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Sophus Lie, Friedrich Engel et le problème de Riemann ... - DMA - Ens

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Préfacepar Jean-Jacques Szczeciniarz 1S’il arrivait même en dormant . . . qu’un géomètre inventât quelquenouvel<strong>le</strong> démonstration, son sommeil ne l’empêcherait pas d’êtrevraie. DESCARTES, Discours <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong> IV ème partie A. T. VI 39(citation tirée <strong>de</strong> [26] que je dédie à la mémoire <strong>de</strong> Laurent Schwarz).Le travail qui vous est livré est <strong>le</strong> résultat d’une réf<strong>le</strong>xion qui s’effectuesur trois registres, philosophique, mathématique <strong>et</strong> historique.Par ces trois voies, il doit perm<strong>et</strong>tre au <strong>le</strong>cteur d’entrer dans l’œuvre profon<strong>de</strong><strong>et</strong> diffici<strong>le</strong> du mathématicien <strong>Sophus</strong> <strong>Lie</strong>. Si <strong>Lie</strong> est connu pour<strong>le</strong>s concepts fondamentaux qu’il a introduits (groupes <strong>et</strong> algèbres <strong>de</strong><strong>Lie</strong>, omniprésents dans <strong>le</strong>s mathématiques), on connaît peu son œuvregigantesque dans son ensemb<strong>le</strong>, ses lignes directrices <strong>et</strong> ses objectifs,<strong>et</strong> surtout son unité. C’est à ces travaux trop vastes pour être maîtrisés,écrits en norvégien <strong>et</strong> en al<strong>le</strong>mand, que la présentation <strong>de</strong> Joël Merkernous introduit d’abord. Mais <strong>le</strong> <strong>le</strong>cteur qui <strong>le</strong> suivra dépassera <strong>le</strong>sta<strong>de</strong> déjà remarquab<strong>le</strong> d’une introduction : il comprendra à quel<strong>le</strong> stratégied’ensemb<strong>le</strong> obéit ce singulier mathématicien qui, dans son genre,domine la fin du 19 ème sièc<strong>le</strong> ; <strong>le</strong> <strong>le</strong>cteur saisira aussi quel<strong>le</strong> singulièreobstination <strong>et</strong> quel<strong>le</strong> forme <strong>de</strong> puissance productrice — cel<strong>le</strong>s d’un mathématicien— ont présidé au travail <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>.Nous voudrions présenter quelques réf<strong>le</strong>xions que suggère <strong>le</strong> genre<strong>de</strong> travail auquel nous avons affaire. Les trois catégories <strong>de</strong> personnagesthéoriques qui occupent l’espace <strong>de</strong>s recherches qui sont présentées icitravail<strong>le</strong>nt <strong>et</strong> doivent travail<strong>le</strong>r nécessairement dans la plus étroite collaboration,<strong>et</strong> pourtant, <strong>le</strong> statut <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs productions <strong>le</strong>s rend absolumentautonomes. Le texte philosophique possè<strong>de</strong> ses énoncés <strong>et</strong> sa cohérencepropre, comme <strong>le</strong> travail mathématique qui est exposé <strong>et</strong> prolongé, <strong>de</strong>la même façon que <strong>le</strong>s questions d’histoire <strong>et</strong> d’historiographie qui sont1 Professeur à l’Université Paris Di<strong>de</strong>rot.


Préface au livre <strong>de</strong> Joël Merkerixnécessaire <strong>de</strong> développer d’autres mathématiques à côté <strong>de</strong> cel<strong>le</strong>s quil’ont été. Dans nombre d’endroits <strong>de</strong> son analyse, l’auteur entrant dansla pensée <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> en fournit précisément d’autres prolongements, qui effectuent<strong>de</strong>s trajectoires nouvel<strong>le</strong>s, laissant voir ce que c<strong>et</strong>te créationnouvel<strong>le</strong> appel<strong>le</strong>.Il n’y a donc pas, redisons-<strong>le</strong>, <strong>de</strong> théorie morte, parce qu’il n’ya pas au cours <strong>de</strong> l’histoire <strong>de</strong> théorie qui s’iso<strong>le</strong>rait <strong>de</strong> l’ensemb<strong>le</strong> <strong>de</strong>sthéories mathématiques. D’où ces r<strong>et</strong>ours maintes fois notés dans la pratiquemathématique <strong>de</strong> métho<strong>de</strong>s réactualisées. Un résultat sédimentéest repris dans l’horizon du système ouvert <strong>de</strong> médiations possib<strong>le</strong>s dans<strong>le</strong>quel est offerte toute idéalité ([26], p. 112).De plus, un travail comme celui-ci m<strong>et</strong> en évi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong>ux caractéristiquesconceptuel<strong>le</strong>s essentiel<strong>le</strong>s du corpus mathématique : sa puissancearchitectonique. C’est sans doute un <strong>de</strong>s faits saillants <strong>de</strong> l’histoire<strong>de</strong>s mathématiques du 20 ème sièc<strong>le</strong> d’avoir traité c<strong>et</strong>te architectoniquecomme tel<strong>le</strong> (Grothendieck, H. Cartan, Serre par exemp<strong>le</strong>), ce quise vérifie dans <strong>le</strong>s nouvel<strong>le</strong>s structures, <strong>le</strong>s chemins transversaux, <strong>le</strong>s trajectoiresinter-disciplinaires, <strong>le</strong>s nouvel<strong>le</strong>s unités disciplinaires que <strong>le</strong>sœuvres ont fait apparaître, <strong>et</strong> en même temps son aspect labyrinthique,c’est-à-dire <strong>le</strong> fait que <strong>de</strong>s résultats un temps si<strong>le</strong>ncieux puissent ressurgirpar <strong>de</strong>s voies imprévues, <strong>de</strong>s théorèmes se trouver redémontrésdans un autre cadre <strong>et</strong> acquérir <strong>de</strong> nouvel<strong>le</strong>s significations. De nouvel<strong>le</strong>scontemporanéités sont mises en place.Le plus souvent, la philosophie <strong>de</strong>s mathématiques officiel<strong>le</strong> laissemalheureusement échapper ces faits qui sont <strong>de</strong> ceux qui par<strong>le</strong>nt <strong>le</strong> plusaux mathématiciens. Je choisis par exemp<strong>le</strong> la manière dont Grothendieck,reprenant l’analogie constatée entre la théorie <strong>de</strong> Galois algébrique<strong>et</strong> la topologie algébrique <strong>de</strong> Poincaré (théorie <strong>de</strong>s revêtements<strong>et</strong> groupe <strong>de</strong> Poincaré), construit <strong>le</strong> concept <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te analogie à traversla théorie <strong>de</strong>s catégories <strong>et</strong> invente la théorie du foncteur fibre.Aux historiens <strong>de</strong>s mathématiques. Il est d’une évi<strong>de</strong>nce cruel<strong>le</strong> qu<strong>et</strong>oute élaboration philosophique ou mathématique portant sur un textehistoriquement daté doit se soum<strong>et</strong>tre au critère <strong>de</strong> son historicité, siun tel critère existe ; s’il n’existe pas, il faut <strong>le</strong> faire surgir. L’histoiresuppose <strong>de</strong> ce point <strong>de</strong> vue que l’on puisse produire une mise à distancesuffisante du texte à l’étu<strong>de</strong>, pour en discerner la spécificité. Ledépaysement construit <strong>de</strong> la sorte se propose toujours comme objectif<strong>de</strong> ressaisir <strong>le</strong>s formes mathématiques qui ont donné sens au résultatdont on construit l’histoire.


xJean-Jacques SzczeciniarzMais c’est <strong>de</strong> la spécificité <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te mathématique qu’il s’agit. Et iln’est pas d’histoire <strong>de</strong>s mathématiques sans hypothèses philosophiquesexplicites, ou implicites, sans choix d’interprétation, sans valorisationépistémologique. De ce point <strong>de</strong> vue, <strong>de</strong> tel<strong>le</strong>s hypothèses doivent pouvoirpasser par <strong>le</strong> crib<strong>le</strong> <strong>de</strong> l’argumentation philosophique. Mais il estd’une nécessité absolue que l’historien comprenne <strong>et</strong> conçoive <strong>le</strong>s mathématiquesqu’il situe dans une histoire. Et c’est du cœur <strong>de</strong>s mathématiquesque c<strong>et</strong>te compréhension doit surgir. Et il est à la limite possib<strong>le</strong>qu’une explication historique ou revendiquée comme tel<strong>le</strong> induise unecompréhension mathématique précisément parce qu’el<strong>le</strong> se sera inséréedans une nouvel<strong>le</strong> trajectoire interne aux mathématiques. Commentl’historien sait-il qu’il comprend ? Comme tout mathématicien qui saitqu’il comprend, pas seu<strong>le</strong>ment par l’expérience du vrai, mais parce quece savoir est à <strong>de</strong>s niveaux différents savoir <strong>de</strong> lui-même : verum in<strong>de</strong>xsui. C’est ensuite que <strong>le</strong>s modalités du vrai <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’accès au vrai peuventêtre extrêmement différentes.Il est nombre <strong>de</strong> travaux mathématiques historiques qui butent sur<strong>le</strong>s questions classiques <strong>et</strong> aporétiques <strong>de</strong>s bons choix <strong>de</strong> récurrence.Les réponses ne peuvent se chercher <strong>et</strong> se trouver que dans la compréhensionmathématique explicite <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur obj<strong>et</strong> d’étu<strong>de</strong>. Mais ce pointmérite lui aussi quelques précisions.Le <strong>de</strong>venir mathématique apparaît d’abord comme autonome <strong>et</strong> endogène.C<strong>et</strong>te caractérisation implique, comme je l’ai dit ci-<strong>de</strong>ssus, tous<strong>le</strong>s travaux historiques qui semb<strong>le</strong>nt al<strong>le</strong>r dans <strong>le</strong> sens <strong>de</strong>s déterminationsextérieures. El<strong>le</strong> ne s’y oppose nul<strong>le</strong>ment, mais un obj<strong>et</strong>, un théorème,une théorie ne sont tels que dès lors qu’ils ont été installés dans<strong>le</strong> <strong>de</strong>venir immanent <strong>de</strong>s mathématiques. Du ressort d’une causalité occasionnel<strong>le</strong>indispensab<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s extérieures, <strong>le</strong>s formes institutionnel<strong>le</strong>snécessaires <strong>et</strong> contingentes, <strong>le</strong>s exigences <strong>de</strong> la vie courantene peuvent expliquer un <strong>de</strong>venir mathématique que si el<strong>le</strong>s ont été reprises<strong>et</strong> installées dans <strong>le</strong> corpus pour ne plus se voir <strong>et</strong> se comprendreque comme déduites <strong>de</strong>, ou construites à partir <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>rnier. Et <strong>de</strong> cefait, ces déterminations sont complètement transformées. Au cours <strong>de</strong>ce développement, <strong>le</strong>s mathématiques, <strong>le</strong>s métho<strong>de</strong>s acquièrent puissanceà l’égard <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs obj<strong>et</strong>s. El<strong>le</strong>s reprennent <strong>le</strong>urs acquis. Le <strong>de</strong>venirdéploie une circularité <strong>de</strong> renvois <strong>de</strong>s obj<strong>et</strong>s aux actes <strong>et</strong> <strong>de</strong>s actes auxobj<strong>et</strong>s.Ni découverte, ni invention. Ni succession d’inventions ni succession<strong>de</strong> découvertes. Une innovation introduit un nouveau système <strong>de</strong>


Préface au livre <strong>de</strong> Joël Merkerxirelations, certaines entre <strong>de</strong>s domaines qui ne paraissaient pas interconnectés,<strong>le</strong> champ thématique peut s’en trouver structura<strong>le</strong>ment modifié.Une synthèse nouvel<strong>le</strong> apparaît qui réveil<strong>le</strong> <strong>de</strong>s relations anciennes entre<strong>de</strong>s potentiels d’idéalités ; alors c<strong>et</strong>te exploration que la situation induitpeut faire penser l’historien qui se m<strong>et</strong> au travail à la constatation qu’ila affaire à une découverte. Mais el<strong>le</strong> n’est là que parce que <strong>le</strong> mathématiciena inventé c<strong>et</strong>te insertion inattendue <strong>de</strong>venue alors nécessaire.<strong>Riemann</strong>, Lebesgue <strong>et</strong> Archimè<strong>de</strong> sont soudain <strong>de</strong>venus voisins, toutcomme Gromov <strong>et</strong> Eudoxe.Aux philosophes, encore. <strong>Riemann</strong> pratique la philosophie : Joël Merkerreprend minutieusement l’analyse riemannienne <strong>de</strong> Herbart, <strong>et</strong> lastratégie philosophique que <strong>Riemann</strong> en tire, stratégie <strong>et</strong> pour la philosophie<strong>et</strong> pour <strong>le</strong>s mathématiques. Le <strong>le</strong>cteur découvrira ici la constructionconceptuel<strong>le</strong> <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> qui se déploie comme un écho anticipateur<strong>de</strong> ses mathématiques. La réf<strong>le</strong>xion philosophique est chez<strong>Riemann</strong> autonome, el<strong>le</strong> se produit pour el<strong>le</strong>-même, mais c’est alorsqu’el<strong>le</strong> par<strong>le</strong> aux mathématiques <strong>et</strong> par<strong>le</strong> <strong>de</strong>s mathématiques. Il fautque nos philosophes cessent d’avoir peur <strong>de</strong>s métaphores contrôlées.Ce sont el<strong>le</strong>s qui font avancer la philosophie entièrement imprégnée <strong>de</strong>mathématiques. Le fait qu’il en soit ainsi doit faire comprendre <strong>et</strong> auphilosophe <strong>et</strong> au mathématicien la situation topologique <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux disciplines.Dussé-je me répéter, c’est c<strong>et</strong>te situation qui perm<strong>et</strong> précisémentà la création mathématique <strong>de</strong> se développer <strong>de</strong> manière autonome, <strong>et</strong>d’autre part, à la méditation philosophique <strong>de</strong> se r<strong>et</strong>rouver pour progresser.Quand Herbart souligne <strong>le</strong> besoin professionnel éprouvé par <strong>le</strong> mathématicien<strong>de</strong> dévoi<strong>le</strong>r l’esprit <strong>de</strong> ses formu<strong>le</strong>s, il veut indiquer <strong>le</strong> caractèreessentiel<strong>le</strong>ment réf<strong>le</strong>xif <strong>de</strong> ses formu<strong>le</strong>s <strong>et</strong> <strong>de</strong> sa pratique mathématique.La philosophie absorbe <strong>le</strong> mouvement <strong>de</strong> la mathématique <strong>et</strong>ses sinuosités, c’est par exemp<strong>le</strong> <strong>le</strong> cas pour <strong>le</strong> différentiel.Joël Merker insiste beaucoup sur ce qu’il appel<strong>le</strong> la stratégie <strong>de</strong>l’ouverture riemannienne. C’est dans c<strong>et</strong>te position-là que l’on doitcomprendre <strong>le</strong>s mathématiques du 19 ème sièc<strong>le</strong> <strong>et</strong> <strong>le</strong>ur i<strong>de</strong>ntification partiel<strong>le</strong>avec la philosophie.L’ouverture constante <strong>de</strong> l’irréversib<strong>le</strong> synthétique : j’insiste surc<strong>et</strong>te expression d’abord du synthétique, c’est-à-dire une concentrationunifiée <strong>de</strong> propriétés mathématiques, par opposition à l’analytique ; laphilosophie <strong>de</strong>s mathématiques se déploie dans <strong>le</strong>s domaines que <strong>le</strong>sconstructions mathématiques réalisent pour <strong>le</strong>s réexprimer, <strong>le</strong>s prolonger,reproduire un système <strong>de</strong> bifurcations. C<strong>et</strong>te terminologie si proche


xiiJean-Jacques Szczeciniarz<strong>de</strong> la pratique mathématique el<strong>le</strong>-même en est absolument distincte <strong>et</strong>je dirai que c’est sa proximité qui mesure sa distinction.Aux mathématiciens, aux historiens <strong>de</strong>s mathématiques <strong>et</strong> aux philosophes.Notre auteur m<strong>et</strong> en évi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> façon particulièrement aiguë,<strong>le</strong> fait que <strong>de</strong>s principes gouvernent la pensée <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>. Le <strong>le</strong>cteurqui <strong>le</strong> suivra verra combien <strong>Lie</strong> <strong>et</strong> <strong>Engel</strong> pensent <strong>de</strong> manière à éviter<strong>le</strong>s formes parasites d’un formalisme <strong>et</strong> comment c<strong>et</strong>te stratégie conditionneà bien <strong>de</strong>s égards <strong>le</strong>ur possibilité productrice. Je voudrais reprendreen n’extrayant que quelques aspects <strong>de</strong> la riche analyse proposée.Joël Merker reconstruit un traj<strong>et</strong> fondamental <strong>de</strong> la démonstration<strong>de</strong> <strong>Lie</strong> d’un théorème diffici<strong>le</strong>. Ce traj<strong>et</strong> se clôt à la fin du Chapitre 9 duVolume I <strong>de</strong> la Theorie <strong>de</strong>r Transformationsgruppen par <strong>le</strong> Théorème26 (p. 153) dont la démonstration longue <strong>et</strong> diffici<strong>le</strong> est exposée <strong>et</strong> clarifiéepar l’auteur. Grâce à ce théorème, <strong>Lie</strong> <strong>et</strong> <strong>Engel</strong> sont en mesured’i<strong>de</strong>ntifier systématiquement tout groupe continu <strong>de</strong> transformations :x ′ i = f i(x 1 , . . .,x n ; a 1 , . . .,a r ) (i =1··· n)à une col<strong>le</strong>ction <strong>de</strong> transformations infinitésima<strong>le</strong>s linéairement indépendantes:n∑X k (f) = ξ ki (x 1 , . . ., x n ) ∂f(k = 1 ···r)∂x ii=1dont <strong>le</strong>s coefficients sont analytiques (réels ou comp<strong>le</strong>xes) <strong>et</strong> qui estlinéairement fermée par croch<strong>et</strong>s :[ ]r∑Xj , X k = c s j,k X s (j, k = 1 ···r),s=1<strong>le</strong>s c s j,k étant <strong>de</strong>s constantes. Je caractériserai <strong>le</strong> bilan <strong>de</strong> trois points <strong>de</strong>vue.Mathématiquement, <strong>le</strong> résultat consiste à montrer comment caractériserun groupe local par linéarisation <strong>de</strong> ses caractéristiques, du faitque <strong>le</strong> groupe est i<strong>de</strong>ntifié à ses générateurs infinitésimaux.Philosophiquement, on comprend que <strong>le</strong> travail du mathématiciena consisté à métamorphoser l’être mathématiques initial. « La connaissancemathématique initia<strong>le</strong>ment indécise <strong>et</strong> problématique peut à présentse déci<strong>de</strong>r à réenvisager l’obj<strong>et</strong> « groupe continu » — maintenantmoins opaque — sous un ang<strong>le</strong> absolument neuf : celui <strong>de</strong>s transformationsinfinitésima<strong>le</strong>s, plus riches <strong>de</strong> virtualités <strong>et</strong> <strong>de</strong> manipulationspossib<strong>le</strong>s ». La production mathématique procè<strong>de</strong> par construction <strong>de</strong>


Préface au livre <strong>de</strong> Joël Merkerxiiisynthèses qui ouvrent davantage. On peut al<strong>le</strong>r plus loin dans l’analyse<strong>et</strong> se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r alors ce que comporte <strong>le</strong> concept <strong>de</strong> groupe continu,autrement dit <strong>de</strong> quel type <strong>de</strong> synthèse <strong>de</strong> connaissances il procè<strong>de</strong>. Si,dans la production, <strong>le</strong>s points <strong>de</strong> départ s’effacent, transposés <strong>et</strong> transformésqu’ils sont, ils ne cessent en réalité jamais d’agir, au point qu’i<strong>le</strong>st parfois possib<strong>le</strong> <strong>de</strong> <strong>le</strong>s voir ressurgir. A c<strong>et</strong>te occasion, se reposent<strong>le</strong>s questions <strong>de</strong>s relations entre l’algèbre <strong>et</strong> la géométrie <strong>et</strong> <strong>de</strong> la nature<strong>de</strong> l’algèbre linéaire.Historiquement, <strong>de</strong> nombreuses questions s’ouvrent qui sont liéesaux rapports entre <strong>le</strong>s chemins conceptuels déterminés par <strong>le</strong>s mathématicienssous la forme <strong>de</strong>s synthèses mathématiques inscrites dans <strong>le</strong>corpus qui <strong>le</strong>s sanctionnent, <strong>et</strong> <strong>le</strong>s parcours réels qui <strong>le</strong>s ont précédés oumême déterminés.Une <strong>de</strong>s questions posée sur <strong>le</strong>s trois mo<strong>de</strong>s est cel<strong>le</strong> <strong>de</strong> la nature<strong>de</strong> la pratique <strong>de</strong> classification induite par <strong>le</strong> travail <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> ; l’auteurnous fournit <strong>de</strong> nombreux éléments <strong>de</strong> réponse.La question <strong>de</strong> la genèse. L’une <strong>de</strong> ses modalités est l’analyse dont ondispose <strong>de</strong> ce qu’on pourrait appe<strong>le</strong>r la théorisation. On doit la voir dansla terminologie utilisée comme l’induction, après une ferm<strong>et</strong>ure, d’uneexigence d’ouverture vers <strong>le</strong>s possibilités enfouies dans <strong>de</strong>s horizonsthéoriques qui sont posés ensemb<strong>le</strong>, capab<strong>le</strong>s <strong>de</strong> susciter un nouveaudéploiement du chantier immanent <strong>de</strong> construction.Joël Merker use comme tout philosophe, comme tout philosophe<strong>de</strong>s mathématiques <strong>et</strong> comme la plupart <strong>de</strong>s mathématiciens qu’il analyse,<strong>de</strong> métaphores spatia<strong>le</strong>s. Sans vouloir épuiser l’analyse du problèmeposé par c<strong>et</strong> usage, je proposerai <strong>le</strong>s remarques suivantes. Je peuxnoter <strong>de</strong>s expressions comme « strates », « couches », « ouverture »,« irréversib<strong>le</strong> », « intérieur/extérieur ». Il est vrai qu’el<strong>le</strong>s relèvent souventdu registre <strong>de</strong> la géométrie <strong>et</strong> <strong>de</strong> la topologie.Mais ces métaphores sont portées par la mise en forme d’analysesphilosophiques fondées <strong>de</strong> l’organisation théorique. Si on m<strong>et</strong> l’accentsur l’exigence <strong>de</strong> successivité, on peut y voir <strong>de</strong>s analyses inspirées par,<strong>et</strong> remises en forme par la phénoménologie. Ainsi peut-on pour débuterces analyses reprendre <strong>de</strong>s expressions conceptuel<strong>le</strong>s <strong>de</strong> J.-T. Desanti([36]) comme cel<strong>le</strong>s <strong>de</strong> « pô<strong>le</strong> d’idéalité », <strong>le</strong> concept <strong>de</strong> pô<strong>le</strong> renvoyantà une direction vers un domaine dans <strong>le</strong>quel un concept prend sens. Cedomaine peut apparaître plus naturel, comme lieu <strong>de</strong> synthèses inachevées.Mais à côté du niveau <strong>de</strong> naturalité qui est en général <strong>le</strong> premierniveau d’une théorie apparemment plus simp<strong>le</strong> ou plus géométrique, àcôté <strong>de</strong> ce niveau, il existe un niveau idéal grâce auquel se manifestent


xivJean-Jacques Szczeciniarz<strong>le</strong>s exigences démonstratives, <strong>et</strong> <strong>le</strong>s autres formes théoriques, ou même<strong>de</strong> disciplines du corpus, qui sont invoquées. Le champ réf<strong>le</strong>xif, c’est-àdirel’ensemb<strong>le</strong> <strong>de</strong>s éléments <strong>de</strong> réf<strong>le</strong>xion que nous <strong>de</strong>vons mobiliser, estmuni d’une direction où chaque point est l’unité d’un pô<strong>le</strong> d’actualités<strong>et</strong> <strong>de</strong> ses potentialités dua<strong>le</strong>s. Ainsi en est-il éga<strong>le</strong>ment du concept d’horizon,comme position d’un environnement implicite au bord <strong>de</strong> tout<strong>et</strong>héorie ou <strong>de</strong> tout obj<strong>et</strong> mathématique explicitement posés reflétant lapart d’implicite qui accompagne tout geste mathématique. Dans toutesces considérations, il s’agit d’abor<strong>de</strong>r la question si comp<strong>le</strong>xe <strong>de</strong>s stratifications<strong>de</strong> couches théoriques qui constituent <strong>le</strong> corpus mathématique.Il faut encore tenir compte du fait que la réf<strong>le</strong>xion s’exerce dans l’unitéd’une norme <strong>et</strong> d’un inachèvement, comme <strong>le</strong> disait <strong>le</strong> même auteur.Et surtout, dans ces analyses, il s’agit <strong>de</strong> ne pas dresser <strong>de</strong> barrièreentre théories en voie <strong>de</strong> constitution <strong>et</strong> théories considérées commeconstituées. El<strong>le</strong>s ne se comportent pas différemment, même si la métaphorefaci<strong>le</strong> du « chantier <strong>de</strong> théorisation » peut venir sous la plume([26], p. 87).Une théorie enveloppe toujours un système <strong>de</strong> formations idéa<strong>le</strong>s(règ<strong>le</strong>s opératoires, prescriptions logiques) capab<strong>le</strong>s d’assurer <strong>le</strong>s positionsd’obj<strong>et</strong>s idéaux <strong>et</strong> d’orienter vers <strong>de</strong>s enchaînements explicites, <strong>et</strong>en même temps un système d’exigences qui renvoient à <strong>de</strong>s possibilités<strong>de</strong> nouer <strong>de</strong>s relations dont la thématisation alimentera la théorie d’unobj<strong>et</strong> mis en question.Une théorie comme système ouvert d’énoncés ne peut être saisiecomme une totalité achevée, son unité est thématique ; el<strong>le</strong> ne sauraitnon plus être saisie <strong>de</strong> l’extérieur, en vertu <strong>de</strong> l’ordre inhérent à lasuite théorématique el<strong>le</strong>-même. Mais c<strong>et</strong>te intériorité n’est pas non plusassurée en vertu <strong>de</strong>s possibilités toujours ouvertes <strong>de</strong> l’interconnexionentre <strong>le</strong>s théories mathématiques el<strong>le</strong>s-mêmes. Ce qui ne veut point direqu’el<strong>le</strong> ne comporte pas ce que j’appel<strong>le</strong>rai <strong>de</strong>s couches ou <strong>de</strong>s stratesd’achèvement. Une classification peut être achevée, comme un résultat.Tel est <strong>le</strong> cas <strong>de</strong>s classifications <strong>de</strong>s groupes, tel est <strong>le</strong> cas <strong>de</strong>s travauxadmirab<strong>le</strong>s <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>. Les théories ne peuvent être saisies que comme unitévivante <strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>s synthèses qu’el<strong>le</strong>s ont produites. Mais <strong>le</strong>s formes<strong>de</strong> propagation <strong>de</strong> ces résultats repotentialise l’intention initia<strong>le</strong> parfois,la démultiplie selon <strong>de</strong> subti<strong>le</strong>s modalités, d’autres fois. La théorie <strong>de</strong>sgroupes <strong>et</strong> <strong>de</strong>s algèbres <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> s’est ainsi reconstruite à travers <strong>le</strong>s théoriescohomologiques <strong>et</strong> <strong>de</strong> nouvel<strong>le</strong>s questions ont ouvert <strong>de</strong>s espaces


Préface au livre <strong>de</strong> Joël Merkerxv<strong>de</strong> connexion avec d’innombrab<strong>le</strong>s potentialités. On a considéré <strong>de</strong>s situationsoù un groupe agit sur un espace topologique <strong>et</strong> on essaie <strong>de</strong> mesurer<strong>le</strong>s possibilités <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te action en cherchant à obtenir <strong>de</strong>s classes<strong>de</strong> cohomologie modulo c<strong>et</strong>te action ou <strong>de</strong>s classes qui contiennent <strong>de</strong>sinformations sur c<strong>et</strong>te action. On sait que par une sorte <strong>de</strong> réenveloppement,il s’est d’abord agi <strong>de</strong> voir <strong>le</strong>s opérations <strong>de</strong> groupe à travers<strong>de</strong>s structures <strong>de</strong> différentiabilité qui en font <strong>de</strong>s variétés. Puis on s’estintéressé aux opérations d’algèbre <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> sur une algèbre différentiel<strong>le</strong>(graduée commutative). <strong>Lie</strong> avait ouvert la voie d’exploration <strong>de</strong>s opérations<strong>de</strong> la pensée qui plongent dans l’algébrisation du différentiel <strong>et</strong>du continu. C’est c<strong>et</strong>te thématique qui ne cesse d’être réactualisée àtravers <strong>de</strong>s couches comp<strong>le</strong>xes <strong>de</strong> structures réf<strong>le</strong>xives qui <strong>le</strong>s hiérarchisentparfois ou <strong>le</strong>s diffractent selon <strong>de</strong>s organisations en casca<strong>de</strong> quine <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt qu’à faire <strong>le</strong> matériau pour <strong>de</strong> nouvel<strong>le</strong>s virtualités philosophiques<strong>et</strong> <strong>de</strong> nouveaux philosophes.Si j’ai insisté sur ce qui me semb<strong>le</strong> nécessaire pour qu’une philosophie<strong>de</strong>s mathématiques se redéploie plus proche <strong>de</strong>s mathématiquesréel<strong>le</strong>s, il n’en reste pas moins que <strong>de</strong>s questions comme cel<strong>le</strong> <strong>de</strong> l’objectivité,<strong>de</strong> la vérité, continuent <strong>de</strong> faire <strong>le</strong> fond <strong>de</strong> la réf<strong>le</strong>xion philosophique.Alain Connes a proposé trois critères d’objectivité <strong>de</strong>s mathématiques(cf. [26], pp. 134–135).• La possibilité <strong>de</strong> classer exhaustivement <strong>le</strong>s obj<strong>et</strong>s définis par uneaxiomatique qui témoignerait <strong>de</strong> l’existence <strong>de</strong> contraintes objectivespar <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s univers <strong>de</strong>s possib<strong>le</strong>s seraient nécessités. C’est c<strong>et</strong>tepossibilité que déploient <strong>Lie</strong> <strong>et</strong> <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> que Joël Merker prolonge aprèsl’avoir admirab<strong>le</strong>ment problématisée. La question dominante pour <strong>Lie</strong>dans la théorie qu’il a érigée était <strong>de</strong> classifier à équiva<strong>le</strong>nce près tous<strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformation possib<strong>le</strong>s.• La cohérence <strong>et</strong> l’harmonie inter-théoriques globa<strong>le</strong>s <strong>de</strong>s théoriesmathématiques attestées par <strong>le</strong>s faits d’intertraductibilité, ce qui témoignepour l’unité <strong>de</strong>s mathématiques, laquel<strong>le</strong> d’ail<strong>le</strong>urs ne sauraitêtre conçue comme une possibilité <strong>de</strong> <strong>le</strong>s réduire à un calcul unique.C’est ce caractère architectonique en soi <strong>de</strong> l’ensemb<strong>le</strong> du corpus mathématiqueque développent la théorie <strong>de</strong>s catégories <strong>et</strong> l’œuvre <strong>de</strong> Grothendieck.C’est aussi c<strong>et</strong> aspect qui commence avec <strong>le</strong>s mathématiquesdu 19 ème sièc<strong>le</strong> <strong>et</strong> que <strong>Lie</strong> réassume.• Le fait que <strong>le</strong>s théories mathématiques intéressantes ont uncontenu informationnel infini. De ce point <strong>de</strong> vue, aucun obj<strong>et</strong> mathématiquene restera en repos. La reprise caractérise la progression <strong>et</strong>


xviJean-Jacques Szczeciniarzson caractère labyrinthique <strong>et</strong> imprévisb<strong>le</strong>. Aucun autre système symboliquene satisfait ces critères.Au <strong>le</strong>cteur <strong>de</strong> refaire c<strong>et</strong>te expérience unique, en entrant dans c<strong>et</strong>teœuvre unique !


Avant-proposLa troisième <strong>et</strong> <strong>de</strong>rnière partie <strong>de</strong> c<strong>et</strong> ouvrage propose une traductionfrançaise annotée <strong>de</strong> la solution mathématique complète qu’ontdonnée <strong>Friedrich</strong> <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Sophus</strong> <strong>Lie</strong> dans <strong>le</strong> troisième volume <strong>de</strong> lamonumenta<strong>le</strong> Theorie <strong>de</strong>r Transformationsgruppen ([42], pp. 393–523)au problème dit « <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz » :Par quels axiomes spatiaux peut-on caractériser <strong>le</strong>s trois géométriesà courbure constante, euclidienne, lobatchevskienne ou riemannienne,à l’exclusion <strong>de</strong> toute autre géométrie ?Notre premier objectif est <strong>de</strong> faire revivre, au sein <strong>de</strong> la philosophiecontemporaine <strong>de</strong> la géométrie, l’incroyab<strong>le</strong> puissance <strong>de</strong> pensée <strong>et</strong> <strong>de</strong>conception <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> qui parvint, entre 1873 <strong>et</strong> 1893, à ériger sur <strong>de</strong>s milliers<strong>de</strong> pages une théorie réalisant p<strong>le</strong>inement <strong>le</strong> fameux Programmed’Erlangen <strong>de</strong> K<strong>le</strong>in (1872, [86]). <strong>Lie</strong> partait <strong>de</strong> l’idée seu<strong>le</strong> qu’il <strong>de</strong>vaitexister, dans <strong>le</strong> domaine <strong>de</strong>s transformations continues entre équationsdifférentiel<strong>le</strong>s, un analogue métaphysiquement compl<strong>et</strong> à la théorie <strong>de</strong>sgroupes <strong>de</strong> substitutions <strong>de</strong>s racines d’une équation algébrique que Serr<strong>et</strong><strong>et</strong> Jordan venaient <strong>de</strong> développer, quelques décennies après la parutionposthume du mémoire génial [55] d’Évariste Galois.Mais surtout, notre objectif principal est <strong>de</strong> montrer, en termes <strong>de</strong>semail<strong>le</strong>s au sens <strong>de</strong> Grothendieck <strong>et</strong> dans la lignée <strong>de</strong> quelques éco<strong>le</strong>smathématiques contemporaines qui se sont développées aux États-Unisavec notamment Olver [124, 125], Gardner [56] <strong>et</strong> Bryant [21] —cf. aussi <strong>le</strong> beau livre du suédois Stormark [157] —, que notre époquepeut maintenant accueillir une sorte <strong>de</strong> résurrection <strong>de</strong>s mathématiquesqui se sont développées à la charnière du 19 ème <strong>et</strong> du 20 ème sièc<strong>le</strong>, notammentdans ses techniques, dans ses manières <strong>de</strong> penser, <strong>et</strong> dans sesproblématiques mêmes, toujours riches, ouvertes <strong>et</strong> inépuisab<strong>le</strong>s. À vraidire, bien que <strong>le</strong> présent ouvrage ne constitue en rien un travail d’histoire<strong>de</strong>s mathématiques, c’est la <strong>le</strong>cture <strong>de</strong>s travaux d’Hawkins [68, 69]qui nous a fait prendre conscience, philosophiquement, <strong>de</strong> l’importance,


xviiiJoël Merkerpour l’architecture <strong>de</strong>s mathématiques, <strong>de</strong> classifier a priori <strong>et</strong> abstraitement<strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations, qu’ils soient discr<strong>et</strong>s (Jordan) oucontinus (<strong>Lie</strong>).En eff<strong>et</strong>, comme <strong>Lie</strong> lui-même l’a vite compris en profon<strong>de</strong>ur dèsl’hiver 1873–74, la classification abstraite <strong>et</strong> a priori <strong>de</strong>s groupes possè<strong>de</strong>une importance capita<strong>le</strong> dans l’édifice mathématique, en tant qu<strong>et</strong>ronc commun <strong>de</strong> la connaissance à partir duquel pourront être directementirrigués puis résolus tous <strong>le</strong>s problèmes spécialisés qui impliquentune structure <strong>de</strong> groupe sous-jacente : transformations <strong>de</strong> contact, prolongementsaux espaces <strong>de</strong> j<strong>et</strong>s, invariants différentiels, symétries <strong>de</strong>séquations aux dérivées partiel<strong>le</strong>s, transformations projectives, transformationsconformes, structures symp<strong>le</strong>ctiques, théorie <strong>de</strong>s invariants algébriques,<strong>et</strong>c. Toutefois, dans la littérature mathématiques actuel<strong>le</strong>, onne trouve aucun artic<strong>le</strong>, aucun livre, aucune source qui restitue la théorieorigina<strong>le</strong> <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> dans sa systématicité intrinsèque, <strong>et</strong> donc pour prendreconnaissance <strong>de</strong>s démonstrations détaillées <strong>de</strong>s théorèmes <strong>de</strong> classification,il faut se reporter aux œuvres origina<strong>le</strong>s. Par ail<strong>le</strong>urs, <strong>le</strong> tournant<strong>de</strong> globalisation <strong>et</strong> d’algébrisation <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong>s groupes initié parHermann Weyl <strong>et</strong> Élie Cartan dans <strong>le</strong>s années 1930 <strong>et</strong> continué par Cheval<strong>le</strong>y,Chern <strong>et</strong> Ehresmann dans <strong>le</strong>s années 1950 a fait progressivementporter l’accent sur <strong>le</strong>s théorèmes <strong>de</strong> classification <strong>de</strong>s algèbres <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>semi-simp<strong>le</strong>s comp<strong>le</strong>xes (Killing) <strong>et</strong> réel<strong>le</strong>s (Élie Cartan), avec la combinatoireafférente <strong>de</strong>s systèmes <strong>de</strong> racines (Weyl) <strong>et</strong> <strong>de</strong>s diagrammes(Dynkin) qui est aujourd’hui centra<strong>le</strong> dans la théorie <strong>de</strong>s représentations.Mais puisque la théorie initia<strong>le</strong> <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> se ramifiait surtout en direction<strong>de</strong>s équations aux dérivées partiel<strong>le</strong>s <strong>et</strong> s’architecturait afin que s’yinscrivent toutes <strong>le</strong>s structures <strong>de</strong> groupes continus possib<strong>le</strong>s, ce premierouvrage <strong>de</strong> traduction commentée sera suivi dans un avenir prochepar d’autres travaux proprement mathématiques (cf. <strong>le</strong> texte en préparation[110]) qui transcriront dans un langage mathématique mo<strong>de</strong>rned’autres résultats <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>, tout particulièrement ceux qui sont consacrés,dans <strong>le</strong> Tome III <strong>de</strong> la Theorie <strong>de</strong>r Transformationsgruppen, à la classificationcomplète <strong>de</strong>s actions analytiques loca<strong>le</strong>s sur un espace à troisdimensions ; cel<strong>le</strong>-ci ne fut en fait complétée qu’en 1902 par Amaldi([2, 3]) pour <strong>le</strong>s actions doub<strong>le</strong>ment imprimitives qui stabilisent à lafois un feuill<strong>et</strong>age local par <strong>de</strong>s surfaces <strong>et</strong> un feuill<strong>et</strong>age subordonnépar <strong>de</strong>s courbes.


Avant-proposxixVoici pour terminer une brève <strong>de</strong>scription du contenu <strong>de</strong> ce livre.Deux chapitres constituent l’Introduction philosophique généra<strong>le</strong> (PartieI) qui est suivie d’une Introduction mathématique à la théorie <strong>de</strong><strong>Lie</strong> (Partie II), uti<strong>le</strong> pour abor<strong>de</strong>r notre traduction <strong>de</strong> la Division V duTome III <strong>de</strong> la Theorie <strong>de</strong>r Transformationsgruppen (Partie III).Dans <strong>le</strong> premier chapitre que nous consacrons à un commentairedétaillé <strong>et</strong> ciblé <strong>de</strong> la célèbre <strong>le</strong>çon ora<strong>le</strong> d’habilitation [Probevor<strong>le</strong>sung]<strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> (1854, [132], non publiée <strong>de</strong> son vivant), nous insistons, ennous servant notamment <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Erhard Scholz [140, 142], sur lacapacité si particulière que <strong>Riemann</strong> avait d’ouvrir sans <strong>le</strong>s fermer <strong>le</strong>squestions <strong>de</strong> conceptualisation mathématique. À la fin <strong>de</strong> l’année 1868,Helmholtz obtint une copie <strong>de</strong>s notes manuscrites que Schering avaitprises pendant la soutenance <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>, <strong>et</strong> il publie rapi<strong>de</strong>ment uneétu<strong>de</strong> ([73]), maintenant centra<strong>le</strong> pour l’histoire <strong>de</strong>s fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> lagéométrie, dans laquel<strong>le</strong> il prétend pouvoir démontrer rigoureusementque la postulation — physiquement évi<strong>de</strong>nte sinon métaphysiquementnécessaire — <strong>de</strong> corps rigi<strong>de</strong>s <strong>et</strong> néanmoins maxima<strong>le</strong>ment mobi<strong>le</strong>sdans un espace abstrait quelconque implique l’existence d’une métriqueriemannienne à courbure constante : inversion, donc, <strong>de</strong>s points <strong>de</strong> vue<strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>, Christoffel <strong>et</strong> Lipschitz pour qui <strong>le</strong>s métriques quadratiquespossib<strong>le</strong>s sont innombrab<strong>le</strong>s, puisqu’el<strong>le</strong>s dépen<strong>de</strong>nt du comportement<strong>de</strong>s invariants différentiels dérivés <strong>de</strong> la courbure. Toutefois, <strong>le</strong>sarguments embryonnaires, riches d’idées nouvel<strong>le</strong>s, <strong>de</strong> Helmholtz, sonten gran<strong>de</strong> partie erronés ou incompl<strong>et</strong>s, <strong>et</strong> il fallut attendre <strong>le</strong>s travaux<strong>de</strong> <strong>Lie</strong> [99, 100, 101, 102, 103] pour qu’ils puissent être inscrits dansune vaste théorie. La traduction que nous proposons ici aura <strong>le</strong> mérite,nous l’espérons, <strong>de</strong> porter au moins à la connaissance <strong>de</strong>s commentateursfrancophones <strong>de</strong> Helmholtz la discussion critique par <strong>Lie</strong> <strong>de</strong> lapertinence <strong>de</strong>s axiomes helmholtziens, voir notamment l’introduction àla Division 5 au début <strong>de</strong> la Partie III, p. 159, <strong>et</strong> aussi <strong>le</strong> Chapitre 21p. 220. Enfin, notre Partie II est consacrée à une présentation <strong>de</strong>s théorèmesfondamentaux <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> qui se base exclusivement sur<strong>le</strong> très systématique Volume I [40] <strong>de</strong> la Theorie <strong>de</strong>r Transformationsgruppen,sans faire appel aux manuels mo<strong>de</strong>rnes.Non germaniste, l’auteur a bénéficié d’ai<strong>de</strong>s ponctuel<strong>le</strong>s <strong>et</strong> uti<strong>le</strong>sconcernant quelques difficultés <strong>de</strong> traduction, notamment <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>Maud Moreillon (Besançon), d’Egmont Porten (Berlin) <strong>et</strong> <strong>de</strong> Jean Ruppenthal(Wuppertal). Françoise Panigeon a régulièrement contrôlé lacorrection <strong>le</strong>xica<strong>le</strong> <strong>et</strong> grammatica<strong>le</strong> du texte dans son ensemb<strong>le</strong>, quilui doit donc beaucoup. Toute notre reconnaissance s’adresse aussi à


xxJoël MerkerErhard Scholz, qui a accepté d’examiner l’ouvrage <strong>et</strong> dont <strong>le</strong>s travaux <strong>de</strong>stature internationa<strong>le</strong> nous ont été d’une gran<strong>de</strong> utilité. Le proj<strong>et</strong> initiala été fécondé grâce à certaines séances du « Séminaire <strong>Riemann</strong> », organiséen collaboration avec Jean-Jacques Szczeciniarz <strong>et</strong> Ivahn Smadja àl’Éco<strong>le</strong> Norma<strong>le</strong> Supérieure. Enfin, Jean-Jacques Szczeciniarz, toujoursdisponib<strong>le</strong> <strong>et</strong> ouvert, a constamment soutenu la réalisation <strong>de</strong> ce proj<strong>et</strong>au cours d’échanges philosophiques profonds <strong>et</strong> précieux.


Avant-proposxxiTab<strong>le</strong> <strong>de</strong>s matièresPartie IIntroduction philosophique généra<strong>le</strong>Chap. 1. L’ouverture riemannienne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11.1. Circonstances historiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11.2. Appréciations d’universalité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41.3. Assemb<strong>le</strong>r l’inachevé.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51.4. Le mystère <strong>de</strong>s notions primitives <strong>de</strong> la géométrie . . . . . . . . . . . . . . . . . 61.5. Fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> la géométrie .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71.6. Le renversement riemannien .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91.7. Déci<strong>de</strong>r l’ouverture problématique du conceptuel . . . . . . . . . . . . . . . . . . 131.8. Nécessité, suffisance, bifurcation .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 131.9. L’influence épistémologique <strong>de</strong> Herbart sur <strong>Riemann</strong> . . . . . . . . . . . . . . 151.10. Le réalisme dia<strong>le</strong>ctique modéré <strong>de</strong> Herbart. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 171.11. La métho<strong>de</strong> <strong>de</strong>s relations .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 191.12. La métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> la spéculation <strong>et</strong> <strong>le</strong>s graphes <strong>de</strong> concepts . . . . . . . . 201.13. La métho<strong>de</strong> <strong>de</strong>s plus p<strong>et</strong>its changements conceptuels . . . . . . . . . . . 251.14. Mo<strong>de</strong>s amétriques <strong>de</strong> détermination . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 271.15. Genèse du multidimensionnel .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 311.16. Conditions pour la détermination <strong>de</strong>s rapports métriques . . . . . . . . . 341.17. Genèse <strong>de</strong>s métriques riemanniennes .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 371.18. Surfaces <strong>de</strong> courbure constante. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 421.19. Courbure sectionnel<strong>le</strong> <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Christoffel-Lipschitz .. . . . . . . . . 441.20. Caractérisation <strong>de</strong> l’euclidéanité par annulation <strong>de</strong> la courbure . . . 49Chap. 2. La mobilité helmholtzienne <strong>de</strong> la rigidité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 512.1. Le problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 512.2. Incomplétu<strong>de</strong>s riemanniennes.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 522.3. Rendre objectives <strong>le</strong>s propositions <strong>de</strong> la géométrie .. . . . . . . . . . . . . . . 552.4. Les quatre axiomes <strong>de</strong> Helmholtz .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 582.5. Linéarisation <strong>de</strong> l’isotropie.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 622.6. Critique par <strong>Lie</strong> <strong>de</strong> l’erreur principa<strong>le</strong> <strong>de</strong> Helmholtz . . . . . . . . . . . . . . . . 642.7. Calculs helmholtziens .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 672.8. Insuffisances <strong>et</strong> reprises . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 722.9. L’approche infinitésima<strong>le</strong> systématique <strong>de</strong> <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> . . . . . . . . . 73—————–


xxiiJoël MerkerPartie II<strong>Lie</strong>Introduction mathématique à la théorie <strong>de</strong>Prologue. Trois principes <strong>de</strong> pensée qui gouvernent la théorie <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> . . . . . . . . 79Chap. 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations . . . . . 833.1. Paramètres essentiels. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 833.2. Concept <strong>de</strong> groupe <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> local . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 873.3. Principe <strong>de</strong> raison suffisante <strong>et</strong> axiome d’inverse . . . . . . . . . . . . . . . . . . 913.4. Introduction <strong>de</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . 983.5. Équations différentiel<strong>le</strong>s fondamenta<strong>le</strong>s . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1003.6. Champs <strong>de</strong> vecteurs <strong>et</strong> groupes à un paramètre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1063.7. Le théorème <strong>de</strong> C<strong>le</strong>bsch–<strong>Lie</strong>-Frobenius .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1243.8. Constantes <strong>de</strong> structure <strong>et</strong> correspondance fondamenta<strong>le</strong> .. . . . . . . . 1313.9. Le problème <strong>de</strong> la classification <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations .. . 155—————–Partie III Traduction française commentée <strong>et</strong> annotée<strong>Sophus</strong> LIE, unter Mitwirkung von <strong>Friedrich</strong> ENGELTheorie <strong>de</strong>r Transformationsgruppen, Dritter und l<strong>et</strong>zter Abschnitt,Abtheilung V 1Divis. V. Recherches sur <strong>le</strong>s fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> la Géométrie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . 159Chap. 20. Détermination <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong> R 3 relativement auxquels <strong>le</strong>s paires<strong>de</strong> points possè<strong>de</strong>nt un, <strong>et</strong> un seul invariant, tandis que s > 2 pointsn’ont pas d’invariant essentiel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .§ 85. Propriétés caractéristiques <strong>de</strong>s groupes recherchés. . . . . . . . . . . . . . 167§ 86. Groupes primitifs parmi <strong>le</strong>s groupes recherchés . . . . . . . . . . . . . . . . . . 183§ 87. Groupes imprimitifs parmi <strong>le</strong>s groupes recherchés . . . . . . . . . . . . . . . 184§ 88 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 204§ 89. Résolution du problème pour <strong>le</strong>s groupes réels . . . . . . . . . . . . . . . . . . 206§ 90 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 216Chap. 21. Critique <strong>de</strong>s recherches helmholtziennes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 220§ 91. Les axiomes helmholtziens .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 221§ 92. Conséquences <strong>de</strong>s axiomes helmholtziens . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 223§ 93. Formulation <strong>de</strong>s axiomes helmholtziens en termes <strong>de</strong> théorie <strong>de</strong>sgroupes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .§ 94. Critique <strong>de</strong>s conclusions que Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz tire <strong>de</strong> sesaxiomes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .§ 95. Considérations se rattachant aux calculs helmholtziens . . . . . . . . . . 248166235237


Avant-proposxxiii§ 96. Quel<strong>le</strong>s conclusions peut-on tirer <strong>de</strong>s axiomes helmholtziens? . . . 253Chap. 22. Première solution du problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz . . . . . . . . . . . 260§ 97 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 261§ 98 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 266§ 99 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 270§ 100. Sur <strong>le</strong> discours d’habilitation <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 275Chap. 23. Deuxième solution du problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz . . . . . . . . . . 289§ 101. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 291§ 102. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 298§ 103. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 307Bibliographie—————–Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3171 LIE, S. : Theorie <strong>de</strong>r transformationsgruppen. Dritter und L<strong>et</strong>zter Abschnitt. UnterMitwirkung von Prof. Dr. <strong>Friedrich</strong> <strong>Engel</strong>, bearbeit<strong>et</strong> von <strong>Sophus</strong> <strong>Lie</strong>, B.G. Teubner,Leipzig, 1893. Reprinted by Chelsea Publishing Co. (New York, N.Y., 1970).


Partie I :Introduction philosophique généra<strong>le</strong>Chapitre 1 :L’ouverture riemannienneLa mathématique est la seu<strong>le</strong> bonne métaphysique.Lord KELVIN1.1. Circonstances historiques. Le 10 juin 1854, à l’occasion <strong>de</strong>ses épreuves d’admission à la célèbre Université Georges Auguste <strong>de</strong>Göttingen, Bernhard <strong>Riemann</strong> (1826–1866), alors âgé <strong>de</strong> vingt-huit ans,défend ora<strong>le</strong>ment son Habilitationsvortrag, qu’il a intitulée :Sur <strong>le</strong>s hypothèses qui servent <strong>de</strong> fon<strong>de</strong>ment à la géométrie 1 .En Al<strong>le</strong>magne au dix-neuvième sièc<strong>le</strong>, <strong>le</strong> diplôme d’habilitationest formel<strong>le</strong>ment requis pour être en mesure d’obtenir <strong>le</strong> statut <strong>de</strong> Privatdozent,c’est-à-dire <strong>de</strong> chargé <strong>de</strong> cours. Non rétribuées par l’université,ces positions sont néanmoins prisées ; <strong>le</strong> salaire afférent y dépend<strong>de</strong> la libéralité <strong>de</strong>s étudiants qui assistent régulièrement aux <strong>le</strong>çons.Au début <strong>de</strong>s années 1850, on compte à Göttingen une dizaine<strong>de</strong> professeurs permanents disposant d’une chaire. Le 16décembre 1851, <strong>Riemann</strong> avait soutenu en latin sa thèse <strong>de</strong> doctorat[Inauguraldissertation] consacrée aux fonctions d’une variab<strong>le</strong> comp<strong>le</strong>xe2 , <strong>et</strong> <strong>le</strong> jury d’experts qui avait été consulté pour autoriser lasoutenance était composé <strong>de</strong> sept « grands » professeurs : Gauss enmathématiques, Mitscherlich en rhétorique, Haussmann en minéralogie,Ritter en philosophie, Hoeck <strong>et</strong> Hermann en philologie classique,1 [Über die Hypothesen, welche <strong>de</strong>r Geom<strong>et</strong>rie zu Grun<strong>de</strong> liegen.] Paru en1867 à titre posthume dans <strong>le</strong> tome XIII <strong>de</strong>s Mémoires <strong>de</strong> la Société Roya<strong>le</strong> <strong>de</strong>sSciences <strong>de</strong> Göttingen, ce texte a immédiatement inspiré <strong>de</strong> nombreux travaux mathématiques,notamment chez De<strong>de</strong>kind, Gehring, Clifford, Helmholtz, Christoffel,Lipschitz, Beltrami, <strong>et</strong> d’autres. En 1898, il a été traduit en français par J. HOÜEL,voir [133], pp. 280–299.2 Grundlagen für eine allgemeine Theorie <strong>de</strong>r Functionen einer verän<strong>de</strong>rlichencomp<strong>le</strong>xen Größen, Théorie généra<strong>le</strong> <strong>de</strong>s fonctions d’une gran<strong>de</strong>ur variab<strong>le</strong> comp<strong>le</strong>xe,voir [8, 93, 131] pour ce chapitre qui ne sera pas abordé dans c<strong>et</strong> ouvrage.


2 1.1. Circonstances historiquesWaitz en histoire <strong>et</strong> Weber en physique ([131]). Aussi n’est-il pasétonnant que, dans un tel contexte d’universalité <strong>de</strong>s compétences<strong>et</strong> <strong>de</strong> proximité <strong>de</strong>s savoirs, <strong>Riemann</strong> ait dû prononcer, <strong>de</strong>ux ans <strong>et</strong><strong>de</strong>mi plus tard pour l’habilitation, sa fameuse conférence d’épreuve[Probevor<strong>le</strong>sung] <strong>de</strong>vant un auditoire majoritairement composé <strong>de</strong>non-mathématiciens, dans <strong>le</strong> cadre <strong>de</strong> ce qu’on appel<strong>le</strong> aujourd’huiun Colloquium s’adressant en principe à tous <strong>le</strong>s protagonistes <strong>de</strong>l’université.Frustration d’historien <strong>de</strong>s mathématiques : <strong>le</strong>s archives <strong>de</strong> la Facultéphilosophique <strong>de</strong> Göttingen n’ont conservé aucune trace ([131])concernant <strong>le</strong>s rapports, <strong>le</strong>s membres du jury, <strong>le</strong>s discussions, <strong>le</strong>s questions,ni pour la thèse, ni pour l’habilitation <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>. D’aprèsDe<strong>de</strong>kind ([35], pp. 547–548), <strong>le</strong>s seuls éléments incontestab<strong>le</strong>s concernant<strong>le</strong>s circonstances <strong>de</strong> l’habilitation qui ne relèvent pas du mythepost-mortem sont <strong>de</strong>ux l<strong>et</strong>tres <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>, la première écrite <strong>le</strong> 28 décembre1853 à son frère Wilhelm au moment <strong>de</strong> fixer tout ce qui est inhérentà la soutenance 3 , <strong>et</strong> la secon<strong>de</strong> à ce même frère, <strong>le</strong> 26 juin 1854,<strong>de</strong>ux semaines après la soutenance 4 . Maigre documentation, quand onpense à toutes <strong>le</strong>s spéculations qui ont été suscitées dans l’imagination<strong>de</strong>s géomètres <strong>de</strong>puis plus d’un sièc<strong>le</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong>mi.Comme <strong>le</strong>s règ<strong>le</strong>s universitaires l’exigent encore aujourd’hui enAl<strong>le</strong>magne, <strong>le</strong> candidat à l’habilitation se doit <strong>de</strong> proposer trois suj<strong>et</strong>sdistincts, afin <strong>de</strong> montrer au mieux l’extension thématique <strong>de</strong> ses travaux<strong>de</strong> recherche. Ainsi <strong>Riemann</strong> propose-t-il à la fin <strong>de</strong> l’année 1853un suj<strong>et</strong> en Analyse, un suj<strong>et</strong> en Algèbre <strong>et</strong> un suj<strong>et</strong> en Géométrie, àsavoir :1) un mémoire abouti sur <strong>le</strong>s séries trigonométriques qu’il avait déjàachevé pendant l’automne 5 ;3 « Mon travail progresse raisonnab<strong>le</strong>ment : au début du mois <strong>de</strong> décembre, j’airemis mon mémoire d’habilitation <strong>et</strong> je <strong>de</strong>vais proposer à ce moment-là trois suj<strong>et</strong>spour l’épreuve ora<strong>le</strong>, parmi <strong>le</strong>squels la faculté <strong>de</strong>vait en choisir un. J’avais préparé <strong>le</strong>s<strong>de</strong>ux premiers <strong>et</strong> j’espérais que l’un d’entre eux serait sé<strong>le</strong>ctionné : malheureusement,Gauss opta pour <strong>le</strong> troisième, <strong>et</strong> je suis à présent un peu pressé par <strong>le</strong> temps, car jedois encore <strong>le</strong> préparer. »4 « J’ai loué pour l’été une maison avec un jardin <strong>et</strong>, grâce à cela, ma santé nem’a plus tourmenté. Ayant terminé, <strong>de</strong>ux semaines après Pâques, une étu<strong>de</strong> dont jene pouvais pas venir à bout, je me suis enfin mis à ma conférence d’épreuve <strong>et</strong> je l’aiterminée vers Pentecôte. »5 Ce mémoire ne fut publié à titre posthume qu’en 1868, par <strong>le</strong>s soins <strong>de</strong>De<strong>de</strong>kind.


Chapitre 1. L’ouverture riemannienne 32) un travail sur <strong>le</strong>s intersections entre <strong>de</strong>ux courbes planes du second<strong>de</strong>gré 6 ;3) une réf<strong>le</strong>xion généra<strong>le</strong> sur <strong>le</strong>s fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> la géométrie.Dans sa courte biographie [35], De<strong>de</strong>kind a écrit que Gauss aurait sé<strong>le</strong>ctionné<strong>le</strong> troisième suj<strong>et</strong> en dérogeant à la convention académique habituel<strong>le</strong><strong>de</strong> choisir <strong>le</strong> premier, parce qu’il était curieux <strong>de</strong> voir commentun si jeune mathématicien pourrait traiter une question qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> tant<strong>de</strong> maturité scientifique 7 . Mais d’après Laugwitz [93], <strong>le</strong> premier suj<strong>et</strong>proposé était thématiquement trop proche <strong>de</strong> la thèse <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> ; <strong>le</strong>contenu du second est probab<strong>le</strong>ment apparu assez évi<strong>de</strong>nt à Gauss ; d<strong>et</strong>el<strong>le</strong> sorte que <strong>le</strong>s professeurs concernés, se fiant à l’expertise <strong>de</strong> Gauss,ne pouvaient qu’être conduits à sé<strong>le</strong>ctionner <strong>le</strong> troisième suj<strong>et</strong> sur lagéométrie.Il y a <strong>de</strong>s raisons <strong>de</strong> penser que <strong>Riemann</strong>, en prenant <strong>le</strong> risque <strong>de</strong>proposer un travail qui n’était que potentiel<strong>le</strong>ment en gestation, avaitl’intention <strong>de</strong> s’exposer à la contrainte, dans un cadre institutionnel, <strong>de</strong>rédiger ses idées nouvel<strong>le</strong>s qu’il jugeait fondamenta<strong>le</strong>s, bien qu’inachevées.En vérité, sur <strong>le</strong> moment, <strong>Riemann</strong> ne semb<strong>le</strong> pas avoir été tel<strong>le</strong>mentpréoccupé par c<strong>et</strong>te tâche supplémentaire, étant donné qu’aprèsavoir programmé une soutenance vers la fin <strong>de</strong> l’été 8 , il ne s’y est consacréà p<strong>le</strong>in temps qu’après Pâques 1854. En fait, durant l’hiver 1854,il reprend ses recherches sur <strong>le</strong>s relations entre l’é<strong>le</strong>ctricité, <strong>le</strong> magnétisme,la lumière <strong>et</strong> la gravitation 9 , tout en travaillant comme assistant<strong>de</strong> Weber à l’institut <strong>de</strong> physique mathématique. Malheureusement, <strong>le</strong>mauvais temps hivernal <strong>et</strong> une crise <strong>de</strong> surmenage <strong>le</strong> conduisent à la6 [Über die Auflösung zweier G<strong>le</strong>ichungen zweiten Gra<strong>de</strong>s mit zwei unbekanntenGrössen], texte absent <strong>de</strong>s Gesammelte Werke.7 Remmert [131] a reproduit <strong>le</strong> rapport <strong>de</strong> Gauss, écrit en calligraphie présütterline,sur la dissertation inaugura<strong>le</strong> <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> <strong>de</strong> 1851 ; Gauss y appréciaitdéjà l’« indépendance productive <strong>et</strong> louab<strong>le</strong> » [rümliche productive Selbstthätigkeit]<strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>.8 Au printemps 1853, Gauss se plaignait dans une l<strong>et</strong>tre à A<strong>le</strong>xan<strong>de</strong>r von Humboldt<strong>de</strong> dou<strong>le</strong>urs à la poitrine <strong>et</strong> au gosier, d’essouff<strong>le</strong>ments, <strong>de</strong> palpitations <strong>et</strong> d’insomnie.Un an plus tard, son état s’était aggravé. Le vendredi 9 juin 1854, il apprendque <strong>Riemann</strong> a officiel<strong>le</strong>ment déposé son texte, <strong>et</strong> il fixe la conférence au <strong>le</strong>n<strong>de</strong>main([10], pp. 201–202).9 Dans sa l<strong>et</strong>tre du 5 février 1854 à son frère Wilhelm (n o 65, [117] p. 109),<strong>Riemann</strong> exprime clairement quel<strong>le</strong> est sa direction <strong>de</strong> recherche principa<strong>le</strong> à c<strong>et</strong>teépoque-là : « Ich hatte g<strong>le</strong>ich nach Ablieferung meiner Habilitationsschrift wie<strong>de</strong>rmeine Untersuchungen über <strong>de</strong>n Zusammenhang <strong>de</strong>r Naturges<strong>et</strong>ze fortges<strong>et</strong>zt, undmich so darin vertieft, daß ich nicht davon loskommen konnte. »


4 1.2. Appréciations d’universalitémaladie — il était hypocondriaque <strong>et</strong> il souffrait régulièrement <strong>de</strong> lafragilité <strong>de</strong> ses poumons —, ce qui <strong>le</strong> contraint à interrompre ses travauxpour se reposer à la campagne. Ayant recouvré la santé, il rédigeradonc sa conférence d’épreuve du lundi <strong>de</strong> Pâque au lundi <strong>de</strong> Pentecôte,en sept semaines environ 10 .1.2. Appréciations d’universalité. Newman ([122]) qualifie d’« impérissab<strong>le</strong>» ce discours d’habilitation, qui rayonne encore d’une puissancephilosophique <strong>et</strong> mathématique singulière. C’est aussi l’un <strong>de</strong>strès rares exemp<strong>le</strong>s d’accession, en mathématique, au statut <strong>de</strong> classiqueintemporel 11 .Dans son essence même, l’Habilitationsvortrag <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> esten eff<strong>et</strong> un chef-d’œuvre remarquab<strong>le</strong> d’inachèvement <strong>et</strong> d’ouverture ;<strong>de</strong> par <strong>le</strong>s conséquences multip<strong>le</strong>s qu’el<strong>le</strong> recè<strong>le</strong>, el<strong>le</strong> a eu en eff<strong>et</strong>une influence déterminante quant au <strong>de</strong>stin <strong>de</strong> branches mathématiquesneuves qui <strong>de</strong>vaient être développées ultérieurement, tel<strong>le</strong>s que parexemp<strong>le</strong> : <strong>le</strong>s fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> la géométrie, la topologie, la géométriedifférentiel<strong>le</strong>, la géométrie riemannienne ou finslérienne, <strong>et</strong>c.Toutefois, même si <strong>le</strong>s considérations <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> sont apparemmenttrès accessib<strong>le</strong>s à la <strong>le</strong>cture <strong>et</strong> semb<strong>le</strong>nt avoir été dictées parune langue philosophique universel<strong>le</strong> <strong>et</strong> intemporel<strong>le</strong>, el<strong>le</strong>s renfermentnombre d’affirmations énigmatiques ; <strong>et</strong> comme ces affirmations remarquab<strong>le</strong>sne sont pas justifiées par <strong>de</strong>s démonstrations mathématiques,el<strong>le</strong>s ont aiguisé la sagacité <strong>de</strong>s géomètres pendant <strong>de</strong>s décennies.Sans concession, <strong>Sophus</strong> <strong>Lie</strong> commentera <strong>le</strong>s zones <strong>de</strong> pénombre 12qui touchent à c<strong>et</strong>te théorie entièrement nouvel<strong>le</strong> <strong>de</strong>s groupes continus<strong>de</strong> transformations, théorie que <strong>Riemann</strong> ne possédait manifestementpas, <strong>et</strong> dont <strong>Lie</strong> allait faire l’œuvre monumenta<strong>le</strong> <strong>de</strong> sa vie. On peut10 Le programme <strong>de</strong> travail <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> a certainement connu <strong>de</strong>s alternancescomp<strong>le</strong>xes que la biographie précieuse [35] <strong>de</strong> De<strong>de</strong>kind (cf.aussi [8, 164]) était naturel<strong>le</strong>mentdans l’incapacité <strong>de</strong> reconstituer, puisque dans sa l<strong>et</strong>tre du 5 février 1854publiée par Neuenschwan<strong>de</strong>r ([117], p. 110), <strong>Riemann</strong> confie à son frère : « Seit achtTagen geht es mir nun wie<strong>de</strong>r besser, die Probevor<strong>le</strong>sung, die ich beim Colloquiumhalten soll ist halb ausgearbeit<strong>et</strong>, und Dein Brief und <strong>de</strong>r Gedanke an Dich sol<strong>le</strong>n mirein Sporn sein, mich durch nichts wie<strong>de</strong>r von dieser Arbeit abbringen zu lassen. »11 En littérature <strong>et</strong> en philosophie, la fréquentation régulière <strong>et</strong> l’étu<strong>de</strong> exégétiquedu corpus classique font partie intégrante <strong>de</strong> la formation spécialisée ; tel n’est pas <strong>le</strong>cas en mathématiques.12 Le §100 du Chapitre 22 p. 275 ci-<strong>de</strong>ssous offre une analyse du discours d’habilitation<strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>, <strong>et</strong> tout particulièrement du § III, 1 p. 265 <strong>de</strong> [132] qui prétendavoir complètement résolu <strong>le</strong> problème auquel Helmholtz, <strong>et</strong> surtout <strong>Lie</strong>, ont consacré<strong>le</strong>urs forces <strong>de</strong> genèse conceptuel<strong>le</strong>.


Chapitre 1. L’ouverture riemannienne 5s’imaginer néanmoins que <strong>Riemann</strong> a étayé par <strong>de</strong>s recherches analytiquesrigoureuses la plupart <strong>de</strong>s propositions qu’il énonce seu<strong>le</strong>mentdans un langage conceptuel, eu égard au <strong>de</strong>voir qu’il avait vis-à-vis <strong>de</strong>son auditoire d’user au minimum d’un appareil technique 13 .Grâce à sa pénétration conceptuel<strong>le</strong>, ce texte allait donc <strong>de</strong>venirune source d’inspiration récurrente dans <strong>le</strong> <strong>de</strong>rnier tiers du 19 èmesièc<strong>le</strong> — <strong>et</strong> aussi à la charnière du 20 ème —, au moment où la clarification<strong>et</strong> l’approfondissement <strong>de</strong>s concepts fondamentaux s’affirmaientcomme l’une <strong>de</strong>s tendances dominantes en mathématiques.Ainsi, faudra-t-il attendre <strong>le</strong>s travaux <strong>de</strong> De<strong>de</strong>kind, Gehring, Clifford,Helmholtz, Christoffel, Lipschitz, Beltrami, Frobenius, <strong>Lie</strong>, Killing,<strong>Engel</strong>, Ricci-Curbastro, Levi-Civita, Schouten, É. Cartan <strong>et</strong> d’autrespour mesurer l’amp<strong>le</strong>ur <strong>de</strong>s développements inattendus que ces idéesà peine esquissées contenaient en germe.1.3. Assemb<strong>le</strong>r l’inachevé. C’est certainement la citation que <strong>Riemann</strong>a choisi <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en exergue à ses Fragmente philosophischen Inhalts 14qui caractérise <strong>le</strong> mieux sa propre position dans ses travaux scientifiques15 :Ne rej<strong>et</strong>ez pas avec mépris <strong>le</strong>s présents que j’ai rassemblés pourvous avec dévotion avant <strong>de</strong> <strong>le</strong>s avoir compris. Lucrèce, <strong>de</strong> Natura Rerum13 Seu<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s quatre courtes pages <strong>de</strong> la secon<strong>de</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong>rnière partie <strong>de</strong> la Commentatiomathematica, qua respon<strong>de</strong>re tentatur quaestioni ab III ma Aca<strong>de</strong>mia Parisiensipropositae ([132], pp. 380–383) dévoi<strong>le</strong>nt quelques calculs elliptiques en relation avecla définition <strong>de</strong> la courbure sectionnel<strong>le</strong> qui apparaît dans l’habilitation. Ce manuscrit<strong>de</strong> 1861 ne fut pas publié car <strong>le</strong> prix <strong>de</strong> l’Académie <strong>de</strong> Paris proposé en 1858 n’a fina<strong>le</strong>mentpas été attribué à <strong>Riemann</strong>. Depuis <strong>le</strong>s travaux <strong>de</strong> Lipschitz <strong>et</strong> <strong>de</strong> Christoffel,<strong>le</strong>s calculs visionnaires (<strong>et</strong> cryptiques) <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> peuvent être interprétés commeassociant aux quantités <strong>de</strong> courbure sectionnel<strong>le</strong> introduites par <strong>Riemann</strong> une certaineforme bilinéaire symétrique sur l’espace <strong>de</strong>s 2-plans infinitésimaux qui est aujourd’huiappelée tenseur <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Christoffel <strong>et</strong> dont la connaissance recouvre tous<strong>le</strong>s invariants locaux <strong>de</strong> la métrique ([154]).14 — publiés à titre posthume en 1876 dans ses Gesammelte MathematischeWerke —15 En 1840, <strong>Riemann</strong> quitte la maison familia<strong>le</strong> à Quickborn pour entrer au lycéeà Hanovre. C’est à ce moment-là que débute sa correspondance régulière avec sa famil<strong>le</strong>.Neueunschwan<strong>de</strong>r ([117], p. 90) qui a transcrit <strong>de</strong>s l<strong>et</strong>tres inédites signa<strong>le</strong> que<strong>Riemann</strong> avait déjà en ce temps-là <strong>de</strong> la peine à mener ses compositions à bonne fin,parce qu’il rej<strong>et</strong>ait continuel<strong>le</strong>ment ce qu’il avait déjà écrit.


6 1.4. Le mystère <strong>de</strong>s notions primitives <strong>de</strong> la géométriePlus <strong>de</strong> la moitié <strong>de</strong> l’œuvre fascinante <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> est en eff<strong>et</strong> constituée<strong>de</strong> travaux qu’il jugeait inaboutis <strong>et</strong> qu’il s’est refusé, pour c<strong>et</strong>te raison,à publier 16 . D’un point <strong>de</strong> vue philosophique, la règ<strong>le</strong> riemannienne<strong>de</strong> direction <strong>de</strong> l’esprit consiste donc à rassemb<strong>le</strong>r <strong>de</strong>s éléments qui nesont pas compris, à formu<strong>le</strong>r <strong>de</strong>s questions réf<strong>le</strong>xives <strong>le</strong>s concernant, àrenverser <strong>le</strong>s interrogations spéculatives, à désigner <strong>le</strong>s questions nonrésolues. Comme Socrate, <strong>Riemann</strong> exprime qu’il ne sait pas ; c<strong>et</strong> état<strong>de</strong> fait qui est impersonnel <strong>et</strong> universel, <strong>le</strong> mathématicien doit l’accepter,puisqu’il fait partie intégrante <strong>de</strong> l’essence même <strong>de</strong>s mathématiques.Une tel<strong>le</strong> posture généra<strong>le</strong> s’apparente donc plus à une volontéd’ignorance qu’au doute systématique <strong>de</strong> Descartes, à ceci près que lavolonté d’ignorance, en mathématiques, ne peut pas être une aporétique<strong>de</strong> principe comme l’est la maïeutique socratique, puisqu’el<strong>le</strong> doit déboucherà terme sur <strong>de</strong>s propositions rigoureuses, sur <strong>de</strong>s théorèmes, sur<strong>de</strong>s connaissances adéquates. Analyser la métaphysique <strong>de</strong>s mathématiquesque nous a léguée <strong>Riemann</strong>, c’est d’une certaine manière entrerdans une topologie <strong>de</strong> l’ouverture acceptée <strong>de</strong> la pensée.1.4. Le mystère <strong>de</strong>s notions primitives <strong>de</strong> la géométrie. D’aprèsClifford ([31], p. 565), « C’est <strong>Riemann</strong> qui <strong>le</strong> premier a accompli latâche d’analyser toutes <strong>le</strong>s hypothèses <strong>de</strong> la géométrie, <strong>et</strong> <strong>de</strong> montrer<strong>le</strong>ur indépendance mutuel<strong>le</strong> ».Au commencement <strong>de</strong> son discours, <strong>Riemann</strong> annonce en eff<strong>et</strong>que la Géométrie classique d’Eucli<strong>de</strong> adm<strong>et</strong> comme données préalab<strong>le</strong>s<strong>le</strong>s concepts <strong>de</strong> point, <strong>de</strong> droite, d’espace, ainsi que <strong>le</strong>s notions d’inci<strong>de</strong>nce,d’ang<strong>le</strong> <strong>et</strong> d’intersection. De toutes ces notions, el<strong>le</strong> ne donneque <strong>de</strong>s définitions nomina<strong>le</strong>s, implicites sur <strong>le</strong> plan logique 17 . En ce quiconcerne <strong>le</strong>s représentations menta<strong>le</strong>s, <strong>le</strong>s axiomes qui donnent naissanceaux relations démonstratives fondamenta<strong>le</strong>s sont toujours soustendus,en filigrane, par un réseau d’intuitions archaïques ; <strong>et</strong> parce que16 Autre exemp<strong>le</strong> dans <strong>le</strong> domaine <strong>de</strong> la création littéraire, analysé par RolandBarthes ([7], p. 343) : « Flaubert (1871, 50 ans) : ‘Comme si <strong>de</strong> rien n’était, je prends<strong>de</strong>s notes pour mon Saint Antoine [ce sera la troisième version], que je suis bien décidéà ne pas publier quand il sera fini, ce qui fait que je travail<strong>le</strong> en toute liberté d’esprit’[L<strong>et</strong>tre à Ernest Fey<strong>de</strong>au, 8 août 1871] ; problème bien énoncé [. . .]. ‘Ne pas publier’,sorte <strong>de</strong> figure mi-rhétorique, mi-magique, utilisée par beaucoup d’écrivains. »17 D’après Eucli<strong>de</strong>, un point est ce qui est sans partie ; une ligne est une longueursans épaisseur ; un ang<strong>le</strong> est l’inclinaison l’une sur l’autre <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux lignes. D’inspirationmétaphysique <strong>et</strong> procédant par prédication négative, <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux premières définitionsoccultent en eff<strong>et</strong> la question <strong>de</strong> savoir où <strong>et</strong> comment asseoir ou fon<strong>de</strong>r cesconcepts qui doivent par ail<strong>le</strong>urs rester opératoirement évi<strong>de</strong>nts pour tout géomètre.


Chapitre 1. L’ouverture riemannienne 7ces intuitions aisées s’enracinent dans l’expérience physique <strong>de</strong> la pensée,el<strong>le</strong>s occultent l’interrogation mathématique abstraite, pure <strong>et</strong> apriori. Or d’après <strong>Riemann</strong>, la position <strong>de</strong>s hypothèses primitives doitpar nature être indécise, el<strong>le</strong> doit par principe faire question en tant qu<strong>et</strong>el<strong>le</strong>, <strong>et</strong> donc, el<strong>le</strong> constituer un thème <strong>de</strong> recherche nouveau, abstrait,pur <strong>et</strong> a priori.Les rapports mutuels <strong>de</strong> ces données primitives restent enveloppés<strong>de</strong> mystère [im Dunkeln] ; on n’aperçoit pas bien si el<strong>le</strong>s sont nécessairementliées entre el<strong>le</strong>s, ni jusqu’à quel point el<strong>le</strong>s <strong>le</strong> sont, ni mêmea priori si el<strong>le</strong>s peuvent l’être. [133], p. 280.Dans c<strong>et</strong>te seu<strong>le</strong> phrase qui semb<strong>le</strong> énoncer une constatation inspirée,s’exprime un <strong>de</strong>s traits <strong>le</strong>s plus caractéristiques <strong>de</strong> la philosophie riemannienne<strong>de</strong>s mathématiques :l’ouverture,l’ouverture dite, l’ouverture écrite, l’ouverture assumée, l’ouverturemaintenue, fussent-el<strong>le</strong>s ombre, obscurité ou même mystère, commeHoüel a si bien choisi <strong>de</strong> <strong>le</strong> traduire.Depuis Eucli<strong>de</strong> jusqu’à Legendre, pour ne citer que <strong>le</strong> plus illustre<strong>de</strong>s réformateurs mo<strong>de</strong>rnes <strong>de</strong> la Géométrie, personne, parmi <strong>le</strong>s mathématiciensni parmi <strong>le</strong>s philosophes, n’est parvenu à éclaircir ce mystère[Dunkelheit]. [133], p. 280.<strong>Riemann</strong> est <strong>le</strong> premier, dans l’histoire <strong>de</strong>s mathématiques, à insisterexplicitement dans ses écrits, sans en passer par la formulation <strong>de</strong>problèmes ouverts précis, sur la présence constante <strong>de</strong> l’inachèvement.C’est en cela qu’il est immortel.1.5. Fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> la géométrie. <strong>Riemann</strong> connaissait-il <strong>le</strong>s travaux<strong>de</strong> géométrie non-euclidienne dus à ses contemporains ? Hormis <strong>le</strong>s Éléments<strong>de</strong> géométrie [95] <strong>de</strong> Legendre, La bibliothèque <strong>de</strong> l’université<strong>de</strong> Göttingen possédait une copie d’un travail <strong>de</strong> Bólyai (cf. [19]), <strong>et</strong>quelques publications <strong>de</strong> N.I. Lobatchevskiĭ, notamment l’essai sur la« géométrie imaginaire » paru au Journal für die reine und angewandteMathematik 18 <strong>et</strong> son livre-fascicu<strong>le</strong> Recherches géométriques sur lathéorie <strong>de</strong>s parallè<strong>le</strong>s (cf. [105]) publié à Berlin en 1840. <strong>Riemann</strong> pourraitavoir consulté ces sources, <strong>et</strong> d’après Neuenschwan<strong>de</strong>r (cf. aussi[141, 143]), il a effectivement emprunté <strong>le</strong> volume 17 du Journal <strong>de</strong>Crel<strong>le</strong> <strong>le</strong> 15 février 1854.Toutefois, l’étu<strong>de</strong> du Nachlass conduite par Scholz dans [141]montre que <strong>Riemann</strong> n’était pas réel<strong>le</strong>ment intéressé, comme avait pu18 — volume 17 (1837), 295–320 —


8 1.6. Le renversement riemannienl’être Gauss, par <strong>le</strong>s fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> la géométrie élémentaire. Fait surprenant,<strong>le</strong>s archives explorées ne portent aucune indication du fait que<strong>Riemann</strong> ait pu se constituer une connaissance circonstanciée <strong>de</strong>s travaux<strong>de</strong> Bólyai <strong>et</strong> <strong>de</strong> Lobatchevskiĭ. En tout cas, dans son discours d’habilitation,il mentionne seu<strong>le</strong>ment Legendre, qu’il considère comme « <strong>le</strong>plus illustre <strong>de</strong>s réformateurs mo<strong>de</strong>rnes <strong>de</strong> la géométrie ». Fait tout aussiétonnant, <strong>Riemann</strong> ne cite pas une seu<strong>le</strong> fois l’axiome <strong>de</strong>s parallè<strong>le</strong>s,même lorsqu’il traite <strong>de</strong>s variétés <strong>de</strong> courbure constante au sein <strong>de</strong>squel<strong>le</strong>sl’existence <strong>et</strong> <strong>le</strong> comportement <strong>de</strong>s parallè<strong>le</strong>s peuvent être caractérisés<strong>de</strong> manière extrêmement limpi<strong>de</strong> en fonction du signe <strong>de</strong> la courbure(constante). En vérité, l’analyse par Scholz [141, 143] du feuill<strong>et</strong>n o 40 du dossier n o 16 du Nachlass montre <strong>le</strong> peu d’intérêt que <strong>Riemann</strong>aurait pu trouver à s’engager, dans <strong>de</strong>s recherches <strong>de</strong> type logique oufondationnel, en partant <strong>de</strong>s postulats d’Eucli<strong>de</strong>.Même s’il est intéressant <strong>de</strong> saisir un tel mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> traitement <strong>de</strong>la géométrie, une tel<strong>le</strong> entreprise serait extrêmement infructueuse, car<strong>de</strong> la sorte, on ne trouverait pas <strong>de</strong> nouveaux théorèmes, <strong>et</strong> ce quiapparaît simp<strong>le</strong> <strong>et</strong> clair dans la présentation <strong>de</strong> l’espace <strong>de</strong>viendrait <strong>de</strong>c<strong>et</strong>te manière-là compliqué <strong>et</strong> diffici<strong>le</strong>. [143], pp. 28–29.Ainsi <strong>Riemann</strong> semb<strong>le</strong>-t-il écarter la voix d’axiomatisation a posteriori<strong>de</strong>s géométries comme systèmes logiques clos <strong>et</strong> cohérents, tel<strong>le</strong> qu’el<strong>le</strong><strong>de</strong>vait naître dans <strong>le</strong>s années 1880 avec <strong>le</strong>s travaux <strong>de</strong> Pasch 19 , Stolz,Schur, <strong>et</strong> ultérieurement <strong>de</strong> Veronese, Killing, Enriques, Pieri, Padoa,Russell, Hilbert, Poincaré. Mais sur la base d’une analyse <strong>de</strong> la méthodologiephilosophique <strong>de</strong> Herbart qui a influencé <strong>Riemann</strong>, on peutnéanmoins soutenir (cf. ce qui va suivre) que <strong>Riemann</strong> anticipe l’organisationstructura<strong>le</strong> <strong>et</strong> hiérarchique <strong>de</strong>s concepts mathématiques mo<strong>de</strong>rnes,<strong>et</strong> ce, bien avant que naisse la métho<strong>de</strong> axiomatique hilbertienneproprement dite qui <strong>de</strong>vait conférer un sens métamathématique précisaux concepts <strong>de</strong> cohérence, <strong>de</strong> complétu<strong>de</strong>, d’indépendance, <strong>de</strong> suffisance,<strong>de</strong> nécessité, <strong>de</strong> spécialisation <strong>et</strong> <strong>de</strong> catégoricité.19 Freu<strong>de</strong>nthal ([52], p. 617) souligne que Pasch dans ses [Vor<strong>le</strong>sungen über neuereGeom<strong>et</strong>rie] (1882) anticipe très largement <strong>le</strong> point <strong>de</strong> vue formaliste pur dont Hilberts’était fait l’ar<strong>de</strong>nt défenseur dans ses Grundlagen <strong>de</strong>r Geom<strong>et</strong>rie (1899) : « À chaquefois », écrit en eff<strong>et</strong> Pasch, « que la géométrie doit être réel<strong>le</strong>ment déductive, <strong>le</strong> procédéd’inférence doit être indépendant aussi bien <strong>de</strong> la signification <strong>de</strong>s notions géométriquesque <strong>de</strong>s figures. Les seu<strong>le</strong>s choses qui comptent sont <strong>le</strong>s relations entre <strong>le</strong>snotions géométriques, tel<strong>le</strong>s qu’el<strong>le</strong>s sont établies dans <strong>le</strong>s théorèmes <strong>et</strong> utilisées dans<strong>le</strong>s définitions ».


Chapitre 1. L’ouverture riemannienne 91.6. Le renversement riemannien. <strong>Riemann</strong> était principa<strong>le</strong>ment intéressépar <strong>de</strong>s questions d’un type nouveau, <strong>et</strong> qui font mystère enel<strong>le</strong>s-mêmes <strong>et</strong> par el<strong>le</strong>s-mêmes ; en acceptant d’explorer ces questions,il est possib<strong>le</strong> <strong>de</strong> faire jouer aux racines <strong>de</strong> la connaissance mathématique<strong>le</strong> rô<strong>le</strong> <strong>de</strong> branches nouvel<strong>le</strong>s en <strong>de</strong>venir. Renverser <strong>le</strong>s questionsd’essence <strong>et</strong> <strong>de</strong> conceptualisation, c’est un acte métaphysique par excel<strong>le</strong>nce.Sur <strong>le</strong> plan <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong> la connaissance, <strong>Riemann</strong> rejointdonc l’exigence critique <strong>de</strong> la philosophie qui a marqué son temps.En eff<strong>et</strong>, Kant caractérisait <strong>de</strong> manière imagée sa « solution transcendanta<strong>le</strong>» au problème général <strong>de</strong> la raison pure comme un renversementcopernicien 20 : <strong>le</strong> fait qu’il existe, en physique <strong>et</strong> en mathématiques,<strong>de</strong>s connaissances synthétiques a priori — fait incontestab<strong>le</strong>dont la philosophie (qui s’en étonne spontanément) se doit <strong>de</strong>rendre compte — peut trouver toute son intelligibilité, d’après Kant,si l’on fait l’hypothèse (révolutionnaire en philosophie) que <strong>le</strong>s obj<strong>et</strong>sse règ<strong>le</strong>nt sur notre connaissance, <strong>et</strong> que ces obj<strong>et</strong>s sur <strong>le</strong>squels se règ<strong>le</strong>notre connaissance sont à distinguer rigoureusement <strong>de</strong>s choses tel<strong>le</strong>squ’el<strong>le</strong>s sont en el<strong>le</strong>s-mêmes <strong>et</strong> auxquel<strong>le</strong>s notre enten<strong>de</strong>ment limité nepeut pas prétendre avoir accès. Ainsi, autant une connaissance synthétique<strong>et</strong> a priori <strong>de</strong>s choses en el<strong>le</strong>s-mêmes exposerait à d’invraisemblab<strong>le</strong>sobscurités <strong>et</strong> à une anarchie sans fin <strong>de</strong> contradictions 21 , autantune connaissance synthétique a priori <strong>de</strong>s obj<strong>et</strong>s d’expérience, en tantque ces obj<strong>et</strong>s trouvent <strong>le</strong>ur source dans notre sensibilité, dans notre intuition,<strong>et</strong> dans notre enten<strong>de</strong>ment, perm<strong>et</strong> d’établir un vrai rapport <strong>de</strong>structuration <strong>et</strong> <strong>de</strong> fon<strong>de</strong>r ainsi sans conteste la part d’aprioricité <strong>de</strong> laconnaissance.20 L’astronome polonais Nicolas Copernic (1473–1543) proposa <strong>de</strong> substituer augéocentrisme l’héliocentrisme (voir [159] pour une étu<strong>de</strong> philosophique). « Il en estprécisément ici », écrit Kant ([82], p. 19) dans sa secon<strong>de</strong> Préface à la Critique <strong>de</strong> laRaison pure afin <strong>de</strong> caractériser son hypothèse fondamenta<strong>le</strong> par une analogie imagée,« comme <strong>de</strong> la première idée <strong>de</strong> Copernic ; voyant qu’il ne pouvait pas réussir àexpliquer <strong>le</strong>s mouvements du ciel en adm<strong>et</strong>tant que toute l’armée <strong>de</strong>s étoi<strong>le</strong>s évoluaitautour du spectateur, il chercha s’il n’aurait pas plus <strong>de</strong> succès en faisant tourner l’observateurlui-même autour <strong>de</strong>s astres immobi<strong>le</strong>s. Or en Métaphysique, on peut faire unpareil essai, pour ce qui est <strong>de</strong> l’intuition <strong>de</strong>s obj<strong>et</strong>s, Si l’intuition <strong>de</strong>vait se rég<strong>le</strong>r surla nature <strong>de</strong>s obj<strong>et</strong>s, je ne vois pas comment on en pourrait connaître quelque chose apriori ; si l’obj<strong>et</strong>, au contraire (en tant qu’obj<strong>et</strong> [Object] <strong>de</strong>s sens), se règ<strong>le</strong> sur la nature<strong>de</strong> notre pouvoir d’intuition, je puis me représenter à merveil<strong>le</strong> c<strong>et</strong>te possibilité. »21 « Le terrain [Kampfplatz] où se livrent ces combats sans fin se nomme la Métaphysique» ([82], p. 5).


10 1.6. Le renversement riemannienPour Kant, l’intuition ne se règ<strong>le</strong> donc pas sur la nature <strong>de</strong> l’obj<strong>et</strong>,mais c’est l’obj<strong>et</strong>, en tant qu’obj<strong>et</strong> <strong>de</strong>s sens, qui se règ<strong>le</strong> sur la nature <strong>de</strong>notre pouvoir d’intuition, ou plus exactement, qui se dévoi<strong>le</strong> dans <strong>et</strong> parce que nous en explorons, dans <strong>et</strong> par ce que nous en disons, <strong>et</strong> ainsi,avec <strong>le</strong> pouvoir <strong>de</strong> préformation qui nous appartient en propre, il doit enal<strong>le</strong>r <strong>de</strong> même <strong>et</strong> <strong>de</strong> manière absolument généra<strong>le</strong> quant aux conceptspar <strong>le</strong>squels l’enten<strong>de</strong>ment élabore <strong>le</strong>s déterminations <strong>de</strong> la connaissance22 (cf. [82], p 19). « Nous ne connaissons a priori <strong>de</strong>s choses quece que nous y m<strong>et</strong>tons nous-mêmes » : c’est l’hypothèse fondamenta<strong>le</strong>(risquée) du système que Kant a érigé afin <strong>de</strong> délimiter avec exactitu<strong>de</strong>la portée <strong>de</strong>s raisonnements métaphysiques qui dépassent <strong>le</strong>s limites d<strong>et</strong>oute expérience.Ainsi d’après Kant, l’enten<strong>de</strong>ment ne doit pas seu<strong>le</strong>ment être définicomme <strong>le</strong> pouvoir d’élaborer <strong>de</strong>s règ<strong>le</strong>s empiriques, en raisonnant parinduction, en comparant, <strong>et</strong> en extrapolant, mais surtout, à un niveau véritab<strong>le</strong>menttranscendantal, comme <strong>le</strong> pouvoir structurel <strong>de</strong> prescrire enquelque sorte ses propres règ<strong>le</strong>s à la nature, au sens où <strong>le</strong>s obj<strong>et</strong>s d’expériencesont nécessairement conformes aux conditions a priori dans<strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s ils peuvent être perçus <strong>et</strong> pensés — autrement dit : <strong>le</strong>s formes<strong>de</strong> la sensibilité <strong>et</strong> <strong>le</strong>s contraintes logiques du raisonnement préformenten quelque sorte toutes <strong>le</strong>s connaissances qui sont synthétiques a priori.En quoi consiste alors, chez <strong>Riemann</strong>, <strong>le</strong> renversement philosophiquepar rapport à la tradition mathématique qui <strong>le</strong> précè<strong>de</strong> ? Certainementpas dans l’élaboration d’une théorie généra<strong>le</strong> <strong>de</strong> la connaissancequi serait <strong>de</strong>stinée à expliquer <strong>le</strong>s antinomies <strong>de</strong> la raison, <strong>le</strong>s apparencestranscendanta<strong>le</strong>s, <strong>et</strong> <strong>le</strong>s paralogismes <strong>de</strong>s preuves métaphysiques. Lesmathématiques ont rarement besoin qu’on <strong>le</strong>ur apprenne à corriger <strong>le</strong>ursraisonnements. Toutefois, dans la trajectoire philosophique <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>,on trouve une analogie <strong>de</strong> fond avec la solution kantienne au problème<strong>de</strong> la métaphysique 23 .22 Postérité remarquab<strong>le</strong> <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te thèse kantienne au suj<strong>et</strong> <strong>de</strong> notre pratique <strong>de</strong> l’algèbre: bien que <strong>le</strong>s idéalités algébriques (groupe <strong>de</strong> Galois ; structure d’une algèbre <strong>de</strong><strong>Lie</strong> ; diagramme <strong>de</strong> Dynkin ; groupe fini produit par générateurs <strong>et</strong> relations ; syzygiesentre invariants algébriques) possè<strong>de</strong>nt un réseau non spatialisé <strong>et</strong> non temporalisé<strong>de</strong> relations comp<strong>le</strong>xes, notre compréhension <strong>de</strong> ces relations <strong>et</strong> <strong>le</strong>s démonstrationsque nous élaborons pour <strong>le</strong>s parcourir sont inévitab<strong>le</strong>ment linéaires <strong>et</strong> successives.L’enten<strong>de</strong>ment préformant (<strong>et</strong> déformant) n’approche <strong>le</strong> multip<strong>le</strong> algébrique que paractions discrètes.23 On ne méditera jamais assez <strong>le</strong>s toutes premières lignes <strong>de</strong> la Critique <strong>de</strong> laraison pure ([82], p. 5) : « La raison humaine a c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>stinée singulière, dans ungenre <strong>de</strong> ses connaissances, d’être accablée <strong>de</strong> questions qu’el<strong>le</strong> ne saurait éviter, car


Chapitre 1. L’ouverture riemannienne 11Chez <strong>Riemann</strong> en eff<strong>et</strong>, du point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong> la connaissanceen général, <strong>le</strong> renversement consiste principa<strong>le</strong>ment dans la désignation— implicite, non théorisée <strong>et</strong> d’ordre méta-mathématique —<strong>de</strong> caractères universels du questionnement mathématique ; presque apriori, ces caractères s’intègrent aux structures fondamenta<strong>le</strong>s <strong>de</strong> la penséemathématique, mais ils ne la préforment pas, ils ne la prédéfinissentpas, <strong>et</strong> ils ne la gouvernent pas. C’est que <strong>Riemann</strong>, dont l’humilité estlégendaire, fait spontanément preuve d’une extrême pru<strong>de</strong>nce quant àl’énonciation <strong>de</strong> toute thèse métaphysique directrice. Ainsi est-il naturel<strong>le</strong>mentpréservé <strong>de</strong> tout engagement dogmatique ou <strong>de</strong> toute tentation<strong>de</strong> fermer un ordre <strong>de</strong> questions. Jamais en eff<strong>et</strong> il n’affirmerait avoirrésolu <strong>de</strong> manière entièrement satisfaisante un problème mathématiquedonné. Son œuvre n’est pas seu<strong>le</strong>ment riche d’invention conceptuel<strong>le</strong>,mais el<strong>le</strong> est aussi — <strong>et</strong> c’est en cela que rési<strong>de</strong> sa force philosophiquemajeure — confondante d’inachèvement volontaire. Kant soutenait,lui, que grâce à l’élaboration <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te « science particulière » qu’ilappelait la critique <strong>de</strong> la raison pure, il avait pu résoudre <strong>le</strong>s questionsen <strong>le</strong>s dissolvant lorsqu’el<strong>le</strong>s s’avéraient être non résolub<strong>le</strong>s 24 . Affirmeravoir résolu une question diffici<strong>le</strong>, même au moyen d’un grand sytème<strong>de</strong> pensée, c’est un risque que <strong>Riemann</strong> ne prend pas.Conséquence limpi<strong>de</strong> : la seu<strong>le</strong> certitu<strong>de</strong> qu’une « métaphysiqueriemannienne » proprement universel<strong>le</strong> pourrait affirmer, c’est qu’il fautmaintenir ouvertes <strong>le</strong>s questions inaugura<strong>le</strong>s tout au long <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur <strong>de</strong>stin.Pour un mathématicien comme <strong>Riemann</strong>, il faut donc élaborer un suivispéculatif constant <strong>de</strong>s problèmes à travers <strong>le</strong>ur histoire, <strong>et</strong> donc par lamême occasion, il faut méditer la continuité <strong>de</strong>s incertitu<strong>de</strong>s qui s’expriment,se développent, <strong>et</strong> se comp<strong>le</strong>xifient. Comme pourrait <strong>le</strong> soutenirHei<strong>de</strong>gger, il s’agit <strong>de</strong> ne jamais oublier la question initia<strong>le</strong> danstoutes <strong>le</strong>s questions qui lui sont subordonnées. Une tel<strong>le</strong> thèse est ununiversel philosophique qui s’exprime aussi dans <strong>le</strong>s mathématiques.el<strong>le</strong>s lui sont imposées par sa nature même, mais auxquel<strong>le</strong>s el<strong>le</strong> ne peut répondre,parce qu’el<strong>le</strong>s dépassent tota<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> pouvoir <strong>de</strong> la raison humaine ». Ici, dans <strong>le</strong>parallélisme dia<strong>le</strong>ctique entre Kant <strong>et</strong> <strong>Riemann</strong>, se <strong>de</strong>ssine alors la question extrêmementdélicate <strong>de</strong> la démarcation entre <strong>le</strong>s mathématiques <strong>et</strong> la métaphysique, entant que l’une <strong>et</strong> l’autre ont <strong>le</strong> même rapport à un champ <strong>de</strong> questions spontanées (<strong>et</strong>« accablantes »), sans pour autant emprunter la même voie quant aux réponses qu’el<strong>le</strong>ssont susceptib<strong>le</strong>s d’élaborer.24 « Après avoir découvert <strong>le</strong> point du ma<strong>le</strong>ntendu <strong>de</strong> la raison avec el<strong>le</strong>-même, je<strong>le</strong>s [ces questions] ai résolues à son entière satisfaction. [. . .] Et je n’ose dire qu’il nedoit pas y avoir un seul problème métaphysique qui ne soit ici résolu. » ([82]).


12 1.7. Déci<strong>de</strong>r l’ouverture problématique du conceptuelIl s’agit ainsi, pour la saine philosophie riemannienne qui s’exerc<strong>et</strong>oujours dans <strong>le</strong>s mathématiques contemporaines, d’examiner régulièrementdans quel<strong>le</strong> mesure <strong>le</strong>s travaux qui paraissent d’année en annéeapportent, ou n’apportent pas une réponse partiel<strong>le</strong>, une réponse satisfaisante,une réponse complète, voire même une réponse définitive 25 .Le traitement du problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> par Helmholtz <strong>et</strong> par <strong>Lie</strong> avec lathéorie <strong>de</strong>s groupes continus <strong>de</strong> transformations (cf. ce qui va suivre),puis par Kolmogorov, Busemann <strong>et</strong> par Freu<strong>de</strong>nthal avec <strong>le</strong>s concepts<strong>de</strong> la topologie généra<strong>le</strong>, montre qu’une question initia<strong>le</strong> peut se métamorphoser,se ramifier <strong>et</strong> se diversifier en s’approfondissant. Dans un<strong>et</strong>el<strong>le</strong> optique, si dogmatisme doctrinaire il peut y avoir, c’est un dogmatisme<strong>de</strong> l’attente <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’imprévisibilité. La position philosophique<strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>, non exprimée par lui comme système <strong>et</strong> intrinsèquementen adéquation avec <strong>le</strong> caractère fondamenta<strong>le</strong>ment imprévisib<strong>le</strong> <strong>et</strong> ouvert<strong>de</strong> l’irréversib<strong>le</strong>-synthétique (cf. [108]) en mathématiques, ne peutêtre entachée par une décision ontologique unilatéra<strong>le</strong>, que ce soit unréalisme, un idéalisme, un transcen<strong>de</strong>ntalisme, un empirisme, un relativisme,ou un scepticisme. Presque par pétition <strong>de</strong> principe, certainsproblèmes acquièrent donc une ouverture dia<strong>le</strong>ctique indéfinie qui <strong>le</strong>srend inépuisab<strong>le</strong>s. À tout <strong>le</strong> moins, très peu <strong>de</strong> questions mathématiquespeuvent être considérées comme complètement résolues : là est toute lateneur du renversement riemannien.25 En arrière-plan <strong>de</strong> ces considérations se profi<strong>le</strong> donc un problème particulièrementdélicat pour la philosophie <strong>de</strong>s mathématiques, à savoir : quand, pourquoi,comment <strong>et</strong> à quel<strong>le</strong>s conditions peut-on déclarer qu’une question mathématique a étécomplètement résolue par un théorème, ou par une théorie ? Étant donné <strong>le</strong> renouveau<strong>de</strong>s problèmes d’effectivité en algèbre que suscite la maturité grandissante <strong>de</strong>s calculateursé<strong>le</strong>ctroniques, la théorie <strong>de</strong> Galois fournit un exemp<strong>le</strong> intéressant d’« illusiond’aboutissement par l’abstraction non calculatoire », puisque dans la pratique, la déterminationdu groupe <strong>de</strong> Galois sur Q d’un polynôme à coefficients entiers n’est enrien résolue par la correspondance biunivoque (<strong>et</strong> presque tautologique) entre tous <strong>le</strong>ssous-groupes du groupe <strong>de</strong> Galois d’une extension finie norma<strong>le</strong>, <strong>et</strong> tous <strong>le</strong>s sous-corps<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te extension qui contiennent Q ([44] ; voir <strong>le</strong> mémoire <strong>de</strong> synthèse [167] <strong>et</strong> sabibliographie pour <strong>le</strong>s résultats <strong>le</strong>s plus récents <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong> Galois algorithmique).Le quantificateur universel “tout” cache ici <strong>de</strong>s ordres <strong>de</strong> question nombreux, notamment<strong>le</strong> problème <strong>de</strong> classifier a priori tous <strong>le</strong>s groupes finis qui peuvent se réalisercomme groupes <strong>de</strong> Galois, qui est essentiel<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> problème principal sur <strong>le</strong>queldébouche la correspondance <strong>de</strong> Galois. Signalons seu<strong>le</strong>ment que Jordan traitera <strong>de</strong> laclassification <strong>de</strong>s sous-groupes du groupe <strong>de</strong>s permutations <strong>de</strong> n 1 l<strong>et</strong>tres, <strong>et</strong> que<strong>Lie</strong> prendra aussi à bras-<strong>le</strong>-corps <strong>le</strong> problème <strong>de</strong> classifier <strong>le</strong>s groupes continus (finisou infinis) <strong>de</strong> transformations.


Chapitre 1. L’ouverture riemannienne 13Voilà donc pour <strong>le</strong> niveau absolument général <strong>de</strong> la philosophieriemannienne <strong>de</strong>s mathématiques.1.7. Déci<strong>de</strong>r l’ouverture problématique du conceptuel. Quant auxconcepts fondamentaux <strong>de</strong> la géométrie, <strong>Riemann</strong> va opérer dans sonhabilitation une <strong>de</strong>uxième révolution <strong>de</strong> pensée par spécification <strong>de</strong> nouvel<strong>le</strong>sarborescences mathématiques potentiel<strong>le</strong>s.Aux structures prédéfinies <strong>de</strong> l’intuition <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’enten<strong>de</strong>ment quiexigeaient chez Kant l’élaboration d’une esthétique transcendanta<strong>le</strong> <strong>et</strong>d’une théorie <strong>de</strong> l’expérience synthétique, se substitue en eff<strong>et</strong> chez<strong>Riemann</strong> l’affirmation méthodologique (implicite) qu’il existe <strong>de</strong>s caractèresa priori, constants <strong>et</strong> reproductib<strong>le</strong>s <strong>de</strong> l’interrogation mathématique,<strong>et</strong> que ces caractères recouvrent trois grands domaines inépuisab<strong>le</strong>sd’investigation en agissant comme principes <strong>de</strong> genèse pour <strong>le</strong>smathématiques tout entières :• la question <strong>de</strong> l’être <strong>et</strong> <strong>de</strong> la nature <strong>de</strong>s obj<strong>et</strong>s mathématiques ;• la question <strong>de</strong>s liens <strong>de</strong> dépendance que ces êtres mathématiquespurement problématiques entr<strong>et</strong>iennent entre eux ;• la question, d’inspiration proprement kantienne, pour <strong>le</strong>s intuitionsmathématiques comme pour <strong>le</strong>s conceptions mathématiques, <strong>de</strong> <strong>le</strong>ursconditions <strong>de</strong> possibilité.Absolument universel<strong>le</strong>s, ces questions généra<strong>le</strong>s concernent toutes <strong>le</strong>smathématiques. Ainsi donc, il ne s’agit pas pour <strong>Riemann</strong>, au début<strong>de</strong> son discours d’habilitation, <strong>de</strong> mieux définir <strong>et</strong> <strong>de</strong> mieux fon<strong>de</strong>r <strong>le</strong>snotions euclidiennes primitives <strong>de</strong> point, <strong>de</strong> droite, ou <strong>de</strong> plan, mais ils’agit plutôt <strong>de</strong> s’interroger sur ce qu’est <strong>et</strong> sur ce que peut être l’espace,<strong>et</strong> donc par voie <strong>de</strong> conséquence, sur <strong>le</strong>s conditions mêmes <strong>de</strong> possibilité,<strong>de</strong> diversité <strong>et</strong> <strong>de</strong> connexion pour <strong>le</strong>s conceptualisations éventuel<strong>le</strong>s<strong>de</strong> la notion problématique d’« espace ». Ceci, par excel<strong>le</strong>nce, c’est <strong>de</strong>la philosophie, <strong>et</strong> une tel<strong>le</strong> philosophie est appelée à se réaliser dans <strong>et</strong>par <strong>le</strong>s mathématiques.La raison [<strong>de</strong> ce mystère] est que <strong>le</strong> concept général <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>urs<strong>de</strong> dimensions multip<strong>le</strong>s, comprenant comme cas particulier <strong>le</strong>sgran<strong>de</strong>urs étendues, n’a jamais été l’obj<strong>et</strong> d’aucune étu<strong>de</strong>. En conséquence,je me suis proposé d’abord <strong>le</strong> problème <strong>de</strong> construire, en partantdu concept général <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>ur [aus allgemeinen Grössenbegriffen], <strong>le</strong>concept d’une gran<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> dimensions multip<strong>le</strong>s [Begriff einer mehrfachausge<strong>de</strong>hnten Grösse]. [133], pp. 280–281.1.8. Nécessité, suffisance, bifurcation. Renversement riemannien,donc, <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong>s sciences mathématiques : <strong>le</strong>s concepts ne sont


14 1.8. Nécessité, suffisance, bifurcationpas donnés dans l’expérience du mon<strong>de</strong> sensib<strong>le</strong>, ils ne sont pas produitspar une intuition sui generis, <strong>et</strong> ils ne sont pas d’emblée présentésdans une évi<strong>de</strong>nce définitionnel<strong>le</strong> 26 . Au contraire, <strong>le</strong>s concepts portent<strong>de</strong> manière permanente <strong>le</strong>s marques <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur propre problématicité ; ilssont donc à construire, <strong>et</strong> ils sont aussi à cause <strong>de</strong> cela ouverts.Dans <strong>le</strong> § I où il introduit la notion, maintenant si fondamenta<strong>le</strong> engéométrie différentiel<strong>le</strong>, <strong>de</strong> multiplicité 27 [Mannigfaltigkeit] 28 , <strong>Riemann</strong>procè<strong>de</strong> comme il l’a déjà fait dans sa Dissertation inaugura<strong>le</strong> <strong>et</strong> dansson mémoire sur <strong>le</strong>s séries trigonométriques : à chaque étape d’uneconceptualisation problématique, il recherche à la fois <strong>le</strong>s conditionsqui sont nécessaires, <strong>et</strong> <strong>le</strong>s conditions qui sont suffisantes à la genèsedu concept ou <strong>de</strong>s concepts visés. Les premières lignes du § 1 en témoignent:Les concepts <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>ur [Grössenbegriffe] ne sont possib<strong>le</strong>s quelà où il existe un concept général qui perm<strong>et</strong>te différents mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> détermination[verschie<strong>de</strong>ne Bestimmungsweisen]. [133], p. 282.Condition nécessaire, donc : « n’être possib<strong>le</strong> que si . . . ». Avant <strong>de</strong> penseraux concepts <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>ur en question, il faut disposer d’un conceptpréalab<strong>le</strong> par <strong>le</strong>quel ces gran<strong>de</strong>urs pourraient être déterminées, <strong>et</strong> il fautse donner <strong>le</strong>s moyens <strong>de</strong> comparer ces déterminations entre el<strong>le</strong>s. Dansla donation, qui est nécessaire, l’Un est précédé par <strong>le</strong> Multip<strong>le</strong>, qui estlui aussi nécessaire.Secon<strong>de</strong> constatation, frappante <strong>de</strong> lucidité philosophique : commes’il respectait rigoureusement <strong>le</strong>s antinomies entre <strong>le</strong> discr<strong>et</strong> <strong>et</strong> <strong>le</strong>continu qui ont préoccupé la philosophie grecque (cf. notamment ladiscusion par Aristote <strong>de</strong>s paradoxes <strong>de</strong> Zénon dans la Physique III),<strong>Riemann</strong> enracine d’emblée sa réf<strong>le</strong>xion dans la bifurcation philosophiqueincontournab<strong>le</strong> entre <strong>le</strong> discr<strong>et</strong> <strong>et</strong> <strong>le</strong> continu.26 Lire <strong>et</strong> méditer <strong>Riemann</strong> perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> se départir d’une certaine « naïv<strong>et</strong>é réaliste »quant à l’« évi<strong>de</strong>nce » <strong>de</strong> l’acte <strong>de</strong> pensée que représente <strong>le</strong> fait <strong>de</strong> poser, ou <strong>de</strong> rappe<strong>le</strong>rla définition d’un obj<strong>et</strong> mathématique, par exemp<strong>le</strong>, dans un artic<strong>le</strong> <strong>de</strong> recherche oulors d’une conférence.27 Vuil<strong>le</strong>min [168] <strong>et</strong> Chorlay [30] suggèrent <strong>de</strong> ne pas traduire <strong>le</strong> terme« Mannigfaltigkeit » introduit par <strong>Riemann</strong> par « variété », mais par « multiplicité ».28 Pour une analyse historique du concept <strong>de</strong> « variété », qui débouchera ultérieurementavec <strong>le</strong>s travaux <strong>de</strong> Weyl, Cartan, Veb<strong>le</strong>n <strong>et</strong> Whitehead sur la définitioncontemporaine en termes <strong>de</strong> cartes <strong>et</strong> d’atlas maximal, nous renvoyons auxétu<strong>de</strong>s [140, 141, 46, 18, 16, 17, 93, 30].


Chapitre 1. L’ouverture riemannienne 15Suivant qu’il est, ou non, possib<strong>le</strong> <strong>de</strong> passer <strong>de</strong> l’un <strong>de</strong> ces mo<strong>de</strong>s<strong>de</strong> détermination à un autre, d’une manière continue, ils forment unemultiplicité [Mannigfaltigkeit] 29 continue ou une multiplicité discrète ; chacunen particulier <strong>de</strong> ces mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> détermination s’appel<strong>le</strong>, dans <strong>le</strong>premier cas, un point, dans <strong>le</strong> second un élément <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te multiplicité.[133], p. 282.Mais avant <strong>de</strong> poursuivre c<strong>et</strong>te analyse philosophique ciblée du discours<strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> (voir p. 27 ci-<strong>de</strong>ssous), un détour par une théorie généra<strong>le</strong><strong>de</strong> la connaissance qui l’a marqué s’impose.1.9. L’influence épistémologique <strong>de</strong> Herbart 30 sur <strong>Riemann</strong>. En1809, après <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s en droit, philosophie, littérature <strong>et</strong> mathématiquesà Iéna, un doctorat puis une habilitation à Göttingen dans <strong>le</strong>squelsil élabore <strong>le</strong>s fondations <strong>de</strong> son système, <strong>le</strong> philosophe al<strong>le</strong>mandHerbart (1776–1841) succè<strong>de</strong> à Kant sur la chaire <strong>de</strong> philosophie <strong>de</strong>l’Université <strong>de</strong> Königsberg. Il crée un séminaire sur la pédagogie qu’ilassocie à une éco<strong>le</strong> pratique expérimenta<strong>le</strong>, <strong>et</strong> il participe aux réformes<strong>de</strong> l’éducation en Prusse. En 1834, il obtient la chaire <strong>de</strong> philosophie àl’Université <strong>de</strong> Göttingen où il enseigne la philosophie <strong>et</strong> la pédagogiejusqu’à sa mort en 1841. Ses vues sont alors largement diffusées en Al<strong>le</strong>magne,<strong>et</strong> c’est par la <strong>le</strong>cture que <strong>Riemann</strong> entre en contact avec samétaphysique.Le dossier n o 18 du Nachlass <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>, conservé à la bibliothèque<strong>de</strong> l’Université <strong>de</strong> Göttingen, comporte 203 feuill<strong>et</strong>s manuscritsregroupés sous <strong>le</strong> titre <strong>de</strong> « Fragmente naturphilosophischen Inhalts». Ceux <strong>de</strong> ces fragments dont se dégage une certaine cohérence<strong>de</strong> pensée ont été édités par De<strong>de</strong>kind <strong>et</strong> Weber à la fin <strong>de</strong>sœuvres complètes [132] 31 . D’après Scholz [142] qui a sollicité l’ai<strong>de</strong><strong>de</strong> l’Handschriftenabteilung <strong>de</strong>r Göttinger Universitätsbibliothek, 12feuill<strong>et</strong>s contiennent <strong>de</strong>s notes <strong>de</strong> <strong>le</strong>cture consacrées à Herbart, que<strong>Riemann</strong> enrichit parfois <strong>de</strong> ses propres formulations. Les extraits sont29 Vari<strong>et</strong>as, cf. <strong>le</strong> mémoire <strong>de</strong> Gauss : Theoria residuorum biquadratorum, <strong>et</strong> Anzeigezu <strong>de</strong>rselben, Werke, Bd. II, pp. 110, 116 u. 118. Dans ses <strong>le</strong>çons <strong>de</strong> 1850–51sur la métho<strong>de</strong> <strong>de</strong>s moindres carrés, Gauss ém<strong>et</strong>tait <strong>de</strong>s remarques occasionnel<strong>le</strong>s surl’extension <strong>de</strong> sa théorie <strong>de</strong>s surfaces à la dimension n quelconque. Les notes calligraphiées<strong>de</strong> ce cours furent prises par A. Ritter qui soutint sa thèse en 1853 sous la direction<strong>de</strong> Gauss. D’après Stäckel ([155], p. 55), A. Ritter était ami proche <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>dans <strong>le</strong>s années 1850 à 1853, <strong>et</strong> c’est probab<strong>le</strong>ment par son intermédiaire que <strong>Riemann</strong>est entré en contact avec <strong>le</strong>s idées <strong>de</strong> Gauss sur la géométrie ([90], p. 114).30 Le <strong>le</strong>cteur est renvoyé à l’étu<strong>de</strong> [142] <strong>de</strong> Scholz pour <strong>de</strong> plus amp<strong>le</strong>s informations.31 Voir [130] pour une traduction partiel<strong>le</strong> en français.


