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Marie-Anne Pierrette Paulze, épouse et collaboratrice de Lavoisier

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M.-A. <strong>Paulze</strong>, épouse <strong>et</strong> <strong>collaboratrice</strong> <strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong>, Vesalius, VI, 2,105-113, 2000<strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> <strong>Pierr<strong>et</strong>te</strong> <strong>Paulze</strong>,épouse <strong>et</strong> <strong>collaboratrice</strong> <strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong>J.J. PeumeryRésuméAntoine-Laurent <strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong> (1743-1794) est sans conteste le fondateur <strong>de</strong> la chimie mo<strong>de</strong>rne <strong>et</strong><strong>de</strong> la physiologie respiratoire. <strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> <strong>Lavoisier</strong>, son épouse, fille du fermier général Jacques<strong>Paulze</strong>, fut pour lui une compagne admirable. Du vivant <strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong>, elle collabora à son oeuvrescientifique en lui traduisant en français diverses publications <strong>et</strong> en <strong>de</strong>ssinant toutes les planchesillustrant son traité <strong>de</strong> chimie; puis, lorsqu'il mourut sur l'échafaud, victime du Tribunal révolutionnaire,en même temps que Jacques <strong>Paulze</strong>, elle voulut rendre à ce grand savant, <strong>de</strong> renomméemondiale, l'hommage le plus digne <strong>de</strong> lui en publiant ses mémoires inachevés.SummaryAntoine-Laurent<strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong> (1743-1794), French chemist, was indisputably the foun<strong>de</strong>r of mo<strong>de</strong>rnchemistry and of respiratory physiology. His wife, <strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> <strong>Lavoisier</strong>, the «fermier general»Jacques <strong>Paulze</strong>'s daughter, was for him an admirable companion. During his life, she assisted himin carrying out his work, translating for him into French several publications and drawing all theexplanatory pictures illustrating his Treatise on chemistry. Then, when he was <strong>de</strong>ad on the scaffold,victim of the Revolutionary Tribunal, at the same time as Jacques <strong>Paulze</strong>, she courageouslyen<strong>de</strong>avoured to ren<strong>de</strong>r to this great scientist the worthiest homage to him, making known memoriesof what he had begun to do before his execution.Le 8 mai 1794, tombait sous la lame <strong>de</strong> laguillotine la tête d'un <strong>de</strong>s plus grands savants quela Terre ait porté, Antoine-Laurent <strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong>. Ilavait eu le tort <strong>de</strong> mêler la politique à sa carrière <strong>de</strong>scientifique. Ses qualités <strong>de</strong> financier, jointes àcelles <strong>de</strong> chimiste <strong>et</strong> <strong>de</strong> physiologiste, avaient faitque, fils d'un fermier général <strong>et</strong> époux <strong>de</strong> la fille dufermier général Jacques <strong>Paulze</strong>, il avait acceptéc<strong>et</strong>te même charge qui lui revenait légitimement.Il fut arrêté par ordre <strong>de</strong> la Convention <strong>et</strong> traduit<strong>de</strong>vant le Tribunal révolutionnaire, le 5 mai 1794;il était accusé, ainsi que vingt-sept autres fermiersgénéraux, d'avoir détourné <strong>de</strong>s fonds pour lesverser aux ennemis <strong>de</strong> la République. Tous furentcondamnés à mort <strong>et</strong> guillotinés, le 19 floréal an II.Ses seuls défenseurs, Loysel <strong>et</strong> Halle, qui m<strong>et</strong>taienten relief la valeur scientifique du condamné,Dr Jean-Jacques Peumery, 392 avenue du Maréchal<strong>de</strong> Lattre <strong>de</strong> Tassigny, 62100 Calais, Francene furent pas entendus. Le len<strong>de</strong>main, le mathématicienLagrange, qui avait assisté à l'exécution,disait à l'astronome Delambre : «Il ne leur a falluqu'un moment pour faire tomber c<strong>et</strong>te tête, <strong>et</strong> centannées peut-être ne suffiront pas pour en reproduireune semblable» (1).Antoine-Laurent <strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong> naquit à Paris,le 26 août 1743. Né dans un milieu aisé, il eut lapossibilité <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s poussées, pourlesquelles il était très doué. En 1768, l'Académie<strong>de</strong>s sciences d'accueillait parmi ses membres.Il avait vingt-cinq ans !L'un <strong>de</strong>s plus grands mérites <strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong> estd'avoir établi le processus qui constitue l'essentiel<strong>de</strong> la fonction respiratoire. Il détruisit la vieill<strong>et</strong>héorie du phlogistique, développée par Stahl,selon laquelle le phlogistique, facteur conjectural,était présent dans tous les éléments (2) <strong>et</strong> (3).105


M.-A. <strong>Paulze</strong>, épouse <strong>et</strong> <strong>collaboratrice</strong> <strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong>, Vesalius, VI, 2, 105-113, 2000Les fonctions financières <strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong>Parallèlement à la révolution chimique dont<strong>Lavoisier</strong> sortait victorieux, une autre révolution sedéroulait dans laquelle il était <strong>de</strong>stiné à jouer unrôle tragique (4) <strong>et</strong> (5). En 1761, il avait reçu unecharge à la «Ferme générale», organisme gouvernementalqui prenait à bail la perception <strong>de</strong>simpôts indirects à <strong>de</strong>s tarifs exorbitants <strong>et</strong> suscitaitla haine <strong>de</strong>s Jacobins. Pourtant, dans c<strong>et</strong>te fonction,<strong>Lavoisier</strong> avait fait beaucoup <strong>de</strong> choses pourdévelopper l'agriculture en France <strong>et</strong> améliorer lesconditions économiques <strong>et</strong> sociales. De la grossefortune qu'il avait héritée, il avait consacré unelarge part à la population au moment <strong>de</strong> la famine,<strong>et</strong> il avait occupé plusieurs postes officiels, parmilesquels celui <strong>de</strong> régisseur <strong>de</strong>s poudres <strong>et</strong> salpêtresen 1775, membre <strong>de</strong> l'Assemblée provinciale<strong>de</strong> l'Orléanais en 1787, commissionnaire <strong>de</strong>s poids<strong>et</strong> mesures en 1790, secrétaire <strong>de</strong> la Trésorerienationale en 1791. Il avait été élu membre duComité d'agriculture en 1785; <strong>et</strong> il avait mis surpied une ferme modèle dans son domaine <strong>de</strong>Fréchines, près <strong>de</strong> Blois, pour démontrer l'avantage<strong>de</strong> la chimie agricole. Mais ses activitésofficielles, <strong>et</strong> notamment sa charge <strong>de</strong> fermiergénéral, l'avaient rendu suspect.Au mois d'août 1792, <strong>Lavoisier</strong> était explusé <strong>de</strong>son laboratoire <strong>de</strong> l'Arsenal, <strong>et</strong>, le 24 novembre1793 (4 frimaire an II), la Convention arrêtait lesmembres <strong>de</strong> la «Ferme générale», qui furent jugés,le 5 mai 1794. Trois jours plus tard, <strong>Lavoisier</strong>, ainsique les vingt-sept autres membres, étaient condamnésà mort <strong>et</strong> exécutés sur la place <strong>de</strong> laRévolution (aujourd'hui, place <strong>de</strong> la Concor<strong>de</strong>).Le mariageLes fonctions <strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong> l'avaient mis enrelation avec le fermier général Jacques <strong>Paulze</strong>qui sut justement apprécier le mérite <strong>de</strong> son jeunecollègue, <strong>et</strong>, bientôt, fut heureux <strong>de</strong> lui donner safille en mariage (6). D'abord avocat au Parlement,puis fermier général, Jacques <strong>Paulze</strong>,homme intelligent <strong>et</strong> habile, <strong>de</strong>vint directeur <strong>de</strong> laCompagnie <strong>de</strong>s In<strong>de</strong>s. Il avait épousé, en 1752,Claudine Thoyn<strong>et</strong>; quelques années plus tard,ilrestait veuf avec trois fils, Balthazar, Christian <strong>et</strong>Joseph-<strong>Marie</strong>, <strong>et</strong> une fille <strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> <strong>Pierr<strong>et</strong>te</strong>.Née en 1758, <strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> <strong>Paulze</strong> fut baptiséele 20 janvier <strong>de</strong> la même année. Elle n'avait qu<strong>et</strong>reize ans lorsque le contrôleur général Terray,dont elle était la p<strong>et</strong>ite-nièce, se mit en tête <strong>de</strong> lamarier au comte d'Amerval, frère <strong>de</strong> la baronne <strong>de</strong>La Gar<strong>de</strong>, une amie <strong>de</strong> la famille, beaucoup plusâgé qu'elle <strong>et</strong> sans état. <strong>Paulze</strong>, au risque <strong>de</strong>comprom<strong>et</strong>tre sa fortune, écrivit à son oncle maternel,le puissant contrôleur <strong>de</strong>s finances : «M.d'Amerval ne peut convenir à ma fille, ni à vous, nià moi... ma fille a pour lui une aversion décidée; jene lui ferai certainement pas violence». Ce quiétait exact; mais <strong>Paulze</strong>, redoutant <strong>de</strong> nouvellessollicitations, se résolut à marier <strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> leplus tôt possible, pour la soustraire aux avances<strong>de</strong> d'Amerval; il songea à l'unir à <strong>Lavoisier</strong>. Lemariage fut décidé au mois <strong>de</strong> novembre 1771.Tous les amis <strong>et</strong> les parents <strong>de</strong>s <strong>Paulze</strong> approuvèrentc<strong>et</strong>te union. On craignait cependant ladésapporbation <strong>de</strong> l'abbé Terray; mais l'abbé acceptala situation sans récriminer <strong>et</strong> rendit sesbonnes grâces à <strong>Paulze</strong>. Le contrat fut passé, le4 décembre 1771, par Me Duclos-Dufresnoy,notaire <strong>de</strong> l'abbé Terray. <strong>Lavoisier</strong> était alors âgé<strong>de</strong> vingt-huit ans, <strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> en avait quatorze.Voici leur portrait, d'après <strong>de</strong>s témoignages<strong>de</strong> l'époque :«<strong>Lavoisier</strong> était grand; il avait les cheveuxchâtains <strong>et</strong> les yeux gris, la bouche p<strong>et</strong>ite, unaimable sourire, un regard d'une gran<strong>de</strong> douceur.«Melle <strong>Paulze</strong> était <strong>de</strong> taille moyenne; elleavait les yeux bleus très vifs, les cheveuxbruns, qui, dans ses portraits, sont recouverts,selon la mo<strong>de</strong> du temps, d'une perruqueblon<strong>de</strong> fort disgracieuse, la bouchep<strong>et</strong>ite, le teint d'une gran<strong>de</strong> fraîcheur» (7)D'autres la dépeindront plus tard comme unejeune femme ravissante, pleine d'agréments <strong>et</strong>très aimable.106


M.-A. <strong>Paulze</strong>, épouse <strong>et</strong> <strong>collaboratrice</strong> <strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong>, Vesalius, VI, 2, 105-113, 2000L'assistance était nombreuse à la signaturedu contrat dans les salons <strong>de</strong> l'hôtel d'Aumont;c'était toute une compagnie choisie d'hommesdistingués <strong>et</strong> <strong>de</strong> femmes élégantes. Plus <strong>de</strong><strong>de</strong>ux cents personnes étaient présentes : gentilshommes,savants, hommes d'Etat, fermiersgénéraux, dames <strong>de</strong> la Cour, <strong>de</strong> la finance ou <strong>de</strong>la bourgeoisie. Le mariage fut célébré, le 16décembre 1771, dans la chapelle <strong>de</strong> l'hôtel ducontrôle <strong>de</strong>s finances, rue Neuve-<strong>de</strong>s-P<strong>et</strong>its-Champs, par le curé <strong>de</strong> la paroisse <strong>de</strong> Saint-Roch. Les témoins du marié étaient <strong>de</strong>ux parentséloignés : Hurzon, chevalier, intendant <strong>de</strong>la marine <strong>de</strong> Provence, <strong>et</strong> le fermier généralJacques Delahante, écuyer, secrétaire du roi;du côté <strong>de</strong> la mariée, ses <strong>de</strong>ux grands-onclesmaternels, l'abbé Terray, <strong>de</strong>venu ministre d'Etat,<strong>et</strong> son frère, Terray <strong>de</strong> Rozières.Ayant quité la <strong>de</strong>meure <strong>de</strong> ses parents, ruedu Four-Saint-Eustache, <strong>Lavoisier</strong> vint habiter,avec sa jeune femme, une maison sise rueNeuve-<strong>de</strong>s-Bons-Enfants, appartenant à sonpère. Les jeunes mariés y resteront jusqu'à lanomination <strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong> à la Régie <strong>de</strong>s poudres,au mois <strong>de</strong> mars 1775, époque à partir <strong>de</strong>laquelle ils seront logés à l'Arsenal.L'épouse <strong>et</strong> la <strong>collaboratrice</strong><strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> avait vite compris <strong>et</strong> apprécié lavaleur <strong>de</strong> l'homme qu'elle avait épousé. D'uneintelligence vive <strong>et</strong> d'une volonté ferme, elles'était mise immédiatement à l'étu<strong>de</strong> pour pouvoirle suivre dans ses travaux; elle <strong>de</strong>manda àson frère Belthazar <strong>de</strong>s leçons <strong>de</strong> latin <strong>et</strong> luiécrivait en 1777 (elle avait dix-neuf ans) : «Quandreviens-tu ? Le latin a besoin <strong>de</strong> toi ici...». Elleapprit l'anglais <strong>et</strong> le sut assez pour ai<strong>de</strong>r sonmari en lui traduisant un grand nombre <strong>de</strong> mémoires<strong>de</strong> chimie. Outre ses traductions inédites<strong>de</strong> Priestley, <strong>de</strong> Gavendish, <strong>de</strong> Henry, elle fitimprimer une brochure <strong>de</strong> Richard Kirwan «Surla force <strong>de</strong>s aci<strong>de</strong>s», <strong>et</strong> un ouvrage du mêmeauteur «Sur le phlogistique». Arthur Young, quilui rendit visite au mois d'octobre 1787, écrivit :«Mme <strong>Lavoisier</strong>, une personne pleine d'animation,<strong>de</strong> sens <strong>et</strong> <strong>de</strong> savoir, nous avait préparé undéjeuner anglais au thé <strong>et</strong> au café; mais lameilleure partie <strong>de</strong> son repas, c'était, sanscontredit, sa conversation, soit sur /Essai sur lePhlogistique <strong>de</strong> Kirwan, qu'elle est en train d<strong>et</strong>raduire, soit sur d'autres suj<strong>et</strong>s qu'une femme<strong>de</strong> sens travaillant dans le laboratoire <strong>de</strong> sonmari sait si bien rendre intéressants».<strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> s'initia aussi à la chimie, avec Jean-Baptiste Buqu<strong>et</strong>, qui fut le premier collaborateur <strong>de</strong><strong>Lavoisier</strong>, <strong>de</strong> 1777 à 1780. Elle <strong>de</strong>ssinait <strong>et</strong> gravait;c'est elle qui fit les planches du «Traité élémentaire<strong>de</strong> chimie» <strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong>, publié en 1789; elle avaitappris la peinture sous la direction <strong>de</strong> David, <strong>et</strong> l'onpossè<strong>de</strong> d'elle un portrait <strong>de</strong> Franklin. Celui-ci luiécrivit <strong>de</strong> Phila<strong>de</strong>lphie, le 23 octobre 1788 :«Un violent accès <strong>de</strong> goutte m'a longtempsempêché d'écrire à ma chère amie; autrement,je l'aurais remerciées plus tôt du portraitdont elle a eu la bonté <strong>de</strong> me faire présent.Ceux qui l'ont vu déclarent que la peinture a ungrand mérite, mais surtout ce qui me la rendchère, c'est la main qui l'a faite...».107


M.-A. <strong>Paulze</strong>, épouse <strong>et</strong> <strong>collaboratrice</strong> <strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong>, Vesalius, VI, 2,105-113, 2000<strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> accompagnait son mari dans lelaboratoire <strong>et</strong> l'aidait dans ses travaux; ellenotait, sous sa dictée, le résultat <strong>de</strong>s expériences,<strong>et</strong> les registres <strong>de</strong> laboratoire contiennent<strong>de</strong> nombreuses pages écrites <strong>de</strong> sa main. Ellea laissé <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>ssins inédits où elle s'est représentéeécrivant <strong>de</strong>vant une table, pendant que<strong>Lavoisier</strong> <strong>et</strong> Seguin font une expérience sur lesphénomènes <strong>de</strong> la respiration. Tous ses écritstémoignent <strong>de</strong> l'admiration qu'elle avait pour lecaractère <strong>et</strong> le génie <strong>de</strong> son mari; elle combattaità ses côtés pour le triomphe <strong>de</strong> ses idées, <strong>et</strong>cherchait à leur faire <strong>de</strong>s a<strong>de</strong>ptes.Elle était en correspondance avec Saussurequ'elle convertit à la doctrine nouvelle. Celui-cilui écrivit :« Vous triomphez <strong>de</strong> mes doutes, Madame,du moins sur le phlogistique... J'étais autrefoisgrand admirateur <strong>de</strong> Stahl... mais lespréventions les plus fortes doivent cé<strong>de</strong>r à laforce <strong>de</strong>s raisonnements <strong>de</strong> M. <strong>Lavoisier</strong> <strong>et</strong><strong>de</strong> ses savants amis...» (8).Le laboratoire <strong>de</strong> l'ArsenalPour satisfaire aux exigences <strong>de</strong> ses diversesfonctions, <strong>Lavoisier</strong> s'était imposé un emploi dutemps rigoureux. Il avait décidé <strong>de</strong> réserver sixheures par jour aux sciences; le reste <strong>de</strong> lajournée était employé à ses différentes fonctionsadministratives. Un jour <strong>de</strong> la semaine étaitentièrement consacré à ses expériences :«C'était pour lui un jour <strong>de</strong> bonheur; quelquesamis éclairés, quelques jeunes gens fiers d'êtreadmis à l'honneur <strong>de</strong> coopérera ses expériences,se réunissaient dès le matin dans le laboratoire;c'était là que l'on déjeunait, que l'ondissertait, que l'on créait c<strong>et</strong>te théorie qui aimmortalisé son auteur; c'était là qu'il fallait voir,entendre c<strong>et</strong> homme d'un esprit si juste, d'untalent si pur, d'un génie si élevé; c'était dans saconversation que l'on pouvait juger <strong>de</strong> la hauteur<strong>de</strong> ses principes <strong>de</strong> morale»,écrira <strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> dans sa notice biographique(9).Le laboratoire <strong>de</strong> l'Arsenal <strong>de</strong>vint peu à peule ren<strong>de</strong>z-vous <strong>de</strong> tous les hommes éminentsdans les sciences. <strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> faisait à la fois la«jeune fille <strong>de</strong> la maison» <strong>et</strong> la secrétaire. Elleséduisait les plus illustres; Laplace eut pour elleun seintiment tendre, qu'il ne fut pas seul àpartager, <strong>et</strong> «Dupont <strong>de</strong> Nemours en <strong>de</strong>viendraéperdûment amoureux» (10). Le physicienMagalhaens, <strong>de</strong>scendant du navigateur portugaisMagellan, chercha pour elle <strong>de</strong>s livresépuisés chez les bouquinistes londoniens.Les étrangers, qui visitaient Paris, tenaient àl'honneur d'y être reçus. Entre autres, ArthurYoung, qui se présenta avec une l<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> recommandation<strong>de</strong> Priestley; Blag<strong>de</strong>n, secrétaire perpétuel<strong>de</strong> la Société Royale <strong>de</strong> Londres; Ingenhouz,<strong>de</strong> Vienne; Fontana, conservateur du cabin<strong>et</strong> <strong>de</strong>physique du grand-duc <strong>de</strong> Toscane; le chevalierLandriani, en même temps que Welter <strong>et</strong>d'Hassenfratz, en présence <strong>de</strong>squels <strong>Lavoisier</strong>refit ses expériences relatives aux théories nouvelles,le 20 mars 1788, tandis que <strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong>traçait le récit <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te séance, dans le registre dulaboratoire, sous le titre <strong>de</strong> : «Expériences pourtenter la conversion du chevalier Landriani».Mentionnons aussi l'illustre Franklin, le chimistreallemandJacquin, l'Anglais Tennant, encore jeune<strong>et</strong> inconnu, <strong>et</strong> le célèbre ingénieur écossais Watt.Parmi les Français, Guyton <strong>de</strong> Morveau y vint,pour la première fois, en 1775. Les chimistes <strong>et</strong> lesmathématiciens <strong>de</strong> l'Académie s'y donnaient ren<strong>de</strong>z-vous.C'étaient Macquer, Darc<strong>et</strong>, Buqu<strong>et</strong>, quifut le maître <strong>de</strong> Fourcroy, <strong>et</strong> qui collabora avec<strong>Lavoisier</strong>; Cad<strong>et</strong> <strong>de</strong> Gassicourt, inventeur du«cacodyle», composé arsenical (ou «liqueur <strong>de</strong>Cad<strong>et</strong>»); Bertholl<strong>et</strong>, appelé à une glorieuse carrière;les géomètres Van<strong>de</strong>rmon<strong>de</strong> <strong>et</strong> Cousin, lesmathématiciens Lagrange, Laplace, Monge, le lieutenant<strong>de</strong> génie Meusnier, qui <strong>de</strong>vint membre <strong>de</strong>l'Académie, <strong>et</strong> mourut au champs d'honneur, ausiège <strong>de</strong> Mayence en 1793. On y voyait aussi lesgrands seigneurs, qui s'intéressaient aux sciences: le duc <strong>de</strong> La Rochefoucauld, le duc <strong>de</strong> Chaulnes,le duc d'Ayen, prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> l'Académie. Les salons108


M.-A. <strong>Paulze</strong>, épouse <strong>et</strong> <strong>collaboratrice</strong> <strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong>, Vesalius, VI, 2,105-113, 2000<strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong> accueillaient également les jeunesgens qui avaient <strong>de</strong>s dispositions pour les sciences;il leur ouvrait son laboratoire, <strong>et</strong> les m<strong>et</strong>tait enrelations avec les érudits qui le fréquentaient.Jamais <strong>Lavoisier</strong> ne communiqua une découverteà l'Académie, sans avoir préalablementrépété l'expérience en présence <strong>de</strong>s savants quivenaient lui rendre visite; il exigeait leurs critiques<strong>et</strong> soum<strong>et</strong>tait ses idées à leur accord.Les premiers déboires<strong>Lavoisier</strong> faisait, chaque année, <strong>de</strong>ux séjours<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux à trois semaines dans son domaine<strong>de</strong> Fréchines. Et <strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> dit :«C'est dans c<strong>et</strong>te habitation qu'il fallait le voir,au milieu <strong>de</strong> tous les habitants, faisant lemagistrat <strong>de</strong> paix... donnant l'exemple <strong>de</strong> toutesles vertus patriarcales, soignant les mala<strong>de</strong>s...,fondant une école pour la générationqui, avant lui, s'élevait sans aucune culture,faisant livrer ses <strong>de</strong>nrées au marché toujoursau-<strong>de</strong>ssous <strong>de</strong>s cours pour ménager la délicatesse<strong>de</strong> la plupart <strong>de</strong>s habitants...».En réalité, <strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> n'aimait pas c<strong>et</strong>te viechampêtre; elle préférait rester à Paris <strong>et</strong> y recevoirleurs amis. Parmi eux, Pierre-Samuel Dupont<strong>de</strong> Nemours tomba en admiration <strong>de</strong>vant lecharme<strong>de</strong> <strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong>. Leur idylle commença en 1781,pendant l'une <strong>de</strong>s nombreuses absences <strong>de</strong> sonmari. La date <strong>de</strong> 1781 serait confirmée par <strong>de</strong>uxl<strong>et</strong>tres <strong>de</strong> Dupont à <strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> <strong>Lavoisier</strong> : l'une,datée du 23 octobre 1798, évoque «dix-sept annéesd'intimité»; l'autre, d'avril 1815, rappelle «l'inviolable<strong>et</strong> tendre attachement qu'il lui a voué<strong>de</strong>puis trente-quatre ans» (11).Dupont <strong>de</strong> Nemours avait presque vingt ans<strong>de</strong> plus qu'elle, mais il exerçait sur elle un certainascendant par sa gai<strong>et</strong>é communicative, saverve, ses idées peu orthodoxes. Le couple<strong>Lavoisier</strong> ne semble pas avoir été perturbé parla présence <strong>de</strong> Dupont, «qui resta l'ami fidèle <strong>et</strong>sincère <strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong>». La vie intime <strong>de</strong> ce<strong>de</strong>rnier est mal connue; on trouve cependantécrit sur lui : «Il ne tient aucune place dans lachronique scandaleuse du XVIIIe siècle» (12).Peu après la prise <strong>de</strong> la Bastille, en dépit <strong>de</strong>sexécutions sommaires, la vie mondaine continuaità Paris. Le 25 septembre 1789, GouverneurMorris, alors ministre plénipotentiaire <strong>de</strong>sEtats-Unis en France, se rendit à l'Opéra, où ilrencontra <strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong>. L'ayant raccompagnée àl'Arsenal, elle lui offrit le thé, en attendant le r<strong>et</strong>our<strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong>, appelé à l'hôtel <strong>de</strong> ville. Comme<strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> confiait à son invité qu'elle n'avaitpas d'enfants, <strong>et</strong> que celui-ci l'appelait gentimentparesseuse, elle lui répondit, les larmes auxyeux, qu'elle n'avait pas eu <strong>de</strong> chance. Lorsque<strong>Lavoisier</strong> arriva, ce fut pour leur parler <strong>de</strong> l'obstination<strong>de</strong>s boulangers, qui menaçaient la municipalité<strong>de</strong> Paris <strong>de</strong> cesser leur commerce, si l'un<strong>de</strong>s leurs, emprisonné, n'était pas relâché (13).Lorsqu'il apprit qu'il était sur la liste <strong>de</strong>s fermiersgénéraux accusés <strong>de</strong> crime contre la République,<strong>Lavoisier</strong> courut