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DOSSIER Dans - Ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport ...

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Numéro 132 Septembre • Octobre 2004Les TIC : au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong>s murs <strong>de</strong> l’école


Vie pédagogique,sommaireseptembre-octobre2004Sommaire –Intern<strong>et</strong>www.viepedagogique.gouv.qc.caRésumé <strong>de</strong>s articles déposésdans le site Intern<strong>et</strong>.4Mot <strong>de</strong> la rédaction5LA CLASSE MULTIÂGEPAR CHOIXpar Claudine Lajeunesse,Mylaine Fournier <strong>et</strong>Jean ArchambaultLes changements s’imposent souventpar <strong>de</strong>s pressions extérieures.À l’inverse, l’expérience ici relatéedémontre comment la classemultiâge est <strong>de</strong>venue une réponseaux questions soulevées parl’analyse <strong>de</strong> la situation <strong>et</strong> quis’imposent <strong>de</strong> l’intérieur.51DES ÉLÈVES TIENNENTBOUTIQUE À L’ENSEIGNEDES «TRÉSORS D’ALBERT»par Paul FrancoeurÀ Th<strong>et</strong>ford-Mines, une expérienceunique au Québec <strong>de</strong> coordination<strong>de</strong> trois programmes a permisla mise sur pied d’un proj<strong>et</strong>novateur pour <strong>de</strong>s élèves <strong>de</strong>scheminements particulierstransitoires.53impressions56événements à venir56lus, vus <strong>et</strong> enten<strong>du</strong>s57histoire <strong>de</strong> rire58dossierLES TECHNOLOGIES DE L’INFORMATION ET DES COMMUNICATIONS :6AU-DELÀ DES MURS DE L’ÉCOLELes technologies <strong>de</strong> l’information <strong>et</strong> <strong>de</strong>s communications font partie maintenant <strong>de</strong> notre réalité,autant dans les sphères privées que dans les domaines d’activités publiques <strong>de</strong> notre quotidien.À ce titre, l’école doit en tenir compte, <strong>et</strong> leur place dans le Programme <strong>de</strong> formation <strong>de</strong> l’école québécoiseest un suj<strong>et</strong> <strong>de</strong> débat.Obj<strong>et</strong> ou outil d’apprentissage, telle pourrait être la question…ENTRE 1996 ET 2004,LE «N» A DISPARU…par Yvon Côté7DE BEAUX ADOS, PASFORCÉMENT «TECHNOS»…Table ron<strong>de</strong> réunissant<strong>de</strong>s élèves <strong>du</strong> secondairepar Yvon Côté8LES TIC À L’ÉCOLE OU«COMMENT LE MONDEA CHANGÉ DEPUISMA NAISSANCE»par Clément Laberge11QU’EN PENSENT-LESENSEIGNANTS?Table ron<strong>de</strong> d’enseignants<strong>et</strong> d’enseignantespar Marie-France Laberge14FASCINÉE MALGRÉLES DIFFICULTÉS!par Céline Gravel19RÉEL, VIRTUEL : UNÉQUILIBRE À MAINTENIRpar Marie-France Laberge <strong>et</strong>André Roux22LÀ OÙ TECHNOLOGIERIME AVEC HUMANITÉET SENTIMENTSpar Thérèse <strong>de</strong>s Lierres27INTERNET FAITVOYAGER LES ÉLÈVESDE L’ÉCOLE SECONDAIREPÈRE-MARQUETTEpar Réginald Fleury34DES CLASSES OUVERTESSUR LE MONDE,AU COLLÈGE DEL’ASSOMPTIONpar Guy Lusignan36UN PROJET QUIS’INSCRIT DANS LADURÉE ET L’EXCELLENCE :LE PROJET PROTICDIX ANS APRÈSpar Thérèse Laferrière40RENCONTRE AVEC QUELQUESARTISANSpar Clau<strong>de</strong> Beauchesne42LE QUÉBEC ENGLISHSCHOOL NETWORK (QESN) :ILLUSTRATIOND’UNE COMMUNAUTÉAPPRENANTEpar Christiane Dufour <strong>et</strong>Sylwia Bielec43LES FUTURS ENSEIGNANTSDU QUÉBEC SONT-ILS BIENPRÉPARÉS À INTÉGRERLES TIC?par Thierry Karsenti45CE QUE L’ON ENTENDSUR LES TICQuelques idées reçuespar Clau<strong>de</strong> Séguin49


Numéro 132Septembre-octobre 2004Revue québécoise <strong>de</strong> développement pédagogiquepubliée par le Secteur <strong>de</strong> l’é<strong>du</strong>cationpréscolaire <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’enseignement primaire <strong>et</strong>secondaire en collaboration avec la Direction<strong>de</strong>s communications <strong>et</strong> la Direction <strong>de</strong>sressources matérielles.Secteur <strong>de</strong> l’é<strong>du</strong>cation préscolaire <strong>et</strong><strong>de</strong> l’enseignement primaire <strong>et</strong> secondaireMinistère <strong>de</strong> l’É<strong>du</strong>cation600, rue Fullum, 10 e étageMontréalH2K 4L1Tél. : (514) 873-8095Téléc. : (514) 864-2294Courrier électronique :vie.pedagogique@meq.gouv.qc.caSOUS-MINISTRE ADJOINTRobert BisaillonVie pédagogiqueDIRECTIONCamille MarchandCOMITÉ DE RÉDACTIONGhislaine Bol<strong>du</strong>cRéjeanne CôtéYvon CôtéSuzanne DesjardinsThérèse Des LierresNicole GagnonCamille MarchandArthur MarsolaisNathalie MichaudDaryl NessMarie-France NoëlMarthe Van NesteMarc-Yves VolcySECRÉTARIATJosée St-AmourCOORDINATION À LA PRODUCTIONMichel MartelDISTRIBUTIONFrance PleauSUPERVISION DE LA RÉVISION LINGUISTIQUESuzanne Vin<strong>et</strong>PHOTOCOMPOSITION TYPOGRAPHIQUEET PHOTOGRAVUREComposition OrléansIMPRESSIONTranscontinental QuébecPHOTO DE LA PAGE COUVERTUREDenis GaronPUBLICITÉDonald BélangerTél. : (450) 974-3285Téléc. : (450) 974-7931Dépôt légal, Bibliothèque nationale <strong>du</strong> QuébecISSN 0707-2511Les textes publiés dans Vie pédagogique sontin<strong>de</strong>xés dans le Répertoire canadien surl’é<strong>du</strong>cation <strong>et</strong> dans Repère.Les opinions émises dans les articles <strong>de</strong>c<strong>et</strong>te revue n’engagent que les auteurs <strong>et</strong>non le ministère <strong>de</strong> l’É<strong>du</strong>cation.Toute repro<strong>du</strong>ction est interdite. Cependant,les étudiants <strong>et</strong> le personnel d’un établissementd’enseignement situé au Québec peuvent,à <strong>de</strong>s fins personnelles ou d’enseignement,repro<strong>du</strong>ire la totalité ou une partie <strong>de</strong>s articlesfigurant dans la revue Vie pédagogique,à condition d’en citer la source, lorsqu’applicable.Toute autre repro<strong>du</strong>ction, notammentà <strong>de</strong>s fins commerciales, nécessitel’autorisation <strong>du</strong> titulaire <strong>de</strong> droit.Au Québec, on peut recevoir gratuitementVie pédagogique en écrivant à :Vie pédagogiqueService <strong>de</strong> la diffusionMinistère <strong>de</strong> l’É<strong>du</strong>cation3220, rue Watt, bureau 101Sainte-Foy (Québec) G1X 4Z7ou en consultant le sitewww.viepedagogique.gouv.qc.ca98-0808mot <strong>de</strong> la rédactionCOMME UN VERRE À MOITIÉ PLEINLe cancre l’est souvent par fidélité au regard que l’enseignant pose sur luiPhilippe Meirieumot <strong>de</strong>larédactionLors <strong>du</strong> colloque sur l’Avenir<strong>de</strong> la profession enseignanteorganisé par le Centre <strong>de</strong>recherche interuniversitaire sur laformation <strong>et</strong> la profession enseignante(CRIFPE), en novembre 2004,Marc Durand, <strong>de</strong> l’Université <strong>de</strong>Montpellier, a convié les participantsà réfléchir sur le travail <strong>de</strong>l’enseignant 1 . Ses observations <strong>de</strong> latâche réelle <strong>de</strong>s enseignants perm<strong>et</strong>tent<strong>de</strong> réaliser que, trop souvent,nous avons tendance à proj<strong>et</strong>er surla réalité <strong>de</strong> la classe le regard normatifd’un observateur qui évalue àpartir <strong>de</strong> critères trop éloignés <strong>de</strong> lasituation pédagogique.M. Durand a voulu m<strong>et</strong>tre en avantl’importance pour l’enseignant oule formateur <strong>de</strong> développer l’attitu<strong>de</strong><strong>de</strong> celui qui observe en tenantcompte <strong>de</strong> tous les paramètres quisont propres à la situation concernée.C<strong>et</strong>te constatation d’un spécialiste<strong>de</strong> l’anthropologie cognitivenous perm<strong>et</strong> d’analyser le regardque nous portons sur l’école <strong>et</strong>, parextension, sur le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’é<strong>du</strong>cation.En eff<strong>et</strong>, combien <strong>de</strong> fois prenonsnousle temps <strong>et</strong> l’espace nécessairespour nous poser en observateurattentif qui essaie <strong>de</strong> comprendrece qui se déroule vraiment sous sesyeux? Nous arrive-t-il <strong>de</strong> considérerce qui se passe réellement, enessayant <strong>de</strong> comprendre la complexité<strong>de</strong>s interrelations entre lesfacteurs d’influence?Or, la situation d’enseignement idéaleexiste-t-elle vraiment? Sur papier,certainement, mais dans la réalité,elle est soumise à <strong>de</strong> telles contingencesque les é<strong>du</strong>cateurs ont apprisà transiger avec les interférences.Ainsi, la séquence d’enseignementsans failles n’existe pas, si ce n’estdans un mon<strong>de</strong> idéal, l’acte d’enseignerétant essentiellement pragmatique<strong>et</strong> incarné dans l’exercice <strong>de</strong>la fonction soumise quotidiennementau choc <strong>de</strong> la réalité.N’est-il pas arrivé un jour, à toutenseignant, <strong>de</strong> préparer le cours« parfait » pour le voir ensuite « saboté» par <strong>de</strong>s facteurs non-prévisibles?Par exemple :Les élèves sont excités par lesrésultats d’un concours ou, aucontraire, ils sont épuisés parle test qu’on leur a fait passerdans la matinée.On vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> d’accueillir<strong>de</strong> nouveaux élèves <strong>et</strong> <strong>de</strong> lesintégrer, le jour même, auxactivités <strong>de</strong> la classe.L’enseignant doit donc constammentnégocier, ajuster <strong>et</strong> adapterses interventions en fonction <strong>du</strong>mon<strong>de</strong> extérieur à la classe.C’est d’ailleurs dans la conscience<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te réalité que, collectivement,il nous sera possible <strong>de</strong> nous donner<strong>de</strong>s clés <strong>de</strong> lecture pour analyserles pratiques <strong>et</strong> comprendrece qui se déroule sur le terrain.Toutefois, ne nous arrive-t-il pasquelquefois d’évaluer les résultats<strong>de</strong>s élèves à partir <strong>de</strong> ce qui <strong>de</strong>vraitêtre plutôt que <strong>de</strong> ce qui est, en cequi a trait autant aux métho<strong>de</strong>sd’enseignement qu’à celles d’évaluation?Combien <strong>de</strong> fois entendons-nousparler <strong>de</strong> tout ce que les élèves nesavent pas <strong>et</strong> qu’ils <strong>de</strong>vraient connaître?Combien <strong>de</strong> fois les élèvessont-ils évalués en m<strong>et</strong>tant en évi<strong>de</strong>nceuniquement ce qui n’est pasfait parfaitement, souvent surlignéen rouge? Combien <strong>de</strong> fois rendonsnouscompte <strong>de</strong>s acquis d’un élèvepar la négative?Nous agissons parfois comme sinous étions <strong>de</strong>vant <strong>de</strong>s verres àmoitié vi<strong>de</strong>s que nous <strong>de</strong>vons remplir…C’est vrai. Les jeunes ont tantà apprendre!Vie pédagogique 132, septembre-octobreLes é<strong>du</strong>cateurs sont à certainsmoments dépassés, écrasés <strong>de</strong>vantla tâche à accomplir <strong>et</strong> blâment parfoisceux qui les ont précédés <strong>de</strong> nepas en avoir fait assez.Pourtant, pour faire baisser c<strong>et</strong>teforte pression, nous pourrionsplutôt considérer ce qui se passevraiment, ce qui existe effectivement,ce qui est acquis, pour en rendrecompte. L’élève ainsi observé seraitpeut-être encouragé par la reconnaissance<strong>de</strong> ce qu’il a fait, plutôtque d’être jugé sur ce qu’il n’a pasaccompli.On imagine que c<strong>et</strong>te attitu<strong>de</strong> pourraitfavoriser la réussite <strong>de</strong> l’élèvequi est considéré comme à risque;une réussite à sa mesure, lui qui n’apas toujours toutes les ressourcesinternes nécessaires pour contrerl’eff<strong>et</strong> cumulatif <strong>de</strong> nombreusesp<strong>et</strong>ites dévalorisations.Pourquoi, à la fin d’une journéed’enseignement, ne pas reconnaîtrece qui a été accompli <strong>et</strong> ce que lesélèves ont appris, plutôt que <strong>de</strong> s’attar<strong>de</strong>rà ce qui n’a pas été vu?Se donner le temps, consciemment,<strong>de</strong> reconnaître les bons coups <strong>et</strong> lesvictoires est un moyen intéressantpour contrer un discours négatifqui parfois occulte les belles actionspédagogiques, voilées par la somme<strong>de</strong>s gestes qui n’ont pas été posés.C’est ainsi que nous aurons le sentimentpositif <strong>de</strong> construire <strong>et</strong> d’ai<strong>de</strong>rl’élève à avancer sur le long chemin<strong>de</strong> l’apprentissage. Une telle prisesur le réel dégagera un nouvel horizonpour apprécier le verre à moitiéplein que chaque élève nous tend.Camille MarchandVos commentaires nous intéressent,écrivez-nous par courriel àvie.pedagogique@meq.gouv.qc.ca1. DURAND, Marc, L’enseignant en milieuscolaire, Paris, PUF, 1998.PÉDAGOGIQUE52004


<strong>DOSSIER</strong>dossierLES TECHNOLOGIESDE L’INFORMATIONET DESCOMMUNICATIONS :AU-DELÀ DES MURSDE L’ÉCOLELes technologies <strong>de</strong> l’information<strong>et</strong> <strong>de</strong>s communications(TIC)ont <strong>de</strong> merveilleux outilsau service <strong>de</strong> l’apprentissage, parcequ’elles perm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong> créer <strong>de</strong>sréseaux d’échanges <strong>et</strong> <strong>de</strong> motiverles élèves par la nouveauté, l’efficacité<strong>et</strong> la rapidité <strong>de</strong> l’instrument.D’autre part, elles génèrent <strong>de</strong> nouveauxsavoirs <strong>et</strong> <strong>de</strong>s connaissancesà m<strong>et</strong>tre à jour constamment dans uncontexte <strong>de</strong> développement rapi<strong>de</strong>;à titre d’exemple, il suffit <strong>de</strong> se rappelerqu’en 1995, on commençait àpeine à parler d’Intern<strong>et</strong>.Les rapports aux savoirs mutentégalement. L’accessibilité amélioréeaux sources d’information en opèreune démocratisation <strong>et</strong> les TIC nousamènent donc à reconsidérer lerapport que le lecteur établit avecle texte, en modifiant les façons <strong>de</strong>l’appréhen<strong>de</strong>r; les hypertextes <strong>et</strong> lapage Web composite, qui font appelà plusieurs langages, en sont <strong>de</strong>sillustrations.Les TIC perm<strong>et</strong>tent également <strong>de</strong>différencier les approches, <strong>de</strong> décloisonnerl’école en m<strong>et</strong>tant en contact<strong>de</strong>s élèves <strong>de</strong> différentes classes<strong>et</strong> <strong>de</strong> milieux différents <strong>et</strong> d’offrirune interface entre les parents <strong>et</strong>l’école.Toutefois, celles-ci ne sont pas unepanacée, <strong>et</strong> pour éviter <strong>de</strong>s dérives,elles <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt à être utiliséesavec discernement <strong>et</strong> surtout à êtreprises en compte dans tous lesaspects <strong>de</strong> la vie scolaire, car ellesont un impact général sur notremo<strong>de</strong> <strong>de</strong> vie.Ne faut-il pas également se penchersur les questions d’éthique quepose l’utilisation <strong>de</strong>s TIC?À l’image <strong>de</strong> l’avènement <strong>de</strong> l’imprimeriequi a changé le statut <strong>du</strong>livre, on peut imaginer que les technologies<strong>de</strong> l’information provoquentun changement « copernicien » quiinfluence la société en général.C’est donc à la lumière <strong>de</strong> ces constatsque les articles <strong>du</strong> présentdossier tentent <strong>de</strong> répondre auxinterrogations suivantes :• Quels sont les impacts <strong>de</strong>s technologies<strong>de</strong> l’information <strong>et</strong> <strong>de</strong>scommunications sur les rapportsentre les élèves, les enseignants<strong>et</strong> plus globalement sur la pédagogie?• Les TIC rem<strong>et</strong>tent en question nosfaçons <strong>de</strong> faire en nous invitant àchanger, mais <strong>de</strong> quelle façon?• Elles sont souvent considéréescomme <strong>de</strong>s outils au service<strong>de</strong> l’apprentissage; toutefois, negénèrent-elles pas <strong>de</strong> nouveauxtypes <strong>de</strong> connaissances?• Peut-on parler d’une écolevirtuelle?Photo : Denis GaronCe dossier sur les TIC est doncincontournable. Et bien que cesuj<strong>et</strong> ait déjà été traité en 1998,Vie pédagogique se <strong>de</strong>vait <strong>de</strong> l’analyser<strong>de</strong> nouveau. D’ailleurs, notrecollaborateur, Yvon Côté a établi unparallèle intéressant entre 1996 <strong>et</strong>2004. Espérons, toutefois, que lesdifférents articles proposés pourrontperm<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> mieux cerner uneréalité qui change à un rythme quinous surprend souvent. Les lecteurspourront y trouver <strong>de</strong>s pistesd’intervention <strong>et</strong> d’ajustement <strong>de</strong>pratiques pour favoriser l’apprentissage,que ce soit à travers <strong>de</strong>stables ron<strong>de</strong>s d’élèves <strong>et</strong> d’enseignantsou <strong>de</strong>s articles d’analyseproposés par Marie-France Laberge,André Roux <strong>et</strong> Clément Laberge.Nous vous proposons <strong>de</strong>s témoignages<strong>de</strong> pratiques novatricesrelatées par nos collaborateurs <strong>et</strong>un regard sur certaines idées toutesfaites, que Clau<strong>de</strong> Séguin s’emploieà démonter.En complément <strong>de</strong> dossier, notresite Intern<strong>et</strong> propose <strong>de</strong>s articlesqui abor<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>s suj<strong>et</strong>s chauds : lematériel didactique à l’ère d’Intern<strong>et</strong><strong>et</strong> la différenciation pédagogique.Il y est également question <strong>de</strong>s ressourcesoffertes aux enseignants <strong>et</strong>enseignantes par la présentation <strong>de</strong>portails <strong>et</strong> <strong>du</strong> concept sous-jacent àleur mise en place.Bonne lecture.VIE 6 Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004


Vie pédagogique 132, septembre-octobreENTRE 1996 ET 2004, LE « N » A DISPARU…par Yvon CôtéOn ne saura sans doute jamais quand, exactement,au cours <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> huit ans, c<strong>et</strong>te disparition est survenue.Mais en 1996, « N » s’accolait toujours à « TIC » <strong>et</strong> formait avec lui l’acronyme « NTIC »pour désigner les Nouvelles Technologies <strong>de</strong> l’Information <strong>et</strong> <strong>de</strong> la Communication…En 1996, en eff<strong>et</strong>, on lesappelait encore les « NTIC »;huit ans plus tard, ça fait déjàun certain temps que le qualificatif« nouvelles » est disparu <strong>et</strong> qu’on neparle plus que <strong>de</strong>s « TIC ». Faut-ilpenser pour autant que c<strong>et</strong>te « disparition» signifie une intégrationcomplète, assumée <strong>et</strong> pleinementvécue <strong>du</strong> phénomène? Détromponsnous: pour beaucoup <strong>de</strong> mon<strong>de</strong>encore, ces technologies <strong>de</strong>meurenttrès nouvelles <strong>et</strong> parfois même,intimidantes.La relecture <strong>du</strong> dossier sur les TIC,pardon! sur les NTIC, paru dans lenuméro <strong>de</strong> mars-avril 1996 1 <strong>de</strong> Viepédagogique, nous révèle biend’autres choses encore quand on lam<strong>et</strong> en parallèle avec celle <strong>du</strong> dossiersur… le même suj<strong>et</strong>, qui paraîtdans le présent numéro <strong>de</strong> la revue.Serez-vous pétris d’étonnement enapprenant que le compte ren<strong>du</strong> <strong>de</strong>la table ron<strong>de</strong> qui avait été tenuealors avec <strong>du</strong> personnel enseignantcontient le mot « Intern<strong>et</strong> » exactement…zéro fois?… Mais, encoreEN PARALLÈLECe qu’on disait en 1996 Ce qu’on dit en 2004«Si la tendance se maintient, pourutiliser une expression chère auxmédias, les jeunes baigneront <strong>de</strong> plusen plus dans c<strong>et</strong>te culture. » (RobertDavid 2 )« Les NTIC doivent avoir une placeéquivalente à celle que l’on a donnée,au cours <strong>de</strong>s siècles passés, à la lecture<strong>et</strong> à l’écriture. Tous peuvent <strong>et</strong>doivent y être formés. » (MichelArcou<strong>et</strong> 3 )«De même que l’action <strong>de</strong>s “internautes”a permis <strong>de</strong> promouvoir leconcept d’Intern<strong>et</strong>, <strong>de</strong> même l’action<strong>de</strong>s enseignants peut fournir <strong>de</strong>s modèles,orienter <strong>de</strong>s pratiques. Il fautforger l’outil <strong>et</strong>, dans le contexteactuel, il serait malheureux d’en sousestimerl’eff<strong>et</strong>. » (Robert David 6 )« Enfin, l’utilisation d’instrumentsefficaces contribuerait à la construction<strong>de</strong>s apprentissages. Or les nouvellestechnologies <strong>de</strong> l’information <strong>et</strong><strong>de</strong> la communication peuvent jouer cerôle. D’abord, leur eff<strong>et</strong> sur la motivation<strong>de</strong>s élèves est connu. » (Tableron<strong>de</strong> avec <strong>de</strong>s enseignants, compteren<strong>du</strong> <strong>de</strong> Luce Brossard 8 )« Nous savons désormais que l’intégration<strong>de</strong>s NTIC suppose une bonne dosed’humilité <strong>et</strong> <strong>de</strong> détachement à l’égard<strong>de</strong> son propre rôle comme enseignant<strong>et</strong> nous savons enfin que les NTICappellent un décloisonnement <strong>de</strong>smatières. » (M. Desbiens, D. Drouin <strong>et</strong>C. Roussel 10 )D’INTERNETET DES TICEN GÉNÉRALD’INTERNETEN PÉDAGOGIEDES TICET DE LAMOTIVATIONDES ÉLÈVESSUR LES TICET LESENSEIGNANTSplus surprenant peut-être, combien<strong>de</strong> fois, pensez-vous, ce même motapparaît-il dans le compte ren<strong>du</strong> <strong>du</strong>présent dossier <strong>de</strong> la table ron<strong>de</strong>avec <strong>de</strong>s enseignants…? Dix fois…?Quinze fois ou plus…? Non : troisfois, bien comptées… Pourtant,l’émergence plus que spectaculaire<strong>de</strong> la « Gran<strong>de</strong> Toile », ces <strong>de</strong>rnièresannées, ne fait <strong>de</strong> doute dansl’esprit <strong>de</strong> personne <strong>et</strong> d’ailleurs,dans plusieurs autres articles parusdans le dossier <strong>de</strong> 1996, c<strong>et</strong>tepoussée d’Intern<strong>et</strong> était annoncée.« 99 p. cent <strong>de</strong>s adolescents ont accédé à Intern<strong>et</strong> <strong>du</strong>rant lessix mois précédant l’enquête. » 4« Il n’est pas nécessaire d’avoir tout <strong>de</strong> suite une utilisationdans 100 p. 100 <strong>de</strong>s classes pour que 100 p. 100 <strong>de</strong>s élèvessachent utiliser les TIC pour apprendre. <strong>Dans</strong> la planification<strong>de</strong> l’enseignement, chaque école peut se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r si àchaque cycle, chacun <strong>de</strong>s élèves sera sollicité, même si celan’est pas possible à chaque année. » 5« Les intervenants à PROTIC étaient non seulement motivéspar les possibilités pédagogiques <strong>de</strong> leur nouvel outil <strong>de</strong> travail,l’ordinateur branché à Intern<strong>et</strong>, mais par l’occasion quileur était fournie <strong>de</strong> faire l’école autrement <strong>et</strong> d’être soutenuspar l’école à c<strong>et</strong> égard. » (Thérèse Laferrière 7 )« La motivation <strong>de</strong>s élèves se tra<strong>du</strong>it par leur engagement dansla tâche ou le proj<strong>et</strong> d’apprentissage <strong>et</strong> <strong>de</strong> nombreuses heuresd’observation passées en classe PROTIC <strong>et</strong> en classe ordinairenous l’ont fait constater à maintes reprises. Cependant lamotivation n’est pas nécessairement constante <strong>et</strong> <strong>de</strong> tousles moments, <strong>et</strong> les élèves <strong>de</strong>meurent <strong>de</strong>s adolescents avectous les intérêts <strong>et</strong> les réactions bien <strong>de</strong> leur âge. » (ThérèseLaferrière 9 )« Sophie Hamel nous rappelle l’importance <strong>de</strong> respecter lesdifférences chez les enseignants, l’importance aussi <strong>du</strong> réseauhumain. Stéphane Côté pense qu’il faut inviter les enseignantsà partager entre eux ce qui se fait. “Regar<strong>de</strong>r ce que tes élèvessont capables <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ire, être spectateur <strong>et</strong> t’émerveiller<strong>de</strong>vant leur travail. Transm<strong>et</strong>tre aux autres enseignants que lesrésultats dépassent <strong>de</strong> beaucoup l’investissement.” » (Tableron<strong>de</strong> avec <strong>de</strong>s enseignants, compte ren<strong>du</strong> <strong>de</strong> Marie-FranceLaberge 11 )Nous vous proposons, dans le tableauci-contre, <strong>de</strong> prendre connaissanced’autres aspects <strong>de</strong>s TIC tels qu’onen parlait en 1996 <strong>et</strong> tels qu’on enparle aujourd’hui, en 2004.Aux collaborateurs <strong>et</strong> collaboratricesqui ont raconté leurs expériencesavec les « NTIC » dans ledossier présenté en 1996 dans Viepédagogique, nous lançons uneinvitation : écrivez-nous pour nousdire quel a été votre cheminement<strong>de</strong>puis lors, où vous en êtes huit ansplus tard, quelles interrogations<strong>de</strong>meurent, <strong>et</strong>c. Votre témoignagesera déposé dans le site Intern<strong>et</strong> <strong>de</strong>Vie pédagogique.Vous aurez vite compris que, si l’espacequi nous était dévolu ici nousl’avait permis, nous aurions pu continuerainsi pendant quelques pages.M. Yvon Côté est chargé <strong>de</strong>dossier à la Direction <strong>de</strong>s ressourcesdidactiques <strong>du</strong> ministère<strong>de</strong> l’É<strong>du</strong>cation <strong>et</strong> membre<strong>du</strong> comité <strong>de</strong> rédaction.1. Vie pédagogique, n o 98, mars-avril 1996,p. 15-38.2. «De quel mon<strong>de</strong> parlons-nous? », dansVie pédagogique, n o 98, mars-avril 1996,p. 18.3. «Risque-t-on <strong>de</strong> <strong>de</strong>venir analphabète sion ne sait pas utiliser les NTIC? », dansVie pédagogique, n o 98, mars-avril 1996,p. 26.4. Chiffres <strong>de</strong> l’enquête NETados 2004 <strong>du</strong>CEFRIO tels que rapportés par Clau<strong>de</strong>Séguin dans son article intitulé Ce qu’onentend sur les TIC, dans le présentnuméro.5. Enquête NETados 2004 <strong>du</strong> CEFRIO.6. «De quel mon<strong>de</strong> parlons-nous? », dansVie pédagogique, n o 98, mars-avril 1996,p. 19.7. «Dix ans après », dans le présent numéro.8. «Que faut-il faire apprendre aux élèves? »,Vie pédagogique, n o 98, mars-avril 1996,p. 21.9. «Protic, dix ans après », dans le présentnuméro.10.«Enseigner avec les NTIC ou commentune équipe peut s’engager sur la voie <strong>de</strong>l’école <strong>de</strong> <strong>de</strong>main », Vie pédagogique,mars-avril 1996, p. 27.11. « Qu’en pensent les enseignants? », dansle présent numéro.PÉDAGOGIQUE72004<strong>DOSSIER</strong>


DE BEAUX ADOS, PAS FORCÉMENT « TECHNOS »…par Yvon CôtéTABLE RONDE RÉUNISSANT DES ÉLÈVES DU SECONDAIRE« Je voudrais, moi aussi, vous remercier… »<strong>DOSSIER</strong>Nous sommes aux <strong>de</strong>rniersinstants d’une table ron<strong>de</strong>regroupant dix élèves <strong>de</strong><strong>de</strong>ux écoles secondaires, l’écoleMonseigneur-Parent, <strong>de</strong> Saint-Hubert, sur la rive sud <strong>de</strong> Montréal<strong>et</strong> l’école Havre-Jeunesse, <strong>de</strong> Sainte-Julienne, dans Lanaudière. Ils sontvenus échanger avec nous sur laplace qu’occupent les technologies<strong>de</strong> l’information <strong>et</strong> <strong>de</strong> la communication(TIC) dans leur vie. Lesreprésentants <strong>de</strong> Vie pédagogique,déjà impressionnés par la qualité<strong>de</strong> la participation <strong>et</strong> l’engagementque ces grands ados ont démontréstout au long <strong>de</strong> la séance, achèventd’être conquis par l’initiative <strong>de</strong> c<strong>et</strong>teparticipante… De longs cheveuxbruns encadrant un fin visage ovaled’où émerge un sourire espiègle :« … car sans vouloir parlerau nom <strong>du</strong> groupe, je trouveque ç’a été très enrichissantpour moi aussi… c’est uneexpérience précieuse pournous… ».C’est à peu près dans ces mots ques’est achevée c<strong>et</strong>te rencontre. Nousdisons « à peu près », car <strong>de</strong>s difficultéstechniques (fallait bien quecela arrive au moment d’une tableron<strong>de</strong> portant sur les technologies…)ont fait que l’enregistrementsonore <strong>de</strong>s échanges n’a pasété à la hauteur. Ce contr<strong>et</strong>empsnous oblige à vous livrer un compteren<strong>du</strong> qui se limite à l’essentiel <strong>de</strong>sidées <strong>et</strong> <strong>de</strong>s propos recueillis auprès<strong>de</strong> ces jeunes sur chacune <strong>de</strong>squestions qui leur ont été soumises.ILS SONT BEAUX ET BELLES…Qu’ils ou elles s’affichent enProgressive Clothing, en RalphLauren ou autres vêtements à lamo<strong>de</strong>, qu’elles soient « en nombril »ou non, qu’elles portent leur cellulaireà la ceinture ou qu’ils portent<strong>de</strong>s boucles à l’oreille, ils sontbeaux <strong>et</strong> belles à regar<strong>de</strong>r, beaux <strong>et</strong>belles à écouter, beaux <strong>et</strong> bellesà voir aller… Au point que lesa<strong>du</strong>ltes vieillissants que noussommes se surprennent à rêver quela relève saura transformer ce mon<strong>de</strong>pas très joli que nous lui léguons…Ils vous regar<strong>de</strong>nt droit dans lesyeux, atten<strong>de</strong>nt patiemment quevous vous manifestiez <strong>et</strong> lorsquevous le faites, c’est avec attentionqu’ils vous écoutent <strong>et</strong> avec calmequ’ils vous répon<strong>de</strong>nt.Je sais, je sais, les ados d’aujourd’huine correspon<strong>de</strong>nt pas tous àc<strong>et</strong>te <strong>de</strong>scription idyllique… Maisles quatre filles <strong>et</strong> les six gars qui s<strong>et</strong>rouvaient autour <strong>de</strong> la table c<strong>et</strong>tejournée-là nous ont fait vivre <strong>de</strong>uxheures <strong>et</strong> <strong>de</strong>mie <strong>de</strong> ravissement.D’entrée <strong>de</strong> jeu, la responsable <strong>de</strong>Vie pédagogique a évoqué la distanc<strong>et</strong>emporelle séparant ces ados<strong>de</strong>s a<strong>du</strong>ltes aux têtes plus ou moinspoivre <strong>et</strong> sel (<strong>et</strong> parfois mêmeANNIE BLAISblanches…) qui allaient les écouter,en énumérant une série <strong>de</strong> mots quiont pour les jeunes d’aujourd’hui <strong>et</strong>pour ceux d’hier une significationfort différente : câble, cellulaire,programme, virus, surf, <strong>et</strong>c. Autant<strong>de</strong> vocables évoquant, pour les uns,Photo : Denis Garon<strong>de</strong>s réalités bien ancrées dans lemon<strong>de</strong> technologique d’aujourd’hui<strong>et</strong>, pour les autres, <strong>de</strong>s réalités différentes,associées à « leur » temps…Une fois bien posée c<strong>et</strong>te « différenciation» entre eux <strong>et</strong> nous, il leur aété <strong>de</strong>mandé <strong>de</strong> nous dire quelsétaient leurs loisirs préférés <strong>et</strong>quelle place occupait l’ordinateurdans leur vie quotidienne.Pour ce qui est <strong>de</strong>s loisirs, que laplanche à neige, le ski, le bask<strong>et</strong>ball,la bicycl<strong>et</strong>te ou la natationsoient <strong>de</strong>s activités régulières pourplusieurs n’a étonné personne;mais que l’ordi – <strong>et</strong> tout ce qui vientavec – soit, pour les uns, « trèsimportant », mais pour certains,constitue une activité parmid’autres, a constitué la premièresurprise <strong>de</strong> la journée, <strong>du</strong> moinspour certains d’entre nous. Nousnous serions atten<strong>du</strong>s, jeunesseoblige, à ce que nos interlocuteursfassent grand état <strong>de</strong> la nécessité <strong>et</strong><strong>de</strong> l’utilité <strong>de</strong> toute c<strong>et</strong>te quincaillerie.Mais c’est bien posément <strong>et</strong>sans remords aucuns (!…) qu’ilsont, comme ça, déclaré : « La compétitionsportive me laisse peu <strong>de</strong>temps pour ce genre <strong>de</strong> choses…».Ou encore : « Les TIC, c’est uneaffaire d’école, ce n’est pas unoutil quotidien pour moi. »En fait, pour plusieurs <strong>de</strong> ces ados,les TIC, si on y a accès à la maisonou à l’école, c’est tant mieux : çapeut être utile <strong>et</strong> amusant; maisbon, si on ne peut les utiliser parcequ’on n’a pas d’ordi sous la main,c’est « d’valeur », mais ce n’est pasun drame… Et lorsqu’on pianotesur un appareil, c’est souvent pourles usages les plus connus <strong>et</strong> lesplus faciles : un peu <strong>de</strong> traitement<strong>de</strong> texte, un peu <strong>de</strong> recherche dansIntern<strong>et</strong>, une tentative ou <strong>de</strong>ux<strong>de</strong> présentation « PowerPoint » <strong>et</strong>beaucoup <strong>de</strong> clavardage <strong>et</strong> d’écoute<strong>de</strong> musique. On n’a pas l’impression,sauf pour <strong>de</strong>ux ou trois d’entreeux, qu’ils ont une bonne idée <strong>de</strong>l’ampleur que revêt la révolutiontechnologique <strong>et</strong> <strong>de</strong>s immensespossibilités qui en découlent. Nonplus, d’ailleurs, qu’ils entrevoient lerevers <strong>de</strong> la médaille : les pièges <strong>et</strong>EDMOND-CLAUDE GARCIA-PELLETIERdésillusions que ce raz <strong>de</strong> maréepeut charrier avec lui. Loin <strong>de</strong> nousl’idée <strong>de</strong> les en blâmer : comme autemps <strong>de</strong> Gutenberg <strong>et</strong> <strong>de</strong> sonmachin à imprimer, nous sommestoutes <strong>et</strong> tous plus ou moins conscients<strong>de</strong>s bouleversements présents<strong>et</strong> à venir découlant <strong>de</strong> larévolution numérique en cours.Ce qui donne lieu à certains paradoxes.Ainsi, en ce qui concerne lesjeunes, ils sont suffisamment coolpour ne pas s’emballer trop vite <strong>et</strong>se m<strong>et</strong>tre à croire que les TIC vonttout régler, ce qui serait bien sûrune grave illusion, mais par ailleurs,ils n’entrevoient pas très bien toutce que la révolution <strong>de</strong>s TIC esten mesure <strong>de</strong> leur apporter, cequi pourrait aussi se révéler unecarence à la longue. Autrement dit,une partie <strong>de</strong> la réalité semble leuréchapper…Photo : Denis GaronVIE 8 Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004


Se doutent-ils, par exemple, quel’école, telle qu’ils la connaissent(<strong>et</strong> que, souvent, ils n’apprécientguère…) pourraitdisparaître au profit d’institutionsvirtuelles?… Que cela estdéjà amorcé dans différentspays? Que seulement aux États-Unis, par exemple, il y a près<strong>de</strong> 200 <strong>de</strong> ces écoles virtuellesau primaire <strong>et</strong> plus <strong>de</strong> 400 ausecondaire?Mais n’anticipons pas trop… <strong>et</strong>voyons ce qu’ils avaient à dire concernantla façon dont elles <strong>et</strong> ils s’ysont pris pour apprivoiser les TIC.OÙ ETCOMMENT AVEZ-VOUSAPPRIS À VOUS SERVIRDES TIC?L’apprentissage <strong>de</strong>s TIC s’est effectuépour ces jeunes à peu près égalemententre la maison <strong>et</strong> l’école,avec une légère dominance pourc<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière (au moins <strong>de</strong>ux outrois d’entre eux n’ont pas d’ordinateurà la maison). Mais, saufpour <strong>de</strong>ux élèves, que cela se soitpassé à la maison ou à l’école, laprésence d’un a<strong>du</strong>lte aidant a étédéterminante. Que c<strong>et</strong> a<strong>du</strong>lte aitété le père ou la mère, un oncle ouun enseignant, son action a servi<strong>de</strong> catalyseur <strong>et</strong>, dans bien <strong>de</strong>s cas,l’émule s’est empressé <strong>de</strong> dépasserJEAN-SIMON GOUDREAUPhoto : Denis Garonle maître qui, maintenant, a recoursà son ancien élève pour se m<strong>et</strong>tre àjour… Scénario connu.D’autres, un peu moins nombreux,ont profité <strong>de</strong>s connaissances en lamatière <strong>de</strong> leurs amis <strong>et</strong> quelquesunsont largement bénéficié <strong>du</strong> coursInitiation à la science informatiquequ’ils ont pu suivre à l’école.Ces <strong>de</strong>rniers sont d’ailleurs parmicelles <strong>et</strong> ceux pour qui les TICsemblent avoir une gran<strong>de</strong> importance.Toutes <strong>et</strong> tous, ou presque, adm<strong>et</strong>tentque le « tâtonnement expérimental »(ou le « gossage »…) <strong>et</strong> l’observation<strong>de</strong> ceux ou celles « qui savaient »ont été abondamment exploités, soità <strong>de</strong>ux ou trois, soit à l’occasiond’un cours particulier ou d’un proj<strong>et</strong>scolaire faisant appel aux TIC.Il est même arrivé à certains d’entreeux <strong>de</strong> « forcer la main », quelquepeu, à leur enseignant ou enseignantequi hésitait <strong>et</strong> qui a finalementcédé <strong>de</strong> bonne grâce à leurspressions. Autre scénario connu <strong>du</strong>milieu scolaire.MAÎTRISEZ-VOUS TRÈS BIENUN ORDI OU AVEZ-VOUSL’IMPRESSION D’AVOIR ENCOREBEAUCOUP DE CHOSESÀ APPRENDRE?Ici, nous avons eu droit à notre<strong>de</strong>uxième surprise… encore unefois, pour certains d’entre nous <strong>du</strong>moins. Car les réponses donnéesont varié d’un : « Je ne ressens pasle besoin d’en apprendre davantage…», à : « J’aimerais enapprendre un peu plus… pousserun peu plus loin pour avoir plus<strong>de</strong> plaisir à utiliser tout ce quec<strong>et</strong>te technologie offre; si j’en ail’occasion, je suivrai <strong>de</strong>s cours… »Ce qui, d’un côté, reflète une certainenaïv<strong>et</strong>é <strong>et</strong>, <strong>de</strong> l’autre, c<strong>et</strong>te tendanc<strong>et</strong>rès n<strong>et</strong>te à la consommation« pure <strong>et</strong> <strong>du</strong>re » répan<strong>du</strong>e dansnotre société <strong>et</strong> chez les ados particulièrement.Il est ressorti assezclairement, en eff<strong>et</strong>, que pour lamajorité <strong>de</strong> ces jeunes, les TIC <strong>et</strong> cequ’ils offrent constituent davantageGUILLAUME HURTUBISEun bien <strong>de</strong> consommation courantequ’un outil perm<strong>et</strong>tant, notamment,<strong>de</strong> donner libre cours à son imagination<strong>et</strong> d’exploiter ses facultéscréatrices.Pour au moins <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> ces élèves,apprendre la programmation constitueun besoin, une obligationmême : « J’aimerais en savoirbeaucoup plus : on <strong>de</strong>vait avoir<strong>de</strong>s cours <strong>de</strong> perfectionnement enprogrammation <strong>et</strong> on n’en a paseu : ça m’a beaucoup déçu… »Cela est intrigant dans la mesureoù, les plus âgés d’entre nous s’ensouviendront, c’est souvent par <strong>de</strong>scours <strong>de</strong> programmation « 101 »que s’est faite notre initiation à l’ordinateurdans les années… loin,loin… <strong>et</strong> que nous étions doncheureux d’en sortir lorsque lesappareils sont <strong>de</strong>venus plus conviviauxd’une part <strong>et</strong> que, d’autrepart, nous nous sommes ren<strong>du</strong>compte que c’est ce que les ordinateursnous perm<strong>et</strong>taient <strong>de</strong> fairequ’il était utile <strong>et</strong> intéressant d’apprendre<strong>et</strong> non comment la magies’opérait… Il est vrai que ce qu’onentend par « programmation »aujourd’hui <strong>et</strong> qui attire ces jeunesn’a plus rien à voir avec ce qu’onnous présentait alors, mais il<strong>de</strong>meure que d’aller « voir ce qui sepasse dans la machine » – plutôtque <strong>de</strong> perfectionner sa compé-Photo : Denis GaronVie pédagogique 132, septembre-octobr<strong>et</strong>ence à l’utiliser – est aussi différentque <strong>de</strong> démonter une bicycl<strong>et</strong>te pouren connaître le fonctionnement <strong>et</strong>les rouages au lieu <strong>de</strong> perfectionnersa technique dans les côtes ouailleurs.Pour au moins un élève, cependant,les TIC constituent <strong>de</strong>s outils puissants<strong>et</strong> leur utilisation suscite chezlui un enthousiasme comparable àcelui découlant <strong>de</strong> la lecture d’unbon livre : « (…) t’apprends <strong>de</strong>schoses, mais tu veux aller plusloin, en savoir davantage… »Et quand, en sous-question, on leur<strong>de</strong>man<strong>de</strong> :« L’école vous a-t-ellesuffisamment aidés dans votreapprentissage <strong>de</strong>s TIC? », lesréponses, cela va <strong>de</strong> soi, sont àl’image <strong>de</strong> leur intérêt pour lachose : si on « aime » les TIC,l’école aurait pu en faire davantage;mais si elles ne sont pas perçuescomme essentielles, alors l’école aété à la hauteur <strong>de</strong>s attentes.STÉFANY LACROIXCe qui, par ailleurs, est ressorticlairement, c’est que plusieurs <strong>de</strong>ces jeunes préfèrent que les TICsoient intégrées aux cours <strong>et</strong> nonqu’elles fassent l’obj<strong>et</strong> d’un apprentissageen soi; ils apprécient qu’ellessoient associées à <strong>de</strong>s proj<strong>et</strong>s, à <strong>de</strong>sactivités.Ainsi, une jeune fille a qualifié <strong>de</strong>« génial » le fait que <strong>de</strong>s enseignantsPÉDAGOGIQUE92004Photo : Denis Garon<strong>DOSSIER</strong>


<strong>DOSSIER</strong>leur aient permis, dans <strong>de</strong>s coursoptionnels, <strong>de</strong> choisir <strong>de</strong>s proj<strong>et</strong>squi les aidaient à cheminer dansl’apprentissage <strong>de</strong> la discipline concerné<strong>et</strong>out en s’initiant à l’utilisation<strong>de</strong>s TIC. Tous les proj<strong>et</strong>s<strong>de</strong>vaient être réalisés en ayantCÉCILE LAUZONrecours aux TIC <strong>et</strong> l’évaluation <strong>du</strong>travail <strong>de</strong>s élèves tenait compte <strong>de</strong>c<strong>et</strong>te exigence. L’élève en question abeaucoup apprécié que l’entrai<strong>de</strong> <strong>et</strong>la collaboration entre les élèvesaient été à l’ordre <strong>du</strong> jour. Certainsont créé <strong>de</strong>s pages Web, d’autres ontrédigé un roman, d’autres encoreont tracé un portrait mondial <strong>du</strong>domaine abordé. Les travaux qu’ilsont faits ont été consignés dans leurportfolio personnel.Un autre élève nous a fait part d’uneexpérience semblable. <strong>Dans</strong> uncours <strong>de</strong> sciences, un enseignant a<strong>de</strong>mandé à ses élèves <strong>de</strong> choisir unsuj<strong>et</strong> parmi la <strong>de</strong>mi-douzaine qu’ilavait proposés <strong>et</strong> <strong>de</strong> s’y investir toutau cours d’un semestre. Ici aussi,le recours aux TIC était fortementencouragé. Cela a donné lieu à <strong>de</strong>sréalisations intéressantes <strong>et</strong> certains<strong>de</strong> leurs auteurs ont connu la consécrationlorsque leurs œuvres ontfait partie <strong>de</strong> l’expo-sciences <strong>de</strong> find’année.Photo : Denis GaronUTILISEZ-VOUS LES TICPOUR EFFECTUER VOSTRAVAUX SCOLAIRES?L’accès à un ordinateur ne leurétant pas toujours possible, certainsont répon<strong>du</strong> par la négative.D’autres ne le font que lorsque lestravaux <strong>de</strong>mandés exigent beaucoupd’écriture. Ils ont alors recoursau traitement <strong>de</strong> texte : « C’est pluspropre, plus présentable… »,«…<strong>et</strong> plus lisible pour le prof… ».Ici, on a vite compris qu’il ne s’agissaitpas tant <strong>de</strong> faciliter la tâche àl’enseignant que <strong>de</strong> l’inciter à êtregénéreux dans son évaluation <strong>du</strong>travail remis…Qu’arrive-t-il si l’enseignante oul’enseignant exige un travail manuscritpour éviter que l’élève se serve<strong>de</strong>s logiciels <strong>de</strong> correction pourprésenter « un beau travail à peuprès sans fautes »? Qu’à cela n<strong>et</strong>ienne, certains n’hésitent pas àtaper le texte à l’ordi, à le soum<strong>et</strong>treà la correction <strong>et</strong> à le transcrire à lamain ensuite…AMINE MAHMOUDIMis à part le traitement <strong>de</strong> texte,le recours aux TIC pour effectuer<strong>de</strong>s travaux scolaires semble selimiter à quelques utilisations <strong>de</strong>« PowerPoint », lesquelles étonnentparfois le personnel enseignant :Photo : Denis Garon« Mon prof n’avait jamais vu un<strong>et</strong>elle présentation. »À ce suj<strong>et</strong>, d’ailleurs, plusieursélèves connaissent déjà la règle <strong>de</strong>base qui veut qu’on ne surchargepas chacune <strong>de</strong>s plages d’une telleprésentation (ce qu’ignorent beaucoupd’a<strong>du</strong>ltes qui ont recours àce logiciel connu). En outre, lesplus hardis vont jusqu’à effectuerquelques démonstrations virtuellesen sciences.Quand l’un <strong>de</strong>s a<strong>du</strong>ltes présentsleur a <strong>de</strong>mandé, en corollaire àc<strong>et</strong>te question, si le recours aux TICleur perm<strong>et</strong>tait, parfois, <strong>de</strong> réfléchirdifféremment, <strong>de</strong> planifier un travail,on a senti un certain flottement…Manifestement, ils n’ensont pas encore là dans l’utilisation<strong>de</strong> ces outils. Une question semblableayant trait à la possibilité,non seulement <strong>de</strong> tirer <strong>de</strong>s donnéesd’Intern<strong>et</strong>, mais d’ajouter à la cagnotte,n’a pas non plus suscitébeaucoup d’interventions.De la même manière, quand on leura <strong>de</strong>mandé : « Comment les TICont-elles influencé votre façond’apprendre? », c<strong>et</strong>te question, <strong>de</strong>nature un peu plus épistémologiqueou « méta-cognitive », a été suivie<strong>de</strong> quelques silences… De touteévi<strong>de</strong>nce, cela semble être davantageune préoccupation d’a<strong>du</strong>ltesqui ont <strong>de</strong>s responsabilités é<strong>du</strong>catives.Pour eux, l’aspect fonctionnel<strong>de</strong>s TIC a beaucoup plus d’importanceque la valeur intrinsèque <strong>de</strong>celles-ci. Ils sont « tombés <strong>de</strong>dansquand ils étaient p<strong>et</strong>its » <strong>et</strong> leur<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r en quoi cela a changéquelque chose à leur vie (ou, ici,à leur façon d’apprendre), revient,à la limite, à leur <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r pourquoiils sont nés à la fin <strong>du</strong> 20 e siècleplutôt qu’avant…On a quand même pu constater quela recherche dans Intern<strong>et</strong> constitue,pour plusieurs d’entre eux, unmo<strong>de</strong> d’apprentissage différent,plus rapi<strong>de</strong> <strong>et</strong> plus efficace (l’un<strong>de</strong>s élèves présents avait même suivi<strong>de</strong>ux cours spécifiquement consacrésà la recherche dans Intern<strong>et</strong>).Ils ont également développé certaineshabil<strong>et</strong>és à départager lesbonnes <strong>et</strong> les mauvaises référencesou données recueillies dans Intern<strong>et</strong> :« Ça se voit tout <strong>de</strong> suite si c’estun amateur qui a déposé un textedans Intern<strong>et</strong>… », « (…) justepar les fautes d’orthographe, <strong>de</strong>sfois, on voit bien… ».Une autre élève voit dans Intern<strong>et</strong> <strong>de</strong>soccasions <strong>de</strong> peaufiner ses apprentissagesen chimie, par exemple, en ydénichant <strong>de</strong>s exercices appropriés.MAXIME PERREAULTET LE« COPIER-COLLER »,LA HANTISE DES PROFS…Certains enseignants exigent qu<strong>et</strong>out travail effectué à l’ai<strong>de</strong> d’Intern<strong>et</strong>comprenne une bibliographieexhaustive; d’autres « (…) apprennentvite quel est le “ style ”<strong>de</strong> chacun <strong>de</strong> leurs élèves… », <strong>de</strong>telle sorte qu’ils discernent aisémentles « vrais » travaux <strong>du</strong> plagiat.INTERNET, ÇA RECÈLE AUSSIQUELQUES DANGERS, NON?La plupart <strong>de</strong>s élèves présents ontdonné l’impression qu’ils étaienteffectivement conscients <strong>de</strong> certainsrisques liés à une utilisation inadéquated’Intern<strong>et</strong> : les « mauvaises »rencontres par le clavardage, laqualité <strong>du</strong> français menacée par lesPhoto : Denis GaronVIE 10 Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004


Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004SONYA ROULEAUnouveaux co<strong>de</strong>s d’écriture propresau courriel, l’omniprésence <strong>de</strong> lalangue anglaise, <strong>et</strong>c., mais curieusement,comme nous le verrons plusloin, c’est lorsque nous leur avons<strong>de</strong>mandé comment ils envisageaientl’avenir <strong>de</strong>s TIC en général, queleurs craintes les plus gran<strong>de</strong>s sesont manifestées.Nous avons également posé la questionsuivante : « Si, <strong>de</strong>main matin,Photo : Denis Garonvous n’aviez plus accès à unordinateur, qu’est-ce qui vousmanquerait le plus? »Toutes les réponses à c<strong>et</strong>te questionont convergé vers l’eldorado quereprésentent les TIC à leurs yeux :l’abondance <strong>de</strong>s informations <strong>et</strong> larapidité pour y accé<strong>de</strong>r, la satisfaction<strong>de</strong> trouver ce que l’on cherche<strong>et</strong> la communication instantanéeà l’échelle <strong>du</strong> globe (un élève araconté comment il était heureux<strong>de</strong> pouvoir communiquer rapi<strong>de</strong>ment<strong>et</strong> fréquemment avec <strong>de</strong>s personnes<strong>de</strong> sa parenté qui vivent àl’étranger).COMMENT ENVISAGEZ-VOUSL’AVENIR DES TIC?Les premières réponses à c<strong>et</strong>tequestion annonçaient une vision« genre » dolce vita, un nouvelespoir d’une société <strong>de</strong>s loisirs :« On va pouvoir tout faire…beaucoup s’amuser…».Mais on a vite senti que tous nepartageaient pas nécessairementc<strong>et</strong>te façon d’entrevoir le futur,notamment en ce qui a trait à la viesociale : « Avec le chat, les gensDAVID TELLIERPhoto : Denis Garonauront tendance à s’isoler… »,« Parfois, on se r<strong>et</strong>rouve quatrefilles ensemble <strong>et</strong> l’une <strong>de</strong> nouss’éloigne pour aller “ chatter ”avec une cinquième!… », « Certainsfont moins <strong>de</strong> sport… lisentmoins aussi… <strong>et</strong> il y a <strong>de</strong>s problèmesd’obésité… », « Il y a moins<strong>de</strong> soupers <strong>de</strong> famille qu’avant… ».Certaines préoccupations d’ordreéconomique sont également ressorties: « Il va y avoir moins d’emplois;regar<strong>de</strong>z ce qui se passe<strong>de</strong>puis les guich<strong>et</strong>s automatiques…».Par contre, on a également fait valoirqu’« avec ou sans portables »,les élèves auront toujours besoind’encadrement <strong>et</strong> donc que laprésence <strong>de</strong>s enseignants, peut-êtredavantage dans un rôle d’accompagnateurcependant, sera toujoursnécessaire.Et les a<strong>du</strong>ltes ont applaudi… nonseulement pour ce cri <strong>du</strong> cœur,mais pour l’ensemble <strong>de</strong>s échangesque nous avons eus au cours <strong>de</strong>c<strong>et</strong>te table ron<strong>de</strong>.Ah! en passant, savez-vous quelmétier veut exercer la brun<strong>et</strong>te ausourire espiègle qui nous a remerciés…?Je vous le donne en mille…Eh oui! vous avez <strong>de</strong>viné : elle seraenseignante…M. Yvon Côté est chargé <strong>de</strong>dossiers à la Direction <strong>de</strong>s ressourcesdidactiques <strong>du</strong> ministère<strong>de</strong> l’É<strong>du</strong>cation.<strong>DOSSIER</strong>LES TIC À L’ÉCOLE OU « COMMENT LE MONDE A CHANGÉDEPUIS MA NAISSANCE »par Clément LabergeAu moment précis où j’allaisamorcer la rédaction d’untexte <strong>de</strong>vant faire état <strong>de</strong> laprésence <strong>de</strong>s nouvelles technologiesdans les écoles d’ici <strong>et</strong> d’ailleurs,afin d’illustrer une réalité qui évoluerapi<strong>de</strong>ment, j’ai reçu un courrielinatten<strong>du</strong> :De : Victorin Sainte-MarieÀ: Clément LabergeSuj<strong>et</strong> : Recherche sur les TIC à l’écoleMonsieur Laberge,Je m’appelle Victorin, j’ai 10 ans. Je vous écris parce que j’ai besoin <strong>de</strong>votre ai<strong>de</strong>. À mon école, nous préparons une exposition sur le thème« Comment le mon<strong>de</strong> a changé <strong>de</strong>puis ma naissance ». Chaque élève achoisi un thème différent. Moi c’est « Les technologies à l’école ». Est-ceque vous pouvez m’ai<strong>de</strong>r?VictorinDevant une telle coïnci<strong>de</strong>nce, j’aichoisi <strong>de</strong> répondre prioritairementà mon jeune correspondant.Et c’est ainsi que le dialogue s’engagea.Clément : C’est avec plaisir que jevais tenter <strong>de</strong> t’ai<strong>de</strong>r, Victorin. Maisbeaucoup <strong>de</strong> choses ont changé<strong>de</strong>puis dix ans au suj<strong>et</strong> <strong>de</strong>s technologiesdans les écoles. Je ne saispas trop par où commencer. Alors,avant que je te répon<strong>de</strong>, est-ce qu<strong>et</strong>u peux m’expliquer pourquoi tu aschoisi ce thème?Victorin : C’est surtout parce queje suis curieux. Je trouve ça bizarreque les a<strong>du</strong>ltes trouvent extraordinairequ’on ait autant d’ordinateursà l’école alors que moi, je trouve çajuste normal. Surtout que je n<strong>et</strong>rouve pas que ce sont <strong>de</strong> très bonsordinateurs.Clément : C’est vrai que c’est unpeu étrange. Mais si tu savais tousles efforts que ça nous a <strong>de</strong>mandésd’équiper les écoles d’ordinateurs,peut-être que tu comprendrais unpeu mieux.On a entrepris c<strong>et</strong>te importanteopération en 1995. Tu avais un an.Jusqu’à ton entrée à la maternelle,on a investi dans les écoles à peuPÉDAGOGIQUE 11