16 1.9. L’influence épistémologique <strong>de</strong> Herbarttous tirés <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong> Herbart sur la métaphysique <strong>et</strong> sur la psychologie.L’auteur [<strong>Riemann</strong> lui-même] se considère comme herbartien enpsychologie <strong>et</strong> en épistémologie (méthodologie <strong>et</strong> éidolologie 32 ) ; toutefoisdans la plupart <strong>de</strong>s cas, il ne peut s’accor<strong>de</strong>r avec la philosophienaturel<strong>le</strong> <strong>de</strong> Herbart, <strong>et</strong> avec <strong>le</strong>s disciplines métaphysiques (ontologie<strong>et</strong> synéchologie ) qui s’y réfèrent. [133], p. 508.Bien que la notion <strong>de</strong> présentations sériel<strong>le</strong>s [Vorstellungsreihen] 33 dueà Herbart ait certainement pu inspirer <strong>Riemann</strong> dans son élaboration duconcept <strong>de</strong> « multiplicité », la synéchologie 34 ne l’a en fait pas réel<strong>le</strong>mentconvaincu, comme l’a clairement démontré Scholz [142]. Il ressort<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong> que Herbart a beaucoup plus influencé <strong>Riemann</strong>quant à sa méthodologie <strong>de</strong> recherche <strong>et</strong> à sa compréhension <strong>de</strong>s aspectsproblématiques <strong>de</strong> la conceptualisation mathématique, que pource qui concerne l’élaboration d’une pensée spécifique <strong>de</strong> l’espace.En premier lieu, <strong>Riemann</strong> était vraisemblab<strong>le</strong>ment en accord avecla réfutation par Herbart <strong>de</strong> la théorie kantienne 35 , <strong>de</strong> l’espace <strong>et</strong> dutemps : l’idée <strong>de</strong> l’espace <strong>et</strong> du temps comme « récipients vi<strong>de</strong>s »32 D’après Herbart, la métaphysique englobe quatre disciplines : la méthodologie,l’éidolologie [Eidolologie], l’ontologie <strong>et</strong> la synéchologie [Synechologie].33 Herbart considérait que <strong>le</strong>s concepts géométriques tels qu’ils sont formés <strong>et</strong>développés par <strong>le</strong>s sciences trouvent <strong>le</strong>ur origine dans <strong>le</strong>s représentations spatia<strong>le</strong>squi donnent accès à l’expérience du mon<strong>de</strong> sensib<strong>le</strong>, <strong>et</strong> qui sont intrinsèquement sériel<strong>le</strong>s.En eff<strong>et</strong>, toutes <strong>le</strong>s formes <strong>de</strong> perception humaine <strong>de</strong> l’espace s’effectuenten séries, c’est-à-dire <strong>de</strong> manière successive <strong>et</strong> temporalisée, dans une continuité <strong>de</strong>discontinuités coprésentes, <strong>et</strong> el<strong>le</strong> s’exerce <strong>de</strong> manière loca<strong>le</strong>, car el<strong>le</strong> se restreint à<strong>de</strong>s voisinages immédiats <strong>de</strong> l’action individuel<strong>le</strong>. Aussi <strong>le</strong>s séries <strong>de</strong> présentation[Vorstellungsreihen] s’ordonnent-el<strong>le</strong>s <strong>et</strong> se connectent-el<strong>le</strong>s l’une à l’autre pour engendrer<strong>de</strong>s représentations spatia<strong>le</strong>s. Une « forme sériel<strong>le</strong> continue » se présente lorsqu’uneclasse spécifique <strong>de</strong> représentations est soumise à une fusion graduel<strong>le</strong> <strong>et</strong> unifiée.34 À partir <strong>de</strong> la théorie psychologique <strong>de</strong>s formes sériel<strong>le</strong>s <strong>de</strong> représentations(cf. la note précé<strong>de</strong>nte), l’engendrement <strong>de</strong> formes sériel<strong>le</strong>s continues [continuirlicheReihenformen] <strong>de</strong> concepts constitue, selon une procédure théorique très élaborée,l’objectif <strong>de</strong> la discipline métaphysique que Herbart appel<strong>le</strong> la synéchologie, <strong>et</strong> quidésigne essentiel<strong>le</strong>ment sa théorie philosophique <strong>de</strong>s fon<strong>de</strong>ments du concept d’espace.35 D’après l’Esthétique transcendanta<strong>le</strong> <strong>de</strong> Kant ([82], pp. 70–72), l’existence <strong>de</strong>sjugements synthétiques a priori — notamment en géométrie, mais aussi en arithmétique<strong>et</strong> en analyse — interdit que l’on voie dans l’espace <strong>et</strong> <strong>le</strong> temps <strong>de</strong>s conditions<strong>de</strong> possibilité <strong>de</strong>s choses mêmes. Quand il s’agit par exemp<strong>le</strong> <strong>de</strong> tirer du concept d<strong>et</strong>rois lignes droites la figure d’un triang<strong>le</strong>, se donner <strong>de</strong>s obj<strong>et</strong>s dans l’intuition estune condition nécessaire <strong>et</strong> sine qua non. Autrement dit, pour que <strong>le</strong>s démonstrationssynthétiques a priori <strong>de</strong> la géométrie soient possib<strong>le</strong>s, il faut disposer d’un pouvoir


Chapitre 1. L’ouverture riemannienne 17dans <strong>le</strong>squels nos sens seraient censés déverser <strong>le</strong>urs perceptions étaitcritiquée par Herbart comme une hypothèse « complètement superficiel<strong>le</strong>,vi<strong>de</strong> <strong>de</strong> sens, <strong>et</strong> inappropriée » [völlig gehaltlose, nichtssagen<strong>de</strong>,unpassen<strong>de</strong>] ([142], p. 422). Aussi <strong>Riemann</strong> (à la suite <strong>de</strong> Herbart)considérait-il peut-être que la question serait « résolue » au sein d’uneplus amp<strong>le</strong> réf<strong>le</strong>xion, grâce à <strong>de</strong>s considérations nouvel<strong>le</strong>s qui montreraientl’ouverture d’une « béance problématique » beaucoup plus considérab<strong>le</strong>que ne l’avait soupçonné Kant.1.10. Le réalisme dia<strong>le</strong>ctique modéré <strong>de</strong> Herbart. Herbart distingueautant que possib<strong>le</strong> « <strong>le</strong> donné » — c’est-à-dire <strong>le</strong>s phénomènes, <strong>le</strong>ssensations <strong>et</strong> <strong>le</strong>s perceptions — du « réel » [das Rea<strong>le</strong>] qui constituel’objectif principal <strong>de</strong> la connaissance philosophique <strong>et</strong> scientifique. Lesavoir doit être structuré en fonction <strong>de</strong>s connexions conceptuel<strong>le</strong>s possib<strong>le</strong>sentre <strong>le</strong>s phénomènes. Tandis que l’expérience nous montre <strong>de</strong>spropriétés <strong>et</strong> <strong>de</strong>s faisceaux [Comp<strong>le</strong>xionen] <strong>de</strong> propriétés, <strong>le</strong> mouvement<strong>de</strong> la pensée, gouverné par <strong>le</strong>s principes <strong>de</strong> la méthodologie conceptuel<strong>le</strong>(cf. ce qui va suivre), s’effectue par un arc d’embrassement, d’intégration<strong>et</strong> <strong>de</strong> structuration <strong>de</strong> la réalité. Par contraste avec Platon, Spinoza,ou encore Schelling, Herbart considérait donc qu’il existe <strong>de</strong>s relationsd’homologie précises entre <strong>le</strong>s phénomènes <strong>et</strong> <strong>le</strong> réel, <strong>et</strong> que <strong>le</strong>savoir doit procé<strong>de</strong>r <strong>de</strong> l’expérience donnée vers une explication pensée<strong>de</strong>s phénomènes, via <strong>de</strong>s clarifications conceptuel<strong>le</strong>s adéquates.<strong>Riemann</strong> a été marqué par la proposition <strong>de</strong> Herbart <strong>de</strong> développer<strong>le</strong>s mathématiques « philosophiquement » comme une science pure<strong>de</strong>s concepts ; une tel<strong>le</strong> proposition s’accordait en fait avec la tendancephilosophique <strong>de</strong> ses contemporains à élaborer <strong>de</strong>s théories systématiques<strong>de</strong> la connaissance. Formé dans la tradition <strong>de</strong> Kant <strong>et</strong> <strong>de</strong> Fichte,Herbart adm<strong>et</strong>tait que l’objectif <strong>de</strong> la philosophie <strong>et</strong> <strong>de</strong> la science est<strong>de</strong> faire avancer la connaissance en raffinant <strong>et</strong> en approfondissant <strong>le</strong>champ <strong>de</strong> l’expérience.Pour c<strong>et</strong>te raison, Herbart attribuait un rô<strong>le</strong> essentiel<strong>le</strong>ment auxiliaireà la philosophie par rapport aux sciences, sans pour autant assigner<strong>de</strong> démarcation n<strong>et</strong>te entre ces <strong>de</strong>ux domaines d’investigation. L’un <strong>de</strong>ses buts principaux était d’établir une méthodologie dia<strong>le</strong>ctique modéréequi incorpore la contradiction comme moyen transitoire pour l’élucidation<strong>de</strong> connexions entre concepts. Toutefois, S’écartant <strong>de</strong> Hegel,Herbart n’érigeait pas la contradiction (<strong>et</strong> son relèvement, l’Aufhebungd’intuition a priori. Kant en déduit qu’il est « indubitab<strong>le</strong>ment certain » « que l’espace<strong>et</strong> <strong>le</strong> temps, en tant que conditions nécessaires <strong>de</strong> toute expérience (extérieure ouintérieure), ne sont que <strong>de</strong>s conditions simp<strong>le</strong>ment subjectives <strong>de</strong> notre intuition ».


18 1.10. Le réalisme dia<strong>le</strong>ctique modéré <strong>de</strong> Herbarthégélienne) au rang <strong>de</strong> mouvement universel <strong>de</strong> la pensée dans sa totalitépropre.En résumé, <strong>de</strong>ux aspects <strong>de</strong> la philosophie <strong>de</strong> Herbart montrent uneaffinité avec <strong>le</strong>s sciences physiques <strong>et</strong> mathématiques plus marquée quechez <strong>le</strong>s idéalistes al<strong>le</strong>mands <strong>de</strong> son temps (Hegel, Fichte, Schelling) :• l’assignation d’un rô<strong>le</strong> essentiel<strong>le</strong>ment auxiliaire à la philosophie parrapport à l’exploration scientifique du réel ;• l’élaboration d’un réalisme dia<strong>le</strong>ctique modéré, en opposition avecl’idéalisme strictement dia<strong>le</strong>ctique.En quoi <strong>Riemann</strong> alors a-t-il été influencé par Herbart 36 ? Lesconceptions philosophiques <strong>de</strong> Herbart sur <strong>le</strong>s sciences ont été lues<strong>et</strong> assimilées par <strong>Riemann</strong> à un niveau très général, mais en ce quiconcerne la théorie <strong>de</strong> la connaissance, <strong>de</strong>s divergences <strong>de</strong> vue existent,comme <strong>le</strong> montre une analyse fine <strong>de</strong>s Fragmente philosophischen Inhalts([142]). Par exemp<strong>le</strong>, en considérant <strong>le</strong> développement historique<strong>de</strong> la connaissance mathématique (toujours structurée en systèmes cohérentsexempts <strong>de</strong> contradiction), <strong>Riemann</strong> ne pouvait pas s’accor<strong>de</strong>rcomplètement avec Herbart, pour qui <strong>le</strong> changement historique <strong>de</strong>sconcepts — <strong>et</strong> notamment dans l’ontologie qui fondait son réalismemodéré — s’articu<strong>le</strong> tout au long d’une chaîne d’erreurs successivementcorrigées 37 . En contrepoint <strong>et</strong> parce qu’il était mathématicien,<strong>Riemann</strong> déclarait que <strong>le</strong>s relations d’un savoir nouvel<strong>le</strong>ment créé ausuj<strong>et</strong> d’un domaine <strong>de</strong> la réalité par rapport à un savoir ancien dans <strong>le</strong>même domaine ne consistait pas nécessairement en un lien <strong>de</strong> correction<strong>et</strong> <strong>de</strong> falsification, mais en un travail <strong>de</strong> modification <strong>et</strong> <strong>de</strong> raffinement<strong>de</strong>s structures conceptuel<strong>le</strong>s 38 .36 De<strong>de</strong>kind ([132], p. 545) décrivait comme suit la pério<strong>de</strong> où <strong>Riemann</strong> commençaitses travaux <strong>de</strong> recherche à Göttingen en 1849 : « Les premiers germes <strong>de</strong> sesidées en philosophie <strong>de</strong>s sciences ont dû se développer à c<strong>et</strong>te époque, simultanémentà ses occupations dans <strong>le</strong>s étu<strong>de</strong>s philosophiques, largement orientées vers Herbart »[In dieser Zeit müssen bei g<strong>le</strong>ichzeitiger Beschäftigung mit philosophischen Studien,welche sich natmentlich auf Herbart richt<strong>et</strong>en, die ersten Keime seiner naturphilosophischenI<strong>de</strong>en sich entwick<strong>le</strong>lt haben].37 Si ma théorie [<strong>de</strong> la substance, <strong>de</strong> l’ontologie] n’est pas correcte, dit Herbart,alors el<strong>le</strong> confirme mon affirmation présente, que <strong>le</strong>s concepts sont un travail encoreinachevé.38 « Die Begriffssysteme, welche ihnen [Naturerkentnissen] j<strong>et</strong>zt zu Grun<strong>de</strong> liegen,sind durch allmählige Umwandlung älterer Begriffssysteme entstan<strong>de</strong>n, und dieGrün<strong>de</strong>, welche zu neuen Erklärungensweisen trieben, lassen sich st<strong>et</strong>s auf Wi<strong>de</strong>rsprücheo<strong>de</strong>r Unwahrscheinlichkeiten, die sich in <strong>de</strong>n älteren Erklärungsweisen herausstellten,zurückführen.» ([132], p. 489).


Chapitre 1. L’ouverture riemannienne 19Ainsi d’une manière généra<strong>le</strong>, c’est principa<strong>le</strong>ment sur <strong>le</strong> plan <strong>de</strong>la méthodologie <strong>de</strong> la genèse <strong>de</strong>s concepts que <strong>Riemann</strong> a été marquépar <strong>le</strong>s réf<strong>le</strong>xions <strong>de</strong> Herbart. Un fragment philosophique perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> sefaire une première idée <strong>de</strong>s principes que <strong>Riemann</strong> a r<strong>et</strong>enus.Si quelque chose a lieu qui n’était pas attendu selon nos suppositionspréalab<strong>le</strong>s, c’est-à-dire qui est impossib<strong>le</strong> ou improbab<strong>le</strong> selonces <strong>de</strong>rnières, alors il faut effectuer un travail pour compléter [<strong>le</strong>sconcepts] ou, si nécessaire, r<strong>et</strong>ravail<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s axiomes afin que ce qui estperçu cesse d’être impossib<strong>le</strong> ou improbab<strong>le</strong>. Le complément ou l’améliorationdu système conceptuel forme l’« explication » <strong>de</strong> la perceptioninattendue. [130], pp. 20–21.Quant à la manière <strong>de</strong> conduire <strong>et</strong> d’organiser la recherche philosophiqueou scientifique, <strong>de</strong>ux méthodologies importantes ont été introduitespar Herbart :1) la métho<strong>de</strong> <strong>de</strong>s relations [Die M<strong>et</strong>ho<strong>de</strong> <strong>de</strong>r Beziehungen], <strong>et</strong>2) la métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> la spéculation.<strong>Riemann</strong> en extrait une troisième métho<strong>de</strong>, qu’il développera <strong>de</strong> manièresystématique :3) la métho<strong>de</strong> <strong>de</strong>s plus p<strong>et</strong>its changements conceptuels.1.11. La métho<strong>de</strong> <strong>de</strong>s relations. Aussi bien dans l’expérience donnéeque dans l’analyse <strong>de</strong>s concepts déjà acquis, la contradiction constitued’après Herbart la force motrice principa<strong>le</strong> pour adapter, modifier, transformer,définir <strong>et</strong> créer <strong>de</strong> nouveaux concepts. Par un travail intel<strong>le</strong>ctueladéquat, toute contradiction observée — tant dans un système conceptueldonné qu’entre la théorie <strong>et</strong> l’expérience — doit être résolue afin<strong>de</strong> faire progresser la connaissance : c’est la métho<strong>de</strong> <strong>de</strong>s relations (dia<strong>le</strong>ctiques),inspirée lointainement <strong>de</strong> la pensée hégélienne. Tout progrèss’effectue alors par une transition à partir d’une raison [Grund], d’unecause, d’un motif, d’un fond, vers une certaine conclusion qui se situedans une relation d’opposition <strong>et</strong> d’éclaircissement avec la raison« contredisante » 39 . De fait, la résorption <strong>de</strong>s contradictions débouchesur <strong>de</strong>s connaissances nouvel<strong>le</strong>s, car la raison [Grund], en tant quecontradiction effective <strong>et</strong> actualisante, ouvre sur <strong>de</strong>s systèmes constitués<strong>de</strong> savoir potentiel auxquels el<strong>le</strong> n’appartient ni <strong>de</strong> manière préalab<strong>le</strong>,ni <strong>de</strong> manière explicite. Suivant l’aphorisme (d’inspiration hégélienne)39 « Offenbar for<strong>de</strong>rn wir von <strong>de</strong>m Grun<strong>de</strong>, daß, in<strong>de</strong>m er die Folge erzeugt, erselbst sich än<strong>de</strong>rt. Seine Materie soll sich verwan<strong>de</strong>ln in die neue Materie <strong>de</strong>r Folge.Hier kann nicht Wahrheit an Wahrheit geknüpft wer<strong>de</strong>n, son<strong>de</strong>rn, damit die FolgeWahrheit enthalte, muß <strong>de</strong>r Grund das Gegentheil davon sein. ([142], p. 438.)


20 1.12. La métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> la spéculation <strong>et</strong> <strong>le</strong>s graphes <strong>de</strong> concepts<strong>de</strong> Herbart : « la raison est contradiction », car pour la pensée, la causalitéréel<strong>le</strong> <strong>de</strong> l’essence <strong>de</strong>s concepts se révè<strong>le</strong> dans, <strong>et</strong> seu<strong>le</strong>ment par <strong>le</strong>parcours <strong>de</strong>s obstac<strong>le</strong>s fondamentaux 40 .À un niveau épistémologique supérieur, Herbart envisageait <strong>de</strong>s situationscontextuel<strong>le</strong>s comp<strong>le</strong>xes qui donnent naissance à <strong>de</strong>s contradictionsouvertes, <strong>et</strong> donc à une méthodologie ouverte pour l’exploration<strong>de</strong> relations ouvertes. Pour que la connaissance progresse, la procédureméthodologique généra<strong>le</strong> consiste alors à résoudre <strong>le</strong>s contradictions enélargissant <strong>le</strong> système conceptuel initial, <strong>de</strong> manière à mieux prendreen compte la situation contextuel<strong>le</strong> considérée. La notion même <strong>de</strong> relation,dans la « métho<strong>de</strong> <strong>de</strong>s relations », manifeste donc la problématicitéréel<strong>le</strong> du rapport aux contradictions que <strong>le</strong>s systèmes rencontrent.La relation, en tant que multip<strong>le</strong> exposé à l’inattendu, <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, pourfaire face à c<strong>et</strong> éclatement, la mise au point <strong>de</strong> métho<strong>de</strong>s d’investigation.Eu égard à son intérêt pour l’éducation <strong>de</strong>s esprits, l’une <strong>de</strong>s questionsprincipa<strong>le</strong>s <strong>de</strong> Herbart était en eff<strong>et</strong> :Comment procé<strong>de</strong>r dans la recherche, en philosophie ou en science ?Question aujourd’hui occultée, tue, bien qu’essentiel<strong>le</strong> <strong>et</strong> incontournab<strong>le</strong>.1.12. La métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> la spéculation <strong>et</strong> <strong>le</strong>s graphes <strong>de</strong> concepts. Enapprofondissant la métho<strong>de</strong> <strong>de</strong>s relations, Herbart a dégagé l’idée généra<strong>le</strong>d’élaboration <strong>de</strong> l’unité dans la diversité <strong>et</strong> il a proposé à c<strong>et</strong>eff<strong>et</strong> que dans chaque domaine d’investigation scientifique soit mis aupoint un concept central [Hauptbegriff] 41 autour duquel s’organisent <strong>et</strong>se reflètent <strong>le</strong>s concepts dérivés, subordonnés, spécifiés, ou catégorisés42 . La tâche <strong>de</strong> la philosophie est alors d’analyser <strong>le</strong>s relations entreces concepts variés <strong>et</strong> d’examiner <strong>le</strong>urs caractéristiques intrinsèques.De Herbart, <strong>Riemann</strong> a vraisemblab<strong>le</strong>ment adopté l’idée que <strong>le</strong>s lienspotentiels entre une multiplicité virtuel<strong>le</strong> <strong>de</strong> concepts satellitaires font<strong>et</strong> doivent faire question, d’où <strong>le</strong>s points d’interrogation dans notre40 Darum sagen wir : <strong>de</strong>r Grund ist ein Wi<strong>de</strong>rspruch. Die Schärfe dieser Behauptungabstumpfen, heißt, <strong>de</strong>m Grun<strong>de</strong> seine Kraft benehmen. » ([142], p. 438.)41 Bien entendu, dans <strong>le</strong> discours d’habilitation <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>, <strong>le</strong> concept centralconcerné n’est autre que celui <strong>de</strong> multiplicité [Mannigfaltigkeit].42 Alors que <strong>le</strong>s sciences développent seu<strong>le</strong>ment <strong>de</strong>s concepts centraux reliés à<strong>le</strong>ur domaine spécifique, la philosophie, lorsqu’el<strong>le</strong> est entendue comme étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>ssciences, se doit <strong>de</strong> former <strong>de</strong>s concepts unificateurs qui transcen<strong>de</strong>nt <strong>le</strong>s contextesspécifiques.


Chapitre 1. L’ouverture riemannienne 21diagramme ci-<strong>de</strong>ssous, que nous appel<strong>le</strong>rons graphe problématique <strong>de</strong>concepts 43 .Concepts spécifiés???Concepts catégorisés?Concept central?Concepts dérivés???Concepts subordonnésHiérarchies, dérivations, liens logiques, tout interroge dans un telgraphe, tout est à explorer <strong>et</strong> donc, tout est à construire. Pour Herbart,ces objectifs d’élucidation sont la matière même <strong>de</strong> la philosophiecomme savoir particulier [Philosophie als eigene Wissenschaft]. Certes,Herbart considérait que la différence essentiel<strong>le</strong> entre la philosophie <strong>et</strong><strong>le</strong>s sciences consiste en ce que seu<strong>le</strong>s ces <strong>de</strong>rnières ont directement affaireau « donné », mais d’après lui néanmoins, <strong>le</strong>s mathématiques ontune place privilégiée aux côtés <strong>de</strong> la philosophie, en tant que toutes<strong>de</strong>ux sont concernées par la création d’une science <strong>de</strong> la quantité 44[Grössen<strong>le</strong>hre].En tout cas, pour ce qui concerne l’élaboration <strong>de</strong>s systèmes, <strong>le</strong>but ultime est la représentation du « réel » 45 en son architecture propre,<strong>et</strong> pour Herbart, la genèse <strong>de</strong>s concepts s’effectue spécia<strong>le</strong>ment grâce àce qu’il désigne comme la métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> la spéculation. Par là, il fautentendre « toute entreprise visant à tracer <strong>de</strong>s transitions entre (<strong>de</strong>s)concepts ». Et lorsque <strong>Riemann</strong> prend <strong>de</strong>s notes au suj<strong>et</strong> du traité <strong>de</strong>43 Un tel graphe n’a aucune raison d’être hiérarchisé en branches linéaires, nimême d’être représentab<strong>le</strong> dans un espace à <strong>de</strong>ux ou à trois dimensions.44 D’après Herbart, lorsqu’el<strong>le</strong>s sont traitées <strong>de</strong> manière philosophique, <strong>le</strong>s mathématiquess’intègrent dans la philosophie en général, <strong>et</strong> au début <strong>de</strong> son Étu<strong>de</strong> philosophique<strong>de</strong>s sciences ([77]), il suggère que <strong>le</strong> mathématicien ressente <strong>le</strong> besoinprofessionnel <strong>de</strong> dévoi<strong>le</strong>r l’esprit <strong>de</strong> ses formu<strong>le</strong>s p<strong>le</strong>ines d’esprit [Der Mathematikerfühlt <strong>de</strong>n Beruf, uns <strong>de</strong>n Geist seiner geistreichen Formeln zu enthül<strong>le</strong>n]. Scholz([142], p. 426) ajoute qu’il serait diffici<strong>le</strong> d’imaginer une meil<strong>le</strong>ure caractérisation <strong>de</strong>la manière dont <strong>Riemann</strong> fait <strong>de</strong>s mathématiques.45 L’ontologie <strong>de</strong> Herbart postulait <strong>le</strong> « réel » comme libre <strong>de</strong> contradictions <strong>et</strong> <strong>de</strong>changements.


22 1.12. La métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> la spéculation <strong>et</strong> <strong>le</strong>s graphes <strong>de</strong> conceptsHerbart Sur <strong>le</strong>s étu<strong>de</strong>s philosophiques, il résume en quelques phrasesclé(feuill<strong>et</strong> n o 177 du dossier 18) 46 <strong>le</strong>s idées principa<strong>le</strong>s qu’il r<strong>et</strong>ient ausuj<strong>et</strong> <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te « métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> la spéculation » :Philosophie = recherche <strong>de</strong> concepts.I. Vues philosophiques.II. Spéculation = tendance [Streben] vers la résolution <strong>de</strong> problème.Démonstration d’une connexion nécessaire entre concepts :problème <strong>de</strong> spéculation ultérieure, comme effort [Bemühung] pour tracer<strong>de</strong>s transitions adéquates entre <strong>le</strong>s concepts. [142], p. 425.Ainsi la métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> la spéculation désigne-t-el<strong>le</strong> tout effort, applicationou travail visant à construire <strong>de</strong>s transitions appropriées entre <strong>le</strong>sconcepts, aussi bien entre ceux qui sont acquis <strong>et</strong> connus, qu’entre ceuxqui sont encore à inventer ou inconnus. Chaque concept-nodal est impliquédans une relation problématique avec <strong>le</strong>s concepts <strong>de</strong> son voisinageimmédiat : c’est <strong>le</strong> sens <strong>de</strong>s points d’interrogation qui sont inscrits à titresymbolique dans <strong>le</strong> diagramme abstrait ci-<strong>de</strong>ssus. Le gain en adéquationaugmente lorsque <strong>le</strong>s flèches du graphe <strong>de</strong> transition qui se rapportent àun concept-nodal sont el<strong>le</strong>s-mêmes construites en adéquation.la recherche <strong>de</strong> l’adéquation porte aussi sur <strong>le</strong> relationnel.Et l’exploration <strong>de</strong>s « arêtes relationnel<strong>le</strong>s » du graphe conceptuel problématiquefait parfois naître <strong>de</strong> nouveaux « nodu<strong>le</strong>s conceptuels » ausein même <strong>de</strong>s transitions qui soulèvent <strong>de</strong>s questions. La métaphoreallusive d’un « réseau <strong>de</strong> neurones » du conceptuel pourrait éclaircir encoreun peu plus c<strong>et</strong>te mystérieuse métho<strong>de</strong> <strong>de</strong>s relations.Qu’il s’agisse ici <strong>de</strong> transition [Übergang] est absolument crucial,car l’objectif est <strong>de</strong> créer <strong>le</strong>s conditions <strong>de</strong> continuité <strong>et</strong> <strong>de</strong> complétud<strong>et</strong>ant pour l’obj<strong>et</strong> concr<strong>et</strong> que pour la pensée abstraite, aussi bien enmathématiques que dans <strong>le</strong>s sciences <strong>de</strong> la nature. Et dans l’Essai d’un<strong>et</strong>héorie <strong>de</strong>s concepts fondamentaux <strong>de</strong>s mathématiques <strong>et</strong> <strong>de</strong> la physiquecomme fon<strong>de</strong>ment pour expliquer la nature 47 , <strong>Riemann</strong> exprime encoreplus précisément son idée fixe au suj<strong>et</strong> <strong>de</strong> la continuité.46 Philosopie = Untersuchung <strong>de</strong>r BegriffeI. Phil(osophische) Ansichten.II. Speculation = Streben zur Auflösung <strong>de</strong>r Prob<strong>le</strong>me.Nachweisung eines nothwendigen Zusammenhangs unter BegriffenProb<strong>le</strong>m weiterer Specul(-ation) als Behmühung zwischen <strong>de</strong>n Begriffen die gehörigenÜbergänge zu bahnen.47 Fragmente philosophischen Inhalts, [132], pp. 477–488 ; [130], pp. 15–20.


Chapitre 1. L’ouverture riemannienne 23Tout ce qui est observé est la transition [Übergang] d’une chosed’un certain état vers un autre état ou, pour par<strong>le</strong>r d’une manière plusgénéra<strong>le</strong>, d’un mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> détermination [Bestimmungsweise] vers un autre,sans que soit perçu un saut au cours <strong>de</strong> la transition. Pour compléterc<strong>et</strong>te observation, nous pouvons soit supposer que la transition sedérou<strong>le</strong> selon un nombre très grand mais fini <strong>de</strong> sauts imperceptib<strong>le</strong>spour nos sens, soit que la chose se dérou<strong>le</strong> <strong>de</strong> manière continue à traverstoutes <strong>le</strong>s étapes intermédiaires, en allant d’un état vers l’autre.[130], p. 21.Dans ce même passage, <strong>Riemann</strong> partait <strong>de</strong> l’hypothèse qu’on a déjàformé <strong>le</strong> concept <strong>de</strong> chose existante en soi [<strong>de</strong>r Begriff für sich bestehen<strong>de</strong>rDinge], <strong>et</strong> il <strong>de</strong>mandait qu’on « relève la tâche qui consisteà maintenir aussi loin que possib<strong>le</strong> » ce concept déjà prouvé <strong>de</strong> choseexistante en soi, sachant que <strong>le</strong>s processus <strong>de</strong> changement contredisentmanifestement un tel concept <strong>de</strong> chose stab<strong>le</strong> <strong>et</strong> existante 48 . Autrementdit, dès qu’il s’agit d’assurer la cohérence <strong>et</strong> la cohésion du conceptd’existence en soi d’une chose soumise à l’étu<strong>de</strong>, l’antinomie, dans<strong>le</strong>s sciences, entre <strong>le</strong> discr<strong>et</strong> <strong>et</strong> <strong>le</strong> continu <strong>de</strong>vient source <strong>de</strong> problèmesscientifiques. De plus, la question très vaste suggérée par <strong>Riemann</strong> déboucheaussi sur une étu<strong>de</strong> scientifique <strong>de</strong> la psychologie <strong>de</strong> la perception<strong>et</strong> el<strong>le</strong> montre que l’antinomie problématique entre <strong>le</strong> discr<strong>et</strong> <strong>et</strong><strong>le</strong> continu, contagieuse, s’insinue jusque dans <strong>le</strong>s structures infimes <strong>de</strong>notre appareil perceptif spatio-temporel pour accentuer encore plus soncaractère antinomique.<strong>Riemann</strong> suggère ainsi que <strong>le</strong> problème est encore plus comp<strong>le</strong>xequ’il n’y paraît, puisque nos structures perceptives sont el<strong>le</strong>smêmesaussi inscrites dans l’antinomie physique entre <strong>le</strong> discr<strong>et</strong> <strong>et</strong> <strong>le</strong>continu. Lorsque la question <strong>de</strong>s moyens d’appropriation perceptive estconsidérée comme question principa<strong>le</strong>, aucune phénoménologie, fûtel<strong>le</strong>« transcendanta<strong>le</strong> », ne peut se dispenser <strong>de</strong> psychologie expérimenta<strong>le</strong>.Éclatés, <strong>le</strong>s problèmes se distribuent entre disciplines, <strong>et</strong> certainsd’entre eux restent désespérément ouverts malgré <strong>le</strong>s progrès <strong>de</strong> laconnaissance.Ici à nouveau, <strong>Riemann</strong>, mathématicien pur, manifeste donc uneconscience philosophique remarquab<strong>le</strong> <strong>de</strong>s antinomies universel<strong>le</strong>sauxquel<strong>le</strong>s l’enten<strong>de</strong>ment scientifique est exposé. De ces antinomies, ilfaut déduire l’ouverture — tel est <strong>le</strong> message intemporel <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>.Ces antinomies ne doivent en aucun cas déboucher sur la ferm<strong>et</strong>ure <strong>de</strong>squestions qu’el<strong>le</strong>s ne parviennent pas à résoudre.48 Héraclite versus Parméni<strong>de</strong>.


24 1.12. La métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> la spéculation <strong>et</strong> <strong>le</strong>s graphes <strong>de</strong> conceptsPar exemp<strong>le</strong>, d’après un tel point <strong>de</strong> vue métaphysique, l’émergence<strong>de</strong>s théories physiques <strong>et</strong> astrophysiques va ramifier <strong>et</strong> comp<strong>le</strong>xifier<strong>le</strong> canevas initial <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux premières thèses <strong>et</strong> antithèses que Kanta formulées au sein <strong>de</strong>s quatre conflits <strong>de</strong>s idées transcendanta<strong>le</strong>s 49 . Onpourrait dire que la force philosophique intensive <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> rési<strong>de</strong>dans sa capacité à désigner <strong>de</strong>s problèmes qui sont ouverts dans <strong>le</strong>urplus gran<strong>de</strong> généralité, dans un amont <strong>de</strong> l’amont, là où l’inaugural estun initial pur, aux racines mêmes <strong>de</strong> l’arbre <strong>de</strong> la connaissance problématisante.Aussi <strong>Riemann</strong> ne se range-t-il pas à la « solution » que Kanta voulu apporter aux antinomies <strong>de</strong> la raison pure 50 , <strong>et</strong> qui consisteen quelque sorte à considérer que <strong>le</strong> conflit dia<strong>le</strong>ctique <strong>de</strong> la raisonavec el<strong>le</strong>-même provient d’une illusion transcendanta<strong>le</strong>. En s’inspirantà tort <strong>de</strong> l’expérience concrète, la raison s’imagine en eff<strong>et</strong> inconsidérément— d’après <strong>le</strong> raisonnement <strong>de</strong> Kant — que <strong>le</strong> rapport du conditionnéà la série <strong>de</strong> ses conditions s’applique à <strong>de</strong>s totalités <strong>de</strong> phénomènes51 , <strong>et</strong> la raison en déduit sans plus <strong>de</strong> façons <strong>de</strong>s conclusionsmétaphysiques qui se donnent pour fermes <strong>et</strong> indubitab<strong>le</strong>s, mais qui49 Première antinomie : finitu<strong>de</strong>/infinitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’univers dans <strong>le</strong> temps ou dans l’espace; <strong>de</strong>uxième antinomie : discrétu<strong>de</strong>/continuité ou simplicité/composition <strong>de</strong> toutes<strong>le</strong>s substances matériel<strong>le</strong>s dans <strong>le</strong> mon<strong>de</strong> ([82], pp. 338–347). Pour <strong>le</strong>s questions cosmologiques,voir [159].50 Dans la septième section du chapitre II : Les antinomies <strong>de</strong> la raison pure, duLivre II : Les raisonnements dia<strong>le</strong>ctiques <strong>de</strong> la raison pure <strong>de</strong> la Critique <strong>de</strong> la raisonpure qui s’intitu<strong>le</strong> Décision critique du conflit cosmologique <strong>de</strong> la raison avec el<strong>le</strong>même(<strong>et</strong> qui constitue l’un <strong>de</strong>s passages-clés <strong>de</strong> l’ouvrage), Kant conclut que toutel’antinomie <strong>de</strong> la raison pure repose sur la fausse croyance que quand un phénomèneconditionné est donné, la synthèse qui constitue l’ensemb<strong>le</strong> <strong>de</strong>s conditions empiriquesqui contribuent à sa donation, puisse el<strong>le</strong> aussi être présentée en acte, alors qu’envérité, el<strong>le</strong> n’est pas présentab<strong>le</strong> <strong>et</strong> s’éloigne en se volatilisant dans la régression inaccessib<strong>le</strong><strong>de</strong>s conditions empiriques. Ainsi, l’erreur est-el<strong>le</strong> <strong>de</strong> croire que « quand <strong>le</strong>conditionné est donné [par exemp<strong>le</strong>, tout obj<strong>et</strong> <strong>de</strong>s sens], la série entière <strong>de</strong> toutes sesconditions est aussi donnée » ([82], p. 376). « Il ne nous reste pas d’autre moyen <strong>de</strong> terminerdéfinitivement la lutte, à la satisfaction <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parties, que <strong>de</strong> <strong>le</strong>s convaincrequ’étant capab<strong>le</strong>s <strong>de</strong> se réfuter si bien réciproquement, el<strong>le</strong>s se disputent pour rien <strong>et</strong>qu’un mirage transcendantal <strong>le</strong>ur a fait voir une réalité là où il ne s’en trouve pas »([82], p. 378).51 Mais d’après Kant, ce rapport ne peut exister en fait que dans <strong>et</strong> par <strong>le</strong>s représentationsd’enten<strong>de</strong>ment. « La majeure du syllogisme cosmologique prend <strong>le</strong> conditionnédans <strong>le</strong> sens transcendantal d’une catégorie pure <strong>et</strong> la mineure, dans <strong>le</strong> sensempirique d’un concept <strong>de</strong> l’enten<strong>de</strong>ment appliqué à <strong>de</strong> simp<strong>le</strong>s phénomènes, <strong>et</strong> parconséquent, on rencontre l’erreur dia<strong>le</strong>ctique qu’on nomme sophisma figuræ dictionis» ([82], p. 377).


Chapitre 1. L’ouverture riemannienne 25s’entre-détruisent parce qu’el<strong>le</strong>s sont vio<strong>le</strong>mment antithétiques. Kantfait alors observer que « <strong>de</strong>ux jugements opposés dia<strong>le</strong>ctiquement l’unà l’autre peuvent être faux tous <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux », mais la troisième issue logiquequ’il théorise pour sortir <strong>de</strong> ces difficultés consiste à soutenir que« <strong>le</strong>s phénomènes en général ne sont rien en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> nos représentations52 ». Réhabilitation du tiers exclu à un niveau transcendantal, donc,mais à une tel<strong>le</strong> issue, <strong>Riemann</strong> aurait vraisemblab<strong>le</strong>ment pu formu<strong>le</strong>r<strong>de</strong>ux objections inspirées <strong>de</strong> ses recherches en mathématiques <strong>et</strong> enphysique.Premièrement, à cause <strong>de</strong> la limitation <strong>de</strong>s moyens expérimentaux,la régression du conditionné vers ses conditions, loin d’être indéfinie,s’avère en fait toujours particulièrement limitée, ce qui comprom<strong>et</strong><strong>le</strong> bien-fondé <strong>de</strong>s raisonnements métaphysiques non seu<strong>le</strong>mentquant à <strong>le</strong>ur contenu conclusif (Kant), mais aussi quant à <strong>le</strong>ur portéesynthétique organique — toujours trop rudimentaire <strong>et</strong> non légitiméepar l’existence d’une réalité dominatrice supérieure 53 . Pour c<strong>et</strong>te raison,la portée <strong>de</strong>s considérations <strong>de</strong> la Critique <strong>de</strong> la raison pure est restreinteau champ synthétique (a priori ou a posteriori) d’une époque,<strong>et</strong> il est impossib<strong>le</strong> d’adm<strong>et</strong>tre que la thétique <strong>et</strong> l’antithétique <strong>de</strong> ladia<strong>le</strong>ctique transcendanta<strong>le</strong> aient pu être définitivement établies par <strong>le</strong>discours kantien, alors que <strong>le</strong>s antinomies que dégage Kant continuentà se raffiner <strong>et</strong> à se comp<strong>le</strong>xifier — sans s’effacer — grâce aux progrès<strong>de</strong> la connaissance scientifique.Deuxièmement, la représentation <strong>de</strong> régressions potentiel<strong>le</strong>s nesert qu’à manifester la présence d’horizons <strong>de</strong> non-savoir <strong>et</strong> à ouvrir <strong>de</strong>sdomaines neufs pour l’investigation scientifique. Le tiers-exclu riemannien,c’est l’inconnu <strong>de</strong>vant soi, c’est l’imprévisib<strong>le</strong>, c’est la résolutioninattendue d’un problème, ou mieux encore, c’est l’ouverture constante<strong>de</strong> l’irréversib<strong>le</strong>-synthétique.1.13. La métho<strong>de</strong> <strong>de</strong>s plus p<strong>et</strong>its changements conceptuels. Dans <strong>le</strong>feuill<strong>et</strong> manuscrit 141 du dossier 18 du Nachlass que Scholz a découvert([142], p. 420 <strong>et</strong> p. 433), <strong>Riemann</strong> s’interroge tout d’abord sur <strong>le</strong>s étapes<strong>de</strong> la formation <strong>de</strong>s concepts : à partir du perçu ; par induction ; parabstraction, ou par synthèse a posteriori ; <strong>et</strong> ensuite surtout, il insistesur <strong>le</strong> resserrement <strong>de</strong>s transitions entre <strong>le</strong>s concepts :52 Kant déduisait en eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> ces considérations sur <strong>le</strong>s antinomies une (secon<strong>de</strong>)« preuve » <strong>de</strong> l’« idéalité transcendanta<strong>le</strong> » <strong>de</strong>s phénomènes ([82], p. 381).53En mathématiques, la comp<strong>le</strong>xification incessante <strong>et</strong> imprévisib<strong>le</strong> <strong>de</strong>l’irréversib<strong>le</strong>-synthétique garantit l’organicité du savoir, dans l’actuel <strong>et</strong> dans <strong>le</strong> potentiel.


26 1.13. La métho<strong>de</strong> <strong>de</strong>s plus p<strong>et</strong>its changements conceptuelsChangement (ou complétion) <strong>de</strong>s concepts qui soit <strong>le</strong> plus p<strong>et</strong>itpossib<strong>le</strong> [. . .] 54 [142], p. 433.Très certainement, c<strong>et</strong>te pensée est directement inspirée d’une formu<strong>le</strong>aphoristique <strong>de</strong> Herbart que <strong>Riemann</strong> recopie en l’extrayant <strong>de</strong> soncontexte, <strong>et</strong> que nous encadrons aussi, vu son importance.La métho<strong>de</strong> <strong>de</strong>s relations est la métho<strong>de</strong> <strong>de</strong>s plus p<strong>et</strong>its changements 55 .Resserrer <strong>le</strong>s transitions conceptuel<strong>le</strong>s, c’est tendre vers une plus gran<strong>de</strong>continuité <strong>de</strong> la pensée 56 . L’ objectif affirmé est <strong>de</strong> compléter par éliminationtoutes <strong>le</strong>s différences, distorsions, sauts, fossés, <strong>et</strong>c. Dans <strong>le</strong>urexposition très systématique <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations,<strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> m<strong>et</strong>tront à exécution ce principe fondamental que<strong>Riemann</strong> n’avait pas eu <strong>le</strong> temps <strong>de</strong> développer.À un niveau « méta-mathématique », ce qui est désigné par<strong>Riemann</strong> dans la généralité la plus gran<strong>de</strong> comme transition (continue)entre concepts est susceptib<strong>le</strong> <strong>de</strong> se réaliser comme connexion, commehiérarchisation, comme sériation, comme interdépendance, commenécessité, comme suffisance, ou enfin, terme ultime du resserrement<strong>de</strong> la continuité conceptuel<strong>le</strong>, comme équiva<strong>le</strong>nce, c’est-à-dire commenécessité <strong>et</strong> suffisance. Tous <strong>le</strong>s liens dynamiques entre concepts,axiomes <strong>et</strong> hypothèses recouvrent ainsi <strong>de</strong>s distinctions en extension <strong>et</strong>en généralité qui <strong>le</strong>s inscrivent dans un graphe <strong>de</strong> transitions ouvertessur un horizon <strong>de</strong> continuité potentiel<strong>le</strong>s.54 Möglichst geringe Verän<strong>de</strong>rung (o<strong>de</strong>r Ergänzung) <strong>de</strong>r Begriffe.55 Die M<strong>et</strong>ho<strong>de</strong> <strong>de</strong>r Beziehungen ist die M<strong>et</strong>ho<strong>de</strong> <strong>de</strong>r k<strong>le</strong>insten Verän<strong>de</strong>rungen.56 À la fin <strong>de</strong> la première partie <strong>de</strong>s Fragmente philosophischen Inhalts intituléeZur Psychologie und M<strong>et</strong>aphysik, <strong>Riemann</strong> évoque la métho<strong>de</strong> <strong>de</strong>s limites introduitepar Newton pour fon<strong>de</strong>r <strong>le</strong> calcul infinitésimal, <strong>et</strong> il exprime spontanément une extension(par analogie) <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te métho<strong>de</strong> à la recherche d’une continuité dans la détermination— primitivement discontinue — <strong>de</strong>s concepts. La métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> Newton, écrit<strong>Riemann</strong>, « consiste en ceci : au lieu <strong>de</strong> considérer une transition continue d’une va<strong>le</strong>urd’une gran<strong>de</strong>ur à une autre, d’une position à une autre, ou plus généra<strong>le</strong>ment d’unmo<strong>de</strong> <strong>de</strong> détermination d’un concept [von einer Bestimmungsweise eines Begriffes]à un autre, on considère d’abord une transition par un nombre fini d’étapes intermédiaires,puis on perm<strong>et</strong> au nombre <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>grés intermédiaires d’augmenter, <strong>de</strong> tel<strong>le</strong>sorte que <strong>le</strong>s distances entre <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>grés intermédiaires consécutifs diminuent toutesà l’infini » ([132], p. 487 ; nous soulignons). C<strong>et</strong>te « continuification » <strong>de</strong>s conceptsqui se trouve — comme pour <strong>le</strong> calcul infinitésimal — à la limite du représentab<strong>le</strong>,n’est pas directement accessib<strong>le</strong> à notre réf<strong>le</strong>xion, mais on peut s’imaginer qu’il soitpossib<strong>le</strong>r <strong>de</strong> passer d’un système conceptuel à un autre par une simp<strong>le</strong> modificationdans <strong>le</strong>s gran<strong>de</strong>urs relatives, <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que <strong>le</strong> système reste stab<strong>le</strong> <strong>et</strong> inchangé dansla transition vers la limite du continu.


Chapitre 1. L’ouverture riemannienne 27Ainsi s’exprime l’« impératif catégorique » riemannien qui faitnaître une diversité éclatée <strong>de</strong> problèmes d’organisation structura<strong>le</strong>dont l’objecif est <strong>de</strong> créer <strong>de</strong>s conditions pour la continuité <strong>de</strong> la penséespéculative :• nature, conception, problématicité <strong>de</strong>s notions primitives ;• liaisons, dépendances, indépendances entre concepts définis ;• nécessités, potentialités, aprioricité ;• principes <strong>de</strong> genèse conceptuel<strong>le</strong> ;• différenciations spécifiques.Immédiatement après avoir ouvert <strong>le</strong>s questions <strong>de</strong> nature, <strong>Riemann</strong> osedonc ouvrir <strong>le</strong> champ encore inexistant <strong>de</strong>s relations possib<strong>le</strong>s entreconcepts potentiels. On peut sans conteste affirmer que la philosophiemathématique <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> anticipe la révolution axiomatique 57 (Hilbert,Bourbaki), puisque <strong>le</strong> structural formalisé est préformé par certainesstructures dia<strong>le</strong>ctiques universel<strong>le</strong>s du questionnement mathématique.D’après un tel point <strong>de</strong> vue, l’axiomatisation ultérieure <strong>de</strong>sgéométries est une tentative — parmi d’autres — <strong>de</strong> systématiser certainesréponses <strong>et</strong> certaines questions que l’exploration rencontre. Déci<strong>de</strong>r<strong>le</strong>s ouvertures, accepter l’ignorance, <strong>et</strong> maintenir intentionnel<strong>le</strong>ment<strong>le</strong> rapport à l’Inconnu n’est peut-être pas la qualité la plus évi<strong>de</strong>nte <strong>de</strong>ssystèmes formalisés, <strong>et</strong> pourtant, l’« impératif catégorique riemannien »exigerait que <strong>le</strong>sdits systèmes expriment explicitement <strong>le</strong>ur propre inachèvement.1.14. Mo<strong>de</strong>s amétriques <strong>de</strong> détermination. Maintenant que nousavons élucidé <strong>le</strong>s exigences méthodologiques généra<strong>le</strong>s que <strong>Riemann</strong>s’est fixées au contact <strong>de</strong> la philosophie <strong>de</strong> Herbart pour conduire sesrecherches sur <strong>le</strong>s fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> la géométrie, nous pouvons reprendre57 Néanmoins, la pensée <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> ne se réduit pas à un procédé entièrementlogique, voire purement axiomatique (cf. <strong>le</strong> commentaire [168], p. 408 <strong>de</strong> Vuil<strong>le</strong>minbasé sur une <strong>le</strong>cture <strong>de</strong> Russell), puisque la logique formel<strong>le</strong> ne questionne pas ausens philosophique du terme, mais cherche à enfermer <strong>le</strong> relationnel du conceptueldans une syntaxe constituée a posteriori par rapport aux recherches ouvertes. Il estbeaucoup plus exact <strong>de</strong> dire que <strong>le</strong>s recherches <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> sur la définition <strong>de</strong> l’espaceprocè<strong>de</strong>nt « comme il est naturel dans l’analyse <strong>de</strong>s concepts », à savoir : « pergenus proximum <strong>et</strong> differentiam specificam » (ibi<strong>de</strong>m), sans toutefois voir dans <strong>le</strong>s déterminationssuccessives <strong>de</strong> concepts <strong>de</strong>s finalités prédéfinies <strong>et</strong> fermées, comme parexemp<strong>le</strong> la « convergence» vers un système d’axiomes caractérisant l’espace euclidien.Très peu <strong>de</strong> commentateurs ont mis en lumière <strong>le</strong> souci constant <strong>de</strong> problématisation<strong>et</strong> d’ouverture qui s’exprime <strong>de</strong> manière très explicite dans tous <strong>le</strong>s écrits <strong>de</strong><strong>Riemann</strong>.


28 1.14. Mo<strong>de</strong>s amétriques <strong>de</strong> déterminationà présent l’analyse philosophique <strong>de</strong> son discours, que nous avions interrompuep. 15.En partant, comme nous l’avons rappelé, <strong>de</strong> la bifurcation zénoniennefondamenta<strong>le</strong> entre <strong>le</strong> discr<strong>et</strong> <strong>et</strong> <strong>le</strong> continu, <strong>Riemann</strong> insiste sur<strong>le</strong> fait que <strong>le</strong>s occasions <strong>de</strong> faire naître <strong>de</strong>s concepts dont <strong>le</strong>s mo<strong>de</strong>s<strong>de</strong> détermination recourent à la continuité 58 sont beaucoup moins fréquentes59 que lorsqu’il s’agit <strong>de</strong>s concepts dont <strong>le</strong>s mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> déterminationforment une multiplicité discrète. En eff<strong>et</strong>, l’équiva<strong>le</strong>nce numériqueentre plusieurs col<strong>le</strong>ctions d’obj<strong>et</strong>s concr<strong>et</strong>s qui fon<strong>de</strong>, à un niveauintuitif proprement archaïque la notion élémentaire <strong>de</strong> nombre entier, nepose quasiment aucun problème d’abstraction à la pensée, parce que <strong>le</strong>sbijections entre col<strong>le</strong>ctions d’obj<strong>et</strong>s individués possè<strong>de</strong>nt, pour l’intuition,un sens physique extrêmement clair, du moins lorsqu’il s’agit <strong>de</strong>p<strong>et</strong>its nombres entiers. <strong>Riemann</strong> dévoi<strong>le</strong> alors sa motivation mathématique.De tel<strong>le</strong>s recherches sont <strong>de</strong>venues nécessaires dans plusieursparties <strong>de</strong>s Mathématiques, notamment pour l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s fonctions analytiquesà plusieurs va<strong>le</strong>urs 60 , <strong>et</strong> c’est surtout à cause <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur imperfectionque <strong>le</strong> célèbre théorème d’Abel, ainsi que <strong>le</strong>s travaux <strong>de</strong> Lagrange,<strong>de</strong> Pfaff, <strong>de</strong> Jacobi sur la théorie généra<strong>le</strong> <strong>de</strong>s équations différentiel<strong>le</strong>s,sont restés si longtemps stéri<strong>le</strong>s. [133], p. 283.58 À nouveau, <strong>Riemann</strong> se révè<strong>le</strong> penseur du continu, en analyse, en géométrie différentiel<strong>le</strong><strong>et</strong> en physique. Weyl écrivait ([134], p. 740) que la motivation <strong>de</strong> principe<strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> était <strong>de</strong> comprendre <strong>le</strong> mon<strong>de</strong> par son comportement dans l’infinimentp<strong>et</strong>it [die Welt aus ihrem Verhalten im Unendlichk<strong>le</strong>inen zu verstehen].59 <strong>Riemann</strong> affirme même qu’el<strong>le</strong>s sont plus rares [selten], or cela n’est pas toutà fait exact, car <strong>le</strong>s mouvements <strong>de</strong>s corps dans l’espace — c<strong>et</strong>te réalité intuitive quinous est omniprésente <strong>et</strong> qui allait connaître un <strong>de</strong>stin algébrique inattendu avec <strong>le</strong> développement<strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> — prouvent manifestement <strong>le</strong> contraire.D’ail<strong>le</strong>urs, Herbart avait déjà montré qu’il existe <strong>de</strong>s espaces continus dont <strong>le</strong>s mo<strong>de</strong>sd’existence sont extrêmement variés, comme par exemp<strong>le</strong> (à nouveau) <strong>le</strong>s divers lieuxque peuvent occuper <strong>le</strong>s obj<strong>et</strong>s sensib<strong>le</strong>s, mais aussi la « ligne du son » [Tonlinie], ouencore <strong>le</strong> triang<strong>le</strong> <strong>de</strong>s cou<strong>le</strong>urs, étudié par Thomas Young <strong>et</strong> Clark Maxwell, avec <strong>le</strong>b<strong>le</strong>u, <strong>le</strong> rouge <strong>et</strong> <strong>le</strong> jaune disposés à ses somm<strong>et</strong>s, ces trois cou<strong>le</strong>urs pouvant se fondreen s’associant quantitativement pour produire toutes <strong>le</strong>s cou<strong>le</strong>urs possib<strong>le</strong>s dans <strong>le</strong>continu bidimensionnel <strong>de</strong> l’intérieur du triang<strong>le</strong>. Au début <strong>de</strong> ce § I ([133], p. 282),<strong>Riemann</strong> a probab<strong>le</strong>ment plutôt voulu suggérer que <strong>le</strong>s mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> détermination continuequi sont nécessaires pour penser <strong>le</strong>s multiplicités continues ne sont pas encoredisponib<strong>le</strong>s, car <strong>le</strong> besoin <strong>de</strong> <strong>le</strong>s élaborer ne s’est pas encore fait ressentir dans la vieordinaire.


Chapitre 1. L’ouverture riemannienne 29C<strong>et</strong>te remarque réfère à une tendance naissante <strong>de</strong>s mathématiques <strong>de</strong>la première moitié du 19 ème sièc<strong>le</strong> : essayer <strong>de</strong> transférer <strong>le</strong> langage <strong>de</strong>la géométrie vers <strong>de</strong>s systèmes analytiques ou algébriques à plusieursvariab<strong>le</strong>s ; une tel<strong>le</strong> tendance était connue <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>, au moins partiel<strong>le</strong>ment,via Gauss ([140], p. 15 sq., 53 sq.). La recherche <strong>de</strong> généralitéexige <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre sur pied une théorie <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>urs étendues quisoit indépendante <strong>de</strong>s déterminations métriques <strong>et</strong> dans laquel<strong>le</strong> « on nesuppose rien <strong>de</strong> plus 61 que ce qui est déjà renfermé dans <strong>le</strong> concept <strong>de</strong>ces gran<strong>de</strong>urs ».Éliminer <strong>le</strong>s hypothèses adventices, circonscrire <strong>de</strong>s hypothèsesminima<strong>le</strong>s, <strong>et</strong> s’en tenir rigoureusement à el<strong>le</strong>s : impératif méthodologiqueriemannien ; principe riemannien <strong>de</strong> genèse.Dans c<strong>et</strong>te branche généra<strong>le</strong> <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>urs étendues,où l’on ne suppose rien <strong>de</strong> plus que ce qui est déjà renfermé dans<strong>le</strong> concept <strong>de</strong> ces gran<strong>de</strong>urs, il nous suffira, pour notre obj<strong>et</strong> actuel, <strong>de</strong>porter notre étu<strong>de</strong> sur <strong>de</strong>ux points, relatifs : <strong>le</strong> premier, à la générationdu concept d’une multiplicité <strong>de</strong> plusieurs dimensions ; <strong>le</strong> second,au moyen <strong>de</strong> ramener <strong>le</strong>s déterminations <strong>de</strong> lieu dans une multiplicitédonnée à <strong>de</strong>s déterminations <strong>de</strong> quantité, <strong>et</strong> c’est ce <strong>de</strong>rnier point quidoit clairement faire ressortir <strong>le</strong> caractère essentiel d’une étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> ndimensions. [133], p. 283.Problème inaugural : il s’agit donc <strong>de</strong> penser, <strong>de</strong> définir <strong>et</strong> d’engendrerune notion purement amétrique 62 d’étendue, dont <strong>le</strong>s « quanta » ou« morceaux » d’étendue puissent être envisagés du point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> la60 Il s’agit bien sûr <strong>de</strong>s surfaces étalées au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> certaines régions du plancomp<strong>le</strong>xe, ramifiées autour <strong>de</strong> certains points, <strong>et</strong> recousues <strong>le</strong> long <strong>de</strong> certaines coupuresque <strong>Riemann</strong> a introduites dans sa dissertation inaugura<strong>le</strong>. Pour ne pas interromprel’étu<strong>de</strong> proprement philosophique, nous laisserons <strong>de</strong> côté ces brèves allusionsà l’analyse comp<strong>le</strong>xe, au théorème d’Abel concernant <strong>le</strong>s intégra<strong>le</strong>s <strong>de</strong> fonctions algébriques(voir [80]), <strong>et</strong> au problème <strong>de</strong> l’intégration <strong>de</strong>s formes différentiel<strong>le</strong>s tota<strong>le</strong>s(voir [69]).61 L’exigence ainsi fondée par <strong>Riemann</strong> <strong>de</strong> se limiter à <strong>de</strong>s hypothèses minima<strong>le</strong>ss’exprime aussi très explicitement dans son Habilitationsschrift sur <strong>le</strong>s séries trigonométriques.62 Si <strong>le</strong>s moyens mathématiques ou axiomatiques manquent au géomètre pourmesurer <strong>le</strong>s gran<strong>de</strong>urs spatia<strong>le</strong>s, <strong>et</strong> s’il est impossib<strong>le</strong> <strong>de</strong> se déplacer à la manièred’un arpenteur pour déposer chaînes, jalons <strong>et</strong> équerres sur un hypothétique sol <strong>de</strong> lagéométrie spatia<strong>le</strong> abstraite, alors la question du plus grand <strong>et</strong> du plus p<strong>et</strong>it perd sonsens <strong>et</strong> son intérêt.


30 1.15. Mo<strong>de</strong>s d’engendrement du multidimensionnelcomparaison inclusive, sans pour autant l’être du point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> la mesurenumérique 63 . Il faut ainsi libérer la notion d’étendue <strong>de</strong> l’emprise<strong>de</strong>s gril<strong>le</strong>s <strong>et</strong> <strong>de</strong>s règ<strong>le</strong>s graduées, afin <strong>de</strong> penser l’étendue en termes<strong>de</strong> régions 64 situées dans une certaine multiplicité [als Gebi<strong>et</strong>e in einerMannigfaltigkeit].Immédiatement <strong>et</strong> explicitement, <strong>Riemann</strong> divise donc <strong>le</strong> problèmeconcerné en <strong>de</strong>ux sous-problèmes :Problème 1 : engendrer <strong>le</strong> concept <strong>de</strong> multiplicité par synthèse <strong>et</strong> paranalyse, en ayant recours à <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> détermination quantitifs nonmétriques.Problème 2 : trouver <strong>de</strong>s conditions pour ramener <strong>le</strong>s déterminations<strong>de</strong> lieu à <strong>de</strong>s rapports métriques <strong>de</strong> type distance.Évi<strong>de</strong>mment, l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux questions généra<strong>le</strong>s <strong>de</strong>vra toujoursêtre encadrée par <strong>le</strong>s mêmes exigences « méta-mathématiques universel<strong>le</strong>s» qui animent constamment <strong>Riemann</strong> :• donner <strong>de</strong>s conditions suffisantes pour la genèse ;• donner <strong>de</strong>s conditions nécessaires pour la genèse ;• établir la nécessité <strong>et</strong> la suffisance <strong>de</strong> conditions génétiques ;• éliminer <strong>le</strong>s caractères spécifiques étrangers au concept pur.Pour accé<strong>de</strong>r vraiment à une tel<strong>le</strong> pensée génétique, il nous faut maintenantm<strong>et</strong>tre complètement entre parenthèses <strong>le</strong>s actes <strong>de</strong> postulationaxiomatique par <strong>le</strong>squels nous nous perm<strong>et</strong>tons aujourd’hui d’acceptersans nous poser plus <strong>de</strong> questions aussi bien <strong>le</strong>s définitions formel<strong>le</strong>sinitia<strong>le</strong>s structurées que <strong>le</strong>s entames tel<strong>le</strong>s que « Soit M une variété différentiab<strong>le</strong><strong>de</strong> dimension n », ou « Soient (p 1 , . . .,p n , q 1 , . . ., q n ) <strong>de</strong>scoordonnées loca<strong>le</strong>s sur l’espace <strong>de</strong>s phases P d’un système hamiltonienquelconque ». <strong>Riemann</strong> cherche en fait à démontrer que l’on peutramener la détermination loca<strong>le</strong> <strong>de</strong>s étendues géométriques à <strong>de</strong>s suites<strong>de</strong> quantités numériques : c’est un pur problème <strong>de</strong> genèse, qui ne préoccupeplus notre époque.63 Par son traitement détaillé <strong>de</strong>s multiplicités continues qui précè<strong>de</strong> l’introduction<strong>de</strong> coordonnées numériques, <strong>Riemann</strong> affirmait clairement que <strong>le</strong>s nombres jouent unrô<strong>le</strong> auxilaire en géométrie, s’exprimant <strong>de</strong> ce fait à contre-courant <strong>de</strong> la tendancegénéra<strong>le</strong> à l’arithmétisation <strong>de</strong> l’analyse <strong>et</strong> <strong>de</strong> la géométrie ([140], pp. 30–34).64 Acte <strong>de</strong> saisie intuitive archaïque du spatial : comment <strong>le</strong> caractériser ? Les travaux<strong>de</strong> <strong>Sophus</strong> <strong>Lie</strong> déploieront une pensée du spatial multidimensionel amétrique <strong>et</strong>mobi<strong>le</strong> dans un langage essentiel<strong>le</strong>ment rhétorique <strong>et</strong> algébrique qui cherche néanmoinsà transm<strong>et</strong>tre chaque acte <strong>de</strong> pensée intuitive.


Chapitre 1. L’ouverture riemannienne 311.15. Genèse du multidimensionnel. Dans un tout premier moment,<strong>Riemann</strong> tente <strong>de</strong> caractériser l’unidimensionnalité initia<strong>le</strong> d’une multipliciténon discrète — dont il fera ensuite un principe fondamental<strong>de</strong> genèse — par la propriété que ses mo<strong>de</strong>s continus <strong>de</strong> déterminationsont eux-mêmes déterminés 65 . D’après un raisonnement diffici<strong>le</strong> à reconstituer,<strong>Riemann</strong> affirme alors que <strong>de</strong> tels mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> déterminationne peuvent alors être parcourus « que dans un seul sens », c’est-à-dire« en avant <strong>et</strong> en arrière » : c’est l’unidimensionnalité, appelée à <strong>de</strong>venirracine <strong>et</strong> principe <strong>de</strong> genèse inductive pour la multidimensionnalité.<strong>Ens</strong>uite, dya<strong>de</strong>, soudure <strong>et</strong> parcours perm<strong>et</strong>tent d’engendrer <strong>le</strong> bidimensionnel66 . Dya<strong>de</strong> : dédoub<strong>le</strong>r l’obj<strong>et</strong> un qui est donné, c’est-àdirese donner <strong>de</strong>ux multiplicités unidimensionnel<strong>le</strong>s ; soudure : transporterune multiplicité pour la « riv<strong>et</strong>er » sur une autre en un bipoint<strong>de</strong> coïnci<strong>de</strong>nce ; parcours : faire décrire à la secon<strong>de</strong> multiplicité unidimensionnell<strong>et</strong>oute la multiplicité unidimensionnel<strong>le</strong> <strong>de</strong> la première.Genèse : voir apparaître <strong>le</strong> bidimensionnel comme un voi<strong>le</strong> créé auxfranges <strong>de</strong> l’unidimensionnel par développement continu dans un étherextrinsèque.65 C<strong>et</strong>te phrase longue <strong>et</strong> diffici<strong>le</strong> ([133], pp. 283–284) semb<strong>le</strong> être une tentativeinaboutie pour trouver dans la variabilité <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> détermination d’une multiplicitédonnée <strong>de</strong>s conditions si restrictives qu’el<strong>le</strong>s en impliquent l’unidimensionnalité.Le caractère inachevé <strong>de</strong> ce passage n’a pas échappé à <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> à <strong>Lie</strong>, qui étaient probab<strong>le</strong>mentdéjà informés, en 1891–93, <strong>de</strong>s travaux naissants <strong>de</strong> Pasch, Stolz, Schur sur<strong>le</strong>s fon<strong>de</strong>ments axiomatiques <strong>de</strong> la géométrie. « La véritab<strong>le</strong> signification <strong>de</strong> la propositiond’après laquel<strong>le</strong> l’espace est une variété numérique [Zäh<strong>le</strong>nmannigfaltigkeit] neressort pas du travail <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>. <strong>Riemann</strong> cherche à démontrer c<strong>et</strong>te proposition,mais sa démonstration ne peut pas être prise au sérieux. Si l’on veut véritab<strong>le</strong>ment démontrerque l’espace est une variété numérique, on <strong>de</strong>vra, à n’en pas douter, postu<strong>le</strong>rauparavant un nombre non négligeab<strong>le</strong> d’axiomes, ce dont il semb<strong>le</strong> que <strong>Riemann</strong>n’ait pas été conscient » (p. 161 ci-<strong>de</strong>ssous). Il est vrai en eff<strong>et</strong> que l’élaborationd’un raisonnement véritab<strong>le</strong>ment synthétique nécessite <strong>de</strong> faire une différence marquéeentre hypothèses <strong>et</strong> conclusion, <strong>et</strong> <strong>de</strong> s’interroger sur la nature <strong>de</strong>s hypothèsesqu’on prendra comme axiomes. Comme <strong>Riemann</strong> ne spécifie pas ce qu’il faut précisémententendre par l’idée <strong>de</strong> lieu comme essence du géométral-local-continu, <strong>le</strong>sraisonnements logiques <strong>et</strong> <strong>le</strong>s démonstrations qu’il cherche à conduire pour ramenerune tel<strong>le</strong> notion <strong>de</strong> lieu à <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>urs numériques sont donc encore truffés <strong>de</strong> problèmesouverts.66 Pour <strong>de</strong> plus amp<strong>le</strong>s développements <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te direction <strong>de</strong> pensée, <strong>le</strong> <strong>le</strong>cteurest renvoyé à la Science <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong>ur extensive <strong>de</strong> Grassmann [64], commentée parFlament [46] <strong>et</strong> par Gil<strong>le</strong>s Châtel<strong>et</strong> [27].


32 1.15. Mo<strong>de</strong>s d’engendrement du multidimensionnelbidimensionneltridimensionnelunidimensione<strong>le</strong>n arrièreen avantsoudureLe tridimensionnel s’engendre alors <strong>de</strong> manière analogue par déploiementextériorisé <strong>de</strong> l’unidimensionnel <strong>le</strong> long d’un bidimensionnel, <strong>et</strong>ainsi <strong>de</strong> suite pour <strong>le</strong>s dimensionnalités d’ordre supérieur. Autre interprétation<strong>de</strong> ce procédé : la variation <strong>de</strong> la variabilité produit une variabilitéd’ordre supérieur.Si, au lieu <strong>de</strong> considérer <strong>le</strong> concept comme déterminab<strong>le</strong>, onconsidère son obj<strong>et</strong> comme variab<strong>le</strong>, on pourra désigner c<strong>et</strong>te constructioncomme la composition d’une variabilité <strong>de</strong> n + 1 dimensions, aumoyen d’une variabilité <strong>de</strong> n dimensions <strong>et</strong> d’une variabilité d’une seu<strong>le</strong>dimension. [133], p. 284.Et maintenant, <strong>le</strong> resserrement <strong>de</strong>s conditions : il faut à présent s’interrogerpour savoir si une analyse inverse est possib<strong>le</strong>, car l’existence<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux genèses réciproques montrerait que <strong>le</strong> concept <strong>de</strong> multiplicité aété entièrement circonscrit. À un procédé <strong>de</strong> composition par inductiondoit donc succè<strong>de</strong>r une analyse par décomposition dimensionnel<strong>le</strong>.Je vais maintenant montrer réciproquement comment une variabilité,dont <strong>le</strong> champ est donné, peut se décomposer en une variabilitéd’une dimension <strong>et</strong> une variabilité d’un nombre <strong>de</strong> dimensions moindre.[133], p. 284.À c<strong>et</strong> instant précis va se dévoi<strong>le</strong>r pour la première fois dans <strong>le</strong> texte<strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> l’interdépendance fondamenta<strong>le</strong> entre <strong>le</strong> fonctionnel <strong>et</strong> <strong>le</strong>géométral. C’est <strong>le</strong> premier moment où, à <strong>de</strong>ssein, l’analyse <strong>et</strong> l’algèbrecommencent à vouloir capturer la géométrie.L’idée est simp<strong>le</strong> : dans une portion <strong>de</strong> multiplicité, <strong>le</strong>s éléments divers<strong>de</strong> la multiplicité comptés à partir d’un point fixé à l’avance doiventpossé<strong>de</strong>r un principe <strong>de</strong> différenciation spécifique par rapport au pointen question. Autrement dit, on peut s’imaginer qu’à l’intérieur <strong>de</strong> laditemultiplicité, il existe au moins une certaine fonction du lieu qui ne soitconstante <strong>le</strong> long d’aucune sous-portion <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te multiplicité. Ici, il nes’agit pas <strong>de</strong> définir axiomatiquement <strong>le</strong> géométral <strong>et</strong> <strong>le</strong> fonctionnel àpartir d’atlas maximaux <strong>de</strong> cartes loca<strong>le</strong>s à va<strong>le</strong>urs dans un ouvert <strong>de</strong>R n ([154, 140, 125]). Il s’agit plutôt d’observer que <strong>le</strong> fonctionnel naît


Chapitre 1. L’ouverture riemannienne 33d’emblée avec <strong>le</strong> géométral, par l’eff<strong>et</strong> d’une dualité ou d’une complémentaritéqui se trouve à la racine <strong>de</strong>s concepts.À ce moment-là, bien que <strong>Riemann</strong> soit pertinemmentconscient — grâce à ses travaux sur <strong>le</strong>s séries trigonométriques — dufait que <strong>le</strong>s fonctions diffèrent en nature suivant qu’el<strong>le</strong>s sont continues,différentiab<strong>le</strong>s, ou analytiques, avec un ensemb<strong>le</strong> éventuel<strong>le</strong>ment finiou infini <strong>de</strong> discontinuités, il semb<strong>le</strong> vouloir ne préciser ici aucunehypothèse technique au suj<strong>et</strong> <strong>de</strong> la régularité <strong>de</strong> la fonction en question.Par conséquent, <strong>le</strong> fonctionnel est ici absolument ouvert à la généralité<strong>et</strong> à la diversification <strong>de</strong>s univers spatiaux. On évolue donc dans unmon<strong>de</strong> virtuel qui embrasse a priori <strong>le</strong>s variétés topologiques, <strong>le</strong>svariétés <strong>de</strong> classe C 1 , C 2 , C k ou C ∞ , <strong>le</strong>s variétés analytiques réel<strong>le</strong>s,comp<strong>le</strong>xes, ou quaternioniques, <strong>le</strong>s espaces analytiques singuliers, <strong>le</strong>sespaces éventuel<strong>le</strong>ment fractals, non séparés, tota<strong>le</strong>ment discontinus,ou encore absolument mixtes, c’est-à-dire qui incorporent éventuel<strong>le</strong>ment,en <strong>de</strong>s localités distinctes, chacun <strong>de</strong> ces aspects-là : postéritéstupéfiante <strong>de</strong> la généralité riemannienne. Les raisonnements quipourraient être considérés comme vagues <strong>et</strong> imprécis englobent doncici <strong>de</strong>s pans entiers <strong>de</strong> la géométrie à plusieurs dimensions, que <strong>Engel</strong><strong>et</strong> <strong>Lie</strong> allaient être <strong>le</strong>s premiers à développer d’une manière vraimentsystématique, dans une optique exclusivement loca<strong>le</strong> <strong>et</strong> générique.Lorsqu’on fait varier la constante à laquel<strong>le</strong> on éga<strong>le</strong> une tel<strong>le</strong> fonction,<strong>le</strong>s lieux <strong>de</strong> points en <strong>le</strong>squels sa va<strong>le</strong>ur est fixe forment alors unemultiplicité continue 67 d’un nombre <strong>de</strong> dimensions moindre que celui<strong>de</strong> la variété donnée.67 En toute rigueur ici, il faut faire <strong>de</strong>s hypothèses tel<strong>le</strong>s que par exemp<strong>le</strong> la différentiabilitéau moins C 1 <strong>et</strong> la non-annulation <strong>de</strong> la différentiel<strong>le</strong>, puisque d’aprèsun théorème <strong>de</strong> Whitney, tout sous-ensemb<strong>le</strong> fermé d’une variété, aussi pathologiquequ’il soit, peut être représenté comme lieu d’annulation d’une certaine fonction continue([106]). Toutefois, dans ce moment d’analyse, <strong>le</strong>s raisonnements sont locaux <strong>et</strong>génériques : « Les cas d’exception, dont l’étu<strong>de</strong> est importante [souci d’ouverture],peuvent être ici laissés <strong>de</strong> côté ». Rien n’empêche en tout cas <strong>de</strong> pressentir que <strong>de</strong> telsraisonnements conservent un sens très précis dans la catégorie <strong>de</strong>s espaces analytiquescomp<strong>le</strong>xes singuliers, où l’ontologie parallè<strong>le</strong> du fonctionnel <strong>et</strong> du géométral, mieuxcontrôlée par <strong>le</strong>s séries entières convergentes, se prolonge toujours d’un point vers unp<strong>et</strong>it voisinage <strong>de</strong> ce point, grâce notamment au théorème <strong>de</strong> préparation <strong>de</strong> Weierstrass,au théorème <strong>de</strong> paramétrisation loca<strong>le</strong> <strong>de</strong> No<strong>et</strong>her <strong>et</strong> au théorème <strong>de</strong> cohérenced’Oka.


34 1.16. Conditions pour la détermination <strong>de</strong>s rapports métriquesf = const.f = const 1f = const 2Ces multiplicités, lorsqu’on fait varier la fonction, se transformentd’une manière continue <strong>le</strong>s unes dans <strong>le</strong>s autres ; on pourra donc adm<strong>et</strong>treque l’une d’entre el<strong>le</strong>s engendre <strong>le</strong>s autres, <strong>et</strong> cela pourra avoirlieu, généra<strong>le</strong>ment parlant, <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> façon que chaque point <strong>de</strong> l’une s<strong>et</strong>ransporte en un point déterminé <strong>de</strong> l’autre. [133], pp. 284–285.Ainsi par décomposition, <strong>Riemann</strong> parvient-il en utilisant <strong>de</strong>s fonctionsauxilaires, à montrer que l’analyse du concept <strong>de</strong> multiplicité reconduitexactement au premier procédé <strong>de</strong> genèse : amplification <strong>de</strong> la variabilitépar variation inductive <strong>de</strong> la variabilité.En conclusion, que ce soit par l’analyse ou par la synthèse, « ladétermination <strong>de</strong> lieu dans une multiplicité donnée, quand cela est possib<strong>le</strong>,se réduit à un nombre fini <strong>de</strong> déterminations <strong>de</strong> quantité 68 » : cequ’il fallait démontrer.Contrairement aux définitions axiomatiques, <strong>Riemann</strong> a donc entreprisd’engendrer <strong>le</strong> multidimensionnel à partir <strong>de</strong> l’unidimensionnel,<strong>et</strong> surtout il a tenté d’articu<strong>le</strong>r la genèse comme une démonstration procédantpar <strong>de</strong>s conditions variées. Helmholtz quant à lui, puis Russell([137]) <strong>et</strong> Vuil<strong>le</strong>min ([168], pp. 388–464), envisageront <strong>le</strong> problèmesous l’ang<strong>le</strong> <strong>de</strong> la postulation d’axiomes, pourtant moins problématisant,<strong>et</strong> moins riche d’imprévisib<strong>le</strong>. Pour terminer sur ce chapitre, notonsà nouveau que <strong>Riemann</strong> ne peut se soustraire à un <strong>de</strong>voir constant<strong>de</strong> manifester <strong>le</strong> souci abstrait d’ouverture.Toutefois il y a aussi <strong>de</strong>s multiplicités dans <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s la détermination<strong>de</strong> lieu exige, non plus un nombre fini, mais soit une série infinie,soit une multiplicité continue <strong>de</strong> déterminations <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>ur. Tel<strong>le</strong>s sont,par exemp<strong>le</strong> <strong>le</strong>s multiplicités formées par <strong>le</strong>s déterminations possib<strong>le</strong>sd’une fonction dans une région donnée, par <strong>le</strong>s formes possib<strong>le</strong>s d’unefigure <strong>de</strong> l’espace, <strong>et</strong>c. [133], p. 285.1.16. Conditions pour la détermination <strong>de</strong>s rapports métriques.Après avoir libéré la notion archaïque d’étendue <strong>de</strong> toute saisiemétrique, il s’agit maintenant <strong>de</strong> traiter <strong>le</strong> <strong>de</strong>uxième sous-problème(cf. p. 30), que <strong>Riemann</strong> reformu<strong>le</strong> comme suit :68<strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> appel<strong>le</strong>ront « variétés numériques » [Zäh<strong>le</strong>nmannigfaltigkeit] <strong>le</strong>smultiplicités introduites par <strong>Riemann</strong>.


Chapitre 1. L’ouverture riemannienne 35De quels types <strong>de</strong> rapports métriques est susceptib<strong>le</strong> une multiplicité ?Il s’agit <strong>de</strong> trouver <strong>de</strong>s conditions qui caractérisent <strong>le</strong>s différentes manièrespossib<strong>le</strong>s <strong>de</strong> munir une multiplicité donnée d’un concept supplémentairequi perm<strong>et</strong>te <strong>de</strong> par<strong>le</strong>r <strong>de</strong> la distance qui existe entre toutes <strong>le</strong>spaires <strong>de</strong> points. Or <strong>le</strong> titre passab<strong>le</strong>ment énigmatique <strong>de</strong> la sous-sectionconcernée :Rapports métriques dont est susceptib<strong>le</strong> une variété <strong>de</strong> n dimensions,dans l’hypothèse où <strong>le</strong>s lignes possè<strong>de</strong>nt une longueur, indépendamment<strong>de</strong> <strong>le</strong>ur position, <strong>et</strong> où toute ligne est ainsi mesurab<strong>le</strong> par touteautre lignea plongé dans la perp<strong>le</strong>xité <strong>de</strong> nombreux mathématiciens, philosophes,historiens <strong>et</strong> commentateurs. Tout d’abord, que signifie exactementc<strong>et</strong>te secon<strong>de</strong> hypothèse elliptique d’après laquel<strong>le</strong> toute ligne doit êtremesurab<strong>le</strong> par toute autre ligne ? Faut-il y voir un principe d’arpentage :déplacement libre <strong>de</strong>s règ<strong>le</strong>s (ou <strong>de</strong>s lignes) ? Doit-on en faire toujoursun axiome, en vertu d’une évi<strong>de</strong>nce physique imparab<strong>le</strong> ? Par « lignes »,faut-il entendre n’importe quel<strong>le</strong> courbe tracée dans la multiplicité ? Untel principe <strong>de</strong> métrisation implique-t-il <strong>de</strong>s comparaisons au niveau localfini, ou bien <strong>de</strong>s comparaisons dans l’infinitésimal ?<strong>Riemann</strong> n’est jamais faci<strong>le</strong> à lire, mais sa célèbre allocution« Sur <strong>le</strong>s hypothèses qui servent <strong>de</strong> fon<strong>de</strong>ment à la géométrie » présente<strong>de</strong>s difficultés <strong>de</strong> compréhension d’un type tout à fait spécial.§ 100, p. 275 ci-<strong>de</strong>ssous.Autre énigme : que signifie la première hypothèse elliptiqued’après laquel<strong>le</strong> <strong>le</strong>s lignes possè<strong>de</strong>nt une longueur, indépendamment <strong>de</strong><strong>le</strong>ur position ? Faut-il y voir une allusion à la libre mobilité <strong>de</strong>s courbes<strong>et</strong> à l’invariance <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur longueur, lorsqu’on effectue une série <strong>de</strong> transformationsponctuel<strong>le</strong>s <strong>de</strong> l’espace ? Mais une tel<strong>le</strong> interprétation entreraiten contradiction avec <strong>le</strong> fait que la métrisation est <strong>et</strong> doit êtreabsolument indépendante <strong>de</strong> la mobilité ; une tel<strong>le</strong> indépendance vauten eff<strong>et</strong> déjà pour la théorie gaussienne <strong>de</strong>s surfaces, <strong>et</strong> <strong>Riemann</strong> a explicitementénoncé que c<strong>et</strong>te théorie contient <strong>le</strong>s fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> la questionqu’il va traiter. En tout cas, par rapport à la théorie gaussienne <strong>de</strong>ssurfaces courbes qui héritent d’une métrique « ondulée » par restriction<strong>de</strong> la métrique pythagoricienne « plate » <strong>de</strong> l’espace à trois dimensions,<strong>Riemann</strong> va renverser 69 complètement la réf<strong>le</strong>xion.69 Voir <strong>le</strong> § 1.6 p. 9


36 1.16. Conditions pour la détermination <strong>de</strong>s rapports métriquesEn eff<strong>et</strong>, sans s’autoriser à cé<strong>de</strong>r ni à la formulation aisée <strong>de</strong> problèmesouverts qui consiste simp<strong>le</strong>ment à augmenter <strong>le</strong> nombre <strong>de</strong> variab<strong>le</strong>s,ni à la générativité symbolique <strong>de</strong>s expressions formel<strong>le</strong>s, c’està-direplus précisément, sans annoncer d’emblée à son auditoire :« Étudions maintenant l’expression différentiel<strong>le</strong> quadratique∑ ni,j=1 g ij(x 1 , . . .,x n ) dx i dx j à n variab<strong>le</strong>s qui généralise visib<strong>le</strong>mentl’expression connue en coordonnées paramétriques intrinsèques <strong>de</strong>la métrique E(u, v) du 2 + 2 F(u, v) dudv + G(u, v) dv 2 sur unesurface courbe, dont Gauss a montré, dans son Theorema Egregium,qu’el<strong>le</strong> possè<strong>de</strong> la mesure <strong>de</strong> courbure comme invariant à travers tout<strong>et</strong>ransformation isométrique »,<strong>Riemann</strong> va plutôt, en renversant <strong>le</strong> sens <strong>de</strong> son étu<strong>de</strong>, chercher à trouver<strong>de</strong>s principes <strong>de</strong> genèse a priori qui montreront en quoi l’expressionquadratique gaussienne, ainsi que sa généralisation à <strong>de</strong>s dimensionssupérieures, est en un certain sens naturel<strong>le</strong>, nécessaire, ou tout dumoins « la plus simp<strong>le</strong> possib<strong>le</strong> » qui pourrait s’offrir à l’étu<strong>de</strong> dans una priori relatif, reconstitué a posteriori, <strong>de</strong> la connaissance mathématique.Régressive dans l’a posteriori par rapport à la théorie <strong>de</strong> Gauss,l’étu<strong>de</strong> riemannienne cherche à ouvrir une voie nouvel<strong>le</strong> vers l’a priorigénétique.Par sa démarche, <strong>Riemann</strong> est donc un véritab<strong>le</strong> métaphysicien<strong>de</strong>s mathématiques : nous <strong>de</strong>vons nous interroger, dit-il en eff<strong>et</strong>, surl’existence <strong>de</strong> causes profon<strong>de</strong>s qui pourraient expliquer l’émergence<strong>de</strong> tel<strong>le</strong>s formes symboliques, ou <strong>de</strong> tel<strong>le</strong>s structures mathématiques.Le point <strong>de</strong> vue riemannien se situe donc bien en amont <strong>de</strong> toute optionphilosophique unilatéra<strong>le</strong> sur l’essence <strong>de</strong>s mathématiques <strong>et</strong> sait sesoustraire aux polémiques afférentes ; idéalisme, platonisme, réalisme,constructivisme, intuitionnisme, historicisme, essentialisme, axiomatisme,formalisme : chacune <strong>de</strong> ces options philosophiques est engagéedans une problématique d’essence tel<strong>le</strong>ment profon<strong>de</strong> que <strong>le</strong>s réponsespossib<strong>le</strong>s sont encore noyées dans l’ouverture <strong>et</strong> dans l’indécision, <strong>et</strong>tout penseur d’inspiration riemannienne se voit dans l’obligation philosophiqued’accepter c<strong>et</strong> état <strong>de</strong> fait.Ainsi la partie du discours <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> où il rappel<strong>le</strong> son principeméthodologique général d’investigation n’est-el<strong>le</strong> plus maintenanténigmatique pour notre analyse.Nous arrivons au second <strong>de</strong>s problèmes posés plus haut, savoirà l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s rapports métriques dont une multiplicité est susceptib<strong>le</strong>,<strong>et</strong> <strong>de</strong>s conditions suffisantes pour la détermination <strong>de</strong> ces rapports métriques.[133], p. 285.


Chapitre 1. L’ouverture riemannienne 37Toute genèse doit en eff<strong>et</strong> procé<strong>de</strong>r par conditions démonstratives, aumoins suffisantes dans un premier moment, <strong>et</strong> si possib<strong>le</strong> ensuite, nécessaires<strong>et</strong> suffisantes, afin <strong>de</strong> resserrer au mieux peut-être <strong>le</strong>s écarts synthétiquesentre concepts qui pourraient cacher <strong>de</strong>s pétitions <strong>de</strong> principe,<strong>de</strong>s hypothèses implicites, ou mieux encore, <strong>de</strong>s concepts nouveaux <strong>et</strong>ouverts qui pourraient connaître un <strong>de</strong>stin inattendu dans l’histoire <strong>de</strong>smathématiques 70 . Ainsi sur <strong>le</strong> chemin génétique qui conduit aux métriquesdifférentiel<strong>le</strong>s quadratiques maintenant dites « riemanniennes »,<strong>Riemann</strong> va-t-il poser successivement plusieurs hypothèses ouvertes quipourraient conduire à d’autres types <strong>de</strong> rapports métriques possib<strong>le</strong>s.1.17. Genèse <strong>de</strong>s métriques riemaniennes. Les déterminations <strong>de</strong> lieuétant ramenées aux déterminations simultanées <strong>de</strong> n gran<strong>de</strong>urs numériquesx 1 , x 2 , x 3 , . . .,x n (§ 1.15), <strong>le</strong> problème consiste maintenantà trouver une expression mathématique pour la longueur <strong>de</strong>s lignescourbes tracées dans la multiplicité. Comme dans l’espace ordinaire, ladonation d’une ligne courbe revient à ce que <strong>le</strong>s quantités x i dépen<strong>de</strong>ntparamétriquement d’une seu<strong>le</strong> variab<strong>le</strong> auxiliaire.Je ne traiterai ce problème que sous certaines restrictions, <strong>et</strong> jeme bornerai d’abord aux lignes dans <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s rapports entre <strong>le</strong>saccroissements dx <strong>de</strong>s variab<strong>le</strong>s x correspondantes varient d’une manièrecontinue. [133], p. 286.Leitmotiv riemannien : encore une annonce d’ouverture potentiel<strong>le</strong> laissée<strong>de</strong> côté par <strong>le</strong> choix d’une hypothèse déterminée. Poser une hypothèse,c’est s’écarter éventuel<strong>le</strong>ment d’un (autre) univers mathématique,c’est bifurquer vers une certaine branche <strong>de</strong> l’arbre mathématique, sansexaminer d’autres branches, sans explorer d’autres univers.70 Encore une fois, rappelons que la pensée mathématique structuraliste contemporainene place jamais la question à un niveau aussi problématisant. En eff<strong>et</strong>, lorsqu’ons’autorise à commencer un artic<strong>le</strong> ou un exposé par une phrase tel<strong>le</strong> que « Soit Mune variété différentiel<strong>le</strong> munie d’une métrique riemannienne g », ou tel<strong>le</strong> que « Soitdz1−|z| 2 la métrique <strong>de</strong> Poincaré sur <strong>le</strong> disque unité ∆ = {z ∈ C : |z| < 1} dans C »,l’acte <strong>de</strong> position que désigne l’expression « Soit X un obj<strong>et</strong> mathématique défini » réfèreà un concept considéré comme déjà donné dans une architecture paradigmatiqueconstituée.


38 1.17. Genèse <strong>de</strong>s métriques riemanniennesPar conséquent, <strong>Riemann</strong> déci<strong>de</strong> d’infinitésimaliser 71 <strong>le</strong> problème :avec c<strong>et</strong>te hypothèse <strong>de</strong> continuité 72 , <strong>le</strong>s lignes peuvent être décomposéesen portions infinitésima<strong>le</strong>s, <strong>et</strong> si l’on s’autorise 73 <strong>de</strong> plus à disposer<strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong> l’intégration afin <strong>de</strong> sommer toutes <strong>le</strong>s longueurs infinitésima<strong>le</strong>s<strong>de</strong>s éléments <strong>de</strong> ligne placés bout à bout, il suffit alors 74 d<strong>et</strong>rouver une expression pour la longueur <strong>de</strong> tout élément linéaire infinitésimal(dx 1 , dx 2 , . . .,dx n ) qui est situé en un point (x 1 , x 2 , . . .,x n ).Poursuite du raisonnement : dans l’infinitésimal <strong>et</strong> en un point(x 1 , x 2 , . . .,x n ) fixé, <strong>le</strong>s rapports d’accroissement entre <strong>le</strong>s composantesdx i <strong>de</strong> l’élément infinitésimal en question <strong>le</strong> long d’une lignedonnée peuvent être considérés comme constants. Mais quand <strong>le</strong> point(x 1 , x 2 , . . .,x n ) varie, ces rapports cessent d’être constants, <strong>et</strong> puisque<strong>le</strong>s lignes sont libres <strong>de</strong> représenter, en un point donné quelconque,toutes <strong>le</strong>s directions possib<strong>le</strong>s qui passent par ce point, il en décou<strong>le</strong> que<strong>le</strong>s rapports d’accroissement infinitésimal <strong>le</strong> long d’une ligne doiventen fait dépendre du point, <strong>et</strong> donc aussi : seu<strong>le</strong>ment du point. Par conséquent,sous ces <strong>de</strong>ux hypothèses fondamenta<strong>le</strong>s d’infinitésimalisationpremière <strong>et</strong> d’intégration secon<strong>de</strong>, <strong>Riemann</strong> a ramené la question géométrique<strong>de</strong> la genèse <strong>de</strong>s rapports métriques à une question d’Analyse,à savoir : déterminer une fonction du lieu <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’élément infinitésimal 75 :Ω = Ω(x 1 , . . .,x n ; dx 1 , . . .,dx n )71 En fait, dans l’en-tête (énigmatique) <strong>de</strong> ce paragraphe, <strong>Riemann</strong> aurait été probab<strong>le</strong>mentmieux inspiré d’annoncer c<strong>et</strong>te infinitésimalisation comme l’une <strong>de</strong> seshypothèses génétiques principa<strong>le</strong>s.72 — par laquel<strong>le</strong> il faudrait entendre plus rigoureusement une hypothèse <strong>de</strong> différentiabilitéd’ordre au moins égal à 1 —73 À cause <strong>de</strong> ce recours à l’intégration — concept d’analyse encore problématiquequi exige l’infini —, <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> objecteront p. 162 ci-<strong>de</strong>ssous que <strong>le</strong>s considérations<strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> fournissent peu d’éclaircissements quant aux fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> lagéométrie purement élémentaire.74 <strong>Riemann</strong> recherche en eff<strong>et</strong> <strong>de</strong>s conditions seu<strong>le</strong>ment suffisantes pour la détermination<strong>de</strong>s rapports métriques dans une multiplicité. À chaque fois qu’une hypothèsesimplificatrice ou spécificatrice est admise, <strong>le</strong> choix d’une discontinuité conceptuel<strong>le</strong>estompe une fraction <strong>de</strong> la nécessité qui doit être corrélative <strong>de</strong> la suffisance.75 Dans <strong>le</strong> § 100 p. 278 sq. ci-<strong>de</strong>ssous que <strong>le</strong> <strong>le</strong>cteur est invité à lire en parallè<strong>le</strong>pour <strong>de</strong> plus amp<strong>le</strong>s éclaircissements (cf. aussi [168], pp. 409–412), <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> réexpriment<strong>le</strong>s raisonnements <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> en utilisant un langage purement analytique.Par ail<strong>le</strong>urs, dans la recherche d’une expression fonctionnel<strong>le</strong> pour la métrique, ilstraitent simultanément du cas local fini, inspiré <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur théorie <strong>de</strong>s invariants, <strong>et</strong> du casinfinitésimal (<strong>Riemann</strong>).


Chapitre 1. L’ouverture riemannienne 39la plus généra<strong>le</strong> possib<strong>le</strong> qui puisse fournir, en restriction sur <strong>le</strong>s courbesquelconques, la longueur <strong>de</strong> n’importe quel<strong>le</strong> ligne tracée dans la multiplicité.Autrement dit, la longueur en un point (x 1 , . . .,x n ) d’un élémentinfinitésimal quelconque (dx 1 , . . ., dx n ) attaché en ce point — que l’onnote habituel<strong>le</strong>ment 76 « ds » — est éga<strong>le</strong> à c<strong>et</strong>te fonction pour l’instantinconnue :ds = longueur x (dx)= distance ( x, x + dx )= Ω(x; dx).J’adm<strong>et</strong>trai, en second lieu, que la longueur <strong>de</strong> l’élément linéaire,abstraction faite <strong>de</strong>s quantités du second ordre, reste invariab<strong>le</strong>, lorsqu<strong>et</strong>ous <strong>le</strong>s points <strong>de</strong> c<strong>et</strong> élément subissent un même déplacement infinimentp<strong>et</strong>it, ce qui implique en même temps que, si toutes <strong>le</strong>s quantitésdx croissent dans un même rapport, l’élément linéaire varie éga<strong>le</strong>mentdans ce même rapport. [133], p. 286.multip<strong>le</strong>fini<strong>de</strong> dxrégionfinie loca<strong>le</strong>x dxx+dxK · dxdxdéplacementeuclidien EquelconqueE(dx)∞ · dxvoisinageinfinitésimal<strong>de</strong> xIci seu<strong>le</strong>ment — mais exclusivement à niveau infinitésimal —<strong>Riemann</strong> utilise l’hypothèse énigmatique d’après laquel<strong>le</strong> <strong>le</strong>s lignespossè<strong>de</strong>nt une longueur indépendamment <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur position. Ainsi, lalongueur <strong>de</strong> dx doit être conservée lors <strong>de</strong> tout déplacement euclidienE qui est restreint à un voisinage infinitésimal <strong>de</strong> x :longueur(dx) = longueur ( E(dx) ) .Donc dans l’infiniment p<strong>et</strong>it, la métrique recherchée semb<strong>le</strong> être supposéecomme <strong>de</strong>vant être euclidienne, ce qui équivaut à dire — on peut<strong>le</strong> démontrer — que la métrique est donnée par une forme quadratiquedifférentiel<strong>le</strong> positive. Mais ce serait brû<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s étapes <strong>et</strong> om<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> découvrir<strong>de</strong> nouveaux noyaux conceptuels possib<strong>le</strong>s dans <strong>le</strong> graphe problématique<strong>et</strong> virtuel <strong>de</strong>s concepts métriques.76 C<strong>et</strong>te notation utilisée <strong>de</strong>puis <strong>le</strong> 18 ème sièc<strong>le</strong> <strong>et</strong> reprise par Gauss, réfère à lalongueur d’un élément d’arc infinitésimal d’une courbe tracée dans <strong>le</strong> plan ou dansl’espace.


40 1.17. Genèse <strong>de</strong>s métriques riemanniennesEn eff<strong>et</strong>, <strong>Riemann</strong> ne se sert en fait <strong>de</strong> son hypothèse mystérieuse(<strong>de</strong>mandant que chaque ligne puisse être mesurée par toute autre ligne)que pour en déduire que la longueur d’un multip<strong>le</strong> entier fini k dx <strong>de</strong> dxest éga<strong>le</strong> à k fois la longueur <strong>de</strong> dx 77 , <strong>et</strong> aussi en même temps, que lalongueur <strong>de</strong> −dx 78 s’i<strong>de</strong>ntifie à la longueur <strong>de</strong> dx.<strong>Ens</strong>uite, par un argument <strong>de</strong> continuité qui pourrait consister àfaire tendre k vers l’infini tout en rap<strong>et</strong>issant dx afin que k dx <strong>de</strong>meureune quantité infinitésima<strong>le</strong>, <strong>Riemann</strong> semb<strong>le</strong> en déduire que la fonctionΩ(x; dx) pourra être n’importe quel<strong>le</strong> fonction homogène du premier<strong>de</strong>gré en dx, à savoir qui satisfait 79 :Ω(x; λ dx) = |λ| Ω(x; dx),pour tout nombre réel fini λ. Or c<strong>et</strong>te nouvel<strong>le</strong> conclusion provisoirene nécessite absolument pas que <strong>le</strong>s rapports métriques soient euclidiensdans l’infinitésimal. En eff<strong>et</strong>, c<strong>et</strong>te propriété <strong>de</strong>man<strong>de</strong> seu<strong>le</strong>mentque <strong>le</strong>s longueurs se dilatent dans l’infinitésimal <strong>de</strong> manière purementhomothétique — exigence minima<strong>le</strong> qui laisse encore disponib<strong>le</strong> un<strong>et</strong>rès gran<strong>de</strong> généralité. On peut donc dire qu’à c<strong>et</strong> endroit-là (bien qu’ilsemb<strong>le</strong> en avoir été clairement soucieux), <strong>Riemann</strong> n’a pas réel<strong>le</strong>mentpris <strong>le</strong> temps <strong>de</strong> resserrer <strong>le</strong>s hypothèses minima<strong>le</strong>s qui conduisent auxmétriques dites <strong>de</strong> Fins<strong>le</strong>r, n<strong>et</strong>tement plus généra<strong>le</strong>s que <strong>le</strong>s métriquesriemanniennes (voir [154, 28, 6]).La poursuite du raisonnement marque alors un revirement inattendu<strong>de</strong> la spéculation, puisqu’après fixation d’un point-origine(x 0 1 , . . .,x0 n ), <strong>Riemann</strong> cherche maintenant une fonction non infinitésima<strong>le</strong>du lieu :Ω ( )x 1 , . . .,x n ; x 0 1, . . .,x 0 ndont <strong>le</strong>s ensemb<strong>le</strong>s <strong>de</strong> niveau {x : Ω(x; x 0 ) = const.} s’i<strong>de</strong>ntifient auxlieux équidistants <strong>de</strong> l’origine. En fait, ce r<strong>et</strong>our au niveau macroscopiquelocal fini va perm<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> se rapprocher en pensée <strong>de</strong>s différentiel<strong>le</strong>squadratiques qui généralisent <strong>le</strong>s métriques gaussiennes, car il77 — en eff<strong>et</strong>, k dx s’obtient en m<strong>et</strong>tant bout à bout k copies <strong>de</strong> dx dans la mêmedirection que <strong>le</strong> dx <strong>de</strong> départ (voir <strong>le</strong> diagramme), <strong>et</strong> chacune <strong>de</strong> ces copies est toutsimp<strong>le</strong>ment obtenue par une translation parallè<strong>le</strong> à dx dans <strong>le</strong> voisinage infinitésimal<strong>de</strong> x —78 — qui se déduit <strong>de</strong> dx par une transformation euclidienne standard, la symétrieorthogona<strong>le</strong> par rapport à l’hyperplan orthogonal à dx, —79 <strong>Riemann</strong> sous-entend intuitivement qu’une tel<strong>le</strong> fonction est en quelque sortesemi-explicite, voire loca<strong>le</strong>ment développab<strong>le</strong> en série entière par rapport à dx, puisqu’ilse la représente comme une fonction homogène du premier <strong>de</strong>gré en <strong>le</strong>s quantitésdx « dans laquel<strong>le</strong> <strong>le</strong>s constantes arbitraires seront <strong>de</strong>s fonctions continues <strong>de</strong> x ».


Chapitre 1. L’ouverture riemannienne 41est alors tout à fait naturel que la première différentiel<strong>le</strong> par rapport àx d’une tel<strong>le</strong> fonction Ω(x; x 0 ) doive nécessairement s’annu<strong>le</strong>r 80 pourx = x 0 , puisque toute notion <strong>de</strong> distance que l’on peut s’imaginer doitévi<strong>de</strong>mment atteindre son minimum, égal à 0, au point <strong>de</strong> référencex = x 0 . Le quadratique (ordre 2) comme successeur du linéaire (ordre1) s’introduit donc seu<strong>le</strong>ment à travers <strong>le</strong> principe <strong>de</strong> stabilité existentiel<strong>le</strong><strong>de</strong>s minima. On notera que presque immédiatement après avoirvoulu passer au macroscopique, <strong>Riemann</strong> réinfinitésimalise <strong>le</strong> raisonnementen considérant la différentiel<strong>le</strong> d x Ω(x 0 ; x 0 ).Puisque c<strong>et</strong>te première différentiel<strong>le</strong> d x Ω(x 0 ; x 0 ) s’annu<strong>le</strong>, <strong>le</strong> comportementquantitatif <strong>de</strong> Ω(x; x 0 ), lorsque x parcourt un voisinage infinitésimal<strong>de</strong> x 0 , sera entièrement représenté par sa différentiel<strong>le</strong> secon<strong>de</strong>:n∑ n∑d 2 ∂ 2 ΩΩ =(x 0 ; x 0 ) dx i dx j .∂x i ∂x ji=1j=1Par construction, c<strong>et</strong>te différentiel<strong>le</strong> secon<strong>de</strong> donne donc une bonne approximation<strong>de</strong> type Taylor-Young pour la va<strong>le</strong>ur :Ω(x 0 + dx; x 0 ) − Ω(x 0 ; x 0 ) = Ω(x 0 + dx; x 0 ) − 0= longueur x 0(dx)= ds ∣ ∣x 0.À présent, nouvel<strong>le</strong> bifurcation d’hypothèses : si tous <strong>le</strong>s coefficients∂ 2 Ω∂x i ∂x j(x 0 ; x 0 ) <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te différentiel<strong>le</strong> secon<strong>de</strong> s’annu<strong>le</strong>nt, <strong>le</strong> développement<strong>de</strong>vra se poursuivre jusqu’aux termes d’ordre 3. Mais comme toutproduit dx i dx j dx k <strong>de</strong> <strong>de</strong>gré trois entre différentiel<strong>le</strong>s change <strong>de</strong> signequand on change dx en −dx, <strong>et</strong> comme la fonction distance recherchéedoit forcément être positive, il en décou<strong>le</strong> que dans ce cas, la différentiell<strong>et</strong>roisième d 3 Ω(x 0 ; x 0 ) doit donc nécessairement s’annu<strong>le</strong>r. Ainsi,on doit alors tester si la différentiel<strong>le</strong> quatrième ne s’annu<strong>le</strong> pas, <strong>et</strong> ainsi<strong>de</strong> suite.En toute généralité, ce raisonnement qui présuppose l’analyticité<strong>de</strong> la fonction Ω, montre que la métrique infinitésima<strong>le</strong> recherchée doits’i<strong>de</strong>ntifier à la racine 2k-ième d’une expression homogène <strong>de</strong> <strong>de</strong>gré 2k80 Si une fonction ω = ω(x 1 , . . . , x n ) <strong>de</strong> n variab<strong>le</strong>s possè<strong>de</strong> une dérivée partiel<strong>le</strong>∂ω∂x iqui ne s’annu<strong>le</strong> pas en un point x 0 , alors ω croît ou décroît strictement (selon <strong>le</strong>signe <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te dérivée partiel<strong>le</strong>) <strong>le</strong> long d’un p<strong>et</strong>it segment affine parallè<strong>le</strong> à l’axe <strong>de</strong>sx i qui passe par x 0 .


42 1.18. Surfaces <strong>de</strong> courbure constant<strong>et</strong>oujours positive dont <strong>le</strong>s coefficients sont <strong>de</strong>s fonctions <strong>de</strong> x :ds = 2κ √ √√√n∑i 1 ,...,i 2κ =1ω i1 ,...,i 2κ(x 1 , . . .,x n ) dx i1 · · ·dx i2κ .Sans perte <strong>de</strong> généralité, on peut supposer que <strong>de</strong> tels coefficientsω i1 ,...,i 2κsont complètement symétriques par rapport à <strong>le</strong>urs indices inférieurs,à savoir :ω i1 ,...,i 2κ(x) ≡ ω iσ(1) ,...,i σ(2κ)(x),pour toute permutation σ <strong>de</strong> l’ensemb<strong>le</strong> {1, . . ., 2κ}.Le cas <strong>le</strong> plus simp<strong>le</strong> est bien sûr celui <strong>de</strong>s formes différentiel<strong>le</strong>squadratiques (2κ = 2), pour <strong>le</strong>quel <strong>le</strong> carré ds 2 <strong>de</strong> la longueur d’unélément infinitésimal quelconque <strong>de</strong> coordonnées non toutes nul<strong>le</strong>s(dx 1 , . . .,dx n ) basé en un point (x 1 , . . ., x n ) est donné par une expressiondu second ordre en <strong>le</strong>s dx i :n∑ds 2 = g i,j (x 1 , . . .,x n ) dx i dx ji,j=1à coefficients <strong>de</strong>s fonctions arbitraires g i,j ≡ g j,i <strong>de</strong> x, <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte quela somme ne prenne que <strong>de</strong>s va<strong>le</strong>urs strictement positives.En conclusion, la genèse <strong>de</strong>s métriques riemanniennes transcend<strong>et</strong>out acte <strong>de</strong> postulation axiomatique a posteriori. Problématisante,la genèse riemannienne procè<strong>de</strong> par spécification progressive d’hypothèsesqui sont hiérarchisées en ordre <strong>de</strong> généralité. Chaque choix engagela pensée dans un nouvel irréversib<strong>le</strong>-synthétique.La coprésence <strong>de</strong> ces bifurcations spéculatives indique l’ouverturecollatéra<strong>le</strong> permanente <strong>de</strong> la pensée mathématique. Au sein même duconcept final <strong>de</strong> différentiel<strong>le</strong> quadratique infinitésima<strong>le</strong> positive, <strong>le</strong> <strong>de</strong>gré<strong>de</strong> liberté <strong>et</strong> d’arbitraire dans <strong>le</strong> choix <strong>de</strong>s fonctions g i,j (x) maintientl’ouverture intrinsèque du concept <strong>et</strong> <strong>le</strong> prédispose à une plasticité remarquab<strong>le</strong>,confirmée par sa capacité à héberger <strong>de</strong>s théories physiquesaussi variées que la cristallographie, la mécanique <strong>de</strong>s milieux continus,ou encore la théorie <strong>de</strong> la relativité généralisée.1.18. Surfaces <strong>de</strong> courbure constante. Le travail <strong>de</strong> Gauss sur la théorieintrinsèque <strong>de</strong>s surface a trouvé <strong>de</strong>s continuateurs ([129, 135, 90])à l’Université <strong>de</strong> Dorpat, maintenant Tartù, une vil<strong>le</strong> <strong>de</strong> langue germaniquesituée dans une province estonienne. Senff a publié en 1831


Chapitre 1. L’ouverture riemannienne 43<strong>le</strong>s formu<strong>le</strong>s qu’on attribue aujourd’hui à Fren<strong>et</strong> 81 ; P<strong>et</strong>erson a soutenuen 1853 une thèse sur <strong>le</strong>s équations aujourd’hui attribuées à Mainardi-Codazzi ; <strong>et</strong> surtout Minding, figure la plus influente, a travaillé sur <strong>le</strong>développement <strong>de</strong>s lignes courbes à l’intérieur <strong>de</strong> surfaces courbes, a introduit<strong>le</strong> concept <strong>de</strong> courbure géodésique, <strong>et</strong> a étudié <strong>le</strong>s surfaces dontla courbure gaussienne est constante.Pour ce qui nous intéresse, Minding a su exprimer la métriquegaussienne d’une surface <strong>de</strong> courbure constante κ > 0 sous la forme 82normalisée suivante :ds 2 = dp 2 + ( 1 √κ sin p √ κ )2 dq 2ou lorsque −κ < 0 sous la forme :ds 2 = dp 2 + ( 1 √κ sinh p √ κ ) 2dq2Le cas <strong>de</strong> la courbure nul<strong>le</strong> s’obtient en prenant la limite, lorsque κtend vers zéro, <strong>de</strong> chacune <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux formu<strong>le</strong>s 83 , <strong>et</strong> l’on r<strong>et</strong>rouve ainsil’expression <strong>de</strong> la métrique pythagoricienne en coordonnées polaires(rayon p, ang<strong>le</strong> q) : ds 2 = dp 2 + p 2 dq 2 .Une autre expression normalisée <strong>de</strong>s métriques gaussiennes <strong>de</strong>courbure constante était très vraisemblab<strong>le</strong>ment connue <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>,81 Pour une excel<strong>le</strong>nte présentation <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong>s courbes <strong>et</strong> <strong>de</strong>s surfaces dansl’espace à trois dimensions, nous renvoyons aux <strong>le</strong>çons <strong>de</strong> Do Carmo [37]. Les aspectsphilosophiques fins <strong>de</strong> l’émergence <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong>s surfaces <strong>de</strong> Gauss ne pourrontpas être abordés ici, <strong>et</strong> nous bornerons notre analyse à l’examen résumé <strong>de</strong> la façondont <strong>Riemann</strong> semb<strong>le</strong> être parvenu au concept <strong>de</strong> courbure, en nous basant sur Weyl([170, 171]) <strong>et</strong> sur Spivak ([154]).82 Lorsque <strong>le</strong> ds 2 est représentée en coordonnées polaires géodésiques sous laforme normalisée ds 2 = dp 2 + G(p, q)dq 2 , sa courbure <strong>de</strong> Gauss s’exprime alors parla formu<strong>le</strong> relativement simp<strong>le</strong> : κ = κ(p) = − √ 1 ∂ 2√ GG ∂p. Sachant que <strong>le</strong> signe <strong>de</strong> la2dérivée secon<strong>de</strong> change suivant qu’on a affaire au sinus (tout court) : ∂2∂p(sin p √ κ) =2− √ κ 2 sin p √ ∂κ, ou au sinus hyperbolique : 2∂p(sinh p √ κ) = √ κ 2 sinhp √ κ, on2r<strong>et</strong>rouve effectivement κ dans <strong>le</strong> premier cas, <strong>et</strong> −κ dans <strong>le</strong> second cas.83 Rappelons que sint = t − 1 6 t3 + · · · <strong>et</strong> que sinht = t + 1 6 t3 + · · · , d’où1lim κ→0 √κ sin p √ 1κ = p <strong>et</strong> aussi lim κ→0 √κ sinhp √ κ = p.


