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Les Amis du Sahara. Organe <strong>de</strong> l'Association Les Amis du Sahara. 1933/07.1/ Les contenus accessibles sur le site Gallica sont pour la plupart <strong>de</strong>s reproductions numériques d'oeuvres tombées dans le domaine public provenant <strong>de</strong>s collections <strong>de</strong> la BnF.Leur réutilisation s'inscrit dans le cadre <strong>de</strong> la loi n°78-753 du 17 juillet 1978 :*La réutilisation non commerciale <strong>de</strong> ces contenus est libre et gratuite dans le respect <strong>de</strong> la législation en vigueur et notamment du maintien <strong>de</strong> la mention <strong>de</strong> source.*La réutilisation commerciale <strong>de</strong> ces contenus est payante et fait l'objet d'une licence. Est entendue par réutilisation commerciale la revente <strong>de</strong> contenus sous forme <strong>de</strong> produits élaborés ou <strong>de</strong> fourniture <strong>de</strong> service.Cliquer ici pour accé<strong>de</strong>r <strong>au</strong>x tarifs et à la licence2/ Les contenus <strong>de</strong> Gallica sont la propriété <strong>de</strong> la BnF <strong>au</strong> sens <strong>de</strong> l'article L.2112-1 du co<strong>de</strong> général <strong>de</strong> la propriété <strong>de</strong>s personnes publiques.3/ Quelques contenus sont soumis à un régime <strong>de</strong> réutilisation particulier. Il s'agit :*<strong>de</strong>s reproductions <strong>de</strong> documents protégés par un droit d'<strong>au</strong>teur appartenant à un tiers. Ces documents ne peuvent être réutilisés, s<strong>au</strong>f dans le cadre <strong>de</strong> la copie privée, sans l'<strong>au</strong>torisation préalable du titulaire <strong>de</strong>s droits.*<strong>de</strong>s reproductions <strong>de</strong> documents conservés dans les bibliothèques ou <strong>au</strong>tres institutions partenaires. Ceux-ci sont signalés par la mention Source gallica.BnF.fr / Bibliothèque municipale <strong>de</strong> ... (ou <strong>au</strong>tre partenaire). L'utilisateur est invité à s'informer <strong>au</strong>près <strong>de</strong> ces bibliothèques <strong>de</strong> leurs conditions <strong>de</strong> réutilisation.4/ Gallica constitue une base <strong>de</strong> données, dont la BnF est le producteur, protégée <strong>au</strong> sens <strong>de</strong>s articles L341-1 et suivants du co<strong>de</strong> <strong>de</strong> la propriété intellectuelle.5/ Les présentes conditions d'utilisation <strong>de</strong>s contenus <strong>de</strong> Gallica sont régies par la loi française. En cas <strong>de</strong> réutilisation prévue dans un <strong>au</strong>tre pays, il appartient à chaque utilisateur <strong>de</strong> vérifier la conformité <strong>de</strong> son projet avec le droit <strong>de</strong> ce pays.6/ L'utilisateur s'engage à respecter les présentes conditions d'utilisation ainsi que la législation en vigueur, notamment en matière <strong>de</strong> propriété intellectuelle. En cas <strong>de</strong> non respect <strong>de</strong> ces dispositions, il est notamment passible d'une amen<strong>de</strong> prévue par la loi du 17 juillet 1978.7/ Pour obtenir un document <strong>de</strong> Gallica en h<strong>au</strong>te définition, contacter reutilisation@bnf.fr.


LES AMIS DU SAHARAOrgane <strong>de</strong> l'AssociationLes Amis du Sahara. Ç0tOMB-BÈGH/tRJuillet 1933Pour tous Renseignements, s'adresser<strong>au</strong> SECRÉTARIAT GÉNÉRAL DE L'ASSOCIATION14, Rue <strong>de</strong> la Liberté, Alger


LES AMIS DU SAHARAOrgane <strong>de</strong> l-AsaociationCOLOMB-BÉCHARBulletinTrimestrielJuillet 1933Pour tous Renseignements, s'adresser<strong>au</strong> SECRÉTARIAT GÉNÉRAL DE L'ASSOCIATION14, Rue <strong>de</strong> la Liberté, Alger


SOMMAIREI. — LES FRANÇAIS AU SAHARA (suite) par M capitaineLEHURAUX, 2° partie.-^- VII La Jonction avecle Soudan.IL — CONFÉRENCES FAITES A RADIO-ALGER, par M. Rozis,Sons-Directeur <strong>de</strong>s Territoires du Sud; :1° Sur'les Confins du Sahara, le. pays <strong>de</strong> faifa;2° Les Oasis Sahariennes.III. — CONFÉRENCE FAITE À RADIO-ALGER, par M. le Mé<strong>de</strong>cin-ColonelCOSTES, Chef du Service <strong>de</strong> Santé<strong>de</strong>s Territoires du Sud, sur L'Organisationmédicale du Sahara.IV. — LA LIAISON POSTALE MILITAIRE A TRAVERS LE SAHARA,par M. le Colonel WEISS, commandant le 1ergroupe d'aviation d'Afrique.V. — RALLYE AÉRIEN SAHARIEN. — Résultats techniques.


LesFrançais<strong>au</strong>Sahara(1)2ePARTIEVII. — LA JONCTION AVEC LE SOUDANLe rôle <strong>de</strong>s compagnies sahariennes, précisé parle décret du lor août 1902, consistait essentiellementà faire observer l'ordre dans les oasis, besognefacile après les quelques éch<strong>au</strong>ffourées dudébut <strong>de</strong> l'occupation.Les ksouriens du Touat et du Tidikelt s'accommodaientfort bien <strong>de</strong> notre présence dans leurpays et ne songaient nullement à secouer un jougqui ne leur pesait point. Au contraire, ils se réjouissaient<strong>de</strong> ne plus être les victimes <strong>de</strong>s noma<strong>de</strong>set <strong>de</strong> pouvoir, désormais, recueillir intégralementles produits <strong>de</strong> leurs jardins sans être astreints<strong>au</strong> lourd prélèvement opéré naguère parles Beraber o?u les Touareg.La population sé<strong>de</strong>ntaire <strong>de</strong>s oasis m'était doncpas à craindre et unie force <strong>de</strong> police réduite eutété suffisante pour la niaintenir dans l'obéissance.Mais les pillards du désert <strong>de</strong>meuraient <strong>de</strong>s adversairesredoutables pour les caravaniers et constituaientune menace constante pour nos petitsdétachements et les isolés. C'est contre ces pillardsque les mébaristes allaient entrer en actionet donner ainsi à la police saharienne une exten-(i) Voir précé<strong>de</strong>nts bulletins <strong>de</strong>puis Janvier 1982.


— 6 -sion insoupçonnée. La chasse <strong>au</strong>x écumeurs <strong>de</strong>caravanes <strong>de</strong>vait en effet conduire nos Châambajusque dans les parties les plus éloignées duSahara, et permettre <strong>au</strong> commandant LAPERRINE<strong>de</strong> réaliser son rêve, qui visait à la disparition <strong>de</strong>l'obstacle saharien par la liaison définitive entrel'Algérie et l'Afrique occi<strong>de</strong>ntale française.L'ancien officier soudanais, <strong>de</strong>venu chef <strong>de</strong>scompagnies sahariennes d'Algérie, avait jadisguerroyé contre les Touareg <strong>de</strong> la boucle duNiger; il connaissait les « <strong>de</strong>ux rives du Sahara »et il savait qu'<strong>au</strong>cune difficulté vraiment sérieusene s'opposerait <strong>au</strong> franchissement <strong>de</strong>s larges espacesqui séparaient ces rives. Le commandantLAPERRINE avait à sa disposition la troupe idéalepour-l'exécution" <strong>de</strong> ce projet; la reconnaissancedu lieutenant GUILLG-LOHAN en 1902, celle accompliepar lui-même dans TAhnet l'année suivantelui avaient confirmé les qualités sahariennes ainsique le loyalisme <strong>de</strong> ses méharistes ; il savaitqu'avec eux il pouvait risquer toutes les aventures,sinon sans danger du moins en toute connaissance<strong>de</strong> c<strong>au</strong>se et avec le maximum <strong>de</strong> chance <strong>de</strong> succès.*Des projets <strong>au</strong>ssi hardis effrayèrent tout d'abordles esprits timorés. A vrai dire <strong>de</strong>puis la missionFOUREAU-LAMY et le combat <strong>de</strong> Tit l'on se rendaitun compte plus exact <strong>de</strong>s réalités sahariennes. LesTouareg avaient be<strong>au</strong>coup perdu <strong>de</strong> leur prestigeet, d'ailleurs, la soumission <strong>de</strong> Faménoukal MOUSSAAG ÀMASTAN nous assurait leur neutralité et peutêtremême leur collaboration. Mais la crainteirraisonnée qu'inspirait encore le désert proprementdit <strong>de</strong>meurait toujours fortement enracinée,à telle enseigne que l'on ne pouvait se résoudre àl'attaquer délibérément en lançant <strong>de</strong> faibles ef-


— •7 —feetifs dans son immensité. II fallut que LAPERRINEavec l'<strong>au</strong>torité qui s'attachait déjà à son oeuvre,déploya toute son éloquence persuasive pour avoirraison <strong>de</strong> cette excessive timidité, faire admettreenfin ses idées, et obtenir l'<strong>au</strong>torisation d^eûtréprendreleur pru<strong>de</strong>nte exécution.Dès le mois <strong>de</strong> mars 1904, peu après la soumission<strong>de</strong>s Touareg Hoggar le commandant LAPER-RINE:' décidait <strong>de</strong> se rendre personnellement dansla vieille capitale du Soudan, à TombiDUctou, qui,a cette époque, n'était déjà plus« la mystérieuse»puisque les troupes françaises l'occupaient dëptiisle mois <strong>de</strong> décembre 1893.Ce projet pouvait paraître <strong>au</strong>dacieux, témérairemême. Il était cependant assez facilement réalisableet le commandant militaire <strong>de</strong>s Oasis n'eûtpas trop <strong>de</strong> peine à le démontrer à ses chefs. Certesil y avait quelques risques à braver. Il allaitfalloir passer dans <strong>de</strong>s contrées inconnues, sousla conduite <strong>de</strong> gui<strong>de</strong>s indigènes dont l'on n?étaitpas tout à fait sûr; peut-être rencontrerait-oh<strong>au</strong>ssi <strong>de</strong>s populations hostiles, notamment <strong>de</strong>s rezzouBeraber dont le théâtre d'opérations était précisément<strong>l'Adrar</strong> et le Timetrin que les méharistesalgériens <strong>au</strong>raient à traverser. Ces dangers, etd'<strong>au</strong>tres encore, le commandant LAPERRINE enavait supputé la véritable portée; il était sûr dépouvoir les vaincre avec sa petite troupe et il estimait,en outre, que les résultats à espérer dé cetterandonnée valaient que l'on courût quelques risques.LAPERRINE désirait affermir le prestige dont laFrance jouissait déjà <strong>au</strong> Sahara en exécutant unemanifestation <strong>de</strong> notre force qui frappât l'imagination<strong>de</strong> tous les habitants du désert. Sans doute


- 8 —nos précé<strong>de</strong>ntes reconnaissances dans le Htoggaravaient été, pour ceux-ci, motifs à méditation;ils ne pouvaient concevoir, toutefois, que nonsoserions les rejoindre jnsqn'en bordure du fleuve,du Niger lointain, à travers; les Tanezroufts ari<strong>de</strong>set sans e<strong>au</strong>, « le pays <strong>de</strong> la soif » ;. là ils étaientbien chez eux et ce n'est pas avec les Châamba,croyaient-ils, que l'on pourrait y venir troublerleur quiétu<strong>de</strong>. Le commandant LAPERRINE ne voulaitpas que cette conviction restât gravée pluslongtemps dans ces cervelles simplistes; il jugeaitavec raison que la pacification totale et durabledu Sahara serait plus vite obtenue s'il parvenaità prouver <strong>au</strong>x Touareg que les Châamba pouvaient,par leurs seuls moyens, les atteindre rapi<strong>de</strong>mentet sûrement en quelque partie que ce futdu.désert.Le commandant <strong>de</strong>s Oasis poursuivait encoreun <strong>au</strong>tre objectif. S'étant rendu compte qu'unecollaboration étroite et amicale entre les <strong>au</strong>toritésfrançaises du Soudan et <strong>de</strong> l'Algérie <strong>de</strong>viendrait*bientôt nécessaire, il souhaitait que cette collaborationse réalisât le plus tôt possible. De nombreuxpoints litigieux s'étaient, en effet, révélés, qu'ilconvenait <strong>de</strong> résoudre à l'amiable sans trop tar<strong>de</strong>rafin d'éviter les malentendus possibles. Il étaitnotamment désirable <strong>de</strong> régler <strong>au</strong> plus tôt lasituation <strong>de</strong>s Touareg <strong>de</strong> <strong>l'Adrar</strong> <strong>de</strong>s If or as donton ne savait s'ils appartenaient àl'Algérie ou <strong>au</strong>Soudan. Une entrevue avec l'officiersupérieurcommandant le territoire militaire <strong>de</strong> Tombouctoune pourrait être que profitable <strong>au</strong>x intérêts <strong>de</strong>s<strong>de</strong>ux possessions et, <strong>de</strong> surcroît, elle affirmeraitavec éclat <strong>au</strong>x yeux <strong>de</strong>s populations sahariennes


le parfait accord qui unissait les Français du Nordà ceux du Sud.Le chef d'escadrons LAPERRINE avait pu déci<strong>de</strong>rson camara<strong>de</strong> <strong>de</strong> promotion <strong>de</strong> l'Ecole spécialemilitaire <strong>de</strong> Saint-Cyr, le R. P. Charles DE FOU-CAULD, à faire partie <strong>de</strong> cette reconnaissance. LePère DE FOUCAULD, offcier <strong>de</strong> cavalerie démissionnaire,explorateur du Maroc, <strong>de</strong>venu prêtre, puismoine <strong>au</strong> Sahara, résidait <strong>de</strong>puis le mois d'octobre1901 à Beni-Abbès où il avait édifié un petitermitage, dont il était d'ailleurs le seul occupant.LAPERRINE, resté en relations suivies avec son anciencondisciple, qui partageait ses idées et encourageaitses ambitions patriotiques, n'eut <strong>au</strong>cunepeine à convaincre le Père que son apostolat <strong>de</strong>vaits'exercer plus loin, <strong>au</strong> coeur du désert, <strong>au</strong> pays<strong>de</strong>s Touareg, où il pourrait concilier son idéal religieux<strong>de</strong> prêtre avec la mission civilisatrice quele commandant militaire supérieur <strong>de</strong>s Oasisdésirait lui confier. C'est pour se préparer à cerôle magnifique,mais difficile, que le Père DEFOUCAULD accepta <strong>de</strong> se joindre à la reconnaissancedirigée par son ami.A cette reconnaissance s'était également jointM. ViLLATTE, <strong>de</strong> l'Observatoire d'Alger, l'anciencompagnon <strong>de</strong> FOUREAU.Le détachement d'escorte commandé par le lieutenantBES'SET, <strong>de</strong> la compagnie saharienne duTidlkelt, suivit l'itinéraire Akabli-In-Zizé-Timissao-In-Ouzel et parvint en région soudanaise sans lemoindre inci<strong>de</strong>nt. Les TouaregIforas et Taîtoqrencontrés s'étaient montrés déférents, bien disposésà rendre les services qui pourraient leurêtre <strong>de</strong>mandés et paraissaientheureux <strong>de</strong> se placersous la protection<strong>de</strong>s Français. C'est le 16


—16 -avril, à Timiaouin, que <strong>de</strong> sérieuses difficultés<strong>de</strong>vaient surgir sous une forme regrettable et bienimprévue puisqu'elles allaient être suscitées pard'<strong>au</strong>tres Français venus du Soudan.A Timiaouin, en effet, le commandant LAPER-RINE eut la surprise, tout d'abord agréable, <strong>de</strong> setrouver en présence d'un détachemant <strong>de</strong> Finfântêriecoloniale dirigé par le capitaine THÉVENIAUT.Cette rencontre à laquelle ne s'attendaient pas lesalgériens, n'était cependant par fortuite. Informé<strong>de</strong>s projets du chef <strong>de</strong> la reconnaissance, le commandantdu territoire du Niger avait <strong>au</strong>ssitôt dépêchéson collaborateur pour signifier <strong>au</strong> chefd'escadrons LAPERRINE l'interdiction formelle <strong>de</strong>pénétrer dans la région <strong>de</strong> TAdrar <strong>de</strong>s Iforas et<strong>de</strong> poursuivre sa route vers le Niger.L'ancien officier soudanais crut d'abord à uneinterprétation inexacte <strong>de</strong>s ordres reçus ou à unexcès <strong>de</strong> zèle d'un subordonné. Il dut pourtant serendre à l'évi<strong>de</strong>nce. Au désir qu'il exprima <strong>de</strong>continuer jusqu'à Tombouctou pour ravitailler sondétachement, ou tout <strong>au</strong> moins jusqu'à Tessalit oùil avait donné ren<strong>de</strong>z-vous <strong>au</strong>x chefs Iforas, le capitaineTHÉVENIAUT apposa un refus catégorique enarguant les instructions impéfatives reçues <strong>de</strong> seschefs.Que l'aire <strong>de</strong>vant l'intransigeance d'une telle attitu<strong>de</strong>? Passer outre et risquer un conflit renouvelé<strong>de</strong> l'affaire VOULET-CHANOINE, oubien accepterl'affront et abandonner le rêve caressé ? Crueldilemme pour un officier qui, ayant une missionprécise à accomplir, se voit empêché <strong>de</strong> la réaliserpar ceux-là même qui eussent dû l'ai<strong>de</strong>r dans sonentreprise. Il fallait à tout prix éviter un inci<strong>de</strong>ntdont eut souffert leprestige <strong>de</strong> la France, et qui


— 11 -<strong>au</strong>rait eu? un. retentissement fâcheux pour notrepays dans le mon<strong>de</strong> entier. LAPERRINE le comprit etil n'hésita; pas à prendre la sage décision gui s'imposait.,Renonçant à la gloire presque acquised'avoir traverse pacifiquenient le désert avec unepoignée d'hommes, il se dirigea vers Tin Zaouaten,laissant le détachement soudanais regagner seul sa.garnison <strong>de</strong> Tombouetôu:.Le 3 juillet 1904, le conmiandant LAPERRINE rentraità ïn-Salah sans nouvel inci<strong>de</strong>nt, aprfes avoirparcouru une partie <strong>de</strong> la région dn Hqggar et visiteles centrés <strong>de</strong> cultures d'Abalessa^ <strong>de</strong> Tit et d'In-Amdjel,.'.-—-':;:-•L'affaire <strong>de</strong> Timiaouin fit grand bruit dans lesmilieux coloni<strong>au</strong>x, Certains reprochaient, non sansvéhémence, <strong>au</strong> chef. <strong>de</strong>s méharistesalgérien^d'avoiroutrepassé ses pouvoirs en pénétrant dans unerégion qui ne relevait pas <strong>de</strong> son commani<strong>de</strong>mént.D'<strong>au</strong>tres, cependant, reconnaissaient sa bonne foiet exprimaientle regret qu'il eût été mis si peucourtoisement en <strong>de</strong>meure d'interrompre une reconnaissancedans <strong>de</strong>s territoires désertiqqes dontla répartition entre l'Algérie et l'Afrique occi<strong>de</strong>ntalefrançaise n'avait pas encore été déterminée.Quoiqu'il en fut, et <strong>de</strong> quelque côté que fussentles forts, cet inci<strong>de</strong>nt, survenu peu d'années aprèsle drame <strong>de</strong> Sankoré, ne pouvait laisser


— 12 —mettre en commun toutes les énergies <strong>au</strong> service<strong>de</strong> la Patrie.Cette première rencontre <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux détachementsfrançais <strong>au</strong> coeur du désert revêtait néanmoins uneimportance considérable, car elle apportait lapreuve que le Sahara pouvait être franchi sansdifficulté sérieuse par une troupe spécialisée, d'uneffectif réduit, et elle établissait la première jonction<strong>de</strong> l'Algérie et du Soudan.L'inci<strong>de</strong>nt lui-même, qui faillit mettre <strong>au</strong>x prisesles <strong>de</strong>ux troupes, servit à mettre en lumièrel'imprécision, qui le provoqua, <strong>de</strong>s droits territori<strong>au</strong>x<strong>de</strong> l'Algérie et du Soudan sur les régionssahariennes. Le premier résultat <strong>de</strong> cette jonctionfut donc <strong>de</strong> déterminer les zones d'action respectives<strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux colonies, <strong>de</strong> répartir les tribus duSahara central et <strong>de</strong> fixer nettement les attributionsainsi que les responsabilités <strong>de</strong>s <strong>au</strong>toritésfrançaises chargées <strong>de</strong> la police du désert.Tout d'abord on envisagea la constitution d'unvaste comman<strong>de</strong>ment unique, une sorte <strong>de</strong> gouvernementdu Sahara qui <strong>au</strong>rait eu pour" avantage <strong>de</strong>placer sous la même direction toute la politiquesaharienne ainsi que la protection militaire <strong>de</strong> cepays. Ce projet rencontrait <strong>de</strong> nombreux partisans,principalement parmi les préconisateurs,déjà nombreux, du chemin <strong>de</strong> fer transsaharien.On y renonça cependant et sans doute f<strong>au</strong>t-il leregretter <strong>au</strong>jourd'hui, car il est certain que la pacificationdu Sahara eût été réalisée plus rapi<strong>de</strong>mentet plus économiquement encore et que, parailleurs, les problèmes qui se posent à l'heure actuelle,se trouveraient singulièrement simplifiés.Mais à cette époque on ne prévoyait pas que leSahara pourrait <strong>de</strong>venir un jour un carrefour <strong>de</strong>s


Collection duGénéral DINAUX.Cliché Arn<strong>au</strong>d1907. - LeColonel LAPERRINE etleCapitaine DINAUX.