se réfugier chez unancien huissier <strong>de</strong> l'Académie <strong>de</strong>s sciences, Lucas,qui habitait encore au Louvre. Celui-ci lecacha dans les locaux où l'Académie tenait sesséances. <strong>Lavoisier</strong> pensait que l'urgence <strong>de</strong> sesservices à la Commission <strong>de</strong>s poids <strong>et</strong> mesurespourrait le préserver du sort tragique <strong>de</strong>s fermiersgénéraux; mais il renonça à la lutte; il quitta l'asilehospitalier du Louvre, <strong>et</strong> vint se constituer prisonnier.Le même jour - le 8 frimaire - il était enfermé,ainsi que son beau-père Jacques <strong>Paulze</strong>, à laprison <strong>de</strong> Port-Libre, bâtie sur l'ancien couvent <strong>de</strong>Port-Royal. Il écrivit à sa femme qu'il seraitsouvent dérangé dans son travail : «on pose <strong>de</strong>splanches, on cloue, on scie, on charpente». Ils'en amusait presque.Cependant, <strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> ne restait pas inactive;elle multipliait les démarches, malgré lesrecommandations <strong>de</strong> son mari <strong>de</strong> ménager sasanté. En dépit <strong>de</strong> tous ses efforts, elle ne putobtenir que le droit <strong>de</strong> visite à son époux à laprison <strong>de</strong> Port-Libre. Par l'intermédiare du phar-109


M.-A. <strong>Paulze</strong>, épouse <strong>et</strong> <strong>collaboratrice</strong> <strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong>, Vesalius, VI, 2,105-113, 2000macien Pluvin<strong>et</strong>, fournisseur <strong>et</strong> ami <strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong>,elle eut le droit <strong>de</strong> se rendre chez Dupin, députéqui aurait pu sauver son mari; mais l'attitu<strong>de</strong>hautaine <strong>de</strong> <strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> déplut à Dupin qui ne fitrien en faveur <strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong> (14). Risquait-elle saliberté ou peut-être sa vie en multipliant les démarchesau profit <strong>de</strong> son père <strong>et</strong> <strong>de</strong> son mari ?La veuve <strong>Lavoisier</strong>Et le 8 mai 1794 arriva... Dans le même jour,<strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> vit périr son père (il précédait <strong>Lavoisier</strong>dans la fournée), son mari, ses amis les pluschers. Dépouillée <strong>de</strong> sa fortune, seule, sansparents (elle avait perdu son frère Christian quelquesmois auparavant), n'ayant pas eu d'enfants<strong>de</strong> son mariage, isolée dans son hôtel particulierdu boulevard <strong>de</strong> la Ma<strong>de</strong>leine, elle ne profitaitmême pas du silence <strong>et</strong> du repos pour mesurerl'étendue <strong>de</strong> sa douleur <strong>et</strong> pleurer ses morts; il luifallait encore subir <strong>de</strong>s visites domiciliaires. Tousles biens <strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong> étaient confisqués <strong>et</strong> appartenaientà la Nation, qui <strong>de</strong>vait en prendrepossession. Dès le 30 mai 1794, le pharmacienQuinqu<strong>et</strong> entreprit l'inventaire <strong>de</strong>s obj<strong>et</strong>s qui pouvaientêtre requis pour le service <strong>de</strong>s hôpitaux(verrerie, matériel <strong>de</strong> chimie, mercure, oxy<strong>de</strong>rouge, appareils <strong>de</strong> physique les plus récents <strong>et</strong>très précis, d'une gran<strong>de</strong> valeur).Quant à <strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong>, elle fut arrêtée, le 14 juin,par ordre du Comité <strong>de</strong> Sûr<strong>et</strong>é générale <strong>et</strong> incarcéréeà la maison d'arrêt <strong>de</strong> la rue Neuve-<strong>de</strong>s-Capucines; les scellés furent apposés sur sesmeubles <strong>et</strong> sur ses appartements privés. Après le27 juill<strong>et</strong>, la «veuve <strong>Lavoisier</strong>» s'adressa au Comitérévolutionnnaire <strong>de</strong> sa section, qui lui délivraun certificat favorable pour le Comité <strong>de</strong> Sûr<strong>et</strong>égénérale; elle obtint enfin sa mise en liberté, le 17août 1794. Dépossédée <strong>de</strong>s biens <strong>de</strong> son père <strong>et</strong><strong>de</strong> son mari, ainsi que <strong>de</strong> ses faibles revenus,<strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> fut réduite, pour subsister, à accepterles secours d'un serviteur fidèle, Masselot, qui sefit un <strong>de</strong>voir <strong>de</strong> la nourrir du produit <strong>de</strong> son travail.Heureusement, fut promulgué le décr<strong>et</strong> du 13ventôse (appliqué le 3 mai 1795), par lequel laConvention décidait que «les obj<strong>et</strong>s mobiliersconfisqués seraient restitués aux héritiers <strong>de</strong>scondamnés, les séquestres levés sans délai <strong>et</strong> lavaleur <strong>de</strong>s biens vendus remboursée sur le pied <strong>et</strong>aux condition <strong>de</strong> la vente». Le 21 messidor (10juill<strong>et</strong> 1795), paraissait la «Dénonciation <strong>de</strong>s veuves<strong>et</strong> <strong>de</strong>s enfants <strong>de</strong>s ci-<strong>de</strong>vant fermiers générauxcontre le représentant du peuple Dupin»,celui-là même qui avait dénoncé à la tribune lesexactions <strong>et</strong> les concussions <strong>de</strong>s «sangsues dupeuple». Il n'est pas impossible que l'ar<strong>de</strong>nte<strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> ait été l'inspiratrice <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te riposte, oumême qu'elle l'ait rédigée, car on a r<strong>et</strong>rouvé dansses papiers <strong>de</strong>s épreuves corrigées <strong>de</strong> sa main.Active <strong>et</strong> courageuse, <strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> <strong>Lavoisier</strong>s'empressa <strong>de</strong> prof iter <strong>de</strong> la loi du 13 ventôse; elleobtint, au mois d'avril 1796, la restitution <strong>de</strong>smeubles, <strong>de</strong>s papiers, <strong>de</strong>s livres, <strong>de</strong>s obj<strong>et</strong>s <strong>de</strong>laboratoire. Les ordres <strong>de</strong> restitution portaient lamention : «Veuve <strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong>, injustement condamné».Il lui fut permis <strong>de</strong> toucher ses revenus,<strong>et</strong> la première chose que fit c<strong>et</strong>te «âme généreuse»fut <strong>de</strong> récompenser par <strong>de</strong>s