PAYSAGES 2015 - La revue annuelle de l'AAPQ

ENJEUX ACTUELS DU PAYSAGE : NOUVEAUX CADRES
POUR LA FORMATION EN ARCHITECTURE DE PAYSAGE
par Nicole Valois et Sylvain Paquette
E
n ce début de 21 e siècle, la question du
paysage constitue un enjeu déclaré.
Son inscription récente au sein de
certains outils législatifs québécois (ex. : Loi
sur le patrimoine culturel, 2011), comme sa
reconnaissance à l’agenda des organismes internationaux
(ex. : Convention européenne du
paysage, 2000) pose cette préoccupation au
cœur des nouveaux enjeux d’aménagement
et de développement de l’ensemble des milieux
(urbain, périurbain, rural, naturel). À
l’échelle de la métropole montréalaise, par
exemple, des orientations particulières concernant
la protection, la mise en valeur et le
développement des paysages ont été adoptés
récemment à l’intérieur du Plan métropolitain
d’aménagement et de développement
(PMAD, 2011) de la Communauté métropolitaine
de Montréal comme à l’intérieur du Plan
d’urbanisme de la Ville de Montréal (2004).
Ces préoccupations s'appliquent à toutes les
échelles d’aménagement, de la transformation
de l'espace de proximité (ex. : jardin, rue,
placette publique), à l’évolution d’un quartier
ou d’une municipalité, voire au développement
d’une région entière (ex. : Plan Nord).
Au moment où les intervenants publics et
parapublics sont pressés de répondre aux
exigences d’une population de plus en plus
sensible à la qualité des paysages et des
cadres de vie, les besoins de ces acteurs sont
croissants en matière de savoirs et de savoirfaire
porteurs d’actions paysagères. Ainsi et
à titre d’exemple, ils concernent tout autant
la préservation de la biodiversité urbaine,
la mise en valeur des paysages d’intérêt
patrimonial, l’implantation d’infrastructures
vertes, le devenir des territoires ressources
(au sud comme au nord) et des régions rurales,
l’intégration de nouvelles formes de
concertation et de participation publiques
que l’élaboration de nouvelles approches de
conception des espaces publics.
La diversité de ces enjeux offre des occasions
de formation et d’expérimentation sans cesse
renouvelées. Directement intégrés à la formation,
ceux-ci sont particulièrement transposés
dans l'enseignement du projet en atelier à
l'École d'architecture de paysage. En ancrant
le projet en phase directe avec ces préoccupations
contemporaines, soit des situations
concrètes que pourraient rencontrer les futurs
professionnels, les ateliers des nouveaux
programmes de baccalauréat et de maîtrise
amènent les étudiants à saisir la complexité
des contextes physicospatiaux, urbains, patrimoniaux,
écologiques ainsi que sociaux.
La reconnaissance de ces enjeux et des dimensions
paysagères qui les traversent participe
à la formulation par les étudiants de solutions
de planification et de design innovantes,
propres à enrichir l'expérience des espaces
projetés. Cette approche met l'architecture
de paysage au cœur du développement et de
la requalification des milieux visés.
La formation offre un cadre propice à une
réflexion transversale sur les enjeux de la
discipline grâce à l'intégration, au sein des
ateliers, des connaissances acquises dans
les cours de nature théorique, technique ou
procédurale. Cela favorise l'assimilation des
approches, courants de pensées, méthodes
et moyens techniques toujours renouvelés
tant en matière de design que de planification.
C’est ainsi que les concepts liés à l'écologie
du paysage, à la conservation du patrimoine
paysager, à la lecture des représentations
et des aspirations sociales, à l'urbanisme
paysager ou aux phytotechnologies, pour ne
nommer que ceux-là, sont interpellés dans
les partis pris d'aménagement des projets
d'atelier. La formation bénéficie également du
transfert des connaissances acquises dans le
cadre des travaux de recherche menés par les
professeurs à l'échelle du Québec comme à
l’échelle internationale. Tout en contribuant
par leur diffusion à l'enrichissement des connaissances
dans le domaine du paysage, les
recherches, transposées dans la formation,
suscitent l'échange, le développement de
l'esprit critique des étudiants et stimulent
le questionnement sur la pratique. Par la
diversité des échelles abordées et l'intégration
des connaissances de pointe issues de
l’architecture de paysage et des disciplines
connexes (ex. : environnement, design urbain)
dans les cours et les ateliers, la formation ouvre
de nouvelles perspectives d'intervention.
Ces programmes permettent de consolider et
d’actualiser les connaissances et les capacités
d’intervention en faveur d’une relève professionnelle
qui sera susceptible d’intervenir
à toutes les étapes du projet d’aménagement,
des premières phases de planification aux
phases de mise en œuvre. Ainsi, les architectes
paysagistes sont appelés à adopter
une pratique réflexive capable d’évoluer de
manière critique par rapport à un projet et
d'influencer son cours, à tous les niveaux de
la commande (ou étapes de projet) en tant
que conseiller, gestionnaire, planificateur ou
concepteur. Plus encore, cette formation permet
de confronter les futurs professionnels au
dialogue interdisciplinaire.
De fait, en plus de rassembler des personnes
issues des disciplines de l’aménagement
(ex. : architecture de paysage, architecture,
urbanisme, design urbain, design de
l’environnement), le programme de maîtrise
accueille par exemple des individus d’horizons
disciplinaires variés en provenance tant des
sciences naturelles (ex. : écologie, agronomie,
génie) que des sciences humaines (ex. :
géographie, anthropologie), offrant ainsi un
milieu de formation stimulant porteur de
nouvelles expertises situées à l’interface de
nombreux domaines de connaissances.
Nicole Valois est professeure agrégée à
l'École d'architecture de paysage de
l'Université de Montréal où elle enseigne
l'atelier urbain et donne un cours sur le
patrimoine et le paysage. Les recherches
qu'elle mène en tant que chercheuse
associée à la Chaire de recherche du Canada
en patrimoine bâti portent sur le patrimoine
moderne en architecture de paysage. Elle a
publié à ce sujet « L'architecture de paysage
moderne du campus de l'Université de
Montréal » dans les Cahiers de géographie
du Québec (2012) et « A capital Treasure :
Garden of the Provinces and Territories »
dans Ground.
Sylvain Paquette est professeur agrégé à
l’École d’architecture de paysage de l’Université
de Montréal. Ses travaux abordent la question
du paysage comme un phénomène de
valorisation sociale et culturelle des
territoires habités ainsi que l'élaboration
d'outils de caractérisation et de gestion des
paysages. Chercheur associé à la Chaire en
paysage et environnement de l’Université de
Montréal, son expertise est mise à profit dans
plusieurs recherches touchant les principaux
enjeux de paysage et d’aménagement des
milieux urbains, périurbains et ruraux,
recherches menées en collaboration avec
différents partenaires publics et parapublics.
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