— 13 —voies transcontinentales. Il n'y existait <strong>au</strong>cune<strong>au</strong>tre voie <strong>de</strong> communication que les pistes chamelièressouvent précaires et dangereuses. On donnaalors la préférence à un partage <strong>de</strong> territoires enlaissant à l'Algérie tout le pays Hoggar tandis quel'Afrique occi<strong>de</strong>ntale française recevait <strong>l'Adrar</strong> <strong>de</strong>sIforas <strong>au</strong> Sud <strong>de</strong> Tin Zaouaten, ainsi que l'Aïr àpartir d'In-Azaoua. Cette délimitation, admise dès1904, fut sanctionnée en juin 1905 par le Gouvernement<strong>de</strong> la Métropole.Au printemps <strong>de</strong> l'année 1905 le capitaineDINAUX, successeur du capitaine MÉTOIS <strong>de</strong>puis le29 décembre 1904 <strong>au</strong> comman<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> la compagniesaharienne du Tidikelt et <strong>de</strong> l'annexe d'In-Salah, résolut d'entreprendre une gran<strong>de</strong> reconnaissancevers <strong>l'Adrar</strong> et le Hoggar.Cette tournée s'avérait nécessaire. Les Touareg,les Iforas notamment, se souciaient fort peu <strong>de</strong>ssubtilités administratives qui venaient <strong>de</strong> scin<strong>de</strong>rleur pays; ils entendaient bien continuer à vivrecomme par le passé, à utiliser les zones <strong>de</strong> pâturagesqu'ils avaient accoutumé <strong>de</strong> fréquenter. LesIforas ne comprenaient pas pourquoion voulaitles rattacher <strong>au</strong> Soudan, alors qu'ils étaient plutôten relations constantes avec les Touareg du Hoggarqui, eux; relevaient <strong>de</strong> l'Algérie. Les dispositionsnouvelles avaient créé un certain malaisequ'il convenait <strong>de</strong> dissiper <strong>au</strong> plus tôt. II fallaitfaire comprendre à ces populations les raisonsd'ordre et <strong>de</strong> métho<strong>de</strong> qui avaient motivé Tannexion<strong>de</strong> leurs terrains <strong>de</strong> parcours à l'Algéried'une part, <strong>au</strong> Soudan <strong>de</strong> l'<strong>au</strong>tre.Le capitaine DINAUX se proposait également<strong>de</strong>contraindre les fractions <strong>de</strong>meurées sour<strong>de</strong>menthostiles à préciser leur attitu<strong>de</strong> à notre égard


~ u—et, le cas échéant, <strong>de</strong> soustraire à leur influencenocive les tribus soumises. Il voulait enfin étudierle principe du paiement <strong>de</strong> l'impôt par les Touaregralliés et amener ceux qui se considéraient biencomme <strong>de</strong>s alliés mais non comme <strong>de</strong>s sujets, àprésenter une soumission sincère et sans arrièrepensée.Le détachement servait en même temps d'escorteà MM. les professeurs GAUTIER et CHUDEAU,<strong>de</strong> l'Université d'Alger, à M. ETIÈNNOT, directeur<strong>de</strong>s postes du département d'Oran et <strong>au</strong> R.P. DEFOUCAULD.Partie d'In-Salah le 3 mai 1905, la reconnaissanceatteignait le 23 juin le puits d'In-Ouzel, puse trouvait l'aménoukal MOUSSA AG AMASTAN accompagné<strong>de</strong> nombreux Touareg <strong>de</strong> sa tribu. L'attitu<strong>de</strong>du chef targui fut extrêmement correcte.MOUSSA renouvela solennellement son serment <strong>de</strong>fidélité à la France et il reçut, en présence <strong>de</strong> sesgens, un burnous <strong>de</strong> comman<strong>de</strong>ment, investitureofficielle <strong>de</strong> la dignité d'aménoukal <strong>de</strong> la confédérationdu Hoggar.Durant un mois le détachement séjourna dansTAdrar,aIlant <strong>de</strong> campement en campement afin<strong>de</strong> permettre à son éhef <strong>de</strong> faire connaître à tonslesintentionspacifiques <strong>de</strong> la France et <strong>de</strong> préciserles droits comme les <strong>de</strong>voirs <strong>de</strong> chacun. Lesrésultats politiques ne se firent pas attendre. TouslesTouareg en nomadisation dans la-région vinrentsaluer l'officier français et lui apporter l'assurance<strong>de</strong> leurs bons sentiments ; parmi eiix setrouvaient <strong>de</strong>s nobles jusqu'alors Indécis et en particuliernotre vieil adversaire ANABA, frère <strong>de</strong> l'ancienaménoukal ATTICI, que nous avions <strong>de</strong>stitué<strong>de</strong> ses fonctions.


--;i5'_Le capitaine DINAUX profita également <strong>de</strong> sonséjour en Adrar pour convoquer les chefs Iforas.Il les avisa que leur rattachement à l'Afrique occi<strong>de</strong>ntalefrançaise était définitif et que s'ils cherchaientà se dérober <strong>au</strong>x ordres <strong>de</strong>s <strong>au</strong>torités <strong>de</strong>ce pays ils s'exposeraient à <strong>de</strong>s sanctions désagréables.Les Touareg étaient d'ailleurs prévenusque les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> comman<strong>de</strong>ment et d'administrationétaient i<strong>de</strong>ntiques <strong>au</strong> Soudan et en Algérieet qu'ils trouveraient là-bas la même bienveillance,la même équitable justice <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>sreprésentants <strong>de</strong> la France. L'officier engageaalors les Iforas à se rendre à Gao pour faire acte<strong>de</strong> soumission <strong>au</strong>x <strong>au</strong>torités dont ils relevaientdésormais. Ils se montrèrent d'abord peu disposésà suivre ce conseil; ils finirent cependant par s'inclineret envoyèrent <strong>au</strong>ssitôt à Gao une députation<strong>de</strong> notables munie <strong>de</strong> pleins pouvoirs. M. leprofesseur GAUTIER, quidésirait se rendre <strong>au</strong> Soudan,se joignit à cette députation.La reconnaissance DINAUX se dirigea ensuite versle Hoggar et alla s'installer à proximité du petitcentre <strong>de</strong> cultures <strong>de</strong> Tamanrasset, M. ETIENNOT,sa mission terminée, rejoignait alors directementIn-Salah, tandis que le R. P. DE FOUCAULD choisissaitun emplacement <strong>au</strong>x abords du centre pour yfaire procé<strong>de</strong>r à la construction du petit ermitagedans lequel il vécut dix ans.Le 25 août 1905 Tamanrasset fut le théâtre d'unecérémonie grandiose et émouvante. De toutes lesparties du Sahara, <strong>de</strong>s guerriers Touareg étaientaccourus à l'appel <strong>de</strong> leur aménoukal pour se présenterà l'officier Français et assister à la gran<strong>de</strong>réunion à laquelle celui-ci les avait conviés. Lecapitaine DINAUX avait su pénétrer Tâme simple»


- Ï6 —mais encore mystérieuse,<strong>de</strong>s Touareg. Il s'étaitvite aperçu que ceux-ci se montraient sensibles<strong>au</strong>x manifestations extérieures <strong>de</strong> la puissance etque notre prestige grandirait parmi eux en fonction<strong>de</strong> notre générositéet <strong>de</strong> notre force. En finpsychologueil soigna la mise en scène <strong>de</strong> cetteréunion afin <strong>de</strong> frapper l'esprit <strong>de</strong>s guerriersTouareg, grands amateurs <strong>de</strong> faste et d'apparat.Autour <strong>de</strong> sa tente, <strong>au</strong> faîte <strong>de</strong> laquelle flottait ledrape<strong>au</strong> français, les méharistes en armes, revêtus<strong>de</strong> leur gran<strong>de</strong> tenue, gandourah blanche etceinture rouge croisée sur la poitrine, formaientune splendi<strong>de</strong> gar<strong>de</strong> d'honneur à l'officier, et tandisque l'unique clairon du détachement faisaitentendre sa fanfare à tous les échos pour annoncerl'ouverture <strong>de</strong> la séance, les Touareg attendaientà distance respectueuse l'invitation <strong>de</strong> serapprocher <strong>de</strong> celui qui représentait avec be<strong>au</strong>coup<strong>de</strong> distinction et d'<strong>au</strong>torité la lointaineNation qui les avait honorablement vaincus.La réunion fut calme, cérémonieuse. On parla<strong>de</strong> la paix, <strong>de</strong>s bienfaits que la France allait apporter<strong>au</strong>x populations du désert, sous conditionque celles-ci se montreraient dorénavant docileset sincères dans leur loyalisme. Le capitaine DI-NAUX présenta le Père DE FOUCAULD, maraboutvénéré <strong>de</strong>s Français, qui allait rester pour toujoursà Tamanrasset et apporter <strong>au</strong>x Touareg lessoins médic<strong>au</strong>x les plus vigilants. Ces conversationsamicales se prolongèrent plusieurs jours etlaissèrent une impression profon<strong>de</strong> et durable.Pendant le long séjour qu'il fit dans le Hoggar,le capitaine DINAUX se mit en relations avec lecommandant du poste soudanais d'Aga<strong>de</strong>z pour luiannoncer son désir <strong>de</strong> le rencontrer dans le mas-


Lachaîne <strong>de</strong>Timdjé etl'oasis d'Iferouane.Aquarelle duGénéral DINAUX.


— Ï7,-^sif <strong>de</strong> l'Aïr et il prépara minutieusement cettenouvelle reconnaissance vers le Soudan avecl'aménoukal MOUSSA AG AMASTAN.Partie <strong>de</strong> Tamanrasset le 3 septembre 1905 cettereconnaissance, à laquelle s'était joint M. le professeurCHUDEAU, atteignait facilement Iferouanequinze jours plus tard sans inci<strong>de</strong>nt. Quelques années<strong>au</strong>paravant il avait fallu à la mission Fou-REAU-LAMY, pour accomplir le même parcoursvaincre <strong>de</strong>s difficultés très gran<strong>de</strong>s. Malheuresementla jonction projetée avec les troupes soudanaisesne pût avoir lieu car, entre temps, le posted'Aga<strong>de</strong>z avait été évacué; seul, un courrier àméhari se trouvait <strong>au</strong> point convenu pour annoncer,en même temps que cette nouvelle fâcheuse,la venue prochaine à Iferouane du chef <strong>de</strong> bataillond^infanterie coloniale GADEL avec un groupe <strong>de</strong>tirailleurs. La capitaine DINAUX attendit plusieursjours l'arrivée du détachement soudanais, maislimité par le temps ainsi que par ses provisions<strong>de</strong> vivres, il ne pût prolonger son séjour en Aïr etdût rentrer <strong>au</strong> Hoggar avec le regret <strong>de</strong> n'avoirpu réaliser intégralement son programme. M. CHU-DEAU, désireux <strong>de</strong> poursuivre ses étu<strong>de</strong>s dans larégion soudanaise, <strong>de</strong>meura à Iferouane d'où ilgagna par la suite Zin<strong>de</strong>r et le Niger.Cette première gran<strong>de</strong> tournée saharienne, prélu<strong>de</strong><strong>de</strong>s randonnées qui suivirent ensuite presquesans interruption, donna <strong>de</strong>s résultats très intéressants.Grâce à un ensemble <strong>de</strong> circonstances favorables,et à la présence simultanée dans les oasissahariennes <strong>de</strong> savants et d'explorateurs qui s'yétaient rencontrés sans accord préalable et quiparticipèrent à cette reconnaissance pacifique,celle-ci permit <strong>au</strong>x professeurs GAUTIER et CHUDEAU


— 18 -<strong>de</strong> se livrer à <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s scientifiques en vue d'inventorierle Sahara et d'explorer <strong>de</strong>s pays nouve<strong>au</strong>x.A leur retour ces <strong>de</strong>ux éminents savantspublièrent <strong>de</strong>s trav<strong>au</strong>x remarquables, en particulierles importants ouvrages intitulés : « SaharaAlgérien » et « Sahara Soudanais ».De son côté, M. ETÏENNOT avait dirigé une missiond'étu<strong>de</strong>s pratiques ayant pour objet la pose<strong>de</strong> la ligne télégraphiquetranssaharienne. Les conclusionsdu rapport remis par ce h<strong>au</strong>t fonctionnaires'étaient montrées favorables à l'exécution<strong>de</strong> ce projet, lequel ne fut cependant jamais réalisé.La création, intervenue <strong>de</strong>puis, d'un rése<strong>au</strong>radio-télégraphique <strong>au</strong> Sahara <strong>au</strong>torise à ne pasle regretter.Enfin, et ce ne fut pas l'événement le moinssensationnel <strong>de</strong> cette pério<strong>de</strong>, le R. P. Charles DEFOUCAULD s'était définitivement installé <strong>au</strong> Hoggar.Dans le mo<strong>de</strong>ste ermitage qu'il fit constuireà Tamanrasset, il procéda non seulement à l'achèvementd'un lexique tamaheq, mais <strong>au</strong>ssi à la créationd'une infirmerie indigène que <strong>de</strong> nombreuxTouareg ne <strong>de</strong>vaient pas tar<strong>de</strong>r à fréquenter.D'<strong>au</strong>tre part, du point <strong>de</strong> vue politique le principedu paiement d'un impôt avait été posé et accepté;<strong>de</strong>s makhzens avaient été organisés; tousles chefs Touareg influents s'étaient ralliés j3ubliquementen s'engageant à respecter les ordres <strong>de</strong>l'<strong>au</strong>torité française et à rester fidèles à la paroledonnée.Le capitaine DINAUX pouvait être fier <strong>de</strong>s résultatsenregistrés. Dans cette première prise <strong>de</strong> contactavec les adversaires <strong>de</strong> la veille il s'étaitmontré diplomate avisé; il avait su révéler <strong>au</strong>xTouareg le vrai visage <strong>de</strong> la France, bonne, gêné-


- 19 -reuse, prête à toutes les bienveillances, mais <strong>au</strong>ssiferme et intransigeante sur le chapitre dé l'honneur.L'officier saharien avait employé le langagequ'il fallait pour être compris <strong>de</strong> ces hommessimples^ et c'est sans doute <strong>de</strong> cette premièreréunion qu'est née lasympathie réciproque qui,en ce qui concerne les nobles du moins, né s'estjamaisdémentie.Le nom du capitaine DINAUX mérité <strong>de</strong> figurersur la liste <strong>de</strong>s bons artisans <strong>de</strong> l'ouvré française<strong>de</strong> pacification <strong>au</strong> Sahara.Cependant la jonction avec les troupes françaisesdu Soudan n'avait pas encore été réaliséecomplètement. Il y avait bien eu la rencontre LA-PERRINE-THÉVENIAUT, mais elle n'avait démontréque la possibilité matérielle <strong>de</strong> ces rencontres ; ellesavait été sans portée pratique pour l'établissementd'un programme commun d'action et <strong>de</strong> politiquesahariennes.Cette situation ne pouvait se prolonger sans inconvénient.Maintenant que, <strong>de</strong> part et d'<strong>au</strong>tre, laFrance occupait <strong>de</strong>s postes avancés dans le désert,il <strong>de</strong>venait indispensable que les chefs <strong>de</strong> ces postesse connussent et se missent en rapport pouréchanger leurs idées, comme leurs projets.Le poste d'Aga<strong>de</strong>z ayant été réoccupé en 1906une tentative nouvelle eut lieu dans l'Aïr et cettefois elle réussit pleinement. Le lieutenant CLOR,<strong>de</strong> la compagnie saharienne du Tidikélt, se rencontrale 12 octobre à Iferouane avec les soudanaisdu capitaine LAFFORGUE et du lieutenantMASSE venus, le premier, <strong>de</strong> Tahoua, le secondd'Aga<strong>de</strong>z. Durant trois jours Châamba algériens etnoirs soudanais fraternisèrent, tandis que leurschefs s'entretenaient amicalement <strong>de</strong>s questions


— 20 —importantes intéressant leurs territoires respectifs.Cette jonction eut les plus heureuses conséquencespolitiques. Jusqu'alors les Touareg, <strong>au</strong>ssi bienceux <strong>de</strong> l'Algérie que ceux <strong>de</strong> l'Afrique occi<strong>de</strong>ntalefrançaise, s'étaient imaginés qu'il existait entre nos<strong>de</strong>ux colonies une cloison étanche et que les Françaisdu Soudan ne désiraient pas avoir <strong>de</strong> relationsavec leurs frères du Nord. L'inci<strong>de</strong>nt regrettable<strong>de</strong> Timiaouin n'avait pu, il f<strong>au</strong>t le reconnaître, queles confirmer dans cette idée. Désormais, la bonneentente entre les <strong>au</strong>torités françaises <strong>de</strong>s <strong>de</strong>uxpays ne pourrait plus être mise en doute et lesTouareg allaient pouvoir induire <strong>de</strong> cette constatationque leurs infractions seraient à l'avenir toujourschâtiées quel que fût leur lieu <strong>de</strong> nomadisation.L'extrême mobilité <strong>de</strong> nos méharistes apportait,en effet, une garantie essentielle pour latranquillité du pays en même temps qu'un gagepour une police facile.Notre prise <strong>de</strong> possession progressive du Saharacentral troublait <strong>au</strong> plus h<strong>au</strong>t point nos adversaires<strong>de</strong> l'extérieur, tous ceux qui vivaient <strong>de</strong> rapines,dont lepillage était la seule industrie comme<strong>au</strong>ssi la principale ressource. Ceux-là se rendaientcompte que la présence permanente <strong>de</strong> nosméharistes dans toutes les parties habitées <strong>de</strong> l'immensedésert, et la possibilité que possédaient lesFrançais <strong>de</strong> se déplacer <strong>au</strong>ssi rapi<strong>de</strong>ment qu'euxmêmes,allaient modifier profondément leurs conditions<strong>de</strong> vie et compliquer singulièrement leursopérations fructueuses <strong>de</strong> naguère. Aussi ne négligèrent-ilspas <strong>de</strong> mettre en oeuvre tous leurs effortspour tenter.<strong>de</strong> soulever les populations sahariennescontre nous.Le plus acharnéparmi ces adversaires était as-


1926. - LeGénéral DINAUX, Commandant leTerritoire dAïn-SefraCollection duGénéral DINAUX.


- 21 —sûrement le vieil ARIDIN EL KOUNTI, marabout influent<strong>de</strong> la tribu <strong>de</strong>s Eountas, retiré avec ses filset ses partisans dans le Sahara occi<strong>de</strong>ntal, maisqui avait conservé avec les gens du Touat, <strong>de</strong>l'Ahnet et <strong>de</strong> <strong>l'Adrar</strong> <strong>de</strong>s relations très étroites. Installédans l'Ahnet avec ses campements, ARIDIN s'ylivrait à une propagan<strong>de</strong> active <strong>au</strong>près <strong>de</strong>s TouaregTaïtoq et Iforas, prêchant la révolte contre lesFrançaisv Son <strong>au</strong>torité et son Influence étaienttelles que, non seulement les Taïtoq, mais <strong>au</strong>ssiles Hoggar en nomadisation dans cette région sedétachèrent peu à peu <strong>de</strong> PaménoukaI MOUSSA AGAMASTANen manifestant ouvertement leur inten^tion <strong>de</strong> reprendre leur indépendance.Il était urgent <strong>de</strong> mettre fin à ces agissementset <strong>de</strong> faire voir à ces populations que la force françaiseveillait et s<strong>au</strong>rait se faire respecter <strong>de</strong>s perturbateurs.Une jonction fut décidée entre les trouvpes algériennes et les troupes soudanaises. Cettejonction eut lieu à Timiaouin le 28 avril 1907. Ledétachement <strong>de</strong> l'Afrique occi<strong>de</strong>ntale française,composé <strong>de</strong> tirailleurs venus <strong>de</strong> Bamba et <strong>de</strong> Gao,était commandé par les capitaines CAUVIN et PAS-QUIER. Le groupe méhariste <strong>de</strong> l'Algérie, dirigépar le capitaine DINAUX, servait également d'escorteà <strong>de</strong>ux officiers <strong>de</strong> l'infanterie coloniale, lecapitaine ARNAUD et le lieutenant CORTÏER, qui rejoignaientleurs postes respectifs <strong>au</strong> Soudan parla voie du désert, avec mission d'étudier l'organisation<strong>de</strong>s compagnies sahariennes en vue <strong>de</strong> lacréation d'unités similaires en Afrique occi<strong>de</strong>ntalefrançaise.Après plusieurs journées passées à Timiaouin,<strong>au</strong> cours <strong>de</strong>squelles les officiers examinèrent lameilleure manière d'exercer la* police et <strong>de</strong> main-


tenir la sécurité dans la région, le capitaine DINAUXquittait ses camara<strong>de</strong>s du Soudan pour rayonnerdans <strong>l'Adrar</strong> dés Iforas. Pendant près <strong>de</strong> <strong>de</strong>uxmois il visita tous les campements, organisa <strong>de</strong>nombreuses réunions pour expliquer le rôle que laFrance s'était fixé et se fit présenter tous les chefset notables <strong>au</strong>xquels il signifiasesinstructionsprécises et les sanctions qui pourraient intervenirsi ces instructions n'étaient pas scrupuleusementobservées.Le capitaine DINAUX rentrait à In-Salah fin juilletaprès avoir exéenté d'excellente besogne etnon sans avoir laissé <strong>au</strong> Hoggar un important détachement<strong>de</strong> niéharistes sous les ordres du lieutenantSlGGNNEY. ^L'élan était donné, la marche vers le Sud définitivementengagée. Malgré les réticences venuesdu Nord, les obstacles <strong>de</strong> toute nature qu'il avaità vaincre, le peu d'empressement que l'on mettait,en h<strong>au</strong>t lieu, à le secon<strong>de</strong>r, LAPERRINE poursuivaitinlassablement sa tâche patriotique, et ilavait la gran<strong>de</strong> satisfaction <strong>de</strong> pouvoir affirmerqu'il ne s'était pas trompé; le Sahara se soumettaitpeu à peu sans effusion <strong>de</strong> sang et sans qu'il encoûtât bien cher <strong>au</strong> pays.Dès cette époque, les jonctions algéro-soudanaisesse succédèrent assez rapi<strong>de</strong>ment.En cette même année 1907, le lieutenant HALPHENet l'officier interprète Pozzo DI BORGO, tous <strong>de</strong>ux<strong>de</strong>lacompagnie saharienne du Tidikelt, rencontraientà î ferouane, le 30 octobre, le capitainePOSTH, commandant le cercle d'Aga<strong>de</strong>z. Le lieutenantHALPHEN rapportait <strong>de</strong> cette tournée <strong>de</strong>précieux renseignements sur la région compriseentreleHoggar et l'Aïr, tandis que l'interprète