44 1.19. Courbure sectionnel<strong>le</strong> <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Christoffel-Lipschitz<strong>et</strong> el<strong>le</strong> possè<strong>de</strong> l’avantage remarquab<strong>le</strong>, par rapport aux formu<strong>le</strong>s précé<strong>de</strong>ntes,<strong>de</strong> ne pas contraindre à distinguer plusieurs cas 84 :ds 2 =dx 2 1 + dx2 2[1 +κ4 (x2 1 + x 2 2) ] 2 .Dans son Habilitationsvortrag, la seu<strong>le</strong> formu<strong>le</strong> significative que<strong>Riemann</strong> osera signa<strong>le</strong>r à son auditoire d’universitaires issus <strong>de</strong> tous<strong>le</strong>s horizons sera la généralisation évi<strong>de</strong>nte <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te expression à ladimension n quelconque :ds 2 =dx 2 1 + · · · + dx 2 n[1 +κ4 (x2 1 + · · · + x2 n )] 2 ,dans laquel<strong>le</strong> on peut immédiatement relire la formu<strong>le</strong> précé<strong>de</strong>nte enégalant à zéro (n − 2) variab<strong>le</strong>s x i .1.19. Courbure sectionnel<strong>le</strong> <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Christoffel-Lipschitz.Question : en passant à la dimension quelconque n 2 <strong>et</strong> pour <strong>de</strong>smétriques quelconques, pourquoi <strong>Riemann</strong> a-t-il envisagé <strong>de</strong> prolongerla théorie <strong>de</strong> Gauss sous l’ang<strong>le</strong> <strong>de</strong> la courbure dite sectionnel<strong>le</strong>,c’est-à-dire en sectionnant <strong>le</strong>s multiplicité <strong>de</strong> dimension n par <strong>de</strong>ssurfaces <strong>de</strong> dimension 2 ? La Commentatio (cf. note p. 5) fournit uneréponse qui témoigne clairement <strong>de</strong> l’enracinement <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te genèsedans la matrice du tridimensionnel.L’expression √∑ b ι,ι ′ ds ι ds ι ′ peut être envisagée comme l’élémentlinéaire dans un espace généralisé <strong>de</strong> n dimensions transcendantnotre intuition. Si dans c<strong>et</strong> espace on trace toutes <strong>le</strong>s lignes <strong>le</strong>s pluscourtes issues du point (s 1 , s 2 , . . . , s n ), dans <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s élémentsinitiaux <strong>de</strong> variation <strong>de</strong>s s sont comme <strong>le</strong>s rapports αds 1 +βδs 1 : αds 2 +βδs 2 : · · · : αds n + βδs n , où α <strong>et</strong> β désignent <strong>de</strong>s quantités arbitraires,alors ces lignes constituent une surface qui peut être développée dansl’espace <strong>de</strong> notre intuition commune 85 . [132], p. 382.84 Lorsque <strong>le</strong> ds 2 est représenté en coordonnées isothermes sous la forme normalisée: ds 2 = λ 2 (u, v) [ du 2 + dv 2] , la courbure est donnée par une formu<strong>le</strong> que Gausspossédait déjà en 1822 :κ = κ(u, v) = − 1 λ 2 ( ∂ 2 log λ∂u 2)+ ∂2 log λ∂v 2 ,<strong>et</strong> qui apparaissait dans son Copenhagen Preisschrift sur <strong>le</strong>s applications conformesqui lui a valu <strong>le</strong> prix <strong>de</strong> l’Académie <strong>de</strong> Copenhague ([90]). L’application <strong>de</strong> c<strong>et</strong>teformu<strong>le</strong> généra<strong>le</strong> dans <strong>le</strong> cas où 1 λ 2 = 1 4 +κ(x2 1+x 2 2) fournit effectivement la constanteκ, quel que soit <strong>le</strong> nombre réel κ fixé à l’avance.


Chapitre 1. L’ouverture riemannienne 45Nécessité pour la pensée, pour la conception, <strong>et</strong> surtout pour l’intuition :nécessité <strong>de</strong> ressaisir la courbure sous un ang<strong>le</strong> bidimensionnel <strong>et</strong>gaussien, car <strong>le</strong> pluridimensionnel nous transcen<strong>de</strong>. Étonnant coup <strong>de</strong>chance riemannien que confirmera p<strong>le</strong>inement la réinterprétation tensoriel<strong>le</strong>: tous <strong>le</strong>s invariants d’ordre <strong>de</strong>ux d’une métrique quadratique infinitésima<strong>le</strong>peuvent être obtenus en se restreignant à <strong>de</strong>s surfaces qu’oninscrit dans la variété <strong>et</strong> qu’on oriente à volonté dans <strong>de</strong>s directions arbitraires.Toutefois, la réduction s’arrête à la dimension 2, car <strong>le</strong> tranchagepar <strong>de</strong>s obj<strong>et</strong>s <strong>de</strong> dimension 1 rend la courbure invisib<strong>le</strong>. En eff<strong>et</strong>,chaque courbe (au moins <strong>de</strong> classe C 1 ) est intrinsèquement équiva<strong>le</strong>nte(isométrique 86 ) à un simp<strong>le</strong> segment <strong>de</strong> droite : la régression en dimensiondu caractère intrinsèque <strong>de</strong> la courbure doit s’arrêter n<strong>et</strong> à la dimension2. Et inversement, <strong>le</strong> passage <strong>de</strong> la dimension 1 à la dimension2 imposait un saut qualitatif inattendu que Gauss avait su découvrir :naissance <strong>de</strong> la courbure intrinsèque <strong>de</strong>s surfaces, courbure qui <strong>de</strong>meureponctuel<strong>le</strong>ment invariab<strong>le</strong> dans toute transformation isométrique, alorsque toutes <strong>le</strong>s lignes tracées dans une surface sont dépossédées <strong>de</strong> touterigidité intrinsèque.Par ail<strong>le</strong>urs, la découverte <strong>de</strong> Gauss aurait pu faire croire qu’en dimensionn 3, d’autres phénomènes spécifiques <strong>et</strong> d’autres invariantsinattendus nouveaux émergeraient, qui seraient eux aussi propres aux85 Expressio √∑ b ι,ι ′ ds ι ds ι ′ spectari potest tanquam e<strong>le</strong>mentum lineare in spatiogeneraliore n dimensionum nostrum intuitum transcen<strong>de</strong>nte. Quodsi in hoc spatioa puncto (s 1 , s 2 , . . . , s n ) ducantur omnes lineae brevissimae, in quarum e<strong>le</strong>mentis initialibusvariationes ipsarum s sunt ut αds 1 +βδs 1 : αds 2 +βδs 2 : · · · : αds n +βδs n ,<strong>de</strong>notantibus α <strong>et</strong> β quantitates quaslib<strong>et</strong>, hae lineae superficiem constituent, quam inspatium vulgare nostro intuitui subjectum evolvere lic<strong>et</strong>. Ici, <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux éléments infinitésimaux(ds 1 , ds 2 , . . . , ds n ) <strong>et</strong> (δs 1 , δs 2 , . . .,δs n ) basés en un point <strong>de</strong> coordonnées(s 1 , s 2 , . . . , s n ) sont supposés être linéairement indépendants, <strong>et</strong> la combinaison linéairegénéra<strong>le</strong> :(αds1 + βδs 1 , αds 2 + βδs 2 , . . ., αds n + βδs n)comprend alors tous <strong>le</strong>s éléments linéaires contenus dans <strong>le</strong> plan qu’ils engendrent.<strong>Riemann</strong> considère donc la surface loca<strong>le</strong> <strong>et</strong> finie qui est obtenue en intégrant toutes<strong>le</strong>s géodésiques issues du point dans toutes ces directions <strong>et</strong> il s’imagine alors qu’un<strong>et</strong>el<strong>le</strong> surface, interne à la multiplicité (variété) initia<strong>le</strong>, pourrait en être extraite afin<strong>de</strong> se réaliser visuel<strong>le</strong>ment dans un espace tridimensionnel auxiliaire. À partir <strong>de</strong> c<strong>et</strong>extrait, on pourrait même s’imaginer que l’invention riemannienne <strong>de</strong> la courbure parsectionnement obéissait à simp<strong>le</strong> exigence d’appropriation intuitive.86 — grâce à la paramétrisation par longueur d’arc, ou à la rectification d’un lac<strong>et</strong>par <strong>le</strong> geste physique —


46 1.19. Courbure sectionnel<strong>le</strong> <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Christoffel-Lipschitzdimensions supérieures. Peut-être même sans qu’il s’en soit réel<strong>le</strong>mentdouté, <strong>Riemann</strong> a-t-il été conduit à entrevoir la bidimensionnalité pure<strong>de</strong> la courbure. Seuls <strong>le</strong>s travaux <strong>de</strong> Lipschitz <strong>et</strong> <strong>de</strong> Christoffel confirmerontc<strong>et</strong>te intuition. Impossib<strong>le</strong> donc <strong>de</strong> se faire une idée a priori <strong>de</strong>l’intrinsèque qui l’exempte <strong>de</strong> l’imprévisibilité contingente <strong>de</strong>s nécessitéslatéra<strong>le</strong>s inscrites dans <strong>de</strong>s modalités hypothétiques.En toute dimension n 2, <strong>Riemann</strong> va donc approcher <strong>le</strong> concept<strong>de</strong> courbure par sections <strong>de</strong> surfaces, domaine où la théorie <strong>de</strong> Gausss’appliquera. C’est peut-être c<strong>et</strong>te idée fondamenta<strong>le</strong> qui a guidé <strong>le</strong> mystérieuxcalcul que la Commentatio (cf. note p. 5) nous transm<strong>et</strong> sansdétails intermédiaires : faire vivre <strong>le</strong> bidimensionnel gaussien dans <strong>le</strong>multidimensionnel.Soient en eff<strong>et</strong> x = (x 1 , . . .,x n ) <strong>de</strong>s coordonnées (numériques)loca<strong>le</strong>s dans <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s <strong>le</strong> carré ds 2 <strong>de</strong> la longueur <strong>de</strong> l’élément linéaire(dx 1 , . . .,dx n ) basé au point x s’exprime par l’expression quadratique∑ ni,j=1 g i,j(x) dx i dx j , <strong>le</strong> point central étant l’origine 0 = (0, . . .,0).<strong>Riemann</strong> commence par effectuer un simp<strong>le</strong> développement <strong>de</strong> Taylorà l’ordre <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s coefficients métriques :g i,j (x) = g i,j (0) +n∑k=1∂g i,j∂x k(0) x k + 1 2n∑k,l=1∂ 2 g i,j∂x k ∂x l(0) x k x l + · · · .Principe mathématique absolu : contracter, éliminer <strong>le</strong>s termes superflus,rendre visib<strong>le</strong> l’être dans sa plus simp<strong>le</strong> expression. Tout d’abord,la diagonalisation <strong>de</strong>s formes quadratiques définies positives à coefficientsréels perm<strong>et</strong> immédiatement, quitte à effectuer au préalab<strong>le</strong> unchangement linéaire <strong>de</strong> coordonnées, <strong>de</strong> supposer qu’on a à l’origineg i,j = δ i,j , d’où :n∑i,j=1g i,j (0) dx i dx j = dx 2 1 + · · · + dx2 n .Si l’on introduit ces gran<strong>de</strong>urs, alors, pour <strong>de</strong>s va<strong>le</strong>urs infinimentp<strong>et</strong>ites <strong>de</strong>s x, <strong>le</strong> carré <strong>de</strong> l’élément linéaire sera = ∑ dx 2 ; <strong>le</strong> terme <strong>de</strong>l’ordre suivant dans ce carré sera égal à une fonction homogène du second<strong>de</strong>gré <strong>de</strong>s n n−12gran<strong>de</strong>urs (x 1 dx 2 − x 2 dx 1 ), (x 1 dx 3 − x 3 dx 1 ), . . .,c’est-à-dire qu’il sera un infiniment p<strong>et</strong>it du quatrième ordre ; <strong>de</strong> tel<strong>le</strong>sorte que l’on obtient une gran<strong>de</strong>ur finie en divisant ce terme par <strong>le</strong>carré du triang<strong>le</strong> infiniment p<strong>et</strong>it dont <strong>le</strong>s somm<strong>et</strong>s correspon<strong>de</strong>nt auxsystèmes <strong>de</strong> va<strong>le</strong>urs (0, 0, 0, . . .), (x 1 , x 2 , x 3 , . . .), (dx 1 , dx 2 , dx 3 , . . . )<strong>de</strong>s variab<strong>le</strong>s. [133], p. 289.


Chapitre 1. L’ouverture riemannienne 47D’après Weyl [170] <strong>et</strong> Spivak [154], il semb<strong>le</strong>rait que <strong>le</strong> principe <strong>de</strong>normalisation que Gauss avait élaboré en termes <strong>de</strong> coordonnées isothermesait été repris <strong>et</strong> généralisé par <strong>Riemann</strong>. Aucun élément manuscritne nous est parvenu mais l’on peut penser 87 que <strong>Riemann</strong> se soitproposé d’examiner, en dimension n 3, ce qui <strong>de</strong>vait correspondreau <strong>le</strong>mme <strong>de</strong> Gauss sur l’orthogonalité <strong>de</strong>s géodésiques. En tout cas,notons M la variété riemannienne, fixons un point p ∈ M <strong>et</strong> considéronsn vecteurs X 1 (p), . . ., X n (p) dans l’espace tangent T p M à M en pqui forment une base orthonormée <strong>de</strong> T p M. L’application exponentiel<strong>le</strong>loca<strong>le</strong> ([154, 38]) :exp: T p M → Menvoie tout vecteur X(p) <strong>de</strong> norme riemannienne g(X(p), X(p)) 1/2suffisamment p<strong>et</strong>ite sur <strong>le</strong> point qui est situé à la distanceg(X(p), X(p)) 1/2 — éga<strong>le</strong> à c<strong>et</strong>te norme — sur l’unique géodésiqueissue <strong>de</strong> p <strong>et</strong> dirigée par X(p). C<strong>et</strong>te application définit undifféomorphisme local <strong>de</strong> T p M sur M qui envoie l’origine 0 ∈ T p Msur p. Si l’on note maintenant ψ : T p M → R n l’isomorphisme <strong>de</strong> T p Mavec R n qui est automatiquement fourni avec la base orthonorma<strong>le</strong> :T p M ψexpMR nψ ( x 1 X 1 (p) + · · · + x n X n (p) ) := (x 1 , . . .,x n )alors l’application ψ ◦ exp −1 fournit un système <strong>de</strong> coordonnées loca<strong>le</strong>s(x 1 , . . .,x n ) sur M qui sont appelées coordonnées riemanniennesnorma<strong>le</strong>s. Toute autre base orthonormée <strong>de</strong> T p M fournirait un systèmeessentiel<strong>le</strong>ment équiva<strong>le</strong>nt <strong>de</strong> coordonnées loca<strong>le</strong>s. L’avantage principal<strong>de</strong> ces systèmes <strong>de</strong> coordonnées est <strong>de</strong> donner l’accès <strong>le</strong> plus direct auxquantités (tensoriel<strong>le</strong>s) <strong>de</strong> courbure, grâce à l’énoncé suivant, dont nousne reconstituerons pas la démonstration.Proposition. ([133, 170, 154]) Dans tout système <strong>de</strong> coordonnées riemanniennesnorma<strong>le</strong>s (x 1 , . . ., x n ), <strong>le</strong> développement <strong>de</strong> Taylor en x =87 C’est là toute la limite <strong>de</strong> l’histoire <strong>de</strong>s mathématiques lorsque, trop pauvre endocuments, mais consciente <strong>de</strong> la comp<strong>le</strong>xité <strong>de</strong>s situations <strong>et</strong> <strong>de</strong> la richesse éventuel<strong>le</strong><strong>de</strong>s échanges purement verbaux entre acteurs, el<strong>le</strong> se trouve réduite à ém<strong>et</strong>tre unevariété <strong>de</strong> conjectures qui finissent à terme par circonscrire toutes <strong>le</strong>s éventualitésd’un réel perdu.


48 1.19. Courbure sectionnel<strong>le</strong> <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Christoffel-Lipschitz0 <strong>de</strong>s coefficients g i,j (x) <strong>de</strong> la métrique :g i,j (x) = δ i,j + 1 2n∑k,l=1∂ 2 g i,j∂x k ∂x l(0) x k x l + · · · ,supprime tous <strong>le</strong>s termes ∂g i,j∂x k(0) d’ordre 1 <strong>et</strong> fait apparaître <strong>de</strong>s termesd’ordre <strong>de</strong>ux :R i,j; k,l := 1 ∂ 2 g i,j(0)2∂x k ∂x lqui satisfont <strong>le</strong>s relations <strong>de</strong> symétrie indiciel<strong>le</strong> évi<strong>de</strong>ntes 88 :R i,j;k,l = R j,i;k,l = R i,j;l,kainsi que <strong>le</strong>s symétries indiciel<strong>le</strong>s non trivia<strong>le</strong>s :(i) R i,j; k,l = R k,l;i,j(ii) R i,j; k,l + R i,l;j,k + R i,k; l,j = 0.Alors dans ces conditions, <strong>le</strong> développement <strong>de</strong> Taylor à l’ordre <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>la métrique quadratique infinitésima<strong>le</strong> :n∑g i,j (x) dx i dx j = dx 2 1 + · · · + dx2 n +i,j=1+ 1 3n∑n∑i,j=1 k,l=1R i,j;k,l(xi dx k − x k dx i)·(xj dx l − x l dx j)peut être réécrit, à un facteur 1 près, comme une forme quadratique à3coefficients R i,j;k,l sur <strong>le</strong>s coordonnées plückériennes :∣ x ∣i 1dx i1∣∣∣= xx i2 dxi1 dx i2 − x i2 dx i1 (1 i 1 < i 2 n)i2du 2-plan engendré par <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux éléments infinitésimaux (x 1 , . . .,x n ) <strong>et</strong>(dx 1 , . . .,dx n ).Précisions l’interprétation géométrique. <strong>Riemann</strong> s’imagine un triang<strong>le</strong>infiniment p<strong>et</strong>it variab<strong>le</strong> (<strong>et</strong> surprenant) dans <strong>le</strong>quel non seu<strong>le</strong>ment(dx 1 , . . .,dx n ), mais encore (x 1 , . . ., x n ) sont <strong>de</strong>s quantités infinitésima<strong>le</strong>s.Si l’on note donc ce <strong>de</strong>uxième élément infinitésimal88 — puisque g i,j = g j,i <strong>et</strong> que <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux dérivées partiel<strong>le</strong>s∂∂x k,∂∂x lcommutent.


Chapitre 1. L’ouverture riemannienne 49(δx 1 , . . .,δx n ) avec un symbo<strong>le</strong> δ pour plus d’homogénéité conceptuel<strong>le</strong>,<strong>le</strong>s termes d’ordre <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> la métrique s’écrivent alors commeune certaine forme quadratique :13n∑n∑i,j=1 k,l=1R i,j;k,l(δxi dx k − δx k dx i)·(δxj dx l − δx l dx j)en <strong>le</strong>s coordonnées plückériennes δx i1 dx i2 − δx i2 dx i1 du 2-plan infinitésima<strong>le</strong>ngendré par (dx 1 , . . .,dx n ) <strong>et</strong> (δx 1 , . . .,δx n ) basés au point<strong>de</strong> référence. Pour obtenir la courbure <strong>de</strong> Gauss <strong>de</strong> la surface formée<strong>de</strong>s géodésiques dirigées par <strong>le</strong> 2-plan αdx+βδx (à un facteur constantprès), il suffit <strong>de</strong> diviser c<strong>et</strong>te expression par <strong>le</strong> carré <strong>de</strong> l’aire infinitésima<strong>le</strong>du triang<strong>le</strong> 0, dx, δx. Il est quasiment certain que <strong>Riemann</strong> s’estinspiré <strong>de</strong> l’énoncé similaire en dimension 2 connu par <strong>le</strong>s continuateurs<strong>de</strong> Gauss, <strong>et</strong> nous pouvons conclure que c’est l’exigence <strong>de</strong> représentationintuitive d’une multiplicité par <strong>de</strong>s tranches bidimensionnel<strong>le</strong>s quia conduit <strong>Riemann</strong> vers la courbure sectionnel<strong>le</strong>.1.20. Caractérisation <strong>de</strong>s variétés loca<strong>le</strong>ment euclidiennes. Le développement<strong>de</strong> Taylor dans <strong>de</strong>s coordonnées géodésiques riemanniennesnorma<strong>le</strong>s offre l’accès <strong>le</strong> plus direct aux composantes <strong>de</strong> courbure, maisc<strong>et</strong>te approche présente l’inconvénient d’être confinée à un seul point.Dans la <strong>de</strong>uxième <strong>et</strong> <strong>de</strong>rnière partie <strong>de</strong> la Commentatio ([132], pp. 380–383), <strong>Riemann</strong> cherche à réduire l’équation différentiel<strong>le</strong> <strong>de</strong> la conduction<strong>de</strong> la cha<strong>le</strong>ur :∑(∂ ∑)∂ub ij = h ∂u∂si i ∂sj j ∂tà une forme la plus simp<strong>le</strong> possib<strong>le</strong>. Il ramène alors ce problème à latransformation d’une métrique quadratique :∑ι, ι ′ b ι, ι ′ ds ι ds ι ′en une métrique plate euclidienne ∑ ι,ι ′ a ι, ι ′ ds ι ds ι ′ dont tous <strong>le</strong>s a ι, ι ′sont constants, métrique qui est donc équiva<strong>le</strong>nte à ds 2 1 + · · · + ds2 n . Parun calcul assez elliptique, <strong>Riemann</strong> trouve la condition nécessaire quepour toute col<strong>le</strong>ction <strong>de</strong> quatre indices ι, ι ′ , ι ′′ , ι ′′ , l’expression suivante :(I)0 = ∂2 b ι, ι ′′∂s ι ′∂s ι ′′′∑+ 1 2+ ∂2 b ι ′ , ι ′′′∂s ι ∂s ι ′′− ∂2 b ι, ι ′′′∂s ι ′∂s ι ′′− ∂2 b ι ′ , ι ′′∂s ι ∂s ι ′′′ν, ν ′ (pν, ι ′ , ι ′′′ p ν ′ , ι, ι ′′ − p ν, ι, ι ′′′ p ν ′ , ι ′ , ι ′′ ) β ν, ν ′B ,


50 1.20. Caractérisation <strong>de</strong>s variétés loca<strong>le</strong>ment euclidiennesdoit s’annu<strong>le</strong>r i<strong>de</strong>ntiquement, où B = d<strong>et</strong> ( ) ( βν,b ι, ι ′ <strong>et</strong> oùν)′B estl’inverse <strong>de</strong> ( b ι, ι ′). Aucun argument ne vient supporter l’affirmationimplicite que c<strong>et</strong>te condition est aussi nécessaire, bien quel’Habilitationsvortrag ait énoncé une tel<strong>le</strong> réciproque 89 . <strong>Ens</strong>uite,<strong>Riemann</strong> désigne par la notation :(ιι ′ , ι ′′ ι ′′′ )<strong>le</strong> membre <strong>de</strong> droite <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te équation <strong>et</strong> en quelques lignes« cryptiques », il prétend que la variation secon<strong>de</strong> <strong>de</strong> la métrique :δδ ∑ b ι, ι ′ ds ι ds ι ′ − 2dδ ∑ b ι, ι ′ ds ι ds ι ′ + dd ∑ b ι, ι ′ δs ι δs ι ′peut être réécrite <strong>de</strong> façon à faire apparaître ces expressions à quatreindices :(II) = ∑ (ιι ′ , ι ′′ ι ′′′)( ds ι δs ι ′ − ds ι ′δs ι)(dsι ′′δs ι ′′′ − ds ι ′′′δs ι ′′).Plus encore, <strong>le</strong> quotient <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te expression par l’aire infinitésima<strong>le</strong> aucarré engendrée par ds <strong>et</strong> par δs :∑ (ιι ′ , ι ′′ ι ′′′)( )(ds ι δs ι ′ − ds ι ′δs ι dsι ′′δs ι ′′′ − ds ι ′′′δs ι ′′)(II) − 1 2∑bι, ι ′ ds ι ds ι ′∑ ( ∑ 2bι, ι ′ δs ι δs ι ′ − bι, ι ′ ds ι δs ι ′)est un invariant. Ces affirmations sont énoncées <strong>de</strong> manière tel<strong>le</strong>ment elliptique<strong>et</strong> sans aucune vérification que nous n’avons pas d’autre possibilitéque <strong>de</strong> nous imaginer que <strong>Riemann</strong> en contrôlait déjà parfaitementla justesse en dimension <strong>de</strong>ux, grâce aux travaux <strong>de</strong> Gauss, Minding,P<strong>et</strong>erson.89 Spivak [154] élabore cinq démonstrations distinctes <strong>de</strong> c<strong>et</strong> énoncé fondamental.Théorème. Si (M, g) est une variété riemannienne <strong>de</strong> dimension n 2, <strong>le</strong>s troisconditions suivantes sont équiva<strong>le</strong>ntes :• (M, g) est loca<strong>le</strong>ment isométrique à R n muni <strong>de</strong> la métrique euclidienne ;• toutes <strong>le</strong>s composantes A ijk l du tenseur <strong>de</strong> courbure s’annu<strong>le</strong>nt i<strong>de</strong>ntiquement ;• en tout point, la forme quadratique <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Christoffel s’annu<strong>le</strong> i<strong>de</strong>ntiquement;• en tout point, la courbure sectionnel<strong>le</strong> <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Gauss s’annu<strong>le</strong> suivant aumoins n(n−1)2directions superficiel<strong>le</strong>s indépendantes.


Chapitre 2 :La mobilité helmholtzienne <strong>de</strong> la rigidité2.1. Le problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. Dans <strong>le</strong> plan <strong>de</strong> son Habilitationsvortrag,après avoir exprimé son intention d’élaborer un conceptgénéral <strong>de</strong> multiplicité continue, <strong>Riemann</strong> annonce qu’il se préoccuperad’appliquer ces considérations abstraites à l’« espace ». Chez <strong>le</strong>sgéomètres du 19 ème sièc<strong>le</strong>, ce nom est strictement réservé à l’« espacephysique réel » tridimensionnel <strong>et</strong> euclidien.Rappelons notamment qu’au début <strong>de</strong>s années 1820, Gauss aété conduit à mesurer <strong>le</strong> très grand triang<strong>le</strong> géodésique (<strong>et</strong> terrestre)Brocken – Hohehagen – Inselberg dans la campagne du royaume <strong>de</strong>Hannovre afin <strong>de</strong> « tester » la nature euclidienne <strong>de</strong> l’espace physique([145, 147]). À c<strong>et</strong>te époque-là, Gauss venait d’être nommé conseil<strong>le</strong>rscientifique <strong>de</strong>s gouvernements <strong>de</strong> Hanovre (dont dépendait Göttingen)<strong>et</strong> du Danemark pour l’établissement géodésique du cadastre, <strong>et</strong> il étaitdéjà en p<strong>le</strong>ine possession <strong>de</strong> sa théorie (extrinsèque) <strong>de</strong>s surfaces. Aussi<strong>Riemann</strong> sait-il pertinemment que <strong>le</strong>s propriétés par <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s l’espacephysique se distingue <strong>de</strong> toute autre multiplicité abstraite à trois dimensionsne peuvent en eff<strong>et</strong> être empruntées qu’à l’expérience.De là surgit <strong>le</strong> problème <strong>de</strong> rechercher <strong>le</strong>s faits <strong>le</strong>s plus simp<strong>le</strong>s aumoyen <strong>de</strong>squels puissent s’établir <strong>le</strong>s rapports métriques <strong>de</strong> l’espace,problème qui, par la nature même <strong>de</strong> l’obj<strong>et</strong>, n’est pas complètementdéterminé ; car on peut indiquer plusieurs systèmes <strong>de</strong> faits simp<strong>le</strong>s,suffisants pour la détermination <strong>de</strong>s rapports métriques <strong>de</strong> l’espace.[133], p. 281.Ainsi, pour déci<strong>de</strong>r quel<strong>le</strong> est « la » géométrie <strong>de</strong> l’« espace », l’expérienceest susceptib<strong>le</strong> <strong>de</strong> trancher, mais à l’avance, par <strong>de</strong>s considérations<strong>de</strong> géométrie pure, on peut rechercher mathématiquement<strong>le</strong>s hypothèses <strong>le</strong>s plus naturel<strong>le</strong>s <strong>et</strong> <strong>le</strong>s plus simp<strong>le</strong>s qui puissentcaractériser complètement c<strong>et</strong>te notion d’« espace physique », notionqui semb<strong>le</strong> nous être donné dans l’évi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> son euclidéanité présente.C’est donc dans <strong>le</strong> passage cité à l’instant, extrait du plan <strong>de</strong>l’Habilitationsvortrag, qu’est formulé (implicitement) <strong>le</strong> célèbre :


52 2.2. Incomplétu<strong>de</strong>s riemanniennesProblème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz« Problème » <strong>et</strong> non « théorème », parce que ni <strong>Riemann</strong> ni Helmholtzne l’ont réel<strong>le</strong>ment résolu, ce problème <strong>de</strong>man<strong>de</strong> précisément parquel<strong>le</strong>s propriétés l’espace euclidien tridimensionnel muni <strong>de</strong> la métriquepythagoricienne pourrait être caractérisé parmi toutes <strong>le</strong>s géométriespossib<strong>le</strong>s. Mais au moment <strong>de</strong> sou<strong>le</strong>ver la question, <strong>Riemann</strong> étaitcertainement très loin <strong>de</strong> soupçonner l’incroyab<strong>le</strong> diversité <strong>de</strong>s géométriesque <strong>Sophus</strong> <strong>Lie</strong> allait découvrir par <strong>de</strong>s procédés algébriques uniformes,engendrant malgré lui, à la suite du fameux Programme d’Erlangen([86]), une prolifération <strong>de</strong> groupes <strong>et</strong> <strong>de</strong> sous-groupes <strong>de</strong> transformations(Chapitre 5).Le problème surgit <strong>de</strong> lui-même : nécessité sybilline, assertionméta-mathématique, vision d’une question adéquate. <strong>Riemann</strong>, commeon <strong>le</strong> sait, suit tous <strong>le</strong>s fils d’Ariane <strong>de</strong> l’ouverture. À la donationd’un sens univoque dans l’expérience physique du mon<strong>de</strong> répond doncla surrection articulée <strong>de</strong>s questionnements mathématiques purs. Faitd’« expérience mathématique » : <strong>le</strong>s hypothèses abstraites possib<strong>le</strong>s sontsoumises à la variation, à la diversité, à la multiplication, à la ramification,<strong>et</strong> à l’éclatement.Ces faits, comme tous <strong>le</strong>s faits possib<strong>le</strong>s, ne sont pas nécessaires; ils n’ont qu’une certitu<strong>de</strong> empirique, ce sont <strong>de</strong>s hypothèses.[133], p. 281.2.2. Incomplétu<strong>de</strong>s riemanniennes. Dans la troisième <strong>et</strong> <strong>de</strong>rnière partie<strong>de</strong> son Habilitationsvortrag, <strong>Riemann</strong> annonce en quelques lignesqu’il a complètement résolu 1 <strong>le</strong> problème <strong>de</strong> caractériser l’espace euclidienstandard parmi <strong>le</strong>s multiplicités à trois dimensions munies d’unemétrique quadratique infinitésima<strong>le</strong> définie positive.Première solution, la plus simp<strong>le</strong> <strong>et</strong> la plus économique sur <strong>le</strong> plandémonstratif : <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r que la mesure <strong>de</strong> courbure sectionnel<strong>le</strong> soitnul<strong>le</strong> 2 en tout point suivant trois directions <strong>de</strong> surface indépendantes 3 .1 Deux raisons ont convaincu <strong>le</strong>s mathématiciens <strong>de</strong>s années 1868 à 1890 que <strong>le</strong>problème n’était en fait pas complètement résolu : 1) <strong>le</strong>s assertions <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> n’ontjamais été suivies <strong>de</strong> démonstrations détaillées, même à titre posthume ; 2) <strong>le</strong>s raisonnements<strong>de</strong> Helmholtz étaient entachés d’erreurs <strong>et</strong> d’imprécisions mathématiques.2 Cf. <strong>le</strong> § 1.20 ci-<strong>de</strong>ssus.3 À notre connaissance, l’examen du Nachlass n’a fourni aucun document exploitab<strong>le</strong>qui perm<strong>et</strong>te aux historiens <strong>de</strong>s mathématiques <strong>de</strong> se faire une idée <strong>de</strong>s démonstrations<strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>. Contemporain <strong>de</strong> K<strong>le</strong>in, <strong>le</strong> bibliothécaire Distel <strong>de</strong> l’université<strong>de</strong> Göttingen savait en revanche que <strong>le</strong> Nachlass contenait <strong>de</strong>s notes intéressantes surla théorie <strong>de</strong>s nombres <strong>et</strong> sur la distribution <strong>de</strong>s zéros <strong>de</strong> la fonction z<strong>et</strong>a <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>,


Chapitre 2. La mobilité helmholtzienne <strong>de</strong> la rigidité 53Autrement dit, l’espace est loca<strong>le</strong>ment euclidien si <strong>et</strong> seu<strong>le</strong>ment si sacourbure riemannienne s’annu<strong>le</strong> i<strong>de</strong>ntiquement. Dans ce cas, <strong>le</strong> théorème<strong>de</strong> Pythagore est alors satisfait pour tous <strong>le</strong>s triang<strong>le</strong>s rectang<strong>le</strong>s finissitués dans n’importe quel<strong>le</strong> surface tota<strong>le</strong>ment géodésique, <strong>et</strong> aussi,la somme <strong>de</strong>s ang<strong>le</strong>s <strong>de</strong> tout triang<strong>le</strong> quelconque est éga<strong>le</strong> à π.Deuxième « solution » : <strong>Riemann</strong> affirme que l’existence d’ungroupe <strong>de</strong> mouvements isométriques qui perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> transférer un élément<strong>de</strong> surface quelconque basé en un point vers un autre élément<strong>de</strong> surface quelconque situé en un autre point arbitraire implique laconstante <strong>de</strong> la mesure <strong>de</strong> courbure sectionnel<strong>le</strong>.Si l’on suppose, en second lieu, comme Eucli<strong>de</strong>, une existenceindépendante <strong>de</strong> la position, non seu<strong>le</strong>ment pour <strong>le</strong>s lignes, mais encorepour <strong>le</strong>s corps, il s’ensuit que la mesure <strong>de</strong> courbure est partoutconstante, <strong>et</strong> alors la somme <strong>de</strong>s ang<strong>le</strong>s est déterminée dans tous <strong>le</strong>striang<strong>le</strong>s, lorsqu’el<strong>le</strong> l’est dans un seul. [133], p. 294.L’argument intuitif est simp<strong>le</strong> : un corp rigi<strong>de</strong> bidimensionnel maxima<strong>le</strong>mentmobi<strong>le</strong> suffira pour propager partout dans la multiplicité lacourbure sectionnel<strong>le</strong> qu’il possè<strong>de</strong>. Toutes <strong>le</strong>s surfaces géodésiques entout point orientées dans toute direction ont la même courbure : la courbureest constante. Alors dans c<strong>et</strong>te circonstance <strong>et</strong> dans <strong>de</strong>s coordonnéesgéodésiques norma<strong>le</strong>s adéquates 4 , <strong>Riemann</strong> représente la métriquepar une formu<strong>le</strong> (déjà mentionnée) invariante symétrique par rapport àtoutes <strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s :ds 2 =dx 2 1 + · · · + dx2 n[1 +κ4 (x2 1 + · · · + x2 n )] 2 ,définie par ζ(s) = ∑ n1 1 npour Re s > 1 <strong>et</strong> que <strong>Riemann</strong> avait introduite dans l’espoir<strong>de</strong> démontrer que <strong>le</strong> nombre <strong>de</strong>s nombres premiers inférieurs à un entier n 2sse comporte asymptotiquement comme log nn, ou mieux encore (Gauss), comme <strong>le</strong> logarithmeintégral ∫ n 12 log xdx. En 1932, après <strong>de</strong>s tentatives <strong>de</strong> Bessel-Hagen, Siegela étudié soigneusement ces notes manuscrites <strong>et</strong> il en a réorganisé <strong>le</strong> contenu dansun mémoire <strong>de</strong> refonte généra<strong>le</strong> [149]. Toutefois, d’après Siegel : « In <strong>Riemann</strong>s Aufzeichnungenzur Theorie <strong>de</strong>r Z<strong>et</strong>afunktion fin<strong>de</strong>n sich nirgendwo druckfertige Stel<strong>le</strong>n; mitunter stehen zusammenhanglose Formeln auf <strong>de</strong>mselben Blatt ; häufig ist vonG<strong>le</strong>ichungen nur eine Seite hingeschrieben ; st<strong>et</strong>s feh<strong>le</strong>n Restabschätzungen und Konvergenzuntersuchungen,auch an wesentlichen Punkten ».4 Dans [170], Weyl a reconstitué <strong>le</strong>s calculs qui auraient pu conduire <strong>Riemann</strong> àc<strong>et</strong>te expression.


54 2.3. Rendre objectives <strong>le</strong>s propriétés <strong>de</strong> la géométriedans laquel<strong>le</strong> κ est une constante réel<strong>le</strong>, que l’on peut même supposeraprès dilatation être éga<strong>le</strong> à −1 (géométrie hyperbolique), à 0 (géométrieeuclidienne) ou à 1 (géométrie sphérique). Dans un autre passage,<strong>Riemann</strong> fournit quelques explications.Le caractère commun <strong>de</strong> ces variétés dont la mesure <strong>de</strong> courbureest constante, peut aussi être exprimé en disant que <strong>le</strong>s figures peuventse mouvoir 5 sans élargissement [Dehnung] en el<strong>le</strong>s. Car il est évi<strong>de</strong>ntque <strong>le</strong>s figures en el<strong>le</strong>s ne pourraient pas coulisser [verschiebar sein] <strong>et</strong>pivoter [drehbar sein] librement, si la mesure <strong>de</strong> courbure n’était pas lamême en chaque point <strong>et</strong> dans toutes <strong>le</strong>s directions. Mais d’autre part,<strong>le</strong>s rapports métriques <strong>de</strong> la variété sont complètement déterminés parla mesure <strong>de</strong> courbure ; donc <strong>le</strong>s rapports métriques autour d’un point<strong>et</strong> dans toutes <strong>le</strong>s directions sont exactement <strong>le</strong>s mêmes qu’autour d’unautre point, <strong>et</strong> par conséquent, à partir <strong>de</strong> ce premier point, <strong>le</strong>s mêmesconstructions peuvent être transférées, d’où il s’ensuit que, dans <strong>le</strong>svariétés dont la mesure <strong>de</strong> courbure est constante, on peut donner auxfigures chaque position quelconque. [133], p. 281.Toutefois, au-<strong>de</strong>là du niveau intuitif, la conceptualisation mathématiquerigoureuse <strong>de</strong> ces affirmations <strong>de</strong>meure essentiel<strong>le</strong>ment problématiquepour <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> pour <strong>Lie</strong>. <strong>Riemann</strong> semb<strong>le</strong> exprimer que l’exigenced’après laquel<strong>le</strong> la mesure <strong>de</strong> courbure doit être partout constantepossè<strong>de</strong> la même signification que certaines exigences concernant lamobilité <strong>de</strong>s figures. Dans un premier temps, <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> cherchent àrestituer l’enchaînement <strong>de</strong>s idées <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> d’une manière quelquepeu plus précise, « quoique non absolument précise », ajoutent-t-ils immédiatement.<strong>Riemann</strong> cherche, parmi <strong>le</strong>s variétés dont la longueur d’un élémentcourbe a la forme (5), toutes cel<strong>le</strong>s dans <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s figurespeuvent occuper chaque position quelconque, c’est-à-dire, dans <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s<strong>le</strong>s figures peuvent coulisser <strong>et</strong> tourner, sans subir d’élargissement.Il parvient à ce résultat que <strong>le</strong>s variétés dont la mesure <strong>de</strong>courbure est constante en tous lieux sont <strong>le</strong>s seu<strong>le</strong>s dans <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s <strong>le</strong>sfigures sont mobi<strong>le</strong>s <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te manière.p. 280 ci-<strong>de</strong>ssous.Plusieurs problèmes <strong>de</strong> conceptualisation se <strong>de</strong>ssinent donc : Qu’estceque <strong>le</strong> « mouvement » ? Qu’entend-on par « figures » ? Que veutdire « coulisser » ? Que veut dire « tourner » ? Que veut dire « sanssubir d’élargissement » ? C’est <strong>le</strong> physicien al<strong>le</strong>mand Hermann vonHelmholtz qui va tenter en 1868 <strong>de</strong> donner un sens mathématique précisà ces notions intuitives.5 Note <strong>de</strong> <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> : « Ici à vrai dire, <strong>Riemann</strong> aurait même dû ajouter <strong>le</strong> mot‘librement’ ».


Chapitre 2. La mobilité helmholtzienne <strong>de</strong> la rigidité 552.3. Rendre objectives <strong>le</strong>s propositions <strong>de</strong> la géométrie. Selon <strong>Lie</strong> 6 , <strong>le</strong>mérite principal <strong>de</strong> Helmholtz par rapport à <strong>Riemann</strong> est d’avoir expressémentconstruit la géométrie en stipulant un certain nombre d’axiomes(non problématisants) qui se rapportent à <strong>de</strong>s col<strong>le</strong>ctions <strong>de</strong> points finimentéloignés <strong>le</strong>s uns <strong>de</strong>s autres, sans utiliser la notion d’élémentd’arc infinitésimal, <strong>et</strong> sans adm<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> pouvoir disposer <strong>de</strong> la théorie<strong>de</strong> l’intégration. Autre mérite <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te métho<strong>de</strong> neuve : Helmholtz est<strong>le</strong> premier à avoir opéré avec la famil<strong>le</strong> <strong>de</strong>s mouvements <strong>de</strong> l’espace(à trois dimensions), tout en l’interprétant comme famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> transformations<strong>de</strong> la variété numérique sous-jacente. On trouve en eff<strong>et</strong> chezHelmholtz <strong>le</strong>s tous premiers concepts embryonnaires pour l’édificationd’une théorie mathématique <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong> mouvements dans l’espace,<strong>et</strong> il est très probab<strong>le</strong> que son mémoire a été la pierre angulaire d’inspiration,<strong>de</strong> motivation, <strong>et</strong> <strong>de</strong> problématisation lorsque, <strong>de</strong>ux ou trois annéesplus tard, K<strong>le</strong>in <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> collaborèrent à l’élaboration du Programmed’Erlangen ([86])Fortement stimulé par la publication posthume très récente <strong>de</strong>l’Habilitationsvortrag <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> 7 , Helmholtz déclare dans son mémoire[73] <strong>de</strong> juin 1868 qu’il conduit en privé <strong>de</strong>puis <strong>de</strong> nombreusesannées <strong>de</strong>s réf<strong>le</strong>xions techniques sur la notion d’« espace ». Il se féliciteaussi <strong>de</strong> trouver comme compagnon <strong>de</strong> pensée, dans ces investigationsdélicates sur <strong>le</strong>s fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> la géométrie, un mathématicien <strong>de</strong> l’envergure<strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>, <strong>et</strong> il propose <strong>de</strong> présenter à la königlische Gesellschaft<strong>de</strong>r Wissenschaften zu Göttingen un système alternatif d’axiomesafin <strong>de</strong> développer une autre vision du problème mathématique <strong>de</strong> l’espace.Pour Helmholtz qui a travaillé sur la physiologie <strong>et</strong> l’anatomie <strong>de</strong>l’œil, la question <strong>de</strong> l’origine <strong>et</strong> <strong>de</strong> la nature essentiel<strong>le</strong> <strong>de</strong> nos intuitionsgénéra<strong>le</strong>s <strong>de</strong> l’espace est primordia<strong>le</strong>. Plus précisément, il s’agit<strong>de</strong> déterminer dans quel<strong>le</strong> mesure <strong>le</strong>s propositions <strong>de</strong> la géométrie possè<strong>de</strong>ntun sens qui est objectivement vali<strong>de</strong>. Et à l’opposé, il s’agit <strong>de</strong>savoir aussi quel<strong>le</strong> est la fraction <strong>de</strong>s définitions <strong>et</strong> <strong>de</strong>s conséquences<strong>de</strong>s définitions qui dépend seu<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> l’abstraction <strong>de</strong>s <strong>de</strong>scriptionsmathématiques. Ces <strong>de</strong>ux questions helmholtziennes ne peuvent certainementpas recevoir <strong>de</strong> réponse simp<strong>le</strong>, car il y a un cerc<strong>le</strong> mystérieux6 En parallè<strong>le</strong>, <strong>le</strong> <strong>le</strong>cteur pourra découvrir <strong>le</strong>s Remarques préliminaires à la DivisionV, traduites en français p. 159 sq. ci-<strong>de</strong>ssous.7 En fait, il obtint une copie <strong>de</strong>s notes manuscrites que Schering avait prises sur<strong>le</strong> travail <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>. Schering s’est vu attribuer la chaire <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> en 1866.


56 2.3. Rendre objectives <strong>le</strong>s propriétés <strong>de</strong> la géométrie<strong>de</strong> correspondances intuitives entre <strong>le</strong>s représentations idéa<strong>le</strong>s <strong>de</strong>s obj<strong>et</strong>sgéométriques purs <strong>et</strong> <strong>le</strong>ur portrait physique approximatif, imparfait<strong>et</strong> défectueux.En tout cas pour Helmholtz — que l’on a pu considérer commerésolument empiriste ([33, 34]) —, notre intuition archaïque, concrète,évi<strong>de</strong>nte <strong>et</strong> profondément non problématique <strong>de</strong>s obj<strong>et</strong>s dans <strong>le</strong> mon<strong>de</strong>physique doit être incarnée fidè<strong>le</strong>ment dans <strong>le</strong>s sytèmes axiomatiques<strong>de</strong> la géométrie pure. Le point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> Helmholtz est donc celui d’unpenseur universel <strong>de</strong>s sciences expérimenta<strong>le</strong>s qui adm<strong>et</strong> <strong>de</strong>ux faits fondamentauxtransmis par l’expérience :1) la mesure <strong>de</strong> l’espace est <strong>et</strong> ne peut être basée que sur l’observation<strong>de</strong> congruences entre <strong>de</strong>s obj<strong>et</strong>s 8 ;2) toute forme <strong>de</strong> congruence <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pour son effectuation qu’i<strong>le</strong>xiste <strong>de</strong>s corps rigi<strong>de</strong>s, fixes en eux-mêmes, <strong>et</strong> qu’on puisse <strong>le</strong>s déplacercomme <strong>de</strong>s règ<strong>le</strong>s sans qu’ils changent ni <strong>de</strong> forme, ni <strong>de</strong> longueur 9 .L’espace ubiquitaire est comme <strong>le</strong> milieu terrestre : baigné d’une atmosphèreinvisib<strong>le</strong>, il n’oppose en principe aucune résistance à la libre mobilité<strong>de</strong>s règ<strong>le</strong>s mesurantes. Corps mesurant <strong>et</strong> corps mesuré sont structurel<strong>le</strong>menthomologues, voire interchangeab<strong>le</strong>s. Dans ce mon<strong>de</strong> homogène<strong>de</strong> corps rigi<strong>de</strong>s, l’essence fondamenta<strong>le</strong> est la distance ; c’est aussiun principe d’équiva<strong>le</strong>nce ontologique.8 Par mise en congruence, il faut entendre tout procédé concr<strong>et</strong> par <strong>le</strong>quel <strong>le</strong>s<strong>de</strong>ux extrémités d’un obj<strong>et</strong>-étalon sont placées en coïnci<strong>de</strong>nce avec une paire <strong>de</strong> pointsrepérab<strong>le</strong>s sur l’obj<strong>et</strong> à mesurer ; ensuite si nécessaire, l’étalon invariab<strong>le</strong> <strong>de</strong> mesuredoit être reporté jusqu’à épuisement <strong>de</strong> l’extension <strong>de</strong> l’obj<strong>et</strong>, un certain nombre <strong>de</strong>fois en fonction <strong>de</strong> la tail<strong>le</strong> <strong>de</strong> l’obj<strong>et</strong>. Lorsque la longueur cherchée n’est pas unmultip<strong>le</strong> entier <strong>de</strong> l’obj<strong>et</strong>-règ<strong>le</strong> utilisé, graduations <strong>et</strong> subdivisions complètent alors<strong>le</strong> défaut restant. L’horizon microscopique borne rapi<strong>de</strong>ment l’effort <strong>de</strong> raffinementdans la mesure. Helmholtz affirme donc clairement que l’ontologie sous-jacente aumesurab<strong>le</strong> repose sur l’équiva<strong>le</strong>nce, sur la comparaison, sur la sommation finie <strong>et</strong> surla (sub)division. Le caractère archimédien <strong>de</strong> l’espace physique provient <strong>de</strong> ce qu’ilhéberge <strong>de</strong>s essences rigi<strong>de</strong>s arithmétisantes.9 Sinon, si <strong>de</strong>s corps mobi<strong>le</strong>s <strong>de</strong>vaient nécessairement changer <strong>de</strong> longueur lorsqu’ilssont déplacés d’un lieu vers un autre — la modification <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur longueur pouvantd’ail<strong>le</strong>urs même a priori dépendre du chemin qu’on <strong>le</strong>ur fait emprunter —, il seraitabsolument impossib<strong>le</strong> <strong>de</strong> par<strong>le</strong>r d’une longueur comme résultat invariab<strong>le</strong> d’unepluralité <strong>de</strong> mesures. « Les axiomes géométriques ne concernent pas <strong>le</strong>s relations spatia<strong>le</strong>sper se, mais ils impliquent aussi <strong>le</strong> comportement mécanique <strong>de</strong> nos corps <strong>le</strong>splus rigi<strong>de</strong>s lorsqu’ils sont déplacés » (cité p. 531 <strong>de</strong> [34]).


Chapitre 2. La mobilité helmholtzienne <strong>de</strong> la rigidité 57On a donc affaire à une théorie essentiel<strong>le</strong>ment active <strong>de</strong> la mesurequi semb<strong>le</strong> s’imaginer comme absolument nécessaire un suj<strong>et</strong> porteurmuni <strong>de</strong> règ<strong>le</strong>s <strong>et</strong> <strong>de</strong> régl<strong>et</strong>tes, forcé <strong>de</strong> parcourir l’espace, <strong>de</strong>puisses dimensions microscopiques jusqu’à ses dimensions astronomiques,afin <strong>de</strong> s’assurer par <strong>de</strong>s moyens rigoureusement élémentaires que <strong>le</strong>sdistances relatives entre certains villages, que la superficie d’un appartement,que <strong>le</strong>s dimensions d’un meub<strong>le</strong> à la vente, ou cel<strong>le</strong>s d’une boîteà bijoux, sont exactes au mètre près, au centimètre près, au millimètreprès 10 .Argument surprenant s’il en est : Helmholtz écarte la rectilinéarité<strong>de</strong>s rayons <strong>de</strong> lumière comme principe <strong>de</strong> référence pour la mesure,parce que <strong>le</strong>s aveug<strong>le</strong>s à qui <strong>le</strong>s vérités <strong>de</strong> la géométrie sont bienconnues n’ont accès qu’aux congruences.Donc je suppose dès <strong>le</strong> début que la mesure <strong>de</strong> l’espace soit possib<strong>le</strong>par <strong>de</strong>s congruences déterminées <strong>et</strong> je me propose comme but latâche <strong>de</strong> rechercher la forme analytique la plus généra<strong>le</strong> d’une variétémultip<strong>le</strong>ment étendue dans laquel<strong>le</strong> soient possib<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s mouvementsayant la constitution ainsi <strong>de</strong>mandée. [76], p. 41.En fait, Helmholtz délimite pour ses recherches un objectif encore plusciblé, moins susceptib<strong>le</strong> <strong>de</strong> l’exposer à l’inattendu mathématique : ilcherche en eff<strong>et</strong> à formu<strong>le</strong>r <strong>de</strong>s hypothèses physiquement évi<strong>de</strong>ntes(qu’on appel<strong>le</strong>rait aujourd’hui axiomes) afin <strong>de</strong> r<strong>et</strong>rouver seu<strong>le</strong>mentl’espace euclidien tridimensionnel comme concept compris sous <strong>de</strong> telsaxiomes. Approche axiomatique ou recherche d’un théorème d’unicité ?L’ambiguïté est réel<strong>le</strong>, d’autant plus que la mise au point d’hypothèsesspécifiques qui impliquent l’euclidéanité sera complètement absorbée10 Ce point vue qui s’imagine une universalisation possib<strong>le</strong> <strong>de</strong> l’empiricité archaïqueest à distinguer n<strong>et</strong>tement du point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>, pour <strong>le</strong>quel la métriqueest intrinsèquement donnée dans l’infinitésimal <strong>et</strong> ne nécessite aucun parcours,ni même aucun acte <strong>de</strong> mesure — si ce n’est pour estimer mathématiquement,par intégration, la longueur d’une ligne courbe finie — puisque chaquedifférentiel<strong>le</strong> infinitésima<strong>le</strong> dx est d’emblée accompagnée <strong>de</strong> sa longueur attitrée( ∑ ni,j=1 g ) 1/2.ij(x)dx i dx j Point crucial : aucun déplacement <strong>de</strong> corps ou <strong>de</strong> régl<strong>et</strong>ten’est requis. Plus précisément : dans toute métrique riemannienne ou finslérienne,l’essence métrique est déjà décalquée sur l’étendue comme <strong>le</strong> serait une infinitéd’étiqu<strong>et</strong>tes millimétriques disposées en tout point, <strong>et</strong> dans toutes <strong>le</strong>s directionsissues d’un point. Mariage entre l’intrinsèque pur <strong>et</strong> <strong>le</strong> champ physique possib<strong>le</strong> : « Ilfaut donc, ou que la réalité sur laquel<strong>le</strong> est fondé l’espace forme une variété discrète,ou que <strong>le</strong> fon<strong>de</strong>ment <strong>de</strong>s rapports métriques soit cherché en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> lui, dans <strong>le</strong>sforces <strong>de</strong> liaison qui agissent en lui » ([133], p. 297).


58 2.4. Les quatre axiomes <strong>de</strong> Helmholtzpar la théorie <strong>de</strong>s groupes continus, qui montrera comment l’engendrementdu divers débor<strong>de</strong> l’ontologie naïve <strong>de</strong>s unicités initia<strong>le</strong>mentespérées (cf. <strong>le</strong> Chapitre 20 p. 166 ci-<strong>de</strong>ssous).2.4. Les quatre axiomes <strong>de</strong> Helmholtz. Helmholtz reconnaît que sonapproche qui consiste à introduire d’emblée la restriction <strong>de</strong> libre mobilité<strong>de</strong> corps rigi<strong>de</strong>s dans l’espace embrasse beaucoup moins <strong>de</strong>concepts que l’analyse problématisante <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> (cf. <strong>le</strong> Chapitre 1).Toutefois, il semb<strong>le</strong> être embarrassé par l’extrême généralité <strong>de</strong>s considérationsabstraites <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>, qu’il préfère envisager comme un<strong>et</strong>entative <strong>de</strong> caractériser l’espace euclidien tridimensionnel en recherchant<strong>le</strong>s meil<strong>le</strong>ures hypothèses suffisantes. Ainsi a-t-il étudié <strong>de</strong> prèsla restriction fina<strong>le</strong> <strong>de</strong> mobilité introduite par <strong>Riemann</strong> pour distinguerl’espace physique <strong>de</strong>s autres multiplicités possib<strong>le</strong>s, <strong>et</strong> il s’est interrogésur la possibilité <strong>de</strong> placer au fon<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> la géométrie ce qu’ilconsidérait comme la conclusion principa<strong>le</strong> <strong>de</strong> la <strong>le</strong>çon d’épreuve <strong>de</strong><strong>Riemann</strong>, à savoir : <strong>le</strong>s propriétés <strong>de</strong> libre mobilité dont <strong>Riemann</strong> prétendaitqu’el<strong>le</strong>s impliquent la constance <strong>de</strong> la courbure sectionnel<strong>le</strong>.En renversant complètement l’ordre <strong>de</strong> pensée riemannien 11 , Helmholtzprocè<strong>de</strong> donc presque d’une manière purement axiomatique au sensmo<strong>de</strong>rne du terme. Car en eff<strong>et</strong>, au début <strong>de</strong> son mémoire [76], quatre« axiomes » concernant la notion d’espace 12 , sont explicitement formulés<strong>et</strong> admis comme hypothèses dans <strong>le</strong>s démonstrations qui suivent.I : Axiome <strong>de</strong> multiplicité numérique <strong>et</strong> <strong>de</strong> continuité <strong>de</strong>smouvements. Les éléments individuels (points) d’une multiplicité à ndimensions peuvent être spécifiés par la mesure 13 <strong>de</strong> exactement n gran<strong>de</strong>ursnumériques réel<strong>le</strong>s (x 1 , . . .,x n ). Le mouvement d’un point est représentépar une modification continue, <strong>et</strong> même suffisamment différentiab<strong>le</strong>si nécessaire, <strong>de</strong> ses coordonnées. Tout est essentiel<strong>le</strong>ment local,11 Chercher dans l’ouverture, c’est s’é<strong>le</strong>ver dans un arbre exponentiel truffé <strong>de</strong>branchements imprévus <strong>et</strong> <strong>de</strong> bifurcations indécises. Prendre connaissance <strong>de</strong> véritéspar l’axiomatique a posteriori, c’est <strong>de</strong>scendre sans choix dans <strong>de</strong>s branches quicanalisent la pensée.12 En parallè<strong>le</strong>, <strong>le</strong> <strong>le</strong>cteur pourra découvrir la traduction complète en français<strong>de</strong> ces axiomes, reproduits par <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> dans <strong>le</strong> § 91 du Chapitre 21, p. 221 ci<strong>de</strong>ssous; ensuite, <strong>le</strong> § 92 p. 223 en offre une formulation mathématique très précise.13 Chez Helmholtz ([34]), <strong>le</strong>s coordonnées ont un sens métrique : el<strong>le</strong>s sont d’embléeaccompagnées d’un étalon d’unité <strong>de</strong> mesure qui est représenté par la quantité1.


Chapitre 2. La mobilité helmholtzienne <strong>de</strong> la rigidité 59implicitement plongé dans R n , sans phénomène topologique, sans discontinuité,sans condition au bord, sans contrainte spécifique. L’étu<strong>de</strong><strong>de</strong>s exceptions est potentiel<strong>le</strong>ment réservée à <strong>de</strong>s analyses ultérieures.II : Axiome <strong>de</strong> l’existence <strong>de</strong>s corps rigi<strong>de</strong>s mobi<strong>le</strong>s. C<strong>et</strong>axiome exprime l’idée nouvel<strong>le</strong> principa<strong>le</strong> <strong>de</strong> Helmhotz. Pour que l’espacesoit physiquement mesurab<strong>le</strong>, on présuppose l’existence <strong>de</strong> systèmes<strong>de</strong> points rigi<strong>de</strong>s en eux-mêmes, <strong>et</strong> néanmoins susceptib<strong>le</strong>s d’êtredéplacés (axiome III) :mobilité <strong>de</strong> la rigidité.Mais quel<strong>le</strong> est ici la définition mathématique précise <strong>de</strong> la « rigidité » ?Impossib<strong>le</strong> <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r qu’il s’agisse d’une distance, au sens euclidienou métrique du terme, puisque c’est justement l’euclidéanité loca<strong>le</strong> queHelmholtz cherche à démontrer à partir d’axiomes abstraits <strong>et</strong> naturels.Herméneutique indécise <strong>de</strong> la position d’hypothèses, ou nécessité<strong>de</strong> réaliser une assomption en généralité pour engendrer <strong>de</strong>s essenceshypothétiques d’ordre supérieur : il faut donc formu<strong>le</strong>r un axiome quine <strong>de</strong>man<strong>de</strong> presque rien d’explicite, <strong>et</strong> qui s’inscrive a priori dans untrès grand univers <strong>de</strong> potentialités mathématiques.L’espoir, via une démonstration synthétique éventuel<strong>le</strong>mentlongue <strong>et</strong> diffici<strong>le</strong>, est <strong>de</strong> se persua<strong>de</strong>r qu’une notion très archaïque <strong>de</strong>« stabilité-rigidité » dans <strong>le</strong> mouvement redonnera cel<strong>le</strong> qui semb<strong>le</strong> laplus naturel<strong>le</strong>ment transmise dans l’expérience physique, à savoir larigidité euclidienne. On est en p<strong>le</strong>ine exploration métaphysique <strong>de</strong>sconditions d’aprioricité du savoir physico-mathématique. On rechercheen quelque sorte <strong>de</strong>s signes qui confirmeraient l’existence <strong>de</strong> véritésprofon<strong>de</strong>s (<strong>et</strong> vraisemblab<strong>le</strong>ment cachées), <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s vérités profon<strong>de</strong>spourraient répondre à la question très importante d’un « pourquoi »,à savoir : « Pourquoi l’espace physique est-il tridimensionnel <strong>et</strong> euclidien» ? Avec son hypothèse <strong>de</strong> corps rigi<strong>de</strong>s, Helmholtz recherchedonc un « parce que » qui s’élève plus haut dans l’échel<strong>le</strong> métaphysiquequ’une simp<strong>le</strong> confirmation expérimenta<strong>le</strong> basée sur <strong>de</strong>s mesuresmicroscopiques ou sur <strong>de</strong>s mesures astronomiques.La définition <strong>de</strong> Helmholtz est à la fois intuitive <strong>et</strong> très généra<strong>le</strong> :il doit exister une certaine fonction à <strong>de</strong>ux arguments qui est définiesur la totalité <strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>s paires <strong>de</strong> points appartenant au corps rigi<strong>de</strong><strong>et</strong> qui satisfait la propriété d’invariance suivante : pour toute paire <strong>de</strong>points fixée à l’avance, la va<strong>le</strong>ur <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te fonction sur <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux pointsen question <strong>de</strong>vra rester invariab<strong>le</strong> au cours <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s mouvementspossib<strong>le</strong>s (axiome III) du corps en question.


60 2.4. Les quatre axiomes <strong>de</strong> HelmholtzPlus encore que dans la théorie gaussienne <strong>de</strong>s formes quadratiquesà coefficients entiers, ou dans la théorie galoisienne <strong>de</strong>s substitutions<strong>de</strong> racines, c’est vraiment dans l’univers <strong>de</strong>s mouvements continusphysico-mathématiques que l’Idée métaphysique d’invariance trouveson origine la plus profon<strong>de</strong>. <strong>Lie</strong> conceptualisera c<strong>et</strong>te Idée dominatricedans <strong>de</strong> nombreuses branches <strong>de</strong> sa théorie <strong>de</strong>s groupes continus (équationinvariante ; système d’équations aux dérivées partiel<strong>le</strong>s invariantes ;algèbres classifiantes d’invariants différentiels) en plaçant <strong>le</strong> concept àun très haut niveau d’abstraction : l’invariant peut être une fonction arbitraire,réel<strong>le</strong> ou comp<strong>le</strong>xe, souvent d’un très grand nombre d’arguments.Et dans <strong>le</strong>s diverses solutions au problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz qu’i<strong>le</strong>xpose avec <strong>Engel</strong>, <strong>Lie</strong> formu<strong>le</strong>ra la notion d’invariant 14 , sans aucuneréférence implicite à la notion <strong>de</strong> distance : pas <strong>de</strong> va<strong>le</strong>urs positives, pasd’inégalité du triang<strong>le</strong>.Plus encore, <strong>Lie</strong> extraira <strong>de</strong> c<strong>et</strong> axiome helmholtzien plusieursprésuppositions implicites situées à l’interface entre l’axiome II <strong>et</strong>l’axiome III, <strong>et</strong> que Helmholtz déduisait à tort <strong>de</strong> ses axiomes incomplètementformulés : 1) l’invariant doit être non dégénéré ; 2) lorsqu’onfixe plusieurs points en position généra<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s équations d’invariance relativementà ces points doivent être mutuel<strong>le</strong>ment indépendantes ; 3) <strong>le</strong>sinvariants <strong>de</strong> toute col<strong>le</strong>ction <strong>de</strong> s > 2 points se déduisent <strong>de</strong>s invariantsentre paires <strong>de</strong> points, c’est-à-dire : il n’y a pas d’autres invariants queceux qui existent entre <strong>le</strong>s paires <strong>de</strong> points.III : Axiome <strong>de</strong> libre mobilité <strong>de</strong>s corps rigi<strong>de</strong>s. En s’inspirant<strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> 15 , Helmholtz <strong>de</strong>man<strong>de</strong> que <strong>le</strong>s corps rigi<strong>de</strong>s puissent êtredéplacés continûment en tout lieu 16 , c’est-à-dire qu’un point quelconquespécifié à l’avance dans un corps rigi<strong>de</strong> peut être transféré vers tout autrepoint <strong>de</strong> l’espace au moyen d’au moins un mouvement continu qui déplace<strong>le</strong> corps dans son intégalité tout en respectant sa rigidité interne.14 Voir l’équation (3) au début du Chapitre 20 <strong>et</strong> aussi la condition C) p. 236).15 Voir la citation p. 53.16 C<strong>et</strong>te condition est suffisante pour l’effectuation <strong>de</strong> mesures physiques auniveau macroscopique. Toutefois, <strong>de</strong> nombreux commentateurs (cf. par exemp<strong>le</strong>[76, 33, 34]) ont insisté sur <strong>le</strong> fait que seu<strong>le</strong> la mobilité <strong>de</strong> règl<strong>et</strong>tes unidimensionnel<strong>le</strong>s,<strong>et</strong> non la mobilité <strong>de</strong> corps rigi<strong>de</strong>s arbitraires, peut être invoquée comme physiquementnécessaire pour effectuer <strong>de</strong>s mesures <strong>de</strong> distance dans <strong>le</strong> mon<strong>de</strong>. Ce point<strong>de</strong> vue laisse néanmoins complètement <strong>de</strong> côté la question <strong>de</strong> savoir ce qu’il faut entendreabstraitement par un déplacement <strong>de</strong> régl<strong>et</strong>tes, <strong>et</strong> semb<strong>le</strong> s’en rem<strong>et</strong>tre tropaisément à une intuition approximative <strong>de</strong> l’arpentage. Seu<strong>le</strong> la théorie abstraite <strong>de</strong>sgroupes continus <strong>de</strong> transformations conceptualise <strong>le</strong>s mouvements possib<strong>le</strong>s <strong>de</strong>s figures,qu’el<strong>le</strong>s soient règ<strong>le</strong>s ou corps, finies ou infinitésima<strong>le</strong>s.


Chapitre 2. La mobilité helmholtzienne <strong>de</strong> la rigidité 61Si l’on fait abstraction <strong>de</strong>s conditions aux limites <strong>et</strong> <strong>de</strong>s discontinuitéséventuel<strong>le</strong>s, <strong>le</strong>s seu<strong>le</strong>s contraintes qui pourraient faire obstac<strong>le</strong> au mouvementne peuvent provenir que <strong>de</strong>s équations qui sont formées avec lafonction invariante entre paires <strong>de</strong> points, par exemp<strong>le</strong> si l’on <strong>de</strong>man<strong>de</strong>qu’un, ou <strong>de</strong>ux, ou trois points, ou plus, du corps rigi<strong>de</strong> restent entièrementfixés au cours du mouvement. <strong>Ens</strong>uite, Helmholtz entreprend<strong>de</strong> « démontrer 17 » que <strong>le</strong>s mouvements d’un corps rigi<strong>de</strong> comprennentexactement n(n+1) <strong>de</strong>grés <strong>de</strong> liberté, <strong>et</strong> donc notamment 6 dans <strong>le</strong> cas2<strong>de</strong> l’espace physique euclidien (translations : 3 paramètres ; rotations :3 paramètres).Paradoxe : la notion <strong>de</strong> corps rigi<strong>de</strong> continu comprenant une infinité<strong>de</strong> points en cohésion n’est donc pas p<strong>le</strong>inement utilisée dans cesraisonnements. Six points au maximum sont à distinguer. En tout cas,<strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> démontreront rigoureusement c<strong>et</strong> énoncé sur <strong>le</strong> nombren(n+1)<strong>de</strong> <strong>de</strong>grés <strong>de</strong> liberté, en analysant finement <strong>le</strong>s hypothèses qui2étaient implicites dans <strong>le</strong>s axiomes II <strong>et</strong> III. Par ail<strong>le</strong>urs, en supposantbeaucoup moins que Helmholtz 18 , <strong>le</strong> Chapitre 20 p. 166 ci-<strong>de</strong>ssous commencerapar une étu<strong>de</strong> purement abstraite <strong>de</strong>s groupes continus <strong>de</strong> transformationspour <strong>le</strong>squels <strong>de</strong>ux points ont un, <strong>et</strong> un seul invariant, tandisque s > 2 points n’ont pas d’autre invariant que ceux qui se déduisent<strong>de</strong>s paires <strong>de</strong> points qui sont contenus en eux, <strong>et</strong> cela, d’abord dans <strong>le</strong>domaine comp<strong>le</strong>xe, puis dans <strong>le</strong> domaine réel. C<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong> abstraite extrêmementrecherchée sur <strong>le</strong> plan mathématique repose sur un très grandnombre <strong>de</strong> résultats contenus dans <strong>le</strong>s trois volumes <strong>de</strong> la Theorie <strong>de</strong>rTransformationsgruppen.IV : Axiome <strong>de</strong> la monodromie ou <strong>de</strong> la périodicité <strong>de</strong>s rotations<strong>de</strong>s corps rigi<strong>de</strong>s. C’est l’axiome <strong>le</strong> plus controversé, car onverra 19 qu’il exclut trop aisément un très grand nombre <strong>de</strong> géométriespossib<strong>le</strong>s, au sens <strong>de</strong> K<strong>le</strong>in <strong>et</strong> <strong>Lie</strong>, c’est-à-dire <strong>de</strong> groupes <strong>de</strong> transformations« exotiques ». Lorsque (n − 1) points d’un corps rigi<strong>de</strong> sontfixés en position généra<strong>le</strong>, Helmholtz prétend (comme conséquence <strong>de</strong>17 Voir <strong>le</strong> §93 p. 235 ci-<strong>de</strong>ssous pour une critique <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> <strong>et</strong> <strong>Engel</strong>.18 « Le procédé <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> a lieu entièrement a priori », écrit Ju<strong>le</strong>s Vuil<strong>le</strong>min p. 420<strong>de</strong> [168].19 En infinitésimalisant <strong>le</strong> problème, Helmholtz va se ramener à considérer unsystème d’équations différentiel<strong>le</strong>s ordinaires dxidt= ∑ 3j=1 a ij x j d’ordre 1 à coefficientsa ij constants, <strong>et</strong> l’axiome <strong>de</strong> monodromie va directement impliquer que la matrice(a ij ) 1j31i3possè<strong>de</strong> une va<strong>le</strong>ur propre nul<strong>le</strong>, <strong>et</strong> <strong>de</strong>ux va<strong>le</strong>urs propres imaginairesconjuguées ±i ω, ω > 0, ce qui fait que la matrice a ij représente tout simp<strong>le</strong>ment unerotation dans l’espace euclidien à trois dimensions.


62 2.5. Linéarisation <strong>de</strong> l’isotropiel’Axiome III) qu’il reste encore un, <strong>et</strong> un seul <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> liberté autorisantun mouvement continu ; ce mouvement dépend alors d’un, <strong>et</strong> d’unseul paramètre, <strong>et</strong> nous venons <strong>de</strong> signa<strong>le</strong>r que <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> ont clarifiéc<strong>et</strong>te affirmation. L’axiome <strong>de</strong> monodromie <strong>de</strong>man<strong>de</strong> alors que la« rotation 20 » (sans r<strong>et</strong>our en arrière) du corps rigi<strong>de</strong> autour <strong>de</strong> (n−1) <strong>de</strong>ses points supposés fixés doit <strong>le</strong> reconduire, au bout d’un temps fini, à saposition initia<strong>le</strong> : chaque point en lui revient coïnci<strong>de</strong>r avec la positionqu’il occupait au début. C<strong>et</strong> axiome qui exclut donc tout mouvement enspira<strong>le</strong> (contraction ou dilatation <strong>de</strong>s « longueurs » après un tour) <strong>et</strong> toutmouvement en hélice (décalage <strong>le</strong> long d’un axe après un tour) semb<strong>le</strong>par<strong>le</strong>r un langage évi<strong>de</strong>nt pour l’intuition euclidienne. <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> reformu<strong>le</strong>rontc<strong>et</strong> axiome <strong>de</strong> manière un peu plus précise 21 en utilisant lanotion <strong>de</strong> groupe à un paramètre, essentiel<strong>le</strong>ment absente du mémoire<strong>de</strong> Helmholtz.2.5. Linéarisation <strong>de</strong> l’isotropie. Les métriques quadratiques <strong>de</strong>Gauss E(u, v) du 2 + 2 F(u, v) dudv + G(u, v) dv 2 <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>∑ ni,j=1 g ij(x) dx i dx j que Helmholtz cherche à ressaisir s’exprimenten termes infinitésimaux, <strong>et</strong> c’est certainement pour c<strong>et</strong>te raison queHelmholtz a considéré comme naturel d’interpréter tous ses axiomesdirectement dans l’infiniment p<strong>et</strong>it 22 .J’utiliserai <strong>le</strong>s hypothèses II, III <strong>et</strong> IV seu<strong>le</strong>ment pour <strong>de</strong>spoints dont <strong>le</strong>s différences <strong>de</strong> cordonnées infiniment p<strong>et</strong>ites. Aussi lacongruence indépendante <strong>de</strong>s limites sera supposée vali<strong>de</strong> seu<strong>le</strong>mentpour <strong>de</strong>s éléments spatiaux [76], pp. 44–45.Examinons donc comment Helmholtz procè<strong>de</strong> sur <strong>le</strong> plan mathématique.Soient (u, v, w) <strong>le</strong>s coordonnées d’un point appartenant au corpsrigi<strong>de</strong> dans une première situation <strong>de</strong> ce corps, <strong>et</strong> soient (r, s, t) <strong>le</strong>s coordonnéesd’un même point dans une secon<strong>de</strong> situation du corps. Alorsces coordonnées (r, s, t) dépen<strong>de</strong>nt en toute généralité <strong>de</strong> (u, v, w) <strong>et</strong> <strong>de</strong>six constantes arbitraires qui expriment <strong>le</strong>s <strong>de</strong>grés <strong>de</strong> liberté. Helmholtzsous-entend que (u, v, w) ↦−→ (r, s, t) est un difféomorphisme — c’est20 La terminologie utilisée par Helmholtz montre que la démonstration mathématiquea priori qu’il m<strong>et</strong> en œuvre est sous-tendue, dans l’intuition explorante, parl’idée que l’on a déjà affaire au groupe orthogonal euclidien. Pour être rigoureux, ilfaudrait qualifier ce mouvement non pas <strong>de</strong> « rotation », mais <strong>de</strong> mouvement continuà un paramètre.21 Voir la condition E) p. 237 ci-<strong>de</strong>ssous, qui exprime tout simp<strong>le</strong>ment que <strong>le</strong>mouvement à un paramètre encore possib<strong>le</strong> est périodique.22 Ici se trouve son erreur d’inadvertance principa<strong>le</strong>, cf. <strong>le</strong> § 2.6 ci-<strong>de</strong>ssous.


Chapitre 2. La mobilité helmholtzienne <strong>de</strong> la rigidité 63une conséquence <strong>de</strong> la rigidité — <strong>et</strong> il écrit la transformation correspondanteentre différentiel<strong>le</strong>s, donnée par une matrice jacobienne. <strong>Ens</strong>uite,il fixe <strong>le</strong> point (r, s, t) <strong>et</strong> il considère seu<strong>le</strong>ment toutes <strong>le</strong>s transformationsencore possib<strong>le</strong>s du corps rigi<strong>de</strong> qui envoient ce point (r, s, t) surun point <strong>de</strong> coordonnées (ρ, σ, τ) satisfaisant r = ρ, s = σ, t = τ. Dansce cas, la transformation entre <strong>le</strong>s différentiel<strong>le</strong>s <strong>de</strong> coordonnées 23 :⎧⎪⎨dr = A 0 dρ + B 0 dσ + C 0 dτ(1)ds = A 1 dρ + B 1 dσ + C 1 dτ⎪⎩dt = A 2 dρ + B 2 dσ + C 2 dτincorpore neuf fonctions A n , B n , C n (n = 0, 1, 2) qui dépen<strong>de</strong>nt encore<strong>de</strong> trois paramètres arbitraires 24 que Helmholtz note p ′ , p ′′ <strong>et</strong> p ′′′ . Ceséquations montrent comment sont transformés <strong>le</strong>s éléments infinitésimauxbasés au point fixé.Dans ces trois équations (1), Helmholtz introduit alors <strong>le</strong>s notations:dr = ε x dρ = ε ξds = ε ydσ = ε υdt = ε z dτ = ε ζ,où ε est une quantité infinitésima<strong>le</strong> que l’on peut visib<strong>le</strong>ment supprimeren divisant <strong>de</strong> part <strong>et</strong> d’autre <strong>de</strong> chaque équation. De c<strong>et</strong>te manière, onenvisage <strong>le</strong>s transformations dans l’infiniment p<strong>et</strong>it comme <strong>de</strong>s transformationslinéaires agissant dans <strong>le</strong> domaine fini 25 :⎧⎪⎨x = A 0 ξ + B 0 υ + C 0 ζ(2)y = A 1 ξ + B 1 υ + C 1 ζ⎪⎩z = A 2 ξ + B 2 υ + C 2 ζ.D’après <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> (§ 94 p. 237 ci-<strong>de</strong>ssous), lorsque <strong>le</strong> pointfixé est rapporté à l’origine d’un système <strong>de</strong> coordonnées (x, y, z), <strong>le</strong>raisonnement <strong>de</strong> Helmholtz revient à effectuer un développement ensérie entière par rapport aux trois variab<strong>le</strong>s x, y <strong>et</strong> z, mais en supprimant23 En parallè<strong>le</strong>, on se reportera avantageusement à la discussion qu’en font <strong>Engel</strong><strong>et</strong> <strong>Lie</strong> au début du § 94 p. 237, notamment aux équations (15), (16) <strong>et</strong> (16’).24 Dans la théorie <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>, c<strong>et</strong>te donnée correspond essentiel<strong>le</strong>ment à considérer <strong>le</strong>sous-groupe d’isotropie d’un point (x 0 , y 0 , z 0 ) fixé.25 La division par ε agit comme un zoom infiniment puissant au point considéré.La matrice 3 ×3 ainsi obtenue <strong>de</strong> fonctions <strong>de</strong> p ′ , p ′′ , p ′′′ est loca<strong>le</strong>ment inversib<strong>le</strong> parconstruction.


64 2.6. Critique par <strong>Lie</strong> <strong>de</strong> l’erreur principa<strong>le</strong> <strong>de</strong> Helhmoltztous <strong>le</strong>s termes d’ordre 2, ce qui donne un groupe linéaire homogènequ’ils écrivent quant à eux 26 :⎧⎪⎨x ′ = λ 1 x + λ 2 y + λ 3 zy ′ = µ 1 x + µ 2 y + µ 3 z⎪⎩z ′ = ν 1 x + ν 2 y + ν 3 z.Ce sous-groupe du groupe linéaire homogène compl<strong>et</strong> GL 3 (R) indiquealors comment sont transformées <strong>le</strong>s droites (infiniment p<strong>et</strong>ites) passantpar l’origine, lorsque <strong>le</strong> corps rigi<strong>de</strong> pivote <strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>s manières possib<strong>le</strong>sautour <strong>de</strong> son point fixe.Ce groupe linéaire agissant au niveau infinitésimal constitue unedécouverte importante. En eff<strong>et</strong>, la considération <strong>de</strong> tel<strong>le</strong>s transformationslinéarisées (<strong>et</strong> projectivisées) en un point fixe constitue l’une<strong>de</strong>s plus idées <strong>le</strong>s plus efficientes que <strong>Lie</strong> a mises au point afin <strong>de</strong>classifier groupes <strong>et</strong> sous-groupes <strong>de</strong> transformations (voir <strong>le</strong> Chapitre5), <strong>et</strong> l’on peut s’imaginer que <strong>le</strong>s considérations embryonnaires<strong>et</strong> « balbutiantes » <strong>de</strong> Helmholtz ont pu constituer pour <strong>Lie</strong> une sourceconstante d’inspiration <strong>et</strong> <strong>de</strong> défi, un point d’orgue à atteindre, ce quiexpliquerait peut-être la raison pour laquel<strong>le</strong> <strong>le</strong> chapitre sur <strong>le</strong> problème<strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz a été placé à l’extrême fin <strong>de</strong> la Theorie <strong>de</strong>rTransformationsgruppen 27 .Ainsi, comme il l’a annoncé au tout début <strong>de</strong> son exposition mathématique,Helmholtz applique « seu<strong>le</strong>ment » ses hypothèses à <strong>de</strong>s pointsinfiniment proches <strong>le</strong>s uns <strong>de</strong>s autres, comme si c<strong>et</strong>te exigence semblaiten <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r moins que lorsqu’on <strong>le</strong>s applique à un domaine d’extensionfini, puisque la portée <strong>de</strong>s axiomes serait <strong>de</strong> la sorte restreinte à undomaine d’extension encore plus p<strong>et</strong>it. Toutefois, la circulation imparfaiteentre l’infinitésimal <strong>et</strong> <strong>le</strong> fini va réserver <strong>de</strong>s surprises à l’explorationrigoureuse en termes <strong>de</strong> contre-exemp<strong>le</strong>s.2.6. Critique par <strong>Lie</strong> <strong>de</strong> l’erreur principa<strong>le</strong> <strong>de</strong> Helhmoltz. <strong>Engel</strong> <strong>et</strong><strong>Lie</strong> interprètent <strong>le</strong>s exigences helmholtziennes en termes <strong>de</strong> théorie <strong>de</strong>sgroupes continus <strong>de</strong> transformations 28 . En notant p = ∂∂x , q := ∂ ∂y <strong>et</strong>26 — sous-groupe à trois paramètres <strong>de</strong> GL 3 (R) —27 L’ultime Division VI du Volume III [42] <strong>de</strong> la Theorie <strong>de</strong>r Transformationsgruppencomprend cinq chapitres consacrés à <strong>de</strong>s considérations généra<strong>le</strong>s, historiques <strong>et</strong>méthodologiques qui reviennent en arrière sur l’ensemb<strong>le</strong> <strong>de</strong> l’ouvrage.28 Le <strong>le</strong>cteur est renvoyé au Chapitre 4 <strong>et</strong> au § 85 p. 167 pour une présentation <strong>de</strong>séléments fondamentaux <strong>de</strong> la théorie ; sans cela, il peut aussi se reporter directement


Chapitre 2. La mobilité helmholtzienne <strong>de</strong> la rigidité 65r := ∂ ∂zpour abréger, soient :X k = ξ k (x, y, z) p + η k (x, y, z) q + ζ k (x, y, z) r (k = 1 ···6)six transformations infinitésima<strong>le</strong>s qui engendrent un groupe continuà six paramètres <strong>de</strong> transformations loca<strong>le</strong>s <strong>de</strong> l’espace réel à trois dimensionsmuni <strong>de</strong>s coordonnées (x, y, z), ce groupe étant supposé satisfaire<strong>le</strong>s axiomes II, III <strong>et</strong> IV <strong>de</strong> Helmholtz. Le <strong>de</strong>uxième axiome :parfaite mobilité <strong>de</strong>s corps rigi<strong>de</strong>s, <strong>de</strong>man<strong>de</strong> notamment que <strong>le</strong> groupesoit transitif. De manière équiva<strong>le</strong>nte, en tout point donné à l’avance,<strong>le</strong>s (champs <strong>de</strong>) vecteurs X 1 , . . ., X 6 engendrent l’espace tangent en cepoint. Sans perte <strong>de</strong> généralité, on peut supposer que <strong>le</strong> système <strong>de</strong>scoordonnées est centré au point considéré. Quitte à effectuer <strong>de</strong>s combinaisonslinéaires (pivot <strong>de</strong> Gauss), on peut supposer aussi que <strong>le</strong>s troispremières transformations infinitésima<strong>le</strong>s s’écrivent :X 1 = p + · · · , X 2 = q + · · · , X 3 = r + · · · ,où <strong>le</strong>s termes «+··· » d’ordre supérieurs sont <strong>de</strong>s restes <strong>de</strong> la forme 29O(1) p+O(1) q+O(1) r, <strong>et</strong> aussi en même temps que <strong>le</strong>s trois transformationsinfinitésima<strong>le</strong>s linéairement indépendantes restantes s’annu<strong>le</strong>ntà l’origine, <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que l’on peut écrire :X k := (α k1 x + α k2 y + α k3 z + · · ·) p++ (β k1 x + β k2 y + β k3 z + · · ·) q++ (γ k1 x + γ k2 y + γ k3 z + · · ·) r(k = 4,5, 6),où <strong>le</strong>s termes «+··· » d’ordre supérieur sont <strong>de</strong> la forme O(2) p +O(2) q +O(2) r, <strong>et</strong> où <strong>le</strong>s α kl , β kl , γ kl sont <strong>de</strong>s constantes réel<strong>le</strong>s. <strong>Engel</strong><strong>et</strong> <strong>Lie</strong> introduisent alors <strong>le</strong> groupe réduit associé au groupe X 1 , . . .,X 6 ,qui est formé <strong>de</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s p, q <strong>et</strong> r issues <strong>de</strong> X 1 ,X 2 <strong>et</strong> X 3 en supprimant purement <strong>et</strong> simp<strong>le</strong>ment tous <strong>le</strong>s termes d’ordre 1, avec <strong>le</strong>s trois transformations d’ordre exactement égal à 1 :L k = (α k1 x+α k2 y + α k3 z) p + (β k1 x + β k2 y + β k3 z) q++ (γ k1 x + γ k2 y + γ k3 z) r(k = 1, 2,3),à la fin <strong>de</strong> ce paragraphe pour prendre connaissance <strong>de</strong> la teneur <strong>de</strong>s contre-exemp<strong>le</strong>s<strong>de</strong> <strong>Lie</strong>.29 Ici, la notation O(1) désigne un reste analytique s’annulant pour x = y = z =0 ; <strong>de</strong> même, la notation O(2) désigne un reste analytique s’annulant, ainsi que toutesses dérivées partiel<strong>le</strong>s d’ordre 1, lorsque x = y = z = 0.


66 2.6. Critique par <strong>Lie</strong> <strong>de</strong> l’erreur principa<strong>le</strong> <strong>de</strong> Helhmoltzqui sont obtenues à partir <strong>de</strong> X 4 , X 5 <strong>et</strong> X 6 en supprimant tous <strong>le</strong>s termesd’ordre 2. Alors l’hypothèse que <strong>le</strong>s six transformations infinitésima<strong>le</strong>sinitia<strong>le</strong>s X 1 , . . .,X 6 forment une algèbre <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> 30 implique que<strong>le</strong>s six transformations réduites p, q, r, L 1 , L 2 <strong>et</strong> L 3 forment el<strong>le</strong>s aussiune algèbre <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>. Par conséquent, d’après <strong>le</strong> troisième théorème fondamental<strong>de</strong> <strong>Lie</strong> (§ 4.9), <strong>le</strong>s six transformations infinitésima<strong>le</strong>s réduitesp, q, r, L 1 , L 2 <strong>et</strong> L 3 engendrent à nouveau un groupe <strong>de</strong> transformations,qui constitue en fait un certain sous-groupe à six paramètres dugroupe affine compl<strong>et</strong> <strong>de</strong> l’espace à trois dimensions.Par une série d’exemp<strong>le</strong>s que <strong>Lie</strong> avait déjà fait paraître en 1892dans <strong>le</strong>s Comptes Rendus <strong>de</strong> l’Académie, <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> montrent combienil est péril<strong>le</strong>ux d’extrapo<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s axiomes supposés vali<strong>de</strong>s dans <strong>de</strong>srégions loca<strong>le</strong>s d’extension finie au suj<strong>et</strong> du comportement <strong>de</strong> pointsqui sont infiniment proches <strong>le</strong>s uns <strong>de</strong>s autres. Ainsi l’existence d’un, <strong>et</strong>d’un seul invariant généralisé (distance abstraite) entre paires <strong>de</strong> pointsne se transfère-t-el<strong>le</strong> pas fidè<strong>le</strong>ment d’un univers à l’autre. En eff<strong>et</strong>, dans<strong>le</strong> § 94 p. 237 ci-<strong>de</strong>ssous, <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> décrivent <strong>de</strong>ux exemp<strong>le</strong>s élémentaires:• un groupe X 1 , . . .,X 6 pour <strong>le</strong>quel <strong>de</strong>ux points ont un <strong>et</strong> un seulinvariant, alors que pour <strong>le</strong> groupe réduit p, q, r, L 1 , L 2 , L 3 , <strong>de</strong>ux pointsont <strong>de</strong>ux invariants fonctionnel<strong>le</strong>ment indépendants 31 ;• un autre groupe X 1 , . . .,X 6 pour <strong>le</strong>quel <strong>de</strong>ux points n’ont aucuninvariant, alors que pour <strong>le</strong> groupe réduit p, q, r, L 1 , L 2 , L 3 , <strong>de</strong>ux pointsont un <strong>et</strong> un seul invariant.Voilà donc l’erreur principa<strong>le</strong> <strong>de</strong> Helmholtz : supprimer « à la physicienne» tous <strong>le</strong>s termes d’ordre supérieur à 1, ce qui détruit complètementl’harmonie euclidienne <strong>de</strong>s corps rigi<strong>de</strong>s qui se donnait pour évi<strong>de</strong>nteà l’intuition. Et l’axiome <strong>de</strong> monodromie recè<strong>le</strong> un phénomèneencore plus troublant. Dans <strong>le</strong> Théorème 37 p. 215 ci-<strong>de</strong>ssous, sans utiliser<strong>le</strong>s axiomes III <strong>et</strong> IV <strong>de</strong> Helmholtz, <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> trouvent abstraitementonze groupes réels pour <strong>le</strong>squels <strong>de</strong>ux points ont un <strong>et</strong> un seulinvariant, tandis qu’un nombre <strong>de</strong> point supérieur à <strong>de</strong>ux n’a pas d’invariantessentiel. Au cours <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te recherche, ils découvrent un groupeparticulier, <strong>le</strong> groupe (24) p. 243, qui satisfait l’axiome <strong>de</strong> monodromie,alors que son groupe réduit ne <strong>le</strong> satisfait pas : même l’axiome <strong>le</strong> plus30 Voir <strong>le</strong> § 4.9 <strong>et</strong> la note p. 241.31 La raison formel<strong>le</strong> <strong>de</strong> ces décalages <strong>de</strong> structure est simp<strong>le</strong> d’un point <strong>de</strong> vueanalytique : <strong>le</strong> passage du groupe (21) <strong>de</strong> dimension 6 au groupe réduit (21’) du § 94p. 237 supprime tel<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> termes, que <strong>le</strong> groupe réduit <strong>de</strong>vient <strong>de</strong> dimension 4 !


Chapitre 2. La mobilité helmholtzienne <strong>de</strong> la rigidité 67central dans <strong>le</strong>s raisonnements mathématiques <strong>de</strong> Helmholtz est remisen cause dans <strong>le</strong> passage à l’infiniment p<strong>et</strong>it !Grâce aux exemp<strong>le</strong>s précé<strong>de</strong>nts, il a été suffisamment démontréque la supposition que Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz a introduite tacitement[l’infinitésimalisation] <strong>et</strong> qui a été décrite plus précisément auxpages 239 sq. [dans la traduction ci-<strong>de</strong>ssous] est erronée. Et maintenant,comme ses considérations ultérieures prennent entièrement c<strong>et</strong>tesupposition comme point <strong>de</strong> départ <strong>et</strong> n’ont force <strong>de</strong> preuve que sur labase <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te supposition, nous parvenons donc au résultat que Monsieur<strong>de</strong> Helmholtz n’a pas démontré l’assertion qu’il énonce à la fin <strong>de</strong>son travail, à savoir : il n’a pas démontré que ses axiomes suffisent àcaractériser <strong>le</strong>s mouvements euclidiens <strong>et</strong> non-euclidiens. p. 247 ci<strong>de</strong>ssous.C<strong>et</strong>te observation conduit alors à contourner l’erreur principa<strong>le</strong><strong>de</strong> Helmholtz en supposant directement que <strong>le</strong>s axiomes II, III <strong>et</strong> IVsont vali<strong>de</strong>s dans l’infiniment p<strong>et</strong>it, c’est-à-dire plus précisément, que<strong>le</strong> groupe réduit <strong>le</strong>s satisfait. On se ramène ainsi à un problème plusaccessib<strong>le</strong> : trouver, dans <strong>le</strong> groupe affine compl<strong>et</strong> <strong>de</strong> l’espace à troisdimensions, tous <strong>le</strong>s sous-groupes transitifs à six paramètres pour <strong>le</strong>squels<strong>de</strong>ux points ont un <strong>et</strong> un seul invariant <strong>et</strong> qui satisfont <strong>de</strong> plusl’axiome <strong>de</strong> monodromie. En utilisant toute la force <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong>sgroupes <strong>de</strong> transformations, <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> vérifieront que <strong>le</strong>s conclusions<strong>de</strong> Helmholtz peuvent être rendus rigoureuses <strong>et</strong> véridiques parune voie différente (voir <strong>le</strong> § 2.8 ci-<strong>de</strong>ssous). Et sans insister ici sur<strong>le</strong>s erreurs mathématiques <strong>de</strong> Helmholtz 32 , eu égard à son but principalqui était <strong>de</strong> r<strong>et</strong>rouver la métrique pythagoricienne tridimensionnel<strong>le</strong>ds 2 = dx 2 1 + dx2 2 + dx2 3 tel<strong>le</strong> qu’el<strong>le</strong> était représentée dans l’infinimentp<strong>et</strong>it par Gauss <strong>et</strong> par <strong>Riemann</strong>, l’approche qui consiste à infinitésimaliserd’emblée <strong>le</strong>s quatre axiomes était tout à fait naturel<strong>le</strong>.2.7. Calculs helmholtziens. Pour l’instant, reprenons maintenant <strong>le</strong>sraisonnements mathématiques originaux <strong>de</strong> Helmholtz ([76]) que <strong>Lie</strong> necherchera pas à imiter 33 . Dans <strong>le</strong>s équations <strong>de</strong> transformations linéaireshomogènes (2), <strong>le</strong>s quantités A n , B n , C n dépen<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> trois paramètresindépendants p ′ , p ′′ <strong>et</strong> p ′′′ . Supposons alors que p ′ , p ′′ <strong>et</strong> p ′′′ dépen<strong>de</strong>nt32 Le Chapitre 21 p. 220 ci-<strong>de</strong>ssous y consacre déjà une analyse suffisammentminutieuse.33 Gran<strong>de</strong> liberté <strong>de</strong> stratégie dans la théorie <strong>de</strong>s groupes.


68 2.7. Calculs helmholtzienslinéairement d’une variab<strong>le</strong> « temporel<strong>le</strong> » auxiliaire notée η, introduisons<strong>le</strong>s trois quotients différentiels :A n := d ( (A n p ′ (η), p ′′ (η), p ′′′ (η) )) (n =0, 1, 2),dη<strong>et</strong> <strong>de</strong> même, introduisons <strong>le</strong>s quotients différentiels analogues B n , C npour n = 0, 1, 2. En différentiant alors <strong>le</strong>s équations (2) par rapport à η,on obtient <strong>de</strong>s équations :⎧dxdη = A 0 ξ + B 0 υ + C 0 ζ⎪⎨dydη = A 1 ξ + B 1 υ + C 1 ζdz ⎪⎩dη = A 2 ξ + B 2 υ + C 2 ζ,dans <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s on peut réexprimer ξ, υ, ζ en fonction <strong>de</strong> x, y, z en inversant<strong>le</strong> système (2), ce qui donne un système homogène d’équationsdifférentiel<strong>le</strong>s ordinaires d’ordre 1 :(3)⎧⎪⎨⎪⎩dxdη = a 0x + b 0 y + c 0 zdydη = a 1x + b 1 y + c 1 zdzdη = a 2x + b 2 y + c 2 z,avec certaines fonctions a n , b n , c n (n = 0, 1, 2) du paramètre individuelη. Les paramètres initiaux p ′ , p ′′ , p ′′′ étant au nombre <strong>de</strong> trois, on peuten fait obtenir trois tels systèmes indépendants en choisissant la dépendance(supposée linéaire) par rapport à η <strong>de</strong> ces paramètres <strong>le</strong> long d<strong>et</strong>rois directions <strong>de</strong> droite qui sont indépendantes (cf. ce qui va suivre).Dans un passage diffici<strong>le</strong> à déchiffrer dont <strong>le</strong> contenu fut ensuit<strong>et</strong>rès largement englobé par la théorie <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> <strong>de</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>sassociées à un groupe linéaire homogène, Helmholtz montreque <strong>le</strong>s fonctions a n , b n , c n sont en fait constantes. Ainsi peut-on appliquerau système (3) ci-<strong>de</strong>ssus <strong>le</strong>s théorèmes bien connus <strong>de</strong> la théorie<strong>de</strong>s systèmes d’ordre 1 à coefficients constants.Par ail<strong>le</strong>urs, en supposant l’existence d’un, <strong>et</strong> d’un seul invariantpour toute paire <strong>de</strong> points relativement au groupe d’isotropie linéarisé(validité <strong>de</strong> l’axiome II dans l’infinitésimal), Helmholtz affirme dans un


Chapitre 2. La mobilité helmholtzienne <strong>de</strong> la rigidité 69court passage tout aussi délicat 34 que <strong>le</strong> déterminant du système doits’annu<strong>le</strong>r :∣ a 0 b 0 c 0 ∣∣∣∣∣(4) 0 =a 1 b 1 c 1 .∣ a 2 b 2 c 2Dans son approche du problème, Helmholtz semb<strong>le</strong> connaître <strong>et</strong>maîtriser la théorie qui perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> résoudre <strong>le</strong>s systèmes linéaires homogènesd’équations différentiel<strong>le</strong>s ordinaires d’ordre 1, théorie que <strong>Lie</strong>appliquera ensuite très fréquemment. Résumons brièvement <strong>le</strong>s résultatsdans un langage contemporain, en adm<strong>et</strong>tant <strong>le</strong> théorème <strong>de</strong> réduction<strong>de</strong>s matrices à une forme norma<strong>le</strong> <strong>de</strong> Jordan (cf. [20] pour unhistorique).L’annulation du déterminant montre qu’une va<strong>le</strong>ur propre aumoins <strong>de</strong> la matrice vaut zéro. Helmholtz démontre avec clarté que<strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux autres va<strong>le</strong>urs propres λ 2 <strong>et</strong> λ 3 (éventuel<strong>le</strong>ment éga<strong>le</strong>s) sontnécessairement imaginaires pures conjuguées l’une <strong>de</strong> l’autre 35 <strong>et</strong> nonnul<strong>le</strong>s. En eff<strong>et</strong>, la solution au système (3) <strong>de</strong> condition initia<strong>le</strong> <strong>le</strong> point(x 0 , y 0 , z 0 ) est donnée par l’exponentiel<strong>le</strong> <strong>de</strong> matrice e Mt appliquée à cepoint, vu comme vecteur colonne. Après un changement <strong>de</strong> base éventuel,<strong>le</strong>s trois éléments diagonaux <strong>de</strong> la matrice e Mt sont : e 0 t , e λ 2t <strong>et</strong>e λ 3t . Dès que la partie réel<strong>le</strong> <strong>de</strong> λ 2 ou cel<strong>le</strong> <strong>de</strong> λ 3 est non nul<strong>le</strong>, il est impossib<strong>le</strong>que <strong>le</strong> mouvement à un paramètre représenté par <strong>le</strong> système (3)soit périodique, comme <strong>le</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong> l’axiome <strong>de</strong> monodromie, puisque34 Paul Hertz, qui a bénéficié d’échanges épistolaires avec <strong>le</strong> professeur <strong>Engel</strong>, reconstituel’argument ([76], pp. 67–68). Pour tout <strong>de</strong>uxième point (x 0 , y 0 , z 0 ) distinct<strong>de</strong> l’origine, <strong>le</strong> troisième axiome helmholtzien <strong>de</strong>man<strong>de</strong> qu’un mouvement à un paramètresoit encore possib<strong>le</strong>. Puisque <strong>le</strong>s quantités numériques p ′ , p ′′ , p ′′′ <strong>et</strong> x 0 , y 0 , z 0sont toutes <strong>de</strong>ux au nombre <strong>de</strong> trois, Helmholtz semb<strong>le</strong> adm<strong>et</strong>tre que tous <strong>le</strong>s systèmes(3) correspon<strong>de</strong>nt biunivoquement avec <strong>le</strong>s mouvements qui fixent <strong>de</strong>ux pointsdistincts. Alors pour tout tel <strong>de</strong>uxième point donné (x 0 , y 0 , z 0 ) distinc <strong>de</strong> l’origine,on doit pouvoir choisir une certaine dépendance linéaire <strong>de</strong> (p ′ , p ′′ , p ′′′ ) par rapport àun paramètre η tel que <strong>le</strong> système (3) décrive précisément tous <strong>le</strong>s mouvements fixantl’origine <strong>et</strong> <strong>le</strong> <strong>de</strong>uxième point (x 0 , y 0 , z 0 ). On en déduit donc un système d’équationslinéaires :0 = dx0dη = a 0x 0 + b 0 y 0 + c 0 z 00 = dy0dη = a 1x 0 + b 1 y 0 + c 1 z 00 = dz0dη = a 2x 0 + b 2 y 0 + c 2 z 0qui implique l’annulation du déterminant (4).35 Ceci décou<strong>le</strong> directement du fait que la matrice est réel<strong>le</strong>. Comme ses va<strong>le</strong>urspropres sont alors distinctes, el<strong>le</strong> est diagonablisab<strong>le</strong> sur C.


70 2.7. Calculs helmholtziense (a+ib)t diverge lorsque t → ±∞, suivant <strong>le</strong> signe <strong>de</strong> a, lorsque a ≠ 0.Enfin, <strong>le</strong> cas où toutes <strong>le</strong>s va<strong>le</strong>urs propres sont nul<strong>le</strong>s ne se produit pas :ou bien la forme norma<strong>le</strong> <strong>de</strong> Jordan <strong>de</strong> M est i<strong>de</strong>ntiquement nul<strong>le</strong>, d’oùtous <strong>le</strong>s points restent au repos (cas exclu par l’axiome <strong>de</strong> mobilité) ;ou bien c<strong>et</strong>te forme norma<strong>le</strong> est nilpotente, <strong>et</strong> <strong>le</strong> mouvement s’éloignepolynomia<strong>le</strong>ment vers l’infini 36 .Ainsi, dans <strong>de</strong> nouvel<strong>le</strong>s coordonnées appropriées, <strong>le</strong> système peutêtre écrit sous une forme norma<strong>le</strong> simplifiée :dXdη = 0, dYdη = −ω Z dZdη = ω Y.Sans surprise, on r<strong>et</strong>rouve <strong>le</strong>s équations différentiel<strong>le</strong>s d’une rotationeuclidienne d’axe {Y = Z = 0}. À la très gran<strong>de</strong> généralité initia<strong>le</strong> dupropos <strong>de</strong> Helmholtz succè<strong>de</strong> donc la considération <strong>de</strong> mouvements quiétaient déjà fort bien compris dans <strong>le</strong>s mathématiques <strong>et</strong> dans la mécanique<strong>de</strong> l’époque. <strong>Lie</strong> au contraire replacera l’ambition <strong>de</strong> généralité àun niveau largement supérieur. L’axiome <strong>de</strong> monodromie qui semblaitintuitivement si évi<strong>de</strong>nt impose donc une condition extrêmement fortequi perm<strong>et</strong> d’éliminer presque tous <strong>le</strong>s systèmes (3), excepté ceux quifournissent <strong>de</strong>s rotations euclidiennes.<strong>Ens</strong>uite, en modifiant convenab<strong>le</strong>ment la dépendance <strong>de</strong>(p ′ , p ′′ , p ′′′ ) par rapport à η, Helmoltz prétend que l’on obtient <strong>de</strong>uxautres rotations <strong>le</strong> long <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux axes {X = Z = 0} <strong>et</strong> {X = Y = 0}qu’il écrit sous la forme généra<strong>le</strong> suivante, en introduisant <strong>de</strong>uxnouvel<strong>le</strong>s directions unidimensionnel<strong>le</strong>s η ′ <strong>et</strong> η ′′ dans l’espace <strong>de</strong>sparamètres (p ′ , p ′′ , p ′′′ ) :⎧dXdX= αdη⎪⎨′ 0 X + 0 + γ 0 Z= adηdY⎪⎨′′ 0 X + b 0 Y + 0dY= αdη ′ 1 X + 0 + γ 1 Z <strong>et</strong> = adη ′′ 1 X + b 1 Y + 0dZdZ⎪⎩ = αdη ′ 2 X + 0 + γ 2 Z⎪⎩ = adη ′′ 2 X + b 2 Y + 0.Pour chacun <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux systèmes, <strong>le</strong> déterminant correspondant (4)doit s’annu<strong>le</strong>r, <strong>et</strong> en particulier, la trace matriciel<strong>le</strong> doit être nul<strong>le</strong> :⎧0 = α 0 + γ 2 <strong>et</strong> 0 = a 0 + b 1 .36 Dans <strong>de</strong> nouvel<strong>le</strong>s coordonnées normalisantes (X, Y, Z), <strong>le</strong> système s’écrit :dZ dYdt= 0,dt= Z <strong>et</strong> dXdt= ε Y , avec ε = 0 ou = 1 suivant que <strong>le</strong> rang <strong>de</strong> la matrice(nilpotente) M est égal à 1 ou à 2. L’intégration donne un mouvement : Z = Z 0 ,Y = Y 0 + Z 0 t, X = ε ( X 0 + Y 0 t + 1 2 Z 0 t 2) qui n’est pas périodique.


Chapitre 2. La mobilité helmholtzienne <strong>de</strong> la rigidité 71<strong>Ens</strong>uite, Helmholtz utilise un argument indirect qu’il aurait pu présenter<strong>de</strong> manière n<strong>et</strong>tement plus limpi<strong>de</strong> sur <strong>le</strong> plan technique : par linéaritésupposée <strong>de</strong> la dépendance <strong>de</strong> (p ′ , p ′′ , p ′′′ ) par rapport à η, η ′ <strong>et</strong> η ′′ , <strong>le</strong>système obtenu par sommation <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux quelconques systèmes parmi <strong>le</strong>strois systèmes considérés doit encore constituer un système du mêm<strong>et</strong>ype, <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que <strong>le</strong> déterminant correspondant (4) doit à nouveaus’annu<strong>le</strong>r. C<strong>et</strong> argument combiné à un argument d’homogénéité <strong>de</strong>séquations obtenues par rapport aux constantes qui interviennent danschaque système perm<strong>et</strong> à Helmholtz <strong>de</strong> déduire que 37 :<strong>et</strong> que :0 = α 0 = α 1 = γ 2 <strong>et</strong> 0 = a 0 = b 1 = a 2 ,(5) 0 = γ 0 a 1 − b 0 α 2 .Enfin, en formant la somme <strong>de</strong>s trois systèmes après annulation <strong>de</strong> cessix constantes <strong>et</strong> en réappliquant l’argument d’annulation nécessaire dudéterminant (4), Helmholtz montre que 38 :Pour terminer, en posant :0 = γ 1 <strong>et</strong> 0 = b 2 .α 2 = −φ, γ 0 = κφ, a 1 = ψ,d’où il décou<strong>le</strong> grâce à (5) que :b 0 = −κψ,37 Le raisonnement <strong>de</strong>vrait converger vers <strong>le</strong> fait que la matrice combinaison linéairegénéra<strong>le</strong> <strong>de</strong>s trois systèmes en question n’est autre qu’une matrice 3 ×3 antisymétriquequelconque, quoiqu’un tel énoncé parlant soit en fait absent du mémoire <strong>de</strong>Helmholtz.38 L’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la matrice combinaison linéaire généra<strong>le</strong> <strong>de</strong>s trois systèmes s’arrêtelà. Fait surprenant : Helmholtz qui semb<strong>le</strong> être conscient <strong>de</strong> r<strong>et</strong>rouver <strong>le</strong>s équationsdifférentiel<strong>le</strong>s du groupe <strong>de</strong>s rotations qui fixent un point dans l’espace tridimensionnelne poursuit néanmoins pas <strong>le</strong> raisonnement <strong>de</strong> normalisation <strong>de</strong>s constantes, <strong>et</strong>il oublie <strong>de</strong> convoquer à nouveau <strong>le</strong> fait que <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux va<strong>le</strong>urs propres non nul<strong>le</strong>s <strong>de</strong>chaque système doivent être imaginaires conjuguées, ce qui lui aurait donné <strong>le</strong>s équationsfina<strong>le</strong>s : b 0 = −a 1 <strong>et</strong> γ 0 = −α 2 . À l’inverse chez <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong>, <strong>le</strong> souci <strong>de</strong>complétion absolue <strong>de</strong> la pensée technique ne laisse dans l’ombre aucun calcul en vue<strong>de</strong>s harmonies formel<strong>le</strong>s conclusives.


72 2.8. Insuffisances <strong>et</strong> reprisesHelmholtz obtient <strong>le</strong> système compl<strong>et</strong> <strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>s transformations possib<strong>le</strong>squi fixent l’origine :⎧⎪⎨dX = 0 + κφ Z dη ′ − κψ Y dη ′′dY = −ω Z dη + 0 + ψ X dη ′′⎪⎩dZ = ω Y dη − φ X dη ′ + 0.Ici, la quantité κ doit être positive pour que <strong>le</strong>s va<strong>le</strong>urs propres nonnul<strong>le</strong>s soit imaginaires pures conjuguées l’une <strong>de</strong> l’autre. Helmholtz observealors qu’il décou<strong>le</strong> <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>rnier système que la quantité suivantes’annu<strong>le</strong> :1XdX + Y dY + ZdZ = 0,κc’est-à-dire après intégration :X 2 + κ Y 2 + κ Z 2 = const.Le facteur positif κ peut être supprimé en remplaçant Y , Z par √ κ Y ,√ κZ, <strong>et</strong> l’on r<strong>et</strong>rouve <strong>le</strong>s équations <strong>de</strong> la famil<strong>le</strong> <strong>de</strong>s sphères euclidiennescentrées en l’origine.2.8. Insuffisances <strong>et</strong> reprises. Helmholtz semb<strong>le</strong> être satisfait par c<strong>et</strong>teconclusion, mais <strong>de</strong>ux erreurs éventuel<strong>le</strong>s peuvent encore être commises.Premièrement, par construction, <strong>le</strong>s quantités x, y, z puis X, Y , Zqui s’en déduisent par combinaison linéaire <strong>de</strong>meurent infinitésima<strong>le</strong>s.On ne r<strong>et</strong>rouve donc la métrique pythagoricienne que dans l’infinimentp<strong>et</strong>it, <strong>et</strong> il est à nouveau absolument hors <strong>de</strong> question d’en déduire quec<strong>et</strong>te métrique vaut dans <strong>le</strong> domaine local fini, voire dans <strong>le</strong> domaineglobal. D’ail<strong>le</strong>urs, toute métrique riemanienne quelconque est infinitésima<strong>le</strong>mentéquiva<strong>le</strong>nte à une métrique euclidienne : la conclusion <strong>de</strong>Helmoltz ne prouve donc que <strong>le</strong> caractère infinitésima<strong>le</strong>ment riemannien<strong>de</strong> la métrique, ce dont Helmholtz semb<strong>le</strong> être néanmoins conscientdans <strong>le</strong> <strong>de</strong>rnier paragraphe <strong>de</strong> son mémoire.Mais <strong>de</strong>uxièmement, Helmholtz prétend qu’il a en fait exploréla conséquence <strong>de</strong> la mobilité <strong>de</strong>s corps rigi<strong>de</strong>s dans l’extension loca<strong>le</strong>finie en tenant compte <strong>de</strong> la courbure riemannienne, <strong>et</strong> il annoncealors sans aucune démonstration <strong>le</strong> résultat final <strong>de</strong> ses investigations.D’après lui, si <strong>le</strong>s axiomes I à IV sont satisfaits en toute généralité dans<strong>le</strong> domaine fini, alors la seu<strong>le</strong> géométrie correspondante serait cel<strong>le</strong> quiprévaut sur une sphère <strong>de</strong> rayon R dans un espace à quatre dimensionsmuni <strong>de</strong>s coordonnées réel<strong>le</strong>s (X, Y, Z, S) d’équation :X 2 + Y 2 + Z 2 + (S + R) 2 = R 2 ,


Chapitre 2. La mobilité helmholtzienne <strong>de</strong> la rigidité 73<strong>le</strong> cas R = ∞ correspondant à la géométrie euclidienne. Et puisquedans une tel<strong>le</strong> famil<strong>le</strong>, tous <strong>le</strong>s cas où R < ∞ fournissent une géométriesur l’espace d’une sphère tridimensionnel<strong>le</strong> qui est compact, Helmholtza cru pouvoir caractériser p<strong>le</strong>inement la géométrie euclidienne en ajoutant<strong>de</strong>ux axiomes 39 :• V : L’espace possè<strong>de</strong> trois dimensions.• VI : L’espace est infini en extension.Malheureusement, dans une l<strong>et</strong>tre datant du 24 avril 1869, EugenioBeltrami informait Helmholtz <strong>de</strong> la consistance éclatante <strong>de</strong> la géométrie<strong>de</strong> Lobatchevskiĭ grâce à sa réalisation sur une pseudosphère infini<strong>et</strong>ridimensionnel<strong>le</strong>. Helmholtz était ainsi contredit. Pour conclure, on r<strong>et</strong>iendral’énoncé suivant, qui laisse encore essentiel<strong>le</strong>ment ouverte laquestion sou<strong>le</strong>vée par <strong>Riemann</strong>.Proposition <strong>de</strong> Helmholtz. En supposant que la libre mobilité <strong>de</strong>scorps rigi<strong>de</strong>s <strong>et</strong> l’axiome <strong>de</strong> monodromie va<strong>le</strong>nt tous <strong>de</strong>ux au niveauinfinitésimal, <strong>le</strong> sous-groupe d’isotropie linéarisé <strong>de</strong> tout point quelconqueest isomorphe à SO 3 (R).2.9. L’approche infinitésima<strong>le</strong> systématique <strong>de</strong> <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>.<strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> donneront au moins trois solutions distinctes au problème<strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. La première (§ 95 p. 248 ci-<strong>de</strong>ssous) rebonditsur la pétition <strong>de</strong> principe helmholtzienne en proposant tout simp<strong>le</strong>ment<strong>de</strong> formu<strong>le</strong>r directement <strong>le</strong>s axiomes au niveau infinitésimal. Mais unedifférence majeure s’introduit : on ne suppose alors nul<strong>le</strong>ment l’existenced’une fonction <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux points quelconques dont la va<strong>le</strong>ur <strong>de</strong>meureinvariante dans <strong>le</strong>s mouvements (rigidité).Tout d’abord 40 , <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> partent <strong>de</strong> l’hypothèse que l’espaceest une variété numérique (loca<strong>le</strong>) à trois dimensions <strong>et</strong> que <strong>le</strong>s mouvements<strong>de</strong> c<strong>et</strong> espace forment un groupe continu <strong>de</strong> transformations (loca<strong>le</strong>s)qui est transitif <strong>et</strong> à six paramètres. Soient X 1 , . . .,X 6 six transformationsinfinitésima<strong>le</strong>s linéairement indépendantes <strong>et</strong> fermées parcroch<strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> dans l’espace <strong>de</strong>s (x, y, z) qui engendrent un tel groupe.Comme <strong>le</strong> groupe est transitif, si l’on fixe un point réel (x 0 , y 0 , z 0 ) enposition généra<strong>le</strong>, il existe exactement 3 transformations infinitésima<strong>le</strong>slinéairement indépendantes dont <strong>le</strong>s combinaisons engendrent l’espace39 Implicitement, <strong>le</strong> premier <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rniers axiomes avait déjà été admis.40 La <strong>le</strong>cture <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>rnier paragraphe nécessite une connaissance préalab<strong>le</strong> <strong>de</strong>sfon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> qui seront exposées en détail dans <strong>le</strong>s Chapitres 4 <strong>et</strong> 5ci-<strong>de</strong>ssous.