dons d<strong>et</strong>erres les serviteurs qui lui étaient restés fidèles- Louis-Antoine Masselot, en particulier, reçut enpartage les terres sises aux Batignolles. Elleexprima toute sa gratitu<strong>de</strong> à l'abbé Morell<strong>et</strong>,l'auteur du «Cri <strong>de</strong>s familles», en lui offrant 100louis; <strong>et</strong>, à partir <strong>de</strong> 1816, elle lui fit verser unepension. Elle témoigna aussi sa reconnaissanceenvers le Lycée <strong>de</strong>s Arts qui avait eu la témérité<strong>de</strong> couronner <strong>Lavoisier</strong>, l'avant-veille <strong>de</strong> sa mort,dans les cachots <strong>de</strong> la Conciergerie.La poursuite <strong>de</strong> l'oeuvre <strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong>Pendant les années qui suivirent l'exécution<strong>de</strong>s fermiers généraux, <strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> s'employasurtout à poursuivre l'oeuvre entreprise par sonmari <strong>et</strong> interrompue par la mort.En 1792, <strong>Lavoisier</strong> avait envisagé <strong>de</strong> publierses principaux mémoires <strong>et</strong> d'y ajouter les travauxd'autres savants qui avaient contribué àj<strong>et</strong>er les fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> la chimie mo<strong>de</strong>rne.110


M.-A. <strong>Paulze</strong>, épouse <strong>et</strong> <strong>collaboratrice</strong> <strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong>, Vesalius, VI, 2,105-113, 2000L'ouvrage <strong>de</strong>vait comporter huit volumes; quand<strong>Lavoisier</strong> mourut, l'impression <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux premiersvolumes était presque terminée. En 1796,<strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> <strong>de</strong>manda à Armand Seguin <strong>de</strong> rédigerune préface, dans laquelle il flétrirait leshommes coupables <strong>de</strong> la mort <strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong>.Seguin refusa en prétextant que ce serait leurfaire trop d'honneur que <strong>de</strong> parler d'eux, mêmed'une manière très péjorative (15). En réalité,Seguin voulait s'attribuer une part égale à celle<strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong> dans la publication <strong>de</strong>s mémoires.<strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> renonça d'abord à son proj<strong>et</strong>;elle le reprit quelques années plus tard. Ellerédigea elle-même, en 1803, une introduction,où elle exposait simplement les conditions danslesquelles <strong>Lavoisier</strong> avait entrepris ce travail.En voici le texte intégral :«En 1792, M. <strong>Lavoisier</strong> avait conçu le proj<strong>et</strong><strong>de</strong> faire un recueil <strong>de</strong> tous ses mémoires lusà l'Académie <strong>de</strong>puis vingt ans. C'était enquelque manière faire l'histoire <strong>de</strong> la chimiemo<strong>de</strong>rne. Pour rendre c<strong>et</strong>te histoire plus intéressante<strong>et</strong> plus complète, il s'était proposé d'yintercaler les mémoires <strong>de</strong> personnes qui, ayantadopté son système, avaient fait <strong>de</strong>s expériencesà son appui. Ce recueil <strong>de</strong>vait formerenviron huit volumes.«L'Europe sait pourquoi ils n'ont pas étéachevés.«On a r<strong>et</strong>rouvé presque tout le premier, lesecond en entier, quelques feuilles du quatrième.Plusieurs savants ont désiré qu'ilsfussent mis au jour. On a longtemps hésité. Ilest difficile <strong>de</strong> ne pas éprouver une sorte <strong>de</strong>crainte, lorsqu'il s'agit <strong>de</strong> publier <strong>de</strong>s écrits quen'a point terminés un homme qui jouit avecjustice d'une gran<strong>de</strong> réputation. C'estquandonl'a perdu que l'amitié doit commencera <strong>de</strong>venirsévère, <strong>et</strong> ne faire paraître que ce qui peutajoutera la gloire d'un être chéri <strong>et</strong> vénéré.«On aurait persisté, <strong>et</strong> ces fragmentsn'auraient point paru, s'ils ne contenaient(page 78 du second volume) un mémoire <strong>de</strong>M. <strong>Lavoisier</strong>, qui réclame, d'après les faitsqu'il y expose, la nouvelle théorie chimiquecomme lui appartenant.«C'est donc un <strong>de</strong>voir envers lui que <strong>de</strong> fixerl'opinion <strong>de</strong>s savants sur c<strong>et</strong>te vérité. On leur<strong>de</strong>man<strong>de</strong> l'indulgence pour les fautes qui pourraients'être glissées dans quelque autre partie<strong>de</strong> ce recueil. Ils l'accor<strong>de</strong>ront, lorsqu'ils saurontque la plupart <strong>de</strong>s épreuves ont été revuesdans les <strong>de</strong>rnier moment <strong>de</strong> l'auteur, <strong>et</strong> que,tandis qu'il n'ignorait pas qu'on préméditait sonassassinat, M. <strong>Lavoisier</strong>, calme <strong>et</strong> courageux,s'occupant d'un travail qu'il croyait utile auxsciences, donnait un grand exemple <strong>de</strong> lasérénité que les lumières <strong>et</strong> la vertu peuventconserver au milieu <strong>de</strong>s plus affreux malheurs!»(16).<strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> laissait entendre que <strong>Lavoisier</strong>revendiquait pour lui seul la paternité <strong>de</strong>s découvertes,comme il l'écrivit : «C<strong>et</strong>te théorien'est donc pas, comme je l'entends dire, lathéorie <strong>de</strong>s chimistes français : elle est la mienne,<strong>et</strong> c'est une propriété que je réclame auprès <strong>de</strong>mes contemporains <strong>et</strong> <strong>de</strong> la postérité». Les<strong>de</strong>ux volumes <strong>de</strong>s «Mémoires <strong>de</strong> chimie» parurenten 1805; ils ne furent pas commercialisés,mais offerts à toutes les personnes éminentes<strong>de</strong> l'époque. Cuvier la remercia dans les termessuivants :«Madame, la Classe me charge <strong>de</strong> vousadresser ses remerciements pour l'ouvrageprécieux que vous avez bien voulu lui donner...Perm<strong>et</strong>tez-moi d'y joindre le témoignage<strong>de</strong> ma propre reconnaissance. Tousles amis <strong>de</strong>s sciences vous en doivent pourla douloureuse détermination que vous avezprise <strong>de</strong> publier ce recueil... Ces volumesincompl<strong>et</strong>s, ces phrases interrompues, fontune impression terrible... Comme on sent serenouveler dans toute sa force l'horreur ducrime qui a privé (<strong>de</strong> vérités) l'humanité,peut-être pour <strong>de</strong>s siècles !» (17).A c<strong>et</strong>te époque, le mot «classe» signifiait unensemble <strong>de</strong> personnes liées entre elles parcertains caractères communs (mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> vie,intérêts, culture). Sous le terme <strong>de</strong> «classe»,Cuvier désignait l'Académie <strong>de</strong>s sciences.111