<strong>DOSSIER</strong>près 70 millions <strong>de</strong> dollars chaqueannée pour ach<strong>et</strong>er <strong>de</strong>s ordinateurs.Mais <strong>de</strong>puis que tu as commencél’école, cela a beaucoupdiminué. C<strong>et</strong>te année, c’est à peuprès 10 millions <strong>de</strong> dollars quiserviront à ach<strong>et</strong>er <strong>de</strong>s ordinateurspour les écoles primaires <strong>et</strong> secondaires<strong>du</strong> Québec.Cela veut dire que pendant que tu asappris à marcher, à courir, à parler,à attacher tes souliers, à écrire <strong>et</strong> àcompter, nous avons eu tout juste l<strong>et</strong>emps d’installer les ordinateursdans les écoles <strong>et</strong> <strong>de</strong> commencer àapprendre à nous en servir. Et déjà,tous ces appareils se font vieux,comme tu le constates bien.Mais, dis-moi, qu’est-ce que tu faisgénéralement avec les ordinateurs àl’école?Victorin : Parfois on va au laboratoired’informatique pour quechaque élève ait un ordinateur <strong>et</strong> onfait <strong>de</strong>s exercices <strong>et</strong> <strong>de</strong>s jeux é<strong>du</strong>catifs.On r<strong>et</strong>ranscrit aussi <strong>de</strong>stextes qu’on a composés dans laclasse <strong>et</strong> on les imprime pour fabriquerun recueil. Il arrive aussiqu’on fasse <strong>de</strong>s recherches dansIntern<strong>et</strong> pour trouver <strong>de</strong> l’informationsur <strong>de</strong>s suj<strong>et</strong>s comme les paysou les animaux. Mais c’est à peuprès tout. Pas <strong>de</strong> musique, pas <strong>de</strong>vrais jeux, pas <strong>de</strong> téléchargements,pas <strong>de</strong> chat – Rien <strong>de</strong> ce que je faisavec mes amisClément : Intern<strong>et</strong>… ça c’est ungros changement! Imagine-toi doncqu’il y a dix ans, Intern<strong>et</strong> n’existait àpeu près pas. On n’en parlait mêmepas dans les écoles. Quand tu es né,il y avait dans tout Intern<strong>et</strong> à peinequelques milliers <strong>de</strong> pages Web, <strong>et</strong>au Québec, moins d’une centaine.En comparaison, on estime aujourd’huiqu’il doit exister jusqu’à2 000 milliards <strong>de</strong> pages Web regroupéesen 50 millions <strong>de</strong> sites Web.Mais ça, je comprends que ça n<strong>et</strong>’impressionne pas parce que tu astoujours vécu dans c<strong>et</strong> univers. Etaujourd’hui, 89 p. 100 <strong>de</strong>s enfants<strong>de</strong> ton âge vont sur Intern<strong>et</strong> à peuprès toutes les semaines!Un <strong>de</strong>s problèmes, c’est que lesjeunes ne font pas la même choseque les plus vieux avec Intern<strong>et</strong>…C’est probablement ça qui expliqueque tu utilises <strong>de</strong>s logiciels <strong>de</strong> téléchargement<strong>de</strong> musique, <strong>de</strong> clavardageou <strong>de</strong>s systèmes <strong>de</strong> messagerieinstantanée chez toi ou chez tesamis, mais pas à l’école. La plupart<strong>de</strong>s profs ont <strong>de</strong> la difficulté à utilisertous ces logiciels <strong>et</strong> cherchent<strong>de</strong>s moyens <strong>de</strong> pouvoir s’en servirpour t’ai<strong>de</strong>r à apprendre — ce quireste évi<strong>de</strong>mment le principal objectif<strong>de</strong> l’école.Mais dis-moi, est-ce qu’il y a aussiquelques ordinateurs dans ta classe?Parce qu’avant, on m<strong>et</strong>tait presqu<strong>et</strong>ous les ordinateurs dans <strong>de</strong>s sallesspéciales, les fameux laboratoiresinformatiques, mais <strong>de</strong> plus enplus, on préfère les installer directementdans les classes.Victorin : Oui, <strong>de</strong>puis l’année<strong>de</strong>rnière, il y a <strong>de</strong>ux ou trois ordinateursdans chaque classe <strong>de</strong>l’école. Ils nous servent surtout àcommuniquer avec d’autres écoles.Chaque matin, un élève est responsable<strong>de</strong> vérifier si une autre classenous a écrit par courriel, si <strong>de</strong>sgens ont ajouté <strong>de</strong>s commentairessur notre site Web ou toutes sortes<strong>de</strong> choses comme ça.Clément : Vous avez un site Web?Voilà qui est intéressant! À quoivous sert-il?Victorin : Le site Web, c’est nouveau<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te année. C’est ma gran<strong>de</strong>sœur qui nous l’a organisé. Elleappelle ça un « cybercarn<strong>et</strong> ». C’esttrès simple à faire. On a un mot <strong>de</strong>passe pour entrer dans le système;ensuite, on trouve une sorte <strong>de</strong> formulaireà remplir avec le textequ’on veut publier <strong>et</strong> hop!, il apparaîtsur notre site Intern<strong>et</strong>. Des foison ajoute <strong>de</strong>s images ou <strong>de</strong>s p<strong>et</strong>itsfilms qu’on fait avec la caméra<strong>de</strong> l’école (il y en a juste une danstoute l’école, alors on ne l’a passouvent!).Le site Web perm<strong>et</strong> à nos parents <strong>de</strong>voir ce qu’on fait dans la classe <strong>et</strong>à d’autres classes <strong>de</strong> nous ai<strong>de</strong>rdans certains proj<strong>et</strong>s. Les visiteurspeuvent nous faire <strong>de</strong>s commentaires<strong>et</strong> parfois, on établit une conversation.Chaque classe <strong>de</strong> l’écolea un cybercarn<strong>et</strong> <strong>et</strong> on fait partied’un réseau <strong>de</strong> classes qui en ontAu suj<strong>et</strong> <strong>de</strong> l’utilisation que les enfants font d’Intern<strong>et</strong> :L’enquête N<strong>et</strong>Ados, initiée par le CEFRIO, perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> bien cerner lesprincipaux usages que les jeunes <strong>de</strong> 12 à 17 ans font d’Intern<strong>et</strong>. Pourconnaître les résultats <strong>de</strong> l’enquête pour l’année 2004, consulter le sitesuivant : http://www.cefrio.qc.ca/Communiques/commun_55.cfmAu suj<strong>et</strong> <strong>de</strong>s cybercarn<strong>et</strong>s : Il s’agit d’un site Web qui perm<strong>et</strong> <strong>de</strong>publier très simplement <strong>de</strong>s textes ou <strong>de</strong>s images sur Intern<strong>et</strong>, qui nenécessite aucune connaissance technique <strong>et</strong> qui comporte <strong>de</strong>s mécanismesperm<strong>et</strong>tant <strong>de</strong> signaler automatiquement aux personnesintéressées toutes les mises à jour <strong>du</strong> site. Plusieurs outils expliquentcomment créer ce type <strong>de</strong> site, notamment Movable Type <strong>et</strong> SPIP, quisont déjà utilisés par plusieurs écoles. Le potentiel pédagogique d’un telsite est impressionnant. Pour en savoir plus :http://carn<strong>et</strong>s.ixmedia.com/mario/archives/002424.htmlAu suj<strong>et</strong> <strong>de</strong> l’utilisation <strong>de</strong> la vidéo par les élèves : Le proj<strong>et</strong> St@rest particulièrement intéressant pour avoir <strong>de</strong>s exemples <strong>de</strong> ce que lesélèves parviennent à réaliser avec une caméra numérique dans un contextescolaire. Voir le site suivant : http://recit.cslaval.qc.ca/star/Au suj<strong>et</strong> <strong>de</strong>s éléphants <strong>du</strong> Zoo <strong>de</strong> Granby : L’exemple est fictif,mais il réfère au type d’interaction « hors les murs <strong>de</strong> l’école » quiest privilégié par <strong>de</strong>s proj<strong>et</strong>s comme Le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> Darwin <strong>et</strong> LeVillage Prologue. Pour en savoir plus : http://darwin.cyberscol.qc.ca <strong>et</strong>http://www.prologue.qc.ca/Au suj<strong>et</strong> <strong>de</strong>s portails scolaires : Les portails scolaires sont <strong>de</strong>s systèmesqui visent à simplifier l’accès <strong>de</strong>s élèves <strong>et</strong> <strong>de</strong>s enseignants auxressources d’Intern<strong>et</strong>. À partir d’un mot <strong>de</strong> passe, les utilisateurs disposentd’un environnement personnalisé qui leur perm<strong>et</strong> d’aller sur leWeb, <strong>de</strong> lire leurs courriels, <strong>de</strong> consulter <strong>de</strong>s ouvrages <strong>de</strong> référence oud’utiliser certains logiciels spécialisés. Plusieurs options s’offrent auxécoles <strong>et</strong> aux commissions scolaires qui souhaitent avoir un portail.Mentionnons particulièrement Collaba, probablement l’option la plussimple <strong>et</strong> MILLE, probablement la plus prom<strong>et</strong>teuse. Pour en savoirplus, consulter les sites : http://www.collaba.ca <strong>et</strong> http://www.mille.caAu suj<strong>et</strong> <strong>de</strong>s TIC à l’école, ailleurs dans le mon<strong>de</strong> : Les donnéescomparatives sont relativement difficiles à trouver, mais le recoupement<strong>de</strong> nombreuses étu<strong>de</strong>s indique que la différenciation se fait <strong>de</strong> plus enplus par les usages <strong>de</strong>s technologies à l’école <strong>et</strong> <strong>de</strong> moins en moins parle nombre ou la qualité <strong>de</strong>s équipements. À l’exception <strong>de</strong> proj<strong>et</strong>s particuliersbasés sur l’utilisation d’ordinateurs portables, comme dans leMaine, dans certaines régions <strong>de</strong> France <strong>et</strong> à la Commission scolaireEastern Townships, par exemple, on peut dire que les systèmes scolairesocci<strong>de</strong>ntaux sont à peu près tous comparables; ils se distinguentsurtout sur le plan <strong>de</strong>s approches pédagogiques utilisant les TIC.Au suj<strong>et</strong> <strong>de</strong> la situation particulière <strong>du</strong> Québec : Le rapport final<strong>du</strong> plan ministériel d’intervention pour l’intro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong>s technologies<strong>de</strong> l’information <strong>et</strong> <strong>de</strong>s communications à la formation générale <strong>de</strong>sjeunes <strong>et</strong> <strong>de</strong>s a<strong>du</strong>ltes (le plan Marois) fournit les informations les plus àjour quant aux statistiques. On peut télécharger ce rapport à l’adressesuivante : http://www.meq.gouv.qc.ca/drd/tic/pdf/bilan5.pdfAu suj<strong>et</strong> <strong>de</strong>s dons d’ordinateurs aux écoles : Le site Web <strong>de</strong>Ordinateurs pour les écoles <strong>du</strong> Québec donne toute l’informationdisponible à ce suj<strong>et</strong>. On peut y accé<strong>de</strong>r à :http://www.opeq.qc.ca/Au suj<strong>et</strong> <strong>du</strong> soutien offert aux enseignants québécois : Le RÉCIT(Réseau pour le développement <strong>de</strong>s compétences par l’intégration <strong>de</strong>stechnologies) est la principale source <strong>de</strong> soutien aux enseignants quiveulent utiliser les technologies <strong>de</strong> l’information <strong>et</strong> <strong>de</strong> la communicationen classe. Pour en savoir plus : http://www.recit.qc.caVIE 12 Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004


aussi chacune un. Le plus l’fun,c’est qu’on a aussi un système quinous perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> savoir automatiquementchaque matin ce que toutesles autres classes ont écrit <strong>et</strong> <strong>de</strong> leurrépondre facilement. Comme ça onpeut s’entrai<strong>de</strong>r <strong>et</strong> faire <strong>de</strong>s proj<strong>et</strong>sensemble. Même avec <strong>de</strong>s classes<strong>du</strong> Nouveau-Brunswick <strong>et</strong> d’Europe.On a aussi réalisé un proj<strong>et</strong> où oncorrespondait avec le responsable<strong>de</strong>s éléphants au Zoo <strong>de</strong> Granby.Il nous a même envoyé <strong>de</strong>s photos.Ça c’était cool!Clément : J’espère que tu sais qu<strong>et</strong>u es vraiment chanceux, Victorin.Ta classe est probablement parmiles mieux organisées au Québec.Il n’y a pas encore beaucoup <strong>de</strong>classes qui ont une page Web aussidynamique. Les cybercarn<strong>et</strong>s sontune chose encore très récente <strong>et</strong> oncommence à peine à les utiliserdans quelques écoles. Ça marchepresque toujours bien, parce quec’est très simple à utiliser <strong>et</strong>, jepense, parce que ça fait tomber lesmurs <strong>de</strong> l’école.Victorin : Faire tomber les murs <strong>de</strong>l’école? Qu’est-ce que tu veux dire?Ma classe est très soli<strong>de</strong>!;-)Clément : Pardonne-moi, c’est vraique ce n’est pas très clair. C’est uneexpression qui me tient à cœur,parce qu’il y quelques années, onvoyait Intern<strong>et</strong> surtout comme unefaçon d’avoir accès à plus d’informationsdans la classe. On disaitqu’Intern<strong>et</strong> était une gran<strong>de</strong> bibliothèque.Mais <strong>de</strong> plus en plus, on serend compte que c’est surtout unextraordinaire moyen <strong>de</strong> communiquer<strong>et</strong> <strong>de</strong> collaborer avec <strong>de</strong>s gens,même s’ils ne peuvent pas venirnous voir pour vrai. C’est ce quevous faites, non?Victorin : Oui, mais je trouve qu’iln’y a pas assez <strong>de</strong> classes qui fontcomme nous. Des fois on aimeraitcorrespondre avec plus <strong>de</strong> classes.On peut quand même le faire avecle courriel, presque toutes lesécoles en ont, mais ce n’est paspareil parce qu’on écrit à uneclasse à la fois <strong>et</strong> c’est moins l’fun.On a moins <strong>de</strong> commentaires <strong>de</strong>sgens, aussi. Mais l’an prochain,peut-être que ça va changer, parceque la directrice nous a dit qu’onaurait probablement un portail scolaire.Elle dit qu’avec ça, chaqueélève aura son propre mot <strong>de</strong> passe,son adresse <strong>de</strong> courriel <strong>et</strong> plein <strong>de</strong>logiciels pour travailler ensemble àl’ordinateur. J’ai hâte!Clément : C’est vrai que ce serabien quand les écoles auront toutesleur portail pédagogique.Dis-moi, tout à l’heure tu disais quevous correspon<strong>de</strong>z parfois avec <strong>de</strong>sélèves d’autres pays. Est-ce que tupenses que l’utilisation d’Intern<strong>et</strong>à l’école est bien organisée auQuébec? Où crois-tu que c’est mieuxailleurs, aux États-Unis ou en France,par exemple?Victorin : Je ne sais pas pour lesautres pays, mais je sais qu’il y abeaucoup plus d’ordinateurs aubureau <strong>de</strong> mes parents que dansmon école. J’aimerais qu’on en aitbeaucoup plus. Même que j’aimeraisqu’on ait tous un ordinateurportable, comme à l’école <strong>de</strong> moncousin.Clément : Tu as raison, l’ordinateurest beaucoup mieux implanté dansplusieurs milieux <strong>de</strong> travail quedans les écoles. Ça s’explique, maisc’est vrai que tu peux trouver çadécevant. C’est aussi vrai que plusieursécoles commencent à penserqu’il faudrait un ordinateur pourchaque élève… mais ça coûte trèscher pour l’instant <strong>et</strong> ça soulèvebeaucoup <strong>de</strong> questions. Je ne pensepas que c’est une pratique qui segénéralisera avant la fin <strong>de</strong> ton parcoursscolaire, même si ce seraitsuper intéressant.La plupart <strong>de</strong>s écoles que je connaischerchent plutôt à rendre facilel’accès à l’ordinateur <strong>et</strong> à Intern<strong>et</strong>,en se disant que l’important, c’estqu’il y ait assez d’ordinateurs dansune école pour que tous les élèvespuissent y avoir accès aussi souventqu’ils en ont besoin; <strong>et</strong> cela peutvarier selon les écoles. Tu croisqu’il y en a un assez grand nombredans ton école?Victorin : Non, vraiment pas! Il enfaudrait au moins <strong>de</strong>ux fois plus! Et<strong>de</strong>s plus rapi<strong>de</strong>s. Même les ordinateursneufs sont vieux!Clément : Imagine-toi qu’il y adix ans, il y avait dans les écoles<strong>du</strong> Québec un ordinateur pour21 élèves, alors qu’aujourd’hui,selon le ministère <strong>de</strong> l’É<strong>du</strong>cation,il y en a un pour 7 élèves. Mais c’estvrai que ce n’est sans doute pas assezencore. Et même si on n’a plustellement d’argent pour ach<strong>et</strong>er <strong>de</strong>sordinateurs neufs, la situation continue<strong>de</strong> s’améliorer, parce quele gouvernement <strong>du</strong> Québec <strong>et</strong>quelques entreprises donnent régulièrementleurs vieux ordinateursaux écoles. C’est pour ça que tu disque « même les ordinateurs neufssont vieux! ». L’année <strong>de</strong>rnière, lesécoles ont reçu <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te façonpresque 10 000 ordinateurs, <strong>et</strong> c<strong>et</strong>teannée, ce sera plus <strong>de</strong> 90 000, selonle site Web <strong>de</strong> l’organisme qui supervisela distribution <strong>de</strong>s ordinateurs.Victorin : Ils donnent leurs vieuxordinateurs aux écoles au lieu <strong>de</strong>les j<strong>et</strong>er?Clément : C’est vrai que c’est unpeu surprenant, mais ce n’est peutêtrepas si grave. Ça dépend <strong>de</strong> cequ’on veut faire avec les ordinateursà l’école.Victorin : C’est comme ça danstous les pays?Clément : À peu près. Quand on adécidé d’investir dans les ordinateurspour les écoles, le principalobjectif était <strong>de</strong> rattraper d’autresprovinces <strong>et</strong> d’autres pays, les États-Unis, en particulier. Aujourd’hui, onpeut dire que tous les pays occi<strong>de</strong>ntauxsont à peu près dans la mêmesituation, avec environ un ordinateurpour sept ou huit élèves (unpeu plus aux États-Unis, un peumoins dans la plupart <strong>de</strong>s payseuropéens).Ce qui est le plus différent d’un paysà l’autre, c’est qu’à certains endroits,on laisse les enseignants explorereux-mêmes les nombreuses possibilités<strong>de</strong>s TIC, alors qu’ailleurs, ondit carrément aux enseignants quoifaire. Au Québec, nous avons plutôtchoisi <strong>de</strong> laisser les profs explorer…avec un tout p<strong>et</strong>it peu d’ai<strong>de</strong>(heureusement ils peuvent comptersur le soutien <strong>de</strong> quelques pionnierspour favoriser l’entrai<strong>de</strong>!). Onpropose aussi aux profs quelquesVie pédagogique 132, septembre-octobre2004proj<strong>et</strong>s auxquels ils peuvent sejoindre avec leurs élèves, mais ilssont assez rares. Le plus souvent, cesont les profs qui les inventent.Mais dis donc, on a pas mal fait l<strong>et</strong>our <strong>de</strong> la situation <strong>de</strong>s technologiesà l’école, que r<strong>et</strong>iens-tu <strong>de</strong> tout ça?De quoi parleras-tu dans ton exposition?Comment le mon<strong>de</strong> a-t-ilchangé à ce suj<strong>et</strong> <strong>de</strong>puis ta naissance,il y a dix ans?Victorin : Je ne sais pas trop… jevois bien que les a<strong>du</strong>ltes ont faitbeaucoup d’efforts, mais je ne comprendspas vraiment pourquoi c’estsi compliqué d’avoir <strong>de</strong>s ordinateursqui fonctionnent bien à l’école,alors que presque tout le mon<strong>de</strong>dans ma classe en a un à la maison.Alors je pense que je vais dire quele mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>s technologies dans lesécoles a eu le temps <strong>de</strong> changer<strong>de</strong>ux fois <strong>de</strong>puis que je suis né. Audébut, il n’y avait pas d’ordis dansles maisons, ni non plus à l’école.Ensuite, il y a eu <strong>de</strong>s ordis neufsdans les écoles, <strong>et</strong> maintenant il y a<strong>de</strong>s ordis neufs dans les maisons <strong>et</strong><strong>de</strong> vieux ordis dans les écoles.Je dirai aussi qu’au début, quelquesprofs savaient mieux utiliser lesordinateurs que les élèves <strong>et</strong> quemaintenant ce sont les élèves quisavent le mieux le faire… mais quenous avons besoin <strong>de</strong>s profs poursavoir comment bien se servir <strong>de</strong>l’ordinateur pour apprendre… <strong>et</strong>pas juste télécharger <strong>de</strong> la musiqueou faire <strong>du</strong> chat!C’est à peu près ainsi que notreéchange <strong>de</strong> courriels a pris fin. Etsi j’ai cru bon rassembler par lasuite quelques informations complémentaires(voir l’encadré) j’aisurtout r<strong>et</strong>enu <strong>de</strong> ma conversationavec Victorin que le plusgrand défi qui attend les écoles ausuj<strong>et</strong> <strong>de</strong>s TIC, c’est d’arriver àtenir compte <strong>de</strong>s usages que lesjeunes en font à la maison ouchez leurs amis. Que ce soit pours’en inspirer ou pour les contrecarrer,il faudra d’abord les comprendre.M. Clément Laberge est consultanten é<strong>du</strong>cation. On peut communiqueravec lui à l’adresse <strong>de</strong>courriel claberge@opossum.ca.PÉDAGOGIQUE 13<strong>DOSSIER</strong>


QU’EN PENSENT LES ENSEIGNANTS?par Marie-France LabergeTABLE RONDE D’ENSEIGNANTS ET D’ENSEIGNANTES<strong>DOSSIER</strong><strong>Dans</strong> nos écoles, il y a en cemoment une préoccupationconcernant l’influence <strong>de</strong>sTIC sur les façons d’enseigner <strong>et</strong>d’apprendre. Les TIC transformentle rapport au savoir, la gestion <strong>de</strong>classe <strong>et</strong> les dispositifs pédagogiques…Vie pédagogique a vouluvérifier auprès <strong>de</strong>s enseignantes <strong>et</strong><strong>de</strong>s enseignants quelle est la place<strong>de</strong>s technologies <strong>de</strong> l’information <strong>et</strong><strong>de</strong> la communication dans leur vie<strong>et</strong> comment se vit l’intégration <strong>de</strong>sTIC en classe. C’est <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te problématiquequ’ont discuté dix enseignants<strong>et</strong> enseignantes <strong>du</strong> primaire<strong>et</strong> <strong>du</strong> secondaire lors d’une tableron<strong>de</strong> qui a eu lieu le 10 mars<strong>de</strong>rnier.QUELLES SONT LESCONDITIONS QUI FACILITENTL’INTÉGRATION DESTECHNOLOGIES DEL’INFORMATION ET DE LACOMMUNICATION EN CLASSE?Selon Clau<strong>de</strong> Gagnon, bien que certainesconnaissances techniques <strong>de</strong>base soient nécessaires, nul besoind’être expert pour s’y m<strong>et</strong>tre. « Quandnous avons le désir <strong>de</strong> mener àterme un proj<strong>et</strong> qui pour nous a <strong>du</strong>sens, les technologies s’intègrenttrès bien. Chez nous, même lesnovices ont embarqué dans le proj<strong>et</strong>Grammaire par la ban<strong>de</strong> 1 parcequ’ils étaient intéressés au proj<strong>et</strong>…le proj<strong>et</strong> c’est le moteur, finalement. »Michelle Fournier croit égalementque ça prend un minimum <strong>de</strong> connaissances,mais souvent, les enfantssont rassurés <strong>de</strong> voir « que nousaussi, il peut nous en manquer <strong>de</strong>sbouts <strong>et</strong> ils sont fiers <strong>de</strong> fouillerpour nous compléter, ça les motive<strong>et</strong> eux nous motivent. Par contre,il y a parfois <strong>de</strong>s groupes d’élèvesqui nous freinent, car ils sont habitués<strong>de</strong> travailler dans les manuels<strong>et</strong> sont plus intéressés à continuercomme ça. » Patrice Prud’hommecroit qu’au secondaire, l’organisationscolaire doit être revue pourfaciliter une réelle intégration <strong>de</strong>sTIC, car actuellement, les ordinateurssont très souvent au laboratoire<strong>et</strong> non en classe <strong>et</strong> dansGuy Boucher : Enseignant<strong>de</strong> scienceshumaines au secondaire,il a été parmi lespremiers étudiants àtravailler avec les TIC,il y a 10 ans, au cégep<strong>et</strong> à l’université. Il sesert <strong>de</strong>puis longtempsd’Intern<strong>et</strong> <strong>et</strong> utilise <strong>de</strong>plus en plus l’ordinateurau fil <strong>de</strong>s ans,mais ça <strong>de</strong>meure unoutil… un outil qu’onne pourra plus éviter.Photo : Denis Garoncertaines écoles, dès septembre, ilfaut réserver la pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> labopour l’année!Patrice Pich<strong>et</strong> est convaincu qu’ilfaut s’équiper personnellementpour se familiariser avec les TIC.Mais puisqu’il n’y a jamais eu<strong>de</strong> programme ou <strong>de</strong> politiquenationale <strong>de</strong> subvention pour lesenseignants comme ce fut le caspour les familles (programmeBrancher les familles), c’est difficilepour plusieurs… Cela représenteune dépense pour <strong>du</strong> matérielqui, en plus, <strong>de</strong>vient rapi<strong>de</strong>mentdésu<strong>et</strong>. « Nous avons un ordinateurdans la salle <strong>de</strong>s profs pour douzepersonnes! Moi, c’est en ayantaccès à un ordinateur la fin <strong>de</strong>semaine, le soir ou pendant les congésque j’ai appris rapi<strong>de</strong>ment.L’école nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong> d’intégrercela <strong>et</strong> ne nous facilite aucunementla tâche; alors, comme nous pouvonstrès bien actuellement, encinquième secondaire par exemple,donner nos cours <strong>de</strong> français sanscela, plusieurs ne changent doncpas <strong>du</strong> tout leur pratique…quandon sait que souvent l’accès à lamachine donne le goût <strong>de</strong> s’y m<strong>et</strong>tre<strong>de</strong> plus en plus… c’est exponentiel,une fois qu’on s’y m<strong>et</strong>… » AndréeTurcotte ajoute que les enseignantsqui vont en formation sont souvent<strong>de</strong>s personnes qui étaient déjàintéressées par les TIC. Commentrejoindre les autres? Sophie Hamelajoute que lorsque quelques ordinateurs« plantent » en même temps,que les choses ne se déroulent pascomme prévu <strong>et</strong> que nous ne savonspas où ça va nous mener, il y aencore toutes sortes <strong>de</strong> peurs quisurgissent! « Mais les enfants, eux,n’ont pas peur, ça fait partie <strong>de</strong> leurvie. » C<strong>et</strong> avis est partagé parStéphane Côté, qui approuve : « Moiaussi, j’avais un jeune qui faisait <strong>de</strong>schoses que je ne pouvais pas faire;l’important, c’est <strong>de</strong> partager <strong>et</strong> lelevier, c’est la motivation <strong>de</strong>s élèves. »Au tour <strong>de</strong> Patrice Prud’hommed’ajouter : « Au début, je voyais çatellement gros… puis finalement,Patrice Pich<strong>et</strong> : Enseignant<strong>de</strong> français encinquième secondairedans une p<strong>et</strong>ite école,Patrice a été longtempstechnophobe, mais<strong>de</strong>puis qu’il a bénéficié<strong>du</strong> programme « Brancherles familles surIntern<strong>et</strong> », il est rapi<strong>de</strong>ment<strong>de</strong>venu presque« accro »; il a découvert<strong>de</strong> multiples possibilitésd’utilisation <strong>de</strong>sTIC, puis… il ne faitplus rien « à la main ».Photo : Denis GaronVIE 14 Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004


je m’aperçois que les élèves font pasmal tous la même chose chez eux,à l’ordinateur; ils s’y connaissentdans certains domaines seulement. »Puis, Ahmed Bensaada précise qu’àl’université, on ne forme pas lesenseignants à la gestion <strong>de</strong> labosd’informatique. Il faut surmonter lapeur d’être ridicule, savoir utiliserles connaissances <strong>de</strong>s élèves, prévoirun plan B. « Il ne faut pas oublierqu’il y a une différence entre savoir« pitonner » <strong>et</strong> faire un proj<strong>et</strong>. J’ai<strong>de</strong>s exemples d’élèves qui, audépart, connaissent peu l’outil,mais qui réussissent <strong>de</strong> très bonsproj<strong>et</strong>s intégrant les TIC. »QUELS SONT LES EFFETSDE L’INTÉGRATION DES TICSUR VOS PRATIQUES?Les réponses jaillissent <strong>de</strong> toutesparts. D’abord, Nathalie Frigon préciseque lorsqu’on a un ordinateur,on peut avoir <strong>de</strong> nouveaux objectifsqu’on n’avait pas auparavant. « Parexemple, maintenant les élèvescréent un conte multimédia; cecim’amène alors à me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rcomment je vais organiser maclasse. C’est le fait <strong>de</strong> vouloir travaillerà l’ordinateur qui m’a faitmodifier mon approche : j’ai inclusle travail en sous-groupe, les ateliers,j’ai ouvert ma porte à d’autresa<strong>du</strong>ltes, divisé ma classe pour faireparticiper au même proj<strong>et</strong> <strong>de</strong>sécrivains, <strong>de</strong>s artistes, <strong>de</strong>s photographes,<strong>et</strong>c. Des parents sontvenus m’ai<strong>de</strong>r <strong>et</strong> là, j’ai eu àréfléchir à ce que je faisais avecceux qui ne travaillaient pas à l’ordinateur…J’ai formé <strong>de</strong>s équipesd’experts, certains enfants en corrigentd’autres, <strong>et</strong>c. » Nathalie aconstaté que les jeunes se découvrent<strong>de</strong>s forces <strong>et</strong> i<strong>de</strong>ntifient aussi leursfaiblesses. « Le proj<strong>et</strong>, c’est bien différent,mon rapport à l’autorité achangé. Au proj<strong>et</strong> suivant, les élèvesse sont organisés beaucoup pluspar eux-mêmes <strong>et</strong> ils venaient mefaire part <strong>de</strong> leurs besoins. Pour cequi est <strong>de</strong>s apprentissages <strong>de</strong> base(écriture, lecture, arithmétique),je passe une gran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong> l’annéeà enseigner ces matières puisqueje travaille en première année <strong>et</strong> jene crois pas qu’il soit nécessaired’utiliser l’ordinateur pour cesMichelle Fournier :Enseignante <strong>de</strong> sixièmeannée au primaire,Michèle fait partie <strong>du</strong>groupe GRISE (Grouperessource en informatiquepour soutien auxenseignants) <strong>de</strong> sacommission scolaire.Elle a reçu une formationpour pouvoir ai<strong>de</strong>rd’autres enseignants àacquérir quelques connaissances<strong>de</strong> base <strong>et</strong>ne pas toujours avoirà dépendre <strong>du</strong> technicien.Michelle estune a<strong>de</strong>pte. Il est rarequ’une journée sepasse sans que l’ordinateuren classe ne soitutilisé.Photo : Denis Garonapprentissages; je suis plus traditionnellesur ce plan, je me sersplutôt <strong>de</strong> l’ordinateur quand lesélèves intègrent leurs apprentissagesdans leurs proj<strong>et</strong>s. »Pour plusieurs, intégrer les TICperm<strong>et</strong> <strong>de</strong> « raccrocher plusieursjeunes ». Patrice Prud’homme croitqu’il y a un « alignement favorable<strong>de</strong> planètes » actuellement : le travailpar proj<strong>et</strong>s, la coopération,les TIC… « Avec les élèves, on colleune réalité à <strong>de</strong>s grands termes, <strong>de</strong>stermes autrement tellement abstraitspour eux. Pour moi, ça se fait bienen exploitant les TIC. On gar<strong>de</strong> aussi<strong>de</strong>s traces <strong>de</strong> travaux d’élèves surCD, puis tes pairs vont te voir(comme le réparateur Maytag…)pour avoir <strong>de</strong> l’ai<strong>de</strong>, <strong>de</strong>s conseils;cela crée <strong>de</strong> nouvelles interactions. »Pour sa part, Ahmed Bensaada aremarqué que sa relation d’autoritéest différente lorsqu’il est au laboratoireavec ses élèves. « Je suisplus souvent assis à discuter aveceux, on va chercher <strong>de</strong>s infos, <strong>de</strong>scourriels. Quand on développe c<strong>et</strong>ype <strong>de</strong> relation, ça perm<strong>et</strong> d’allerplus loin ensuite, dans d’autrescontextes. Les élèves m’envoient <strong>de</strong>sfilms qu’ils ne peuvent pas m<strong>et</strong>tredans leur proj<strong>et</strong> parce qu’ils sonttrop lourds, ils me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>les transformer en GIF animé <strong>et</strong> jeleur montre comment le faire…L’informatique amène <strong>de</strong> nouveauxtypes d’interaction. Les élèves ontune évaluation par les pairs jumeléeà la mienne pour choisir quelstravaux seront mis en ligne à la fin<strong>du</strong> proj<strong>et</strong>; la moitié <strong>de</strong> la noteaccordée l’est par <strong>de</strong>s élèves…puis, une publication sur le Web,c’est la meilleure motivation. »En ce qui concerne le développement<strong>de</strong> compétences, AhmedBensaada précise que les proj<strong>et</strong>s<strong>de</strong> sciences incitent à intégrerl’anglais, parce que la plupart <strong>de</strong>sVie pédagogique 132, septembre-octobre2004Sophie Hamel : Enseignante<strong>de</strong> quatrièmeannée au primaire,Sophie s’est impliqué<strong>et</strong>out <strong>de</strong> suite quand leGroupe GRISE a étéformé. Elle a cinq ordinateursen classe <strong>et</strong> aaccès à trois portables.Les enfants sont trèsmotivés <strong>et</strong> veulent s’enservir; ils sont souvent« en proj<strong>et</strong> » <strong>et</strong> travaillentmieux qu’avant.étu<strong>de</strong>s scientifiques sont rédigésdans c<strong>et</strong>te langue. « On tra<strong>du</strong>it, onreçoit l’ai<strong>de</strong> <strong>du</strong> prof d’anglais, puis<strong>de</strong> l’enseignant <strong>de</strong> français, on ouvrevers d’autres disciplines <strong>et</strong> on toucheà toutes les compétences transversales,sauf une. »Pour sa part, Stéphane Côté est convaincuque l’un <strong>de</strong>s inconvénients<strong>du</strong> système même avec la réformeest que le jeune passe toutes sesclasses même s’il est en difficulté.« En sixième, j’ai <strong>de</strong>s élèves <strong>de</strong>niveau troisième à sixième… Cesélèves vivent l’échec avec succès! Enétant promu à chaque année, ils ontPhoto : Denis Garon<strong>DOSSIER</strong>PÉDAGOGIQUE 15


<strong>DOSSIER</strong><strong>de</strong> l’expérience dans l’échec! Quatreprofs leur ont déjà dit : t’es capable,tu vas l’avoir, <strong>et</strong> ça ne marchejamais... L’informatique m’ai<strong>de</strong> àleur faire vivre l’apprentissage sousune autre forme, je m<strong>et</strong>s moins l’accentsur l’aspect scolaire avec cesélèves <strong>et</strong> je trouve que j’arrive à leurfaire apprendre un peu plus. JeAhmed Bensaada :Enseignant <strong>de</strong> sciencephysique au secondaire,Ahmed est, à l’école,considéré comme MonsieurInformatique. Latechnologie est complètementintégrée à savie. Véritable technophile(doté d’un senscritique bien aiguisé <strong>et</strong><strong>de</strong> cinq adresses <strong>de</strong>courriel pour répondreà différents besoins!),il est responsable <strong>du</strong>site Web ainsi que<strong>du</strong> comité <strong>de</strong>s TIC <strong>de</strong>son école <strong>et</strong> fait partie<strong>de</strong> l’équipe Cyberscol,dans le proj<strong>et</strong> Sciencesanimées.Photo : Denis Garontente d’enseigner à partir <strong>de</strong>s vraieschoses, <strong>de</strong>s choses qui les touchentplutôt que d’enseigner pour passerà la classe suivante. Les élèves quivivent <strong>de</strong>s échecs à répétition commencentà vivre <strong>du</strong> succès véritable. »Stéphane constate que ses meilleureséquipes sont celles qui sontcomposées d’un élève fort en informatique,d’un autre fort en français,<strong>et</strong>c., car un proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> coopérationvéritable nécessite <strong>de</strong>s experts dansdivers domaines. Beaucoup d’apprentissagespersonnels se fontautour <strong>du</strong> proj<strong>et</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’intégration<strong>de</strong> l’informatique <strong>et</strong> les élèves<strong>de</strong>viennent plus efficaces.Andrée Turcotte précise que plusieursvol<strong>et</strong>s <strong>de</strong> la réforme appellent<strong>de</strong>s changements <strong>de</strong> pratiques <strong>et</strong>non pas seulement l’informatique.Les participants sont tous <strong>de</strong> c<strong>et</strong>avis. Michelle Fournier mentionneaussi l’écoute <strong>de</strong>s enfants commeun facteur important <strong>de</strong> réussitepour m<strong>et</strong>tre sur pied <strong>de</strong> nouvellesfaçons <strong>de</strong> faire; par exemple, à certainsmoments <strong>de</strong> l’année, les jeunesn’en peuvent plus d’être placés enîlots ou en dya<strong>de</strong>s. Il faut aussi êtrecritique par rapport à la réforme<strong>et</strong> savoir ce qui convient le mieuxà chacun. C<strong>et</strong>te question amènePatrice Pich<strong>et</strong> à souligner « que noussommes avant tout <strong>de</strong>s pédagogues<strong>et</strong> notre mission est d’amener lesélèves à se dépasser, à aller plusloin… à faire faire <strong>de</strong>s p<strong>et</strong>its pasaux plus faibles <strong>et</strong> <strong>de</strong>s plus grandspas à d’autres. Les TIC ai<strong>de</strong>nt, ellesmodifient nos pratiques, cela faitpartie <strong>de</strong> notre quotidien, mais ilfaut savoir regar<strong>de</strong>r intelligemmenttous les moyens que nous avons ».Guy Boucher a aussi changé sesfaçons <strong>de</strong> faire dans ses activitésparascolaires. « J’ai intégré plus <strong>de</strong>TIC au parascolaire <strong>et</strong> on a raccrochéd’autres types <strong>de</strong> jeunes qui,même en classe avec l’ordinateur,n’accrochent pas. J’ajouterais que,personnellement, le fait <strong>de</strong> rencontrerd’autres enseignants lors <strong>de</strong>c<strong>et</strong>te table ron<strong>de</strong> aujourd’hui vaAndrée Turcotte :Après avoir enseignépendant vingt ans,Andrée est maintenantconseillère pédagogiquepour l’intégration <strong>de</strong>sTIC au primaire. Elle estresponsable <strong>du</strong> proj<strong>et</strong>conventionné RESCOLSCIENTIC, qui génèrela rédaction d’articlesen sciences <strong>et</strong> technologie.m’amener à modifier égalementmes pratiques. Primaire <strong>et</strong> secondaireensemble, parler <strong>de</strong> nos bonscoups, c’est très énergisant. »QUELS LIENS FAITES-VOUSENTRE L’EXPLOITATION DESTIC ET LA DIFFÉRENCIATION?Ahmed Bensaada fait remarquerque c’est la pédagogie par proj<strong>et</strong>sPhoto : Denis Garonqui perm<strong>et</strong> la différenciation <strong>et</strong>, parricoch<strong>et</strong>, les TIC. Les participantss’enten<strong>de</strong>nt sur ce point. AndréeTurcotte précise que la différenciation,c’est pouvoir aller chercherailleurs ce qu’on n’a pas; il fautdonc se connaître, connaître sesforces, voir l’aspect positif <strong>de</strong> larelation avec les autres. SophieHamel a mis sur pied toutes sortes<strong>de</strong> façons d’organiser le temps <strong>et</strong>l’espace. Les TIC lui perm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong>travailler avec le portfolio électronique,une belle voie <strong>de</strong> différenciationqu’elle explore <strong>de</strong> plus en plusavec sa classe. Andrée ajoute quel’enseignant veut que ses élèvesaiment aller à l’école. « Il fautsavoir à quoi rêvent nos élèves <strong>et</strong>tenter <strong>de</strong> les amener vers leursrêves. Si l’informatique répond àcela pour certains, tant mieux.La différenciation est essentielle,parce qu’il y a trop <strong>de</strong> décrochage<strong>et</strong> d’élèves en difficulté dans nosclasses <strong>et</strong> que nous voulons que lejeune ait le goût <strong>de</strong> continuer. » Unconsensus s’établit autour <strong>du</strong> faitque les TIC poussent en tout cas àréfléchir <strong>et</strong> à revoir ses pratiques.Clau<strong>de</strong> Gagnon remarque que lesélèves en difficulté qui voient leurscopies claires <strong>et</strong> propres à l’ordinateursont fiers d’eux. « Les TICpeuvent ai<strong>de</strong>r à faire faire <strong>de</strong>s p<strong>et</strong>itspas à certains… <strong>et</strong> donnent aussi legoût d’apprendre aux a<strong>du</strong>ltes ».C<strong>et</strong>te réflexion amène Stéphane àparler <strong>de</strong> la façon dont cela se passeavec son groupe-classe. « J’enseigneplusieurs pério<strong>de</strong>s <strong>de</strong> façon traditionnelle<strong>et</strong> une pério<strong>de</strong> par jour àl’ordinateur; j’essaie <strong>de</strong> rendre l’enfantautonome – c’est un <strong>de</strong>s objectifsimportants <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te réforme –je l’ai<strong>de</strong> à développer <strong>de</strong>s compétencesen français, oui… mais sije ne lui montre que ça, ce n’est passuffisant pour vivre dans la sociétéVIE 16 Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004


Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004actuelle. Selon les capacités <strong>de</strong> chacun,je leur apprends à résoudre<strong>de</strong>s problèmes. Nous avons eu <strong>de</strong> ladifficulté à gérer le son dans notreproj<strong>et</strong> cinéma? Alors, nous l’avonstransformé en film mu<strong>et</strong>! Oui, çaNathalie Frigon : Enseignante<strong>de</strong> premièreannée à l’école privéeSelwyn House, oùchaque enseignant ason portable, Nathaliea accès à un équipementassez important.Depuis cinq ans,Nathalie réalise <strong>de</strong>s proj<strong>et</strong>s<strong>de</strong> création littéraire<strong>et</strong> artistique avecses jeunes élèves. Elleperçoit différemmentson rôle auprès <strong>de</strong>sélèves ainsi que sonrapport au savoir : l<strong>et</strong>ransfert d’expertiseest plus fréquent, oncherche à créer unecommunauté d’apprenantsaussi bien enclasse qu’à distance <strong>et</strong>il y a aussi interaction<strong>de</strong> l’être humain avec lamachine…Photo : Denis Garon<strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong>s investissementsincroyables, mais je suis fier <strong>de</strong> direqu’ensuite, 22 jours par année,je ne travaille pas… Ce sont lesélèves qui prennent les choses enmain; ils présentent leur proj<strong>et</strong> àd’autres classes, par exemple. Ilsutilisent l’informatique en situationauthentique… D’autres jeunesviennent les féliciter pour leursfilms! Je peux “ leur faire mangerbien <strong>de</strong> la misère ” pour qu’ils travaillentensuite à l’ordinateur. »COMMENT VOUS SENTEZ-VOUSPAR RAPPORT À L’ÉVOLUTIONSI RAPIDE DES TECHNOLOGIES?Patrice Prud’homme souligne quecertains sentent une pression <strong>et</strong>que ça n’a pas <strong>de</strong> raison d’être :«Le logiciel libre, les nouvelles applications…pourtant, ce qui <strong>de</strong>vraitcompter, c’est ce qu’on fait avec ».Ahmed ajoute qu’il ne faut pas toutsuivre à la l<strong>et</strong>tre; l’évolution est trèsrapi<strong>de</strong>, mais il faut tout <strong>de</strong> mêmeêtre dans l’air <strong>du</strong> temps. Certainsproblèmes que l’on éprouvait avantsont maintenant résolus, il faut lesavoir. Un autre participant précisequ’il se rallie aux standards internationaux;c’est là que le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>l’é<strong>du</strong>cation peut faire pression.Pour Clau<strong>de</strong> Gagnon, si on n’appliquepas la différenciation entreles enseignants, ces outils peuventfaire peur. On n’a pas le temps <strong>de</strong>maîtriser quelque chose avant queça change. « Si on a <strong>de</strong>s forces,aidons les autres pour qu’ils ne sesentent pas envahis. » Par contre,Guy Boucher constate que le changementfait tout le temps peur <strong>et</strong> ené<strong>du</strong>cation, c’est connu, ça prend <strong>du</strong>temps! « Quand on sera dans unenouvelle phase technique, certainsviendront d’entrer dans la phaseprécé<strong>de</strong>nte. C’est toujours commeça. »QUELLES SERAIENT LESCONDITIONS FACILITANTES POURAMENER LES ENSEIGNANTS« TECHNOLOGIQUEMENTTIMIDES » À OSER?Sophie Hamel nous rappelle l’importance<strong>de</strong> respecter les différenceschez les enseignants, l’importanceaussi <strong>du</strong> réseau humain. StéphaneCôté pense qu’il faut inviter lesenseignants à partager entre eux cequi se fait. « Regar<strong>de</strong>r ce que tesélèves sont capables <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ire,être spectateur <strong>et</strong> t’émerveiller <strong>de</strong>vantPatrice Prud’homme :Après avoir travaillé àCarrefour É<strong>du</strong>cation, ilest maintenant animateurau Service local <strong>du</strong>RÉCIT (Réseau <strong>de</strong>spersonnes-ressourcespour le développement<strong>de</strong>s compétences parl’intégration <strong>de</strong>s technologies).Patrice seperçoit comme un« technophobe guéri ».Photo : Denis Garonleur travail. Transm<strong>et</strong>tre aux autresenseignants que les résultats dépassent<strong>de</strong> beaucoup l’investissement.<strong>Dans</strong> ma classe, j’ai souventtrois évaluations <strong>de</strong> niveaux différents(comme au plongeon); l’élèvedéci<strong>de</strong> ce qu’il peut passer. On peutcommencer à proposer <strong>de</strong>s solutionsplutôt qu’uniquement <strong>de</strong>sproblématiques. » Andrée Turcottesoutient que les enseignants ontbesoin d’être rassurés car c’est vraique ce n’est pas <strong>du</strong> tout simple,avec 29 élèves. « Quand ils ont vécuune seule réussite, <strong>de</strong>s fois c’est ledépart! » Michelle Fournier rappellequ’il faudrait que <strong>de</strong>s genscomme elle (GRISE) soient <strong>de</strong> nouveaulibérés pour accompagner <strong>de</strong>senseignants. « Maintenant qu’il y abeaucoup <strong>de</strong> r<strong>et</strong>raités <strong>et</strong> <strong>de</strong> nouveauxprofs, ça <strong>de</strong>vrait être refait. »On s’entend pour dire qu’il faut aussiparler <strong>de</strong> la motivation <strong>de</strong>s enseignants.Ahmed Bensaada accompagne<strong>de</strong>s collègues qui se lancentdans <strong>de</strong>s proj<strong>et</strong>s <strong>de</strong> sciences. « Certainsprofs travaillent avec moi pourla première fois <strong>et</strong> l’année suivante,je ne les revois plus parce que c’esttrop <strong>de</strong> travail : il faut vérifier lesréférences, voir si le contenu estbon, parfois les élèves t’apportentune information dont tu n’as jamaisenten<strong>du</strong> parler <strong>et</strong> qu’il faut allervérifier… c’est énorme, <strong>et</strong> la premièreannée, c’est encore plus <strong>de</strong>travail! Pour aller chercher <strong>de</strong>sgens pour les proj<strong>et</strong>s, il faudraitvraiment leur libérer <strong>de</strong>s pério<strong>de</strong>s. »Par ailleurs, en général on avouequ’avant que les TIC ne <strong>de</strong>viennentun outil efficace, il faut se former,il faut comprendre ce qu’ellespeuvent apporter <strong>et</strong> souvent on lefait en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s heures <strong>de</strong> travail…Certains ne m<strong>et</strong>tront pas toutce temps! Il faudrait reconnaître l<strong>et</strong>emps nécessaire à l’intro<strong>du</strong>ction<strong>DOSSIER</strong>PÉDAGOGIQUE 17


<strong>DOSSIER</strong>Clau<strong>de</strong> Gagnon : Enseignantau primaire,il fait aussi partie <strong>du</strong>groupe GRISE <strong>de</strong> laCommission scolaire<strong>de</strong>s Chênes. Il a misbeaucoup <strong>de</strong> temps,ces <strong>de</strong>rnières années, àtravailler à l’intégration<strong>de</strong>s TIC en classe, maisil fait la part <strong>de</strong>schoses… il n’y a pasque « l’ordi »! Clau<strong>de</strong>gère le site Web <strong>de</strong>l’école <strong>et</strong> a égalementun site <strong>de</strong> classe intéressant,ce qui favorise,entre autres, le sentimentd’appartenance<strong>de</strong>s élèves.<strong>de</strong>s TIC en pédagogie dans la tâche<strong>de</strong> l’enseignant, au moins pour uncertain nombre d’années. Ça prendaussi un lea<strong>de</strong>rship pédagogique :le directeur <strong>de</strong>vrait i<strong>de</strong>ntifier lespersonnes dans son équipe qui ontPhoto : Denis Garon<strong>de</strong>s forces sur ce plan, organiser unplan <strong>de</strong> formation <strong>et</strong> d’accompagnement<strong>et</strong> ne pas compter que sur<strong>de</strong>s bénévoles.D’autre part, Nathalie Frigon se<strong>de</strong>man<strong>de</strong> si on incite suffisammentles enseignants à s’interroger ausuj<strong>et</strong> <strong>de</strong> la réforme. « Je fais partied’un groupe très critique <strong>et</strong> je croisque c’est bénéfique, mais comme j<strong>et</strong>ravaille dans un établissementd’enseignement privé, on sent peutêtremoins la pression qu’à l’écolepublique pour appliquer tout ça. »Nathalie parle aussi <strong>de</strong> sa découverted’un colloque qui lui a offert<strong>de</strong>s pistes <strong>de</strong> travail <strong>et</strong> <strong>de</strong> réflexion :« Je suis tombée en amour avecl’AQUOPS, un colloque où je suisalimentée par <strong>de</strong>s idées riches,stimulantes, intéressantes; finalement,nous nous rendons comptequ’il y a <strong>de</strong>s idées qui ont un impactimportant sur les relations avec lesautres enseignants <strong>et</strong> sur le travail<strong>de</strong>s élèves. Le questionnement estvraiment important; ensuite, nousexpérimentons tranquillement différenteschoses qui ne nous sontpas imposées d’en haut, mais quenous partageons plutôt entre nous. »Sophie Hamel trouve que si tout lemon<strong>de</strong> faisait la même chose, ceserait moins intéressant, « alorsc’est aussi très bien que <strong>de</strong>s enseignantsd’autres classes se focalisentsur autre chose que les TIC, surd’autres types <strong>de</strong> proj<strong>et</strong>s ». Stéphanerenchérit : « Les profs <strong>de</strong>vraient passeraux jeunes leurs forces, leurspassions aussi. » Cependant, il fautformer, accompagner, outiller lesenseignants <strong>et</strong> comme le dit Clau<strong>de</strong>Gagnon : « Comment apprendre labicycl<strong>et</strong>te sans bicycl<strong>et</strong>te à la maison?Outillons les profs! »CONCLUSIONIl semble donc que les TIC soientlà pour rester <strong>et</strong> qu’étant donné lavaleur ajoutée qu’elles apportent à<strong>de</strong> nombreuses sphères <strong>du</strong> travail <strong>de</strong>l’élève <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’enseignant, on seraitfou <strong>de</strong> s’en passer! Cependant, tousles enseignants rencontrés aujourd’huirappellent l’importance <strong>du</strong>regard critique nécessaire pourStéphane Côté : Enseignant<strong>de</strong> 6 e année,il apprécie le fait d’avoird’abord enseigné l’é<strong>du</strong>cationphysique, car ila toujours appris auxélèves à coopérer.Donner un sens à l’apprentissage: c’est là oùil tente <strong>de</strong> travailler leplus fort… augmenterl’estime <strong>de</strong> soi, entreautres au moyen <strong>de</strong>l’ordinateur, représentepour lui une priorité<strong>et</strong> il est égalementtrès important que lesjeunes constatent lerésultat <strong>de</strong> leurs efforts,qu’ils voient levisage <strong>de</strong>s autresjeunes s’illuminer!Photo : Denis Garonassurer une intégration en classequi soit signifiante, enrichissante <strong>et</strong>stimulante.De plus, il est clair que le milieu <strong>de</strong>l’é<strong>du</strong>cation se trouve actuellementen recherche, en phase <strong>de</strong> tâtonnementpar rapport à l’intégration<strong>de</strong>s technologies <strong>de</strong> l’information <strong>et</strong><strong>de</strong> la communication en classe.Mais à c<strong>et</strong>te phase correspond àtout le moins une attitu<strong>de</strong> assezrépan<strong>du</strong>e d’ouverture vis-à-vis lechangement proposé, les enseignantspouvant maintenant entrevoir certainespossibilités d’utilisation <strong>de</strong>sTIC. Plusieurs proj<strong>et</strong>s <strong>de</strong> plus en plusconcr<strong>et</strong>s <strong>et</strong> étoffés sont en train <strong>de</strong>naître. Selon les participants à notr<strong>et</strong>able ron<strong>de</strong>, les caractéristiques <strong>de</strong>sTIC favoriseraient l’adoption d’uneapproche socioconstructiviste quiplace le jeune au centre <strong>du</strong> processusd’apprentissage <strong>et</strong> qui m<strong>et</strong>en avant la construction plutôt quela transmission <strong>de</strong> connaissances.L’utilisation <strong>de</strong>s TIC en classe seraitun vecteur <strong>de</strong> changement pédagogiqueperm<strong>et</strong>tant <strong>de</strong> modifier lerapport au savoir <strong>de</strong>s enseignants <strong>et</strong><strong>de</strong>s élèves, ainsi que le rôle <strong>de</strong> chacun.Plus qu’un simple obj<strong>et</strong> d’apprentissage,les TIC <strong>de</strong>viennent unnouveau moyen pour l’enseignement<strong>et</strong> l’apprentissage <strong>et</strong> nousassistons peu à peu à une modificationgra<strong>du</strong>elle <strong>de</strong>s croyances <strong>et</strong> <strong>de</strong>spratiques <strong>de</strong>s enseignants.M me Marie-France Laberge estanimatrice au Service national<strong>du</strong> RÉCIT - Domaine <strong>de</strong>s langues.1. S’amuser <strong>et</strong> créer en jouant avec lesrègles <strong>de</strong> grammaire, est-ce possible?Grammaire par la ban<strong>de</strong> propose unedémarche stimulante où l’élève <strong>de</strong>vient lecréateur d’une ban<strong>de</strong> <strong>de</strong>ssinée m<strong>et</strong>tant enscène <strong>de</strong>s personnages qui évoluent dansun mon<strong>de</strong> où les règles sont la trame <strong>de</strong>l’aventure.VIE 18 Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004