74 2.9. L’approche infinitésima<strong>le</strong> systématique <strong>de</strong> <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>Lie</strong><strong>de</strong>s (x, y, z) en ce point, <strong>et</strong> il existe aussi 3 = 6 − 3 autres transformationsinfinitésima<strong>le</strong>s indépendantes s’annulant en ce point qui sont <strong>de</strong> laforme :Y k = ( α k1 (x − x 0 ) + α k2 (y − y 0 ) + α k3 (z − z 0 ) + · · ·)p++ ( β k1 (x − x 0 ) + β k2 (y − y 0 ) + β k3 (z − z 0 ) + · · ·)q++ ( γ k1 (x − x 0 ) + γ k2 (y − y 0 ) + γ k3 (z − z 0 ) + · · ·)r(k = 123),où par convention, <strong>le</strong>s termes « + · · · » s’annu<strong>le</strong>nt à l’ordre au moins<strong>de</strong>ux en (x 0 , y 0 , z 0 ). En supprimant purement <strong>et</strong> simp<strong>le</strong>ment tous cesrestes, on obtient trois générateurs (qui peuvent éventuel<strong>le</strong>ment <strong>de</strong>venirlinéairement dépendants) :Y k = ( α k1 (x − x 0 ) + α k2 (y − y 0 ) + α k3 (z − z 0 ) ) p++ ( β k1 (x − x 0 ) + β k2 (y − y 0 ) + β k3 (z − z 0 ) ) q++ ( γ k1 (x − x 0 ) + γ k2 (y − y 0 ) + γ k3 (z − z 0 ) ) r(k = 123),d’un sous-groupe 41 linéaire <strong>de</strong> GL 3 (R). Ce sous-groupe (dit réduit)détermine <strong>de</strong> quel<strong>le</strong> manière <strong>le</strong>s éléments linéaires infinitésimaux(dx, dy, dz) sont transformés par <strong>le</strong>s transformations du groupe quifixent <strong>le</strong> point (x 0 , y 0 , z 0 ) considéré.Le troisième axiome p. 248 <strong>de</strong>man<strong>de</strong> que ce sous-groupe d’isotropielinéarisée <strong>de</strong>meure à trois paramètres. Toutefois, aucune existenced’invariant n’est postulée. Enfin, <strong>le</strong> quatrième axiome p. 248 <strong>de</strong>man<strong>de</strong>que tout sous-groupe à un paramètre <strong>de</strong> ce groupe linéaire homogèneà trois dimensions soit constitué <strong>de</strong> mouvements qui agissent périodiquementsur <strong>le</strong>s éléments linéaires passant par l’origine 42 . Plus précisément,pour tout sous-groupe à un paramètre dudit groupe d’isotropie41 Les relations <strong>de</strong> croch<strong>et</strong>s <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> [ Y j , Y k]=∑ 3s=1 c jks Y s où <strong>le</strong>s c jks sont <strong>de</strong>sconstantes réel<strong>le</strong>s, sont en eff<strong>et</strong> directement héritées par <strong>le</strong>s transformations réduites :[Y j , Y k]=∑ 3s=1 c jks Y s parce que dans <strong>le</strong> groupe, il n’existe aucune transformationinfinitésima<strong>le</strong> s’annulant à l’ordre <strong>de</strong>ux en (x 0 , y 0 , z 0 ).42 En première apparence, c<strong>et</strong>te condition semb<strong>le</strong> donc légèrement plus exigentequ’un axiome <strong>de</strong> monodromie qui serait formulé au niveau infinitésimal, en tant qu’untel axiome ne <strong>de</strong>vrait porter que sur <strong>le</strong>s sous-groupes à un paramètres qui fixent un<strong>de</strong>uxième point. Par ail<strong>le</strong>urs, c<strong>et</strong>te condition est légèrement plus généra<strong>le</strong>, en tant quel’on ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pas que l’élément linéaire revienne coïnci<strong>de</strong>r exactement avec luimêmeaprès un temps fini : on autorise <strong>le</strong>s dilatations éventuel<strong>le</strong>s.


Chapitre 2. La mobilité helmholtzienne <strong>de</strong> la rigidité 75linéarisée, tout élément linéaire subit une transformation qui <strong>le</strong> ramèneà se r<strong>et</strong>rouver dans la même direction après un temps fini.Dans ces conditions, si l’on <strong>de</strong>mandait <strong>de</strong> plus que chaque élémentlinéaire revienne coïnci<strong>de</strong>r avec lui-même après un temps fini, <strong>le</strong>raisonnement <strong>de</strong> Helmholtz s’appliquerait encore à quelques modificationsmineures près. En eff<strong>et</strong>, soit Y := λ 1 Y 1 +λ 2 Y 2 +λ 3 Y 3 une combinaisonlinéaire quelconque <strong>de</strong>s Y k à coefficients réels λ 1 , λ 2 , λ 3 nontous nuls. Les va<strong>le</strong>urs propres <strong>de</strong> la matrice 3×3 <strong>de</strong>s coefficients (réels)<strong>de</strong> Y par rapport à (x − x 0 ), (y − y 0 ), (z − z 0 ) sont ou bien réel<strong>le</strong>s, oubien comp<strong>le</strong>xes conjuguées par paires, <strong>et</strong> jamais toutes nul<strong>le</strong>s puisque <strong>le</strong>groupe linéaire réduit Y 1 , Y 2 , Y 3 est <strong>de</strong> dimension trois. Lorsqu’el<strong>le</strong>s nesont pas toutes réel<strong>le</strong>s, <strong>de</strong>ux seu<strong>le</strong>ment peuvent être comp<strong>le</strong>xes conjuguées43 , la <strong>de</strong>rnière étant réel<strong>le</strong>. Par un raisonnement basée sur la formenorma<strong>le</strong> <strong>de</strong> Jordan <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te matrice (comme chez Helmholtz), on seconvainc alors aisément que la périodicité stricte du mouvement n’estpossib<strong>le</strong> que si <strong>de</strong>ux va<strong>le</strong>urs propres sont imaginaires pures non nul<strong>le</strong>sconjuguées l’une <strong>de</strong> l’autre, tandis que la troisième est nécessairementnul<strong>le</strong>. En appliquant c<strong>et</strong> énoncé à Y = Y k pour k = 1, 2, 3, on trouvealors trois rotations d’axes linéairement indépendants qui engendrent<strong>le</strong> groupe SO 3 (R) : c’est <strong>le</strong> groupe d’isotropie linéarisée en tout point,première étape <strong>de</strong> la démonstration (la secon<strong>de</strong> étape est en fait absentechez Helmholtz).Toutefois, ce n’est pas du tout <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te manière-là que <strong>Engel</strong> <strong>et</strong><strong>Lie</strong> approchent <strong>le</strong> problème. Dans c<strong>et</strong>te Division V termina<strong>le</strong> <strong>de</strong> <strong>le</strong>urouvrage, ils peuvent se « payer <strong>le</strong> luxe » <strong>de</strong> convoquer p<strong>le</strong>inement <strong>le</strong>sthéorèmes <strong>de</strong> classification qu’ils ont mis au point auparavant afin <strong>de</strong>faire voir que la caractérisation <strong>de</strong>s groupes d’isotropie linéarisée tombecomme un fruit mûr par un simp<strong>le</strong> examen <strong>de</strong>s listes <strong>et</strong> <strong>de</strong>s théorèmesqui ont été établis précé<strong>de</strong>mment.En eff<strong>et</strong> (cf. <strong>le</strong> § 95 p. 248 ci-<strong>de</strong>ssous), l’isotropie linéarisée d’unpoint en position généra<strong>le</strong> que l’on place au centre (i.e. à l’origine) d’unnouveau système <strong>de</strong> coordonnées (x ′ 1 , x′ 2 , x′ n ) sera représentée par troisgénérateurs infinitésimaux indépendants :1,2,3∑µ να kµν x ′ µ p ′ ν (k = 1,2, 3),43 — puisque 3 est <strong>le</strong> nombre total <strong>de</strong> va<strong>le</strong>urs propres comptées avec multiplicité—


76 2.9. L’approche infinitésima<strong>le</strong> systématique <strong>de</strong> <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>où l’on a noté p ′ µ := ∂ , qui forment une algèbre <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> que nous noteronsg ′ . Comme l’action est linéaire, el<strong>le</strong> se transm<strong>et</strong> à l’espace projectif∂x ′ µP(R 3 ) = P 2 (R) <strong>et</strong> l’on obtient une nouvel<strong>le</strong> algèbre <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> g dont onpeut représenter <strong>le</strong>s générateurs dans un système <strong>de</strong> coordonnées inhomogènes(x, y). Seu<strong>le</strong> la dilatation x ′ 1 p′ 1 +x′ 2 p′ 2 +x′ 3 p′ 3 disparaît lorsqu’onprojectivise 44 , <strong>et</strong> donc la dimension <strong>de</strong> g vaut <strong>de</strong>ux s’il existe une combinaisonlinéaire <strong>de</strong>s générateurs <strong>de</strong> g ′ qui est éga<strong>le</strong> à c<strong>et</strong>te dilatation (cecas sera exclu dans un instant), <strong>et</strong> el<strong>le</strong> vaut trois sinon.Deux pièces maîtresses entrent alors en scène. Nous avons signaléque l’axiome <strong>le</strong> plus important par sa puissance <strong>de</strong> restriction <strong>de</strong>mandaitque chaque mouvement à un paramètre soient périodique sur <strong>le</strong>séléments linéaires, à un facteur dilatant près. Quand on projectivise,<strong>le</strong> facteur dilatant disparaît, chaque point subit un mouvement rigoureusementpériodique — à moins qu’il ne reste fixe —, <strong>et</strong> cela imposenotamment que tous <strong>le</strong>s points décrivent une courbe fermée. Mais un<strong>et</strong>el<strong>le</strong> circonstance ne se produit que très rarement.Tout d’abord, en dimension 2 <strong>et</strong> bien avant que n’apparaisse <strong>le</strong> problème<strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz, <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> avaient déjà classifié toutes<strong>le</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s projectives réel<strong>le</strong>s à changement <strong>de</strong>coordonnées projective près. Il y en a sept (cf. (30) p. 250 ci-<strong>de</strong>ssous),<strong>et</strong> c’est la première pièce maîtresse :⎧⎪⎨p + y q; p + x q; y q; q;x p + c y q (c≠0, 1); y p − x q + c (x p + yq) (c≠ 0);⎪⎩y p − x q.Ici, (x, y) sont <strong>de</strong>s coordonnées inhomogènes sur P 2 (R) <strong>et</strong> p = ∂ , q = ∂x∂. On vérifie que <strong>le</strong>s cinq premières transformations sont exclues, parce∂yque chacune d’entre el<strong>le</strong> laisse globa<strong>le</strong>ment invariante au moins unedroite projective sur laquel<strong>le</strong> la transformation infinitésima<strong>le</strong> se ramène,si l’on note x une coordonnée indépendante sur une tel<strong>le</strong> droite : 1) oubien à ∂∂; 2) ou bien à x ; <strong>et</strong> alors il est clair dans <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux cas que∂x ∂x<strong>le</strong>s courbes intégra<strong>le</strong>s correspondantes : x(t) = x 0 +t <strong>et</strong> x(t) = x 0 e t nesont pas périodiques. La sixième transformation :rotation + c · dilatation = y p − x q + c (x p + yq)(c≠0)est el<strong>le</strong> aussi exclue, puisque tout point est entraîné autour <strong>de</strong> l’originepar la présence du facteur <strong>de</strong> rotation, tout en étant attiré (ou répulsé)44 El<strong>le</strong> seu<strong>le</strong> donne la transformation projective infinitésima<strong>le</strong> i<strong>de</strong>ntiquement nul<strong>le</strong>.


Chapitre 2. La mobilité helmholtzienne <strong>de</strong> la rigidité 77par <strong>le</strong> facteur <strong>de</strong> dilatation : tout mouvement s’effectue en spira<strong>le</strong>, sanspériodiser.Enfin, la septième <strong>et</strong> <strong>de</strong>rnière transformation infinitésima<strong>le</strong> : y p −x q engendre <strong>le</strong> groupe <strong>de</strong>s rotations, qui convient parfaitement.L’utilisation <strong>de</strong> la <strong>de</strong>uxième pièce maîtresse est encore plus magistra<strong>le</strong>.Dans <strong>le</strong>s chapitres précé<strong>de</strong>nts du Volume III <strong>de</strong> la Theorie<strong>de</strong>r Transformationsgruppen, <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> avaient en eff<strong>et</strong> déjà classifiétoutes <strong>le</strong>s sous-algèbres <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> <strong>de</strong> l’algèbre <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> pgl 2 (R) dugroupe projectif réel en dimension <strong>de</strong>ux. Il <strong>le</strong>ur suffit alors d’examiner,dans c<strong>et</strong>te liste remarquab<strong>le</strong> <strong>et</strong> complète, seu<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>s algèbres<strong>de</strong> <strong>Lie</strong> à <strong>de</strong>ux ou trois paramètres pour exclure systématiquement toutescel<strong>le</strong>s qui contiennent une transformation infinitésima<strong>le</strong> <strong>de</strong> l’une <strong>de</strong>s sixformes précé<strong>de</strong>ntes. C<strong>et</strong> examen presque instantané montre qu’il existeun seul groupe projectif réel à trois paramètres qui convient, à savoir :p + x (x p + y q), q + y (x p + y q), y p − x q,<strong>et</strong> ce groupe n’est autre que <strong>le</strong> projectivisé du groupe <strong>de</strong>s rotations dansl’espace à trois dimensions, à une seu<strong>le</strong> ambiguïté près : la présenceéventuel<strong>le</strong> d’un facteur <strong>de</strong> dilatation qui aurait disparu par projectivisation.Autrement dit, si on revient aux coordonnées homogènes initia<strong>le</strong>s(x ′ 1 , x′ 2 , x′ 3 ), <strong>le</strong>s trois générateurs <strong>de</strong> l’isotropie linéarisée doivent forcémentêtre <strong>de</strong> la forme :x ′ µ p ′ ν − x ′ ν p ′ µ + α µν (x ′ 1 p ′ 1 + x ′ 2 p ′ 2 + x ′ 3 p ′ 3)(µ, ν = 1, 2,3; α µν + α νµ =0).Mais alors un simp<strong>le</strong> examen <strong>de</strong> la condition que ces trois transformationsinfinitésima<strong>le</strong>s doivent être fermées par croch<strong>et</strong> montre (voir lanote p. 252 ci-<strong>de</strong>ssous) que toutes <strong>le</strong>s constantes α µν doivent en faitêtre nul<strong>le</strong>s. En définitive, <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> ont essentiel<strong>le</strong>ment 45 redémontréla proposition <strong>de</strong> Helmholtz p. 73 avec <strong>de</strong> purs moyens <strong>de</strong> théorie <strong>de</strong>sgroupes.Maintenant que l’isotropie linéarisée est caractérisée <strong>et</strong> connue,il reste à rechercher tous <strong>le</strong>s groupes transitifs à six paramètres dontl’isotropie linéarisée est constituée du groupe <strong>de</strong>s rotations euclidiennesdans l’espace :x ′ 1 p′ 2 − x′ 2 p′ 1 , x′ 1 p′ 3 − x′ 3 p′ 1 , x′ 2 p′ 3 − x′ 3 p′ 2 .45 Rappelons toutefois que <strong>le</strong>s hypothèses sont légèrement différentes.


78 2.9. L’approche infinitésima<strong>le</strong> systématique <strong>de</strong> <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>C<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière étape <strong>de</strong> la démonstration, que Helmholtz n’a absolumentpas traitée, comme nous l’avons vu, <strong>Lie</strong> l’a complétée en détail,en appliquant <strong>le</strong>s résultats <strong>de</strong> son traité.Théorème <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>. (cf. p. 268) Si un groupe réel continu <strong>de</strong> l’espace àtrois dimensions est transitif à six paramètres <strong>et</strong> si <strong>le</strong> groupe d’isotropielinéarisée <strong>de</strong> tout point est formé <strong>de</strong>s rotations euclidiennes, alorsce groupe est équiva<strong>le</strong>nt, via une transformation ponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong> <strong>de</strong>c<strong>et</strong> espace, soit au groupe <strong>de</strong>s déplacements euclidiens <strong>de</strong> l’espace <strong>de</strong>s(x, y, z) :p, q, r, xq − yp, xr − zp, yr − zq,soit à l’un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux groupes à six paramètres <strong>de</strong> mouvements non-euclidiens:x 2 p 1 − x 1 p 2 , x 3 p 1 − x 1 p 3 , x 3 p 2 − x 2 p 3 ,x 1(x1 p 1 + x 2 p 2 + x 3 p 3)± p1 , x 1(x1 p 1 + x 2 p 2 + x 3 p 3)± p2 ,x 1(x1 p 1 + x 2 p 2 + x 3 p 3)± p3 ,par <strong>le</strong>quel la surface imaginaire : x 2 1 +x2 2 +x2 3 ±1 = 0 reste invariante46 .46 On vérifie en eff<strong>et</strong> aisément que <strong>le</strong>s trois premières transformations infinitésima<strong>le</strong>sannu<strong>le</strong>nt i<strong>de</strong>ntiquement l’équation, tandis que <strong>le</strong>s trois <strong>de</strong>rnières reproduisentl’équation au facteur 2x k près, k = 1, 2, 3.


Partie II :Introduction mathématiqueà la théorie <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>Prologue : Trois principes <strong>de</strong> penséequi gouvernent la théorie <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>Transformations ponctuel<strong>le</strong>s paramétrées. Soient x = (x 1 , . . .,x n )<strong>de</strong>s coordonnées sur l’espace réel ou comp<strong>le</strong>xe R n ou C n <strong>de</strong> dimensionn 1. Si (x ′ 1 , . . ., x′ n ) sont <strong>de</strong>s coordonnées sur une secon<strong>de</strong> copieauxiliaire d’un même espace réel ou comp<strong>le</strong>xe à n dimensions, on peutconsidérer <strong>le</strong>s applications :x ′ 1 = f 1 (x 1 , . . .,x n ), · · · · · · , x ′ n = f n (x 1 , . . .,x n )définies dans <strong>le</strong> premier espace <strong>et</strong> à va<strong>le</strong>urs dans <strong>le</strong> second espace, où<strong>le</strong>s f i sont <strong>de</strong>s fonctions quelconques <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs n arguments (x 1 , . . .,x n ).L’application :x ↦−→ f(x) = x ′est alors appelée une transformation ponctuel<strong>le</strong> lorsqu’el<strong>le</strong> transforme<strong>de</strong> manière biunivoque <strong>et</strong> différentiab<strong>le</strong> 1 la totalité <strong>de</strong>s points(x 1 , . . .,x n ) <strong>de</strong> l’espace-source en <strong>de</strong>s points (x ′ 1 , . . .,x′ n ) <strong>de</strong> l’espaced’arrivée <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que son application inverse :x ′ ↦−→ f −1 (x ′ ) = xsoit el<strong>le</strong> aussi différentiab<strong>le</strong> 2 <strong>et</strong> biunivoque. Aujourd’hui, on dit quex ↦→ f(x) = x ′ est un difféomorphisme (<strong>de</strong> R n ou C n sur R n ouC n , respectivement). Plus généra<strong>le</strong>ment, on considère <strong>de</strong>s difféomorphismesentre sous-ensemb<strong>le</strong>s ouverts quelconques U <strong>et</strong> U ′ (<strong>de</strong> R n ou<strong>de</strong> C n ).Dans la théorie <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> <strong>de</strong>s groupes continus <strong>de</strong> transformations,l’obj<strong>et</strong>-archétype est constitué <strong>de</strong> transformations ponctuel<strong>le</strong>s :x ′ i = f i(x 1 , . . . x n ; a 1 , . . .,a r )(i = 1 ··· n),1 Au moins <strong>de</strong> classe C 1 , c’est-à-dire que chaque composante f i <strong>de</strong> l’applicationpossè<strong>de</strong> <strong>de</strong>s dérivées partiel<strong>le</strong>s ∂fi∂x k(x 1 , . . .,x n ) dans toutes <strong>le</strong>s directions <strong>de</strong> coordonnéesx k , <strong>et</strong> que ces dérivées partiel<strong>le</strong>s sont partout continues.2 À nouveau : au moins <strong>de</strong> classe C 1 .


80 Trois principes <strong>de</strong> pensée qui gouvernent la théorie <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>qui sont <strong>de</strong> plus paramétrées par un nombre fini r <strong>de</strong> paramètres réelsou comp<strong>le</strong>xes (a 1 , . . .,a r ), à savoir pour chaque a fixé, chaque application:x ′ = f(x; a) =: f a (x)est supposée constituer un difféomorphisme d’un certain domaine 3 <strong>de</strong>l’espace-source sur un autre domaine situé dans un espace d’arrivéeayant la même dimension n <strong>et</strong> muni <strong>de</strong> coordonnées (x ′ 1 , . . .,x′ n ). Ainsi,<strong>le</strong> déterminant jacobien :∂f 1∂f ∂x 1· · · · · · 1∣ ∣∣∣∣∣∣∂x n. . .. . = ∑ ∂f 1 ∂f 2 ∂f nsgn(σ)· · ·∂x∣ ∂f n ∂f∂x 1· · · · · · n σ∈Perm σ(1) ∂x σ(2) ∂x σ(n)n∂x nne s’annu<strong>le</strong> en aucun point du domaine source. Avant d’introduire <strong>le</strong>saxiomes <strong>de</strong> groupe (voir § 4.2), la première question à résoudre est : <strong>de</strong>combien <strong>de</strong> paramètres exactement <strong>le</strong>s transformations x ′ i = f i (x; a)dépen<strong>de</strong>nt-el<strong>le</strong>s réel<strong>le</strong>ment ? Certains paramètres pourraient en eff<strong>et</strong>être superflus, <strong>et</strong> <strong>de</strong>vraient à ce titre être supprimés à l’avance. Or àc<strong>et</strong>te fin, il est crucial <strong>de</strong> formu<strong>le</strong>r explicitement dès <strong>le</strong> début <strong>et</strong> une foispour toutes trois principes <strong>de</strong> pensée concernant l’admission <strong>de</strong>s hypothèsesfondamenta<strong>le</strong>s qui gouvernent la théorie <strong>de</strong>s groupes continusdéveloppée par <strong>Lie</strong>.Hypothèse généra<strong>le</strong> d’analyticité : Courbes, surfaces, variétés, sousvariétés,équations <strong>de</strong> transformation, groupes, sous-groupes, <strong>et</strong>c., tous<strong>le</strong>s obj<strong>et</strong>s mathématiques <strong>de</strong> la théorie seront supposés analytiques(réels ou comp<strong>le</strong>xes), c’est-à-dire que <strong>le</strong>s fonctions qui <strong>le</strong>s représententdans <strong>de</strong>s systèmes <strong>de</strong> coordonnées loca<strong>le</strong>s seront systématiquementsupposées développab<strong>le</strong>s en série entière convergente dans un certaindomaine <strong>de</strong> R k ou <strong>de</strong> C k , pour un certain k 1.Principe <strong>de</strong> relocalisation libre au voisinage d’un point générique :Considérons un obj<strong>et</strong> mathématique local représenté par <strong>de</strong>s fonctionsqui sont analytiques dans un domaine U 1 , <strong>et</strong> supposons qu’un certain« bon » comportement « générique » se produise dans U 1 \D 1 en <strong>de</strong>horsd’un certain sous-ensemb<strong>le</strong> analytique D 1 ⊂ U 1 ; par exemp<strong>le</strong>, l’inversiond’une matrice carrée qui est constituée <strong>de</strong> fonctions analytiquesest possib<strong>le</strong> seu<strong>le</strong>ment en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> l’ensemb<strong>le</strong> D 1 <strong>de</strong>s zéros <strong>de</strong> son3 D’après une définition standard <strong>de</strong> topologie généra<strong>le</strong>, un domaine est un ouvertconnexe non vi<strong>de</strong>.


Présentation mathématique généra<strong>le</strong> 81déterminant 4 , qui est une fonction analytique. Alors on s’autorise à relocaliser<strong>le</strong>s considérations dans tout sous-domaine U 2 ⊂ U 1 \D 1 .D 1 U 3U 2D 2 U3U 1 U 2<strong>Ens</strong>uite, dans U 2 , <strong>de</strong>s raisonnements ultérieurs peuvent <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r quel’on évite un autre sous-ensemb<strong>le</strong> analytique propre D 2 , <strong>et</strong> donc l’ondoit à nouveau relocaliser <strong>le</strong>s considérations dans un sous-domaineU 3 ⊂ U 2 \D 2 , <strong>et</strong> ainsi <strong>de</strong> suite. La plupart <strong>de</strong>s démonstrations <strong>de</strong> laThéorie <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations, <strong>et</strong> tout particulièrement <strong>le</strong>s4Plus généra<strong>le</strong>ment, considérons une matrice rectangulaire G(y) :=(g j i (y))1jm 1in <strong>de</strong> tail<strong>le</strong> n × m dont <strong>le</strong>s éléments gj i = gj i (y) sont <strong>de</strong>s fonctions analytiquesd’un certain nombre <strong>de</strong> variab<strong>le</strong>s y = (y 1 , . . . , y q ) qui sont définies dans uncertain domaine U <strong>de</strong> C q (ou <strong>de</strong> R q ). Pour tout entier ρ tel que 1 ρ min(m, n),on peut former la col<strong>le</strong>ction <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s déterminants <strong>de</strong> tail<strong>le</strong> ρ ×ρ (mineurs) qui sontextraits <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te matrice :∆ j1,...,jρi 1,...,i ρ(y) :=∣g j1i 1(y) · · · g jρi 1(y)·· · · · ··.g j1i ρ(y) · · · g jρi ρ(y) ∣En partant <strong>de</strong> ρ := min(m, n), si tous ces déterminants sont i<strong>de</strong>ntiquement nuls (entant que fonctions <strong>de</strong> la variab<strong>le</strong> y), on passe alors <strong>de</strong> la tail<strong>le</strong> ρ à la tail<strong>le</strong> juste inférieureρ − 1, on forme tous <strong>le</strong>s mineurs, on teste <strong>le</strong>ur annulation i<strong>de</strong>ntique, <strong>et</strong> onrecommence. Le rang générique ρ ∗ <strong>de</strong> la matrice G(y) est alors <strong>le</strong> plus grand entier ρtel qu’il existe au moins un tel mineur non i<strong>de</strong>ntiquement nul, tous <strong>le</strong>s mineurs d’un<strong>et</strong>ail<strong>le</strong> strictement supérieure étant i<strong>de</strong>ntiquement nuls. On a ρ ∗ = 0 si <strong>et</strong> seu<strong>le</strong>mentsi toutes <strong>le</strong>s fonctions g j i (y) sont nul<strong>le</strong>s (cas inintéressant), <strong>et</strong> sinon, on a en toutegénéralité : 1 ρ ∗ min(m, n). Enfin, si l’on introduit <strong>le</strong> lieu :{}D ∗ := y ∈ C q : ∆ j1,...,j ρ ∗i (y) = 0, ∀ i 1,...,i ρ ∗ 1, . . .,i ρ ∗, ∀ j 1 , . . . , j ρ ∗<strong>de</strong>s points y en <strong>le</strong>squels tous <strong>le</strong>s mineurs <strong>de</strong> tail<strong>le</strong> ρ ∗ × ρ ∗ s’annu<strong>le</strong>nt, alors ce lieu D ∗est un sous-ensemb<strong>le</strong> analytique propre — en particulier fermé <strong>et</strong> <strong>de</strong> complémentaireU\D ∗ ouvert <strong>et</strong> <strong>de</strong>nse — qui a par définition la propriété qu’en tout point y ∈ U\D ∗ ,au moins un mineur <strong>de</strong> tail<strong>le</strong> ρ ∗ × ρ ∗ ne s’annu<strong>le</strong> pas, <strong>et</strong> comme tous <strong>le</strong>s mineurs d<strong>et</strong>ail<strong>le</strong> strictement supérieure s’annu<strong>le</strong>nt i<strong>de</strong>ntiquement par construction, on en déduitla propriété remarquab<strong>le</strong> : en tout point y ∈ U\D ∗ , <strong>le</strong> rang <strong>de</strong> la matrice G(y) estmaximal, égal à son rang générique ρ ∗ . Cas particulier : lorsqu’on a une matricecarrée <strong>de</strong> déterminant non i<strong>de</strong>ntiquement nul, i.e. ρ ∗ = m = n, c<strong>et</strong>te matrice estinversib<strong>le</strong> en tout point y ∈ U\D ∗ .


82 Trois principes <strong>de</strong> pensée qui gouvernent la théorie <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>théorèmes <strong>de</strong> classification, autorisent un certain nombre <strong>de</strong> tel<strong>le</strong>s relocalisations,souvent sans aucune mention <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong>,un tel acte <strong>de</strong> pensée étant considéré comme justifié à l’avance par lanécessité d’étudier en premier lieu <strong>le</strong>s obj<strong>et</strong>s génériques, eux-mêmesdéjà extrêmement riches <strong>et</strong> diversifiés.Toutefois, lorsque nous traduirons <strong>et</strong> ré-énoncerons au Chapitre 5<strong>le</strong>s principaux (<strong>et</strong> magistraux) théorèmes <strong>de</strong> classification qui, dans <strong>le</strong>Tome III, précè<strong>de</strong>nt <strong>le</strong>s solutions comp<strong>le</strong>xes qu’<strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> apportentau problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz, nous rappel<strong>le</strong>rons explicitement,précisément <strong>et</strong> rigoureusement toutes <strong>le</strong>s hypothèses <strong>de</strong> généricité quisont requises pour la validité <strong>de</strong>s résultats, afin qu’il ne subsiste aucuneambiguïté d’interprétation pour <strong>le</strong> <strong>le</strong>cteur contemporain.Ne nommer aucun domaine d’existence : Sans introduire <strong>de</strong> dénominationou <strong>de</strong> notation spécifique, <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> écrivent ordinairement<strong>le</strong> voisinage [<strong>de</strong>r Umgebung] d’un point (ou au sens absolu), <strong>de</strong>la même manière que l’on par<strong>le</strong> du voisinage d’une maison, ou <strong>de</strong>s environsd’une vil<strong>le</strong>, tandis que la topologie contemporaine conceptualiseun voisinage (habituel<strong>le</strong>ment « p<strong>et</strong>it »), parmi une infinité <strong>de</strong> voisinagesexistants. Contrairement à ce que la mythologie formaliste du20 ème sièc<strong>le</strong> aime à faire accroire <strong>de</strong>puis <strong>le</strong>s controverses entre <strong>le</strong>s géomètres<strong>de</strong> Leipzig <strong>et</strong> l’éco<strong>le</strong> <strong>de</strong> Berlin, <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> ont toujours misen évi<strong>de</strong>nce, lorsque c’était nécessaire, la nature loca<strong>le</strong> <strong>de</strong>s concepts <strong>de</strong>la théorie <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations. Nous illustrerons notammentc<strong>et</strong>te constatation en étudiant <strong>le</strong>s tentatives que <strong>Lie</strong> a entreprises pouréconomiser l’axiome d’existence <strong>de</strong>s éléments inverses dans sa théorie<strong>de</strong>s groupes continus <strong>de</strong> transformations (§ 4.3). Certes, il est vrai que<strong>le</strong>s résultats <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>, gagneraient en précision technique à être énoncésen spécifiant tous <strong>le</strong>s domaines d’existence, mais il est plausib<strong>le</strong> que<strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> ait rapi<strong>de</strong>ment réalisé que <strong>le</strong> fait <strong>de</strong> ne pas donner <strong>de</strong> nomaux voisinages, <strong>et</strong> d’éviter <strong>de</strong> la sorte tout symbolisme essentiel<strong>le</strong>mentsuperflu, était <strong>le</strong> moyen <strong>le</strong> plus efficace pour conduire à <strong>le</strong>ur terme <strong>de</strong>sthéorèmes <strong>de</strong> classification <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> envergure.En conséquence, nous adopterons <strong>le</strong> sty<strong>le</strong> (économique) <strong>de</strong> pensée<strong>de</strong> <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong>, <strong>et</strong> nous présupposerons, sans pour autant effectuer <strong>de</strong>srappels fréquents, que :• tous <strong>le</strong>s obj<strong>et</strong>s mathématiques sont analytiques ;• <strong>le</strong>s relocalisations génériques sont librement autorisées ;• <strong>le</strong>s ensemb<strong>le</strong>s ouverts sont souvent p<strong>et</strong>its, rarement nommés,non vi<strong>de</strong>s, <strong>et</strong> toujours connexes.


Chapitre 3 :Théorèmes fondamentauxsur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations3.1. Paramètres essentiels. Comme exemp<strong>le</strong> d’application <strong>de</strong> ces troisprincipes généraux qui gouvernent la pensée <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>, montrons commenton peut s’assurer que tous <strong>le</strong>s paramètres dans une col<strong>le</strong>ction d’équations<strong>de</strong> transformation sont effectivement présents ; si tel n’est pas <strong>le</strong>cas, montrons comment on peut ramener ces équations à d’autres équations<strong>de</strong> transformations équiva<strong>le</strong>ntes qui comportent un nombre inférieur<strong>de</strong> paramètres. Ce problème à résoudre obéit à une exigence incontournab<strong>le</strong>d’économie. Supprimer à l’avance tous <strong>le</strong>s paramètres superfluslorsqu’il en existe perm<strong>et</strong>tra certainement d’éviter d’avoir à traiter<strong>de</strong>s cas parasites dans l’énoncé <strong>de</strong>s théorèmes principaux <strong>de</strong> la théorie.On supposera pour fixer <strong>le</strong>s idées que <strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>sx = (x 1 , . . .,x n ) ∈ C n sont comp<strong>le</strong>xes <strong>et</strong> que <strong>le</strong>s paramètresa = (a 1 , . . ., a r ) sont eux aussi comp<strong>le</strong>xes, étant entendu que la théoriefondamenta<strong>le</strong> est inchangée 1 lorsque x ∈ R n <strong>et</strong> a ∈ R r , ou mêmelorsque 2 x ∈ C n <strong>et</strong> a ∈ R r .Dans <strong>de</strong>s équations <strong>de</strong> transformations quelconques x ′ = f(x; a),toutes <strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s (x 1 , . . .,x n ) sont par hypothèse présentes, puisquex ↦→ f a (x) est un difféomorphisme local pour tout a. Mais aucune supposition,excepté la finitu<strong>de</strong>, n’a été faite sur <strong>le</strong>s paramètres (a 1 , . . ., a r ).L’idée principa<strong>le</strong> consiste à développer <strong>le</strong>s fonctions f i <strong>de</strong>s équations<strong>de</strong> transformation :x ′ i = f i(x 1 , . . .,x n ; a 1 , . . .,a r ) (i =1··· n)1 Lorsqu’ils ne précisent pas <strong>le</strong> domaine <strong>de</strong> variation <strong>de</strong>s quantités numériques,<strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> sous-enten<strong>de</strong>nt qu’el<strong>le</strong>s sont comp<strong>le</strong>xes. Pour <strong>le</strong>s théorèmes <strong>de</strong> classificationsur R qui prolongent <strong>et</strong> qui utilisent <strong>le</strong>s théorèmes <strong>de</strong> classification sur C, <strong>le</strong>s<strong>de</strong>ux auteurs précisent alors explicitement que variab<strong>le</strong>s <strong>et</strong> paramètres sont tous <strong>de</strong>uxréels.2 Ce cas intermédiaire n’est en général pas étudié par <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong>, mais il <strong>le</strong> serapar Élie Cartan.


84 3.1. Paramètres essentielsen série entière par rapport à x − x 0 dans un voisinage connexe (nonnommé) d’un point fixé x 0 = (x 10 , . . .,x n0 ), ce qui nous donne :f i (x; a) = ∑ α∈N n F i α (a) (x − x 0) α ;ici, pour tout multiindice α = (α 1 , . . .,α n ) ∈ N n , nous avons noté <strong>de</strong>manière abrégée <strong>le</strong> monôme :(x − x 0 ) α = (x 1 − x 10 ) α1 · · ·(x n − x n0 ) αn .Comme coefficients <strong>de</strong>s (multi-)puissances (x−x 0 ) α dans une tel<strong>le</strong> sérieentière, il apparaît un nombre infini <strong>de</strong> certaines fonctions analytiquesF i α = F i α(a) <strong>de</strong>s paramètres (a 1 , . . .,a r ) qui sont définies dans undomaine fixe <strong>de</strong> C r . Alors nous prétendons que <strong>le</strong>s paramètres a k quisont éventuel<strong>le</strong>ment superflus peuvent être détectés en étudiant <strong>le</strong> ranggénérique <strong>de</strong> l’application infinie <strong>de</strong>s coefficients :F ∞ : C r ∋ a ↦−→ ( F i α(a) ) α∈N n ,1in∈ C ∞ ,c’est-à-dire, d’après la définition même du rang (générique) d’une application,en étudiant <strong>le</strong> rang générique 3 ρ ∞ <strong>de</strong> sa matrice jacobienne :( ∂Fi ) α∈N n , 1inJac F ∞ (a) = α(a) ,∂a j 1jrqui est considérée ici comme une matrice ayant r lignes in<strong>de</strong>xées parl’entier j, <strong>et</strong> possédant une infinité <strong>de</strong> colonnes, in<strong>de</strong>xées simultanémentpar <strong>le</strong> multiindice α <strong>et</strong> par l’entier i.À première vue, ces considérations techniques peuvent paraîtrecomp<strong>le</strong>xes, mais il n’en est rien, puisqu’il est au contraire tout à faitnaturel que la manière dont <strong>le</strong>s fonctions f i (x; a) dépen<strong>de</strong>nt réel<strong>le</strong>ment<strong>de</strong>s paramètres (a 1 , . . .,a r ) doive être déchiffrée sur l’ensemb<strong>le</strong><strong>de</strong>s fonctions-coefficients F i α (a 1, . . .,a r ).Si par exemp<strong>le</strong> il existe un paramètre, disons a 1 , tel qu’aucunefonction f i (x; a) n’en dépend, d’où il décou<strong>le</strong> que tous <strong>le</strong>s coefficientsF i α (a) sont indépendants <strong>de</strong> a 1, alors c<strong>et</strong>te application F ∞ a un rangqui est trivia<strong>le</strong>ment r − 1, parce que la première ligne <strong>de</strong> sa matricejacobienne Jac F ∞ (a) est alors i<strong>de</strong>ntiquement nul<strong>le</strong>, <strong>et</strong> puisque <strong>le</strong> rang3 Pour une définition, voir la note p. 81, dont <strong>le</strong>s considérations se généralisentsans modification au cas où il y a une infinité <strong>de</strong> colonnes. Techniquement, ρ ∞ estdéfini comme <strong>le</strong> plus grand entier ρ min(r, ∞) tel qu’il existe au moins un mineur<strong>de</strong> tail<strong>le</strong> ρ × ρ dans c<strong>et</strong>te matrice jacobienne ( ∂Uαi∂a j(a) ) α∈N n , 1in(<strong>de</strong> tail<strong>le</strong> r × ∞)1jrqui ne s’annu<strong>le</strong> pas i<strong>de</strong>ntiquement en tant que fonction <strong>de</strong> a. Alors tous <strong>le</strong>s mineurs<strong>de</strong> tail<strong>le</strong> (ρ ∞ + 1) × (ρ ∞ + 1) s’annu<strong>le</strong>nt i<strong>de</strong>ntiquement.


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 85générique d’une matrice est en toute circonstance inférieur au nombre<strong>de</strong> ses lignes.En toute généralité, si ρ ∞ désigne <strong>le</strong> rang générique <strong>de</strong> JacF ∞ <strong>et</strong> sion définit <strong>le</strong> sous-ensemb<strong>le</strong> D ∞ <strong>de</strong>s zéros communs à tous ses mineurs<strong>de</strong> tail<strong>le</strong> ρ ∞ × ρ ∞ :∣∂F i 1α 1∂F i 1α 1∂a jρ∞(a)∂a j1(a) · · ··· · · · ··∂F iρ∞αρ∞∂a j1(a) · · ·∂F iρ∞αρ∞∂a jρ∞(a)alors D ∞ est un sous-ensemb<strong>le</strong> analytique propre <strong>de</strong> l’espace <strong>de</strong>s paramètresa, <strong>et</strong> pour tout paramètre a 0 qui n’appartient pas à ce sousensemb<strong>le</strong><strong>de</strong> paramètres « exceptionnels », on peut tout d’abord relocaliser<strong>le</strong>s considérations dans un p<strong>et</strong>it voisinage convenab<strong>le</strong> 4 <strong>de</strong> a 0 ,<strong>et</strong> ensuite, grâce à une application du théorème du rang constant, onpeut trouver un difféomorphisme approprié <strong>de</strong> l’espace <strong>de</strong>s paramètresa ↦→ a = a(a) fixant a 0 , ce qui donne <strong>de</strong> nouvel<strong>le</strong>s équations <strong>de</strong> transformations:x ′ i = f (i x1 , . . .,x n ; a 1 (a), . . .,a r (a) )( )=: f i x1 , . . .,x n ; a 1 , . . .,a r (i = 1 ···n),<strong>de</strong> manière à ce que <strong>le</strong>s nouveaux coefficients F i α(a)obtenus en développant<strong>le</strong>s nouvel<strong>le</strong>s fonctions f i en série entière par rapport à (x −x 0 )<strong>de</strong>viennent absolument indépendants <strong>de</strong>s r − ρ ∞ <strong>de</strong>rniers paramètresa ρ∞+1, . . .,a r , qui sont ainsi <strong>de</strong>venus visib<strong>le</strong>ment superflus. Sans démonstration(voir [110]), formulons l’énoncé rigoureux <strong>de</strong> réduction.Théorème. Loca<strong>le</strong>ment au voisinage <strong>de</strong> tout paramètre générique a 0en <strong>le</strong>quel l’application infinie <strong>de</strong>s coefficients a ↦→ F ∞ (a) est <strong>de</strong> rangmaximal, constant, <strong>et</strong> égal à son rang générique ρ ∞ , il existe à lafois un changement local <strong>de</strong> paramètres a ↦→ ( b 1 (a), . . ., b ρ∞ (a) ) =:(b 1 , . . .,b ρ∞ ) qui fait baisser <strong>le</strong> nombre <strong>de</strong>s paramètres <strong>de</strong> r à ρ ∞ , <strong>et</strong><strong>de</strong>s nouvel<strong>le</strong>s équations <strong>de</strong> transformations :( )x ′ i = g i x; b1 , . . .,b ρ∞ (i = 1 ···n)∣4 Ici <strong>et</strong> dans la ce qui va suivre, ce qui peut être dit au voisinage <strong>de</strong>s paramètresexceptionnels qui appartiennent à D ∞ requerrait <strong>de</strong>s outils sophistiqués <strong>de</strong> la théorie<strong>de</strong>s singularités qui sont au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> la portée du présent travail.


86 3.1. Paramètres essentielsdépendant <strong>de</strong> seu<strong>le</strong>ment ρ ∞ paramètres qui redonnent par substitution<strong>le</strong>s anciennes équations <strong>de</strong> transformations :g i(x; b(a))≡ fi (x; a)(i = 1 ··· n).Définition. Les paramètres (a 1 , . . .,a r ) d’équations <strong>de</strong> transformationsdonnées x ′ i = f i(x, a), i = 1, . . .,n, sont dits essentiels si, après développementen série entière f i (x, a) = ∑ α∈N n F i α(a) (x − x 0 ) α autourd’un point x 0 , <strong>le</strong> rang générique ρ ∞ <strong>de</strong> l’application infinie <strong>de</strong>s coefficientsF ∞ : a ↦−→ ( F i α (a)) α∈N n ,1in est maximal possib<strong>le</strong>, égal aunombre r <strong>de</strong>s paramètres, à savoir : ρ ∞ = r.Dans ce cas, <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> disent <strong>de</strong>s équations <strong>de</strong> transformationsqu’el<strong>le</strong>s comportent r-termes [r-gliedrig]. Grâce à ce théorème, on peuttoujours — pourvu que l’on adm<strong>et</strong>te <strong>le</strong> principe <strong>de</strong> relocalisation libreen un point générique 5 — supposer sans aucune perte <strong>de</strong> généralité que<strong>le</strong>s paramètres <strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>s équations <strong>de</strong> transformations sont essentiels.Du point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> la philosophie <strong>de</strong>s mathématiques, <strong>le</strong> paramétriquepeut être <strong>et</strong> doit être ainsi définitivement réduit à sa qualitéessentiel<strong>le</strong>. Par conséquent, dans ce qui va suivre, <strong>le</strong>s paramètres seronttoujours supposés essentiels.Pour terminer sur l’essentialité <strong>de</strong>s paramètres, voici encore un critèreeffectif qui sera utilisé plus loin <strong>de</strong> manière inci<strong>de</strong>nte, mais quenous énoncerons sans fournir <strong>de</strong> démonstration (voir [110]) afin <strong>de</strong> nepas r<strong>et</strong>ar<strong>de</strong>r la présentation <strong>de</strong>s concepts centraux.Théorème. Les trois conditions suivantes sont équiva<strong>le</strong>ntes :(i) Dans <strong>le</strong>s équations <strong>de</strong> transformations :x ′ i = f i(x 1 , . . .,x n ; a 1 , . . .,a r ) = ∑ α∈N n F i α (a) (x −x 0) α(i =1··· n),<strong>le</strong>s paramètres a 1 , . . .,a r ne sont pas essentiels.(ii) (Par définition) Le rang générique ρ ∞ <strong>de</strong> la matrice jacobienneinfinie :( ∂Fi ) α∈N n ,1inJac F ∞ (a) = α(a)∂a j 1jr5 Sans adm<strong>et</strong>tre ce principe, la théorie <strong>de</strong>s singularités <strong>de</strong>vrait être convoquée.Néanmoins, lorsque <strong>le</strong>s équations <strong>de</strong> x ′ i = f i(x; a) constituent un groupe continufini local <strong>de</strong> transformations au sens qui est défini dans <strong>le</strong> § 3.2 ci-<strong>de</strong>ssous, on vérifi<strong>et</strong>echniquement (cf. [110]) qu’aucune relocalisation n’est nécessaire pour éliminer <strong>le</strong>sparamètres superflus, la raison « philosophique » étant que tout groupe agit transitivementsur lui-même, ce qui force <strong>le</strong>s rangs (génériques) à être constants.


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 87est strictement inférieur à r.(iii) Loca<strong>le</strong>ment dans un voisinage <strong>de</strong> tout (x 0 , a 0 ), il existe unchamp <strong>de</strong> vecteurs non i<strong>de</strong>ntiquement nul sur l’espace <strong>de</strong>s paramètres:n∑T = τ k (a) ∂ ,∂a kk=1dont <strong>le</strong>s coefficients τ k (a) sont analytiques dans un voisinage <strong>de</strong>a 0 , qui annihi<strong>le</strong> toutes <strong>le</strong>s fonctions f i (x; a) :n∑ ∂f i0 ≡ T f i = τ k = ∑ r∑τ k (a) ∂F αi (a) (x−x 0 ) α (i = 1 ··· n).∂a k ∂aα∈N nkk=1k=1Lorsque l’on sait déjà (cf. <strong>le</strong> premier théorème) que <strong>le</strong>s r − ρ ∞ <strong>de</strong>rniersparamètres (a ρ∞+1, . . ., a r ) sont purement absents <strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>sfonctions f i , c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière condition (iii) exprime tout simp<strong>le</strong>ment<strong>le</strong> fait évi<strong>de</strong>nt que <strong>le</strong>s fonctions f i sont annulées i<strong>de</strong>ntiquement par∂ / ∂a ρ∞+1, . . ., ∂ / ∂a r .Plus généra<strong>le</strong>ment, si ρ ∞ désigne <strong>le</strong> rang générique <strong>de</strong> l’applicationinfinie <strong>de</strong>s coefficients :F ∞ : a ↦−→ ( Fα i (a)) 1in,α∈N n<strong>et</strong> si ρ ∞ r−1, alors on démontre que loca<strong>le</strong>ment dans un voisinage d<strong>et</strong>out (x 0 , a 0 ), il existe exactement r−ρ ∞ champs <strong>de</strong> vecteurs analytiques(mais pas plus) :T µ =n∑k=1τ µk (a) ∂∂a k(µ=1··· r−ρ ∞),satisfaisant <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux propriétés suivantes :• la dimension <strong>de</strong> l’espace vectoriel qu’ils engendrentVect ( T 1∣∣a , . . .,T r−ρ∞∣∣a)est éga<strong>le</strong> à r − ρ ∞ en tout paramètre a en <strong>le</strong>quel <strong>le</strong> rang <strong>de</strong> F ∞ estmaximal égal à ρ ∞ ;• chacune <strong>de</strong> ces dérivations T µ annihi<strong>le</strong> i<strong>de</strong>ntiquement toutes <strong>le</strong>sfonctions f i (x; a) :0 ≡ T µ f i =r∑k=1τ µk (a) ∂f i∂a k(x; a)(i = 1 ··· n; µ =1··· r−ρ ∞).3.2. Concept <strong>de</strong> groupe <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> local. Nous restituons ici <strong>le</strong>s définitionsfondamenta<strong>le</strong>s <strong>et</strong> <strong>le</strong>s théorèmes, sans insister sur l’aspect purement


88 3.2. Concept <strong>de</strong> groupe <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> localtechnique qui exige, en toute rigueur, <strong>de</strong> préciser quand <strong>et</strong> comment l’ondoit rap<strong>et</strong>isser <strong>le</strong>s ouverts dans <strong>le</strong>squels <strong>le</strong>s obj<strong>et</strong>s sont définis. Dans<strong>le</strong>s premières pages <strong>de</strong> la Theorie <strong>de</strong>r Transformationsgruppen, <strong>Engel</strong><strong>et</strong> <strong>Lie</strong> exposent <strong>le</strong> principe général <strong>de</strong>s voisinages emboîtés, avant <strong>de</strong>choisir <strong>de</strong> se dispenser <strong>de</strong> <strong>le</strong>s nommer afin d’alléger la présentation.En dimension n 1 arbitraire, un groupe continu fini <strong>de</strong> transformationssur C n est une famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> transformations ponctuel<strong>le</strong>s analytiquesparamétrée par un nombre fini r <strong>de</strong> paramètres :x ′ i = f i(x 1 , . . .,x n ; a 1 , . . .,a r )(i = 1 ···n)qui satisfait <strong>le</strong>s trois propriétés suivantes.Loi <strong>de</strong> composition : À chaque fois qu’el<strong>le</strong> est bien définie, la successionx ′ = f(x; a) <strong>et</strong> x ′′ = f(x ′ ; b) <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux tel<strong>le</strong>s transformations, à savoir :x ′′ = f ( f(x; a); b ) = f(x; c)s’i<strong>de</strong>ntifie toujours à une transformation <strong>de</strong> la même famil<strong>le</strong>, pour uncertain nouveau paramètre :c = m(a, b)qui est défini <strong>de</strong> manière précise <strong>et</strong> unique par une certaine applicationanalytique loca<strong>le</strong> m : C r × C r → C r , laquel<strong>le</strong>, <strong>de</strong> son propre côté,hérite automatiquement <strong>de</strong> la propriété d’associativité qu’ont <strong>le</strong>s difféomorphismespar composition :m ( m(a, b), c ) = m ( a, m(b, c) ) .Existence d’un élément i<strong>de</strong>ntité : Il existe un paramètre spécial e =(e 1 , . . .,e r ) tel que f(x; e) ≡ x se réduit à l’application i<strong>de</strong>ntique.Loi <strong>de</strong> multiplication <strong>de</strong> groupe sous-jacente : L’application analytique(a, b) ↦−→ m(a, b), qui peut aussi être écrite <strong>de</strong> manière alternative <strong>et</strong>plus brève en utilisant un symbo<strong>le</strong> <strong>de</strong> type multiplication : (a, b) ↦−→a · b, est une loi <strong>de</strong> groupe continue, au sens où :• Pour tout a, on doit avoir : a · e = e · a = a, une propriété quidécou<strong>le</strong> en fait <strong>de</strong> la loi <strong>de</strong> composition :f(x; a · e) = f ( f(x; a); e ) = f(x; a) = f ( f(x; e); a ) = f(x; e · a),grâce à l’unicité postulée à l’instant <strong>de</strong> c = a · b.• De même, l’associativité héritée (a · b) · c = a · (b · c) doit valoir.• Existence d’éléments inverses : Enfin, comme <strong>de</strong>rnier axiomequi ne s’avère pas être conséquence élémentaire <strong>de</strong> la loi <strong>de</strong> multiplication<strong>de</strong> groupe, il doit exister un difféomorphisme local analytique


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 89i : C r → C r défini dans un voisinage <strong>de</strong> e avec i(e) = e tel que :a · i(a) = i(a) · a = e,à savoir : i(a) représente l’inverse <strong>de</strong> a pour la structure <strong>de</strong> groupe, <strong>et</strong><strong>de</strong> plus, a ↦→ i(a) est une application analytique, nécessairement undifféomorphisme local au voisinage <strong>de</strong> e. En particulier, si l’on réécritmaintenant que la composition 6 :f ( f(x; a); b ) = f(x; a · b)est exécutée par la multiplication <strong>de</strong> groupe entre <strong>le</strong>s paramètres, on endéduit formel<strong>le</strong>ment que :f ( f(x; a); i(a) ) ≡ f(x; a·i(a)) ≡ x ≡ f(x; i(a)·a) ≡ f ( f(x; i(a)); a ) ,ce qui montre que x ↦→ f i(a) (x) est <strong>le</strong> difféomorphisme inverse <strong>de</strong> x ↦→f a (x).Il sera uti<strong>le</strong> pour la suite <strong>de</strong> mémoriser <strong>le</strong> fait que dans la terminologie<strong>de</strong> <strong>Lie</strong>, un « groupe continu fini <strong>de</strong> transformations » signifieprécisément une action analytique loca<strong>le</strong> effective 7 x ′ = f(x; a), surune variété <strong>de</strong> dimension finie n, d’un groupe <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> analytique local <strong>de</strong>dimension r. <strong>Lie</strong> n’insiste pas en général sur l’hypothèse sous-entendued’analyticité, mais il utilise à la place <strong>le</strong> mot « continu », afin <strong>de</strong> marquer<strong>le</strong> contraste entre sa propre théorie <strong>et</strong> la théorie <strong>de</strong> Galois discrète<strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong> substitutions <strong>de</strong>s racines d’une équation algébrique 8 .Ce que nous appelons aujourd’hui un groupe <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> local, à savoirun espace C r (ou R r ) localisé autour d’un certain point e <strong>et</strong> munid’une « loi <strong>de</strong> multiplication <strong>de</strong> groupe » analytique loca<strong>le</strong> (a, b) ↦−→m(a, b) = a · b <strong>et</strong> d’une application « élément inverse » a ↦→ i(a), estappelé par <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> « groupe <strong>de</strong>s paramètres 9 d’un groupe <strong>de</strong> transformations».6 Dans la suite, pour tout a fixé, <strong>le</strong> difféomorphisme local x ↦→ f(x; a) seraoccasionnel<strong>le</strong>ment écrit x ↦→ f a (x).7 Est effective ([125]) une action loca<strong>le</strong> <strong>de</strong> groupe <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> local tel<strong>le</strong> que pour toutparamètre a distinct du paramètre i<strong>de</strong>ntité, <strong>le</strong> difféomorphisme local x ↦→ f a (x) nese réduit pas à l’i<strong>de</strong>ntité. On démontre aisément qu’une action analytique <strong>de</strong> groupe<strong>de</strong> <strong>Lie</strong> est effective si <strong>et</strong> seu<strong>le</strong>ment si <strong>le</strong>s paramètres <strong>de</strong> la famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> transformationsqu’el<strong>le</strong> définit sont essentiels.8 Voir [68] pour une excel<strong>le</strong>nte étu<strong>de</strong> historique.9 Les pages 401–429 du volume I <strong>de</strong> la Theorie <strong>de</strong>r Transformationsgruppen([40]) sont consacrées à <strong>le</strong>ur étu<strong>de</strong> généra<strong>le</strong>.


90 3.2. Concept <strong>de</strong> groupe <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> localPossibilité <strong>de</strong> préciser rigoureusement <strong>le</strong>s hypothèses <strong>de</strong> lieu. Sans rem<strong>et</strong>tre encause <strong>le</strong>s trois principes <strong>de</strong> pensée qui seront appliqués constamment par la suite, signalonsque l’on peut aisément formu<strong>le</strong>r <strong>de</strong>s hypothèses précises <strong>et</strong> rigoureuses quantaux domaines d’existence d’un groupe <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> local.Ici, on doit observer que l’on a fixé <strong>le</strong> comportement <strong>de</strong>s fonctionsf i(x; a) seu<strong>le</strong>ment à l’intérieur <strong>de</strong>s régions [Bereich] (x) <strong>et</strong> (a).Par conséquent, nous avons la permission <strong>de</strong> substituer l’expressionx ′ ν = f ν(x, a) dans <strong>le</strong>s équations x ′′i = f i(x ′ , b) seu<strong>le</strong>ment lorsque <strong>le</strong> système<strong>de</strong> va<strong>le</strong>urs [Werthsystem] x ′ 1, . . . , x ′ n se trouve dans la région (x). C’est pourquoinous sommes forcé d’ajouter, aux hypothèses remplies jusqu’à maintenant par<strong>le</strong>s régions (x) <strong>et</strong> (a), la supposition suivante : il doit être possib<strong>le</strong> d’indiquer,à l’intérieur <strong>de</strong>s régions (x) <strong>et</strong> (a), <strong>de</strong>s sous-régions respectives ((x)) <strong>et</strong> ((a))d’une nature tel<strong>le</strong> que <strong>le</strong>s x ′ i restent toujours dans la région (x) lorsque <strong>le</strong>s x ise meuvent [laufen] arbitrairement dans ((x)) <strong>et</strong> quand <strong>le</strong>s a k se meuvent arbitrairementdans ((a)) ; nous exprimons cela brièvement <strong>de</strong> la manière suivante :la région x ′ = f`((x)) ((a))´ doit tomber [hineinfal<strong>le</strong>n] entièrement dans la région(x).D’après ces conventions [Fests<strong>et</strong>zungen], si on choisit x 1, . . . , x n dans larégion ((x)) <strong>et</strong> a 1, . . . , a r dans la région ((a)), on peut réel<strong>le</strong>ment effectuer lasubstitution x ′ k = f k (x,a) dans l’expression f i(x ′ 1, . . . , x ′ n, b 1, . . . , b n) ; c’est-àdire,lorsque que x 0 1, . . . , x 0 n désigne un système <strong>de</strong> va<strong>le</strong>urs arbitraire dans larégion ((x)), l’expression :f i`f1(x, a),...,f n(x,a), b 1, . . . , b n´peut être développée, dans <strong>le</strong> voisinage du système <strong>de</strong> va<strong>le</strong>urs x 0 k, commeune série entière ordinaire en x 1 − x 0 1, . . . , x n − x 0 n ; <strong>le</strong>s coefficients <strong>de</strong> c<strong>et</strong>tesérie entière sont <strong>de</strong>s fonctions <strong>de</strong> a 1, . . . , a r, b 1, . . . , b r <strong>et</strong> ils se comportentrégulièrement [verhalten sich regulär], lorsque <strong>le</strong>s a k sont arbitraires dans ((a)) <strong>et</strong><strong>le</strong>s b k arbitraires dans (a). [40], pp. 15–16.Reformulons ces conditions avec une optique purement loca<strong>le</strong>. Si(x 1 , . . . , x n ) ∈ C n sont <strong>le</strong>s coordonnées comp<strong>le</strong>xes considérées, on choisirala norme :|x| := max1in |x i|,où |w| = √ ww désigne <strong>le</strong> modu<strong>le</strong> d’un nombre comp<strong>le</strong>xe w ∈ C. Pour <strong>de</strong>s « rayons »variés ρ > 0, on considère alors <strong>le</strong>s ouverts spécifiques centrés en l’origine, appelésaujourd’hui polydisques :∆ n ρ := { x ∈ C n : |x| < ρ } .Par ail<strong>le</strong>urs, on munit aussi l’espace <strong>de</strong>s paramètres (a 1 , . . . , a r ) ∈ C r <strong>de</strong> la normesimilaire :|a| := max1kr |a k|,<strong>et</strong> pour <strong>de</strong>s réels strictement positifs σ > 0 variés, on introduit <strong>le</strong>s ouverts :□ r σ := { a ∈ C r : |a| < σ } .Voici alors comment l’on peut formu<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s axiomes <strong>de</strong> groupe <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> en localisanttoutes <strong>le</strong>s considérations autour <strong>de</strong> l’élément i<strong>de</strong>ntité. Eu égard au caractère purementlocal qui est visé, <strong>le</strong>s fonctions f i (x; a) seront supposées définies lorsque |x| < ρ 1


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 91<strong>et</strong> lorsque |a| < σ 1 , pour un certain ρ 1 > 0 <strong>et</strong> pour un certain σ 1 > 0, tous <strong>de</strong>ux« p<strong>et</strong>its ». L’élément i<strong>de</strong>ntité e ∈ C r correspondra à l’origine 0 ∈ C r , c’est-à-dire quel’on a :f i (x 1 , . . .,x n : 0, . . .,0) ≡ x i (i =1··· n).Afin que la composition <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux transformations successives x ′ = f(x; a) <strong>et</strong> x ′′ =f(x ′ ; b) soit bien définie, nous rap<strong>et</strong>issons ρ 1 en un certain ρ 2 suffisamment p<strong>et</strong>it avec0 < ρ 2 < ρ 1 <strong>et</strong> nous rap<strong>et</strong>issons σ 1 en un certain σ 2 suffisamment p<strong>et</strong>it avec 0


92 3.3. Principe <strong>de</strong> raison suffisante <strong>et</strong> axiome d’inverseêtre considéré comme effectuant une permutation (différentiab<strong>le</strong>) entr<strong>et</strong>ous <strong>le</strong>s points considérés, car en particulier, un difféomorphisme, c’estune bijection. Ainsi, bien que <strong>le</strong>s difféomorphismes agissent sur unensemb<strong>le</strong> <strong>de</strong> cardinal infini (non dénombrab<strong>le</strong>), ils sont <strong>le</strong>s analoguescontinus <strong>de</strong>s permutations discontinues d’un ensemb<strong>le</strong> fini. En fait, dans<strong>le</strong>s années 1873 à 1880, l’idée fixe <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> était d’ériger, dans <strong>le</strong> domaine<strong>de</strong>s continua n-dimensionnels, une théorie qui correspon<strong>de</strong> à la théorie<strong>de</strong> Galois <strong>de</strong>s substitutions <strong>de</strong>s racines d’une équation algébrique <strong>et</strong> quilui soit en tout point analogue.Comme dans <strong>le</strong>s paragraphes qui précè<strong>de</strong>nt, soit donc :x ′ = f(x; a 1 , . . .,a r ) =: f a (x)une famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> difféomorphismes locaux analytiques paramétrée par unnombre fini r <strong>de</strong> paramètres essentiels. Pour <strong>Lie</strong>, <strong>le</strong> seul axiome <strong>de</strong>groupe vraiment significatif est celui qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> qu’une tel<strong>le</strong> famil<strong>le</strong>soit fermée par composition, à savoir que l’on a toujours :f a(fb (x) ) ≡ f c (x),pour un certain c qui dépend <strong>de</strong> a <strong>et</strong> <strong>de</strong> b, toujours avec la restriction<strong>de</strong> localité assurant qu’une tel<strong>le</strong> composition ait un sens. En s’inspirant<strong>de</strong> sa connaissance du Traité <strong>de</strong>s substitutions <strong>de</strong> Jordan, <strong>Lie</strong> s’est <strong>de</strong>mandés’il était possib<strong>le</strong> d’économiser <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux autres axiomes standard<strong>de</strong> la structure <strong>de</strong> groupe : l’axiome d’existence d’un élément i<strong>de</strong>ntité,<strong>et</strong> l’axiome d’existence d’un inverse pour tout élément du groupe.Assertion. ([81]) Soit H un sous-ensemb<strong>le</strong> quelconque d’un groupeabstrait G dont <strong>le</strong> cardinal est fini : Card H < ∞, <strong>et</strong> qui est fermépar composition :h 1 h 2 ∈ H toutes <strong>le</strong>s fois que h 1 , h 2 ∈ H.Alors H contient l’élément i<strong>de</strong>ntité e <strong>de</strong> G <strong>et</strong> tout élément h ∈ H possè<strong>de</strong>un inverse dans H, <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que H lui-même est un vrai sousgroupe<strong>de</strong> G.Preuve. En eff<strong>et</strong>, soit h ∈ H arbitraire. La suite infinieh, h 2 , h 3 , . . .,h k , . . . d’éléments <strong>de</strong> l’ensemb<strong>le</strong> fini H doit nécessairement<strong>de</strong>venir périodique : h a = h a+n pour un certain a 1 <strong>et</strong> pourun certain n 1, d’où e = h n , donc e ∈ H <strong>et</strong> h n−1 est l’inverse <strong>de</strong>h. □Dans ses travaux pionniers <strong>de</strong>s années 1873 à 1880 <strong>et</strong> aussi dansla Theorie <strong>de</strong>r Transformationsgruppen qu’<strong>Engel</strong> a rédigée sous sadirection entre 1884 <strong>et</strong> 1893, <strong>Lie</strong> est parvenu à transférer tous <strong>le</strong>s


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 93concepts <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong> substitutions (Galois, Serr<strong>et</strong>, Jordan)du discontinu vers <strong>le</strong> continu : loi <strong>de</strong> groupe, actions <strong>de</strong> groupe,sous-groupes, sous-groupes normaux, groupe quotient, classification àconjugaison près, groupe adjoint, représentation adjointe, formes norma<strong>le</strong>s,(in)transitivité, (im)primitivité, prolongement holoédrique, prolongementmériédrique, asystaticité, <strong>et</strong>c. Le principe <strong>de</strong> raison suffisantesuggère alors naturel<strong>le</strong>ment qu’au fon<strong>de</strong>ment même <strong>de</strong> la théoriegénéra<strong>le</strong>, l’élimination <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux axiomes concernant l’élément i<strong>de</strong>ntité<strong>et</strong> l’existence d’inverses soit aussi possib<strong>le</strong> dans l’univers <strong>de</strong>s groupescontinus finis <strong>de</strong> transformations. Pendant plus <strong>de</strong> dix années, <strong>Lie</strong> a eneff<strong>et</strong> été convaincu qu’une assertion purement similaire à cel<strong>le</strong> énoncéeci-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong>vait être vraie dans <strong>le</strong> domaine du continu, avec G = Diff n<strong>le</strong> pseudo-groupe (infini, continu) <strong>de</strong>s difféomorphismes locaux <strong>de</strong> C n(ou <strong>de</strong> R n ) <strong>et</strong> en prenant pour H ⊂ Diff n une col<strong>le</strong>ction finiment paramétréed’équations <strong>de</strong> transformations x ′ = f(x; a) qui est stab<strong>le</strong> parcomposition.Citons un extrait du premier mémoire systématique <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>, paru en1880 aux Mathematische Anna<strong>le</strong>n.Comme on <strong>le</strong> sait, on montre dans la théorie <strong>de</strong>s substitutionsque <strong>le</strong>s permutations d’un groupe <strong>de</strong> substitutions peuvent être ordonnéesen paires <strong>de</strong> permutations inverses l’une <strong>de</strong> l’autre. Mais comme ladifférence entre un groupe <strong>de</strong> substitutions <strong>et</strong> un groupe <strong>de</strong> transformationsrési<strong>de</strong> seu<strong>le</strong>ment dans <strong>le</strong> fait que <strong>le</strong> premier contient un ensemb<strong>le</strong>fini, <strong>et</strong> <strong>le</strong> second un ensemb<strong>le</strong> infini d’opérations, il est naturel <strong>de</strong> conjecturerque <strong>le</strong>s transformations d’un groupe <strong>de</strong> transformations puissentaussi être ordonnées par paires <strong>de</strong> transformations inverses l’une <strong>de</strong>l’autre. Dans <strong>de</strong>s travaux antérieurs, je suis parvenu à la conclusionque tel <strong>de</strong>vrait être <strong>le</strong> cas. Mais comme au cours <strong>de</strong> mes investigationsen question, certaines hypothèses implicites se sont introduites au suj<strong>et</strong><strong>de</strong>s fonctions qui apparaissent, je pense alors qu’il est nécessaired’ajouter expressément l’exigence que <strong>le</strong>s transformations du groupepuissent être ordonnées par paires <strong>de</strong> transformations inverses l’une<strong>de</strong> l’autre. En tout cas, je conjecture que c<strong>et</strong>te exigence est une conditionnécessaire <strong>de</strong> ma définition origina<strong>le</strong> du concept [Begriff] <strong>de</strong> groupe<strong>de</strong> transformations. Toutefois, il m’a été impossib<strong>le</strong> <strong>de</strong> démontrer celaen général. [98], p. 444–445.Cependant, en 1884, dans sa toute première année <strong>de</strong> travail <strong>de</strong>rédaction en collaboration, <strong>Engel</strong> proposa un contre-exemp<strong>le</strong> à c<strong>et</strong>teconjecture <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>. Considérons en eff<strong>et</strong> la famil<strong>le</strong> d’équations <strong>de</strong> transformations:x ′ = ζ x,


94 3.3. Principe <strong>de</strong> raison suffisante <strong>et</strong> axiome d’inverseoù x, x ′ ∈ C sont <strong>le</strong>s coordonnées <strong>de</strong> l’espace-source <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’espaceimage,<strong>et</strong> où <strong>le</strong> paramètre ζ ∈ C est restreint à |ζ| < 1. Évi<strong>de</strong>mment,c<strong>et</strong>te famil<strong>le</strong> est fermée par composition 10 , à savoir : lorsque x ′ = ζ 1 x<strong>et</strong> lorsque x ′′ = ζ 2 x ′ , la composition donne x ′′ = ζ 2 x ′ = ζ 2 ζ 1 x, <strong>et</strong> el<strong>le</strong>appartient en eff<strong>et</strong> à la famil<strong>le</strong> en question, puisque |ζ 2 ζ 1 | < 1 décou<strong>le</strong><strong>de</strong> |ζ 1 |, |ζ 2 | < 1. Par contre, ni l’élément i<strong>de</strong>ntité, ni l’inverse <strong>de</strong> tout<strong>et</strong>ransformation n’appartiennent à la famil<strong>le</strong> ainsi définie.Comme on l’aura noté, c<strong>et</strong>te proposition <strong>de</strong> contre-exemp<strong>le</strong> n’esten fait pas réel<strong>le</strong>ment convaincante. En eff<strong>et</strong>, la condition |ζ| < 1 est icivisib<strong>le</strong>ment artificiel<strong>le</strong>, puisque la famil<strong>le</strong> se prolonge en fait trivia<strong>le</strong>mentcomme groupe compl<strong>et</strong> <strong>de</strong>s dilatations ( x ′ = ζ x ) <strong>de</strong> la droiteζ∈Ccomp<strong>le</strong>xe. L’idée <strong>de</strong> <strong>Engel</strong> était d’en appe<strong>le</strong>r à une application holomorpheuniva<strong>le</strong>nte ω : ∆ → C du disque unité ∆ = {ζ ∈ C: |ζ| < 1}à va<strong>le</strong>urs dans C qui possè<strong>de</strong> <strong>le</strong> cerc<strong>le</strong> unité {|ζ| = 1} comme coupure,à savoir : ω ne peut être prolongée holomorphiquement au-<strong>de</strong>là d’aucunpoint ζ 0 ∈ ∂∆ = {|ζ| = 1} du bord du disque unité. L’application ωutilisée (sans référence bibliographique) par <strong>Engel</strong> est la suivante ([40],p. 164). Si k 1 est un entier quelconque, soit od k <strong>le</strong> nombre <strong>de</strong> diviseursimpairs <strong>de</strong> k, y compris 1 <strong>et</strong> k (lorsque k est impair).10 Sans présupposer l’existence d’un élément i<strong>de</strong>ntité, la condition <strong>de</strong> stabilité parcomposition qu’<strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> ont dégagée ([40], p. 14) s’énonce comme suit, lorsquex ∈ C n <strong>et</strong> a ∈ C r sont à va<strong>le</strong>urs comp<strong>le</strong>xes. Il existe <strong>de</strong>ux paires <strong>de</strong> domainesX 1 ⊂ X ⊂ C n <strong>et</strong> A 1 ⊂ A ⊂ C r dans l’espace <strong>de</strong>s variab<strong>le</strong>s x <strong>et</strong> dans l’espace<strong>de</strong>s paramètres a tels que pour tout a ∈ A , l’application x ↦→ f(x; a) est undifféomorphisme <strong>de</strong> X sur son image, tels que <strong>de</strong> plus, pour tout a 1 ∈ A 1 fixé,f(X 1 × {a 1 }) ⊂ X , <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que pour tout a 1 ∈ A 1 <strong>et</strong> pour tout b ∈ A , l’applicationcomposée x ↦−→ f ( f(x; a 1 ); b ) est bien définie <strong>et</strong> établit un difféomorphesur son image. De plus, <strong>de</strong>ux conditions significatives sont supposées.• Il existe une application analytique ϕ = ϕ(a, b) à va<strong>le</strong>urs dans C m définie dansA × A avec ϕ(A 1 × A 1 ) ⊂ A tel<strong>le</strong> que :f ( f(x; a); b ) ≡ f ( x; ϕ(a, b) ) pour tous x ∈ X 1 , a ∈ A 1 , b ∈ A 1 .• Il existe une application analytique χ = χ(a, c) à va<strong>le</strong>urs dans C m définie poura ∈ A <strong>et</strong> c ∈ A avec χ ( A 1 × A 1) ⊂ A qui résout b en termes <strong>de</strong> (a, c) dansl’équation c = ϕ(a, b), à savoir :c ≡ ϕ ( a, χ(a, c) ) pour tous a ∈ A 1 , c ∈ A 1 .C’est avec ces hypothèses précises que <strong>Lie</strong> pensait déduire : 1) la présence d’unélément i<strong>de</strong>ntité e ∈ A ; <strong>et</strong> : 2) l’existence d’un difféomorphisme analytique locala ↦→ ι(a) défini près <strong>de</strong> e <strong>et</strong> fixant e, tel que f(x; ι(a)) est la transformation inverse<strong>de</strong> f(x; a).


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 95Assertion. La série infinie :ζ νω(ζ) := ∑ 1 − ζ = ∑ 2ν ν1ν1(ζ ν +ζ 3ν +ζ 5ν +ζ 7ν + · · ·) = ∑ k1od k ζ kconverge absolument dans tout disque ∆ ρ = {ζ ∈ C : |ζ| < ρ} <strong>de</strong>rayon ρ < 1 <strong>et</strong> y définit une application holomorphe univa<strong>le</strong>nte ∆ → Cdu disque unité ∆ = {|ζ| < 1} à va<strong>le</strong>urs dans C qui ne se prolongeholomorphiquement au-<strong>de</strong>là d’aucun point ζ 0 ∈ ∂∆ := {|ζ| = 1}.En fait, à la place <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te série explicite, on pourrait utiliser aussin’importe quel<strong>le</strong> autre application <strong>de</strong> type uniformisante <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> 11ζ ↦−→ ω(ζ) =: λ qui établit un biholomorphisme du disque unité ∆ surun domaine simp<strong>le</strong>ment connexe Λ := ω(∆) dont <strong>le</strong> bord est une courbe<strong>de</strong> Jordan nul<strong>le</strong> part loca<strong>le</strong>ment analytique réel<strong>le</strong> 12 . Désignons alors parλ ↦−→ χ(λ) =: ζ l’inverse d’une tel<strong>le</strong> application, <strong>et</strong> considérons lafamil<strong>le</strong> d’équations <strong>de</strong> transformations :(x ′ = χ(λ) x ) λ∈Λ .Par construction, |χ(λ)| < 1 pour tout λ ∈ Λ. Toute composition<strong>de</strong> x ′ = χ(λ 1 ) x <strong>et</strong> <strong>de</strong> x ′′ = χ(λ 2 ) x ′ est <strong>de</strong> la forme x ′′ = χ(λ) x,avec <strong>le</strong> paramètre défini <strong>de</strong> manière unique λ := ω ( χ(λ 1 ) χ(λ 2 ) ) , doncl’axiome <strong>de</strong> composition <strong>de</strong> groupe est satisfait. Cependant, il n’y a ànouveau pas d’élément i<strong>de</strong>ntité, <strong>et</strong> à nouveau, aucune transformationne possè<strong>de</strong> un inverse. Et <strong>de</strong> plus crucia<strong>le</strong>ment (<strong>et</strong> pour terminer), iln’existe aucun prolongement <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te famil<strong>le</strong> à un domaine plus grand˜Λ ⊃ Λ qui soit accompagné d’un prolongement holomorphe ˜χ <strong>de</strong> χ à ˜Λ<strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que ˜χ (˜Λ) contienne un voisinage <strong>de</strong> {1} (afin d’atteindrel’élément i<strong>de</strong>ntité), <strong>et</strong> même a fortiori, il n’existe aucun prolongement11 Le théorème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> énonce que pour tout ouvert connexe <strong>et</strong> simp<strong>le</strong>mentconnexe Λ <strong>de</strong> C dont <strong>le</strong> complémentaire C\Λ contient au moins un point, il existeune application biholomorphe — c’est-à-dire holomorphe, bijective <strong>et</strong> d’inverse holomorphe— χ : Λ → ∆ <strong>de</strong> Λ sur <strong>le</strong> disque unité ∆ ⊂ C, appelée uniformisante <strong>de</strong><strong>Riemann</strong>. Le théorème réf<strong>le</strong>xion <strong>de</strong> Schwarz stipu<strong>le</strong> qu’en tout point λ 0 ∈ ∂Λ du bord<strong>de</strong> Λ autour duquel ∂Λ est un p<strong>et</strong>it morceau <strong>de</strong> courbe analytique réel<strong>le</strong>, l’uniformisanteχ se prolonge holomorphiquement dans un voisinage <strong>de</strong> λ 0 . Réciproquement, siχ se prolonge holomorphiquement au-<strong>de</strong>là d’un point du bord <strong>de</strong> Λ, ce bord est alorsnécessairement analytique réel au voisinage <strong>de</strong> ce point.12 On peut même considérer un domaine dont <strong>le</strong> bord est une courbe <strong>de</strong> Jordancontinue nul<strong>le</strong> part différentiab<strong>le</strong>, voire dont <strong>le</strong> bord est un ensemb<strong>le</strong> fractal, commepar exemp<strong>le</strong> <strong>le</strong> flocon <strong>de</strong> Von Koch ; on trouvera une présentation concise <strong>et</strong> lumineuse<strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong> Carathéodoy sur <strong>le</strong> prolongement au bord <strong>de</strong>s uniformisantes <strong>de</strong><strong>Riemann</strong> dans <strong>le</strong> Chapitre 17 <strong>de</strong> [112].


96 3.3. Principe <strong>de</strong> raison suffisante <strong>et</strong> axiome d’inverseholomorphe tel <strong>de</strong> χ à un voisinage <strong>de</strong> ∆ (afin d’obtenir <strong>le</strong>s inverses <strong>de</strong>stransformations x ′ = χ(λ) x avec λ ∈ Λ proche <strong>de</strong> ∂Λ).Dans <strong>le</strong> volume I <strong>de</strong> la Theorie <strong>de</strong>r Transformationsgruppen, c<strong>et</strong>exemp<strong>le</strong> apparaît seu<strong>le</strong>ment au Chapitre 9, pp. 163–165, <strong>et</strong> il est écrit enp<strong>et</strong>its caractères. Constatation frappante : pour <strong>de</strong>s raisons <strong>de</strong> pur<strong>et</strong>é <strong>et</strong><strong>de</strong> systématicité dans la pensée, la structure <strong>de</strong>s neuf premiers chapitresest organisée afin <strong>de</strong> faire autant que possib<strong>le</strong> l’économie <strong>de</strong> l’existenced’un élément i<strong>de</strong>ntité <strong>et</strong> <strong>de</strong> transformations inverses l’une <strong>de</strong> l’autre parpaires. Ce choix théorique comp<strong>le</strong>xifie considérab<strong>le</strong>ment la présentation<strong>de</strong> la théorie fondamenta<strong>le</strong>, pourtant censée être relativement faci<strong>le</strong>d’accès afin <strong>de</strong> toucher un public assez large <strong>de</strong> mathématiciens. Maisil est bien connu que la meil<strong>le</strong>ure qualité dans l’exposition <strong>de</strong>s premierséléments d’un ouvrage <strong>et</strong> que <strong>le</strong>s meil<strong>le</strong>urs choix stratégiques quant àson organisation thématique, ne peuvent être atteints, paradoxa<strong>le</strong>ment,qu’à la fin du processus <strong>de</strong> mise en forme dans son ensemb<strong>le</strong>. Impossib<strong>le</strong>,donc, <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r au jeune <strong>et</strong> novice <strong>Friedrich</strong> <strong>Engel</strong> (alors âgé<strong>de</strong> 24 ans) <strong>de</strong> faire prévaloir un point <strong>de</strong> vue d’accessibilité <strong>et</strong> <strong>de</strong> simplicitédans la présentation. Au contraire, l’objectif affirmé <strong>de</strong> son maître<strong>Sophus</strong> <strong>Lie</strong> était d’atteindre la plus gran<strong>de</strong> généralité, <strong>de</strong> s’é<strong>le</strong>ver <strong>le</strong> plushaut possib<strong>le</strong> dans un tel traité.Et malgré <strong>le</strong> contre-exemp<strong>le</strong> du jeune <strong>Engel</strong> que nous venons <strong>de</strong>détail<strong>le</strong>r, <strong>Lie</strong> était quand même persuadé que l’analogie profon<strong>de</strong> <strong>de</strong> sathéorie <strong>de</strong>s groupes continus avec la théorie <strong>de</strong>s groupes finis <strong>de</strong> substitutionsn’était pas, dans sa racine métaphysique profon<strong>de</strong>, réel<strong>le</strong>mentremise en cause. Ainsi, toutes <strong>le</strong>s fois que cela est possib<strong>le</strong> du point<strong>de</strong> vue abstrait <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>, <strong>le</strong>s énoncés <strong>de</strong>s neuf premiers chapitres <strong>de</strong> laTheorie <strong>de</strong>r Transformationsgruppen n’utilisent ni l’existence d’un élémenti<strong>de</strong>ntité, ni l’existence <strong>de</strong> transformations inverses l’une <strong>de</strong> l’autrepar paires. <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> étudient seu<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>s famil<strong>le</strong>s continues finiesd’équations <strong>de</strong> transformations x ′ i = f i (x; a 1 , . . .,a r ), i = 1, . . ., nqui sont fermées par composition au sens <strong>de</strong> la note p. 94, sans hypothèsesupplémentaire : grand <strong>de</strong>gré d’abstraction <strong>et</strong> <strong>de</strong> généralité. Enfait, à partir <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te seu<strong>le</strong> condition <strong>de</strong> ferm<strong>et</strong>ure par composition,<strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> déduisent que <strong>le</strong>s équations finies x ′ i = f i (x; a) satisfontcertaines équations différentiel<strong>le</strong>s fondamenta<strong>le</strong>s, stipulées dans <strong>le</strong>Théorème p. 104 ci-<strong>de</strong>ssous (Théorème 3 p. 33 dans [40]). C’est alorsl’existence <strong>de</strong> tel<strong>le</strong>s équations différentiel<strong>le</strong>s qu’ils prennent systématiquementcomme hypothèse principa<strong>le</strong>, à la place <strong>de</strong> la ferm<strong>et</strong>ure parcomposition, toujours sans élément i<strong>de</strong>ntité <strong>et</strong> sans transformations inverses.


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 97Le Théorème 26 est énoncé à la page 163 <strong>de</strong> [40] (voir p. 153), <strong>et</strong>il est démontré tout juste avant que n’apparaisse <strong>le</strong> contre-exemp<strong>le</strong> <strong>de</strong><strong>Engel</strong>. Ce théorème raffiné <strong>et</strong> subtil confirme la croyance métaphysique<strong>de</strong> <strong>Lie</strong>, montre sa persévérance intel<strong>le</strong>ctuel<strong>le</strong>, <strong>et</strong> prouve à nouveau saremarquab<strong>le</strong> force <strong>de</strong> conceptualisation. En résumé, il s’énonce commesuit 13 .Soit x ′ i = f i (x; a 1 , . . .,a r ), i = 1, . . .,n une col<strong>le</strong>ction d<strong>et</strong>ransformations fermée par compositions loca<strong>le</strong>s. D’après <strong>le</strong> théorèmeénoncé p. 104 ci-<strong>de</strong>ssous, il existe un système d’équations différentiel<strong>le</strong>sfondamenta<strong>le</strong>s <strong>de</strong> la forme :∂x ′ i∂a k=r∑ψ kj (a) · ξ ji (x ′ )j=1(i = 1 ···n ; k = 1 ··· r).qui est satisfait i<strong>de</strong>ntiquement par <strong>le</strong>s fonctions f i (x, a), où <strong>le</strong>s ψ kjsont certaines fonctions analytiques <strong>de</strong>s paramètres (a 1 , . . ., a r ). Si l’onintroduit alors <strong>le</strong>s r transformations infinitésima<strong>le</strong>s (voir <strong>le</strong> § 3.4 ci<strong>de</strong>ssous)qui sont définies par :n∑i=1ξ ki (x) ∂f∂x i=: X k (f)<strong>et</strong> si l’on forme <strong>le</strong>s équations finies :x ′ i = exp ( λ 1 X 1 + · · · + λ k X k)(x)(k = 1 ···r),=: g i (x; λ 1 , . . .,λ r ) (i = 1 ··· n)du groupe à r paramètres qui est engendré par ces r transformationsinfinitésima<strong>le</strong>s, alors ce groupe contient l’élément i<strong>de</strong>ntité g(x; 0) <strong>et</strong>ses transformations sont ordonnées par paires inverses l’une <strong>de</strong> l’autre :g(x; −λ) = g(x; λ) −1 . Enfin, <strong>le</strong> Théorème 26 en question (p. 153 ci<strong>de</strong>ssous)énonce que dans ces équations finies x ′ i = g i(x; λ), il est possib<strong>le</strong>d’introduire <strong>de</strong> nouveaux paramètres locaux a 1 , . . .,a r à la place<strong>de</strong> λ 1 , . . ., λ r <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que <strong>le</strong>s équations <strong>de</strong> transformations qui enrésultent :x ′ i = g i(x; λ1 (a), . . .,λ r (a) )=: f i (x 1 , . . .,x n , a 1 , . . .,a r ) (i = 1 ···n)13 En première approche, ce passage doit être lu en adm<strong>et</strong>tant quelques notionsqui ne seront présentées que dans <strong>le</strong>s paragraphes qui suivent.


98 3.4. Introduction <strong>de</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>sreprésentent une famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ r transformations qui embrasse, après unprolongement analytique éventuel, toutes <strong>le</strong>s ∞ r transformations initia<strong>le</strong>s:x ′ i = f i(x 1 , . . .,x n , a 1 , . . .,a r ).Ainsi <strong>Lie</strong> réalise-t-il <strong>et</strong> confirme-t-il son idée d’épuration axiomatique.En répondant à <strong>Engel</strong> que l’on doit s’autoriser à changer éventuel<strong>le</strong>ment<strong>de</strong> paramètres 14 , on peut toujours élargir <strong>le</strong> domaine initial d’existencepour capturer l’i<strong>de</strong>ntité <strong>et</strong> <strong>le</strong>s transformations inverses. À la contreexemplificationcontrariante répond donc la dia<strong>le</strong>ctique comp<strong>le</strong>xifiante<strong>de</strong> vérités supérieures qui doivent être quêtées sans relâche.Afin <strong>de</strong> poursuivre <strong>et</strong> <strong>de</strong> rendre plus compréhensib<strong>le</strong> c<strong>et</strong> énoncé,il nous faut à présent exposer : 1) <strong>le</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s(§ 3.4) ; 2) <strong>le</strong>s équations différentiel<strong>le</strong>s fondamenta<strong>le</strong>s (§ 3.5) ; 3) la reconstitution<strong>de</strong>s équations finies du groupe à partir d’une col<strong>le</strong>ction d<strong>et</strong>ransformations infinitésima<strong>le</strong>s indépendantes (§ 3.6) ; 4) <strong>le</strong> théorème<strong>de</strong> C<strong>le</strong>bsch-<strong>Lie</strong>-Frobenius sur <strong>le</strong>s systèmes compl<strong>et</strong>s <strong>et</strong> indépendantsd’équations aux dérivées partiel<strong>le</strong>s (§ 3.7).3.4. Introduction <strong>de</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s. Soit ε unequantité infiniment p<strong>et</strong>ite au sens <strong>de</strong> Leibniz, ou une quantité arbitrairementp<strong>et</strong>ite soumise au formalisme rigoureux <strong>de</strong> Weierstrass. Pourchaque k ∈ {1, 2, . . ., r} fixé à l’avance, considérons <strong>le</strong> point :x ′ i = f i(x; e1 , . . .,e k + ε, . . .,e n)= x i + ∂f i∂a k(x; e) · ε + · · ·(i = 1 ···n)qui est déplacé infinitésima<strong>le</strong>ment en partant du point initial x = f(x; e)en ajoutant l’incrément infime ε seu<strong>le</strong>ment à la k-ième coordonnée e kdu paramètre i<strong>de</strong>ntité e. Grâce à un développement <strong>de</strong> Taylor à l’ordre 1,on peut interpréter ce mouvement spatial infinitésimal en introduisant,pour tout k ∈ {1, 2, . . ., r}, <strong>le</strong> champ <strong>de</strong> vecteurs (ainsi qu’une notationraccourcie appropriée pour désigner ses coefficients) :X e k := n∑i=1∂f i(x; e) ∂ :=∂a k ∂x in∑i=1ξ ki (x) ∂∂x i,14 En changeant <strong>de</strong> paramètre dans la famil<strong>le</strong> x ′ = χ(λ)x, on r<strong>et</strong>rouve évi<strong>de</strong>mment<strong>le</strong> groupe compl<strong>et</strong> <strong>de</strong>s dilatations x ′ = ζ x.


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 99écrit ici sous la forme d’un opérateur <strong>de</strong> dérivation d’ordre un. On peutaussi <strong>le</strong> considérer comme une famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> vecteurs colonnes :τ ( ∂f 1∂a k, · · · , ∂fn∂a k) ∣ ∣∣x = τ( ξ k1 , . . .,ξ kn) ∣ ∣∣xbasés aux points x, où τ (·) désigne l’opérateur <strong>de</strong> transposition <strong>de</strong>s matrices,qui transforme bien sûr <strong>le</strong>s lignes horizonta<strong>le</strong>s en lignes vertica<strong>le</strong>s.Alors on peut réécrire ce mouvement infime sous la formex ′ = x + ε Xk e + · · · , ou bien encore, <strong>de</strong> manière équiva<strong>le</strong>nte :x ′ i = x i + ε ξ ki (x) + · · ·(i = 1 ···n),où <strong>le</strong>s termes supprimés “+ · · · ” sont bien entendu <strong>de</strong>s O(ε 2 ) uniformespar rapport à x, <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que d’un point <strong>de</strong> vue géométrique, x ′ est« poussé » infinitésima<strong>le</strong>ment à partir <strong>de</strong> x d’une longueur ε <strong>le</strong> long duvecteur Xke ∣x, comme l’illustre la partie gauche <strong>de</strong> notre figure (aveck = 1).λa 3a 31 1X e 1px + ε X e 1e a 1e a 1a 2a 2X ex + ε X epDéplacement infinitésimal x ′ = x + ε X e <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s pointsPlus généra<strong>le</strong>ment, toujours à partir du paramètre i<strong>de</strong>ntité e, onpeut ajouter à e un incrément infinitésimal arbitraire :(e1 + ε λ 1 , . . .,e k + ε λ k , . . ., e r + ε λ r),où τ (λ 1 , . . .,λ r ) ∣ eest un vecteur tangent constant basé en e dans l’espace<strong>de</strong>s paramètres. Alors grâce à la linéarité <strong>de</strong> l’application tangente,c’est-à-dire grâce à la règ<strong>le</strong> <strong>de</strong> dérivation composée en coordonnées, i<strong>le</strong>n décou<strong>le</strong> que :n∑f i (x; e + ε λ) = x i + ε λ k · ∂f i(x; e) + · · ·∂a k= x i + εk=1n∑λ k · ξ ki (x) + · · · ,<strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que tous <strong>le</strong>s points x ′ = x+ε X + · · · sont simultanément<strong>et</strong> infinitésima<strong>le</strong>ment déplacés <strong>le</strong> long du champ <strong>de</strong> vecteurs :k=1X := λ 1 X e 1 + · · · + λ r X e r


100 3.5. Équations différentiel<strong>le</strong>s fondamenta<strong>le</strong>squi est la combinaison linéaire généra<strong>le</strong> <strong>de</strong>s r précé<strong>de</strong>nts champs <strong>de</strong>vecteurs basiques Xk e , k = 1, . . ., r.Occasionnel<strong>le</strong>ment, <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> écrivent qu’un tel champ <strong>de</strong> vecteursX appartient au groupe x ′ = f(x; a), pour signifier que X vientaccompagné du mouvement infinitésimal x ′ = x+ε X qu’il est supposéexécuter (<strong>le</strong>s points <strong>de</strong> suspension sont censés être supprimés dans l’intuition).En accord avec c<strong>et</strong> acte <strong>de</strong> pensée synthétique, <strong>Lie</strong> appel<strong>le</strong> Xune transformation infinitésima<strong>le</strong>, considérant en eff<strong>et</strong> que x ′ = x+ε Xest juste un cas particulier <strong>de</strong> x ′ = f(x, a). Une autre raison fondamenta<strong>le</strong><strong>et</strong> très profon<strong>de</strong>, pour laquel<strong>le</strong> <strong>Lie</strong> dit que X appartient au groupex ′ = f(x; a) est qu’il a démontré que <strong>le</strong>s groupes continus finis d<strong>et</strong>ransformations loca<strong>le</strong>s sont en correspondance biunivoque avec <strong>le</strong>s espacesvectoriels purement linéaires :Vect C(X1 , X 2 , . . .,X r),<strong>de</strong> transformations infinitésima<strong>le</strong>s, qui héritent en fait aussi, directementà partir <strong>de</strong> la loi <strong>de</strong> multiplication <strong>de</strong> groupe, d’une structure algébriqueadditionnel<strong>le</strong>, comme nous allons maintenant <strong>le</strong> rappe<strong>le</strong>r. Quelques préparatifs(§§ 3.5, 3.6 <strong>et</strong> 3.7) sont nécessaires.Tout d’abord (§ 3.5), il faut infinitésimaliser — c’est-à-dire différentier— la loi <strong>de</strong> composition <strong>de</strong> groupe, réorganiser <strong>le</strong>s équationsobtenues, <strong>et</strong> interpréter géométriquement <strong>le</strong>ur signification.<strong>Ens</strong>uite (§ 3.6), il faut traduire dans la théorie <strong>de</strong>s groupes <strong>le</strong>s théorèmesclassiques sur l’intégration <strong>de</strong>s systèmes d’équations différentiel<strong>le</strong>sordinaires d’ordre un. Ces systèmes correspon<strong>de</strong>nt à l’intégrationd’un, <strong>et</strong> d’un seul champ <strong>de</strong> vecteurs. Une <strong>de</strong>rnière pièce préliminaireest donc nécessaire (§ 3.7) : <strong>le</strong> théorème <strong>de</strong> C<strong>le</strong>bsch-Frobenius, qui correspondà l’intégration <strong>de</strong> plusieurs champs <strong>de</strong> vecteurs soumis à unecertaine condition <strong>de</strong> compatibilité.3.5. Équations différentiel<strong>le</strong>s fondamenta<strong>le</strong>s. Partons <strong>de</strong> la loi <strong>de</strong>composition <strong>de</strong> groupe, que nous réécrivons comme suit :x ′′ = f ( f(x; a); b ) = f(x; a · b) =: f(x; c).Ici, c := a · b dépend <strong>de</strong> a <strong>et</strong> b, mais à la place <strong>de</strong> a <strong>et</strong> b, nous allonsconsidérer a <strong>et</strong> c comme paramètres indépendants. Ainsi, en remplaçantb = a −1 · c =: b(a, c), <strong>le</strong>s équations :f i(f(x; a); b(a, c))≡ fi (x; c) (i = 1 ··· n)sont satisfaites i<strong>de</strong>ntiquement pour tout x, tout a <strong>et</strong> tout c. <strong>Ens</strong>uite, pourk ∈ {1, 2, . . ., r} fixé, différentions ces i<strong>de</strong>ntités par rapport à a k , en


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 101notant <strong>de</strong> manière abrégée f i ′ ≡ f i(x ′ ; b) <strong>et</strong> x ′ j ≡ f j(x; a), ce qui nousdonne :∂f i′ ∂x ′ 1+· · ·+ ∂f i′ ∂x ′ n+ ∂f i′ ∂b 1+· · ·+ ∂f i′ ∂b r≡ 0∂x ′ 1 ∂a k ∂x ′ (i =1··· n).n ∂a k ∂b 1 ∂a k ∂b r ∂a kIci bien sûr à nouveau, l’argument <strong>de</strong> f i ′ est ( f(x, a); b(a, c) ) , l’argument<strong>de</strong>s x ′ l est (x; a) <strong>et</strong> l’argument <strong>de</strong>s b j est (a, c). Grâce à x ′′ (x ′ ; e) ≡x ′ , la matrice ∂f )i′∂x f(x; e); b(e, e) est l’i<strong>de</strong>ntiték( ′ In×n . Par conséquent,en appliquant la règ<strong>le</strong> <strong>de</strong> Cramer 15 , pour tout k fixé, nous pouvons résoudre<strong>le</strong>s n équations linéaires précé<strong>de</strong>ntes par rapport aux n inconnues∂x ′ 1∂a k, . . ., ∂x′ n∂a k, <strong>et</strong> nous obtenons <strong>de</strong>s expressions <strong>de</strong> la forme :(2)∂x ′ ν∂a k(x; a) = Ξ 1ν (x ′ , b) ∂b 1∂a k(a, c) + · · · + Ξ rν (x ′ , b) ∂b r∂a k(a, c)(ν =1··· n; k = 1 ···r),pour certaines fonctions analytiques Ξ jν (x ′ , b) qui sont indépendantes<strong>de</strong> k.D’autre part, afin <strong>de</strong> pouvoir substituer la dérivée partiel<strong>le</strong> ∂b j∂a kparune expression adéquate, différentions par rapport à a k <strong>le</strong>s équationssuivantes, qui sont satisfaites i<strong>de</strong>ntiquement :( )c µ ≡ m µ a, b(a, c) (µ =1··· r).De c<strong>et</strong>te manière-là, nous obtenons :0 ≡ ∂m r∑µ+∂a kπ=1∂m µ∂b π∂b π∂a k(µ=1··· r).Mais puisque la matrice ∂mµ∂b πse réduit à la matrice i<strong>de</strong>ntité I r×r pour 16(a, b(a, c))∣∣(a,c)=(e,e) = (e, e), la règ<strong>le</strong> <strong>de</strong> Cramer, à nouveau, nous perm<strong>et</strong><strong>de</strong> résoudre ce système par rapport aux r inconnues ∂bπ∂a k, <strong>et</strong> nousobtenons ainsi <strong>de</strong>s expressions <strong>de</strong> la forme :∂b π∂a k(a, c) = Ψ kπ (a, c),avec certaines fonctions Ψ kπ , qui sont définies dans un domaine éventuel<strong>le</strong>mentplus p<strong>et</strong>it. En posant (a, c) = (e, e) dans <strong>le</strong> même système15 — <strong>et</strong> en rap<strong>et</strong>issant aussi si nécessaire <strong>le</strong>s domaines d’existence, mais sans introduire<strong>de</strong> dénomination spécia<strong>le</strong> —16 — seu<strong>le</strong>ment parce que m(e, b) ≡ b —


102 3.5. Équations différentiel<strong>le</strong>s fondamenta<strong>le</strong>savant <strong>de</strong> <strong>le</strong> résoudre, nous obtenons en fait (noter <strong>le</strong> signe « moins ») :( ∂bπ) 1πr(e, e) = −I r×r ,∂a k 1krd’où Ψ kπ (e, e) = −δk π, où <strong>le</strong> symbo<strong>le</strong> δπ k vaut 1 si k = π <strong>et</strong> 0 sinon.Nous pouvons donc maintenant insérer dans (2) la va<strong>le</strong>ur obtenueΨ kπ pour ∂bπ∂a k, ce qui nous donne <strong>de</strong>s équations aux dérivées partiel<strong>le</strong>squi sont absolument crucia<strong>le</strong>s dans toute la théorie <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> :(2’)∂x ′ ν∂a k(x; a) =r∑Ψ kπ (a, b) · Ξ πν (x ′ , b) (ν =1··· n, k =1··· r)π=1Ces équations sont <strong>de</strong> la plus haute importance [äusserst wichtig],comme nous allons <strong>le</strong> voir plus tard. [40], p. 29.Ici, nous avons remplacé c par c = c(a, b) = a · b, d’oùb ( a, c(a, b) ) ≡ b, <strong>et</strong> nous avons reconsidéré (a, b) commes variab<strong>le</strong>sindépendantes.Maintenant, en posant b := e dans ces équations (2’), <strong>le</strong>s dérivéespartiel<strong>le</strong>s par rapport aux paramètres a k <strong>de</strong>s transformationsx ′ i = x′ i (x; a) s’expriment par <strong>de</strong>s équations différentiel<strong>le</strong>s :(2”)∂x ′ i∂a k(x; a) =r∑ (ψ kj (a) · ξ ji x ′ (x; a) )j=1(i = 1 ··· n, k =1··· r),qui <strong>le</strong>s font apparaître comme combinaisons linéaires, avec certains coefficientsψ kj (a) := Ψ kj (a, e) qui dépen<strong>de</strong>nt seu<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> a <strong>de</strong>s quantitésξ ji (x ′ ) := Ξ ji (x ′ , b) ∣ ∣b=e. Mais nous connaissons en fait déjà cesfonctions ξ ji (x ′ ).En eff<strong>et</strong>, si nous posons a = e dans ces équations, alors grâce àψ kj (e) = −δ j k, nous obtenons immédiatement :ξ ki (x) = ξ ki(x ′ (x; e) ) = − ∂x′ i∂a k(x; e),d’où <strong>le</strong>s ξ ki (x) coïnci<strong>de</strong>nt, modulo un signe « moins » uniforme, avec <strong>le</strong>scoefficients <strong>de</strong>s r transformations infinitésima<strong>le</strong>s que nous avons déjàintroduites p. 98, <strong>et</strong> que nous avons considérées comme <strong>de</strong>s opérateurs<strong>de</strong> dérivations donnant la direction d’un mouvement infinitésimal <strong>de</strong>


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 103tous <strong>le</strong>s points <strong>de</strong> l’espace :Xke ∣x= ∂f 1(x; e) ∂ + · · · + ∂f n ∂(x; e)∂a(3)k ∂x 1 ∂a k ∂x n=: −ξ k1 (x) ∂∂− · · · − ξ kn (x)(k =1··· r).∂x 1 ∂x nMaintenant enfin, après avoir reproduit à l’aveug<strong>le</strong> ces calculs ari<strong>de</strong>sd’élimination différentiel<strong>le</strong> dûs à <strong>Lie</strong>, nous pouvons dévoi<strong>le</strong>r encoreplus précisément l’interprétation géométrique adéquate dont sont riches<strong>le</strong>s équations différentiel<strong>le</strong>s (2”) doub<strong>le</strong>ment encadrées.K nX e ˛k˛fa(x)˛XekK n˛fa(x)Xak˛˛fa(x)X e k := ∂f∂a k˛˛exfa(x)Xke ˛˛xf a(·)xf a(x)X a k := ∂f∂a k˛˛a∂f∂a k˛˛a= P −ψ kj (a) ∂f∂a j˛˛eSignification géométrique <strong>de</strong>s équations différentiel<strong>le</strong>s fondamenta<strong>le</strong>sPlutôt que <strong>de</strong> différentier par rapport à a k au point spécial (x; e), nouspouvons, par souci <strong>de</strong> généralité, différentier en un point quelconque(x; a), ce qui nous donne alors <strong>le</strong>s champs <strong>de</strong> vecteurs :Xka ∣ := ∂f 1fa(x)(x; a) ∂ + · · · + ∂f n ∂(x; a)(k =1··· r),∂a k ∂x 1 ∂a k ∂x n<strong>et</strong> alors <strong>le</strong>s équations différentiel<strong>le</strong>s fondamenta<strong>le</strong>s expriment que ces rnouvel<strong>le</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s :∣ = −ψ fa(x) k1(a) X1e ∣ − · · · − ψ ∣fa(x) kr(a) XreX a k∣fa(x)sont <strong>de</strong>s combinaisons linéaires à coefficients qui ne dépen<strong>de</strong>nt que<strong>de</strong>s paramètres <strong>de</strong> groupe (a 1 , . . .,a r ), <strong>de</strong>s r transformations infinitésima<strong>le</strong>sX1, e . . .,Xr e calculées au paramètre-i<strong>de</strong>ntité e, <strong>et</strong> reconsidéréesau point f a (x) issu <strong>de</strong> x qui est « poussé » par la transformation f a (·).Le diagramme illustre géométriquement c<strong>et</strong>te interprétation.Enfin, puisque la matrice ψ(a) possè<strong>de</strong> un inverse ˜ψ(a) qui estanalytique dans un voisinage <strong>de</strong> e, <strong>le</strong>s équations différentiel<strong>le</strong>s fondamenta<strong>le</strong>speuvent aussi être écrites sous la forme réciproque, parfoisuti<strong>le</strong> :(4) ξ ji(x ′ (x; a) ) =r∑k=1˜ψ jk (a) · ∂x′ i∂a k(x; a).(i =1··· n ; j =1··· r).


104 3.5. Équations différentiel<strong>le</strong>s fondamenta<strong>le</strong>sNous pouvons donc maintenant énoncer <strong>le</strong> tout premier théorème fondamental<strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>.Théorème. ([40], pp. 33–34) Si <strong>le</strong>s n équations <strong>de</strong> transformations :x ′ i = f i(x 1 , . . .,x n , a 1 , . . .,a n )(i = 1 ···n)dont <strong>le</strong>s paramètres a 1 , . . ., a r sont tous essentiels représentent ungroupe continu fini local <strong>de</strong> transformations 17 , alors x ′ 1 , . . .,x′ n , considéréescomme fonctions <strong>de</strong> a 1 , . . .,a r , x 1 , . . .,x n satisfont certaineséquations différentiel<strong>le</strong>s <strong>de</strong> la forme spécifique :(5) ∂x′ i∂a k=r∑ψ kj (a 1 , . . ., a r ) ·ξ ji (x ′ 1 , . . ., x′ n )j=1(i = 1 ··· n; k =1··· r),où la matrice ψ kj (a) <strong>de</strong> fonctions analytiques définie au voisinage <strong>de</strong>l’i<strong>de</strong>ntité e satisfait ψ kj (e) = −δ j k , <strong>et</strong> où <strong>le</strong>s fonctions ξ ki(x), éga<strong>le</strong>s à− ∂x′ i∂a k(x; e), coïnci<strong>de</strong>nt, modulo un signe « moins » uniforme, avec <strong>le</strong>scoefficients <strong>de</strong>s r transformations infinitésima<strong>le</strong>s basiques :X e k∣x=n∑i=1∂f i(x; e) ∂∂a k ∂x i(k = 1 ···r).De plus, il est impossib<strong>le</strong> <strong>de</strong> trouver r quantités constantes λ 1 , . . .,λ rnon toutes nul<strong>le</strong>s tel<strong>le</strong>s que <strong>le</strong>s n expressions :s’annu<strong>le</strong>nt simultanément.λ 1 ξ 1i (x ′ ) + · · · + λ r ξ ri (x ′ )(i = 1 ···n)C<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière propriété signifie évi<strong>de</strong>mment que <strong>le</strong>s r transformationsinfinitésima<strong>le</strong>s X 1 , . . .,X r sont linéairement indépendantes 18 <strong>et</strong>el<strong>le</strong> décou<strong>le</strong> du fait que <strong>le</strong>s paramètres sont tous essentiels 19 . Après avoir17 Ici, nous avons admis l’existence d’un élément i<strong>de</strong>ntité <strong>et</strong> nous avons supposéque <strong>le</strong>s transformations peuvent être ordonnées par paires <strong>de</strong> transformations inversesl’une <strong>de</strong> l’autre. Mais <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> déduisent l’existence d’équations différentiel<strong>le</strong>s dutype (5) sous la seu<strong>le</strong> hypothèse que la famil<strong>le</strong> x ′ = f(x; a) soit fermée par composition,au sens explicité dans la note p. 94, voir aussi <strong>le</strong> § 3.9 ci-<strong>de</strong>ssous.18 — sur C ou sur R, suivant que a ∈ C r ou a ∈ R r —19 Si <strong>le</strong>s paramètres (a 1 , . . . , a r ) ne sont pas essentiels, d’après <strong>le</strong> théorème p. 86,<strong>le</strong> rang générique ρ ∞ <strong>de</strong> l’application infinie F ∞ <strong>de</strong>s coefficients est r − 1. Maislorsque <strong>le</strong>s équations <strong>de</strong> transformations constituent un groupe continu fini, on peutétablir (voir [110]) qu’en fait, <strong>le</strong> rang (tout court) <strong>de</strong> F ∞ est égal à ρ ∞ au paramètrei<strong>de</strong>ntité e, <strong>et</strong> donc aussi par voie <strong>de</strong> conséquence, égal à ρ ∞ dans un voisinage <strong>de</strong> e.Il existe donc au moins un champ <strong>de</strong> vecteurs T = ∑ nk=1 τ k(a) ∂∂a knon nul en e àcoefficients analytiques tel que : 0 ≡ T f i (x; a) = ∑ rk=1 τ k(a) ∂x′ i∂a k(x; a) pour tout


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 105formé <strong>le</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s X k := ∂f∂a k(x; e), on peut donctester <strong>de</strong> manière directe, effective <strong>et</strong> finitaire l’essentialité <strong>de</strong>s paramètres,en examinant seu<strong>le</strong>ment 20 s’il existe <strong>de</strong>s combinaisons linéairesà coefficients constants entre <strong>le</strong>s colonnes <strong>de</strong> la matrice ∂f i∂a k(x; e).Définition. On dira que r champs <strong>de</strong> vecteurs quelconques (qui neproviennent pas forcément d’un groupe <strong>de</strong> transformations) à coefficientsanalytiques X k = ∑ ni=1 ξ ki(x) ∂∂x i, k = 1, . . .,r, sont indépendantss’ils sont linéairement indépendants, à savoir, s’il n’existe pas <strong>de</strong>constantes λ 1 , . . .,λ r non toutes nul<strong>le</strong>s tel<strong>le</strong>s que λ 1 X 1 + · · ·+λ r X r ≡0.Ainsi un groupe dont <strong>le</strong>s paramètres sont essentiels donne-t-ilnaissance à une col<strong>le</strong>ction <strong>de</strong> transformations infinitésima<strong>le</strong>s indépendantes.Question. Réciproquement, peut-on reconstituer <strong>le</strong> groupe <strong>de</strong> transformationsx ′ = f(x; a 1 , . . .,a r ) à partir <strong>de</strong>s r transformations infinitésima<strong>le</strong>sX 1 , . . .,X r qui donnent toutes <strong>le</strong>s directions <strong>de</strong> mouvementinfinitésimal possib<strong>le</strong>, lorsqu’on fait subir un incrément infinitésimal(e 1 , . . .,e k + ε, . . ., e n ) à la k-ième coordonnée du paramètre-i<strong>de</strong>ntité ?Principe <strong>de</strong> r<strong>et</strong>our en arrière <strong>de</strong> la genèse : on sait bien que la théorie<strong>de</strong> l’intégration perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> reconstituer <strong>le</strong> fini à partir <strong>de</strong> l’infinitésimal.C<strong>et</strong>te question en soulève d’autres. Comment intégrer un systèmei = 1, . . .,n. En remplaçant maintenant chacune <strong>de</strong>s dérivées partiel<strong>le</strong>s ∂x′ i∂a kva<strong>le</strong>ur déduite <strong>de</strong>s équations différentiel<strong>le</strong>s fondamenta<strong>le</strong>s (5), on obtient :r∑ r∑(0 ≡ τ k (a)ψ kj (a)ξ ji x ′ (x; a) )(i =1··· n).j=1 k=1par saEnfin, en posant a = e dans ces équations, en rappelant ψ kj (e) = −δ j k, <strong>et</strong> en introduisant<strong>le</strong>s constantes λ j := ∑ rk=1 τ k(e)ψ kj (e) = −τ j (e) qui ne sont pas toutes nul<strong>le</strong>spar hypothèse, on en déduit <strong>de</strong>s équations :0 ≡ λ 1 ξ 1i (x) + · · · + λ r ξ ri (x) (i =1··· n)qui montrent que <strong>le</strong>s champs <strong>de</strong> vecteurs X k ne sont pas linéairement indépendants.20 C’est donc un exemp<strong>le</strong> d’irréversib<strong>le</strong>-synthétique : pour un groupe <strong>de</strong> transformations,on contourne ainsi l’infinité potentiel<strong>le</strong>ment imparcourab<strong>le</strong> <strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>s vérificationsqui seraient a priori nécessaires en toute généralité afin <strong>de</strong> connaître <strong>le</strong> ranggénérique exact <strong>de</strong> la matrice jacobienne JacF ∞ , dont <strong>le</strong>s colonnes sont en nombreinfini. La généralité initia<strong>le</strong> du concept d’essentialité <strong>de</strong>s paramètres se transforme enun critère concr<strong>et</strong>, calculab<strong>le</strong> <strong>et</strong> effectif.


