<strong>Le</strong> mé<strong>de</strong>cin généraliste<strong>et</strong> <strong>la</strong> <strong>douleur</strong>◗ AnatomieNé du 2 ème ganglion cervical situéen avant <strong>de</strong> l'articu<strong>la</strong>tion C1-C2,le rameau postérieur <strong>de</strong> C2 donnenaissance en arrière <strong>et</strong> pratiquementau contact <strong>de</strong> l'articu<strong>la</strong>tionC2-C3, au nerf d'Arnold, quidonne <strong>la</strong> sensibilité cutanée, <strong>de</strong>l'écaille <strong>de</strong> l'occipital au vertex.(voir figure 1)Protubérance occipitaleZone d’infiltrationLigne supérieure<strong>de</strong> <strong>la</strong> nuqueMastoï<strong>de</strong>P<strong>et</strong>it nerf occipitalGrand nerf occipital◗ Physiopathologie<strong>et</strong> diagnostic cliniqueUn syndrome cana<strong>la</strong>ire au niveau<strong>de</strong> l'émergence du nerf d'Arnoldau travers <strong>de</strong> l'aponévrose du trapèzeest récusé par <strong>de</strong>s travauxanatomiques récents.1 = Une irritation mécanique dunerf ou du ganglion rachidien C2est possible en regard <strong>de</strong>s articu<strong>la</strong>tionsC1-C2 ou C2-C3.2 = <strong>Le</strong> “dérangement inter- v e r t é-b r a l mineur” (DIM) : les massifsarticu<strong>la</strong>ires <strong>de</strong> C1-C2 <strong>et</strong> C2-C3sont sensibles à <strong>la</strong> palpation.On r<strong>et</strong>rouve au palpé-roulé unezone cellu<strong>la</strong>lgique, dans <strong>la</strong> régionsous-occipitale, fréquemmentaussi au niveau <strong>de</strong> <strong>la</strong> peau dusourcil.L'infiltration <strong>de</strong>s articu<strong>la</strong>ires C1-C2<strong>et</strong> C2-C3 avec un anesthésiquelocal fait disparaître l'hyperpathieà distance en quelques minutes. Ilest probable que ce mécanismepuisse rendre compte fréquemment<strong>de</strong>s “Arnoldalgies” rencontréesen pratique.3 = <strong>Le</strong> syndrome myofascial : l'association<strong>de</strong> points gâch<strong>et</strong>tes surles muscles trapèze <strong>et</strong> sterno-cleido-mastoïdien,<strong>et</strong> <strong>de</strong> céphaléespostérieures ou occipito-frontalesest très fréquente. Elle peut rendrecompte <strong>de</strong> nombreuses céphaléespostérieures. <strong>Le</strong>s <strong>douleur</strong>s proj<strong>et</strong>éescè<strong>de</strong>nt souvent, au moinstransitoirement à l'injection d'anesthésiqueslocaux dans lespoints gâch<strong>et</strong>tes. (voir figure 2)Grand nerf occipitalP<strong>et</strong>it nerf occipitalGrand nerfauricu<strong>la</strong>ireFigure 1◗ Diagnostic diff é r e n t i e l ,les céphalées dites “d<strong>et</strong> e n s i o n ”Des céphalées constrictives associéesà <strong>de</strong>s contractures douloureuses<strong>de</strong>s muscles cervicaux, enparticulier lorsqu'elles sont bi<strong>la</strong>téralesentrent en général dans lecadre <strong>de</strong>s fréquentes céphaléesdites “<strong>de</strong> tension”.Il existe sûrement <strong>de</strong>s formes <strong>de</strong>passages <strong>et</strong> <strong>de</strong>s associations entreces différents syndromes, dans lequel <strong>de</strong>s éléments psychologiques,émotionnels <strong>et</strong> comportementauxjouent un rôle important.Que ces éléments pré-existent ausyndrome douloureux chroniqueou qu'ils leur soient secondairesDouleurs référéesn'a guère d'inci<strong>de</strong>nce sur <strong>la</strong>conduite à tenir <strong>et</strong>, c<strong>et</strong>te questionsouvent posée n'a pas d'intérêt,car en tout état <strong>de</strong> cause, l'impassesur <strong>la</strong> prise en charge spécifique<strong>de</strong> ces facteurs aboutitgénéralement à un échec thérapeutique.Poser un diagnostic <strong>de</strong> “névralgied'Arnold” ou “d'arthrose cervicale”est évi<strong>de</strong>mment plus facile <strong>et</strong> plusrassurant. Ce <strong>de</strong>rnier impliqueune inexorable fatalité : “voussouffrez, c'est normal : c'est <strong>de</strong>l'arthrose <strong>et</strong> il n'y a rien à faire !”