— 23 -Pozzo Di BÔRGÔ recueillait <strong>de</strong> sérieuses in<strong>format</strong>ionssur les tribus <strong>de</strong> l'Aïr ainsi que sur le commercetranssaharien.Lé rayon d'action <strong>de</strong> la compagnie sahariennedu Tidikelt s'était notablement développé, le cercleétroit fixé par le décret d'organisation avait<strong>de</strong>puis longtemps été franchi, mais les moyensmatériels dont elle disposait n'avaient pas été modifiés.Le moment était venu d'<strong>au</strong>gmenter les effectifs<strong>de</strong> cette unité pour la mettre en mesure d*assurersa tâche nouvelle dans <strong>de</strong> bonnes conditions.Le décret du 14 janvier^ 1908 permit le relèvementsouhaité <strong>de</strong> sorte qu'avec <strong>de</strong>s effectifs plus importantsil fut possible <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r à une organisationmilitaire <strong>de</strong>s régions sahariennes répondantmieux que par le passé <strong>au</strong>x exigences <strong>de</strong> la policedudésert.Le colonel LAPERRINE avait déjà établi son plan.Celui-ci posait en principe l'occupation permanente<strong>de</strong>s contrées habitées, ou du moins <strong>de</strong>s principalesd'entre elles, comme le Hoggar et les Ajjer.Des groupes mobiles <strong>de</strong>vaient y être installés, chacund'eux ayant un secteur <strong>de</strong> surveillance biendéterminé, tandis qu'un fort construit en un emplacementjudicieusement choisi, servirait <strong>de</strong> pointd'appui et <strong>de</strong> centre <strong>de</strong> ravitaillement à ce groupe.C'est le captaine NIÉGER, désigné comme successeur<strong>de</strong>puis le mois <strong>de</strong> juillet 1907 du capitaineDINAUX, i3romu chef <strong>de</strong> bataillon, qui fut chargéd'appliquer ce programme.Le groupe du Hoggar, constitué à l'effectif <strong>de</strong>135 méharistes, quittait In-Salah le 22 avril 1908pour gagner son centre d'opérations sous le comman<strong>de</strong>ment<strong>de</strong> son chef le lieutenant SIGONNEY. Lecolonel LAPERRINE s'était joint <strong>au</strong> détachement,


- 24 —car il désirait choisir lui-même l'emplacement dufutur fort. C'est à ïarhaouhaouat, centre <strong>de</strong> culturesmo<strong>de</strong>ste, mais admirablement situé à environ50 kilomètres <strong>de</strong> Tamanrasset, à un carrefour<strong>de</strong>s pistes., caravanier es reliant le. Soudan à la Tripolitaine,que le fort fût édifié. On lui donna lenom <strong>de</strong> « Motylinski» pourhonorer la mémoireet l'Officier Interprète venu <strong>de</strong>ux années <strong>au</strong>paravant<strong>au</strong>près du Père DE FOUCAULD se livrer à <strong>de</strong>sétu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> la langue <strong>de</strong>s Touareg et décédé <strong>de</strong>puisàConstantine.Dès son arrivée <strong>au</strong> Hoggar le lieutenant SIGON-NEY se mit en rapport avec le Père DE FOUCAULDqu'un séjour <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux années <strong>au</strong>près <strong>de</strong>s Touaregavait familiarisé avec leur langue, leurs coutumeset leur mentalité si particulière. Le Père s'étaitdéjà acquis <strong>de</strong> soli<strong>de</strong>s amitiés <strong>au</strong>ssi bien parmi lesnobles que chez les imrads; le prestige personneldont il jouissait allait lui permettre d'ai<strong>de</strong>r le commandantdu groupe mobile dans sa tâche difficileet <strong>de</strong> <strong>de</strong>venir pour lui un conseiller sûr, précieuxet discret, dont les avis <strong>de</strong>vaient éviter les tâtonnementset peut-être <strong>au</strong>ssi les erreurs du début.Entre temps, le colonel LAPERRINE avait annoncécette réorganisation <strong>au</strong>x <strong>au</strong>torités soudanaiseset sollicité le concours <strong>de</strong> celles-ci pour l'accomplissementd'une oeuvre qui intéressait <strong>au</strong>tantl'Afrique occi<strong>de</strong>ntale française que l'Algérie. Cetappel à la concor<strong>de</strong> et à l'union <strong>de</strong>sintelligenceset <strong>de</strong>s forces <strong>de</strong>vait être entendu. Le commandantmilitaire <strong>de</strong> la région <strong>de</strong> Zin<strong>de</strong>r, le chef <strong>de</strong> bataillonMOURET, officier <strong>de</strong> h<strong>au</strong>te valeur <strong>au</strong>x vues largeset claires, répondait immédiatement <strong>au</strong> commandantmilitaire <strong>de</strong>s Oasis en lui offrant sa plusentière collaboration et en exprimant le désir <strong>de</strong>


. — 2o —rencontrer le plus tôt possible le commandant dugroupe mobile du Hoggar dans l'Air.C'est pour répondre à cette courtoise invitationque le lieutenant SIGONNEY se rendait à Aga<strong>de</strong>z <strong>au</strong>mois <strong>de</strong> septembre 1908. Reçus avec effusion dansla ville soudanaise, les méharistes algériensséjournaient du 10 <strong>au</strong> 17 septembre et un accordétait conclu entre les représentants <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux possessionsen vue <strong>de</strong> l'organisation <strong>de</strong> caravanestranssahariennes et <strong>de</strong> rétablissement d'un servicepostal mensuel entre le Hoggar et Aga<strong>de</strong>z.Cet accord était complété quelques mois* plustard, en février 1909, lors d'une rencontre réaliséedans <strong>l'Adrar</strong> <strong>de</strong>s Iforas entre le lieutenant SIGON-NEY et le lieutenant LASSERON, commandant le secteur<strong>de</strong> Kidal.Mais la jonction la plus importante <strong>de</strong> cette pério<strong>de</strong>fut celle exécutée à Niamey entre le colonelLAPERRINE et le colonel VENEL commandant le territoiremilitaire du H<strong>au</strong>t-Sénégal-Niger.Accompagné <strong>de</strong> son adjoint, le lieutenant CLER-GET DE SAINT LÉGER, et d'une petite escorte composéeseulement <strong>de</strong> quinze méharistes, le colonelLAPERRINE partait d'In-Salah le 8 avril 1909 et parvenaità Gao le 12 juin. De ce point il se rendaiten jrirogue à Niamey, siège du territoire militaire,tandis que les méharistes <strong>de</strong> son détachement ga^gnaientles bons pâturages <strong>de</strong> la région <strong>de</strong> Tahouaen attendant le retour.L'arrivée <strong>de</strong>s algériens sur les bords du Nigerfut un événement sensationnel. Jamais les Touareg


- $6— . .<strong>de</strong> la Boucle n'eussent imaginé que les Châamba,avec lesquels leurs frères du Hoggar et <strong>de</strong>s Ajjeravaient souvent eu maille à partir, pussent unjour abreuver leurs méhara dans ce Fleuve sacré,et les Châamba, <strong>de</strong> leur côté, n'<strong>au</strong>raient jamaisosé, dans leurs rêves <strong>de</strong> conqtLêtelés plus insensés,envisager cette éventualité. Cette fois le désert étaitbien dompté; la preuve était faite <strong>de</strong> sa capitulation.Les indigènes du Soudan ne s'y trompèrentpas. En manifestant bruyamment leur joie enl'honneur <strong>de</strong>s méharistes, sans doute obéissaientilsà leur passion pour le «tam-tam» et la dansebarbare, mais voulaient-ils <strong>au</strong>ssi exprimer par cemoyen leur allégresse <strong>de</strong> se sentir si parfaitementà l'abri, désormais, <strong>de</strong>s exactions <strong>de</strong> leurs farouchesvoisins, les Touareg.Des questions importantes furent examinées parles colonels LAPERRINE et YENEL avec' l'esprit <strong>de</strong>la plus amicale collaboration. Il convient <strong>de</strong> noterparticulièrement la question relative à la fixation<strong>de</strong>s limites territoriales <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux colonies. L'accordconclu et ratifié plus tard par le Gouvernementest connu sous le nom <strong>de</strong> « Convention <strong>de</strong>Niamey»; ses cl<strong>au</strong>ses sont toujours envigueur.outre, <strong>de</strong>s règles <strong>de</strong> transhumance furent arrêtéesEnafin <strong>de</strong> régler les conditions <strong>de</strong> nomadisation <strong>de</strong>sTouareg Hoggar sur le territoire <strong>de</strong> l'Afrique occi<strong>de</strong>ntalefrançaise.Dès lors, le contact était définitivement établientre les <strong>au</strong>torités <strong>de</strong>s <strong>de</strong>uxpays, les droits <strong>de</strong>chacun se trouvaient parfaitement précisés et délimités,toute c<strong>au</strong>se <strong>de</strong> mésentente ou <strong>de</strong> discussionpossibleavaitdisparu. Ori allait pouvoir travaillerà la même oeuvre sansarrière-pensée, sans crainte


- 27 -<strong>de</strong>s conflits d'attribution, dans une confiance réciproque,et cet état d'esprit allait contribuer, dansune large mesure, à hâter la pacification totale duSahara, à faciliter l'exercice <strong>de</strong> la police dans cesvastes contrées ainsi que la mise en valeur <strong>de</strong>leurs faibles ressourcés.(A suivre).Capitaine Léon LEHURAUX.


Conférences faites à"Radio-Alger''par M. A. ROZIS,Sous-Directeur <strong>de</strong>s Territoires du SudSUR LES CÛMF BAHAKA :LEPÂ^Chers<strong>au</strong>^liteurs,Le Sahara français, sons ses divers aspects, vousa été décrit ces jours-ci dans les c<strong>au</strong>series particulièrementséduisantes, faites par le GénéralMEYNIER, Directeur <strong>de</strong>s Territoires du Sud et sescollaborateurs.Je dois, à sa <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, vous parler <strong>au</strong>jourd'huièl'une question qui intéresse spécialement l'économie<strong>de</strong>s h<strong>au</strong>ts plate<strong>au</strong>x algériens dont une partiese trouve située dans le groupement administratif<strong>de</strong>s Territoires du Sud, sur les confins du Sahara.Comme vous le savez sans doute, cette économiepeut se diviser en trois branches principales : laculture <strong>de</strong>s céréales, l'élevage, l'exploitation <strong>de</strong>l'alfa.C'est <strong>de</strong> cette <strong>de</strong>rnière que je me propose <strong>de</strong>vousentretenir.A


- 30 -L'alfa, sa cueillette, son exploitation !'. .Voilà unsujet qui présente <strong>de</strong> l'intérêt certes, mais qui, tout<strong>de</strong> même, risque <strong>de</strong> paraître un. peu monotone àmes <strong>au</strong>diteurs ! Aussi, n'est-ce pas sans une certaineappréhension que je me suis <strong>de</strong>mandé commenti'allait le présenter pour ne pas lasser bienvite leur patience. Le seul moyen, nie semble-t-il,<strong>de</strong> vous y intéresser, serait <strong>de</strong> vous faire parcourir,du moins par la pensée, les vastes régions querecouvre cette plante curieuse. Vous verriez quesi leur aspect est parfois sévère, elles ne manquentcependant pas d'attrait ni surtout <strong>de</strong> pittoresque.En vous parlant <strong>au</strong>ssi <strong>de</strong>s populations noma<strong>de</strong>s quiles habitent, et <strong>de</strong> ï'imp or tance que présente pourelles l'exploitation alfatière, peut-être pourrai-jeretenir quelques instants votre bienveillante attention.AMais d'abord qu'est-ce que l'alfa et à quels besoinsrépond son exploitation ?L'alfa est une graminée vivace <strong>au</strong>x feuilles longues,aiguës, rendues jonciformes parla sécheresse;elle pousse sur une souche à rhizome trèsrameux, avec <strong>de</strong>s racines assez grêles, s'insinuantdans les moindres interstices pour chercher à unegran<strong>de</strong> profon<strong>de</strong>ur, l'humidité et les éléments fertilisantsnécessaires à son existence; elle forme <strong>de</strong>stouffes qui s'éten<strong>de</strong>nt sur le rhizome et présententsouvent une circonférence <strong>de</strong> plus d'un mètre <strong>de</strong>diamètre. Ses feuilles, attachées <strong>au</strong> rhizome pasune petite gaine, atteignent une longueur <strong>de</strong> 50 à80 centimètres; dressées vers le ciel, elles retombenten panache et frisonnent <strong>au</strong> moindre souffle


~ 31 —d'air. Dans la saison humi<strong>de</strong>, elles sont d'un be<strong>au</strong>vert foncé; mais* sous l'influence <strong>de</strong> la sécheresseou <strong>de</strong> la <strong>de</strong>ssication, elles se décolorent et <strong>de</strong>viennentblanchâtres.L'alfa pousse à Pétat spontané et se multipliesans <strong>au</strong>cun soin cultural. II en existe quelques peuplementsdans le sud^^^ <strong>de</strong> l'Espagne; mais c'estsurtout dans PAfrique du Nord que cette plantévit et s'étend en nappes d'une superficie impressionnante.Sur la terre algérienne, elle couvrequatre millions d'hectares dont la moitié environest située dans les territoires du Sud.C'est sur la zone <strong>de</strong>s h<strong>au</strong>ts plate<strong>au</strong>x, <strong>de</strong>puis les<strong>de</strong>rniers contreforts <strong>de</strong> l'atlas tellién jusqu'<strong>au</strong> <strong>de</strong>là<strong>de</strong> l'atlas Saharien, que l'on trouve les peuplementsalfatiers les plus <strong>de</strong>nses, principalement dans lesterres friables et graveleuses, à l'abri die l'humiditésur les valonnements qui snrplombent les dépressionsargileuses et jusque sur le sommet <strong>de</strong>s montagnesélevées qu'ils recouvrent à peu près complètement,comme le Djebel Antar <strong>de</strong> Méchéria.L'exploitation <strong>de</strong> l'alfa qui consiste dans la cueilletteannuelle <strong>de</strong>s feuilles pour les besoins <strong>de</strong> l'industrie,a lieu naturellement dans les parties déces peuplements les plus rapprochées <strong>de</strong>s voiesferrées qui permettent l'évacuation <strong>de</strong>s produitsvers le littoral. Vous verrez, en effet, dans quelquesinstants, que l'exploitation a surtout pourobjectif le commerce d'exportation.La cueillette <strong>de</strong>s feuilles se fait par voie d'arrachisà la main, en respectant la gaine qui les sou<strong>de</strong><strong>au</strong> rhizome. Il f<strong>au</strong>t, <strong>au</strong>tant que possible, protégerla souche afin <strong>de</strong> ne pas compromettre sa production.Dans tous les pays producteurs, on a édicté àce sujet une réglementation sévère.


— 32 —Cette cueillette est <strong>de</strong> droit réservée <strong>au</strong>x indigènes<strong>de</strong>s tribus sur lesquelles se trouvent les nappesexploitées. Des chantiers disséminés sur lie territoire<strong>de</strong> ces tribus, installés près <strong>de</strong>s points d'e<strong>au</strong>*effectuent les achats d'alfa vert apporté par lesindigènes; ils procè<strong>de</strong>nt après triage, à un boftelagesommaire et à une mise en meule facilitantune lente <strong>de</strong>ssication <strong>de</strong>s stocks approvisionnés;ces stocks sont ensuite transportés snr les centresd^évacuation situés près <strong>de</strong> la voie ferrée.La feuille d'alfa est utilisée à plusieurs fins. Parsa contexture même et les qualités <strong>de</strong> sa fibre, ellepeut servir comme textile à certains usages : spar^terie, vannerie, cor<strong>de</strong>rie. Mais, c'est surtout dansla fabrication <strong>de</strong>s pâtes <strong>de</strong> cellulose pour la papeterieque la feuille d'alfa trouve son plus granddébouché. Le papier d'alfa a pris naissance enAngleterre vers 1860. C'est à l'ingénieur anglaisROUTLEDGE que l'on doit la découverte <strong>de</strong>s procédés-chimiques permettant d'extraire <strong>de</strong> l'alfa lapartie fibreuse utile pour la fabrication d'une cellulose<strong>de</strong> qualité comparable à la cellulose <strong>de</strong> cotonla plus pure. Il f<strong>au</strong>t rendre hommage à ce savantdont l'invention a donné un essor considérable àl'industrie du pax>ier <strong>de</strong> luxe. La pâte d'alfa permet,en effet, <strong>de</strong> produire un papier souple, résistant,particulièrement opaque, un papier facilitantadmirablement les impressions d'art. La réputation<strong>de</strong> ce papier est mondiale; il est très recherchéjusqu'en Chine et <strong>au</strong> Japon. Notre grand hebdomadaireL'Illustration est imprimé sur papierd'alfa.La production <strong>de</strong> l'exploitation alfatière en Algérieest essentiellement variable d'une année àl'<strong>au</strong>tre. Ce n'est pas qu'elle soit conditionnée par


-Mlàsituation <strong>de</strong>s récoltes, car lès peuplements sontassez vastes pour faire largement face à toutes les<strong>de</strong>man<strong>de</strong>s; elle l'est par son prix <strong>de</strong> revient assezélevé, en raison <strong>de</strong>s frais <strong>de</strong> transports qui <strong>au</strong>g^mentent <strong>au</strong> fur et à mesure que les chantiers <strong>de</strong>cueillette s'éloignent du littoral; elle est surtoutconditionnée par les besoins <strong>de</strong> la papeterie. Nousavons, en ce moment* une erise alfatière parce quelapapeterie anglaise, gran<strong>de</strong> consommatrice d'alfaa tendance à remplacer la pâté d'alfa, bien que laqualité <strong>de</strong> son papier en soit fortement diminuée,par <strong>de</strong>s pâtes dé bois Scandinaves et finlandaisesqu'elle peut se procurer <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>ux ou trois ans,à <strong>de</strong>s prix très inférieurs. L'une <strong>de</strong>s c<strong>au</strong>ses dé lacrise est <strong>au</strong>ssi la baisse dé la livre sterling, car lesmarchés d'alfas se traitent en livres, et on sait queles anglais n'enten<strong>de</strong>nt pas subir les conséquences<strong>de</strong> la dépréciation <strong>de</strong> leur monnaie.Pendant la <strong>de</strong>rnière pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> grosse exploitation,c'est-à-dire en 1927, 28 et 29, Texportatioin<strong>de</strong>s produits alfatiers algériens a atteint unemoyenne annuelle <strong>de</strong> 204.000 tonnes. Le prix <strong>de</strong>vente <strong>de</strong> la tonne d'alfa rendue <strong>au</strong> port, s'est élevéjusqu'à 550 francs, alors qu'avant la guerre il atteignaità peine 80 francs Actuellement, le prix <strong>de</strong>la tonne d'alfa s'établit dans les environs <strong>de</strong> 260francs, quai Alger, Bône, Philippeville ou Arzew,En 1928 la valeur <strong>de</strong>s exportations a dépassé 100millions <strong>de</strong> francs.De toute manière, le commerce d'exportation <strong>de</strong>l'alfa,enAlgérie, est supérieur comme valeur àcelui <strong>de</strong> l'exportation <strong>de</strong>s phosphates et à peu prèségal à celui <strong>de</strong>s minerais <strong>de</strong> fer. Il est donc évi<strong>de</strong>ntque l'exploitation alfatière mérite qu'on s'y intéresseet qu'on laprotège; elle le mérite d'<strong>au</strong>tant


— 34 -plus qu'elle alimente pour plusieurs millions <strong>de</strong>francs, les transports ferroviaires — chose quin'est pas négligeable par ces temps <strong>de</strong> déficit ;d'<strong>au</strong>tant plus <strong>au</strong>ssi qu'elle fait vivre <strong>de</strong>s milliersdfinâigènes.Je vous ai dit que la papeterie anglaise est unegran<strong>de</strong> consommatrice d'alfa. Sur 200.000 tonnesCpe l'Algérie a exportées en 1929, 162.000 l'ont étéà <strong>de</strong>stination <strong>de</strong> ïAngleterre et 3Sv0OO à <strong>de</strong>stination<strong>de</strong> la France continentale. Ce <strong>de</strong>rnier chiffre doitparticulièrement retenir votre attention. Il indiqueque la France ne se désintéresse plus comme <strong>au</strong>tresfois <strong>de</strong> la fabrication <strong>de</strong> la pâte d'alfa, car c'estbien à cet usage qu'on été employéesà peu prèsexclusivement ces 35.000 tonnes <strong>de</strong> feuilles qui représententune production <strong>de</strong> 14.000 tonnes environ<strong>de</strong> pâte <strong>de</strong> cellulose.En 1924, une usine <strong>de</strong>stinée <strong>au</strong> traitement <strong>de</strong>la feuille d'alfa, pour sa trans<strong>format</strong>ion en pâte<strong>de</strong> cellulose a été créée dans le V<strong>au</strong>eluse, à laTraille, pvès- d'Avignon, par une société anonymefrançaise dont lesiège social se trouve à Paris.Cette société est concessionnaire, dans la région<strong>de</strong> Djelfa, d'un vaste peuplement qui lui a étéaccordé pour 18 ans par l'Administration <strong>de</strong>s Territoiresdu Sud, avec l'obligation d'utiliser les produits<strong>de</strong> son exploitation à la fabrication <strong>de</strong>s pâtes<strong>de</strong> cellulose. Elleune parfaite conscience et son exploitation peuts'acquitte <strong>de</strong> sesobligationsavecêtre citée comme un modèle, <strong>au</strong>ssi bien du point<strong>de</strong> vue du souci qu'elle montre <strong>de</strong>s<strong>au</strong>vegar<strong>de</strong>rvitalité <strong>de</strong>s peuplements d'alfa, que <strong>de</strong> seslarapportsconfiants avec la population indigène qu'elleemploie à la cueillette et à la manutention.L'Unionfrançaise <strong>de</strong>s papeteries Navarre, éga-