106 3.6. Champs <strong>de</strong> vecteurs <strong>et</strong> groupes à un paramètre<strong>de</strong> champs <strong>de</strong> vecteurs X 1 , . . .,X r ? R<strong>et</strong>rouve-t-on toujours une famil<strong>le</strong><strong>de</strong> transformations fermée par composition ?Lorsque r 2, la « non-canonicité » <strong>de</strong>s r transformations infinitésima<strong>le</strong>sX 1 , . . .,X r se révè<strong>le</strong> immédiatement. En eff<strong>et</strong>, dès qu’oneffectue un changement <strong>de</strong> paramètres a ↦→ b = b(a) fixant l’i<strong>de</strong>ntité21 , ce qui transforme f(x; a) en g(x; b) := f(x; a(b)), <strong>le</strong>s r transformationsinfinitésima<strong>le</strong>s Y k := ∂g∂b k(x; e) calculées <strong>de</strong> la même manièredans <strong>le</strong> nouvel espace <strong>de</strong>s paramètres <strong>de</strong>viennent certaines combinaisons22 linéaires à coefficients constants <strong>de</strong>s précé<strong>de</strong>ntes transformationsinfinitésima<strong>le</strong>s X 1 , . . ., X r . De tel<strong>le</strong>s combinaisons linéaires interviennentaussi nécessairement lorsqu’on calcu<strong>le</strong> <strong>le</strong>s transformationsinfinitésima<strong>le</strong>s X k non pas en l’i<strong>de</strong>ntité e, mais en un paramètre a quelconque.Ainsi ces <strong>de</strong>ux observations montrent clairement que la structurelinéaire est centra<strong>le</strong>.3.6. Champs <strong>de</strong> vecteurs <strong>et</strong> groupes à un paramètre. Pour commencer,étudions tout d’abord la question posée à l’instant dans <strong>le</strong> cas d’uneseu<strong>le</strong> transformation, c’est-à-dire lorsque r = 1. Dans la théorie <strong>de</strong><strong>Lie</strong> s’exprime une affirmation d’équiva<strong>le</strong>nce ontologique qui a <strong>de</strong> nombreusesimplications <strong>et</strong> qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong>s explications :transformation infinitésima<strong>le</strong> ≡ champ <strong>de</strong> vecteurs quelconqueEn eff<strong>et</strong> <strong>et</strong> pour commencer, rappelons que tout champ <strong>de</strong> vecteurs :n∑X = ξ i (x) ∂∂x ii=1n’est pas seu<strong>le</strong>ment un opérateur <strong>de</strong> dérivation, il vient aussi accompagné<strong>de</strong> son flot — dont nous adm<strong>et</strong>trons l’existence, voir [88, 154, 92,125] — noté :(x; t) ↦−→ exp(tX)(x).Ce flot est défini géométriquement en suivant la courbe intégra<strong>le</strong> <strong>de</strong> Xissue d’un point x jusqu’au « temps » t, ou bien, <strong>de</strong> manière équiva<strong>le</strong>nte<strong>et</strong> d’un point <strong>de</strong> vue analytique, en intégrant <strong>le</strong> système d’équationsdifférentiel<strong>le</strong>s ordinaires :dx idt = ξ (i x1 (t), . . .,x n (t) ) (i =1 ···n)21 On note alors b ↦→ a = b(a) <strong>le</strong> changement inverse <strong>de</strong> paramètres.22 La règ<strong>le</strong> <strong>de</strong> dérivation <strong>de</strong>s fonctions composées donne en eff<strong>et</strong> immédiatement :∂g i∂b k(x; e) = ∑ rl=1∂f i∂a l(x; e) ∂a l∂b k(e).


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 107avec la condition initia<strong>le</strong> x i (0) = x i , la va<strong>le</strong>ur au temps t <strong>de</strong> la solutionétant justement exp(tX)(x). Or <strong>le</strong> flot est un groupe à un paramètre <strong>de</strong>difféomorphismes locaux :exp(t 2 X) ( exp(t 1 X)(x) ) = exp ( (t 1 + t 2 )(X) ) (x),l’i<strong>de</strong>ntité correspondant au paramètre t = 0 <strong>et</strong> l’inverse <strong>de</strong> x ↦→exp(tX)(x) étant tout simp<strong>le</strong>ment x ↦→ exp(−tX)(x).Soit donc maintenant x ′ i = f i(x; a) un groupe continu <strong>de</strong> transformations(au sens <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>) à un seul paramètre a ∈ C (ou bien a ∈ R)pour <strong>le</strong>quel la transformation i<strong>de</strong>ntique correspond au paramètre a = 0.Les équations différentiel<strong>le</strong>s fondamenta<strong>le</strong>s (5) ci-<strong>de</strong>ssus :dx ′ ida = ψ(a) · ξ i(x ′ 1, . . .,x ′ n)(i = 1 ···n)consistent alors en un système d’équations différentiel<strong>le</strong>s ordinairesdu premier ordre paramétrées par a. Mais en introduisant <strong>le</strong> nouveau« paramètre-temps » défini par :t = t(a) :=∫ a0ψ(ã) dã,on peut transférer immédiatement ces équations différentiel<strong>le</strong>s fondamenta<strong>le</strong>svers un système <strong>de</strong> n équations différentiel<strong>le</strong>s ordinaires donttous <strong>le</strong>s seconds membres <strong>de</strong>viennent indépendants du temps :dx ′ i(1)dt = ξ i(x ′ 1, . . ., x ′ n) (i = 1 ··· n).L’intégration revient par conséquent à calcu<strong>le</strong>r <strong>le</strong> flot du champ <strong>de</strong> vecteurs:n∑X ′ := ξ i (x ′ ) ∂ ,∂x ′ ii=1vu dans l’espace <strong>de</strong>s (x ′ 1 , . . .,x′ n ). Avec <strong>le</strong>s mêmes l<strong>et</strong>tres f i, nous écrironsf i (x; t) à la place <strong>de</strong> f i (x; a(t)) en supposant que ce changement<strong>de</strong> paramètre a déjà été exécuté. Alors en fait, l’unique solution dusystème (1) avec la condition initia<strong>le</strong> x ′ i (x; 0) = x i n’est autre quex ′ i = f i (x; t) : <strong>le</strong> flot était donné <strong>et</strong> connu <strong>de</strong>puis <strong>le</strong> début. De plus,l’unicité du flot <strong>et</strong> <strong>le</strong> fait que <strong>le</strong>s coefficients ξ i sont indépendants <strong>de</strong> timpliquent tous <strong>de</strong>ux que la loi <strong>de</strong> composition <strong>de</strong> groupe correspondalors juste à l’addition <strong>de</strong>s paramètres « temporels » :(2) f i(f(x; t1 ); t 2 ) ≡ f i (x; t 1 + t 2 ) (i =1··· n).


108 3.6. Champs <strong>de</strong> vecteurs <strong>et</strong> groupes à un paramètreEn fait, on peut redresser loca<strong>le</strong>ment 23 <strong>le</strong> champ X ′ en <strong>le</strong> champ∂très simp<strong>le</strong> dans un certain nouveau système <strong>de</strong> coordonnées∂y 1′(y 1 ′, y′ 2 , . . .,y′ n ), <strong>et</strong> alors <strong>le</strong> fait que <strong>le</strong>s paramètres temporels s’additionnent<strong>de</strong>vient évi<strong>de</strong>nt.Théorème. Tout groupe continu à un paramètre :x ′ i = f i(x 1 , . . .,x n ; t)(i = 1 ···n)est loca<strong>le</strong>ment équiva<strong>le</strong>nt, à travers un changement approprié <strong>de</strong> variab<strong>le</strong>sx ↦→ y = y(x), à un groupe <strong>de</strong> translations :y ′ 1 = y 1 + t, y ′ 2 = y 2 , . . ...., y ′ n = y n .1byx = f(0, by; y 1)bxy =: Φ(y)y0 y 10y = Φ −1 (x)Φ(y)Fig. : Redressement d’un flot au moyen d’un difféomorphismePreuve. On peut supposer <strong>de</strong>puis <strong>le</strong> début que <strong>le</strong>s coordonnéesx 1 , . . .,x n ont été choisies <strong>et</strong> adaptées <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que ξ 1 (0) = 1<strong>et</strong> que ξ 2 (0) = · · · = ξ n (0) = 0. Dans un espace auxiliaire y 1 , . . .,y nreprésenté sur la gauche <strong>de</strong> la figure, considérons tous <strong>le</strong>s points ŷ :=(0, y 2 , . . .,y n ) proches <strong>de</strong> l’origine qui se trouvent sur l’hyperplan <strong>de</strong>coordonnées complémentaire <strong>de</strong> l’axe <strong>de</strong>s y 1 , <strong>et</strong> introduisons <strong>le</strong> difféomorphisme:y ↦−→ x = x(y) := f ( 0, ŷ; y 1)=: Φ(y),défini en suivant <strong>le</strong> flot f(y; t) jusqu’à un temps t = y 1 en partant d<strong>et</strong>ous ces points possib<strong>le</strong>s ŷ dans l’hyperplan en question. C<strong>et</strong>te applicationest effectivement un difféomorphisme local fixant l’origine, grâceà ∂Φ 1∂y 1(0) = ∂f 1(0) = ξ ∂t 1(0) = 1, grâce à ∂Φ k∂y 1(0) = ∂f k(0) = ξ ∂t k(0) = 0<strong>et</strong> grâce à Φ k (0, ŷ) ≡ ŷ k for k = 2, . . .,n. Nous affirmons maintenantque <strong>le</strong> flot (courbé) qui est représenté dans la partie droite <strong>de</strong> la figure aainsi été redressé à gauche pour <strong>de</strong>venir juste une translation uniformedirigée par l’axe <strong>de</strong>s y 1 . En eff<strong>et</strong> 24 , si l’on suppose à l’avance que <strong>le</strong>x 123 Rappelons que <strong>le</strong> principe <strong>de</strong> relocalisation sous-entend que l’on se replace enun point générique où <strong>le</strong> champ X ne s’annu<strong>le</strong> pas (sinon il est i<strong>de</strong>ntiquement nul, casinintéressant).24 À travers <strong>le</strong> difféomorphisme local y ↦→ x = Φ(y), <strong>le</strong> flot x ′ = f(x; t) se transformenaturel<strong>le</strong>ment par substitution en <strong>le</strong> flot bien déterminé Φ(y ′ ) = f ( Φ(y); t ) ,ou bien, <strong>de</strong> manière équiva<strong>le</strong>nte en <strong>le</strong> flot : y ′ = Φ −1( f ( Φ(y); t )) .


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 109nouveau flot est effectivement donné par ŷ ′ = ŷ <strong>et</strong> par y ′ 1 = y 1 + t, <strong>et</strong> sion effectue ensuite <strong>de</strong>s substitutions :x ′ = f ( ) (0, ŷ ′ ; y 1′ = f 0, ŷ; y1 + t ) (2)= f ( f ( ) )0, ŷ; y 1 ; t = f(x; t),nous r<strong>et</strong>rouvons <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te manière-là <strong>le</strong> flot x ′ = f(x; t) qui était défini<strong>de</strong> manière unique.□En général, dans <strong>le</strong>s traités contemporains <strong>de</strong> géométrie différentiel<strong>le</strong>,<strong>le</strong>s flot sont étudiés sous l’hypothèse que <strong>le</strong>s champs <strong>de</strong> vecteurssoient différentiab<strong>le</strong>s, <strong>de</strong> classe au moins C 1 , voire lipschitziens.Mais dans <strong>le</strong> cas où <strong>le</strong>s coefficients <strong>de</strong>s champs <strong>de</strong> vecteurs sont tousanalytiques (hypothèse généra<strong>le</strong> admise par <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong>), il existeune série entière explicite <strong>et</strong> simp<strong>le</strong>, appelée série <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> (<strong>et</strong> étudiéeentre autres par Gröbner [66]), qui redonne <strong>le</strong> flot sans aucune intégration,directement à partir <strong>de</strong>s coefficients du champ <strong>de</strong> vecteurs.Adm<strong>et</strong>tons donc <strong>le</strong> résultat d’après <strong>le</strong>quel <strong>le</strong> flot (local ou global)est analytique, si <strong>le</strong>s ξ i (x ′ ) <strong>le</strong> sont 25 . La solution formel<strong>le</strong> x ′ (x; t) dusystème d’équations différentiel<strong>le</strong>s ordinaires (1) satisfaisant x ′ (x; 0) =x peut être recherchée en développant l’inconnue x ′ en série formel<strong>le</strong>par rapport à la variab<strong>le</strong> temporel<strong>le</strong> t, <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux premiers termes étantévi<strong>de</strong>nts :X ′ = ∑ ni=1 ξ i(x ′ ) ∂∂x ′ ix ′ i (x; t) = ∑ k0Ξ ik (x) t k = x i + t ξ i (x) + · · ·(i =1··· n).Ainsi donc, quel<strong>le</strong>s sont <strong>le</strong>s fonctions-coefficients Ξ ik (x) ? En différentiant(1) une première fois par rapport à t, puis en redérivant encore unefois <strong>le</strong> résultat obtenu, tout en resubstituant comme il se doit, on obtientpar exemp<strong>le</strong> :⎡⎢⎣d 2 x ′ idt 2 = n∑k=1d 3 x ′ idt 3 = n∑k=1∂ξ i∂x ′ kdx ′ kdt∂X ′ (ξ i )∂x ′ k= X ′ (ξ i ) (i = 1 ··· n)dx ′ kdt= X ′( X ′ (ξ i ) ) ,25 Voir [92] ; nous pourrions en fait ré-établir un tel résultat via <strong>de</strong>s techniques <strong>de</strong>séries majorantes en partant <strong>de</strong> la formu<strong>le</strong> exponentiel<strong>le</strong> <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> que nous allons donnerà l’instant.


110 3.6. Champs <strong>de</strong> vecteurs <strong>et</strong> groupes à un paramètreoù X ′ (ξ i ) <strong>et</strong> X ′ (X ′ (ξ i )) sont <strong>de</strong>s fonctions <strong>de</strong> (x ′ 1 , . . .,x′ n ), <strong>et</strong> donc généra<strong>le</strong>ment,par une récurrence évi<strong>de</strong>nte :d k x ′ idt k = X′( · · · (X ′ (ξ i ) ) · · · ) = X ′( · · · (X ′( X ′ (x ′ i} {{ } } {{ }))) · · · ),k−1 foisk foispour tout entier k 1, sachant que X ′ (x ′ i) = ξ i = ξ i (x ′ ) ; il sera uti<strong>le</strong><strong>de</strong> convenir que X ′0 x ′ i = x′ i lorsque k = 0.En posant maintenant t = 0 dans ces équations dk x ′ i= X ′k (x ′ dt i),knous obtenons donc l’expression recherchée <strong>de</strong>s fonctions Ξ ik (x) :k! Ξ ik (x) ≡ X ′ k (x′i ) ∣ ∣t=0= X k (x i ),où X := ∑ ni=1 ξ i(x) ∂∂x iest <strong>le</strong> même champ <strong>de</strong> vecteurs que X ′ ,vu dans <strong>le</strong>s coordonnées (x 1 , . . .,x n ). Ainsi <strong>de</strong> manière surprenante,l’intégration d’un flot dans <strong>le</strong> cas analytique revient à la sommationd’un nombre infini <strong>de</strong> termes différentiés.Proposition. L’unique solution x ′ (x; t) d’un système d’équations différentiel<strong>le</strong>sordinaires :⎡dx ′ i⎣ dt = ξ i(x ′ 1 , . . ., x′ n )x ′ i (x; 0) = x i (i =1··· n)qui est associé ou bien à un groupe <strong>de</strong> transformations à un seul paramètrevia <strong>le</strong>s équations différentiel<strong>le</strong>s fondamenta<strong>le</strong>s <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>, ou bienà un champ <strong>de</strong> vecteurs quelconque X ′ = ∑ ni=1 ξ i(x ′ ) ∂ , est fournie∂x ′ ipar <strong>le</strong> développement en série entière convergent :(3) x ′ i(x; t) = x i + t X(x i ) + · · · + tkk! Xk (x i ) + · · · (i =1··· n),où X = ∑ ni=1 ξ i(x) ∂∂x iest <strong>le</strong> même champ que X ′ vu dans <strong>le</strong>s coordonnées(x 1 , . . .,x n ), qui agit sur x i comme dérivation X k d’ordre karbitraire. De plus, ce développement peut aussi être réécrit <strong>de</strong> manièreappropriée au moyen d’une simp<strong>le</strong> notation exponentiel<strong>le</strong> :(3’) x ′ i = exp ( t X ) (x i ) = ∑ k0(t X) k(x i ) (i = 1 ···n).k!Ainsi c<strong>et</strong>te proposition établit-el<strong>le</strong> l’équiva<strong>le</strong>nce ontologique fondamenta<strong>le</strong>:groupe local à un paramètre ≡ transformation infinitésima<strong>le</strong> ,


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 111qui s’insère plus généra<strong>le</strong>ment dans l’équiva<strong>le</strong>nce fonctionnel<strong>le</strong> entre<strong>le</strong> différentiel infinitésimal <strong>et</strong> <strong>le</strong> local fini, tout en développant <strong>le</strong>s premierséléments d’une théorie géométrique du mouvement. Toutefois,c<strong>et</strong>te équiva<strong>le</strong>nce ne saurait s’affirmer comme principe d’égalité absolueentre <strong>de</strong>ux êtres initia<strong>le</strong>ment distincts qui <strong>de</strong>viendraient par là-mêmestrictement interchangeab<strong>le</strong>s. Comme dans toute autre équiva<strong>le</strong>nce mathématique,l’ontologie est interrogation en <strong>de</strong>venir sur la structure <strong>et</strong>sur la constitution d’un être mathématique problématique. À travers <strong>le</strong>séquiva<strong>le</strong>nces que l’être mathématique découvre à son propre suj<strong>et</strong> parl’analyse ou par la synthèse, l’être vise en eff<strong>et</strong> à se déployer dans <strong>de</strong>sespaces neufs qui soient propices à révé<strong>le</strong>r sa nature intrinsèque, en supprimanttoutes <strong>le</strong>s formes d’arbitraire <strong>et</strong> <strong>de</strong> non-compréhension dont estentachée sa donation initia<strong>le</strong>.À strictement par<strong>le</strong>r, aucun énoncé mathématique d’équiva<strong>le</strong>nceentre <strong>de</strong>ux concepts ou entre <strong>de</strong>ux conditions spécifiques n’est réel<strong>le</strong>menttransparent dans une doub<strong>le</strong> circulation du sens. L’équiva<strong>le</strong>nce, enmathématiques, transcen<strong>de</strong> tout concept logique ou méta-mathématique<strong>de</strong> termes formels syntaxiquement substituab<strong>le</strong>s.En vérité, dans l’équiva<strong>le</strong>nce, il doit se manifester un différentielsynthétiquedu potentiel interrogatif, comme par l’eff<strong>et</strong> d’une révélationprogressive qui autoriserait à oublier presque définitivement <strong>le</strong> membreinitial <strong>de</strong> l’« équiva<strong>le</strong>nce » pour ne r<strong>et</strong>enir que <strong>le</strong> membre final, plus rapproché,bien que peut-être encore fort éloigné, <strong>de</strong> l’essence <strong>de</strong> la chose àcomprendre. Quant au choix <strong>de</strong> brisure <strong>de</strong> symétrie dans l’équiva<strong>le</strong>nce,c’est-à-dire quant au choix <strong>de</strong> l’initial <strong>et</strong> du final dans l’équiva<strong>le</strong>nce enquestion, c’est bien sûr <strong>le</strong> concept <strong>de</strong> transformation infinitésima<strong>le</strong> quidoit en quelque sorte éliminer <strong>le</strong> concept <strong>de</strong> groupe local à un paramètre,pour s’y substituer comme obj<strong>et</strong> d’étu<strong>de</strong> principal. Et c’est effectivementce que <strong>Lie</strong> affirmera systématiquement dans ses travaux :grâce à l’équiva<strong>le</strong>nce en question, on peut m<strong>et</strong>tre entre parenthèses l’intervention<strong>de</strong> l’analyse comme procédé d’intégration pour se concentrerseu<strong>le</strong>ment sur la classification <strong>de</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s. L’infinitésimalse substitue au fini, car il est plus simp<strong>le</strong> : il est linéaire.À vrai dire, si l’on accepte comme <strong>Lie</strong> <strong>le</strong>s règ<strong>le</strong>s <strong>de</strong> la généricitécomme hypothèse généra<strong>le</strong> d’étu<strong>de</strong> (cf. p. 80), <strong>le</strong> théorème <strong>de</strong> redressementmontre que <strong>le</strong> concept <strong>de</strong> transformation infinitésima<strong>le</strong> individuel<strong>le</strong>est entièrement circonscrit. En eff<strong>et</strong>, toute transformation infinitésima<strong>le</strong>se réduit au champ <strong>de</strong> vecteurs <strong>le</strong> plus simp<strong>le</strong> possib<strong>le</strong> :∂∂x 1,somme réduite à un seul terme, dérivation <strong>le</strong> long d’un seul axe <strong>de</strong> coordonnées,avec un coefficient constant égal à 1. L’infinitésimalisation


112 3.6. Champs <strong>de</strong> vecteurs <strong>et</strong> groupes à un paramètre<strong>de</strong>s transformations transfère la théorie <strong>de</strong>s groupes vers l’algèbre, <strong>et</strong>tout d’abord, vers l’algèbre linéaire. On peut donc maintenant se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rquel<strong>le</strong> doit être l’équiva<strong>le</strong>nce entre groupe à r paramètres <strong>et</strong> système<strong>de</strong> r transformations infinitésima<strong>le</strong>s mutuel<strong>le</strong>ment indépendantesX 1 , . . .,X r . Ici, l’Un va provoquer l’imprévu du Multip<strong>le</strong>, c’est-à-direforcer la genèse <strong>de</strong> concepts inattendus. Mais pour l’instant, poursuivonsl’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s groupes à un seul paramètre.<strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> écrivent <strong>le</strong>s champs <strong>de</strong> vecteurs X — qu’ils appel<strong>le</strong>ntsystématiquement transformations infinitésima<strong>le</strong>s — toujours sous laforme «Xf », non pas donc comme opérateur abstrait <strong>de</strong> dérivation,mais comme action effective sur une fonction-test toujours notée f =f(x 1 , . . .,x n ). L’action concrète <strong>de</strong> X sur f consiste bien entendu à <strong>le</strong>faire agir comme dérivation :Xf =n∑i=1ξ i (x) ∂f∂x i.Eu égard à l’équiva<strong>le</strong>nce ontologique sus-mentionnée, il est naturel <strong>de</strong>se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r maintenant (scholie) quel<strong>le</strong> est l’action d’un groupe finià un paramètre sur <strong>le</strong>s fonctions. Si donc f = f(x 1 , . . .,x n ) est unefonction analytique arbitraire, si l’on compose f avec <strong>le</strong> flot du groupeà un paramètre :f ′ := f(x ′ 1, . . .,x ′ n) = f ( x ′ 1(x; t), . . .,x ′ n(x; t) ) ,<strong>et</strong> si l’on développe en série entière c<strong>et</strong>te composition par rapport à t :f ′ = ( f ′) + ( t df ′t=0 1! dt)t=0 + ( t2 d 2 f ′2! dt)t=0 + · · · ,2on doit calcu<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s quotients différentiels df ′, d2 f ′, . . ., ce qui ne pose àdt dt 2vrai dire aucune difficulté :⎡df ′ n∑⎢ dt = dx ′ i ∂f ′ n∑dt ∂x ′ = ξ ′ ∂f ′ii=1 i∂x ′ = X ′ (f ′ ),i=1 i⎣d 2 f ′dt 2 = X′( df ′ )= X ′( X ′ (f ′ ) ) ,dt<strong>et</strong> ainsi <strong>de</strong> suite. En posant t = 0, chaque x ′ i <strong>de</strong>vient x i , la fonctionf ′ <strong>de</strong>vient f <strong>et</strong> X ′ (f ′ ) <strong>de</strong>vient X(f), <strong>et</strong> ainsi <strong>de</strong> suite, <strong>et</strong> grâce à cesobservations, on obtient <strong>le</strong> développement recherché :(4)f(x ′ 1, . . ., x ′ n) = f(x 1 , . . .,x n ) + t tkX(f) + · · · +1! k! Xk (f) + · · ·= ∑ (tX) kk0(f) = exp(tX)(f),k!


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 113qui fait bien sûr réapparaître la symbolique exponentiel<strong>le</strong>. Évi<strong>de</strong>mment,par différentiation, on doit r<strong>et</strong>rouver l’action infinitésima<strong>le</strong> :Xf = d ( )exp(tX)(f)dt. t=0Maintenant, soit X = ∑ ni=1 ξ i(x) ∂∂x iune transformation infinitésima<strong>le</strong>qui engendre <strong>le</strong> groupe à un paramètre x ′ = exp(tX)(x).Qu’advient-il lorsque <strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s x 1 , . . .,x n sont soumises à un changement<strong>de</strong> coordonnées analytiques loca<strong>le</strong>s ? C<strong>et</strong>te question généra<strong>le</strong>est tout à fait crucia<strong>le</strong> quant à l’individuation effective. En eff<strong>et</strong>, toutedonation dans un système <strong>de</strong> coordonnées est entachée <strong>de</strong> quelconque<strong>et</strong> d’arbitraire. Principe métaphysique : user au maximum <strong>de</strong> la libertéque l’on a <strong>de</strong> changer <strong>le</strong> système <strong>de</strong> coordonnées afin <strong>de</strong> spécifier <strong>et</strong> <strong>de</strong>simplifier au mieux <strong>le</strong>s individus géométriques.En premier lieu, on doit donc comprendre a priori (<strong>et</strong> en général)<strong>de</strong> quel<strong>le</strong> façon <strong>le</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s arbitraires sont modifiées,simplifiées ou comp<strong>le</strong>xifiées lorsqu’on effectue un changementarbitraire <strong>de</strong> variab<strong>le</strong>s.Soit donc x ↦→ x = x(x) un changement <strong>de</strong> coordonnées analytiquesloca<strong>le</strong>s, c’est-à-dire en faisant apparaître <strong>le</strong>s indices :(x 1 , . . .,x n ) ↦−→ (x 1 , . . ., x n ) = ( x 1 (x), . . .,x n (x) ) .Ici, en respectant la pensée <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>, aucun symbo<strong>le</strong> fonctionnel n’estintroduit, mais pour <strong>le</strong>s besoins occasionnels <strong>de</strong> l’exégèse mo<strong>de</strong>rne, onpourrait convenir d’appe<strong>le</strong>r x ↦→ Φ(x) = x ce difféomorphisme local,avec une l<strong>et</strong>tre auxiliaire Φ. Néanmoins, <strong>le</strong> formalisme <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> présenteun avantage considérab<strong>le</strong> par rapport au formalisme contemporain, <strong>et</strong>ce, pour au moins <strong>de</strong>ux raisons.• D’un point <strong>de</strong> vue symbolique, <strong>le</strong> difféomorphisme inverse :(x 1 , . . ., x n ) ↦−→ (x 1 , . . .,x n ) = ( x 1 (x), . . .,x n (x) )s’exprime exactement comme <strong>le</strong> difféomorphisme initial, en intervertissantseu<strong>le</strong>ment 26 <strong>le</strong>s rô<strong>le</strong>s <strong>de</strong> x <strong>et</strong> <strong>de</strong> x.• Aussi bien dans <strong>le</strong>s applications concrètes que dans <strong>le</strong>s démonstrations<strong>de</strong>s théorèmes <strong>de</strong> classification, <strong>le</strong>s fonctions coordonnéesimagessont toujours données explicitement ou spécifiquement en fonction<strong>de</strong>s coordonnées-sources (x 1 , . . ., x n ), si bien que l’introduction <strong>de</strong>26 On se dispense ainsi d’avoir à résoudre la micro-question <strong>de</strong> présentation symboliqueformel<strong>le</strong> : « est-il plus adapté <strong>de</strong> choisir la l<strong>et</strong>tre Φ ou bien la l<strong>et</strong>tre Φ −1 pourdésigner <strong>le</strong> difféomorphisme initial ? ».


114 3.6. Champs <strong>de</strong> vecteurs <strong>et</strong> groupes à un paramètresymbo<strong>le</strong>s fonctionnels Φ i serait superflue ou redondante. En fait, toutchangement <strong>de</strong> coordonnées sous-entend une procédure <strong>de</strong> remplacementautomatique d’anciennes variab<strong>le</strong>s par <strong>de</strong> nouvel<strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s, ceque la notation x = x(x) montre <strong>de</strong> manière adéquate.Ainsi, une fonction arbitraire f = f(x 1 , . . .,x n ) définie dansl’espace-source donne alors naissance, à travers <strong>le</strong> « miroir » du changement<strong>de</strong> coordonnées, à la fonction correspondante :(5) f(x 1 , . . .,x n ) := f ( x 1 (x), . . ., x n (x) )qui est définie dans l’espace-image. C<strong>et</strong>te relation s’écrit aussi <strong>de</strong> manièresymétrique :f(x) = f(x).Le transfert d’une dérivation arbitraire X = ∑ ni=1 ξ i(x) ∂∂x ià travers cemiroir doit alors être tel que la relation purement symétrique :X(f) = X(f),soit satisfaite pour toute fonction f, c’est-à-dire que, après remplacementà droite <strong>de</strong> x par x(x) <strong>et</strong> en utilisant la différentiation <strong>de</strong> (5) parrapport à x k , <strong>le</strong> transfert doit satisfaire :X(f) =n∑i=1ξ i (x) ∂f∂x i===n∑k=1ξ k (x) ∂f∂x k∣∣∣x=x(x)n∑ ( ) ∑nξ k x(x)k=1n∑i=1( n∑k=1i=1∂f∂x i(x) ∂x i∂x k(x(x))ξ k(x(x)) ∂x i∂x k(x(x)) ) ∂f∂x i(x).Autrement dit, <strong>de</strong> manière abrégée <strong>et</strong> en supprimant <strong>le</strong> symbo<strong>le</strong> <strong>de</strong>fonction-test :n∑X = X(x i ) ∂ .∂x ii=1En intervertissant <strong>le</strong>s rô<strong>le</strong>s <strong>de</strong> X <strong>et</strong> <strong>de</strong> X, nous avons donc démontrél’énoncé suivant.Lemme. À travers un changement arbitraire <strong>de</strong> coordonnées loca<strong>le</strong>s :(x 1 , . . .,x n ) ↦−→ (x 1 , . . ., x n ) = ( x 1 (x), . . .,x n (x) ) ,


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 115un champ <strong>de</strong> vecteurs quelconque X = ∑ ni=1 ξ i(x) ∂∂x ivers :n∑X := X(x i ) ∂ .∂x ii=1est transféréDe la même manière que l’on pouvait écrire l’équation f = f, onpeut maintenant écrire X = X, étant entendu que ces <strong>de</strong>ux écrituresn’ont <strong>de</strong> sens que si l’on remplace partout x par x (ou partout x par x).À présent, comment sont transformés <strong>le</strong>s groupes à un paramètre ?L’énoncé suivant (cf. [40, 88, 154]), que nous ne redémontrerons pas,décou<strong>le</strong> aisément <strong>de</strong>s considérations précé<strong>de</strong>ntes.Proposition. Le nouveau groupe à un paramètre x ′ = exp(tX)(x) associéau nouveau champ <strong>de</strong> vecteurs X = ∑ ni=1 X(x i) ∂∂x ipeut êtrer<strong>et</strong>rouvé à partir <strong>de</strong> l’ancien x ′ = exp(tX)(x) grâce à la formu<strong>le</strong> canonique:exp ( tX ) (x) = exp(tX)(x) ∣ x=x(x).En d’autres termes, l’ancien groupe à un paramètre :x ′ i = x i + t 1 X(x i) + t21·2 X2 (x i ) + · · · (i = 1 ···n)est transféré vers <strong>le</strong> nouveau groupe à un paramètre :x ′ i = x i + t 1 X(x i) + t21·2 X2 (x i ) + · · · (i =1··· n),où la variab<strong>le</strong> t reste la même dans <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux col<strong>le</strong>ctions <strong>de</strong> n équations.Après ces préparatifs, nous pouvons maintenant revenir à la questionsou<strong>le</strong>vée à la fin du § 3.5 : comment reconstituer <strong>le</strong>s équationsx ′ i = f i (x; a) d’un groupe continu fini <strong>de</strong> transformations à partir <strong>de</strong>ses transformations infinitésima<strong>le</strong>s X 1 , . . .,X r ? En prenant une combinaisonlinéaire arbitraire X := λ 1 X 1 + · · · + λ r X r <strong>de</strong> ces transformations,après fixation <strong>de</strong>s constantes λ k , on peut considérer <strong>le</strong> groupeà un paramètre exp(tX)(x) qui est engendré par X. Autrement dit, enconsidérant après-coup que <strong>le</strong>s constantes λ k peuvent aussi re<strong>de</strong>venirvariab<strong>le</strong>s, on obtient <strong>de</strong> nouvel<strong>le</strong>s équations <strong>de</strong> transformations :x ′ i = exp ( t λ 1 X 1 + · · · + t λ r X r)(xi )=: h i(x; t, λ1 , . . .,λ r)(i = 1 ...n)paramétrées non seu<strong>le</strong>ment par <strong>le</strong> « temps » t, mais aussi par cesconstantes arbitraires λ k . La réponse positive que l’on a déjà <strong>de</strong>vinée


116 3.6. Champs <strong>de</strong> vecteurs <strong>et</strong> groupes à un paramètreénoncera que ces équations <strong>de</strong> transformations, appelées équations finiescanoniques du groupe par <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong>, recouvrent complètement<strong>le</strong>s équations origina<strong>le</strong>s x ′ i = f i(x; a).Avant <strong>de</strong> poursuivre, résumons <strong>le</strong> parcours spéculatif <strong>et</strong> sou<strong>le</strong>vons<strong>de</strong>s questions nouvel<strong>le</strong>s. Le Multip<strong>le</strong> X 1 , . . .,X r comprend l’Un-diversX = λ 1 X 1 +· · ·+λ r X r <strong>de</strong> transformations infinitésima<strong>le</strong>s individuel<strong>le</strong>spossib<strong>le</strong>s. Chaque tel Un-divers jouit p<strong>le</strong>inement <strong>de</strong> l’équiva<strong>le</strong>nce ontologiqueavec <strong>le</strong> groupe à un paramètre qu’il engendre. Ainsi <strong>le</strong> groupeà un paramètre <strong>de</strong> l’Un-divers fournit-il gratuitement <strong>de</strong>s équations d<strong>et</strong>ransformations à plusieurs paramètres. La question <strong>de</strong> savoir commentces équations <strong>de</strong> transformations x ′ i = h i(x; t, λ 1 , . . .,λ r ) sont reliéesaux anciennes équations se divise alors en <strong>de</strong>ux questions.• Étant donné r transformations infinitésima<strong>le</strong>s linéairement indépendantesX 1 , . . .,X r qui proviennent d’un groupe continu à r paramètresessentiels x ′ = f(x; a 1 , . . .,a r ), comment choisir 27 <strong>le</strong>s paramètrest, λ 1 , . . .,λ r dans <strong>le</strong>s équations <strong>de</strong> transformations x ′ =exp ( tλ 1 X 1 + · · · + tλ r X r )(x) pour r<strong>et</strong>rouver x ′ = f(x; a 1 , . . .,a r ) ?• Étant donné r transformations infinitésima<strong>le</strong>s linéairement indépendantesquelconques X 1 , . . .,X r qui ne proviennent pas forcémentd’un groupe continu fini, <strong>le</strong>s équations <strong>de</strong> transformations x ′ =exp ( tλ 1 X 1 + · · ·+tλ r X r )(x) constituent-el<strong>le</strong>s un groupe continu fini ?Et si tel n’est pas <strong>le</strong> cas, sous quel<strong>le</strong>s conditions, nécessaires, suffisantes,ou mieux encore : nécessaires <strong>et</strong> suffisantes 28 c<strong>et</strong>te conclusion est-el<strong>le</strong>satisfaite ?La secon<strong>de</strong> question exige la notion crucia<strong>le</strong> <strong>de</strong> croch<strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>(§§ 3.8 <strong>et</strong> 3.9 ci-<strong>de</strong>ssous), tandis que la réponse à la première peuts’en dispenser : <strong>le</strong> passage à un niveau supérieur d’abstraction dans <strong>le</strong>sconditions <strong>de</strong> donation implique un renversement compl<strong>et</strong> du champsynthétique.Tout d’abord, au suj<strong>et</strong> <strong>de</strong>s fonctions h i (x; t, λ 1 , . . .,λ r ) introduitesà l’instant, une question se pose immédiatement : <strong>le</strong>s r + 1 paramètrest <strong>et</strong> λ 1 , . . .,λ r y sont-ils essentiels ? Certainement pas : ces r + 1 paramètresse réduisent en fait à r paramètres (au maximum), puisquechaque λ i apparaît multiplié par t dans exp(tλ 1 X 1 + · · · + tλ r X r )(x).27 Nous venons d’annoncer que l’on r<strong>et</strong>rouve <strong>le</strong>s équations d’origine, mais il auraittrès bien pu se produire que <strong>le</strong>s équations x ′ = exp ( tλ 1 X 1 + · · · + tλ r X r )(x) <strong>le</strong>ursoient purement étrangères.28 Nécessité <strong>et</strong> suffisance en toute circonstance : exigence riemannienne universel<strong>le</strong>.


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 117Toutefois, en posant t = 1, <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> établissent l’essentialité <strong>de</strong>s rparamètres restants λ 1 , . . ., λ r par une démonstration sophistiquée <strong>et</strong> ingénieuseque nous restituons, en la mo<strong>de</strong>rnisant <strong>et</strong> avec <strong>de</strong> plus amp<strong>le</strong>sdétails, à la fin <strong>de</strong> ce paragraphe.Théorème 8. ([40], p. 65) Si r transformations infinitésima<strong>le</strong>s :X k (f) =n∑i=1ξ ki (x 1 , . . ., x n ) ∂f∂x i(k = 1 ···r)sont mutuel<strong>le</strong>ment [linéairement] indépendantes <strong>et</strong> si, <strong>de</strong> plus,λ 1 , . . .,λ r sont <strong>de</strong>s paramètres arbitraires, alors la totalité [Inbegriff]<strong>de</strong>s groupes 29 à un paramètre λ 1 X 1 (f) + · · · + λ r X r (f) forme unefamil<strong>le</strong> <strong>de</strong> transformations :x ′ i = x i +r∑λ k · ξ ki +k=1∑1...rk,jλ k λ j1 · 2 · X k(ξ ji ) + · · · (i = 1 ···n),dans <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s r paramètres λ 1 , . . ., λ r sont tous essentiels, doncune famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ r transformations différentes 30 .Fait remarquab<strong>le</strong> : toute question spéculative ou rhétorique qui apparaîtnaturel<strong>le</strong>ment est traitée par <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> au moment appropriédans <strong>le</strong> continu temporel <strong>et</strong> mémoriel du déploiement irréversib<strong>le</strong> <strong>de</strong> lathéorie. S’il existe une systématique du questionnement, c’est dans <strong>le</strong>smathématiques d’inspiration riemannienne qui se sont développées pendantla <strong>de</strong>uxième moitié du 19 ème sièc<strong>le</strong> qu’il faut en trouver <strong>le</strong>s racines,bien avant que l’axiomatique formel<strong>le</strong> du 20 ème sièc<strong>le</strong> ne l’enfouissesous <strong>de</strong>s strates <strong>de</strong> reconstitution a posteriori <strong>et</strong> non ouvertement problématisante.Maintenant, examinons la première question. Pour λ 1 , . . .,λ rfixés, la transformation infinitésima<strong>le</strong> combinaison linéaire X :=λ 1 X 1 + · · · + λ r X r a pour coefficients :ξ i (x) :=n∑λ j ξ ji (x)j=1(i =1... n).29 Le principe d’équiva<strong>le</strong>nce ontologique énoncé p. 110 s’exerce déjà implicitementici : tout groupe à un paramètre est i<strong>de</strong>ntifié par <strong>Lie</strong> à son générateur infinitésimal.30 La notation « ∞ r » désigne <strong>le</strong> nombre <strong>de</strong> paramètres continus (d’où <strong>le</strong> symbo<strong>le</strong>d’infinité ∞) dont dépend un obj<strong>et</strong> analytique ou géométrique.


118 3.6. Champs <strong>de</strong> vecteurs <strong>et</strong> groupes à un paramètrePar définition du flot x ′ = exp(tX)(x), <strong>le</strong>s fonctions :h i (x; t, λ 1 , . . .,λ r ) = exp ( tλ 1 X 1 + · · · + tλ r X r )(x i )satisfont <strong>le</strong> système d’équations différentiel<strong>le</strong>s ordinaires :dh idt = ξ i(h 1 , . . .,h n ) (i =1... n),ou bien, <strong>de</strong> manière équiva<strong>le</strong>nte :dh ir∑(6)dt = λ j ξ ji (h 1 , . . .,h n ) (i = 1 ... n),j=1avec bien sûr la condition initia<strong>le</strong> h(x; 0, λ) = x lorsque t = 0. D’unautre côté, d’après <strong>le</strong> paragraphe qui précè<strong>de</strong> <strong>le</strong> Théorème p. 104, <strong>le</strong>sfonctions f i <strong>de</strong>s équations <strong>de</strong> transformations d’origine x ′ i = f i(x; a)satisfont <strong>le</strong>s équations différentiel<strong>le</strong>s fondamenta<strong>le</strong>s :(4)r∑k=1∂f i∂a k˜ψjk (a) = ξ ji (f 1 , . . ., f n )(i = 1 ...n; j = 1 ...r).La correspondance recherchée entre <strong>le</strong>s équations <strong>de</strong> transformationsinitia<strong>le</strong>s x ′ = f(x; a) du groupe <strong>et</strong> ses équations finies canoniques x ′ =h(x; t, λ) est maintenant fournie par la proposition suivante, qui résoutla première question.Proposition. Si <strong>le</strong>s paramètres a 1 , . . .,a r sont <strong>le</strong>s uniques solutionsa k (t, λ) du système d’équations différentiel<strong>le</strong>s ordinaires du premierordre :da kr∑dt = λ j ˜ψjk (a) (k = 1 ...r)j=1satisfaisant la condition initia<strong>le</strong> d’après laquel<strong>le</strong> a(0, λ) = e est l’élémenti<strong>de</strong>ntité, alors <strong>le</strong>s équations suivantes sont i<strong>de</strong>ntiquement satisfaites:f i(x; a(t,λ))≡ exp(t λ1 X 1 + · · · + t λ r X r)(xi ) = h i(x; t,λ1 ,... ,λ r)(i = 1 ...n)<strong>et</strong> el<strong>le</strong>s montrent comment <strong>le</strong>s fonctions h i se déduisent <strong>de</strong>s fonctions f i .Preuve. En eff<strong>et</strong>, multiplions (4) ci-<strong>de</strong>ssus par λ j <strong>et</strong> sommons parrapport à j pour j allant <strong>de</strong> 1 jusqu’à r, ce qui nous donne :r∑ ∂f ir∑r∑λ j ˜ψjk (a) = λ j ξ ji (f 1 , . . .,f n ) (i =1... n).∂a kk=1j=1j=1


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 119Grâce à l’hypothèse principa<strong>le</strong> concernant <strong>le</strong>s a k , nous pouvons remplacerla secon<strong>de</strong> somme du membre <strong>de</strong> gauche par da k, <strong>et</strong> nous obtenonsdtainsi <strong>de</strong>s i<strong>de</strong>ntités :r∑ ∂f i da kr∑∂a k dt ≡ λ j ξ ji (f 1 , . . .,f n ) (i =1... n)k=1j=1dans la partie gauche <strong>de</strong>squel<strong>le</strong>s nous reconnaissons une simp<strong>le</strong> dérivationpar rapport à t :df idt = d [ ( )]r∑fi x; a(t, λ) ≡ λ j ξ ji (f 1 , . . ., f n )dtj=1(i = 1 ...n).Mais puisque f ( x; a(0, λ) ) = f(x; e) = x est soumis à la même conditioninitia<strong>le</strong> que la solution h ( x; t, λ ) du système (6), lorsque t = 0,l’unicité <strong>de</strong>s solutions à un système d’équations différentiel<strong>le</strong>s ordinairesdu premier ordre implique immédiatement la coïnci<strong>de</strong>nce annoncée: f ( x; a(t, λ) ) ≡ h ( x; t, λ ) .□Démonstration du Théorème 8 p. 117. Ici exceptionnel<strong>le</strong>ment, nousavons observé une légère incorrection technique (la seu<strong>le</strong> que nous ayons pudécouvrir !) dans la preuve écrite par <strong>Engel</strong> ∣ <strong>et</strong> par ∣ <strong>Lie</strong> ([40], pp. 62–65) au suj<strong>et</strong>du lien entre <strong>le</strong> rang générique <strong>de</strong> X ∣x 1 ,...,X ∣x r <strong>et</strong> une borne inférieure pour<strong>le</strong> nombre <strong>de</strong>s paramètres essentiels 31 .L’idée géométrique principa<strong>le</strong> <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> est astucieuse <strong>et</strong> pertinente : el<strong>le</strong>consiste à introduire exactement r — <strong>le</strong> nombre <strong>de</strong>s λ k — copies du mêmeespace x 1 ,... ,x n dont <strong>le</strong>s coordonnées seront notées x (µ)1 ,... ,x(µ) n pour µ =1,... ,r <strong>et</strong> à considérer la famil<strong>le</strong> <strong>de</strong>s équations <strong>de</strong> transformations qui sontinduites par <strong>le</strong>s mêmes équations <strong>de</strong> transformations :x (µ)i′= exp(C)(x(µ)i)= hi(x (µ) ; λ 1 ,...,λ r)(i = 1 ···n; µ=1···r)dans chaque copie <strong>de</strong> l’espace, avec <strong>le</strong> paramètre « temporel » t = 1, oùl’on pose pour abréger h(x; λ) := h(x; 1,λ). Géométriquement, on voitainsi <strong>de</strong> quel<strong>le</strong> manière <strong>le</strong>s équations <strong>de</strong> transformations initia<strong>le</strong>s x ′ i =h i (x; λ 1 ,... ,λ r ) agissent simultanément sur <strong>le</strong>s r-up<strong>le</strong>s <strong>de</strong> points. Si on <strong>le</strong>s31 À la page 63, il est dit que si <strong>le</strong> nombre r <strong>de</strong> transformations infinitésima<strong>le</strong>sindépendantes X k est n, alors la matrice ( ξ ki (x) ) 1in(<strong>de</strong> tail<strong>le</strong> r × n) <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs1krcoefficients est <strong>de</strong> rang générique égal à r, mais c<strong>et</strong>te assertion est contredite pourn = r = 2 par <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux champs <strong>de</strong> vecteurs x ∂∂x + y ∂ ∂∂y<strong>et</strong> xx∂x + xy ∂∂y . Toutefois<strong>le</strong>s idées <strong>et</strong> <strong>le</strong>s arguments <strong>de</strong> la preuve présentée (qui ne nécessite en fait pas <strong>de</strong> tel<strong>le</strong>assertion) sont parfaitement corrects.


120 3.6. Champs <strong>de</strong> vecteurs <strong>et</strong> groupes à un paramètredéveloppe en série entière par rapport aux paramètres λ k , ces transformationss’écrivent :x (µ) ′r∑(µ)i = xi+ λ k · ξ (µ) ∑1...rλ k λ jki+(5)1 · 2 · ( X(µ) (µ)) k ξji + · · ·k=1k,j(i = 1 ···n; µ=1··· r),où nous avons bien sûr posé : ξ (µ)ki:= ξ ki (x (µ) ) <strong>et</strong> X (µ)k:=∑ ni=1 ξ ki(x (µ) ∂) . Une tel<strong>le</strong> idée se révè<strong>le</strong>ra fructueuse dans d’autres∂x (µ)icontextes, cf. la démonstration du Théorème 24 p. 149 ci-<strong>de</strong>ssous.D’après <strong>le</strong> théorème p. 86, afin d’établir que <strong>le</strong>s paramètres λ 1 ,... ,λ rsont essentiels, on doit seu<strong>le</strong>ment développer x ′ en série entière par rapport àx à l’origine :x ′ i = ∑(i = 1 ...n),α∈N n F i α(λ)x α<strong>et</strong> montrer que <strong>le</strong> rang générique <strong>de</strong> la matrice infinie <strong>de</strong>s coefficients λ ↦−→(Fiα (λ) ) 1inest <strong>le</strong> maximal possib<strong>le</strong>, égal à r. De même <strong>et</strong> immédiatement,α∈N non obtient <strong>le</strong> développement correspondant <strong>de</strong>s équations <strong>de</strong> transformationsdans <strong>le</strong>s espaces-copies :(6) x (µ) ′ ∑i = Fα i,(µ) (λ)(x (µ) ) α (i = 1 ...n; µ=1...r),α∈N navec, pour tout µ = 1,... ,r, <strong>le</strong>s mêmes fonctions coefficients :F i,(µ)α (λ) ≡ F i α (λ) (i = 1 ... n; α ∈ Nn ; µ=1... r).Il en décou<strong>le</strong> que <strong>le</strong> rang générique <strong>de</strong> la matrice infinie <strong>de</strong>s coefficientscorrespondante, qui n’est autre qu’une copie <strong>de</strong> r fois la même applicationλ ↦−→ ( Fα i(λ)) 1in, ni ne croît, ni ne décroit.α∈N nAinsi, <strong>le</strong>s paramètres λ 1 ,...,λ r pour <strong>le</strong>s équations <strong>de</strong> transformationsx ′ = h(x; λ) sont essentiels si <strong>et</strong> seu<strong>le</strong>ment si ils sont essentiels pour <strong>le</strong>séquations <strong>de</strong> transformations diagona<strong>le</strong>s x (µ)′ = h ( x (µ) ; λ ) , µ = 1,... ,r,induites sur <strong>le</strong> produit <strong>de</strong> r copies <strong>de</strong> l’espace <strong>de</strong>s x 1 ,... ,x n .Donc il nous faut démontrer que <strong>le</strong> rang générique <strong>de</strong> la copie <strong>de</strong> r matricesinfinies <strong>de</strong> coefficients λ ↦−→ ( Fαi,(µ) (λ) ) 1in, 1µrest égal à r.α∈N nNous allons en fait établir que <strong>le</strong> rang en λ = 0 <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te même application estdéjà égal à r, ou, <strong>de</strong> manière équiva<strong>le</strong>nte, que la matrice infinie constante :( i,(µ) ∂F)α 1in, α∈N n ,1µr(0)∂λ k 1krdont <strong>le</strong>s r lignes sont in<strong>de</strong>xées par <strong>le</strong>s dérivées partiel<strong>le</strong>s, est <strong>de</strong> rang égal r.


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 121Afin <strong>de</strong> préparer c<strong>et</strong>te matrice infinie, si nous différentions <strong>le</strong>s développements(5) — qui s’i<strong>de</strong>ntifient à (6) — par rapport à λ k en λ = 0, <strong>et</strong> si nousdéveloppons <strong>le</strong>s coefficients <strong>de</strong> nos transformations infinitésima<strong>le</strong>s :ξ ki (x (µ) ) = ∑ξ kiα · (x (µ) ) α (i =1... n; k = 1 ...r; µ=1...r)α∈N npar rapport aux puissances <strong>de</strong> x 1 ,...,x n , nous obtenons une expression appropriée<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te matrice :( i,(µ) ∂F)α 1in, α∈N n , 1µr ( (ξkiα ) 1in, α∈Nn(0)≡· · · (ξ ) 1in, α∈Nn)∂λ k 1kr1krkiα 1kr()=: T ∞ Ξ(0) · · · T ∞ Ξ(0) .Comme nous l’avons dit, il suffit donc <strong>de</strong> démontrer que c<strong>et</strong>te matrice est <strong>de</strong>rang r. Visib<strong>le</strong>ment, c<strong>et</strong>te matrice s’i<strong>de</strong>ntifie à r copies <strong>de</strong> la même matriceinfinie T ∞ Ξ(0) <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s coefficients <strong>de</strong> Taylor en 0 <strong>de</strong> la matrice :⎛Ξ(x) := ⎝ ξ ⎞11(x) · · · ξ 1n (x)· · · · · · · · · ⎠ξ r1 (x) · · · ξ rn (x)<strong>de</strong>s coefficients <strong>de</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s X k . À présent, nous pouvonsformu<strong>le</strong>r un <strong>le</strong>mme auxiliaire qui va nous perm<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> conclure.Lemme. Soit n 1, q 1, m 1 <strong>de</strong>s entiers, soit x ∈ C n <strong>et</strong> soit :⎛A(x) = ⎝ a ⎞11(x) · · · a 1m (x)· · · · · · · · · ⎠a q1 (x) · · · a qm (x)une matrice arbitraire q × m <strong>de</strong> fonctions analytiques :a ij (x) = ∑α∈N n a ijα x α (i =1... q; j =1... m)qui sont toutes définies dans un voisinage fixé <strong>de</strong> l’origine dans C n , <strong>et</strong> soit lamatrice constante q × ∞ <strong>de</strong> tous ses coefficients <strong>de</strong> Taylor à l’origine :T ∞ A(0) := ( a ijα) 1jm, α∈N n1iqdont <strong>le</strong>s q lignes sont étiqu<strong>et</strong>ées par l’indice i. Alors l’inégalité suivante entrerangs génériques est satisfaite :rangT ∞ A(0) rang-génériqueA(x).Preuve. Ici, notre matrice infinie T ∞ A(0) sera considérée commeagissant par multiplication à gauche sur <strong>de</strong>s vecteurs horizontauxu = (u 1 ,... ,u q ), <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que u · T ∞ A(0) est une matrice ∞ × 1,c’est-à-dire un vecteur horizontal infini. De manière similaire, A(x) agira sur<strong>de</strong>s vecteurs horizontaux <strong>de</strong> fonctions analytiques (u 1 (x),... ,u r (x)).


122 3.6. Champs <strong>de</strong> vecteurs <strong>et</strong> groupes à un paramètreSupposons que u = (u 1 ,... ,u q ) ∈ C q est un vecteur quelconque dans<strong>le</strong> noyau <strong>de</strong> T ∞ A(0), à savoir : 0 = u ·T ∞ A(0), c’est-à-dire avec <strong>de</strong>s indices :0 = u 1 · a 1jα + · · · + u q · a qjα (j = 1 ... m; α ∈ N n );nous déduisons alors immédiatement, après avoir multiplié chaque tel<strong>le</strong> équationpar x α <strong>et</strong> après avoir sommé sur tous <strong>le</strong>s α ∈ N n que :0 ≡ u 1 · a 1j (x) + · · · + u q · a qj (x) (j = 1 ... m),<strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que <strong>le</strong> même vecteur constant u = (u 1 ,... ,u q ) satisfait aussi 0 ≡u ·A(x). Il en décou<strong>le</strong> que la dimension du noyau <strong>de</strong> T ∞ A(0) est inférieure ouéga<strong>le</strong> à la dimension du noyau <strong>de</strong> A(x) (en un point générique x) : ceci coïnci<strong>de</strong>clairement avec l’inégalité entre rangs (génériques) écrite ci-<strong>de</strong>ssus. □Maintenant, pour tout q = 1,2,... ,r, nous voulons appliquer <strong>le</strong> <strong>le</strong>mmeavec la matrice A(x) éga<strong>le</strong> à :(Ξ(x (1) ) ( Ξ(x (2) ) · · · Ξ(x (q) ) ) ,c’est-à-dire éga<strong>le</strong> à :⎛⎞) ξ (1)⎜11 · · · ξ (1)1n ξ (2)11 · · · ξ (2)1n · · · · · · ξ (q)11 · · · ξ (q)1n⎟Ξ q(˜xq := ⎝ · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · ⎠,ξ (1)r1 · · · ξ rn (1) ξ (2)r1 · · · ξ rn (2) · · · · · · ξ (q)r1 · · · ξ rn(q)où nous avons abrégé :˜x q := ( x (1) ,... ,x (q)) .Assertion. C’est une conséquence du fait que X 1 ,X 2 ,...,X r sont linéairementindépendants que pour tout q = 1,2,... ,r, on a :(rang-générique Ξ ( x (1)) Ξ ( x (2)) · · · Ξ ( x (q))) q.Preuve. En eff<strong>et</strong>, pour q = 1, il est en premier lieu clair que :rang-générique ( Θ(x (1) ) ) 1,puisque l’un au moins <strong>de</strong>s ξ ki (x) ne s’annu<strong>le</strong> pas i<strong>de</strong>ntiquement. Établissonsensuite par récurrence que, aussi longtemps qu’ils restent < r, <strong>le</strong>s rangs génériquesaugmentent au moins d’une unité à chaque pas :( )rang-générique Ξ q+1(˜xq+1 ) ( ) 1 + rang-générique Ξ q(˜xq ) ,une propriété qui concluera visib<strong>le</strong>ment la preuve <strong>de</strong> l’Assertion.En eff<strong>et</strong>, si au contraire <strong>le</strong>s rangs génériques se stabilisaient lorsqu’onpasse <strong>de</strong> q à q + 1, tout en restant <strong>de</strong>meuraient < r, alors loca<strong>le</strong>ment auvoisinage d’un point générique, fixé ˜x 0 q+1 , <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux matrices Ξ q+1 <strong>et</strong> Ξ qauraient <strong>le</strong> même rang, loca<strong>le</strong>ment constant. Par conséquent, <strong>le</strong>s solutions


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 123(ϑ1 (˜x q ) · · · ϑ r (˜x q ) ) au système d’équations linéaires écrit sous forme matriciel<strong>le</strong>:0 ≡ ( ϑ 1 (˜x q ) · · · ϑ r (˜x q ) ) · Ξ q(˜xq),<strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s sont analytiques près <strong>de</strong> ˜x 0 q — grâce à une application <strong>de</strong> la règ<strong>le</strong> <strong>de</strong>Cramer <strong>et</strong> grâce à la constance du rang — seraient automatiquement solutionsdu système étendu :0 ≡ ( ϑ 1 (˜x q ) · · · ϑ r (˜x q ) ) · (Ξq (˜x q ) Ξ(x (q+1) ) ) ,<strong>et</strong> donc il existerait <strong>de</strong>s solutions non nul<strong>le</strong>s (ϑ 1 ,... ,ϑ r ) aux équations <strong>de</strong>dépendance linéaire :0 = ( ϑ 1 · · · ϑ r)· Ξ(x(q+1) )qui seraient constantes par rapport à la variab<strong>le</strong> x (q+1) , puisqu’el<strong>le</strong>s dépen<strong>de</strong>ntseu<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> ˜x q . Ceci contredirait précisément l’hypothèse queX (q+1)1 ,... ,X r (q+1) sont linéairement indépendants. □Pour terminer, nous pouvons enchaîner une série d’inégalités qui sontmaintenant <strong>de</strong>s conséquences évi<strong>de</strong>ntes du Lemme <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’Assertion :()rang T ∞ Ξ(0) · · · T ∞ Ξ(0) = rangT ∞ Ξ r (0) rang-génériqueΞ r(˜xr) r,<strong>et</strong> puisque tous ces rangs (génériques) sont en tout cas r, nous obtenonsl’estimation promise :()r = rank T ∞ Ξ(0) · · · T ∞ Ξ(0) ,ce qui achève fina<strong>le</strong>ment la démonstration du théorème.Afin <strong>de</strong> mémoriser <strong>le</strong> prolongement <strong>de</strong>s transformations au produit <strong>de</strong> rcopies <strong>de</strong> l’espace <strong>de</strong>s x 1 ,... ,x n , formulons une proposition qui sera utiliséedans la démonstration du Théorème 24 p. 149.Proposition. Si <strong>le</strong>s r transformations infinitésima<strong>le</strong>s :n∑X k (f) = ξ ki (x 1 ,...,x n ) ∂f(k =1... r)∂x ii=1sont linéairement indépendantes <strong>et</strong> si <strong>de</strong> plus :x (µ)1 ,... ,x(µ) n(µ = 1 ...r)sont r systèmes distincts <strong>de</strong> n variab<strong>le</strong>s, <strong>et</strong> si enfin on pose pour abréger :n∑X (µ)k(f) = i=1ξ ki(x(µ)1) ∂f,... ,x(µ) n∂x (µ)i(k, µ=1...r),□


124 3.7. Le théorème <strong>de</strong> C<strong>le</strong>bsch-Frobeniusalors <strong>le</strong>s r transformations infinitésima<strong>le</strong>s :r∑W k (f) = X (µ)k(f) (k = 1 ...r)µ=1en <strong>le</strong>s nr variab<strong>le</strong>s x (µ)ine satisfont aucune relation <strong>de</strong> la forme :n∑ ( (1)χ k x 1 ,... ,x(1) n ,...... ,x (r) )1 ,...,x(r) n · Wk (f) ≡ 0.k=13.7. Le théorème <strong>de</strong> C<strong>le</strong>bsch-<strong>Lie</strong>-Frobenius. Question préliminaire :Quel<strong>le</strong>s sont <strong>le</strong>s solutions généra<strong>le</strong>s ω à une équation scalaire aux dérivéespartiel<strong>le</strong>s du premier ordre Xω = 0 associée à un champ <strong>de</strong>vecteurs X = ∑ ni=1 ξ i(x) ∂∂x ià coefficients analytiques ?Les relocalisations au voisinage d’un point générique étant autorisées,nous pouvons supposer, après une renumérotation éventuel<strong>le</strong><strong>de</strong>s variab<strong>le</strong>s, que ξ n ne s’annu<strong>le</strong> pas en un point que nous choisissonscomme origine d’un système <strong>de</strong> coordonnées (x 1 , . . .,x n ). En divisantpar ξ n (x), il est équiva<strong>le</strong>nt <strong>de</strong> rechercher <strong>le</strong>s fonctions ω qui sont annihiléespar l’opérateur différentiel :X =∑n−1i=1ξ i (x)ξ n (x)∂+ ∂ ,∂x i ∂x ntoujours noté X <strong>et</strong> qui satisfait maintenant X(x n ) ≡ 1. Rappelons que<strong>le</strong> système d’équations différentiel<strong>le</strong>s ordinaires qui définit <strong>le</strong>s courbesintégra<strong>le</strong>s <strong>de</strong> ce champ X, à savoir <strong>le</strong> système :dx 1dt = ξ ( )1 x(t)( ), . . ....,ξ n x(t)dx n−1dtavec la condition initia<strong>le</strong> pour t = 0 := ξ ( )n−1 x(t)( ) ,ξ n x(t)dx n (t)dtx 1 (0) = x 1 , . . ....,x n−1 (0) = x n−1 , x n (0) = 0,= 1,est résolub<strong>le</strong> ; plus précisément, il possè<strong>de</strong> une unique solution(x 1 (t), . . .,x n−1 (t), x n (t)) qui est analytique dans un voisinage <strong>de</strong>l’origine. En vérité, nous connaissons déjà la technique <strong>de</strong> résolution.Tout d’abord, par une intégration évi<strong>de</strong>nte, on a x n (t) = t ; ensuite, <strong>le</strong>s(n − 1) autres fonctions x k (t) sont données par la merveil<strong>le</strong>use formu<strong>le</strong>exponentiel<strong>le</strong> (Proposition p. 110) :x k (t) = exp(tX)(x k ) = ∑ l0t ll! Xl (x k ) (k = 1 ··· n−1).


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 125Posons alors t := −x n dans c<strong>et</strong>te formu<strong>le</strong> (<strong>le</strong> signe « moins » va êtrecrucial), <strong>et</strong> définissons <strong>le</strong>s (n − 1) fonctions qui seront intéressantes :(1)ω k (x 1 , . . .,x n ) := x k (−x n ) = exp ( − x n X ) (x k )= ∑ (−1) l (x n) lX l (x k )l!l0(k =1··· n −1).Proposition. Les (n − 1) fonctions ainsi définies ω 1 , . . .,ω n−1 sont <strong>de</strong>ssolutions <strong>de</strong> l’équation aux dérivées partiel<strong>le</strong>s Xω = 0. De plus, cessolutions sont fonctionnel<strong>le</strong>ment indépendantes, au sens où <strong>le</strong> rang <strong>de</strong>est égal à n−1 à l’origine. Enfin,pour toute autre solution f <strong>de</strong> Xf = 0, il existe une fonction analytiqueloca<strong>le</strong> F = F ( )ω 1 , . . .,ω n−1 définie au voisinage <strong>de</strong> l’origine dansC n−1 tel<strong>le</strong> que :<strong>le</strong>ur matrice jacobienne ( ∂ω k∂x i) 1kn−11inf(x) ≡ F ( ω 1 (x), . . .,ω n−1 (x) ) .Preuve. En eff<strong>et</strong>, lorsqu’on applique X à la série ci-<strong>de</strong>ssus qui définit<strong>le</strong>s fonctions ω k , on observe que tous <strong>le</strong>s termes s’annihi<strong>le</strong>nt grâceà une simp<strong>le</strong> application élémentaire <strong>de</strong> la formu<strong>le</strong> <strong>de</strong> Leibniz, développéesous la forme :X [ (x n ) l X l (x k ) ] = l (x n ) l−1 X l (x k ) + (x n ) l X l+1 (x k ).<strong>Ens</strong>uite, l’assertion d’après laquel<strong>le</strong> l’application :x ↦−→ ( ω 1 (x), . . .,ω n−1 (x) )est <strong>de</strong> rang n − 1 en x = 0 provient tout simp<strong>le</strong>ment du fait que l’on apar construction :ω k (x 1 , . . .,x n−1 , 0) ≡ x k .Enfin, après redressement (voir <strong>le</strong> Théorème p. 108) <strong>de</strong> X en X ′ :=∂dans certaines nouvel<strong>le</strong>s coordonnées appropriées (x ′ ∂x 1, . . .,x ′ n), la′ nsolution généra<strong>le</strong> f ′ (x ′ ) <strong>de</strong> l’équation aux dérivées partiel<strong>le</strong>s (redressée):X ′ (f ′ ) = ∂f ′= 0∂x ′ ns’avère alors trivia<strong>le</strong>ment être une fonction arbitraire :F ′( )x ′ 1, . . .,x ′ n−1<strong>de</strong>s (n − 1) premières variab<strong>le</strong>s x ′ 1, . . .,x ′ n−1, <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s s’i<strong>de</strong>ntifient,dans ce système <strong>de</strong> coordonnées, aux fonctions ω 1 ′ ≡ x′ 1 , . . ., ω′ n−1 ≡x ′ n−1 définies par la formu<strong>le</strong> (1). Ceci montre que dans l’ancien système


126 3.7. Le théorème <strong>de</strong> C<strong>le</strong>bsch-Frobenius<strong>de</strong> coordonnées (x 1 , . . .,x n ), la solution généra<strong>le</strong> <strong>de</strong> Xf = 0 s’écritcomme annoncé : f = F(ω 1 , . . .,ω n−1 ).□Question : Qu’advient-il en présence <strong>de</strong> plusieurs équations auxdérivées partiel<strong>le</strong>s ? La manière dont <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> présentent la résolution<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te question dans <strong>le</strong> Chapitre 5 <strong>de</strong> [40] est symptomatique sur<strong>le</strong> plan du contrô<strong>le</strong> par la pensée <strong>de</strong>s principes <strong>de</strong> genèse, <strong>et</strong> nous nousproposons à présent d’en restituer la teneur.Premier principe : examiner la dya<strong>de</strong> comme germe du Multip<strong>le</strong>pur. Par exemp<strong>le</strong>, si une fonction f(x 1 , . . .,x n ) satisfait <strong>de</strong>ux équationsaux dérivées partiel<strong>le</strong>s du premier ordre :X 1 (f) = 0, X 2 (f) = 0,alors el<strong>le</strong> satisfait naturel<strong>le</strong>ment aussi <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux équations différentiel<strong>le</strong>sdu second ordre :X 1(X2 (f) ) = 0, X 2(X1 (f) ) = 0,<strong>et</strong> par conséquent, aussi l’équation :X 1(X2 (f) ) − X 2(X1 (f) ) = 0,qui est obtenue en soustrayant ces <strong>de</strong>ux équations. Or si l’on introduit<strong>le</strong>s expressions développées <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux opérateurs d’ordre 1 :X k =n∑i=1ξ ki (x 1 , . . ., x n ) ∂∂x i(k = 1,2),alors c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière équation ne dérive la fonction f qu’à l’ordre 1 :X 1(X2 (f) ) − X 2(X1 (f) ) =n∑i=1[X1 (ξ 2i ) − X 2 (ξ 1i ) ] ∂f∂x i,puisque tous <strong>le</strong>s termes qui incorporent <strong>de</strong>s dérivées partiel<strong>le</strong>s du secondordre s’annihi<strong>le</strong>nt dans la soustraction. Grâce à ce procédé, onobtient alors un nouvel opérateur qui a la même structure que <strong>le</strong>s <strong>de</strong>uxopérateurs initiaux : homologie <strong>de</strong> l’ontologie. On notera alors :[X1 , X 2]= −[X2 , X 1]


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 127c<strong>et</strong> opérateur que l’on appel<strong>le</strong>ra croch<strong>et</strong> 32 (<strong>de</strong> Jacobi ou <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>) entreX 1 <strong>et</strong> X 2 <strong>et</strong> qui est bien sûr antisymétrique par rapport à ses <strong>de</strong>ux arguments.[ ] Toute solution f <strong>de</strong>[ X 1 f = ] X 2 f = 0 est alors solution <strong>de</strong>X1 , X 2 f = 0. L’opérateur X1 , X 2 s’ajoute alors en quelque sortegratuitement aux équations initia<strong>le</strong>s. C’est donc un <strong>de</strong>uxième principe :engendrement du tiers par antisymétrisation <strong>de</strong> la dya<strong>de</strong>. En résumé, ona une :Observation fondamenta<strong>le</strong>. Si une fonction ψ(x 1 , . . .,x n ) satisfait <strong>le</strong>s<strong>de</strong>ux équations aux dérivées partiel<strong>le</strong>s du premier ordre :X k (f) =n∑i=1ξ ki (x 1 , . . .,x n ) ∂f∂x i= 0 (k = 1, 2),alors el<strong>le</strong> satisfait aussi l’équation différentiel<strong>le</strong> du premier ordre :(X 1 X2 (f) ) (− X 2 X1 (f) ) n∑ [= X1 (ξ 2i ) − X 2 (ξ 1i ) ] ∂f= 0.∂x ii=1Question suscitée [dans l’arbre <strong>de</strong> scindage <strong>de</strong> l’irréversib<strong>le</strong>-synthétique]: l’opérateur [ X 1 , X 2]apporte-t-il, ou n’apporte-t-il pas d’informationnouvel<strong>le</strong> ? En adm<strong>et</strong>tant <strong>le</strong>s principes <strong>de</strong> pensée que nousavons formulés p. 79 sq., la réponse est simp<strong>le</strong>. S’il existe <strong>de</strong>ux fonctions(analytiques) χ 1 (x) <strong>et</strong> χ 2 (x) tel<strong>le</strong>s qu’on peut réécrire (après relocalisationéventuel<strong>le</strong>) :[X1, X 2]= χ1 X 1 + χ 2 X 2 ,alors <strong>le</strong> fait que toute solution f <strong>de</strong> X 1 f = X 2 f = 0 est aussi solution<strong>de</strong> [ X 1 , X 2]f = 0 sera une conséquence trivia<strong>le</strong> <strong>de</strong>s hypothèse <strong>et</strong>n’apportera aucune connaissance nouvel<strong>le</strong>, puisque <strong>de</strong> X 1 f = X 2 f = 0on déduit immédiatement par <strong>de</strong>s opérations algébriques non différentiel<strong>le</strong>s:χ 1 X 1 f = χ 2 X 2 f = 0 puis χ 1 X 1 f + χ 2 X 2 f = 0.32 Hawkins [68] relate la réinterprétation <strong>de</strong> ce concept dans <strong>le</strong>s premiers travaux<strong>de</strong> <strong>Lie</strong> sur l’intégration <strong>de</strong>s systèmes d’équations aux dérivées partiel<strong>le</strong>s. Dans la Theorie<strong>de</strong>r Transformationsgruppen, c’est peu fréquemment que <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> nomment <strong>le</strong>fameux « croch<strong>et</strong> » souvent considéré comme une étape <strong>de</strong> calcul ; en certains endroits,ils l’appel<strong>le</strong>nt « combinaison » [Combination] (entre <strong>de</strong>ux transformations infinitésima<strong>le</strong>s),ou simp<strong>le</strong>ment « équation » [G<strong>le</strong>ichung], <strong>et</strong> à la fin du traité, ils utilisent engénéral la terminologie [Klammeroperation], « opération <strong>de</strong> croch<strong>et</strong> », ou « <strong>de</strong> parenthésage». Il est noté (X 1 X 2), toujours avec <strong>de</strong>s parenthèses simp<strong>le</strong>s, sans <strong>le</strong> symbo<strong>le</strong><strong>de</strong> fonction f, <strong>et</strong> sans virgu<strong>le</strong>, sauf quand <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux éléments insérés sont <strong>de</strong>s champs<strong>de</strong> vecteurs en coordonnées.


128 3.7. Le théorème <strong>de</strong> C<strong>le</strong>bsch-FrobeniusAu contraire, lorsque <strong>le</strong> croch<strong>et</strong> [ ]X 1 , X 2 ne peut pas être exprimécomme combinaison linéaire <strong>de</strong> X 1 <strong>et</strong> <strong>de</strong> X 2 (même après relocalisationen un point générique), l’équation [ ]X 1 , X 2 f = 0 doit être considéréecomme nouvel<strong>le</strong> <strong>et</strong> nécessaire. Ce cas se produit par exemp<strong>le</strong> avecX 1 = ∂∂x 1<strong>et</strong> X 2 = ∂ ∂∂x 2+ x 1 ∂x 3d’où [ ]X 1 , X 2 =∂∂x 3.Ainsi, en partant <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux opérateurs distincts, la considération d’untroisième opérateur peut s’avérer incontournab<strong>le</strong>. Autrement dit, <strong>le</strong> principe<strong>de</strong> différenciation par examen <strong>de</strong> la dya<strong>de</strong> force à envisager <strong>le</strong> multip<strong>le</strong>général.Considérons donc maintenant d’emblée un nombre quelconqueq 2 d’opérateurs d’ordre 1 à coefficients analytiques :X k =n∑i=1ξ ki (x 1 , . . .,x n ) ∂∂x i(k = 1 ···q).Tout d’abord, il peut se produire qu’il existe <strong>de</strong>s relations <strong>de</strong> dépendance<strong>de</strong> la forme :q∑χ k (x) · X k ≡ 0,k=1où <strong>le</strong>s χ k (x) sont <strong>de</strong>s fonctions analytiques non toutes nul<strong>le</strong>s. Aprèsrelocalisation <strong>et</strong> renumérotation éventuel<strong>le</strong>, on peut résoudre une tel<strong>le</strong>équation sous la forme : X q = τ 1 X 1 +· · ·+τ q−1 X q−1 . Si une tel<strong>le</strong> équationrésolue non trivia<strong>le</strong> existe, alors parmi <strong>le</strong>s q équations X 1 f = · · · =X q−1 f = X q f = 0, la <strong>de</strong>rnière sera manifestement conséquence <strong>de</strong>s(q −1) premières, <strong>et</strong> el<strong>le</strong> pourra donc d’ores <strong>et</strong> déjà être laissée <strong>de</strong> côté.Aussi est-il parfaitement légitime, lorsqu’on veut résoudre <strong>le</strong>s équationsX k f = 0, <strong>de</strong> supposer qu’il n’existe pas <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> relation <strong>de</strong> dépendance.Après relocalisation éventuel<strong>le</strong> <strong>et</strong> renumérotation éventuel<strong>le</strong> <strong>de</strong>svariab<strong>le</strong>s, cela revient, d’après un théorème d’algèbre linéaire, à adm<strong>et</strong>treque <strong>le</strong>s opérateurs X 1 , . . .,X q sont résolub<strong>le</strong>s par rapport aux qquotients différentiels ∂f∂x i, i = 1, . . .,q, autrement dit, qu’il existe unematrice q ×q <strong>de</strong> fonctions analytiques ̟jk (x), inversib<strong>le</strong> dans un ouvertrelocalisé, tel<strong>le</strong> que <strong>le</strong>s nouveaux opérateurs Y j := ∑ qk=1 ̟jk(x) X ksont <strong>de</strong> la forme normalisée :Y j = ∂∂x j+∑q+1inθ ji (x) ∂∂x i(j = 1 ···q).Bien entendu, l’étu<strong>de</strong> du sytème X 1 f = · · · = X q f = 0 se ramène àcel<strong>le</strong> du système Y 1 f = · · · = Y q f = 0, puisque <strong>le</strong> déterminant <strong>de</strong> lamatrice ̟jk (x) ne s’annu<strong>le</strong> en aucun point <strong>de</strong> l’ouvert relocalisé.


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 129D’après l’observation fondamenta<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s solutions communes possib<strong>le</strong>saux q équations X 1 f = · · · = X q f = 0 satisfont aussi toutes <strong>le</strong>séquations par paires <strong>de</strong> la forme :X i(Xk (f) ) − X k(Xi (f) ) = 0(i, k = 1 ··· q).Et maintenant, <strong>de</strong>ux circonstances distinctes peuvent se produire.Premièrement, chacune <strong>de</strong>s q(q−1) équations ainsi obtenues peut2s’avérer être conséquence <strong>de</strong>s précé<strong>de</strong>ntes. Tel est <strong>le</strong> cas si <strong>et</strong> seu<strong>le</strong>mentsi, pour tout i q <strong>et</strong> pour tout k q, une relation <strong>de</strong> dépendance <strong>de</strong> laforme :X i(Xk (f) ) − X k(Xi (f) ) = χ ik1 (x) X 1 (f) + · · · + χ ikq (x) X q (f)est satisfaite. CLEBSCH dit alors <strong>le</strong>s q équations indépendantes X 1 (f) =· · · = X q (f) = 0 forment système compl<strong>et</strong>.Mais en général, c’est <strong>le</strong> second cas, plus délicat, qui se produit.Parmi <strong>le</strong>s nouvel<strong>le</strong>s équations :X i(Xk (f) ) − X k(Xi (f) ) = 0,un certain nombre, disons s 1, seront indépendantes <strong>de</strong>s q équationsX 1 f = · · · = X q f = 0. Ajoutons alors ces nouvel<strong>le</strong>s équations aux qéquations initia<strong>le</strong>s, notons-<strong>le</strong>s :X q+1 (f) = 0, . . ....,X q+s (f) = 0,<strong>et</strong> traitons maintenant <strong>le</strong> système obtenu <strong>de</strong> ces q + s équations exactementcomme nous avons traité précé<strong>de</strong>mment <strong>le</strong>s q équations <strong>de</strong> départ.Bien entendu, la relocalisation autour d’un point générique est toujoursadmise. Comme on ne peut pas obtenir plus <strong>de</strong> n équations X i (f) = 0qui sont indépendantes l’une <strong>de</strong> l’autre en un point générique, on doitaboutir, au bout d’un nombre fini d’étapes, à un système compl<strong>et</strong> quiconsiste en un nombre q n d’équations indépendantes.Proposition. ([40], p. 86) La détermination <strong>de</strong>s solutions communes <strong>de</strong>q équations linéaires aux dérivées partiel<strong>le</strong>s du premier ordre X 1 (f) =· · · = X q (f) peut toujours être ramenée, par différentiation <strong>et</strong> éliminationalgébrique linéaire, à l’intégration d’un système compl<strong>et</strong> d’équationsindépendantes.On peut donc supposer maintenant sans perte <strong>de</strong> généralité que <strong>le</strong>système à étudier X 1 f = · · · = X q f = 0 est compl<strong>et</strong> <strong>et</strong> qu’il est formé<strong>de</strong> q équations indépendantes.


130 3.7. Le théorème <strong>de</strong> C<strong>le</strong>bsch-FrobeniusProposition. ([40], pp. 86–87) Si l’on résout un système compl<strong>et</strong> <strong>et</strong> indépendant<strong>de</strong> q équations :X 1 (f) = 0, . . ....,X q (f) = 0∂ ∂par rapport à q quotients différentiels, disons∂x n−q+1, . . .,∂x naprès renumérotationéventuel<strong>le</strong> <strong>de</strong>s variab<strong>le</strong>s, alors <strong>le</strong>s q équations obtenues :(4) Y k (f) = ∂fn−q∑+∂x n−q+ki=1η ki∂f∂x i= 0 (k =1··· q)satisfont <strong>le</strong>s relations <strong>de</strong> commutation par paires :(5) Y j(Yk (f) ) − Y k(Yj (f) ) = 0 (j, k = 1 ··· q).Preuve. En eff<strong>et</strong>, observons que l’expression semi-développée :Y j(Yk (f) ) −Y k(Yj (f) ) =∑n−qi=1[Yj (η ki ) −Y k (η ji ) ] ∂f∂x i(j, k =1··· q)∂ ∂ne fait intervenir aucun <strong>de</strong>s quotients différentiels∂x n−q+1, . . .,∂x n,puisque la dérivation Y j (1) du coefficient constant égal à 1 <strong>de</strong> la premièredérivation∂f∂x n−q+k<strong>de</strong> Y k s’annu<strong>le</strong> trivia<strong>le</strong>ment. Mais alors unerelation <strong>de</strong> dépendance linéaire <strong>de</strong> la forme :(Y j Yk (f) ) (− Y k Yj (f) ) = ∑ ( n−q∂f ∑)∂fcoeff · + η ki∂x n−q+k ∂xi=1 ine peut manifestement être possib<strong>le</strong> que si tous <strong>le</strong>s coefficients présentss’annu<strong>le</strong>nt.□La généralisation conjointe du Théorème p. 108 <strong>et</strong> <strong>de</strong> la Propositionp. 125 à un système compl<strong>et</strong> <strong>de</strong> q équations indépendantes s’énoncealors comme suit 33 .Théorème. (CLEBSCH-LIE-FROBENIUS) Tout système compl<strong>et</strong> formé<strong>de</strong> q équations résolues :n−q∂f ∑+ η ki (x 1 , . . .,x n ) ∂f = 0 (k = 1 ···q)∂x n−q+k ∂xi=1idont <strong>le</strong>s coefficients η ki sont analytiques au voisinage d’un point(x 0 1 , . . .,x0 n ) possè<strong>de</strong> n−q solutions indépendantes ω 1(x), . . .,ω n−q (x)33 Pour la démonstration détaillée <strong>de</strong> ce théorème standard <strong>de</strong> calcul différentielaujourd’hui dit « <strong>de</strong> Frobenius », outre [40], on pourra consulter [88, 154, 148, 157,69], ou bien compléter <strong>le</strong>s arguments en s’inspirant <strong>de</strong>s raisonnements qui précè<strong>de</strong>nt.


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 131qui sont analytiques dans un certain voisinage (x 0 1 , . . .,x0 n ) <strong>et</strong> qui, <strong>de</strong>plus, se réduisent à x 1 , . . .,x n−q lorsqu’on pose x n−q+1 = x 0 n−q+1 , . . .,x n = x 0 n .De plus, pour toute autre solution f <strong>de</strong> X 1 f = · · · = X q f = 0, i<strong>le</strong>xiste une fonction analytique loca<strong>le</strong> F = F(ω 1 , . . .,ω n−q ) définie auvoisinage <strong>de</strong> (x 0 1, . . .,x 0 n−q) dans C n−q tel<strong>le</strong> que :f(x) ≡ F ( ω 1 (x), . . .,ω n−q (x) ) .D’après <strong>Lie</strong> ([40], p. 91), ce théorème central <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong>s systèmescompl<strong>et</strong> n’avait pas été énoncé d’une manière aussi précise, nipar Jacobi, ni par C<strong>le</strong>bsch, bien qu’il soit implicitement contenu dans<strong>de</strong>s mémoires <strong>de</strong> Cauchy, <strong>de</strong> Weierstrass, <strong>de</strong> Briot <strong>et</strong> Bouqu<strong>et</strong>, <strong>de</strong> Kowa<strong>le</strong>vsky<strong>et</strong> <strong>de</strong> Darboux consacrés à l’existence <strong>de</strong>s solutions <strong>de</strong> systèmesd’équations aux dérivées partiel<strong>le</strong>s. Frobenius ([54]) en fera la synthèsefina<strong>le</strong> 34 .3.8. Constantes <strong>de</strong> structure <strong>et</strong> correspondance fondamenta<strong>le</strong>. Expliquonsmaintenant dans <strong>le</strong> détail comment, au Chapitre 9 <strong>de</strong> [40],<strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> organisent 35 la présentation <strong>de</strong> ces théorèmes fondamentaux,eu égard à c<strong>et</strong>te idée fixe <strong>de</strong> la théorie commençante : économiser àla fois l’axiome <strong>de</strong> l’élément i<strong>de</strong>ntité <strong>et</strong> l’axiome <strong>de</strong>s éléments inverses.Filigrane <strong>de</strong> tension métaphysique : il s’agit d’engendrer la théorie ducontinu en complète analogie harmonique avec la théorie discrète <strong>de</strong>sgroupes <strong>de</strong> substitutions.Soit donc une famil<strong>le</strong> d’équations <strong>de</strong> transformations à r paramètresessentiels :( )(1) x ′ i = f i x1 , . . .,x n ; a 1 , . . ., a r (i = 1 ···n).34 Voir [69] pour une excel<strong>le</strong>nte mise en perspective historique <strong>et</strong> philosophique.35 Dans ce paragraphe 3.8, nous traduisons en l’adaptant librement la majeure partiedu Chapitre 9 <strong>de</strong> [40]. Les théorèmes fondamentaux <strong>de</strong> la théorie y apparaissentdéployés dans une pensée beaucoup plus systématique que ce que la postérité en a r<strong>et</strong>enu.En particulier, la classification en trois Théorèmes fondamentaux tel<strong>le</strong> qu’établieaprès la rédaction du premier volume, à savoir : 1) l’existence d’équations différentiel<strong>le</strong>sfondamenta<strong>le</strong>s ; 2) l’existence <strong>de</strong> constantes dans <strong>le</strong>s croch<strong>et</strong>s entre générateursinfinitésimaux ; 3) la reconstition d’un groupe <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> local à partir d’un système <strong>de</strong>constantes satisfaisant <strong>le</strong>s i<strong>de</strong>ntités algébriques naturel<strong>le</strong>s correspondant à l’antisymétrie<strong>et</strong> à l’i<strong>de</strong>ntité <strong>de</strong> Jacobi (cf. Schur, Scheffers, Cartan, Campbell, Bianchi <strong>et</strong>d’autres) simplifie l’exposition d’origine, toute entière orientée vers l’exploration spéculative<strong>de</strong>s axiomes fondamentaux.


132 3.8. Équations <strong>de</strong> structureIci, <strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s (x 1 , . . .,x n ) varient dans un domaine 36 X ⊂ C n , <strong>le</strong>sparamètres (a 1 , . . ., a r ) varient dans un domaine A ⊂ C r , <strong>et</strong> l’applicationx ↦→ f a (x) = f(x; a) est, pour tout a, un difféomorphisme <strong>de</strong>X sur son image f a (X ). Comme cela a déjà été inci<strong>de</strong>mment signalédans la note p. 94 <strong>et</strong> dans la note p. 104, il se trouve que l’existenced’équations différentiel<strong>le</strong>s fondamenta<strong>le</strong>s (cf. <strong>le</strong> Théorème p. 104) peutêtre dérivée <strong>de</strong> la seu<strong>le</strong> condition que <strong>le</strong>s transformations du groupe sontstab<strong>le</strong>s par composition au sens technique suivant :[f(f(x; a); b)≡ f(x; ϕ(a,b))pour tous x ∈ X 1 , a ∈ A 1 , b ∈ A 1 ,c ≡ ϕ ( a, χ(a,c) ) pour tous a ∈ A 1 , c ∈ A 1 ,sans supposer ni l’existence d’un élément i<strong>de</strong>ntité, ni l’existence d<strong>et</strong>ransformations inverses l’une <strong>de</strong> l’autre par paires. Plus précisément,sous <strong>le</strong>s hypothèses spécifiques <strong>de</strong> la note p. 94, on démontre la propositionsuivante en s’inspirant <strong>de</strong>s raisonnements du § 3.5.Proposition. ([40], pp. 33–34) Il existe une matrice (ψ kj (a)) 1jr1kr d<strong>et</strong>ail<strong>le</strong> r × r <strong>de</strong> fonctions qui sont holomorphes <strong>et</strong> inversib<strong>le</strong>s dans A 1 ,<strong>et</strong> il existe <strong>de</strong>s fonctions ξ ji (x) holomorphes dans X tel<strong>le</strong>s que <strong>le</strong>s équationsdifférentiel<strong>le</strong>s :(2)∂x ′ i∂a k(x; a) =r∑ψ kj (a) · ξ ji (x ′ )j=1(i = 1 ···n ; k = 1 ···r)sont i<strong>de</strong>ntiquement satisfaites pour tout x ∈ X 1 <strong>et</strong> tout a ∈ A 1 , aprèsremplacement <strong>de</strong> x ′ par f(x; a).Pour <strong>le</strong> moment, nous voulons nous r<strong>et</strong>enir <strong>de</strong> supposer que <strong>le</strong>séquations x ′ i = f i(x 1 , . . .,x n , a 1 , . . .,a r ) doivent représenter un groupeà r termes. En ce qui concerne <strong>le</strong>s équations (1), nous voulons plutôtsupposer : premièrement, qu’el<strong>le</strong>s représentent une famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ rtransformations différentes, donc que <strong>le</strong>s r paramètres a 1 , . . . , a r sonttous essentiels, <strong>et</strong> <strong>de</strong>uxièmement, qu’el<strong>le</strong>s satisfont <strong>de</strong>s équations différentiel<strong>le</strong>s<strong>de</strong> la forme spécifique (2). [40], pp. 67–68.L’essentialité <strong>de</strong>s paramètres (a 1 , . . .,a r ) assure alors ([40], p. 68) que :• <strong>le</strong> déterminant <strong>de</strong>s ψ kj (a) ne s’annu<strong>le</strong> pas i<strong>de</strong>ntiquement ; <strong>et</strong>que :• <strong>le</strong>s r transformations infinitésima<strong>le</strong>s :X ′ k =n∑i=1ξ ki (x ′ ) ∂∂x ′ i(k = 1 ··· r)36 Nous considérerons en eff<strong>et</strong> ici explicitement <strong>le</strong>s domaines d’existence.


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 133sont linéairement indépendantes.Nouvel<strong>le</strong>s hypothèses économiques. On supposera premièrement que<strong>le</strong>s équations <strong>de</strong> transformations (1), définies pour x ∈ X <strong>et</strong> a ∈ A ,constituent une famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> difféomorphismes x ↦→ f a (x) = x ′ du domaineX ⊂ C n sur son image f a (X ) ⊂ C n dont <strong>le</strong>s paramètres(a 1 , . . .,a r ) sont essentiels, <strong>et</strong> <strong>de</strong>uxièmement que c<strong>et</strong>te famil<strong>le</strong> satisfait<strong>de</strong>s équations différentiel<strong>le</strong>s du type (2) ci-<strong>de</strong>ssus, en ajoutant expressémentl’hypothèse que <strong>le</strong> déterminant <strong>de</strong>s ψ kj (a) ne s’annu<strong>le</strong> en aucunparamètre a ∈ A 1 .Trois moments théoriques majeurs entrent alors en scène au Chapitre9 (Vol. I) <strong>de</strong> la Theorie <strong>de</strong>r Transformationsgruppen.• Premier moment : Constantes <strong>de</strong> structure.• Deuxième moment : Réciproque intermédiaire.• Troisième moment : Élimination <strong>de</strong>s transformations auxilaires.Le but principal est d’établir que si r transformations infinitésima<strong>le</strong>sX 1 , . . .,X r satisfont <strong>le</strong>s relations par paires [ X k , X j]=∑ rj=1 c kjs X s ,où <strong>le</strong>s c kjs sont <strong>de</strong>s constantes, alors la totalité <strong>de</strong>s transformationsx ′ = exp ( λ 1 X 1 + · · · + λ r X r)(x) constitue un groupe continu local<strong>de</strong> transformations à r paramètres essentiels. C’est <strong>le</strong> Théorème 24, obtenuà l’issu du troisième moment, qui va aboutir à c<strong>et</strong>te conclusion.Énoncé technique auxiliaire. Mais tout d’abord, <strong>le</strong> théorème suivant serautilisé d’une manière essentiel<strong>le</strong> par <strong>Lie</strong> pour établir, au cours du secondmoment, la ferm<strong>et</strong>ure par composition d’une famil<strong>le</strong> d’équations<strong>de</strong> transformation construites en intégrant un système d’équations auxdérivées partiel<strong>le</strong>s construites dans l’espace produit <strong>de</strong>s x <strong>et</strong> <strong>de</strong>s a. Ànoter : on n’utilise ici que la connaissance <strong>de</strong>s groupes à un paramètres.Théorème 9. ([40], p. 72) Si, dans <strong>le</strong>s équations <strong>de</strong> transformationsdéfinies pour (x, a) ∈ X × A :(1) x ′ i = f i (x 1 , . . .,x n ; a 1 , . . ., a r ) (i = 1 ···n),<strong>le</strong>s r paramètres a 1 , . . ., a r sont tous essentiels <strong>et</strong> si, <strong>de</strong> plus, certaineséquations différentiel<strong>le</strong>s <strong>de</strong> la forme :r∑(2) ∂x′ i= ψ kj (a 1 , . . ., a r )·ξ ji (x ′ 1∂a , . . .,x′ n ) (i =1··· n ; k =1 ···r)kj=1sont i<strong>de</strong>ntiquement satisfaites par x ′ 1 = f 1(x; a), . . .,x ′ n = f n(x; a),où la matrice ψ kj (a) est holomorphe <strong>et</strong> inversib<strong>le</strong> dans un sous-domaine


134 3.8. Équations <strong>de</strong> structurenon vi<strong>de</strong> A 1 ⊂ A , <strong>et</strong> où <strong>le</strong>s fonctions ξ ji (x ′ ) sont holomorphes dansX , alors en introduisant <strong>le</strong>s r transformations infinitésima<strong>le</strong>s :n∑X k := ξ ki (x) ∂ ,∂x ii=1l’assertion suivante est vérifiée : toute transformation x ′ i = f i (x; a)dont <strong>le</strong>s paramètres a 1 , . . .,a r se trouvent dans un p<strong>et</strong>it voisinage d’unparamètre quelconque fixé a 0 ∈ A 1 peut être obtenue en exécutant enpremier lieu la transformation :x i = f i (x 1 , . . .,x n ; a 0 1 , . . .,a0 r )(i = 1 ···n),<strong>et</strong> en second lieu, en exécutant une certaine transformation :x ′ i = exp ( tλ 1 X 1 + · · · + tλ r X r)(xi ) (i = 1 ··· n)du groupe à un paramètre qui est engendré par une combinaison linéaireappropriée <strong>de</strong>s X k , où t <strong>et</strong> <strong>le</strong>s λ 1 , . . .,λ r sont <strong>de</strong>s nombres comp<strong>le</strong>xes« p<strong>et</strong>its ».Spécia<strong>le</strong>ment, c<strong>et</strong> énoncé technique sera utilisé par <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong>pour établir que toutes <strong>le</strong>s fois que r transformations infinitésima<strong>le</strong>sX 1 , . . .,X r constituent une algèbre <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> (voir ci-<strong>de</strong>ssous), la composition<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux transformations <strong>de</strong> la forme x ′ = exp ( )tλ 1 X 1 + · · · +tλ r X r est à nouveau <strong>de</strong> la même forme, <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que la totalité d<strong>et</strong>outes ces transformations constitue un groupe.Démonstration. Les arguments s’inspirent <strong>de</strong> ceux qui ont été développésp. 118 dans un contexte local ; ici, c’est a 0 ∈ A 1 qui remplace<strong>le</strong> paramètre i<strong>de</strong>ntité.D’un premier côté, fixons donc a 0 ∈ A 1 <strong>et</strong> introduisons <strong>le</strong>s solutionsa k = a k (t, λ 1 , . . ., λ r ) du système suivant d’équations différentiel<strong>le</strong>sordinaires :da kr∑dt = λ j ˜ψjk (a) (k = 1 ··· r),j=1avec la condition initia<strong>le</strong> a k (0, λ 1 , . . .,λ r ) = a 0 k , où λ 1, . . .,λ r sont <strong>de</strong>sparamètres comp<strong>le</strong>xes (p<strong>et</strong>its) <strong>et</strong> où, comme précé<strong>de</strong>mment, l’inverse˜ψ jk (a) <strong>de</strong> la matrice ψ jk (a) est holomorphe dans A 1 .D’un <strong>de</strong>uxième côté, introduisons <strong>le</strong> flot local :exp ( tλ 1 X 1 + · · · + tλ r X r)(x) =: h(x; t, λ)d’une combinaison linéaire généra<strong>le</strong> λ 1 X 1 + · · · + λ r X r <strong>de</strong>s r transformationsinfinitésima<strong>le</strong>s X k = ∑ ni=1 ξ ki(x) ∂∂x i, où x est supposé être


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 135dans A 1 . Ainsi par sa définition même, ce flot intègre <strong>le</strong>s équationsdifférentiel<strong>le</strong>s ordinaires :dh ir∑dt = λ j ξ ji (h 1 , . . .,h n ) (i =1 ···n)j=1avec la condition initia<strong>le</strong> h ( x; 0, λ ) = x.D’un troisième côté, rappelons que l’on peut résoudre <strong>le</strong>s ξ ji dans<strong>le</strong>s équations différentiel<strong>le</strong>s fondamenta<strong>le</strong>s (2) en inversant la matrice˜ψ :ξ ji (f 1 , . . .,f n ) =r∑k=1˜ψ jk (a) ∂f i∂a k(i =1··· n ; j =1··· r).À i <strong>et</strong> à j fixés, multiplions ensuite par λ j <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux membres <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te<strong>de</strong>rnière équation, sommons pour j allant <strong>de</strong> 1 jusqu’à r <strong>et</strong> reconnaissonsda k, que nous pouvons donc faire apparaître :dtr∑r∑ ∂f ir∑λ j ξ ji (f 1 , . . .,f n ) = λ j ˜ψjk (a)∂aj=1kk=1 j=1r∑ ∂f i da k=∂a k dtk=1= d [ ( )]fi x; a(t, λ) (i =1··· n).dt( )Donc(<strong>le</strong>s f i x;) a(t, λ) satisfont <strong>le</strong>s mêmes équations différentiel<strong>le</strong>s que<strong>le</strong>s h i x; t, λ , <strong>et</strong> en outre, si nous assignons à x la va<strong>le</strong>ur f(x; a 0 ), <strong>le</strong>s<strong>de</strong>ux col<strong>le</strong>ctions <strong>de</strong> solutions auront <strong>de</strong> surcroît la même condition initia<strong>le</strong>pour t = 0, à savoir : f(x; a 0 ). En conclusion, c<strong>et</strong>te observationque <strong>le</strong>s f i <strong>et</strong> <strong>le</strong>s h i satisfont <strong>le</strong>s mêmes équations jointe à la propriétéfondamenta<strong>le</strong> d’unicité pour <strong>le</strong>s solutions d’un système d’équations différentiel<strong>le</strong>sordinaires fournit l’i<strong>de</strong>ntité <strong>de</strong> coïnci<strong>de</strong>nce :f ( x; a(t, λ) ) ≡ exp ( )(t 1 λ 1 X 1 + · · · + tλ r X r f(x; a 0 ) )qui exprime que chaque transformation x ′ = f(x; a) pour a dans unvoisinage <strong>de</strong> a 0 s’avère être la composition <strong>de</strong> la transformation fixéex = f(x; a 0 ), suivi <strong>de</strong> la transformation du groupe à un paramètreexp ( )tλ 1 X 1 +· · ·+tλ r X r (x) : c’est ce que l’on voulait démontrer. □Premier moment : Constantes <strong>de</strong> structure. En produisant par différentiationun système d’équations soumis à la condition <strong>de</strong> C<strong>le</strong>bsch-<strong>Lie</strong>-Frobenius, la démonstration remarquab<strong>le</strong> qui suit <strong>et</strong> qui semb<strong>le</strong> ne


136 3.8. Équations <strong>de</strong> structureplus apparaître dans <strong>le</strong>s traités contemporains va dévoi<strong>le</strong>r l’existence <strong>de</strong>constantes fondamenta<strong>le</strong>s c kjs en faisant jouer un rô<strong>le</strong> quasiment symétriqueà l’espace <strong>de</strong>s variab<strong>le</strong>s <strong>et</strong> à celui <strong>de</strong>s paramètres. Dans la dipolaritédu x <strong>et</strong> du a, c’est en ne se désolidarisant pas <strong>de</strong> l’action spatia<strong>le</strong>que la structure (implicite) <strong>de</strong> groupe abstrait (dans l’espace <strong>de</strong>s paramètresa) va articu<strong>le</strong>r <strong>le</strong> premier aspect <strong>de</strong> l’autonomisation algébrique<strong>de</strong> sa genèse ultérieure. L’argument-clé <strong>et</strong> purement archaïque sera <strong>de</strong>fractionner tout croch<strong>et</strong> entre <strong>de</strong>ux sommes <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux transformations infinitésima<strong>le</strong>sstrictement attachées à l’espace <strong>de</strong>s x <strong>et</strong> à l’espaces <strong>de</strong>s a(respectivement) :[X + A, X ′ + A ′] = [ X, X ′ ] + [ A, A ′]— i<strong>de</strong>ntité garantie par <strong>le</strong>s relations trivia<strong>le</strong>s : 0 = [ X, A ′] = [ A, X ′]qui proviennent <strong>de</strong> l’hétérogénéité l’un à l’autre <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux espaces :0 = ∂ xi (a k ) = ∂ ak (x i ). La constance <strong>de</strong>s constantes c kjs proviendraalors d’une réalité <strong>de</strong> fait évi<strong>de</strong>nte <strong>et</strong> tout aussi archaïque, sachant quela condition fondamenta<strong>le</strong> <strong>de</strong> C<strong>le</strong>bsch :[Xk + A k , X j + A j]= combinaison linéairea,x(Xs + A s)= [ X k , X j]+[Ak , A j]= combinaison linéaire x(Xt)+ combinaison linéairea(Au)force toutes <strong>le</strong>s fonctions coefficients <strong>de</strong> ces combinaisons linéaires :coeff a,x = coeff x = coeff aqui dépen<strong>de</strong>nt a priori en toute généralité conjointement <strong>de</strong> x <strong>et</strong> <strong>de</strong> a,à ne dépendre en fait que <strong>de</strong> x, <strong>et</strong> aussi que <strong>de</strong> a, d’où <strong>le</strong>ur constanceabsolue.Théorème 21. ([40], pp. 149–150) Si une famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ r transformations:x ′ i = f i (x 1 , . . .,x n , a 1 , . . .,a r ) (i =1··· n)satisfait certaines équations différentiel<strong>le</strong>s <strong>de</strong> la forme spécifique :∂x ′ r∑i= ψ kj (a 1 , . . .,a r ) · ξ ji (x ′ 1∂a , . . .,x′ n )kj=1(i = 1 ···n; k = 1 ··· r),<strong>et</strong> si on écrit ces équations, ce qui est toujours possib<strong>le</strong>, sous la forme :ξ ji (x ′ 1 , . . .,x′ n ) = r∑k=1˜ψ jk (a 1 , . . ., a r ) ∂x′ i∂a k(i =1··· n; j =1··· r),


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 137alors il existe entre <strong>le</strong>s 2r transformations infinitésima<strong>le</strong>s :n∑X j(F) ′ = ξ ji (x ′ 1, . . .,x ′ n) ∂F∂xi=1ir∑A j (F) = ˜ψ jµ (a 1 , . . .,a r ) ∂F∂a µµ=1<strong>de</strong>s relations <strong>de</strong> la forme :⎧(3)X ⎪⎨ k( ′ X′j (F) ) − X j( ′ X′k (F) ) =⎪⎩A k(Aj (F) ) − A j(Ak (F) ) =r∑c kjs X s ′ (F)s=1r∑c kjs A s (F)s=1(j = 1 ···r)(j = 1 ···r)(k, j = 1 ···r),(k, j = 1 ···r),où <strong>le</strong>s c kjs désignent <strong>de</strong>s constantes numériques. En conséquence <strong>de</strong>cela, <strong>le</strong>s r équations :X ′ j (F) + A j(F) = 0(k = 1 ··· r),qui sont résolub<strong>le</strong>s par rapport à ∂F∂a 1, . . .,∂F∂a r, constituent un systèmecompl<strong>et</strong> à r termes en <strong>le</strong>s n+r variab<strong>le</strong>s x ′ 1 , . . .,x′ n , a 1, . . ., a r ; si l’onrésout <strong>le</strong>s n équations x ′ i = f i (x, a) par rapport à x 1 , . . .,x n :x i = F i (x ′ 1 , . . .,x′ n , a 1, . . .,a r )(i =1··· n),alors F 1 (x ′ , a), . . ., F n (x ′ , a) sont <strong>de</strong>s solutions indépendantes <strong>de</strong> cesystème compl<strong>et</strong>.Démonstration. Pour commencer, résolvons donc <strong>le</strong>s équations :x ′ i = f i(x 1 , . . .,x n , a 1 , . . .,a r ) (i =1··· n)par rapport à x 1 , . . .,x n , ce qui donne :x i = F i (x ′ 1 , . . .,x′ n , a 1, . . .,a r )(i =1··· n).Alors on peut aisément déduire certaines équations différentiel<strong>le</strong>s quisont satisfaites par F 1 , . . .,F n . Si en eff<strong>et</strong> nous différentions simp<strong>le</strong>ment<strong>le</strong>s i<strong>de</strong>ntités :F i(f1 (x, a), . . .,f n (x, a), a 1 , . . .,a r)≡ xipar rapport à a k , nous obtenons pour i fixé l’i<strong>de</strong>ntité :n∑ ∂F i (x ′ , a) ∂f ν (x, a)+ ∂F i(x ′ , a)≡ 0,∂x ′ ν ∂a k ∂a kν=1


138 3.8. Équations <strong>de</strong> structurepourvu que l’on pose partout x ′ ν = f ν(x, a). Multiplions maintenantc<strong>et</strong>te i<strong>de</strong>ntité par ˜ψ jk (a) <strong>et</strong> sommons <strong>le</strong> résultat obtenu pour k allant <strong>de</strong>1 jusqu’à r ; alors en tenant compte <strong>de</strong> l’hypothèse :r∑k=1˜ψ jk (a) ∂f ν(x, a)∂a k≡ ξ jν (f 1 , . . ., f n ),nous obtenons <strong>le</strong>s équations suivantes :n∑ν=1ξ jν (x ′ 1 , . . .,x′ n ) ∂F i∂x ′ ν+r∑k=1(i =1··· n; j = 1 ···r).˜ψ jk (a 1 , . . .,a r ) ∂F i∂a k= 0D’après la manière dont ces équations ont été dérivées, el<strong>le</strong>s sontsatisfaites i<strong>de</strong>ntiquement lorsqu’on y fait la substitution x ′ ν = f ν (x, a).Mais puisqu’el<strong>le</strong>s ne contiennent pas du tout x 1 , . . .,x n , el<strong>le</strong> doivent enfait être satisfaites i<strong>de</strong>ntiquement, c’est-à-dire : <strong>le</strong>s fonctions F 1 , . . ., F nsont toutes solutions <strong>de</strong>s équations linéaires aux dérivées partiel<strong>le</strong>s suivantes:(4)Ω j (F) =n∑ν=1ξ jν (x ′ ) ∂F∂x ′ ν+r∑µ=1(j =1··· r).˜ψ jµ (a) ∂F∂a µ= 0Ces r équations contiennent n + r variab<strong>le</strong>s, à savoir x ′ 1, . . .,x ′ n <strong>et</strong>a 1 , . . .,a r ; <strong>de</strong> plus, el<strong>le</strong>s sont indépendantes <strong>le</strong>s unes <strong>de</strong>s autres, puisque<strong>le</strong> déterminant <strong>de</strong>s ˜ψ jµ (a) ne s’annu<strong>le</strong> pas, <strong>et</strong> par conséquent, une résolutionpar rapport aux r quotients différentiels ∂F∂a 1, . . ., ∂F∂a rest possib<strong>le</strong>.Mais par ail<strong>le</strong>urs, <strong>le</strong>s équations (4) possè<strong>de</strong>nt n solutions indépendantesen commun : <strong>le</strong>s fonctions F 1 (x ′ , a), . . .,F n (x ′ , a) dont <strong>le</strong> déterminantfonctionnel par rapport aux x ′ :∑±∂F 1∂x ′ 1. . . ∂F n∂x ′ n=1∑ ±∂f 1∂x 1. . . ∂fn∂x nne s’annu<strong>le</strong> pas i<strong>de</strong>ntiquement, parce que par hypothèse, <strong>le</strong>s équationsx ′ i = f i (x, a) représentent <strong>de</strong>s transformations difféomorphes. Ainsi endéfinitive, <strong>le</strong>s hypothèses du théorème <strong>de</strong> C<strong>le</strong>bsch-<strong>Lie</strong>-Frobenius sontsatisfaites par <strong>le</strong>s équations (4), c’est-à-dire : ces équations constituentun système compl<strong>et</strong> à r termes.


