03.06.2015 Views

Paysage et aménagement urbain. 2001 - Centre de documentation ...

Paysage et aménagement urbain. 2001 - Centre de documentation ...

Paysage et aménagement urbain. 2001 - Centre de documentation ...

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

c'est le plus pur <strong>de</strong>s plaisirs humains. C'est le plus grand délassement pour la pensée <strong>de</strong> l'homme<br />

(…); <strong>et</strong> l'on s'apercevra toujours que les hommes, (…), atteignent d'abord à l'architecture<br />

monumentale avant d'arriver à la beauté du jardin : comme si l'art <strong>de</strong>s jardins était une perfection plus<br />

gran<strong>de</strong> 40 .”<br />

Tout le mon<strong>de</strong> s'accor<strong>de</strong> à dire, avec Michel Conan, que les peintres, comme Patinir, Dürer <strong>et</strong> l'école<br />

flaman<strong>de</strong>, seront les premiers à développer leur art autour d'une réflexion paysagère. Pourtant selon<br />

Vitruve, note Michel Baridon, la peinture murale évoquait déjà <strong>de</strong>s paysages. De même Ptolémée,<br />

redécouvert au Moyen Age, écrivait, dès le IIe siècle après Jésus-Christ : "la distance peut être mal<br />

appréciée quand une couleur claire se pousse en avant par rapport à une foncée. Les peintres<br />

utilisent ces eff<strong>et</strong>s pour leurs perspectives 41 ". Mais ces artistes ne constituaient pas <strong>de</strong>s mouvements<br />

à part entière. "Le paysage surgit au début du XVe siècle, dans la peinture flaman<strong>de</strong>, il surgit d'abord<br />

<strong>de</strong> façon timi<strong>de</strong>, littéralement par la fenêtre, puis colonise l'espace <strong>et</strong> s'installe peu à peu, dans le<br />

cours du XVIe siècle, pour prendre le rang <strong>de</strong> genre à part entière 42 ."<br />

Le traitement du cadre paysager y est au moins aussi important que le suj<strong>et</strong> lui-même. Le suj<strong>et</strong><br />

apparaît double pour ces artistes : d'une part, la vie, les hommes, les personnages, d'autre part, le<br />

cadre, la beauté, le paysage.<br />

À mesure que se transforme notre rapport au paysage, notre approche <strong>de</strong> la notion se modifie. Mais<br />

la pratique paysagère se distingue <strong>de</strong> la théorie sur le paysage autant que le peintre se distingue du<br />

poète. Elle est fille <strong>de</strong> l'art <strong>de</strong>s jardins <strong>et</strong> <strong>de</strong> celui du bâtisseur. Au cours <strong>de</strong> l'histoire, c<strong>et</strong>te pratique a<br />

lentement émergé à travers les actions successives <strong>de</strong> jardiniers, d’artistes, d’ingénieurs, d’architectes<br />

<strong>et</strong> <strong>de</strong> paysagistes.<br />

Le jardin classique constitue <strong>de</strong> fait son propre territoire. C'est un espace clos <strong>et</strong> indépendant,<br />

délimité fortement par <strong>de</strong>s murs, <strong>de</strong>s barrières, <strong>de</strong>s haies ou <strong>de</strong>s massifs forestiers. Ses espèces <strong>de</strong><br />

prédilection sont les buis <strong>et</strong> les fleurs. C'est le royaume <strong>de</strong> l'horticulteur <strong>et</strong> <strong>de</strong> son sécateur. Attribut<br />

d'une propriété seigneuriale, il faisait état d'une puissance. Son esthétique géométrique était<br />

inaccessible aux habitants <strong>de</strong> la ville.<br />

Aujourd'hui, selon Pierre Donadieu, "le paysagiste s'inspire <strong>de</strong>s valeurs esthétiques <strong>et</strong> symboliques du<br />

jardin qui fon<strong>de</strong> sa culture d'aménageur 43 ".<br />

Pour reprendre les propres termes <strong>de</strong> Dezallier d'Argenville dans son traité, Théorie <strong>et</strong> pratique du<br />

jardinage (1709) : "un jardin est toujours mieux quand il a l'œil d'un maître un peu connaisseur (...). La<br />

première chose <strong>et</strong> la plus essentielle qu'on doive observer, en choisissant un endroit pour planter un<br />

jardin, est la situation du terrain. C'est <strong>de</strong> là que dépend la réussite : en eff<strong>et</strong> si l'on sait faire un bon<br />

choix, les arbres <strong>de</strong>viendront beaux <strong>et</strong> grands en peu <strong>de</strong> temps, au lieu que si l'on s'y trompe, tous les<br />

soins <strong>et</strong> toutes les dépenses qu'on pourra faire <strong>de</strong>viendront inutiles 44 ".<br />

Parallèlement les villages <strong>de</strong>venaient <strong>de</strong>s bourga<strong>de</strong>s, puis <strong>de</strong>s bourgs <strong>et</strong> enfin <strong>de</strong>s villes. Le minéral<br />

agrandissait progressivement, <strong>et</strong> sans partage, son royaume, conquérant, jusqu'aux limites franches<br />

d'un rempart, sur une nature hostile. Pour que c<strong>et</strong>te ville en croissance puisse éviter l'asphyxie, il lui<br />

fallut s'inventer <strong>de</strong>s îlots <strong>de</strong> nature. Elle dût accepter quelques morceaux <strong>de</strong> son contraire afin <strong>de</strong><br />

<strong>de</strong>meurer viable pour ses hôtes, au <strong>de</strong>meurant <strong>de</strong> plus en plus nombreux à mesure qu'elle s'étendait<br />

comme une tache d'encre sur un papier buvard.<br />

Au XIXe siècle, la ville commence à débor<strong>de</strong>r <strong>de</strong> ses vieilles frontières. Deux phénomènes se<br />

déroulent alors. D'un côté, les espaces libérés par l'arasement <strong>de</strong>s fortifications constituent les<br />

premiers espaces libres <strong>urbain</strong>s. D'un l'autre côté, la mutation <strong>de</strong>s anciens centres, à l'époque<br />

haussmanienne du second Empire, crée <strong>de</strong> nouveaux rapports entre les pleins <strong>et</strong> les vi<strong>de</strong>s.<br />

Imprégnant <strong>de</strong> plein les vi<strong>de</strong>s restant à l'intérieur <strong>de</strong>s portes <strong>de</strong> la cité, tout en reconfigurant la voirie <strong>et</strong><br />

les réseaux divers alors nouvellement généralisés, progressivement <strong>et</strong> sans dire son nom le paysage<br />

40 Jean Clau<strong>de</strong> Nicolas Forestier, Carn<strong>et</strong> <strong>de</strong> plans <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>de</strong>ssins<br />

41 Michel Baridon, Le paysage, les jardins <strong>et</strong> l'optique : quelques jalons, <strong>Paysage</strong> Territoire d'Intention<br />

42 Gilbert Pons ; Introduction ; Le paysage : sauvegar<strong>de</strong> <strong>et</strong> création<br />

43 Pierre Donadieu, Entre urbanité <strong>et</strong> ruralité, la médiatique paysagère<br />

44 Isabelle Auricoste, Le futur antérieur <strong>de</strong>s jardins, <strong>Paysage</strong> <strong>et</strong> Actualités n°117, page39-41<br />

13

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!