— 35 —lemeiît concessionnaire <strong>de</strong> nappes alfatières dansle sud du département d'Alger, traite la feuilled'alfa dans ses usines, principalement dans celledé Monfourat et la transforme, non seulement enpâte <strong>de</strong> cellulose, mais encore en un produit finireprésentant diverses qualités <strong>de</strong> papier qui peuventrivaliser avec les meilleures produits étrangers<strong>de</strong> même nature.La France n'est donc plus* <strong>de</strong>puis quelques années,complètement tributaire <strong>de</strong> la Gran<strong>de</strong>^IJretagnepour les pâtes d'alfa employées dans la papeterie.II serait à souhaiter qu'elle développât cetteindustrie.Pourquoi donc, me direz-vous, la papeterie françaiseou étrangère ne songeât-elle pas à créer <strong>de</strong>susines sur place ? Elle récupérerait ainsi les frais<strong>de</strong> transport très onéreux <strong>de</strong> la matière preipière,puisque celle-ci représente un poids <strong>de</strong>ux fois et<strong>de</strong>mi supérieur à celui <strong>de</strong> la cellulose. Cet avantagen'a pas échappé à l'attention <strong>de</strong>s industriels;mais après <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s très sérieuses et rnêm,e <strong>de</strong>sexpériences malheureuses faites sur place, le projetd'installation, en Algérie, d'une gran<strong>de</strong> usine<strong>de</strong> fabrication <strong>de</strong> cellulose a dû être abandonné.Le fonctionnement d'une pareille usine est subordonnéà <strong>de</strong>s conditions particulières; main-d'oeuvrespécialisée, qualité et abondance <strong>de</strong> l'e<strong>au</strong> quel'on doit employer en gran<strong>de</strong> quantité, prix <strong>de</strong>revient assez bas du combustible et <strong>de</strong>s produitschimiques mis en oeuvre, toutes conditions <strong>au</strong>xquellesil n'a pas été possible jusqu'à ce jour <strong>de</strong>satisfaire en Algérie.On doit cependant escompter que les progrèsincessants réalisés par la science, dans le domaine<strong>de</strong>laphysique et <strong>de</strong> la chimie notamment, nous


- 38—permettront un jour <strong>de</strong> produire sur place et àbon compte, une pâte brute dont l'exploitation seraplus facile et plus avantageuse que celle <strong>de</strong> lafeuillemême.L'industrie algérienne emploie l'alfa à divers<strong>au</strong>tres usages : la vannerie, la sparterie et la cor<strong>de</strong>rieprincipalement; elle fabrique également ducrinvégétal avec l'alfa en remplacement du palmiernain qui tend à disparaître. Le défibrage <strong>de</strong>l'alfa pour la cor<strong>de</strong>rie et les liens agricoles se faitdans plusieurs petites fabriques locales; ce défibragene s'est pratiqué pendant longtemps qued'une .manière rudimentaire, par simple écrasement<strong>de</strong> la feuille. Depuis <strong>de</strong>ux ans, cependant, lasociété <strong>de</strong>s textiles, filiale <strong>de</strong> la société générale<strong>de</strong>s alfas qui exploite, dans le sud oranais, unevaste concession, a créé <strong>au</strong>x environs d'Alger, uneusine importante pour le défibrage mécanique <strong>de</strong>l'alfa, après rouissage,©n'a réussi à produire unefilasse <strong>de</strong> très bonne qualité, d'une gran<strong>de</strong> résistance,dont on se sert pour fabriquer <strong>de</strong>s ficellesfines, <strong>de</strong>s cordages et <strong>de</strong>s cables très appréciés. Ilest permis <strong>de</strong> penser que cette usine arrivera, aprèsune mise <strong>au</strong> point <strong>de</strong> ses procédés <strong>de</strong> rouissage et<strong>de</strong>défibrage, à produire <strong>de</strong>s tissus pouvant remplacerles sacs <strong>de</strong> jute importés <strong>de</strong> l'étranger etdontl'Algérie fait une consommation importante,représentant une valeur anuelle <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 60 millions<strong>de</strong> francs.La Société générale <strong>de</strong>s alfas, qui a réalisé dansce sens un effort <strong>de</strong>s plus méritoires <strong>au</strong> prix <strong>de</strong>grands sacrifices, a apporté d'<strong>au</strong>tre part, dansl'aménagement <strong>de</strong> sa vaste concession du sudoranais, <strong>de</strong>s améliorations très importantes qui la


Lepays <strong>de</strong> Ialfa. - Scène -pastorale. MṘozis, Sous-Directeur <strong>de</strong>sTerritoires duSudvisite uncampement <strong>de</strong>pasteurs


- 37 —placent <strong>au</strong> premier rang <strong>de</strong>s exploitations alfatières<strong>de</strong> l'Afrique du Nord.Nous sommes encore loin <strong>de</strong> pouvoir utiliser lafibre <strong>de</strong> l'alfa dans l'industrie du tissage <strong>au</strong> mêmetitre que le chanvre et le lin comme l'indiqueun grand dictionnaire récemment édité. Cependant<strong>de</strong>s recherches sont poursuivies par <strong>de</strong>s savantsqui ont le ferme espoir d'arriver à produireunefilasse <strong>au</strong>ssi fine et <strong>au</strong>ssi résistante que celle dulin, supérieure même, disent-ils, car se basant sur<strong>de</strong>s découvertes d'ordre linguistique,ilsaffirmentque les plus be<strong>au</strong>x tissus <strong>de</strong> l'antiquité étaient fabriquésavec <strong>de</strong>s fils d'alfa. Il s'agirait donc <strong>de</strong>retrouver et d'industrialiser les procédés <strong>de</strong> rouissageet <strong>de</strong> défibrage que l'antiquité <strong>au</strong>rait employésavec succès. Nous souhaitons tous que cesrecherches aboutissent; jusqu'à présent, elles nesont pas sorties du domaine du laboratoire.L'Algérie, vous n'en doutez pas, chers <strong>au</strong>diteurs,suit avec sympathie toutes les expériences quiten<strong>de</strong>nt à la découverte <strong>de</strong> nouve<strong>au</strong>x procédésd'utilisation rationnelle et avantageuse <strong>de</strong> l'alfa.Et à ce sujet, il est à noter que les Etats-Unisd'Amériqne commencent à s'intéresser à la question.Nous savons, en effet, que tout récemmentencore, un chargement <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux mille tonnes d'alfaa été expédié d'un port algérien sur le Nouve<strong>au</strong>Mon<strong>de</strong> pour servir à <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> cet ordre.A -:.J'en ai fini avec la technicité <strong>de</strong> l'exploitationalfatière; il-me reste maintenant à vous dire quelquesmots du pays <strong>de</strong> l'alfa.C'est ici, cher s <strong>au</strong>diteurs, que je voudrais vous


~ 38 —confier à parcourir avec moi ces vastes régions,sur lesquelles gravitetoute une population noma<strong>de</strong>ayant conservé ses habitu<strong>de</strong>s séculaires, lasimplicité- cfuné vie patriarcale et qui, par celainéme^ attiré là syhijDathie <strong>de</strong> tons ceux qui l'apprôehèiitet savent la comprendreVl-:;FRôMÉNTïN:':â: noté le paysage alors que se ren^dânt sur lès contins dû Sahara^ en 185% il parcourûtàcheval lés étapes <strong>de</strong> la longue route d'Algerà Laghouat. Au sud <strong>de</strong> Bbghâri, il entra dans laplaine d'alfa, onduléCette touffe, toujours la même, poussant <strong>au</strong> hasardsûr un terrain tout bosselé, avec l'aspect et là couleurd'un petit jonc s'agltant, ondoyant comme unechevelure <strong>au</strong> moindre Souffle, finissait par l'excé<strong>de</strong>raDe loin, elle ressemble à une immense moissonqui ne veut pas mûrir et qui se flétrit sans sedorerV II préférait le sol sablonneux et grisâtre sansvégétation on son cheval ne buttait pas.Mais la lumière <strong>de</strong>s plaines d'alfa lui paraissaitidéale : elle vous baigne, écrit-il, comme une secon<strong>de</strong>atmosphère <strong>de</strong> flots impalpables. L'éclat duciel s'adoucit par <strong>de</strong>s bleus si tendres, la couleurdé ses vastes plate<strong>au</strong>x est si molle, l'ombre ellemêmese noie <strong>de</strong> tant <strong>de</strong> reflets que la vuen'éprouve <strong>au</strong>cune violence. Cette lumière enveloppeSahara.etn'aveuglé pas comme la lumière crue duLouis BERTRAND qui a parcouru la même route,en 1892, n'a pas étéfrappé <strong>de</strong> cette lumière. Il estvrai que son héros du « Sang <strong>de</strong>s races » ne s'attardaitpas <strong>au</strong>x douceurs dûpaysage. La piste surlaquelle il lançait ses puissants attelages, tour àtour coupée <strong>de</strong>lagunes salées, <strong>de</strong> fondrières, <strong>de</strong>plate<strong>au</strong>x d'alfa, l'impressionnait comme un pays


— m --.inconnu et lointain dont il avait à vaincre les embûchesredoutables.André CHEVRILLON, en 1925, a voulu,


— 40 -« comme s'ils allaient nous dévorer, <strong>de</strong>s hommes« jeunes accourent et les écartent, <strong>de</strong>s femmes à« peines entrevues disparaissent.« La fumée <strong>de</strong>s foyersmonte dans le ciel tout« droit, comme celle d'un sacrifice. Nous tombons«presqueàl'improvisfe,an milieu <strong>de</strong> dix famil-« les qui vivent à la façon <strong>de</strong> Jacob et d'Abra-« hanx ». Et il goûte l'aimable hospitalité <strong>de</strong> cepeuplé que ne tentent pas les plaisirs <strong>de</strong> la mo<strong>de</strong>rnecité.Ecoutez ses impressions <strong>de</strong> la nuit : «Je sors« dé la tente et je m'assois <strong>au</strong> <strong>de</strong>hors pour respi-« rer Pair frais. Je lève les yeux<strong>au</strong> ciel. II me« semble quedans ma vie antérieure, je n'ai« Jamais vu d'étoiles. Ici, le firmament est une« gran<strong>de</strong> tenture <strong>de</strong> velours, les étoiles y sont pi-« quées en telle multitu<strong>de</strong> et jettent <strong>de</strong>s feux si« différents, qu'on dirait <strong>de</strong>s semis <strong>de</strong> topaze sûr« un fond <strong>de</strong> poussière d'or».La nuit <strong>de</strong>s steppes, chers <strong>au</strong>diteurs, comme lanuit saharienne est, en effet, particulièrement captivante.Dans cette immensité et dans ce calme impressionnantelle vous enveloppe, elle vous pénètre.La voûte céleste, où rayonnent tant <strong>de</strong> milliers<strong>de</strong> mon<strong>de</strong>s, semble si près <strong>de</strong> votre front, que votreâme se fond tout entière dans la contemplation <strong>de</strong>l'Infini mystérieux et splendi<strong>de</strong> !Vous voyez donc que le pays <strong>de</strong> l'alfa n'est pasàUSsi sévère, ni <strong>au</strong>ssi monotone qu'on se l'imaginedès l'abord. Pour y trouver quelque séduction, ilf<strong>au</strong>t évi<strong>de</strong>mment, sortir <strong>de</strong>s routes ari<strong>de</strong>s que les<strong>au</strong>tomobiles franchissent à toute vitesse. Le mieuxserait, comme nous le faisions encore voici quelquesannées, <strong>de</strong> le parcourir, à l'exemple <strong>de</strong> MAS-QUERAIT, en compagnie <strong>de</strong> ces cavaliers <strong>de</strong>s tribus


- 41 —qui savent agrémenter l'étape <strong>de</strong> récits imagés et<strong>de</strong> parties <strong>de</strong> chasse. Car lepays dé l'alfa est larégion idéale <strong>de</strong> la chasse : chassé moyenâgeuse,<strong>au</strong> f<strong>au</strong>con, sur le lièvre et l'outar<strong>de</strong>; chasse encoreplus captivante du chacal et <strong>de</strong> la gazelle,.avec lerapi<strong>de</strong> et fin lévrier d*Afrique appelé sloughi.C'est <strong>au</strong>ssi le pays <strong>de</strong>s chev<strong>au</strong>chées équestres dontl'histoire <strong>de</strong> la conquête algérienne vous a narré défameux épiso<strong>de</strong>s* comme celui <strong>de</strong> la prise <strong>de</strong> lasmala d'Ah<strong>de</strong>lka<strong>de</strong>r, en1843, par les chasseurs duDuc d'Aumale. C'est, en effet, dans les immensesplaines et vallonnements d'alfa s'étendant entréle Sersou, le Djebel-Amour elles Monts <strong>de</strong>s Oui edNayls, <strong>au</strong>près <strong>de</strong> la source <strong>de</strong> Taguine, que fut surpriseet capturée la gran<strong>de</strong> cité mobile qui abritaitla famille, les serviteurs et les trésors <strong>de</strong> notrevaleureuxadversaire.Les arabes <strong>de</strong>s H<strong>au</strong>ts-Plate<strong>au</strong>x, vous le savez,élèvent pour leur usagé et pour celui <strong>de</strong> l'Arméevle cheval <strong>de</strong> race barbe; c'est le cheval qui pendantla <strong>de</strong>rnière guerre, et sur tous les fronts, ale mieux résisté <strong>au</strong>x intempéries, <strong>au</strong>x fatigues et<strong>au</strong>x privations. Habitué à vivre sans abri <strong>de</strong>vantla tente, sous un soleil ar<strong>de</strong>nt l'été, sous la neigel'hiver il s'accomo<strong>de</strong> <strong>de</strong> toutes lés températures etse contente d'une ration <strong>de</strong> misère. Il est douxà manier et eej)endant plein d'ar<strong>de</strong>ur et <strong>de</strong> feu.Quand, près du terme <strong>de</strong> l'étape, on suit, <strong>au</strong> crépuscule,la plaine d'armoise odorante, <strong>au</strong> sol; uniet souple bordant le plate<strong>au</strong> d'alfa, les chev<strong>au</strong>xs'impatientent, le bruit <strong>de</strong> leurs sabots se fait plussonore; on les sent vibrer et leurs hennissements;vous font <strong>de</strong>viner le gîte familier qui vous attend.La dune, qui barre <strong>au</strong> loin l'horizon, flamboiesous les <strong>de</strong>rniers rayons du soleil, tandis que les


— 42 -collines toutes proches,se colorent d'un m<strong>au</strong>ve tendrequi bleuit et bientôt se dérobe; la brise <strong>de</strong>vientplus fraîche et plus vivifiante. Dans l'ombre qui<strong>de</strong>scend, on entend l'appel <strong>de</strong>s troupe<strong>au</strong>x regagnantle douar. Et alors quevers la tente : hospitalière, l'étapele voyageur se diriges'achèveainsidans une scène pastorale; véritable évocation <strong>de</strong>stemps bibliques qui répand dans son âme la douceurelle charme d'un paysage virgilien.Je ne puis m'attar<strong>de</strong>r plus longtemps, chers<strong>au</strong>diteurs, à vous décrire ce pays où j'ai éprouvétant <strong>de</strong> fortes et saines émotions <strong>au</strong> cours <strong>de</strong>slongues et ru<strong>de</strong>s tournées que mes fonctions m'ontamené à y accomplir. Il est bon que vous sachiezcependant que sur l'immense steppe que l'on aappelée, non sans quelque raison, la mer d'alfa,vit une population noma<strong>de</strong> <strong>de</strong> près <strong>de</strong> 700.000âmes qui tire ses principales ressources <strong>de</strong> l'élevage,<strong>de</strong> l'industrie <strong>de</strong>s transports à dos <strong>de</strong> chame<strong>au</strong>et <strong>au</strong>ssi <strong>de</strong> l'exploitation alfatière. Cette populationpossè<strong>de</strong> un troupe<strong>au</strong> comprenant : 3millions<strong>de</strong> têtes d'ovins et <strong>de</strong> caprins, 100.000 chame<strong>au</strong>x,75.000 boeufs, 20.000 chev<strong>au</strong>x et 60.000 ânes qui senourrissent en majeure partie <strong>de</strong>s herbages poussantsur la steppe d'alfa. Cette plante joue à l'égard<strong>de</strong>s pâturages un rôle protecteur <strong>de</strong> premier plan,non seulement parce qu'elle défend les terres contreles érosions <strong>de</strong>s pluies d'orages, mais encoreparce qu'à l'ombre <strong>de</strong> sa touffe et sur l'humusqu'elle produit, poussent les petites graminéesannuellesdont le troupe<strong>au</strong> fait sa principalenourriture;Ce rôle protecteur est si évi<strong>de</strong>nt quel'on


—: 43 -s'est <strong>de</strong>mandé si, pour garantir les pâturages, ilne convenait pas d'interdire d'une manière absolue,l'exploitation <strong>de</strong> l'alfa, parce qu'elle a souventpour effet, d'app<strong>au</strong>vrir et quelquefois <strong>de</strong>ruiner les peuplements sur lesquels elle §'opère.Si on compare le revenu <strong>de</strong> l'industrie pastoraleet <strong>de</strong> l'exploitation alfatière, il n'est pas cjouteuxque celui <strong>de</strong> l'élevage procure <strong>au</strong>x indigènes dupays <strong>de</strong> l'alfa, qui est <strong>au</strong>ssi'"le pays du mouton,une ressource bien supérieure.Mais on ne s<strong>au</strong>rait contester non plus que l'industriealfatière apporte à ces mêmes indigènesun appoint considérable dont bénéficient surtoutles familles p<strong>au</strong>vres ne possédant qu'un petit troupe<strong>au</strong>.Il est facile d'évaluer cet appoint, car l'administrationfixe le salaire minimum payé à lacueillette. Nous avons, en effet (et c'est une initiativedont l'administration <strong>de</strong>s Territoires du Sudpeut se féliciter), nous avons mis les .exploitantsdans l'obligation <strong>de</strong> payer <strong>au</strong>x indigènes, quel quesoit l'afflux <strong>de</strong> la m:ain-d'oeuvre, un prix raisonnablebasé sur la valeur du blé, principale <strong>de</strong>nrée<strong>de</strong> consommation <strong>de</strong>s noma<strong>de</strong>s. Le prix minimumdu quintal d'alfa vert est fixé à 4% du prix duquintal <strong>de</strong> blé. Ainsi, une production dé 125.000tonnes d'alfa vert représente actuellement 5 millions<strong>de</strong> salaires à la cueillette. En 1928 et 29^ années<strong>de</strong> grosse exportation où les cours <strong>de</strong> l'alfaet du blé ont été très élevés, ces mêmes salairesont dépassé 20 millions pour chacune <strong>de</strong>s <strong>de</strong>uxcampagnes. Et pour déterminer plus exactementla totalité <strong>de</strong>s sommes dont les indigènes ont profité,il f<strong>au</strong>drait encore ajouter les salaires payéspour les manutentions et les transports <strong>de</strong>s chantiers,<strong>au</strong>x gares d'évacuation. On peut, sans exagé-


-44 -.dation, les évaluer <strong>au</strong> tiers <strong>de</strong>s chiffrés que je viensdé vous citer. Tous ces salaires bénéficient, je tiensà le souligner, <strong>au</strong>x populations pastoralesetnoma<strong>de</strong>s<strong>de</strong>s H<strong>au</strong>ts-Plate<strong>au</strong>x quisontparticulièrementdignes <strong>de</strong>là solhcitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la France,"'", À'.On peut donc conclure que l'exploitation alfatièredoit être maintenue, encouragée et même <strong>de</strong>veloppée.Mais qu'à Fëgal d'une exploitation forestière,bien ordonnée et bien conduite, elle doit êtresoumise à <strong>de</strong>s règles très sévères, ayant pour but<strong>de</strong> protéger la reproduction <strong>de</strong> la plante et d'empêchertout abus <strong>de</strong> cueillette pouvant entraînerla ruine <strong>de</strong>s peuplements alfatiers.: AJe m'excuse, chers <strong>au</strong>diteurs, d'avoir retenu unpeu trop lontemps peut-être votre attention. Sivous le voulez bien, dans une prochaine c<strong>au</strong>serie,quittant les steppes d'alfa, àl'aspect trop sévère,nous nous enfoncerons plus <strong>au</strong> loin, vers le su<strong>de</strong>t nous irons nous réch<strong>au</strong>ffer <strong>au</strong> souffle tiè<strong>de</strong> dudésert. Je vous parlerai alors <strong>de</strong>s oasis sahariennes>du pays du palmier-dattier, cet arbre vraimentdivin dont les fruits délicieux, imprégnés <strong>de</strong> lumière,apportent jusqu'à vous, comme un reflet duradieux soleil saharien.A. Rozis.