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 139Si nous posons maintenant :r∑˜ψ jk (a) ∂F = A j (F)∂a kk=1<strong>et</strong> si nous posons aussi :n∑ν=1ξ jν (x ′ ) ∂F∂x ′ ν= X ′ j (F),en accord avec <strong>le</strong>s notations employées dans <strong>le</strong> § 3.6, alors <strong>le</strong>s équations(4) reçoivent la forme brève :Ω j (F) = X ′ j (F) + A j(F) = 0(j =1··· r).Comme nous <strong>le</strong> savons, <strong>le</strong> fait que ces équations constituent un systèmecompl<strong>et</strong> revient à ce que <strong>de</strong>s équations <strong>de</strong> dépendance <strong>de</strong> la forme :(Ω k Ωj (F) ) (− Ω j Ωk (F) ) r∑= ϑ kjs (x ′ 1, . . .,x ′ n, a 1 , . . .,a r ) · Ω s (F)s=1(k, j = 1 ···r)doivent être satisfaites i<strong>de</strong>ntiquement, quel<strong>le</strong>s que peuvent être <strong>le</strong>s Fcomme fonctions <strong>de</strong> x ′ 1, . . .,x ′ n, a 1 , . . .,a r : ce sont en eff<strong>et</strong> <strong>de</strong>s i<strong>de</strong>ntitésentre champs <strong>de</strong> vecteurs. Mais puisque ces i<strong>de</strong>ntités peuvent aussiêtre écrites <strong>de</strong> manière développée comme :X k( ′ X′j (F) ) − X j( ′ X′k (F) ) (+ A k Aj (F) ) (− A j Ak (F) ) =r∑r∑= ϑ kjs X s ′ (F) + ϑ kjs A s (F),s=1nous pouvons immédiatement <strong>le</strong>s diviser en <strong>de</strong>ux col<strong>le</strong>ctions d’i<strong>de</strong>ntités:⎧X ⎪⎨ k( ′ X′j (F) ) − X j( ′ X′k (F) ) r∑= ϑ kjs X s ′ (F)s=1(5)(⎪⎩ A k Aj (F) ) (− A j Ak (F) ) r∑= ϑ kjs A s (F),<strong>et</strong> ici, la secon<strong>de</strong> série d’équations peut encorer être à nouveau décomposéeen :A k(˜ψjµ)− Aj(˜ψkµ)=r∑s=1s=1ϑ kjs ˜ψsµs=1(k, j, µ=1 ···r).


140 3.8. Équations <strong>de</strong> structureMaintenant, comme <strong>le</strong> déterminant <strong>de</strong>s ˜ψ sµ ne s’annu<strong>le</strong> pas i<strong>de</strong>ntiquement,<strong>le</strong>s fonctions ϑ kjs sont complètement déterminées par ces <strong>de</strong>rnièreconditions, <strong>et</strong> il en décou<strong>le</strong> que <strong>le</strong>s ϑ kjs peuvent seu<strong>le</strong>ment dépendre <strong>de</strong>a 1 , . . .,a r , c’est-à-dire qu’el<strong>le</strong>s sont en tout cas libres <strong>de</strong> x ′ 1, . . .,x ′ n.Mais on se convainc aussi aisément que <strong>le</strong>s ϑ kjs sont aussi libres <strong>de</strong>a 1 , . . .,a r : en eff<strong>et</strong>, si dans la première série d’i<strong>de</strong>ntités (5), on considèreF comme une fonction arbitraire <strong>de</strong>s seu<strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s x ′ 1, . . .,x ′ n,alors on obtient par différentiation par rapport à a µ <strong>le</strong>s i<strong>de</strong>ntités suivantes:0 ≡r∑s=1∂ϑ kjs∂a µX ′ s (F)(k, j, µ=1···r).Mais puisque X 1 ′(F), . . ., X′ r (F) sont <strong>de</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>sindépendantes, <strong>et</strong> puisque <strong>de</strong> plus, <strong>le</strong>s ∂ϑ kjs∂a µne dépen<strong>de</strong>nt pas<strong>de</strong> x ′ 1, . . .,x ′ n, toutes <strong>le</strong>s dérivées partiel<strong>le</strong>s ∂ϑ kjs∂a µs’annu<strong>le</strong>nt i<strong>de</strong>ntiquement; autrement dit, <strong>le</strong>s ϑ kjs sont aussi libres <strong>de</strong> a 1 , . . .,a r : ce sont <strong>de</strong>sconstantes numériques, comme annoncé.□En particulier, ce théorème peut maintenant être immédiatementappliqué à tous <strong>le</strong>s groupes à r paramètres qui contiennent la transformationi<strong>de</strong>ntité.Théorème 22. ([40], p. 150) Entre <strong>le</strong>s r transformations infinitésima<strong>le</strong>s:X k := ∂f 1(x; e) ∂ + · · · + ∂f n ∂(x; e)(k = 1 ··· r)∂a k ∂x 1 ∂a k ∂x nd’un groupe <strong>de</strong> transformations ponctuel<strong>le</strong>s loca<strong>le</strong>s x ′ = f(x; a) quicontient l’élément i<strong>de</strong>ntité e, il existe <strong>de</strong>s relations par paires <strong>de</strong> laforme :(X k Xj (f) ) (− X j Xk (f) ) r∑= c kjs X s (f),s=1où <strong>le</strong>s c kjs ∈ C sont <strong>de</strong>s constantes numériques.En particulier, si un groupe continu <strong>de</strong> transformations contient<strong>de</strong>ux transformations infinitésima<strong>le</strong>s :n∑X(f) = ξ i (x 1 , . . .,x n ) ∂fn∑, Y (f) = η i (x 1 , . . ., x n ) ∂f ,∂x i ∂x ii=1i=1alors il contient aussi la transformation infinitésima<strong>le</strong> :X ( Y (f) ) − Y ( X(f) ) .


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 141Deuxième moment : Réciproque intermédiaire. L’objectif est, réciproquement,<strong>de</strong> démontrer qu’une paire d’algèbres <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> <strong>de</strong> champs <strong>de</strong>vecteurs X 1 ′, . . .,X′ r <strong>et</strong> A′ 1 , . . .,A′ r perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> reconstituer <strong>le</strong>s équations<strong>de</strong> transformation d’un certain groupe fini. Spécia<strong>le</strong>ment, il va être établiau cours <strong>de</strong> la démonstration (voir infra) que la famil<strong>le</strong> exponentiel<strong>le</strong>x ′ = exp ( )λ 1 X 1 + · · · + λ r X r (x) est stab<strong>le</strong> par composition, ce quel’on pourrait écrire informel<strong>le</strong>ment comme :exp ◦ exp ≡ exp .C’est la première fois qu’apparaît c<strong>et</strong>te propriété <strong>de</strong> stabilité lorsque <strong>le</strong>nombre r <strong>de</strong> paramètres est 2, <strong>et</strong> l’on peut se convaincre que seu<strong>le</strong>la condition <strong>de</strong> ferm<strong>et</strong>ure par croch<strong>et</strong> est à même <strong>de</strong> garantir c<strong>et</strong>te propriété.Théorème 23. ([40], pp. 154–155) Si r transformations infinitésima<strong>le</strong>sindépendantes :X ′ k(f) =n∑i=1ξ ki (x ′ 1, . . ., x ′ n) ∂f∂x ′ i(k = 1 ···r)dans <strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s x ′ 1 , . . ., x′ n satisfont <strong>de</strong>s conditions par paires <strong>de</strong> laforme :X k( ′ X′j (f) ) − X j( ′ X′k (f) ) r∑= c kjs X s ′ (f),si <strong>de</strong> plus r transformations infinitésima<strong>le</strong>s :r∑A k (f) = ˜ψ kµ (a 1 , . . .,a r ) ∂f∂a µµ=1s=1(k = 1 ···r)dans un espace auxiliaire a 1 , . . ., a r satisfont <strong>le</strong>s conditions analogues :(A k Aj (f) ) (− A j Ak (f) ) r∑= c kjs A s (f)avec <strong>le</strong>s mêmes constantes c kjs , <strong>et</strong> si enfin, <strong>le</strong> déterminant∑ ± ˜ψ11 (a) · · · ˜ψ rr (a) ne s’annu<strong>le</strong> pas, alors on obtient commesuit <strong>le</strong>s équations d’un groupe à r paramètres essentiels : on forme <strong>le</strong>sytème compl<strong>et</strong> à r termes :X ′ k(f) + A k (f) = 0s=1(k = 1 ···r)<strong>et</strong> l’on détermine ses solutions généra<strong>le</strong>s relativement à un systèmeapproprié <strong>de</strong> va<strong>le</strong>urs a k = a 0 k . Si x i = F i (x ′ 1 , . . ., x′ n , a 1, . . ., a r )sont ces solutions généra<strong>le</strong>s, alors <strong>le</strong>s équations résolues


142 3.8. Équations <strong>de</strong> structurex ′ i = f i (x 1 , . . .,x n , a 1 , . . ., a r ) représentent un groupe continu<strong>de</strong> transformations à r paramètres essentiels. Ce groupe contient latransformation i<strong>de</strong>ntique <strong>et</strong> pour chacune <strong>de</strong> ses transformations, ilcontient aussi la transformation inverse ; il est engendré par <strong>le</strong>s ∞ r−1tranformations infinitésima<strong>le</strong>s :λ 1 X ′ 1(f) + · · · + λ r X ′ r(f),où λ 1 , . . .,λ r désignent <strong>de</strong>s constantes arbitraires. En introduisant <strong>de</strong>snouveaux paramètres à la place <strong>de</strong>s a k , <strong>le</strong>s équations du groupe peuventdonc être rapportées à la forme :x ′ i = x i +r∑λ k ξ ki (x) +k=1∑1...rk, jλ k λ j1 · 2 X j(ξ ki ) + · · · (i = 1 ··· n).Démonstration. Il est clair que <strong>le</strong> système d’équations aux dérivéespartiel<strong>le</strong>s d’ordre un :Ω j (F) = X ′ j(F) + A j (F) = 0(j =1··· r),est compl<strong>et</strong>, puisque <strong>le</strong>s hypothèses garantissent que l’on a <strong>de</strong>s relationspar paires <strong>de</strong> la forme :(Ω k Ωj (F) ) (− Ω j Ωk (F) ) r∑= c kjs Ω s (F),<strong>et</strong> ce système est indépendant, puisque l’hypothèse d’invertibilité <strong>de</strong> lamatrice ˜ψ kµ garantit que <strong>le</strong>s équations Ω 1 (F) = 0, . . ., Ω r (F) = 0 sontrésolub<strong>le</strong>s par rapport à ∂F∂a 1, . . ., ∂F∂a r.Maintenant, soit a 0 1 , . . ., a0 r un système <strong>de</strong> va<strong>le</strong>urs <strong>de</strong>s a dans unvoisinage duquel <strong>le</strong>s fonctions ˜ψ jk (a) se comportent régulièrement.D’après <strong>le</strong> Théorème p. 130 <strong>de</strong> C<strong>le</strong>bsch-<strong>Lie</strong>-Frobenius, <strong>le</strong> système compl<strong>et</strong>Ω j (F) = 0 possè<strong>de</strong> n solutions F 1 (x ′ , a), . . .,F n (x ′ , a) qui se réduisentà x ′ 1 , . . .,x′ n (respectivement) pour a k = a 0 k . Imaginons maintenantque ces solutions généra<strong>le</strong>s sont données, formons <strong>le</strong>s n équations :x i = F i (x ′ 1 , . . .,x′ n , a 1, . . .,a r )s=1(i =1··· n),<strong>et</strong> résolvons-<strong>le</strong>s par rapport à x ′ 1, . . .,x ′ n, ce qui est toujours possib<strong>le</strong>,puisque F 1 , . . .,F n sont évi<strong>de</strong>mment indépendantes l’une <strong>de</strong> l’autre,pour autant que seu<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s x ′ 1 , . . .,x′ n sont concernées. Leséquations obtenues <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te manière :x ′ i = f i(x 1 , . . .,x n , a 1 , . . .,a r ) (i =1··· n)


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 143représentent alors, comme nous allons maintenant <strong>le</strong> démontrer, ungroupe à r paramètres, <strong>et</strong> en fait naturel<strong>le</strong>ment, un groupe contenantla transformation i<strong>de</strong>ntique, car pour a k = a 0 k , on a x′ i = x i.Tout d’abord, on a i<strong>de</strong>ntiquement :(6)n∑ν=1ξ jν (x ′ ) ∂F i∂x ′ ν+r∑µ=1(i = 1 ···n; j = 1 ···r).ν=1˜ψ jµ (a) ∂F i∂a µ= 0D’un autre côté, en différentiant x i = F i (x ′ , a) par rapport à a µ , onobtient l’équation :n∑ ∂F i ∂x ′ ν0 = + ∂F i,∂x ′ ν ∂a µ ∂a µqui est satisfaite i<strong>de</strong>ntiquement après la substitution x ′ ν = f ν (x, a).Multiplions c<strong>et</strong>te équation par ˜ψ jµ (a) <strong>et</strong> sommons pour µ allant <strong>de</strong> 1jusqu’à r, ce qui nous donne une équation qui <strong>de</strong>vient, en tenant compte<strong>de</strong> (6) :n∑ν=1∂F(ir∑∂x ′ ν µ=1)˜ψ jµ (a) ∂x′ ν− ξ jν (x ′ ) = 0∂a µ(i = 1 ···n; µ=1···r).Mais comme <strong>le</strong> déterminant ∑ ± ∂F 1∂x ′ 1donc en déduire <strong>le</strong>s équations :r∑˜ψ jµ (a) ∂x′ ν= ξ jν (x ′ )∂a µµ=1. . . ∂Fn∂x ′ nne s’annu<strong>le</strong> pas, on peut(j =1··· r ; ν = 1, ..., n),qui forment alors un système que nous pouvons à nouveau résoudre parrapport aux ∂x′ ν∂a µ, puisque par hypothèse, <strong>le</strong> déterminant <strong>de</strong> ˜ψ jµ (a) nes’annu<strong>le</strong> pas. Ainsi, nous obtenons fina<strong>le</strong>ment <strong>de</strong>s équations différentiel<strong>le</strong>s<strong>de</strong> la forme 37 :∂x ′ r∑ν= ψ µj (a 1 , . . .,a r ) · ξ jν (x ′(7) ∂a1, . . .,x ′ n)µj=1(ν = 1 ···n ; µ=1···r)37 Moment crucial : <strong>de</strong>s équations différentiel<strong>le</strong>s fondamenta<strong>le</strong>s du type déjà rencontrésont à présent reconstituées, <strong>et</strong> c’est grâce à el<strong>le</strong>s que la structure <strong>de</strong> groupefermé par composition va pouvoir renaître plus bas.


144 3.8. Équations <strong>de</strong> structurequi se réduisent naturel<strong>le</strong>ment à <strong>de</strong>s i<strong>de</strong>ntités après la substitution :x ′ ν = f ν(x, a).À ce point, la démonstration que <strong>le</strong>s équations x ′ i = f i (x, a) représententun groupe à r paramètres essentiels ne présente pas <strong>de</strong> difficulté.En eff<strong>et</strong>, il est faci<strong>le</strong> tout d’abord <strong>de</strong> voir que <strong>le</strong>s équations x ′ i =f i (x, a) représenent ∞ r transformations distinctes, donc que <strong>le</strong>s paramètressont a 1 , . . .,a r sont tous essentiels. Sinon (cf. <strong>le</strong> Théorèmep. 86), toues <strong>le</strong>s fonctions f 1 (x, a), . . ., f n (x, a) <strong>de</strong>vraient satisfaire uneéquation linéaire aux dérivées partiel<strong>le</strong>s <strong>de</strong> la forme :r∑χ k (a 1 , . . ., a r ) ∂f = 0,∂a kk=1dans laquel<strong>le</strong> <strong>le</strong>s χ k seraient libres <strong>de</strong> x 1 , . . .,x n . En vertu <strong>de</strong> (7), onobtiendrait alors :∑1...rk, jχ k (a) · ψ kj (a) · ξ jν (f 1 , . . .,f n ) ≡ 0(ν = 1 ···n),d’où, puisque X 1 ′(F), . . ., X′ r (F) sont <strong>de</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>sindépendantes :r∑χ k (a) · ψ kj (a) = 0 (j = 1 ···r);k=1mais d’après cela, il vient immédiatement : χ 1 (a) = 0, . . ., χ r (a) = 0,parce que <strong>le</strong> déterminant <strong>de</strong>s ψ kj (a) ne s’annu<strong>le</strong> pas.Ainsi, <strong>le</strong>s équations x ′ i = f i(x, a) représentent effectivement unefamil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ r transformations différentes. Mais maintenant, puisquec<strong>et</strong>te famil<strong>le</strong> satisfait certaines équations différentiel<strong>le</strong>s <strong>de</strong> la formespécifique (7), nous pouvons appliquer immédiatement <strong>le</strong> Théorème 9p. 133. D’après ce théorème, si a 1 , . . ., a r sont <strong>de</strong>s paramètres fixés,toute transformation x ′ i = f i (x, a) dont <strong>le</strong>s paramètres a 1 , . . .,a r s<strong>et</strong>rouvent dans un certain voisinage <strong>de</strong> a 1 , . . .,a r peut être obtenue enexécutant d’abord la transformation :x i = f i (x 1 , . . .,x n , a 1 , . . ., a r )(i = 1 ···n),<strong>et</strong> ensuite une transformation :r∑x ′ i = x i + λ k ξ ki (x) + · · · (i =1··· n)k=1


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 145d’un groupe à un paramètre λ 1 X 1 (f) + · · · + λ r X r (f), où il est entenduque λ 1 , . . ., λ r sont <strong>de</strong>s constantes appropriées. Si nous posonsen particulier a k = a 0 k , nous obtenons x i = x i , donc nous voyons que lafamil<strong>le</strong> <strong>de</strong>s ∞ r transformations x ′ i = f i (x, a) coïnci<strong>de</strong>, dans un certainvoisinage <strong>de</strong> a 0 1, . . .,a 0 r, avec la famil<strong>le</strong> <strong>de</strong>s transformations :r∑x ′ i(8)= x i + λ k ξ ki (x) + · · ·k=1(i = 1 ··· n).Une fois ce point atteint, la trame archaïque <strong>de</strong> l’argumentationspéculative se résume à opérer une transsubstantiation, contagieuse <strong>et</strong>homogénéisante, <strong>de</strong>s types <strong>de</strong> transformations. En eff<strong>et</strong>, <strong>le</strong> Théorème 9p. 133 montrait non pas que f ◦ f = f ou que exp ◦ exp = exp, maisseu<strong>le</strong>ment qu’il y a une stabilité par composition entre transformationsd’un type hétérogène :f ◦ exp ≡ f,ou encore, avec <strong>de</strong> plus amp<strong>le</strong>s détails, que l’on a :(x ′ = exp ( λ X ) ) ((x) x ′ = f(x; a)(∗)(x = f(x; a)a near a 0 )◦λ near 0≡a near aMais si on applique maintenant c<strong>et</strong> énoncé au paramètre a := a 0 considérécomme initial lors <strong>de</strong> la résolution du système compl<strong>et</strong> Ω 1 (F) =· · · = Ω r (f) = 0, alors puisque par construction ce paramètre a 0 produitla transformation i<strong>de</strong>ntique : x = f(x; a 0 ) = x, il en décou<strong>le</strong> quel’on obtient — si l’on pose donc a = a 0 dans (∗) — l’i<strong>de</strong>ntité :(x ′ = exp ( λ X ) ) ( )(x) x ′ = f(x; a)≡,λ near 0 a near a 0une coïnci<strong>de</strong>nce d’essence que l’on peut réexprimer dans <strong>le</strong> langagearchaïque comme :exp ≡ f.On peut donc alors remplacer, dans l’i<strong>de</strong>ntité <strong>de</strong> composition hétérogènef ◦exp ≡ f, non seu<strong>le</strong>ment exp par f pour obtenir une i<strong>de</strong>ntité <strong>de</strong>composition homogène : f ◦ f = f, mais aussi f par exp pour obtenirune <strong>de</strong>uxième i<strong>de</strong>ntité <strong>de</strong> composition équiva<strong>le</strong>nte : exp ◦ exp, el<strong>le</strong> aussihomogène. Le ré-engendrement <strong>de</strong> la stabilité par composition repose,à la fin <strong>de</strong> la démonstration, sur <strong>le</strong> passage à une communauté <strong>de</strong> types.Voici maintenant <strong>le</strong>s arguments tels qu’écrits dans la langue <strong>de</strong><strong>Engel</strong>. Si nous choisissons a 1 , . . .,a r arbitrairement dans un certain).


146 3.8. Équations <strong>de</strong> structurevoisinage <strong>de</strong> a 0 1 , . . .,a0 r , alors la transformation x i = f i (x, a) appartienttoujours à la famil<strong>le</strong> (8). Mais si nous exécutons tout d’abord latransformation x i = f i (x, a) <strong>et</strong> ensuite une transformation appropriée :x ′ i = x i + ∑ rk=1 λ k ξ ki (x) + · · · <strong>de</strong> la famil<strong>le</strong> (8), alors d’après ce qui aété dit plus haut, nous obtenons une transformation x ′ i = f i (x, a) danslaquel<strong>le</strong> a 1 , . . .,a r peut prendre toutes <strong>le</strong>s va<strong>le</strong>urs dans un certain voisinage<strong>de</strong> a 1 , . . .,a r . En particulier, si nous choisissons a 1 , . . .,a r dans<strong>le</strong> voisinage <strong>de</strong> a 0 1, . . ., a 0 r mentionné plus haut, ce qui est toujours possib<strong>le</strong>,alors à nouveau la transformation x ′ i = f i (x, a) appartient aussià la famil<strong>le</strong> (8). Par conséquent, nous voyons que <strong>de</strong>ux transformations<strong>de</strong> la famil<strong>le</strong> (8), lorsqu’el<strong>le</strong>s sont exécutées l’une après l’autre, donnentà nouveau une transformation <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te famil<strong>le</strong>. En définitive, c<strong>et</strong>te famil<strong>le</strong>— <strong>et</strong> naturel<strong>le</strong>ment aussi la famil<strong>le</strong> x ′ i = f i (x, a) qui s’i<strong>de</strong>ntifieà el<strong>le</strong> — forme un groupe continu <strong>de</strong> transformations à r paramètresqui contient la transformation i<strong>de</strong>ntique <strong>et</strong> <strong>de</strong>s transformations inversesl’une <strong>de</strong> l’autre par paires.□Troisième moment : Élimination <strong>de</strong>s transformations auxiliaires. R<strong>et</strong>ouren arrière <strong>et</strong> examen du gain synthétique obtenu : à présent, il faut rebondir<strong>et</strong> s’interroger sur la possibilité d’une réciproque plus forte quiferait l’économie d’hypothèses secondaires — au prix d’un plus gran<strong>de</strong>ffort <strong>de</strong> pensée.Les hypothèses <strong>de</strong> l’important Théorème 23 peuvent être simplifiéesd’une manière essentiel<strong>le</strong>.Le théorème exprime que <strong>le</strong>s 2r transformations infinitésima<strong>le</strong>sX k (f) <strong>et</strong> A k (f) déterminent un certain groupe à r paramètres dansl’espace <strong>de</strong>s x ; mais au même moment, il y a une représentation <strong>de</strong> cegroupe qui est absolument indépendante <strong>de</strong>s A k (f) ; en eff<strong>et</strong>, d’après<strong>le</strong> théorème cité, <strong>le</strong> groupe en question s’i<strong>de</strong>ntifie à la famil<strong>le</strong> <strong>de</strong>s ∞ r−1groupes à un paramètre λ 1 X 1 (f) + · · · + λ r X r (f), <strong>et</strong> c<strong>et</strong>te famil<strong>le</strong> estdéjà déterminée par <strong>le</strong>s seuls X k (f). C<strong>et</strong>te circonstance nous conduità conjecturer [Dieser Umstand führt uns auf die Vermuthung] que la famil<strong>le</strong><strong>de</strong>s ∞ r−1 groupes à un paramètre λ 1 X 1 (f)+···+λ r X r (f) forme toujoursun groupe à r si <strong>et</strong> seu<strong>le</strong>ment si <strong>le</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>sindépendantes satisfont <strong>de</strong>s relations par paires <strong>de</strong> la forme :(X k Xj (f) ) (− X j Xk (f) ) r∑= [X k , X j ] = c kjs X s (f).D’après <strong>le</strong> Théorème 22 p. 140, c<strong>et</strong>te condition est nécessaire pour que<strong>le</strong>s ∞ r−1 groupes à un paramètres ∑ λ k X k (f) forment un groupe à rparamètres. Donc notre conjecture [unsere Vermuthung] revient à suspecterque c<strong>et</strong>te condition nécessaire soit aussi suffisante. [40], pp. 155–156.s=1


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 147C<strong>et</strong>te présomption serait changée en certitu<strong>de</strong> si l’on pouvait, pourtout système <strong>de</strong> tel<strong>le</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s X 1 , . . .,X r , réussirà produire r autres transformations infinitésima<strong>le</strong>s auxiliaires(9) A k (f) =r∑µ=1˜ψ kµ (a 1 , . . .,a r ) ∂f∂a µ(k = 1 ···r)en <strong>de</strong>s variab<strong>le</strong>s auxiliaires (a 1 , . . .,a r ) <strong>de</strong>stinées à jouer <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> <strong>de</strong> paramètres,<strong>et</strong> qui satisfassent en outre bien sûr <strong>le</strong>s relations correspondantes:(A k Aj (f) ) (− A j Ak (f) ) r∑= c kjs A s (f),sans que <strong>le</strong> déterminant ∑ ± ˜ψ 11 · · · ˜ψ rr ne s’annu<strong>le</strong>. Ce troisième momentest lui aussi riche d’une métaphysique génétique où <strong>Lie</strong> se révè<strong>le</strong>surprenant d’inventivité.Comme il n’est question que <strong>de</strong> l’espace <strong>de</strong>s variab<strong>le</strong>s x 1 , . . .,x ndans <strong>le</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s données :X k (f) =n∑i=1ξ ki (x) ∂f∂x is=1(k = 1 ··· r),on ne voit pas bien comment engendrer, presque ex nihilo, une essenceparamétrique. Choisir tout simp<strong>le</strong>ment A 1 := X 1 , . . ., A r := X r eny remplaçant la variab<strong>le</strong> x par la variab<strong>le</strong> a ne marche certainementpas, puisqu’il n’y a aucune raison que <strong>le</strong> nombre r <strong>de</strong> paramètres soitégal à la dimension n. À vrai dire, dès que r > n, <strong>le</strong>s r transformationsinfinitésima<strong>le</strong>s sont nécessairement linéairement dépendantes entout point x 0 fixé, tandis que <strong>le</strong>s r transformations auxilaires du type (9)recherchées pour pouvoir appliquer <strong>le</strong> Théorème 23 doivent être linéairementindépendantes en tout a 0 fixé, puisque la matrice <strong>de</strong>s ˜ψ kµ (a) doitêtre inversib<strong>le</strong>. C<strong>et</strong>te dépendance linéaire, inévitab<strong>le</strong> lorsque r > n, estd’ail<strong>le</strong>urs <strong>le</strong> défaut <strong>le</strong> plus gênant <strong>de</strong> X 1 , . . .,X r .L’idée (remarquab<strong>le</strong>) <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> consiste à considérer l’action dugroupe, non pas sur <strong>le</strong>s points x pris un à un dans l’espace initial, maissur <strong>le</strong>s col<strong>le</strong>ctions d’un certain nombre k <strong>de</strong> points en simultané, ou, cequi revient au même, sur <strong>le</strong>s points pris un à un dans <strong>le</strong> produit <strong>de</strong> kcopies <strong>de</strong> c<strong>et</strong> espace. Introduisons donc à c<strong>et</strong> eff<strong>et</strong> un nombre, ici exactementégal à r pour <strong>le</strong>s besoins indiqués, <strong>de</strong> copies <strong>de</strong> l’espace initial,ces copies étant chacunes munies <strong>de</strong> coordonnées notées :((µ))x 1 , . . ., x n(µ) (µ = 1 ···r).


148 3.8. Équations <strong>de</strong> structureIntroduisons aussi <strong>le</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s qui sont <strong>le</strong>s refl<strong>et</strong>s<strong>de</strong>s X k dans chaque espace :n∑X (µ)k(f) = ((µ))ξ ki x 1 , . . .,x n(µ) ∂fi=1∂x (µ)i<strong>et</strong> considérons <strong>le</strong>s r transformations infinitésima<strong>le</strong>s :r∑W k (f) = X (µ)k(f).µ=1D’après la Proposition p. 123 ci-<strong>de</strong>ssus, ces transformations infinitésima<strong>le</strong>ssont tel<strong>le</strong>s qu’aucune relation <strong>de</strong> la forme :r∑k=1(ψ k x′1 , . . .,x ′ n, x ′′1, . . ., x ′′ n, · · · · · · , x (r) )1 , . . .,x (r)n · Wk (f) = 0n’est possib<strong>le</strong>, c’est-à-dire : ces transformations infinitésima<strong>le</strong>s sont indépendantes.Maintenant, puisqu’on a <strong>de</strong> plus :W k(Wj (f) ) − W j(Wk (f) ) =r∑c kjs W s (f),s=1<strong>le</strong>s r équations indépedantes l’une <strong>de</strong> l’autre :W 1 (f) = 0, · · · · · · , W r (f) = 0forment un système compl<strong>et</strong> à r termes en <strong>le</strong>s rn variab<strong>le</strong>sx ′ 1, . . .,x ′ n, · · · , x (r)1 , . . .,x (r)n . Ce système compl<strong>et</strong> possè<strong>de</strong> r(n − 1)solutions indépendantes, que l’on peut appe<strong>le</strong>r u 1 , u 2 , . . .,u rn−r . Doncsi l’on sé<strong>le</strong>ctionne r fonctions y 1 , . . .,y r <strong>de</strong>s rn quantités x (µ)i quisont indépendantes l’une <strong>de</strong> l’autre <strong>et</strong> indépendantes <strong>de</strong> u 1 , . . .,u rn−r ,on peut alors introduire <strong>le</strong>s y <strong>et</strong> <strong>le</strong>s u comme nouvel<strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>sindépendantes à la place <strong>de</strong>s x (µ)i . En effectuant cela, on obtient :W k (f) =r∑π=1W k (y π ) ∂frn−r∑+ W k (u τ ) ∂f ,∂y π ∂uτ=1τou encore, puisque tous <strong>le</strong>s W k (u τ ) s’annu<strong>le</strong>nt i<strong>de</strong>ntiquement :W k (f) =r∑π=1ω kπ (y 1 , . . ., y r , u 1 , . . .,u rn−r ) ∂f∂y π,,


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 149<strong>et</strong> ici, <strong>le</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s W 1 (f), . . .,W r (f) ne sont reliéspar aucune relations <strong>de</strong> la forme :r∑ϕ k (y 1 , . . ., y r , u 1 , . . .,u rn−r ) · W k (f) = 0.k=1Naturel<strong>le</strong>ment, c<strong>et</strong>te propriété <strong>de</strong>s W k (f) reste aussi vraie lorsque l’onconfère à u τ <strong>de</strong>s va<strong>le</strong>urs appropriées u 0 τ. Si on pose alors ω kπ (y, u 0 ) =ωkπ 0 (y), <strong>le</strong>s r transformations infinitésima<strong>le</strong>s indépendantes en <strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>sindépendantes y 1 , . . .,y r :r∑V k (f) = ωkπ 0 (y 1, . . ., y r ) ∂f∂y ππ=1satisfont <strong>le</strong>s relations par paires :V k(Vj (f) ) − V j(Vk (f) ) =r∑c kjs V s (f)<strong>et</strong> <strong>de</strong> plus, el<strong>le</strong>s ne sont liées par aucune relation <strong>de</strong> la forme :r∑ϕ k (y 1 , . . ., y r ) · V k (f) = 0.k=1Par conséquent, <strong>le</strong>s V k (f) sont <strong>de</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s ayantla constitution recherchée. Ains, nous pouvons immédiatement appliquer<strong>le</strong> Théorème 23 p. 141 aux 2r transformations infinitésima<strong>le</strong>sX 1 (f), . . ., X r (f), V 1 (f), . . ., V r (f) <strong>et</strong> nous avons donc démontré que<strong>le</strong>s ∞ r−1 groupes à un paramètre ∑ λ k X k (f) constituent un groupeà r paramètres (essentiels). En définitive, la réciproque « conjecturée »ci-<strong>de</strong>ssus est vraie.Théorème 24. ([40], p. 158) Si r transformations infinitésima<strong>le</strong>s indépendantes:X k (f) =n∑i=1satisfont <strong>le</strong>s relations par paires :s=1ξ ki (x 1 , . . ., x n ) ∂f∂x iX k(Xj (f) ) − X j(Xk (f) ) = [X k , X j ] =(k = 1 ···r)r∑c kjs X s (f),où <strong>le</strong>s c kjs sont <strong>de</strong>s constantes, alors la totalité <strong>de</strong>s ∞ r−1 groupes à unparamètre :λ 1 X 1 (f) + · · · + λ r X r (f)s=1


150 3.8. Équations <strong>de</strong> structureforme un groupe continu à r paramètres, qui contient la transformationi<strong>de</strong>ntité, <strong>et</strong> dont <strong>le</strong>s transformations peuvent être ordonnées par pairesinverses l’une <strong>de</strong> l’autre.Si <strong>le</strong>s équations x ′ i = f i (x 1 , . . .,x n , a 1 , . . .,a r ) représentent unefamil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ r transformations <strong>et</strong> si en outre, el<strong>le</strong>s satisfont <strong>de</strong>s équationsdifférentiel<strong>le</strong>s <strong>de</strong> la forme spécifique :∂x ′ i∂a k=r∑ψ kj (a 1 , . . .,a r ) · ξ ji (x ′ 1, . . .,x ′ n)j=1(i = 1 ···n; k = 1 ··· r),alors comme nous <strong>le</strong> savons, <strong>le</strong>s r transformations infinitésima<strong>le</strong>s :n∑X k (f) = ξ ki (x 1 , . . ., x n ) ∂f(k = 1 ···r)∂x ii=1sont linéairement indépendantes <strong>et</strong> <strong>de</strong> plus, d’après <strong>le</strong> Théorème 21p. 136, el<strong>le</strong>s sont reliées entre el<strong>le</strong>s par <strong>de</strong>s relations <strong>de</strong> la forme :(X k Xj (f) ) (− X j Xk (f) ) r∑= [X k , X j ] = c kjs · X s (f).s=1Ainsi, la famil<strong>le</strong> <strong>de</strong>s ∞ r−1 groupes à un paramètre :λ 1 X 1 (f) + · · · + λ r X r (f)forme un groupe à r paramètres contenant la transformation i<strong>de</strong>ntité.Par conséquent, nous pouvons ré-énoncer comme suit <strong>le</strong> Théorème 9p. 133.Théorème 25. ([40], p. 160) Si une famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ r transformations :x ′ i = f i(x 1 , . . .,x n , a 1 , . . .,a r ) (i =1··· n)satisfait certaines équations différentiel<strong>le</strong>s <strong>de</strong> la forme :∂x ′ r∑i= ψ kj (a 1 , . . .,a r ) · ξ ji (x ′ 1∂a , . . .,x′ n )kj=1<strong>et</strong> si <strong>le</strong> déterminant :∑±ψ11 (a) · · ·ψ rr (a)(i = 1 ···n ; k = 1 ··· r),ne s’annu<strong>le</strong> pas, alors toute transformation x ′ i = f i (x, a) dont <strong>le</strong>s paramètresa 1 , . . .,a r se trouvent dans un p<strong>et</strong>it voisinage d’un paramètrequelconque fixé a 0 1 , . . ., a0 r peut être obtenue en exécutant en premier


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 151lieu la transformation x i = f i (x, a 0 ) <strong>et</strong> en second lieu, une transformationcomplètement déterminée :r∑x ′ i = x i + λ k ξ ki (x) + · · · (i =1··· n)k=1du groupe à r paramètres qui, sous <strong>le</strong>s hypothèses supposées, est engendrépar <strong>le</strong>s r transformations infinitésima<strong>le</strong>s indépendantes :n∑X k (f) = ξ ki (x 1 , . . .,x n ) ∂f(k =1··· r).∂x ii=1Pour terminer ce paragraphe, considérons <strong>le</strong> cas où <strong>le</strong>s équations x ′ i =f i (x, a), i = 1,... ,n ne contiennent pas la transformation i<strong>de</strong>ntité dans <strong>le</strong>domaine A 1 ⊂ A , en supposant bien entendu comme à la p. 132 que <strong>de</strong>uxtransformations :x ′ i = f i (x 1 ,... ,x n , a 1 ,... ,a r )x ′′i = f i(x ′ 1 ,... ,x′ n , b 1,... ,b r )exécutées l’une après l’autre, avec a ∈ A 1 <strong>et</strong> b ∈ A 1 , produisent la transformation:x ′′i = f i (x 1 ,...,x n , c 1 ,... ,c r ) = f i(x1 ,...,x n , ϕ 1 (a,b),... ,ϕ r (a,b) ) .Il en décou<strong>le</strong> que ces transformations satisfont <strong>de</strong>s équations différentiel<strong>le</strong>sfondamenta<strong>le</strong>s <strong>de</strong> la forme :∂x ′ r∑i= ψ kj (a 1 ,... ,a r ) · ξ ji (x ′ 1∂a ,... ,x′ n )kj=1(i = 1 ···n ; k = 1 ··· r),<strong>et</strong> l’on supposera comme auparavant que <strong>le</strong> déterminant <strong>de</strong>s ψ kj (a) ne s’annu<strong>le</strong>en aucun a ∈ A 1 .Dans ce qui va suivre, a 0 1 ,... ,a0 r <strong>et</strong> pareil<strong>le</strong>ment b0 1 ,... ,b0 r désigneront<strong>de</strong>s points déterminés (fixes) du domaine A 1 , <strong>et</strong> ϕ k (a 0 ,b 0 ) sera noté c 0 k . Enrevanche, a 1 ,... ,a r désignera un point arbitraire du domain A , <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorteque <strong>le</strong>s équations :x i = f i (x 1 ,...,x n , a 1 ,...,a r )représenteront une transformation quelconque du groupe.Toute transformation <strong>de</strong> la forme x i = f i (x,a) peut être obtenue en exécutantd’abord la transformation x ′ i = f i(x,a 0 ) <strong>et</strong> ensuite une certaine second<strong>et</strong>ransformation définie comme suit. Résolvons <strong>le</strong>s équations x ′ i = f i(x,a 0 ) parrapport à x 1 ,... ,x n , ce qui donne :x i = F i (x ′ 1 ,... ,x′ n , a0 1 ,... ,a0 r ),


152 3.8. Équations <strong>de</strong> structure<strong>et</strong> introduisons ces va<strong>le</strong>urs <strong>de</strong>s x i dans x i = f i (x,a). De c<strong>et</strong>te manière, nousobtenons, pour <strong>le</strong>s équations cherchées, une expression <strong>de</strong> la forme :(10) x i = Φ i(x′1 ,... ,x ′ n, a 1 ,... ,a r ) (i = 1 ···n),dans laquel<strong>le</strong> nous n’écrivons pas <strong>le</strong>s a 0 k, puisque nous voulons <strong>le</strong>s considérercomme <strong>de</strong>s constantes numériques.La transformation (10) <strong>et</strong> bien définie pour tous <strong>le</strong>s systèmes <strong>de</strong> va<strong>le</strong>ursa k dans <strong>le</strong> domaine A <strong>et</strong> son expression peut être prolongée analytiquement(au sens <strong>de</strong> Weierstraß) à ce domaine entier A ; cela décou<strong>le</strong> en eff<strong>et</strong> <strong>de</strong>s hypothèsesque nous avons effectuées au suj<strong>et</strong> <strong>de</strong> la nature <strong>de</strong>s fonctions f i <strong>et</strong>F i .Nous affirmons maintenant que pour certaines va<strong>le</strong>urs <strong>de</strong>s paramètresa k , <strong>le</strong>s transformations <strong>de</strong> la famil<strong>le</strong> x i = Φ i (x ′ , a) appartiennent au groupeinitia<strong>le</strong>ment donné x ′ i = f i(x,a), alors que par contraste, pour certaines autresva<strong>le</strong>urs <strong>de</strong>s a k , el<strong>le</strong>s appartiennent au groupe X 1 f,...,X r f qui contient latransformation i<strong>de</strong>ntité.Établissons la première partie <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te assertion. Nous savons que <strong>le</strong>s<strong>de</strong>ux transformations :x ′ i = f i (x 1 ,...,x n , a 0 1,...,a 0 r), x i = f i (x ′ 1,...,x ′ n, b 1 ,...,b r )exécutées l’une après l’autre produisent la transformation x i = f i (x,c), oùc k = ϕ k (a 0 ,b) ; ici, nous pouvons donner à b 1 ,... ,b r tout système <strong>de</strong> va<strong>le</strong>ursdans <strong>le</strong> domaine A 1 , tandis que <strong>le</strong> système <strong>de</strong> va<strong>le</strong>urs c 1 ,...,c r appartientau domaine A , dans un certain voisinage <strong>de</strong> c 0 1 ,...,c0 r . Mais d’après ce quia été dit précé<strong>de</strong>mment, la transformation x i = f i (x,c) est aussi obtenue enexécutant <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux transformations :x ′ i = f i (x 1 ,... ,x n , a 0 1,... ,a 0 r), x i = Φ i (x ′ 1,...,x ′ n, a 1 ,...,a r )l’une après l’autre, <strong>et</strong> en choisissant a k = c k . Par conséquent, après la substitutiona k = ϕ k (a 0 ,b), la transformation x i = Φ i (x ′ ,a) est i<strong>de</strong>ntiqueà la transformation x i = f i (x ′ ,b), c’est-à-dire : toutes <strong>le</strong>s transformationsx i = Φ i (x ′ ,a) dont <strong>le</strong>s paramètres a k se trouvent dans un certain voisinage<strong>de</strong> c 0 1 ,... ,c0 r qui est défini via l’équation a k = ϕ k (a 0 ,b), appartiennent augroupe donné x ′ i = f i(x,a).Afin d’établir la secon<strong>de</strong> partie <strong>de</strong> notre assertion, rappelons <strong>le</strong> Théorème25. Si a 1 ,... ,a r se trouvent dans un certain voisinage <strong>de</strong> a 0 1 ,... ,a0 r ,alors en vertu <strong>de</strong> ce théorème, la transformation x i = f i (x,a) peut être obtenueen exécutant d’abord la transformation :x ′ i = f i (x 1 ,...,x n , a 0 1,...,a 0 r)<strong>et</strong> ensuite une transformation complètement déterminée :r∑(11) x i = x ′ i + λ k ξ ki (x ′ ) + · · ·k=1


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 153du goupe à r paramètres qui est engendré par <strong>le</strong>s r transformations infinitésima<strong>le</strong>sindépendantes :n∑X k (f) = ξ ki (x 1 ,... ,x n ) ∂f(k = 1 ···r).∂x ii=1D’après la preuve du Théorème 9 p. 133, nous savons <strong>de</strong> plus que l’on trouvela transformation (11) en question en choisissant d’une manière appropriéea 1 ,... ,a r comme fonctions indépendantes <strong>de</strong> λ 1 ,... ,λ r <strong>et</strong> en déterminantinversement λ 1 ,... ,λ r comme fonction <strong>de</strong> a 1 ,...,a r . Mais d’un autre côté,nous obtenons aussi la transformation x i = f i (x,a) en exécutant d’abord latransformation x ′ i = f i (x,a 0 ), puis la transformation x i = Φ i (x ′ ,a). Parconséquent, la transformation x i = Φ i (x ′ ,a) appartient au groupe engendrépar X 1 f,...,X r f dès que <strong>le</strong> système <strong>de</strong> va<strong>le</strong>urs a 1 ,... ,a r se trouve dansun certain voisinage <strong>de</strong> a 0 1 ,... ,a0 r. Pour l’exprimer différemment : <strong>le</strong>s équationsx i = Φ i (x ′ ,a) sont transformées en <strong>le</strong>s équations (11) lorsque a 1 ,... ,a rest remplacé par <strong>le</strong>s fonctions mentionnées <strong>de</strong> λ 1 ,...,λ r . Ceci prouve la<strong>de</strong>uxième partie <strong>de</strong> notre assertion.Ainsi, <strong>le</strong>s équations <strong>de</strong> transformation x i = Φ i (x ′ ,a) possè<strong>de</strong>nt la propriétéimportante suivante : si à la place <strong>de</strong> a k , on introduit <strong>le</strong>s nouveauxparamètres b 1 ,...,b r au moyen <strong>de</strong>s équations a k = ϕ k (a 0 ,b), alors pourun certain domaine <strong>de</strong>s variab<strong>le</strong>s, <strong>le</strong>s équations x i = Φ i (x ′ ,a) prennent laforme x i = f i (x ′ ,b) ; d’un autre côté, si on introduit <strong>le</strong>s nouveaux paramètresλ 1 ,... ,λ r à la place <strong>de</strong> a k , alors pour un certain domaine, <strong>le</strong>s équationsx i = Φ i (x ′ ,a) se convertissent en :r∑x i = x ′ i + λ k ξ ki (x ′ ) + · · · (i =1··· n)k=1Voilà donc en définitive une caractéristique importante du groupe initia<strong>le</strong>mentdonné x ′ i = f i(x,a) : quand on introduit dans <strong>le</strong>s équations x ′ i =f i (x,a) <strong>le</strong>s nouveaux paramètres a 1 ,...,a r à la place <strong>de</strong>s a k au moyen <strong>de</strong>a k = ϕ k (a 0 ,a), alors on obtient un système d’équations <strong>de</strong> transformationsx ′ i = Φ i(x,a) qui représentent, lorsqu’on <strong>le</strong>s prolonge analytiquement, unefamil<strong>le</strong> <strong>de</strong> transformations à laquel<strong>le</strong> appartiennent toutes <strong>le</strong>s transformationsd’un certain groupe à r paramètres contenant la transformations i<strong>de</strong>ntité.Nous pouvons exprimer cela comme suit.Théorème 26. ([40], p. 163) Tout groupe x ′ i = f i(x 1 ,...,x n , a 1 ,...,a r ) àr paramètres qui n’est pas engendré par r transformations infinitésima<strong>le</strong>s indépendantesdérive d’un groupe contenant r transformations infinitésima<strong>le</strong>sindépendantes <strong>de</strong> la manière suivante : former tout d’abord <strong>le</strong>s équations différentiel<strong>le</strong>s:∂x ′ i∂a k=r∑ψ kj (a) · ξ ji (x ′ )j=1(i = 1 ··· n; k = 1 ···r),


154 3.8. Équations <strong>de</strong> structurequi sont satisfaites par <strong>le</strong>s équations x ′ i = f i(x,a), puis poser :n∑ξ ki (x) ∂f = X k (f) (k = 1 ··· r)∂x ii=1<strong>et</strong> former ensuite <strong>le</strong>s équations finies :r∑x ′ i = x i + λ k ξ ki (x) + · · ·k=1(i = 1 ···n)du groupe à r paramètres contenant la transformation i<strong>de</strong>ntité qui est engendrépar <strong>le</strong>s r transformations infinitésima<strong>le</strong>s indépendantes X 1 f,...,X r f. Avecces données, il est alors possib<strong>le</strong>, dans ces équations finies, d’introduire <strong>de</strong>snouveaux paramètres a 1 ,... ,a r à la place <strong>de</strong> λ 1 ,... ,λ r <strong>de</strong> manière à ce que<strong>le</strong>s équations <strong>de</strong> transformations qui en résultent :x ′ i = Φ i(x 1 ,... ,x n , a 1 ,... ,a r ) (i =1··· n)représentent une famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ r transformations qui embrasse, après prolongementanalytique, toutes <strong>le</strong>s ∞ r transformations :du groupe.x ′ i = f i (x 1 ,... ,x n , a 1 ,... ,a r )(i = 1 ···n)À l’issue <strong>de</strong> ce premier traj<strong>et</strong> fondamental que clôt la fin du Chapitre9 <strong>de</strong> la Theorie <strong>de</strong>r Transformationsgruppen, <strong>le</strong>s Théorème 22<strong>et</strong> 24 vont perm<strong>et</strong>tre dans la suite à <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> à <strong>Lie</strong> d’i<strong>de</strong>ntifier systématiquementtout groupe continu <strong>de</strong> transformations :x ′ i = f i(x 1 , . . .,x n ; a 1 , . . .,a r ) (i =1··· n)à une col<strong>le</strong>ction <strong>de</strong> transformations infinitésima<strong>le</strong>s linéairement indépendantes:n∑X k (f) = ξ ki (x 1 , . . .,x n ) ∂f(i = 1 ··· n)∂x ii=1dont <strong>le</strong>s coefficients ξ ki (x) sont analytiques (réels ou comp<strong>le</strong>xes) <strong>et</strong> quiest linéairement fermée par croch<strong>et</strong>s :[ ]r∑Xj , X k = c s j,k X s (j, k = 1 ···r),s=1où <strong>le</strong>s c s j,k sont <strong>de</strong>s constantes. Une tel<strong>le</strong> i<strong>de</strong>ntification38 d’un groupe à<strong>de</strong>s générateurs infinitésimaux n’a pas seu<strong>le</strong>ment un caractère d’interchangeabilitéontologique, el<strong>le</strong> métamorphose aussi l’être d’un groupe38 Tous <strong>le</strong>s énoncés précé<strong>de</strong>nts sont clairement <strong>et</strong> explicitement locaux, <strong>et</strong> ce seraitse méprendre sur la portée rigoureuse <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> que <strong>de</strong>


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 155local arbitraire en linéarisant ses caractéristiques fondamenta<strong>le</strong>s. Avecces théorèmes fondamentaux, non seu<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> différentiel supplante <strong>le</strong>fini, mais encore : on s’apprête à algébriser définitivement la genèse.Un point <strong>de</strong> seuil, en eff<strong>et</strong>, est atteint, c’est un point <strong>de</strong> non r<strong>et</strong>our :la connaissance mathématique initia<strong>le</strong>ment indécise <strong>et</strong> problématisantepeut à présent se déci<strong>de</strong>r à réenvisager l’obj<strong>et</strong> « groupe continu » —maintenant moins opaque — sous un ang<strong>le</strong> absolument neuf : celui <strong>de</strong>stransformations infinitésima<strong>le</strong>s, plus riches <strong>de</strong> virtualités <strong>et</strong> <strong>de</strong> manipulationspossib<strong>le</strong>s. La genèse synthétique du concept <strong>de</strong> groupe continu<strong>de</strong> transformations a donc ceci d’« irréversib<strong>le</strong> » que ses caractéristiquesinitia<strong>le</strong>s sont <strong>de</strong>stinées à s’effacer <strong>de</strong>vant l’approfondissement incessant<strong>de</strong> <strong>le</strong>ur compréhension.Sur <strong>le</strong> plan algébrique, <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux seu<strong>le</strong>s contraintes qui s’exercentsur une col<strong>le</strong>ction <strong>de</strong> transformations infinitésima<strong>le</strong>s sont l’antisymétriedu croch<strong>et</strong> :r∑c s j,k X s = [ ] [ ]r∑X j , X k = − Xk , X j = −c s k,j X ss=1qui se lit simp<strong>le</strong>ment :0 = c s j,k + c s k,j,<strong>et</strong> <strong>le</strong>s i<strong>de</strong>ntités <strong>de</strong> type Jacobi ; ces <strong>de</strong>rnières sont satisfaites automatiquemententre tripl<strong>et</strong>s <strong>de</strong> champs <strong>de</strong> vecteurs <strong>et</strong> el<strong>le</strong>s s’écrivent ici pourtous j, k, l = 1, . . .,r :0 = [ X j , [X k , X l ] ] + [ X l , [X j , X k ] ] + [ X k , [X l , X j ] ]= [ X j , ∑ r] [s=1 cs k,l X s + Xl , ∑ r] [s=1 cs j,k X s + Xk , ∑ r]s=1 cs l,j X sr∑ r∑ [= X t csk,l c t j,s + cs j,k ct l,s + ] cs l,j ct k,s ,t=1s=1s=1ce qui équivaut aux relations quadratiques :r∑ [ ]0 = csk,l c t j,s + c s j,k c t l,s + c s l,j c t k,s .s=13.9. Le problème <strong>de</strong> la classification <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations.Pour <strong>Lie</strong>, la question dominante dans la théorie qu’il a érigéeétait <strong>de</strong> classifier, à équiva<strong>le</strong>nce près, tous <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformationspossib<strong>le</strong>s, loca<strong>le</strong>ment, génériquement :Classification <strong>de</strong>s groupes continus finis locaux<strong>de</strong> transformations analytiques


156 3.9. Le problème <strong>de</strong> la classification <strong>de</strong>s groupes<strong>et</strong> surtout pour l’espace réel à trois dimension, <strong>le</strong> seul qui possè<strong>de</strong> unsens « physique ». Du point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong>s équations <strong>de</strong> transformationsfinies, il est bien entendu naturel <strong>de</strong> déclarer que <strong>de</strong>ux groupes <strong>de</strong> transformations:x ′ = f(x; a) <strong>et</strong> y ′ = g(y; b)qui agissent sur <strong>de</strong>s espaces respectifs x 1 , . . .,x n <strong>et</strong> y 1 , . . .,y n <strong>de</strong> lamême dimension n 1 avec <strong>le</strong> même nombre r 1 <strong>de</strong> paramètresessentiels a 1 , . . .,a r <strong>et</strong> b 1 , . . .,b r sont équiva<strong>le</strong>nts 39 [ähnlich] s’il existeà la fois un changement <strong>de</strong> paramètres b = β(a) <strong>et</strong> un changement <strong>de</strong>coordonnées y = τ(x) dans l’espace-source qui s’effectue simultanémentaussi dans l’espace-image : y ′ = τ(x ′ ), <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que, aprèssubstitutions adéquates, on a la relation :x ′ = τ −1 (y ′ ) = τ −1( g(y; b) ) = τ −1( g(τ(x); β(a)) ) ≡ f(x; a),la <strong>de</strong>rnière égalité étant i<strong>de</strong>ntiquement satisfaite pour tout x <strong>et</strong> tout a.Mais grâce aux théorèmes fondamentaux, ce problème <strong>de</strong> classificationrevient en fait à classifier <strong>le</strong>s algèbres <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> loca<strong>le</strong>s finies <strong>de</strong>champs <strong>de</strong> vecteurs <strong>et</strong> <strong>le</strong>urs sous-algèbres, à changement <strong>de</strong> coordonnéesprès :Classification <strong>de</strong>s algèbres <strong>de</strong> <strong>Lie</strong><strong>de</strong> champs <strong>de</strong> vecteurs analytiques locauxen dimensions 1, 2 <strong>et</strong> 3 <strong>et</strong> au voisinage <strong>de</strong> points génériquesAu niveau infinitésimal, il est bien entendu naturel <strong>de</strong> déclarer que <strong>de</strong>uxalgèbres <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> <strong>de</strong> champs <strong>de</strong> vecteurs analytiques locaux X 1 , . . .,X r<strong>et</strong> Y 1 , . . ., Y r <strong>de</strong> la même dimension r sur <strong>de</strong>ux espaces <strong>de</strong> coordonnéesx 1 , . . .,x n <strong>et</strong> y 1 , . . .,y n <strong>de</strong> la même dimension n sont (loca<strong>le</strong>ment)équiva<strong>le</strong>ntes s’il existe un difféomorphisme x ↦→ y = y(x) qui envoiechaque X k sur une combinaison linéaire λ k1 Y 1 + · · · + λ kr Y r <strong>de</strong>s Y l àcoefficients constants λ kl .Ainsi, <strong>le</strong> problème <strong>de</strong> classification revient-il à trouver <strong>de</strong>s formesnorma<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s plus simp<strong>le</strong>s possib<strong>le</strong>s pour <strong>le</strong>s algèbres <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> <strong>de</strong> transformationsinfinitésima<strong>le</strong>s. Plus précisément, il s’agit d’entreprendrel’étu<strong>de</strong> suivante.39 L’adjectif « semblab<strong>le</strong> » appartenant trop au langage non-conceptuel, [ähnlich]sera traduit par « équiva<strong>le</strong>nt », en référence à la métho<strong>de</strong> d’équiva<strong>le</strong>nce que Élie Cartana développée à la suite <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> pour une pluralité <strong>de</strong> structures géométriques qu’il ainterprétées en termes <strong>de</strong> systèmes différentiels extérieurs ([24, 87, 156, 56, 125]).


Chapitre 3. Théorèmes fondamentaux sur <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations 157• Déterminer [bestimmen] toutes <strong>le</strong>s algèbres <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> <strong>de</strong> dimensionfinie r <strong>de</strong> champs <strong>de</strong> vecteurs analytiques comp<strong>le</strong>xes locaux :n∑X k = ξ ki (x) ∂(k = 1 ··· r)∂x ii=1définies dans un certain ouvert initial U ⊂ C n ; il est permis <strong>de</strong> relocaliser<strong>le</strong>s considérations un nombre fini <strong>de</strong> fois à un sous-domaine plusp<strong>et</strong>it dès qu’une opération mathématique nécessite qu’un certain obj<strong>et</strong>soit nondégénéré, ou qu’une certaine fonction soit non nul<strong>le</strong> 40 .• Rapporter chaque tel système X 1 , . . .,X r à une forme norma<strong>le</strong>la plus simp<strong>le</strong> possib<strong>le</strong>, e.g.assurer que la plupart <strong>de</strong>s coefficients sontnuls, monomiaux, égaux à <strong>de</strong>s fonctions élémentaires, ou qu’ils dépen<strong>de</strong>ntd’un nombre <strong>de</strong> variab<strong>le</strong>s qui est strictement inférieur à n.• Distinguer précisément tous <strong>le</strong>s systèmes possib<strong>le</strong>s <strong>de</strong> champs<strong>de</strong> vecteurs en introduisant <strong>de</strong>s concepts géométriques ou algébriquesindépendants <strong>de</strong>s coordonnées afin <strong>de</strong> ranger tous <strong>le</strong>s groupes dans <strong>de</strong>scatégories <strong>et</strong> dans <strong>de</strong>s sous-catégories qui soient précisément <strong>et</strong> quasiinstantanémentdiscernab<strong>le</strong>s par la pensée.Les problèmes <strong>de</strong> classification : un groupe <strong>de</strong> tail<strong>le</strong> importante <strong>et</strong> d’unecomp<strong>le</strong>xité invisib<strong>le</strong> agit <strong>de</strong> manière quasiment incontrôlab<strong>le</strong> sur une catégoried’obj<strong>et</strong>s. L’obj<strong>et</strong> quelconque flotte alors, transporté passivement par <strong>le</strong>s ambiguïtés<strong>de</strong> sa donation initia<strong>le</strong>. La saisie vraie en tant que tel<strong>le</strong> ne peut qu’exprimerfondamenta<strong>le</strong>ment la mobilité unique qui est consubstantiel<strong>le</strong> à l’obj<strong>et</strong>qu’el<strong>le</strong> vise : <strong>le</strong> transport possib<strong>le</strong> d’un être mathématique par une transformationf quelconque :f ∗( être mathématique) = <strong>le</strong> même être vu autrement,transport qui préserve la nature abstraite généra<strong>le</strong> <strong>de</strong> l’être en spécifiantseu<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>s mo<strong>de</strong>s généraux par <strong>le</strong>squels il se voit déterminé, re-déterminé,<strong>et</strong> déterminé à nouveau. I<strong>de</strong>ntité, symétrie <strong>et</strong> transitivité : par un acte <strong>de</strong> penséeréduit à sa plus simp<strong>le</strong> expression, l’homogénéité ontologique du symbo<strong>le</strong><strong>de</strong> transformation :f ∗(f∗ (·) ) = (ff) ∗ (·) = f ∗ (·),garantit la permanence <strong>de</strong> c<strong>et</strong> être, <strong>de</strong> tous ces êtres.40 En adm<strong>et</strong>tant <strong>le</strong>s relocalisations libres, on évite notamment <strong>de</strong> se confronter audiffici<strong>le</strong> problème <strong>de</strong> trouver <strong>de</strong>s formes norma<strong>le</strong>s pour un unique champ <strong>de</strong> vecteuranalytique X au voisinage d’un point où tous ses coefficients s’annu<strong>le</strong>nt, une questiontoujours non résolue <strong>et</strong> probab<strong>le</strong>ment non résolub<strong>le</strong> en toute généralité, mêmeen dimension n = 2. Au contraire, d’après <strong>le</strong> théorème <strong>de</strong> redressement local p. 108toute transformation infinitésima<strong>le</strong> non i<strong>de</strong>ntiquement nul<strong>le</strong> relocalisée en un pointgénérique est loca<strong>le</strong>ment équiva<strong>le</strong>nt à une unique forme norma<strong>le</strong> :∂∂x 1.


158 3.9. Le problème <strong>de</strong> la classification <strong>de</strong>s groupesMais <strong>le</strong> subjectif pour soi <strong>de</strong> la pensée perceptive accentue <strong>le</strong>s exigences<strong>de</strong> la saisie. Le subjectif biologique du perceptif biologique structure eneff<strong>et</strong> fortement la nature désirée <strong>de</strong> toute saisie par la pensée. Le champ mathématiquedoit se restructurer en accord avec une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> impérieuse d’immédiat<strong>et</strong>é.Il s’agit <strong>de</strong> capturer, en un même moment d’intuition globa<strong>le</strong>, tous<strong>le</strong>s obj<strong>et</strong>s possib<strong>le</strong>s dans <strong>le</strong>ur individualité propre, clairement <strong>et</strong> distinctement,avec la même n<strong>et</strong>t<strong>et</strong>é que l’œil embrasse dans son champ visuel toutes <strong>le</strong>sfrontières qui coexistent entre centaines <strong>de</strong> régions <strong>de</strong> cou<strong>le</strong>ur. Reproduire <strong>le</strong>perceptif dans <strong>le</strong> champ mathématique, c’est désirer reproduire l’immédiat<strong>et</strong>éimmanente à soi du champ biologique <strong>de</strong> la conscience. Le perceptif chercheà s’incrire dans la pensée, <strong>et</strong> la pensée cherche à s’inscrire dans <strong>le</strong> perceptif :doub<strong>le</strong> circulation étrangère à soi du soi <strong>de</strong> l’être qui pense <strong>et</strong> qui perçoit, aucontact d’une mathématique qui ne pense pas par el<strong>le</strong>-même <strong>et</strong> ne perçoitrien ni en el<strong>le</strong>-même, ni par el<strong>le</strong>-même.


Partie III :Traduction française commentée <strong>et</strong> annotée<strong>Sophus</strong> LIE, unter Mitwirkung von <strong>Friedrich</strong> ENGELTheorie <strong>de</strong>r TransformationsgruppenDritter und l<strong>et</strong>zter Abschnitt, Abtheilung VChapitresDivision 5 : Recherche sur <strong>le</strong>s fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> la géométrie . . . . . . . . . . . . . 159.Chap. 20 : Détermination <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong> R 3 relativement auxquels <strong>le</strong>s paires<strong>de</strong> points possè<strong>de</strong>nt un, <strong>et</strong> un seul invariant, tandis que s > 2 points n’ontpas d’invariant essentiel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 166.Chap. 21 : Critique <strong>de</strong>s recherches helmholtziennes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 220.Chap. 22 : Première solution du problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz . . . . . 260.Chap. 23 : Deuxième solution du problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz . . . . 289.Division 5Recherches sur <strong>le</strong>s fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> la GéométrieEucli<strong>de</strong> a développé la Géométrie « purement géométrique » enpartant d’un certain nombre d’axiomes simp<strong>le</strong>s <strong>et</strong> <strong>de</strong> notions fondamenta<strong>le</strong>sélémentaires, sans utiliser aucun outil analytique. Aussi admirab<strong>le</strong>que soit son système déductif, celui-ci laisse encore cependant quelquepeu à désirer, lorsque l’on considère la façon dont sont employés <strong>le</strong>séléments fondamentaux.Premièrement, on ne saisit pas si <strong>le</strong> système euclidien d’axiomes<strong>et</strong> <strong>de</strong> notions fondamenta<strong>le</strong>s est réel<strong>le</strong>ment compl<strong>et</strong>. Il est en eff<strong>et</strong> maintenantgénéra<strong>le</strong>ment admis qu’au cours <strong>de</strong> ses développements, Eucli<strong>de</strong>a introduit <strong>de</strong>s hypothèses tacites qu’il aurait dû formu<strong>le</strong>r commeaxiomes. Par exemp<strong>le</strong>, l’introduction du concept d’espace à <strong>de</strong>ux dimensions1 repose chez Eucli<strong>de</strong> sur un véritab<strong>le</strong> axiome qu’il n’a pasexplicité.Deuxièmement, on peut s’imaginer que certains <strong>de</strong>s axiomes euclidienssont superflus, c’est-à-dire qu’ils pourraient être démontrés àpartir <strong>de</strong>s définitions <strong>et</strong> axiomes précé<strong>de</strong>nts.1Précisément : « espace <strong>de</strong> type surface », Flächenraum.


160 Division V.Mais au fond, il est beaucoup plus important <strong>de</strong> s’assurer avanttout qu’on possè<strong>de</strong> un système compl<strong>et</strong> <strong>et</strong> suffisant d’axiomes <strong>et</strong> <strong>de</strong> notionsfondamenta<strong>le</strong>s, plutôt que <strong>de</strong> se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r si certains axiomes sontéventuel<strong>le</strong>ment superflus. Tout <strong>de</strong> même, la question <strong>de</strong> savoir jusqu’àquel point <strong>le</strong> système euclidien d’axiomes doit être enrichi ou complétéreste en attente, sans même par<strong>le</strong>r <strong>de</strong> réalisation définitive. Cependant,on s’est préoccupé avec d’autant plus <strong>de</strong> zè<strong>le</strong> <strong>de</strong> la <strong>de</strong>uxième question,que <strong>le</strong>s recherches récentes sur <strong>le</strong>s fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> la Géométrieont seu<strong>le</strong>ment été incitées à étudier la question <strong>de</strong> la démontrabilité ou<strong>de</strong> la non-démontrabilité du onzième axiome d’Eucli<strong>de</strong> : <strong>le</strong> postulat <strong>de</strong>sparallè<strong>le</strong>s.Après que plusieurs mathématiciens, notamment Legendre, ont effectué<strong>de</strong> nombreuses tentatives infructueuses pour démontrer l’axiome<strong>de</strong>s parallè<strong>le</strong>s, Lobatchevskiĭ (1829) tout d’abord <strong>et</strong> peu après Bólyai(1832) ont réussi à exposer indirectement la non-démontrabilité <strong>de</strong>l’axiome <strong>de</strong>s parallè<strong>le</strong>s, à savoir, en laissant une géométrie se construire,dans laquel<strong>le</strong> l’axiome <strong>de</strong>s parallè<strong>le</strong>s n’est pas du tout utilisé. D’après<strong>de</strong>s l<strong>et</strong>tres anciennes <strong>de</strong> Gauss, qui ne furent à vrai dire publiées que trèstardivement, il ressort que Gauss était déjà parvenu <strong>de</strong>puis longtemps à<strong>de</strong>s résultats similaires.Aujourd’hui, on doit véritab<strong>le</strong>ment s’étonner que <strong>le</strong>s mathématiciensaient dû s’éclairer sur la nécessité <strong>de</strong> l’axiome <strong>de</strong>s parallè<strong>le</strong>s seu<strong>le</strong>mentpar un tel détour, alors qu’un seul coup d’œil sur la surface d’unesphère aurait pu <strong>le</strong>ur montrer qu’une géométrie libre <strong>de</strong> contradictionest aussi possib<strong>le</strong> sans l’axiome <strong>de</strong>s parallè<strong>le</strong>s, une géométrie qui satisfaiten tout cas <strong>le</strong>s axiomes introduits précé<strong>de</strong>mment par Eucli<strong>de</strong>, àl’intérieur d’un domaine choisi convenab<strong>le</strong>ment.Lobatchevskiĭ <strong>et</strong> Bólyai ont entièrement développé <strong>le</strong>ur géométrieà la manière d’Eucli<strong>de</strong>, i.e. <strong>de</strong> façon purement géométrique. <strong>Riemann</strong>fut <strong>le</strong> premier à employer <strong>de</strong>s instruments analytiques, afin d’en tirer<strong>de</strong>s éclaircissements sur <strong>le</strong>s fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> la Géométrie. Malheureusement,nous ne possédons <strong>de</strong> sa main aucune présentation détaillée <strong>de</strong> sesrecherches, <strong>et</strong> nous <strong>de</strong>vons nous en rem<strong>et</strong>tre aux explications fort succinctes<strong>et</strong> souvent diffici<strong>le</strong>s à comprendre que contient sa soutenanced’habilitation <strong>de</strong> 1854.<strong>Riemann</strong> place au tout début <strong>de</strong> ses recherches la propositiond’après laquel<strong>le</strong> l’espace est une variété numérique, partant que <strong>le</strong>spoints <strong>de</strong> l’espace peuvent être repérés par <strong>de</strong>s coordonnées. <strong>Ens</strong>uite,


Remarques préliminaires 161il <strong>de</strong>man<strong>de</strong> quel<strong>le</strong>s propriétés doivent être attribuées à c<strong>et</strong>te variété numériquepour qu’el<strong>le</strong> représente la géométrie euclidienne, ou bien uneautre géométrie semblab<strong>le</strong>. La réponse à c<strong>et</strong>te question est manifestementun problème purement analytique, qui peut être résolu en tant qu<strong>et</strong>el.Cependant, la véritab<strong>le</strong> signification <strong>de</strong> la proposition d’après laquel<strong>le</strong>l’espace est une variété numérique ne ressort pas du travail <strong>de</strong><strong>Riemann</strong>. <strong>Riemann</strong> cherche à démontrer c<strong>et</strong>te proposition, mais sa démonstrationne peut pas être prise au sérieux. Si l’on veut véritab<strong>le</strong>mentdémontrer que l’espace est une variété numérique, on <strong>de</strong>vra, à n’en pasdouter, postu<strong>le</strong>r auparavant un nombre non négligeab<strong>le</strong> d’axiomes, cedont il semb<strong>le</strong> que <strong>Riemann</strong> n’ait pas été conscient. Il faut cependantprendre en considération <strong>le</strong> fait que par l’introduction <strong>de</strong>s variétés numériques,il importait à <strong>Riemann</strong> <strong>de</strong> donner une version purement analytiquedu problème, <strong>et</strong> il faut faire observer que <strong>le</strong>s hypothèses justifiantla possibilité d’introduire au commencement <strong>le</strong>s variétés numériquesn’étaient pour lui qu’accessoires.Ajoutons à cela que son étu<strong>de</strong> constituait une soutenance ora<strong>le</strong>[Probevor<strong>le</strong>sung], <strong>et</strong> qu’el<strong>le</strong> n’était pas <strong>de</strong>stinée à l’impression ; s’ilavait voulu lui-même la publier, il l’aurait sûrement écrite d’une toutautre manière.Du reste, l’introduction du concept <strong>de</strong> variété numérique dans<strong>le</strong>s recherches sur <strong>le</strong>s fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> la Géométrie ne possè<strong>de</strong> en rienun caractère arbitraire, mais s’inscrit objectivement dans l’essence <strong>de</strong>schoses. En eff<strong>et</strong>, en ce qui concerne l’édification <strong>de</strong> la Géométrie, ilfaut distinguer plusieurs niveaux. L’un d’entre eux est indépendant aussibien <strong>de</strong> l’axiome <strong>de</strong>s parallè<strong>le</strong>s, que du concept intrinsèque <strong>de</strong> surface[Flächeninhalt] <strong>et</strong> <strong>de</strong> celui <strong>de</strong>s nombres irrationnels. Mais il y a aussi<strong>de</strong>s niveaux plus é<strong>le</strong>vés, entre autres, un niveau où l’on ne peut pas élu<strong>de</strong>r<strong>le</strong> concept <strong>de</strong> nombre irrationnel <strong>et</strong> où on doit en tout cas introduireà titre d’axiome <strong>le</strong> fait que la droite soit une variété numérique. M. G.Cantor est <strong>le</strong> premier à avoir été confronté à la nécessité d’introduire unaxiome <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te sorte, si l’on souhaite pousser l’édification <strong>de</strong> la Géométriejusqu’à son achèvement.<strong>Riemann</strong> fon<strong>de</strong> la géométrie <strong>de</strong>s variétés numériques sur <strong>le</strong>concept <strong>de</strong> longueur d’un élément courbe [Bogene<strong>le</strong>ment], dontdécou<strong>le</strong> par intégration <strong>le</strong> concept <strong>de</strong> longueur d’une ligne finie. Il<strong>de</strong>man<strong>de</strong> que <strong>le</strong> carré <strong>de</strong> la longueur d’un élément courbe soit unefonction complètement homogène du second <strong>de</strong>gré par rapport auxdifférentiel<strong>le</strong>s <strong>de</strong>s coordonnées ; en ajoutant, entre autres, l’exigence


162 Division V.que chaque ligne arbitraire puisse être déplacée sans modifier salongueur, <strong>Riemann</strong> est alors parvenu à ce résultat qu’en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>la géométrie euclidienne, seu<strong>le</strong>ment <strong>de</strong>ux autres géométries sontpossib<strong>le</strong>s. Parmi ces <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rnières, l’une s’i<strong>de</strong>ntifie à cel<strong>le</strong> qui a étéréalisée par Lobatchevskiĭ, <strong>et</strong> l’autre correspond à la géométrie inscritesur la surface d’une sphère.Avant toute chose, du point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> l’Analyse, <strong>le</strong>s recherches<strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> sur la longueur d’un élément courbe — qu’il n’a toutefoisqu’esquissées — sont du plus haut intérêt ; entre autres, el<strong>le</strong>s ont vraisemblab<strong>le</strong>mentdonné l’impulsion aux développements que MessieursLipschitz <strong>et</strong> Christoffel ont entrepris ultérieurement (<strong>de</strong>puis 1870) sur<strong>le</strong>s expressions différentiel<strong>le</strong>s du second <strong>de</strong>gré, Monsieur Lipschitzayant en tout cas poursuivi au cours du développement <strong>de</strong> sa théoriel’objectif <strong>de</strong> trancher en même temps quant à la justesse <strong>de</strong>s considérations<strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>. Mais on ne peut pas nier que <strong>le</strong>s assertions <strong>de</strong><strong>Riemann</strong> ne fournissent que peu d’éclaircissements sur l’obj<strong>et</strong> véritab<strong>le</strong><strong>de</strong> la recherche, i.e. sur <strong>le</strong>s fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> la Géométrie. Les axiomes<strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> se réfèrent en eff<strong>et</strong> tous à la longueur d’un élément courbe,donc seu<strong>le</strong>ment aux propriétés <strong>de</strong> l’espace dans l’infinitésimal ; si l’onveut en déduire quelque chose quant à la constitution <strong>de</strong> l’espace àl’intérieur d’une région d’extension finie, on <strong>de</strong>vra d’abord effectuerune intégration. Mais puisque <strong>le</strong>s axiomes qui doivent servir à l’édificationd’une Géométrie purement géométrique doivent nécessairementêtre élémentaires, <strong>et</strong> puisque ni <strong>le</strong> concept <strong>de</strong> longueur d’un élémentcourbe ni celui d’intégration ne sont élémentaires, il est clair que <strong>le</strong>saxiomes <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> sont inutilisab<strong>le</strong>s pour un tel objectif.Dans son travail célèbre *<strong>de</strong> l’année 1868, M. <strong>de</strong> Helmholtzs’est soustrait, quoique <strong>de</strong> manière inconsciente, aux insuffisances <strong>de</strong>saxiomes riemanniens dont nous venons justement <strong>de</strong> discuter, notammentlorsqu’il postula certains axiomes se référant à un nombre fini<strong>de</strong> points éloignés <strong>le</strong>s uns <strong>de</strong>s autres, <strong>et</strong> lorsqu’il tenta d’en déduirel’axiome <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> sur la longueur d’un élément courbe.M. <strong>de</strong> Helmholtz place expressément en première positionl’axiome d’après <strong>le</strong>quel l’espace est une variété numérique ; ceciconstitue un progrès par rapport à <strong>Riemann</strong>, bien que, à vrai dire, M.<strong>de</strong> Helmholtz s’enquière lui aussi <strong>de</strong> la portée <strong>de</strong> c<strong>et</strong> axiome lorsque,à la fin <strong>de</strong> son travail (à la page 221), il affirme que l’axiome posé par*« Sur <strong>le</strong>s faits qui se trouvent au fon<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> la Géométrie », Gött. Nachr.1868, pp. 193–221 ; voir aussi ses œuvres scientifiques complètes, Tome II, pp. 618–639.


Remarques préliminaires 163lui « <strong>de</strong>man<strong>de</strong> d’en accepter moins que ce que l’on présuppose dans <strong>le</strong>sdémonstrations géométriques que l’on conduit ordinairement ». Maisc<strong>et</strong>te affirmation est tota<strong>le</strong>ment fausse, d’autant plus que <strong>le</strong>s autresaxiomes helmholtziens renferment <strong>de</strong>s présuppositions superflues.Un progrès supplémentaire en comparaison avec <strong>Riemann</strong> consisteen ce que M. <strong>de</strong> Helmholtz opère directement avec la famil<strong>le</strong> <strong>de</strong>s mouvements<strong>de</strong> l’espace, tout en l’interprétant comme famil<strong>le</strong> <strong>de</strong>s transformations<strong>de</strong> la variété numérique concernée ; il exécute même unefois <strong>de</strong>ux tels mouvements l’un après l’autre <strong>et</strong> il m<strong>et</strong> à profit <strong>le</strong> faitque ces <strong>de</strong>ux mouvements pris ensemb<strong>le</strong> peuvent être substitués à untroisième mouvement ; il fait donc en quelque sorte usage <strong>de</strong>s caractérististiques<strong>de</strong> type « groupe » que possè<strong>de</strong>nt <strong>le</strong>s mouvements, sanscependant connaître <strong>le</strong> concept général <strong>de</strong> groupe.Même si <strong>le</strong> travail <strong>de</strong> Helmholtz, quant à ses hypothèses, marqueun certain progrès par rapport aux recherches plus anciennes <strong>de</strong><strong>Riemann</strong>, on ne doit cependant pas ignorer que <strong>le</strong> travail <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>ne lui cè<strong>de</strong> en rien quant à la va<strong>le</strong>ur mathématique. En eff<strong>et</strong>, tandis qu’ils’est avéré que la métho<strong>de</strong> esquissée par <strong>Riemann</strong> pouvait réel<strong>le</strong>ment sedéduire <strong>de</strong>s propositions énoncées par lui, nous verrons ultérieurementque <strong>le</strong>s ressources analytiques dont Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz s’estservi ne sont pas suffisantes pour atteindre l’objectif, <strong>et</strong> qu’au cours<strong>de</strong> ses recherches, Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz introduit toute une séried’hypothèses incorrectes.Si nous embrassons <strong>le</strong>s pensées communes qui se trouvent au fon<strong>de</strong>ment<strong>de</strong>s considérations <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Helmholtz, nouspouvons dire que <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux chercheurs ont posé un problème <strong>de</strong> typenouveau, quoiqu’ils ne l’aient fait que <strong>de</strong> manière implicite, problèmeque nous souhaitons appe<strong>le</strong>r « Problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz * », <strong>et</strong>qui peut s’énoncer brièvement comme suit : Trouver <strong>de</strong>s propriétés quiperm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong> distinguer non seu<strong>le</strong>ment la famil<strong>le</strong> <strong>de</strong>s mouvements euclidiens,mais aussi <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux famil<strong>le</strong>s <strong>de</strong> mouvements non-euclidiens,<strong>et</strong> grâce auxquel<strong>le</strong>s ces trois famil<strong>le</strong>s apparaîtront alors comme remarquab<strong>le</strong>spar rapport à toutes <strong>le</strong>s autres famil<strong>le</strong>s <strong>de</strong> mouvements d’unevariété numérique.*Au fond, <strong>le</strong> problème provient plutôt véritab<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> lui-même. Nouscroyons cependant que notre appellation du problème est tout à fait légitime, car M. <strong>de</strong>Helmholtz est <strong>le</strong> premier à avoir révélé que <strong>le</strong> problème n’avait pas du tout été résolupar la théorie <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>. Une formulation véritab<strong>le</strong> du problème n’a été fournie paraucun <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux auteurs.


164 Division V.Lorsqu’en 1869, <strong>Lie</strong> a communiqué à son ami F. K<strong>le</strong>in ses premièresrecherches sur <strong>le</strong>s groupes continus, K<strong>le</strong>in a attiré très tôt l’attention<strong>de</strong> <strong>Lie</strong> sur <strong>le</strong>s recherches <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong> Helmholtz, en soulignantque <strong>le</strong> concept <strong>de</strong> groupe continu y jouait un rô<strong>le</strong> implicite (cf.<strong>le</strong>mémoire <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> dans <strong>le</strong> tome 16 <strong>de</strong>s Math. Ann., p. 527). Mais c’estseu<strong>le</strong>ment au cours <strong>de</strong> l’année 1884 qu’à la suite <strong>de</strong>s invitations renouvelées<strong>de</strong> K<strong>le</strong>in, <strong>Lie</strong> a entrepris <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre strictement à l’épreuve <strong>le</strong>sréalisations helmholtziennes <strong>et</strong> d’apporter un traitement approfondi auproblème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz dans l’espace ordinaire à trois dimensions,au moyen <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong>s groupes. <strong>Lie</strong> n’a rencontré à c<strong>et</strong> égardaucune difficulté, sachant qu’il avait déjà déterminé <strong>de</strong>puis longtempstous <strong>le</strong>s groupes continus finis <strong>de</strong> c<strong>et</strong> espace. <strong>Lie</strong> a tout d’abord faitconnaître <strong>le</strong>s résultats <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te recherche dans <strong>le</strong> Leipziger Berichtenen 1886, sans que <strong>le</strong>ur déduction soit accompagnée <strong>de</strong>s calculs nécessaires.<strong>Ens</strong>uite, dans <strong>de</strong>ux gros mémoires <strong>de</strong> l’année 1890, parus éga<strong>le</strong>mentdans <strong>le</strong> Leipziger Berichten, non seu<strong>le</strong>ment il formula une critiquedétaillée <strong>de</strong>s développements helmholtziens, mais encore, ce qui constituait<strong>le</strong> but principal <strong>de</strong> tout ce travail, il apporta plusieurs nouvel<strong>le</strong>ssolutions au problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz.Les chapitres qui suivent constituent un remaniement <strong>et</strong> en partie<strong>de</strong>s compléments aux travaux sus-mentionnés, que <strong>Lie</strong> a publiés à cesuj<strong>et</strong>.Le Chapitre 20 contient certaines théories qui seront exposées aumieux pour el<strong>le</strong>s-mêmes, avant que nous rendions compte <strong>de</strong>s développementshelmholtziens. Une partie <strong>de</strong>s axiomes qui ont été poséspar Helmholtz peut en eff<strong>et</strong> s’exprimer, comme nous <strong>le</strong> verrons, <strong>de</strong> lafaçon suivante : la totalité <strong>de</strong>s mouvements constitue un groupe, <strong>et</strong> relativementà ce groupe, <strong>de</strong>ux points possè<strong>de</strong>nt un <strong>et</strong> un seul invariant,tandis que tous <strong>le</strong>s invariants d’un nombre <strong>de</strong> points supérieur à <strong>de</strong>uxpeuvent s’exprimer comme fonctions <strong>de</strong>s invariants <strong>de</strong> paires <strong>de</strong> points.Afin <strong>de</strong> mesurer la portée <strong>de</strong>s axiomes helmholtziens, il faut connaîtreà l’avance tous <strong>le</strong>s groupes qui satisfont précisément à c<strong>et</strong>te exigence,<strong>et</strong> puisque c<strong>et</strong>te tâche, déjà importante en el<strong>le</strong> même, qui consiste à déterminertous ces groupes, ne peut pas être accomplie sans quelquesdépenses <strong>de</strong> calcul, il semb<strong>le</strong> recommandé d’entreprendre spécia<strong>le</strong>mentune tel<strong>le</strong> détermination.Dans <strong>le</strong> Chapitre 21, nous formu<strong>le</strong>rons une critique détaillée <strong>de</strong>saxiomes <strong>et</strong> <strong>de</strong>s résultats exposés par Helmholtz. <strong>Ens</strong>uite, dans <strong>le</strong>s Chapitres22 <strong>et</strong> 23, nous exposerons différentes solutions du problème <strong>de</strong>


Remarques préliminaires 165<strong>Riemann</strong>-Helmholtz, dans l’espace ordinaire <strong>et</strong> dans l’espace n foisétendu. Enfin, dans <strong>le</strong> Chapitre 24, nous discuterons <strong>et</strong> nous critiqueronsquelques recherches récentes sur <strong>le</strong>s fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> la Géométrie.Nous ne pouvons pas conclure ces remarques préliminaires sanssouligner expressément que <strong>le</strong>s recherches qui vont suivre n’ont pas laprétention <strong>de</strong> constituer <strong>de</strong>s spéculations philosophiques sur <strong>le</strong>s fon<strong>de</strong>ments<strong>de</strong> la Géométrie ; el<strong>le</strong>s ont seu<strong>le</strong>ment pour obj<strong>et</strong> d’apporterun traitement soigné <strong>de</strong> type « théorie <strong>de</strong>s groupes » à ce problème <strong>de</strong>la théorie <strong>de</strong>s groupes 2 que nous avons appelé Problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. À la fin <strong>de</strong> la présente Division V, nous évoquerons <strong>le</strong> bénéficeque la résolution <strong>de</strong> ce problème peut apporter à l’édification d’unsystème <strong>de</strong> Géométrie.Même si nous n’entreprenons pas ici une tel<strong>le</strong> tentative, noussouhaitons toutefois exprimer comme étant notre conviction profon<strong>de</strong>,l’opinion d’après laquel<strong>le</strong> il n’est nul<strong>le</strong>ment impossib<strong>le</strong> <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre surpied un système d’axiomes géométriques qui soit suffisant <strong>et</strong> ne renfermepas <strong>de</strong> condition superflue. Malheureusement, on doit indubitab<strong>le</strong>mentreconnaître qu’il n’existe que très peu <strong>de</strong> recherches qui ontvéritab<strong>le</strong>ment développé <strong>le</strong>s fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> la Géométrie.2 Certainement intentionnel<strong>le</strong>, la redondance est explicite : Eine sorgfältige gruppentheor<strong>et</strong>ischeBehandlung <strong>de</strong>s gruppentheor<strong>et</strong>ischen Prob<strong>le</strong>ms, das wir als das<strong>Riemann</strong>-Helmholtzsche Prob<strong>le</strong>m bezeich<strong>et</strong> haben.


Chapitre 20.Détermination <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong> R 3 relativement auxquels<strong>le</strong>s paires <strong>de</strong> points possè<strong>de</strong>nt un, <strong>et</strong> un seul invariant,tandis que s > 2 points n’ont pas d’invariant essentiel.Les développements du présent chapitre se rattachent au §59 duTome I (p. 218 sq.). À ce moment-là, nous 1 avons introduit <strong>le</strong> conceptd’invariant <strong>de</strong> plusieurs points <strong>et</strong> maintenant, nous voulons déterminertous <strong>le</strong>s groupes continus finis <strong>de</strong> R 3 qui satisfont certaines exigencesquant aux invariants d’un nombre quelconque fini <strong>de</strong> points. Notamment,<strong>de</strong>ux points doivent avoir un <strong>et</strong> un seul invariant relativement àchaque tel groupe, tandis que tous <strong>le</strong>s invariants <strong>de</strong> s > 2 points doiventtoujours pouvoir s’exprimer comme fonctions <strong>de</strong>s invariants <strong>de</strong>s paires<strong>de</strong> points qui sont comprises dans ces s points. Si, en concordance avec<strong>le</strong> Tome I, p. 219, nous disons qu’un invariant <strong>de</strong> s points est essentiels’il ne peut pas être exprimé au moyen <strong>de</strong>s invariants d’un sous-sytème<strong>de</strong> s − 1 (voire moins) points, alors nous pouvons énoncer notre problème(qui se trouve déjà exprimé dans <strong>le</strong> titre du chapitre) <strong>de</strong> la manièresuivante :Déterminer tous <strong>le</strong>s groupes continus finis <strong>de</strong> R 3 relativementauxquels <strong>de</strong>ux points possè<strong>de</strong>nt un <strong>et</strong> un seul invariant, tandis qu’unnombre <strong>de</strong> points supérieur à <strong>de</strong>ux n’a jamais d’invariant essentiel.Nous allons d’abord résoudre ce problème sans tenir compte <strong>de</strong>la condition <strong>de</strong> réalité. Par conséquent, nous allons chercher en premierlieu tous <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations comp<strong>le</strong>xes qui possè<strong>de</strong>ntla propriété indiquée, <strong>et</strong> plus tard seu<strong>le</strong>ment, nous résoudrons aussi <strong>le</strong>problème pour <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations réels * .Nous nous sommes déjà expliqués p. 397 sq. sur <strong>le</strong>s raisons quinous ont poussés à placer ce chapitre en position préliminaire, avant <strong>de</strong>1 Ambiguïté éventuel<strong>le</strong>, ici, sur <strong>le</strong> « nous », qui pourrait aussi bien renvoyer à unimpersonnel mathématique qu’au duo <strong>de</strong> rédacteurs formé par <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong>.* En 1886, <strong>Lie</strong> a déjà esquissé dans <strong>le</strong> Leipziger Berichten, p. 337 sq., <strong>le</strong>s résultatsqui alimentent <strong>le</strong> présent chapitre ; début 1890, il en a donné <strong>de</strong>s démonstrationsdétaillées (ib., pp. 355–418). Ce qui suit est un remaniement <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière étu<strong>de</strong>.


Groupes <strong>de</strong> R 3 pour <strong>le</strong>squels <strong>de</strong>ux points ont un seul invariant. 167passer aux recherches proprement dites sur <strong>le</strong>s fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> la Géométrie.§ 85.Propriétés caractéristiques <strong>de</strong>s groupes recherchés.Soit :X k f = ξ k (x, y, z) p + η k (x, y, z) q + ζ k (x, y, z) r(k = 1 ···m)un groupe 1 à m paramètres 2 possédant la constitution exigée. Si ensuite :(1) x 1 , y 1 , z 1 ; x 2 , y 2 , z 2 ; . . ....; x s , y s , z ssont s points arbitraires 3 <strong>de</strong> R 3 <strong>et</strong> si nous posons :ξ k (x ν , y ν , z ν ) p ν + η k (x ν , y ν , z ν ) q ν + ζ k (x ν , y ν , z ν ) r ν = X (ν)k f,alors premièrement, <strong>le</strong>s m équations linéaires aux dérivées partiel<strong>le</strong>s :(2) X (1)k f + X(2) kf = 0 (k =1··· m)en <strong>le</strong>s six variab<strong>le</strong>s : x 1 , y 1 , z 1 , x 2 , y 2 , z 2 doivent possé<strong>de</strong>r en communune <strong>et</strong> une seu<strong>le</strong> solution 4 :(3) J ( x 1 , y 1 , z 1 ; x 2 , y 2 , z 2);<strong>et</strong> <strong>de</strong>uxièmement, lorsque s > 2, toutes <strong>le</strong>s solutions communes <strong>de</strong>s méquations :(4) X (1)k f + X(2) k f + · · · + X(s) f = 0 (k =1··· m)1 Tout groupe <strong>de</strong> transformations fini <strong>et</strong> continu est systématiquement i<strong>de</strong>ntifiépar <strong>Lie</strong> à un système <strong>de</strong> générateurs infinitésimaux clos par croch<strong>et</strong>s.2 Le texte al<strong>le</strong>mand imprimé comporte ici l’une <strong>de</strong>s très rares coquil<strong>le</strong>s <strong>de</strong> tout<strong>le</strong> traité (Tomes I, II <strong>et</strong> III), <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> ayant noté par réf<strong>le</strong>xe r au lieu <strong>de</strong> m cenombre <strong>de</strong> paramètres (nous rectifions), comme ils ont l’habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>le</strong> faire lorsqu’ilsenvisagent un groupe continu général, mais dans ce chapitre, la l<strong>et</strong>tre r n’est plus autorisée,car el<strong>le</strong> entrerait en confusion avec la troisième transformation infinitésima<strong>le</strong><strong>de</strong> l’espace, traditionnel<strong>le</strong>ment notée r = ∂f∂z .3 Ici, R 3 désigne l’espace à trois dimensions, en fait comp<strong>le</strong>xe : c’est C 3 , <strong>et</strong> nonR 3 . <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> travail<strong>le</strong>nt toujours d’abord sur C (sans <strong>le</strong> préciser), puis sur R (en <strong>le</strong>précisant), mais ils notent à nouveau R 3 (ou R n ) l’espace réel.4 Plus précisément, la solution généra<strong>le</strong> du système (2) est nécessairement unefonction arbitraire <strong>de</strong> l’unique invariant J, <strong>de</strong> la forme Φ ( J(x 1 , y 1 , z 1 ; x 2 , y 2 , z 2 ) ) , oùΦ est une fonction arbitraire. En permutant <strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s (x 1 , y 1 , z 1 ) <strong>et</strong> (x 2 , y 2 , z 2 ), <strong>le</strong>séquations (2) restent inchangées, donc J(x 2 , y 2 , z 2 ; x 1 , y 1 , z 1 ) est aussi une solution<strong>de</strong> (2), mais non essentiel<strong>le</strong>, puisqu’el<strong>le</strong> est <strong>de</strong> la forme Φ ( J(x 1 , y 1 , z 1 ; x 2 , y 2 , z 2 ) ) .k


168 Division V. Chapitre 20. § 85.en <strong>le</strong>s 3s variab<strong>le</strong>s x k , y k , z k doivent se laisser exprimer au moyen <strong>de</strong>ss(s−1)fonctions 5 :1 ·2(5) J ( )x λ , y λ , z λ ; x µ , y µ , z µ (λ =1··· s−1; µ=λ+1··· s).Avant toute chose, il faut remarquer que chaque groupe possédantla constitution exigée 6 doit être transitif. En eff<strong>et</strong>, si <strong>le</strong> groupe :X 1 f . . .X m f était intransitif, <strong>le</strong>s équations :X k f = 0(k = 1 ···m)auraient déjà en tout cas une solution commune, <strong>et</strong> <strong>le</strong>s équations (2) possè<strong>de</strong>raientalors au minimum <strong>de</strong>ux solutions communes indépendantes 7 ,en contradiction avec notre exigence.Afin <strong>de</strong> trouver encore d’autres propriétés <strong>de</strong>s groupes recherchés,rappelons que <strong>le</strong>s 8 m transformations infinitésima<strong>le</strong>s :(6) X (1)k f + X(2) k f + · · · + X(s)k f(k = 1 ···m)produisent un groupe à m paramètres en <strong>le</strong>s 3s variab<strong>le</strong>s (1), <strong>le</strong>quelindique comment <strong>le</strong> système <strong>de</strong>s s points (1) <strong>de</strong> R 3 est transformé par<strong>le</strong> groupe : X 1 f . . .X m f. En outre, nous avons l’intention <strong>de</strong> supposerque <strong>le</strong>s s points (1) soient non seu<strong>le</strong>ment chacun en position généra<strong>le</strong>vis-à-vis du groupe : X 1 f . . .X m f, mais encore soient mutuel<strong>le</strong>ment enposition généra<strong>le</strong> 9 , <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que <strong>le</strong> système <strong>de</strong>s va<strong>le</strong>urs (1) soit enposition généra<strong>le</strong> vis-à-vis du groupe (6).Sous ces hypothèses, on peut faci<strong>le</strong>ment embrasser d’un coupd’œil [ÜBERSEHEN] quel<strong>le</strong>s sont toutes <strong>le</strong>s positions nouvel<strong>le</strong>s que <strong>le</strong>système <strong>de</strong>s s points (1) peut prendre à travers <strong>le</strong>s transformations dugroupe (6) ; en eff<strong>et</strong>, d’après <strong>le</strong> Tome I, p. 216, la mobilité généra<strong>le</strong> <strong>de</strong>ces systèmes <strong>de</strong> points n’est limitée par aucune autre condition 10 que la5 Ici, 1 λ < µ s, car <strong>le</strong>s autres fonctions sont <strong>de</strong>s invariants non essentiels.6Pour l’instant, <strong>le</strong>s groupes sont inconnus. Le Théorèmes 37 (sur R) p. 215 fournirala liste <strong>de</strong>s onze groupes réels répondant au problème posé.7 Si ϕ(x, y, z) est une solution non constante du système X 1 f = · · · = X m f =0, alors ϕ(x 1 , y 1 , z 1 ) <strong>et</strong> ϕ(x 2 , y 2 , z 2 ) sont <strong>de</strong>ux solutions indépendantes <strong>de</strong> (2).8 Secon<strong>de</strong> inadvertance du texte imprimé, que nous rectifions à nouveau, maisqui ne se reproduira plus.9 Être mutuel<strong>le</strong>ment en position généra<strong>le</strong>, pour un système <strong>de</strong> s points p 1 , . . . , p s<strong>de</strong> R 3 signifie simp<strong>le</strong>ment que <strong>le</strong> point produit (p 1 , . . . , p s ) dans R 3s soit en positiongénéra<strong>le</strong>.10 À l’endroit cité, il a été établi qu’à un groupe quelconque <strong>de</strong> transformationsX 1 f, . . . , X m f à m paramètres agissant sur un espace (x 1 , . . . , x n ) <strong>de</strong> dimensionn quelconque est toujours attaché, loca<strong>le</strong>ment au voisinage d’un point générique,un nombre déterminé n − q (éventuel<strong>le</strong>ment nul) <strong>de</strong> fonctions indépendantes


Groupes <strong>de</strong> R 3 pour <strong>le</strong>squels <strong>de</strong>ux points ont un seul invariant. 169condition que chaque invariant du groupe doit conserver la même va<strong>le</strong>urnumérique pour toutes <strong>le</strong>s positions du système <strong>de</strong> points. Si nousnotons alors x ′ k , y′ k , z′ k la position que prend <strong>le</strong> point x k, y k , z k après un<strong>et</strong>ransformation quelconque du groupe : X 1 f . . .X m f <strong>et</strong> si nous nousrappelons que tous <strong>le</strong>s invariants du groupe (6) doivent pouvoir êtreexprimés au moyen <strong>de</strong>s invariants (5), nous reconnaissons par conséquentque <strong>le</strong>s s points (1) peuvent se transformer 11 en tous <strong>le</strong>s points 12 :x ′ k , y′ k , z′ k (k = 1 . . .s) qui satisfont <strong>le</strong>s équations :{ ( ( )J x′λ , y λ, ′ z λ; ′ x ′ µ, y µ, ′ z µ) ′ = J xλ , y λ , z λ ; x µ , y µ , z µ(7)(λ = 1 ··· s − 1; µ=λ+1··· s),<strong>et</strong> qui sont procurés <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que <strong>le</strong> système <strong>de</strong> va<strong>le</strong>urs :(1’) x ′ 1 , y′ 1 , z′ 1 : x′ 2 , y′ 2 , z′ 2 ; . . .; x′ s , y′ s , z′ sreste dans un certain voisinage du système <strong>de</strong> va<strong>le</strong>urs (1).Si nous fixons 13 maintenant <strong>le</strong>s s − 1 premiers points (1) :x ′ k = x k, y ′ k = y k, z ′ k = z k(k = 1 ···s −1),alors <strong>le</strong>s conditions (7) pour <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s λ <strong>et</strong> µ sont tous <strong>de</strong>ux < s sontsatisfaites automatiquement, <strong>et</strong> il ne reste plus que <strong>le</strong>s s −1 conditions :{ ( ( )J xλ , y λ , z λ ; x ′ s, y s, ′ z s) ′ = J xλ , y λ , z λ ; x s , y s , z s(8)(λ = 1,2··· s − 1),Ω 1 (x), . . . , Ω n−q (x) découpant l’espace en <strong>le</strong> feuill<strong>et</strong>age :Ω 1 (x) = const 1 , . . . , Ω n−q (x) = const n−qqui reste stab<strong>le</strong> par l’action du groupe. Alors l’action du groupe est loca<strong>le</strong>ment transitiveen famil<strong>le</strong> sur <strong>le</strong>s feuil<strong>le</strong>s Ω k (x) = const k , k = 1, . . . , n − q. De plus, l’exigencehelmholtzienne reformulée abstraitement par <strong>Lie</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong> que <strong>le</strong>s positions(x ′ 1, . . . , x ′ n) que peut prendre (x 1 , . . . , x n ) par l’action du groupe soient entièrementdéterminées par <strong>le</strong>s fonctions invariantes J, <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s satisfont J(x ′ 1 , . . . , x′ n ) =J(x 1 , . . . , x n ) pour toute transformation finie x ′ i = f i (x 1 , . . . , x n ; a 1 , . . . , a m ) dugroupe recherché.11 Les s points p 1 , . . . , p s mutuel<strong>le</strong>ment en position généra<strong>le</strong> <strong>de</strong> coordonnées(x λ , y λ , z λ ), λ = 1, . . .,s, sont transformés par <strong>le</strong> groupe (inconnu, que l’on recherche)en <strong>de</strong>s points (x ′ λ , y′ λ , z′ λ) <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte qu’une « pseudodistance » soitconservée : J(p ′ λ , p′ µ) = J(p λ , p µ ), <strong>et</strong> c’est c<strong>et</strong>te seu<strong>le</strong> hypothèse qui va « faire naître »<strong>le</strong>s 11 groupes possib<strong>le</strong>s col<strong>le</strong>ctés dans <strong>le</strong> Théorème 37, p. 215.12 Les points sont représentés par <strong>le</strong>urs coordonnées qui sont <strong>de</strong>s systèmes <strong>de</strong>va<strong>le</strong>urs.13 Fixer un ou plusieurs points signifie considérer <strong>le</strong> sous-groupe consistant seu<strong>le</strong>menten <strong>le</strong>s transformations ponctuel<strong>le</strong>s qui fixent ce ou ces points.


170 Division V. Chapitre 20. § 85.c’est-à-dire : après fixation <strong>de</strong> ces s − 1 points-là, <strong>le</strong> point x s , y s , z speut encore se transformer en tous <strong>le</strong>s points x ′ s , y′ s , z′ s qui satisfont <strong>le</strong>séquations (8) <strong>et</strong> qui se trouvent dans un voisinage donné <strong>de</strong> x s , y s , z s .Mais puisque <strong>le</strong> groupe : X 1 f . . .X m f est fini, lorsqu’on fixe un nombresuffisant <strong>de</strong> points qui sont mutuel<strong>le</strong>ment en position généra<strong>le</strong>, il doitfina<strong>le</strong>ment se produire <strong>le</strong> cas que tous <strong>le</strong>s points restent généra<strong>le</strong>mentau repos ; par conséquent, <strong>le</strong>s équations (8) doivent être constituées d<strong>et</strong>el<strong>le</strong> sorte que, lorsque s est suffisamment grand, plus aucune famil<strong>le</strong>continue <strong>de</strong> systèmes <strong>de</strong> va<strong>le</strong>urs x ′ s, y s, ′ z s ′ ne <strong>le</strong>s satisfait, <strong>et</strong> qu’on peuten tirer <strong>le</strong>s équations :(9) x ′ s = x s, y ′ s = y s, z ′ s = z s.D’après <strong>le</strong> Tome I, p. 490, ce cas se produit 14 au plus tard lorsque s =m+1, mais nous verrons cependant que sous <strong>le</strong>s hypothèses posées ici,ce cas se produit déjà pour un nombre inférieur 15 à m + 1.Si nous fixons seu<strong>le</strong>ment un point en position généra<strong>le</strong>, parexemp<strong>le</strong> x 1 , y 1 , z 1 , alors chaque autre point x 2 , y 2 , z 2 en position généra<strong>le</strong>peut encore être transformé en <strong>le</strong>s ∞ 2 points 16 x ′ 2, y ′ 2, z ′ 2 qui satisfontl’équation :J ( x 1 , y 1 , z 1 ; x ′ 2 , y′ 2 , z′ 2)= J(x1 , y 1 , z 1 ; x 2 , y 2 , z 2).Et maintenant, comme notre groupe : X 1 f . . .X m f est transitif, aprèsfixation d’un point en position généra<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s paramètres du groupe sontsoumis exactement à trois conditions ; par conséquent <strong>le</strong> point x 2 , y 2 , z 2ne peut évi<strong>de</strong>mment occuper encore ∞ 2 positions que s’il reste encoreau minimum <strong>de</strong>ux paramètres arbitraires ; donc notre groupe possè<strong>de</strong> aumoins cinq paramètres.14 Voici l’argument. Soit G un groupe <strong>de</strong> transformations fini <strong>et</strong> continu comportantm paramètres (essentiels) qui agit sur R n . Il existe au moins un point p 1 enposition généra<strong>le</strong> qui n’est pas fixé par G. Le sous-groupe (d’isotropie) G 1 ⊂ G <strong>de</strong>stransformations qui laissent p 1 au repos a donc m 1 m − 1 paramètres. Si m 1 1,il existe au moins un point p 2 en position généra<strong>le</strong> qui n’est pas fixé par G 1 . Le sousgroupeG 2 ⊂ G 1 <strong>de</strong>s transformations fixant p 2 possè<strong>de</strong> m 2 m 1 − 1 m − 2paramètres, <strong>et</strong>c.15 Les développements ultérieurs montreront que cela se produit en fait déjà pours < 4, meil<strong>le</strong>ure inégalité que s < 7 = m + 1 lorsque m = 6.16 Le symbo<strong>le</strong> courant « ∞ k » dénote <strong>le</strong> nombre k <strong>de</strong> paramètres (réels ou comp<strong>le</strong>xes)dont un obj<strong>et</strong> géométrique (ou analytique) dépend effectivement. Chaque paramètre,susceptib<strong>le</strong> <strong>de</strong> parcourir une infinité <strong>de</strong> va<strong>le</strong>urs continues, compte pour une<strong>et</strong> une seu<strong>le</strong> puissance du symbo<strong>le</strong> « ∞ ».