.<strong>Le</strong> diagnostic <strong>de</strong> “névralgie” peutêtre à l'origine d'un e m b a l l e m e n tiatrogène aboutissant é v e n t u e l l e m e n tà une casca<strong>de</strong> <strong>de</strong> gestes inutiles<strong>et</strong> parfois dangereux ( m a n i p u l a-tions, “ostéopathie”, infiltrations,c h i r u rg i e . . . ) .Aucun n'apportera une solutiondurable, <strong>et</strong> chacun est susceptible<strong>de</strong> <strong>la</strong>isser une séquelle org a n i q u e,aggravant <strong>la</strong> souffrance du patient.Il n'y a alors d'autre recours q u ecelui <strong>de</strong> passer d'une logiquecurative en échec à une démarc h eréadaptative (faire avec <strong>la</strong> doule u r, faute <strong>de</strong> pouvoir faire sans).◗ TraitementQuand <strong>la</strong> symptomatologie dure<strong>de</strong>puis plus <strong>de</strong> 3 à 6 mois, on est<strong>de</strong>vant un syndrome douloureuxchronique dont <strong>la</strong> prise en chargesera au mieux réalisée en équipemultidisciplinaire <strong>et</strong> associera <strong>de</strong>stechniques médicamenteuses <strong>et</strong>surtout <strong>de</strong>s procédures non médicamenteuses.1/ médicaments<strong>Le</strong> paracétamol <strong>et</strong> les AINS peuventêtre utiles à doses efficaces.<strong>Le</strong>s anticontracturants sont rarementefficaces à <strong>de</strong>s posologiescompatibles avec une vie active.Points gâch<strong>et</strong>tesFigure 2
La névralgie d’ArnoldParfois, les morphiniques audébut perm<strong>et</strong>tent une reprise précoce<strong>de</strong> l'activité.2/ techniquesnon médicamenteuses• Mobilisation<strong>Le</strong> port prolongé d'une minerveou d'un collier, au <strong>de</strong>là <strong>de</strong> <strong>la</strong>pério<strong>de</strong> aiguë initiale, aggrave <strong>la</strong>composante comportementale <strong>de</strong><strong>la</strong> <strong>douleur</strong> <strong>et</strong> <strong>la</strong> dépendance.<strong>Le</strong>s massages, <strong>la</strong> rééducation <strong>et</strong> <strong>la</strong>mobilisation, <strong>la</strong> reprise précoced'une activité, sont sûrement préférablesdans tous les cas.L'apprentissage d'une technique<strong>de</strong> re<strong>la</strong>xation est susceptibled'être également un point <strong>de</strong>départ pour faciliter un abordpsychologique <strong>et</strong> comportementalplus en profon<strong>de</strong>ur.• Blocs thérapeutiques<strong>Le</strong>s infiltrations <strong>de</strong> corticoï<strong>de</strong>s àl'écaille <strong>de</strong> l'occipital n'ont pas <strong>de</strong>justification en l'absence d'unecompression du nerf à ce niveau.<strong>Le</strong>s anesthésiques locaux qui leursont généralement associés peuventavoir une efficacité transitoire surune composante myofasciale lorsqu'ilssont injectés au voisinaged'un point gâch<strong>et</strong>te.L'infiltration articu<strong>la</strong>ire <strong>de</strong>vraitintéresser les <strong>de</strong>ux articu<strong>la</strong>tionsC1-C2 <strong>et</strong> C2-C3. La proximité <strong>de</strong>sespaces sous arachnoïdiens <strong>et</strong> <strong>de</strong>l'artère vertébrale impose uncontrôle par l'imagerie <strong>de</strong> <strong>la</strong> position<strong>de</strong> l'aiguille.Si <strong>de</strong>s anesthésiques locaux sontutilisés, le praticien <strong>et</strong> son environnementdoivent être préparéspour faire face à une éventuellePour mémoirerachi-anesthésie totale. Un contrôleradioscopique est suffisant <strong>et</strong> perm<strong>et</strong>un repérage précis <strong>de</strong>s articu<strong>la</strong>iressur un patient installé <strong>de</strong> 3/4ou <strong>de</strong> profil.Certains préfèrent un repérag<strong>et</strong>omo<strong>de</strong>nsitométrique sur un patienten décubitus ventral avec un abordp o s t é r i e u . r• Manipu<strong>la</strong>tions vertébrales<strong>Le</strong>s techniques manuelles myotensivespeuvent être utiles.Pratiquées avec une extrême pru<strong>de</strong>ncepar un praticien entraîné,les manipu<strong>la</strong>tions trouvent dans leDIM cervical une indication <strong>de</strong>choix. La difficulté est <strong>de</strong> trouverun correspondant sûr. Dans ledoute, il faut sûrement leur préférerles infiltrations articu<strong>la</strong>ires guidéespar l'imagerie.