Arrêtons-nous quelques instants dans lacapitale <strong>de</strong>cetarchipel :TIMIMOUN


: II; '-,: ;;^;:;vLÈS OASIS SAHARIENNESET LE PAYS DU PALLIER DATTIER'" 1 PARTIENous irons nous réch<strong>au</strong>ffer <strong>au</strong> Souffle^ tiè<strong>de</strong> dudésert ! C'est ainsi, chers <strong>au</strong>diteurs, qne Je vousai conviés à ma conférence sur les oasis sahariennesv. , ; ;Quand, en plein hiver, quittant le h<strong>au</strong>t pays <strong>de</strong>la steppe d'alfa, le corps transi, les yeux larmoyantssous les rafales <strong>de</strong> vent, on <strong>de</strong>scend versle sud les <strong>de</strong>rniers contreforts <strong>de</strong> l'Atlas et quel'on pénètre brusquement dans la plaine saharienne,on est <strong>de</strong> suite enveloppé d'une atmosphèrenouvelle très douce et l'on se<strong>de</strong>man<strong>de</strong> quelle bienfaisantefée a pu, d'un coup <strong>de</strong> baguette magique,vous apporter cette agréable sensation.Reportez-vous par la pensée vers le sud oranais,<strong>au</strong>-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> Saïda, <strong>de</strong> Méchéria, d'Aïn-Sefra. Lamachine ne halète plus pour gravir les rampes <strong>de</strong>la voie ferrée. Au contraire, dans le tintamarred'une course rapi<strong>de</strong>, le train franchit les lacets <strong>de</strong>la <strong>de</strong>scente; quelques bosquets à peine entrevusdisparaissent; un flocon <strong>de</strong> fumée voile parfoisles roches qui s'éfagent en couches régulières etgéologiques, tapissent lés labyrinthes <strong>de</strong>s défilés,les parois <strong>de</strong>s ravins et <strong>de</strong>s cols. Les falaises abrupteset déchiquetées s'estompent <strong>au</strong> loin, fuyant


— 46 —sous votre regard étonné; Et... voici que la plainesaharienne dénudée, apparaît sans qu'un nuage<strong>au</strong> ciel vienne tamiser les rayons <strong>de</strong> sa lumièrecrue. Le soleil pénètre là terre d'argile quis'éch<strong>au</strong>ffe et miroite. L'atmosphère se fait pluslégère; c'est le souffle tiè<strong>de</strong> du désert qui vouscaresse et vous réconforte>. \Voici Beni-Ounif qui a été longtemps notre sentinelleavancée sur la route <strong>de</strong> l'ouest. Beni-Ounifcomman<strong>de</strong> Figuig, la gran<strong>de</strong> palmeraie marocaine,ainsi que la vallée <strong>de</strong> la Zousfana. Sans vous rappeler<strong>au</strong>cun souvenir historique, car je n'en aipas <strong>au</strong>jourd'hui le loisir, je vais marcher versTaghit parle couloir si ch<strong>au</strong>d, si lumineux <strong>de</strong> cetteZousfana où les couleurs chatoyantes semblentsuspendues aUx sommets <strong>de</strong>s dunes et <strong>de</strong>s falaisesincan<strong>de</strong>scentes; puis par le Guir et la Saoura, vastesfleuves quaternaires qui charient encore parfoisles e<strong>au</strong>x dévalant <strong>de</strong> l'Atlas marocain; j'atteindraiBeni-Abbès, Kerzaz et ce chapelet d'oasisqui aboutit <strong>au</strong> Gourara. Elles sont resserrées entreles h<strong>au</strong>tes dunes <strong>de</strong> l'erg, le lit du fleuve <strong>de</strong>sséchéet la hammada pierreuse, d'un relief tourmenté,propice <strong>au</strong>x guets-apens, par où les ban<strong>de</strong>s venantdu Tafilalet attaquèrent maintes fois nos convoiset nos détachements.Tandis que Beni-Abbès, assez bien p>ourvue d'e<strong>au</strong>vive, pourrait recevoir un certain développement,la plupart <strong>de</strong>s oasis <strong>de</strong> la Saoura sont condamnéesà végéter misérablement parce quela nappe quiles arrose ne jaillit pas et que l'irrigation <strong>au</strong>moyen d'un système élévatoire, la khotara, quin'est <strong>au</strong>tre que l'antique levier à bascule <strong>de</strong>s fellahségyptiens, <strong>de</strong>man<strong>de</strong> une énorme somme <strong>de</strong>travail dont le résultat ne correspond pas à l'ef-


fort dépensé. La découverte d'une nappe artésienne,jaillissant à un -nive<strong>au</strong> suffisant pour arroserpar simple gravité ces oasis, changerait évi^déminent leurs conditions d'existence.Maisj l'étu<strong>de</strong> géologique du pays ne laissé pasespérer la; découverte d'e<strong>au</strong>x artésiennes pouvantpermettre d'étendre les cultures. Ft d'ailleurs^ laseule ban<strong>de</strong> dé terre cultivable comprise entré làberge g<strong>au</strong>che <strong>de</strong> la Soura et les dunes du grandErg, est si étroite, qu'elle rend illusoire cette ex*tension.La légen<strong>de</strong> qui faisait dé cette vallée, une margnifique avenue <strong>de</strong> palmiers s'est effondrée à làlumière <strong>de</strong>s faits. C'est, en somme, un panvre paysoù l'habitant a <strong>de</strong> là peine à vivre et à se mainte*-nir. Mais ce n'en est pas moins la route naturelledu Gourara, du Touàt et du Tidikelt. Nous n'avonspas le choix entre les obstacles que la nature s'estplu à dresser sur la route saharienne et le couloirparsemé <strong>de</strong> petites tâches verdoyantes qui rendpossible l'accès <strong>de</strong> ces lointaines régions.Les savants géologues FLAMAND et GAUTIER ontdésigné le Gourara, le Touat et le Tidikelt sous levocable « d'archipel touatien » parce qu'ils considèrentsans doute ces oasis comme <strong>de</strong>s ilôts oùla vie huniaine s'est cantonnée, après le <strong>de</strong>ssèchementprogressif du Sahara.Puisque nous l'abordons par le nord, arrêtonsnousquelques instants, chers <strong>au</strong>diteurs,' dans lacapital <strong>de</strong> cet archipel : Timimoun. C'est d'ailleursl'oasis saharienne qui a acquis le plus dé vogue<strong>de</strong>puis que les grands circuits touristiques l'ontcomprise dans leurs itinéraires. Située en borduredu grand erg occi<strong>de</strong>ntal, dont elle se trouve heureusementséparée par une dépression la proté-


- 48 —géant contre un ensablement redoutable, elle domineles dunes qui s'éten<strong>de</strong>nt à l'infini <strong>de</strong>vant elle.L'e<strong>au</strong> qui se déverse dans les multiples petits bassinsalimentant les jardins, provient <strong>de</strong>s contrefortsdu Tadmaït, immense plate<strong>au</strong> central quiemmagasine la précieuse réserve <strong>de</strong> liqui<strong>de</strong>, que<strong>de</strong> trop rares pluies déversent sur sa surface. Par<strong>de</strong>s canalisations souterraines, zigzagant sur <strong>de</strong>skilomètres et <strong>de</strong>s kilomètres, les indigènes ontamené l'e<strong>au</strong> dans l'oasis; c'est un travail gigantes^que qui représente un effort que l'on jugerait surhumainsi on ne savait qu'il est le résultat <strong>de</strong> plusieurssiècles <strong>de</strong> labeur.Timimoun, agrémentée grâce <strong>au</strong> sens artistiqued'un officier, <strong>de</strong> monuments <strong>de</strong> style soudanais enargile rouge et grisâtre, a le don <strong>de</strong> provoquerl'enthousiasme du voyageur. De fait, les flamboiementsdu crépuscule sur les argiles, la verte fraîcheur<strong>de</strong> Foasis, l'or pâle <strong>de</strong>s vagues dé sable seprofilant <strong>au</strong> loin, donnent à cette cité <strong>de</strong>s refletset <strong>de</strong>s couleurs qui enchantent la vue. Conteritonsnousd'un regard superficiel; jouissons <strong>de</strong> l'heureradieuse, mais n'allons pas <strong>au</strong> fond <strong>de</strong>s choses;nous serions sans doute déçus, parce que sous cevoile féerique se cache une gran<strong>de</strong> misère humaine.Sur ce <strong>de</strong>rnier point cependant, je veux me gar<strong>de</strong>rd'exagérer et <strong>de</strong> faire acte <strong>de</strong> pessimisme^ carle Gourara renferme une population <strong>de</strong> 25.000âmes qui paraît avoir, bienque <strong>de</strong> même origine,plus <strong>de</strong> ressort que les <strong>au</strong>tres populations sé<strong>de</strong>ntairesdu Touat et du Tidikelt. Elle est relativementlaborieuse et relativement industrieuse. Toutestd'ailleursrelatif <strong>au</strong> Sahara. Ainsi, lorsque jevous parle du soufflé délicieusement tiè<strong>de</strong> <strong>de</strong>l'hiver, il f<strong>au</strong>t bien vousimaginer, chers <strong>au</strong>diteurs,


Une curieuse agglomération : Tamentit, rappelle I origine juive..,Rebecca à la fontaineLa météorite <strong>de</strong> Tamentit actuellement <strong>au</strong> Muséum d'Histoire Naturelle


^49 —que ce souffle <strong>de</strong>vient brûlant et difficilement supportablel'été.En somme, la vie dans ces régions est extrêmementpénible, même pour les <strong>au</strong>tochtones. Je vousdirai, en quelques mots, dans un, instant, ce qu'estla population <strong>de</strong> ce paj^s et comment se pose leproblème <strong>de</strong> son existence. Auparavant, continuons,si vous le voulez bien, à suivre, par la pensée,la trace <strong>de</strong> la vie dans le Sahara qui se meurt.De la lisière du grand erg occi<strong>de</strong>ntal, dirigeonsnousvers le Touat. Voici Adrar, chef-lieu administratif,créé par nous en bordure <strong>de</strong>s palmeraiesdu Bouda et du Timmi pour être le siège <strong>de</strong> comman<strong>de</strong>mentd'une compagnie <strong>de</strong> méharistes. Com-\ me vous le savez, sans doute, c'est à <strong>de</strong>s <strong>format</strong>ionsmilitaires <strong>de</strong> cette nature qu'incombe le soin; d'assurer la sécurité du Sahara. Ces compagnies; battent l'estra<strong>de</strong> <strong>au</strong> loin sur les routes suivies pari les pillards du sud marocain et du Rio <strong>de</strong> Oro, qui,; avant notre occupation, mettaient en coupe réglée; ces malheureuses oasis.A trente kilomètres <strong>au</strong> sud d'Adrar, une curieuse; agglomération, Tamentit, rappelle l'origine juive<strong>de</strong> quelques-unes <strong>de</strong>s populations qui se sontfixées dans le pays <strong>au</strong> cours <strong>de</strong>s migrations <strong>de</strong>sdifférents âges. Nous y avons trouvé une idole <strong>de</strong>\ l'époque gétule, ainsi que les ruines d'une énormetour dont une partie est construite en maçonnerie<strong>de</strong> pierres. Cette particularité est frappante car,dans ces régions où l'on ne trouve pas une pierreà 50 kilomètres à la ron<strong>de</strong>, toutes les constructionsen moellons d'argile simplement séchés <strong>au</strong> soleil.Une <strong>au</strong>tre curiosité signalait <strong>au</strong>trefois à l'attentiondu voj^ageur, l'oasis <strong>de</strong> Tamentit. Sur l'une<strong>de</strong>s places i>ubliques <strong>de</strong> la petite cité d'argile exis-


— 50 —tait une météorite tombée dans la régionvers letreizième siècle. Elle se trouve actuellement <strong>au</strong>Muséum d'histoire naturelle. C'est un bloc métalliqueen forme <strong>de</strong> champignon pesant750 kilogrammes.Elle était l'objet d'une vénération plussuperstitieuse que religieusecomme une <strong>au</strong>tre météorite,la fameuse pierrenoire <strong>de</strong> la Kaâba à laMecque. Depuis sept siècles une foule <strong>de</strong> femmestouatiennes désireuses d'avoir un enfant se sontassises sur la pierre sacrée. Le plusétonnantc'estque la population que nous pensionsattachée<strong>de</strong>toute son âme et <strong>de</strong> toute la force <strong>de</strong> la traditionà cet objet, a consenti à s'en <strong>de</strong>ssaisir <strong>au</strong> bénéficedu Muséum. Ne croyez pas cependant qu'elle aitfait preuve <strong>de</strong> ce détachement dans le seul intérêt<strong>de</strong> la science française. Des âmes <strong>au</strong>ssi frustes nesont pas sensibles à <strong>de</strong> pareils sentiments et jene s<strong>au</strong>rais leur en faire grief. La Djemaâ, assemblée<strong>de</strong> notables, voyant que les français attachaienttant d'importance à cette pierre du ciel, aconsenti à la laisser enlever moyennant une subvention<strong>de</strong> 30.000 francs dont le montant a été appliquéà l'exécution <strong>de</strong> trav<strong>au</strong>x <strong>de</strong> réfection <strong>de</strong> lafoggara, canalisation souterraine assurant l'irrigation<strong>de</strong> la palmeraie.La légen<strong>de</strong> voulait qu'<strong>au</strong> moment <strong>de</strong> sa chute surnotre planète, la météorite fût d'or pur et que pourmettre d'accord les populations qui se la disputaientles armes à la main, Dieu lachangea en unbloc <strong>de</strong> fer, afin que leur cupidité ne fut plustentée. Ce bloc <strong>de</strong> ferayant, <strong>de</strong> nos jours, tenté,non pas la cupidité, mais la curiosité <strong>de</strong> nos savants,nous avons donné <strong>au</strong>x habitantsquelquesparcelles d'or qui leur ont permis d'<strong>au</strong>gmenter la


51superficie <strong>de</strong> leurs jardins et d'améliorer ainsileurs maigres revenus.Et qui sait si l'imagination <strong>de</strong>s générations futuresne rapprochera pas, un jour, notre geste<strong>de</strong>lalégen<strong>de</strong> primitive, en lui attribuant la significationd'un retour <strong>de</strong> la faveur divine à lapopulationque là pierre du ciel avait <strong>au</strong>trefois diviséeet qui, Sous la tutelle bienfaisante dé la France,a retrouvé la paix et la prospérité !Plus <strong>au</strong> sud, Zaonïet Kounta, Sali, Reggan,ontl'aspect <strong>de</strong> cités médiévales, A l'exemple <strong>de</strong> noscités féodales, elles sont flanquées d'une casbah,véritable châte<strong>au</strong> fort, et même pour laplupart,totalement englobées dans cette casbah dont lesénormes murs d'enceinte, les bastions et les tourellessont soigneusement entretenus. C'est qu'en1effet, les populationssahariennes ont cQnservé,malgré la paix que nous leur assurons <strong>de</strong>puistrente ans, le souvenir très vivace <strong>de</strong>s dangers dutemps passé. Rien ne m'a plus ému, lors <strong>de</strong> lavisite <strong>de</strong> toutes ces oasis, que j'ai faites pendant laguerre avec un peloton <strong>de</strong> méharistes afin <strong>de</strong> calmerl'inquiétu<strong>de</strong> <strong>de</strong> leurs habitants, que les termesdont ils se servaient pour m'exprimer leur reconnaissance: « Autrefois me disaient-ils, nous cultivionsnos jardins avec le fusil en bandoulière etnous n'étions jamais certains <strong>de</strong> pouvoirfairelarécolte <strong>de</strong> nos dattes. Depuis que la France nousprotège, nous travaillons et nous dormons en paix;et si, <strong>au</strong>jourd'hui, tu as vu les guetteurssur nostours, c'est que nous craignons queles Françaisnous abandonnent et que les bandits qui nousrançonnaient ne recommencent leurs rapines»Quel plus beléloge peut-on faire <strong>de</strong> l'action bien-


—I 52 —faisante <strong>de</strong> la France dans ces pays lointains et<strong>de</strong>shérités ? -Zaouïet-Rêggan, dont vous enten<strong>de</strong>z souventparler comme poste <strong>de</strong> relai ou <strong>de</strong> secours <strong>de</strong> noscommunications aériennes et <strong>au</strong>tomobiles versGao, se trouve à l'extrémité <strong>de</strong> la pointe <strong>de</strong> l'archipeltouatien; plus <strong>au</strong> sud c'est le désert absolusur 1,000 kilomètres <strong>de</strong> profon<strong>de</strong>ur, l'épouvantable ;Tanezrouft, sans un brin d'herbe, sans une goutte ;d'e<strong>au</strong>. Mais la ligne <strong>de</strong>s oasis s'infléchit vers l'Est ]et c'est, avec Aoulef, Tit, Inrar, Iu-Salah et*quelquesminuscules palmeraies, la région du Tidi- ikelt qui ferme définitivement ce mince et longcouloir <strong>de</strong> végétation saharienne alimenté, à n'enpas douter, par les e<strong>au</strong>x emmagasinées dans l'immenseplate<strong>au</strong> du Tadmaït dont il forme la ceintureéloignée.***Il y a, <strong>au</strong> Gourara, <strong>au</strong> Touat et <strong>au</strong> Tidikelt, <strong>de</strong>uxsortes <strong>de</strong> populations : la population blanche quise dit d'origine arabe ou zénète et la populationnoire importée du Sénégal et du Soudan par lestraitants d'esclaves et à qui nous avons rendu laliberté, mais qui n'en <strong>de</strong>meure pas moins sous ladominationéconomique et politique <strong>de</strong> la première.Les <strong>de</strong>scendants d'esclaves s'appellent harratins,c'est-à-dire affranchis. Les blancs sont propriétaires<strong>de</strong> la terre et <strong>de</strong> l'e<strong>au</strong>, mais ils croiraientdéchoir en se livrant <strong>au</strong> moindre travail manuel.Ce sont donc les harratins qui cultivent les jardinscomme khammès, c'est-à-diremétayers <strong>au</strong> cinquième.Lorsque j'ai parcouru les oasis en 1917, j'aiétudié <strong>de</strong> près et d'une manière très attentive, la


Aspect <strong>de</strong>s cités médiévalesA l'exemple <strong>de</strong> nos cités féodales, elles sont flanquées d'une casbah,véritable châte<strong>au</strong> fort. ..1917. - La sortie <strong>de</strong> la kasbah d'In-Salah


—153 —situation <strong>de</strong> ces anciens esclaves. Ah ! elle n?estpas brillante. Le cinquième <strong>de</strong>s produits, <strong>de</strong> laterre abandonné <strong>au</strong>métayer harratin représenteà peu près un salaire journalier <strong>de</strong> la valeur <strong>de</strong>75 centimes à 1 franc. Il doit, avec ce salaire <strong>de</strong>misère — et naturellement ce qu'il peut voler àson maître — s'entretenir et entretenir sa famille.Le fruit du palmier dattier qui, dans ces régions,est à la base <strong>de</strong> la nourriture humaine, est heureusementd'un prix relativement faible, <strong>de</strong> 20 à 50francs le quintal. Mais on se rend parfaitementcompte que la population harratine est une. populationsous-alimentée, par conséquent, en état <strong>de</strong>résistance physique assez précaire, si l'on réfléchitque, <strong>de</strong> son travail dépend à peu près uniquementla mise en valeur du pays, on peut déduireque le problème du développement et même dusimple maintien <strong>de</strong>s ressources économiques dé cesrégions est, en l'état actuel, difficile à résoudre..Il f<strong>au</strong>drait, à mon sens, arriver à une modificationcomplète <strong>de</strong> l'étal social <strong>de</strong>s habitants. Cettemodification pourrait résulter d'nne évolutionayant pour objectif une amélioration sensible ducontratdumétayage et l'accession progressive duharratin à la propriété\ xMais cette évoluiionuési silente que malgré faction bienfaisante*><strong>de</strong> notretutelle administrative, pendant les 30 années ^d'occupation,ses effets sont à peine perceptibles. Elleserait plus rapi<strong>de</strong> et "plus radicale partant plus décisive,si nous agissions par voieoTexpropriationmassive, moyennant in<strong>de</strong>mnité naturellement,nous permettant <strong>de</strong> répartir judiei<strong>au</strong>sementunepartie <strong>de</strong>s terres et <strong>de</strong>s parts d'e<strong>au</strong> entre les hàrratins.Ce serait une mesure hardie, Certes, sortantun peu du cadre <strong>de</strong> nos timi<strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s adnii-


- 54 -nistratives; une mesure dont l'application, j'en conviens,présenterait certaines difficultés du point<strong>de</strong> vue politique indigène et du point <strong>de</strong> vue financier.Mon opinion personnelle est que ces difficultésne sont pas insurmontables et que nous n'arriveronspas à résoudre <strong>au</strong>trement le problème. Or,il importe, c'est une nécessité inéluctable, d'apporterun remè<strong>de</strong> efficace à la situation <strong>de</strong>s harratins,si nous ne voulons pas que ces îlots <strong>de</strong> vie humainedisparaissent à plus ou moins longues échéance.La diminution progressive <strong>de</strong> la population,malgré l'ai<strong>de</strong> morale et l'assistance matérielle quenous ne lui avons pas ménagée est un fait. Elleprovient <strong>de</strong> trois c<strong>au</strong>ses principales : exo<strong>de</strong> <strong>de</strong> diverséléments vers <strong>de</strong>s régions plus clémentes,mortalité infantile en proportion exagérée, f<strong>au</strong>te<strong>de</strong> nourriture, suppression <strong>de</strong> la traite <strong>de</strong>s esclavesqui <strong>au</strong>trefois alimentait l'archipel touatien commele sud marocain en main-d'oeuvre d'origine noire.Cette <strong>de</strong>rnière c<strong>au</strong>se, la suppression <strong>de</strong>l'esclavage,étant hors\ du débat, nous <strong>de</strong>vons agir sur les <strong>de</strong>uxpremières. Je ne vois d'<strong>au</strong>tre moyen d'enrayerl'exo<strong>de</strong> et d'atténuer la .mortalité que <strong>de</strong> mettre lapopulation la plus prolifique, la plus laborieuse etla mieux adaptée <strong>au</strong> climat, en situation <strong>de</strong> vivreayee une certaine aisance sur la terrefécon<strong>de</strong>,w >.; -; .^; ^VÏW-'^Ï . "..qu'elleCesVoicigroupésquelques renseignements statistiques surd'oasis :;0n compte dans le Gourara 750.000 palmiers,.produisant 70,000 quint<strong>au</strong>x <strong>de</strong> dattes, dans leTouat 373.000 palmiers produisant 22.000 quint<strong>au</strong>x<strong>de</strong> dattes, dans le Tidikelt 316.000 palmiers produisant18,000quint<strong>au</strong>x. La culture <strong>de</strong>s céréales,