Groupes <strong>de</strong> R 3 pour <strong>le</strong>squels <strong>de</strong>ux points ont un seul invariant. 171Il est clair qu’après fixation du point : x 1 , y 1 , z 1 , <strong>le</strong>s ∞ 3 points <strong>de</strong>l’espace peuvent se disposer sur <strong>le</strong>s ∞ 1 surfaces invariantes :(10) J ( x 1 , y 1 , z 1 ; x, y, z ) = const.Relativement au groupe à six paramètres <strong>de</strong>s mouvements euclidiens,qui satisfait évi<strong>de</strong>mment toutes <strong>le</strong>s conditions posées à la page 166, ces∞ 1 surfaces-là ne sont autres que <strong>le</strong>s ∞ 1 sphères (10) centrées au point :x 1 , y 1 , z 1 . Afin <strong>de</strong> pouvoir nous exprimer brièvement, nous voulonsdonc appel<strong>le</strong>r simp<strong>le</strong>ment pseudosphères centrées au point x 1 , y 1 , z 1 relativesau groupe : X 1 f . . .X m f <strong>le</strong>s ∞ 1 surfaces (10). <strong>Ens</strong>uite, nouspouvons aussi dire : si un point x 1 , y 1 , z 1 qui est en position généra<strong>le</strong>vis-à-vis du groupe : X 1 f . . .X m f est fixé, alors chaque autre pointen position généra<strong>le</strong> peut se mouvoir sur la pseudosphère centrée enx 1 , y 1 , z 1 passant par lui. La totalité [Inbegriff] <strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>s pseudosphèresexistantes forme naturel<strong>le</strong>ment une famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> surfaces invariantespar <strong>le</strong> groupe 17 : X 1 f . . .X m f. On peut encore mentionner aussique <strong>le</strong>s ∞ 1 pseudosphères (10) peuvent être définies par une équation<strong>de</strong> Pfaff intégrab<strong>le</strong> <strong>de</strong> la forme :(11) α(x 1 , y 1 , z 1 ; x, y, z) dx + β dy + γ dz = 0,qui est obtenue par différentiation 18 <strong>de</strong> (10), <strong>et</strong> dans laquel<strong>le</strong> x 1 , y 1 , z 1jouent <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> <strong>de</strong> constantes.À présent, imaginons-nous que <strong>de</strong>ux points : x 1 , y 1 , z 1 <strong>et</strong> x 2 , y 2 , z 2sont fixés ; alors, comme nous <strong>le</strong> savons 19 , tout autre troisième point :x 3 , y 3 , z 3 en position généra<strong>le</strong> peut encore occuper toutes <strong>le</strong>s positions :x ′ 3 , y′ 3 , z′ 3 qui satisfont <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux équations :{ ( ( )J x1 , y 1 , z 1 ; x ′ 3, y 3, ′ z 3) ′ = J x1 , y 1 , z 1 ; x 3 , y 3 , z 3(12)J ( x 2 , y 2 , z 2 ; x ′ 3, y ′ 3, z ′ 3)= J(x2 , y 2 , z 2 ; x 3 , y 3 , z 3),<strong>et</strong> qui se trouvent dans un certain voisinage <strong>de</strong> x 3 , y 3 , z 3 , donc ce pointpeut encore occuper au moins ∞ 1 positions. Maintenant, comme parfixation <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux points, <strong>le</strong>s paramètres du groupe sont soumis à cinq17 En eff<strong>et</strong>, chaque transformation finie du groupe conserve la pseudodistance J,donc envoie chaque pseudosphère centrée en un point sur la pseudosphère <strong>de</strong> mêmepseudorayon qui est centrée au point image. Par conséquent, l’ensemb<strong>le</strong> <strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>spseudosphères se transforme en lui-même.18 — par rapport aux trois variab<strong>le</strong>s x, y, z —19 — d’après <strong>le</strong>s équations (7) <strong>et</strong> (1’) —


172 Division V. Chapitre 20. § 85.conditions, il en décou<strong>le</strong> que <strong>le</strong> nombre <strong>de</strong> paramètres du groupe ne peuten tout cas pas être inférieur à six 20 .Si <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux équations (12) n’étaient pas indépendantes l’une <strong>de</strong>l’autre relativement à x ′ 3, y 3, ′ z 3, ′ la secon<strong>de</strong> équation serait alors uneconséquence <strong>de</strong> la première, <strong>et</strong> il en décou<strong>le</strong>rait évi<strong>de</strong>mment que toutes<strong>le</strong>s s − 1 équations (8) seraient aussi <strong>de</strong>s conséquences <strong>de</strong> la premièred’entre el<strong>le</strong>s, aussi grand que l’on choisisse s ; on ne pourrait donc paschoisir s assez grand pour que <strong>le</strong>s équations (9) soient tirées <strong>de</strong>s équations(8), ou, ce qui revient au même, il en décou<strong>le</strong>rait, même si s étaitassez grand, que tous <strong>le</strong>s invariants <strong>de</strong> s points ne pourraient pas se laisserexprimer au moyen <strong>de</strong>s invariants <strong>de</strong>s paires <strong>de</strong> points, en contradictionavec ce qui a été dit ci-<strong>de</strong>ssus. Par conséquent, nous pouvonsconclure que <strong>le</strong>s équations (12), relativement à x ′ 3, y 3, ′ z 3, ′ sont indépendantesl’une par rapport à l’autre <strong>et</strong> que <strong>le</strong> point x 3 , y 3 , z 3 peut seu<strong>le</strong>mentoccuper encore ∞ 1 positions après fixation <strong>de</strong> x 1 , y 1 , z 1 <strong>et</strong> <strong>de</strong> x 2 , y 2 , z 2 .En d’autres termes, <strong>le</strong>s ∞ 1 pseudosphères <strong>de</strong> centre : x 2 , y 2 , z 2 doiventcouper <strong>le</strong>s ∞ 1 pseudosphères <strong>de</strong> centre : x 1 , y 1 , z 1 en <strong>le</strong>s ∞ 2 courbesqui sont déterminées par <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux équations :{ (J x1 , y 1 , z 1 ; x, y, z ) = const.(13)J ( x 2 , y 2 , z 2 ; x, y, z ) = const.,ou par <strong>le</strong> système simultané :{ α(x1 , y 1 , z 1 ; x, y, z) dx + β dy + γ dz = 0(14)α(x 2 , y 2 , z 2 ; x, y, z) dx + β dy + γ dz = 0.En particulier, on obtient que <strong>le</strong>s ∞ 1 pseudosphères <strong>de</strong> centre : x 1 , y 1 , z 1ne peuvent pas être indépendantes <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur centre 21 , <strong>et</strong> donc qu’il y a auminimum ∞ 2 pseudosphères différentes 2220 Fixer un point <strong>de</strong> coordonnées (x 1 , y 1 , z 1 ) absorbe au moins trois paramètresdu groupe, puisqu’il est supposé transitif. Le second point (x 2 , y 2 , z 2 ) se meut alors,par l’action du sous-groupe d’isotropie fixant <strong>le</strong> premier point, sur une pseudosphère<strong>de</strong> centre (x 1 , y 1 , z 1 ), avec <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>grés <strong>de</strong> liberté, <strong>et</strong> <strong>de</strong> manière loca<strong>le</strong>ment transitive.Fixer ensuite ce <strong>de</strong>uxième point absorbe au moins <strong>de</strong>ux paramètres supplémentairesdu groupe. Enfin, une mobilité comportant au moins un <strong>de</strong>rnier paramètre estencore possib<strong>le</strong> sur l’intersection (généra<strong>le</strong>ment non vi<strong>de</strong>) <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux famil<strong>le</strong>s <strong>de</strong> pseudosphèrescentrées en (x 1 , y 1 , z 1 ) <strong>et</strong> en (x 2 , y 2 , z 2 ).21 — sinon l’intersection <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux famil<strong>le</strong>s <strong>de</strong> surfaces (14) ne se réduirait pas à<strong>de</strong>s courbes —22 Le pseudorayon, à savoir la constante dans l’équation J(p 1 ; p) = const., constitueun premier paramètre (évi<strong>de</strong>nt) pour la famil<strong>le</strong> <strong>de</strong>s pseudosphères. Les équations<strong>de</strong>s pseudosphères ne pouvant pas être indépendantes <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur centre p 1 , el<strong>le</strong>s


Groupes <strong>de</strong> R 3 pour <strong>le</strong>squels <strong>de</strong>ux points ont un seul invariant. 173Enfin, si nous nous imaginons que trois points distincts : x k , y k , z k(k = 1, 2, 3) sont fixés, alors chaque autre quatrième point x 4 , y 4 , z 4peut encore occuper toutes <strong>le</strong>s positions x ′ 4 , y′ 4 , z′ 4 dans un certain voisinage<strong>de</strong> x 4 , y 4 , z 4 qui satisfont <strong>le</strong>s trois équations :⎧⎪⎨J ( ) ( )x 1 , y 1 , z 1 ; x ′ 4, y 4, ′ z 4′ = J x1 , y 1 , z 1 ; x 4 , y 4 , z 4(15) J ( x 2 , y 2 , z 2 ; x ′ 4⎪⎩, y′ 4 , ) ( )z′ 4 = J x2 , y 2 , z 2 ; x 4 , y 4 , z 4J ( x 3 , y 3 , z 3 ; x ′ 4 , y′ 4 , ( )4) z′ = J x3 , y 3 , z 3 ; x 4 , y 4 , z 4 .Si maintenant, parmi ces trois équations, il n’y avait que <strong>de</strong>ux d’entreel<strong>le</strong>s qui étaient indépendantes relativement à x ′ 4, y ′ 4, z ′ 4, la troisième découlantpar exemp<strong>le</strong> <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux premières, alors parmi <strong>le</strong>s s − 1 équations(8), <strong>le</strong>s s − 3 <strong>de</strong>rnières décou<strong>le</strong>raient aussi toujours <strong>de</strong>s <strong>de</strong>uxpremières, donc <strong>le</strong>s équations (9) ne pourraient jamais être tirées <strong>de</strong>séquations (8), si grand que soit choisi s. Par conséquent, <strong>le</strong>s équationssuivantes :x ′ 4 = x 4, y ′ 4 = y 4, z ′ 4 = z 4doivent déjà se tirer <strong>de</strong>s équations (15), ce qui veut dire qu’après fixation<strong>de</strong> trois points qui sont mutuel<strong>le</strong>ment en position généra<strong>le</strong>, tous <strong>le</strong>spoints <strong>de</strong> l’espace doivent rester généra<strong>le</strong>ment au repos * . 23dépen<strong>de</strong>nt d’au moins un paramètre supplémentaire. Au total, il y a au moins <strong>de</strong>uxparamètres.*Entre autres choses, il décou<strong>le</strong> encore <strong>de</strong> là que <strong>le</strong>s équations :(A) J ( x ′ k, y ′ k, z ′ k; x ′ , y ′ , z ′) = J ( x k , y k , z k ; x, y, z ) (k =1, 2, 3)sont résolub<strong>le</strong>s par rapport à x ′ , y ′ , z ′ . Si on soum<strong>et</strong> <strong>le</strong>s quantités :x ′ k , y′ k , z′ k , x k, y k , z k aux équations :J ( x ′ k , y′ k , z′ k ; x′ j ,y′ j , ) ( )z′ j = J xk , y k , z k ; x j , y j , z j(k, j =1, 2, 3,k < j),<strong>et</strong> si on <strong>le</strong>s interprète comme <strong>de</strong>s paramètres, la résolution <strong>de</strong>s équations (A) parrapport à x ′ , y ′ , z ′ représentera, comme on s’en convaincra faci<strong>le</strong>ment, <strong>le</strong> groupe <strong>le</strong>plus général <strong>de</strong> l’espace pour <strong>le</strong>quel <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux points : x 1 , y 1 , z 1 ; x 2 , y 2 , z 2 possè<strong>de</strong>ntl’invariant : J ( x 1 , y 1 , z 1 ; x 2 , y 2 , z 2). Ce groupe comprend évi<strong>de</strong>mment <strong>le</strong> groupe :X 1 f . . . X m f, mais il n’est pas nécessairement continu ; néanmoins, il peut se décomposeren plusieurs famil<strong>le</strong>s séparées <strong>de</strong> transformations continues (voir <strong>le</strong> Chap. 18du Tome I).Nous voulons encore mentionner que l’on obtient <strong>le</strong>s équations finies du groupe :X 1 f . . . X m f à partir <strong>de</strong>s équations (A), lorsqu’on choisit la résolution en x ′ , y ′ , z ′qui pour : x ′ k = x k, y ′ k = y k, z ′ k = z k (k = 1, 2, 3) se réduit aux équations : x ′ = x,y ′ = y, z ′ = z.23 Ici, dans <strong>le</strong>s applications, pour un groupe concr<strong>et</strong> dont l’invariant J est connuexplicitement en termes <strong>de</strong> fonctions algébriques ou transcendantes, il est a prioripossib<strong>le</strong>, d’après ce qui vient d’être vu, <strong>de</strong> résoudre <strong>le</strong>s équations (A) par rapport à


174 Division V. Chapitre 20. § 85.De ceci, il résulte en premier lieu que m doit être précisément égalà six. Et il suit en second lieu que <strong>le</strong>s ∞ 2 courbes (13) ne peuvent pastoutes être contenues dans <strong>le</strong>s ∞ 1 pseudosphères <strong>de</strong> centre x 3 , y 3 , z 3 ,mais que chacune <strong>de</strong> ces courbes n’a en général qu’un point en communavec chacune <strong>de</strong> ces pseudosphères 24 , <strong>et</strong> donc que <strong>le</strong> système simultané(14) ne peut pas être indépendant <strong>de</strong> x 1 , y 1 , z 1 , x 2 , y 2 , z 2 . Ainsi,on a démontré que dans R 3 , il n’existe pas <strong>de</strong> famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ 2 courbesqui est constituée <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que dans toute pseudosphère se trouvent∞ 1 courbes <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te famil<strong>le</strong>. Et maintenant, comme chaque famil<strong>le</strong> <strong>de</strong>∞ 2 courbes qui remplit complètement R 3 , est représentab<strong>le</strong> 25 , commefamil<strong>le</strong> <strong>de</strong>s courbes caractéristiques <strong>de</strong> Monge d’une équation linéaireaux dérivées partiel<strong>le</strong>s :λ(x, y, z) ∂f ∂f+ µ(x, y, z)∂x ∂y+ ν(x, y, z)∂f∂z = 0,nous pouvons aussi dire ceci : <strong>le</strong>s pseudosphères ne sont pas entièrementsurfaces intégra<strong>le</strong>s d’une même équation linéaire aux dérivéespartiel<strong>le</strong>s.(x ′ , y ′ , z ′ ) comme fonctions <strong>de</strong> (x, y, z) <strong>et</strong> <strong>de</strong>s 18 paramètres x k , y k , z k , x ′ k , y′ k , z′ k ,k = 1, 2, 3. En général, cela peut donner une représentation <strong>de</strong>s équations finies dugroupe, à ceci près que 18−6 = 9 paramètres sont nécessairement superflus, <strong>et</strong> que <strong>le</strong>séquations finies ainsi obtenues peuvent parfois représenter une famil<strong>le</strong> qui ne contientpas l’i<strong>de</strong>ntité, par exemp<strong>le</strong> si <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux « repères » formés <strong>de</strong>s trois points (x k , y k , z k ) <strong>et</strong><strong>de</strong>s trois autres points (x ′ k , y′ k , z′ k) sont disposés d’une façon spécia<strong>le</strong>. Effectivement,un groupe <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> G peut possé<strong>de</strong>r plusieurs composantes connexes, par exemp<strong>le</strong> <strong>le</strong>groupe <strong>de</strong>s déplacements euclidiens E 3 (R) = E + (R)∪E − (R), suivant que l’orientationest préservée ou inversée. Dans <strong>le</strong> Chap. 18 du Tome I, <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> élaborent un<strong>et</strong>héorie généra<strong>le</strong> <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong> transformation qui se décomposent en un nombre fini<strong>de</strong> groupes connexes ; seu<strong>le</strong> la composante <strong>de</strong> l’i<strong>de</strong>ntité est engendrée, via l’exponentiel<strong>le</strong>,par <strong>de</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s X 1 , . . . , X m . C<strong>et</strong>te stratégie éventuel<strong>le</strong> :trouver <strong>le</strong>s invariants possib<strong>le</strong>s <strong>et</strong> en déduire <strong>le</strong>s groupes possib<strong>le</strong>s par <strong>le</strong> théorème <strong>de</strong>sfonctions implicites, ne sera pas adoptée. En fait, <strong>Lie</strong> évite généra<strong>le</strong>ment d’écrire <strong>le</strong>séquations finies d’un groupe concr<strong>et</strong>.24 L’indépendance <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux équations (13) lorsque <strong>le</strong>urs centres sont mutuel<strong>le</strong>menten position généra<strong>le</strong> équivaut à ce que l’intersection <strong>de</strong>s pseudosphères se réduise(en général) à une courbe. Si l’on considère une troisième pseudosphère centréeen un autre point, l’intersection trip<strong>le</strong> <strong>de</strong>vient, grâce à (15) <strong>et</strong> au paragraphe qui suit,un simp<strong>le</strong> point, ce qui revient à dire que l’intersection <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te pseudosphère avec<strong>le</strong>s ∞ 2 courbes d’intersection entre <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux premières famil<strong>le</strong>s <strong>de</strong> pseudosphères, seréduit à un point.25 Loca<strong>le</strong>ment, toute famil<strong>le</strong> régulière <strong>de</strong> courbes se redresse en la famil<strong>le</strong> {x =const., y = const.} <strong>de</strong>s droites parallè<strong>le</strong>s à l’axe <strong>de</strong>s z, <strong>et</strong> ces droites sont <strong>le</strong>s courbesintégra<strong>le</strong>s <strong>de</strong> tout champ <strong>de</strong> vecteurs <strong>de</strong> la forme ν(x, y, z) ∂ ∂zavec ν ≠ 0.


Groupes <strong>de</strong> R 3 pour <strong>le</strong>squels <strong>de</strong>ux points ont un seul invariant. 175C<strong>et</strong>te propriété <strong>de</strong>s pseudosphères qui vient d’être établie perm<strong>et</strong>encore <strong>de</strong> déduire une propriété importante <strong>de</strong>s groupes recherchés, àsavoir, el<strong>le</strong> perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> démontrer que dans aucun <strong>de</strong>s groupes recherchésne peuvent se trouver <strong>de</strong>ux transformations infinitésima<strong>le</strong>s qui possè<strong>de</strong>nt<strong>le</strong>s mêmes courbes intégra<strong>le</strong>s.En eff<strong>et</strong>, s’il y avait <strong>de</strong>ux transformations infinitésima<strong>le</strong>s dugroupe : X 1 f . . .X 6 f, par exemp<strong>le</strong> : X 1 f <strong>et</strong> X 2 f, qui ont exactement<strong>le</strong>s mêmes courbes intégra<strong>le</strong>s, il existerait une i<strong>de</strong>ntité <strong>de</strong> la forme :X 2 f ≡ ϕ(x, y, z) X 1 f,où ϕ n’est pas une simp<strong>le</strong> constante 26 . Si nous formons maintenant <strong>le</strong>ssix équations linéaires aux dérivées partiel<strong>le</strong>s :(16) X k f + X (1)kf = 0 (k =1···6)dont une solution commune :J ( )x, y, z; x 1 , y 1 , z 1détermine immédiatement — étant donné une constante arbitraire —<strong>le</strong>s ∞ 1 pseudosphères <strong>de</strong> centre x 1 , y 1 , z 1 , alors nous remarquons quedans ces six équations sont comprises <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux suivantes :X 1 f + X (1)1 f = 0ϕ(x, y, z) X 1 f + ϕ(x 1 , y 1 , z 1 ) X (1)1 f = 0,d’où suivent immédiatement 27 <strong>le</strong>s équations :X 1 f = 0, X (1)1 f = 0.Et maintenant, comme la première <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux équations est indépendante<strong>de</strong> x 1 , y 1 , z 1 , il se produit que sous <strong>le</strong>s hypothèses posées, toutes<strong>le</strong>s pseudosphères <strong>de</strong> l’espace satisfont une même équation linéaire auxdérivées partiel<strong>le</strong>s du premier ordre, ce qui, comme nous venons à l’instant<strong>de</strong> <strong>le</strong> démontrer, ne peut pas être <strong>le</strong> cas 28 .Par suite, nous pouvons maintenant énoncer la proposition suivante:26 Sinon, si X 2 = λX 1 avec λ constant, l’algèbre <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> (espace vectoriel)X 1 , X 2 , . . . , X 6 ne serait pas <strong>de</strong> dimension six. Donc la différentiel<strong>le</strong> dϕ = ϕ x dx +ϕ y dy + ϕ z dz n’est pas i<strong>de</strong>ntiquement nul<strong>le</strong>.27 Le déterminant 2 × 2 du système, égal à ϕ(x 1 , y 1 , z 1 ) − ϕ(x, y, z), ne s’annu<strong>le</strong>pas i<strong>de</strong>ntiquement, puisque sa différentiel<strong>le</strong> par rapport aux variab<strong>le</strong>s (x, y, z) est nonnul<strong>le</strong>.28 Par exemp<strong>le</strong>, une application <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te propriété sera utilisée pour traiter, auChap. 21, <strong>le</strong> contre-exemp<strong>le</strong> (23’) à une assertion <strong>de</strong> Helmholtz.


176 Division V. Chapitre 20. § 85.Proposition 1. Si un groupe <strong>de</strong> transformations ponctuel<strong>le</strong>s <strong>de</strong> R 3continu <strong>et</strong> fini est constitué <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que, relativement à son action,<strong>de</strong>ux points possè<strong>de</strong>nt un <strong>et</strong> un seul invariant, tandis que s > 2points n’ont pas d’invariant essentiel, alors ce groupe est transitif àsix paramètres <strong>et</strong> en outre, il ne comprend jamais <strong>de</strong>ux transformationsinfinitésima<strong>le</strong>s dont <strong>le</strong>s courbes intégra<strong>le</strong>s coïnci<strong>de</strong>nt ; <strong>de</strong> plus, la famil<strong>le</strong><strong>de</strong>s pseudosphères relatives au groupe se compose au minimum<strong>de</strong> ∞ 2 surfaces, <strong>et</strong> il n’y a pas dans R 3 <strong>de</strong> famil<strong>le</strong> doub<strong>le</strong>ment infinie <strong>de</strong>courbes qui produisent toutes <strong>le</strong>s pseudosphères existantes.Avant d’al<strong>le</strong>r plus loin, nous voulons encore m<strong>et</strong>tre sous une formeappropriée la condition d’après laquel<strong>le</strong> <strong>de</strong>ux points ont un <strong>et</strong> un seulinvariant, relativement à un groupe transitif : X 1 f . . .X 6 f à six paramètres.Tout d’abord, il sort <strong>de</strong> la condition susnommée que <strong>le</strong>s six équationslinéaires aux dérivées partiel<strong>le</strong>s (16) possé<strong>de</strong>nt une <strong>et</strong> une seu<strong>le</strong>solution commune, <strong>et</strong> donc que parmi ces équations, il doit s’en trouverexactement cinq 29 qui sont indépendantes <strong>le</strong>s unes <strong>de</strong>s autres. Parail<strong>le</strong>urs, comme <strong>le</strong> groupe : X 1 f . . .X 6 f est transitif, on aura parexemp<strong>le</strong> que : X 1 f, X 2 f, X 3 f ne sont liés par aucune relation linéairehomogène, tandis que : X 4 f, X 5 f, X 6 f se laissent exprimer <strong>de</strong> manièrelinéaire 30 <strong>et</strong> homogène au moyen <strong>de</strong> : X 1 f, X 2 f, X 3 f, à savoir :(17) X 3+k f ≡ ∑1j3ϕ kj (x, y, z) X j f (k = 1, 2,3).29 Si l’on note X k = ∑ 3i=1 ξ ki(x) ∂∂x i, pour k = 1, . . .,6, <strong>le</strong>s six équations (16)d’inconnues <strong>de</strong>s fonctions J = J(x, y, z; x 1 , y 1 , z 1 ) s’écrivent∑ 3i=1 ξ ki(x, y, z) ∂J∂x i+ ∑ 3i=1 ξ ki(x 1 , y 1 , z 1 ) ∂J∂x 1i= 0 (k =1··· 6).L’hypothèse qu’el<strong>le</strong>s possè<strong>de</strong>nt une seu<strong>le</strong> solution équivaut à ce que <strong>le</strong> rang générique<strong>de</strong> la matrice 6 × 6 :⎛⎝ ξ 11(x, y, z) · · · ξ 13 (x, y, z) ξ 11 (x 1 , y 1 , z 1 ) · · · ξ 13 (x 1 , y 1 , z 1 )·· · · · ·· ·· · · · ··ξ 61 (x, y, z) · · · ξ 63 (x, y, z) ξ 61 (x 1 , y 1 , z 1 ) · · · ξ 63 (x 1 , y 1 , z 1 )soit égal à cinq. La suite <strong>de</strong>s raisonnements explore c<strong>et</strong>te hypothèse.30 — à coefficients non constants, <strong>le</strong> terme « linéaire » ne possédant pas ici <strong>le</strong> sensmo<strong>de</strong>rne —⎞⎠


Groupes <strong>de</strong> R 3 pour <strong>le</strong>squels <strong>de</strong>ux points ont un seul invariant. 177En tenant compte <strong>de</strong> ces i<strong>de</strong>ntités, nous pouvons clairement remplacer<strong>le</strong>s six équations (16) par <strong>le</strong>s suivantes :⎧X k f + X (1)k⎪⎨ ∑f = 0{(18) ϕkj (x, y, z) X j f + ϕ kj (x 1 , y 1 , z 1 ) X (1)j f } = 01j3⎪⎩(k = 1,2, 3),ou encore, par <strong>le</strong>s suivantes :⎧X k f + X (1)k⎪⎨ ∑f = 0{(19)ϕkj (x, y, z) − ϕ kj (x 1 , y 1 , z 1 ) } X j f = 01j3⎪⎩(k = 1,2, 3).Sous <strong>le</strong>s hypothèses posées, parmi <strong>le</strong>s six équations (19), <strong>le</strong>s troispremières sont résolub<strong>le</strong>s 31 par rapport à p 1 , q 1 , r 1 ; en revanche, <strong>le</strong>s trois<strong>de</strong>rnières sont complètement libres <strong>de</strong> p 1 , q 1 , r 1 ; comme parmi <strong>le</strong>s équations(19), il doit y en avoir exactement cinq 32 qui sont indépendantes<strong>le</strong>s unes <strong>de</strong>s autres, il est nécessaire <strong>et</strong> suffisant que <strong>le</strong>s trois <strong>de</strong>rnièresd’entre el<strong>le</strong>s, que nous pouvons aussi écrire sous la forme :(20) X 3+k f − ∑ϕ kj (x 1 , y 1 , z 1 ) X j f = 0 (k = 1,2, 3),1j3se réduisent précisément à <strong>de</strong>ux équations indépendantes. De là, si nousprenons en considération <strong>le</strong> fait que <strong>le</strong>s trois transformations infinitésima<strong>le</strong>s:X 3+k f − ∑ϕ kj (x 1 , y 1 , z 1 ) X j f, (k =1, 2, 3)1j3laissent complètement invariant 33 <strong>le</strong> point x 1 , y 1 , z 1 <strong>et</strong> qu’el<strong>le</strong>s peuvents’exprimer (quand ce point est un point en position généra<strong>le</strong>) commecombinaisons linéaires <strong>de</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s du groupe :31 Le groupe étant transitif, la matrice ( ξ ki (x 1 , y 1 , z 1 ) ) 1i3formée <strong>de</strong>s coefficients<strong>de</strong>s trois transformations infinitésima<strong>le</strong>s X (1)k1k3, k = 1, 2, 3, par rapport auxchamps basiques p 1 , q 1 , r 1 , est <strong>de</strong> déterminant non nul.32 — puisque, rappelons-<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s m = 6 équations (2) doivent possé<strong>de</strong>r une <strong>et</strong> uneseu<strong>le</strong> solution commune qui constitue <strong>le</strong> seul invariant entre <strong>de</strong>ux points —33 En eff<strong>et</strong>, d’après (17), au point (x 1 , y 1 , z 1 ), ces trois transformations infinitésima<strong>le</strong>ss’annu<strong>le</strong>nt, donc <strong>le</strong>s trois groupes à un paramètre qu’el<strong>le</strong>s engendrent vial’exponentiel<strong>le</strong> laissent fixe <strong>le</strong> point (x 1 , y 1 , z 1 ).


178 Division V. Chapitre 20. § 85.X 1 f . . .X 6 f fixant <strong>le</strong> point en question (voir 34 Tome I, p. 203, Proposition7), nous obtenons la :Proposition 2. Soit : X 1 f . . .X 6 f un groupe à six paramètres <strong>de</strong>R 3 <strong>et</strong> soit :Y k f = α k (x, y, z) p + β k (x, y, z) q + γ k (x, y, z) r(k = 1, 2,3)trois transformations infinitésima<strong>le</strong>s quelconques du groupe qui laissentinvariant un point en position généra<strong>le</strong>. Alors, relativement au groupe :X 1 f . . .X 6 f, <strong>de</strong>ux points possè<strong>de</strong>nt toujours un <strong>et</strong> un seul invariantlorsque, <strong>et</strong> seu<strong>le</strong>ment lorsque, <strong>le</strong> déterminant :(21)∣∣α 1 β 1 γ 1 ∣∣∣∣∣α 2 β 2 γ 2α 3 β 3 γ 334 D’après c<strong>et</strong>te proposition généra<strong>le</strong> qui repose seu<strong>le</strong>ment sur <strong>de</strong>s considérationsd’algèbre linéaire, si X k = ∑ ni=1 ξ ki(x 1 , . . .,x n ) ∂∂x i, k = 1, . . .,m sont m transformationsinfinitésima<strong>le</strong>s indépendantes d’un groupe fini continu quelconque à mparamètres, <strong>et</strong> si q désigne <strong>le</strong> rang générique <strong>de</strong> la matrice ( ξ ki (x) ) 1in1km formée<strong>de</strong> <strong>le</strong>urs coefficients, alors loca<strong>le</strong>ment au voisinage d’un point en position généra<strong>le</strong> <strong>et</strong>après renumérotation éventuel<strong>le</strong> <strong>de</strong>s X k :• <strong>le</strong>s q premières transformations infinitésima<strong>le</strong>s X 1 , . . . , X q ne sont liées par aucunerelation <strong>de</strong> la forme :χ 1 (x 1 , . . .,x n ) · X 1 + · · · + χ q (x 1 , . . . , x n ) · X q ≡ 0 ;• <strong>le</strong>s m − q transformations infinitésima<strong>le</strong>s restantes X q+1 , . . . , X m s’exprimentcomme combinaisons linéaires à coefficients fonctionnels <strong>de</strong> X 1 , . . . , X q :X q+j ≡ ∑ qk=1 ϕ jk(x 1 , . . . , x n ) · X k (j =1··· m − q) ;• la sous-algèbre <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> constituée <strong>de</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s qui s’annu<strong>le</strong>nten un point fixé (x 0 1 , . . .,x0 n ) est précisément <strong>de</strong> dimension m − q <strong>et</strong> el<strong>le</strong>est engendrée par <strong>le</strong>s m − q transformations explicites :X q+j − ∑ qk=1 ϕ jk(x 0 1 , . . . , x0 n ) · X k (j = 1 ··· m − q).Appliquée ici avec n = 3, m = 6 <strong>et</strong> q = 3, c<strong>et</strong>te proposition donne <strong>le</strong>s m − q = 3transformations infinitésima<strong>le</strong>s X 3+k − ∑ 1j3 ϕ kj(x 1 , y 1 , z 1 )X j , k = 1, 2, 3 indépendantess’annulant au point (x 1 , y 1 , z 1 ) <strong>et</strong> dont la matrice 3 × 3 <strong>de</strong>s coefficientspossè<strong>de</strong> un rang générique égal à 2. C<strong>et</strong>te propriété se transm<strong>et</strong> donc à tout systèmeY 1 , Y 2 , Y 3 <strong>de</strong> trois transformations infinitésima<strong>le</strong>s indépendantes du groupe qui s’annu<strong>le</strong>nten (x 1 , y 1 , z 1 ) : c’est la Proposition 2.


Groupes <strong>de</strong> R 3 pour <strong>le</strong>squels <strong>de</strong>ux points ont un seul invariant. 179s’annu<strong>le</strong> i<strong>de</strong>ntiquement, sans que tous ses sous-déterminants d’ordre<strong>de</strong>ux s’annu<strong>le</strong>nt 35 .En utilisant <strong>le</strong> critère qui est contenu dans c<strong>et</strong>te proposition, nouspouvons maintenant déduire encore une autre propriété importante <strong>de</strong>sgroupes recherchés ; toutefois, c<strong>et</strong>te propriété n’est possédée que parceux <strong>de</strong> ces groupes qui sont imprimitifs.Étant donné un groupe imprimitif à six paramètres ayant la constitution<strong>de</strong>mandée, il peut donc arriver que ce groupe laisse invariante unefamil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ 1 surfaces : ω(x, y, z) = const. Si ce cas se produit, nouspouvons toujours nous imaginer que <strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s x, y, z sont choisies<strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que la famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> surfaces invariantes est représentée parl’équation : x = const. ; <strong>le</strong> groupe en question est ensuite <strong>de</strong> la forme 36 :X k f = ξ k (x) p + η k (x, y, z) q + ζ k (x, y, z) r (k =1···6),où ξ 1 . . . ξ 6 ne s’annu<strong>le</strong>nt <strong>de</strong> toute façon pas tous, parce que sinon, <strong>le</strong>groupe serait intransitif 37 .En principe [an und für sich], trois cas seu<strong>le</strong>ment sont a prioriimaginab<strong>le</strong>s : en eff<strong>et</strong>, d’après 38 <strong>le</strong> Théorème 1, p. 6, <strong>le</strong> groupe :X 1 f . . .X 6 f peut transformer <strong>le</strong>s surfaces : x = const. <strong>de</strong> une, <strong>de</strong>uxou trois manières différentes [dreigliedrig transformiren] ; nous allonscependant démontrer ici que seul <strong>le</strong> troisième cas se produit.Si <strong>le</strong>s surfaces : x = const. se transformaient seu<strong>le</strong>ment d’une manière,on pourrait, d’après <strong>le</strong> théorème cité à l’instant choisir la variab<strong>le</strong>x <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> manière que chaque ξ k (x) p prenne la forme : a k p. Si l’onavait maintenant par exemp<strong>le</strong> a 1 ≠ 0, on pourrait introduire comme35 Intuitivement, <strong>le</strong> sous-groupe à trois paramètres Y 1 , Y 2 , Y 3 qui fixe un pointdonné déplace encore transitivement tous <strong>le</strong>s autres points sur la pseudosphère à laquel<strong>le</strong>ils appartiennent. Ces pseudosphères représentent donc <strong>le</strong>s seu<strong>le</strong>s famil<strong>le</strong>s <strong>de</strong>sous-variétés invariantes par l’action du sous-groupe Y 1 , Y 2 , Y 3 , <strong>et</strong> par conséquent,puisqu’el<strong>le</strong>s sont <strong>de</strong> codimension 1, d’après une propriété généra<strong>le</strong>, <strong>le</strong> rang générique<strong>de</strong> la matrice 3 × 3 <strong>de</strong>s coefficients <strong>de</strong> Y 1 , Y 2 , Y 3 doit être égal à 3 − 1 = 2.36 Le groupe stabilise <strong>le</strong>s hyperplans {x = const.} si <strong>et</strong> seu<strong>le</strong>ment si <strong>le</strong> coefficientξ k <strong>de</strong> p dans chaque X k ne dépend que <strong>de</strong> x.37 Si tous <strong>le</strong>s ξ k (x) étaient i<strong>de</strong>ntiquement nuls, la direction p manquerait.38 Ce théorème, <strong>le</strong> premier du Tome III, énonce que tout groupe <strong>de</strong> transformationscontinu fini <strong>de</strong> la droite <strong>de</strong>s x est <strong>de</strong> dimension 3, <strong>et</strong> est équiva<strong>le</strong>nt soit à ∂ x(groupe <strong>de</strong>s translations), soit à ∂ x , x∂ x (groupe affine), soit à ∂ x , x∂ x , x 2 ∂ x (groupeprojectif).


180 Division V. Chapitre 20. § 85.nouveau y <strong>et</strong> nouveau z <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux solutions indépendantes <strong>de</strong> l’équation39 : X 1 f = 0, <strong>et</strong> rapporter par c<strong>et</strong>te opération <strong>le</strong> groupe à la forme :X 1 f = p,X k f = η k (x, y, z) q + ζ k (x, y, z) r(k = 2 ···6).Mais alors l’invariant <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux points : x, y, z <strong>et</strong> x 1 , y 1 , z 1 serait nécessairement<strong>de</strong> la forme : x − x 1 , donc <strong>le</strong>s pseudosphères <strong>de</strong> centrex 1 , y 1 , z 1 seraient représentées par : x − x 1 = const., ou plus simp<strong>le</strong>mentpar : x = const., c’est-à-dire qu’il y aurait en général seu<strong>le</strong>ment∞ 1 pseudosphères distinctes, ce qui est exclu d’après ce qui précè<strong>de</strong>.Si d’autre part <strong>le</strong>s surfaces : x = const. se transformaient <strong>de</strong> <strong>de</strong>uxmanières différentes, nous pourrions, d’après <strong>le</strong> Théorème 1, p. 6, parun choix approprié <strong>de</strong> x, rapporter <strong>le</strong> groupe : X 1 f . . .X 6 f à la forme :X 1 f = p + η 1 (x, y, z) q + ζ 1 (x, y, z) rX 2 f = xp + η 2 (x, y, z) q + ζ 2 (x, y, z) rX k f =η k (x, y, z) q + ζ k (x, y, z) r(k =3···6),<strong>et</strong> par conséquent, un point x 1 , y 1 , z 1 fixé en position généra<strong>le</strong> adm<strong>et</strong>traittrois transformations infinitésima<strong>le</strong>s <strong>de</strong> la forme 40 :Y 1 f = (x − x 1 ) p + η 1 q + ζ 1 rY 2 f =η 2 q + ζ 2 rY 3 f = η 3 q + ζ 3 r,39 Le changement <strong>de</strong> coordonnées est alors <strong>de</strong> la forme :x = x, y = y(x, y, z), z = z(x, y, z),<strong>et</strong> il induit la transformations suivante sur <strong>le</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s basiques:p = p + y x q + y x r, q = y y q + z y r, r = y z q + z z r,ce qui ne change rien au fait que <strong>le</strong>s autres transformations infinitésima<strong>le</strong>s X 2 , . . .,X 6n’incorporent pas p : <strong>le</strong>s nouvel<strong>le</strong>s transformations X 2 , . . . , X 6 n’incorporent pas p.40 La transformation Y 1 := X 2 − x 1 X 1 s’annu<strong>le</strong> au point p 1 . Les quatre transformationsrestantes X 3 , X 4 , X 5 , X 6 n’incorporant que q <strong>et</strong> r, il existe <strong>de</strong>ux combinaisonslinéaires indépendantes à coefficients constants Y 2 <strong>et</strong> Y 3 qui s’annu<strong>le</strong>nt aussi enp 1 .


Groupes <strong>de</strong> R 3 pour <strong>le</strong>squels <strong>de</strong>ux points ont un seul invariant. 181<strong>et</strong> <strong>le</strong> déterminant correspondant :∣ x − x 1 η 1 ζ 1 ∣∣∣∣∣ 0 η 2 ζ 2 = (x − x 1 )∣ η ∣2 ζ 2 ∣∣∣∣η0 η 3 ζ 3 ζ 33<strong>de</strong>vrait, d’après la Proposition 2, s’annu<strong>le</strong>r i<strong>de</strong>ntiquement. Mais alors<strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux transformations infinitésima<strong>le</strong>s Y 2 f <strong>et</strong> Y 3 f seraient liées parune i<strong>de</strong>ntité <strong>de</strong> la forme :Y 3 f ≡ ω(x, y, z) Y 2 f<strong>et</strong> possè<strong>de</strong>raient par suite <strong>de</strong>s courbes intégra<strong>le</strong>s en commun, ce qui estexclu d’après la Proposition 1.Ainsi, on a démontré que <strong>le</strong>s surfaces invariantes x = const.doivent être transformées par l’action d’un groupe à trois paramètres :Proposition 3. Si, relativement à un groupe à six paramètres <strong>de</strong>R 3 , <strong>de</strong>ux points possè<strong>de</strong>nt un <strong>et</strong> un seul invariant, tandis que s > 2points n’ont pas d’invariant essentiel, alors <strong>le</strong> groupe transforme d<strong>et</strong>rois manières différentes chaque famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ 1 surfaces qu’il laisseéventuel<strong>le</strong>ment invariantes.Nous allons maintenant déterminer tous <strong>le</strong>s groupes transitifs à sixparamètres <strong>de</strong> R 3 qui possè<strong>de</strong>nt certaines propriétés énoncées dans <strong>le</strong>sPropositions 1 <strong>et</strong> 3, donc pour nous exprimer <strong>de</strong> manière plus précise :nous cherchons maintenant tous <strong>le</strong>s groupes transitifs : X 1 f . . .X 6 f <strong>de</strong>R 3 à six paramètres tels que :premièrement <strong>de</strong>ux points ont un <strong>et</strong> un seul invariant ; tels que<strong>de</strong>uxièmement <strong>de</strong>ux transformations infinitésima<strong>le</strong>s indépendantesn’ont jamais <strong>le</strong>s mêmes courbes intégra<strong>le</strong>s <strong>et</strong> tels que troisièmementchaque famil<strong>le</strong> invariante éventuel<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ 1 surfaces est transformée d<strong>et</strong>rois manières différentes.Afin <strong>de</strong> résoudre complètement <strong>le</strong> problème posé auparavant,p. 166, nous <strong>de</strong>vrons encore déci<strong>de</strong>r au final, quant à chacun <strong>de</strong>s groupesqui se présentera, si s > 2 points ont un invariant essentiel ou non, caralors, seuls <strong>le</strong>s groupes pour <strong>le</strong>squels s > 2 points n’ont pas d’invariantessentiel seront intéressants pour nous. La décision à ce suj<strong>et</strong> seraessentiel<strong>le</strong>ment facilitée par la proposition suivante.Proposition 4. Si, relativement à un groupe transitif à six paramètres: X 1 f . . .X 6 f <strong>de</strong> R 3 , <strong>de</strong>ux points x, y, z <strong>et</strong> x 1 , y 1 , z 1 possè<strong>de</strong>ntun <strong>et</strong> un seul invariant : J ( x, y, z; x 1 , y 1 , z 1), alors s > 2 points n’ont


182 Division V. Chapitre 20. § 85.aucun invariant essentiel si <strong>et</strong> seu<strong>le</strong>ment si : premièrement, au minimum∞ 2 pseudosphères différentes appartiennent au groupe ; <strong>et</strong> <strong>de</strong>uxièmement,il n’existe pas <strong>de</strong> famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ 2 courbes qui sont invariantes 41par <strong>le</strong> groupe <strong>et</strong> au moyen <strong>de</strong>squel<strong>le</strong>s sont produites toutes <strong>le</strong>s pseudosphèresexistantes.On se convainc sans difficulté <strong>de</strong> la justesse <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te proposition.En eff<strong>et</strong>, la Proposition 1 p. 176 montre immédiatement que dans laProposition 4, <strong>le</strong>s conditions indiquées sont nécessaires ; qu’el<strong>le</strong>s soientaussi suffisantes, on peut s’en rendre compte comme suit.Comme <strong>de</strong>ux points doivent possé<strong>de</strong>r un <strong>et</strong> un seul invariant essentiel<strong>et</strong> comme il doit y avoir au minimum ∞ 2 pseudosphères différentes,il est clair que <strong>de</strong>ux pseudosphères, dont <strong>le</strong>s centres : x 1 , y 1 , z 1<strong>et</strong> x 2 , y 2 , z 2 sont mutuel<strong>le</strong>ment en position généra<strong>le</strong>, n’ont en généralqu’une seu<strong>le</strong> courbe en commun, <strong>et</strong> donc que <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux fonctions :J ( x 1 , y 1 , z 1 ; x 3 , y 3 , z 3), J(x2 , y 2 , z 2 ; x 3 , y 3 , z 3),que nous voulons écrire en abrégé J 1,3 <strong>et</strong> J 2,3 , sont indépendantes l’une<strong>de</strong> l’autre relativement à x 3 , y 3 , z 3 . De là il suit manifestement que <strong>le</strong>strois fonctions : J 1,2 , J 1,3 , J 2,3 sont <strong>de</strong>s solutions indépendantes <strong>de</strong>séquations :X (1)k f + X(2) k f + X(3) kf = 0 (k =1···6);mais comme, sous <strong>le</strong>s hypothèses posées, ces équations sont très certainementrésolub<strong>le</strong>s par rapport à six <strong>de</strong>s neuf quotients différentiels p ν ,q ν , r ν (ν = 1, 2, 3), en conséquence <strong>de</strong> quoi el<strong>le</strong>s n’ont que trois solutionscommunes indépendantes, on a donc démontré que, sous <strong>le</strong>s hypothèsesposées, tous <strong>le</strong>s invariants <strong>de</strong> trois points se laissent exprimerau moyen <strong>de</strong>s invariants <strong>de</strong>s paires <strong>de</strong> points, <strong>et</strong> donc que trois pointsn’ont pas d’invariant essentiel.Par ail<strong>le</strong>urs, si trois pseudosphères dont <strong>le</strong>s centres : x ν , y ν , z ν(ν = 1, 2, 3) sont mutuel<strong>le</strong>ment en position généra<strong>le</strong> ne s’intersectaientpas toujours en un seul point, mais possédaient toujours une courbe entièreen commun, alors <strong>le</strong>s pseudosphères centrées en <strong>de</strong>ux points quelconquesparmi ces points détermineraient une famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ 2 courbesqui serait constituée <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que sur chaque pseudosphère seraientdisposées ∞ 1 courbes <strong>de</strong> la famil<strong>le</strong> ; <strong>et</strong> maintenant, comme c<strong>et</strong>te41 Dans la Proposition 1, <strong>le</strong>s famil<strong>le</strong>s <strong>de</strong> ∞ 2 courbes exclues n’étaient pas forcémentinvariantes par l’action du groupe. Mais <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux énoncés sont en fait équiva<strong>le</strong>nts,parce que <strong>le</strong>s pseudosphères el<strong>le</strong>s-mêmes <strong>et</strong> <strong>le</strong>s famil<strong>le</strong>s <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs courbes d’intersection<strong>de</strong>ux à <strong>de</strong>ux sont évi<strong>de</strong>mment invariantes par <strong>le</strong> groupe.


Groupes <strong>de</strong> R 3 pour <strong>le</strong>squels <strong>de</strong>ux points ont un seul invariant. 183famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> courbes serait évi<strong>de</strong>mment indépendante <strong>de</strong> la position <strong>de</strong>ces trois points-là, el<strong>le</strong> resterait éga<strong>le</strong>ment invariante par <strong>le</strong> groupe :X 1 f . . .X 6 f, puisque la famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>s pseudosphères est el<strong>le</strong>mêmeinvariante (cf. p. 171), alors que dans notre proposition, l’existenced’une tel<strong>le</strong> famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> courbes invariantes est cependant expressémentexclue. Ainsi, on a démontré que trois pseudosphères ayant troiscentres distincts n’ont en général qu’un seul point en commun. Si l’onentend maintenant par x 4 , y 4 , z 4 un quatrième point quelconque en positiongénéra<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s trois fonctions : J 1,4 , J 2,4 , J 3,4 seront très certainementindépendantes l’une <strong>de</strong> l’autre relativement à x 4 , y 4 , z 4 . Si <strong>de</strong> surcroît,on tient compte du fait que quatre points ont précisément six invariantsindépendants relativement au groupe : X 1 f . . .X 6 f, <strong>et</strong> aussi du fait que :J 1,2 , J 1,3 , J 2,3 , J 1,4 , J 2,4 , J 3,4 constituent déjà six invariants tels, on obtientque, sous <strong>le</strong>s hypothèses posées, quatre points n’ont pas non plusd’invariant essentiel. Enfin, il est désormais tout aussi immédiatementclair que s > 4 points sont dépourvus d’invariant essentiel ; notre propositionest donc complètement démontrée.Maintenant, nous allons tout d’abord déterminer tous <strong>le</strong>s groupesprimitifs qui possè<strong>de</strong>nt <strong>le</strong>s propriétés énoncées p. 181 <strong>et</strong> ensuite, nousdéterminerons ceux qui sont imprimitifs.§ 86.Groupes primitifs parmi <strong>le</strong>s groupes recherchés.Parmi <strong>le</strong>s groupes primitifs à six paramètres <strong>de</strong> R 3 , il n’y a aprèstout que <strong>de</strong>ux types 1 (voir Théorème 9, p. 139), <strong>le</strong>squels sont représentéspremièrement par <strong>le</strong> groupe :(22) p, q, r, xq − yp, yr − zq, zp − xr<strong>de</strong>s mouvements euclidiens, <strong>et</strong> <strong>de</strong>uxièmement par <strong>le</strong> groupe projectif àsix paramètres :(23)p + xU, q + yU, r + zUxq − yp, yr − zq, zp − xr<strong>de</strong> la surface du second <strong>de</strong>gré : x 2 + y 2 + z 2 + 1 = 0, où, comme àl’accoutumée, on écrit U pour xp + yq + zr.1 La référence concerne <strong>le</strong> Théorème 9 du Volume III qui classifie tous <strong>le</strong>s groupescontinus finis <strong>de</strong> transformations holomorphes locaux sur un espace à trois dimensionsqui sont primitifs.


184 Division V. Chapitre 20. § 87.Comme on <strong>le</strong> sait, relativement au groupe (22), <strong>de</strong>ux points possè<strong>de</strong>ntun <strong>et</strong> un seul invariant, à savoir notre distance au sens usuel :(x 1 − x 2 ) 2 + (y 1 − y 2 ) 2 + (z 1 − z 2 ) 2 .Il en va <strong>de</strong> même pour <strong>le</strong> groupe (23), <strong>et</strong> pour préciser, l’invariant enquestion :(x 1 −x 2 ) 2 +(y 1 −y 2 ) 2 +(z 1 −z 2 ) 2 +[x 1 y 2 −y 1 x 2 ] 2 +[y 1 z 2 −z 1 y 2 ] 2 +[z 1 x 2 −x 1 z 2 ] 2{1+x 1 x 2 +y 1 y 2 +z 1 z 2 } 2constitue, comme on <strong>le</strong> sait, <strong>le</strong> birapport entre x 1 , y 1 , z 1 ; x 2 , y 2 , z 2 <strong>et</strong> <strong>le</strong>s<strong>de</strong>ux points que la droite <strong>de</strong> liaison [Verbindungslinie] entre x 1 , y 1 , z 1 <strong>et</strong>x 2 , y 2 , z 2 découpent sur la surface invariante du second <strong>de</strong>gré.En outre, il est déjà connu <strong>de</strong>puis longtemps que pour ces <strong>de</strong>uxgroupes, <strong>le</strong>s invariants <strong>de</strong> plusieurs points quelconques peuvent s’exprimerau moyen <strong>de</strong>s invariants <strong>de</strong>s paires <strong>de</strong> points, <strong>et</strong> donc que s > 2points n’ont pas d’invariant essentiel ; si on ne connaissait pas encorec<strong>et</strong>te propriété, on pourrait la conclure immédiatement <strong>de</strong> la Proposition4, p. 181, puisque, premièrement : pour chacun <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>uxgroupes, <strong>de</strong>ux points possè<strong>de</strong>nt un <strong>et</strong> un seul invariant <strong>et</strong> <strong>de</strong>uxièmement: étant primitifs, ces <strong>de</strong>ux groupes ne laissent invariante absolumentaucune famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ 2 courbes.Le cas <strong>de</strong>s groupes primitifs est ainsi achevé ; nous voulons seu<strong>le</strong>mentmentionner encore que pour chacun <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux groupes trouvés, uneéquation du second <strong>de</strong>gré :α 11 dx 2 + α 22 dy 2 + α 33 dz 2 + 2α 12 dxdy + 2α 23 dydz + 2α 31 dzdx,dont <strong>le</strong> déterminant ne s’annu<strong>le</strong> pas i<strong>de</strong>ntiquement, reste invariante, <strong>et</strong>que <strong>le</strong>s ∞ 2 directions passant par un point fixé en position généra<strong>le</strong> sonttransformées par une action à trois paramètres 2 .§ 87.Groupes imprimitifs parmi <strong>le</strong>s groupes recherchés.Tous <strong>le</strong>s groupes concernés sont transitifs à six paramètres. Maintenant,si l’on fixe un point en position généra<strong>le</strong> par rapport à l’actiond’un groupe transitif à six paramètres, la variété à <strong>de</strong>ux dimensions<strong>de</strong>s ∞ 2 éléments linéaires passant par ce point sera transformée par2 Pour chacun <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux groupes (22) <strong>et</strong> (23), l’origine 0 est un point <strong>de</strong> positiongénéra<strong>le</strong>, puisqu’ils sont tous <strong>de</strong>ux transitifs. Les trois transformations infinitésima<strong>le</strong>sxq − yp, yr − zq <strong>et</strong> zp − xr qu’ils possè<strong>de</strong>nt en commun s’annu<strong>le</strong>nt en 0 <strong>et</strong> el<strong>le</strong>sengendrent <strong>le</strong> groupe compl<strong>et</strong> <strong>de</strong>s rotations (comp<strong>le</strong>xes ou réel<strong>le</strong>s) autour <strong>de</strong> 0, qui estévi<strong>de</strong>mment transitif sur <strong>le</strong> plan projectif <strong>de</strong>s ∞ 2 éléments linéaires passant par 0.


Groupes <strong>de</strong> R 3 pour <strong>le</strong>squels <strong>de</strong>ux points ont un seul invariant. 185un groupe projectif qui comporte au plus trois paramètres. Par ail<strong>le</strong>urs,nous savons d’après l’énumération <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s groupes projectifs duplan (p. 106 sq.) que chaque groupe projectif du plan qui ne comportepas plus <strong>de</strong> trois paramètres, soit laisse un point invariant, soitse compose <strong>de</strong>s ∞ 3 transformations projectives qui laissent invarianteune quadrique non dégénérée. Nous pouvons conclure <strong>de</strong> là que pour <strong>le</strong>sgroupes transitifs <strong>de</strong> R 3 à six paramètres, seu<strong>le</strong>ment <strong>de</strong>ux cas peuventse produire : ou bien, après fixation d’un point en position généra<strong>le</strong>, i<strong>le</strong>xiste un élément linéaire traversant ce point qui reste en même tempsfixé, ou bien il existe une quadrique non dégénérée qui est invariante<strong>et</strong> <strong>le</strong>s ∞ 2 éléments linéaires traversant ce point se transforment <strong>de</strong> troismanières différentes.Ce <strong>de</strong>rnier cas ne peut pas se produire ici, parce que <strong>le</strong>s groupesà six paramètres en question seraient alors primitifs 3 (cf.p. 123 sq.), <strong>et</strong>par conséquent, chaque groupe possédant la constitution ici exigée doitlaisser invariant un système simultané :dxα(x, y, z) =dyβ(x, y, z) =dzγ(x, y, z)ou, ce qui revient au même, une famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ 2 courbes :ϕ(x, y, z) = const.,ψ(x, y, z) = const.Si nous choisissons alors <strong>le</strong>s coordonnées x, y, z <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que lafamil<strong>le</strong> invariante <strong>de</strong> courbes reçoive la forme : x = const., y = const.,alors tous <strong>le</strong>s groupes recherchés sont <strong>de</strong> la forme :X k f = ξ k (x, y) p + η k (x, y) q + ζ k (x, y, z) r(k =1···6).D’après <strong>le</strong> Tome 1, p. 307, Proposition 4, <strong>le</strong>s six transformationsinfinitésima<strong>le</strong>s réduites :X k f = ξ k (x, y) p + η k (x, y) q (k =1···6)3 Déjà étudiés <strong>et</strong> traités il y a un instant au § 86.


186 Division V. Chapitre 20. § 87.produisent un groupe dans l’espace <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux variab<strong>le</strong>s x, y qui estisomorphe-holoédrique, ou isomorphe-méroédrique 4 X 1 f . . .X 6 f.Nous voulons tout d’abord considérer ce groupe réduit.Si <strong>le</strong> groupe réduit comportait moins <strong>de</strong> cinq paramètres, <strong>le</strong> groupeX 1 f . . .X 6 f comprendrait <strong>de</strong>ux transformations infinitésima<strong>le</strong>s <strong>de</strong> laforme :ω 1 (x, y, z) r, ω 2 (x, y, z) r,donc il comprendrait <strong>de</strong>ux transformations infinitésima<strong>le</strong>s ayant <strong>le</strong>smêmes courbes intégra<strong>le</strong>s, ce qui, d’après la Proposition 1, p. 176, n’estpas possib<strong>le</strong>, <strong>et</strong> par conséquent, <strong>le</strong> groupe réduit : X 1 f . . .X 6 f doitcomporter soit cinq, soit six paramètres. Ainsi, il faut seu<strong>le</strong>ment se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rencore quel<strong>le</strong>s sont <strong>le</strong>s formes différentes que <strong>le</strong> groupe réduitpeut prendre.Si <strong>le</strong> groupe : X 1 f . . .X 6 f dans l’espace <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux variab<strong>le</strong>s x, yest primitif, alors, par un choix approprié <strong>de</strong> x <strong>et</strong> <strong>de</strong> y, il peut toujours,d’après la page 71 recevoir l’une <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux formes 5 :{ p, q, xq, xp − yq, yp, xp + yq(24)p, q, xq, xp − yq, yp.D’un autre côté, si <strong>le</strong> groupe : X 1 f . . .X 6 f est imprimitif, il laisse alorsinvariante, lorsqu’on l’interprète comme groupe du plan x, y, au moinsune famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ 1 courbes : ϕ(x, y) = const., mais ensuite alors, dansl’espace <strong>de</strong>s x, y, z, l’équation ϕ(x, y) = const. représente évi<strong>de</strong>mmentune famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ 1 surfaces qui reste invariante 6 par <strong>le</strong> groupe :4 Un espace vectoriel F <strong>de</strong> transformations infinitésima<strong>le</strong>s est dit isomorpheholoédrique[holoedrisch isomorph] à un autre espace vectoriel E <strong>de</strong> transformationsinfinitésima<strong>le</strong>s lorsqu’il existe une application linéaire respectant <strong>le</strong>s croch<strong>et</strong>s (<strong>et</strong> naturel<strong>le</strong>en un certain sens) bijective <strong>de</strong> E dans F . Si l’application (naturel<strong>le</strong>) <strong>de</strong> Edans F est seu<strong>le</strong>ment surjective, mais pas bijective, F est dit isomorphe-méroédrique[meroedrisch isomorph] à E, ou isomorphe [isomorph] (tout court) à E. Ici, l’applicationnaturel<strong>le</strong> <strong>de</strong> « projection » qui, à chaque transformation infinitésima<strong>le</strong> X k , associesa réduite X k respecte <strong>le</strong>s croch<strong>et</strong>s, car [ X j , X k]=∑ 6l=1 c jkl X l décou<strong>le</strong> en eff<strong>et</strong><strong>de</strong> <strong>de</strong> [ X j , X k]=∑ 6l=1 c jkl X l (avec <strong>le</strong>s mêmes constantes <strong>de</strong> structure), mais el<strong>le</strong>n’est pas forcément injective.5 La référence concerne <strong>le</strong> Théorème 6 du Volume III qui classifie tous <strong>le</strong>s groupescontinus finis <strong>de</strong> transformations holomorphes locaux sur un espace à <strong>de</strong>ux dimensions.Le premier est <strong>le</strong> groupe affine ; <strong>le</strong> second est <strong>le</strong> groupe spécial affine.6 Analytiquement, <strong>le</strong>s surfaces ϕ(x, y) = const. sont invariantes par <strong>le</strong> groupeX k , k = 1, . . .,6 si <strong>et</strong> seu<strong>le</strong>ment si X k (ϕ) s’exprime comme une certaine fonctionω k (ϕ) <strong>de</strong> la même fonction ϕ, pour tout k = 1, . . .,6. Puisque ϕ est indépendant<strong>de</strong> z, il est alors évi<strong>de</strong>nt qu’on a <strong>de</strong> même X k (ϕ) = X k (ϕ) = ω k (ϕ),


Groupes <strong>de</strong> R 3 pour <strong>le</strong>squels <strong>de</strong>ux points ont un seul invariant. 187X 1 f . . .X 6 f. Maintenant, comme d’après la Proposition 3, p. 181 <strong>le</strong>groupe : X 1 f . . .X 6 f doit transformer <strong>de</strong> trois manières différentes[dreigliedrig transformiren] toute famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ 1 surfaces qu’il laisseinvariante, il s’ensuit que <strong>le</strong> groupe réduit : X 1 f . . .X 6 f, interprétécomme groupe du plan <strong>de</strong>s x, y, transforme <strong>de</strong> trois manières différentestoute famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ 1 courbes qu’il laisse invariante. Mais parmi<strong>le</strong>s groupes imprimitifs du plan à cinq ou à six paramètres, il n’y en aproportionnel<strong>le</strong>ment qu’un p<strong>et</strong>it nombre qui satisfont à c<strong>et</strong>te exigence,comme <strong>le</strong> montre <strong>le</strong> Tab<strong>le</strong>au p. 71 sq. 7 , <strong>et</strong> pour préciser, par un choix approprié<strong>de</strong> x <strong>et</strong> <strong>de</strong> y, ceux qui ont six paramètres peuvent être rapportésà l’une <strong>de</strong>s trois formes :⎧⎪⎨q, xq, yq, p, xp, x 2 p + xyq(25) q, xq, x 2 q, p, xp + yq, x 2 p + 2xyp⎪⎩q, yq, y 2 q, p, xp, x 2 p,<strong>et</strong> ceux qui ont cinq paramètres à la forme :(26) q, xq, p, 2xp + yq, x 2 p + xyq.Ainsi, nous avons trouvé toutes <strong>le</strong>s formes possib<strong>le</strong>s du grouperéduit : X 1 f . . . X 6 f <strong>et</strong> nous avons seu<strong>le</strong>ment à déterminer encore, pourchacun <strong>de</strong> ces groupes réduits, quels sont <strong>le</strong>s groupes à six paramètres :X 1 f . . .X 6 f en <strong>le</strong>s trois variab<strong>le</strong>s x, y, z qui produisent <strong>de</strong> tels groupesréduits. Avec cela, nous <strong>de</strong>vrons naturel<strong>le</strong>ment tenir compte du fait que<strong>le</strong> groupe : X 1 f . . .X 6 f ne doit pas comporter <strong>de</strong>ux transformationsinfinitésima<strong>le</strong>s ayant <strong>le</strong>s mêmes courbes intégra<strong>le</strong>s. Quand nous auronsdéterminé <strong>le</strong>s différentes formes du groupe : X 1 f . . .X 6 f qui satisfaitc<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière condition, nous <strong>de</strong>vrons fina<strong>le</strong>ment examiner encore, pourchacun <strong>de</strong>s groupes trouvés, si <strong>de</strong>ux points possè<strong>de</strong>nt un invariant, <strong>et</strong> sis > 2 points n’ont aucun invariant essentiel.Nous supposerons en premier lieu que <strong>le</strong> groupe réduit :X 1 f . . .X 6 f a six 8 paramètres, <strong>et</strong> ensuite, nous supposerons qu’il en acinq 9 .k = 1, . . .,6. Géométriquement, la famil<strong>le</strong> <strong>de</strong>s surfaces réglées formées au-<strong>de</strong>ssus<strong>de</strong>s courbes ϕ(x, y) = const. par ajout en chaque point d’une droite parallè<strong>le</strong> à l’axe<strong>de</strong>s z reste invariante par <strong>le</strong>s X k , puisqu’ils se déduisent <strong>de</strong>s X k par simp<strong>le</strong> ajoutd’une transformation ζ ∂ z parallè<strong>le</strong> à l’axe <strong>de</strong>s z.7 À nouveau, il s’agit du Théorème 6.8 Il s’agit <strong>de</strong>s quatre groupes réduits (24) 1 <strong>et</strong> (25) 1 , (25) 2 , (25) 3 .9 Il s’agit <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux groupes réduits (24) 2 <strong>et</strong> (26).


188 Division V. Chapitre 20. § 87.A) Détermination <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s groupesdont <strong>le</strong> groupe réduit possè<strong>de</strong> six paramètresComme nous venons <strong>de</strong> <strong>le</strong> voir, si <strong>le</strong> groupe réduit : X 1 f . . .X 6 f asix paramètres, il peut être rapporté à l’une <strong>de</strong>s quatre formes suivantes10 :(I) p, q, xq, xp + yq, xp − yq, yp(II) p, q, xq, xp + yq, xp − yq, x 2 p + xyp(III) p, q, xq, xp + yq, x 2 q, x 2 p + 2xyq(IV) p, q, xp, yq, x 2 p, y 2 q.Nous <strong>de</strong>vons donc examiner ces quatre cas l’un après l’autre.Premier casEn premier lieu, nous recherchons tous <strong>le</strong>s groupes à six paramètresdans l’espace <strong>de</strong>s x, y, z qui satisfont nos exigences formulées àla page 181 <strong>et</strong> dont <strong>le</strong>s groupes réduits sont <strong>de</strong> la forme (I). Chacun <strong>de</strong>ces groupes est <strong>de</strong> la forme :{ p + ϕ1 r, q + ϕ 2 r, xq + ϕ 3 r, xp + yq + ϕ 4 r(27)xp − yq + ϕ 5 r, yp + ϕ 6 r,où l’on entend par ϕ 1 . . .ϕ 6 <strong>de</strong>s fonctions <strong>de</strong> x, y, z. Ainsi, nous <strong>de</strong>vonsmaintenant déterminer <strong>le</strong>s fonctions ϕ 1 . . .ϕ 6 <strong>de</strong> la manière la plus généra<strong>le</strong>possib<strong>le</strong> pour que <strong>le</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s (27) constituentun groupe à six paramètres qui satisfont nos exigences formuléespage 181, <strong>et</strong> nous pouvons encore choisir la variab<strong>le</strong> z d’une manièr<strong>et</strong>el<strong>le</strong> que la forme <strong>de</strong>s fonctions ϕ 1 . . .ϕ 6 soit la plus simp<strong>le</strong> possib<strong>le</strong>.On peut supposer <strong>de</strong>puis <strong>le</strong> début qu’à la place <strong>de</strong> z, on a introduitune solution <strong>de</strong> l’équation différentiel<strong>le</strong> :∂f∂x + ϕ 1(x, y, z) ∂f∂z = 0qui n’est pas indépendante <strong>de</strong> z ; grâce à ce choix, la transformationinfinitésima<strong>le</strong> p + ϕ 1 r prend la forme simp<strong>le</strong> : p, tandis que la forme10 Pour étudier <strong>le</strong> groupe (II), qui correspond exactement à (25) 1 , on remplace <strong>le</strong>s<strong>de</strong>ux générateurs infinitésimaux xp <strong>et</strong> yq par xp−yq <strong>et</strong> xp+yq. Ces quatre générateursdu groupe réduit X 1 , . . . , X 6 , lorsqu’il possè<strong>de</strong> six paramètres, sont réécrits dans unautre ordre, adaptés à l’avance aux calculs <strong>de</strong> réduction <strong>et</strong> <strong>de</strong> normalisation du groupeX 1 , . . .,X 6 qui vont suivre.


Groupes <strong>de</strong> R 3 pour <strong>le</strong>squels <strong>de</strong>ux points ont un seul invariant. 189<strong>de</strong>s autres transformations n’est pas essentiel<strong>le</strong>ment modifiée 11 . Nouspouvons donc supposer désormais que ϕ 1 est simp<strong>le</strong>ment nul.À présent, il s’ensuit 12 :[p, q + ϕ2 r ] = ∂ϕ 2∂x r.Mais comme notre groupe ne renferme pas <strong>de</strong> transformation infinitésima<strong>le</strong><strong>de</strong> la forme 13 : ψ(x, y, z) r, <strong>le</strong> coefficient ∂ϕ 2en facteur <strong>de</strong>vant∂xr doit s’annu<strong>le</strong>r i<strong>de</strong>ntiquement, c’est-à-dire que ϕ 2 doit être libre <strong>de</strong> x.Si <strong>de</strong> plus nous introduisons : z 1 = ω(y, z) comme nouvel<strong>le</strong> variab<strong>le</strong>, pconserve sa forme 14 tandis que la secon<strong>de</strong> transformation infinitésima<strong>le</strong><strong>de</strong>vient :( ∂ωq + ϕ 2 (y, z) r = q +∂y + ϕ ∂ω)2 · r 1 .∂zSi nous choisissons ω <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que l’équation : ω y + ϕ 2 ω z = 0est satisfaite, alors <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux premières transformations infinitésima<strong>le</strong>s<strong>de</strong> notre groupe reçoivent la forme :p, q.Afin <strong>de</strong> déterminer ϕ 3 , calculons <strong>le</strong>s croch<strong>et</strong>s :[p, xq + ϕ3 r ] = q + ∂ϕ 3∂x r[q, xq + ϕ3 r ] ∂ϕ 3=∂y r,qui montrent que ϕ 3 dépend seu<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> z ; mais par ail<strong>le</strong>urs, ϕ 3 nepeut pas non plus s’annu<strong>le</strong>r, parce que sinon, notre groupe comprendrait<strong>de</strong>ux transformations infinitésima<strong>le</strong>s : q <strong>et</strong> xq, dont <strong>le</strong>s courbesintégra<strong>le</strong>s coïnci<strong>de</strong>nt, or ce cas est exclu, d’après la page 181. Nouspouvons donc introduire comme nouvel<strong>le</strong> coordonnée z une fonction11 En fait, tout changement <strong>de</strong> coordonnées loca<strong>le</strong>s <strong>de</strong> la forme x = x, y = y <strong>et</strong>z = z(x, y, z) où la fonction z, quelconque, est seu<strong>le</strong>ment supposée satisfaire la conditionz z ≠ 0 assurant qu’il s’agit d’un difféomorphisme local, a la propriété <strong>de</strong> laisserinchangés <strong>le</strong>s parties en p <strong>et</strong> en q <strong>de</strong> chacune <strong>de</strong>s six transformations infinitésima<strong>le</strong>s dugroupe. Par exemp<strong>le</strong>, xp+yq+ϕ 4 r se transforme en xp+yq+ ( ϕ 4 z z +xz x +yz y)r.Ce phénomène est bien sûr général <strong>et</strong> sera utilisé dans d’autres contextes.12 La plupart du temps, <strong>le</strong> « croch<strong>et</strong> » n’est pas nommé par <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> <strong>et</strong> il esttoujours noté au moyen <strong>de</strong> parenthèses.13 — puisque <strong>le</strong> groupe réduit X 1 , . . . , X 6 est <strong>de</strong> dimension six, ou parce qu’ons’en convainc aisément par un examen <strong>de</strong>s six générateurs (27) —14 — tandis que <strong>le</strong>s quatre transformations infinitésima<strong>le</strong>s restantes conserventel<strong>le</strong>s aussi essentiel<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>ur forme —


190 Division V. Chapitre 20. § 87.<strong>de</strong> z qui rend ϕ 3 = 1, <strong>et</strong> comme cela n’a pas d’influence sur p <strong>et</strong> sur q,il en décou<strong>le</strong> que <strong>le</strong>s trois premières transformations infinitésima<strong>le</strong>s <strong>de</strong>notre groupe se présentent maintenant sous la forme :p, q, xq + r.En calculant <strong>le</strong>s croch<strong>et</strong>s <strong>de</strong> : xp+yq+ϕ 4 r avec p <strong>et</strong> q, on vérifie, exactementcomme pour ϕ 3 , que ϕ 4 dépend seu<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> z ; mais commepar ail<strong>le</strong>urs on obtient aussi 15 :[xq + r, xp + yq + ϕ4 (z) r ] = ϕ ′ 4(z) r,il s’ensuit que ϕ ′ 4(z) = 0, d’où ϕ 4 (z) = c, <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que nousobtenons la transformation infinitésima<strong>le</strong> :xp + yq + cr.Exactement comme pour ϕ 3 <strong>et</strong> ϕ 4 , on vérifie aussi que ϕ 5 ne dépendque <strong>de</strong> z ; <strong>de</strong> plus, nous obtenons :[xq + r, xp − yq + ϕ5 (z) r ] = −2xq + ϕ ′ 5(z) r,<strong>et</strong> donc 16 : ϕ ′ 5 (z) = −2, c’est-à-dire : ϕ 5(z) = −2z + const. Mais enintroduisant une nouvel<strong>le</strong> coordonnée z, on peut annu<strong>le</strong>r la constanted’intégration, sans modifier la forme <strong>de</strong>s précé<strong>de</strong>ntes 17 transformationsinfinitésima<strong>le</strong>s. <strong>Ens</strong>uite, en calculant <strong>le</strong> croch<strong>et</strong> :[xp + yq + cr, xp − yq − 2zr]= −2cr15 Il sera maintenant fréquemment sous-entendu que <strong>le</strong>s croch<strong>et</strong>s [ ]X j , X k calculéspar la suite doivent, d’après l’hypothèse que X 1 , . . . , X 6 forment une algèbre <strong>de</strong><strong>Lie</strong>, s’exprimer comme certaines combinaisons linéaires λ 1 X 1 + · · · + λ 6 X 6 à coefficientsconstants <strong>de</strong> X 1 , . . .,X 6 eux-mêmes. Dans la plupart <strong>de</strong>s cas, en inspectantla partie en p <strong>et</strong> en q <strong>de</strong> chaque X k , on voit d’un seul coup d’œil <strong>le</strong>s seuls constantesλ k possib<strong>le</strong>s qui peuvent apparaître, sans avoir à résoudre un système linéaire. Unefois que ces constantes sont déterminées, on en déduit une condition intéressante sur<strong>le</strong>s fonctions inconnues ϕ 1 , . . . , ϕ 6 . Par exemp<strong>le</strong>, lorsque <strong>le</strong> croch<strong>et</strong> calculé est <strong>de</strong> laforme ψ r, nécessairement toutes <strong>le</strong>s constantes λ k sont nul<strong>le</strong>s, donc ψ ≡ 0, <strong>et</strong> celadonne une équation différentiel<strong>le</strong> sur <strong>le</strong>s inconnues ϕ k . <strong>Engel</strong> <strong>et</strong> <strong>Lie</strong> organisent <strong>le</strong>s calculs<strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que la détermination <strong>et</strong> la normalisation <strong>de</strong> ces fonction s’effectuent<strong>de</strong> manière progressive <strong>et</strong> graduel<strong>le</strong>.16 Ce croch<strong>et</strong> doit être combinaison linéaire <strong>de</strong>s six transformations infinitésima<strong>le</strong>s(27), dont <strong>le</strong>s quatre premières : p, q, xq + r <strong>et</strong> xp + yq + cr ont déjà été normalisées.Puisque <strong>le</strong> membre <strong>de</strong> droite du croch<strong>et</strong> calculé contient seu<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> terme−2xq en p <strong>et</strong> en q, la combinaison linéaire en question ne peut être que : −2 (xq + r),d’où ϕ ′ 5 (z)r = −2 r.17 Les quatre premières transformations infinitésima<strong>le</strong>s déjà normalisées sont <strong>de</strong>la forme ξ p + ζ q, sans terme en ζ r, <strong>et</strong> el<strong>le</strong>s restent invariab<strong>le</strong>s par tout changement<strong>de</strong> coordonnées <strong>de</strong> la forme x = x, y = y, z = z(x, y, z).


Groupes <strong>de</strong> R 3 pour <strong>le</strong>squels <strong>de</strong>ux points ont un seul invariant. 191on obtient que la constante c doit aussi s’annu<strong>le</strong>r.Fina<strong>le</strong>ment, pour déterminer encore ϕ 6 — qui ne dépend naturel<strong>le</strong>mentque <strong>de</strong> z —, formons <strong>le</strong>s croch<strong>et</strong>s :[xq + r, yp + ϕ6 (z) r ] = xp − yq + ϕ ′ 6 (z) r[xp − yq − 2zr, yp + ϕ6 (z) r ] = −2yp − 2{zϕ ′ 6 (z) − ϕ 6(z)} r,d’où il décou<strong>le</strong> :ϕ ′ 6 (z) = −2z, z ϕ′ 6 (z) = 2 ϕ 6(z) = −2z 2 .Par conséquent, nous trouvons que <strong>le</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s<strong>de</strong> notre groupe peuvent recevoir la forme simp<strong>le</strong> :{p, q, xq + r, yq + zr, xp − zr(28)yp − z 2 r.Accessoirement, on peut remarquer que ce groupe apparaît aussi parprolongement 18 [durch Hinzunahme] (cf.p. 165) du groupe linéaire généraldu plan :p, q, xq, yq, xp, yp18 Un difféomorphisme local (x, y) ↦→ (x, y) = ( x(x, y), y(x, y) ) du plan qui estproche <strong>de</strong> l’i<strong>de</strong>ntité transforme un graphe {y = y(x)} en un autre graphe {y = y(x) }<strong>et</strong> transforme aussi <strong>le</strong>s dérivées y x du graphe en :y x := dy dx · ∂y(x, y(x))/∂x=dx dx · ∂x(x, y(x))/∂x = x x + y x y y.x x + y x x yEn appliquant c<strong>et</strong>te formu<strong>le</strong> au groupe local à un paramètre :(x, y) ↦−→ exp(tX)(x, y) =: ( x(x, y, t), y(x, y, t) )engendré par une transformation infinitésima<strong>le</strong> quelconque X = ξ(x, y)p+ζ(x, y)q,<strong>et</strong> en la différentiant par rapport à t en t = 0, on obtient par <strong>le</strong> calcul ([124, 11, 125,109]) :d ∣t=0= η x + [η y − ξ x ] y x + [−ξ y ](y x ) 2 .dt y xAutrement dit, si l’on introduit <strong>le</strong> prolongement X (1) <strong>de</strong> X aux j<strong>et</strong>s d’ordre 1 qui estla transformation infinitésima<strong>le</strong> en <strong>le</strong>s trois variab<strong>le</strong>s (x, y, y x ) définie par :X (1) := ξ(x, y) ∂∂∂x+ η(x, y)∂y + ( η x + [η y − ξ x ]y x + [−ξ y ](y x ) 2) ∂∂y x,alors on réobtient :exp ( tX (1)) (x, y, y x ) = ( x(x, y, t), y(x, y, t), y x (x, y, y x , t) )Les six transformations infinitésima<strong>le</strong>s (28) sont donc bien <strong>de</strong>s prolongements, à l’espace(x, y, z ≡ y x ) <strong>de</strong>s j<strong>et</strong>s d’ordre 1, <strong>de</strong>s six transformations p, q, xq, yq, xp <strong>et</strong>yp.


192 Division V. Chapitre 20. § 87.au moyen du quotient différentiel :dydx = z.Il reste maintenant encore à examiner si notre groupe (28) satisfaitaux exigences <strong>de</strong> la page 166, donc avant tout si <strong>de</strong>ux points <strong>de</strong> l’espace<strong>de</strong>s x, y, z du groupe ont un <strong>et</strong> un seul invariant relativement au groupe.Notre groupe renferme trois transformations infinitésima<strong>le</strong>s quisont d’ordre zéro par rapport à x, y, z <strong>et</strong> dont on ne peut tirer, par combinaisonlinéaire, aucune transformation d’ordre un, ou d’un ordre plusé<strong>le</strong>vé, à savoir :p, q, xq + r.Nous en déduisons que l’origine <strong>de</strong>s coordonnées : x = y = z = 0est un point en position généra<strong>le</strong> 19 . Ce point reste au repos par <strong>le</strong>s troistransformations infinitésima<strong>le</strong>s :yp − z 2 r, xp − yq − 2zr, xp + yq<strong>de</strong> notre groupe. Par conséquent, d’après la Proposition 2, p. 178, l’existenced’un invariant pour <strong>le</strong>s paires <strong>de</strong> points dépend seu<strong>le</strong>ment du faitque <strong>le</strong> déterminant :∣y 0 −z 2x −y −2zx y 0∣ = 2y2 z − 2xyz 2s’annu<strong>le</strong>, ou ne s’annu<strong>le</strong> pas, i<strong>de</strong>ntiquement. Mais comme ce déterminantne s’annu<strong>le</strong> pas i<strong>de</strong>ntiquement, <strong>de</strong>ux points <strong>de</strong> R 3 n’ont sûrementaucun invariant relativement au groupe (28). Ainsi, <strong>le</strong> groupe (28) nefait pas partie <strong>de</strong>s groupes que nous recherchons [ist also für uns unbrauchbar].Deuxième casLe groupe réduit : X 1 f . . . X 6 f a maintenant la forme (II) explicitéepage 188, par suite <strong>de</strong> quoi <strong>le</strong> groupe : X 1 f . . .X 6 f est <strong>de</strong> la forme :{p + ϕ1 r, q + ϕ 2 r, xq + ϕ 3 r, xp + yq + ϕ 4 r(29)xp − yq + ϕ 5 r, x 2 p + xyq + ϕ 6 r,où ϕ 1 . . .ϕ 6 sont <strong>de</strong>s fonctions <strong>de</strong> x, y, z.19 Dès que <strong>le</strong> groupe est (loca<strong>le</strong>ment) transifif, <strong>le</strong>s sous-algèbres d’isotropie <strong>de</strong> toutpoints sont isomorphes <strong>de</strong>ux à <strong>de</strong>ux <strong>et</strong> tout point est en position généra<strong>le</strong>.


Groupes <strong>de</strong> R 3 pour <strong>le</strong>squels <strong>de</strong>ux points ont un seul invariant. 193Les calculs effectués pour <strong>le</strong> premier cas montrent directementque <strong>le</strong>s cinq premières transformations infinitésima<strong>le</strong>s (29) peuvent êtremises sous la forme :p, q, xq + r, xp + yq, xp − yq − 2zr.D’un autre côté, comme <strong>le</strong>s croch<strong>et</strong>s :[p, x 2 p + xyq + ϕ 6 r ] = 2xp + yq + ∂ϕ 6∂x r[q, x 2 p + xyq + ϕ 6 r ] = xq + ∂ϕ 6∂y r[xp + yq, x 2 p + xyq + ϕ 6 r ] = x 2 p + xyq +{x ∂ϕ 6∂x + y ∂ϕ }6r∂ydonnent immédiatement 20 :∂ϕ 6∂x = −z, ∂ϕ 6∂y = 1,x ∂ϕ 6∂x + y ∂ϕ 6∂y = ϕ 6 = y − xz,nous obtenons <strong>le</strong>s six transformations infinitésima<strong>le</strong>s :{p, q, xq + r, xp + yq, xp − yq − 2zr(30)x 2 p + xyq + (y − zx) r.Cel<strong>le</strong>s-ci constituent manifestement un groupe à six paramètres 21 quiprovient aussi par extension [durch Erweiterung] du groupe projectif àsix paramètres du plan :p, q, xq, xp + yq, xp − yq, x 2 p + xyq,<strong>de</strong> la même manière que <strong>le</strong> groupe (28) provient par extension du groupelinéaire général du plan.Cependant, <strong>le</strong> groupe (30) ne fait pas non plus partie <strong>de</strong>s groupesque nous recherchons. En eff<strong>et</strong>, l’origine : x = y = z = 0 qui est20 Rappelons que <strong>le</strong>s membres <strong>de</strong> droite <strong>de</strong> ces trois croch<strong>et</strong>s doivent êtrecombinaisons linéaires à coefficients constants <strong>de</strong>s six transformations infinitésima<strong>le</strong>s(29) — dont <strong>le</strong>s cinq premières sont déjà normalisées —,21 En eff<strong>et</strong>, on peut se convaincre sans aucun calcul <strong>de</strong> la stabilité par croch<strong>et</strong>sgrâce à la propriété généra<strong>le</strong> ([124, 11, 125, 109]) que <strong>le</strong>s croch<strong>et</strong>s entre prolongements[ X (1)j , X (1)kl] ∑ 6 =l=1 c jkl X (1) se comportent exactement <strong>de</strong> la même manièreque <strong>le</strong>s croch<strong>et</strong>s [ X k , X l]=∑ 6l=1 c jkl X l entre <strong>le</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>sinitia<strong>le</strong>s.


194 Division V. Chapitre 20. § 87.à nouveau un point en position généra<strong>le</strong>, reste invariante par <strong>le</strong>s troistransformations infinitésima<strong>le</strong>s :xp + yq, xp − yq − 2zr, x 2 p + xyq + (y − xz) rdu groupe (30), mais <strong>le</strong> déterminant correspondant :x y 0x −y −2z= −2xy(y − xz)∣ x 2 xy y − xz ∣ne s’annu<strong>le</strong> pas i<strong>de</strong>ntiquement, donc <strong>de</strong>ux points <strong>de</strong> R 3 n’ont à nouveauaucun invariant relativement au groupe (30).Troisième casIci, <strong>le</strong> groupe réduit : X 1 f . . .X 6 f a la forme (III), explicitéepage 188, d’où <strong>le</strong> groupe : X 1 f . . .X 6 f est <strong>de</strong> la forme :{p + ϕ1 r, q + ϕ 2 r, xq + ϕ 3 r, xp + yq + ϕ 4 r(31)x 2 q + ϕ 5 r, x 2 p + 2xyq + ϕ 6 r,où l’on entend par ϕ 1 . . .ϕ 6 <strong>de</strong>s fonctions <strong>de</strong> x, y, z.Exactement comme pour <strong>le</strong> premier cas, on vérifie que <strong>le</strong>s quatrepremières transformations infinitésima<strong>le</strong>s (31) peuvent être mises sousla forme :p, q, xq + r, xp + yq + cr.Afin <strong>de</strong> déterminer ϕ 5 , formons <strong>le</strong>s croch<strong>et</strong>s :[p, x 2 q + ϕ 5 r ] = 2xq + ∂ϕ 5∂x r[q, x 2 q + ϕ 5 r ] ∂ϕ 5=∂y r[xq + r, x 2 q + ϕ 5 r ] =(x ∂ϕ 5∂y + ∂ϕ 5∂z)r[xp + yq + cr, x 2 q + ϕ 5 r ] = x 2 q +{x ∂ϕ 5∂x + y ∂ϕ 5∂y + c ∂ϕ 5∂zà partir <strong>de</strong>squels nous obtenons <strong>le</strong>s équations :∂ϕ 5∂x = 2, ∂ϕ 5∂y = ∂ϕ 5∂z = 0,x ∂ϕ 5∂x + y ∂ϕ 5∂y + c ∂ϕ 5∂z = ϕ 5 = 2x.}r,


Groupes <strong>de</strong> R 3 pour <strong>le</strong>squels <strong>de</strong>ux points ont un seul invariant. 195De la même manière, en calculant <strong>le</strong>s croch<strong>et</strong>s :[p, x 2 p + 2xyq + ϕ 6 r ] = 2xp + 2yq + ∂ϕ 6∂x r[q, x 2 p + 2xyq + ϕ 6 r ] = 2xq + ∂ϕ 6∂y r[xq + r, x 2 p + 2xyq + ϕ 6 r ] = x 2 q +(x ∂ϕ 6∂y + ∂ϕ )6r∂z[xp + yq + cr, x 2 p + 2xyq + ϕ 6 r ] = x 2 p + 2xyq++{x ∂ϕ 6∂x + y ∂ϕ 6∂y + c ∂ϕ }6r,∂znous pouvons déterminer la <strong>de</strong>rnière fonction inconnue ϕ 6 comme suit :∂ϕ 6∂x = 2c, ∂ϕ 6∂y = 2, ∂ϕ 6∂z = 0,x ∂ϕ 6∂x + y ∂ϕ 6∂y + c ∂ϕ 6∂z = ϕ 6 = 2 (y + cx).Par conséquent, notre groupe (31) reçoit la forme 22 :(32)p, q, xq + r, xp + yq + crx 2 q + 2xr, x 2 p + 2xyq + 2 (y + cx) r .Ici aussi : x = y = z = 0 est un point en position généra<strong>le</strong>. Cepoint reste invariant par <strong>le</strong>s trois transformations infinitésima<strong>le</strong>s :{xp + (y − cx) q, x 2 q + 2xr(33)x 2 p + 2xyq + 2 (y + cx) r<strong>et</strong> <strong>le</strong> déterminant correspondant :x y − cx 0(34)0 x 2 2x∣ x 2 2xy 2(y + cx) ∣ = 2x3 (y +cx) −4x 3 y +2x 3 (y −cx)s’annu<strong>le</strong> i<strong>de</strong>ntiquement, sans que tous ses sous-déterminants d’ordre<strong>de</strong>ux ne s’annu<strong>le</strong>nt. Par conséquent (voir Proposition 2, p. 178), <strong>de</strong>uxpoints <strong>de</strong> R 3 : x 1 , y 1 , z 1 <strong>et</strong> x 2 , y 2 , z 2 possè<strong>de</strong>nt un <strong>et</strong> un seul invariant22 Le fait que <strong>le</strong> groupe obtenu soit encadré laisse entendre à l’avance qu’il serar<strong>et</strong>enu dans la liste <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s groupes qui satisfont <strong>le</strong>s conditions formulées à lapage 181. Mais la démonstration <strong>et</strong> <strong>le</strong>s examens ne sont pas terminés.


196 Division V. Chapitre 20. § 87.relativement au groupe (32), <strong>et</strong> pour préciser, on trouve par <strong>le</strong> calcul 23l’expression suivante pour c<strong>et</strong> invariant :(35) z 1 + z 2 − c log(x 2 − x 1 ) 2 − 2 y 2 − y 1x 2 − x 1.Il s’agit alors <strong>de</strong> savoir aussi quel<strong>le</strong> va<strong>le</strong>ur la constante c peut prendre ;mais comme c<strong>et</strong>te constante ne peut visib<strong>le</strong>ment pas être supprimée enintroduisant <strong>de</strong> nouvel<strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s x, y, z, el<strong>le</strong> constitue alors un paramètreessentiel, ce qui veut dire que <strong>le</strong> groupe (32) représente en fait∞ 1 types différents <strong>de</strong> groupes.Maintenant, il reste encore à déterminer si <strong>le</strong> groupe (32) appartientréel<strong>le</strong>ment aux groupes que nous recherchons, donc si <strong>le</strong>s invariantsd’un nombre quelconque <strong>de</strong> points peuvent s’exprimer au moyen<strong>de</strong>s invariants <strong>de</strong> paires <strong>de</strong> points. Mais comme nous avons déjà vu que<strong>de</strong>ux points possè<strong>de</strong>nt un <strong>et</strong> un seul invariant, <strong>et</strong> comme par ail<strong>le</strong>urs, lafamil<strong>le</strong> <strong>de</strong>s pseudosphères (cf.p. 171) :(36) z + z 0 − c log(x − x 0 ) 2 − 2 y − y 0x − x 0= const.n’est pas seu<strong>le</strong>ment constituée <strong>de</strong> ∞ 1 , mais même 24 <strong>de</strong> ∞ 3 surfacesdifférentes, il ne nous reste plus, d’après la Proposition 4, p. 181, qu’àsavoir s’il existe une famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ 2 courbes qui engendre la totalité <strong>de</strong>spseudosphères.Comme <strong>le</strong> point : x = y = z = 0 est un point en position généra<strong>le</strong>,alors, quand il est fixé, pour chaque famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ 2 courbes quiest invariante, la courbe qui passe par ce point doit <strong>de</strong>meurer au repos.Or <strong>le</strong> point : x = y = z = 0 adm<strong>et</strong> <strong>le</strong>s trois transformations infinitésima<strong>le</strong>s(33), qui produisent naturel<strong>le</strong>ment un sous-groupe à trois paramètres<strong>de</strong> (32). En annulant alors tous <strong>le</strong>s sous-déterminants d’ordre<strong>de</strong>ux 25 du déterminant (34) relatif à ce sous-groupe, on trouve quex = y = 0 est la seu<strong>le</strong> courbe passant par <strong>le</strong> point : x = y = z = 0 quireste invariante en même temps que ce point. Mais comme, par l’action23 Soit on forme <strong>et</strong> on résout <strong>le</strong> système (2) avec <strong>le</strong>s six transformations infinitésima<strong>le</strong>sX k , k = 1, . . .,6 du groupe (32), soit on vérifie directement que l’expression<strong>de</strong> c<strong>et</strong> invariant est annulée i<strong>de</strong>ntiquement par X (1)k+ X (2)kpour k = 1, . . .,6.24 Il y a quatre paramètres : z 0 , x 0 , y 0 <strong>et</strong> const., mais la constante absorbe z 0 parpassage du membre <strong>de</strong> gauche au membre <strong>de</strong> droite.25 En restriction à une courbe quelconque passant par l’origine qui est invariantepar <strong>le</strong> sous-groupe d’isotropie fixant l’origine, <strong>le</strong> rang <strong>de</strong> l’espace vectoriel engendrépar <strong>le</strong>s trois transformations infinitésima<strong>le</strong>s (33), donc <strong>de</strong> la matrice (34), doit être 1.


Groupes <strong>de</strong> R 3 pour <strong>le</strong>squels <strong>de</strong>ux points ont un seul invariant. 197du groupe (32), la courbe : x = y = 0 prend toutes <strong>le</strong>s ∞ 2 positions :x = const., y = const., on a donc établi que : x = const., y = const.est l’unique famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ 2 courbes qui est invariante par <strong>le</strong> groupe (32).Enfin, puisque <strong>le</strong>s pseudosphères (36) ne sont évi<strong>de</strong>mment pas composées<strong>de</strong>s courbes <strong>de</strong> la famil<strong>le</strong> : x = const., y = const., il apparaîtque tout nombre <strong>de</strong> points supérieur à <strong>de</strong>ux n’a pas d’invariant essentielrelativement au groupe (32).Mentionnons encore que : x = 0 est l’unique surface passant par<strong>le</strong> point : x = y = z = 0 qui reste invariante par <strong>le</strong> groupe (33), <strong>et</strong> quepar conséquent, mis à part la famil<strong>le</strong> : x = const., il n’existe pas d’autrefamil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ 1 surfaces qui adm<strong>et</strong> <strong>le</strong> groupe (32).Quatrième casMaintenant, nous cherchons tous <strong>le</strong>s groupes à six paramètres <strong>de</strong>l’espace <strong>de</strong>s x, y, z qui satisfont aux exigences <strong>de</strong> la page 181 <strong>et</strong> dont <strong>le</strong>groupe réduit possè<strong>de</strong> la forme :(IV) p, q, xp, yq, x 2 p, y 2 q,Les transformations infinitésima<strong>le</strong>s <strong>de</strong> ce groupe s’écrivent :{p + ϕ1 r, q + ϕ 2 r, xp + ϕ 3 r, yq + ϕ 4 r,(37)x 2 p + ϕ 5 r, y 2 q + ϕ 6 r,où ϕ 1 . . .ϕ 6 sont <strong>de</strong>s fonctions <strong>de</strong> x, y, z.Comme dans <strong>le</strong> premier cas, on vérifie que [<strong>le</strong>s fonctions] ϕ 1 <strong>et</strong> ϕ 2peuvent être supposées nul<strong>le</strong>s sans perte <strong>de</strong> généralité. En calculant <strong>le</strong>croch<strong>et</strong> <strong>de</strong> xp+ϕ 3 r avec p <strong>et</strong> avec q, on obtient que ϕ 3 ne dépend ni <strong>de</strong>x ni <strong>de</strong> y ; <strong>de</strong> plus, comme ϕ 3 ne peut évi<strong>de</strong>mment pas être nul 26 , nouspouvons <strong>le</strong> rendre égal à 1 en introduisant une nouvel<strong>le</strong> variab<strong>le</strong> z, <strong>et</strong>nous avons à présent <strong>le</strong>s trois transformations infinitésima<strong>le</strong>s :p, q, xp + r.En calculant maintenant <strong>le</strong>s croch<strong>et</strong>s <strong>de</strong> ces transformations simplifiéesavec : yq + ϕ 4 r, nous trouvons que ϕ 4 ne dépend pas <strong>de</strong> x, y, z,donc est simp<strong>le</strong>ment une constante ; nous pouvons donc poser ϕ 4 = c,où cependant la constante c ne doit pas s’annu<strong>le</strong>r 27 ,26 Si la constante c était nul<strong>le</strong>, <strong>le</strong> groupe possè<strong>de</strong>rait <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux transformations p <strong>et</strong>xp dont <strong>le</strong>s courbes intégra<strong>le</strong>s coïnci<strong>de</strong>raient, ce qui serait exclut par la Proposition 1p. 176.27 Si la fonction ϕ 4 était i<strong>de</strong>ntiquement nul<strong>le</strong>, <strong>le</strong> groupe possè<strong>de</strong>rait <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux transformationsq <strong>et</strong> yp dont <strong>le</strong>s courbes intégra<strong>le</strong>s coïnci<strong>de</strong>raient.


198 Division V. Chapitre 20. § 87.Afin <strong>de</strong> déterminer aussi ϕ 5 , formons <strong>le</strong>s croch<strong>et</strong>s :[p, x 2 p + ϕ 5 r ] = 2xp + ∂ϕ 5∂x r[q, x 2 p + ϕ 5 r ] ∂ϕ 5=∂y r[yq + cr, x 2 p + ϕ 5 r ] =(y ∂ϕ 5∂y + c ∂ϕ 5∂z)r[xp + r, x 2 p + ϕ 5 r ] = x 2 p +(x ∂ϕ 5∂x + ∂ϕ 5∂zLes trois premières <strong>de</strong> ces équations montrent que :∂ϕ 5∂x = 2, ∂ϕ 5∂y = ∂ϕ 5∂z = 0,)r.<strong>et</strong> la <strong>de</strong>rnière donne alors : ϕ 5 = 2x.Par un calcul complètement similaire, on trouve : ϕ 6 = 2 cy. Endéfinitive, nous parvenons donc au groupe :(38)p, q, xp + r, yq + cr, x 2 p + 2xr, y 2 q + 2 cyr(c ≠0).Ici, <strong>le</strong> paramètre c est manifestement essentiel <strong>et</strong> ne peut pas être supprimé.La présence <strong>de</strong>s trois transformations infinitésima<strong>le</strong>s : p, q, xp + rmontre que l’origine <strong>de</strong>s coordonnées est un point en position généra<strong>le</strong>.Ce point reste au repos lorsqu’agissent <strong>le</strong>s trois transformations infinitésima<strong>le</strong>s:(39) yq − cxp, x 2 p + 2xr, y 2 q + 2 cyr (c ≠0)du groupe (38). Maintenant comme <strong>le</strong> déterminant correspondant :−cx y 0(40)x 2 0 2x∣ 0 y 2 2cy ∣ = 2 cx2 y 2 − 2 cx 2 y 2s’annu<strong>le</strong> i<strong>de</strong>ntiquement, tandis que ses sous-déterminants d’ordre <strong>de</strong>uxne sont pas tous nuls, nous pouvons en déduire que <strong>de</strong>ux points quelconques<strong>de</strong> l’espace <strong>de</strong>s x, y, z ont un <strong>et</strong> un seul invariant relativementau groupe (38). En fait, on se persua<strong>de</strong> par un calcul aisé que l’expression:(41) z 1 + z 2 − log(x 2 − x 1 ) 2 − c · log(y 2 − y 1 ) 2


Groupes <strong>de</strong> R 3 pour <strong>le</strong>squels <strong>de</strong>ux points ont un seul invariant. 199constitue un invariant, <strong>et</strong> à vrai dire, l’unique invariant <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux points :x 1 , y 1 , z 1 <strong>et</strong> x 2 , y 2 , z 2 .La famil<strong>le</strong> <strong>de</strong>s pseudosphères <strong>de</strong> notre groupe (38) est <strong>de</strong> la forme :(42) z + z 0 − log(x − x 0 ) 2 − c · log(y − y 0 ) 2 = const.Ainsi, el<strong>le</strong> est constituée d’un nombre <strong>de</strong> surfaces qui est supérieur à∞ 1 . Par ail<strong>le</strong>urs, on vérifie, comme dans <strong>le</strong> cas précé<strong>de</strong>nt, en annulant<strong>le</strong>s sous-déterminants d’ordre <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> (40), que x = y = 0 est la seu<strong>le</strong>courbe passant par <strong>le</strong> point : x = y = z = 0 qui reste au repos enmême temps que ce point <strong>et</strong> donc aussi que la famil<strong>le</strong> <strong>de</strong>s ∞ 2 courbes :x = const., y = const. est la seu<strong>le</strong> qui reste invariante par <strong>le</strong> groupe (38).Mais comme la pseudosphère (42) n’est manifestement pas constituéepar <strong>le</strong>s courbes <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te famil<strong>le</strong>, on en déduit avec certitu<strong>de</strong>, grâce àla Proposition 4, p. 181, qu’un nombre <strong>de</strong> points supérieur à <strong>de</strong>ux nepossè<strong>de</strong> aucun invariant essentiel relativement au groupe (38).On peut encore mentionner qu’en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux famil<strong>le</strong>s <strong>de</strong> surfaces: x = const. <strong>et</strong> y = const., il n’existe pas d’autre famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ 1surfaces qui soit invariante par <strong>le</strong> groupe (38).B) Détermination <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s groupesdont <strong>le</strong> groupe réduit possè<strong>de</strong> cinq paramètresEn c<strong>et</strong>te circonstance, d’après <strong>le</strong>s pages 185 sq., <strong>le</strong> groupe réduit :X 1 f . . .X 6 f peut être rapporté aux <strong>de</strong>ux formes suivantes :(V) p, q, xq, xp − yq, yp(VI) p, q, xq, 2xp + yq, x 2 p + xyq.Par conséquent, nous <strong>de</strong>vons encore traiter maintenant ces <strong>de</strong>ux cas.Cinquième casSi <strong>le</strong> groupe réduit est <strong>de</strong> la forme (V), <strong>le</strong> groupe : X 1 f . . .X 6 fpeut être mis sous la forme :{ ϕ r, p + ϕ1 r, q + ϕ 2 r, xp − yq + ϕ 3 r,(43)xq + ϕ 4 r, yp + ϕ 5 r,où l’on entend par ϕ, ϕ 1 , . . .,ϕ 5 <strong>de</strong>s fonctions <strong>de</strong> x, y, z.


200 Division V. Chapitre 20. § 87.Ce cas a déjà été complètement étudié aux pages 157 sq., où l’ona démontré 28 que <strong>le</strong> groupe (43) peut être, par un choix approprié <strong>de</strong> lavariab<strong>le</strong> z, rapporté soit à la forme :soit à la forme :(44)r, p, q, xq, xp − yq, yp,{r, p, q + xr, xp − yq,yp + 1 2 y2 r, xq + 1 2 x2 r.Le premier <strong>de</strong> ces groupes n’entre pas en ligne <strong>de</strong> compte, puisque q<strong>et</strong> xq possè<strong>de</strong>nt <strong>le</strong>s mêmes courbes intégra<strong>le</strong>s. Le groupe (44) nous est28 Par souci <strong>de</strong> complétu<strong>de</strong>, voici <strong>le</strong>s arguments. En introduisant ∫ 1ϕdz commenouveau z, on remplace ϕr par r <strong>et</strong> on obtient <strong>le</strong> groupe :r, p + ϕ 1 r, q + ϕ 2 r, xp − yq + ϕ 3 r, xq + ϕ 4 r, yp + ϕ 5 r.Le croch<strong>et</strong> avec r <strong>de</strong>s cinq <strong>de</strong>rniers générateurs montre que chaque ϕ k a la formeϕ k = a k z + ψ k (x, y), k = 1, . . .,5. Mais comme <strong>le</strong> croch<strong>et</strong> :[p + (a1 z + ψ 1 )r, xp − yq + (a 4 z + ψ 4 )r ] = p + χ(x, y)r,où χ est une fonction <strong>de</strong> x <strong>et</strong> <strong>de</strong> y qu’il est inuti<strong>le</strong> <strong>de</strong> calcu<strong>le</strong>r précisément, ne peutqu’être égal à p+(a 1 z+ψ 1 )r, on obtient que a 1 = 0, <strong>et</strong> d’une manière analogue aussi,que a 2 = · · · = a 5 = 0. En introduisant maintenant z− ∫ ψ 1 dx comme nouveau z, onredresse la transformation infinitésima<strong>le</strong> p+ψ 1 r en p. Le croch<strong>et</strong> [ p, q+ψ 2 r ] = ∂ψ2∂x rmontre alors que ϕ 2 = Cx + χ(y), <strong>et</strong> on peut annu<strong>le</strong>r ensuite la fonction χ(y) enintroduisant z − ∫ χ dy comme nouveau z. Le groupe considéré est ainsi réduit à laforme :r, p, q + Cxr, xp − yq + ψ 3 r, xq + ψ 4 r, yp + ψ 5 r,où ψ 3 , ψ 4 , ψ 5 sont <strong>de</strong>s fonctions <strong>de</strong> (x, y). Le croch<strong>et</strong> [ p, xp−yq+ψ 3 r ] = p+ ∂ψ3∂x rmontre que ψ 3 = ax + τ(y). D’un autre côté, on a :[q + Cxr, xp − yq + (ax + τ)r]= −q +(τ ′ (y) − Cx)r,d’où τ ′ (y) est constant = b <strong>et</strong> τ(y) = by, si l’on supprime la constante d’intégrationgrâce à la présence <strong>de</strong> la (première) transformation infinitésima<strong>le</strong> r. En introduisantencore z − ax + by comme nouveau z, on obtient simp<strong>le</strong>ment la transformation infinitésima<strong>le</strong>xp − yq, tandis que r, p <strong>et</strong> q + Cxr ne changent pas essentiel<strong>le</strong>ment <strong>de</strong>forme. De plus, on a :[p, xq + ψ4 r ] = q + ∂ψ4∂x r,[q + Cxr, xq + ψ4 r ] = ∂ψ4∂y r,d’où en faisant abstraction <strong>de</strong> la constante d’intégration (superflue) : ψ 4 = 1 2 Cx2 +ky.Mais <strong>le</strong> croch<strong>et</strong> :[xp − yq, xq + (12 Cx2 + ky)r ] = 2xq + (Cx 2 − ky)rmontre que la constante k s’annu<strong>le</strong>. Enfin, on montre d’une manière analogue queψ 5 = 1 2 Cy2 . Si C = 0, on obtient <strong>le</strong> premier groupe ; si C ≠ 0, en remplaçant z par1Cz, on obtient <strong>le</strong> second groupe (44).


Groupes <strong>de</strong> R 3 pour <strong>le</strong>squels <strong>de</strong>ux points ont un seul invariant. 201déjà connu, d’après <strong>le</strong> Tome II (voir <strong>le</strong> Théorème 66, p. 421) ; <strong>de</strong> plus,nous savons qu’en introduisant <strong>le</strong>s expressions x, 1 y, z − 1 xy comme2 2nouvel<strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s à la place <strong>de</strong> x, y, z, ce groupe se transforme 29 en <strong>le</strong>groupe projectif suivant (loc. cit., pp. 445 sq.) :(45) p − yr, q + xr, r, xq, xp − yq, yp .Ainsi, pour notre recherche, nous souhaitons considérer ce groupe fondamenta<strong>le</strong>mentsous c<strong>et</strong>te forme projective.La présentation <strong>de</strong>s trois transformations infinitésima<strong>le</strong>s : p − yr,q + xr, r montre que x = y = z = 0 est un point en position généra<strong>le</strong>.Mais comme ce point reste au repos par l’action <strong>de</strong>s trois transformationsinfinitésima<strong>le</strong>s :(46) xq, xp − yq, ypdu groupe (45), <strong>et</strong> comme <strong>le</strong> déterminant correspondant :0 x 0(47)x −y 0∣ y 0 0 ∣s’annu<strong>le</strong> i<strong>de</strong>ntiquement, sans que tous ses sous-déterminants d’ordre<strong>de</strong>ux en fassent <strong>de</strong> même, il décou<strong>le</strong> très certainement <strong>de</strong> la Proposition2 p. 178 que <strong>de</strong>ux points : x 1 , y 1 , z 1 <strong>et</strong> x 2 , y 2 , z 2 possè<strong>de</strong>nt un <strong>et</strong> unseul invariant relativement au groupe (45). Pour c<strong>et</strong> invariant, on trouv<strong>et</strong>rès faci<strong>le</strong>ment l’expression :(48) z 2 − z 1 + x 1 y 2 − x 2 y 1 .La famil<strong>le</strong> <strong>de</strong>s pseudosphères :(49) z − z 0 + x 0 y − y 0 x = const.appartenant à ce groupe consiste en ∞ 3 surfaces différentes <strong>et</strong> pour préciser,el<strong>le</strong> consiste en tous <strong>le</strong>s plans <strong>de</strong> l’espace <strong>de</strong>s x, y, z. Comme<strong>de</strong> plus, d’après <strong>le</strong> Théorème 73 p. 445 du Tome II, <strong>le</strong> groupe (44)ne laisse invariante aucune autre famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ 2 courbes que la famil<strong>le</strong>: x = const., y = const., il en va évi<strong>de</strong>mment <strong>de</strong> même pour<strong>le</strong> groupe (45), <strong>et</strong> comme <strong>le</strong>s ∞ 3 pseudosphères (49) ne sont pas entièrementconstituées <strong>de</strong>s courbes <strong>de</strong> la famil<strong>le</strong> : x = const., y = const., ondéduit donc immédiatement <strong>de</strong> la Proposition 4, p. 181, qu’un nombre29 On vérifie en eff<strong>et</strong> par <strong>le</strong> calcul que (44) <strong>de</strong>vient (45), <strong>le</strong>quel est effectivementun sous-groupe du groupe projectif engendré par <strong>le</strong>s 8 générateurs infinitésimaux p, q,xp, yp, xq, yq, xxp + xyq, xyp + yyq.


202 Division V. Chapitre 20. § 87.<strong>de</strong> points supérieur à <strong>de</strong>ux ne possè<strong>de</strong> aucun invariant essentiel relativementau groupe (44).On doit encore mentionner que <strong>le</strong> groupe (45) ne laisse en généralinvariante aucune famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ 1 surfaces (voir Tome II, loc. cit.).Sixième casLorsque <strong>le</strong> groupe réduit : X 1 f . . .X 6 f a la forme (VI), p. 199, <strong>le</strong>groupe : X 1 f . . .X 6 f est nécessairement <strong>de</strong> la forme :{ϕ r, p + ϕ1 r, q + ϕ 2 r, 2xp + yq + ϕ 3 r,(50)xq + ϕ 4 r, x 2 p + xyq + ϕ 5 r,où ϕ, ϕ 1 , . . .,ϕ 5 sont <strong>de</strong>s fonctions <strong>de</strong> x, y, z.Exactement comme aux pages 157 sq. 30 , on peut parvenir à ce queϕ = 1, ϕ 1 = 0, ϕ 2 = Cx ; alors en même temps, <strong>le</strong>s fonctions ϕ 3 , ϕ 4 <strong>et</strong>ϕ 5 sont certainement toutes indépendantes <strong>de</strong> z.Pour la détermination <strong>de</strong> ϕ 3 (x, y), formons <strong>le</strong>s croch<strong>et</strong>s :[p, 2xp + yq + ϕ3 r ] = 2 p + ∂ϕ 3∂x r[q + Cxr, 2xp + yq + ϕ3 r ] ( ∂ϕ3)= q +∂y − 2Cx r,qui donnent :∂ϕ 3∂x = D, ∂ϕ 3∂y= 3 Cx + E,d’où : C = 0 <strong>et</strong> ϕ 3 = D x + E y + H, où la constante H peut être simp<strong>le</strong>mentsupprimée 31 , tandis que <strong>le</strong>s constantes D <strong>et</strong> E sont ramenées àzéro lorsqu’on introduit : z − 1 Dx − Ey comme nouvel<strong>le</strong> variab<strong>le</strong> z.2Nous avons donc maintenant ramené <strong>le</strong>s quatres premières transformations(50) à la forme simplifiée :p, q, r, 2 xp + yq.En calculant <strong>le</strong>s croch<strong>et</strong>s <strong>de</strong> xq + ϕ 4 (x, y) r avec p <strong>et</strong> avec q, onvérifie que ϕ 4 a la forme : ϕ 4 = Lx+My, où la constante d’intégration(superflue) a déjà été supprimée 32 . En outre, on obtient :[2xp + yq, xq + (Lx + My) r]= xq + (2Lx + My) r,30 Voir la note <strong>de</strong> rappel au début <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> du cinquième cas.31 — en soustrayant Hr à la transformation infinitésima<strong>le</strong> 2xp + yq + ϕ 3 r.32 — à nouveau, en soustrayant un multip<strong>le</strong> <strong>de</strong> la transformation r.


Groupes <strong>de</strong> R 3 pour <strong>le</strong>squels <strong>de</strong>ux points ont un seul invariant. 203<strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que L doit être nul, tandis que M ne peut naturel<strong>le</strong>ment pass’annu<strong>le</strong>r, sinon q <strong>et</strong> xq auraient <strong>le</strong>s mêmes courbes intégra<strong>le</strong>s. En introduisant1 z comme nouvel<strong>le</strong> variab<strong>le</strong> z, on peut faire que la constanteMM soit simp<strong>le</strong>ment éga<strong>le</strong> à 1.Enfin, formons <strong>le</strong>s croch<strong>et</strong>s :[p, x 2 p + xyq + ϕ 5 r ] = 2xp + yq + ∂ϕ 5∂x r[q, x 2 p + xyq + ϕ 5 r ] = xq + ∂ϕ 5∂y r[xq + yr, x 2 p + xyq + ϕ 5 r ] =(x ∂ϕ )5∂y − xy r[2xp + yq, x 2 p + xyq + ϕ 5 r ] = 2(x 2 p + xyq) +(2x ∂ϕ 5∂x + y ∂ϕ )5r,∂yà partir <strong>de</strong>squels nous trouvons :∂ϕ 5∂x = c, ∂ϕ 5∂y = y2x ∂ϕ 5∂x + y ∂ϕ 5∂y = 2cx + y2 = 2 ϕ 5 + K,où cependant la constante K peut être simp<strong>le</strong>ment réduite à zéro. Ainsi,nous sommes parvenus au groupe :{p, q, r, 2xp + yq, xq + yr(51)x 2 p + xyq + ( 1 2 y2 + cx) r.Puisque <strong>le</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s p, q, r sont présentes,<strong>le</strong> point x = y = z = 0 est à nouveau un point en position généra<strong>le</strong>. Lestransformations infinitésima<strong>le</strong>s du groupe (51) qui laissent invariant cepoint sont :2xp + yq, xq + yr, x 2 p + xyq + ( 1 2 y2 + cx) r,<strong>et</strong> <strong>le</strong> déterminant correspondant :2x y 00 x y∣ x 2 1xy2 y2 + cx ∣a la va<strong>le</strong>ur :x 2 y 2 + 2cx 3 − 2x 2 y 2 + x 2 y 2 = 2cx 3 ,qui ne s’annu<strong>le</strong> donc i<strong>de</strong>ntiquement que lorsque la constante c a la va<strong>le</strong>urzéro, tandis que <strong>le</strong>s sous-déterminants d’ordre <strong>de</strong>ux ne s’annu<strong>le</strong>nt


204 Division V. Chapitre 20. § 88.pas tous, y compris pour c = 0. Par conséquent, parmi tous <strong>le</strong>s groupes<strong>de</strong> la forme (51), <strong>le</strong> groupe :(52)p, q, r, 2xp + yq, xq + yrx 2 p + xyq + 1 2 y2 rest <strong>le</strong> seul relativement auquel <strong>de</strong>ux points possè<strong>de</strong>nt un <strong>et</strong> un seul invariant.Par <strong>le</strong> calcul, on trouve que c<strong>et</strong> invariant possè<strong>de</strong> la forme :(53) z 2 − z 1 − (y 2 − y 1 ) 22 (x 2 − x 1 ) .La famil<strong>le</strong> <strong>de</strong>s pseudosphères :(54) z − z 0 − (y − y 0) 22 (x − x 0 ) = const.qui appartient à notre groupe (52) consiste manifestement en ∞ 3 surfacesdifférentes. Par ail<strong>le</strong>urs, on se convainc faci<strong>le</strong>ment que <strong>le</strong>s transformationsinfinitésima<strong>le</strong>s du groupe (52) qui fixent <strong>le</strong> point en positiongénéra<strong>le</strong> : x = y = z = 0, ne laissent au repos nul<strong>le</strong> autre courbe passantpar ce point que la droite : x = y = 0 ; par conséquent : x = const.,y = const. est la seu<strong>le</strong> famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ 2 courbes qui reste invariante par <strong>le</strong>groupe (52) <strong>et</strong> la Proposition 4, p. 181 montre à nouveau qu’un nombre<strong>de</strong> points supérieur à <strong>de</strong>ux n’a pas d’invariant essentiel relativement augroupe (52).Pour terminer, remarquons encore que <strong>le</strong> groupe (52) ne laisseinvariante qu’une seu<strong>le</strong> famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ 1 surfaces, à savoir la famil<strong>le</strong> :x = const.Ainsi, nous avons aussi trouvé tous <strong>le</strong>s groupes imprimitifs <strong>de</strong> R 3qui satisfont l’exigence que nous avons formulée page 166.§ 88.D’après <strong>le</strong>s résultats <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux précé<strong>de</strong>nts paragraphes, <strong>le</strong> problèmeénoncé dans l’ouverture du présent chapitre possè<strong>de</strong> la solution suivante1 .Théorème 36. Si un groupe continu fini <strong>de</strong> l’espace <strong>de</strong>s x, y, z estconstitué <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que relativement à son action, <strong>de</strong>ux points ontun <strong>et</strong> un seul invariant tandis que tous <strong>le</strong>s invariants d’un nombre <strong>de</strong>points supérieur à <strong>de</strong>ux peuvent s’exprimer au moyen <strong>de</strong>s invariants <strong>de</strong>s1 Le résultat vaut pour un groupe <strong>de</strong> transformations holomorphes loca<strong>le</strong>s agissantsur C 3 , <strong>le</strong> cas <strong>de</strong>s groupes réels étant traité au § 89 qui suit.


Groupes <strong>de</strong> R 3 pour <strong>le</strong>squels <strong>de</strong>ux points ont un seul invariant. 205paires <strong>de</strong> points, alors <strong>le</strong> groupe est transitif à six paramètres <strong>et</strong> pourpréciser, il est semblab<strong>le</strong> 2 [ähnlich], via une transformation ponctuel<strong>le</strong><strong>de</strong> l’espace <strong>de</strong>s x, y, z, ou bien au groupe <strong>de</strong>s mouvements euclidiens,ou bien au groupe projectif à six paramètres qui stabilise une surface dusecond <strong>de</strong>gré non-dégénérée, ou bien encore à l’un <strong>de</strong>s quatre groupessuivants :[1]p, q, xp + r, yq + cr, x 2 p + 2xr, y 2 q + 2cyrc ≠ 0[2]p, q, xq + r, x 2 q + 2xr, xp + yq + crx 2 p + 2xyq + 2(y + cx) r[3] p − yr, q + xr, r, xq, xp − yq, yp[4]p, q, r, xq + yr, 2xp + yqx 2 p + xyq + 1 2 y2 rLe paramètre c est ici essentiel dans <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux cas [1] <strong>et</strong> [2] <strong>et</strong> ne peutpas être supprimé.Comme nous l’avons montré dans <strong>le</strong>s précé<strong>de</strong>nts paragraphes, chacun<strong>de</strong>s quatre groupes [1] . . . [4] laisse invariante une unique famil<strong>le</strong><strong>de</strong> ∞ 2 courbes, à savoir la famil<strong>le</strong> : x = const., y = const. Maintenant,nous voulons encore ajouter que ces quatre groupes sont entièrementsystatiques 3 .En eff<strong>et</strong>, <strong>le</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s <strong>de</strong>s quatre groupessus-nommés commutent toutes avec la transformation infinitésima<strong>le</strong> r,2 Le langage contemporain appel<strong>le</strong> équiva<strong>le</strong>ntes <strong>de</strong>ux structures géométriques quine diffèrent l’une <strong>de</strong> l’autre que par un changement <strong>de</strong> coordonnées ponctuel<strong>le</strong>s.3 Soit X 1 , . . . , X m un groupe fini continu <strong>de</strong> transformations loca<strong>le</strong>s d’une variétéà n dimension munie <strong>de</strong>s coordonnées (x 1 , . . .,x n ). Un point (x 0 1 , . . .,x0 n ) enposition généra<strong>le</strong> adm<strong>et</strong> un certain nombre m − q <strong>de</strong> transformations infinitésima<strong>le</strong>sY 1 , . . . , Y m−q qui <strong>le</strong> laissent au repos, cf. <strong>le</strong>s rappels <strong>de</strong> la note p. 178. Dans certainescirconstances, il peut exister une sous-variété connexe non vi<strong>de</strong> Λ (avec <strong>de</strong>s singularitéséventuel<strong>le</strong>s) passant par ce point dont chaque point individuel est laissé fixepar toutes <strong>le</strong>s transformations du sous-groupe engendré par Y 1 , . . . , Y m−q , qui n’estautre que <strong>le</strong> sous-groupe d’isotropie <strong>de</strong> (x 0 1 , . . .,x0 n ). Dans ce cas, <strong>le</strong> groupe est ditsystatique, concept introduit par <strong>Lie</strong> en 1884–85. D’après <strong>le</strong> Chap. 24 du Tome I, enreprenant <strong>le</strong>s notations <strong>de</strong> la note p. 178, <strong>le</strong>s équations du plus grand tel ensemb<strong>le</strong> Λsont : ϕ jk (x 1 , . . . , x n ) = ϕ jk (x 0 1 , . . . , x0 n ) pour j = 1, . . .,m − q <strong>et</strong> k = 1, . . .,q. SiΛ est l’ensemb<strong>le</strong> vi<strong>de</strong>, <strong>le</strong> groupe est dit asystatique.