Où sont les maîtres en intégrationpédagogique <strong>de</strong>sTIC? Si nous sommes <strong>de</strong>smaîtres en <strong>de</strong>venir, en quoi <strong>de</strong>vonsnousl’être au juste? Avec toutes lestâches qui nous incombent, certainesrevêtant un caractère urgentsur le plan relationnel en réponse à<strong>de</strong>s besoins essentiels, pourquoiest-il nécessaire d’accor<strong>de</strong>r unepriorité à l’intégration pédagogique<strong>de</strong>s TIC?C’est un rêve <strong>de</strong> partenariat entre lemon<strong>de</strong> scolaire <strong>et</strong> le mon<strong>de</strong> universitairequi m’a amenée à participerà une recherche en intégrationpédagogique <strong>de</strong>s TIC. Comme j’étaisvraiment débutante en matièred’habil<strong>et</strong>é à utiliser les TIC, je mesuis sentie poussée dans la piscine,en eau profon<strong>de</strong>; il a bien fallu quej’apprenne à nager! Après c<strong>et</strong>teexpérience, comment ne pas êtreen accord avec la politique <strong>du</strong> pas àpas?Je suis donc sortie <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te piscineen ayant compris qu’avant <strong>de</strong> nousengager dans un partenariat avec lemon<strong>de</strong> universitaire, il fallait s’assurerd’avoir l’appui <strong>de</strong> la direction<strong>de</strong> notre école <strong>et</strong> obtenir que lemon<strong>de</strong> universitaire veuille bienécouter <strong>et</strong> respecter notre réalitéscolaire. Mais j’en suis sortie égalementfascinée par l’accès possible àd’innombrables sources d’information<strong>et</strong> particulièrement aux facilités<strong>de</strong> communication qu’offre Intern<strong>et</strong>;celles, entre autres, qui nous perm<strong>et</strong>tent<strong>de</strong> communiquer avec unmembre <strong>de</strong> notre famille ou un amiqui vit au loin ou <strong>de</strong> consulter unexpert.Avec l’arrivée <strong>de</strong>s ordinateurs dansnos classes, que se pro<strong>du</strong>it-il? Bienenten<strong>du</strong>, il faut d’abord que vosélèves aient accès aux ordinateurs!Si c’est le cas, quels types d’activitésleur proposez-vous? Le site Appui-Motivation, basé sur les recherches<strong>de</strong> Roch Chouinard (2004), nousfournit une grille intéressante pouranalyser la qualité <strong>de</strong> nos interventionsen classe.Si vous commencez à peine votreapprentissage <strong>de</strong>s TIC, je comprendsqu’un mon<strong>de</strong> inconnu, quel’on ne peut s’approprier sans yaccor<strong>de</strong>r beaucoup <strong>de</strong> temps,provoque <strong>de</strong>s résistances. Ce nesont pas tous les enseignants quisont attirés par les activités à l’ordinateur.En eff<strong>et</strong>, le concept <strong>de</strong>sintelligences multiples ne se limitepas aux enfants. Que dire <strong>de</strong>sdangers évi<strong>de</strong>nts associés aux TIC,les sites indésirables, par exemple,<strong>de</strong> même que le manque d’activitéphysique <strong>de</strong> plusieurs jeunes? Où sesitue notre responsabilité?La réforme <strong>de</strong> l’école québécoise amis en lumière la nécessité d’apporter<strong>de</strong>s changements importantsdans la relation maître-élève afinqu’elle joue mieux son rôle. Ici,c’est à partir <strong>du</strong> point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> l’intégration<strong>de</strong>s TIC que <strong>de</strong>s modificationsdans la relation maître-élèvesont abordées pour en arriver à uneéventuelle transformation.LA RELATION MAÎTRE-ÉLÈVEEST-ELLE MODIFIÉE OUDOIT-ELLE SE MODIFIER...• PARCE QUE LE MONDE DEL’ORDINATEUR A ENVAHI TOUTESLES SPHÈRES D’ACTIVITÉMODERNES?L’arrivée <strong>de</strong>s ordinateurs dans nosclasses est récente <strong>et</strong>, pour certainsd’entre nous, l’événement est encoreen gestation. Ainsi, le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> larecherche ne peut pas prétendre àune gran<strong>de</strong> connaissance. Mais lemouvement est inévitable, les ordinateursenvahissent tous les domainesd’activité publics <strong>et</strong> privés. L’écoledoit, avec discernement, ai<strong>de</strong>r lesjeunes à faire face à c<strong>et</strong>te réalité.Affirmons-le tout <strong>de</strong> suite, noussavons que l’ordinateur ne remplacerajamais l’apport essentield’une bonne relation pédagogique.Même si certains experts ont laisséentendre que l’ordinateur pouvait<strong>de</strong>venir notre meilleur ami, peutêtreparce qu’il fait preuve d’unepatience infinie, nous espéronsqu’ils pourront également reconnaîtreles richesses incommensurables<strong>de</strong>s relations humainesréelles. Nous sommes à l’ère nonseulement <strong>du</strong> partage <strong>de</strong> nos différentesexpertises, mais aussi <strong>de</strong> lacréativité qui peut naître d’une collaborationnovatrice.<strong>Dans</strong> c<strong>et</strong> ordre d’idées, pour<strong>de</strong>venir une véritable organisationapprenante, P<strong>et</strong>er Senge <strong>et</strong> ses collaborateurs(2000) affirment quel’art <strong>de</strong> la conversation est considérécomme plus important que lesordinateurs <strong>et</strong> la recherche sophistiquée.Ils ajoutent qu’il est nécessaire<strong>de</strong> communiquer concernant<strong>de</strong>s questions difficiles, quand nossentiments entrent en jeu à propos<strong>de</strong> nos droits ou lorsque <strong>de</strong>uxprincipes valables sont en conflit.Nous ne pouvons pas faire l’économie<strong>du</strong> travail d’équipe nécessaire.Oui aux ordinateurs, pour avoiraccès à la culture, mais apprenonssurtout à mieux vivre ensemble.Il faut être aveugle pour ne pas voirl’envahissement <strong>du</strong> mon<strong>de</strong> économiqueau moyen <strong>de</strong>s ordinateursprésents dans nos écoles. M<strong>et</strong>tre<strong>de</strong>s freins n’apparaît pas être lasolution, mais en composant avec l<strong>et</strong>rain gran<strong>de</strong> vitesse <strong>de</strong>s TIC, lescitoyens les plus responsables <strong>de</strong>notre société peuvent-ils donnerune direction à ce mouvement?• ...PARCE QUE L’ÉCOLE NE DOIT PASRESTER INDIFFÉRENTE AU FAITQUE LA CLASSE DOMINANTE SEVie pédagogique 132, septembre-octobre2004FASCINÉE MALGRÉ LES DIFFICULTÉS!Réflexions d’une enseignante sur la transformation <strong>de</strong> la relation maître-élèveà travers son expérimentation en intégration pédagogique<strong>de</strong>s technologies <strong>de</strong> l’information <strong>et</strong> <strong>de</strong> la communication (TIC).par Céline GravelDISTANCE ENCORE PLUS AVECL’AVÈNEMENT DES TIC?C’est un fait qu’avec l’avènement<strong>de</strong>s TIC le pouvoir <strong>de</strong> la classe dominantes’est accru. Il s’agit d’un outilpuissant, qui peut servir à construirecomme il peut servir à détruire. Delà la nécessité d’instaurer la qualité<strong>de</strong> l’é<strong>du</strong>cation, elle-même essentielleà la qualité <strong>de</strong> la vie sur laterre.À c<strong>et</strong> égard, P<strong>et</strong>rella (2000) nousm<strong>et</strong> en gar<strong>de</strong> quant à l’é<strong>du</strong>cationpour la ressource humaine, oucomment l’é<strong>du</strong>cation pour <strong>et</strong> par lapersonne a pu être évincée. L’é<strong>du</strong>cationest vue comme un instrument<strong>de</strong> survie, à l’ère <strong>de</strong> lacompétitivité mondiale; elle a ététransformée en un « lieu » où l’onapprend une culture <strong>de</strong> guerre(« mieux réussir que les autres <strong>et</strong> àleur place ») plutôt qu’une culture<strong>de</strong> communauté (« vivre ensembleavec les autres dans l’intérêtgénéral »).Cependant, nombreux sont ceux quicroient <strong>et</strong> travaillent à une é<strong>du</strong>cationfondée sur une perspectiveplanétaire, comme en rend comptele rapport <strong>de</strong> Hrimech <strong>et</strong> Jutras(1997). L’é<strong>du</strong>cation dans une perspectiveplanétaire repose sur uneconviction, celle qu’il est souhaitable– voire indispensable à lasurvie <strong>de</strong> l’humanité – que l’êtrehumain ait l’occasion <strong>de</strong> se développer<strong>de</strong> manière équilibrée <strong>et</strong>harmonieuse dans le respect <strong>de</strong> lapersonne, dans la paix, la justice,l’honnêt<strong>et</strong>é, l’entrai<strong>de</strong>, la solidarité,le respect <strong>de</strong>s autres <strong>et</strong> la foi enl’humanité.Il importe donc d’assurer unesoli<strong>de</strong> formation sur le plan <strong>de</strong>svaleurs afin que nos élèves aientle goût <strong>de</strong> <strong>de</strong>venir <strong>de</strong>s citoyensresponsables. Comme le dit bienLouise Dupuis Walker (1997) dansson analyse <strong>du</strong> potentiel extraordinaire<strong>de</strong> la ressource é<strong>du</strong>cativeque constitue le réseau Intern<strong>et</strong>,c<strong>et</strong>te haute technologie qui perm<strong>et</strong>une ouverture sur le mon<strong>de</strong> exigecependant que les personnes quiPÉDAGOGIQUE 19<strong>DOSSIER</strong>


<strong>DOSSIER</strong>s’en servent apprennent quelquechose <strong>de</strong> fondamental qui est lepropre <strong>de</strong> l’école : dégager le sens<strong>de</strong> l’information, c’est-à-dire l’examineravec un esprit critique.Puisqu’il n’y a pas toujours <strong>de</strong>sa<strong>du</strong>ltes présents lorsque les jeunesutilisent Intern<strong>et</strong>, il vaut mieuxcommencer dès leur jeune âge àdévelopper leur jugement. Pourtous les enfants avec qui les parentsdiscutent peu ou qui ne sont pasencouragés à développer un espritcritique, l’école n’est-elle pas unacteur <strong>de</strong> premier plan?• ...PARCE QUE C’EST LA LOIET QUE, DANS SON NOUVEAUCURRICULUM, LE MINISTÈRE DEL’ÉDUCATION LE DEMANDE?La réforme <strong>de</strong> l’école québécoise(2000) propose <strong>de</strong> nombreuxchangements aux enseignants. Deschangements qui veulent favoriser<strong>de</strong>s apprentissages. Nous savons,pour qu’il y ait apprentissage, qu’ilest nécessaire que les activités aient<strong>du</strong> sens, <strong>de</strong> la signification pour lesélèves. Est-ce qu’il peut en êtreautrement pour les enseignants?Plusieurs <strong>de</strong> ces changementsnécessitent <strong>de</strong> profon<strong>de</strong>s remisesen question; nous avons doncbesoin <strong>de</strong> temps pour réfléchir <strong>et</strong>pour partager nos expériences.Nous ne pouvons pas effectuer tousles changements en même temps.Le domaine <strong>de</strong>s TIC semble pouvoirêtre un levier <strong>de</strong> changement efficace.Plusieurs conditions sont néanmoinsà m<strong>et</strong>tre en place relativementau matériel, au soutientechnique <strong>et</strong> à la formation pouratteindre les objectifs fixés. Il s’agitd’un domaine très exigeant dans leprocessus <strong>de</strong> changement. Maispour tous ceux <strong>et</strong> celles qui aimentapprendre, <strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong>ressources sont accessibles.<strong>Dans</strong> nos écoles, nous aurionsavantage à m<strong>et</strong>tre à profit les différentesforces que nous avonsdéveloppées comme enseignants.Pour l’intégration pédagogique <strong>de</strong>sTIC, je trouve très efficace que lesoutien technique soit donné auxélèves en notre présence, pourrépondre à <strong>de</strong>s besoins dans laréalisation <strong>de</strong> proj<strong>et</strong>s.• ...PARCE QUE NOUS NE POUVONSPLUS PRÉTENDRE DÉTENIRTOUTES LES CONNAISSANCESNÉCESSAIRES?L’enseignant n’est plus le granddétenteur <strong>de</strong> la connaissance. Lesélèves apprennent plus vite que nousà utiliser les TIC, alors que pour lesa<strong>du</strong>ltes débutants, elles créent souventune surcharge cognitive. Voilàun bel exemple d’adaptation profon<strong>de</strong>!Personnellement, j’ai découvert quela solution est <strong>de</strong> faire preuve d’humilité<strong>et</strong> <strong>de</strong> savoir puiser dans lesforces <strong>de</strong> nos élèves. Il est avantageux<strong>de</strong> s’intéresser aux sourcesd’information <strong>et</strong> aux activités é<strong>du</strong>cativesaccessibles sur Intern<strong>et</strong>.Avoir <strong>de</strong>s élèves experts dans laclasse pour répondre à <strong>de</strong>s besoinstechniques s’avère efficace <strong>et</strong> précieux.On constate à quel point ilspeuvent développer leurs habil<strong>et</strong>ésdans un contexte d’entrai<strong>de</strong>.Mais parfois les élèves risquent <strong>de</strong>fur<strong>et</strong>er, sans travailler à <strong>de</strong>s apprentissagesqui leur seraient profitables.Sans vouloir tout contrôler, notrerôle d’enseignant est indéniablequant aux prises <strong>de</strong> conscience àfavoriser. Entre autres, pour nepas se laisser envahir par les nombreusessources d’information, ils’agit <strong>de</strong> cibler quelques bonnessources <strong>et</strong> <strong>de</strong> prendre le tempsd’approfondir, <strong>de</strong> focaliser sur <strong>de</strong>ssavoirs <strong>et</strong> <strong>de</strong>s habil<strong>et</strong>és.Il est intéressant <strong>de</strong> noter qu’avecles ordinateurs, la plupart <strong>du</strong> tempsnous nous r<strong>et</strong>rouvons physiquement<strong>du</strong> même côté que nos élèves<strong>et</strong> non plus constamment face àeux, dans une position autoritaire.Nous regardons dans la mêmedirection, nous nous intéressonsensemble à une source d’informationextérieure.Il y a quelques années, je n’invitaispas aussi souvent mes élèves à consulter<strong>de</strong>s documents ou <strong>de</strong>s personnes-ressourcessur Intern<strong>et</strong>.Nous avions appris à l’université àpréparer nos leçons en <strong>de</strong>meurantmaître <strong>de</strong> la situation <strong>du</strong> début à lafin. Aujourd’hui, les questions sontouvertes <strong>et</strong> les réponses multiples.Non seulement parce que nos connaissancesont augmenté, maisparce que nous avons accès à différentespersonnes à travers lemon<strong>de</strong> qui ont <strong>de</strong>s vécus différents<strong>et</strong> <strong>de</strong>s systèmes <strong>de</strong> valeurs qui leursont propres. Les ordinateurs nenous apprendront pas à fairepreuve <strong>de</strong> sagesse, mais ils peuventperm<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> créer <strong>de</strong>s liens <strong>et</strong> <strong>de</strong>favoriser la compréhension entredifférentes communautés.• ...PARCE QU’UNE CLASSE FERMÉESUR ELLE-MÊME NE RÉPOND PASAUX BESOINS DES JEUNES?Il faut adm<strong>et</strong>tre qu’une classe ferméesur elle-même <strong>et</strong> ayant commeseuls outils le papier <strong>et</strong> le crayon nerépond pas aux besoins <strong>de</strong>s jeunes.À plus forte raison si les élèves ontvécu <strong>de</strong> nombreux échecs avec cesmêmes outils. Pour gar<strong>de</strong>r nosélèves éveillés, il faut leur présenter<strong>de</strong>s activités qui les intéressent. Ilfaut aussi trouver un équilibre entreles activités indivi<strong>du</strong>elles, en équipe<strong>et</strong> en groupe, <strong>de</strong>s activités qui perm<strong>et</strong>tentd’effectuer régulièrement<strong>de</strong>s liens entre les concepts enseignés<strong>et</strong> ce que vivent les jeunes.Actuellement, notre classe collaboreavec <strong>de</strong>s classes <strong>de</strong> France àl’ai<strong>de</strong> <strong>du</strong> courriel, <strong>du</strong> clavardagepédagogique <strong>et</strong> <strong>de</strong> la vidéocommunication.Il est beaucoup plus facile<strong>de</strong> valoriser la nécessité d’un travail<strong>de</strong> qualité auprès <strong>de</strong> nos jeuneslorsque nous savons qu’il s’inscritdans une collaboration internationale.Écrire à notre correspondantest fort différent d’effectuer l<strong>et</strong>ravail seulement parce que notreprof nous l’a <strong>de</strong>mandé. N’allez pascroire qu’il s’agit ici <strong>de</strong> sélectionnernos meilleurs élèves comme celapouvait se faire traditionnellement.Tout un chacun dans la classe peuts’investir selon ses capacités. <strong>Dans</strong>un tel contexte, l’enseignant quitteson statut <strong>de</strong> juge <strong>et</strong> prend à cœurla réussite <strong>de</strong> ses élèves. Il y a uneacceptation <strong>et</strong> un respect <strong>de</strong>s différencesà développer d’un milieu àl’autre. Nous apprenons à nousconnaître pour mieux tendre versune communauté d’apprentissage.Cela dit, nos activités stimulantesn’ont pas toutes besoin d’ordinateurs.Nous n’avons qu’à penser àl’expression par les arts. <strong>Dans</strong> unautre domaine, par exemple, lors<strong>de</strong> notre <strong>de</strong>rnière activité <strong>de</strong> vidéocommunicationoù une partie <strong>de</strong>sélèves communiquaient avec leurscorrespondants sur le thème « Cequi nous caractérise! », les autresanimaient <strong>de</strong>s activités auprès <strong>de</strong>senfants <strong>de</strong> la maternelle sur lesthèmes <strong>du</strong> poisson d’avril <strong>et</strong> <strong>du</strong>printemps. Plusieurs jeunes ontpréféré l’expérience en maternelleà celle <strong>de</strong> la vidéocommunication.• ...PARCE QUE L’ORDINATEURNOUS OFFRE DE NOMBREUSESPOSSIBILITÉS DE METTREEN PLACE DES ACTIVITÉSSTIMULANTES POUR LES ÉLÈVES?Il est bien vrai que déjà nousr<strong>et</strong>rouvons <strong>de</strong> nombreuses activitésstimulantes sur Intern<strong>et</strong> conçuespour favoriser <strong>de</strong>s apprentissages.Nous ne sommes pas tenus <strong>de</strong>débuter par <strong>de</strong>s activités d’envergurepour bénéficier <strong>de</strong> l’eff<strong>et</strong> stimulantque peut pro<strong>du</strong>ire l’utilisation<strong>de</strong> l’ordinateur. Auparavant, jen’avais jamais donné <strong>de</strong> dictée à<strong>de</strong>ux élèves travaillant à l’ordinateur.C<strong>et</strong>te activité fournit uncontexte <strong>de</strong> coopération qui estencourageant. Réaliser une pro<strong>du</strong>ctionécrite à partir d’une image quel’élève a lui-même choisie, c’estnouveau <strong>et</strong> stimulant.Il existe <strong>de</strong>s logiciels é<strong>du</strong>catifsfort intéressants. L’emploi <strong>de</strong>s ordinateursest motivant parce que ces<strong>de</strong>rniers offrent une rétroactionobjective <strong>et</strong> immédiate, ce qui perm<strong>et</strong>aux apprenants d’évaluer leursprogrès <strong>et</strong> <strong>de</strong> connaître leur niveau <strong>de</strong>compétence. Une activité stimulantefavorisant l’attention, les élèves feront<strong>de</strong>s acquis sans qu’il soit nécessaire<strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre trop <strong>de</strong> pression.Pour une première fois c<strong>et</strong>te année,à l’ai<strong>de</strong> <strong>du</strong> traitement <strong>de</strong> texte Wor<strong>de</strong>t <strong>du</strong> courriel, j’ai collaboré avecVIE 20 Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004


Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004certains jeunes à la pro<strong>du</strong>ctiond’ordres <strong>du</strong> jour <strong>et</strong> <strong>de</strong> procèsverbaux<strong>de</strong>s réunions <strong>du</strong> conseild’élèves <strong>de</strong> l’école, sans trop alourdirla tâche <strong>de</strong>s élèves <strong>du</strong> primaire.Ces <strong>de</strong>rnières années, l’ordinateurfacilitant la pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> différentsdocuments, j’ai pu personnaliserdavantage certaines activités d’apprentissage.Par exemple, au lieu <strong>de</strong>réfléchir à une situation hypothétique,il semble plus facile pour lesélèves <strong>de</strong> résoudre un problèmemathématique où ce sont leurscompagnons <strong>de</strong> classe qui ont àpartager les coûts liés à un voyagequ’ils veulent organiser pour la fin<strong>de</strong> l’année scolaire.Je ne sais pas encore ce que larecherche révèlera au suj<strong>et</strong> <strong>de</strong>la diffusion <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ctions d’élèvesdans Intern<strong>et</strong>, cela étant une pratiquenouvelle. Il se peut qu’ellepro<strong>du</strong>ise <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s positifs sur l’estime<strong>de</strong> soi. Un danger possibleserait peut-être <strong>de</strong> gonfler l’orgueil<strong>de</strong>s jeunes.Avec les années, il sera <strong>de</strong> plus enplus facile <strong>de</strong> trouver dans Intern<strong>et</strong><strong>de</strong>s démonstrations <strong>de</strong> procédésscientifiques qui dépasseront noscapacités d’expliquer avec <strong>de</strong>s mots<strong>et</strong> <strong>de</strong>s livres. L’aspect visuel nousfournit dans une forme attrayante <strong>et</strong>souvent interactive <strong>de</strong>s sourcesd’information qui peuvent plusfacilement favoriser l’engagementdans la tâche.• …PARCE QUE L’ORDINATEURNOUS OFFRE DES POSSIBILITÉSDE DIFFÉRENCIATION?Certains élèves arrivent en classeavec un ou quelques champs d’intérêtbien définis tandis que d’autressont en avance sur les programmes.Il s’avère pertinent d’accor<strong>de</strong>r <strong>de</strong>l’importance à ce qui les attire pouren comprendre les fon<strong>de</strong>ments <strong>et</strong>i<strong>de</strong>ntifier les besoins <strong>de</strong>s jeunes.Les activités liées à l’ordinateurn’ont pas à être i<strong>de</strong>ntiques pourtous. Elles peuvent répondre facilementà <strong>de</strong>s besoins <strong>et</strong> à <strong>de</strong>s rythmesdifférents.L’ordinateur peut nous ai<strong>de</strong>r àré<strong>du</strong>ire le temps <strong>de</strong> classe utilisépour donner <strong>de</strong>s explications à toussimultanément, alors que nos élèvesont <strong>de</strong>s niveaux différents d’acquisitionqui sont appelés à s’accentuer.Ainsi, nous avons plus <strong>de</strong> tempspour entrer en contact en tantqu’alliés auprès <strong>de</strong>s élèves <strong>et</strong> pourreconnaître les forces <strong>de</strong>s uns <strong>et</strong><strong>de</strong>s autres. Mais attention, l’accèsà l’ordinateur ne doit pas êtreuniquement réservé aux élèves lesplus avancés.L’école a la responsabilité d’offrir<strong>de</strong>s activités stimulantes aux enfantsqui ont vécu ou qui vivent <strong>de</strong>s situationspénibles en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s heures<strong>de</strong> classe. Le fait <strong>de</strong> vivre <strong>de</strong>s activitéssociales sécurisantes <strong>et</strong> bienencadrées perm<strong>et</strong> à ces jeunes <strong>de</strong>structurer leur i<strong>de</strong>ntité. En brisantl’isolement dans lequel ils risquent<strong>de</strong> s’enfermer, nous favorisons ladécouverte <strong>de</strong> la valeur <strong>de</strong>s apprentissagespour toute la vie.J’ai apprécié davantage le courrierélectronique lorsqu’il m’a permis<strong>de</strong> communiquer avec un élève quitenait un discours suicidaire alorsque sa famille quittait la région.Effectivement, <strong>de</strong>puis près d’un an,il m’écrit <strong>de</strong> temps à autre. Oui àune ouverture sur le mon<strong>de</strong>, maisprenons bien soin <strong>de</strong>s jeunes quenous côtoyons. Selon Cyrulnik(2003), la figuration <strong>du</strong> coup, <strong>de</strong>l’événement traumatisant, dansnotre mon<strong>de</strong> intérieur, est unecopro<strong>du</strong>ction entre le récit intimeque se construit le blessé <strong>et</strong> l’histoirequ’en fait son contexte culturel.Nous sommes donc impliquésdans les solutions. Nous pouvonstravailler à canaliser la colère,une forme d’énergie, dans un sensconstructif.Lorsque l’un <strong>de</strong> mes élèves <strong>du</strong>troisième cycle a cru qu’il discutaitavec une jeune fille <strong>du</strong> futur, surIntern<strong>et</strong>, <strong>de</strong>vais-je y voir une perte<strong>de</strong> contact avec la réalité ou uneoccasion <strong>de</strong> l’ai<strong>de</strong>r à mieux saisir lanotion <strong>de</strong> futur? Le danger existe <strong>de</strong>façon prégnante si personne n’est làpour recueillir les impressions oules questionnements <strong>de</strong> nos jeunes.Aspy <strong>et</strong> Roebuck (1990) se sontappuyés sur l’hypothèse <strong>de</strong> Rogersau suj<strong>et</strong> <strong>de</strong>s liens qui existent entrele développement affectif <strong>de</strong>s jeunes<strong>et</strong> leur développement intellectuel.Selon les mêmes auteurs, l’empathie,la congruence <strong>et</strong> la considérationpositive seraient les ingrédients<strong>de</strong> base <strong>de</strong> l’enseignement. Ajouterà cela <strong>de</strong>s stratégies efficaces, quedifférents logiciels peuvent m<strong>et</strong>treen lumière, fait que nos élèvesseront gagnants.• ...PARCE QUE L’ORDINATEURFACILITE LA RÉALISATION DEPROJETS LIÉS AUX COMPÉTENCESQU’IL FAUT DÉVELOPPER DANSUN PROJET DE VIE?Il existe sur le Web une généreusebanque <strong>de</strong> scénarios, <strong>de</strong> proj<strong>et</strong>svraiment intéressants pour lemon<strong>de</strong> scolaire. Nous pouvonsnous en inspirer ou tout simplement,ce que je trouve très judicieux,bâtir <strong>de</strong>s proj<strong>et</strong>s avec nosélèves à partir <strong>de</strong> leurs centres d’intérêt.Ainsi nous reconnaissons leurpouvoir <strong>de</strong> décision, <strong>de</strong> contrôlabilitésur la tâche. Il importe <strong>de</strong>partager le pouvoir avec nos élèvesafin qu’ils apprennent à choisir.À toutes les étapes <strong>de</strong> la démarched’un proj<strong>et</strong>, soit l’intention, la planification,la réalisation <strong>et</strong> la présentation,les ressources qu’offrel’ordinateur peuvent être exploitées.En pédagogie par proj<strong>et</strong>s, l’aboutissementd’un travail réalisé enéquipe donne à tous les élèves lapossibilité <strong>de</strong> réussir, à <strong>de</strong>s niveauxdifférents. D’un proj<strong>et</strong> à l’autre,<strong>de</strong>s défis doivent être relevés en lecture,en écriture <strong>et</strong> dans d’autresdomaines d’apprentissage.La réalisation <strong>de</strong> proj<strong>et</strong>s en classeest liée à une conception plusglobale d’un proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> vie. « Avoirun proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> vie, c’est se poseren suj<strong>et</strong> capable d’infléchir sonpropre avenir, <strong>et</strong> non en victimepassive d’un <strong>de</strong>stin. » (MohammedCherkaoui, cité par Delannoy,1997)Il est vrai que je suis fascinée parles performances <strong>de</strong>s TIC <strong>et</strong> par lesnouveaux apprentissages qu’ilsgénèrent, mais je crois qu’il est primordial<strong>de</strong> maintenir surtout unefascination à l’égard <strong>de</strong>s personnesque sont nos élèves. Il est nécessaire<strong>de</strong> perm<strong>et</strong>tre aux jeunes <strong>de</strong>se réaliser en classe en s’intéressantà leurs discours, à ce qu’ils ressentent,en leur donnant l’occasiond’être en relation avec leurs pairs,en leur perm<strong>et</strong>tant <strong>de</strong> bouger <strong>et</strong> enm<strong>et</strong>tant en place une gestion participative.Paradoxalement, la gran<strong>de</strong>vitesse <strong>de</strong> développement <strong>de</strong>s TICm<strong>et</strong> en évi<strong>de</strong>nce la nécessité <strong>de</strong>prendre le temps d’être avec nosélèves. Tout comme l’intégrationpédagogique <strong>de</strong>s TIC peut, chez lesélèves, contribuer au plaisir d’apprendre.M me Céline Gravel est enseignanteau 3 e cycle <strong>du</strong> primaireà l’école Sainte-Thérèse, <strong>de</strong> laCommission scolaire <strong>de</strong>s Rives<strong>du</strong>-Saguenay.Références bibliographiquesASPY, David <strong>et</strong> Flora ROEBUCK. On n’apprendpas d’un prof qu’on n’aime pas,Montréal, Actualisation IDH, 1990.CHOUINARD, Roch. Appui-Motivation, [Enligne], 2004, [www.appui-motivation.qc.ca].CYRULNIK, Boris. Le murmure <strong>de</strong>s fantômes,Paris, Éd. Odile Jacob, 2003.DELANNOY, Cécile. La motivation. Désir <strong>de</strong>savoir, décision d’apprendre, Paris,Hach<strong>et</strong>te, 1997.DUPUIS-WALKER, Louise. « L’Intern<strong>et</strong> : unoutil <strong>de</strong> planétarisation scolaire? Quelquesconsidérations éthiques », dans Hrimech,M. <strong>et</strong> F. Jutras, Défis <strong>et</strong> enjeux <strong>de</strong> l’é<strong>du</strong>cationdans une perspective planétaire,1997, p. 95-106.HOURST, Bruno. Au bon plaisir d’apprendre,Paris, Dunob, 2002.HRIMECH, Mohamed <strong>et</strong> France JUTRAS.Défis <strong>et</strong> enjeux <strong>de</strong> l’é<strong>du</strong>cation dans uneperspective planétaire, Sherbrooke, Éditions<strong>du</strong> CRP, 1997.PETRELLA, Riccardo. L’é<strong>du</strong>cation, victime<strong>de</strong> cinq pièges, Montréal, Éd. Fi<strong>de</strong>s, 2000.SENGE, P<strong>et</strong>er <strong>et</strong> autres. La cinquième discipline.Le gui<strong>de</strong> <strong>de</strong> terrain, Paris, ÉditionsFirst, 2000.<strong>DOSSIER</strong>PÉDAGOGIQUE 21


<strong>DOSSIER</strong>RÉEL, VIRTUEL : UN ÉQUILIBRE À MAINTENIRpar Marie-France Laberge <strong>et</strong> André Roux«… une existence épanouie est alors un juste équilibre entre ces différentes composantes.Nous ne sommes finalement que <strong>de</strong>s êtres sur le fil <strong>du</strong> rasoir <strong>de</strong>vant jongler sans cesse entre nos personnagespour éviter <strong>de</strong> sombrer définitivement dans l’un d’eux <strong>et</strong> <strong>de</strong> nous y perdre. »(tiré <strong>du</strong> blogue 1 d’un internaute, le 29 février 2004)Le virtuel… univers impalpable,nouveaux langages <strong>et</strong>mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> vie, pratiques <strong>du</strong>réseau, phénomène culturel <strong>et</strong> social.Optimisme, confiance, inquiétu<strong>de</strong>?Entre réalité <strong>et</strong> virtualité, nosjeunes en formation doivent trouverl’équilibre.UNE CIVILISATIONDE L’IMMATÉRIELQu’est-ce que le réel? Et le virtuel?Et l’imaginaire? Bien que ces questionsne constituent pas le thèmeprincipal <strong>du</strong> présent article, il imported’y consacrer quelques lignes.Des philosophes croient qu’il y aune nature humaine commune, unecertaine universalité <strong>de</strong> l’humain :la raison, la mémoire <strong>et</strong> la volontéseraient ce qui nous unifie. Pour cequi est <strong>de</strong> la réalité, comme le disaitHéraclite, tant qu’on est éveillé onest tous dans le même mon<strong>de</strong>, maisquand on rêve, chacun s’enfuit dansson propre univers. Pour certains,il existe diverses formes <strong>de</strong> réalité,<strong>de</strong>s réalités plurielles (dont fait partiele mon<strong>de</strong> virtuel) <strong>et</strong> il imported’amener son esprit à en saisir lesnuances. Par exemple, la réalité estaccessible à notre connaissance,mais l’abstraction aussi fait partieintégrante <strong>de</strong> la réalité. L’imaginaire,quant à lui, serait un dépassement<strong>du</strong> réel… Et le virtuel?Ce peut être l’idée ou encore lareprésentation, la simulation, l’illusionextrême. Il est cependantintéressant <strong>de</strong> noter que, malgré leconcept d’univers factice souventrattaché au mon<strong>de</strong> virtuel, nousvivons dans une société d’ordrematériel, <strong>de</strong> consommation, relativementfactice elle aussi…Puisque le virtuel est déjà trèsprésent dans la vie <strong>de</strong> nos jeunes<strong>et</strong> que ses diverses fac<strong>et</strong>tes continuerontà se multiplier, commençonsà explorer ses rivages.Selon Quéau (2002), ce serait« une bonne pédagogie, pour commencerd’apprendre à douter, qued’éprouver <strong>de</strong>s systèmes <strong>de</strong> représentationalternatifs. Le virtuel n’estpas qu’un lieu <strong>de</strong> fuite hors <strong>du</strong>mon<strong>de</strong>, c’est aussi un lieu d’actionqui est doté d’une certaine crédibilité…Le virtuel est le moyen d’agirà l’échelle planétaire, à l’échelle<strong>de</strong>s idées, il a c<strong>et</strong> immense avantage<strong>de</strong> nous proposer une réalité alternativequi fonctionne, <strong>et</strong> qui nousperm<strong>et</strong>tra <strong>de</strong> travailler, <strong>de</strong> rencontrerles autres <strong>et</strong> d’agir sur le mon<strong>de</strong> ».Pensons par exemple au virtuel(simulation) qui nous prépare àêtre encore plus actif dans lesdomaines <strong>du</strong> réel : la chirurgie,l’économie, l’aviation... Quand onrevient au réel, on a la possibilité <strong>de</strong>comparer <strong>de</strong>ux niveaux <strong>de</strong> réalité;mais une <strong>de</strong>s principales inquiétu<strong>de</strong>sliées à ces nouveaux universrési<strong>de</strong> dans la possibilité <strong>de</strong> fuir leréel pour le virtuel. Selon Huri<strong>et</strong>(1998), « l’attrait est que le réelrésiste tandis que le virtuel obéit ».Peut-on alors s’adresser au substitutpour obtenir une satisfactionéquivalente? C’est une questiond’acuité… sucre ou é<strong>du</strong>lcorant?Le réel finira-t-il toujours pas nousrattraper? Nous <strong>de</strong>vons être responsables<strong>de</strong> ce qui nous arrive dansnotre environnement immédiat réel<strong>et</strong> local. Bref, c’est une approchepédagogique intéressante, selonQuéau (2002), <strong>de</strong> nous habituer àchanger <strong>de</strong> régime, <strong>de</strong> vision <strong>et</strong> <strong>de</strong>compréhension. Cela correspondau fait <strong>de</strong> migrer hors <strong>du</strong> mon<strong>de</strong>pour aller dans un autre. En revenantdans le réel, on pourra yimporter les modalités d’action ou<strong>de</strong> solidarité qu’on aura rencontréesdans le virtuel, <strong>et</strong> réciproquement.« Ce qui paraît intéressant,c’est le va-<strong>et</strong>-vient, la comparaison,la compétition entre les <strong>de</strong>ux mo<strong>de</strong>s<strong>de</strong> réalité, l’un complétant l’autre. »Toutefois, il manquera toujours aumon<strong>de</strong> virtuel c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>nsité, c<strong>et</strong>tesubstance propre aux territoireshumains réels. Naviguer en territoireaffectif fait appel à la sensibilité.Il semble que l’image <strong>de</strong>venant unecopie <strong>de</strong> plus en plus conforme <strong>du</strong>mon<strong>de</strong> réel, son attrait croît avecl’usage <strong>et</strong> la représentation prend<strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong> place par rapportà la chose réelle. <strong>Dans</strong> lemon<strong>de</strong> virtuel, l’écran donne accès àune infinité <strong>de</strong> possibilités. Il donneaccès à tout <strong>et</strong> tout <strong>de</strong> suite; pourplusieurs, il y a quelque chose <strong>de</strong>magique là-<strong>de</strong>dans! Au fil <strong>de</strong>sdécouvertes <strong>et</strong> <strong>de</strong>s progrès, il <strong>de</strong>vientégalement <strong>de</strong> plus en plus difficile<strong>de</strong> distinguer ce qui est spécifiquementhumain <strong>de</strong> ce qui est spécifiquementtechnologique. Ce quinous préoccupe ici, c’est que lesjeunes sont gavés <strong>de</strong> messages, queces images auditives <strong>et</strong> visuelles ontun attrait incontestable sur eux,mais que le recul réflexif nécessairene fait souvent pas partie <strong>de</strong> ce àquoi nous les initions, le jeunerestant alors dans une zone floue àmi-chemin entre le réel <strong>et</strong> l’imaginaire.L’acquisition <strong>de</strong> règles morales<strong>et</strong> sociales s’avère souvent déficiente.L’é<strong>du</strong>cation à la virtualité <strong>de</strong>vraitdonc amener l’enfant à se construiredans ce mon<strong>de</strong> d’images :– en sachant qu’il est faux;–en en discutant, comme pourtant d’autres suj<strong>et</strong>s, avec lesa<strong>du</strong>ltes qui participent à saformation.TOUT SEUL ENSEMBLEOU NOUVELLES CONDITIONSDE SOLIDARITÉ?Une <strong>de</strong>s dérives importantes <strong>du</strong>virtuel est la perte <strong>du</strong> sentimentd’exister dans la réalité, être dans leréel l’avatar d’un personnage virtuelplutôt que l’inverse. Un <strong>de</strong> ses plusformidables exploits est la culture<strong>de</strong> réseau, une <strong>de</strong>scendante directe<strong>de</strong> la culture scientifique. <strong>Dans</strong> lesparagraphes suivants, nous navigueronsd’un pôle à l’autre <strong>de</strong> c<strong>et</strong>espace où les notions d’i<strong>de</strong>ntité <strong>et</strong><strong>de</strong> communauté prennent un nouveausens.L’i<strong>de</strong>ntité, c’est l’image qu’un indivi<strong>du</strong>a <strong>de</strong> lui-même <strong>et</strong> c’est aussil’ensemble <strong>de</strong> ses voies formellesd’i<strong>de</strong>ntification vis-à-vis <strong>de</strong> ses semblables;ces <strong>de</strong>rnières années, <strong>de</strong>si<strong>de</strong>ntités numériques (numérisation<strong>de</strong> nos caractéristiques i<strong>de</strong>ntitaires :ADN, empreinte oculaire, empreintevocale, mots <strong>de</strong> passe, <strong>et</strong>c.) <strong>et</strong> <strong>de</strong>si<strong>de</strong>ntités virtuelles (utilisées sur lesréseaux entre autres) se sont ajoutées.La permanence, l’unité <strong>et</strong> laréalité physique <strong>de</strong> l’i<strong>de</strong>ntité sont<strong>de</strong>s points <strong>de</strong> référence <strong>de</strong> moins enmoins soli<strong>de</strong>s dans l’univers virtuel.VIVRE PAR PROCURATIONAu Japon, on appelle otaku l’indivi<strong>du</strong>qui est plus fasciné par levirtuel que par le réel. On parlequasi uniquement <strong>de</strong> jeunes hommesâgés <strong>de</strong> 15 à 30 ans; ces <strong>de</strong>rniers nevivent que par procuration, la technologieétant l’ami qui ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rien en r<strong>et</strong>our. Les otakus sont engénéral <strong>de</strong>s collectionneurs (d’obj<strong>et</strong>s,<strong>de</strong> données) qui en viennent àabsolument tout savoir sur un suj<strong>et</strong>;puisqu’ils ne sortent pas <strong>de</strong> chezeux <strong>et</strong> sont rivés à leur écran àlongueur <strong>de</strong> jour, ceux qui arriventà gagner leur vie le font justementVIE 22 Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004


Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004grâce à l’expertise qu’ils ont développée.Les autres vivent tout simplementindéfiniment chez leursparents (en gran<strong>de</strong> majorité à l’aisefinancièrement). La société japonaiseétant beaucoup plus hermétiqueque la nôtre <strong>et</strong> la pressionsociale beaucoup plus gran<strong>de</strong>,« l’otaku québécois » serait surtoutun indivi<strong>du</strong> dont l’isolement estcausé par son rapport à la technologie;il ne souffrirait pas (encore…)<strong>de</strong> tous les problèmes importantsi<strong>de</strong>ntifiés chez les jeunes Japonais.Aux États-Unis, les otakus sontassimilés aux nerds car leurspréoccupations ludiques sont assezsemblables. Pour ces jeunes, il estplus facile <strong>de</strong> parler par l’entremise<strong>de</strong> l’ordinateur que <strong>de</strong> communiqueravec un véritable être humain;ils recherchent la sécurité dans cenouvel espace. « Timi<strong>de</strong>s, peu sûrsd’eux-mêmes, ils découvrent l’amourpar procuration, tombant amoureux<strong>de</strong> p<strong>et</strong>ites poupées en résine,d’héroïnes <strong>de</strong> <strong>de</strong>ssins animés ou <strong>de</strong>ve<strong>de</strong>ttes fabriquées sur mesure. »Les messageries électroniques représententleur moyen <strong>de</strong> communicationprivilégié « où ils n’apparaissentque sous un pseudonyme. La constitution<strong>de</strong> ces réseaux aboutit àla création d’une véritable cultureun<strong>de</strong>rground, avec ses références,ses points <strong>de</strong> ren<strong>de</strong>z-vous, sa légen<strong>de</strong>,son langage. » Barral (1999)UNE CULTURE DU PARTAGEToutefois… Intern<strong>et</strong>, c’est aussiune mise en commun d’objectifs,Photo : Denis Garond’efforts, <strong>de</strong> résultats dans le sens<strong>de</strong> co-construction, participation,partage. Ce sont <strong>de</strong>s communautésqui communiquent sur le réseau <strong>de</strong>façon horizontale en m<strong>et</strong>tant enavant un sens <strong>de</strong> la gratuité quin’obéit plus aux logiques commercialeshabituelles, c<strong>et</strong>te culture serapprochant plutôt <strong>de</strong> celle <strong>de</strong>s universitairesou <strong>de</strong> membres d’associations.Celui qui, lors d’un exposé,d’un atelier, d’une conférence oud’un forum, fait part <strong>de</strong> ses idéesà ses collègues, espère reconnaissance<strong>et</strong> échange. On ne paie pasles idées, on les m<strong>et</strong> en communpour faire progresser le savoir collectif.L’aventure <strong>du</strong> logiciel libreest l’une <strong>de</strong>s plus intéressantes quisoient à c<strong>et</strong> égard : non hiérarchique,décentralisée <strong>et</strong> en développementcontinu grâce à <strong>de</strong>s milliers d’indivi<strong>du</strong>s.Duplication infinie, sans coûtou presque, <strong>et</strong> mise à dispositioninstantanée sont <strong>de</strong>ux critères complètementopposés à ceux <strong>de</strong>sphilosophies matérialistes. Si vousn’avez pas quelque chose, vous discutezavec ceux qui sont susceptibles<strong>de</strong> l’avoir <strong>et</strong> vous faitesensuite <strong>de</strong> même dès que l’occasionse présente. Intern<strong>et</strong> peut servir àéditer ses propres contenus <strong>et</strong> nonseulement à aller en chercher. Onpeut aussi y recueillir <strong>de</strong> l’information<strong>et</strong> la traiter, différente <strong>de</strong> celle<strong>de</strong>s médias <strong>de</strong> masse qui est « mâchée» d’avance. Il faut ici seresponsabiliser, m<strong>et</strong>tre en pratiqueson esprit <strong>de</strong> recherche <strong>et</strong> son senscritique, se fixer <strong>de</strong>s buts, se doter<strong>de</strong> grilles d’analyse. « Le réseau » aun impact sur les trois visées <strong>du</strong>Programme <strong>de</strong> formation : construiresa vision <strong>du</strong> mon<strong>de</strong>, structurerson i<strong>de</strong>ntité <strong>et</strong> développerson pouvoir d’action. La vision quenous avons <strong>de</strong> nous-mêmes <strong>et</strong> <strong>du</strong>mon<strong>de</strong> qui nous entoure dépend <strong>de</strong>nombreux facteurs <strong>et</strong> subit <strong>de</strong> nombreusesinfluences. Tous les acteurs<strong>du</strong> mon<strong>de</strong> scolaire <strong>de</strong>vraient ai<strong>de</strong>rle jeune à se connaître, à se construire<strong>et</strong> à développer un pouvoird’action dans les diverses communautésauxquelles il appartiendra.Vivre une ou plusieurs vies à l’écran<strong>de</strong>vient vite, pour certains jeunes,plus intéressant que le mon<strong>de</strong> réel;si tel est le cas, c’est entre autresparce qu’ils sentent qu’ils n’ontpas <strong>de</strong> pouvoir d’action sur leurmon<strong>de</strong>. Pour avoir un pouvoir d’action,il faut être capable d’imaginerles choses autrement <strong>et</strong> aller chercherce qui nous manque pouratteindre nos objectifs. Les jeunescontrôlent une bonne part <strong>de</strong>leur mon<strong>de</strong> virtuel (<strong>du</strong> moins lepensent-ils), c’est ce qui les attir<strong>et</strong>ant. Cependant, dans notre mon<strong>de</strong>réel, celui qui fait preuve <strong>de</strong> réflexion<strong>et</strong> d’ouverture généreuse aux autrestrouvera aussi une voie vers le pouvoird’action dans sa communauté.ÊTES-VOUS « ONLINE »OU « OFFLINE »?Comme la vision <strong>du</strong> mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>l’enseignant influence celles quedéveloppent ses élèves, l’a<strong>du</strong>lte sedoit d’avoir au moins une cultur<strong>et</strong>echnologique <strong>de</strong> base pour que lesjeunes puissent avoir accès auxmoyens pour atteindre leurs buts <strong>et</strong>satisfaire leurs besoins dans unmon<strong>de</strong> où le virtuel investit <strong>de</strong> plusen plus le réel.Sans c<strong>et</strong>te culture technologiqueminimale, on parlera d’habitués <strong>et</strong>d’exclus, <strong>de</strong> rupture sociale, <strong>de</strong> fossé<strong>de</strong> générations. Présentement, unegénération est à apprendre ce quela génération précé<strong>de</strong>nte n’a pasappris. Qu’est-ce que ça implique?Rien <strong>de</strong> dramatique, bien au con-Photo : Denis Garontraire, si les relations horizontalesqui ont cours dans le mon<strong>de</strong> virtuelse transposent dans la réalité <strong>de</strong> laclasse, pour qu’élèves <strong>et</strong> enseignantsjoignent leurs forces respectives.L’avènement <strong>de</strong>s TIC apporte <strong>de</strong>smodifications importantes <strong>de</strong> l’environnementhumain; notre espècedoit être capable <strong>de</strong> s’adapter : êtresévolués, conscients, adaptés à leurenvironnement physique <strong>et</strong> social,capables <strong>de</strong> raisonnement <strong>et</strong> d’émotions,c’est ce que nous tendonsà être <strong>et</strong> à développer chez nosélèves.Parler <strong>de</strong> culture technologiquesignifie m<strong>et</strong>tre l’accent sur un contenuou un ensemble <strong>de</strong> savoirs <strong>et</strong>sur une forme qui ramène à unefaçon <strong>de</strong> voir, <strong>de</strong> penser, <strong>de</strong> vivre.Selon Dub<strong>et</strong> (2003), « la seule culturecommune contemporaine estcelle qui est martelée par la publicitédirecte ou déguisée dans sessupports médiatiques au premierrang <strong>de</strong>squels, la télévision : culte<strong>de</strong> la réussite indivi<strong>du</strong>elle, apologie<strong>de</strong> la consommation présentéecomme la source <strong>du</strong> bonheur,marchandisation <strong>de</strong>s rapports humains,sacralisation <strong>de</strong> l’argent… »Fort heureusement, on trouve <strong>de</strong>plus en plus <strong>de</strong> classes où s’élaboreune véritable culture humanistefondée notamment sur la coopération,l’apprentissage <strong>de</strong> la démocratie,les échanges réciproques <strong>de</strong>savoirs, <strong>et</strong>c. La question à se posermaintenant est la suivante : <strong>Dans</strong> lemon<strong>de</strong> scolaire, disposons-nousd’une culture technologique suffisantepour appréhen<strong>de</strong>r les évolutionsqui ne cessent <strong>de</strong> semultiplier?Pouvons-nous comprendre, utiliser<strong>et</strong> gérer les TIC? Cela signifie ne passeulement apprendre commentfonctionne notre équipement, maisse <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r pourquoi <strong>et</strong> quandnous <strong>de</strong>vrions nous en servir.Pouvons-nous suivre un peu lesquestions technologiques soulevéesdans l’actualité ou effectuer <strong>de</strong>sactivités technologiques courantes?Si la réponse est non, nous avonsdonc besoin « <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre le grosorteil à l’eau » sur le plan personnel<strong>DOSSIER</strong>PÉDAGOGIQUE 23