• Techniques <strong>de</strong> contre-stimu<strong>la</strong>tionLa neuro stimu<strong>la</strong>tion transcutanée,l'acupuncture, <strong>la</strong> mésothérapiepeuvent être un appoint antalgiqueappréciable mais ne constituent pasun traitement étiologique.• <strong>Le</strong> recours à <strong>la</strong> chirurgieIl doit rester exceptionnel. Larésection micro-chirurgicale duganglion rachidien C2 <strong>et</strong> <strong>la</strong> radicellectomiepostérieure sélectivepeuvent donner <strong>de</strong> bons résultatschez <strong>de</strong>s patients qui souffrent <strong>de</strong><strong>douleur</strong>s neurogènes, en particulierpost-traumatiques. La présence<strong>de</strong> paroxysmes névralgiques constitueun bon élément prédictif durésultat. Ces procédures neurochiru rgicales re<strong>la</strong>tivement lour<strong>de</strong>ssont donc susceptibles d'être utileschez quelques patients soigneusementsélectionnés.1 • La <strong>douleur</strong> survient dans les suites d’un traumatisme une fois sur <strong>de</strong>ux ;il faut donc interroger soigneusement son patient.2 • La gran<strong>de</strong> majorité <strong>de</strong>s névralgies d’Arnold est due à un "dérangementintervertébral mineur" ou un syndrome myofascial.◗ C o n c l u s i o n<strong>Le</strong>s <strong>douleur</strong>s cervico-céphaliqueslorsqu'elles durent, en particulierdans un contexte post-traumatique,réalisent le plus souvent <strong>de</strong>stableaux complexes auxquelsparticipent différentes composa n t e s: muscu<strong>la</strong>ire, ostéo-articu<strong>la</strong>ire,n e u r o g é n e , psychologique, émotionnelle<strong>et</strong> comportementale.Chacune <strong>de</strong> ces composantes doitêtre soigneusement évaluée <strong>et</strong> priseen charge <strong>de</strong> façon spécifique. Si <strong>la</strong>névralgie d'Arnold est souvent undiagnostic facile, elle constitueaussi parfois un diagnostic <strong>de</strong> facilité.Comme pour tout syndromedouloureux chronique, <strong>la</strong> prise enc h a rge nécessite rigueur <strong>et</strong> ténacité.Bibliographie• Becser N., Bovim G. and Sjaastad O.“Extracranial nerves in the posterior partof the head. Anatomic variation and theirpossible clinical significance.”Spine. 23, 1435-1441, 1998.• Bovim G. , Berg R. , Dale L.G.“Cervicogenic headaches : Anesth<strong>et</strong>icblocka<strong>de</strong>s of cervical nerves (C2-5)and fac<strong>et</strong> joint (C2-3).”Pain. 49, 315-320. 1992.• Henry P., Puymirat E, Dartigues J.F.,Daubech J.F. <strong>et</strong> Broch<strong>et</strong> B. : “Céphalées<strong>et</strong> rachis cervical : mythes <strong>et</strong> réalités.”Doul. <strong>et</strong> Analg. 2, 53-58, 1992.• Lozano A.M., Van<strong>de</strong>rlin<strong>de</strong>n G., Bachoo R.,and Rothbart P. : “Microsurgical C-2ganglio-nectomy for chronic intractableoccipital pain.”J. Neurosurg 89 : 359-365, 1998.• Maigne R. : “Signes cliniques <strong>de</strong>scéphalées cervicales ; leur traitement.”Méd. Hyg. 39, 1174-1185. 1981.• Murphy T.M. : “Somatic blocka<strong>de</strong> ofHead and neck. in Neural Blocka<strong>de</strong>in the Management of Pain.” M. Cousinsed. 1 vol Lippincott.507-508. 1998.3 • La physiopathologie <strong>de</strong>s syndromes myofasciaux chroniques <strong>de</strong>meure assezobscure. L’hygiène rachidienne est souvent en cause avec <strong>la</strong> répétition <strong>de</strong> positions<strong>et</strong> <strong>de</strong> mouvements inadéquats.4 • La névralgie d’Arnold est souvent à l’origine d’une casca<strong>de</strong> iatrogène parfoisdangereuse, pouvant aboutir à un syndrome douloureux chronique(<strong>douleur</strong> > 6 mois).