M.-A. <strong>Paulze</strong>, épouse <strong>et</strong> <strong>collaboratrice</strong> <strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong>, Vesalius, VI, 2,105-113, 2000Le salon <strong>de</strong> Madame <strong>Lavoisier</strong> - Le comte<strong>de</strong> Rumford<strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> <strong>Lavoisier</strong> habitait alors un hôtel <strong>de</strong>la rue d'Anjou-Saint-Honoré; elle avait ouvert sonsalon, où se r<strong>et</strong>rouvaient périodiquement les hommes<strong>de</strong> sciences les plus illustres, Delambre, Cuvier,Prony, Lagrange, Laplace, Bertholl<strong>et</strong>, Arago,Biot, Humboldt... Sur le point <strong>de</strong> partir pour lesAmériques, Dupont <strong>de</strong> Nemours écrivit plusieursl<strong>et</strong>tres d'adieu à <strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong>. Avant <strong>de</strong> s'embarquer,le 16 septembre 1799, il déclarait encore :«Il faut bien vous aimer d'amour, avec unenuance ou avec l'autre. J'ai l'expérience quevous n'êtes pas propre à l'amitié. Vousn'avez ni ses épanchements, ni son intérêt, nises consolations, ni ses conseils, ni sescaresses, ni ses discours, ni son doux silence.Où cesse votre tendresse, tout cesse.Vous <strong>de</strong>venez froi<strong>de</strong>, dure, querelleuse, <strong>et</strong>c'est l'expression désobligeante qui arrived'elle-même sur vos lèvres» (18).<strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> ne répondit pas à c<strong>et</strong>te l<strong>et</strong>tre;elle ne partageait plus c<strong>et</strong>te passion amoureuse.L'avait-elle seulement partagée ?Parmi les habitués <strong>de</strong> son salon, figurait lecomte <strong>de</strong> Rumford. Né en Amérique en 1753,Benjamin Thompson n'avait pas épousé la cause<strong>de</strong> ses concitoyens; il combattit dans les rangs <strong>de</strong>l'armée anglaise, lors <strong>de</strong> la guerre <strong>de</strong> l'Indépendanceaméricaine; il parvint au gra<strong>de</strong> <strong>de</strong> lieutenant-colonel<strong>et</strong> reçut en Angl<strong>et</strong>erre le titre <strong>de</strong>chevalier. En 1790, il passa au service <strong>de</strong> laBavière, en tant qu'ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> camp <strong>de</strong> l'ElecteurKarl-Theodor, qui le désigna comme surintendant<strong>de</strong> la police. Il fut nommé «comte <strong>de</strong>Rumford» par l'Electeur. Rumford se fit remarquerpar ses qualités d'administrateur <strong>et</strong> <strong>de</strong> physicien;il faisait <strong>de</strong>s expériences remarquablessur la chaleur <strong>et</strong> la lumière, inventait le chauffagepar la vapeur <strong>et</strong>, en observant le dégagement <strong>de</strong>chaleur provoqué par le forage <strong>de</strong>s canons,découvrait la transformation du mouvement encalories. Il détruisit lathéorie du calorique, comme<strong>Lavoisier</strong> avait détruit celle du phlogistique.Si Rumford apporta <strong>de</strong> nombreuses réformessociales, il eut aussi une activité scientifiqueoriginale qu'il employait à perfectionner les foyers<strong>et</strong> les cheminées; on lui attribue l'invention d'unecasserole à double fond, d'une cuisinière, d'unecaf<strong>et</strong>ière verseuse à filtre. Il introduisit la culture<strong>de</strong> la pomme <strong>de</strong> terre qui <strong>de</strong>vint un aliment <strong>de</strong>base; c'est leur politique agricole commune quirapporcha Rumford du ménage <strong>Lavoisier</strong> <strong>et</strong> lesdisposa à <strong>de</strong>s rapports amicaux. A la mort <strong>de</strong>l'Electeur, Rumford quitta la Bavière <strong>et</strong> vint sefixer en France. Il <strong>de</strong>manda <strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> enmariage, <strong>et</strong> celle-ci, voyant en lui un hommecomme <strong>Lavoisier</strong> attaché aux progrès <strong>de</strong> lascience <strong>et</strong> un bienfaiteur <strong>de</strong> l'humanité, accepta<strong>de</strong> l'épouser. Le mariage eut lieu le 22 novembre1805. Elle avait quarante-sept ans, <strong>et</strong> lui cinquante-<strong>de</strong>ux.Mais il y eut une incompatibilitéd'humeur, <strong>de</strong>s heurts fréquents entre les <strong>de</strong>uxépoux; le ménage se dégrada progressivement,<strong>et</strong> leur union se solda par une séparation àl'amiable en 1809. Rumford mourut en 1814.L'apogée du salon <strong>de</strong> Madame <strong>Lavoisier</strong>Guizot, qui fréquenta le salon <strong>de</strong> «Mme <strong>de</strong>Rumford», dit: «Depuis c<strong>et</strong>te époque, <strong>et</strong> pendantvingt-sept ans, aucun événement, on pourraitdire aucun inci<strong>de</strong>nt, ne dérangea plus Mme <strong>de</strong>Rumford dans sa noble <strong>et</strong> agréable façon <strong>de</strong>vivre. Elle n'appartint plus qu'à ses amis <strong>et</strong> à lasociété qu'elle recevait avec un mélange assezsingulier <strong>de</strong> ru<strong>de</strong>sse <strong>et</strong> <strong>de</strong> politesse, toujours d<strong>et</strong>rès bonne compagnie <strong>et</strong> d'une gran<strong>de</strong> intelligencedu mon<strong>de</strong>, même dans ses brusqueries<strong>de</strong> langage <strong>et</strong> ses fantasmes d'autorité» (19). Ilest certain que l'âge <strong>et</strong> les souffrances qu'elleavait endurées avaient influé sur sa personnalité.Ses jolis traits <strong>de</strong> visage s'étaient durcis, sasilhou<strong>et</strong>te s'était épaissie, <strong>de</strong> telle sorte que les<strong>de</strong>scriptions qu'on a d'elle à c<strong>et</strong>te pério<strong>de</strong> - <strong>et</strong>notamment celles <strong>de</strong> A.F. <strong>de</strong> Frénilly, GeorgesSand, P. Mérimée, A. Delahante - sont beaucoupmoins flatteuses que celles du début. Les sobriqu<strong>et</strong>sdéplaisants tirés <strong>de</strong> sa conformation physiquene manquaient pas.112