—m.--faite sous les palmiers produit : 11.200 quint<strong>au</strong>x<strong>au</strong> Gourara, 4.500 <strong>au</strong> Touat et 2.300 <strong>au</strong> Tidikelt.La population du Gourara est <strong>de</strong> 25.000 âmes,celle du Touat, <strong>de</strong> 18.000 et celle du Tidikelt <strong>de</strong>12.000.Les éléments statistiques que je viens <strong>de</strong> vousdonner permettent <strong>de</strong> juger <strong>de</strong> l'importance économique<strong>de</strong> cet archipel d'oasis s'échelonnant surune distance d'environ 600 kilomètres.A ne considérer que sa faculté <strong>de</strong> production et<strong>de</strong> consommation, on pourrait peut-être contestercette importance. Mais, à déf<strong>au</strong>t <strong>de</strong> toute considérationsentimentale et humaine, l'intérêt national,nous comman<strong>de</strong>rait, s'il en était besoin, <strong>de</strong> toutfaire pour maintenir dans le Sahara, ces populationset ces îlots <strong>de</strong> verdure. Nous y avons le plusgrand intérêt ne serait-ce que pour rendre possiblele jalonnement <strong>de</strong>s communications intersahariennesqui doivent assurer I a soudure <strong>de</strong>sdiverses parties <strong>de</strong> notre empire africain.AAprès vous avoir décrit, avec trop d'objectivitépeut-être, la partie la plus p<strong>au</strong>vre <strong>de</strong> nos oasissahariennes, il me serait agréable <strong>de</strong> vous parler<strong>de</strong> régions plus clémentes où la culture du palmierdattierest susceptible <strong>de</strong> donner, et donne enréalité, <strong>de</strong>s revenus considérables.Aussi avais-je l'intention, une fois parcouru lecycle <strong>de</strong>s oasis <strong>de</strong> l'archipel touatien, <strong>de</strong> revenirvers le nord en franchissant, sous le méridien <strong>de</strong>Paris, l'immense plate<strong>au</strong> du Tadmaït — le redoutableet sinistre plate<strong>au</strong> comme l'appelle un peu àtort le délicat écrivain Marcelle Vioux — pour


Mais les moments m'êtant comptés, jesuisabor<strong>de</strong>r El^Goléa, la perle du désert, puis Ouargïa,Touggourt, Biskra, la vallée <strong>de</strong> l'Oued R'Hir et laplaine dés ^Zibansi c'est-à-dire, la partie septentrionaledûconstantinois qui constitue la^véritable terre <strong>de</strong> prédilection du palmier dattier.obligé^-chers<strong>au</strong>diteur,l- <strong>de</strong> vous donner ren<strong>de</strong>z-vous àvendredi prochain à la même heure, s'il vous plaîtd'entendre parler <strong>de</strong> ces régions et <strong>de</strong>s possibilitésQu'elles offrent à l'activité française.'- ':h'(-:::^::- A. Rozis.


Le Ta dm aitJe I ai parcouru en 1917 pendant 20 jours <strong>au</strong> pas<strong>de</strong> mon méhari....


ÏIÎLES OASIS SAHARIEN NESET LE PAYS DU PALMIE^DATTIEP2* PARTIEA ma <strong>de</strong>rnière conférence, après avoir parcourule cycle <strong>de</strong>s oasis dé l'archipel touatien, je vousai laissés, chers <strong>au</strong>diteurs, sur le chemin <strong>de</strong> retourvers le nord, près <strong>de</strong> la bordure sud du Tadmaït.Le'Tadmaït, plate<strong>au</strong> sinistre et redoutable oùtant <strong>de</strong> voyageurs sont morts <strong>de</strong> soif, région morneet désolée que hantent seuls les aigles et les v<strong>au</strong>tours! C'est ainsi que Blarcelle Vioux, écrivain <strong>de</strong>talent, s'exprime dans un <strong>de</strong> ses <strong>de</strong>rniers livres surle Sahara.Eli bien, n'en déplaise à Marcelle Vioux, le Tadmaït,que nous commençons à connaître, n'est pasle sinistre plate<strong>au</strong> qu'elle a cru entrevoir <strong>de</strong> son<strong>au</strong>tomobile filant à toute vitesse. Le Tadmaït emmagasine,je vous l'ai déjà dit, toutes les e<strong>au</strong>x quialimentent le grand chapelet d'oasis <strong>de</strong> l'archipeltouatien. A ce titre son relief tourmenté est unbienfait du ciel parce qu'il lui permet d'absorberles pluies diluviennes qui parfois tombent sur sasurface pour les rendre en sources vivifiantes lelong <strong>de</strong> sa ceinture éloignée. Et dans ce relief tourmentécombien <strong>de</strong> ravins et <strong>de</strong> petites vallées commecelles <strong>de</strong> l'Oued Mya renferment une végétation,véritable provi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong>s caravanes ! Je l'ai


- -^58 -parcouru en 1917 pendant 20 jours <strong>au</strong> pas <strong>de</strong> monméhari. En relisant mes notes, je revois le spectaclegrandiose du déclin du jour sur l'immensefalaise qui le bor<strong>de</strong> <strong>au</strong>-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong>s gorges<strong>de</strong> l'Aïn-Guettara, d'où coule un mince filet d'e<strong>au</strong> fraîcheet limpi<strong>de</strong>, où je me suis désaltéré. A ma droite se<strong>de</strong>ssinent <strong>de</strong>s <strong>au</strong>tels prestigieux,sur <strong>de</strong>s marches<strong>de</strong> 200 mètres <strong>de</strong> h<strong>au</strong>t; sur ia g<strong>au</strong>che, <strong>de</strong> magnifiquesdômes étincelants s'élancent vers le ciel.Entre <strong>de</strong>s chaînes découpées, les gigantesquesgours, témoins d'une <strong>au</strong>tre époque, resplendissentsous les <strong>de</strong>rniers rayons du soleil, tandis que lafalaise disparaît, peu à peu, dans <strong>de</strong>s teintes violettes,bleues et définitivement sombres. C'est un <strong>de</strong>splus grandioses et <strong>de</strong>s plus impressionnants spectaclesque le Sahara puisse nous offrir. Mais il nef<strong>au</strong>t pas nous y attar<strong>de</strong>r, chers <strong>au</strong>diteurs, si nousvoulons atteindre El-Goléa.El-Goléa, EI-Ménéa la douce ! son nom évoquedans l'âme du méhariste français et indigène quelquechose <strong>de</strong> paradisiaque. Au cours <strong>de</strong>s ru<strong>de</strong>sétapes <strong>de</strong> la route, les méharistes chaâmbas <strong>de</strong> mafidèle escorte ne me parlaient pas d'<strong>au</strong>tre choseque <strong>de</strong> ce coin béni <strong>de</strong> Dieu. Ils dormaient semblait-ilen rêvant à l'e<strong>au</strong> ruisselante, <strong>au</strong>x fruitssavoureux, à la fraîche verdure qui allaient souspeu remplacer l'e<strong>au</strong> n<strong>au</strong>séabon<strong>de</strong> <strong>de</strong>s outres goudronnées,la maigre jritance <strong>de</strong>s boîtes <strong>de</strong> conserveet la chaleur torri<strong>de</strong> endurée sous le mince toit<strong>de</strong> la tente.El-Goléa, ancienne cité berbère, ne comprenait,<strong>au</strong> moment <strong>de</strong> notre installation, qu'un p<strong>au</strong>vre village,une source etquelques jardins <strong>de</strong> palmiersque les noma<strong>de</strong>s chaâmbas faisaient cultiver par<strong>de</strong>s harratins. De la vieille cité dont les masures


— 59 -en ruines s'êtagent <strong>au</strong> pied <strong>de</strong> la Kalaâ, manlelonfortifié dominant la plaine les légen<strong>de</strong>s célèbrentl'ancienne et bien relative splen<strong>de</strong>ur. Elle <strong>au</strong>raiteu une reine, d'une gran<strong>de</strong> be<strong>au</strong>té naturellement.Ce fut sans doute une petite Kahena berbère ouplutôt une sorte <strong>de</strong> Jeanne HACHETTE qui soutint unsiège victorieux contre l'envahisseur noma<strong>de</strong>.Mais, ce qui est mieux qu'une légen<strong>de</strong>, c'est lafécondité vraiment surprenante que nous avonsapportée à cette oasis, grâce <strong>au</strong>x puits artésiensque nous y avons forés, sur les conseils d'un savantofficier <strong>de</strong>s affaires indigènes, le commandantCAUVET, à qui je suis heureux <strong>de</strong> rendre hommage.Ce n'est plus seulement le saharien qu'une courseépuisante à travers le désert a prédisposé à un enthousiasmefacile; c'est <strong>au</strong>ssi le voyageur venant<strong>de</strong>s rivages enchanteurs dé la Méditerranée quisera étonné, ravi, <strong>de</strong> découvrir sur ce point isolédu Sahara les signes les plus" évi<strong>de</strong>nts <strong>de</strong>.= cettefécondité.Une palmeraie d'Un millier d'hectares et, sousles palmiers, <strong>de</strong>s jardins où les arbres fruitiersles plus divers, abricotiers, poiriers, pommiers,pêchers, citronniers, orangers et mandariniersproduisent <strong>de</strong>s fruits délicieux; <strong>de</strong>s jardinsmerfveilleux où les roses et les fleurs odorantes poUs-| sent à profusion.Deux ombres cependant <strong>au</strong> table<strong>au</strong> : d'aborddifficulté d'écouler certains produits en raison <strong>de</strong>l'éloignement <strong>de</strong>s centres <strong>de</strong> consommation quiconstituent les débouchés naturels; ensuite, insalubritédu pays provoquée par les marais d'épanldage <strong>de</strong>s e<strong>au</strong>x d'irrigation qui favorisent l'endémiepaludéenne.Le premier inconvénient pourra, sans doute,


_ 60 —être atténué sinon complètement supprimé, parl'amélioration <strong>de</strong>s voies <strong>de</strong> communication et <strong>au</strong>ssipar la mise en oeuvre <strong>de</strong> cultures riches, commepar exemple celle <strong>de</strong>s plantes à parfum, dont lesproduits manufacturés sur place peuvent supporter<strong>de</strong>s frais <strong>de</strong> transport élevés. Pour se faireune idée <strong>de</strong> ce que coûtent les transports d'El-Goléa sur les Centres <strong>de</strong> consommation, il f<strong>au</strong>t serappeler que cette belle oasis est séparée duM'Zab, agglomération la plus proche, par une zonedésertique <strong>de</strong> 300 kilomètres <strong>de</strong> profon<strong>de</strong>ur etqu'elle est éloignée <strong>de</strong> 650 kilomètres <strong>de</strong> Djelfa,terminus <strong>de</strong> la voie ferrée.Le second inconvénient disparaîtra rapi<strong>de</strong>mentsi on apporte à résoudre le problème <strong>de</strong> l'assainissementune volonté raisoniiée, tenace et <strong>au</strong>toritaire,secondée par une technicité avertie et appuyéesur <strong>de</strong>s moyens financiers que l'on peutd'ailleurs estimer d'une faible importance.Malgré son éloignement, <strong>de</strong>s tentatives <strong>de</strong> colonisationfrançaise privée sont déjà .éb<strong>au</strong>chées àEl-Goléa; déplus, une colonie agricole <strong>de</strong>vant, enprincipe, vivre <strong>de</strong>s produits du sol a été créée dansl'oasis avec <strong>de</strong>sménages d'orphelins métis, recueillispar les Pères Blancs du Cardinal LAVIGE-RIE et entretenus <strong>au</strong> moyen <strong>de</strong>s subsi<strong>de</strong>s <strong>de</strong> l'Ad-.ministration <strong>de</strong>s Territoires du Sud.L'exposé <strong>de</strong> ce qui doit être fait à El-Goléa i>ourassurer son développement économique me prendraittrop <strong>de</strong>temps et j'ai hâte, dans cette c<strong>au</strong>serierapi<strong>de</strong>, <strong>de</strong> vous parler <strong>de</strong>s oasis situées dansla partie septentrionale du sahara constantinois.Dirigeons-nous donc, chers <strong>au</strong>diteurs, vers Ouargla.Abor<strong>de</strong>rOuargla par une belle journée est unvéritable ravissement. De loin, l'oasis semble


EL-GOLEA. -VuesurlaKalaa


-61 —adossée à la berge <strong>de</strong> l'Oued Mya dont le vastelit sablonneux la contourne vers le Sud. La bergetaillée dans une falaise à pic, forme, sous lesrayons du soleil, comme un diadème incan<strong>de</strong>scentsur la masse <strong>de</strong> verdure qui s'étale à ses pieds enun large croissant. Les dunes qui ferment l'horizon,à l'opposé <strong>de</strong> la berge, s'enflamment a leurtour et c'est, dans ce paysage féerique d'argilesrouges, <strong>de</strong> sables dorés et <strong>de</strong> Verdures sombres,un éhlouissement <strong>de</strong> lumière et <strong>de</strong> couleur. Sousles premiers grands palmiers dont les têtes éeheveléesbaignent dans cette lumière, les noma<strong>de</strong>schaâmbas dressent leurs tentes, et leurs chame<strong>au</strong>xaccroupis atten<strong>de</strong>nt les chargements <strong>de</strong> dattes, <strong>de</strong>sucre, <strong>de</strong> thé et <strong>de</strong> cotonna<strong>de</strong>s qu'ils vont transporter<strong>au</strong> loin dans les cités sahariennes. Mais, cespalmiers épars dans les sables ne servent que <strong>de</strong>décor <strong>au</strong> paysage; ils sont à peu près stériles. Lagran<strong>de</strong> palmeraie d'Ouargla, celle que nous avonsvue couronnée d'un diadème, étale ses frondaisonsle lon^ <strong>de</strong> l'Oued Mya. Elle compte près d'un million<strong>de</strong> palmiers qui produisent environ 80.000quint<strong>au</strong>x <strong>de</strong> dattes.La population d'Ouargla fortement imprégnée<strong>de</strong> sang noir est douce, laborieuse, prolifique etinsouciante Elle n'a pas su conserver la propriété<strong>de</strong> la terre. Les mozabites. d'abord chassés dupays par les envahisseurs arabes, y sont revenusplus tard et ont acquis avec les profits <strong>de</strong> leurnégoce et <strong>de</strong>s prêts d'argent les plus belles palmeraies.Bien que dépossédé par plus riche que lui,le bon Ouargli a l'amour <strong>de</strong> son pays et du palmier.Tout jeune il s'expatrie, voyage, s'installepour quelque temps à Tunis, à Alger et dans lesvilles du littoral; mais sa famille reste là, vivant


._ 62 —<strong>de</strong> peu, attendant patiemment le retour <strong>de</strong> l'enfantprodigue, espoir rarement déçu car le palmierexerce sur lui une sorte d'envoûtement.Rentrons définitivement dans le nord, chers<strong>au</strong>diteurs. Il est temps d'atteindre la gran<strong>de</strong> vallée<strong>de</strong> l'Oued R'Hir, Touggourt, et la région <strong>de</strong>sZibans, Biskra. C'est ici que nous sommes dans laterre <strong>de</strong> prédilection du palmier dattier. Le paysage,be<strong>au</strong>coup d'entre vous le connaissent sansdoute pour l'avoir admiré <strong>au</strong> cours d'un voyagetouristique; et combien <strong>de</strong> peintres <strong>de</strong> grand talentl'ont reproduit ! C'est toujours, dans les vasteshorizons, le même resplendissement <strong>de</strong> lumière;parfois cependant, elle se voile <strong>de</strong> vapeurs transparenteset floues qui en tamisent délicatement lesrayons. Les montagnes et les collines dénudées, calcinées,barrent vers le nord la plaine saharienne,se parent également <strong>de</strong> teintes rouges et violettessous le soleil crépusculaire.Mais... dans la plaine fertile, les taches verdoyantesse multiplient, s'étalent en superficies imposantes;l'e<strong>au</strong> vivifiante ruisselle dans les can<strong>au</strong>x; lescités sont nombreuses et peuplées. C'est Biskra lareine du Sahara, Sidi-Okba la ville sainte, Tolga etses oasis satellites; plus <strong>au</strong> sud, Ourir et M'Raïer,Djamaâ, Touggourt, Temacine et combien d'<strong>au</strong>treencore !La population <strong>de</strong>s Zibans et <strong>de</strong> l'Oued R'Hirs'élève à 175.000 âmes. Le nombre <strong>de</strong> palmiersexistant dans ces régions est <strong>de</strong> 3 millions, dont2 millions sont en plein rapport. Ils couvrent27.000 hectares <strong>de</strong> jardins et produisent 600.000quint<strong>au</strong>x <strong>de</strong> fruits. Le volume d'e<strong>au</strong> provenant <strong>de</strong>spuits artésiens et <strong>de</strong>s sources naturelles dont ondispose pour irriguer ces jardins, représente un


— 63 —débit d'environ 8 mètres cubes à la secon<strong>de</strong>. C'estle débit d'étiage <strong>de</strong> la Moselle à 15 kilomètres àl'aval <strong>de</strong> Toul.Le dattier qui, pour vivre et produire, <strong>de</strong>mandéun climat sec et ch<strong>au</strong>d, mais cependant une irrigationabondante, est ici dans son véritable milieu.11 s'abreuve à la source tiè<strong>de</strong> qui ruisselle à sespieds et, Pété, dans un ciel <strong>de</strong> fournaise, sa têteorgueilleuse abrite, sous ses larges palmes, lesfruits délicats que l'<strong>au</strong>tomne plus doux doit imprégner<strong>de</strong> sa lumière dorée.La majeure partie <strong>de</strong> la population vit largement<strong>de</strong>s produits du palmier dattier et <strong>de</strong>s culturessous-j acentes, légumes et céréales. Ici le problèmehumain ne se pose pas sous la même formeque dans l'archipel touatien, ni même qu'a Ouargla.Nous avons, dans les Zibans et l'Oued R'Hir, uneinfinité <strong>de</strong> petits propriétaires <strong>de</strong> palmiers, quelquesgrands domaines appartenant à <strong>de</strong>s sociétéset à <strong>de</strong>s particuliers, un nombre assez considérable<strong>de</strong> métayers cultivant <strong>au</strong> cinquième, maisjouissant <strong>de</strong> certains avantages sur les culturessous-j acentes, une main-d'oeuvre qui s'égaille dansle Tell en été et revient dans les palmeraies <strong>au</strong>moment <strong>de</strong> la cueillette <strong>de</strong>s dattes. Tout ce mon<strong>de</strong>,en somme, mange à sa faim. Mais, comme partout,l'insalubrité <strong>de</strong>s oasis ayant pour c<strong>au</strong>se lastagnation <strong>de</strong>s e<strong>au</strong>x usées est une question à solutionner.Le pays du palmier doit être assaini, sion ne veut pas laisser péricliter et s'affaiblir lecapital humain qui constitue l'élément essentiel<strong>de</strong> sa mise en valeur.D'<strong>au</strong>tres questions doivent également retenirl'attention et, parmi les plus importantes, se placecelle <strong>de</strong> l'aménagement rationnel <strong>de</strong>s ressources


— 64 -hydr<strong>au</strong>liques; une réglementationsévère doit déterminerles conditions d'utilisation <strong>de</strong>s e<strong>au</strong>x d'irrigation,<strong>de</strong> manière à ne laisser préleversur lanappe artésienne que la quantitéd'e<strong>au</strong> strictementindispensable à la vivification <strong>de</strong> la terre.Nous avons <strong>au</strong>ssi à organiser plus fortement lesétu<strong>de</strong>s expérimentales portant sur l'amélioration<strong>de</strong> la culture du dattier et le traitement <strong>de</strong>s affectionsparasitaires; sur la technique <strong>de</strong> la préparation,<strong>de</strong> la conservation et <strong>de</strong> la présentationfruits.<strong>de</strong>sToutes ces questions font l'objet <strong>de</strong>s préoccupations<strong>de</strong> l'Administration. Leur mise en oeuvre seheurte malheureusement à une insuffisance <strong>de</strong> ressourcesbudgétaires et <strong>de</strong> personnel technique. Ilf<strong>au</strong>dra, pour les résoudre, faire appel à un empruntspécial et créer <strong>de</strong>s emplois nouve<strong>au</strong>x <strong>de</strong>techniciens du palmier. Ah! je sais bien qu'àl'heure actuelle, ces formules ne rencontrent pasla faveur <strong>de</strong> l'opinion publique. Cependant, jen'hésite pas à les préconiser, parce qu'elles me paraissentlargement justifiée par le bénéfice moralet matériel que le pays est appelé à en retirer àbrèveéchéance.Nous avons, d'ailleurs, sous les yeux l'exemple<strong>de</strong> ce qu'ont fait les Américains, en cette matière.Voici vingt ans à peine qu'ils ont introduit le dattieren Californie et qu'ils produisent déjà plus <strong>de</strong>50.000 quint<strong>au</strong>x <strong>de</strong> dattes fines. Leurs plantationssont l'objet <strong>de</strong>s soins les plus avertis et les plusattentifs dirigés, sous le contrôle <strong>de</strong> l'Etat fédéral,par<strong>de</strong> savants botanistes, comme le professeurSWINGLE. En 20 ans, ils ont fait plus <strong>de</strong>progrèsdans la culture du palmier que n'en ont fait lespeuplesorient<strong>au</strong>x en plusieurs siècles etquenous