<strong>DOSSIER</strong><strong>et</strong> en ce qui a trait aux aspects pédagogiques<strong>du</strong> réseau <strong>et</strong> <strong>de</strong>s TIC. Pourprévoir un peu les usages qui s’imposerontau reste <strong>de</strong> la société, onpeut aussi regar<strong>de</strong>r aller les jeunes,car leur appropriation <strong>de</strong>s TIC estsouvent plus avancée.APPRENDRE GRÂCE ÀLA SIMULATION DU RÉELDécouvrir le réel grâce au virtuel…L’apprentissage par la simulation<strong>et</strong> le jeu, voilà sur quoi travaillent<strong>de</strong> nombreux chercheurs (<strong>et</strong> certains<strong>de</strong>puis un bon moment déjà,au Massachus<strong>et</strong>ts Institute ofTechnology, entre autres). D’aprèsRieber (1998), c’est en rendant leprocessus d’apprentissage intéressanten lui-même – non pas le seulrésultat – que l’on peut obtenirle plus <strong>de</strong> motivation chez l’apprenant.Et c’est le jeu qui, selonlui, est susceptible d’y parvenir aumieux. Comme nous l’expliqueFrété (2002), Rieber appelle « seriousplay » le type d’expériencesd’apprentissage intense dans lesquellesles enfants autant que lesa<strong>du</strong>ltes s’engagent, auxquelles ilsconsacrent volontairement <strong>de</strong>squantités énormes d’énergie <strong>et</strong> <strong>de</strong>temps <strong>et</strong> dont ils r<strong>et</strong>irent en mêm<strong>et</strong>emps un grand plaisir. L’adjectif« serious » est employé pour éviterune dévalorisation <strong>de</strong> l’expérienced’apprentissage qui peut avoir lieuau cours d’un jeu. Negroponte, <strong>du</strong>MIT Media Lab, parle <strong>de</strong> « hard fun »pour décrire c<strong>et</strong>te approche <strong>de</strong>l’apprentissage.En ce qui concerne le « flow »,i<strong>de</strong>ntifié par Csikszentmihalyi (1990),il se rapporte spécifiquement aujeu. Il s’agit <strong>de</strong> c<strong>et</strong> état <strong>de</strong> satisfactionque l’on expérimente lorsquel’on se sent « porté » par une activité.Les gens qui se trouvent tellementengagés <strong>et</strong> absorbés parcertaines activités ont l’impression<strong>de</strong> « flotter » avec elles. Pour ressentirle « flow », l’intérêt <strong>de</strong> l’activité ad’abord une gran<strong>de</strong> importance <strong>et</strong>il faut savoir se concentrer; ensuite,l’impression <strong>de</strong> découverte <strong>et</strong> <strong>de</strong>créativité amèneront l’apprenant àfaire <strong>de</strong>s efforts cognitifs importants.Pour que c<strong>et</strong>te sensationpuisse se pro<strong>du</strong>ire, il faut la motivation,un défi à la mesure <strong>du</strong> joueur,<strong>de</strong>s buts bien définis, une rétroactionclaire <strong>et</strong> la possibilité pour l’indivi<strong>du</strong><strong>de</strong> se sentir en contrôle total<strong>de</strong> la situation. On s’aperçoit alorsque les « ingrédients » nécessaires àla génération d’un tel état sont lesmêmes que ceux utilisés pourdécrire les environnements é<strong>du</strong>catifsintrinsèquement motivants. C’estla motivation qui perm<strong>et</strong>tra ledéclenchement <strong>de</strong> l’apprentissage<strong>et</strong> l’entr<strong>et</strong>ien <strong>du</strong> désir <strong>de</strong> persisterdans la tâche qui rendra l’élève plusautonome. L’approche constructiviste<strong>de</strong> l’apprentissage fournit<strong>de</strong>ux éléments qui semblent être enrapport avec la théorie <strong>du</strong> « flow »:l’apprentissage en situation <strong>et</strong> l’apprentissageautogéré. En eff<strong>et</strong>, l’authenticité<strong>de</strong> la tâche dans laquellel’apprenant est plongé ainsi que sonautodétermination sont <strong>de</strong>ux facteursclés <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te approche <strong>et</strong> sontà la base <strong>de</strong> tout investissement pro<strong>du</strong>ctif<strong>de</strong> l’apprenant.Toute simulation, <strong>et</strong> non seulementle jeu, est une repro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> laréalité dans laquelle les élèvesréagissent comme si la situationétait réelle; elle offre un mo<strong>de</strong> d’apprentissageefficace basé sur l’expérience.Au cours d’une simulation, les participantsapprennent à partir <strong>de</strong> cequ’ils font <strong>et</strong> ils doivent faire faceaux problèmes <strong>et</strong> aux conceptsdans l’action. C’est donc une métho<strong>de</strong>d’apprentissage active où leformateur joue plutôt le rôle d’unfacilitateur. Pouvoir comparer ceque nous voyons avec ce que nousavons vécu dans un autre environnementnous rend plus créatifs;c’est un autre avantage <strong>de</strong> ce type<strong>de</strong> situation.L’ACCROISSEMENT OUCOMMENT APPRENDRE AUXJEUNES À CRÉER UN LIENENTRE LE VIRTUEL ET LE RÉELLe concept d’accroissement est entrain <strong>de</strong> changer le rapport <strong>de</strong>sjeunes à la réalité. Ce concept puissantdéveloppé par Englebart <strong>et</strong>Lickli<strong>de</strong>r, <strong>du</strong> MIT, au début <strong>de</strong>sannées 60, tient pour assuré que lamachine va accroître le potentiel <strong>de</strong>l’humain, lui perm<strong>et</strong>tant <strong>de</strong> raffinerses actions, d’ajuster son parcours,<strong>de</strong> nuancer son discours, voire <strong>de</strong>mieux structurer sa pensée.Durant la plus gran<strong>de</strong> partie <strong>du</strong>XX e siècle, l’équipement techniquea prévalu sur les systèmes d’opération,qui sont restés plutôt élémentaires<strong>et</strong> nullement conviviaux.L’usager, souvent démuni, étaittotalement dépendant <strong>du</strong> technicien<strong>et</strong> <strong>du</strong> programmeur. Ce n’est qu’audébut <strong>de</strong>s années 80, avec l’intro<strong>du</strong>ction<strong>du</strong> système d’exploitationStar <strong>de</strong> la compagnie Xerox (quirendait accessible pour la premièrefois une interface d’utilisationdirecte 2 ) qu’un système d’exploitationparvenait à assuj<strong>et</strong>tir le systèmed’opération d’un ordinateur… Defaçon exponentielle, la machineservile allait cé<strong>de</strong>r sa place à lamachine accompagnatrice. Le serviteurse transformait en compagnon.Au même moment, plusieurs fabricants<strong>de</strong> pro<strong>du</strong>its électroniquescommercialisaient les premiersjeux vidéos, rendant disponibles<strong>de</strong>s univers virtuels dont le réalismevisuel allait inciter <strong>de</strong> plus en plus àconfondre le réel <strong>et</strong> le virtuel. <strong>Dans</strong>ces micromon<strong>de</strong>s, tout est factice<strong>et</strong> facile; même les gestes les plustéméraires restent sans conséquences<strong>et</strong> peuvent être effacés grâce à latouche RESET. Très vite, une questionsurgissait : les technologiesallaient-elles perm<strong>et</strong>tre d’accroîtrele potentiel <strong>de</strong>s jeunes ou allaientelles<strong>de</strong>venir le catalyseur d’unabrutissement collectif?QUAND L’ÉLÈVE SE PERDDANS LE VIRTUEL? ! 15 mars 2004 – LorsqueYann avait 10 ans, il se servait <strong>de</strong>l’ordinateur pour ses loisirs <strong>et</strong>pour ses étu<strong>de</strong>s. Trois ans auparavant,à l’âge <strong>de</strong> 7 ans, lorsqu’ilavait commencé à réaliser <strong>de</strong>stravaux scolaires avec la machine,il avait peur que lapoubelle <strong>de</strong> son système d’exploitationne débor<strong>de</strong> à chaquefois qu’il y déposait <strong>de</strong>s documents.Aujourd’hui, Yann a 15 ans.Il continue à faire ses travauxsur ordinateur. Il y insère touteune série <strong>de</strong> renseignementspris à gauche <strong>et</strong> à droite sur leWeb <strong>et</strong> dont la fiabilité est souventdouteuse. Il m<strong>et</strong> plus l’accentsur la forme que sur lecontenu <strong>de</strong> ses travaux.Pendant ses moments <strong>de</strong> loisir,il est engagé dans une jouted’épopée fantastique en réseau.Il a <strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong> difficultéà se dissocier <strong>de</strong> Zorh, le personnagequ’il y incarne. Il passeaussi <strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong> temps àclavar<strong>de</strong>r avec <strong>de</strong>s inconnus <strong>et</strong><strong>de</strong> moins en moins <strong>de</strong> tempsavec ses amis, lesquels, d’ailleurs,se font <strong>de</strong> plus en plusrares <strong>de</strong>puis quelques années.Yann ne réfléchit plus beaucoup,il zappe <strong>et</strong> il « copie-colle » sansréserve… Il est <strong>de</strong>venu complètementdépendant <strong>de</strong> la technologie.Les jeunes <strong>de</strong> la « N<strong>et</strong> Generation »font face au risque <strong>de</strong> confondreréalité <strong>et</strong> imaginaire lorsqu’ilsopèrent dans <strong>de</strong>s mon<strong>de</strong>s virtuels.Est-il possible <strong>de</strong> prévenir c<strong>et</strong>teconfusion, d’éclairer leurs rapportsavec les technologies?QUAND LE JEUNE CONFONDVIRTUEL ET RÉEL? ! Gabrielle, 11 ans, a adoptéil y a quatre mois Milkshake,une vache laitière disponible surwww.vacheland.com. Chaquejour, elle lui prodigue les soinsnécessaires, « fait le train » <strong>et</strong>s’occupe <strong>de</strong> la ferme. Alors quela p<strong>et</strong>ite famille se r<strong>et</strong>rouveau chal<strong>et</strong> un samedi matin,Gabrielle se rend compte qu’ellen’a pas réservé les servicesd’une fermière substitut, une«Vache Sitter ». Une grosse peinese lit sur son visage. Sa mère luireproche d’avoir <strong>de</strong> la peinepour une vache virtuelle. « Jesais bien que ma vache n’est pasvraie mais ma peine, elle, estvraie! ».VIE 24 Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004


Certains préten<strong>de</strong>nt qu’il faut contrôlerla navigation <strong>de</strong>s jeunes sur leWeb. D’autres affirment qu’il estnécessaire <strong>de</strong> ré<strong>du</strong>ire le tempsqu’ils passent <strong>de</strong>vant l’ordinateurou encore qu’on doit leur interdire<strong>de</strong> jouer à <strong>de</strong>s jeux d’aventure. D<strong>et</strong>elles mesures peuvent à courtterme limiter les actions <strong>de</strong>s jeunes,mais elles ne modifient en rien leurreprésentation <strong>de</strong> la réalité.Plus l’usager est ré<strong>du</strong>it au statut <strong>de</strong>consommateur, plus il est à risque<strong>de</strong> se perdre dans le virtuel, d’en<strong>de</strong>venir dépendant. Par contre, plusil est conscient <strong>et</strong> maître <strong>de</strong> sesactions, plus il pourra développerses capacités en partenariat avec lamachine. Il pourra tirer profit <strong>de</strong>la puissance <strong>de</strong> la technologie <strong>et</strong>accroître son potentiel en relationavec la machine. Nous <strong>de</strong>vons doncen tant que parents, enseignants<strong>et</strong> é<strong>du</strong>cateurs favoriser pour nosjeunes le développement d’uneautonomie intellectuelle <strong>et</strong> affectiveen rapport avec les technologies.QUAND LA TECHNOLOGIEABRUTIT LES INDIVIDUS?! <strong>Dans</strong> son livre Fahrenheit 451,Ray Bradbury montre <strong>de</strong>s personnesqui participent à un quiztélé en répondant à <strong>de</strong>s questionssimplistes grâce à uneman<strong>et</strong>te <strong>de</strong> contrôle. Les gens nelisent plus (c’est interdit parla loi) <strong>et</strong> ne regar<strong>de</strong>nt que <strong>de</strong>sban<strong>de</strong>s <strong>de</strong>ssinées aux phylactèresvi<strong>de</strong>s.L’ALLIANCE RÉEL-VIRTUELNE PEUT RÉUSSIR QUE SI ELLEEST RÉINVESTIE DANSLE MONDE RÉEL TANGIBLEDepuis une vingtaine d’années,nous avons accès par l’ordinateur àun mon<strong>de</strong> multimédia qui, dans unespace virtuel, nous fournit unecertaine représentation <strong>de</strong> la réalité.C<strong>et</strong> environnement virtuel nousdonne également l’occasion d’accé<strong>de</strong>rà <strong>de</strong>s micromon<strong>de</strong>s. Il nousest donc possible <strong>de</strong> manipuler <strong>de</strong>sobj<strong>et</strong>s virtuels, <strong>de</strong> les déplacer ou<strong>de</strong> les modifier… Qu’il s’agisse <strong>de</strong>systèmes d’exploitation, <strong>de</strong> logiciels<strong>de</strong> simulation, <strong>de</strong> périphériques <strong>de</strong>saisie <strong>de</strong> données ou <strong>de</strong> jeux d’aventure,nous avons à notre disposition<strong>de</strong>s outils qui nous perm<strong>et</strong>tentd’observer, <strong>de</strong> modéliser <strong>et</strong> <strong>de</strong> contrôlerla réalité virtuelle proj<strong>et</strong>éesur nos écrans, d’agir dans <strong>de</strong>smon<strong>de</strong>s imaginaires <strong>et</strong>, <strong>de</strong> plus enplus, d’avoir une emprise sur laréalité tangible.Photo : Denis GaronQUAND L’ÉLÈVE SE SERT DUVIRTUEL POUR ACCROÎTRESON POTENTIEL?! Mars 1996 – Karine vientd’avoir 11 ans. Elle est suivie<strong>de</strong>puis trois ans par une orthopédagogue(en dénombrementflottant). Un jour, alors queKarine effectue un travail <strong>de</strong>français que lui a proposé l’intervenante,elle <strong>de</strong>man<strong>de</strong> unepaire <strong>de</strong> ciseaux <strong>et</strong> <strong>de</strong> la colle.L’orthopédagogue lui fait observerqu’il ne s’agit pas d’un bricolage,mais d’une leçon <strong>de</strong>français. La fill<strong>et</strong>te lui répondqu’elle le sait très bien, maisqu’elle aimerait tout <strong>de</strong> mêmeavoir <strong>de</strong>s ciseaux <strong>et</strong> <strong>de</strong> la collepour découper <strong>et</strong> réorganiserla liste <strong>de</strong> mots avec lesquelselle travaille pour en faire <strong>de</strong>sphrases.Quelques semaines plus tard,alors qu’elle se promène dansson quartier, elle pense à unesolution pour embellir un terrainvacant <strong>et</strong> pollué, une solutionqu’elle a découverte paressais <strong>et</strong> erreurs en jouant àSimCity.Présentement, Karine travaille leschéma narratif à l’ai<strong>de</strong> d’unidéateur. Elle est en train <strong>de</strong> surmontersa difficulté à planifierce qu’elle veut écrire. En utilisantc<strong>et</strong> outil, elle a beaucoupplus d’idées <strong>et</strong> elle parvient à lesdévelopper plus facilement. Ellepeut illustrer l’histoire qu’elle seraconte dans sa tête. Pour lapremière fois <strong>de</strong>puis qu’elle està l’école, Karine va participer aujournal <strong>de</strong> classe.Au début, Karine était le plussouvent une spectatrice contemplative,se contentant <strong>de</strong> regar<strong>de</strong>rles autres travailler à l’ordinateur.Malgré une apparente passivité,elle a tout <strong>de</strong> même saisi le potentield’un <strong>de</strong>s outils fondamentaux<strong>de</strong> toutes les applications<strong>de</strong> bureautique : le découpage <strong>et</strong>la réorganisation <strong>de</strong> textes. Sonsens <strong>de</strong> l’observation lui a permis<strong>de</strong> réinvestir les fonctionscopier <strong>et</strong> coller dans sa réalitéquotidienne <strong>et</strong> <strong>de</strong> découvrir, enjouant, <strong>de</strong>s principes <strong>de</strong> gestion<strong>de</strong> son environnement qu’ellea pu réutiliser dans la réalitétangible. Les schémas conceptuelsqu’elle commence à développerà l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’idéateur luiperm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong> prendre confianceen sa capacité <strong>de</strong> communiquerpar l’écriture.<strong>Dans</strong> un contexte où l’apprenant estconscient <strong>et</strong> à l’affût d’informations,Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004capable d’expression <strong>et</strong> doté d’unéquilibre affectif minimal, il peutcomprendre <strong>et</strong> assumer ce qu’ilfait. Il est en mesure <strong>de</strong> maintenirun équilibre heureux entre le réel <strong>et</strong>le virtuel.DES OUTILS COMPLEXES POURDES TÂCHES COMPLEXESSi l’écriture <strong>et</strong> par la suite l’imprimerieont permis aux humainsd’utiliser <strong>de</strong>s co<strong>de</strong>s <strong>et</strong> <strong>de</strong>s symbolespour exprimer leur pensée, les technologies<strong>de</strong> l’information <strong>et</strong> <strong>de</strong> lacommunication sont en train, pourleur part, <strong>de</strong> transformer notrefaçon même <strong>de</strong> penser <strong>et</strong> <strong>de</strong> nousreprésenter la réalité <strong>et</strong> notre façond’agir sur elle. La linéarité <strong>et</strong> la permanence<strong>de</strong> l’écrit font progressivementplace à la mo<strong>du</strong>larité <strong>et</strong> à lasystémie <strong>de</strong>s environnements virtuelsqui ont un impact signifiant sur notrefaçon <strong>de</strong> créer <strong>et</strong> d’apprendre. Alorsque les médias conventionnels donnaientpeu <strong>de</strong> place à l’erreur dansla version finale <strong>du</strong> document, lesmédias électroniques perm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong>r<strong>et</strong>oucher sa pro<strong>du</strong>ction ou <strong>de</strong> lamodifier à son gré. Nul besoin <strong>de</strong>tout recommencer. Il est par conséquentpossible d’arriver, en y m<strong>et</strong>tantle temps <strong>et</strong> l’effort, à une versionfinale qui soit satisfaisante.QUAND LE VIRTUELFAVORISE LA CRÉATIVITÉCOLLECTIVE?! Juin 2003 – À la soirée <strong>de</strong>gala <strong>de</strong> l’école secondaireAlexis-Bouthiller, les élèves <strong>du</strong>groupe d’anglais sont trèsfébriles. Ils présentent leur toute<strong>de</strong>rnière pro<strong>du</strong>ction vidéo auxparents <strong>et</strong> aux invités réunisdans la salle.Paul-André, un <strong>de</strong>s élèves <strong>du</strong>groupe, est à l’arrière-scène.Il se rappelle les moments forts<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te belle aventure qu’ilvient <strong>de</strong> vivre avec ses camara<strong>de</strong>s<strong>de</strong> classe. C<strong>et</strong>te année,tous ses cours d’anglais ont étécentrés sur la pro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong>films vidéo.À l’automne, ses camara<strong>de</strong>s ontété initiés à la vidéo numérique<strong>DOSSIER</strong>PÉDAGOGIQUE 25


<strong>DOSSIER</strong>lorsqu’ils ont monté, tournépuis édité un extrait <strong>de</strong> HarryPotter. Pendant l’hiver ils ontpro<strong>du</strong>it leur version <strong>de</strong> la Guerre<strong>de</strong>s tuques… sans neige!Et ce soir, ils présentent unesérie <strong>de</strong> vign<strong>et</strong>tes qu’ils ontcréées <strong>de</strong> toutes pièces.Alors que bien <strong>de</strong>s jeunes ne fontque « consommer » <strong>du</strong> cinéma,Paul-André <strong>et</strong> ses camara<strong>de</strong>s <strong>de</strong>classe pro<strong>du</strong>isent <strong>de</strong>s films. Ils ontaccès à un univers virtuel qui était,il y a encore quelques années,réservé à <strong>de</strong>s réalisateurs <strong>et</strong> à <strong>de</strong>spro<strong>du</strong>cteurs qualifiés. Paul-André <strong>et</strong>ses camara<strong>de</strong>s ont travaillé fort<strong>du</strong>rant toute l’année scolaire. Trèsfort. La première fois qu’il a vu unextrait <strong>de</strong> leur premier film, il a<strong>de</strong>mandé à son enseignante lapermission <strong>de</strong> refaire une scène.Il avait constaté à quel point il neparlait pas assez fort <strong>et</strong> n’articulaitpas bien les mots lorsqu’il s’exprimaiten anglais. Puis, à la suite <strong>du</strong>visionnement <strong>de</strong> la reprise, il a<strong>de</strong>mandé qu’on reprenne encore lascène, car c<strong>et</strong>te fois, il parlait tropvite. En mars, lui <strong>et</strong> ses équipiersont <strong>de</strong>mandé à leur enseignante lapermission d’entrer à l’école <strong>du</strong>rantles journées pédagogiques afin <strong>de</strong>reprendre le découpage <strong>du</strong> film. Lasemaine précé<strong>de</strong>nte, ils avaientinséré <strong>de</strong> nouvelles transitions entreles scènes <strong>et</strong>, après les avoir visionnées,étaient tous d’accord pourdire que cela ne fonctionnait pas.Personne n’a jamais parlé d’autorégulationà Paul-André. Mais latechnologie lui a fourni <strong>de</strong>s outilsperformants qui facilitent le regardcritique <strong>et</strong> la prise <strong>de</strong> conscience <strong>et</strong>perm<strong>et</strong>tent l’apport <strong>de</strong>s correctifsnécessaires.L’ACCROISSEMENT AUSERVICE DES SITUATIONSD’APPRENTISSAGE COMPLEXESSans supervision, un jeune peutfacilement s’égarer sur la voie <strong>du</strong>virtuel. Toutefois, si on lui fournitun encadrement flexible, il pourrafaire une utilisation créative <strong>du</strong>mon<strong>de</strong> virtuel qui préserve le lienavec le mon<strong>de</strong> réel.QUAND LA TECHNOLOGIEREHAUSSE LE NIVEAUDE CONSCIENCE,D’IMPLICATION ET DECRÉATIVITÉ D’UN GROUPE?! DU RÉEL VERS LE VIRTUELJoël veut organiser une vente <strong>de</strong>T-shirts pour amasser <strong>de</strong>s fondspour sa classe. Avec l’accord <strong>de</strong>son enseignante, il rassembleune p<strong>et</strong>ite équipe. À l’ai<strong>de</strong> d’unidéateur, ils font l’inventaire<strong>de</strong>s ressources humaines, matérielles<strong>et</strong> technologiques dont ilsauront besoin pour mener leurproj<strong>et</strong> à terme. Leur schéma estr<strong>et</strong>ouché à plusieurs reprises(<strong>et</strong> il continuera <strong>de</strong> l’être tout aulong <strong>du</strong> proj<strong>et</strong>).Les équipiers resteront toujoursen contact, même pendant lessoirées <strong>et</strong> les week-ends à lamaison, pour échanger leursidées grâce au carn<strong>et</strong> virtuelauquel ils accè<strong>de</strong>nt sur le portail<strong>de</strong> leur commission scolaire.DU VIRTUEL VERS LE RÉELUne équipe va sur le Web pourtrouver un grossiste qui peutfournir <strong>de</strong>s chandails qui leurseront livrés par la poste dès lelen<strong>de</strong>main. Une autre équipe secharge <strong>de</strong> créer un nouveaulogo à l’ai<strong>de</strong> d’une application<strong>de</strong> graphisme…DU RÉEL VERS LE VIRTUELFinalement, les infographistes enherbe optent pour la numérisationd’un logo créé « à la main »par l’« artiste » <strong>de</strong> la classe… ilsr<strong>et</strong>ouchent l’œuvre numériséepour y ajouter un jeu <strong>de</strong> formesgéométriques qui sert <strong>de</strong> cadre<strong>et</strong> ils y inscrivent le nom <strong>de</strong>l’école.DU VIRTUEL VERS LE RÉELLe logo est imprimé sur un papierspécialement conçu pouren perm<strong>et</strong>tre le transfert sur leschandails.Pendant ce temps… une autreéquipe se charge d’écrire unmessage publicitaire, d’abord àl’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’idéateur, puis avec untraitement <strong>de</strong> texte <strong>et</strong> un correcteur.Une affiche est montéeavec une partie <strong>de</strong>s textes écritsà l’ai<strong>de</strong> d’une application d’éditique.L’autre partie <strong>du</strong> texte estr<strong>et</strong>ouchée pour en faire un messagevocal, une annonce quisera diffusée à la radio scolaire.La consigne <strong>de</strong> leur enseignantest claire : faire en sorte queleur public cible soit bien i<strong>de</strong>ntifié<strong>et</strong> transformer le messageécrit en message oral en tenantcompte <strong>de</strong>s règles apprises pourobtenir une communicationorale efficace. Le message serar<strong>et</strong>ouché plusieurs fois pourl’améliorer <strong>et</strong> le rendre conformeaux exigences. Au mêmemoment, une sous-équipe estdéléguée pour trouver sur leWeb une musique accrocheuselibre <strong>de</strong> droits pour rehausser lapub. C<strong>et</strong>te annonce publicitairesera enregistrée en format numérique.L’affiche est impriméepuis installée à différents lieuxstratégiques <strong>de</strong> l’école <strong>et</strong> <strong>du</strong>quartier. L’annonce publicitaireest diffusée à la radio étudiante<strong>et</strong> versée dans le site Web <strong>de</strong>l’école. Au même moment… un<strong>de</strong>s équipiers se charge <strong>de</strong> tenirla comptabilité à l’ai<strong>de</strong> d’unfichier électronique qu’il a conçupour faire les calculs <strong>de</strong>s dépenses<strong>et</strong> <strong>de</strong>s ventes.DU RÉEL VERS LE VIRTUELUn mois plus tard, le directeur<strong>de</strong> l’établissement que fréquententJoël <strong>et</strong> ses coéquipiers déposeles fonds amassés dans uncompte bancaire… jusqu’auprochain proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> Joël ou <strong>de</strong>l’un <strong>de</strong> ses camara<strong>de</strong>s <strong>de</strong> classe.Demain, les élèves <strong>de</strong> la classeferont une évaluation <strong>de</strong> l’entreprise<strong>de</strong> leurs camara<strong>de</strong>s(à l’ai<strong>de</strong> d’une grille conçuequelques jours plus tôt parl’équipe <strong>de</strong> Joël). :-)On a ici un exemple d’énergie créativequi perm<strong>et</strong> à un groupe d’élèves<strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s apprentissages signifiantsà l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong>s technologies,dans l’esprit <strong>du</strong> Programme <strong>de</strong> formation<strong>de</strong> l’école québécoise. Lestechnologies <strong>de</strong> l’information <strong>et</strong> <strong>de</strong>la communication que les jeunesutilisent perm<strong>et</strong>tent un accroissement<strong>de</strong> leur potentiel indivi<strong>du</strong>el <strong>et</strong>collectif.Les élèves sont mobilisés, ils travaillentà partir d’axes <strong>de</strong> certainsdomaines généraux <strong>de</strong> formation(Orientation <strong>et</strong> entrepreneuriat,Médias, <strong>et</strong>c.). Ils développent leurscompétences intellectuelles, méthodologiques<strong>et</strong> <strong>de</strong> coopération. Ilstouchent à au moins <strong>de</strong>ux compétencesdisciplinaires. Ils ont lachance <strong>de</strong> voir leur travail régulépar leurs pairs. Ils ont la satisfaction<strong>de</strong> voir les r<strong>et</strong>ombées <strong>de</strong> leurimplication. Pendant tout ce temps,ils ont transité <strong>de</strong> façon créative <strong>et</strong>constructive entre le réel <strong>et</strong> le virtuel,les technologies leur perm<strong>et</strong>tantd’accroître leur potentiel.Ces élèves sont en train <strong>de</strong> <strong>de</strong>venir<strong>de</strong>s virtuoses <strong>de</strong> l’ère <strong>du</strong> numérique.M me Marie-France Laberge <strong>et</strong>M. André Roux sont animateursau Service national <strong>du</strong> RÉCIT-Domaine <strong>de</strong>s languesRéférences bibliographiquesBARRAL, É. Otaku, les enfants <strong>du</strong> virtuel,Paris, J’ai Lu, 2001.CSIKSZENTMIHALYI, M. Flow : The psychologyof optimal experience, New York, Harperand Row, 1990.DUBET, F. Pour tenter d’éclairer le concept<strong>de</strong> culture commune, [En ligne], 2001,[http://assoreveil.org/culture_commune.html].FRÉTÉ, C. Le potentiel <strong>du</strong> jeu vidéo pourl’é<strong>du</strong>cation, [En ligne], 2002, [http://tecfa.unige.ch/perso/fr<strong>et</strong>e/memoire/memoire/memoire-cath.pdf].HURIET, C. Rapport d’information n°169 -Images <strong>de</strong> synthèse <strong>et</strong> mon<strong>de</strong> virtuel,.[Enligne], 1998, [www.senat.fr/rap/o97-169/o97-169_mono.html].QUÉAU, P. Cyberespace ou le jeu vertigineux<strong>du</strong> virtuel, [En ligne], 1995,[www.humains-associes.org/no7/ha.no7.queau.1.html].RIEBER, L. P. Conception <strong>et</strong> implémentation<strong>de</strong> scénarios pédagogiques riches, [Enligne],1998, [http://tecfa.unige.ch/proj/seed/catalog/docs/guer<strong>et</strong>03/html/guer<strong>et</strong>03-schnei<strong>de</strong>r.html].TAPSCOTT, D. Growing Up Digital : The Riseof the N<strong>et</strong> Generation, Toronto, McGrawHill, 1998.1. Blogue : n. m. Page Web évolutive <strong>et</strong> nonconformiste présentant <strong>de</strong>s informations<strong>de</strong> toutes sortes, généralement sousforme <strong>de</strong> courts textes mis à jour régulièrement,<strong>et</strong> dont le contenu <strong>et</strong> la forme,très libres, restent à l’entière discrétion<strong>de</strong>s auteurs.2. Système d’exploitation visuel doté d’unbureau sur lequel reposent <strong>de</strong>s documents<strong>et</strong> <strong>de</strong>s dossiers représentés par <strong>de</strong>sicônes tels ceux offerts sous Windows,Mac OS <strong>et</strong> KDE sous Linux.VIE 26 Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004


LÀ OÙ TECHNOLOGIE RIME AVECHUMANITÉ ET SENTIMENTSpar Thérèse Des LierresSéveiller à d’autres cultures.’ Partager <strong>de</strong>s émotions au<strong>de</strong>là<strong>de</strong>s distances. Communiqueravec <strong>de</strong>s personnes éloignées.Recevoir <strong>de</strong>s conseils d’un virtuose<strong>de</strong> la musique. Voilà quelques expériencesque <strong>de</strong>s élèves <strong>de</strong> l’écolesecondaire Hormisdas-Gamelin 1ont vécues.L’école secondaire Hormisdas-Gamelin (Commission scolaire auCœur-<strong>de</strong>s-Vallées) est située àGatineau (secteur Buckingham),dans la région <strong>de</strong> l’Outaouais.Comment ses élèves ont-ils pucommuniquer avec <strong>de</strong>s élèves <strong>de</strong>Kangiqsualujjuaq, au Québec, <strong>de</strong>Toronto, en Ontario, <strong>et</strong> <strong>de</strong> Gan<strong>de</strong>r,à Terre-Neuve? Parce que leur écoleest un <strong>de</strong>s rares établissements auQuébec qui sont équipés d’un<strong>et</strong>echnologie perm<strong>et</strong>tant <strong>de</strong>s vidéoconférences.UN PEU D’HISTOIREÀ l’instigation <strong>du</strong> Centre <strong>de</strong>recherches sur les communicationsCanada 2 , en 2000, <strong>de</strong>s enseignants<strong>de</strong> diverses localités <strong>du</strong> Canada serencontrent virtuellement pourpartager leurs connaissances, leursquestions sur la pédagogie par proj<strong>et</strong>s<strong>et</strong> sur la technologie <strong>de</strong> lavidéoconférence. C’est le point <strong>de</strong>départ <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te aventure. Par lasuite, l’école secondaire Hormisdas-Gamelin reçoit l’équipement nécessaire,grâce au financement <strong>de</strong>Canarie 3 <strong>et</strong> <strong>de</strong> sa commission scolaire,pour tenir <strong>de</strong>s vidéoconférencesdans ses murs. Dorénavant,les enseignants n’ont plus à sedéplacer à Ottawa <strong>et</strong> les élèvespeuvent participer aux activités.UN PEU DE TECHNOLOGIELes écoles ont recours à CA*n<strong>et</strong>4pour favoriser les rencontres virtuellesen direct par l’entremise <strong>du</strong>Centre <strong>de</strong> recherches sur les communicationsCanada. Ce type <strong>de</strong>connections perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> transm<strong>et</strong>tresimultanément une très gran<strong>de</strong>’quantité d’informations <strong>et</strong> <strong>de</strong> lafaire parvenir à une vitesse plusaccélérée qu’avec les liens <strong>du</strong> réseauIntern<strong>et</strong>. C<strong>et</strong>te classe virtuelle utiliseune infrastructure sur réseau àlarge ban<strong>de</strong> (fibre optique) qui luiperm<strong>et</strong> <strong>de</strong> se servir <strong>de</strong>s outils multimédias<strong>et</strong> <strong>de</strong>s logiciels.AU DÉPART : LA PRINCIPALEDIFFICULTÉDisons-le franchement. Pour vivre<strong>de</strong>s expériences virtuelles, l’écoledoit acquérir un équipement sophistiqué,mais où trouver l’argent?Puis, une fois que l’on a les outils,il faut en assurer le fonctionnement<strong>et</strong> la maintenance : par qui? Quoiquele coût ne soit pas exorbitant sur ce<strong>de</strong>rnier chapitre, il est tout <strong>de</strong>même là. L’appui <strong>de</strong>s commissionsscolaires <strong>et</strong> <strong>de</strong>s directions d’écoleest alors crucial, ainsi que l’enthousiasmed’enseignants ou d’enseignantes,telle Brigitte Lussierqui assure la coordination <strong>du</strong>proj<strong>et</strong> Canarie à l’école secondaireHormisdas-Gamelin.PARTONS À LA DÉCOUVERTEDE TROIS EXPÉRIENCESVIRTUELLES VÉCUESEN 2003-2004PREMIÈRE EXPÉRIENCE :LA VALISE D’HANA 4Connaissez-vous ce récitécrit par Karen Levine 5 ?Oui, répon<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>s élèves<strong>de</strong> l’école secondaireHormisdas-Gamelin (Commissionscolaire au Cœur-<strong>de</strong>s-Vallées),<strong>de</strong> l’école Saint-Germain-<strong>de</strong>-Saint-Laurent (Commission scolaireMarguerite-Bourgeoys) <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’écoleprimaire W.O. Mitchell, à Ottawa. Ilsl’ont lu, s’en sont imprégnés <strong>et</strong> sesont rencontrés virtuellement pouren discuter. Quelle expérience 6 !Qui est Hana? C<strong>et</strong>te p<strong>et</strong>ite fille estnée le 16 mai 1931 dans un villag<strong>et</strong>chèque. Elle est juive. À 13 ans, enoctobre 1944, elle est déportée aucamp <strong>de</strong> concentration d’Auschwitz.Elle part avec sa valise <strong>de</strong> cuir brundoublée <strong>de</strong> tissu à pois. Dès lelen<strong>de</strong>main <strong>de</strong> son arrivée, elle estenvoyée dans une chambre à gaz.Qu’avait-elle apporté dans sa précieusevalise?C<strong>et</strong>te valise, une jeune Japonaiseà l’origine <strong>du</strong> Centre <strong>de</strong> ressources<strong>de</strong> l’Holocauste pour enfants àTokyo, Fumiko Ishioka, l’a trouvée.Un nom y est inscrit : Hana Brady.Après <strong>de</strong> nombreuses péripéties,la jeune Japonaise est parvenueà joindre le frère d’Hana, GeorgeBrady. Il est vivant <strong>et</strong> <strong>de</strong>meure àToronto.Le proj<strong>et</strong> <strong>de</strong>s trois écoles viséesdébute donc le 4 novembre 2003.Les enseignants qui y prennent partse rencontrent virtuellement pourplanifier les activités à venir. Puisc’est au tour <strong>de</strong>s élèves <strong>de</strong> faireconnaissance le 14 novembre. Ilfaut se présenter, établir le contact<strong>et</strong> se familiariser avec la technologie.C’est le branle-bas <strong>de</strong> combat dansles classes. Les élèves lisent leroman, en discutent <strong>et</strong>, en équipe,préparent <strong>de</strong> courts exposés créatifs.Une <strong>de</strong>s compétences développéesse lit ainsi : « M<strong>et</strong>tre en œuvresa pensée créatrice en créant <strong>de</strong>spoèmes, chansons <strong>et</strong> constructionsen arts plastiques en lien direct avecles émotions déclenchées par lalecture <strong>du</strong> livre <strong>et</strong> <strong>de</strong>s discussionsen classe. » Les élèves sont émuspar c<strong>et</strong>te histoire. Ils s’interrogent.POURQUOI? Pourquoi en 1940?Pourquoi en 2004? Une question estensuite posée à tous les élèves : Quem<strong>et</strong>triez-vous dans votre valise dansune pareille circonstance?<strong>Dans</strong> la classe <strong>de</strong> Stéphanie Girard(quatrième secondaire), tous lesélèves participent aux activités préparatoires.Huit d’entre eux, choisispar leurs camara<strong>de</strong>s, acceptent <strong>de</strong>les représenter lors <strong>de</strong>s vidéoconférences.Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004SONIA OUELLETLe 25 novembre, c’est le grand jour.L’auteure <strong>du</strong> livre est présente, ainsique la tra<strong>du</strong>ctrice (le livre écrit enanglais a été tra<strong>du</strong>it dans plus <strong>de</strong>quinze langues). Un porte-parole<strong>de</strong> Bibliothèque <strong>et</strong> Archives Canadaa apporté plusieurs obj<strong>et</strong>s (l<strong>et</strong>tres,photos, morceaux <strong>de</strong> vêtements).Un <strong>de</strong>s survivants est là aussi, prêt àtémoigner. À tour <strong>de</strong> rôle, un représentant<strong>de</strong> chaque école parle auxautres : il présente son école <strong>et</strong> lestravaux effectués en classe. Deséchanges s’engagent alors, surtoutavec le rescapé <strong>de</strong> l’Holocauste :Comment se déroulait la vie <strong>de</strong> tousles jours au camp <strong>de</strong> concentration?Qu’est-il arrivé à sa famille? Commentétaient les Allemands qui dirigeaientle camp? Les élèves ont lesyeux grands ouverts, sans oublierleurs oreilles <strong>et</strong>… leur cœur!Lorsque les huit représentants <strong>de</strong> laclasse <strong>de</strong> Stéphanie Girard reviennentdans leur propre classe, les questionsfusent <strong>et</strong> les émotions sontpartagées. C<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière vidéoconférencen’aura <strong>du</strong>ré que 75 minutes,mais les apprentissages <strong>du</strong>rerontprobablement toute la vie.DEUXIÈME EXPÉRIENCE : PARTAGERSA PASSION DE LA MUSIQUE…C’est la musique qui réunit virtuellement<strong>de</strong>s spécialistes avec <strong>de</strong>senseignants <strong>et</strong> leurs élèves branchés.PÉDAGOGIQUE 27<strong>DOSSIER</strong>


<strong>DOSSIER</strong>YANIK FRANCOEUR ET PIERRE CHALIFOURDepuis <strong>de</strong>ux ans, c<strong>et</strong>te activité sedéroule en anglais pendant toutel’année scolaire <strong>de</strong> façon régulière.MusicGrid 7 chapeaute ces rencontres.Tous les participants sontreliés grâce à une technologie <strong>de</strong>pointe, mais c’est grâce à laMUSIQUE que la magie opère! Lespossibilités sont variées : enseigner,piloter une ou plusieurs classes,s’entrai<strong>de</strong>r entre élèves, m<strong>et</strong>tre enplace <strong>de</strong>s proj<strong>et</strong>s <strong>de</strong> collaboration,discuter avec <strong>de</strong>s professionnels,diriger un orchestre, écouter <strong>de</strong>sindivi<strong>du</strong>s ou <strong>de</strong>s groupes jouer,chanter, composer, <strong>et</strong>c.Tous les élèves <strong>de</strong> Sonia Ouell<strong>et</strong>participent aux activités à unmoment ou l’autre. Par exemple, aucourant <strong>du</strong> mois <strong>de</strong> septembre,l’ensemble vocal <strong>de</strong> l’école secondaireHormisdas-Gamelin (activitéparascolaire) a chanté un <strong>de</strong>scoupl<strong>et</strong>s <strong>de</strong> l’hymne national <strong>du</strong>Canada. Les quatre autres écolesont alors fait <strong>de</strong> même, tandis quele refrain était entonné par <strong>de</strong>sélèves d’une école <strong>de</strong> Toronto. Unepremière rencontre à travers lamusique <strong>et</strong> le chant!Le temps <strong>de</strong>s fêtes! Qui n’entend pas<strong>de</strong>s airs <strong>de</strong> Noël à c<strong>et</strong>te pério<strong>de</strong>?Les élèves <strong>de</strong> l’ensemble vocal leschantent avec leurs camara<strong>de</strong>srépartis dans tout le Canada. C’estaussi pendant c<strong>et</strong>te pério<strong>de</strong> que lesélèves <strong>de</strong> l’harmonie Contre-Temps(activité parascolaire) interprètentune pièce musicale <strong>et</strong> écoutentleurs compagnons s’exécuter également,<strong>et</strong> ce, toujours virtuellement.De vraies rencontres dans la joie <strong>de</strong>Noël!Chaque mardi, un virtuose d’unespécialité (session <strong>de</strong> jazz) ou d’uninstrument (clarin<strong>et</strong>tiste, flûtiste,corniste, percussionniste) est enligne. Les élèves qui jouent <strong>de</strong> c<strong>et</strong>instrument se ren<strong>de</strong>nt dans la salleprévue (là où micros <strong>et</strong> technologiesont installés, bien sûr). Ils sont unpeu stressés : la présence d’un professionnel<strong>de</strong> renom y est pourquelque chose, mais aussi celle <strong>de</strong>sautres élèves. Ils doivent jouer<strong>de</strong> leur mieux : plusieurs yeux <strong>et</strong>oreilles les voient <strong>et</strong> les enten<strong>de</strong>nt!Ils redoublent d’efforts. S’il est vraique le défi est plus grand, il fautbien avouer que la fierté <strong>du</strong> travailbien fait est au ren<strong>de</strong>z-vous <strong>et</strong> legoût <strong>de</strong> faire encore mieux laprochaine fois. La motivation fait<strong>de</strong>s miracles! C’est ainsi que la technologieperm<strong>et</strong> à un expert d’entreren contact, en même temps, avecplusieurs jeunes <strong>de</strong> divers horizons<strong>et</strong> <strong>de</strong> partager sa passion.Recevoir <strong>de</strong>s cours particuliersd’un musicien renommé? C’est possiblegrâce à une technologie plusrestreinte qui, c<strong>et</strong>te fois, perm<strong>et</strong> <strong>de</strong>rassembler virtuellement <strong>de</strong>s participantsqui se trouvent dans <strong>de</strong>uxsalles éloignées.La classe d’« option musique » (huitcours <strong>de</strong> musique sur un cycle <strong>de</strong>neufs jours) <strong>de</strong> Sonia Ouell<strong>et</strong> a puprofiter <strong>de</strong> l’expérience <strong>de</strong> M. PaceStur<strong>de</strong>rvant à Ottawa. Quelle expériencepour ces élèves <strong>de</strong> se trouvervirtuellement, pendant <strong>de</strong>ux cours,face à un tromp<strong>et</strong>tiste <strong>de</strong> renom!Tout le mon<strong>de</strong> est au ren<strong>de</strong>z-vous.Ce grand musicien travaille avectout le groupe, intervenant avec différentessections d’instruments,selon les besoins.Chaque rencontre est très significativepour les élèves. Ils voudraientque ces audiences soient plus nombreuses,mais ils s’aperçoivent aussiqu’exceller en musique <strong>de</strong>man<strong>de</strong><strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s efforts <strong>et</strong>… <strong>de</strong> s’exercer!Il faut bien assimiler ce quel’on vient d’apprendre en le reprenantmaintes <strong>et</strong> maintes fois, seuld’abord puis en groupe pourasseoir les compétences indivi<strong>du</strong>elles<strong>et</strong> organisationnelles.Depuis le 31 mars, le proj<strong>et</strong> est officiellementterminé. À l’heureactuelle, l’évaluation est en cours <strong>et</strong>les résultats sont à venir. Si lebateau repart, pour Sonia Ouell<strong>et</strong>,il n’y a aucune hésitation : elle seraà bord. Quel enrichissement pourune enseignante! C<strong>et</strong>te expériencelui a permis, dit-elle, <strong>de</strong> recevoirune formation, en même temps queses élèves, équivalente à un atelier àun congrès <strong>de</strong> la Fédération <strong>de</strong>sassociations <strong>de</strong> musiciens é<strong>du</strong>cateurs<strong>du</strong> Québec (FAMEQ). Parexemple, M. Pace Stur<strong>de</strong>rvant l’amotivée à m<strong>et</strong>tre beaucoup d’énergiesur la maîtrise <strong>de</strong> la sonorité <strong>de</strong>sinstruments, sans négliger une bonnerespiration <strong>et</strong> un bon soutien <strong>de</strong>l’air cumulé. Toute une différencesonore lorsqu’on le fait bien, précise-t-elle!Sonia Ouell<strong>et</strong> est convaincueque ses élèves sentent, euxaussi, c<strong>et</strong>te amélioration. Elle a pufacilement réintégrer toutes cescourtes séances <strong>de</strong> formation nonseulement dans la classe participante,mais aussi dans toutes sesclasses. C’est ainsi que les plusgrands apprentissages musicauxpeuvent se faire à travers leséchanges humains, l’expérience <strong>et</strong>la coopération, conclut-elle.Inutile <strong>de</strong> poser la question auxélèves. Ils l’ont dit à plusieursreprises : s’il y a un autre départ, ilsseront également <strong>du</strong> voyage!TROISIÈME EXPÉRIENCE :L’EXPÉDITION DUCAPITAINE BERNIER 8« Partir, voyager <strong>et</strong> découvrir <strong>de</strong>nouveaux horizons. Tel était le désir<strong>du</strong> célèbre marin <strong>de</strong> L’Isl<strong>et</strong>, le capitaineJoseph-Elzéar Bernier. » Ainsicommence l’exposition virtuelle <strong>du</strong>Musée maritime <strong>du</strong> Québec 9 . Audébut <strong>du</strong> xx e siècle, le capitaine <strong>et</strong>son équipage entreprennent uneexpédition qui les con<strong>du</strong>ira dans lesîles arctiques. C’est alors la rencontre<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux cultures : francophone<strong>et</strong> inuite.S’inspirant <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te exposition, leMusée virtuel <strong>du</strong> Canada 10 m<strong>et</strong> enavant un proj<strong>et</strong> pilote <strong>de</strong> classevirtuelle. Pour le secteur francophone,trois écoles y participent(à Gatineau, à Kangiqsualujjuaq <strong>et</strong>à Ottawa). Le 22 février 2004,les enseignants qui ont choisi d’yprendre part se rencontrent virtuellement,avec un porte-parole <strong>du</strong> Musée,pour la présentation <strong>du</strong> proj<strong>et</strong>.Trois jours plus tard, cinq élèves <strong>de</strong>Yanik Francœur (première secondaire),enseignant d’histoire <strong>et</strong><strong>de</strong> géographie, sont fin prêts.Comme les élèves d’Ottawa <strong>et</strong> <strong>de</strong>Kangiqsualujjuaq, ils ont visité l’expositionvirtuelle sur le capitaineBernier; ils se sont documentés<strong>et</strong>… ils ont préparé <strong>de</strong>s questions!Le moment est irremplaçable. Eneff<strong>et</strong>, à Kangiqsualujjuaq, <strong>de</strong>uxaînés inuits <strong>et</strong> un interprète accompagnentles élèves. Ils sont là pourles jeunes, prêts à répondre à leursquestions : À quoi peut ressemblerune journée typique dans votre vie?Comment sont vos rapports avec lesBlancs? Quelles sont les activités<strong>de</strong>s jeunes <strong>de</strong> notre âge dans votrecommunauté?... La fascination estévi<strong>de</strong>nte : entre <strong>de</strong>s cultures, <strong>de</strong>sgénérations, <strong>de</strong>s langues différentes.Quel ren<strong>de</strong>z-vous!La prochaine rencontre virtuelle estplanifiée pour la fin <strong>de</strong> février. Lesparticipants sont alors appelés àprésenter une expédition qui a eulieu à peu près à la même pério<strong>de</strong>que celle <strong>du</strong> capitaine Bernier, maisdans leur région respective. Le travailest intense, car le temps estlimité. Cependant, ils sont tousau ren<strong>de</strong>z-vous. Les élèves <strong>de</strong>Kangiqsualujjuaq traitent d’uneexpédition inuite typique (chasse <strong>et</strong>pêche), ceux d’Ottawa, <strong>du</strong> colonel By<strong>et</strong> ceux <strong>de</strong> Gatineau, <strong>de</strong> l’expédition<strong>de</strong>s bûcherons à travers la légen<strong>de</strong>VIE 28 Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004


Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004<strong>de</strong> la chasse-galerie. Des aventuriers,il y en a dans chaque région!Pour la <strong>de</strong>rnière rencontre virtuelle,soit celle <strong>du</strong> 10 mars, c’estau tour <strong>de</strong>s élèves <strong>de</strong> s’imaginereux-mêmes <strong>de</strong> grands explorateurs.Où aller? Avec qui? Comment sepréparer? Que faut-il apporter?Voilà quelques questions, parmid’autres, auxquelles un explorateurdoit répondre avant <strong>de</strong> partir. Quece soit pour le Parc <strong>de</strong> la Gatineau(Ottawa), la Chine (Kangiqsualujjuaq)ou la lune (Gatineau)!C’est la première année qu’un telproj<strong>et</strong> existe : il est présentement enévaluation. Comme le soulignePierre Chalifour 11 , c<strong>et</strong>te activité perm<strong>et</strong>d’emmener le Musée virtuel <strong>du</strong>Canada dans les salles <strong>de</strong> classe <strong>et</strong>,par ricoch<strong>et</strong>, <strong>de</strong> le faire connaître.Pour Yanik Francœur, son désir estque ce proj<strong>et</strong> ait lieu <strong>de</strong> nouveaul’an prochain. Son rêve? Faire participertous ses élèves à un proj<strong>et</strong>plus vaste <strong>et</strong> avoir davantage <strong>de</strong>BRIGITTE LUSSIERtemps pour le réaliser. Il insiste surl’engagement <strong>de</strong>s cinq élèves participants: ils y ont mis beaucoup <strong>de</strong>temps, d’énergie, <strong>de</strong> détermination,<strong>de</strong> sérieux; ils se sont documentésavec acharnement <strong>et</strong> rigueur; <strong>et</strong> ilsont posé <strong>de</strong>s questions <strong>de</strong> tousordres. Yanik est convaincu qu’ilpourrait faire vivre c<strong>et</strong> engouementà tous les élèves <strong>de</strong> sa classe.EN CONCLUSIONLes enseignants rencontrés ont lesyeux brillants lorsqu’ils parlent <strong>de</strong>ce qu’ils ont vécu dans ces proj<strong>et</strong>s,<strong>et</strong> ce, en dépit <strong>de</strong>s difficultés techniques,d’agencement <strong>de</strong>s horaires,<strong>de</strong> réservation <strong>de</strong> salles, <strong>de</strong> surcharge<strong>de</strong> travail pour encadrerles élèves ou <strong>de</strong> la technologie àapprivoiser! Ils y ont appris à m<strong>et</strong>treen pratique quelques approchespréconisées par la réforme, commel’ouverture interculturelle <strong>et</strong> leurrôle <strong>de</strong> gui<strong>de</strong> dans les apprentissages<strong>de</strong>s élèves. Ce n’est peut-êtrepas la voie <strong>de</strong> l’avenir, mais c’estcertainement une voie qui perm<strong>et</strong>traaux citoyens <strong>de</strong> <strong>de</strong>main<strong>de</strong> s’ouvrir à d’autres cultures, àd’autres langages, à d’autres façons<strong>de</strong> voir la vie <strong>et</strong>, qui sait, <strong>de</strong> travaillerdavantage pour la paix!M me Thérèse Des Lierres estprofesseure au Département<strong>de</strong>s sciences <strong>de</strong> l’é<strong>du</strong>cation <strong>de</strong>l’Université <strong>du</strong> Québec enOutaouais.1. Nos plus sincères remerciements àBrigitte Lussier pour l’organisation <strong>de</strong>la rencontre qui a permis la rédaction<strong>du</strong> présent article ainsi qu’à SoniaOuell<strong>et</strong>, Stéphanie Girard <strong>et</strong> YanikFrancœur pour leur collaboration. Ilssont tous enseignants à l’école secondaireHormisdas-Gamelin. Merci égalementà Pierre Chalifour, <strong>du</strong> Musée virtuel<strong>du</strong> Canada, pour sa participation à larencontre.2. Voir le site suivant : www.crc.ca.3. Voir le site suivant : www.canarie.ca.4. Il s’agit d’un proj<strong>et</strong> mené par laBibliothèque nationale <strong>du</strong> Canada encollaboration avec le Conseil national <strong>de</strong>recherches <strong>du</strong> Canada <strong>et</strong> la classevirtuelle <strong>du</strong> Centre <strong>de</strong> recherches sur lescommunications Canada.5. Hurtubise, Montréal, 2002.6. Voir le site suivant : rtsq.grics.qc.ca/vi<strong>de</strong>o_en_classe/club_<strong>de</strong>_lecture.htm.7. Voir le site suivant : www.musicgrid.ca.8. Ce proj<strong>et</strong> a été réalisé avec la collaboration<strong>du</strong> Musée virtuel <strong>du</strong> Canada, <strong>du</strong>Réseau canadien d’information sur lepatrimoine, <strong>du</strong> Centre <strong>de</strong> recherches surles communications Canada <strong>et</strong> <strong>du</strong> Conseilnational <strong>de</strong> recherches <strong>du</strong> Canada.9. Voir le site suivant : www.ilititaa.org.10. Voir le site suivant : www.museevirtuel.ca.11. M. Chalifour est agent <strong>de</strong> programmed’investissement au Musée virtuel <strong>du</strong>Canada.<strong>DOSSIER</strong>PÉDAGOGIQUE 33


INTERNET FAIT VOYAGERLES ÉLÈVES DE L’ÉCOLE SECONDAIREPÈRE-MARQUETTEpar Réginald Fleury<strong>DOSSIER</strong>Faire <strong>de</strong> l’é<strong>du</strong>cation interculturelledans un cours <strong>de</strong>mathématiques? À premièrevue, le défi peut paraître difficileà relever. Pourtant, en utilisantles technologies <strong>de</strong> l’information <strong>et</strong><strong>de</strong> la communication (TIC) commeoutil d’exploration internationale,<strong>de</strong>s élèves <strong>de</strong> première secondaireont découvert les monnaies <strong>de</strong>nombreux pays <strong>et</strong> la richesse culturelle<strong>de</strong> leur propre classe.UNE ÉCOLE QUI FAIT PLACEÀLADIVERSITÉETHNOCULTURELLEL’école secondaire Père-Marqu<strong>et</strong>te,située dans le quartier Rosemontà Montréal, accueille 1 200 élèvesqui représentent bien la réalité<strong>et</strong>hnographique métropolitaine. Desjeunes québécois issus <strong>de</strong> famillesétablies ici <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>s décennies ou<strong>de</strong>s siècles en côtoient d’autresissus d’une immigration récente.On y recense 54 pays d’origine,incluant la France <strong>et</strong> le Canada.Bien sûr, le français est la langue <strong>de</strong>tous les échanges, mais, à la maison,ce sont près <strong>de</strong> 40 langues différentesqui sont parlées par lesélèves. Sept classes d’accueil <strong>et</strong> unservice <strong>de</strong> soutien linguistique ontla responsabilité <strong>de</strong> donner uncoup <strong>de</strong> main aux élèves qui nemaîtrisent pas encore le français.Riche <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te diversité culturelle,l’école secondaire Père-Marqu<strong>et</strong>te acependant une lour<strong>de</strong> responsabilité,soit celle d’assurer l’intégration<strong>et</strong> l’égalité <strong>de</strong>s chances pour tousces élèves. Elle le fait d’abord enayant un personnel qui représentebien la diversité culturelle montréalaise,mais aussi en m<strong>et</strong>tant sur pied<strong>de</strong>s proj<strong>et</strong>s qui favorisent l’apprentissagecoopératif.LES TIC ET L’ENSEIGNEMENTEN ÉQUIPEDurant l’année scolaire 2003-2004,plusieurs cours <strong>de</strong> première secondaireont été jumelés dans un contexted’enseignement en équipe :français <strong>et</strong> géographie, français <strong>et</strong>écologie, mathématique <strong>et</strong> informatique.Implantée conformément à lastratégie d’intervention Agir autrement,c<strong>et</strong>te approche a pour objectif<strong>de</strong> faciliter la réalisation <strong>de</strong>proj<strong>et</strong>s pédagogiques complexespour les élèves qui arrivent toutjuste <strong>de</strong> l’école primaire.Par ailleurs, l’école a fait <strong>de</strong>s effortsconsidérables <strong>du</strong>rant les <strong>de</strong>rnièresannées pour s’équiper sur le planmultimédia. Ordinateurs, écrans,projecteurs, logiciels <strong>et</strong> camérasdigitales, c<strong>et</strong> ensemble d’outils estdésormais à la disposition <strong>de</strong>s élèves<strong>et</strong> <strong>de</strong>s enseignants pour diversifierles moyens d’accé<strong>de</strong>r à l’information<strong>et</strong> <strong>de</strong> communiquer leursréalisations.C’est la combinaison <strong>de</strong> l’enseignementen équipe <strong>et</strong> <strong>de</strong>s ressourcestechnologiques qui a donné naissanceau proj<strong>et</strong> communémentappelé « Math-info » à l’école secondairePère-Marqu<strong>et</strong>te. Ce proj<strong>et</strong>utilise les avantages pédagogiques<strong>de</strong>s TIC pour ai<strong>de</strong>r les élèves <strong>de</strong>première secondaire à mieux comprendreles mathématiques. Par <strong>de</strong>sjeux, <strong>de</strong>s activités d’exploration <strong>et</strong><strong>de</strong>s exercices virtuels, les élèvesapprennent <strong>et</strong> comprennent lesmathématiques différemment.Pour tous les groupes <strong>de</strong> premièresecondaire, <strong>de</strong>ux cours <strong>de</strong> mathématiquessur huit (par cycle <strong>de</strong> neufjours) sont consacrés à <strong>de</strong>s activitésspéciales. Durant ces cours, chaqueélève dispose d’un ordinateur, <strong>et</strong>surtout <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux enseignants plutôtqu’un, pour le gui<strong>de</strong>r à travers sesapprentissages.<strong>Dans</strong> un tel cadre, il <strong>de</strong>vient plusfacile <strong>de</strong> créer <strong>de</strong>s activités d’apprentissagecomplexes, où les élèvesdoivent m<strong>et</strong>tre à contribution ungrand nombre <strong>de</strong> ressources pourréussir à résoudre un problème.Lorsque ce <strong>de</strong>rnier est situé dans uncontexte international, les ressourcesculturelles <strong>de</strong>s élèves prennent alorsune valeur considérable.LES MONNAIES DU MONDEL’activité Les monnaies <strong>du</strong> mon<strong>de</strong> 1portait sur les opérations sur lesnombres décimaux. Elle partaitd’une compétence que les élèvesavaient déjà acquise au primaire <strong>et</strong>dans leur quotidien en manipulant<strong>de</strong> l’argent. Cependant, le fait d’explorerun autre système monétaireperm<strong>et</strong>tait <strong>de</strong> consoli<strong>de</strong>r les habil<strong>et</strong>ésqu’ils possédaient déjà, tout enpoussant plus loin le niveau <strong>de</strong> maîtrise<strong>de</strong>s concepts liés aux nombresdécimaux.Divisée en trois étapes <strong>de</strong> <strong>de</strong>uxcours <strong>de</strong> 90 minutes, l’activité proposaitd’abord une découverte <strong>de</strong>l’euro. Durant c<strong>et</strong>te étape, les élèves<strong>de</strong>vaient déterminer les noms <strong>de</strong>spays qui utilisent l’euro <strong>et</strong> effectuer<strong>de</strong>s opérations simples sur <strong>de</strong>spièces <strong>de</strong> monnaies. Grâce auxactivités virtuelles <strong>du</strong> site Wisweb 2 ,chaque élève pouvait manipuler lespièces européennes, additionner <strong>et</strong>soustraire <strong>de</strong>s nombres décimauxou multiplier un nombre décimalpar un nombre entier.Déjà à c<strong>et</strong>te étape, les connaissances<strong>de</strong>s élèves sur les autres paysétaient mises à profit. Les élèvesd’origine européenne récemmentimmigrés faisaient figure <strong>de</strong> référenceau sein <strong>de</strong>s groupes. D’unautre côté, plusieurs élèves dont lafamille était établie au Québec<strong>de</strong>puis un certain temps révélaienteux aussi la diversité <strong>de</strong> leursorigines, leurs grands-parents ouarrière-grands-parents étant venus<strong>de</strong> pays européens.Durant la <strong>de</strong>uxième étape, les élèvesavaient pour tâche <strong>de</strong> déterminer,pour quinze pays donnés, la capitale<strong>et</strong> le nom <strong>de</strong> la monnaie utiliséeainsi que sa valeur par rapport audollar canadien. Pour c<strong>et</strong>te partie <strong>de</strong>l’activité, les sources d’informationétaient le dictionnaire, l’encyclopédievirtuelle <strong>et</strong> le réseau Intern<strong>et</strong>,sans oublier les connaissances personnelles<strong>de</strong>s élèves.Évi<strong>de</strong>mment, un réseau d’échange<strong>de</strong>s connaissances s’est créé autour<strong>de</strong>s élèves dont le pays d’originefaisait partie <strong>de</strong> la liste, ceux-cin’ayant pas à chercher bien loinpour trouver la capitale ou la monnaieutilisée. <strong>Dans</strong> leur recherched’information, les élèves se sontintéressés aux origines <strong>de</strong> leurscamara<strong>de</strong>s. <strong>Dans</strong> plusieurs cas,même si un élève ne venait pas d’un<strong>de</strong>s pays sur la liste, la proximitégéographique <strong>de</strong> son pays d’origine<strong>et</strong> <strong>de</strong> celui qui était recherché faisaitquand même <strong>de</strong> c<strong>et</strong> élève une référence.En outre, le plurilinguisme<strong>de</strong> quelques-uns a été mis à profit,car certains <strong>de</strong>s sites explorésétaient en anglais ou en espagnol.Déjà, la diversité <strong>du</strong> bagage culturel<strong>de</strong>s élèves était <strong>de</strong>venue un suj<strong>et</strong>d’exploration pour l’ensemble <strong>du</strong>groupe, mais la partie <strong>de</strong> l’activitétraitant <strong>de</strong> la valeur relative <strong>de</strong>smonnaies par rapport au dollarcanadien a vraiment éveillé leurcuriosité sur la réalité économique<strong>de</strong>s autres pays. Pour répondreà c<strong>et</strong>te curiosité, l’expérience <strong>de</strong>sélèves issus d’une immigrationrécente <strong>de</strong>venait la meilleure sourced’information.Par exemple, en déterminant qu’unpeso chilien vaut aujourd’hui moinsVIE 34 Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004


Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004d’un cent canadien ou que, inversement,un dollar canadien vaut plus<strong>de</strong> 450 pesos chiliens, les élèvesétaient un peu déboussolés. Ceuxqui ne connaissaient que la monnaiecanadienne ne pouvaient s’imaginer<strong>de</strong>s valeurs si différentes dansd’autres systèmes monétaires. Cesont les élèves d’origine chilienneou sud-américaine qui ont purépondre à leurs questions :•«Il y a <strong>de</strong>s pièces <strong>de</strong> 100 pesos aulieu d’avoir <strong>de</strong>s pièces <strong>de</strong> 1 cent <strong>et</strong>il existe <strong>de</strong>s bill<strong>et</strong>s <strong>de</strong> 10 000 pesosau lieu <strong>de</strong>s bill<strong>et</strong>s <strong>de</strong> 20 dollars. »•«Un paqu<strong>et</strong> <strong>de</strong> gomme à mâchercoûte 200 pesos. C’est beaucoup<strong>de</strong> pesos, mais ça vaut à peu près50 cents. <strong>Dans</strong> le fond, c’est moinscher là-bas. »•«Avec 1 million <strong>de</strong> dollars, tut’achètes une super belle maison,alors qu’avec 1 million <strong>de</strong> pesostu t’achètes un super bon ordinateur.»Les discussions ont été très intéressantes,notamment lorsque lesélèves se sont mis à comparer lavaleur <strong>de</strong> certains obj<strong>et</strong>s d’un paysà l’autre, par exemple, celle <strong>du</strong>paqu<strong>et</strong> <strong>de</strong> gomme à mâcher, maisaussi dans le cas <strong>de</strong>s vêtements,<strong>de</strong> la nourriture, <strong>de</strong>s disques compacts,<strong>du</strong> bill<strong>et</strong> d’entrée au cinéma,<strong>et</strong>c.En plus <strong>de</strong>s notions mathématiques(inverses multiplicatifs) <strong>et</strong> socioéconomiques,c<strong>et</strong>te activité a amené lesélèves à parler <strong>de</strong> macroéconomie.En eff<strong>et</strong>, la ressource principaleutilisée pour c<strong>et</strong>te partie <strong>de</strong> l’activitéétait le site <strong>de</strong> la Banque <strong>du</strong>Canada. Grâce à c<strong>et</strong>te source, lesélèves avaient accès à une informationtrès actuelle <strong>et</strong> ils étaient mêmeen mesure <strong>de</strong> saisir la dynamiquerelative aux fluctuations <strong>de</strong>s valeursmonétaires. Ayant remarqué que lestaux <strong>de</strong> change variaient d’unejournée à l’autre, les élèves se sontquestionnés sur les raisons <strong>et</strong> lesconséquences <strong>de</strong> tels changements.Bien sûr, les enseignants ont reprisleur rôle <strong>de</strong> référence pour parler<strong>de</strong>s causes <strong>de</strong> la variation quotidienne<strong>de</strong>s taux <strong>de</strong> change, maisc’est le témoignage d’un élèvearrivé d’Argentine qui en montraitle mieux quelques conséquencespossibles sur la vie <strong>de</strong> jeunes <strong>de</strong>leur âge. Ainsi, grâce à l’expérienced’un <strong>de</strong> leurs camara<strong>de</strong>s, les élèvesse sont interrogés sur les facteursqui peuvent amener <strong>de</strong>s familles àimmigrer au Québec.<strong>Dans</strong> la troisième <strong>et</strong> <strong>de</strong>rnière étape<strong>de</strong> l’activité, les élèves <strong>de</strong>vaientd’abord r<strong>et</strong>rouver l’origine <strong>de</strong> septobj<strong>et</strong>s ach<strong>et</strong>és par un globe-trotterayant parcouru le mon<strong>de</strong>, avantd’en déterminer la valeur en dollarscanadiens. Ici, les élèves développaientune habil<strong>et</strong>é à multiplier <strong>de</strong>snombres décimaux entre eux.Comme aux autres étapes, mais ici<strong>de</strong> façon plus marquée, ce sont lesconnaissances <strong>de</strong>s élèves sur <strong>de</strong>scultures autres que la leur qui ontété valorisées. Par exemple, bienqu’il n’y ait eu aucun élève d’originebrésilienne dans les groupes, unemajeure partie d’entre eux a pudéterminer sans difficulté la provenance<strong>du</strong> chandail <strong>de</strong> soccer jaune<strong>et</strong> vert <strong>de</strong> l’équipe nationale <strong>du</strong>Brésil.Bref, l’activité Les monnaies <strong>du</strong>mon<strong>de</strong>, d’abord centrée autourd’apprentissages concernant lesmathématiques, par son contexteinternational <strong>et</strong> grâce à <strong>de</strong> l’informationsur d’autres pays obtenuepar les TIC, a aussi permis à tous lesélèves <strong>de</strong> première secondaire <strong>de</strong>l’école Père-Marqu<strong>et</strong>te <strong>de</strong> vivre unebelle expérience d’é<strong>du</strong>cation interculturelle.LES TIC ET LA VALORISATIONDU BAGAGE CULTURELPour l’activité Les monnaies <strong>du</strong>mon<strong>de</strong>, les TIC ont été utiliséescomme moyens <strong>de</strong> trouver <strong>et</strong> <strong>de</strong>présenter une information actuelle,venant <strong>de</strong> plusieurs sources différentes.Les compétences transversalesrelatives à l’utilisation <strong>de</strong>navigateurs, <strong>de</strong> moteurs <strong>de</strong> recherche<strong>et</strong> <strong>de</strong> cédéroms ont donné auxélèves une gran<strong>de</strong> autonomie dansleur quête <strong>de</strong> renseignements surles différents pays. Plusieurs ontmême réutilisé <strong>de</strong>s sources d’informationdécouvertes dans leur cours<strong>de</strong> géographie.Le contexte d’exploration internationaleest, bien enten<strong>du</strong>, plus quepropice à l’éveil d’un intérêt <strong>de</strong>sélèves pour le bagage culturel fortdiversifié <strong>de</strong> certains <strong>de</strong> leurs camara<strong>de</strong>s.Cependant, l’utilisation autonome<strong>de</strong>s TIC a fait que les élèvesont pu prendre un rôle très actifdans la recherche d’information surles autres pays. Ainsi, les élèves nese faisaient pas simplement raconterune histoire sur un autre pays,mais ils participaient à la construction<strong>de</strong>s connaissances <strong>du</strong> groupe.Par exemple, c’est un élève d’originenon pas chinoise mais québécoisequi a expliqué à son groupepourquoi la ville <strong>de</strong> Beijing s’appelaitaussi Pékin.L’utilisation <strong>de</strong>s TIC a aussi permisune plus gran<strong>de</strong> exploration <strong>de</strong>spays par la quantité d’images misesà la disposition <strong>de</strong> tous, notammentdans Intern<strong>et</strong>, sur les drapeaux, lasituation géographique, les pièces<strong>de</strong> monnaie, les villes <strong>et</strong> les paysages<strong>de</strong> chacun. <strong>Dans</strong> la <strong>de</strong>rnièrepartie <strong>de</strong> l’activité, <strong>de</strong>s élèves ontmême déniché une vidéo qui leur apermis <strong>de</strong> reconnaître le son d’un<strong>de</strong>s obj<strong>et</strong>s ach<strong>et</strong>és par le glob<strong>et</strong>rotter: le stealdrum.L’utilisation <strong>de</strong>s TIC a donc pouravantage, en milieu multi<strong>et</strong>hnique,<strong>de</strong> donner accès à un vaste répertoired’informations écrites, visuelles<strong>et</strong> même auditives sur les paysd’origine <strong>de</strong>s élèves.LE RAPPORT AU SAVOIRLa démocratisation <strong>de</strong> l’accès à l’informationengendrée par les TIC aun impact direct sur le rapportqu’entr<strong>et</strong>iennent les élèves, maisaussi les enseignants, avec les connaissancesabordées en classe.L’une <strong>de</strong>s répercussions est d’abordle développement d’une approchecritique dans la recherche <strong>de</strong>sources d’information. En eff<strong>et</strong>,lorsqu’une requête pro<strong>du</strong>it jusqu’àun million <strong>de</strong> résultats sur unmoteur <strong>de</strong> recherche, c’est seulementen rem<strong>et</strong>tant en question lapertinence <strong>de</strong> chacun qu’un élèveréussira à déterminer le site quiconvient le mieux à ses besoins.De même, la possibilité <strong>de</strong> trouversur Intern<strong>et</strong> <strong>de</strong>s informations contradictoiresest plus élevée que dans<strong>de</strong>s livres. Avant l’avènement d’Intern<strong>et</strong>,la fiabilité d’un documentutilisé en milieu scolaire était rarementmise en doute. Maintenant,l’accès à un nombre incalculable <strong>de</strong>sites par les élèves fait qu’il est difficilepour les enseignants <strong>de</strong> trierl’information avant que les élèves yaient recours. Ce rôle est transféréaux élèves eux-mêmes, qui doiventdorénavant s’interroger sur la crédibilité<strong>de</strong>s sites qu’ils consultent,surtout lorsque <strong>de</strong>ux sites présentent<strong>de</strong>s informations contradictoires.<strong>DOSSIER</strong>PÉDAGOGIQUE 35


<strong>DOSSIER</strong>Par ailleurs, les TIC <strong>et</strong> l’é<strong>du</strong>cationinterculturelle ont ceci d’intéressantqu’ils peuvent changer le rapportau savoir entre l’enseignant <strong>et</strong> sesélèves. Ainsi, en raison d’une utilisationplus fréquente <strong>de</strong>s TIC surcertains suj<strong>et</strong>s, il n’est pas rare <strong>de</strong>voir un élève possé<strong>de</strong>r plus <strong>de</strong> connaissancesen la matière que sonprofesseur. Il en va souvent <strong>de</strong>même lorsqu’on abor<strong>de</strong> <strong>de</strong>s questionsrelatives à <strong>de</strong>s pays, culturesou communautés différentes.Reconnaître ces connaissances <strong>et</strong>même donner à un élève le rôle <strong>de</strong>référence, habituellement réservé àl’enseignant, est un facteur importantd’intégration pour n’importequel élève, quelle que soit son origine.Reconnu pour ses compétencesparticulières sur un suj<strong>et</strong>, il <strong>de</strong>vientcelui qui peut répondre aux questions<strong>de</strong> ses camara<strong>de</strong>s <strong>et</strong> même àcelles <strong>de</strong> son enseignant.Chez les élèves issus d’une immigrationrécente, c<strong>et</strong>te reconnaissance<strong>de</strong>vient particulièrement intéressanteparce qu’elle perm<strong>et</strong> une valorisation<strong>de</strong> leur culture, leur indiquantque celle-ci a une place dans lasociété québécoise. C<strong>et</strong>te reconnaissancesymbolise aussi pour cesélèves la réciprocité <strong>de</strong> l’intérêtentre la culture d’accueil <strong>et</strong> la leur.<strong>Dans</strong> le cas <strong>de</strong>s élèves qui ontparticipé à l’activité Les Monnaies<strong>du</strong> Mon<strong>de</strong>, on a pu observer, d’unepart, le développement d’une curiosité<strong>de</strong>s élèves envers leurs camara<strong>de</strong>sd’une culture différente <strong>et</strong>,d’autre part, une diminution <strong>de</strong> lagêne qu’éprouvent certains élèves àparler <strong>de</strong> leurs origines <strong>et</strong> <strong>de</strong> leurbagage culturel. En intégrant àd’autres activités subséquentes <strong>de</strong>séléments relatifs à la diversité, il aété possible <strong>de</strong> maintenir les acquisdéveloppés ici <strong>et</strong> même d’abor<strong>de</strong>rd’autres aspects <strong>de</strong> l’é<strong>du</strong>cationinterculturelle.LES TIC ET LADIVERSIFICATION DESCONTEXTES D’APPRENTISSAGEL’activité Les monnaies <strong>du</strong> mon<strong>de</strong>était basée sur l’emploi <strong>de</strong>s TICcomme outils d’apprentissage <strong>et</strong>présentait l’avantage principal <strong>de</strong>situer <strong>de</strong>s thèmes mathématiquesdans un contexte réel <strong>et</strong> international.C<strong>et</strong>te mise en situation avaitnon seulement un intérêt didactique,mais elle perm<strong>et</strong>tait aussi <strong>de</strong>valoriser la diversité culturelle.C’est donc surtout par une diversification<strong>de</strong>s contextes d’apprentissage,ici à l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong>s TIC, qu’il aété possible d’abor<strong>de</strong>r un aspect <strong>de</strong>l’é<strong>du</strong>cation interculturelle.Il va sans dire que Les Monnaies <strong>du</strong>Mon<strong>de</strong> est un exemple ponctueld’intégration <strong>de</strong> l’é<strong>du</strong>cation interculturelledans une activité pédagogique.Susciter une ouverture à ladifférence chez les élèves <strong>et</strong> favoriserl’harmonie dans la diversitésont <strong>de</strong>s préoccupations qui nécessitentune approche plus large,globalement intégrée aux activitésd’apprentissage <strong>et</strong> à la vie scolaire.L’avantage qu’offrent les TIC dansune telle approche globale d’é<strong>du</strong>cationinterculturelle, c’est que parles sites Intern<strong>et</strong>, les vidéos, la musique<strong>et</strong> les images, il est possibled’intégrer l’exploration culturelleaux activités d’apprentissage quotidiennes.M. Réginald Fleury est enseignantà l’école secondairePère-Marqu<strong>et</strong>te, <strong>de</strong> la Commissionscolaire <strong>de</strong> Montréal.1. Voir le site suivant : www.csdm.qc.ca/p_marqu<strong>et</strong>te_s/Proj<strong>et</strong>s/math116/Activités%20Math-Info.htm.2. [http://www.fi.uu.nl/wisweb/welcome_en.html]DES CLASSES OUVERTESSUR LE MONDE, AU COLLÈGEDE L’ASSOMPTIONpar Guy LusignanBBeaucoup d’enseignants ontcommencé à exploiter lestechnologies <strong>de</strong> l’information<strong>et</strong> <strong>de</strong> la communication (TIC)en classe. Depuis quelques années<strong>et</strong> dans plusieurs matières, c<strong>et</strong>tecompétence transversale a <strong>de</strong>sracines bien implantées. Vie pédagogiquea rencontré une équiped’enseignantes <strong>et</strong> d’enseignants <strong>du</strong>Collège <strong>de</strong> l’Assomption 1 qui exploiteles TIC principalement dans l’enseignement<strong>de</strong>s sciences humaines 2 .En vue d’en savoir plus sur leurspratiques, différentes questions ontété abordées, par exemple, les raisonsqui ont motivé l’exploitation<strong>de</strong>s TIC, les principaux eff<strong>et</strong>s surl’enseignement <strong>et</strong> l’apprentissage, lesuivi <strong>de</strong>s élèves, la perception <strong>de</strong>senseignants <strong>et</strong> celle <strong>de</strong>s élèves <strong>de</strong>même que les difficultés éprouvées.UNE RÉFLEXION À LA BASEDU CHANGEMENTPour Norbert Viau, enseignant d’histoire<strong>et</strong> <strong>de</strong> géographie <strong>de</strong> cinquièmesecondaire, après un peu plus <strong>de</strong>vingt ans d’expérience, le passage<strong>de</strong> l’enseignement traditionnel àl’exploitation <strong>de</strong>s TIC est la conséquenced’une réflexion sur sonenseignement. Une réflexion qui estalimentée par <strong>de</strong>s lectures sur l’enseignementstratégique <strong>et</strong> <strong>de</strong>s ouvrages<strong>de</strong> Philippe Meirieu ainsi que parl’observation attentive <strong>de</strong>s comportementsd’apprentissage <strong>de</strong>s élèves.C<strong>et</strong>te réflexion l’a con<strong>du</strong>it, il y a environhuit ans, à se poser la questionsuivante : « Mes élèves réussissent,mais apprennent-ils vraiment? »C’est en voulant répondre à c<strong>et</strong>tequestion que Norbert Viau a étéamené à revoir ses pratiques d’enseignementqui étaient appréciées<strong>de</strong>s élèves <strong>et</strong> efficaces dans la mesureoù ces <strong>de</strong>rniers réussissaient trèsbien.Un changement s’imposait, certes,mais pas n’importe lequel. Le dispositifque Norbert Viau veut m<strong>et</strong>treen place doit faire <strong>de</strong> la classe unlieu d’apprentissage plutôt qu’unlieu d’enseignement. Le dispositifdoit perm<strong>et</strong>tre à l’élève d’avoir entout temps à sa disposition les informationsnécessaires à la réalisation<strong>de</strong> ses travaux. Il doit favoriser lacollaboration entre les élèves parun aménagement matériel approprié<strong>de</strong> la classe qui facilite l<strong>et</strong>ravail en équipe <strong>et</strong> développerleur sens <strong>de</strong>s responsabilités. Enfin,il est important que les changementsapportés puissent perm<strong>et</strong>treà l’enseignant d’ai<strong>de</strong>r l’élève quandcelui-ci en a besoin <strong>et</strong> d’assurer unmeilleur suivi <strong>de</strong> son apprentissage.Parallèlement à sa réflexion <strong>et</strong> unpeu <strong>de</strong> manière fortuite, NorbertViau découvre un outil très efficacepour accé<strong>de</strong>r à <strong>de</strong>s informationsnombreuses <strong>et</strong> actuelles <strong>et</strong> soutenirl’apprentissage dans le domaine <strong>de</strong>ssciences humaines : Intern<strong>et</strong>. Enexplorant le Web, il se rend alorscompte que <strong>de</strong>s enseignants seservent <strong>de</strong>s TIC en classe <strong>et</strong> qu’ilexiste <strong>de</strong>s programmes ayant pourobj<strong>et</strong> <strong>de</strong> développer leur utilisation,comme le programme Rescol.Il y a donc environ cinq ans, NorbertViau <strong>et</strong> son collègue FernandLaberge, enseignant d’histoire <strong>de</strong>quatrième secondaire, conçoiventun proj<strong>et</strong> pour exploiter les TIC enclasse. Ils le présentent à la direction,laquelle accepte d’y donnersuite. Dès l’année suivante, <strong>de</strong>uxsalles sont équipées chacune d’unedouzaine d’ordinateurs reliés enréseau <strong>et</strong> branchés à Intern<strong>et</strong> pour« qu’il y ait une intégration constante<strong>de</strong>s TIC », précise NorbertViau.L’expérience est positive <strong>et</strong> a uneff<strong>et</strong> d’entraînement auprès d’autresenseignants qui déci<strong>de</strong>nt alors <strong>de</strong> selancer dans une entreprise semblable.Ainsi, Louise Proulx s’estengagée dans l’aventure il y a troisVIE 36 Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004


Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004ans. Sa salle <strong>de</strong> classe est alors aménagéeen conséquence <strong>et</strong> équipéed’ordinateurs branchés au réseauIntern<strong>et</strong>. Après 28 ans d’enseignement,elle considère ce changementcomme « un second début ». PourMartin Tessier, enseignant <strong>de</strong> mathématique<strong>et</strong> d’informatique, les TICsont un obj<strong>et</strong> d’apprentissage. À sesyeux, il est souhaitable que l’apprentissage<strong>et</strong> l’utilisation <strong>de</strong> certainslogiciels ou, encore, la recherched’informations sur le WEB ne soientpas <strong>de</strong>s exercices futiles mais sefassent en fonction <strong>de</strong> certains contenus.Comme il lui est difficile <strong>de</strong>toujours vérifier la validité <strong>de</strong>sinformations trouvées <strong>et</strong> présentéespar les élèves, il déci<strong>de</strong> alors <strong>de</strong>travailler avec Louise Proulx dansune perspective interdisciplinaire :« Quand je leur fais faire uneprésentation avec le logiciel Power-Point, Louise vali<strong>de</strong> les informationshistoriques <strong>et</strong> je ne m’occupe que<strong>de</strong>s aspects informatiques <strong>de</strong> la présentation.» L’informatique commeobj<strong>et</strong> <strong>et</strong> l’informatique comme outild’apprentissage se marient biendans <strong>de</strong>s situations semblables. À sapremière année d’enseignement,dès son arrivée au Collège <strong>de</strong>l’Assomption en septembre 2003,Cynthia Lizotte se lance dans l’exploitation<strong>de</strong>s TIC : « L’enseignementtraditionnel correspond moins à mapersonnalité […] j’aime organiser,coordonner <strong>et</strong> gérer les choses. »UNE DÉMARCHE PÉDAGOGIQUEÀ PLUSIEURS VOLETSL’exploitation <strong>de</strong>s TIC en classerepose sur une démarche généralecomprenant trois vol<strong>et</strong>s principaux,soit la préparation <strong>de</strong> l’activité, saréalisation par les élèves <strong>et</strong> le travail<strong>de</strong> supervision <strong>et</strong> d’encadrementeffectué par les enseignantes <strong>et</strong> lesenseignants.LA PRÉPARATION DE L’ACTIVITÉC’est sur la qualité <strong>de</strong> la planification<strong>de</strong> l’activité que repose l’exploitation<strong>de</strong>s TIC en classe. Chaqueproj<strong>et</strong> est planifié avec minutie. Ilfaut établir les objectifs à atteindre,prévoir un scénario général pour saréalisation, déterminer la nature <strong>du</strong>travail final, préparer les documentsnécessaires à la réalisation<strong>de</strong> certaines étapes <strong>et</strong> repérer lessites <strong>et</strong> les ressources virtuellesprésentes sur le réseau Intern<strong>et</strong>. Deplus, il faut vali<strong>de</strong>r les informations<strong>et</strong> les organiser sur le site Web <strong>de</strong>l’enseignant pour que les élèvespuissent y accé<strong>de</strong>r en tout temps,que ce soit à la maison ou à l’école.Enfin, les enseignants doivent intégrerune évaluation interactive àcertaines étapes <strong>de</strong> la réalisation <strong>et</strong>faire connaître les critères <strong>de</strong> l’évaluationfinale.Selon Norbert Viau, « évoluer versune approche comme celle-là, c’esttrès exigeant, surtout lors <strong>de</strong> la préparation<strong>de</strong>s activités ». FernandLaberge va dans le même sens : « Enclasse, on circule, on va d’uneéquipe à l’autre… ça coule doucement.C’est parce que c’est le résultat<strong>de</strong> nombreuses heures <strong>de</strong>préparation <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te activité. C’estbeaucoup. Il faut avoir une bonnebase documentaire <strong>de</strong> référence. Etc’est long à trouver. » Pour sa part,Cynthia Lizotte précise que l’enseignantdoit avoir déjà fait larecherche avant d’amener les élèvesà réaliser un proj<strong>et</strong> : « On ne peutpas lancer les élèves dans unerecherche sans savoir ce qui existe,sans connaître le niveau <strong>de</strong> difficultéqu’ils vont rencontrer dans lestextes ou les informations. » PourLouise Proulx, il est important <strong>de</strong>bien circonscrire la documentationdisponible sur le Web pour ai<strong>de</strong>rPhoto : Denis Garonles élèves à faire leur travail, car« en <strong>de</strong>uxième secondaire, il ne fautpas noyer l’élève avec plusieurssources d’information si l’on neveut pas le perdre ».LA RÉALISATION DE L’ACTIVITÉPour les élèves, la réalisation d’uneactivité s’inscrit dans une démarchedynamique dans la mesure où ilsdoivent faire <strong>de</strong>s choix, organiser <strong>et</strong>planifier le travail, tenir un journal<strong>de</strong> bord, prendre la responsabilitéd’assumer indivi<strong>du</strong>ellement <strong>de</strong>stâches <strong>et</strong> collaborer à la pro<strong>du</strong>ction<strong>du</strong> travail final. C’est après avoirpris connaissance <strong>du</strong> proj<strong>et</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong>sobjectifs à atteindre que les élèves,en équipe <strong>de</strong> quatre, se partagentles tâches pour la recherche d’informations.Par exemple, en cinquièmesecondaire, dans leur cours<strong>de</strong> géographie, <strong>de</strong>s élèves <strong>de</strong> chaqueéquipe ont décidé d’effectuer leursrecherches à l’ordinateur, tandisque d’autres réunissaient <strong>de</strong>s informationsdans <strong>de</strong>s ouvrages mis àla disposition <strong>de</strong> la classe commel’État <strong>du</strong> mon<strong>de</strong> 2003 ou 2004 ouencore Quid 2003. Après avoirterminé sa quête d’informations,chaque élève a soumis les résultats<strong>de</strong> ses recherches à son équipe quiles a analysés au moment d’unemise en commun. C<strong>et</strong>te étape <strong>du</strong>déroulement est importante dansla mesure où chaque élève doit expliqueraux autres membres <strong>de</strong>l’équipe les informations qu’il atrouvées <strong>et</strong> répondre à leursquestions. <strong>Dans</strong> certains cas, à la<strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> l’équipe,<strong>de</strong>s élèves sont appelés à continuerleurs recherches pour compléterleur travail. À l’étape <strong>de</strong> la mise encommun, les élèves font une synthèse<strong>de</strong>s informations recueillies.C<strong>et</strong>te synthèse constitue le travailfinal. De plus, les élèves <strong>de</strong> l’équipeévaluent la qualité <strong>de</strong> leur démarche<strong>et</strong> font évaluer leur pro<strong>du</strong>ction parl’enseignant. <strong>Dans</strong> bien <strong>de</strong>s cas, lestravaux font l’obj<strong>et</strong> d’une présentationà la classe <strong>et</strong> sont ensuite réunissur le site Web <strong>de</strong> l’enseignant.LA SUPERVISION ET L’ENCADREMENTDES ÉLÈVESL’un <strong>de</strong>s grands avantages <strong>de</strong> c<strong>et</strong>teapproche est que l’enseignant peutsuperviser le travail <strong>de</strong> chacune <strong>de</strong>séquipes à l’intérieur d’une heure <strong>de</strong>cours. Une supervision qui « perm<strong>et</strong><strong>de</strong> connaître rapi<strong>de</strong>ment les élèves,leur façon d’apprendre <strong>et</strong> <strong>de</strong> travailler», précise Fernand Laberge.Même si les enseignants n’en sontpas encore ren<strong>du</strong>s à l’indivi<strong>du</strong>alisationpédagogique, ils peuvent adapterleur enseignement en tenantcompte <strong>de</strong>s différences observéesdans les équipes. En eff<strong>et</strong>, chacune<strong>de</strong> celles-ci est responsable d’unaspect précis <strong>du</strong> proj<strong>et</strong> global,accomplit les activités à son rythme<strong>et</strong> est supervisée par l’enseignantqui l’accompagne <strong>du</strong>rant le déroulement.Fernand Laberge précise :« le suivi que je fais d’une équipe àl’autre est très différent : <strong>de</strong>s équipes,je les lance… <strong>et</strong> je sais que çava être terminé correctement <strong>et</strong>rapi<strong>de</strong>ment. Pour d’autres équipes,je dois pratiquement les tenir par lamain. Je peux me le perm<strong>et</strong>tre. C’est<strong>de</strong> l’évaluation formative. »Pour superviser les équipes, lesenseignants ont recours à différentesapproches. Certains privilégient latenue d’un journal <strong>de</strong> bord où lesélèves consignent les renseignementsutiles sur le déroulement <strong>du</strong>travail, tandis que d’autres enseignantsfixent <strong>de</strong>s dates <strong>de</strong> tombée,<strong>de</strong>s points <strong>de</strong> chute pour les différentesétapes <strong>de</strong> la réalisation <strong>du</strong>proj<strong>et</strong>. Chaque équipe doit alorsrencontrer l’enseignant pour faireapprouver son calendrier ou faireévaluer les activités menées à bien àl’une ou l’autre <strong>de</strong>s étapes avantd’entreprendre la suivante. Si l<strong>et</strong>ravail accompli ne satisfait pasaux critères <strong>de</strong> qualité, l’enseignantdonne <strong>de</strong>s conseils aux élèves<strong>et</strong> ceux-ci doivent reprendre lesparties moins satisfaisantes. PourNorbert Viau, c<strong>et</strong>te stratégie d’interventiona aussi l’avantage « d’intégrerl’évaluation à l’apprentissage <strong>et</strong><strong>de</strong> fournir une régulation externeaux équipes ». Cynthia Lizotte ajoute :«L’élève travaille à l’ordinateur, <strong>et</strong>ça me perm<strong>et</strong> d’aller voir leséquipes, <strong>de</strong> vérifier où elles en sontren<strong>du</strong>es, ce qu’elles font, commentse déroulent leurs recherches… Enprocédant <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te façon, j’ai plus<strong>de</strong> temps à passer avec l’élève. »PÉDAGOGIQUE 37<strong>DOSSIER</strong>


<strong>DOSSIER</strong>Pour l’encadrement, <strong>et</strong> cela est vraimentexceptionnel, tous les jours, àdifférents moments <strong>de</strong> la journée <strong>et</strong>le soir à 19 h <strong>et</strong> à 21 h, Norbert Viaurelève ses courriels <strong>et</strong> répond à sesélèves qui lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> préciserou encore <strong>de</strong> clarifier <strong>de</strong>s consignesou <strong>de</strong>s informations. À son avis, c<strong>et</strong>ype d’encadrement correspond auconcept <strong>de</strong> la classe éclatée : « Quel’élève soit à la bibliothèque ouen pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> travail personnel àl’école ou à la maison, s’il a <strong>de</strong>sdoutes, s’il a besoin <strong>de</strong> l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong>l’enseignant, il peut l’avoir trèsrapi<strong>de</strong>ment, parfois, immédiatement.Tandis qu’avant il attendait aucours suivant, même quand celui-ciétait <strong>de</strong>ux jours plus tard. Maintenant,on peut parler d’une régulationimmédiate <strong>du</strong> travail <strong>de</strong> l’élève. »Pour Norbert Viau, « l’ordinateur estun outil qui doit absolument s’intégrerà l’intérieur d’une démarche ».C<strong>et</strong>te démarche complexe favorisecependant un processus actif d’apprentissageau cours <strong>du</strong>quel l’élèvereçoit le soutien constant <strong>de</strong> l’enseignant<strong>et</strong> <strong>de</strong> ses camara<strong>de</strong>s <strong>de</strong>classe.DES EXEMPLES DE PROJETSAu Collège <strong>de</strong> l’Assomption, lesenseignants conçoivent différentstypes <strong>de</strong> proj<strong>et</strong>s au cours d’uneannée. Certains sont disciplinaires<strong>et</strong> réalisés par les élèves d’une seuleclasse. D’autres sont interdisciplinaires<strong>et</strong> conçus pour être travaillésdans <strong>de</strong>ux matières. Ces proj<strong>et</strong>speuvent prendre plusieurs formesselon les enseignants ou selon lesclasses. Ainsi, en <strong>de</strong>uxième secondaire,Louise Proulx a planifié uneactivité qui consistait à construireun musée virtuel ayant pour thème :«L’Égypte <strong>de</strong>s pharaons ». En équipe,les élèves <strong>de</strong>vaient développer unsuj<strong>et</strong>, par exemple, le Nil <strong>et</strong> l’agriculture,la momification <strong>et</strong> la vieéternelle, les temples <strong>et</strong> les pyrami<strong>de</strong>s.La recherche s’effectuaitalors à partir <strong>de</strong> documents écritsou <strong>de</strong> références virtuelles trouvéessur le site Web <strong>de</strong> l’enseignante. Lestravaux pro<strong>du</strong>its ont ensuite étéréunis sur son site pour constituerle musée virtuel.Pour sa part, Cynthia Lizotte, enseignante<strong>de</strong> géographie <strong>de</strong> troisièmesecondaire, a fait faire une recherchesur l’exploitation forestière. Lesélèves avaient pour tâche d’abor<strong>de</strong>rleur recherche en adoptant <strong>de</strong>spoints <strong>de</strong> vue différents, tels ceux<strong>de</strong>s Amérindiens, <strong>de</strong>s fonctionnairesprovinciaux, <strong>de</strong>s travailleursforestiers ou <strong>de</strong>s compagnies pap<strong>et</strong>ières.Après le visionnement <strong>du</strong> film<strong>de</strong> Richard Desjardins, L’erreurboréale, les élèves cherchaient <strong>de</strong>sinformations sur les sites Webr<strong>et</strong>enus par l’enseignante. Les résultats<strong>de</strong>s recherches pouvaient servirà préparer <strong>de</strong>s débats ou bien êtresoumis à la classe sous forme <strong>de</strong>présentations PowerPoint ou sur<strong>de</strong>s affiches.<strong>Dans</strong> le cours d’histoire <strong>de</strong> quatrièmesecondaire, Fernand Labergea fait travailler les élèves sur leRégime français. Différents travauxont été exécutés en équipe <strong>et</strong> lesélèves les ont réunis dans un journalélectronique propre à chacun<strong>de</strong>s groupes d’histoire <strong>de</strong> c<strong>et</strong> enseignant.Parmi les travaux, mentionnonsceux qui ont traité <strong>du</strong>gouvernement royal, <strong>du</strong> commerce<strong>de</strong>s fourrures, <strong>du</strong> régime seigneurial<strong>et</strong> <strong>du</strong> rôle <strong>de</strong> l’Église. Le journal<strong>de</strong> ces groupes a été publié sur lesite Web <strong>de</strong> l’enseignant <strong>et</strong> lestravaux pourront être consultés aucours <strong>de</strong>s années subséquentes.En cinquième secondaire, dans lesclasses d’histoire <strong>de</strong> Norbert Viau,les élèves ont fait une recherche surla crise irakienne. Les travaux <strong>de</strong>sdifférentes équipes <strong>de</strong>vaient constituerun dossier compl<strong>et</strong> sur la question.Pour effectuer leurs recherches,les élèves pouvaient consulter lesdiverses sources d’information proposéessur le site <strong>du</strong> cours.Par ailleurs, d’autres travaux ont étémenés dans une perspective interdisciplinaireavec un enseignantd’anglais <strong>de</strong> troisième secondaire.Par exemple, en 2003-2004, <strong>de</strong>stravaux <strong>de</strong> recherche ont été effectuéssur les Amérindiens par lesélèves <strong>du</strong> cours d’histoire <strong>de</strong> quatrièmesecondaire. Les résultats <strong>de</strong>leurs recherches ont été réutiliséspar les élèves <strong>du</strong> cours d’anglais <strong>de</strong>troisième secondaire 3 .Aux proj<strong>et</strong>s disciplinaires <strong>et</strong> interdisciplinairess’ajoutent <strong>de</strong>s proj<strong>et</strong>smultimatière. Ces proj<strong>et</strong>s d’enverguresont conçus pour être réaliséspar <strong>de</strong>s élèves <strong>de</strong> différentes disciplines<strong>et</strong> classes. Ainsi en a-t-ilété <strong>du</strong> proj<strong>et</strong> Démocratie réaliséen 2003-2004 (voir l’encadré). Unproj<strong>et</strong> multimatière sur le Moyen-Orient, favorisant une intégrationverticale en sciences humaines <strong>de</strong>la <strong>de</strong>uxième à la cinquième secondaire,a été achevé en 2002-2003 4 .À noter que ce type <strong>de</strong> proj<strong>et</strong>s estprésenté à l’ensemble <strong>de</strong>s élèvessous forme d’exposition <strong>de</strong>s travauxlors <strong>de</strong> la Semaine <strong>de</strong> l’universsocial au Collège <strong>de</strong> l’Assomption,événement qui se tient habituellementvers la fin <strong>du</strong> mois d’avril.UN PROJET MULTIMATIÈREPour mieux comprendre notremon<strong>de</strong> : la démocratie.<strong>Dans</strong> ce proj<strong>et</strong> multimatière 5 , laproblématique générale consistaità initier les élèves aux bases<strong>de</strong> certains enjeux à la foishistoriques, sociologiques <strong>et</strong>économiques <strong>et</strong> à les situer géographiquement.Par l’intermédiaired’une problématique quiamène les élèves à s’intéresser à<strong>de</strong> nombreux suj<strong>et</strong>s touchantl’actualité, le proj<strong>et</strong> a favorisé lapro<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> travaux variés quiont été présentés à tous lesélèves <strong>du</strong> Collège sous formed’affiches lors <strong>de</strong> la Semaine <strong>de</strong>l’univers social qui a eu lieu <strong>du</strong>19 au 23 avril 2004.Les visées pédagogiques <strong>du</strong> proj<strong>et</strong>étaient explicites <strong>et</strong> concernaientd’abord l’exploitation <strong>de</strong>stechnologies <strong>de</strong> l’information <strong>et</strong><strong>de</strong> la communication (TIC).Ainsi, en cours <strong>de</strong> réalisation,les élèves <strong>de</strong>vaient-ils utiliser lesTIC pour la recherche d’informations<strong>et</strong> la télécollaboration(babillard électronique, forum),communiquer <strong>de</strong> l’informationà <strong>de</strong>s élèves <strong>de</strong> classes différentes<strong>de</strong> personne à personneen utilisant le courriel ou à <strong>de</strong>sgroupes d’élèves, soit directementen se servant, par exemple,<strong>de</strong>s logiciels <strong>de</strong> présentationcomme PowerPoint, soit en différéen créant un site Intern<strong>et</strong>.Comme autres visées pédagogiques<strong>du</strong> proj<strong>et</strong>, mentionnonsl’acquisition d’une démarche<strong>de</strong> travail rigoureuse pour larecherche, le choix, l’organisation<strong>et</strong> la présentation <strong>de</strong> l’information.Voici quelques exemples <strong>de</strong> suj<strong>et</strong>squi ont été traités. <strong>Dans</strong> le coursd’histoire 414, sur le thème <strong>de</strong>la démocratie parlementaire,<strong>de</strong>s équipes d’élèves ont effectué<strong>de</strong>s recherches sur laChambre <strong>de</strong>s communes <strong>et</strong> leSénat, l’Assemblée nationale,l’exercice <strong>du</strong> droit <strong>de</strong> vote, <strong>et</strong>c.<strong>Dans</strong> le cours d’histoire 534,sur le thème « Aux origines <strong>de</strong> ladémocratie », <strong>de</strong>s suj<strong>et</strong>s ont étéproposés aux élèves : les penseurs<strong>et</strong> les idées à l’origine<strong>de</strong> la démocratie mo<strong>de</strong>rne; ladémocratie en péril lors <strong>de</strong>sannées 20 <strong>et</strong> 30; <strong>et</strong> la démocratieaméricaine. En équipe,les élèves ont alors approfondil’un ou l’autre <strong>de</strong>s suj<strong>et</strong>s précé<strong>de</strong>ntsen réalisant une recherchesur un aspect en particulier :Jean-Jacques Rousseau, philosophe<strong>du</strong> Siècle <strong>de</strong>s lumières;Thomas Jefferson, son action <strong>et</strong>ses idées; Démocratie <strong>et</strong> fascismeVIE 38 Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004Photo : Denis Garon


en Italie; Démocratie <strong>et</strong> nazismeen Allemagne; <strong>et</strong>c.<strong>Dans</strong> un proj<strong>et</strong> multimatière, lesite Web <strong>de</strong> chaque enseignantprésente les différents suj<strong>et</strong>s <strong>et</strong>les références que les élèvespeuvent consulter dans <strong>de</strong>s encyclopédiesvirtuelles ou sur le site<strong>de</strong> revues historiques ou autres.Les élèves y trouvent égalementles objectifs, la démarche pourexécuter le travail, <strong>de</strong>s consignessur la façon <strong>de</strong> rédigerune problématique ou <strong>de</strong> formuler<strong>de</strong>s hypothèses ainsi queles critères d’évaluation.Pour en savoir plus, consulter lesite <strong>de</strong>s enseignants <strong>du</strong> Collège<strong>de</strong> l’Assomption : [www.classomption.qc.ca] <strong>et</strong> le site <strong>de</strong> NorbertViau : [www.norbertviau.ca].COMMENT LES ENSEIGNANTSET LES ÉLÈVES PERÇOIVENT-ILSCETTE APPROCHE?Norbert Viau est conscient que lefait d’utiliser l’ordinateur n’est pasune fin en soi. Pour c<strong>et</strong> enseignant,« l’ordinateur est un outil <strong>de</strong>recherche d’informations mises àjour, c’est un outil qui force l’élèveà s’organiser. Il faut qu’il planifieson utilisation. C’est un outil quil’ai<strong>de</strong> à développer son esprit critique.Il doit analyser <strong>et</strong> gérer soninformation. » Louise Proulx abon<strong>de</strong>dans le même sens. Elle considèrel’informatique comme « un outilparmi d’autres… qui perm<strong>et</strong> àPhoto : Denis Garonl’élève <strong>de</strong> découvrir <strong>et</strong> <strong>de</strong> se questionnerau lieu <strong>de</strong> boire <strong>de</strong>sparoles. Un outil qui perm<strong>et</strong> auxélèves <strong>de</strong> travailler à leur proprerythme tout en sachant que le travail<strong>de</strong>vra être terminé trois semainesplus tard. »Du côté <strong>de</strong>s élèves, les réactionssont souvent mitigées. Ainsi,Norbert Viau <strong>et</strong> Fernand Labergeont constaté que, pour les élèves,l’intégration constante <strong>de</strong>s TIC neva pas <strong>de</strong> soi : « Pour <strong>de</strong>s élèveshabitués à <strong>de</strong> l’enseignement traditionnel,c’est difficile <strong>de</strong> penser quela classe est d’abord un lieu d’apprentissageplus qu’un lieu d’enseignement.» Comment expliquerce phénomène? D’abord, tous lesélèves n’aiment pas utiliser l’ordinateur,pour différentes raisons.Certains, parce que c<strong>et</strong> instrumentleur est peu familier, d’autres parcequ’ils préfèrent traiter <strong>de</strong> l’informationdans <strong>de</strong>s imprimés, commel’affirme une élève : « <strong>Dans</strong> un livre,on peut repérer l’information plusrapi<strong>de</strong>ment. » Un autre élève dira :« <strong>Dans</strong> un manuel, on est certainque l’information est vraie. Ce n’estpas toujours le cas avec les informationstrouvées sur Intern<strong>et</strong>. »Selon Norbert Viau, il était plusfacile pour un élève <strong>de</strong> passerinaperçu dans un cours magistral :« Quand je donnais <strong>de</strong>s coursthéoriques, soit que l’élève « embarquait» <strong>et</strong> aimait cela, soit qu’ilse m<strong>et</strong>tait « au neutre » <strong>et</strong> gardaitles yeux ouverts sans participer.<strong>Dans</strong> une approche comme celleque l’on a mise en place, il ne peutfaire cela. Je détecte très vite l’élèvequi est « au neutre ». J’interviensplus rapi<strong>de</strong>ment… il y a moinsd’élèves qui per<strong>de</strong>nt leur temps <strong>et</strong>ils ont la pression <strong>de</strong> l’équipe. »S’il est vrai que l’apprentissage avecl’informatique est plus intéressantdans la mesure où l’élève peutprendre <strong>de</strong>s initiatives <strong>et</strong> être plusautonome, il n’en <strong>de</strong>meure pasmoins que c’est le type <strong>de</strong> proj<strong>et</strong>s <strong>et</strong>la façon dont le déroulement estprévu qui jouent un rôle déterminantsur la motivation. Pour LouiseProulx, l’intérêt <strong>de</strong>s élèves « dépend<strong>de</strong> la tâche, <strong>de</strong>s exigences, <strong>du</strong> suj<strong>et</strong>,<strong>de</strong> l’effort que ça <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, maissurtout ça dépend <strong>de</strong> l’élève luimême.Des élèves vivent parfois <strong>de</strong>smoments difficiles en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> laclasse… ».Interrogés sur la question <strong>de</strong>s avantagesqu’ils perçoivent, <strong>de</strong>s élèvesdiront ceci : « La recherche d’informationssur le Web nous apprend àtravailler par nous-mêmes. C’estplus utile. On se souvient mieux. »Un autre élève fera ressortir unaspect intéressant : « Quand l’enseignantparle, il ne peut pas toujourscapter ton attention. Puis toutle mon<strong>de</strong> a le même cours en plus.C’est limité. Avec l’ordinateur, onpeut aller où l’on veut puis apprendreplus, aller chercher plus <strong>de</strong> détails.Moi j’aime mieux ça comme ça. »Pour sa part, Étienne verra d’autresavantages, particulièrement le rapportplus indivi<strong>du</strong>alisé qu’il a avecson enseignant, « mais aussi le pouvoir<strong>de</strong> travailler en équipe <strong>et</strong> <strong>de</strong>collaborer à la réalisation d’un travail». Selon Justine, c<strong>et</strong>te approcherend les élèves plus débrouillards,plus autonomes : « On est obligé<strong>de</strong> chercher. <strong>Dans</strong> le manuel, laréponse se trouve à la page 158,par exemple. On ne cherche paslongtemps. C’est plus vite, mais çan’ai<strong>de</strong> pas l’apprentissage. » Étiennementionne encore que la recherchesur Intern<strong>et</strong> perm<strong>et</strong> d’apprendrebeaucoup plus : « <strong>Dans</strong> un coursordinaire, on apprend seulement ceque l’enseignant nous enseigne.Avec Intern<strong>et</strong>, on fait plus d’apprentissage.» Enfin, comme l’affirmeJulie : « Sur Intern<strong>et</strong>, on ne trouvepas tout <strong>de</strong> suite, on lit autre chose,on apprend autre chose, <strong>et</strong> c’estbon pour notre culture générale. »CONCLUSIONDes enseignants <strong>de</strong> sciences humaines<strong>du</strong> Collège <strong>de</strong> l’Assomptionont misé sur l’exploitation <strong>de</strong>s TICpour rénover leurs pratiques pédagogiques<strong>et</strong> faire <strong>de</strong> la classe un lieud’apprentissage dans lequel lesélèves développent leur autonomie<strong>et</strong> se responsabilisent. La démarchemise en place favorise le travail encollaboration <strong>et</strong> perm<strong>et</strong> aux élèves<strong>de</strong> réaliser <strong>de</strong>s proj<strong>et</strong>s à leurVie pédagogique 132, septembre-octobre2004rythme. Ils ont alors accès en touttemps aux informations à la disposition<strong>de</strong> tous sur le Web. À noterque, dans la plupart <strong>de</strong>s cas, lessites contenant les informationsutiles à la réalisation <strong>du</strong> travail ontdéjà été repérés <strong>et</strong> organisés parl’enseignant sur son propre site. Ladémarche mise en place perm<strong>et</strong>ainsi à l’enseignant <strong>de</strong> superviserles élèves, <strong>de</strong> leur fournir une régulationexterne au moment approprié<strong>et</strong> d’intégrer l’évaluation formativedans le processus d’apprentissage.<strong>Dans</strong> l’ensemble, on peut affirmerqu’il y a environ cinq ans, les enseignants<strong>du</strong> Collège <strong>de</strong> l’Assomptionqui ont mis en place un dispositiffavorisant l’exploitation <strong>de</strong>s TIC enclasse avaient déjà compris que « lacompétence à exploiter les TIC[…] nécessite à la fois l’accès à<strong>de</strong>s ressources adaptées <strong>et</strong> un encadrementsoutenu [<strong>et</strong> qu’] il importedonc d’offrir aux élèves un environnementstimulant pour leur apprendreà traiter l’information, à créer <strong>et</strong> àcommuniquer à l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong>s TIC 6 ».M. Guy Lusignan est consultanten é<strong>du</strong>cation.1. Le Collège <strong>de</strong> l’Assomption, fondé en1832, est un établissement privé quiaccueille plus <strong>de</strong> 1 200 élèves, garçons <strong>et</strong>filles, qui poursuivent <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s secondaires.Le tiers d’entre eux est inscrit auProgramme d’é<strong>du</strong>cation internationale.2. Vie pédagogique a rencontré le 3 mars2004 M. Norbert Viau, enseignant <strong>de</strong>géographie (534) <strong>et</strong> d’histoire (534),M. Fernand Laberge, enseignant d’histoire(414), M me Louise Proulx, enseignanted’histoire (214), M me CynthiaLizotte, enseignante <strong>de</strong> géographie (314),<strong>et</strong> M. Martin Tessier, enseignant <strong>de</strong> mathématique-informatique<strong>de</strong> 2 e secondaire,ainsi que plusieurs <strong>de</strong> leurs élèves.M. Norbert Viau nous a généreusementaccordé une entrevue d’une heure <strong>et</strong> nousa fourni l’occasion d’assister à l’un <strong>de</strong> sescours. M. Fernand Laberge, pour sa part,nous a invité à assister à l’un <strong>de</strong> ses cours.Nous les en remercions.3. Voir le site <strong>de</strong> Fernand Laberge :[www.fernandlaberge.qc.ca].4. Voir le site <strong>de</strong>s enseignants <strong>du</strong> Collège <strong>de</strong>l’Assomption : [www.classomption.qc.ca].5. Ce proj<strong>et</strong> regroupe les cours suivants :Géographie 314, Histoire 414, É<strong>du</strong>cationéconomique 514, Anglais 514, Histoire534 <strong>et</strong> Géographie 534.6. Ministère <strong>de</strong> l’É<strong>du</strong>cation, Programme <strong>de</strong>formation <strong>de</strong> l’école québécoise, Enseignementsecondaire, premier cycle, Gouvernement<strong>du</strong> Québec, 2003, p. 46.PÉDAGOGIQUE 39<strong>DOSSIER</strong>


