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Agapè sans frontières

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Bible etÉthiqueMai 2008 g MosaïqueEnvisager sa mort, c’est vivresa vieCertains voudraient nous faire croireque parler de l’euthanasie, c’est parlerde la mort, uniquement de celle-ci etqu’il serait beaucoup plus légitime deparler de la vie et de la souffrance. Iciencore la réponse esquive la question.Parler de la liberté fondamentale dedécider de sa propre mort face à unesouffrance devenue intolérable, face àla perte de cette dignité de l’être pleinementhumain, c’est surtout parler dela vie ! Donner à la personne humainela pleine et entière responsabilité dechoisir de mettre un terme à son existence,n’est-ce pas en même tempslui donner l’entière et pleine libertéd’en jouir, de la vivre de façon authentique? Reconnaître l’être comme capableet donc libre de vivre sa mort,cela signifie reconnaître sa vie commeégalement digne et grandie. C’est ainsique je peux me situer, homme parmiles hommes, soignant accompagnantcelui qui souffre, chrétien face à laRévélation.Car qui d’autre que la personne ellemême,devant sa vie, sa souffrance etsa mort, peut décider du caractère intolérableou non de ce qu’elle endure ?Qui détermine les critères ? Si c’estDieu, c’est bien dans le dialogue qu’Ilentretient avec l’être en face de Lui etcertainement pas au travers d’affirmations,de diktats prononcés par deshommes sur d’autres Hommes.Bien évidemment tout ceci nous placedevant la question fondamentale dela liberté humaine et de son usage. Lacrainte existe de voir le côté humain,charitable, fraternel de l’euthanasie(donc sa dimension spirituelle, sonrapport même avec un Dieu aimantet miséricordieux) dévoyé, détournépour en faire un instrument mortifère,de destruction et de négation àla fois de la personne humaine et del’amour divin. Pire, pour certains la loiactuelle permettrait de donner un cadrepermissif et laxiste, légalisant ungeste meurtrier et permettant tous lesdérapages.Nous ne pouvons bien entendu présagerde l’avenir. J’aimerais simplementtémoigner que cette crainte, eu égardjustement au contexte et au cadre légalactuel, m’apparaît injustifiée. Bienplus, l’acte d’euthanasie, étant reconnucomme potentiellement justifiable,place les acteurs (la personne souffrante,les soignants, l’entourage) devantune exigence radicale d’aller au boutde la question. À ma connaissance,dans tous les pays où l’euthanasie estlégalisée, chaque situation a été abordéedans le plus grand respect, avecla plus grande considération de ce quiest en jeu, en mettant en relation demanière pleine et entière les facteurshumains, spirituels, sociaux, familiaux,religieux le cas échéant. Loin de la banalisationque certains auraient pucraindre, c’est au contraire la radicalitédu questionnement, la profondeur dela réflexion et la qualité de la relationqu’on a pu constater.Au nom de quoi, de quels critères,limiter la responsabilité individuelledevant la fin de sa propre vie ? Quedeviennent alors toutes les autreslibertés si la plus fondamentale estaliénée ? À chacun bien entendu, entoute liberté, de choisir pour soi. Maisà chacun peut-être aussi, en toute solidarité,à laisser l’autre décider pourlui-même.Seul face à sa conscience, reliépar l’amourCette liberté radicale est certes le faitde la personne elle-même devant sapropre fin. Mais cette personne mêmeest un être en relation : au-delà demoi-même, je suis en relation avecles autres, si je suis croyant, je suis enrelation avec Dieu aussi. Car je n’existe,en tant que personne, que située dansun réseau de liens.La liberté et la responsabilité que jerevendique se voient donc situées enrapport avec d’autres personnes libreset responsables. La radicalité dela question est alors répartie et se vitconjointement : le droit fondamentalpour la personne de mourir dans la dignité,sa liberté foncière de couper lesliens au monde, implique de la part dece monde, des personnes en relation,la reconnaissance de ce droit, de façonresponsable également. Idéalement laliberté pour la personne de choisir safin va de pair avec la reconnaissancede ce droit de la part d’autrui et avec lepartage de cette liberté, permettant àchacun de rester en relation et de vivrepleinement et authentiquement cettefin d’existence en personnes humaines,dignes et solidaires.Nul ne peut être forcé par quiconqued’accomplir un geste d’euthanasie.Mais nul ne peut être contraint à subiret à prolonger une vie de douleur et desouffrance, indigne ou intolérable à sespropres yeux, quand l’amour fraternelde l’autre peut être là pour apporter lesoulagement et pour aider à rétablirune relation pleine et entière à soimême,aux autres et à Dieu.Daniel BURDETMédecin généralisteLicencié en théologie protestantePAGE11

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