— 65-àvons fait nous-mêmes <strong>de</strong>puis que nous occuponsl'Algérie, c'est-à-dire, <strong>de</strong>puis un siècle.Notre retard trouve, il est vrai, son excuse dansle milieu social où nous agissons. Nos populationsindigènes sont souvent réfractaires <strong>au</strong>x idées <strong>de</strong>progrès dont elles ne comprennent ni le sens ni lebesoin. Or, nous nous attachons à ne pas heurterd'<strong>au</strong>torité leurs conceptions. Notre politique indigèneest sentimentale et personne ne s<strong>au</strong>rait nousle reprocher. Il ne f<strong>au</strong>t pas oublier que les neufsdizièmés <strong>de</strong>s palmeraies appartiennent <strong>au</strong>x indigènesque nous ne voulons nullement dépossé<strong>de</strong>r,bien <strong>au</strong> contraire.Ce que les Américains ont réalisé en pays neuf,avec <strong>de</strong>s éléments avancés parfaitement aptes àsaisir les avantages <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s culturales rationnellesétait relativement facile. Nous l'avonsbien fait en Algérie pour la culture vitleole..Mais on ne doit pas moins admirer, sans réserve,l'esprit scientifique dans lequel ils ont élaboré etrésolu, semble-t-il,lé problème <strong>de</strong> l'introduction etdu développement <strong>de</strong> la culture rationnelle dupalmier en Californie, et leur exemple doit nousinciter à appliquer en Algérie quelques-unestout<strong>au</strong> moins <strong>de</strong> leur .conceptions et <strong>de</strong> leurs métho<strong>de</strong>sculturales.'. ***En vous parlant du pays du palmier-dattier, j'aivoulu, chers <strong>au</strong>diteurs, m'arrêter plus spécialementdans cette belle région<strong>de</strong>s Zibans et <strong>de</strong>l'Oued R'hir. Nous pouvons,si nous le voulons,porter <strong>de</strong> 27.000 à 40.000 hectares, les surfaces quis'y trouvent complantées en palmiers.Dans cetimmense et magnifique» jardinnouspourrions,


- 66 -avant 20 ans, récolter chaque année plus <strong>de</strong> 120.000tonnes <strong>de</strong> dattes. (Je dis bien 120.000 tonnes,1.200.000 quint<strong>au</strong>x). Vous n'ignorez pas queladatteest non seulement un fruit <strong>de</strong>s plus savoureux,mais encore un fruit dont la valeur nutritive, enraison <strong>de</strong> sa forte teneur en sucre et en vitamines,a <strong>de</strong>puis longtemps, retenu l'attention <strong>de</strong> l'Académie<strong>de</strong> mé<strong>de</strong>cine. On peut donc considérer quel'écoulement <strong>de</strong> cette production sur les marchés<strong>de</strong> France et d'Europe, sera facilement assuré. Et,par bonheur, ne se pose pas, dans le programme <strong>de</strong>mise en valeur que je viens <strong>de</strong> vous esquisser, leredoutable dilemme <strong>de</strong>s productions communes àl'Algérie et à la Métropole...Aussi, quel be<strong>au</strong> champ d'activité offert à l'initiativefrançaise !...-' A .J'ai terminé, chers <strong>au</strong>diteurs, sans avoir pu vousparler d'<strong>au</strong>tres oasis sahariennes cependant biencurieuses, comme celles du M'Zab et du Souf, oùles habitants ont édifié, dit le savant géographeJean BRUNHES, <strong>de</strong>s établissements que l'on peutciter comme un exemple <strong>de</strong> l'effort le plus opiniâtre,le plus méthodique et le plus intelligent, qu'unpeuple ait jamais réalisé pour s'implanter et semaintenir dans un pays, qui, manifestement <strong>de</strong>vaitresterinhabité.Je compte, puisque Radio-Alger veut bien meprêter sa puissante voix, vous en entretenir <strong>au</strong>cours <strong>de</strong> l'<strong>au</strong>tomne prochain.En attendant, je serais satisfait s'il m'était permis<strong>de</strong> penser qu'en parlant <strong>au</strong>x <strong>au</strong>diteurs<strong>de</strong> la Métropole d'un Sahara lointain etmystérieux,français


— 67 -et d'un Sahara plus proche déjà pénétré par lacolonisation française, j'ai pu éveiller leur curiositéet leur inspirer le désir <strong>de</strong> connaître, eux <strong>au</strong>ssi,ces horizons lumineux si vastes, si impressionnantsetparfois si grandioses !ïA. Rozis.


ORGANISATIONMEDICALEDUSAHARAConférence faite à Radios-Algerpar M. le Me<strong>de</strong>cin-eGlonel COSTË,Chef du Service <strong>de</strong> Santé <strong>de</strong>s Territoires du SudHYOIÈNESOGIALE<strong>de</strong>sL'organisation médicale du Sahara, comme cellerégions non sahariennes <strong>de</strong>s Territoires duSud, reste entièrement confiée <strong>au</strong>x mé<strong>de</strong>cins militaires.Chacun <strong>de</strong>s postes sahariens comprend unmé<strong>de</strong>cin. Avant leur envoi dans ces postes sahariens,ces mé<strong>de</strong>cins ont fait un stage à l'InstitutPasteur d'Alger <strong>au</strong> cours duquel ils ont été plusspécialement initiés <strong>au</strong>x principales questions <strong>de</strong>la pathologie saharienne. Ces praticiens généralementjeunes, ar<strong>de</strong>nts, bien préparés à leur tâchepar leur <strong>format</strong>ion professionnelle ont donné<strong>au</strong>x oeuvres d'assistance et d'ïrygiène un développementremarquable. Ils ont été parmi lesmeilleurs agents <strong>de</strong> pénétration pacifique pourl'influence française : ils ont fait aimer la Francepar les populations sahariennes. Ils ne se bornentpas à soigner les mala<strong>de</strong>s qui s'empressent à leursconsultations; ils y font <strong>de</strong> la mé<strong>de</strong>cine préventive,vaccinant contre les maladies épidémiques,traitantles maladies vénériennes par les procédésmo<strong>de</strong>rnes,luttant contre les affections oculaires sifréquentes, poursuivant l'éducation hygiénique<strong>de</strong>s


- 70 -familles, surtout celle <strong>de</strong>s mères; ils ont déjà obtenules résultats les plus réconfortants.Dans chacun <strong>de</strong>s postes sahariens, Ouargla, In-Salah, Adrar, Timimoun, Tamanrasset, Djanet,etc., existe une infirmerie indigène dans laquelleun infirmier indigène et quelquefois une infirmièreindigène secon<strong>de</strong> le mé<strong>de</strong>cin dans les diversesbranches <strong>de</strong> son service.L'assistance publique est assurée par l'intermédiaire<strong>de</strong>s administrations municipales. Les communes<strong>de</strong> ces Territoires inscrivent chaque annéeà leur budget <strong>de</strong>s crédits pour le fonctionnement<strong>de</strong> leurs infirmeries et <strong>de</strong>s divers services d'assistance;elles sont largement subventionnées pourl'accomplissement <strong>de</strong> cette oeuvre charitable, parlebudget <strong>de</strong>s Territoires du Sud.Les soins <strong>au</strong>x mala<strong>de</strong>s sont prodigués soit dansles infirmeries indigènes, soit dans les salles <strong>de</strong>consultations. Chaque poste important possè<strong>de</strong> uneinfirmerie indigène pourvue d'un bon matérieltechnique, comportant à la fois <strong>de</strong>s loc<strong>au</strong>x pourla visite quotidienne <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s et <strong>de</strong>s sallesd'hospitalisation. Quelques-uns, très mo<strong>de</strong>rnes,possè<strong>de</strong>nt même un cabinet <strong>de</strong>ntaire et un service<strong>de</strong> radiologie. L'amélioration <strong>de</strong>s infirmeries anciennesou plutôt leur remplacement par <strong>de</strong> nouvelles<strong>format</strong>ions répondant mieux <strong>au</strong>x besoins actuels,est poursuivie méthodiquement.Dans les postes secondaires existent <strong>de</strong> simplessalles <strong>de</strong> consultations où les mala<strong>de</strong>s reçoiventchaque jour d'un infirmier <strong>au</strong>xiliaire, les soinsélémentaires que réclame leur santé en attendantd'être visités par le mé<strong>de</strong>cin lors <strong>de</strong> ses tournéespériodiques. Le programme poursuivi actuellement


- 71 -consisté à multiplier le plus possible ces centresmédic<strong>au</strong>xsecondaires.L'organisation existante fonctionne dans lesmeilleures conditions possibles. Les consultantsviennent chaque année plus nombreux <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r<strong>au</strong>x mé<strong>de</strong>cins les secours <strong>de</strong> leur art. Les femmesmême, restées longtemps réfraciaires, se ren<strong>de</strong>nt<strong>au</strong>jourd'hui en nombre appréciable <strong>au</strong>x consultationsdès infirmeries ou <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt le mé<strong>de</strong>cin àdomicile.Le nombre <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s venus consulter dansles infirmeries indigènes du Sud était en 1920 <strong>de</strong>190.000. En 1929 ce nombre montait à 365.000. Laprogression n'a cessé <strong>de</strong> s'accroître régulièrementchaque année et te nombre <strong>de</strong>s consultants a dépasséen 1932, 500.000, chiffre presque égal à celui<strong>de</strong> la population entière <strong>de</strong>s Territoires du Sud.Le traitement <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s n'est plus <strong>au</strong>jourd'huile seul souci <strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>cins sahariens. Ils s'efforcentà prévenir les maladies, à dépister et à combattrepar les mesures appropriées les plus gran<strong>de</strong>smaladies sociales, trachome, syphilis, tuberculose,variole, paludisme.La lutte contre les affections oculaires, trachomeet conjonctivites aiguës, a pris dans ces <strong>de</strong>rnièresannées, une extension nouvelle. Les ophtalmies <strong>de</strong>toute nature sont très fréquentes parmi les populationssahariennes. La conjonctivite granuleuse,en particulier, fait nombre <strong>de</strong> borgnes ou <strong>de</strong> <strong>de</strong>miaveugles<strong>au</strong>x cornées opaques pour qui, même sousla claire lumière du ciel saharien, la nature s'envelopped'un perpétuel brouillard. Elles constituentun gros facteur <strong>de</strong> déchéance physique pourles mala<strong>de</strong>s et d'infériorité économique pour la


— 72 —collectivité. Le nombre <strong>de</strong>s enfants en particulierqui en sont atteints est considérable surtout parmiles populations sé<strong>de</strong>ntaires; la proportionest<strong>de</strong>80% à Ouargla, un peu moins à Tamanrasset etD j anet. Etant donné, d'une part, l'extrême diffusion<strong>de</strong> la maladie-et le nombre <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s,d'<strong>au</strong>tre part, les conditions <strong>de</strong> vie, les moeurs,l'état commun <strong>de</strong> p<strong>au</strong>périsme <strong>de</strong>s populations sahariennes,les services médic<strong>au</strong>x se heurtent à dèsobstacles très sérieux.Depuis quelques années cependant la collaboration. <strong>de</strong>s nié<strong>de</strong>cins et <strong>de</strong>s instituteurs a améliorécette situation sanitaire d'une façon appréciableparmi la population <strong>de</strong>s écoles. Chaque année àla rentrée <strong>de</strong>s classes tous les élèves sont examinéspar les mé<strong>de</strong>cins qui renouvellent ces visites périodiquementdans le courant <strong>de</strong> l'année scolaire. Aucours <strong>de</strong> ces visites, ils donnent <strong>au</strong>x instituteurstouslesrenseignements concernant la santé <strong>de</strong>leurs élèves. Ces instituteurs veillent chaque jourà envoyer <strong>au</strong> mé<strong>de</strong>cin, les élèves ayant besoin <strong>de</strong>soins. Eux-mêmes, chaque jour, suivant les indications<strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>cins et <strong>au</strong> moyen <strong>de</strong> médicamentstrès simples qui leur sont confiés, donnent àla fin <strong>de</strong> la classe <strong>de</strong>s soinsélémentaires.prophylactiquesEn <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> cetteprophylaxie scolaire, la luttecontre les affections oculaires est poursuivie dansun grand nombre <strong>de</strong> centresanti-ophtalmiques,les Bit-El-Aïnin ou maisons <strong>de</strong>s yeux, dans lesquellesun infirmier <strong>au</strong>xiliaire spécialement instruità cet effet, donne à chaque mala<strong>de</strong>, dansl'intervalle <strong>de</strong>s tournées du mé<strong>de</strong>cin, les soinsprescrits par celui-ci.Il est hors <strong>de</strong> doutequ'une amélioration est déjà


— £.3 -constatée. Les complications du côté <strong>de</strong> la cornéesont moins fréquentes, surtout parmi la populationinfantile scolaire. A la rentrée <strong>de</strong>s classes,sans doute, lé nombre <strong>de</strong>s optalmies aiguës esten <strong>au</strong>gmentation, parce que la surveillance médicalescolaire ne peut s'effectuer pendant la pério<strong>de</strong><strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s vacances et que les enfants neviennent plus alors régulièrement se faire soignerà l'infirmerie. Mais rapi<strong>de</strong>ment après la rentrée<strong>de</strong>s classes, sous l'influence <strong>de</strong>s soins pratiqués,ces poussées aiguës disparaiss entâtes menaces <strong>de</strong>complications et la contagiosité font place à <strong>de</strong>saméliorations et souvent à la guéris on complète.Les maladies vénériennes, fréquentes dans leSahara font partie <strong>au</strong> même titre que les maladiesépidémiques les plus graves <strong>de</strong>s affectationstransmissibles qui compromettent la santé <strong>de</strong>s individuspar leurs manifestations immédiates1- etmenacent l'avenir <strong>de</strong> la race <strong>au</strong>ssi bien par lesdéchets énormes qu'elles déterminent dans lesnaissances que par les infirmités qu'elles occasionnentchez les enfants et l'affaiblissement qui en-résulte chez les adultes. Elles constituent ainsi undanger social dont la prophylaxiefait l'objet <strong>de</strong>spréoccupations constantes <strong>de</strong>s services sanitaires,non seulement en vue d'éviter leur propagationmais encore dans le but d'essayer d'en faire progressivementdisparaître les origines.La lutte contre ces maladies dans le Sahara estpoursuivie avec activité par les mé<strong>de</strong>cins militaires<strong>de</strong>s postes. Ils disposent<strong>de</strong> tous les médicamentsnouve<strong>au</strong>x, d'un prix élevé sans doute, maisqui abrègent considérablement la durée <strong>de</strong>s acci<strong>de</strong>ntscontagieux. Et il f<strong>au</strong>t reconnaître queles


-—?74 ~populationssahariennes comprennent parfaitementcombien cette lutte est poursuiviedansleurpropre intérêt;', ils-viennent,, en général très volontiers<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>au</strong>x cliniques les soins que nécessiteleur état.La tuberculose relativement peu fréquente parmiles tribus purement noma<strong>de</strong>s qui vivent <strong>au</strong>grand air sous la tente, s'pbserve plus fréquemmentparmi les populations sé<strong>de</strong>ntaires <strong>de</strong>s ksourssahariens où elle c<strong>au</strong>se d'assez nombreux décèsparmi les enfants du premier âge.Les c<strong>au</strong>ses, engénéral, ne sont pas différentes <strong>de</strong> celles que l'onobserve ailleurs. Les populations sahariennes sonttrès p<strong>au</strong>vres; la plus gran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong>s habitantssont <strong>de</strong>s sous-alimentés habituels et dans ces conditions,les organismes sont moins résistants quandils viennent à être infectés par le bacille tuberculeux.Les contacts plus fréquents avec les européens.paraissent <strong>au</strong>gmenter le <strong>de</strong>gré d'infectiontuberculeuse parmi les populations <strong>de</strong>s oasis sahariennes.De nombreuses recherches ont été poursuiviesdans ces <strong>de</strong>rnières années par les mé<strong>de</strong>cinsmilitaires <strong>de</strong>s Territoires du Sud, avec la collaboration<strong>de</strong> l'Institut Pasteur d'Alger et grâce à l'emploi<strong>de</strong> là métho<strong>de</strong> <strong>de</strong>s cuti-réaction à la tuberculine,à l'effet d'établir ce <strong>de</strong>gré d'infection tuberculeuseLa missionscientifiqueduHoggar en 1928a établi que l'in<strong>de</strong>xtuberculinique total <strong>de</strong>s Touaregdu Hoggar était l'un <strong>de</strong>s moins élevés qui aientété constatés dans lesrégions sahariennes <strong>de</strong> l'Algérie.Il est <strong>de</strong> 18% alorsqu'<strong>au</strong> Gourara et <strong>au</strong>Tidikelt, par exemple, il monte à 40 %. L'infectiontuberculeuse est d'ailleurs plus marquée chez lesindigènes<strong>de</strong> race blancheque chez les négroï<strong>de</strong>s,


— .75—très adaptés <strong>au</strong> pays, <strong>au</strong> climat et à ses privations.La lutte contre la tuberculose parmi les populationssahariennes est particulièrement ardue.Les moeurs, la façon <strong>de</strong> vivre <strong>de</strong>s ksouriens souvententassés dans <strong>de</strong>s loc<strong>au</strong>x exigus, couchant <strong>au</strong> contactdu sol souillé fréquemment par les déjections<strong>de</strong> toutes sortes et be<strong>au</strong>coup d'<strong>au</strong>tres c<strong>au</strong>ses ren<strong>de</strong>ntle problème difficile.L'action du service médical tend <strong>au</strong>jourd'hui àpoursuivre la prémunition <strong>de</strong> ces populations par<strong>de</strong>s vaccinations. La prémunltion <strong>de</strong>s jeunesenfants par le vaccin B.C.G, par voie buccale estpossible : elle n'a pas eu be<strong>au</strong>coup d'a<strong>de</strong>ptes jusqu'àce jour parmi les populations sahariennes.Peut-être obtiendra-t-on <strong>de</strong> meilleurs résultatslorsqu'on pourra vaccinerpar voie sous-cutanée ;cette question fait actuellement l'objet <strong>de</strong> recherches<strong>de</strong> la part <strong>de</strong> mé<strong>de</strong>cins.Le paludisme est endémique dans la plupart <strong>de</strong>soasis sahariennes où l'existence <strong>de</strong> nombreusesmares d'e<strong>au</strong> stagnante jointe à l'élévation <strong>de</strong> latempérature pendant la majeure partie <strong>de</strong> l'annéese prête à la création <strong>de</strong> gîtes d'anophèles dontcertaines espèces ont été reconnues comme lesré-agents actifs <strong>de</strong> propagationdu paludisme.Ilsulte <strong>de</strong>s observations faites que cette affectiontend "à diminuer d'une façon générale<strong>de</strong> fréquenceet surtout <strong>de</strong> gravité. Cette diminution <strong>de</strong> la morbiditémalarienne est la conséquence<strong>de</strong>smesures<strong>de</strong> prophylaxie rationnelle qui y sont appliquées.Les moyens<strong>de</strong> lutte employésdans le Sahara nesont pas différents <strong>de</strong> ceux employésdans tousles pays à malaria.En ce qui concerne la variole, <strong>au</strong>trefois si fré-


...-H-V76 -quente, et qui a c<strong>au</strong>sé en particulier tant <strong>de</strong> cécités,on peut dire qu'elle a pratiquement disparu <strong>de</strong>ces régions, grâce <strong>au</strong>x bienfaits <strong>de</strong> la vaccinationlargement répandue et grâce à la ténacité et <strong>au</strong>dévouement <strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>cins sahariens. Les résultatsheureux <strong>de</strong> cette vaccination ont été reconnus partoutes les populations <strong>de</strong>s Territoires du Sud etlors <strong>de</strong>s tournées périodiques <strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>cins, nombreuxsont les hommes, les enfants et même lesfemmes qui profitent <strong>de</strong> cette métho<strong>de</strong> d'immunisationcontre une maladie qu'ils savent si redoutable.La vieille et dangereuse métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> la varionsation si en honneur <strong>au</strong>trefois parmi eux a totalementdisparu. Il est juste <strong>de</strong> dire que pour l'application<strong>de</strong> la vaccination on s'efforce <strong>de</strong> respecterle plus possible les moeurs et coutumes indigènes.C'est ainsi qu'il est recommandé <strong>de</strong> réunir lesfemmes et les filles en un ou plusieurs loc<strong>au</strong>x distinctsoù le mé<strong>de</strong>cin pénètre seul; en d'<strong>au</strong>trespoints, les femmes sont vaccinées par une infirmièrespécialement dressée ou par <strong>de</strong>s Soeurs Blanches.En respectant ainsi dans toute la mesure possibleles moeursindigènes, les résultats obtenus ontété excellents puisqu'il n'a.plus été observé d'épidémie<strong>de</strong> variole dans ces <strong>de</strong>rnières années, dans lesOasissahariennes.Letyphus est endémique dans toute l'Afrique duNord. Aux années <strong>de</strong> disette correspon<strong>de</strong>nt, engénéral, <strong>de</strong>s poussées <strong>de</strong> cette maladie épidémique.Aussi <strong>de</strong>s dispositions ont-elles été prises pourcombattre le mal dans toute la mesure possible.En <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s mesures tendant à ravitailler lesmiséreux, à surveiller les gens suspects, à limiterou à empêcher l'extension <strong>de</strong> la maladie d'un cen-


Présentation <strong>au</strong>mé<strong>de</strong>cin <strong>de</strong>Laghou^t <strong>de</strong>jeunes nourrissons


^'77-tre à un <strong>au</strong>tre, <strong>de</strong>sorganismes spéci<strong>au</strong>x, centresdépouilïage, ont été créés dans touts les centres.On sait, en effet, que l'agent actif du typhus esttransmis par les poux. Grâce <strong>au</strong>x mesures prises,on n'observe plus, dans les Territoires sahariens,<strong>de</strong> grosses épidémies <strong>de</strong> typhus, les foyers <strong>au</strong>ssitôtconnus sont rapi<strong>de</strong>ment circonscrits et éteints,grâceàl'abnégation et <strong>au</strong> dévouement sans limite<strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>cins militaires, abnégation qui va parfoisjusqu'<strong>au</strong> sacrifice <strong>de</strong> leur vie.Nous avons fait ressortir qu'à la base <strong>de</strong> toutesles maladies sociales, une <strong>de</strong>s c<strong>au</strong>ses générales <strong>de</strong>déficience parmi ces populations sahariennes excessivementp<strong>au</strong>vres était une alimentation insuffisante.A cette c<strong>au</strong>se, l'administration cherche àremé<strong>de</strong>r dans la plus gran<strong>de</strong> mesure par l'organisation<strong>de</strong> cantines scolaires qui fonctionnent déjàdans un certan nombre dé localités et qui serontprogressivement étendus <strong>au</strong>x <strong>au</strong>tres. Il y a be<strong>au</strong>coupà attendre <strong>de</strong> cette excellente] mesure.L'oeuvre <strong>de</strong> l'assistance <strong>au</strong>x mères et <strong>au</strong>x nourrissonsa été étendue <strong>au</strong>x Territoires sahariens<strong>de</strong>puis l'année 1927. Ces six années <strong>de</strong> fonctionnementpermettent d'apprécier les premiers résultatsqui sont importants déjà dans les oasis sahariennes.De très nombreux enfants sont visités chaquemois par le mé<strong>de</strong>cin pendanttoute leur premièreannée, et il est certain quenombre d'entre euxont été s<strong>au</strong>vés par cette surveillance médicale assidue.Ainsi donc, l'organisationsanitaire <strong>de</strong>s régionssahariennes, conçue scientifiquement,tout en assurantdans les meilleures conditions possibles,le


— 78-tralternent <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s, est en même temps particulièrementdirigée en vue <strong>de</strong> la prévention <strong>de</strong>smaladies sociales. L'oeuvre <strong>de</strong> ces organismes estdéjà considérable en égard surtout <strong>au</strong>x difficultésrencontrées. Sans doute il reste be<strong>au</strong>coup à faire;niais l'organisation est créée, le programme estétabli, et si la tâche est longue et difficile, lorsqu'ona vu à l'oeuvre ceux qui sont chargés <strong>de</strong> laréaliser; mé<strong>de</strong>cins militaires et officiers sahariens_qui administrent ces territoires, on ne peut qu'envisagerl'avenir avec la plus entière confiance.Mé<strong>de</strong>cin-ColonelCOSTE.