UN PROJET QUI S’INSCRIT DANS LA DURÉE ET L’EXCELLENCE :LE PROJET PROTICLe proj<strong>et</strong> PROTIC nous intéress<strong>et</strong>oujours par sa pérennité<strong>et</strong> son rayonnement.Bien qu’il ait été initié en 1994,il propose officiellement <strong>de</strong>puis1997 un modèle qui intègre les utilisations<strong>de</strong>s TIC à l’enseignement <strong>et</strong>à l’apprentissage. Les élèves qui participentà ce programme réussissentbien <strong>et</strong> manifestent une motivationqui n’est plus simplement pro<strong>du</strong>itepar l’eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> la nouveauté.En 2003, ce proj<strong>et</strong> a été reconnu auniveau international par l’Organisation<strong>de</strong> coopération <strong>et</strong> <strong>de</strong> développementéconomique-secteur é<strong>du</strong>catif(OCDE) <strong>et</strong> il suscite toujours lemême engouement chez les élèves<strong>et</strong> les parents. Ici, la technologien’est pas une fin en soi, elle perm<strong>et</strong>plutôt <strong>de</strong> diversifier <strong>et</strong> d’adapteraux besoins <strong>de</strong> chaque élève <strong>de</strong>ssituations d’apprentissage pour développer<strong>de</strong>s habil<strong>et</strong>és <strong>et</strong> construire<strong>de</strong>s connaissances utiles dans unmon<strong>de</strong> en perpétuel changement.<strong>DOSSIER</strong>DIX ANS APRÈSpar Thérèse LaferrièreEn 1994, lorsque le programmePROTIC a été mis enavant, notre intérêt en tantque partenaire universitaire étaitdouble : offrir aux futurs maîtres unenvironnement <strong>de</strong> stage à la finepointe <strong>de</strong> la technologie <strong>et</strong> participer,par l’entremise d’une démarcheréflexive basée sur <strong>de</strong>s observationsdocumentées, au développementd’un environnement d’apprentissageà la mesure <strong>de</strong>s attentes indivi<strong>du</strong>elles<strong>et</strong> collectives dans unesociété en voie <strong>de</strong> renouveler sonrapport à l’information.L’Université Laval développait à cemoment-là son réseau d’écolesassociées pour la formation pratique<strong>de</strong>s futurs maîtres, le perfectionnementprofessionnel <strong>et</strong> la recherchecollaborative. Elle s’inscrivait ainsidans un mouvement nord-américaind’amélioration <strong>de</strong> la formation <strong>de</strong>senseignants par le renforcement<strong>de</strong>s partenariats université-milieuscolaire. Il lui était même possibled’investir encore davantage danscertaines écoles par la voie <strong>de</strong> larecherche subventionnée. Tel a étéle cas à l’école Les Compagnons-<strong>de</strong>-Cartier. Nos propres recherches 1 sesont concentrées sur l’évolution <strong>de</strong>spratiques pédagogiques <strong>et</strong> organisationnellesdans la classe en réseau.Les intervenants <strong>de</strong> PROTIC étaientmotivés non seulement par les possibilitéspédagogiques <strong>de</strong> leur nouveloutil <strong>de</strong> travail, l’ordinateur branchéà Intern<strong>et</strong>, mais par l’occasionqui leur était fournie <strong>de</strong> faire l’écoleautrement <strong>et</strong> d’être soutenus parl’école à c<strong>et</strong> égard. Le modèle <strong>de</strong>départ comportait trois vol<strong>et</strong>s : ordinateursbranchés, travail d’équipe<strong>et</strong> pédagogie par proj<strong>et</strong>s. Quant auxstagiaires en enseignement, ilsétaient, <strong>et</strong> <strong>de</strong>meurent, à la foisattirés par la nouveauté <strong>et</strong> inqui<strong>et</strong>s àl’idée <strong>de</strong> réussir à relier apprentissagepar proj<strong>et</strong>s <strong>et</strong> curriculum <strong>et</strong>à gérer <strong>de</strong> façon appropriée ladynamique d’une classe.L’équipe d’intervenants a mis enplace progressivement les élémentsd’une pédagogie constructiviste,voire socioconstructiviste, en classePROTIC : les notions d’intentionnalité,<strong>de</strong> compétence <strong>et</strong> <strong>de</strong> participationactive <strong>de</strong> l’élève, <strong>de</strong> communautéd’apprentissage, d’activité authentique,d’autorégulation, d’échafaudage<strong>et</strong> d’apprentissage en profon<strong>de</strong>uront pris ancrage 2 . Comme l’écrivaitPea (1996), « les contextes sociauxsont très importants. Ils incluentnon seulement la technologie maisson contenu, les stratégies d’enseignementutilisées à la fois dansles logiciels <strong>et</strong> dans la classe ainsique l’environnement <strong>de</strong> classe luimême.De manière récurrente, lesrecherches constatent que les eff<strong>et</strong>s<strong>de</strong>s meilleurs logiciels peuvent sevoir neutraliser par une utilisationinadéquate <strong>et</strong> que <strong>de</strong>s logiciels <strong>de</strong>mauvaise conception sont utiliséshabilement par <strong>de</strong>s enseignantspour l’atteinte <strong>de</strong> buts d’apprentissageimportants. »Il en va <strong>de</strong> même au regard <strong>du</strong> rôleque joue l’ordinateur connecté auréseau Intern<strong>et</strong> sur la motivation <strong>de</strong>l’élève. Au départ, la mise en œuvre<strong>du</strong> programme PROTIC a étééclairée par certaines expériencesanglo-saxonnes dont les ComputersupportedIntentional LearningEnvironements (CSILE), en 1989 <strong>et</strong>les Apple Classrooms of Tomorrow(ACOT), en 1995. Les étu<strong>de</strong>s menéesà ce suj<strong>et</strong> reconnaissaient l’acquisition<strong>de</strong> compétences d’ordr<strong>et</strong>echnologique. De plus, elles indiquaientque l’augmentation <strong>de</strong> lamotivation <strong>de</strong>s élèves était l’un <strong>de</strong>srésultats les plus prom<strong>et</strong>teurs <strong>de</strong>l’utilisation d’ordinateurs en classe(Means <strong>et</strong> Olson, 1995; voir aussiGrégoire, Bracewell <strong>et</strong> Laferrière,1996) pour autant que l’on y m<strong>et</strong>tel’accent sur l’apprentissage intentionnel<strong>et</strong> que l’on fournisse lesformes <strong>de</strong> soutien technologique <strong>et</strong>pédagogique nécessaires à c<strong>et</strong>te fin(Bereiter <strong>et</strong> Scardamalia, 1989).Means <strong>et</strong> Olsen avaient observé,entre autres, que les enseignantsdécrivaient une augmentation <strong>de</strong> lacollaboration chez les élèves <strong>et</strong> <strong>de</strong>l’enseignement entre élèves (13 cassur 17). PROTIC s’est implanté <strong>de</strong>manière à perm<strong>et</strong>tre aux élèves <strong>de</strong>développer bien sûr leur compétenc<strong>et</strong>echnologique, mais aussileurs capacités <strong>de</strong> gestion <strong>de</strong> leurtravail indivi<strong>du</strong>el <strong>et</strong> d’apprentissageavec d’autres. L’organisation physique<strong>de</strong> la classe encourage le travailen équipe <strong>de</strong> trois ou quatreélèves ainsi que l’accès à <strong>de</strong> l’information<strong>et</strong> à <strong>de</strong>s simulations surIntern<strong>et</strong>. Les occasions fournies auxélèves d’enseigner à leurs camara<strong>de</strong>s<strong>et</strong> d’apprendre <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>rniers(proj<strong>et</strong>s d’équipe ou collectifs) <strong>de</strong>même que l’extension <strong>de</strong> l’activité<strong>de</strong> la classe au moyen <strong>de</strong> logiciels<strong>de</strong> communication <strong>et</strong> <strong>de</strong> télécollaboration(courriel, sites Web, clavardage<strong>et</strong> forums électroniques),utilisés à l’école comme à la maison,font partie <strong>de</strong> l’environnementd’apprentissage <strong>de</strong>s élèves inscrits àce programme.Une étu<strong>de</strong> con<strong>du</strong>ite par Legault <strong>et</strong>Laferrière (2001) 3 avait pour obj<strong>et</strong>principal d’examiner les répercussions<strong>de</strong> l’implantation d’une pédagogiepar proj<strong>et</strong>s assistée parl’ordinateur en réseau dans <strong>de</strong>sclasses PROTIC sur l’organisationpédagogique <strong>de</strong> la classe, les stratégiesd’apprentissage adoptées parles élèves, la satisfaction <strong>de</strong> leursbesoins, le choix <strong>de</strong> leurs buts scolaires,les croyances qui les motivent<strong>et</strong> leur engagement. Pour c<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong>,182 élèves <strong>de</strong> troisième secondairerépartis dans six classes ont répon<strong>du</strong>à <strong>de</strong>s questionnaires portant sur lescaractéristiques <strong>de</strong> leurs classes,sur les croyances qui les motiventVIE 40 Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004


<strong>et</strong> sur leurs démarches d’apprentissageen français <strong>et</strong> en mathématiques.Les six classes correspondaient àtrois contextes différents, soit <strong>de</strong>uxclasses PROTIC, <strong>de</strong>ux classes d’enrichissement<strong>et</strong> <strong>de</strong>ux classes ordinaires.Les perceptions <strong>de</strong>s élèves <strong>de</strong>sclasses PROTIC ont été comparées àcelles <strong>de</strong>s autres classes concernantle français <strong>et</strong> les mathématiques.Les résultats ont indiqué que le climat<strong>de</strong>s classes Protic se distinguait<strong>de</strong> celui <strong>de</strong>s autres classes par lacollaboration <strong>et</strong> l’investigation <strong>et</strong>,dans une moindre mesure, par l’innovation<strong>et</strong> l’indivi<strong>du</strong>alisation. Lesstratégies d’apprentissage différaientprincipalement sur les plans <strong>de</strong>la construction <strong>de</strong> connaissances,<strong>du</strong> traitement en profon<strong>de</strong>ur <strong>de</strong>scontenus <strong>et</strong>, dans la classe <strong>de</strong>mathématiques, <strong>de</strong> l’autorégulation.D’autre part, dans les classesProtic, les « buts d’évitement » serévélaient moins importants, tandisque les « buts <strong>de</strong> maîtrise » l’étaientplus dans la classe <strong>de</strong> mathématiques.Les mêmes élèves exprimaientplus <strong>de</strong> satisfaction quant à leursbesoins dans le cas <strong>de</strong>s mathématiques,accordaient plus <strong>de</strong> valeurau français <strong>et</strong> aux mathématiques <strong>et</strong>s’engageaient plus dans la classe <strong>de</strong>français.Photo : Denis GaronConcernant les relations entre lesvariables, l’efficacité personnelle<strong>de</strong>s élèves était liée à la satisfaction<strong>de</strong>s besoins d’appartenance <strong>et</strong> <strong>de</strong>pouvoir <strong>et</strong> à l’adoption <strong>de</strong> buts <strong>de</strong>maîtrise. La valeur accordée auxmatières était rattachée positivementà l’organisation pédagogique<strong>de</strong> la classe, à l’adoption <strong>de</strong> buts <strong>de</strong>maîtrise <strong>et</strong> négativement à l’adoption<strong>de</strong> buts d’évitement. Quantà l’engagement, il était coordonnésignificativement aux stratégiesadoptées par les élèves, dont l’autorégulation<strong>de</strong>s apprentissages.Par ailleurs, la motivation <strong>de</strong>sélèves se tra<strong>du</strong>it en règle généralepar leur engagement dans la tâcheou le proj<strong>et</strong> d’apprentissage : <strong>de</strong>nombreuses heures d’observationspassées en classe PROTIC <strong>et</strong> enclasse ordinaire nous l’ont fait constaterà maintes reprises. Cependant,la motivation n’est pas nécessairementconstante ni <strong>de</strong> tous lesmoments, <strong>et</strong> les élèves <strong>de</strong>meurent<strong>de</strong>s adolescents avec tous lescentres d’intérêt <strong>et</strong> les réactionsbien <strong>de</strong> leur âge.La place faite à l’activité cognitiveest l’obj<strong>et</strong> actuellement d’investigationsdiverses. Ainsi, les stagiairesen enseignement s’interrogent surleur rôle (gui<strong>de</strong>, médiateur) enclasse PROTIC, <strong>et</strong> leur base <strong>de</strong> données,« Knowledge Forum », ne cesse<strong>de</strong> croître en c<strong>et</strong>te matière. La directriceadjointe <strong>de</strong> même que lesenseignantes <strong>et</strong> les enseignantsréfléchissent ensemble au sein <strong>de</strong>leur communauté professionnelled’apprentissage aux meilleures conditionsà installer <strong>et</strong> à maintenir. Deson côté, une enseignante chercheà optimiser la communication pédagogiquedans une classe en réseau,<strong>et</strong> nombreux sont ses textes réflexifsà c<strong>et</strong> égard. À les analyser, on constateque le rôle <strong>de</strong> l’enseignant tientà la formulation d’intentions pédagogiquesqui tiennent compte <strong>de</strong>sobjectifs <strong>du</strong> programme scolaire,<strong>de</strong> l’intentionnalité <strong>de</strong> l’élève, <strong>de</strong>l’équipe <strong>de</strong> travail ou <strong>de</strong> la communautéd’apprentissage. Ce rôle tientégalement à la lecture que l’enseignantfait <strong>de</strong> l’état d’avancement <strong>de</strong>l’élève ou <strong>de</strong>s élèves, à la mise enplace <strong>de</strong>s conditions d’apprentissage<strong>et</strong> d’élaboration <strong>de</strong> connaissances, ycompris les leçons, les rencontresd’orientation, <strong>de</strong> coordination <strong>et</strong>d’évaluation <strong>du</strong> travail indivi<strong>du</strong>el, <strong>de</strong>groupe ou <strong>de</strong> la communauté d’apprentissage.L’accompagnement <strong>de</strong>sélèves dans leur cheminement d’apprentissages’exprime par une communicationqui leur donne accèsaux informations pertinentes ou auxidées <strong>de</strong> leurs camara<strong>de</strong>s. Les notions<strong>et</strong> les concepts explorés par lesélèves perm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong> nommer avecjustesse ce qu’ils investiguent, toutcomme ces faits <strong>et</strong> interprétationsseront repris dans le but <strong>de</strong> poursuivrela construction <strong>du</strong> sens.D’autres enseignants ont exploré,au cours <strong>de</strong> la présente année, lespossibilités <strong>de</strong> simulations dans ledomaine <strong>de</strong>s mathématiques <strong>et</strong> <strong>de</strong>la science <strong>et</strong> l’un d’entre eux amême guidé <strong>de</strong>s élèves particulièrementmotivés <strong>et</strong> habiles dans leurparticipation à une communauté <strong>de</strong>pratique qui se consacre à la conception<strong>et</strong> à l’expérimentation <strong>et</strong>dont le noyau principal est constituéd’ex-stagiaires PROTIC (CoPains).Bref, le potentiel <strong>de</strong> l’ordinateur enréseau pour motiver le travail <strong>de</strong>sélèves est là. Cependant, la classe enréseau exige plus que <strong>de</strong>s ordinateursbranchés. L’équipe d’intervention<strong>et</strong> <strong>de</strong> recherche PROTIC s’occupedonc à comprendre les conditionspédagogiques <strong>et</strong> organisationnellesqui doivent régner pour assurer laréussite <strong>de</strong>s élèves.M me Thérèse Laferrière estprofesseure au Départementd’étu<strong>de</strong>s sur l’enseignement <strong>et</strong>l’apprentissage <strong>de</strong> la Faculté<strong>de</strong>s sciences <strong>de</strong> l’é<strong>du</strong>cation <strong>de</strong>l’Université Laval.Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004Références bibliographiquesAPPLE CLASSROOMS OF TOMORROW [ACOT].Changing the Conversation about Teaching,Learning, and Technology : A report on tenyears of ACOT research, Cupertino, CA,Apple Computer, 1995.BEREITER, C. <strong>et</strong> M. SCARDAMALIA.« Intentional Learning as a Goal ofInstruction », dans L. B. Resnick (Ed.),Knowing, Learning, and Instruction :Essays in Honor of Robert Glaser, Hillsdale,NJ, Lawrence Erlbaum Associates, 1989,p. 361-392.COGNITION AND TECHNOLOGY GROUP ATVANDERBILT. « Designing Environments toReveal, Support, and Expand our Children’sPotentials », dans S. Soraci & W. J. McIlvane(Eds.), Perspectives on FundamentalProcesses in Intellectual Functioning : vol. 1—A survey of research approaches, Stamford,CT : Ablex, 1998, p. 313-350.MEANS, B. <strong>et</strong> K. OLSON. Technology’s Rolein E<strong>du</strong>cation Reform : Findings from anational study of innovating schools.Washington, DC, U.S. Department ofE<strong>du</strong>cation, Office of E<strong>du</strong>cational Researchand Improvement, 1995.ROY, PEA, « Learning and Teaching withE<strong>du</strong>cational Technologies », dans H.J.Walberg & G.D. Haertel (eds.), E<strong>du</strong>cationalPsychology : Effective Practices and Policies,Berkeley, CA, McCutchan Publishers, 1996.SHEINGOLD, K. <strong>et</strong> M. HADLEY. AccomplishedTeachers : Integrating Computers intoClassroom Practice, New York, Bank Stre<strong>et</strong>College of E<strong>du</strong>cation, Center for Technologyin E<strong>du</strong>cation,1990.1. Financement obtenu <strong>du</strong> Fonds FCAR(1998-2001) <strong>et</strong> <strong>du</strong> Réseau <strong>de</strong>s centres d’excellenceen téléapprentissage (1995-2002),Programme <strong>de</strong>s centres d’excellence,Conseil <strong>de</strong> recherches en sciences humaines,Ottawa.2. Voir le document collectif Gestion <strong>de</strong> laclasse, communauté d’apprentissage(2001) : [www.tact.fse.ulaval.ca/tact2/ress2.html].3. LEGAULT, F. <strong>et</strong> T. LAFERRIÈRE. Impactd’une pédagogie <strong>de</strong> proj<strong>et</strong> assistée parl’ordinateur en réseau sur les croyancesmotivationnelles <strong>et</strong> l’engagement autravail <strong>de</strong>s élèves <strong>du</strong> secondaire. Étu<strong>de</strong>présentée sur concours au Colloque <strong>du</strong>Programme pancanadien <strong>de</strong> rechercheen é<strong>du</strong>cation 2001 (PPRE) « La technologie<strong>de</strong> l’information <strong>et</strong> l’apprentissage »,2002, [cmec.ca/stats/pcera/RSEvents02/FLegault_OFR.pdf].<strong>DOSSIER</strong>PÉDAGOGIQUE 41


RENCONTRE AVEC QUELQUES ARTISANSpar Clau<strong>de</strong> Beauchesne<strong>DOSSIER</strong>Après quelques années d’existence<strong>et</strong> <strong>de</strong>vant la réputation<strong>du</strong> Programme <strong>de</strong> formationintégrant les nouvelles approchespédagogiques <strong>et</strong> les technologies<strong>de</strong> l’information <strong>et</strong> <strong>de</strong>s communications,dit « PROTIC », la revueVie pédagogique ne pouvait résisterà la tentation <strong>de</strong> mieux circonscrireles conditions qui ont permis laréussite <strong>et</strong> la persistance <strong>du</strong> programmeen question.C’est donc dans c<strong>et</strong>te intentionque je me suis ren<strong>du</strong> à l’école LesCompagnons-<strong>de</strong>-Cartier (Commissionscolaire <strong>de</strong>s Découvreurs) poury rencontrer quelques-uns <strong>de</strong>s enseignants<strong>de</strong> PROTIC.Je n’avais jusque-là que peu enten<strong>du</strong>parler <strong>du</strong> programme <strong>et</strong>, commemonsieur ou madame Tout-lemon<strong>de</strong>,j’avais surtout r<strong>et</strong>enu quechacun <strong>de</strong>s élèves <strong>de</strong> PROTIC étaitéquipé d’un ordinateur portable<strong>et</strong> branché sur Intern<strong>et</strong>. En consultantle site <strong>du</strong> programme[www.protic.n<strong>et</strong>] en vue <strong>de</strong> ma rencontreavec la responsable <strong>et</strong>quelques enseignants, j’ai tout <strong>de</strong>suite découvert que l’intégration<strong>de</strong>s TIC à l’apprentissage, bienqu’elle soit un élément fondamental<strong>du</strong> programme, n’était pas – loin <strong>de</strong>là – le seul aspect qui caractérisaitce programme. Les TIC semblaientplutôt constituer un catalyseur perm<strong>et</strong>tantd’appliquer <strong>de</strong>s stratégiespédagogiques variées <strong>et</strong> <strong>de</strong> voirémerger une communauté d’apprentissage.À QUOI TIENT LA MOTIVATIONDES ÉLÈVES?Comparativement à d’autres programmes<strong>du</strong> secondaire qui se distinguentpar un curriculum enrichiou par la pratique intensive d’unediscipline artistique ou sportive,PROTIC est axé sur une philosophieé<strong>du</strong>cative – un credo, diront certainsspécialistes – dont les grands principesétaient déjà énoncés par leConseil supérieur <strong>de</strong> l’é<strong>du</strong>cation dansson rapport annuel <strong>de</strong> 1969-1970,intitulé L’activité é<strong>du</strong>cative, soit lareconnaissance <strong>de</strong> l’élève commeagent premier <strong>de</strong> ses apprentissages,auprès <strong>de</strong> qui l’enseignantjoue un rôle d’accompagnateur.Ainsi, l’élève s’engagera activementdans sa formation dans la mesureoù il sera placé dans <strong>de</strong>s « situationsd’apprentissage signifiantes <strong>et</strong>variées qui représentent pour lui<strong>de</strong>s défis <strong>et</strong> l’incitent à utiliser sesstratégies cognitives <strong>et</strong> métacognitivespour construire ses savoirs <strong>et</strong>développer sa personnalité » (Cadre<strong>de</strong> référence <strong>de</strong> PROTIC 1997).Les élèves inscrits à PROTIC ne sontpas nécessairement tous parmi lesplus « performants » – certains, parexemple, peuvent éprouver <strong>de</strong>s difficultésconcernant le français oules mathématiques –, mais ils nesont pas non plus caractérisés par<strong>de</strong>s difficultés à fonctionner dansune classe ordinaire. À noter que78 p. 100 <strong>de</strong>s élèves sont <strong>de</strong> sexemasculin. Cependant, ils « <strong>de</strong>meurent<strong>de</strong>s adolescents… » (entendre,« parfois indisciplinés ») : les enseignantsconsidèrent néanmoins queleurs élèves sont généralement plusmotivés, voire beaucoup plus queceux <strong>de</strong> l’enseignement ordinaire.Cela se manifeste par le temps supplémentaireconsacré à la réalisationd’un proj<strong>et</strong>, la qualité <strong>de</strong>stravaux ou <strong>de</strong>s présentations (souventsupérieure à toutes les exigencesque l’on pourrait avoirà leur endroit), la disponibilité àaccompagner – sous supervision <strong>de</strong>l’enseignant – d’autres élèves quiéprouvent <strong>de</strong>s difficultés dans unematière ou l’autre… Le fait <strong>de</strong>travailler à <strong>de</strong>s proj<strong>et</strong>s personnelsperm<strong>et</strong> à <strong>de</strong>s élèves, peut-être plusfaibles dans certaines matières scolaires,<strong>de</strong> démontrer <strong>de</strong>s aptitu<strong>de</strong>sparticulières qu’ils n’auraient pum<strong>et</strong>tre en valeur dans un autrecadre d’apprentissage. Plusieursélèves développent ainsi leurs aptitu<strong>de</strong>sd’entrepreneur, <strong>de</strong> créateur,<strong>de</strong> lea<strong>de</strong>r, <strong>de</strong> critique, <strong>et</strong>c.PROTIC se caractérise donc toutautant par la pédagogie par proj<strong>et</strong>s,l’interdisciplinarité, l’apprentissagecoopératif, le titulariat, le tutorat,le développement <strong>de</strong>s compétencestransversales… que par l’ordinateurportable <strong>et</strong> l’utilisation d’Intern<strong>et</strong>.D’ailleurs, les TIC n’y font pasl’obj<strong>et</strong> d’un enseignement disciplinaire,mais sont plutôt intégréesaux disciplines <strong>et</strong> aux proj<strong>et</strong>s multidisciplinairesréalisés par lesélèves. Plus exactement, ceux-ci nesont pas amenés à se « spécialiser »dans les TIC mais à « développer uneculture technologique », laquelle estpartout présente. Le curriculum est,à peu <strong>de</strong> chose près, le mêmequ’à l’enseignement ordinaire : tousles élèves sont cependant inscritsen anglais, langue d’enseignement(même s’ils suivent l’enseignementen français); le fait que les enseignants<strong>du</strong> programme assument aumoins <strong>de</strong>ux disciplines dans unemême classe offre la possibilité<strong>de</strong> mo<strong>du</strong>ler les heures consacrées àchacune <strong>de</strong>s matières, sans compterque c<strong>et</strong>te organisation perm<strong>et</strong> auxenseignants <strong>de</strong> mieux connaîtrechacun <strong>de</strong>s élèves <strong>et</strong> <strong>de</strong> répondreaux besoins particuliers.L’ENGAGEMENTDES ENSEIGNANTSLe discours pédagogique <strong>de</strong>s enseignantsm’a gran<strong>de</strong>ment rappelécelui que j’avais enten<strong>du</strong> lors <strong>de</strong>mes visites dans quelques écolesalternatives <strong>de</strong> Montréal, au milieu<strong>de</strong>s années 90. PROTIC rappelleégalement la « voie technologique »<strong>de</strong>stinée à certains élèves <strong>du</strong> secondaire.Et mes interrogations étaientquelquefois les mêmes que cellesqui me venaient en tête à l’époque.«Avec la pédagogie par proj<strong>et</strong>s <strong>et</strong>l’intégration <strong>de</strong>s matières, notamment,n’y a-t-il pas risque <strong>de</strong> laisseréchapper <strong>de</strong>s connaissances essentielles?» Réponse : Il est souventétonnant <strong>de</strong> constater le nombre <strong>de</strong>« savoirs déclaratifs » (dates, noms<strong>de</strong> lieux <strong>et</strong> <strong>de</strong> personnages, événements,<strong>et</strong>c.) que les élèves vontchercher à partir d’une vaste questioncomme la suivante : « Qu’est-cequi a provoqué la chute <strong>de</strong> l’Empireromain? » ou à quel point ils peuventabondamment documenter le dossier<strong>du</strong> problème <strong>de</strong> l’eau enCalifornie. « Les élèves qui travaillentprincipalement à l’ordinateurseront-ils techniquement prêts à« subir » les examens <strong>du</strong> ministère<strong>de</strong> l’É<strong>du</strong>cation pour ce qui est <strong>du</strong>français, <strong>de</strong> l’histoire ou <strong>de</strong> la géographie?» Réponse : Les enseignantstiennent compte <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te réalité <strong>et</strong>veillent à ce que les élèves puissentquand même possé<strong>de</strong>r les exigences<strong>de</strong> base pour répondre àleurs besoins… Bref, les enseignantsmanifestent un enthousiasmepeu commun, qui va bien au-<strong>de</strong>là<strong>de</strong> l’utilisation <strong>de</strong>s TIC. De plus, tantsur le plan intellectuel <strong>et</strong> cognitifque sur le plan social <strong>et</strong> affectif, lesobjectifs poursuivis au sein <strong>de</strong> PRO-TIC sont sensiblement les mêmesque ceux <strong>de</strong> la réforme qui débuterabientôt au secondaire.N’y aurait-il pas moyen <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre enœuvre les mêmes stratégies pédagogiquessans utiliser l’ordinateurbranché sur Intern<strong>et</strong>? Théoriquement,peut-être. Cependant, selonles enseignants rencontrés, les TICreprésentent l’outil par excellencepour m<strong>et</strong>tre en œuvre les approchespédagogiques mo<strong>de</strong>rnes.VIE 42 Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004Photo : Denis Garon


Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004Par exemple, pendant que les élèvestravaillent une notion à l’ai<strong>de</strong> d’unlogiciel, ceux qui ont davantage <strong>de</strong>difficulté (20 p. 100) peuvent bénéficier<strong>de</strong> plus d’attention <strong>de</strong> la part<strong>de</strong> l’enseignant. Pas besoin d’ach<strong>et</strong>er30 exemplaires <strong>du</strong> même manueld’histoire : il vaut mieux en ach<strong>et</strong>er2 ou 3 <strong>de</strong> plusieurs manuels… Lesrecherches dans les manuels sontcomplétées par la consultation <strong>de</strong>ssites où il est question <strong>du</strong> suj<strong>et</strong>traité, <strong>et</strong> vice-versa. L’informationobtenue par les uns est transmiseaux autres…Toutefois, il y a plus. Des facteursorganisationnels jouent certainementun rôle dans la motivation <strong>de</strong>sélèves. Les enseignants <strong>de</strong> PROTICsont sélectionnés en fonction <strong>de</strong>leur intérêt à participer au programme<strong>et</strong> <strong>de</strong> leur capacité à enincarner les gran<strong>de</strong>s valeurs pédagogiques.Les élèves peuvent sesentir davantage inspirés par lesenseignants qui, tout comme eux,ont <strong>de</strong>mandé à prendre part à l’expérience.L’AVENIR…PROTIC est généralement méconnuou mal connu, même dans lesécoles primaires <strong>du</strong> territoire <strong>de</strong> laCommission scolaire <strong>de</strong>s Découvreurs– où <strong>de</strong>s élèves <strong>de</strong> sixièmeannée pourraient désirer s’y inscriredès le début <strong>du</strong> secondaire. Il subsisteraitencore quelques préjugésliés à l’aspect ludique <strong>de</strong> l’utilisation<strong>de</strong> l’ordinateur. Il faut direque PROTIC a été implanté en1997-1998, soit après tous lesautres programmes déjà connus,notamment les programmes « Artsétu<strong>de</strong>s» <strong>et</strong> « <strong>Sport</strong>s-étu<strong>de</strong>s » ainsique le Programme d’é<strong>du</strong>cationinternationale.Bien que PROTIC suscite l’intérêt<strong>de</strong>s chercheurs, non seulement auQuébec mais aussi à l’étranger, lesprincipaux acteurs se font très pru<strong>de</strong>ntslorsqu’il est question d’implanterun programme semblableailleurs. Il ne suffit pas <strong>de</strong> fournir<strong>de</strong>s ordinateurs portables aux élèves<strong>et</strong> <strong>de</strong> les brancher sur Intern<strong>et</strong>. Etbien que la philosophie <strong>de</strong> PROTICcorrespon<strong>de</strong> parfaitement à celle<strong>du</strong> Ministère, notamment en ce quia trait au développement <strong>de</strong>s compétencestransversales, il est loind’être assuré que le réseau <strong>de</strong> l’é<strong>du</strong>cationau Québec est globalementprêt à prendre un tel virage.<strong>Dans</strong> les faits, la constitution <strong>de</strong>véritables équipes formées d’enseignantes<strong>et</strong> d’enseignants motivés<strong>et</strong> compétents prêts à inciter lesélèves à s’engager dans leurs apprentissages<strong>de</strong> même qu’une organisationscolaire souple sont <strong>de</strong>uxconditions <strong>de</strong> réussite incontournables.M. Clau<strong>de</strong> Beauchesne est consultanten é<strong>du</strong>cation.LE QUÉBEC ENGLISH SCHOOLS NETWORK (QESN) : ILLUSTRATIOND’UNE COMMUNAUTÉ APPRENANTEpar Christiane Dufour <strong>et</strong> Sylwia BielecComment le QESN-RÉCIT[www.qesnrecit.qc.ca]abor<strong>de</strong>-t-il la formation<strong>de</strong>s enseignants au sein <strong>de</strong> la communautéanglophone? En m<strong>et</strong>tantl’accent sur <strong>de</strong>s stratégies <strong>et</strong> <strong>de</strong>spratiques variées qui rassemblent<strong>de</strong>s personnes-ressources <strong>et</strong> spécialistes<strong>de</strong>s divers paliers <strong>de</strong> l’é<strong>du</strong>cation.Il contribue ainsi à créer<strong>de</strong>s communautés dynamiquesqui font en sorte que les idéesnovatrices trouvent plus rapi<strong>de</strong>mentracine. C’est pourquoi sa<strong>de</strong>vise est « Communiquer, collaborer,communauté ».Le Québec English Schools N<strong>et</strong>work(QESN-RÉCIT) est surtout connupar sa présence sur le Web. Son siteoffre aux enseignants <strong>et</strong> aux autresagents d’é<strong>du</strong>cation <strong>du</strong> milieu scolaireun ensemble <strong>de</strong> ressourcespour l’enseignement <strong>et</strong> l’apprentissage.Cependant, le QESN-RÉCIT estbeaucoup plus qu’un site ou unecollection <strong>de</strong> sites. Derrière cespages HTML colorées bat le cœurd’un réseau en croissance, qui sedéveloppe en répondant aux besoins<strong>de</strong> ses membres.LA CRÉATION D’UNECOMMUNAUTÉ APPRENANTEAu QESN-RÉCIT, le travail se faitsimultanément sur <strong>de</strong>ux axes. Lepremier consiste à expérimenter<strong>de</strong>s pratiques pédagogiques <strong>et</strong> àdévelopper une expertise concernantl’intégration <strong>de</strong>s technologies<strong>de</strong> l’information <strong>et</strong> <strong>de</strong> la communication(TIC) dans l’apprentissage.Le référentiel pour ce travail inclutune pédagogie active <strong>et</strong> une visionsocioconstructiviste <strong>de</strong> l’apprentissageliées au Programme <strong>de</strong> formation.Le second axe mise surl’utilisation <strong>de</strong>s TIC pour communiquerà l’ensemble <strong>du</strong> réseau <strong>de</strong>spratiques issues <strong>de</strong> la communautéanglophone. Toutes les activités <strong>du</strong>QESN-RÉCIT s’insèrent à l’intérieur<strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux axes complémentaires <strong>et</strong>ont pour obj<strong>et</strong> la formation professionnelle<strong>de</strong>s enseignants membres<strong>du</strong> réseau.Les principales activités <strong>du</strong> QESN-RÉCIT sont articulées autour <strong>de</strong>quatre gran<strong>de</strong>s fonctions intimementliées :• rassembler les acteurs autour<strong>de</strong> proj<strong>et</strong>s <strong>et</strong> <strong>de</strong> problématiquesvariés;• établir <strong>et</strong> soutenir les groupes <strong>de</strong>travail <strong>et</strong> <strong>de</strong> recherche;•alimenter la discussion autour <strong>de</strong>pratiques en cours d’expérimentation;• propager <strong>de</strong> nouvelles pratiques<strong>et</strong> ressources issues <strong>du</strong> milieu.LES PROJETS INNOVATEURSLe QESN-RÉCIT rassemble <strong>de</strong>sacteurs <strong>du</strong> milieu é<strong>du</strong>catif autour<strong>de</strong> proj<strong>et</strong>s <strong>et</strong> <strong>de</strong> problématiquesvariés afin qu’ils puissent bénéficierd’un soutien, d’un encadrement<strong>et</strong> d’un accompagnement. C’est surc<strong>et</strong>te base qu’a commencé leQuébec English Schools N<strong>et</strong>work en1993, alors que l’on cherchait uneréponse aux problèmes d’isolement<strong>et</strong> <strong>de</strong> qualité d’enseignement dansles écoles anglophones en région.Dès le départ, ce réseau avait choisi<strong>de</strong> rassembler les enseignants autour<strong>de</strong> proj<strong>et</strong>s pédagogiques centrés surla télécollaboration entre leursclasses. Quelle était la technologie<strong>de</strong> l’époque? CC :Mail <strong>et</strong> son réseau<strong>de</strong> serveurs <strong>de</strong> courrier électroniquesoutenus par les animateurs<strong>de</strong>s CEMIS <strong>et</strong> par la GRICS.L’intuition à la base <strong>de</strong> ce choix estque l’on ne peut pas forcer la croissanced’un réseau. On peut seulementm<strong>et</strong>tre en place <strong>de</strong>s conditions<strong>et</strong> créer <strong>de</strong>s occasions pour rassemblerles gens autour <strong>de</strong> proj<strong>et</strong>scommuns afin d’alimenter la discussion<strong>et</strong> l’expérimentation dans lemilieu. Dès le départ, c<strong>et</strong>te formulea fait ses preuves. Des pratiquespédagogiques novatrices ont étéintro<strong>du</strong>ites dans les classes tout enassurant soutien <strong>et</strong> formation auxenseignants selon leurs besoins <strong>et</strong>à p<strong>et</strong>its pas tout au long <strong>du</strong> processus.PÉDAGOGIQUE 43Photo : Denis Garon<strong>DOSSIER</strong>


<strong>DOSSIER</strong>De nos jours, le QESN-RÉCIT continued’offrir <strong>de</strong>s proj<strong>et</strong>s <strong>de</strong> télécollaborationqui ont été élaborés enéquipe avec <strong>de</strong>s enseignants, <strong>de</strong>sconseillers pédagogiques <strong>et</strong> <strong>de</strong>s animateurs<strong>du</strong> RÉCIT (Réseau pour ledéveloppement <strong>de</strong>s compétencespar l’intégration <strong>de</strong>s technologies).Ces proj<strong>et</strong>s, dans lesquels la technologies’intègre <strong>de</strong> façon naturelle,sont centrés sur le Programme <strong>de</strong>formation <strong>et</strong> s’inspirent <strong>de</strong> la pédagogiepar proj<strong>et</strong>s. Pour participer àces proj<strong>et</strong>s <strong>de</strong> télécollaboration, lesenseignants doivent y inscrire leursclasses. Ils ont alors accès à un site<strong>de</strong> soutien exhaustif <strong>et</strong> à la présenced’un animateur en ligne qui leuroffre <strong>de</strong> l’assistance pédagogique <strong>et</strong>technique. De plus, ils bénéficient<strong>de</strong> l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’animateur <strong>du</strong> RÉCIT<strong>de</strong> leur commission scolaire qui faitpartie intégrante <strong>du</strong> réseau <strong>de</strong> soutien.Ces proj<strong>et</strong>s <strong>de</strong> Form@ction(Learn-by-Doing) s’adressent auxenseignants qui souhaitent réaliseravec leur classe un proj<strong>et</strong> TIC surIntern<strong>et</strong> mais qui n’osent s’y aventurerseuls parce qu’ils manquentd’expérience ou sentent le besoind’être accompagnés lors <strong>de</strong> leurspremières expérimentations. D’autresconnaissent mieux les TIC, maisveulent apprendre à réaliser <strong>de</strong>sproj<strong>et</strong>s qui en tirent profit sur leplan pédagogique. Les proj<strong>et</strong>s <strong>de</strong>Form@ction perm<strong>et</strong>tent donc auxenseignants <strong>de</strong> se former <strong>et</strong> <strong>de</strong> seperfectionner dans l’action, selonleurs besoins spécifiques, avec unanimateur qui leur sert <strong>de</strong> gui<strong>de</strong> <strong>et</strong>qui leur offre <strong>de</strong> l’ai<strong>de</strong> technique.Plus <strong>de</strong> 650 classes ont déjà participéà ces proj<strong>et</strong>s <strong>de</strong>puis leurimplantation. Les évaluations <strong>et</strong> larétroaction <strong>de</strong>s enseignants indiquentqu’ils sont enthousiastes, qu’ils ontPhoto : Denis Garonprogressé dans leur cheminementd’intégration <strong>de</strong>s TIC, que l’environnementé<strong>du</strong>catif <strong>de</strong> leur classe s’entrouve enrichi <strong>et</strong> qu’ils apprécientparticulièrement le soutien qu’ilsreçoivent tant en ligne que localement1 .LE PERFECTIONNEMENTPROFESSIONNELPAR LARECHERCHE-ACTIONIl existe souvent, dans le milieu scolaire,<strong>de</strong>s îlots d’innovation isolésqui ne sont pas conscients <strong>du</strong> potentiel<strong>de</strong> leur travail. Il s’agit d’enseignants<strong>et</strong> d’enseignantes qui sontau sta<strong>de</strong> <strong>de</strong> la réflexion quant àl’adoption <strong>de</strong> nouvelles pratiquesou d’écoles qui veulent essayer <strong>de</strong>sapproches différentes 2 .Chaque année, le QESN-RÉCIT crée<strong>et</strong> soutient <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong> travail <strong>et</strong><strong>de</strong> recherche. Il rassemble <strong>de</strong>s enseignants<strong>de</strong> plusieurs commissionsscolaires autour d’une problématique,le portfolio par exemple. Uneéquipe <strong>de</strong> soutien composée <strong>de</strong>conseillers pédagogiques, animateurs<strong>du</strong> RÉCIT, chercheurs <strong>et</strong> technologuesen é<strong>du</strong>cation les encadre<strong>et</strong> accompagne ces groupes surplace <strong>et</strong> à distance. Le résultat? Cesenseignants novateurs sont en contactavec <strong>de</strong>s collègues qui partagentleurs objectifs <strong>et</strong> font face auxmêmes défis. Ils implantent <strong>de</strong> nouvellespratiques dans leurs classestout en bénéficiant <strong>de</strong> la proximité<strong>de</strong> collègues <strong>et</strong> <strong>de</strong> personnesressourcesavec qui ils peuvent confronterleurs idées.La force <strong>de</strong> ces groupes rési<strong>de</strong> dansle croisement entre la rechercheaction<strong>et</strong> le perfectionnement professionnel.Le cheminement <strong>de</strong> tousles membres <strong>et</strong> leur collaborationfavorise une compréhension partagéed’une problématique particulière.Les idées <strong>et</strong> les pratiques filtrentalors plus rapi<strong>de</strong>ment <strong>et</strong> sont adoptéesfacilement. Ce genre <strong>de</strong> groupe<strong>de</strong> travail perm<strong>et</strong> ainsi le perfectionnementprofessionnel par larecherche-action.ALIMENTER LA DISCUSSIONDANS LE MILIEUSouvent, à l’invitation d’un groupe,le QESN-RÉCIT a l’occasion <strong>de</strong> travailleravec <strong>de</strong>s enseignants novateurspour documenter leurs pratiques.Ainsi, plusieurs proj<strong>et</strong>s qui illustrent<strong>de</strong>s pratiques exemplaires en français,langue secon<strong>de</strong>, ont été publiéssur le site Portes françaises 3 .Le proj<strong>et</strong> « Iroquois Beadwork –Cultural Portraits of the Past andPresent » a été documenté en collaborationavec <strong>de</strong>s enseignants, leMusée McCord <strong>et</strong> le centre culturelKanien’kehaka Raotitiohkwa <strong>et</strong> publiédans Le centre <strong>de</strong> ressourcesen univers social 4 .Ces démarches donnent l’occasionaux enseignants <strong>de</strong> discuter <strong>de</strong> leurproj<strong>et</strong> ainsi que <strong>de</strong> réfléchir surleur démarche <strong>et</strong> <strong>de</strong> la clarifier envue <strong>de</strong> la partager. La communautéenseignante prend alors connaissance<strong>de</strong> nouvelles pratiques pédagogiquesdont elle peut s’inspirer,outre qu’elle a accès à la banque<strong>de</strong>s ressources créées.Le QESN-RÉCIT a souvent constatéque les acteurs <strong>du</strong> milieu scolairequi expérimentent <strong>de</strong> nouvelles pratiques,qui expliquent à d’autres cequ’il font dans leur classe <strong>et</strong> quipublient sur son site <strong>de</strong>viennent <strong>de</strong>scatalyseurs importants <strong>de</strong> changementdans leurs écoles ou commissionsscolaires respectives. Le faitd’articuler leur vécu avec l’ai<strong>de</strong>d’une personne-ressource <strong>du</strong> QESN-RÉCIT dans le but <strong>de</strong> publier undocument sur le site leur donne unrecul qui, souvent, en fait d’excellentsanimateurs ou accompagnateurs.La publication <strong>de</strong> leur travailleur donne la crédibilité <strong>et</strong> la reconnaissancequi assurent que l’on feraappel à eux. Ils ont une précieuseexpérience <strong>de</strong> première ligne <strong>et</strong>peuvent en faire profiter d’autresenseignants.Par l’entremise d’ateliers, <strong>de</strong> présentations<strong>et</strong> <strong>de</strong> sessions <strong>de</strong> partageà l’école, à l’échelle <strong>de</strong> la commissionscolaire ainsi qu’à <strong>de</strong>s congrès,les expériences <strong>et</strong> les réflexions <strong>de</strong>ces acteurs alimentent la discussiondans le milieu. Les contenus, hébergéssur le site <strong>du</strong> QESN-RÉCIT, servent<strong>de</strong> documents <strong>de</strong> présentation <strong>et</strong> <strong>de</strong>soutien pour les communicateurs,qu’il s’agisse <strong>de</strong>s enseignants euxmêmesou d’autres membres <strong>de</strong> lacommunauté.UN RÉSULTAT VISIBLEPour propager les nouvelles pratiquesissues <strong>du</strong> milieu, le QESN-RÉCIT mise donc sur son site Webqui sert <strong>de</strong> vitrine pour le réseau.Cependant, le véritable moteur <strong>du</strong>changement <strong>et</strong> <strong>de</strong> la formation professionnellerési<strong>de</strong> dans la synergiequi se développe au sein <strong>de</strong>s groupesd’enseignants avec qui il travaille.Ces groupes forment <strong>de</strong>s « communautés<strong>de</strong> pratique » qui s’établissentautour <strong>de</strong>s multiples stratégies <strong>et</strong>pratiques pédagogiques mises enœuvre dans le milieu : « L’émergence<strong>et</strong> la croissance d’une tellecommunauté dépen<strong>de</strong>nt notamment<strong>de</strong> l’alliance <strong>de</strong> l’attention, <strong>du</strong>dialogue <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’entrai<strong>de</strong>, considéréscomme <strong>de</strong>s attitu<strong>de</strong>s enracinéesdans <strong>de</strong>s valeurs <strong>et</strong> seprolongeant dans <strong>de</strong>s comportements,<strong>de</strong>s façons <strong>de</strong> faire, <strong>de</strong>smoyens d’action <strong>et</strong> <strong>de</strong>s structures<strong>de</strong> soutien 5 .»Les dirigeants <strong>du</strong> QESN-RÉCIT ontconstaté que lorsqu’ils réunissentainsi <strong>de</strong>s enseignants dynamiques,<strong>de</strong>s conseillers pédagogiques, <strong>de</strong>sreprésentants <strong>du</strong> ministère <strong>de</strong> l’É<strong>du</strong>cation,<strong>de</strong>s animateurs <strong>du</strong> RÉCIT,<strong>de</strong>s chercheurs universitaires <strong>et</strong> <strong>de</strong>smuséologues… tous progressent!Le travail concerté <strong>de</strong> ces multiplespersonnes a pour résultat que lesidées novatrices trouvent alors plusfacilement racine dans l’ensemble<strong>du</strong> milieu scolaire.M mes Sylwia Bielec <strong>et</strong> ChristianeDufour font partie <strong>de</strong> l’équipe<strong>de</strong> soutien <strong>et</strong> <strong>de</strong> développement<strong>du</strong> QESN-RÉCIT.1. Pour les proj<strong>et</strong>s <strong>de</strong> Form@ction <strong>du</strong>QESN-RÉCIT : [www.qesnrecit.qc.ca/cc/ldoann.htm].2. School Reform in Québec : Lead and PilotSchools : [www.qesnrecit.qc.ca/reform/bestprac/leadsch/in<strong>de</strong>x.php]; Vie <strong>de</strong> cycle :[www.qesnrecit.qc.ca/reform/schoolorgs/cyclelife/in<strong>de</strong>x.php].3. Proj<strong>et</strong>s <strong>de</strong> portes françaises : www.qesnrecit.qc.ca/fls/proj<strong>et</strong>s.htm.4. Iroquois Beadwork : www.qesnrecit.qc.ca/socialsciences/beadwork/in<strong>de</strong>x.html.5. GRÉGOIRE, R. Communauté d’apprentissage: Attitu<strong>de</strong>s fondamentales. Proj<strong>et</strong><strong>de</strong> recherche sous la direction <strong>de</strong> ThérèseLaferrière, [En ligne], 20 décembre1998, [www.fse.ulaval.ca/fac/tact/fr/html/prj-7.1/commune3.html] (19 mai 2004).VIE 44 Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004


Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004LES FUTURS ENSEIGNANTS DU QUÉBECSONT-ILS BIEN PRÉPARÉS À INTÉGRER LES TIC?par Thierry KarsentiUn jour, les gens apprendront à travers <strong>de</strong>s circuits électroniques.Marshall McLuhan, 1965Pour plusieurs, MarshallMcLuhan a été un précurseur,en annonçant dès lesannées soixante que les technologiesjoueraient un rôle central ené<strong>du</strong>cation. Mais plus <strong>de</strong> 50 ansavant McLuhan, un autre visionnaire,Thomas Edison, prédisaitdéjà un grand avenir aux technologiesdans les écoles. En eff<strong>et</strong>, en1911, peu <strong>de</strong> temps après avoirréalisé un film <strong>de</strong>stiné à l’é<strong>du</strong>cation,Edison déclarait : « Les livresseront incessamment désu<strong>et</strong>s.[…] Il est possible d’enseignertoutes les fac<strong>et</strong>tes <strong>du</strong> savoirhumain par le film. Notre systèmed’é<strong>du</strong>cation sera complètementtransformé d’ici dix ans ». Celafait donc près d’un siècle que l’onprom<strong>et</strong> aux technologies un rôlemajeur dans l’é<strong>du</strong>cation.Au Québec, c’est dès la fin <strong>de</strong>s annéessoixante-dix que les enseignantsinitient les élèves à l’ordinateurainsi qu’à l’utilisation <strong>de</strong> certainslogiciels. Le Québec semble doncpromis à un bel avenir en décidant,<strong>de</strong>ux ans avant la France, d’investir<strong>de</strong> façon massive dans l’achat <strong>de</strong>70 000 ordinateurs pour les écoles 1 .Malheureusement, l’aventure <strong>de</strong>sordinateurs <strong>de</strong> Comterm-Matra(voir Lemieux, 1992) fait reculer leQuébec, qui se r<strong>et</strong>rouve, au début<strong>de</strong>s années 90, au <strong>de</strong>rnier rang <strong>de</strong>sprovinces canadiennes pour lenombre d’élèves par ordinateur.Après c<strong>et</strong> échec, il faut attendre lemilieu <strong>de</strong>s années 90 pour que laquestion <strong>de</strong> la pénurie d’ordinateursdans les écoles refasse lesmanch<strong>et</strong>tes. Les écoles <strong>du</strong> Québecont <strong>de</strong>ux fois moins d’ordinateursqu’elles ne le <strong>de</strong>vraient, selon unrapport <strong>de</strong> l’Organisation <strong>de</strong> coopération<strong>et</strong> <strong>de</strong> développement économiques(OCDE) <strong>de</strong> 1996. Il fautattendre la fin <strong>de</strong>s années 90 pourvoir le Québec réellement émergersur la scène canadienne. En eff<strong>et</strong>, le14 juin 1999, le ministre <strong>de</strong> l’É<strong>du</strong>cationFrançois Legault annonceque toutes les écoles <strong>du</strong> Québecsont branchées 2 , qualifiant <strong>de</strong> grandsuccès le plan d’action ministérielrelatif aux technologies <strong>de</strong> l’information<strong>et</strong> <strong>de</strong> la communication. LeQuébec <strong>de</strong>vient ainsi la premièreprovince <strong>du</strong> Canada où toutes lesécoles ont un accès à Intern<strong>et</strong>.Parallèlement à c<strong>et</strong>te annonce,L’élève rapaillé, <strong>de</strong> Robert Bibeau,est publié sur Intern<strong>et</strong> 3 . Ce texte,que plusieurs n’hésitent pas à qualifier<strong>de</strong> pamphl<strong>et</strong>, fait couler beaucoupd’encre <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux côtés <strong>de</strong>l’Atlantique. Bibeau (1999) prétendcarrément – <strong>et</strong> avec raison – queles TIC sont présentes partout dansla société sauf dans les classes <strong>de</strong>sécoles <strong>du</strong> Québec. Écoles branchées<strong>et</strong> pédagogie débranchée, voilà quipourrait résumer les conclusions<strong>de</strong> son manuscrit. Il reprend ainsicertains <strong>de</strong>s propos <strong>de</strong> chercheursbelges qui affirmaient quelquesannées plus tôt que « les établissementsoù l’on peut réellementconsidérer que les NTI sont utiliséessur une base régulière pourtransm<strong>et</strong>tre <strong>de</strong>s connaissances <strong>et</strong>faire acquérir <strong>de</strong>s compétencespar les élèves restent très peunombreux » (Depover <strong>et</strong> Strebelle,1996, p. 76).Finalement, au tournant <strong>du</strong> XXI e siècle,l’intégration <strong>de</strong>s TIC en é<strong>du</strong>cationest également marquée par uneforte volonté <strong>du</strong> gouvernement <strong>du</strong>Québec <strong>de</strong> perm<strong>et</strong>tre à tous lesélèves d’être outillés <strong>et</strong> d’être formésaux défis technologiques <strong>de</strong> lasociété <strong>du</strong> savoir. Le ministère <strong>de</strong>l’É<strong>du</strong>cation croit que l’école, enplus <strong>de</strong> veiller à développer <strong>de</strong>scompétences technologiques chezles élèves <strong>et</strong> <strong>de</strong> favoriser l’intégration<strong>de</strong>s TIC dans l’ensemble <strong>de</strong>sdisciplines scolaires, doit aussi« amener tous les élèves à diversifierl’usage qu’ils en font [<strong>de</strong>stechnologies] <strong>et</strong> à développer unsens critique à leur endroit »(MEQ, 2001, p. 28). C<strong>et</strong>te volontés’est tra<strong>du</strong>ite par <strong>de</strong> nombreuxinvestissements dans les écoles,notamment pour l’achat d’équipements,le soutien technique <strong>et</strong> l’ai<strong>de</strong>pédagogique. Une <strong>de</strong>s actions concrètes<strong>du</strong> gouvernement <strong>du</strong> Québecpour ai<strong>de</strong>r les enseignants à intégrerles TIC <strong>de</strong> façon pédagogique apermis la création <strong>du</strong> Réseau pourle développement <strong>de</strong>s compétencespar l’intégration <strong>de</strong>s technologies 4(RÉCIT), qui a remplacé les Centresd’enrichissement en micro-informatiquescolaire (CEMIS).Bien que les prédictions d’Edisonaient tardé à se concrétiser, nousserions tentés <strong>de</strong> croire, en 2004,que nous n’en sommes pas trèsloin. Nous sommes aussi à mêmed’espérer que les enseignants nouvellementformés disposent <strong>de</strong>scompétences nécessaires pour faireun usage régulier <strong>et</strong> pédagogique<strong>de</strong>s technologies. Est-ce vraimentle cas?LES TIC ET LA FORMATIONDES MAÎTRES AU QUÉBECDepuis 1990, le ministère <strong>de</strong> l’É<strong>du</strong>cation<strong>du</strong> Québec invite les universitésquébécoises à repenser laformation <strong>de</strong>s maîtres, <strong>et</strong> ce, enrecourant à divers savoirs ancrésdans <strong>de</strong>s pratiques exercées enmilieu scolaire telles que les stages(MEQ, 1997). Par ailleurs, l’Étatconvie <strong>de</strong>puis longtemps les facultésd’é<strong>du</strong>cation à favoriser l’intégration<strong>de</strong>s TIC en formation à laprofession enseignante, dans uneperspective <strong>de</strong> cohérence <strong>de</strong> laformation initiale <strong>de</strong>s enseignantsavec les nouvelles réalités scolaires(MEQ, 1997). C’est le 29 janvier1997 que le ministère <strong>de</strong> l’É<strong>du</strong>cation<strong>du</strong> Québec lance son plan d’interventionintitulé Les technologies<strong>de</strong> l’information <strong>et</strong> <strong>de</strong> la communicationen é<strong>du</strong>cation. Pour leMEQ, l’objectif « […] est <strong>de</strong> contribuerà une meilleure préparationPÉDAGOGIQUE 45Photo : Denis Garon<strong>DOSSIER</strong>