M.-A. <strong>Paulze</strong>, épouse <strong>et</strong> <strong>collaboratrice</strong> <strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong>, Vesalius, VI, 2,105-113, 2000Et pourtant, Dupont <strong>de</strong> Nemours lui écriraencore, en quittant définitivement la France enavril 1815, pendant les Cent-Jours, c<strong>et</strong>te ultimel<strong>et</strong>tre d'amour : «Quelque part que je sois <strong>et</strong>autant que pourra durer ma carrière, vous aurezun intime ami, <strong>et</strong> celui qui a fait le plus d'effortspour se rendre digne <strong>de</strong> vos bontés...». Il mourra<strong>de</strong>ux ans plus tard, à Wilmington.Le salon <strong>de</strong> <strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> <strong>Lavoisier</strong> ne se fermaqu'à sa mort. Citons encore parmi ses habitués:Théodore <strong>de</strong> Lam<strong>et</strong>h, général <strong>et</strong> homme politiquefrançais; Lally <strong>de</strong> Tollendal, fils du gouverneurgénéral <strong>de</strong>s Etablissements français dans l'In<strong>de</strong>,qui réhabilita son père fusillé en 1766 pour uneprétendue trahison; Lebrun, duc <strong>de</strong> Plaisance, quifut architrésorier <strong>de</strong> l'Empire <strong>et</strong> créa la Cour <strong>de</strong>scomptes; Champagny, duc <strong>de</strong> Cadore, qui futministre <strong>de</strong>s relations extérieures <strong>de</strong> Napoléon;Prosper Brugière, baron <strong>de</strong> Barante, qui occupa <strong>de</strong>hauts postes sous l'Empire <strong>et</strong> la Restauration, puissous Louis-Philippe; le duc <strong>de</strong> Broglie, qui se signala,sous la Restauration, par sa politique libérale,puis se ralia à Louis-Philippe <strong>et</strong> <strong>de</strong>vint prési<strong>de</strong>ntdu Conseil; M. <strong>et</strong> Mme <strong>de</strong> Rémusat, gens <strong>de</strong>l<strong>et</strong>tres; Lady Edgeworth, femme <strong>de</strong> l<strong>et</strong>tres angloirlandaise;lord Holland, homme politique britannique;Such<strong>et</strong>, ducd'Albufera, maréchal <strong>de</strong> France...C'est dire que ce salon réunissait la haute société,<strong>et</strong> <strong>de</strong>s hommes importants appartenant à l'Empire,à la Restauration <strong>et</strong> à la Monarchie <strong>de</strong> Juill<strong>et</strong>.<strong>Marie</strong>-<strong>Anne</strong> <strong>Lavoisier</strong> mourut subitement, le10 février 1836; née en 1758, elle était âgée <strong>de</strong>78 ans. Toute sa vie, elle s'efforça <strong>de</strong> rendre àson mari l'hommage le plus digne <strong>de</strong> lui; elle estl'exemple du courage <strong>et</strong> <strong>de</strong> la fidélité profon<strong>de</strong>.Bibliographie1. DelambreJ.B. (1812), Eloge <strong>de</strong> Lagrange, Mémoires<strong>de</strong> l'Institut, p. XIV.2. Bin<strong>et</strong> Léon (1946), Figures <strong>de</strong> savants français.Paris, Vigot frères, 116 pagers in-12°, p. 17-35.3. Grimai Pierre (1958), Dictionnaire <strong>de</strong>s biographies -Presses Universitaires <strong>de</strong> France, Paris, Tome II, p.864-8654. SchelerThomas (Paris), Hlll Jonathan A. (New-York)(1994), <strong>Lavoisier</strong> (1743-1794)5. Le cinquentanaire <strong>de</strong> la Société <strong>de</strong>s Sciences médicales<strong>de</strong> Gannat - séance du 30 - Hommage à <strong>Lavoisier</strong>(1895), Montluçon, Imprimerie du Centre médical6. Grimaux Edouard (1888), <strong>Lavoisier</strong> (1743-1794),d'après sa correspondance, ses manuscrits, sespapiers <strong>de</strong> famille <strong>et</strong> d'autres documents inédits. 1volume, 398 pages, Paris, Félix Adam, p. 35.7. Grimaux Edouard, Ibi<strong>de</strong>m, p. 38.8. L<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> Saussure à Mme <strong>Lavoisier</strong>, datée <strong>de</strong> Genèvele 7 novembre 1788.9. Grimaux Edouard, Ibi<strong>de</strong>m, p. 4510. Decourt Philippe (1974), L'aventure scientifique <strong>Lavoisier</strong><strong>et</strong> la Révolution - Archives internationalesClau<strong>de</strong> Bernard, 3ème trimestre 1974, n°7, p. 25.11. Poirier Jean-Pierre (1993), Antoine Laurent <strong>de</strong> <strong>Lavoisier</strong>(1743-1794), 1 volume, 545 pages in-8°. Paris,Pygmalion (Gérard Watel<strong>et</strong>), p. 137, note 26.12. Grimaux Edouard, Ibi<strong>de</strong>m, p. 6113. Paris<strong>et</strong> E. (1901) Journal <strong>de</strong> Gouverneur Morrispendant les années 1789, 1790, 1791 <strong>et</strong> 1792, 1volume, VII-388 pages in-8°. Paris, Plon-Nourrit,p.79. - Morris Gouverneur : A diary of the FrenchRévolution. Boston, 1939, Volume 1, p.230.Les notes journalières <strong>de</strong> Gouverneur Morris n'ont pasété écrites en vue <strong>de</strong> la publication. Le style en estnégligé <strong>et</strong> ne rappelle que <strong>de</strong> fort loin celui <strong>de</strong>s articlesqu'il fit paraître dans divers périodiques. Plusieurséditeurs ont entrepris <strong>de</strong> faire connaître au public lesdivers papiers laissés par Morris à sa mort. Dès 1832,Jared Sparks publiait à Boston trois volumes comprenantla vie <strong>et</strong> <strong>de</strong>s extraits du Journal <strong>de</strong> Morris.14. Poirier Jean-Pierre, Ibi<strong>de</strong>m, p. 395-39615. L<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> Seguin du 30 messidor an IV -18 juill<strong>et</strong> 179616. Mémoires <strong>de</strong> chimie, 2 volumes in-8° : le permier <strong>de</strong>s<strong>de</strong>ux a 416 pages; le second renferme la 2ème <strong>et</strong> la3ème partie formant 413 pages, <strong>et</strong> une 4ème partie<strong>de</strong> 64 pages. L'introduction <strong>de</strong> 2 pages est <strong>de</strong> Mme<strong>Lavoisier</strong> (1806).17. L<strong>et</strong>tre du 22 fructidor an III, 9 août 1805 (?)'18. Poirier Jean-Pierre, Ibi<strong>de</strong>m, p. 43319. Guizot (1868), La comtesse <strong>de</strong> Rulford - «Mélangesbiographiques <strong>et</strong> littéraires», in-18. Paris, Lévy frères,1868.BiographieDocteur en mé<strong>de</strong>cine (Paris), docteur en histoire <strong>et</strong>philosophie <strong>de</strong>s sciences (Paris-Sorbonne), trois foislauréat <strong>et</strong> médaille d'argent <strong>de</strong> l'Académie nationale<strong>de</strong> mé<strong>de</strong>cine, Jean-Jacques Peumery est l'auteur <strong>de</strong>nombreuses publications <strong>et</strong> <strong>de</strong> plusieurs ouvragessur la pneumologie <strong>et</strong> sur l'histoire <strong>de</strong> la mé<strong>de</strong>cine.113

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