Laliaisonpostalemilitaireà travers le Saharapar le Colonel WEISS,Commandant le 1 'Groupe d'Aviation d'AfriquePendant <strong>de</strong>ux mois et <strong>de</strong>rnl, <strong>au</strong> printemps <strong>de</strong>1933, leséquipages militaires <strong>de</strong> l'aviation d'Algérieont assuré un trafic postal régulier <strong>au</strong>-<strong>de</strong>ssusdu Sahara et relié en <strong>de</strong>ux jours Alger à Gao, sur lefleuve Niger, Le troisième jour, le courrier atteignaitles princip<strong>au</strong>x centres <strong>de</strong> la colonie du Niger,Niamey et Zin<strong>de</strong>r. L?itinéraire a près <strong>de</strong> 4.000 kilomètres.Cette expérience <strong>de</strong> ligne, <strong>de</strong> liaison ponctuelle,décidée par le Ministre <strong>de</strong> l'air, est une date dansl'histoire <strong>de</strong> notre aviation et <strong>de</strong> notre colonisation.Pour la première fois, la traversée du plus granddésertdugloben'est plus commentée à la manièred'un raid, d'une performance. Elle inspirait, il ya quelques années à peine, le même effroi qu'<strong>au</strong>xanciens Grecs, le passage <strong>de</strong>s colonnes d'Herculeou <strong>au</strong>x marins <strong>de</strong> Vasco <strong>de</strong> Gaina les vagues géantes<strong>de</strong> l'hémisphère sud. Les escadrilles s'y promènent<strong>au</strong>jourd'hui et habitent, dans cette mort avecune entière sérénité.Le désert est une extraordinaire école d'adresseet d'énergie, presque indispensable à la <strong>format</strong>iond'un pilote. Avec son ciel <strong>de</strong> cristal, la nappe verte<strong>de</strong> ses oasis et même son affreux néant, il vous


— '80 —attire à lui comme un abîme. Une fois pris, on nes'en détache plus.Pour mener à bien l'entreprise postale, on s'estdonc tout naturellement adressé <strong>au</strong>x soldats <strong>de</strong>l'air du Sahara, qui, d'une conscience haletante etles yeux agrandis, atten<strong>de</strong>nt toujours que sonnel'heure du bled. Les soldats ont toujours précédéles civils <strong>au</strong>x colonies sur toutes les routes. La loiest générale. Cet honneur est leur fait et ne peutleur être ôté. Dans l'ordre aéron<strong>au</strong>tique ils sont,en outre, <strong>de</strong>s pionniers économiques puisque, <strong>de</strong>toute façon, là ou ailleurs, leurs moteurs tournentet leurs avions s'aventurent. Leurs <strong>au</strong>rores sontmoins paresseuses à se lever, selon l'expression<strong>de</strong> LA FONTAINE. Un jour vient où ils passentle flambe<strong>au</strong>... mais c'est <strong>au</strong> dénouement.Le succès spontané <strong>de</strong> la ligne qu'ils ont crééeprouve que les missions aéron<strong>au</strong>tiques ne sontjamais si différentes d'esprit et <strong>de</strong> nature qu'onle croit et révèle à -l'aviation française la notion<strong>de</strong> son unité.La route <strong>de</strong> Gao démontre <strong>au</strong>ssi une vérité ancienne,mais sujette à éclipse dans l'opinion. LaFrance possè<strong>de</strong> à sa porte un Empire africain d'unseul tenant, grand comme l'Europe. Le bloc formépar l'Algérie, la Tunisie, le Maroc, l'Afrique Occi<strong>de</strong>ntaleet l'Afrique Equatoriale Françaises est lacréation du génie colonial et civilisateur le plusinouï qui fût jamais. L'armée d'Afrique a étél'outil, l'expression concrète <strong>de</strong> ce génie.Les aphorismes sur les métho<strong>de</strong>sanglaises,italiennes,portugaises, lesquelles ont chacune leurvaleur et leur vertu, ne résistent pas à la perspicacitéd'un voyageur impartial. Dès qu'on quittenotre territoire on entre dans leroy<strong>au</strong>me du mi-


Leséquipages quionteffectué lapremière liaison postale Alger-Gao (14Mars 1933).Deg<strong>au</strong>che àdroite: Caporal-Chef LAMUR (pilotant l'avion postal); leColonel WEISS; leSergent pilote PRADIER; leChef mécanicien DALICIEIJX,


- Bl —rage. Comparez lesvingt-cinq ans <strong>de</strong> Maroc <strong>de</strong>LYAUTEY avec le siècle et <strong>de</strong>mibritannique<strong>au</strong>xIn<strong>de</strong>s.Comme nous mettons une souplesse d'Alcibia<strong>de</strong>ànousdénigrer nous-mêmes, il est bon que l'aviateur,qui a « nomadisé » partout et tâté <strong>de</strong> toutesles escales, soulève un coin du voileAu milieu du blocroc et <strong>de</strong>français, une mer <strong>de</strong> sable, <strong>de</strong>montagne : le Sahara — plus sévère àfranchir que la mer. Notre oeuvre africaine nevivra qu'à condition d'en faire un lac intérieurdont les <strong>de</strong>ux rives, Afrique du Nord et Soudan,soient rapprochées par <strong>de</strong>s communications constanteset sûres. Celles-ci s'imposent sous leurs aspectsdivers : méhari, <strong>au</strong>to, avion, chemin <strong>de</strong> fer— <strong>au</strong>cune locomotive ne se substituant tout à faità l'<strong>au</strong>tre. Au Sahara l'<strong>au</strong>to et l'avion <strong>au</strong>ront précédéle train.Cette circulation Intense est un instrument impérialà créer. Tout français doit s'incliner <strong>de</strong>vantses <strong>de</strong>ux justifications :1° L'<strong>au</strong>gmentation <strong>de</strong>s transactions commercialesentre l'Afrique du Nord et les colonies <strong>de</strong> l'AfriqueOcci<strong>de</strong>ntale et <strong>de</strong> l'Afrique Equatoriale (échangeséconomiques faciles à décupler en quelquesannées);2° Notre sécurité militaire qui exige le contrôle<strong>de</strong> toute l'immensité où nous sommes engagésetlé transport rapi<strong>de</strong> <strong>de</strong> l'armée d'Afrique vers laMéditerranée. Dès à présent grâceà notre bienfaisantepolitique indigène et à l'aviation son alliée,serait impossible un coup dans le genre<strong>de</strong>celui que les agitateursturcs et allemands ontmonté <strong>au</strong> désert, en 1916, et qui nous a valu l'insur-


avia-CAULD.: :C'est à ces gran<strong>de</strong>schoses que songentlesteurs en écoutant tourner leurs hélices <strong>au</strong>-<strong>de</strong>ssusrection sendussiste et l'assassinat du Père <strong>de</strong> FOU-du Tamezrouft, plus sec et plus dur que le ciment;en parcourant leur ligne postale —la seule <strong>au</strong>mon<strong>de</strong> qui traverse 3.000 kilomètres <strong>de</strong> désert sansmatériel ni personnel <strong>de</strong> relais.Alger-Gao-Zin<strong>de</strong>r, par l'aviation militaire ! IlWya pas diéntréprise d'une plus frémissante intelligenceni d'exemple d'une force pacifique mobiliséeplus à propos.Après mille kilomètres <strong>de</strong> Tànezrouft l'arrivéesur le Nigerest pour l'aviateur une joie physique.Le Tanezroiiit, c'est le détachement suprême;mais le fleuve, <strong>de</strong>viné <strong>de</strong> loin par temps clair, vousrattache <strong>au</strong> mon<strong>de</strong> et délie l'énigme humaine quepose le fier désert.Le bled, comme "la'nuit, fait briller les diamants,pare le fleuve d'une vertu singulière. Auxh<strong>au</strong>tes e<strong>au</strong>x et vu du ciel, le Niger s'avance, largementétalé, monstrueuse coulée violette à traversl'Afrique.Ces impressions qui sont à <strong>de</strong>ux pas <strong>de</strong> nousdureront <strong>au</strong>tant que nous : d'abord, laplaine<strong>de</strong>gravier à l'infini, sans un soupçon <strong>de</strong> végétationou d'érosion, un cercle d'horizon comme celui <strong>de</strong>la mer sans Fin égalité <strong>de</strong>svagues; puis les markoubasdu Tilemsi déjà moins inhumains; enfinle ruban humi<strong>de</strong>, le Thalassa ! Thalassa ! <strong>de</strong>sgrecs,douceurl'airdutonique promis <strong>au</strong>x poumons secs, larivage, la fin du sable, le revoir,l'amitié, le philtre <strong>de</strong> vie... Tout rayonne : voici le


Lac<strong>au</strong>sette àl'atterrissage. -LesSahariens entourent lesaviateurs et s'intéressentàlaliaison postale Alger-Gao.


— 83 -fleuve ! Elle a été plus d'une fois pour l'aviateurdouce et consolante la vision <strong>de</strong> l'e<strong>au</strong> à l'horizon...L'aviation française a fait <strong>de</strong> Gao la plaque tournante<strong>de</strong> ses Itinéraires d'Afrique. De Gao, l'avionpeut rayonner sans difficulté vers Dakar, vers nosportes du golfe <strong>de</strong> Guinée, Konakry, Abldjean,Grand Bassam, Lomé, Éotonou, Douala, et versnos bases hnportantes du Tchad et <strong>de</strong> l'Afriqueéquatoriale. L'équipement en terrains d'escale <strong>de</strong>toutes ces régions est d'une perfection minutieuse^râce à la pensée continue <strong>de</strong>s chefs <strong>de</strong> l'aviation<strong>de</strong> Dakar, <strong>de</strong>s Tùlasnie, <strong>de</strong>s Gama, <strong>de</strong>s Bouscatqui ont successivement veillé sur cette , oeuvreunique.Gao doit s'attendre à voir sa gran<strong>de</strong>ur tomber<strong>au</strong> profit <strong>de</strong> sa voisine Zin<strong>de</strong>r, (à 1.100 kilomètresplus à l'est sur le rése<strong>au</strong> routier <strong>de</strong> notre Afriqueocci<strong>de</strong>ntale) qui sera reine et maîtresse <strong>de</strong>toutes les communications le jour où nous ouvrirons<strong>au</strong> trafic aérien, sans solution <strong>de</strong> continuité,l'axe central du Sahara. Ce <strong>de</strong>rnier n'a été parcouruque jusqu'<strong>au</strong> Hoggar.Dès que le tronçon désertique Tamanrasset-Agadès, <strong>au</strong>jourd'hui reconnu, sera régulièrementexploité, la ligne directe Alger-Zin<strong>de</strong>rdétrôneral'itinéraire actuel par Gao, parce que plus courte<strong>de</strong> 1.000 kilomètres et parce que riche <strong>de</strong> ressourcesen puits : c'est le vrai chemin du Tchad, duCongo, <strong>de</strong> Madagascar.Les pilotes, les touristes aériens <strong>de</strong> la ligneneconnaîtront plus l'émotion <strong>de</strong> déboucher sur leNiger après le Tanesrouft fatal. Qu'ilsse hâtent,


- 84 -avant <strong>de</strong> s'engager sur une voie trop pratique, <strong>de</strong>jouir <strong>de</strong> cette image : le fleuve d'espérance succédantà mille kilomètres <strong>de</strong> ciment et <strong>de</strong> poussière.*Gao ! chef-d'oeuvre d'illusion et <strong>de</strong> rêve— Je veux boire avec rage, dit l'aviateur enpénétrant dans son humidité ch<strong>au</strong><strong>de</strong>.-—Pourvu que je ne m'anéantisse pas avant <strong>de</strong>le revoir ! dit l'aviateur en le quittant.Les bordjs m<strong>au</strong>ves et rouges sont alignés lé long<strong>de</strong> l'e<strong>au</strong> sous Pombrage<strong>de</strong>s caroubiers. L'e<strong>au</strong>reflète feuillage et murs multicolores. Des négrillonsnus, <strong>au</strong> ventre déformé, pat<strong>au</strong>gent. Des piroguessont amarrées sous les arbres pleins <strong>de</strong> bengalis.L'hélice du vapeur qui passe soulève <strong>de</strong>sgerbes <strong>de</strong> bulles.Mais ce qui est plus que tout réparateur <strong>de</strong>sblessures du Tanesrouft, symbole d'adversité et<strong>de</strong> matière, c'est le bleu du Niger, un bleu indéfinissableet comme il n'en existe nulle part ailleurs.On le respire, on le sent transparent, incertain,filtré, et à chaque secon<strong>de</strong> changeant. Le Nigern'est plus, quand on rase la surface <strong>de</strong> l'e<strong>au</strong>, legros serpent sombre <strong>de</strong> tout à l'heure qui coupeen <strong>de</strong>ux l'Afrique : c'est un jardin d'e<strong>au</strong> qu'uneforêt <strong>de</strong> fleurs et <strong>de</strong> plantes ensevelit sous lescorolles et les feuilles.Une f<strong>au</strong>ne ailée innombrable s'insinue, sansremuer une tige, à travers ce dédale végétal :hérons, grues couronnées, canards souffleurs,oise<strong>au</strong>x marabouts, en troupe immobiles. On lesdirait <strong>de</strong> porcelaine; soudain, elles s'envolent à<strong>de</strong>ux mètres <strong>de</strong> lapirogue, poursuivies par <strong>de</strong>s


LeColonel WEISS atroqué sonavion contre unepirogueetprofite <strong>de</strong>sonséjour àGaopourexcursionner surlefleuve.


— 85 -coups <strong>de</strong> fusil. Lésramener à bord l'hécatombe.négrillons plongent pourDe-ci, <strong>de</strong>-là, la drôle <strong>de</strong> mine d'un cheval oud'un boeuf, <strong>au</strong>x pattes invisibles, abandonné surune petite île à fleur d'ê<strong>au</strong> et qui semble <strong>de</strong>bout surlé fleuve. Des nuages d'oise<strong>au</strong>x blancs, Tes piqueboeufs,sont posés sur leur dos et les picorent.Gao ! Tout est oublié : l'aspect <strong>de</strong> solitu<strong>de</strong> duTanesrouft, le maquis <strong>de</strong>s ouadi morts, la terrebalafrée <strong>de</strong> cassis, le néant j<strong>au</strong>ne et pierreux...Iln'y a plus que le bleu, l'indéfinissable bleu duNiger...Lieutenant-Colonnel Pierre WEISS.


RallyeAérienSaharienRESULTATSTECHNidUESLe nombre <strong>de</strong>s engagés était limité par le règlementà 60 avions :27engagements ont été recueillis par F Aéro-Club <strong>de</strong> France et 33 par les Aéro-Clubs <strong>de</strong> laFédération aéron<strong>au</strong>tique Nord-Africaine.Sur ces 60 avions :41, soit 68 % <strong>de</strong>s engagés ont pris le départ,17 venant <strong>de</strong> la Métropole,8 marocains,1 Bel-Abbésien,6 Oranais,9 Algérois.Par marque, les avions se répartissaient <strong>de</strong> lamanière suivante :13 CAUDRON «LUCIOLE» :12 à moteur Salmson 95 CV.1 à moteur Ren<strong>au</strong>lt 95 CV.8 CAUDRONS «PHALENE» :, ;-;3 à moteur Gipsij 105 CV.1 à moteur Ren<strong>au</strong>lt-Bengali.// à moteur Gipsy 130 CV,


-88 -5 FARMAN 230 ET DERIVES :3 à moteur Ren<strong>au</strong>lt 95 CV.1 à moteur Salmson 95 CV.C{:f-:\T :* àmotêuiiGipsyîOÔGV.1 FARMAN 190 :à moteur Titan 230 CV, .1 FARMA*jh30O?:-à moteur Farmàn 150 CV.2 POTEZ 36/14 :à moteur Ren<strong>au</strong>lt 95 CV.%PGTE& 43 :à moteur. Topez 100 C.V.2 MOTH 60 :à moteur Gipsy 85 CV.3 PUSS-MOTH :2 à moteur Gipsy 130 CV.1 à moteur Gipsy 105 CV.1 KLEMM :à moteur Sienens 60 CV.1 R.W.D. 5 :à moteur Cirrus Hermès 105 CV.84 avions ont effectué complètement l'itinéraireprévu dans les délais fixés.Ils ont ainsi totalisé. ........... 121.788 kms7 avions arrêtés en route pour<strong>de</strong>s raisons diverses, ont parcouru. . 13.400 kmsce qui fait que les 41 avions qui ontpris le départ ont effectué, <strong>au</strong> total. 135.188 kms


En d'<strong>au</strong>tres termes :83 % <strong>de</strong>s avions ontparcouru dans les délaisimposés tout l'itinéraire malgré <strong>de</strong>s conditionsatmosphériques souvent assez dures.et 92 % <strong>de</strong>s kilomètres qu'<strong>au</strong>raient du faire ces41 avions ont été effectués.Enfin :39 avions sur 41 engagés, soit : 95 % ont rejointsleur base <strong>de</strong> départ par leurs propres moyensavant la date <strong>de</strong> clôture du Rallye.Les c<strong>au</strong>ses qui ont empêché 7 avions d'effectuerla totalité <strong>de</strong> l'itinéraire peuvent être résuméescomme suit :P.,. Luciole/Salmson 95 CV. :Atterisage en campagne (train détérioré).L... Potez/36/Ren<strong>au</strong>lt 95 CV. :Avarie d'atterrissage sur le terrain d'Oran.F... Luciole/Ren<strong>au</strong>lt 95 CV. :Insuffisance <strong>de</strong> refroidissement du moteur.C. R... Luciole/Salmson 95 CV. :Baisse <strong>de</strong> régime à laquelle il n'a pu être remédiéen campagne.G. M... Phalène/Gipsy 105 CV. :Ennui <strong>de</strong> soupape sur un cylindre.R... Luciole/Salmson 95 CV. :Obligation <strong>de</strong> rejoindre rapi<strong>de</strong>ment son point <strong>de</strong>départ par avion pour affaire urgente.G... Phalène/Gipsy 130 CV. :Hélice f<strong>au</strong>ssée par suite d'un coup <strong>de</strong> frein unpeubrutal.


— 90 —Quant <strong>au</strong>x difficultés qu'ont rencontré certainspilotes en cours <strong>de</strong> route, et <strong>au</strong>xquellesil a pu êtreimmédiatement remédié, elles se sont limitées àquelquesennuis <strong>de</strong> béquilles (nettement tropfaibles sur les Farman et sur les Phalènes) et àquelques défectuosités d'alimentation sur un Farman-Ren<strong>au</strong>lt.Le Gérant : M. le Général MEYNIER.Imp. Rives, Romeu et Cie, 14-16, Rue Bab-el-Oued. -Alger

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