<strong>DOSSIER</strong><strong>de</strong>s futurs enseignants <strong>et</strong> enseignantes[…] au regard <strong>de</strong> l’intégration<strong>de</strong>s TIC dans leurenseignement. » <strong>Dans</strong> ce pland’action, on déplore le manque <strong>de</strong>préparation <strong>de</strong>s futurs enseignantsconcernant l’utilisation <strong>de</strong>s TIC :« […] Le nombre <strong>de</strong> cours offertsest faible […] ». On reprocheégalement aux universités <strong>de</strong> considérerla formation technologiquecomme « une spécialité <strong>et</strong> noncomme un instrument d’applicationgénérale en didactique <strong>et</strong> enpédagogie. » (MEQ, 1997).D’une formation centrée exclusivementsur les TIC, nous sommespassés, dans plusieurs facultésd’é<strong>du</strong>cation <strong>de</strong>s universités <strong>du</strong>Québec, à une « intégration transversale» <strong>de</strong>s TIC, c’est-à-dire quel’on souhaite r<strong>et</strong>rouver les TIC nonpas dans un seul cours <strong>de</strong> la formation<strong>de</strong>s maîtres, mais plutôt dansl’ensemble <strong>de</strong>s activités <strong>du</strong> programme<strong>de</strong> formation. Ce viragefait notamment suite au documentministériel La formation à l’enseignement: les orientations, les compétencesprofessionnelles (MEQ,DIRECTION DE LA FORMATION INI-TIALE DU PERSONNEL ENSEIGNANT,2001). Ce document regroupe douzecompétences que <strong>de</strong>vraient maîtriserles futurs enseignants à l’issue <strong>de</strong>leur formation. La Compétence 8,qui traite particulièrement <strong>de</strong>s technologies<strong>de</strong> l’information <strong>et</strong> <strong>de</strong> lacommunication, est ainsi formulée :« Intégrer les technologies <strong>de</strong> l’information<strong>et</strong> <strong>de</strong>s communicationsaux fins <strong>de</strong> préparation <strong>et</strong> <strong>de</strong>pilotage d’activités d’enseignement-apprentissage,<strong>de</strong> gestion <strong>de</strong>l’enseignement <strong>et</strong> <strong>de</strong> développementprofessionnel ».Quoique ce virage d’orientation <strong>de</strong>la formation initiale <strong>de</strong>s maîtres –d’une formation technologique àune formation axée surtout sur l’intégrationpédagogique <strong>de</strong>s technologies– constitue un juste r<strong>et</strong>our <strong>du</strong>balancier, il y a dans c<strong>et</strong>te façon<strong>de</strong> faire un certain danger. Si onsouhaite r<strong>et</strong>rouver les technologiesdans l’ensemble <strong>de</strong> la formation,ne risquent-elles pas aussi <strong>de</strong> ser<strong>et</strong>rouver nulle part? N’aurait-il pasété plus sage d’ajouter un nouveaucours au programme? Est-ce que lefait <strong>de</strong> voir <strong>de</strong>s professeurs <strong>et</strong> <strong>de</strong>schargés <strong>de</strong> cours utiliser le logicielPowerPoint <strong>de</strong> Microsoft pourenseigner <strong>de</strong> façon magistrale est legage d’une formation qui vise àdévelopper <strong>de</strong>s compétences enmatière <strong>de</strong> TIC 5 ? Il est facile d’endouter. C<strong>et</strong>te incertitu<strong>de</strong> relativementaux nouveaux aménagements<strong>de</strong> la formation <strong>de</strong>s maîtres nous aamenés à nous questionner sur lacompétence <strong>de</strong>s futurs enseignantsà intégrer les TIC. C’est ainsi quenous avons décidé d’entreprendrel’une <strong>de</strong>s plus importantes enquêtessur les TIC <strong>et</strong> la formation <strong>de</strong>smaîtres jamais réalisées en Amérique<strong>du</strong> Nord ou en Europe 6 .LES RÉSULTATS D’UNEENQUÊTE MENÉE AUPRÈS DE6 998 FUTURS ENSEIGNANTSET ENSEIGNANTES DU QUÉBECNous présentons ci-après les principauxrésultats <strong>de</strong> notre recherche :une enquête menée auprès <strong>de</strong>quelque 6 998 futurs enseignants <strong>et</strong>enseignantes qui étudient dans lesneuf universités francophones <strong>du</strong>Québec offrant un programme <strong>de</strong>formation initiale à l’enseignement.Les résultats <strong>de</strong>s analyses statistiquesnous renseignent d’abord surles personnes qui ont répon<strong>du</strong> auquestionnaire : 84 % <strong>de</strong> femmes <strong>et</strong>16 % d’hommes, ce qui est la répartitionque l’on r<strong>et</strong>rouve en généralen formation <strong>de</strong>s maîtres au Québec.La proportion <strong>de</strong> femmes est toutefoisbeaucoup plus forte dans leprogramme <strong>de</strong> formation initiale<strong>de</strong>s maîtres au préscolaire <strong>et</strong> au primaire(94 %). Les données recueilliesfournissent aussi un éclairagefort intéressant sur les attitu<strong>de</strong>s <strong>et</strong>les compétences relatives aux TICpour les enseignants nouvellementformés. Mais comme nous avonsinterrogé <strong>de</strong>s personnes qui effectuaientun stage, les résultats <strong>de</strong>c<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong> perm<strong>et</strong>tent égalementun coup d’œil privilégié sur l’utilisation<strong>de</strong>s technologies dans près<strong>de</strong> 7 000 classes <strong>du</strong> Québec.LES FUTURS ENSEIGNANTSET ENSEIGNANTES ETLA MAÎTRISE DES TICNous avons posé diverses questionssur les technologies afin <strong>de</strong> mieuxcomprendre l’accès que les futursenseignants ont à ces outils, maisaussi leur <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> maîtrise <strong>de</strong>sTIC. Les résultats <strong>de</strong> notre enquêtemontrent que 95 % <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>rniersont accès à un ordinateur à leurdomicile, <strong>et</strong> que 85 % ont aussi uneconnexion Intern<strong>et</strong>. Quelque 91 %se considèrent « bons » à « experts »en ce qui a trait à l’utilisation <strong>du</strong>traitement <strong>de</strong> texte, outil dont ilsfont surtout usage pour la planification<strong>et</strong> la gestion <strong>de</strong> l’enseignement.Toutefois, lorsqu’il est question <strong>de</strong>l’utilisation d’un logiciel <strong>de</strong> présentation(PowerPoint), plus <strong>de</strong> 55 %indiquent se sentir « novices », <strong>et</strong>moins <strong>de</strong> 1 % se considèrent comme<strong>de</strong>s experts. En ce qui a trait à lacréation <strong>de</strong> pages Web, c’est près<strong>de</strong> 86 % <strong>de</strong>s répondants qui se considèrentnovices, <strong>et</strong> moins d’unrépondant sur 700 se considère« expert ». En résumé, on observeque les futurs enseignants ont engran<strong>de</strong> majorité un accès aux TIC.Néanmoins, en ce qui a trait à lamaîtrise d’outils (logiciels) pouvantêtre utilisés en salle <strong>de</strong> classe (logiciels<strong>de</strong> présentation ou <strong>de</strong> création<strong>de</strong> page Web), ils ne se disent pas<strong>de</strong>s utilisateurs chevronnés. Ce résultatpeut paraître surprenant, surtoutlorsque l’on sait qu’un logiciel <strong>de</strong>présentation comme PowerPointexiste <strong>de</strong>puis bientôt vingt ans. Ence qui a trait à la création <strong>de</strong> pagesWeb, une habil<strong>et</strong>é qui, pour plusieurs,est au cœur <strong>de</strong>s innovationspédagogiques en classe, il estsurprenant <strong>de</strong> constater que tantd’enseignants se sentent toujoursnovices.ATTITUDE DES FUTURSENSEIGNANTS ETENSEIGNANTES ENVERSLES TICDe nombreuses étu<strong>de</strong>s ont montréque <strong>de</strong>s facteurs humains tels que lamotivation <strong>et</strong> le sentiment <strong>de</strong> compétencesont susceptibles d’appuyerVIE 46 Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004Photo : Denis Garon


Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004ou d’inhiber l’usage <strong>de</strong>s technologiesen classe (Karsenti, Savoie-Zajc<strong>et</strong> Larose, 2001; Ungerlei<strong>de</strong>r, 2002).Nous n’avons pas été surpris par lesrésultats <strong>de</strong> notre enquête qui montrentqu’une motivation élevée <strong>et</strong>un fort sentiment <strong>de</strong> compétence àl’égard <strong>de</strong>s TIC vont <strong>de</strong> pair avecune plus gran<strong>de</strong> utilisation enclasse. Le constat est le même quantà la valeur pédagogique accordéeaux TIC : plus le futur enseignant oula future enseignante trouve qu’ilest important pour les élèves d’apprendreà l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong>s TIC, plus lestechnologies seront mises à profiten classe. Les résultats <strong>de</strong> notreétu<strong>de</strong> ont toutefois ceci <strong>de</strong> particulierque ce sont les facteurs humains (lamotivation, le sentiment <strong>de</strong> compétence<strong>et</strong> la valeur pédagogique accordéeaux TIC) qui expliquent le plusleur utilisation – ou non – par lesfuturs enseignants <strong>et</strong> enseignanteslors <strong>de</strong> leurs stages. Il semble ainsique les habil<strong>et</strong>és technologiques <strong>et</strong>l’équipement – pourtant <strong>de</strong>s conditionsessentielles à l’intégration <strong>de</strong>sTIC – ne suffisent pas. Intégrer lesTIC en classe, c’est aussi une question<strong>de</strong> motivation <strong>et</strong> d’attitu<strong>de</strong>.FORMATION PRATIQUE(STAGES) ET TIC<strong>Dans</strong> la <strong>de</strong>rnière section <strong>de</strong> l’enquête,nous cherchions à mieuxcomprendre si les futurs enseignants<strong>et</strong> enseignantes avaient l’occasiond’intégrer les TIC en contexte d’enseignement,<strong>du</strong>rant leur stage. Nousavons obtenu à ce suj<strong>et</strong>, croyonsnous,les résultats les plus intéressants<strong>de</strong> notre enquête. À la question« Lors <strong>de</strong> votre <strong>de</strong>rnier stage,avez-vous utilisé les TIC? », 46 %<strong>de</strong>s participants ont répon<strong>du</strong> « jamais» ou « très rarement ». Pourl’ensemble <strong>de</strong>s répondants inscritsdans le programme d’enseignementau préscolaire <strong>et</strong> au primaire, l’utilisationest toutefois plus fréquente(35 % indiquent n’avoir jamais ouavoir très rarement utilisé les TIC).En ce qui a trait aux personnesinscrites au programme d’enseignementau secondaire, mis à partle cours d’informatique ou encorel’utilisation <strong>de</strong>s TIC pour la planification<strong>de</strong> l’enseignement, c’est près<strong>de</strong> 95 % qui indiquent n’avoir jamaisou avoir très rarement utilisé lesTIC en classe. La différence entrel’usage <strong>de</strong>s TIC que font les enseignantsen classe au primaire <strong>et</strong> ausecondaire est donc majeure <strong>et</strong><strong>de</strong>vrait nous amener à réfléchir surle mo<strong>de</strong> d’organisation <strong>de</strong> l’écolesecondaire. Il est aussi intéressant<strong>de</strong> noter que quels que soient lesprogrammes d’étu<strong>de</strong>s, ce sont toujoursles femmes qui utilisent leplus les TIC, <strong>et</strong> ce, <strong>de</strong> façon trèssignificative.À la question « <strong>Dans</strong> quel contexteavez-vous utilisé les TIC au cours<strong>de</strong> votre <strong>de</strong>rnier stage? », celles <strong>et</strong>ceux parmi les futurs maîtres quiavaient utilisé les TIC ont répon<strong>du</strong> :• pour <strong>de</strong> la recherche d’informations<strong>et</strong> <strong>de</strong> la navigation surIntern<strong>et</strong> (souvent pour la préparation<strong>de</strong> leçons ou d’activités)(42 %);• pour <strong>de</strong>s proj<strong>et</strong>s, <strong>de</strong>s travaux<strong>et</strong> <strong>de</strong>s activités réalisées avecles élèves (23 %);• comme appui pédagogique(par exemple, la création<strong>de</strong> présentations PowerPoint)(15 %);• pour faire <strong>de</strong> la gestion, <strong>de</strong> laplanification <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’organisation<strong>de</strong> l’enseignement (parexemple, pour comptabiliser<strong>de</strong>s notes à l’ai<strong>de</strong> d’un chiffrier)(13 %);• pour <strong>de</strong> la communicationavec le courrier électronique,les forums ou encore les sites<strong>de</strong> clavardage (8 %);• pour l’initiation <strong>de</strong>s élèves àl’informatique (7 %).CONCLUSIONLes sondages <strong>et</strong> les enquêtes comportenttoujours une certaine marged’erreur <strong>et</strong> il faut souvent fairepreuve <strong>de</strong> pru<strong>de</strong>nce dans l’analyse<strong>et</strong> l’interprétation <strong>de</strong>s donnéesrecueillies. Néanmoins, commenous avons interrogé un nombr<strong>et</strong>rès important <strong>de</strong> futurs enseignants<strong>et</strong> enseignantes (6 998), on nepourra pas dire que notre échantillonn’est pas représentatif. C’estplus <strong>de</strong> 60 % <strong>de</strong>s futurs enseignantsformés au Québec qui ont répon<strong>du</strong>à notre enquête. Nous aurionscertes pu présenter toutes les utilisationsnovatrices <strong>et</strong> exemplairesque nous avons pu observer (<strong>et</strong>elles sont souvent impressionnantes),mais l’objectif <strong>de</strong> notreétu<strong>de</strong> était <strong>de</strong> savoir si, <strong>de</strong> façongénérale, les futurs enseignants sontconvenablement préparés à intégrerles TIC. C’est pourquoi notre analysea surtout porté sur « l’ensemble<strong>de</strong>s répondants », <strong>et</strong> non sur l’utilisationexemplaire que font <strong>de</strong>s TICcertains enseignants.L’ÉCOLE SECONDAIRE DOIT-ELLEÊTRE REPENSÉE?Alors que le ministère <strong>de</strong> l’É<strong>du</strong>cations’interroge sur l’avenir <strong>et</strong>l’organisation <strong>de</strong>s cégeps, les résultats<strong>de</strong> l’enquête que nous avonsréalisée nous amènent à nous questionnersur l’organisation <strong>de</strong> l’écolesecondaire au Québec. Comment sefait-il que l’utilisation <strong>de</strong>s TIC à <strong>de</strong>sfins pédagogiques dans les écolessecondaires soit rarissime, en particulierdans un contexte où l’onobserve une utilisation <strong>de</strong> plus enplus fréquente <strong>de</strong>s TIC dans d’autresdomaines <strong>de</strong> la société? L’intégration<strong>de</strong>s TIC est-elle incompatibleavec un contexte où les enseignantsdoivent régulièrement changer <strong>de</strong>classe pour enseigner? Est-ce qu’emmenerses élèves au laboratoired’informatique – local souventréservé aux cours d’informatique –représente « un parcours <strong>du</strong> combattant»? Certes, plusieurs écolessecondaires – comme c’est le casà la Commission scolaire <strong>de</strong> Lavalou encore à la Commission scolaire<strong>de</strong>s Draveurs, en Outaouais –innovent avec <strong>de</strong>s laboratoiresdédiés à l’intégration pédagogique<strong>de</strong>s TIC pour les autres disciplinesd’enseignement, mais il s’agit làd’initiatives ponctuelles qui nereflètent pas nécessairement la tendancegénérale dans le réseau <strong>de</strong>sécoles secondaires au Québec. Lesconclusions d’une récente étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>l’OCDE (2004), Compl<strong>et</strong>ing thefoundation for lifelong learning :An OECD survey of Upper SecondarySchools, montrent comment l’aménagement<strong>de</strong>s heures d’enseignement,l’organisation <strong>de</strong> la classe… <strong>et</strong> lafaible compétence technopédagogique<strong>de</strong>s enseignants ne perm<strong>et</strong>tentpas une véritable intégration <strong>de</strong>sTIC dans les classes <strong>du</strong> secondaire<strong>de</strong> quelque quinze pays in<strong>du</strong>strialisés.Le rapport m<strong>et</strong> d’abord enévi<strong>de</strong>nce que l’utilisation <strong>de</strong>s TICest « décevante » dans les établissementsd’enseignement secondaire<strong>de</strong> ces pays, <strong>et</strong> ce, même si d’importantesdépenses en équipementau cours <strong>de</strong>s 20 <strong>de</strong>rnières annéesont permis <strong>de</strong> faire entrer les technologiesdans la quasi-totalité <strong>de</strong>ces établissements scolaires. Lesconclusions reflètent c<strong>et</strong>te déception: l’utilisation <strong>de</strong> l’informatiqueà <strong>de</strong>s fins pédagogiques dans l’ensemble<strong>de</strong>s écoles secondaires <strong>de</strong>ces pays est sporadique.Plusieurs diront donc qu’il ne fautpas s’inquiéter car ce rapport concor<strong>de</strong>avec les résultats que nousavons obtenus, <strong>et</strong> ce, même si ni leCanada ni le Québec n’ont participéà c<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’OCDE. On diraque c’est une bien mince consolation<strong>de</strong> constater que nous sommes,comme bien d’autres, « hors piste ».Ne serait-ce pas plutôt une occasionpour notre système é<strong>du</strong>catif <strong>de</strong> sedémarquer <strong>et</strong> d’innover sur le plan<strong>de</strong> l’intégration pédagogique <strong>de</strong>sTIC dans les écoles secondaires?LES CONDITIONS GAGNANTESSEMBLENT EN PLACEAU PRIMAIREÀ l’enseignement primaire, les résultats<strong>de</strong> notre enquête montrent quela plupart <strong>de</strong>s futurs enseignantsont la possibilité d’emmener leursélèves dans une salle où l’on r<strong>et</strong>rouveplusieurs ordinateurs. De surcroît,près <strong>de</strong> 30 % <strong>de</strong>s classes sont équipéesd’ordinateurs (le nombred’appareils varie <strong>de</strong> 1 à 7). C<strong>et</strong>tecombinaison <strong>de</strong>s moyens – un laboratoireinformatique <strong>et</strong> quelquesordinateurs dans la classe – laisseentrevoir plusieurs possibilités pourl’intégration pédagogique <strong>de</strong>s TICpar les futurs enseignants <strong>et</strong> enseignantes<strong>du</strong> primaire. Les possibilitéssont donc là. Il faut cependant<strong>DOSSIER</strong>PÉDAGOGIQUE 47


<strong>DOSSIER</strong>s’assurer que la formation <strong>de</strong> cesenseignants leur perm<strong>et</strong>te d’enbénéficier pleinement.QUATRE ANNÉES POURAPPRENDRE À CRÉERUNE PAGE WEB?Les résultats <strong>de</strong> notre enquête ontmis en évi<strong>de</strong>nce que les futurs enseignants<strong>et</strong> enseignantes maîtrisent engénéral très bien le traitement <strong>de</strong>texte après quatre années <strong>de</strong> formationà l’université. En ce qui a traitaux logiciels <strong>de</strong> présentation, onremarque toutefois que moins <strong>de</strong>1% se considèrent experts. Quant àla création <strong>de</strong> pages Web, c’est unehabil<strong>et</strong>é qui ne semble aucunementmaîtrisée par la majeure partie <strong>de</strong>srépondants. Plusieurs soulignerontque c’est un résultat « normal » <strong>et</strong>que les enseignants n’ont pas àmaîtriser les outils technologiquescomplexes pour intégrer les TIC enclasse. C<strong>et</strong>te affirmation est toutà fait sensée. Mais, <strong>de</strong> nos jours,la création <strong>de</strong> pages Web fait-elleencore partie <strong>de</strong>s technologies avancées<strong>et</strong> complexes? Avec quelque550 milliards <strong>de</strong> documents surIntern<strong>et</strong> <strong>et</strong> plus <strong>de</strong> 7,5 millions <strong>de</strong>nouvelles pages Web créées chaquejour (Varian <strong>et</strong> Lyman, 2002), il estdifficile <strong>de</strong> concevoir la création <strong>de</strong>pages Web comme une habil<strong>et</strong>étechnique avancée. Surtout quedans certaines formations, il a étédémontré qu’une page Web peutêtre créée en quelques minutes.Comment se fait-il donc que, aprèsquatre années <strong>de</strong> formation à l’université,si peu <strong>de</strong> futurs enseignantsse sentent en mesure <strong>de</strong> créer unepage Web ou <strong>de</strong> déposer <strong>de</strong>s documentssur Intern<strong>et</strong>? On dit que leréseau Intern<strong>et</strong> débor<strong>de</strong>ra d’icipeu, car il n’a <strong>de</strong> place que pour4,7 milliards d’adresses différentes(c’est d’ailleurs pour c<strong>et</strong>te raisonqu’un nouveau système sera bientôtmis en place, le IPv6, qui acceptera340 milliards <strong>de</strong> milliards <strong>de</strong> milliards<strong>de</strong> milliards d’adresses 7 ).Pourquoi les enseignantes <strong>et</strong> lesenseignants nouvellement formésne pourraient-ils pas participer à ladiffusion d’informations sur Intern<strong>et</strong>?C’est pourtant une <strong>de</strong>s fonctions<strong>de</strong>s TIC mise en avant dansle Programme <strong>de</strong> formation <strong>de</strong>l’école québécoise, puisqu’il estclairement indiqué que les TIC« constituent non seulement <strong>de</strong>smoyens <strong>de</strong> consultation <strong>de</strong> sourcesdocumentaires, mais aussi <strong>de</strong>smoyens <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ction » (MEQ,2001b, p. 10). Comment concevoirla « pro<strong>du</strong>ction » à l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong>s TIC sil’on n’est pas en mesure <strong>de</strong> créer<strong>de</strong>s pages Web, une compétencejugée <strong>de</strong> plus en plus fondamentale?FAUT-IL RÉAJUSTER LAFORMATION INITIALE DESENSEIGNANTS RELATIVEMENTÀLACOMPÉTENCE 8 8 ?Même si certains résultats <strong>de</strong> notreenquête peuvent être interprétés <strong>de</strong>diverses façons, un élément sembledifficile à expliquer : comment sefait-il que près <strong>de</strong> la moitié <strong>de</strong>sfuturs enseignants <strong>et</strong> enseignantesindiquent ne pas avoir utilisé les TIClors <strong>de</strong> leur <strong>de</strong>rnier stage, alors qu<strong>et</strong>outes les écoles <strong>du</strong> Québec sontéquipées <strong>de</strong> laboratoires d’informatique<strong>et</strong> que toutes sont branchéesà Intern<strong>et</strong> <strong>de</strong>puis 1999 9 ? N’est-cepas là un constat étrange pour unesociété qui figure parmi les plusbranchées <strong>de</strong> la planète? Commentpeut-on présumer que la Compétence8 sera maîtrisée par les nouveauxdiplômés en enseignement si,d’une part, les universités diminuent(ou diluent) les formations TIC <strong>et</strong>,d’autre part, plus <strong>de</strong> 50 % <strong>de</strong>s enseignantsen formation n’ont pas l’occasiond’utiliser les TIC lors <strong>de</strong>sstages? Est-ce là vraiment la « formationintégrée <strong>et</strong> ancrée dans<strong>de</strong>s lieux <strong>de</strong> pratique » (MEQ,DIRECTION DE LA FORMATION INI-TIALE DU PERSONNEL ENSEIGNANT,2001, p. 25) suggérée par le ministère<strong>de</strong> l’É<strong>du</strong>cation dans sondocument d’orientation pour laformation à l’enseignement? Avantque la situation ne s’aggrave, ilsemble donc urgent <strong>de</strong> veiller à ceque les futurs enseignants <strong>et</strong> enseignantesreçoivent une formation àl’intégration <strong>de</strong>s TIC qui leur perm<strong>et</strong>te<strong>de</strong> développer les compétencesvisées par le ministère <strong>de</strong>l’É<strong>du</strong>cation. Et au-<strong>de</strong>là d’une juxtaposition<strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> formation,ce qu’il faut plutôt viser, c’estune sorte d’alternance intégrative(Malglaive, 1994) qui « perm<strong>et</strong>d’articuler ensemble, dans lemême temps <strong>et</strong> non dans <strong>de</strong>sprocessus <strong>de</strong> formation séparés,la formation aux savoirs <strong>et</strong> la formationaux savoir-faire dans lecontexte réel <strong>de</strong> l’action » (MEQ,DIRECTION DE LA FORMATION INI-TIALE DU PERSONNEL ENSEIGNANT,2001, p. 26).La <strong>de</strong>rnière étu<strong>de</strong> <strong>du</strong> CEFRIO 10montre que plus <strong>de</strong> 99 % <strong>de</strong>s jeunes<strong>de</strong> 12 à 17 ans ont déjà utiliséIntern<strong>et</strong>. <strong>Dans</strong> un mon<strong>de</strong> où lesjeunes – ceux <strong>de</strong>s écoles primaires<strong>et</strong> secondaires – vivent à l’heure <strong>de</strong>stechnologies <strong>et</strong> où Intern<strong>et</strong> <strong>de</strong>vientpour plusieurs la première sourced’accès à la connaissance, la formation<strong>de</strong>s futurs enseignants <strong>et</strong> enseignantesaux usages pédagogiques<strong>de</strong>s TIC nous semble <strong>de</strong>s plus importantes.De plus, alors que pendantplusieurs années nous noussommes opposés aux formationstrop technologiques à l’université,nous constatons aujourd’hui, enparticulier considérant les résultats<strong>de</strong> l’enquête que nous avons menée,qu’elles ont peut-être encore leurplace (avec évi<strong>de</strong>mment quelquesaménagements).POURQUOI UNE FORMATIONTECHNOPÉDAGOGIQUE?Pourquoi est-il important <strong>de</strong> formerles futurs enseignants <strong>et</strong> enseignantesrelativement aux TIC, maisaussi en ce qui a trait aux usagespédagogiques <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>rnières?Premièrement, cela leur perm<strong>et</strong>tra<strong>de</strong> mieux enseigner tout en tenantcompte <strong>de</strong>s réalités <strong>de</strong> la société.Deuxièmement, cela perm<strong>et</strong>traaux jeunes à qui ils enseignent <strong>de</strong>mieux apprendre.Troisièmement, l’utilisation <strong>de</strong>sTIC par leurs maîtres <strong>de</strong>vrait insufflerune motivation scolaire accrueaux élèves.Quatrièmement, il semble important,comme le souligne le ministère<strong>de</strong> l’É<strong>du</strong>cation <strong>du</strong> Québec,d’amener les jeunes à développerun esprit critique à l’égard <strong>de</strong>s technologies<strong>et</strong> <strong>de</strong> leurs usages. Et un<strong>et</strong>elle chose ne semble possible quesi les futurs enseignants <strong>et</strong> enseignantesmaîtrisent à la fois les TIC,<strong>et</strong> leurs usages en classe.Cinquièmement, les enseignantes<strong>et</strong> les enseignants doivent être enmesure <strong>de</strong> faire face à la mutation<strong>du</strong> rapport au savoir qui s’est installéechez les jeunes. Le livre <strong>et</strong> l’enseignantne sont plus les premièressources d’accès à la connaissance :c’est à Intern<strong>et</strong> que revient c<strong>et</strong> honneur.Mais ce n’est pas un mal ensoi, au contraire, <strong>et</strong> ce, même siplusieurs s’inquiètent <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong>« désinformation » que l’on observesur Intern<strong>et</strong>. Les informations contradictoiresexistent <strong>de</strong>puis fortlongtemps <strong>et</strong> elles ne font que per<strong>du</strong>reravec Intern<strong>et</strong>. La découverte<strong>de</strong> l’Amérique n’a-t-elle pas été – àtort ou non – attribuée à AmerigoVespucci, dans un ouvrage impriméà 1 000 exemplaires au début <strong>du</strong>XVI e siècle avant d’être finalementconcédée à Christophe Colomb? Lesexemples sont nombreux.Sixièmement, si on se réfère autexte signé par Marie-FranceLaberge, Communiquer à l’heured’Intern<strong>et</strong>, dans le numéro 131 <strong>de</strong>Vie pédagogique, il semble importantque les enseignantes <strong>et</strong> lesenseignants nouvellement formésVIE 48 Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004Photo : Denis Garon


puissent amener les élèves à communiquer<strong>de</strong> façon efficace en utilisantles technologies. Mais commentréussir un tel exploit si les enseignantseux-mêmes ne maîtrisentpas les outils <strong>de</strong> communicationemployés <strong>de</strong> façon quotidienne parun nombre <strong>de</strong> plus en plus important<strong>de</strong> jeunes?Septièmement, une meilleure formationtechnopédagogique ouvriraaux enseignants <strong>et</strong> aux enseignantesqui viennent d’entrer en fonction <strong>de</strong>nombreuses occasions <strong>de</strong> partage,par l’adhésion à <strong>de</strong>s réseaux dontplusieurs visent à faciliter l’insertionprofessionnelle.Huitièmement, il semble que lafaible compétence en matière <strong>de</strong>TIC <strong>de</strong>s personnes qui ont participéà notre enquête indique que les universitésqui ont r<strong>et</strong>ranché <strong>de</strong> leurformation initiale <strong>de</strong>s maîtres uncours portant sur les TIC l’ont peutêtrefait <strong>de</strong> façon trop hâtive, sansen mesurer pleinement les conséquences.Neuvièmement, enfin (<strong>et</strong> ce nesont pas tous les acteurs <strong>de</strong> l’é<strong>du</strong>cationqui partagent c<strong>et</strong> avis), lestechnologies ne remplaceront jamaisla nourriture intellectuelle, affective<strong>et</strong> sociale que les enseignantes <strong>et</strong> lesenseignants peuvent procurer àleurs élèves : il est donc importantqu’ils soient à la fois conscients <strong>de</strong>sinnombrables avantages découlant<strong>de</strong> l’intégration <strong>de</strong>s TIC, tout enétant informés <strong>de</strong>s limites <strong>de</strong> ces<strong>de</strong>rnières ainsi que <strong>de</strong>s écueils quisont parfois inhérents à leur utilisation.M. Thierry Karsenti est titulaire<strong>de</strong> la Chaire <strong>de</strong> recherche <strong>du</strong>Canada sur les TIC <strong>et</strong> l’é<strong>du</strong>cation<strong>et</strong> chercheur au Centre<strong>de</strong> recherche interuniversitairesur la formation <strong>du</strong> personnelenseignant <strong>de</strong> la Faculté <strong>de</strong>ssciences <strong>de</strong> l’é<strong>du</strong>cation <strong>de</strong>l’Université <strong>de</strong> Montréal.Photo : Denis GaronRéférences bibliographiquesBIBEAU, R. L’élève rapaillé, [En ligne], 1999,[http://ntic.org/gui<strong>de</strong>r/textes/div/rapail2.htm].DEPOVER, C. <strong>et</strong> A. STREBELLE. « Fon<strong>de</strong>mentsd’un modèle d’intégration <strong>de</strong>s activités liéesaux nouvelles technologies <strong>de</strong> l’informationdans les pratiques é<strong>du</strong>catives », dans Baron,G.-L. <strong>et</strong> É. Bruillard, Informatique <strong>et</strong> é<strong>du</strong>cation: regards cognitifs, pédagogiques <strong>et</strong>sociaux, Paris : INRP, 1996.KARSENTI, T., L. SAVOIE-ZAJC <strong>et</strong> F. LAROSE. ,É<strong>du</strong>cation <strong>et</strong> Francophonie, n o 29, vol. 1,(Revue électronique : www.acelf.ca/revue/in<strong>de</strong>x.html), 2001.LABERGE, M.-F. « Communiquer à l’heured’Intern<strong>et</strong> », Vie pédagogique, n o 131, avrilmai2004, p.16-21.LEMIEUX, P. « Réflexions libres sur l’État <strong>et</strong> laculture », dans Sauvageau, F., Les politiquesculturelles à l’épreuve. La culture entrel’État <strong>et</strong> le marché, Québec, Institut québécois<strong>de</strong> recherche sur la culture, 1992,p. 151-169.MALGLAIVE, G. « Alternance <strong>et</strong> compétences »,Cahiers pédagogiques, n o 1, 1994, p. 26-28.MINISTÈRE DE L’ÉDUCATION DU QUÉBEC.Programme <strong>de</strong> formation <strong>de</strong> l’école québécoise.É<strong>du</strong>cation préscolaire <strong>et</strong> enseignementprimaire, Québec, 2001.MINISTÈRE DE L’ÉDUCATION, DIRECTIONDE LA FORMATION INITIALE DU PERSONNELENSEIGNANT. La formation à l’enseignement.Les orientations, les compétencesprofessionnelles, Québec, 2001.MINISTÈRE DE L’ÉDUCATION DU QUÉBEC.Les technologies <strong>de</strong> l’information <strong>et</strong> <strong>de</strong> lacommunication en é<strong>du</strong>cation. Plan d’intervention,enseignement universitaire,Québec, 1997.OCDE. Les technologies <strong>de</strong> l’information <strong>et</strong>l’avenir <strong>de</strong> l’enseignement post-secondaire,Amsterdam, Presses <strong>de</strong> l’OCDE, 1996.OCDE. OECD survey of upper secondaryschools, Amsterdam, Presses <strong>de</strong> l’OCDE,2004.Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004UNGERLEIDER, C. « Information andCommunication Technologies in Elementaryand Secondary E<strong>du</strong>cation : A State of the ArtReview », dans Actes <strong>du</strong> Colloque 2002 <strong>du</strong>Programme pancanadien <strong>de</strong> rechercheen é<strong>du</strong>cation (PPRE) : La technologie <strong>de</strong>l’information <strong>et</strong> l’apprentissage, Toronto,Conseil <strong>de</strong>s ministres <strong>de</strong> l’É<strong>du</strong>cation <strong>du</strong>Canada, 2002.VARIAN, H. <strong>et</strong> P. LYMAN). How much information?Berkely, CA, University of Californiain Berkeley, 2002.1. Le 4 juill<strong>et</strong> 1983, le ministre <strong>de</strong> l’É<strong>du</strong>cation,M. Camille Laurin, lançait un planpour l’utilisation pédagogique <strong>de</strong> l’ordinateur.De son côté, le ministre GilbertPaqu<strong>et</strong>te, responsable <strong>du</strong> nouveau ministère<strong>de</strong> la Science <strong>et</strong> <strong>de</strong> la Technologie,présentait la même année un proj<strong>et</strong> quivisait à équiper les écoles <strong>du</strong> Québec <strong>de</strong>quelque 70 000 ordinateurs.2. MINISTÈRE DE L’ÉDUCATION DU QUÉBEC.Allocution <strong>du</strong> ministre Legault, [Enligne], 1999, [http://www.meq.gouv.qc.ca/CPRESS/cprss99/c990614.htm].3. Le portail <strong>de</strong>s NTIC : [http://ntic.org/gui<strong>de</strong>r/textes/div/rapail2.htm].4. [http://www.recit.qc.ca]5. Il s’agit là <strong>de</strong> la plus fréquente utilisation<strong>de</strong>s TIC par les formateurs à l’université.6. C<strong>et</strong>te enquête a été réalisée grâce à unesubvention <strong>du</strong> Conseil <strong>de</strong> recherche ensciences humaines <strong>du</strong> Canada (CRSH).7. [http://www.commentcamarche.n<strong>et</strong>/intern<strong>et</strong>/ipv6.php3]8. Intégrer les technologies <strong>de</strong> l’information<strong>et</strong> <strong>de</strong>s communications aux fins <strong>de</strong>préparation <strong>et</strong> <strong>de</strong> pilotage d’activitésd’enseignement-apprentissage, <strong>de</strong> gestion<strong>de</strong> l’enseignement <strong>et</strong> <strong>de</strong> développementprofessionnel.9. Source : Allocution <strong>du</strong> ministre Legault :[http://www.meq.gouv.qc.ca/CPRESS/cprss99/c990614.htm]10. [http://www.cefrio.qc.ca]<strong>DOSSIER</strong>CE QUE L’ON ENTEND SUR LES TICQuelques idées reçuespar Clau<strong>de</strong> Séguin«Les TIC, c’est commele téléphone, ce n’estqu’un outil, <strong>et</strong> l’on n’apas à s’occuper <strong>de</strong> ça dans lesécoles. »Il est vrai que les technologies <strong>de</strong>l’information <strong>et</strong> <strong>de</strong> la communication(TIC) sont <strong>de</strong>s outils, maisquels outils! L’arrivée <strong>de</strong>s TIC estcomparable à d’autres innovations :l’imprimé à la Renaissance, leschiffres arabes <strong>et</strong> le zéro au MoyenÂge ou la révolution <strong>de</strong> l’écriturealphabétique 1 300 ans avant Jésus-Christ. En eff<strong>et</strong>, l’accès planétaire <strong>et</strong>instantané à l’information est bienun changement majeur… pourceux qui en tirent parti. La simplicité<strong>de</strong> l’outil TIC cache le fait queson usage est intimement lié à <strong>de</strong>spratiques disciplinaires <strong>et</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>un apprentissage plus sophistiquéque celui <strong>du</strong> téléphone : si chercherdans Google semble si simple,trouver ce que l’on cherche estune autre histoire. Si certains élèvesen sont arrivés à une bonne maîtrisepar leur seule pratique, il nefaut pas croire que c’est le cas pourla totalité <strong>de</strong>s élèves.Cependant, le personnel enseignantn’est pas interpellé que par l’acquisition<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te compétence. Il aaussi à se préoccuper <strong>de</strong>s questionsd’éthique dans ce domaine (traiter<strong>du</strong> droit d’auteur, <strong>du</strong> plagiat, <strong>de</strong>sméfaits en ligne ou sur le réseau),<strong>de</strong>s questions <strong>de</strong> sens critique (caron trouve <strong>du</strong> pire <strong>et</strong> <strong>du</strong> meilleur surla toile mondiale) <strong>et</strong> <strong>de</strong>s questions<strong>de</strong> sécurité <strong>et</strong> <strong>de</strong> protection <strong>de</strong> la vieprivée <strong>de</strong>s jeunes lorsqu’ils utilisentIntern<strong>et</strong>.L’enseignant ne peut pas ignorer àquoi les élèves ont accès <strong>de</strong> nosjours ni se fermer à leurs questionsou leurs préoccupations : les TICfont partie désormais <strong>de</strong> l’universculturel <strong>de</strong>s jeunes. On lira à cesuj<strong>et</strong> l’enquête NETados <strong>du</strong> Centrefrancophone d’informatisation <strong>de</strong>sorganisations(CEFRIO), qui fait unportrait <strong>de</strong>s 12-17 ans sur Intern<strong>et</strong>en 2003 : www.cefrio.qc.ca/rapports/N<strong>et</strong>_Ados_2003.pdf (la version 2004<strong>de</strong>vrait être publiée sous peu).« Grâce aux TIC, j’ai trouvé unefaçon <strong>de</strong> valoriser les garçons<strong>de</strong> mon groupe : je fais toujoursappel à un garçon pourme dépanner ou dépanner lesautres. »On comprend la préoccupation <strong>de</strong>valoriser tous les élèves d’uneclasse en leur proposant <strong>de</strong>s tâchesoù ils réussissent, mais il ne fautpas associer les TIC à un univers« garçon », car les filles autant quePÉDAGOGIQUE 49


<strong>DOSSIER</strong>les garçons doivent s’en servir.Attention aux messages qui viennentrenforcer les stéréotypes sociaux.Bien que l’écart entre l’accès auxTIC chez les garçons <strong>et</strong> les filles soitpresque nul, les comportementsmais surtout les types d’utilisation<strong>et</strong> les attitu<strong>de</strong>s diffèrent. Pourquoiles filles ne seraient-elles pas aussihabiles que les garçons à se servir<strong>de</strong> l’ordinateur qu’à dépanner lesutilisateurs, voire l’ordinateur luimême?Il y a vingt ans, autant <strong>de</strong>garçons que <strong>de</strong> filles se <strong>de</strong>stinaientà la programmation, mais le ratioest aujourd’hui <strong>de</strong> 10 pour 1 :<strong>de</strong>vinez en faveur <strong>de</strong> qui? 1«Pour que 100 p. 100 <strong>de</strong>s élèvessortent <strong>de</strong>s écoles avec unebonne compétence en matière<strong>de</strong> TIC, il faut que 100 p. 100<strong>du</strong> personnel enseignant s’enserve en classe. »Bien que le Programme <strong>de</strong> formation<strong>de</strong> l’école québécoise fassemaintenant une place significativeaux TIC <strong>et</strong> propose <strong>de</strong> les intégrer àla classe, tous les enseignants nesont pas <strong>de</strong>venus subitement à l’aiseavec les TIC <strong>et</strong> en mesure d’en tirerparti sur le plan pédagogique.Il n’est pas nécessaire d’avoir tout<strong>de</strong> suite une utilisation <strong>de</strong>s TIC dans100 p. 100 <strong>de</strong>s classes pour que100 p. 100 <strong>de</strong>s élèves sachent s’enservir pour apprendre. <strong>Dans</strong> laplanification <strong>de</strong> l’enseignement,chaque école peut se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r si,à chaque cycle, chaque élève serasollicité, même si cela n’est paspossible chaque année.Le soutien aussi est important.Plusieurs écoles ont d’ailleurs misen place un service professionneld’ai<strong>de</strong> aux enseignants : certainsd’entre eux sont libérés <strong>de</strong> leurtâche pour apporter ce soutien.D’autres écoles ont mis sur pied <strong>de</strong>sbriga<strong>de</strong>s d’élèves experts en TIC(BEETIC) pour soutenir le personnelenseignant : la gran<strong>de</strong> majorité<strong>de</strong>s problèmes d’utilisation sont eneff<strong>et</strong> <strong>de</strong>s difficultés mineures que<strong>de</strong>s élèves peuvent régler. Ainsi, dès1996, une p<strong>et</strong>ite fille <strong>de</strong> 5 ans étaitl’experte <strong>de</strong> l’é<strong>du</strong>cation préscolaire :elle savait m<strong>et</strong>tre l’ordinateur soustension, manipuler avec soin lescédéroms, lancer les applications,naviguer dans un récit animé <strong>et</strong>l’enseigner aux autres élèves. Huitannées plus tard, ces savoir-fairesont courants dans les classes <strong>et</strong>peuvent être mis à profit. La valeurn’attend pas le nombre <strong>de</strong>s années!«Avec les TIC, on a un accèsglobal, planétaire <strong>et</strong> instantanéà l’information. »Tout n’est pas rose sur la gran<strong>de</strong>toile. L’information n’est pas aussiabondante en français qu’en anglais.C’est souvent un fouillis, <strong>et</strong> lesdonnées sont partiales, partielles,voire éclatées. Comme tout un chacunpeut publier sur la gran<strong>de</strong> toilemondiale, cela signifie qu’il y abeaucoup d’informations poubelle.Les utilisateurs doivent aussi faire<strong>de</strong>s efforts <strong>et</strong> consacrer <strong>de</strong> l’énergiecognitive à apprendre <strong>de</strong> façon continuelle<strong>et</strong> à se débrouiller dans <strong>de</strong>senvironnements virtuels qui changenttrop souvent.Du côté <strong>de</strong>s aspects positifs <strong>et</strong>,comme on dit, « incontournables »,notons que tout s’améliore <strong>et</strong> <strong>de</strong>vientplus fiable, plus rapi<strong>de</strong> <strong>et</strong> que lecoût d’acquisition <strong>de</strong> ces technologiesbaisse toujours. La quantité <strong>de</strong>contenus numérisés augmente ennombre, mais elle se diversifie aussi :le Web <strong>de</strong>vient la bibliothèque numérique<strong>et</strong> la médiathèque <strong>de</strong> laplanète.Si les livres se ven<strong>de</strong>nt toujours aussibien, n’est-ce pas parce qu’ilscorrespon<strong>de</strong>nt à un besoin? Toutefois,ceux qui utilisent beaucoup leWeb pour trouver <strong>de</strong> l’informationne sont-ils pas ceux qui lisent beaucoup<strong>de</strong> livres?« Les élèves ne lisent plus, ils nefont que jouer à l’ordinateur. »L’enquête NETados 2004 <strong>du</strong> CEFRIOdémontre, qu’au contraire, les plusfervents utilisateurs d’Intern<strong>et</strong> (dixheures par semaine ou plus) ontune vie culturelle fort active : ilssont <strong>de</strong> plus grands cinéphiles, <strong>de</strong>plus grands amateurs <strong>de</strong> théâtre,<strong>de</strong> plus grands a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> spectacles<strong>et</strong> <strong>de</strong> concerts, <strong>de</strong> plus grandslecteurs <strong>de</strong> journaux <strong>et</strong> <strong>de</strong> magazinesainsi que <strong>de</strong> plus grands amateurs<strong>de</strong> téléphone <strong>et</strong> <strong>de</strong> télévisionque ceux qui utilisent Intern<strong>et</strong> troisheures ou moins par semaine.D’autre part, l’intensité <strong>de</strong> l’usaged’Intern<strong>et</strong> ne paraît avoir aucuneinfluence sur la fréquentation <strong>de</strong>sbibliothèques scolaires <strong>et</strong> municipales.«Tous les emplois seront touchéspar les TIC. »Depuis quelques années, la trèsgran<strong>de</strong> majorité <strong>de</strong>s emplois professionnels,voire les emplois <strong>de</strong> cadre,nécessitent sinon une maîtrise <strong>de</strong>ces technologies, au moins une trèsbonne compréhension. Il <strong>de</strong>meurequ’un certain nombre d’emploispourraient bien ne jamais êtr<strong>et</strong>ouchés par les TIC, ou l’être <strong>de</strong>façon tout à fait marginale <strong>et</strong> sur unmo<strong>de</strong> répétitif : plusieurs emploisdans les services, certains p<strong>et</strong>itscommerces, par exemple. Cependant,tous les citoyens seronttouchés dans la mesure où l’onaura un gouvernement en ligne. Eneff<strong>et</strong>, qu’est-ce qu’un gouvernementen ligne si les citoyens, eux, ne lesont pas? Des programmes <strong>du</strong> gouvernement<strong>du</strong> Québec comme Famillesbranchées (terminé en 2003)<strong>et</strong> Villages branchés [http://www.risq.qc.ca/reseau/villages/in<strong>de</strong>x.php]assurent l’accès futur au gouvernementen ligne.Il ne faut pas oublier que l’apprentissage<strong>de</strong> la lecture reste un préalableà l’utilisation <strong>de</strong>s TIC : elleest nécessaire à ces activités <strong>et</strong> serévèle toujours indispensable pouragir en citoyen avisé. Sans compterqu’il faut être familiarisé avec la lecturedans le contexte <strong>de</strong> l’informationprésentée en ligne. <strong>Dans</strong> ce casprécis, tous les élèves, à titre <strong>de</strong>futurs citoyens, seront touchés parles TIC.« Je ne peux pas exiger <strong>de</strong>sélèves qu’ils utilisent Intern<strong>et</strong><strong>du</strong>rant mon temps <strong>de</strong> classe :il n’y a pas assez d’appareilsà leur disposition. Impossiblepar ailleurs <strong>de</strong> l’imposer en<strong>de</strong>hors <strong>de</strong> la classe, car ceserait injuste pour les élèvesqui n’y ont pas accès. »Même s’il n’y a pas suffisammentd’ordinateurs à l’école, il n’en restepas moins que les élèves y ont accès àla maison, ainsi qu’à la bibliothèquescolaire, au centre communautaire,à la bibliothèque municipale ouencore chez leurs amis <strong>et</strong> amies.Les chiffres récents <strong>de</strong> l’enquêteNETados 2004 <strong>du</strong> CEFRIO auprès<strong>de</strong> 1 043 foyers indiquent qu’auQuébec :• 99 p. 100 <strong>de</strong>s adolescents ontaccédé à Intern<strong>et</strong> <strong>du</strong>rant les sixmois précédant l’enquête;• 88 p. 100 <strong>de</strong>s adolescents ontaccédé à Intern<strong>et</strong> <strong>du</strong>rant les sept<strong>de</strong>rniers jours avant l’enquête;• 83 p. 100 sont branchés à lamaison;• 65 p. 100 <strong>de</strong> ceux qui sontbranchés à la maison, le sont àhaute vitesse <strong>et</strong> 54 p. 100 <strong>de</strong> l’ensemble<strong>de</strong>s élèves sont branchés àhaute vitesse, ce qui est unebonne majorité;• 35 p. 100 ont utilisé les bibliothèquesmunicipales pour accé<strong>de</strong>rà Intern<strong>et</strong>;• 97,5 p. 100 se déclarent à l’aisepour faire une recherche surIntern<strong>et</strong> (Google).Il y a <strong>de</strong>ux ans, un groupe d’adolescentsaméricains interrogés sur leuremploi <strong>de</strong>s TIC à l’école déploraientle peu d’usage que leurs enseignantsen faisaient <strong>et</strong> souhaitaientavoir toutes les semaines <strong>de</strong>s défis<strong>de</strong> recherche d’information surIntern<strong>et</strong>. N’en sommes-nous pas aumême point présentement?M. Clau<strong>de</strong> Séguin travaille à laDirection <strong>de</strong>s ressources didactiques<strong>du</strong> ministère <strong>de</strong> l’É<strong>du</strong>cation.1. Dix fois plus <strong>de</strong> garçons que <strong>de</strong> fillesse sont inscrits au programme Informatique420 en 2001 <strong>et</strong> c<strong>et</strong>te proportion esten continuelle croissance <strong>de</strong>puis 1984.La même chose s’observe auprès <strong>de</strong>s effectifsétudiants, soit le total <strong>de</strong>s élèves quisuivent effectivement <strong>de</strong>s cours d’informatiqueen 2003, le ratio est <strong>de</strong> 10,43 garçonspour une fille. Les filles semblaientse r<strong>et</strong>rouver plus nombreuses en Techniquesd’intégration multimédia 582.A1,mais dans l’effectif étudiant, la proportion<strong>de</strong> garçon augmente rapi<strong>de</strong>ment : 2.3 garçonsen 2001, 2,8 en 2002 <strong>et</strong> 3,37 pourune fille, en 2003.VIE 50 Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004FIN


Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004<strong>Dans</strong> la façon actuelle <strong>de</strong>faire l’école, avoir <strong>de</strong>s élèvesd’âges multiples dans saclasse est inconcevable, à moinsque l’on ne puisse faire autrement.En eff<strong>et</strong>, selon c<strong>et</strong>te conception <strong>de</strong>l’école, on s’attend plutôt à avoir<strong>de</strong>s groupes d’élèves les plus homogènespossible, on se concentre surles contenus d’apprentissage plutôtque sur le développement <strong>de</strong> compétences<strong>et</strong> l’on enseigne encore« en années » (alors que ces <strong>de</strong>rnièresn’existent plus, ni dans leProgramme <strong>de</strong> formation, ni dansle régime pédagogique, ni dansl’organisation scolaire, <strong>et</strong> ce, <strong>de</strong>puis1997). Toutefois, lorsqu’il est impossible<strong>de</strong> faire autrement, onforme, bien à regr<strong>et</strong>, ce que l’onappelle encore <strong>de</strong>s « classes multiprogrammes» 1 , bien qu’il n’existemaintenant qu’un seul Programme<strong>de</strong> formation.L’optique dans laquelle s’inscrit l<strong>et</strong>exte qui suit est radicalement différente.Il présente nos témoignages :ceux <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux enseignantes <strong>de</strong> premiercycle, accompagnées <strong>du</strong> conseillerpédagogique <strong>de</strong> leur école,qui ont choisi d’enseigner dans <strong>de</strong>sclasses multiâges à partir <strong>de</strong> l’annéescolaire 2000-2001 <strong>et</strong> qui ont maintenuce choix <strong>de</strong>puis. Pour choisird’enseigner <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te manière, nousavons dû changer notre façon <strong>de</strong>voir l’apprentissage <strong>et</strong> l’enseignement<strong>et</strong> la rendre plus conforme àce qui est connu <strong>de</strong> la façon dontl’être humain apprend 2 . Pour choisird’enseigner selon ce modèle, nousavons cru <strong>et</strong> croyons toujours, <strong>de</strong>fait, que chaque élève apprenddifféremment en construisant gra<strong>du</strong>ellement,à sa manière, le mon<strong>de</strong>qui l’entoure. Nous estimons aussique l’apprentissage est un processuscontinu, progressif plutôtqu’une séquence, qu’une accumulationou qu’une série d’étapes.Nous affirmons enfin que la diversitéest une réalité dont il faut tenircompte, mais aussi une valeur àpromouvoir <strong>et</strong> un gage <strong>de</strong> richesse,LA CLASSE MULTIÂGE PAR CHOIXpar Claudine Lajeunesse, Mylaine Fournier <strong>et</strong> Jean Archambaultdans une communauté d’apprentissage.Ces changements dans lafaçon <strong>de</strong> concevoir l’apprentissage<strong>et</strong> l’enseignement sont à la base <strong>de</strong>ceux qui sont mis en place à l’heureactuelle dans l’organisation scolaire.DES CHANGEMENTS ÀL’ORGANISATION SCOLAIREEn 1997, l’énoncé <strong>de</strong> politiqueé<strong>du</strong>cative, L’école, tout un programme,indiquait une nouvelleforme d’organisation <strong>de</strong> l’enseignementà l’école. Dorénavant,« l’école primaire sera découpéeen trois cycles <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux anschacun <strong>de</strong> façon à : échelonnerl’enseignement selon <strong>de</strong>s étapespluriannuelles qui correspon<strong>de</strong>ntmieux à la psychologie <strong>de</strong> l’enfant<strong>et</strong> aux sta<strong>de</strong>s <strong>de</strong> son développement».C’est à partir <strong>de</strong> l’appropriation <strong>de</strong>c<strong>et</strong> énoncé <strong>de</strong> politique par l’équipe<strong>de</strong> l’école Bienville <strong>et</strong> <strong>de</strong> la compréhension<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te nouvelle organisationque se sont formées <strong>de</strong>séquipes <strong>de</strong> cycle. Chacune a alorsamorcé <strong>de</strong>s réflexions sur lesmo<strong>de</strong>s d’organisation <strong>de</strong>s groupesd’élèves. En eff<strong>et</strong>, puisque l’écoles’organise en cycles <strong>et</strong> que le Programme<strong>de</strong> formation est lui-mêmeaménagé ainsi, nous avons jugé bon<strong>de</strong> rem<strong>et</strong>tre en question les regroupementstraditionnels d’élèves <strong>et</strong>l’organisation <strong>de</strong>s groupes. Cesréflexions <strong>de</strong>vaient aboutir à laprise <strong>de</strong> décision, par les équipes<strong>de</strong> cycle, en rapport avec l’organisation<strong>de</strong>s groupes d’élèves.LES AVANTAGES ET LESINCONVÉNIENTS DES TYPESDE REGROUPEMENT D’ÉLÈVESAu cours <strong>de</strong> l’année 1999-2000, lorsd’une rencontre <strong>de</strong> notre équipe <strong>de</strong>cycle (celle <strong>du</strong> premier cycle), nousavons analysé les choix <strong>de</strong> regroupementd’élèves qui s’offraient ànous :• l’enseignement « en années », soitla classe traditionnelle;•le bouclage (looping), aussiappelé « cycle d’apprentissagepluriannuel », c’est-à-dire le faitd’enseigner aux mêmes élèvespendant toute la <strong>du</strong>rée <strong>du</strong> cycle(<strong>de</strong>ux ans);•la classe multiâge, ce qui signifieavoir dans la même classe unnombre équivalent d’élèves <strong>de</strong>s<strong>de</strong>ux groupes d’âge (6-7 ans <strong>et</strong>7-8 ans).Lorsque nous avons dû m<strong>et</strong>tre enévi<strong>de</strong>nce les avantages <strong>et</strong> les inconvénients<strong>de</strong> chaque mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> regroupement,nous avons vite constatéque nous reconnaissions peu d’inconvénients,mais peu d’avantagesaussi, à continuer à enseigner selonle modèle traditionnel. Par contre,nous en trouvions beaucoup plus aubouclage <strong>et</strong> à la classe multiâge.Voici le résultat <strong>de</strong> notre réflexion.LE BOUCLAGEEnseigner aux mêmes élèves pendant<strong>de</strong>ux ans perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> gagner <strong>du</strong>temps au début <strong>de</strong> la secon<strong>de</strong> année<strong>du</strong> cycle, surtout en ce qui a trait àla gestion <strong>de</strong> la classe : les règles <strong>et</strong>le fonctionnement <strong>de</strong> la classe sontconnus <strong>et</strong> <strong>de</strong>s élèves <strong>et</strong> <strong>de</strong>s parents.Le bouclage perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> conserver <strong>et</strong>même <strong>de</strong> renforcer les liens affectifsentre les élèves mêmes ainsiqu’entre les élèves <strong>et</strong> nous. Lesparents nous connaissent <strong>et</strong> noussommes bien au courant <strong>de</strong>s forces<strong>et</strong> <strong>de</strong>s difficultés <strong>de</strong> nos élèves.LA CLASSE MULTIÂGELa classe multiâge a tous les avantages<strong>du</strong> bouclage parce qu’il s’agitbel <strong>et</strong> bien <strong>de</strong> ce type d’enseignement.En eff<strong>et</strong>, l’enseignante nemodifie presque pas son grouped’élèves pendant <strong>de</strong>ux ans. Chaqueannée, seulement la moitié <strong>du</strong>groupe passe au cycle suivant. Unavantage propre à la classe multiâgeest que, lors <strong>de</strong> chaque début d’année,la moitié <strong>du</strong> groupe est constituéed’« anciens » élèves, c’est-à-dired’élèves qui connaissent les règles<strong>et</strong> le fonctionnement <strong>de</strong> la classe <strong>et</strong>qui peuvent donc gui<strong>de</strong>r les nouveaux.Lors <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te rencontre <strong>de</strong> l’équipe<strong>de</strong> cycle, les discussions ont étéplutôt animées : certaines d’entrenous exprimaient leur intérêt pourla classe multiâge, d’autres soutenaientl’impossibilité <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre enœuvre c<strong>et</strong>te façon <strong>de</strong> faire dans unmilieu aussi défavorisé que celuidans lequel nous travaillons 3 , <strong>et</strong>surtout au premier cycle, alors queles élèves sont encore peu autonomes.Enfin, <strong>de</strong>s enseignantes ontaffirmé que la planification <strong>et</strong> l’encadrementd’une classe multiâgesont <strong>de</strong>s tâches très exigeantes <strong>et</strong>qu’il y aura toujours un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>uxprogrammes à la remorque <strong>de</strong>l’autre.POURQUOI AVOIR CHOISILA CLASSE MULTIÂGE?Nous sommes les <strong>de</strong>ux seulesenseignantes <strong>de</strong> l’équipe <strong>du</strong> premiercycle à avoir choisi une classemultiâge. Les autres ont préféré lebouclage. Le primaire étant maintenantorganisé par cycles <strong>de</strong> <strong>de</strong>uxans <strong>et</strong> l’enseignement <strong>de</strong>vant s’effectuerà partir d’un programmepar cycles, il n’existe donc plus <strong>de</strong>« coupure » entre les <strong>de</strong>ux années<strong>du</strong> cycle. Voilà pourquoi toutes lesenseignantes <strong>du</strong> cycle ont abandonnél’enseignement « en années ».D’autre part, recevoir au début <strong>du</strong>premier cycle vingt élèves qui neconnaissent pas le métier d’élève(c’est-à-dire travailler pour apprendre,faire les travaux <strong>de</strong>mandés,suivre les consignes, respecter lesrègles, <strong>et</strong>c.), c’est tout un défi! Déjà,dans les classes ordinaires, on trouve<strong>de</strong>s élèves fort différents les uns <strong>de</strong>sautres <strong>et</strong> qui ont <strong>de</strong>s compétencesdiverses. <strong>Dans</strong> les faits, les classesordinaires sont hétérogènes <strong>et</strong> lesenseignants y font déjà une forme<strong>de</strong> classe multiâge avec les élèvesfaibles <strong>et</strong> les élèves forts. Ces constatationsnous avaient con<strong>du</strong>ites àsouhaiter pouvoir différencier notrepédagogie. Nous utilisions déjà l’apprentissagepar les autres élèves <strong>et</strong>nous avions observé que l’autonomie<strong>de</strong>s élèves était favorisée parla place que nous leur laissions enPÉDAGOGIQUE 51


classe. En outre, nous souhaitionsque les jeunes réussissent mieux.Pour ce faire, nous voulions les voirplus motivés, plus engagés <strong>et</strong> plusactifs quant à leur apprentissage.Nous avons vérifié nos attentes <strong>et</strong>notre conception <strong>de</strong> la classe multiâgeen faisant la visite d’une classe<strong>de</strong> ce type au premier cycle d’uneécole innovatrice. C<strong>et</strong>te visite nous aaussi permis d’améliorer notrecompréhension <strong>de</strong> la façon dontl’élève apprend <strong>et</strong> <strong>du</strong> rôle que doitjouer l’enseignant pour faciliter c<strong>et</strong>apprentissage. La réflexion <strong>de</strong>vaitporter en même temps sur la conception<strong>de</strong> l’apprentissage <strong>et</strong> <strong>de</strong>l’enseignement <strong>et</strong> sur les mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong>regroupement <strong>de</strong>s élèves, particulièrementen ce qui a trait à laclasse multiâge. Voici à quoi c<strong>et</strong>teréflexion nous a menées :• voir tous les élèves plutôt que voirseulement <strong>de</strong>ux classes;• ne pas concevoir l’apprentissagepar classes;• connaître l’élève en tant qu’indivi<strong>du</strong>plutôt qu’avoir une vision <strong>de</strong><strong>de</strong>ux groupes;• utiliser un seul programme pourtous les élèves plutôt que <strong>de</strong>uxprogrammes (le Programme <strong>de</strong>formation résout en partie c<strong>et</strong>tedifficulté puisqu’il n’est plusélaboré selon <strong>de</strong>s années);• proposer nécessairement <strong>de</strong>s situationssignifiantes, concrètes <strong>et</strong>larges pour développer <strong>de</strong>s compétencesplutôt qu’une tâche uniquepour chaque classe.Ces réflexions <strong>et</strong> ces changements<strong>de</strong> pratiques nous ont con<strong>du</strong>ites àconclure que, dans le contexted’une conception qui suppose ladifférenciation pédagogique <strong>et</strong> dansune logique <strong>de</strong> développement<strong>de</strong> compétences dans <strong>de</strong>s cycles <strong>de</strong><strong>de</strong>ux ans, la classe traditionnelle(« en années ») <strong>et</strong> la classe où <strong>de</strong>uxprogrammes étaient enseignés concurremmentn’avaient plus <strong>de</strong> sens.Nous avons donc décidé <strong>de</strong> nousj<strong>et</strong>er à l’eau, sans nos collègues, <strong>et</strong>nous avons commencé la classemultiâge.COMMENCER LA CLASSEMULTIÂGENos débuts en classe multiâge n’ontpas été <strong>de</strong> tout repos. Avant mêmel’arrivée <strong>de</strong> nos élèves, nous nousétions penchées sur ce que nousvoulions vraiment que nos classes<strong>de</strong>viennent. Nous avions choisi untel fonctionnement parce qu’il étaiten accord avec nos valeurs : laclasse multiâge se voulait le lieu parexcellence où allaient se vivre lerespect <strong>de</strong>s différences, l’accroissement<strong>de</strong> l’autonomie <strong>de</strong>s élèves,l’entrai<strong>de</strong> <strong>et</strong> la solidarité. Commentprésenter ce nouveau fonctionnementaux élèves? L’éclatement<strong>de</strong>s différences qu’allait créer laclasse multiâge allait-il marginaliserquelques élèves? Comment briser lapensée « par années d’enseignement» déjà si soli<strong>de</strong>ment ancréechez les élèves <strong>du</strong> premier cycle<strong>et</strong> chez leurs parents? Les élèves<strong>de</strong> première année ne sont pas les« bébés » qu’il faut instruire, pas plusque les élèves <strong>de</strong> <strong>de</strong>uxième annéene sont les experts, supérieurs auxplus jeunes, qui déversent leursavoir sur eux…Compte tenu <strong>de</strong> ces considérations,le premier mois a principalementété axé sur l’instauration d’un climat<strong>de</strong> classe soli<strong>de</strong>, tout commeon l’aurait fait dans une classe ordinaire,mais avec le souci particulier<strong>de</strong> faire naître l’unité « classe » quin’allait plus rendre possible lacomparaison entre les élèves. Peuimporte à quel échelon l’élève sesitue, il construit son savoir aucontact <strong>de</strong>s autres. C’est l’essencemême <strong>du</strong> socioconstructivisme, à labase <strong>de</strong> la réforme. Nous avonsdonc rapi<strong>de</strong>ment transmis notreenthousiasme pour la nouvelleclasse multiâge à notre groupe.Lors d’une discussion, les élèvesont eux-mêmes énoncé les avantagesà apprendre dans une telleclasse.À force d’essais <strong>et</strong> d’erreurs, en effectuantfréquemment <strong>de</strong>s r<strong>et</strong>ours surnos expériences, nous en sommesvenues à clarifier nos croyancespédagogiques. Nous nous souvenonsavec humour d’une activitécombinée où les élèves <strong>de</strong> « première» avaient à exécuter un<strong>et</strong>âche <strong>et</strong> les élèves <strong>de</strong> « <strong>de</strong>uxième »,une autre tâche complètement différente.Quel cauchemar! La gestiond’une telle activité était carrémentinsensée. Nous n’avons plus jamaistenté l’expérience! Ensemble, nousavons convenu <strong>de</strong> ce que nousvoulions : un élève au centre <strong>de</strong> sesapprentissages, qui construit sonsavoir <strong>et</strong> développe ses compétencesau contact <strong>de</strong>s autres élèves,où la prise en considération <strong>de</strong>srythmes d’apprentissage maximisela réussite <strong>de</strong> nos élèves <strong>et</strong>…DES ACTIVITÉS OUVERTESC’est alors que nous en sommesarrivées à planifier <strong>de</strong>s activitésouvertes. Des activités où chaqueélève, peu importe son niveau ouson âge, pourrait y trouver soncompte <strong>et</strong> progresser. C<strong>et</strong>te découverte<strong>de</strong>vait être déterminante pournotre gestion <strong>de</strong>s apprentissages.En eff<strong>et</strong>, la situation d’apprentissagelarge, ouverte, allait nous perm<strong>et</strong>tre<strong>de</strong> simplifier notre planification(une seule au lieu <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux), <strong>de</strong> partird’où les élèves étaient ren<strong>du</strong>s <strong>et</strong><strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en application l’approchesocioconstructiviste. En fait, la classemultiâge nous forçait à élargir notrechamp <strong>de</strong> compétences avec lesélèves. Il ne pouvait plus être questiond’enseigner pour l’élève moyen.Cependant, comment adapter lestâches <strong>et</strong> les activités? Comment favoriserle développement <strong>de</strong> chacun<strong>de</strong>s élèves <strong>de</strong> la classe? Commentcréer un fonctionnement optimalpour tous? En fait, le fonctionnement<strong>de</strong> la classe n’a pas tellementchangé. Nous nous sommesren<strong>du</strong> compte qu’il y avait plusieurstypes d’activités qui pouvaient sedérouler en classe multiâge. Le travailsous forme <strong>de</strong> proj<strong>et</strong>s est un<strong>de</strong>s moyens que nous privilégions.Tout en tenant compte <strong>du</strong> rythme<strong>de</strong>s élèves, nous travaillons la motivation,l’engagement, le goût d’allerplus loin <strong>et</strong> la résolution <strong>de</strong>s conflits.Chaque jeune y va selon cequ’il est, en donnant très souvent lemeilleur <strong>de</strong> lui-même. L’apprentissageavec les autres élèves est trèsvalorisé. En eff<strong>et</strong>, dans nos classes,la première personne-ressourcen’est pas l’enseignante mais plutôtl’élève lui-même. Nous favorisonspar le fait même la compétenc<strong>et</strong>ransversale « coopérer ». Ainsi, lesélèves sont amenés à s’entrai<strong>de</strong>r <strong>et</strong>ils le font <strong>de</strong> manière naturelle.C’est un moyen <strong>de</strong> consoli<strong>de</strong>r leursapprentissages <strong>et</strong> <strong>de</strong> faire <strong>de</strong> lamétacognition, pour les plus vieux,<strong>et</strong> c’est aussi un moyen <strong>de</strong> se dépasser,pour les plus jeunes.Par ailleurs, nous utilisons ledécloisonnement pour abor<strong>de</strong>r <strong>de</strong>sconcepts plus pointus. Ce moyennous perm<strong>et</strong> aussi d’aller plus enprofon<strong>de</strong>ur dans <strong>de</strong>s contenus disciplinaires.Nous nous en servonsparticulièrement pour les mathématiques<strong>et</strong> occasionnellement pour lalecture. Nous travaillons égalementpar ateliers. Ceux-ci perm<strong>et</strong>tent auxélèves <strong>de</strong> développer leur autonomie,<strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en pratique ce qu’ilsont appris <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’exercer. En outre,ils donnent à l’enseignante l’occasiond’offrir un soutien plus indivi<strong>du</strong>elà ceux qui en ont besoin.CE QUE NOUS RETIRONSDE NOTRE EXPÉRIENCEAprès trois années <strong>de</strong> travail enclasse multiâge, nous avons pu tirerplusieurs avantages <strong>de</strong> ce fonctionnement.Un <strong>de</strong>s bénéfices majeursd’une telle classe est la continuité<strong>de</strong>s apprentissages. En eff<strong>et</strong>, pourune enseignante, pouvoir suivreindivi<strong>du</strong>ellement ses élèves pendant<strong>de</strong>ux années perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> ne pasdramatiser leurs difficultés aprèsune seule année. Cela perm<strong>et</strong> aussi<strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en place <strong>de</strong>s stratégiesd’intervention qui s’échelonnent surune pério<strong>de</strong> plus longue <strong>et</strong> qui sontmoins contraignantes <strong>et</strong> plus efficaces.Les élèves parviennent à voirles apprentissages sur un cycle <strong>de</strong><strong>de</strong>ux ans <strong>et</strong> sont stimulés par c<strong>et</strong>teprogression qu’ils observent quotidiennement.En ce qui a trait aux apprentissagesscolaires, les élèves sont à même <strong>de</strong>VIE 52 Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004


Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004vivre un plus grand éventail <strong>de</strong> situationsen travaillant avec d’autresjeunes qui progressent différemmentd’eux <strong>et</strong> qui sont ren<strong>du</strong>s à <strong>de</strong>sniveaux divers. <strong>Dans</strong> les domainessocial <strong>et</strong> affectif, les élèves développentun sens <strong>de</strong> la communautéainsi que <strong>de</strong> l’entrai<strong>de</strong> <strong>et</strong> apprennentles uns <strong>de</strong>s autres lorsqu’ils s’ai<strong>de</strong>nt.L’enseignant n’est plus la personneressourcepremière <strong>de</strong> la classe.Ces valeurs se transm<strong>et</strong>tent facilementdès le début <strong>de</strong> l’année auxnouveaux arrivants. Notre gestion<strong>de</strong> classe est facilitée par c<strong>et</strong> apprentissage<strong>de</strong> la culture <strong>de</strong> la classe.La classe multiâge nous a aidées àreconnaître que les élèves se développentà <strong>de</strong>s rythmes différents <strong>et</strong><strong>de</strong> diverses façons, <strong>et</strong> à repérer lapédagogie qui convient pour toucherchacun <strong>de</strong>s jeunes. C’est en cesens que la pédagogie est centréesur l’élève. Enseigner dans uneclasse multiâge rend évi<strong>de</strong>nte lanécessité d’offrir aux élèves <strong>de</strong>ssituations d’apprentissage ouvertesqui perm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong> répondre davantageà leurs besoins. Ces situationsouvertes augmentent leur motivation.D’autre part, se lancer dans un<strong>et</strong>elle entreprise sans travailler enéquipe serait vouer le tout à l’échec.D’abord parce que l’échange entreles enseignants est primordial, maisaussi parce que différencier lapédagogie exige une ouverture <strong>et</strong>un décloisonnement qui perm<strong>et</strong>tent<strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en commun nos ressources.Par exemple, lorsque nousréunissons les élèves autrement quepar leur groupe d’appartenance(par groupes <strong>de</strong> besoins, <strong>de</strong> centresd’intérêt, <strong>et</strong>c.), nous sommes appeléesà travailler avec <strong>de</strong>s élèves <strong>de</strong>s<strong>de</strong>ux groupes. Cela suppose quenous <strong>de</strong>venions coresponsables <strong>de</strong>sélèves. La coresponsabilité impliqueen r<strong>et</strong>our une nouvelle forme <strong>de</strong>gestion <strong>de</strong>s élèves <strong>et</strong> perm<strong>et</strong> d’optimiserla communication <strong>du</strong> cheminement<strong>de</strong>s jeunes entre lesenseignants.Enfin, nous trouvons tellementd’avantages à la classe multiâge querevenir à la classe ordinaire seraitimpensable à nos yeux. La classemultiâge a élargi nos horizons <strong>et</strong>elle nous a permis <strong>de</strong> changer notrerôle <strong>et</strong> <strong>de</strong> transformer nos pratiques.C’est un lieu <strong>de</strong> questionnement <strong>et</strong><strong>de</strong> développement professionnelque nous continuons à découvrirensemble.M mes Claudine Lajeunesse <strong>et</strong>Mylaine Fournier sont enseignantesau premier cycle à l’écoleBienville <strong>de</strong> la Commission scolaire<strong>de</strong> Montréal, tandis queM. Jean Archambault fait maintenantpartie <strong>de</strong> l’équipe <strong>de</strong>professionnels au Programme<strong>de</strong> soutien à l’école montréalaise<strong>du</strong> ministère <strong>de</strong> l’É<strong>du</strong>cation.Au moment d’écrire c<strong>et</strong>article, il était conseiller pédagogiqueà l’école Bienville.1. L’appellation « classe multiprogramme »convenait lorsque l’objectif premier était<strong>de</strong> couvrir le programme. Il existait alors<strong>de</strong>s programmes d’étu<strong>de</strong>s annuels. Maisavec la réforme <strong>de</strong> l’é<strong>du</strong>cation, l’objectifétant plutôt <strong>de</strong> faire apprendre les élèvesen tenant compte <strong>de</strong>s différences dans lesfaçons d’apprendre, les programmesannuels ne font plus <strong>de</strong> sens, pas plus quele regroupement <strong>de</strong>s élèves selon leurâge. C’est pourquoi nous utilisons l<strong>et</strong>erme « classe multiâge ».2. Ces travaux ont pu être réalisés en partiegrâce au financement <strong>du</strong> Programme <strong>de</strong>soutien à l’école montréalaise <strong>du</strong> ministère<strong>de</strong> l’É<strong>du</strong>cation.3. L’école Bienville se situe au neuvièmerang <strong>de</strong>s écoles défavorisées <strong>de</strong> l’île <strong>de</strong>Montréal.DES ÉLÈVES TIENNENT BOUTIQUEÀ L’ENSEIGNE DES « TRÉSORS D’ALBERT »La polyvalente <strong>de</strong> Th<strong>et</strong>ford Mines m<strong>et</strong> en œuvre un proj<strong>et</strong> original<strong>de</strong> préparation au marché <strong>du</strong> travail <strong>et</strong> d’apprentissage <strong>de</strong> l’entrepreneuriat.par Paul FrancœurLa région <strong>de</strong> l’Amiante n’estguère le pays fantôme qued’aucuns imaginent par suite<strong>du</strong> ralentissement radical dansl’exploitation <strong>de</strong> ses vastes mines.Bornée par un horizon <strong>de</strong> terrils <strong>et</strong><strong>de</strong> crassiers, la ville <strong>de</strong> Th<strong>et</strong>fordMines affiche pourtant une allurefraîche. Après une brève pério<strong>de</strong> <strong>de</strong>dépression, il y a une dizaine d’années,sa population n’a pas tardé àprendre en main son <strong>de</strong>stin. On yobserve maintenant les signes d’unevigoureuse renaissance, notammentavec la multiplication <strong>de</strong>s p<strong>et</strong>ites <strong>et</strong>moyennes entreprises, un peu à lamanière beauceronne.Par diverses initiatives, la polyvalente<strong>de</strong> Th<strong>et</strong>ford Mines participeà ce renouveau socioéconomique.Ainsi, en juin 2002, un groupe d’enseignants<strong>de</strong>s cheminements particulierstransitoires (CPT) décidaientd’associer <strong>et</strong> <strong>de</strong> coordonner leursefforts dans l’application <strong>de</strong> troisprogrammes : é<strong>du</strong>cation manuelle<strong>et</strong> technique (EMT), préparation aumarché <strong>du</strong> travail (PMT) <strong>et</strong> é<strong>du</strong>cationà la vie économique (EVE) (ce<strong>de</strong>rnier étant un programme d’établissement).De c<strong>et</strong>te heureuseconcertation a surgi la créationd’une boutique <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> classe,« Les Trésors d’Albert », qui, <strong>de</strong>puisquelques mois, a fièrement pignonsur rue au pavillon Albert-Carrier.Photo : Denis GaronPETITE HISTOIRED’UN GRAND PROJETCe chantier s’est naturellement articuléautour d’un noyau <strong>du</strong>r <strong>de</strong> troisenseignants, assurés <strong>du</strong> soutien actif<strong>de</strong> la directrice adjointe, ChantalHallée : Ghyslain Cliche (EMT), JulieCôté (PMT) <strong>et</strong> Nathalie Jolicœur(EVE). Cependant, tous les enseignants<strong>de</strong>s CPT ont appuyé c<strong>et</strong>te initiativedès le départ <strong>et</strong> y collaborentactivement : Alain Bisson, ChantalRaby, Louis L’Archevêque, NicoleFréch<strong>et</strong>te, Julie Labrecque <strong>et</strong> LuciePoulin.PÉDAGOGIQUE 53


À la fin <strong>de</strong> l’année scolaire 2001-2002,l’équipe <strong>de</strong>s enseignants <strong>de</strong>s CPT –qui regroupent environ 70 élèvesparmi les 250 qui sont inscrits àl’un ou l’autre vol<strong>et</strong> <strong>de</strong>s cheminementsparticuliers – s’est interrogéecollectivement au suj<strong>et</strong> <strong>de</strong>s moyensà m<strong>et</strong>tre en œuvre aux fins suivantes :• favoriser l’autonomie <strong>de</strong>s élèves;• accroître leur responsabilité personnelle<strong>et</strong> leur motivation quantaux apprentissages;• les amener à maîtriser diversestechniques <strong>de</strong> travail;• les initier au travail d’équipe;• rehausser leur estime d’euxmêmes<strong>et</strong> leur sentiment d’appartenanceà un groupe;• développer chez eux diversescompétences transversales <strong>et</strong> spécifiquesliées au Programme <strong>de</strong>formation;• leur perm<strong>et</strong>tre d’expérimenter lesréalités <strong>du</strong> marché <strong>du</strong> travail <strong>et</strong><strong>du</strong> fonctionnement courant d’uneentreprise;• assurer une intégration progressive<strong>de</strong>s matières au programmedans la perspective <strong>de</strong> la réformescolaire.Et l’on entendait poursuivre cesobjectifs ambitieux au moyen d’unproj<strong>et</strong> mobilisateur <strong>et</strong> rassembleur,à partir d’une réalité précise : lacohabitation <strong>de</strong> quelques ateliers <strong>de</strong>pro<strong>du</strong>ction qui foisonnaient enordre dispersé. Ces activités s’étaientdéveloppées parallèlement, sur l’initiative<strong>de</strong> chaque enseignant. Parexemple :• Depuis sept ans, Ghyslain Cliche acréé <strong>et</strong> développé un créneauparticulier dans ses ateliers : lafabrication d’une gamme <strong>de</strong> décorations<strong>et</strong> <strong>de</strong> ca<strong>de</strong>aux <strong>de</strong> Noël, enbois peint. Ces pro<strong>du</strong>its ont atteintla notoriété, <strong>et</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> vacroissant. Les fruits <strong>de</strong> sa créativitéabon<strong>de</strong>nt : <strong>de</strong>s soldats « cassenois<strong>et</strong>tes» <strong>de</strong> toutes tailles; <strong>de</strong>strios <strong>de</strong> chan<strong>de</strong>lles décoratives,miniatures ou géantes; <strong>de</strong>s trios<strong>de</strong> chanteurs; <strong>de</strong>s tambours; <strong>de</strong>sbonhommes <strong>de</strong> neige; <strong>de</strong>s maisonspour enfants; <strong>de</strong>s pellesdécoratives; <strong>de</strong>s traîneaux décoratifs;<strong>de</strong>s plaques (numéro <strong>de</strong>porte); <strong>et</strong>c.• Pour sa part, Julie Côté a lancéune chocolaterie dans le contexted’activités parascolaires. Ces friandisesconnaissent <strong>de</strong>s pointes <strong>de</strong>pro<strong>du</strong>ction à l’occasion <strong>de</strong>s fêtes<strong>de</strong> Noël, <strong>de</strong> la Saint-Valentin <strong>et</strong> <strong>de</strong>Pâques;• De son côté, Lucie Poulin a missur pied un atelier <strong>de</strong> fabricationd’articles en cuir (capteurs <strong>de</strong>rêves, porte-clés, ceintures, étuis àcrayons, étuis à ceintures, liseuses,sacs, porte-monnaie) <strong>et</strong> d’articlesen acrylique (tic-tac-tœ, porteclés,sous-verres, horloges <strong>de</strong>bureau, cabanes d’oiseaux) dontPhoto : Denis Garonla qualité est reconnue <strong>et</strong> pourlesquels les débouchés se multiplient;•Enfin, Nathalie Jolicœur a mis aupoint la fabrication <strong>de</strong> p<strong>et</strong>its savons<strong>de</strong> fantaisie qui se présentent <strong>de</strong>façon variée (par exemple, associésà une chan<strong>de</strong>lle dans uneassi<strong>et</strong>te décorative).En juin 2002, on convenait doncque c<strong>et</strong>te pro<strong>du</strong>ction diversifiée,souvent <strong>de</strong> très bonne qualité, méritaitune meilleure visibilité <strong>et</strong> unmécanisme plus efficace <strong>de</strong> mise enmarché. C’est alors que s’imposadans les esprits le concept <strong>de</strong> créationd’une boutique. C<strong>et</strong>te propositionfit l’unanimité. Le proj<strong>et</strong> polarisait<strong>et</strong> unifiait les objectifs entrevus,avec l’avantage d’être concr<strong>et</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong>faire appel à une gran<strong>de</strong> variétéd’aptitu<strong>de</strong>s.Ce moyen ingénieux allait perm<strong>et</strong>trenotamment <strong>de</strong> mobiliser les élèvesqui terminaient le cycle <strong>de</strong>s CPT <strong>et</strong>s’apprêtaient à s’inscrire en formationprofessionnelle ou à se dirigervers le marché <strong>du</strong> travail. Il leurferait vivre une expérience réelled’entreprise, étayée par la mise enœuvre d’un programme d’établissementaxé sur l’é<strong>du</strong>cation à la vieéconomique. Une quinzaine d’élèvespourraient s’initier sur le vif à lagérance d’une p<strong>et</strong>ite entreprise,tandis que les autres en assureraientla pro<strong>du</strong>ction par leurs travaux enateliers.BILAN D’UNE PREMIÈRE ANNÉEDE FONCTIONNEMENTDès le mois <strong>de</strong> septembre 2002,dans le contexte <strong>de</strong> l’implantation<strong>du</strong> programme d’établissement« É<strong>du</strong>cation à la vie économique »,on proposa donc aux élèves <strong>de</strong>sCPT la constitution d’une minientreprisedont ils seraient les artisans.On examina d’abord avec euxla structure d’une coopérative, <strong>et</strong>on travailla à l’aménagement d’unlocal <strong>et</strong> à sa décoration (PMT <strong>et</strong>EVE). Tant <strong>et</strong> si bien que, le samedi23 novembre 2002, toute la population<strong>de</strong> Th<strong>et</strong>ford Mines était conviéeà l’inauguration <strong>de</strong> la boutique àl’occasion d’une journée portesouvertes. La réponse <strong>du</strong> publicatteignit alors un niveau inespéré <strong>et</strong>les ventes furent nombreuses. À laconférence <strong>de</strong> presse qui précédale lancement, la participation <strong>de</strong>sélèves fut massive <strong>et</strong> active. Ils trouvèrentdans c<strong>et</strong> événement publicune stimulation à s’engager plus àfond dans le proj<strong>et</strong> – ce qui n’avaitpas été le cas au début <strong>de</strong> l’année.Les enseignants avaient même dûinsister pour les m<strong>et</strong>tre en mouvement.À la suite <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te inauguration officielle,la boutique ouvrit ses portestous les mardis <strong>et</strong> jeudis, <strong>de</strong> 12 h 15à 13 h 15, avec la possibilité <strong>de</strong>comman<strong>de</strong>s téléphoniques en touttemps. La vente au comptoir étaitassurée par <strong>de</strong>s élèves, en présenced’un enseignant. L’intérêt <strong>du</strong> publicest <strong>de</strong>meuré constant, le défi étantd’accor<strong>de</strong>r le rythme <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ctionà celui <strong>de</strong>s ventes.Au printemps 2003, la boutiques’est donné une vitrine permanente<strong>de</strong> publicité <strong>et</strong> d’exposition, sous laforme d’un élégant stand situé dansle hall <strong>de</strong> l’entrée principale <strong>de</strong>sélèves.ATELIERS DE TRAVAILLa polyvalente <strong>de</strong> Th<strong>et</strong>ford Mines,conçue au départ pour recevoirplus <strong>de</strong> 3 000 élèves, en compteaujourd’hui environ 1 600, ce quilaisse une marge <strong>de</strong> manœuvredans l’aménagement <strong>de</strong>s espaces.Les ateliers consacrés au travail <strong>du</strong>bois occupent <strong>de</strong>ux gran<strong>de</strong>s sallesinsonorisées, situées en <strong>de</strong>mi-soussol.Les ateliers sont équipés <strong>de</strong>quelques appareils <strong>de</strong> base, maissans excès. On encourage en eff<strong>et</strong> l<strong>et</strong>ravail <strong>de</strong>s mains, dans un style artisanal,afin <strong>de</strong> conserver à l’ouvrierla maîtrise maximale <strong>de</strong> son pro<strong>du</strong>it.Les travaux <strong>de</strong> menuiserieoffrent toute une variété d’intervention(marquage, découpage, peinture,<strong>et</strong>c.), laissée au choix <strong>de</strong>chaque élève, en fonction <strong>de</strong> sesgoûts, <strong>de</strong> ses aptitu<strong>de</strong>s naturelles ou<strong>de</strong>s apprentissages qu’il entendmaîtriser. On s’efforce d’appliquerc<strong>et</strong>te liberté <strong>de</strong> choix dans les autresateliers (cuir, acrylique, chocolaterie,savons).VIE 54 Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004


Si la conception <strong>de</strong> l’article à fabriquerrelève surtout <strong>de</strong> l’enseignant,les étapes <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ction proprementdite sont <strong>du</strong> ressort <strong>de</strong>s élèves.Le contrôle <strong>de</strong> la qualité est principalementfondé sur la responsabilitépersonnelle <strong>de</strong> chaque artisan,invité à parfaire un pro<strong>du</strong>it que luimêmeserait désireux d’acquérir.Les exigences <strong>de</strong> la mise en marchéincitent en eff<strong>et</strong> l’élève à surveillerla bonne qualité <strong>de</strong> son œuvre. Lachaîne <strong>de</strong> travail nécessite évi<strong>de</strong>mmentun minimum <strong>de</strong> supervisionobjective <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s enseignants,mais aussi, à l’occasion, <strong>de</strong> quelquesélèves à qui on a confié <strong>de</strong>s responsabilitésà diverses étapes.C<strong>et</strong>te pro<strong>du</strong>ction fait souvent l’obj<strong>et</strong><strong>de</strong> comman<strong>de</strong>s à l’avance. Le prix <strong>de</strong>vente est calculé à partir <strong>du</strong> coût <strong>du</strong>matériel auquel on ajoute 10 p. 100.Le profit éventuel sert au financement<strong>de</strong>s activités <strong>de</strong> fin d’année<strong>de</strong>s élèves.PREMIER BILANDE L’OPÉRATIONEn juin 2003, on procéda à l’évaluation<strong>de</strong> la première année d’activité.On distribua un questionnairedans lequel chacun <strong>de</strong>s élèves participantsa pu exprimer ses commentaires,positifs ou négatifs, <strong>et</strong>ses suggestions pour la suite <strong>du</strong>chantier. À l’occasion d’un r<strong>et</strong>ouren groupe sur les résultats compilés<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te consultation, on engagea<strong>de</strong>s échanges <strong>et</strong> <strong>de</strong>s discussions.Enfin, c<strong>et</strong>te démarche collective futcomplétée par une rencontre personnelleavec chacun <strong>et</strong> chacune,afin <strong>de</strong> prendre en considérationles réactions indivi<strong>du</strong>elles à c<strong>et</strong>teexpérience communautaire.Le bilan général <strong>de</strong> l’opérations’avère n<strong>et</strong>tement positif, tout enm<strong>et</strong>tant au jour la nécessité <strong>de</strong>quelques correctifs, adaptations <strong>et</strong>améliorations :•L’intérêt <strong>de</strong>s élèves, plutôt faibleau début <strong>de</strong> l’année, s’est ensuiteraffermi à la suite d’un contactdirect avec la réaction <strong>du</strong> public<strong>de</strong>vant le résultat <strong>de</strong> leurs efforts.La reconnaissance officielle <strong>de</strong>leurs réalisations a gran<strong>de</strong>mentcontribué à leur revalorisationpersonnelle. Désormais, on comptem<strong>et</strong>tre un effort particulier surla publicité <strong>et</strong> la promotion <strong>de</strong>spro<strong>du</strong>its;• La visibilité <strong>de</strong>s œuvres <strong>de</strong>s70 élèves <strong>de</strong>s CPT se trouve enforte hausse, à l’école même <strong>et</strong>parmi la population. On fait maintenantappel à eux pour diversesformes <strong>de</strong> contribution dans ledomaine <strong>de</strong> leur spécialité. Ils entirent un légitime motif <strong>de</strong> fierté <strong>et</strong>se montrent <strong>de</strong> plus en plus solidaires<strong>de</strong> leur activité collective;• La collaboration entre les enseignantss’est révélée excellente,bien qu’ils déplorent le manque<strong>de</strong> temps pour une meilleureconcertation courante <strong>de</strong> leursinterventions. Ce proj<strong>et</strong> a souventdébordé l’horaire officiel <strong>de</strong>travail;•L’appui <strong>de</strong> la direction ne s’estjamais démenti, en particulier parune ouverture à l’égard <strong>de</strong>s<strong>de</strong>man<strong>de</strong>s répétées en provenance<strong>de</strong>s élèves <strong>et</strong> <strong>de</strong>s enseignants.Tous les frais liés au proj<strong>et</strong> ont étéremboursés à même le budg<strong>et</strong>courant <strong>de</strong> l’école, sans recours à<strong>de</strong>s allocations supplémentaires,subventions spéciales ou programmesparticuliers;• La contribution <strong>de</strong> la coopérative<strong>de</strong>s élèves <strong>et</strong> <strong>de</strong> la caisse scolaire,gérées par <strong>de</strong>s enseignantes <strong>et</strong><strong>de</strong>s enseignants r<strong>et</strong>raités, fut précieusesur le plan technique(recherches, achats <strong>de</strong> matériel,<strong>et</strong>c.);• La Commission scolaire <strong>de</strong>L’Amiante a aussi prêté son concourspour l’organisation <strong>de</strong> laconférence <strong>de</strong> presse, à l’automne2002.PREMIÈRE BOUTIQUEDU GENRE AU QUÉBECSous la forme qui la distingue,il semble que la boutique « LesTrésors d’Albert » n’ait point d’équivalentdans d’autres écoles <strong>du</strong>Québec. C<strong>et</strong>te expérience à caractèreunique manifeste le dynamismed’une région – autrefois repliée envase clos autour <strong>de</strong> ses puits <strong>de</strong>Photo : Denis Garonmine – qui, à titre d’agent principal,assume le défi <strong>de</strong> son développementéconomique <strong>et</strong> convie sesjeunes à entrer dans ce mouvement<strong>de</strong> responsabilisation.L’expérience témoigne aussi <strong>de</strong> lamarge <strong>de</strong> manœuvre dont peut disposerune équipe d’enseignants,créative <strong>et</strong> solidaire, quand elle estanimée <strong>et</strong> soutenue par une directionouverte. Elle confirme, dansune certaine mesure, la viabilité <strong>de</strong>sorientations <strong>de</strong> la réforme scolaireà l’école secondaire.Soulignons enfin que le succès <strong>de</strong>ce proj<strong>et</strong> s’explique essentiellementpar la mise en interrelation d’ungroupe d’enseignants au profil particulièrementimaginatif, dynamique<strong>et</strong> engagé. Ghyslain Cliche, parexemple, illustre dans sa démarcheprofessionnelle les caractéristiquesqui se trouvent aussi chez ses collèguesimmédiats, selon diversesnuances :• la qualité <strong>de</strong> sa longue expérienceen formation professionnelle <strong>et</strong>technique;•la créativité qu’il manifeste dansla conception <strong>de</strong> ses scénariosd’apprentissage;Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004• son engagement personnel dansle milieu socioéconomique (il adéjà occupé la fonction <strong>de</strong> promairedans la municipalité);• un sens aigu <strong>de</strong>s réalités pratiquesqui ne paralyse pas sonélan; <strong>et</strong>, surtout,• un profond souci d’ouvrir uneperspective d’avenir à tous cesjeunes dont il se considère commeresponsable à titre d’é<strong>du</strong>cateur.Deux prix d’excellence ont déjàsouligné le mérite <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te initiativeexceptionnelle : le Prix d’excellence<strong>du</strong> jury <strong>du</strong> Concours québécois enentrepreneuriat local <strong>et</strong> une mentionspéciale pour une innovationpédagogique <strong>de</strong> la Fédération <strong>de</strong>scommissions scolaires <strong>du</strong> Québec –section Chaudière-Appalaches.S’il ne vous est pas loisible d’allerfaire <strong>du</strong> lèche-vitrines à Th<strong>et</strong>fordMines, vous pouvez <strong>du</strong> moins consulterle site Web <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te boutique :www.csamiante.qc.ca/albert-carrier(voir « Trésors d’Albert »).M. Paul Francœur est consultanten é<strong>du</strong>cation.PÉDAGOGIQUE 55


ImpressionsRENCONTRE AVEC UN ÊTRE REMARQUABLE :RÉACTIONS ET OPINIONS D’UNE ENSEIGNANTEpar Danielle RoyJai eu la chance d’assister à’Tout au long <strong>de</strong> l’entrevue, M. Lopez’ l’entr<strong>et</strong>ien <strong>de</strong> M. Roch Denis, parle <strong>de</strong> la recherche d’un justerecteur <strong>de</strong> l’Université <strong>du</strong> équilibre entre autorité <strong>et</strong> tendresse.« Être soi-même » c’est doncQuébec à Montréal (UQAM) avecGeorges Lopez 1 , c<strong>et</strong> instituteur être simple, vrai <strong>et</strong> sans artificesexceptionnel que nous avons pu auprès <strong>de</strong>s enfants. N’est-ce pasvoir évoluer dans sa classe multiprogramme,en Auvergne, dans soi-même un enfant : se souvenirse rappeler aussi que l’on a étéle documentaire Être <strong>et</strong> avoir, <strong>de</strong> <strong>de</strong>s fous rires, <strong>de</strong>s récréations ou <strong>de</strong>sNicolas Philibert. Exceptionnel non papiers qui circulent sous les bureauxnous ai<strong>de</strong> à prendre <strong>du</strong> recul,pas à cause <strong>de</strong> ses métho<strong>de</strong>s pédagogiquesrévolutionnaires, mais dans face à ces « gentils p<strong>et</strong>its monstres ».son approche simple <strong>et</strong> humaine Entrer en relation, c’est aussi perm<strong>et</strong>trel’échange <strong>et</strong> le rapprochement.envers ses élèves.Lors <strong>de</strong> son témoignage, M. Lopez a Par besoin <strong>de</strong> sécurité, l’enseignantsuggéré aux enseignantes <strong>et</strong> enseignantsd’oser « être eux-mêmes » à se centrer sur un contenu àou l’enseignante a souvent tendanceavec leurs élèves, <strong>de</strong> se montrer enseigner, au détriment parfois <strong>du</strong>disponibles à eux <strong>et</strong> d’entr<strong>et</strong>enir un temps qu’il ou elle pourrait consacrerà établir <strong>et</strong> développer undialogue chaque fois que la situationle perm<strong>et</strong>. Ce message profondémenthumain peut apparaître expérience m’a confirmé que leclimat agréable. Par contre, monici comme une naïve évi<strong>de</strong>nce <strong>et</strong> souci d’entr<strong>et</strong>enir une relation respectueuseavec les élèves entraînepourtant, dans les débats actuels ené<strong>du</strong>cation traitant <strong>de</strong> métacognition, chez ces <strong>de</strong>rniers l’éveil, la curiosité<strong>de</strong> socioconstructivisme ou d’enseignementpar compétences, nous De plus, ce climat <strong>de</strong> complicité, <strong>de</strong><strong>et</strong> l’intérêt envers l’apprentissage.avons tendance à oublier c<strong>et</strong> élémentqui constitue la base <strong>de</strong> notre dans la salle <strong>de</strong> classe apporte auxrespect <strong>et</strong> même parfois d’humourdémarche pédagogique.enseignants une plus gran<strong>de</strong> satisfactionau travail. N’est-ce pas lerêve <strong>de</strong> chacun, a<strong>du</strong>lte ou enfant, <strong>de</strong>« se sentir bien » à l’endroit où l’onse trouve?Certaines pratiques me sont apparuesfavorables à l’installation d’untel climat en classe :• prendre <strong>du</strong> temps chaque matinpour accueillir les élèves, être làtout simplement pour recevoir lesp<strong>et</strong>its mots ou les p<strong>et</strong>its « maux »qui peuvent parfois comprom<strong>et</strong>treles apprentissages.• prévoir <strong>de</strong>s pério<strong>de</strong>s régulières<strong>de</strong> rencontres indivi<strong>du</strong>elles oùl’on peut discuter <strong>du</strong> suivi <strong>de</strong>sproj<strong>et</strong>s, <strong>de</strong>s difficultés scolaires,mais aussi <strong>du</strong> vécu <strong>de</strong> l’élève à lamaison ou à l’école. Cela peut sefaire <strong>du</strong>rant les pério<strong>de</strong>s <strong>de</strong> lecturesilencieuse, <strong>de</strong> travail personnelou <strong>de</strong> récupération.Je vous laisse sur les propos colorés<strong>de</strong> Dominique Demers, extraits <strong>de</strong>son roman jeunesse Une drôle <strong>de</strong>ministre, que je lisais aux parents<strong>de</strong> mes élèves lors <strong>de</strong> notre rencontreau début <strong>de</strong> l’année :« Gustave-Aurèle avait la bouchegran<strong>de</strong> ouverte. Il venait <strong>de</strong> lire lanouvelle politique rédigée par sonamie. C’était totalement impossible,parfaitement impensable… <strong>et</strong> toutà fait merveilleux! Il y était écrit queles enfants <strong>de</strong>vaient absolumentapprendre à faire <strong>de</strong>s bulles avant lafin <strong>de</strong> leur sixième année. Qu’il étaitégalement très important qu’ilsapprennent à courir plus vite que levent, à fabriquer <strong>de</strong>s cerfs-volants, àvoyager dans <strong>de</strong>s livres drôles oueffrayants, à élever <strong>de</strong>s animaux exotiques,à inventer <strong>de</strong>s m<strong>et</strong>s extravagants…Ma<strong>de</strong>moiselle Charlotteparlait aussi <strong>de</strong> la nécessité d’apprendreà calculer <strong>et</strong> à écrire sansfautes, mais elle ne s’y attardait paslongtemps. “ Les enfants heureuxapprennent vite <strong>et</strong> mieux ”, écrivaitellesimplement. »M me Danielle Roy est enseignanteà l’école Saint-Gabriel-Lalemant <strong>de</strong> la Commissionscolaire <strong>de</strong> Montréal.1. C<strong>et</strong> entr<strong>et</strong>ien a eu lieu lors <strong>du</strong> colloqueLes 40 ans <strong>du</strong> rapport Parent, le 4 avril2003, au Palais <strong>de</strong>s Congrès, à Montréal.ÉVÉNEMENTS À VENIRCOLLOQUE DE LA COMMISSION PROFESSIONNELLEDES SERVICES ÉDUCATIFS DE L’ASSOCIATIONDES CADRES SCOLAIRES DU QUÉBEC (ACSQ)La Commission professionnelle <strong>de</strong>sservices é<strong>du</strong>catifs <strong>de</strong> l’Association<strong>de</strong>s cadres scolaires <strong>du</strong> Québecannonce la tenue <strong>de</strong> son 12 e colloque,qui aura pour thème : « Différenciationpédagogique : utopie oustimulant créatif? ».Le colloque aura lieu les 8, 9 <strong>et</strong>10 décembre 2004, à l’Hôtel Hilton<strong>de</strong> Québec.Renseignements <strong>et</strong> inscription :Association <strong>de</strong>s cadres scolaires<strong>du</strong> Québec1195, avenue Lavigerie, bureau 170Sainte-Foy (Québec) G1V 4N3Tél. : (418) 654-0014Téléc. : (418) 654-1719Site Intern<strong>et</strong> : www.acsq.qc.caUN MERCI BIEN SPÉCIALÀ…Yannick Gagnépour sa précieuse collaborationà la pro<strong>du</strong>ction <strong>du</strong> présent numéro,<strong>du</strong>rant le stage qu’il a effectué àVie pédagogiqueVIE 56 Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004


Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004lus, vus <strong>et</strong> enten<strong>du</strong>sGUÉNETTE, PIERRE.ENJEU TOLÉRANCE.ÉDITIONS NOVALIS, OTTAWA, 2003.COLLECTION IMAGINAIRE PLURIELSOUS LA DIRECTION DEHÉLÈNE RÉGNIER, 99 P.us,us <strong>et</strong>nten<strong>du</strong>sTOLÉRANCE ET INTOLÉRANCE :ENJEU!« Qu’est-ce qui est bien, qu’est-cequi est mal? » Voilà une questionà laquelle nous avons tous dûrépondre à plusieurs reprises dans<strong>de</strong>s situations diverses. Personnen’ignore que la con<strong>du</strong>ite humaineest une dimension <strong>de</strong> la vie quipréoccupe <strong>et</strong> soulève <strong>de</strong>s débats,parfois mouvementés. « Choisir estsouvent difficile », affirme PierreGuén<strong>et</strong>te, auteur d’Enjeu tolérance(p. 16). <strong>Dans</strong> c<strong>et</strong> ouvrage, il proposeaux jeunes <strong>et</strong> aux a<strong>du</strong>ltes unedémarche claire <strong>et</strong> pertinente pourréfléchir sur la question <strong>de</strong> latolérance <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’intolérance, unedémarche pour déci<strong>de</strong>r d’agir, caril y a enjeu.Conçu comme un outil pédagogique,l’ouvrage <strong>de</strong> Pierre Guén<strong>et</strong>teest bien illustré; le repérage estclair <strong>et</strong> facile; les ressources ont étéchoisies avec soin <strong>et</strong> sont variées :textes, définitions, liste d’organismes,dossiers thématiques, tableaux,questionnaires, liste <strong>de</strong> repères, <strong>et</strong>c.Le tout est regroupé au sein d’unedémarche précisée par quatre questions: Que se passe-t-il? Qu’est-ceque je peux faire? Qu’arrivera-t-il?Qu’est-ce que je déci<strong>de</strong> <strong>de</strong> faire?<strong>Dans</strong> c<strong>et</strong> ouvrage pratique, l’auteurpropose en fait une réflexion fouillée<strong>et</strong> soutenue par un processussimple <strong>et</strong> explicite. L’enseignant ytrouvera <strong>de</strong>s pistes concrètes àexploiter en classe, y puisera <strong>de</strong>sréflexions signifiantes pour soutenirses interventions <strong>et</strong> pourra exploiterune démarche probante <strong>de</strong> réflexionéthique sur <strong>de</strong>s réalités humaines.En outre, ce livre perm<strong>et</strong> aux élèvesune lecture autonome : soutenuspar <strong>de</strong>s interventions ponctuelles <strong>de</strong>l’enseignant, ils entreront dans ladémarche réflexive proposée <strong>et</strong>,ainsi, seront en mesure <strong>de</strong> relireleurs expériences personnelles.Précisons que Pierre Guén<strong>et</strong>te traite<strong>de</strong> la question <strong>de</strong> la tolérance enabordant également celle <strong>de</strong> l’intolérance.En listant <strong>de</strong>s pistes d’action,il démontre que la toléranceest le seuil minimal <strong>du</strong> respectnécessaire au mieux-vivre ensemble.À ce suj<strong>et</strong>, il cite Abauzit (p. 77) :«Tolérer n’est évi<strong>de</strong>mment pas unidéal, ce n’est pas un maximum,c’est un minimum. » En outre, il faitréférence aux propos <strong>de</strong> VladimirJankélévitch (p. 78) : « La toléranceest donc un moment provisoire. »L’ouvrage <strong>de</strong> Pierre Guén<strong>et</strong>te rejointfort bien l’intention <strong>de</strong> la collection« Imaginaire pluriel » <strong>de</strong> Novalis(p. 7) : c’est « un livre pratique[qui] perm<strong>et</strong> au lecteur <strong>de</strong> s’investir<strong>de</strong> tout son être <strong>et</strong> <strong>de</strong> découvrirquelque chose <strong>de</strong> nouveau sur luimême<strong>et</strong> sur les relations avec lesautres ». C<strong>et</strong> outil pédagogique pratiqueperm<strong>et</strong> aussi à toute personnequi le souhaite <strong>de</strong> faire le point <strong>et</strong><strong>de</strong> réfléchir sur ses relations avecles autres.Donald GuertinDALONGEVILLE, ALAINET MICHEL HUBER,SITUATIONS-PROBLÈMES POURENSEIGNER LA GÉOGRAPHIEAU CYCLE 3, 2002, COLLECTIONPÉDAGOGIE PRATIQUE À L’ÉCOLE,HACHETTE ÉDUCATION, 223 P.Peu <strong>de</strong> livres proposent <strong>de</strong>s idéesconcrètes pour enseigner <strong>de</strong>s situations-problèmesen géographie.Aussi, je souhaiterais que tous lesenseignants lisent l’ouvrage <strong>de</strong>Dalongeville <strong>et</strong> Huber. Bien sûr, cesidées s’inscrivent dans une culturefrançaise <strong>et</strong> les « problèmes » nesont pas toujours transposablesdans <strong>de</strong>s « situations » scolairesquébécoises. Peu importe. Leurlivre offre une occasion <strong>de</strong> réfléchirsur ce qu’est une « géographie parproblèmes ».Un « mo<strong>de</strong> d’emploi » facilite la lecture<strong>de</strong>s 22 situations d’enseignementproposées. Chaque chapitreéclaire l’animation <strong>de</strong> l’enseignant<strong>et</strong> le travail sur les représentations<strong>de</strong>s élèves; un développement informatifai<strong>de</strong> les enseignants à faire lepoint sur le suj<strong>et</strong> traité; <strong>de</strong>s référencesbibliographiques sont aussisuggérées.Que peut apporter c<strong>et</strong>te lecture àun enseignant <strong>de</strong> géographie? Il ytrouvera une intention pédagogiquequi se rapproche <strong>de</strong>s orientations<strong>du</strong> Programme <strong>de</strong> formation <strong>de</strong>l’école québécoise (2002). Il ypuisera <strong>de</strong>s idées pour intégrer àson enseignement <strong>de</strong>s énigmes, <strong>de</strong>sobstacles cognitifs, <strong>de</strong>s contradictions,<strong>de</strong>s contrastes, <strong>de</strong>s points <strong>de</strong>vue d’acteurs aux champs d’intérêtdifférents; il aura le sentiment d’enrichirson propre rôle en classe <strong>et</strong>d’être beaucoup plus que ce « gui<strong>de</strong>technicien », rôle auquel on leré<strong>du</strong>it parfois. Enfin, il y trouvera<strong>de</strong>s idées pour rendre plus stimulantel’utilisation <strong>de</strong> documents enclasse <strong>et</strong> en faire autre chose que<strong>de</strong>s fiches à remplir.Malgré tout ce qui s’est écrit <strong>de</strong>puisune quarantaine d’années en science<strong>et</strong> en é<strong>du</strong>cation sur la problématisation<strong>de</strong>s obj<strong>et</strong>s d’étu<strong>de</strong>, la pédagogie<strong>de</strong> la situation-problème engéographie en est encore à ses premièresarmes. Aussi c<strong>et</strong>te lecturecontribue-t-elle à l’avancement <strong>de</strong>divers chantiers <strong>de</strong> travail.Un <strong>de</strong> ces chantiers concerne lanotion même <strong>de</strong> situation. <strong>Dans</strong>leur ouvrage, les auteurs m<strong>et</strong>tentsurtout l’accent sur le problème.Cependant, la construction <strong>de</strong> lasituation, c’est-à-dire <strong>du</strong> contextequi donne <strong>du</strong> sens au problème, <strong>et</strong>l’articulation <strong>de</strong> la situation auproblème sont très importantes. Lessituations sont <strong>de</strong>s morceaux <strong>de</strong>culture proposés à <strong>de</strong>s élèves, euxmêmessitués dans le temps <strong>et</strong> dansl’espace. <strong>Dans</strong> ce sens, il m’a sembléque toutes les situations-problèmessoumises par Dalongeville <strong>et</strong> Hubern’étaient pas <strong>de</strong> même valeur ni <strong>de</strong>même portée é<strong>du</strong>cative.C<strong>et</strong>te remarque con<strong>du</strong>it à un autrechantier, celui <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong>la géographie scolaire. Le contenu<strong>de</strong> c<strong>et</strong> ouvrage soulève <strong>de</strong>s questionsfondamentales sur ce que<strong>de</strong>vient la géographie à l’école. Carl’élaboration <strong>de</strong> situations-problèmesinflue sur les contenus mêmes <strong>de</strong> lagéographie enseignée. Sur ce plan,les liens conceptuels établis avec lagéographie savante française m’ontparu manquer parfois <strong>de</strong> transpositiondidactique. Il est clair que,dans l’école québécoise, c<strong>et</strong>te transpositiondidactique doit être accompagnéed’une « transpositionculturelle », tant la formation géographique<strong>de</strong>s enseignants est différente!Ces nouveaux contenus géographiques(idées directrices, questions,enjeux, arguments, raisonnements,acteurs sociaux), il importe que lesprincipaux intéressés aient <strong>de</strong>s occasions<strong>de</strong> s’y former <strong>et</strong> d’en débattre.<strong>Dans</strong> l’attente <strong>de</strong> ces formations,à supposer qu’elles viennent unjour, la lecture <strong>de</strong> l’ouvrage <strong>de</strong>Dalongeville <strong>et</strong> Huber est un élémentincontournable dans le contexte<strong>de</strong> la réforme scolaire.Suzanne LaurinPÉDAGOGIQUE 57


histoire <strong>de</strong> rireChers lecteurs <strong>et</strong> lectrices, c<strong>et</strong>te rubrique vous est ouverte. Ne soyez pas égoïstes, faites-nous partager les « bons » mots <strong>de</strong> vos élèves ou les faits cocasses,absur<strong>de</strong>s même, dont vous êtes les témoins dans vos classes ou dans l’école. Adressez vos envois à : Vie pédagogique, ministère <strong>de</strong> l’É<strong>du</strong>cation, 600, rue Fullum,10 e étage, Montréal (Québec) H2K 4L1. Sous la direction <strong>de</strong> M. Stéphane Lauzon, enseignant d’arts plastiques, les illustrations qui suivent ont été effectuéespar <strong>de</strong>s élèves <strong>du</strong> Collège Marie-Clarac.« La peau <strong>de</strong> la vache sert à gar<strong>de</strong>r la vache ensemble. »Émilie Tremblay« La nuit, pour éviter les moustiques, il faut dormir avec un mousqu<strong>et</strong>aire.»Joséphine SterlingDE LANOUVEAUTÉ!!! Si vous rési<strong>de</strong>z au Québec, vous pouvez maintenant vous abonner à Vie pédagogique ou, le cas échéant, procé<strong>de</strong>r à votre changement d’adresse sur lenouveau site Intern<strong>et</strong> <strong>de</strong> la revue : http://www.viepedagogique.gouv.qc.ca❑ ABONNEMENT — ❑ CHANGEMENT D’ADRESSE POUR LES ABONNÉS DU QUÉBECRemplir ce coupon en y indiquant, pour un changement d’adresse, votre numéro d’abonné(ou votre ancienne adresse) ainsi que votre nouvelle adresse.Numéro d’abonné (réabonnement)NomPrénomN˚ rue, route appartementVille Province Co<strong>de</strong> postalPaysAdresser à : Vie pédagogiqueService <strong>de</strong> la diffusionMinistère <strong>de</strong> l’É<strong>du</strong>cation3220, rue Watt, bureau 101Sainte-Foy (Québec) G1X 4Z7Télécopieur : (418) 646-6153Courriel : vie.pedagogique@meq.gouv.qc.caÀ quel titre travaillez-vous en é<strong>du</strong>cation ou vous intéressezvousà ce domaine?• administrateur scolaire 13• commissaire d’école 14• directeur d’école ou directeur adjoint 15• enseignant 16• étudiant 17• personnel <strong>du</strong> ministère <strong>de</strong> l’É<strong>du</strong>cation 18• professionnel non enseignant 19• parent 20• autre 65❑ ABONNEMENT — ❑ CHANGEMENT D’ADRESSE POUR LES ABONNÉS ÀL’EXTÉRIEUR DU QUÉBECRemplir ce coupon en y indiquant, pour un changement d’adresse, votre numéro d’abonné(ou votre ancienne adresse) ainsi que votre nouvelle adresse.TARIFS (<strong>de</strong>vise canadienne) 1 AN 2 ANSCanada (NB/NE/TN) 23,00 $ 42,00 $Canada (autres provinces) 21,50 $ 39,00 $Autres pays 24,00 $ 45,00 $NomPrénomOrganismeAdresseB.P. Ville Co<strong>de</strong> postalPaysVIE 58 Vie pédagogique 132, septembre-octobre2004appartement❑ chèque (dollars canadiens)À l’ordre <strong>de</strong> : Ministre <strong>de</strong>s FinancesAdresser à :❑ mandat postalVie pédagogiqueService <strong>de</strong> la diffusionMinistère <strong>de</strong> l’É<strong>du</strong>cation3220, rue Watt, bureau 101Sainte-Foy (Québec) G1X 4Z7CANADA

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