206 Division V. Chapitre 20. § 89.ce qui montre, grâce à la Proposition 2 p. 510 du Tome I, que cesgroupes sont systatiques ; on peut aussi s’en convaincre directement,puisque pour chacun <strong>de</strong>s groupes [1] . . . [4], <strong>le</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>squi fixent un point x 0 , y 0 , z 0 en position généra<strong>le</strong> laissent enmême temps au repos la droite : x = x 0 , y = y 0 .Enfin, mentionnons encore que par l’action <strong>de</strong>s groupes [1], [2],[3], <strong>le</strong>s ∞ 2 éléments linéaires qui passent par chaque point fixé en positiongénéra<strong>le</strong> se transforment <strong>de</strong> trois manières différentes, mais seu<strong>le</strong>ment<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux manières par l’action du groupe [4] ; c’est précisémentparce que <strong>le</strong> groupe [4] renferme, dans <strong>le</strong> voisinage <strong>de</strong> chaque point :x 0 , y 0 , z 0 en position généra<strong>le</strong>, une transformation infinitésima<strong>le</strong> du secondordre en : x − x 0 , y − y 0 , z − z 0 .On pourrait se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r si <strong>le</strong>s groupes [1], [2], [4], qui ne sontpas présentés sous forme projective, sont transformab<strong>le</strong>s en <strong>de</strong>s groupesprojectifs par un choix approprié <strong>de</strong> coordonnées x, y, z. Pour <strong>le</strong> groupe[4], la réponse à c<strong>et</strong>te question est très certainement non, car s’il <strong>de</strong>vaitse transformer en un groupe projectif, la transformation infinitésima<strong>le</strong>du second ordre qu’il renfermerait dans <strong>le</strong> voisinage du point : x = y =z = 0 en position généra<strong>le</strong> <strong>de</strong>vrait être <strong>de</strong> la forme 4 :(λ x + µ y + ν z)(xp + yq + zr)+ · · · ,où <strong>le</strong>s termes supprimés sont d’ordre trois <strong>et</strong> d’ordre supérieur enx, y, z ; mais comme c<strong>et</strong>te condition nécessaire n’est pas remplie, <strong>le</strong>groupe [4] ne peut sûrement pas être semblab<strong>le</strong> à un groupe projectif.§ 89.Résolution du problème pour <strong>le</strong>s groupes réels.Jusqu’à maintenant, nous avons considéré <strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s x, y, zcomme <strong>de</strong>s quantités comp<strong>le</strong>xes. À présent, nous voulons <strong>le</strong>s limiterau domaine <strong>de</strong>s nombres réels <strong>et</strong> nous voulons résoudre <strong>le</strong> problèmeposé dans l’introduction <strong>de</strong> ce chapitre, en supposant que <strong>le</strong>s groupessont réels <strong>et</strong> que seu<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s transformations ponctuel<strong>le</strong>s qui sont réel<strong>le</strong>ssont admissib<strong>le</strong>s.Nous recherchons donc maintenant tous <strong>le</strong>s groupes continus finisréels <strong>de</strong> R 3 relativement auxquels <strong>de</strong>ux points réels ont un <strong>et</strong> un seulinvariant, tandis que trois points réels ou plus ne possè<strong>de</strong>nt aucun invariantessentiel. Avec cela, nous nous restreignons naturel<strong>le</strong>ment aux4 En eff<strong>et</strong>, <strong>le</strong> groupe projectif contient toutes <strong>le</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>sd’ordre zéro <strong>et</strong> un, <strong>et</strong> en dimension trois, ses transformations du second ordre, aunombre <strong>de</strong> trois, sont : x(xp + y q + z r), y(xp + y q + z r) <strong>et</strong> z(xp + y q + z r).


Groupes <strong>de</strong> R 3 pour <strong>le</strong>squels <strong>de</strong>ux points ont un seul invariant. 207groupes dont <strong>le</strong>s équations finies autorisent un certain nombre <strong>de</strong> différentiationspar rapport aux variab<strong>le</strong>s <strong>et</strong> aux paramètres 1 (cf.p. 365).Dès <strong>le</strong> début, il est clair que <strong>le</strong>s groupes recherchés sont entièrementtransitifs (cf.p. 168). Ainsi, d’après la page 366, nous pouvonsnous imaginer dans chaque cas individuel qu’au moyen d’une transformationponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong>, <strong>de</strong> nouvel<strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s x, y, z sont introduites<strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que <strong>le</strong> groupe concerné est représenté par <strong>de</strong>s équationsréel<strong>le</strong>s, dans <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s fonctions qui apparaissent sont <strong>de</strong>s fonctionsanalytiques <strong>de</strong>s variab<strong>le</strong>s <strong>et</strong> <strong>de</strong>s paramètres, au sens <strong>de</strong> Weierstraß.Ainsi, nous <strong>de</strong>vons seu<strong>le</strong>ment considérer <strong>le</strong>s groupes à m paramètrestels que, dans <strong>le</strong>urs transformations infinitésima<strong>le</strong>s :X k f = ξ k (x, y, z) p + η k (x, y, z) q + ζ k (x, y, z) r(k =1, 2 ··· m),<strong>le</strong>s coefficients ξ k , η k , ζ k sont <strong>de</strong>s séries <strong>de</strong> puissances ordinaires parrapport à x − x 0 , y − y 0 , z − z 0 dans un voisinage d’un point réel quelconqueen position généra<strong>le</strong>, <strong>et</strong> bien entendu, <strong>de</strong>s séries <strong>de</strong> puissancesavec seu<strong>le</strong>ment <strong>de</strong>s coefficients réels.Soit : X 1 f . . .X m f, ou brièvement G m , un tel groupe réel à mparamètres qui satisfait notre exigence concernant <strong>le</strong>s invariants <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux1 On part d’un groupe <strong>de</strong> transformations réel fini continu dont <strong>le</strong>s équationsx ′ i = f i(x 1 , . . .,x n ; a 1 , . . .,a m ), i = 1, . . . , n, ne sont pas forcément analytiques.En supposant seu<strong>le</strong>ment que <strong>le</strong>s f i possè<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>s dérivées continues d’ordre un <strong>et</strong><strong>de</strong>ux par rapport à toutes <strong>le</strong>urs variab<strong>le</strong>s, <strong>Lie</strong> <strong>et</strong> <strong>Engel</strong> énoncent <strong>et</strong> démontrent (Théorème33, p. 366 du Volume III) que lorsque <strong>le</strong> groupe est transitif, il est toujours possib<strong>le</strong>d’introduire loca<strong>le</strong>ment un changement simultané <strong>de</strong> paramètres a ↦→ b = b(a)<strong>et</strong> <strong>de</strong> coordonnées x ↦→ y = y(x) qui transfère <strong>le</strong> groupe en un groupe équiva<strong>le</strong>nty ′ i = g i (y 1 , . . . , y n ; b 1 , . . . , b r ), i = 1, . . .,n, dont toutes <strong>le</strong>s équations sont analytiques.L’énoncé n’est plus valab<strong>le</strong> lorsque <strong>le</strong> groupe n’est pas transitif, comme <strong>le</strong>montre l’exemp<strong>le</strong> q, xq, f(x)q sur <strong>le</strong> plan <strong>de</strong>s (x, y), où f(x) est une fonction différentiab<strong>le</strong>non analytique (cf.[42], p. 368). Le cinquième problème <strong>de</strong> Hilbert (1900)<strong>de</strong>man<strong>de</strong> s’il est possib<strong>le</strong> d’éliminer l’hypothèse <strong>de</strong> différentiabilité, <strong>et</strong> <strong>de</strong> supposerseu<strong>le</strong>ment que <strong>le</strong>s fonctions f i sont continues. En 1952, G<strong>le</strong>ason, <strong>et</strong> indépendamment,Montgomery-Zippin ont établi que tout groupe topologique loca<strong>le</strong>ment euclidien, i.e.qui forme aussi une variété topologique, adm<strong>et</strong> une structure <strong>de</strong> variété analytiqueréel<strong>le</strong> pour laquel<strong>le</strong> il constitue un groupe <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> analytique. En 1955, Montgomery-Zippin ont établi <strong>le</strong> théorème suivant : Si un groupe topologique loca<strong>le</strong>ment compactG agit transitivement <strong>et</strong> effectivement sur un espace topologique X compact <strong>et</strong> loca<strong>le</strong>mentconnexe, alors G possè<strong>de</strong> une structure <strong>de</strong> groupe <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>, <strong>et</strong> X possè<strong>de</strong> unestructure <strong>de</strong> variété analytique réel<strong>le</strong> <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que l’action est analytique ([113] ;[62], pp. 87–88).


208 Division V. Chapitre 20. § 89.points <strong>et</strong> plus. <strong>Ens</strong>uite, l’expression :e 1 X 1 f + · · · + e m X m f,représente la transformation infinitésima<strong>le</strong> généra<strong>le</strong> d’un certain groupeà m paramètres G ′ m <strong>de</strong> transformations comp<strong>le</strong>xes, lorsqu’on y considèrex, y, z comme <strong>de</strong>s variab<strong>le</strong>s comp<strong>le</strong>xes <strong>et</strong> e 1 . . .e m comme <strong>de</strong>s paramètrescomp<strong>le</strong>xes 2 (cf.p. 362). Il est maintenant faci<strong>le</strong> <strong>de</strong> voir que cegroupe G ′ m satisfait éga<strong>le</strong>ment notre exigence concernant <strong>le</strong>s invariants<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux points ou plus, c’est-à-dire : relativement à G ′ m, <strong>de</strong>ux pointsont un <strong>et</strong> un seul invariant, tandis qu’un nombre <strong>de</strong> points supérieur à<strong>de</strong>ux n’a pas d’invariant essentiel. En eff<strong>et</strong>, aussi bien pour G m que pourG ′ m , <strong>le</strong>s invariants <strong>de</strong> s points sont simp<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>s solutions du sytèmecompl<strong>et</strong> :X (1)k f + X(2) k f + · · · + X(s) k f = 0(k = 1 ··· m),<strong>et</strong> <strong>le</strong> fait que l’on considère x, y, z comme <strong>de</strong>s variab<strong>le</strong>s réel<strong>le</strong>s oucomme <strong>de</strong>s variab<strong>le</strong>s comp<strong>le</strong>xes n’a aucune influence sur <strong>le</strong> nombre<strong>de</strong>s solutions <strong>de</strong> ce système compl<strong>et</strong> qui sont indépendantes l’une <strong>de</strong>l’autre. Donc si <strong>de</strong>ux points ont un <strong>et</strong> un seul invariant <strong>et</strong> si tous <strong>le</strong>s invariantsd’un nombre <strong>de</strong> points supérieur à <strong>de</strong>ux peuvent s’exprimer aumoyen <strong>de</strong>s invariants <strong>de</strong> paires <strong>de</strong> points, lorsque x, y, z sont réels, celavaut aussi lorsque x, y, z sont comp<strong>le</strong>xes <strong>et</strong> vice-versa : on peut mêm<strong>et</strong>oujours assurer que tous <strong>le</strong>s invariants <strong>de</strong> s points sont <strong>de</strong>s fonctionsréel<strong>le</strong>s <strong>de</strong>s 3s variab<strong>le</strong>s : x 1 , y 1 , z 1 , . . .,x s , y s , z s .De c<strong>et</strong>te façon, l’énoncé suivant est démontré : Si un groupe réel àm paramètres : X 1 f . . .X m f satisfait notre exigence concernant <strong>le</strong>s invariants<strong>de</strong> plusieurs points, alors, dès qu’on interprète x, y, z comme<strong>de</strong>s variab<strong>le</strong>s comp<strong>le</strong>xes, il fournit un groupe qui possè<strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>spropriétés dégagées au §85 ; <strong>le</strong> groupe : X 1 f . . .X m f est alors nécessairementà six paramètres <strong>et</strong> il est semblab<strong>le</strong> à l’un <strong>de</strong>s groupes du2 Techniquement, c<strong>et</strong>te opération consiste tout simp<strong>le</strong>ment à remplacer par <strong>de</strong>svariab<strong>le</strong>s comp<strong>le</strong>xes <strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s réel<strong>le</strong>s qui apparaissent dans <strong>le</strong>s séries entières par<strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s on peut développer tous <strong>le</strong>s coefficient <strong>de</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>sX k , k = 1, . . .,m. Cela a un sens, parce que <strong>le</strong>s séries en question <strong>de</strong>meurent convergenteslorsque <strong>le</strong>s modu<strong>le</strong>s <strong>de</strong>s variab<strong>le</strong>s comp<strong>le</strong>xes satisfont <strong>le</strong>s mêmes inégalités quecel<strong>le</strong>s que <strong>de</strong>vaient satisfaire <strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s réel<strong>le</strong>s initia<strong>le</strong>s pour garantir la convergence.<strong>Ens</strong>uite, pour reconstituer <strong>le</strong>s équations finies du groupe via l’application exponentiel<strong>le</strong>,on peut faire prendre aussi <strong>de</strong>s va<strong>le</strong>urs comp<strong>le</strong>xes aux variab<strong>le</strong>s « temporel<strong>le</strong>s »t qui apparaissent dans <strong>le</strong>s groupes à un paramètre exp(tX k )(x) engendrés par <strong>le</strong>sX k .


Groupes <strong>de</strong> R 3 pour <strong>le</strong>squels <strong>de</strong>ux points ont un seul invariant. 209Théorème 36, p. 204, grâce à une transformation réel<strong>le</strong> ou comp<strong>le</strong>xe <strong>de</strong>l’espace <strong>de</strong>s x, y, z.Les groupes énumérés par <strong>le</strong> Théorème 36 se rangent dans <strong>de</strong>uxclasses. Chaque groupe <strong>de</strong> la première classe 3 laisse invariante uneéquation du second <strong>de</strong>gré :(55)α 11 dx 2 + α 22 dy 2 + α 33 dz 2 + 2α 12 dxdy + 2α 23 dydz + 2α 31 dzdx = 0,où <strong>le</strong>s α sont <strong>de</strong>s fonctions <strong>de</strong> x, y, z <strong>et</strong> où <strong>le</strong> déterminant correspondantne s’annu<strong>le</strong> pas i<strong>de</strong>ntiquement ; en outre ces groupes sont constitués d<strong>et</strong>el<strong>le</strong> sorte que <strong>le</strong>s ∞ 2 éléments linéaires passant par chaque point fixé enposition généra<strong>le</strong> sont transformés par une action à trois paramètres. Lesgroupes <strong>de</strong> la <strong>de</strong>uxième classe, i.e. <strong>le</strong>s groupes [1] . . . [4], se distinguenten ce que chacun d’entre eux laisse invariante la famil<strong>le</strong> <strong>de</strong>s ∞ 2 droites :x = const., y = const., sans stabiliser aucune autre famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ 2courbes.Si un groupe réel à six paramètres est semblab<strong>le</strong> à l’un <strong>de</strong>s groupesqui appartient à la première <strong>de</strong> nos <strong>de</strong>ux classes, alors il doit évi<strong>de</strong>mmentlaisser invariante une équation <strong>de</strong> la forme (55) dans laquel<strong>le</strong><strong>le</strong>s α sont <strong>de</strong>s fonctions réel<strong>le</strong>s <strong>de</strong> x, y, z <strong>et</strong> dont <strong>le</strong> déterminant nes’annu<strong>le</strong> pas i<strong>de</strong>ntiquement ; <strong>et</strong> <strong>de</strong> plus, <strong>le</strong>s ∞ 2 éléments linéaires passantpar chaque point réel fixé en position généra<strong>le</strong> doivent encore êtr<strong>et</strong>ransformés par une action à trois paramètres. Mais d’après <strong>le</strong> Théorème35, p. 391 4 , chaque groupe réel à six paramètres <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te espèceest semblab<strong>le</strong>, par une transformation ponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong>, ou bienau groupe <strong>de</strong>s mouvements euclidiens, ou bien au groupe projectif réelà six paramètres qui laisse invariants <strong>le</strong> volume ainsi qu’une coniquenon-dégénérée infiniment éloignée, ou bien encore au groupe projectifà six paramètres d’une surface du second <strong>de</strong>gré non-dégénérée, qui estreprésentée par une équation réel<strong>le</strong> entre x, y <strong>et</strong> z ; ici cependant, on3 — à savoir, <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux groupes imprimitifs (22) <strong>et</strong> (23) —4 Ce théorème établit que si un groupe réel continu dans un espace à n > 2variab<strong>le</strong>s x 1 , . . .,x n laisse invariante une équation réel<strong>le</strong> :1...n∑k, νf kν (x 1 , . . .,x n )dx k dx ν = 0dont <strong>le</strong> déterminant ne s’annu<strong>le</strong> pas i<strong>de</strong>ntiquement, <strong>et</strong> si en outre, il est constitué d<strong>et</strong>el<strong>le</strong> sorte qu’il transforme <strong>de</strong> la manière la plus généra<strong>le</strong> possib<strong>le</strong> <strong>le</strong>s ∞ n−1 élémentslinéaires qui passent par un tout point fixé en position généra<strong>le</strong>, alors ce groupe possè<strong>de</strong>soit (n+1)(n+2)1·2, soit n(n+1)1·2, soit n(n+1)1·2paramètres. Dans chacun <strong>de</strong>s trois cas,<strong>le</strong>s groupes sont décrit par un système <strong>de</strong> générateurs explicites.


210 Division V. Chapitre 20. § 89.doit encore distinguer trois cas, selon que c<strong>et</strong>te surface du second <strong>de</strong>gréest imaginaire, ou réel<strong>le</strong> <strong>et</strong> non réglée, ou réel<strong>le</strong> <strong>et</strong> réglée.À présent, nous recherchons tous <strong>le</strong>s groupes réels à six paramètresqui sont semblab<strong>le</strong>s 5 à l’un <strong>de</strong>s groupes : [1] . . . [4].Comme chacun <strong>de</strong>s groupes : [1] . . . [4] laisse invariante seu<strong>le</strong>mentla famil<strong>le</strong> : x = const., y = const., mais nul<strong>le</strong> autre famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ 2courbes, chaque groupe réel à six paramètres : X 1 f . . .X 6 f qui est semblab<strong>le</strong>à l’un d’entre eux, laisse invariante une <strong>et</strong> seu<strong>le</strong>ment une famil<strong>le</strong><strong>de</strong> ∞ 2 courbes. De plus, c<strong>et</strong>te famil<strong>le</strong> doit nécessairement être réel<strong>le</strong>, carsi el<strong>le</strong> était imaginaire, la famil<strong>le</strong> <strong>de</strong>s courbes imaginaires conjuguéesresterait aussi invariante par <strong>le</strong> groupe : X 1 f . . .X 6 f, puisqu’il est réel,<strong>et</strong> il y aurait alors <strong>de</strong>ux famil<strong>le</strong>s invariantes distinctes, ce qui ne peutpas être <strong>le</strong> cas. Par une transformation ponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong>, nous pouvonsmaintenant transformer c<strong>et</strong>te unique famil<strong>le</strong> existante <strong>de</strong> ∞ 2 courbes enla famil<strong>le</strong> : x = const., y = const., <strong>et</strong> par là, nous pouvons — dès <strong>le</strong>début — rapporter <strong>le</strong> groupe réel : X 1 f . . .X 6 f à la forme :X k f = ξ k (x, y) p + η k (x, y) q + ζ k (x, y, z) r(k =1, 2 ···6),où naturel<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>s ξ k , η k , ζ k sont <strong>de</strong>s fonctions réel<strong>le</strong>s <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs arguments.Comme précé<strong>de</strong>mment (voir p. 185), on obtient maintenant aussi<strong>le</strong>s six transformations infinitésima<strong>le</strong>s :X k f = ξ k (x, y) p + η k (x, y) q (k = 1 ···6),qui forment évi<strong>de</strong>mment un groupe réel dans l’espace <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux variab<strong>le</strong>sx, y ; <strong>et</strong> grâce au raisonnement <strong>de</strong> la page 186, on comprendimmédiatement que ce groupe réduit doit possè<strong>de</strong>r au moins cinq paramètres<strong>et</strong> que, si on l’interprète comme un groupe agissant sur un plan,alors chaque famil<strong>le</strong> réel<strong>le</strong> ou imaginaire <strong>de</strong> ∞ 1 courbes qu’il laisseinvariante doit être transformée par une action à trois paramètres.Si maintenant <strong>le</strong> groupe réduit : X 1 f . . .X 6 f ne laisse invarianteabsolument aucune famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ 1 courbes dans <strong>le</strong> plan, alors d’après<strong>le</strong>s pages 370 sq., il est semblab<strong>le</strong>, via une transformation ponctuel<strong>le</strong>réel<strong>le</strong>, à l’un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux groupes : (I), p. 188 <strong>et</strong> (V), p. 199. Si, d’un autrecôté, il laisse invariante seu<strong>le</strong>ment une famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ 1 courbes, alorsc<strong>et</strong>te famil<strong>le</strong> est nécessairement réel<strong>le</strong> <strong>et</strong> par suite, sur la base <strong>de</strong>s développements<strong>de</strong>s pages 378 sq., <strong>le</strong> groupe peut être rapporté, via une5— par une transformation ponctuel<strong>le</strong> comp<strong>le</strong>xe —


Groupes <strong>de</strong> R 3 pour <strong>le</strong>squels <strong>de</strong>ux points ont un seul invariant. 211transformation ponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong>, à l’une <strong>de</strong>s trois formes : (II), (III),p. 188 <strong>et</strong> (VI), p. 199. Si enfin <strong>le</strong> groupe : X 1 f . . .X 6 f laisse invariantes<strong>de</strong>ux famil<strong>le</strong>s distinctes <strong>de</strong> ∞ 1 courbes, alors il peut, lorsque ces<strong>de</strong>ux famil<strong>le</strong>s sont réel<strong>le</strong>s, recevoir la forme (IV), p. 188, <strong>et</strong> lorsqu’aucontraire el<strong>le</strong>s sont imaginaires conjuguées, la forme :{p, q, xp + yq, yp − xq(VII)(x 2 − y 2 ) p + 2xyq, 2xyp + (y 2 − x 2 ) q,(cf.p. 380) <strong>et</strong> ceci, <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux fois, via une transformation ponctuel<strong>le</strong>réel<strong>le</strong>.Si <strong>le</strong> groupe réduit : X 1 f . . .X 6 f a l’une <strong>de</strong>s formes (I) . . . (VI),alors en conduisant exactement <strong>le</strong>s mêmes calculs que précé<strong>de</strong>mment(voir <strong>de</strong> la p. 188 à la p. 204), on détermine toutes <strong>le</strong>s formes possib<strong>le</strong>sdu groupe : X 1 f . . .X 6 f, <strong>et</strong> alors, comme on s’en convainc faci<strong>le</strong>ment,on a seu<strong>le</strong>ment besoin, lors <strong>de</strong> l’effectuation <strong>de</strong> ces calculs, <strong>de</strong> transformationsponctuel<strong>le</strong>s qui respectent pas à pas la réalité du groupe. Par là,nous voyons que <strong>le</strong>s formes (I) <strong>et</strong> (II) du groupe réduit ne conduisentà aucun groupe réel possédant <strong>le</strong>s qualités ici requises, <strong>et</strong> nous voyonsaussi que chaque groupe réel : X 1 f . . .X 6 f qui satisfait nos exigences <strong>et</strong>dont <strong>le</strong> groupe réduit possè<strong>de</strong> l’une <strong>de</strong>s formes (III), . . . , (VI) est semblab<strong>le</strong>,via une transformation ponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong>, à l’un <strong>de</strong>s groupes :[2] 6 , [1], [3], [4]. Et naturel<strong>le</strong>ment, <strong>le</strong> paramètre c qui apparaît dans <strong>le</strong>s<strong>de</strong>ux groupes [1] <strong>et</strong> [2] doit avoir une va<strong>le</strong>ur réel<strong>le</strong>.Enfin, si <strong>le</strong> groupe réduit : X 1 f . . .X 6 f a la forme (VII), alors <strong>le</strong>groupe : X 1 f . . .X 6 f est semblab<strong>le</strong>, via une transformation imaginaire,à l’un <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong> la forme [1], car <strong>le</strong> groupe (IV), p. 188 provientdu groupe (VII), lorsqu’on introduit comme nouvel<strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s x + iy<strong>et</strong> x − iy à la place <strong>de</strong> x <strong>et</strong> <strong>de</strong> y.Nous ne voulons néanmoins faire aucun usage <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te circonstance,car il est préférab<strong>le</strong> <strong>de</strong> déterminer directement tous <strong>le</strong>s groupesréels à six paramètres qui satisfont nos exigences <strong>et</strong> dont <strong>le</strong>s groupesréduits ont la forme (VII).Ainsi, nous cherchons maintenant tous <strong>le</strong>s groupes réels à six paramètres<strong>de</strong> la forme :{p + ϕ1 r, q + ϕ 2 r, xp + yq + ϕ 3 r, yp − xq + ϕ 4 r(56)(x 2 − y 2 ) p + 2xyq + ϕ 5 r, 2xyp + (y 2 − x 2 ) q + ϕ 6 r6 C’est <strong>le</strong> bon ordre.


212 Division V. Chapitre 20. § 89.relativement auxquels <strong>de</strong>ux points ont un <strong>et</strong> un seul invariant, tandisqu’un nombre <strong>de</strong> points supérieur à <strong>de</strong>ux n’a aucun invariant essentiel ;ici, ϕ 1 . . .ϕ 6 sont naturel<strong>le</strong>ment <strong>de</strong>s fonctions <strong>de</strong> x, y, z.Exactement comme aux pages 188 sq., nous voyons 7 [sehen wirein] que <strong>le</strong>s trois premières transformations infinitésima<strong>le</strong>s (56) peuventêtre rapportées à la forme :p, q, xp + yq + ar,où a désigne une constante réel<strong>le</strong>, via une transformation ponctuel<strong>le</strong>, <strong>et</strong>pour préciser, via une transformation ponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong>.En calculant <strong>le</strong> croch<strong>et</strong> <strong>de</strong> : yp − xq + ϕ 4 r avec p <strong>et</strong> avec q, nousvoyons que ϕ 4 est indépendant <strong>de</strong> x <strong>et</strong> <strong>de</strong> y. De plus, nous avons :[xp + yq + ar, yp − xq + ϕ4 (z) r ] = a ϕ ′ 4 (z) r,<strong>et</strong> donc, si a ne s’annu<strong>le</strong> pas, alors ϕ 4 est aussi indépendant <strong>de</strong> z ; si aucontraire a = 0 <strong>et</strong> ϕ 4 ≠ 0, nous introduisons la fonction réel<strong>le</strong> :∫dzϕ 4 (z)comme nouvel<strong>le</strong> variab<strong>le</strong> z <strong>et</strong> nous parvenons par cela à faire que ϕ 4 =1. Par conséquent, nous pouvons réunir ces <strong>de</strong>ux cas en rapportant <strong>le</strong>squatre premières transformations infinitésima<strong>le</strong>s (56) à la forme :p, q, xp + yq + ar, yp − xq + br,où b représente éga<strong>le</strong>ment une constante réel<strong>le</strong>.7 Dans un premier temps, on redresse <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux premières transformations en p <strong>et</strong>en q. Le croch<strong>et</strong> <strong>de</strong> la troisième avec p <strong>et</strong> avec q montre que ϕ 3 ne dépend que <strong>de</strong> z.Si ϕ 3 ≡ 0, <strong>le</strong> travail est fini : il suffit <strong>de</strong> prendre a = 0. Si ϕ 3 ≢ 0, en introduisant∫ 1ϕ 3dz comme nouveau z (<strong>et</strong> en relocalisant bien sûr <strong>le</strong>s considérations autour d’unpoint où ϕ 3 ne s’annu<strong>le</strong> pas), on redresse la troisième transformation en xp + yq + r,c’est-à-dire que a = 1. On réunit <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux cas en introduisant une constante a, qui sera<strong>de</strong> toute façon ramenée à être éga<strong>le</strong> à 0 ou à 1 à la fin <strong>de</strong> la démonstration.


Groupes <strong>de</strong> R 3 pour <strong>le</strong>squels <strong>de</strong>ux points ont un seul invariant. 213À présent, calculons <strong>le</strong>s croch<strong>et</strong>s :[p, (x 2 − y 2 )p + 2xyq + ϕ 5 r ] = 2(xp + yq) + ∂ϕ 5∂x r[q, (x 2 − y 2 )p + 2xyq + ϕ 5 r ] = −2(yp − xq) + ∂ϕ 5∂y r[xp + yq + ar, (x 2 − y 2 )p + 2xyq + ϕ 5 r ] = (x 2 − y 2 )p + 2xyq+{+ x ∂ϕ 5∂x + y ∂ϕ 5∂y + a ∂ϕ 5∂z[yp − xq + br, (x 2 − y 2 )p + 2xyq + ϕ 5 r ] = 2xyp + (y 2 − x 2 )q+{+ y ∂ϕ 5∂x − x ∂ϕ 5∂y + b ∂ϕ 5∂z[yp − xq + br, 2xyp + (y 2 − x 2 )q + ϕ 6 r ] = −(x 2 − y 2 )p − 2xyq+d’où nous obtenons :⎧(57)⎪⎨⎪⎩ y ∂ϕ 6∂x − x ∂ϕ 6∂y + b ∂ϕ 6∂z = −ϕ 5.De là, on tire tout d’abord :ϕ 5 = 2(ax − by) + ω(z),<strong>et</strong> par conséquent :∂ϕ 5∂x = 2a, ∂ϕ 5∂y = −2bx ∂ϕ 5∂x + y ∂ϕ 5∂y + a ∂ϕ 5∂z = ϕ 5y ∂ϕ 5∂x − x ∂ϕ 5∂y + b ∂ϕ 5∂z = ϕ 6ϕ 6 = 2(bx + ay) + bω ′ (z);}r}r{+ y ∂ϕ 6∂x − x ∂ϕ 6∂y + b ∂ϕ }6r∂za ω ′ (z) = ω(z) = a 2 ω ′′ (z)mais si nous insérons c<strong>et</strong>te va<strong>le</strong>ur <strong>de</strong> ϕ 6 dans la <strong>de</strong>rnière <strong>de</strong>s équations(57), viennent alors <strong>de</strong>ux équations :b 2 ω ′′ (z) = −ω(z) = −a 2 ω ′′ (z),qui, pour <strong>de</strong>s va<strong>le</strong>urs réel<strong>le</strong>s <strong>de</strong> a <strong>et</strong> <strong>de</strong> b, ne peuvent alors valoir quelorsque ω(z) s’annu<strong>le</strong> 8 .8 On notera l’organisation fine <strong>de</strong>s calculs : <strong>le</strong> terme −ω(z), dont la fin <strong>de</strong> ladémonstration conclut qu’il s’annu<strong>le</strong> i<strong>de</strong>ntiquement, avait déjà été placé au centre plushaut, <strong>et</strong> maintenant, dans c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière équation, il est clair, puisque b 2 <strong>et</strong> −a 2 sont<strong>de</strong> signe opposé, que −ω(z) au centre est à la fois <strong>de</strong> signe positif <strong>et</strong> <strong>de</strong> signe négatif,donc nul.


214 Division V. Chapitre 20. § 89.Ainsi, nous sommes parvenus au groupe :(58)p, q, xp + yq + ar, yp − xq + br(x 2 − y 2 ) p + 2xyq + 2(ax − by) r2xyp + (y 2 − x 2 ) q + 2(bx + ay) r.Ici, <strong>le</strong>s constantes a <strong>et</strong> b ne doivent naturel<strong>le</strong>ment pas s’annu<strong>le</strong>r toutes<strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux, parce que sinon, <strong>le</strong> groupe serait intransitif ; si b = 0, nouspouvons toujours parvenir à faire que a = 1 en introduisant une nouvel<strong>le</strong>variab<strong>le</strong> z, <strong>et</strong> si au contraire, b ne s’annu<strong>le</strong> pas, on peut toujoursfaire que b soit simp<strong>le</strong>ment égal à 1.Comme on <strong>le</strong> trouve aisément, relativement au groupe (58), <strong>de</strong>uxpoints x 1 , y 1 , z 1 <strong>et</strong> x 2 , y 2 , z 2 ont un <strong>et</strong> un seul invariant, à savoir celui-ci :z 1 + z 2 − a log { (x 2 − x 1 ) 2 + (y 2 − y 1 ) 2} + 2 b arctan y 2 − y 1x 2 − x 1.En raisonnant comme précé<strong>de</strong>mment (cf.par exemp<strong>le</strong> p. 196), on pourraitaussi se convaincre faci<strong>le</strong>ment que si a <strong>et</strong> b ne s’annu<strong>le</strong>nt pas tous<strong>de</strong>ux, trois points <strong>et</strong> plus n’ont aucun invariant essentiel ; toutefois, nouspréférons démontrer cela en indiquant une transformation ponctuel<strong>le</strong>imaginaire qui envoie <strong>le</strong> groupe (58) sur <strong>le</strong> groupe [1] p. 205, puisquenous savons déjà du groupe [1] qu’il satisfait toutes nos exigences.Si nous introduisons dans <strong>le</strong> groupe (58) <strong>le</strong>s nouvel<strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s :nous obtenons <strong>le</strong> groupe :x 1 = x + iy, y 1 = x − iy, z 1 = z,p 1 + q 1 , i(p 1 − q 1 ), x 1 p 1 + y 1 q 1 + ar 1 , i(y 1 q 1 − x 1 p 1 ) + br 1x 2 1p 1 + y 2 1q 1 + { (a + ib) x 1 + (a − ib) y 1}r1i(y 2 1q 1 − x 2 1p 1 ) + i { (a − ib) y 1 − (a + ib) x 1}r1 .Maintenant, comme a + ib ≠ 0, nous pouvons encore introduire 2z 1a+ibcomme nouvel<strong>le</strong> variab<strong>le</strong> z 1 <strong>et</strong> obtenir ainsi un groupe qui a exactementla forme [1]. Ainsi, <strong>le</strong> groupe (58) est semblab<strong>le</strong> au groupe [1] via latransformation imaginaire :x 1 = x + iy, y 1 = x − iy, z 1 = 2za+ib ,<strong>et</strong> en fait, aux paramètres a <strong>et</strong> b du groupe (58) correspond alors lava<strong>le</strong>ur :(59) c = a−iba+ibdu paramètre c du groupe [1].


Groupes <strong>de</strong> R 3 pour <strong>le</strong>squels <strong>de</strong>ux points ont un seul invariant. 215Avec ceci, on a démontré que <strong>le</strong> groupe réel (58) satisfait toutesnos exigences, <strong>et</strong> on a maintenant trouvé en toute généralité tous <strong>le</strong>sgroupes réels qui <strong>le</strong>s satisfont.Théorème 37. Si un groupe continu fini réel <strong>de</strong> l’espace <strong>de</strong>s x, y, zest donné <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que relativement à lui, <strong>de</strong>ux points ont un <strong>et</strong> unseul invariant <strong>et</strong> que <strong>le</strong>s invariants d’un nombre <strong>de</strong> points supérieurà <strong>de</strong>ux peuvent tous s’exprimer au moyen <strong>de</strong>s invariants <strong>de</strong>s paires<strong>de</strong> points, alors ce groupe possè<strong>de</strong> six paramètres <strong>et</strong> il est semblab<strong>le</strong>[ähnlich], via une transformation ponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong> <strong>de</strong> l’espace, à l’un<strong>de</strong>s onze groupes suivants :1 p, q, r, xq − yp, yr − zq, zp − xr2 p, q, r, xq − yp, yr + zq, zp + xr3 p + xU, q + yU, r + zU, xq − yp, yr − zq, zp − xr4 p − xU, q − yU, r − zU, xq − yp, yr − zq, zp − xr5 p − xU, q − yU, r + zU, xq − yp, yr + zq, zp + xr6p, q, xp + yq + cr, yp − xq + r(x 2 − y 2 )p + 2xyq + 2(cx − y)r, 2xyp + (y 2 − x 2 )q + 2(x + cy)r7p, q, xp + yq + r, yp − xq(x 2 − y 2 )p + 2xyq + 2xr, 2xyp + (y 2 − x 2 )q + 2yr8p, q, xp + r, yq + cr, x 2 p + 2xr, y 2 q + 2cyr(c ≠0)9p, q, xq + r, x 2 q + 2xr, xp + yq + crx 2 p + 2xyq + 2(y + cx)r10 p − yr, q + xr, r, xq, xp − yq, yp


216 Division V. Chapitre 20. § 90.11p, q, r, xq + yr, 2xp + yqx 2 p + xyq + 1 2 y2 rIci, <strong>le</strong> paramètre réel c est à chaque fois essentiel <strong>et</strong> ne peut pas êtresupprimé.Pour faciliter la compréhension <strong>de</strong> ce tab<strong>le</strong>au, nous ajoutons encore<strong>le</strong>s remarques suivantes.Pour abréger, on écrit chaque fois U à la place <strong>de</strong> xp + yq + zr.Le groupe 2 laisse invariante la conique qui découpe la sphèreréel<strong>le</strong> : x 2 + y 2 − z 2 = 0 sur <strong>le</strong> plan à l’infini, <strong>et</strong> ce groupe provientdu groupe 1 constitué <strong>de</strong>s mouvements euclidiens lorsqu’on remplace zpar iz.Le groupe 4 laisse invariante la surface réel<strong>le</strong> du second <strong>de</strong>gré nonréglée : x 2 + y 2 + z 2 = 1 <strong>et</strong> <strong>le</strong> groupe 5, la surface réel<strong>le</strong> réglée :x 2 + y 2 − z 2 = 1. Ces groupes sont obtenus à partir du groupe 3 <strong>de</strong> lasurface : x 2 + y 2 + z 2 + 1 = 0, lorsqu’on introduit soit ix, iy, iz, soitix, iy, z comme nouvel<strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s, <strong>et</strong> l’on peut alors très simp<strong>le</strong>mentindiquer quel est l’invariant <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux points qui <strong>le</strong>ur correspond, grâceaux pages 184 sq.À la place du groupe (58) se trouvent dans notre tab<strong>le</strong>au <strong>le</strong>s <strong>de</strong>uxgroupes 6 <strong>et</strong> 7, parce que, d’après la page 214, l’un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux paramètresa <strong>et</strong> b peut toujours être rendu simp<strong>le</strong>ment égal à 1 ; cependant, on doitfaire attention au fait que dans <strong>le</strong> groupe 6, la va<strong>le</strong>ur du paramètre cdoit être limitée aux seu<strong>le</strong>s va<strong>le</strong>urs qui sont 0, car <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux groupesqui correspon<strong>de</strong>nt aux paramètres +c <strong>et</strong> −c sont semblab<strong>le</strong>s, commeon s’en convainc immédiatement, lorsqu’on intervertit x <strong>et</strong> y <strong>et</strong> qu’onremplace z par −z.Les groupes 8 . . . 11 sont <strong>le</strong>s groupes [1] . . . [4] <strong>de</strong> la page 205 ; ondoit encore mentionner spécia<strong>le</strong>ment que dans <strong>le</strong> groupe 8, on a seu<strong>le</strong>mentbesoin <strong>de</strong> donner à c <strong>de</strong>s va<strong>le</strong>urs tel<strong>le</strong>s que c 2 1, car par latransformation :x 1 = x, y 1 = y, z 1 = z c ,<strong>le</strong> groupe s’envoie sur un groupe <strong>de</strong> la même forme, dont <strong>le</strong> paramètrepossè<strong>de</strong> la va<strong>le</strong>ur 1 c . § 90.


Groupes <strong>de</strong> R 3 pour <strong>le</strong>squels <strong>de</strong>ux points ont un seul invariant. 217En quelques mots, nous voulons maintenant expliquer commenton peut résoudre dans <strong>le</strong> plan <strong>le</strong> problème que nous venons <strong>de</strong> résoudrepour l’espace trois fois étendu.Si un groupe continu fini du plan doit être constitué <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorteque relativement à son action, <strong>de</strong>ux points ont un <strong>et</strong> un seul invariant,tandis qu’un nombre <strong>de</strong> points supérieur à <strong>de</strong>ux n’a pas d’invariant essentiel,alors on vérifie en premier lieu, comme au § 85, que <strong>le</strong> groupeest transitif, qu’il doit possè<strong>de</strong>r trois paramètres <strong>et</strong> qu’il ne peut pascontenir <strong>de</strong>ux transformations infinitésima<strong>le</strong>s ayant <strong>le</strong>s mêmes courbesintégra<strong>le</strong>s.Inversement, il est clair que relativement à tout groupe transitif Gdu plan à trois paramètres, <strong>de</strong>ux points ont toujours un <strong>et</strong> un seul invariant1 . Si <strong>de</strong> plus G ne contient pas <strong>de</strong>ux transformations infinitésima<strong>le</strong>sayant <strong>le</strong>s mêmes courbes intégra<strong>le</strong>s, on peut démontrer qu’un nombre<strong>de</strong> points supérieur à <strong>de</strong>ux n’a jamais d’invariant essentiel 2 .En eff<strong>et</strong>, si l’on fixe un point P 1 en position généra<strong>le</strong>, il reste encoreun sous-groupe à un paramètre <strong>de</strong> G par l’action duquel <strong>le</strong>s autres pointsdu plan se meuvent sur ∞ 1 courbes, à savoir sur <strong>le</strong>s pseudocerc<strong>le</strong>s <strong>de</strong>centre P 1 appartenant à G. S’il y avait seu<strong>le</strong>ment ∞ 1 pseudocerc<strong>le</strong>s, cespseudocerc<strong>le</strong>s ne dépendraient pas <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur centre, <strong>et</strong> par suite, la transformationinfinitésima<strong>le</strong> <strong>de</strong> G qui laisse invariant <strong>le</strong> point P 1 aurait <strong>le</strong>smêmes courbes intégra<strong>le</strong>s que la transformation infinitésima<strong>le</strong> indépendanted’el<strong>le</strong> qui laisse invariant un autre point quelconque en positiongénéra<strong>le</strong>. Mais comme cela ne doit pas se produire, nous pouvons enconclure qu’il y a au minimum ∞ 2 pseudocerc<strong>le</strong>s. Si maintenant onfixe, outre <strong>le</strong> point P 1 , encore un <strong>de</strong>uxième point P 2 en position généra<strong>le</strong>,alors <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux pseudocerc<strong>le</strong>s <strong>de</strong> centre P 1 <strong>et</strong> P 2 , qui passent par untroisième point en position généra<strong>le</strong> P 3 , se coupent en P 3 , <strong>et</strong> mis à partP 3 , ils se coupent au maximum en <strong>de</strong>s points isolés 3 ; par conséquent,dès que P 1 <strong>et</strong> P 2 sont fixés, chaque autre point P du plan reste en généralau repos, <strong>et</strong> pour préciser, à cause <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux invariants qui appartiennent1 Soit X 1 , X 2 , X 3 <strong>le</strong>s trois transformations infinitésima<strong>le</strong>s d’un tel groupe du plan.Un invariant quelconque J = J(x 1 , y 1 ; x 2 , y 2 ) entre <strong>de</strong>ux points satisfait <strong>le</strong>s équations0 ≡ X (1)kJ + X(2) kJ, pour k = 1, 2, 3. Ces 3 équations (intégrab<strong>le</strong>s au sens<strong>de</strong> Frobenius) sur un espace <strong>de</strong> dimension 4 sont automatiquement indépendantesdès que <strong>le</strong> groupe est transitif. Aussi existe-t-il exactement 4 − 3 = 1 invariantJ(x 1 , y 1 ; x 2 , y 2 ).2 La Proposition 4 p. 181 traitait déjà <strong>le</strong> cas <strong>de</strong> la dimension 3.3 Analyticité ...


218 Division V. Chapitre 20. § 90.aux <strong>de</strong>ux paires <strong>de</strong> points P 1 , P <strong>et</strong> P 2 , P . Il en décou<strong>le</strong> que, sous <strong>le</strong>s hypothèsesposées, tous <strong>le</strong>s invariants d’un nombre <strong>de</strong> points supérieur àtrois peuvent être exprimés au moyen <strong>de</strong>s invariants <strong>de</strong>s paires <strong>de</strong> points(cf.aussi p. 182 sq.).Si donc nous cherchons tous <strong>le</strong>s groupes du plan qui possè<strong>de</strong>ntla propriété connue concernant <strong>le</strong>s invariants <strong>de</strong> plusieurs points, <strong>et</strong> sitout d’abord, nous ne tenons pas compte <strong>de</strong> la condition <strong>de</strong> réalité, nousavons seu<strong>le</strong>ment besoin <strong>de</strong> rechercher, parmi <strong>le</strong>s groupes à trois paramètresqui sont rassemblés à la page 57 4 , ceux qui sont transitifs <strong>et</strong> quin’ont jamais <strong>de</strong>ux transformations infinitésima<strong>le</strong>s possédant <strong>le</strong>s mêmescourbes intégra<strong>le</strong>s. Nous trouvons <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te façon seu<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>s quatregroupes suivants :⎧p, q, xp + cyq(c ≠0)(60)⎪⎨⎪⎩p + x 2 p + xyq, q + xyp + y 2 q, yp − xqxq, xp − yq, ypp, q, xp + (x + y) q .Ici, <strong>le</strong> groupe :p, xp + yq, x 2 p + (2xy + y 2 ) qest remplacé par <strong>le</strong> groupe projectif <strong>de</strong> la conique : x 2 + y 2 + 1 = 0(cf.p. 70, p. 76 <strong>et</strong> p. 88). Pareil<strong>le</strong>ment, <strong>le</strong> groupe : p, 2xp + yq, x 2 p +xyq est remplacé par un groupe projectif qui lui est semblab<strong>le</strong> (cf.p. 95).Les invariants <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux points x 1 , y 1 <strong>et</strong> x 2 , y 2 pour <strong>le</strong>sgroupes (60), écrits l’un après l’autre, ont l’expression suivante :(61) ⎧⎨c log(x 2 − x 1 ) 2 − log(y 2 − y 1 ) 2 ,⎩x 1 y 2 − x 2 y 1 , (x 2 − x 1 ) e − y 2 −y 1x 2 −x 1 .(x 2 −x 1 ) 2 +(y 2 −y 1 ) 2 +(x 1 y 2 −x 2 y 1 ) 2(1+x 1 x 2 +y 1 y 2 ) 2Si l’on veut avoir tous <strong>le</strong>s groupes réels du plan qui possè<strong>de</strong>nt <strong>le</strong>scaractéristiques requises, on doit ajouter aux groupes (60) encore <strong>le</strong>s4 À c<strong>et</strong> endroit sont listés tous <strong>le</strong>s groupes locaux à un, <strong>de</strong>ux, trois ou quatreparamètres qui agissent en dimension <strong>de</strong>ux.


Groupes <strong>de</strong> R 3 pour <strong>le</strong>squels <strong>de</strong>ux points ont un seul invariant. 219<strong>de</strong>ux suivants (cf.pp. 370 sq. <strong>et</strong> p. 209) :⎧⎪⎨ p, q, yp − xq + c(xp + yq)(62)⎪⎩p − x 2 p − xyq, q − xyp − y 2 q, yp − xq .Le premier d’entre eux fournit l’invariant suivant * :{(63) (x2 − x 1 ) 2 + (y 2 − y 1 ) 2} e 2c arctan y 2 −y 1x 2 −x 1 ;<strong>le</strong> second provient du <strong>de</strong>uxième <strong>de</strong>s groupes (60), lorsqu’on introduitix, iy comme nouvel<strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s à la place <strong>de</strong> x, y <strong>et</strong> par là, l’invariantqui lui appartient peut être immédiatement indiqué ** .* Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz s’est en tout cas préoccupé, déjà en 1868, d’une recherchedont <strong>le</strong> but peut s’énoncer, avec notre manière actuel<strong>le</strong> <strong>de</strong> nous exprimer,comme suit : déterminer <strong>le</strong>s groupes du plan relativement auxquels <strong>de</strong>ux points ont un<strong>et</strong> un seul invariant, tandis qu’un nombre <strong>de</strong> points supérieur à <strong>de</strong>ux n’a pas d’invariantessentiel. À c<strong>et</strong>te époque, il avait déjà remarqué que dans <strong>le</strong> plan, on peut imaginer unefamil<strong>le</strong> <strong>de</strong> mouvements relativement auxquels <strong>de</strong>ux points possè<strong>de</strong>nt l’invariant (63).**Déjà dans <strong>le</strong>s années 1874–76, <strong>Lie</strong> a déterminé tous <strong>le</strong>s groupes à trois paramètresdu plan, sans toutefois ajouter l’écriture <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s calculs jusque dans <strong>le</strong>sdétails (Gött. Nachr. v. 1874 ; norwegisches Archiv 1878). En l’année 1884, il a donnéensuite une énumération détaillée <strong>de</strong>s différentes formes norma<strong>le</strong>s auxquel<strong>le</strong>s tous <strong>le</strong>sgroupes <strong>de</strong> ce genre peuvent être rapportées. Plus tard (en 1887) Monsieur Poincarés’est préoccupé <strong>de</strong>s fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> la géométrie du plan, <strong>et</strong> dans son travail relatif àce suj<strong>et</strong> (Bull. <strong>de</strong> la Soc. Math., vol. 15), il a aussi pris en considération <strong>le</strong>s recherchesrelativement anciennes <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> sur la théorie <strong>de</strong>s groupes, tandis qu’il ne connaissaitni <strong>le</strong> travail <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> <strong>de</strong> 1884, ni la première communication <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> sur <strong>le</strong>s fon<strong>de</strong>ments<strong>de</strong> la géométrie (1886), pas plus que l’étu<strong>de</strong> helmholtzienne <strong>de</strong> l’année 1868. Lesconclusions intéressantes auxquel<strong>le</strong>s Monsieur Poincaré est parvenu résultent en véritéimmédiatement <strong>de</strong>s recherches anciennes <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>.


Chapitre 21.Critique <strong>de</strong>s recherches helmholtziennes.Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz a apporté, dans son travail déjà cité à lapage 162, un traitement du problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz que nousvoulons maintenant examiner <strong>de</strong> plus près.Nous commençons (dans <strong>le</strong> § 91) par restituer la teneur <strong>de</strong>saxiomes qu’il a posés. <strong>Ens</strong>uite (dans <strong>le</strong>s § 92 <strong>et</strong> 93), nous établissonsquel<strong>le</strong>s contenus ces axiomes peuvent recevoir lorsqu’on se sert<strong>de</strong> la manière dont on s’exprime dans la théorie <strong>de</strong>s groupes. Dans <strong>le</strong>§ 94 nous fournissons une critique <strong>de</strong>s conclusions que Monsieur <strong>de</strong>Helmholtz a tirées <strong>de</strong> ses axiomes au suj<strong>et</strong> <strong>de</strong> l’espace étendu dans troisdirections, <strong>et</strong> nous montrons qu’il est parvenu à son résultat final enprésupposant tacitement toute une série d’hypothèses qui sont absolumentincorrectes.Si l’on veut supprimer ces défauts très substantiels <strong>de</strong>s développementshelmholtziens, il se présente <strong>de</strong>ux voies différentes : on peut soitlaisser complètement <strong>de</strong> côté <strong>le</strong>s axiomes <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Helmhotz <strong>et</strong> seu<strong>le</strong>mentenvisager ses calculs, soit partir <strong>de</strong> ses axiomes comme point <strong>de</strong>départ, sans prendre en considération ses calculs.Nous nous engageons dans la première voie au § 96, où nous montronsquels axiomes doivent être posés, afin <strong>de</strong> parvenir au but en effectuant<strong>de</strong>s calculs qui sont analogues, par <strong>le</strong>urs idées fondamenta<strong>le</strong>s,aux calculs helmholtziens.Dans <strong>le</strong> § 96, nous empruntons la <strong>de</strong>uxième voie, <strong>et</strong> nous exposeronsséparément quel<strong>le</strong>s conclusions la théorie <strong>de</strong>s groupes perm<strong>et</strong><strong>de</strong> tirer à partir <strong>de</strong>s axiomes <strong>de</strong> Helmhotz. On obtiendra alors commerésultat que ces axiomes (si on <strong>le</strong>s interprète d’une manière assez voisine)suffisent certes à caractériser <strong>le</strong>s mouvements euclidiens <strong>et</strong> noneuclidiens<strong>de</strong> l’espace à trois dimensions, mais qu’en tout cas, l’un <strong>de</strong>saxiomes <strong>de</strong> Helmholtz, à savoir l’axiome <strong>de</strong> monodromie, est superflu.Le résultat ainsi obtenu soulève la question relativement proche :savoir si l’on ne peut pas se passer aussi d’autres parties <strong>de</strong>s axiomes <strong>de</strong>Helmholtz. La réponse à c<strong>et</strong>te question sera donnée dans <strong>le</strong> Chapitre 23 ;on montrera que <strong>le</strong>s axiomes <strong>de</strong> Helmholtz restants renferment aussi <strong>de</strong>séléments superflus.


Critique <strong>de</strong>s recherches helmholtziennes. 221§ 91.Les axiomes helmholtziens.Au fon<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> sa recherche, Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz place <strong>le</strong>saxiomes suivants, ou, hypothèses, comme il <strong>le</strong>s appel<strong>le</strong> * :« I. L’espace à n dimensions est une variété n fois étendue, c’est-à-direque l’élément individuel défini en celui-ci, <strong>le</strong> point, peut être déterminé parla mesure <strong>de</strong> variab<strong>le</strong>s quantitatives continues <strong>et</strong> indépendantes <strong>le</strong>s unes <strong>de</strong>sautres (coordonnées), dont <strong>le</strong> nombre est égal à n. Chaque mouvement d’unpoint est ainsi accompagné par une modification continue d’au moins une <strong>de</strong>scoordonnées. S’il <strong>de</strong>vait y avoir <strong>de</strong>s exceptions dans <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s, soit la modification<strong>de</strong>viendrait discontinue, soit, malgré <strong>le</strong> mouvement, absolument aucunemodification <strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>s coordonnées ne se produirait, alors ces exceptions<strong>de</strong>vraient être limitées à certains lieux définis par une ou plusieurs équations(donc à <strong>de</strong>s points, à <strong>de</strong>s lignes, à <strong>de</strong>s surfaces, <strong>et</strong>c. ), <strong>et</strong> ces lieux peuventinitia<strong>le</strong>ment rester exclus <strong>de</strong> la recherche.« On doit remarquer que par la continuité du changement au cours dumouvement, on ne signifie pas seu<strong>le</strong>ment que toutes <strong>le</strong>s va<strong>le</strong>urs intermédiairesjusqu’à la va<strong>le</strong>ur fina<strong>le</strong> sont parcourues par la quantité qui se différencie d’el<strong>le</strong>même1 , mais aussi que <strong>le</strong>s quotients différentiels existent, c’est-à-dire que <strong>le</strong>rapport <strong>de</strong>s changements associés <strong>de</strong>s coordonnées se rapproche d’un rapportfixe, lorsque <strong>le</strong>s gran<strong>de</strong>urs <strong>de</strong> ces changements diminuent progressivement.« II. On présuppose l’existence <strong>de</strong> corps mobi<strong>le</strong>s mais rigi<strong>de</strong>s en euxmêmes,c’est-à-dire <strong>de</strong> systèmes <strong>de</strong> points, comme cela est nécessaire pourpouvoir effectuer la comparaison <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>urs spatia<strong>le</strong>s par congruence. Maiscomme nous ne sommes pas encore autorisés à présupposer une métho<strong>de</strong> spécia<strong>le</strong>pour la mesure <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>urs spatia<strong>le</strong>s, la définition d’un corps rigi<strong>de</strong>,ici, ne peut être que la suivante : entre <strong>le</strong>s 2n coordonnées <strong>de</strong> chaque paire<strong>de</strong> points qui appartient à un corps rigi<strong>de</strong> en lui-même, il existe une équationindépendante du mouvement <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>rnier, qui reste la même pour toutes <strong>le</strong>spaires <strong>de</strong> points congruentes.« Sont congruentes <strong>le</strong>s paires <strong>de</strong> points qui peuvent être amenées à coïnci<strong>de</strong>rsimultanément, ou l’une après l’autre, avec la même paire <strong>de</strong> points <strong>de</strong>l’espace.« III. On présuppose une mobilité parfaitement libre <strong>de</strong>s corps rigi<strong>de</strong>s,c’est-à-dire, on suppose que chaque point en eux peut être déplacé continûmentvers <strong>le</strong> lieu <strong>de</strong> chaque autre point, tant que son mouvement n’est pas restreint* Gött. Nachr. 1868, p. 197 sq.1 Les symétries par rapport à un hyperplan, tel<strong>le</strong>s que (x 1 , x 2 , . . .,x n ) ↦−→(−x 1 , x 2 , . . .,x n ), ne sont pas admises, car el<strong>le</strong>s ne sont pas reliées à la transformationi<strong>de</strong>ntique par une famil<strong>le</strong> continue <strong>de</strong> mouvements puisqu’el<strong>le</strong>s renversentl’orientation.


222 Division V. Chapitre 21. § 92.par <strong>le</strong>s équations qui existent entre lui <strong>et</strong> <strong>le</strong>s autres points restants du systèmerigi<strong>de</strong> auquel il appartient.« Le premier point d’un système rigi<strong>de</strong> en lui-même est donc absolumentmobi<strong>le</strong>. Lorsque ce point est fixé, il existe une équation pour <strong>le</strong> <strong>de</strong>uxième point<strong>et</strong> l’une <strong>de</strong> ses coordonnées <strong>de</strong>vient une fonction <strong>de</strong>s (n − 1) coordonnéesrestantes. Après que <strong>le</strong> <strong>de</strong>uxième point est aussi fixé, il existe <strong>de</strong>ux équationspour <strong>le</strong> troisième point, <strong>et</strong>c. Par conséquent, ce sont au total n(n+1)1 · 2quantitésqui sont requises pour la détermination <strong>de</strong> la position d’un corps rigi<strong>de</strong> en luimême.« Il décou<strong>le</strong> <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te supposition <strong>et</strong> <strong>de</strong> cel<strong>le</strong> énoncée en II, que, si <strong>de</strong>uxsystèmes <strong>de</strong> points rigi<strong>de</strong>s en eux-mêmes A <strong>et</strong> B peuvent être, dans une premièreposition initia<strong>le</strong> <strong>de</strong> A, rapportés à une congruence <strong>de</strong> points correspondants,alors, pour toute autre position <strong>de</strong> A, ils doivent pouvoir être rapportésà la congruence <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s mêmes points qui étaient congruents auparavant.Cela veut dire, en d’autres termes, que la congruence <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux obj<strong>et</strong>s spatiauxne dépend pas <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur situation initia<strong>le</strong>, ou encore que toutes <strong>le</strong>s parties <strong>de</strong> l’espace,lorsqu’on fait abstraction <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs bornes, sont congruentes <strong>le</strong>s unes auxautres.« IV. On doit fina<strong>le</strong>ment attribuer encore à l’espace une propriété quiest analogue à la monodromie <strong>de</strong>s fonctions d’une variab<strong>le</strong> comp<strong>le</strong>xe, <strong>et</strong>qui exprime en el<strong>le</strong>-même que <strong>de</strong>ux corps congruents sont encore à nouveaucongruents après que l’un d’eux a subi une révolution complète autour d’unaxe <strong>de</strong> rotation arbitraire. Une rotation est caractérisée analytiquement en ceciqu’un certain nombre <strong>de</strong> points du corps en mouvement conservent <strong>le</strong>urs coordonnéesinchangées au cours du mouvement ; un r<strong>et</strong>our en arrière du mouvementest caractérisé par <strong>le</strong> fait que <strong>le</strong>s comp<strong>le</strong>xes <strong>de</strong> va<strong>le</strong>urs <strong>de</strong>s coordonnéesqui se transformaient auparavant continûment l’un dans l’autre sont parcourusen sens inverse. Nous pouvons donc exprimer <strong>le</strong> fait concerné comme suit :Lorsqu’un corps rigi<strong>de</strong> tourne autour <strong>de</strong> (n−1) <strong>de</strong> ses points <strong>et</strong> que ces pointssont choisis <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que sa position ne dépend plus que d’une variab<strong>le</strong>indépendante, alors la rotation sans r<strong>et</strong>our en arrière <strong>le</strong> reconduit fina<strong>le</strong>mentàla situation initia<strong>le</strong> dont il est parti. »Les axiomes <strong>de</strong> Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz ici reproduits attribuentcertaines propriétés aux mouvements <strong>de</strong> l’espace n fois étendu, <strong>et</strong> ils’agit essentiel<strong>le</strong>ment maintenant <strong>de</strong> déterminer tous <strong>le</strong>s systèmes possib<strong>le</strong>s<strong>de</strong> mouvements pour <strong>le</strong>squels <strong>le</strong>s propriétés indiquées se manifestent.Afin <strong>de</strong> pouvoir employer notre théorie <strong>de</strong>s groupes pour résoudrece problème, nous <strong>de</strong>vons avant toute chose montrer que nousavons au fond affaire ici à un problème <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong>s groupes. C’estce qui se va se passer dans <strong>le</strong> prochain paragraphe.§ 92.


Critique <strong>de</strong>s recherches helmholtziennes. 223Conséquences <strong>de</strong>s axiomes helmholtziens.Le premier <strong>de</strong>s axiomes helmholtziens exprime simp<strong>le</strong>ment que<strong>le</strong>s mouvements continus sont possib<strong>le</strong>s <strong>et</strong> il détermine ce qui doit êtreentendu en général par « mouvement continu ».Lorsqu’on considère un mouvement <strong>de</strong> l’espace n fois étendu, ons’imagine <strong>de</strong> la manière la plus commo<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux espaces n fois étenduscontenus l’un dans l’autre, dont l’un est fixe, <strong>et</strong> l’autre mobi<strong>le</strong> 1 ;la nature particulière du mouvement considéré spécifie alors <strong>de</strong> quel<strong>le</strong>manière <strong>le</strong>s points individuels <strong>de</strong> l’espace en mouvement modifient <strong>le</strong>ursituation à l’intérieur <strong>de</strong> l’espace fixe. Maintenant, l’Axiome I <strong>de</strong>man<strong>de</strong>que chaque mouvement soit accompagné d’une modification continue<strong>de</strong>s coordonnées du point qui se déplace. Par conséquent, si nous nousimaginons un mouvement quelconque qui commence pour <strong>le</strong> tempst = 0 <strong>et</strong> qui est continuel pendant un certain temps t, <strong>et</strong> si nous adm<strong>et</strong>tonsqu’un point quelconque <strong>de</strong> l’espace mobi<strong>le</strong> a <strong>le</strong>s coordonnéesx 1 , . . .,x n au temps t = 0 par rapport à l’espace fixe, <strong>et</strong> qu’il a <strong>le</strong>s coordonnéesx 1 , . . .,x n au temps t, alors notre mouvement sera représentépar <strong>de</strong>s équations <strong>de</strong> la forme :(1) x ν = F ν(x1 , . . .,x n , t ) (ν = 1 ···n),qui pour t = 0 se réduisent aux équations : x ν = x ν ; avec cela, <strong>le</strong>s F νsont <strong>de</strong>s fonctions réel<strong>le</strong>s <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs arguments.Ainsi, nous voyons que chaque mouvement continu <strong>de</strong> l’espace nfois étendu fournit une famil<strong>le</strong> continue <strong>de</strong> ∞ 1 transformations ponctuel<strong>le</strong>sréel<strong>le</strong>s, <strong>et</strong> pour préciser, une famil<strong>le</strong> dans laquel<strong>le</strong> est contenuela transformation i<strong>de</strong>ntique.Pour ce qui touche à la nature <strong>de</strong>s fonctions F ν , remarquons queMonsieur <strong>de</strong> Helmholtz présuppose en tout cas l’existence <strong>de</strong>s quotientsdifférentiels du premier ordre par rapport à x <strong>et</strong> à t ; cela décou<strong>le</strong> déjà<strong>de</strong> l’Axiome I, bien que ce ne soit pas énoncé avec toute la certitu<strong>de</strong>désirab<strong>le</strong>, mais cela <strong>de</strong>vient indubitab<strong>le</strong> lorsqu’on envisage <strong>le</strong>s calculssitués aux pages 202–206 <strong>de</strong> son travail. À c<strong>et</strong> endroit-là, Monsieur <strong>de</strong>Helmholtz utilise par ail<strong>le</strong>urs aussi l’existence <strong>de</strong> certains quotients différentielsdu second ordre, lorsqu’il différentie notamment d’abord parrapport à x <strong>et</strong> ensuite par rapport au paramètre présent, ce qui correspondraitau fait que <strong>le</strong>s quotients différentiels <strong>de</strong>s F ν par rapport à xsont différentiab<strong>le</strong>s <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur côté par rapport à t.1 En dimension <strong>de</strong>ux, l’espace fixe sera une gran<strong>de</strong> région rectangulaire <strong>et</strong> planaire,tandis que l’espace mobi<strong>le</strong>, superposé tel une nappe liqui<strong>de</strong>, glissera <strong>de</strong> partoutes ses parties, d’un seul tenant, avec <strong>de</strong>s franges libres.


224 Division V. Chapitre 21. § 92.On doit en outre observer que Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz exclut <strong>de</strong> laconsidération <strong>le</strong>s circonstances où la continuité est interrompue. Nouspouvons exprimer cela plus rigoureusement, en établissant, comme on<strong>le</strong> fait par ail<strong>le</strong>urs couramment, que l’on doit se restreindre dans toutela recherche à une portion limitée <strong>de</strong> l’espace, à l’intérieur <strong>de</strong> laquell<strong>et</strong>outes <strong>le</strong>s fonctions qui se présentent <strong>et</strong> <strong>le</strong>urs premiers quotients différentielssont continus ; il s’agit là <strong>de</strong> fixer <strong>le</strong>s concepts d’une manièrequi est exactement la même que cel<strong>le</strong> vers laquel<strong>le</strong> nous avons déjàconvergé 2 <strong>de</strong>puis toujours dans nos recherches généra<strong>le</strong>s sur <strong>le</strong>s groupescontinus.Dans son <strong>de</strong>uxième axiome, Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz caractériseplus précisément <strong>le</strong>s mouvements <strong>de</strong> l’espace n fois étendu, lorsqu’ilindique comment <strong>de</strong>ux points quelconques <strong>de</strong> l’espace mobi<strong>le</strong> mentionnéci-<strong>de</strong>ssus se comportent l’un par rapport à l’autre au cours <strong>de</strong>sdifférents mouvements. Naturel<strong>le</strong>ment, <strong>le</strong>s exigences <strong>de</strong> l’Axiome II, <strong>et</strong>éga<strong>le</strong>ment cel<strong>le</strong>s <strong>de</strong>s axiomes suivants, se réfèrent seu<strong>le</strong>ment aux pointsqui se trouvent à l’intérieur d’une tel<strong>le</strong> portion limitée <strong>de</strong> l’espace n foisétendu, <strong>et</strong> qui y <strong>de</strong>meurent aussi au cours du mouvement.Considérons notre espace mobi<strong>le</strong> dans une situation quelconque àl’intérieur <strong>de</strong> l’espace fixe <strong>et</strong> envisageons <strong>de</strong>ux points quelconques <strong>de</strong>l’espace mobi<strong>le</strong>, qui ont <strong>le</strong>s coordonnées : x 0 1 . . .x 0 n, y 0 1 . . .y 0 n par rapportà l’espace fixe ; <strong>le</strong>s quantités : x 0 1 . . .x 0 n, y 0 1 . . .y 0 n possè<strong>de</strong>nt alors<strong>de</strong>s va<strong>le</strong>urs numériques déterminées, que nous pouvons cependant nousimaginer comme étant choisies <strong>de</strong> manière absolument quelconque. Enoutre, soit x 1 . . .x n , y 1 . . .y n <strong>le</strong>s coordonnées <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux points en questionlorsqu’ils sont dans une autre position quelconque <strong>de</strong> l’espace mobi<strong>le</strong>.Le <strong>de</strong>uxième axiome helmholtzien <strong>de</strong>man<strong>de</strong> alors qu’entre <strong>le</strong>s coordonnéesx 1 . . .x n , y 1 . . .y n , il existe une équation qui est indépendante<strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s mouvements, donc une équation qui est aussi satisfaite,dans toute nouvel<strong>le</strong> position <strong>de</strong> notre paire <strong>de</strong> points, par <strong>le</strong>s coordonnées<strong>de</strong> ses <strong>de</strong>ux points. De plus, dans l’axiome, il apparaît explicitementqu’entre <strong>le</strong>s 2n coordonnées <strong>de</strong> toute paire <strong>de</strong> points qui appartientà un corps rigi<strong>de</strong>, une tel<strong>le</strong> équation doit exister. En cela rési<strong>de</strong> <strong>le</strong> faitque l’équation entre x 1 . . .x n , y 1 . . .y n doit toujours être une équationvéritab<strong>le</strong>, quel<strong>le</strong> que soit la manière dont la position initia<strong>le</strong> : x 0 1 . . .x 0 n,y 0 1 . . .y0 n <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux points peut être choisie3 .2 À ce suj<strong>et</strong>, voir <strong>le</strong>s principes <strong>de</strong> pensée p. 79 sq.3 On s’attend à ce que l’équation mentionnée dépen<strong>de</strong> <strong>de</strong>s quatre variab<strong>le</strong>s x, y,x 0 <strong>et</strong> y 0 , comme c’est <strong>le</strong> cas pour l’équation |x − y | = |x 0 − y 0 | qui exprime la


Critique <strong>de</strong>s recherches helmholtziennes. 225Dans l’Axiome II, il est <strong>de</strong>mandé en plus que l’équation en questionsoit la même pour toutes <strong>le</strong>s paires <strong>de</strong> points congruentes, doncpour toutes <strong>le</strong>s paires <strong>de</strong> points qui peuvent être envoyées l’une surl’autre par <strong>le</strong>s mouvements ; par conséquent, el<strong>le</strong> ne dépend, en <strong>de</strong>hors<strong>de</strong> x 1 . . .x n , y 1 . . .y n , que <strong>de</strong>s coordonnées quelconques d’une paire<strong>de</strong> points congruents que l’on peut choisir librement, par exemp<strong>le</strong> <strong>de</strong>x 0 1 . . .x0 n , y0 1 . . .y0 n , donc c<strong>et</strong>te équation peut être rapportée à la forme 4 :(2) Φ ( x 0 1 . . .x0 n , y0 1 . . .y0 n , x 1 . . .x n , y 1 . . .y n)= 0.En particulier, c<strong>et</strong>te équation doit encore être satisfaite lorsque la paire<strong>de</strong> points x ν , y ν coïnci<strong>de</strong> avec la paire <strong>de</strong> points x 0 ν, yν, 0 <strong>et</strong> comme onpeut donner aux quantités x 0 ν, yν 0 <strong>de</strong>s va<strong>le</strong>urs numériques quelconques,<strong>et</strong> que donc par suite il ne peut pas exister <strong>de</strong> relation seu<strong>le</strong>ment entre :x 0 1 . . .x0 n , y0 1 . . .y0 n , il en décou<strong>le</strong> que l’équation (2) doit se réduire à unei<strong>de</strong>ntité lorsqu’on fait la susbstitution :x ν = x 0 ν , y ν = y 0 ν (ν =1 ···n).De là, il suit en même temps que (2) ne peut pas être libre <strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>s2n quantités x 0 ν , y0 ν .À présent, imaginons-nous que la paire <strong>de</strong> points x ν , y ν est soumiseà un mouvement continu qui est représenté par l’équation (1) ; el<strong>le</strong> estainsi envoyée sur une nouvel<strong>le</strong> paire <strong>de</strong> points, dont <strong>le</strong>s points possè<strong>de</strong>nt<strong>le</strong>s coordonnées :⎧ (⎪⎨x ν = F ν x1 . . .x n , t )((3)y ν = F ν y1 . . .y n , t )⎪⎩(ν = 1 ···n)dans l’espace fixe. Puisque c<strong>et</strong>te nouvel<strong>le</strong> paire <strong>de</strong> points doit satisfairela même équation que la paire <strong>de</strong> points x ν , y ν , il en décou<strong>le</strong> que l’équation:(2’) Φ ( x 0 1 . . .x0 n , y0 1 . . .y0 n , x 1 . . .x n , y 1 . . .y n)= 0est vali<strong>de</strong>, quel<strong>le</strong> que soit la va<strong>le</strong>ur <strong>de</strong> t. Si nous effectuons la substitution(3) dans c<strong>et</strong>te équation, nous obtenons une équation entre x 1 . . .x n ,y 1 . . .y n <strong>et</strong> t qui doit être satisfaite pour toutes <strong>le</strong>s va<strong>le</strong>urs <strong>de</strong> t. Si nousnous souvenons ici que x 1 . . .x n , y 1 . . .y n sont liés par la relation (2) <strong>et</strong>conservation <strong>de</strong> la norme euclidienne |z | := ( z 2 1 + · · · + z2 n) 1/2à travers tous <strong>le</strong>sdéplacements.4 Plus bas, l’équation (7) ramènera encore plus précisément c<strong>et</strong>te relation syncrétiqueà la forme symétrique <strong>et</strong> résolue Ω(x, y) = Ω(x 0 , y 0 ).


226 Division V. Chapitre 21. § 92.que c<strong>et</strong>te relation doit être indépendante <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s mouvement, alorsnous réalisons que par la substitution (3), l’équation (2’) doit se transformeren une équation qui est équiva<strong>le</strong>nte à (2). Si tel n’était pas <strong>le</strong> cas,alors par la substitution (3), l’équation (2’) ne se transformerait pas enune équation qui est une conséquence <strong>de</strong> (2), donc l’équation (2) entre<strong>le</strong>s coordonnées <strong>de</strong>s paires <strong>de</strong> points mobi<strong>le</strong>s ne serait manifestementpas indépendante du mouvement, mais au contraire, el<strong>le</strong> changerait aucours du mouvement.Puisque l’équation (2) ne peut pas être libre <strong>de</strong>s 2n quantités x 0 ν, y 0 ν,nous sommes autorisés à nous imaginer qu’el<strong>le</strong> est résolue par rapportà l’une <strong>de</strong> ces quantités, par exemp<strong>le</strong>, par rapport à y 0 n :(4) y 0 n = ϕ( x 0 1 . . .x0 n , y0 1 . . . y0 n−1 , x 1 . . .x n , y 1 . . .y n).D’après ce qui a été dit à l’instant, on obtient à présent que l’équation :(4’) y 0 n = ϕ ( x 0 1 . . .x 0 n, y 0 1 . . .y 0 n−1, x 1 . . .x n , y 1 . . .y n)se transforme en (4) par la substitution (3), <strong>et</strong> puisque nous pouvons attribueraux quantités x 0 ν, yν 0 toutes <strong>le</strong>s va<strong>le</strong>urs numériques quelconques,ceci doit valoir aussi quel<strong>le</strong>s que soient <strong>le</strong>s va<strong>le</strong>urs que peuvent avoirx 0 ν , y0 ν , c’est-à-dire que l’équation :(5){ϕ(x01 . . .x 0 n , y0 1 . . .y0 n−1 , x 1 . . .x n , y 1 . . .y n)== ϕ ( x 0 1 . . .x0 n , y0 1 . . .y0 n−1 , x 1 . . .x n , y 1 . . .y n)doit se transformer en une i<strong>de</strong>ntité par la substitution (3).Tout ceci reste encore vrai aussi, lorsque l’on attribue aux quantités: x 0 1 . . .x0 n , y0 1 . . . y0 n−1 <strong>de</strong>s va<strong>le</strong>urs numériques déterminées :α 1 . . .α n , β 1 . . .β n−1 ; si donc nous posons :ϕ ( ) ( )α 1 . . .α n , β 1 . . .β n−1 , x 1 . . .x n , y 1 . . .y n = Ω x1 . . .x n , y 1 . . .y nnous obtenons à partir <strong>de</strong> (5) l’équation :(6) Ω ( x 1 . . .x n , y 1 . . .y n)= Ω(x1 . . .x n , y 1 . . .y n),qui se transforme éga<strong>le</strong>ment en une i<strong>de</strong>ntité par la substitution (3). Noustrouvons ainsi que <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux points x 1 . . .x n , y 1 . . .y n possè<strong>de</strong>nt l’invariant: Ω ( x 1 . . .x n , y 1 . . .y n)relativement aux ∞ 1 transformations (1).En même temps, il en décou<strong>le</strong> que l’équation (2), ou l’équation (4) qui


Critique <strong>de</strong>s recherches helmholtziennes. 227lui est équiva<strong>le</strong>nte, peut être rapportée à la forme 5 :(7) Ω ( x 1 . . .x n , y 1 . . .y n)= Ω(x01 . . .x 0 n, y 0 1 . . .y 0 n).Les équations (1) représentent un mouvement quelconque parmi<strong>le</strong>s mouvements continus qui sont admissib<strong>le</strong>s, <strong>et</strong> ce, <strong>de</strong> la manière laplus généra<strong>le</strong> possib<strong>le</strong> ; <strong>le</strong>s mêmes considérations que cel<strong>le</strong>s émises auparavantmontrent alors que la fonction Ω ( x 1 . . .x n , y 1 . . .y n)<strong>de</strong>s coordonnées<strong>de</strong> la paire <strong>de</strong> points x 1 . . .x n , y 1 . . .y n conserve sa va<strong>le</strong>urnumérique à travers tous <strong>le</strong>s mouvements dont est susceptib<strong>le</strong> c<strong>et</strong>te paire<strong>de</strong> points ; <strong>et</strong> que donc, en prenant pour base <strong>le</strong> <strong>de</strong>uxième axiome helmholtzien,chaque paire <strong>de</strong> points appartenant à l’espace mobi<strong>le</strong> mentionnéprécé<strong>de</strong>mment possè<strong>de</strong> un invariant relativement à tous <strong>le</strong>s mouvements.En d’autres termes :Soit :x ν = F ν(x1 . . .x n , t )(ν = 1···n)la famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ 1 transformations qui est déterminée par un mouvementcontinu quelconque <strong>de</strong> l’espace n fois étendu, alors <strong>de</strong>ux points :x 1 . . .x n , y 1 . . .y n possè<strong>de</strong>nt toujours un invariant :Ω ( x 1 . . .x n , y 1 . . .y n)relativement à la famil<strong>le</strong> (1) ; <strong>et</strong> pour préciser, <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux points ont c<strong>et</strong>invariant relativement à toute famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ 1 transformations, qui estspécifiée comme étant l’un <strong>de</strong>s mouvements continus admissib<strong>le</strong>s <strong>de</strong>l’espace <strong>le</strong> plus général possib<strong>le</strong>.Toutefois, on doit souligner que l’existence d’un tel invariant estseu<strong>le</strong>ment une conséquence du <strong>de</strong>uxième axiome helmholtzien, <strong>et</strong> qu’enrevanche, l’exigence qu’il doit exister un tel invariant ne peut pas êtresubstituée complètement à c<strong>et</strong> axiome.En eff<strong>et</strong>, <strong>le</strong> <strong>de</strong>uxième axiome <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, comme nous l’avons vuplus haut, qu’entre <strong>le</strong>s coordonnées <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux points distincts l’un <strong>de</strong>l’autre dans notre espace mobi<strong>le</strong>, il existe une équation indépendante dumouvement, <strong>et</strong> pour préciser, une véritab<strong>le</strong> équation 6 , donc une équationqui n’est pas sans signification pour une paire <strong>de</strong> points individuel<strong>le</strong>. Simaintenant <strong>de</strong>ux points : x 1 . . .x n <strong>et</strong> y 1 . . . y n <strong>de</strong> l’espace mobi<strong>le</strong> ont5 C<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière équation déduite, aussi bien que l’équation abstraite (7) postuléep. 169, réfère sémantiquement à la conservation dist(x, y) = dist(x 0 , y 0 ) d’une« distance » en un certain sens généralisé ; <strong>le</strong>s résultats <strong>de</strong> la recherche <strong>le</strong> préciseront.6 En toute rigueur, Helmholtz a effectivement oublié <strong>de</strong> requérir que l’équationinvariante soit non trivia<strong>le</strong>, sain réf<strong>le</strong>xe logique dont nul géomètre ne doit manquer.


228 Division V. Chapitre 21. § 92.l’invariant : Ω(x, y) relativement à tous <strong>le</strong>s mouvements, alors il s’ensuit— à vrai dire en toute généralité — qu’entre <strong>le</strong>urs 2n coordonnées,il existe une équation indépendante <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s mouvements, à savoirl’équation :(7) Ω ( x 1 . . .x n ; y 1 . . .y n)= Ω(x01 . . .x 0 n ; y0 1 . . .y0 n),dans laquel<strong>le</strong> <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux systèmes <strong>de</strong> va<strong>le</strong>urs distincts l’un <strong>de</strong> l’autre :x 0 1 . . .x 0 n <strong>et</strong> : y1 0 . . .yn, 0 désignent <strong>le</strong>s coordonnées <strong>de</strong> la paire <strong>de</strong> points :x 1 . . .x n , y 1 . . . y n dans une situation initia<strong>le</strong> quelconque bien définie <strong>de</strong>l’espace mobi<strong>le</strong> ; dans certains cas exceptionnels, il peut cependant seproduire que (7) ne représente pas d’équation véritab<strong>le</strong> entre x 1 . . .x n ,y 1 . . .y n , par exemp<strong>le</strong> lorsque <strong>le</strong> membre <strong>de</strong> droite <strong>de</strong> (7) prend uneforme absolument nul<strong>le</strong> pour certains systèmes <strong>de</strong> va<strong>le</strong>urs : x 0 1 . . .x0 n ,y1 0 . . .y0 n .Il s’ensuit <strong>de</strong> là qu’afin d’épuiser complètement <strong>le</strong> contenu du<strong>de</strong>uxième axiome helmholtzien, nous ne pouvons pas nous contenter,pour toute paire <strong>de</strong> points, <strong>de</strong> requérir l’existence d’un invariant, maisnous <strong>de</strong>vons encore ajouter une <strong>de</strong>uxième exigence, qui peut s’énoncer<strong>de</strong> la manière suivante :L’invariant Ω ( )x 1 . . .x n , y 1 . . .y n <strong>de</strong> la paire <strong>de</strong> points : x1 . . .x n ,y 1 . . .y n doit être constitué <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que l’équation (7) soit toujoursune équation véritab<strong>le</strong> entre x 1 . . .x n <strong>et</strong> y 1 . . .y n , quel<strong>le</strong>s que soient<strong>le</strong>s différentes va<strong>le</strong>urs numériques qu’on puisse donner à x 0 1 . . .x0 n ,y1 0 . . .yn.0Il va <strong>de</strong> soi que c<strong>et</strong>te exigence doit être satisfaite seu<strong>le</strong>ment pour<strong>le</strong>s systèmes <strong>de</strong> va<strong>le</strong>urs : x 0 1 . . .x0 n , y0 1 . . .y0 n qui appartiennent à la régionlimitée <strong>de</strong> l’espace n fois étendu qui a été mentionnéee précé<strong>de</strong>mment.Avant que nous passions à la considération du troisième axiomehelmholtzien, nous voulons auparavant mentionner certaines conséquencesqui se laissent déduire <strong>de</strong> l’existence <strong>de</strong> l’invariant Ω(x, y).Supponsons que <strong>le</strong>s équations :(8) x ′ ν = F ν(x1 . . .x n ; t ) (ν = 1 ··· n)<strong>et</strong>(9) x ′′ν = Φ ν(x′1 . . .x ′ n ; τ) (ν = 1 ···n)représentent <strong>de</strong>ux mouvements continus quelconques <strong>de</strong> l’espace n foisétendu. Si nous nous imaginons d’abord <strong>le</strong> mouvement (8) s’accomplissantpendant <strong>le</strong> temps t, <strong>et</strong> ensuite <strong>le</strong> mouvement (9) pendant <strong>le</strong> temps


Critique <strong>de</strong>s recherches helmholtziennes. 229τ, alors <strong>le</strong> point : x 1 . . .x n se trouvera fina<strong>le</strong>ment dans la position :x ′′1 . . .x′′ n qui est définie par <strong>le</strong>s équations :(10) x ′′ν = Φ ν(F1 (x, t) . . .F n (x, t); τ ) (ν = 1 ··· n).Maintenant, comme ces équations (10) représentent évi<strong>de</strong>mment un<strong>et</strong>ransformation, on en déduit que par l’effectuation <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux mouvementsl’un à la suite <strong>de</strong> l’autre, on obtient toujours une certaine transformation<strong>de</strong> l’espace. La même chose vaut naturel<strong>le</strong>ment lorsqu’on effectue unnombre quelconque <strong>de</strong> tels mouvements l’un à la suite <strong>de</strong> l’autre.Si nous nous souvenons maintenant que <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux points : x 1 . . .x n ,y 1 . . .y n ont l’invariant Ω(x, y) non seu<strong>le</strong>ment relativement à la transformation(8), mais aussi relativement à la transformation (9), nousvoyons alors immédiatement qu’ils possè<strong>de</strong>nt c<strong>et</strong> invariant relativementà toute transformation (10), <strong>et</strong> plus généra<strong>le</strong>ment, relativement à tout<strong>et</strong>ransformation qui est obtenue par accomplissement <strong>de</strong> plusieurs mouvementsl’un à la suite <strong>de</strong> l’autre. Par conséquent :Si l’on effectue un mouvement continu, ou plusieurs mouvements<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te sorte l’un à la suite <strong>de</strong> l’autre, alors on obtient toujours un<strong>et</strong>ransformation relativement à laquel<strong>le</strong> <strong>de</strong>ux points quelconques : x ν <strong>et</strong>y ν ont l’invariant Ω(x, y).Au moyen du mouvement continu <strong>le</strong> plus général possib<strong>le</strong> qui soitadmissib<strong>le</strong>, une certaine famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> transformations <strong>de</strong> l’espace est doncspécifiée <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que, relativement à c<strong>et</strong>te famil<strong>le</strong>, <strong>de</strong>ux pointsx ν <strong>et</strong> y ν ont l’invariant Ω(x, y). Nous ne pouvons pas dire pour l’instant<strong>de</strong> quel<strong>le</strong> nature particulière est faite c<strong>et</strong>te famil<strong>le</strong>, puisque c’est l<strong>et</strong>roisième axiome helmholtzien qui donne la première information là<strong>de</strong>ssus.On ne peut d’ail<strong>le</strong>urs même pas encore conclure du contenu du<strong>de</strong>uxième aximome que <strong>de</strong>ux points doivent avoir seu<strong>le</strong>ment un invariant.Le troisième axiome <strong>de</strong> Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz (voir p. 221,lignes 1 à 11 ci-<strong>de</strong>ssus) est constitué <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux parties.La première partie (l. 1 à 5) peut être, si l’on tient compte <strong>de</strong> cequi a été dit auparavant, formulée <strong>de</strong> la manière suivante : chaque point<strong>de</strong> l’espace mobi<strong>le</strong> doit pouvoir être déplacé continûment dans <strong>le</strong> lieu<strong>de</strong> chaque autre point <strong>de</strong> c<strong>et</strong> espace, tant qu’il n’est pas restreint par <strong>le</strong>fait que <strong>le</strong>s invariants <strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>s paires <strong>de</strong> points <strong>de</strong> l’espace mobi<strong>le</strong>auquel il appartient doivent conserver <strong>le</strong>ur va<strong>le</strong>ur numérique au coursdu mouvement.


230 Division V. Chapitre 21. § 92.En cela rési<strong>de</strong> <strong>le</strong> fait que chaque invariant que possè<strong>de</strong> un systèmequelconque <strong>de</strong> points : P 1 , P 2 , P 3 . . . relativement à tous <strong>le</strong>s mouvements,doit se laisser exprimer au moyen <strong>de</strong>s invariants <strong>de</strong>s paires <strong>de</strong>points qui sont contenues dans <strong>le</strong> système. Si en eff<strong>et</strong> J est un invariantquelconque que <strong>le</strong> système <strong>de</strong> points : P 1 , P 2 , P 3 . . . a relativement àtous <strong>le</strong>s mouvements, alors la fonction J conserve sa va<strong>le</strong>ur numériqueau cours <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s mouvements. Si maintenant J ne se laissait pasexprimer au moyen <strong>de</strong>s invariants <strong>de</strong>s paires <strong>de</strong> points : P 1 , P 2 ; P 1 , P 3 ;P 2 , P 3 ; . . . , alors la mobilité du système <strong>de</strong> points : P 1 , P 2 , P 3 . . . ne seraitpas seu<strong>le</strong>ment limitée par <strong>le</strong> fait que <strong>le</strong>s invariants <strong>de</strong> ces paires <strong>de</strong>points-là <strong>de</strong>vraient conserver <strong>le</strong>ur va<strong>le</strong>ur numérique au cours du mouvement,mais el<strong>le</strong> serait aussi limitée par la condition indépendante parrapport à cel<strong>le</strong>s-là que J doit conserver toujours sa va<strong>le</strong>ur numérique ;mais cela contredirait l’axiome posé ci-<strong>de</strong>ssus.Il suit alors <strong>de</strong> la première partie du troisième axiome helmholtzienqu’un point n’a absolument aucun invariant relativement à tous <strong>le</strong>smouvements <strong>et</strong> que trois points (ou plus) ne possè<strong>de</strong>nt, relativement àtous <strong>le</strong>s mouvements, que <strong>le</strong>s invariants qui s’expriment au moyen <strong>de</strong>sinvariants <strong>de</strong>s paires <strong>de</strong> points qui sont contenues en eux ; autrementdit : un point individuel n’a en général aucun invariant ; <strong>de</strong>ux pointsont en tout cas un invariant relativement à tous <strong>le</strong>s mouvements possib<strong>le</strong>s; mais au contraire, trois points (ou plus) n’ont aucun invariantessentiel. Mais comme nous ne savons cependant pas encore si c<strong>et</strong>tepropriété <strong>de</strong>s mouvements peut être substituée entièrement à l’exigencequi est posée dans c<strong>et</strong>te première partie-là, nous <strong>de</strong>vons comme auparavantajouter l’exigence que chaque point P <strong>de</strong> l’espace mobi<strong>le</strong> est limitédans son mouvement seu<strong>le</strong>ment par <strong>le</strong>s invariants qu’il a avec <strong>le</strong>s autrespoints <strong>de</strong> l’espace mobi<strong>le</strong>.Il reste maintenant encore à discuter <strong>de</strong> la <strong>de</strong>uxième partie du troisièmeaxiome helmholtzien (voir p. 221, l. 6–11 ci-<strong>de</strong>ssus).La <strong>de</strong>uxième partie <strong>de</strong> l’Axiome III semb<strong>le</strong> au premier coup d’œilne contenir que <strong>de</strong>s conséquences <strong>de</strong> la première partie, <strong>et</strong> c’est visib<strong>le</strong>mentainsi que Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz a voulu l’entendre. Il en vacependant tout autrement. Certes <strong>le</strong>s lignes 6–9 expriment seu<strong>le</strong>ment<strong>de</strong>s faits qui sont conséquences immédiates <strong>de</strong>s hypothèses posées précé<strong>de</strong>mment,en particulier <strong>le</strong>s mots : « <strong>le</strong> premier point . . . mobi<strong>le</strong> » nesont qu’une autre manière d’exprimer <strong>le</strong> fait qu’un point individuel nepossè<strong>de</strong> aucun invariant. Mais dans <strong>le</strong>s lignes 10 <strong>et</strong> 11 se glisse unenouvel<strong>le</strong> supposition qui n’est pas conséquence <strong>de</strong>s précé<strong>de</strong>ntes.


Critique <strong>de</strong>s recherches helmholtziennes. 231Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz s’imagine en eff<strong>et</strong> qu’un certain nombre,disons m, <strong>de</strong> points : P 1 , P 2 , . . .P m <strong>de</strong> l’espace mobi<strong>le</strong> sont fixés.D’après l’Axiome II, il existe alors pour <strong>le</strong>s coordonnées <strong>de</strong> chaqueautre point P <strong>de</strong> l’espace mobi<strong>le</strong> certaines équations, qui exprimentque <strong>le</strong>s invariants <strong>de</strong>s m paires <strong>de</strong> points : P, P 1 ; P, P 2 ; . . . ; P, P mconservent <strong>le</strong>ur va<strong>le</strong>ur numérique au cours <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s mouvements encorepossib<strong>le</strong>s. Mais <strong>le</strong>s hypothèses qui précè<strong>de</strong>nt ne disent rien sur lanature <strong>et</strong> sur <strong>le</strong> nombre <strong>de</strong> ces équations, ce au suj<strong>et</strong> <strong>de</strong> quoi certainessuppositions qui sont faites tacitement aux lignes 11 <strong>et</strong> 12 donnent unpremier éclaircissement.Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz <strong>de</strong>man<strong>de</strong> dans ces circonstances lachose suivante, que nous pouvons exprimer ainsi : si <strong>le</strong>s m pointsP 1 , P 2 , . . .P m sont fixés, il doit exister entre <strong>le</strong>s n coordonnées <strong>de</strong>chaque autre point P exactement m (mais pas plus) équations, <strong>et</strong>ces équations doivent généra<strong>le</strong>ment être indépendantes <strong>le</strong>s unes <strong>de</strong>sautres, c’est-à-dire, qu’el<strong>le</strong>s doivent être indépendantes <strong>le</strong>s unes <strong>de</strong>sautres aussi longtemps que P 1 . . .P m sont <strong>de</strong>s points mutuel<strong>le</strong>ment enposition généra<strong>le</strong> * .Il suit <strong>de</strong> là tout d’abord qu’après fixation d’un point P 1 , il existeune <strong>et</strong> une seu<strong>le</strong> équation pour tout autre point P ; <strong>et</strong> comme un pointindividuel ne doit avoir aucun invariant, il en décou<strong>le</strong> que <strong>de</strong>ux pointsont un <strong>et</strong> un seul invariant.En outre, <strong>le</strong>s exigences helmholtziennes montrent qu’après fixation<strong>de</strong> m points : P 1 . . .P m qui sont mutuel<strong>le</strong>ment en position généra<strong>le</strong>,un mouvement continu est encore toujours possib<strong>le</strong>, tant que m a l’une<strong>de</strong>s va<strong>le</strong>urs 1, 2, . . ., n − 1, mais qu’au contraire, dans <strong>le</strong> cas m = n,aucun mouvement continu n’est plus possib<strong>le</strong>, <strong>et</strong> qu’après fixation <strong>de</strong> npoints tels, tous <strong>le</strong>s points <strong>de</strong> l’espace <strong>de</strong>meurent plutôt généra<strong>le</strong>ment aurepos. Si en eff<strong>et</strong> <strong>le</strong>s m points : P 1 . . .P m sont fixés, il existe alors entre<strong>le</strong>s n coordonnées <strong>de</strong> tout autre point P en position généra<strong>le</strong> m équationsindépendantes <strong>le</strong>s unes <strong>de</strong>s autres. Et puisque, d’après ce qui précè<strong>de</strong>,lorsqu’on tient compte <strong>de</strong>s hypothèses admises, ce sont <strong>le</strong>s seu<strong>le</strong>s*Ainsi doivent être compris <strong>le</strong>s mots <strong>de</strong>s lignes 6–11 <strong>de</strong> l’Axiome III ci-<strong>de</strong>ssus.Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz dit ici, certes d’une manière qui n’est pas explicite, quelorsque <strong>le</strong> premier point d’un système rigi<strong>de</strong> en lui-même est fixé, il doit exister une<strong>et</strong> une seu<strong>le</strong> équation pour chaque autre point ; <strong>et</strong> puisqu’il ajoute alors : « l’une <strong>de</strong>ses coordonnées <strong>de</strong>vient une fonction <strong>de</strong>s (n − 1) coordonnées restantes », il est clairqu’il exclut l’existence <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux équations pour <strong>le</strong> <strong>de</strong>uxième point. Il résulte éga<strong>le</strong>ment<strong>de</strong> manière distincte <strong>de</strong> tout cela qu’après fixation <strong>de</strong> m points, alors pour tout autrepoint, il doit exister exactement m équations qui sont en général indépendantes <strong>le</strong>sunes <strong>de</strong>s autres.


232 Division V. Chapitre 21. § 92.conditions auxquel<strong>le</strong>s la mobilité <strong>de</strong> P est soumise, il en décou<strong>le</strong> que Ppeut encore être envoyé sur chaque autre point P ′ dont <strong>le</strong>s coordonnéessatisfont ces m équations-là, <strong>et</strong> qui est lié à P par une série continue d<strong>et</strong>els points. Si donc en particulier m a la va<strong>le</strong>ur n, alors <strong>le</strong> point P nepeut plus effectuer aucun mouvement continu, mais il doit au contrairerester au repos.Nous avons vu plus haut qu’en accomplissant un nombre quelconque<strong>de</strong> mouvements continus l’un après l’autre, on obtient toujoursune transformation ponctuel<strong>le</strong> <strong>de</strong> R 3 parfaitement déterminée. Nouspouvons maintenant donner <strong>de</strong>s explications plus précises sur la famil<strong>le</strong><strong>de</strong>s transformations qui sont engendrées <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te manière.Considérons notre espace mobi<strong>le</strong> dans une situation quelconque àl’intérieur <strong>de</strong> l’espace fixe. Soit n points P 1 . . .P n qui sont mutuel<strong>le</strong>menten position généra<strong>le</strong> dans l’espace mobi<strong>le</strong> <strong>et</strong> P 1 . . .P n <strong>le</strong>s points<strong>de</strong> l’espace fixe avec <strong>le</strong>squels ils coïnci<strong>de</strong>nt exactement. Si ensuite P estun autre point quelconque <strong>de</strong> l’espace mobi<strong>le</strong>, alors P a aussi une positionentièrement déterminée à l’intérieur <strong>de</strong> l’espace fixe, car il n’existeplus aucun mouvement continu tel que P 1 . . .P n conservent complètement<strong>le</strong>ur position : P 1 . . .P n .Maintenant, imaginons-nous que l’espace mobi<strong>le</strong> est soumis à unnombre quelconque <strong>de</strong> mouvements continus. Nous allons voir que latransformation la plus généra<strong>le</strong> <strong>de</strong> R n que l’on peut obtenir <strong>de</strong> c<strong>et</strong>temanière ne dépend que d’un nombre fini <strong>de</strong> paramètres arbitraires.En eff<strong>et</strong>, par un mouvement continu, nous pouvons tout d’abordtransférer <strong>le</strong> point P 1 <strong>de</strong> la position P 1 vers tout autre point P ′ 1 , <strong>et</strong> parconséquent, la position la plus généra<strong>le</strong> <strong>de</strong> P ′ 1 dépend <strong>de</strong> n paramètresarbitraires. Si l’on choisit P ′ 1 fixé, alors P 2 peut encore être transférévers tout autre point P ′ 2 qui satisfait une certaine équation, donc P′ 2dépend encore, lorsqu’on a choisi P ′ 1 , <strong>de</strong> n − 1 paramètres, <strong>et</strong> ainsi <strong>de</strong>suite. En bref, par <strong>de</strong>s mouvements continus, nous pouvons parvenir à ceque P 1 . . . P n reçoivent <strong>le</strong>s position nouvel<strong>le</strong>s P ′ 1 . . .P ′ n, où <strong>le</strong> système<strong>de</strong> points : P ′ 1 . . .P′ n dépend <strong>de</strong> :n + (n − 1) + (n − 2) + · · · + 1 = n(n+1)1 · 2paramètres. Mais avec cela, toutes <strong>le</strong>s possibilités sont aussi épuisées,car aussitôt que P 1 . . .P n reçoivent la nouvel<strong>le</strong> position : P ′ 1 . . .P ′ n,tout autre point P <strong>de</strong> l’espace mobi<strong>le</strong> reçoit en même temps une nouvel<strong>le</strong>position P ′ complètement déterminée, puisqu’il n’y a plus aucun


Critique <strong>de</strong>s recherches helmholtziennes. 233mouvement continu au cours duquel P ′ 1 . . .P′ n <strong>de</strong>meurent entièrementau repos.En cela rési<strong>de</strong> <strong>le</strong> fait que, par <strong>le</strong> transfert du système <strong>de</strong> pointsP 1 . . . P n <strong>de</strong>puis la position initia<strong>le</strong> : P 1 . . .P n vers la nouvel<strong>le</strong> position: P ′ 1 . . .P ′ n, une transformation ponctuel<strong>le</strong> entièrement déterminéeest définie <strong>de</strong> manière unique ; quel<strong>le</strong> que soit la façon dont ce transfertpuisse être effectué par une série <strong>de</strong> mouvement continus se succédantl’un après l’autre, on obtient toujours la même transformation ponctuel<strong>le</strong>quand on effectue ces mouvements l’un après l’autre. Maintenant,puisqu’il y a exactement 1 n(n + 1) paramètres arbitraires à disposition2pour <strong>le</strong> choix du système <strong>de</strong> points P ′ 1 . . .P′ n , lorsqu’on s’imagine <strong>le</strong>système <strong>de</strong> points P 1 . . . P n déplacé <strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>s manières possib<strong>le</strong>s,il en décou<strong>le</strong> que l’ensemb<strong>le</strong> <strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>s transformations ponctuel<strong>le</strong>s,qui peuvent être obtenues par un nombre quelconque <strong>de</strong> mouvementscontinus <strong>de</strong> l’espace mobi<strong>le</strong> à partir d’une position initia<strong>le</strong> déterminée,constitue une famil<strong>le</strong> ayant exactement 1 n(n+1) paramètres essentiels.2Remarquons ensuite que c<strong>et</strong>te famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> transformations ponctuel<strong>le</strong>sest indépendante du choix <strong>de</strong> la position initia<strong>le</strong> <strong>de</strong> l’espace mobi<strong>le</strong>,parce que, quel<strong>le</strong> que soit la manière dont on choisit la positioninitia<strong>le</strong>, il y a toujours n points P 1 . . .P n <strong>de</strong> l’espace mobi<strong>le</strong> qui coïnci<strong>de</strong>ntavec <strong>le</strong>s points : P 1 . . .P n <strong>de</strong> l’espace fixe. En cela rési<strong>de</strong> <strong>le</strong> faitque la famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> transformations ponctuel<strong>le</strong>s ainsi définie à l’instantconstitue un groupe. En eff<strong>et</strong>, si au moyen d’une transformation quelconque<strong>de</strong> notre famil<strong>le</strong>, nous amenons l’espace mobi<strong>le</strong> <strong>de</strong> la positionR à la position R ′ , <strong>et</strong> si ensuite, au moyen d’une autre transformation <strong>de</strong>notre famil<strong>le</strong>, nous l’amenons <strong>de</strong> la position R ′ à la position R ′′ , alorsil y a toujours une transformation entièrement déterminée appartenant àla famil<strong>le</strong>, grâce à laquel<strong>le</strong> R se transforme en R ′′ .Le groupe que l’on trouve <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te manière est sûrement transitif,car il peut envoyer tout point <strong>de</strong> l’espace sur tout autre point. De plus i<strong>le</strong>st faci<strong>le</strong> <strong>de</strong> voir que ses transformations sont ordonnées ensemb<strong>le</strong> parpaires <strong>de</strong> transformations inverses. En eff<strong>et</strong>, si S est la transformation<strong>de</strong> notre groupe qui envoie P 1 . . .P n sur P ′ 1 . . .P′ n , alors il est toujourspossib<strong>le</strong>, au moyen d’un certain nombre <strong>de</strong> mouvements continus,<strong>de</strong> parvenir à ce que <strong>le</strong>s points <strong>de</strong> l’espace mobi<strong>le</strong>, qui coïnci<strong>de</strong>nt avecP ′ 1 . . .P ′ n dans une situation quelconque <strong>de</strong> c<strong>et</strong> espace, arrivent fina<strong>le</strong>mentà la position : P 1 . . .P n . Ainsi S −1 fait toujours partie <strong>de</strong> notregroupe en même temps que S.Enfin, on peut aussi démontrer que notre groupe, que nous voulonsappe<strong>le</strong>r brièvement g, est continu. En eff<strong>et</strong>, s’il ne l’était pas, d’après


234 Division V. Chapitre 21. § 92.<strong>le</strong> Tome I, Chap. 18 7 , il serait composé d’une série <strong>de</strong> famil<strong>le</strong>s continuesséparées, dont chacune contiendrait 1 n(n+1) paramètres <strong>et</strong> parmi2ces famil<strong>le</strong>s, il y en aurait une qui est continue <strong>et</strong> qui constituerait ungroupe g à 1 n(n+1) paramètres contenant <strong>de</strong>s transformations inverses2par paires. Ce groupe g serait <strong>le</strong> seul auquel appartient la transformationi<strong>de</strong>ntique, parmi <strong>le</strong>s famil<strong>le</strong>s continues concernées. Mais maintenant,chaque famil<strong>le</strong> continue <strong>de</strong> ∞ 1 transformations qui est déterminéepar un mouvement continu contient la transformation i<strong>de</strong>ntique (voirp. 223) <strong>et</strong> el<strong>le</strong> fait donc partie du groupe g ; par conséquent, <strong>le</strong> groupeg comprend aussi toutes <strong>le</strong>s transformations qui proviennent <strong>de</strong> l’accomplissementd’un nombre quelconque <strong>de</strong> mouvements continus l’unaprès l’autre. Il en décou<strong>le</strong> que g est contenu dans g <strong>et</strong> comme g était unsous-groupe <strong>de</strong> g, nous pouvons conclure que g coïnci<strong>de</strong> avec g, c’està-direque g est effectivement continu.Avec <strong>le</strong>s hypothèses qu’a faites <strong>de</strong> Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz,l’énoncé suivant est donc vali<strong>de</strong> :Lorsqu’on effectue un nombre quelconque <strong>de</strong> mouvements continus<strong>de</strong> l’espace <strong>le</strong>s uns à la suite <strong>de</strong>s autres, parmi ceux qui sont <strong>le</strong>splus admissib<strong>le</strong>s possib<strong>le</strong>s, on obtient un groupe continu fini transitifg <strong>de</strong> transformations réel<strong>le</strong>s qui renferme exactement 1 n(n + 1) paramètres<strong>et</strong> dont <strong>le</strong>s transformations sont inverses l’une <strong>de</strong> l’autre par2paires.Il va alors <strong>de</strong> soi que relativement à ce groupe, <strong>de</strong>ux points ont un<strong>et</strong> un seul invariant, <strong>et</strong> que s > 2 points n’ont pas d’invariant essentiel.En eff<strong>et</strong>, si <strong>de</strong>ux points possédaient par exemp<strong>le</strong> plus d’un invariantrelativement au groupe, ils possè<strong>de</strong>raient alors évi<strong>de</strong>mment aussi c<strong>et</strong>invariant relativement à tous <strong>le</strong>s mouvements continus, alors qu’ils nedoivent avoir qu’un seul invariant relativement à ces mouvements.Grâce à ce qui précè<strong>de</strong>, il a été démontré que nous avons affaire àun groupe continu fini <strong>et</strong> que relativement à ce groupe, <strong>de</strong>ux points ontun <strong>et</strong> un seul invariant, tandis que s > 2 points n’ont pas d’invariant essentiel.Nous avons déjà étudié dans <strong>le</strong> Chapitre 20 <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> c<strong>et</strong>teespèce, <strong>et</strong> bien que nous nous soyons limités, à ce moment-là, à l’espace<strong>de</strong> dimension trois, on peut néanmoins appliquer immédiatementau cas <strong>de</strong> l’espace n fois étendu au moins une partie <strong>de</strong>s raisonnementsconduits à c<strong>et</strong> endroit-là, à savoir <strong>le</strong>s développements <strong>de</strong>s pages 166–173. Nous reconnaissons ainsi que chaque groupe ayant la constitution7 Ce chapitre est consacré à l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong> transformations comportantplusiseurs composantes connexes.


Critique <strong>de</strong>s recherches helmholtziennes. 235définie à l’instant possè<strong>de</strong> <strong>le</strong>s propriétés suivantes : si un point en positiongénéra<strong>le</strong> est fixé, alors tout autre point en position généra<strong>le</strong> peutrecevoir encore ∞ n−1 positions différentes ; si on fixe <strong>de</strong>ux points quisont mutuel<strong>le</strong>ment en position généra<strong>le</strong>, alors tout autre troisième pointen position généra<strong>le</strong> peut encore recevoir ∞ n−2 positions différentes,<strong>et</strong>c. ; pour être bref, nous trouvons que la finitu<strong>de</strong> du groupe <strong>et</strong> que<strong>le</strong>s hypothèses faites sur <strong>le</strong>s invariants <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux points (ou plus) qui ontété indiquées à la page 231 se déduisent <strong>de</strong>s exigences <strong>de</strong> Monsieur <strong>de</strong>Helmholtz, à savoir <strong>de</strong>s exigences qu’après fixation d’un point, il existeune <strong>et</strong> une seu<strong>le</strong> équation pour tout autre point, <strong>et</strong> ainsi <strong>de</strong> suite. Ainsi,nous n’avons plus besoin <strong>de</strong> mentionner spécia<strong>le</strong>ment ces exigences.Fina<strong>le</strong>ment, on peut encore mentionner que <strong>le</strong> groupe continu finig qui est déterminé par <strong>le</strong>s mouvements continus <strong>de</strong> l’espace se trouveêtre lié encore d’une manière simp<strong>le</strong> à un autre groupe. Nous entendons<strong>le</strong> groupe g ′ <strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>s transformations ponctuel<strong>le</strong>s pour <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s<strong>de</strong>ux points quelconques x ν , y ν ont l’invariant Ω(x, y).Il est à l’avance clair qu’il existe un tel groupe g ′ , car, quel<strong>le</strong> quesoit la manière dont nous pouvons choisir la fonction Ω(x, y), il y atoujours <strong>de</strong>s transformations relativement auxquel<strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux points ontl’invariant Ω(x, y), <strong>et</strong> aussi, l’ensemb<strong>le</strong> <strong>de</strong> ces transformations constitu<strong>et</strong>oujours un certain groupe, qui à vrai dire peut éventuel<strong>le</strong>ment se réduireà la transformation i<strong>de</strong>ntique.Dans notre cas, il est maintenant faci<strong>le</strong> <strong>de</strong> voir que la transformationla plus généra<strong>le</strong> <strong>de</strong> g ′ contient exactement 1 n(n + 1) paramètres2arbitraires, ce qui décou<strong>le</strong> tout simp<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> la propriété particulièrequ’a l’invariant Ω(x, y), sous <strong>le</strong>s hypothèses ici posées. Par conséquent,il est clair que g est <strong>le</strong> plus grand groupe continu contenu dans g ′ ; si g ′<strong>de</strong>vait être lui-même continu, alors il coïnci<strong>de</strong>rait naturel<strong>le</strong>ment avec g.§ 93.Formulation <strong>de</strong>s axiomes helmholtziensen termes <strong>de</strong> théorie <strong>de</strong>s groupes.Nous allons maintenant rassemb<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s résultats <strong>de</strong>s précé<strong>de</strong>nts paragraphes.Afin <strong>de</strong> pouvoir nous exprimer d’une manière plus commo<strong>de</strong>,nous voulons toutefois appe<strong>le</strong>r brièvement <strong>le</strong> groupe défini à lapage 233 un groupe <strong>de</strong>s mouvements <strong>de</strong> R n . En conformité avec cela,nous appelons brièvement chaque transformation <strong>de</strong> ce groupe un mouvement,<strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que par « mouvement » nous entendons toujoursune transformation qui transforme l’espace mobi<strong>le</strong> d’une situation vers


236 Division V. Chapitre 21. § 93.une autre situation. Ce que nous avons appelé jusqu’à présent un mouvementcontinu est maintenant simp<strong>le</strong>ment une famil<strong>le</strong> continue <strong>de</strong> ∞ 1mouvements, dans laquel<strong>le</strong> est contenue la transformation i<strong>de</strong>ntique.C<strong>et</strong>te manière <strong>de</strong> s’exprimer correspond manifestement à la manièremaintenant habituel<strong>le</strong> <strong>de</strong> s’exprimer dont nous avons déjà usé auparavant,lorsque nous parlions du groupe <strong>de</strong>s mouvements euclidiens,sachant aussi que nous entendions chaque fois par « mouvement » un<strong>et</strong>ransformation <strong>de</strong> ce groupe.À présent, en col<strong>le</strong>ctant <strong>le</strong>s résultats <strong>de</strong>s paragraphes précé<strong>de</strong>nts,nous pouvons dire que <strong>le</strong>s trois premiers axiomes helmholtziens ont lamême signification que <strong>le</strong>s exigences suivantes :A) Chaque point <strong>de</strong> l’espace n fois étendu peut être déterminé parn coordonnées : x 1 . . . x n .B) Un groupe continu fini qui est réel <strong>et</strong> transitif <strong>et</strong> que nous appelonsgroupe <strong>de</strong>s mouvements :(11) x ′ ν = f ν(x1 . . .x n ; a 1 . . .a r), (ν =1··· n)est déterminé par tous <strong>le</strong>s mouvements possib<strong>le</strong>s dans l’espace. Lenombre r <strong>de</strong> paramètres <strong>de</strong> ce groupe possè<strong>de</strong> la va<strong>le</strong>ur 1 n(n+1) <strong>et</strong> <strong>le</strong>s2transformations du groupe sont inverses l’une <strong>de</strong> l’autre par paires. Lesfonctions f 1 . . .f n sont non seu<strong>le</strong>ment différentiab<strong>le</strong>s par rapport auxx, mais aussi par rapport aux a <strong>et</strong> <strong>le</strong>s quotients différentiels par rapportaux x sont <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur côté à nouveau différentiab<strong>le</strong>s par rapport aux a.C) Relativement au groupe (11), <strong>de</strong>ux points ont un <strong>et</strong> un seulinvariant, <strong>et</strong> s > 2 points n’ont aucun invariant essentiel. Si :J ( )x 1 . . .x n ; y 1 . . .y n est l’invariant <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux points xν <strong>et</strong> y ν , alorson doit pouvoir délimiter à l’intérieur <strong>de</strong> l’espace n fois étendu unecertaine région n fois étendue <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que <strong>le</strong>s relations :(12) J ( ) ( )x 1 . . .x n ; y 1 . . .y n = J x01 . . .x 0 n; y1 0 . . .yn0fournissent toujours une équation véritab<strong>le</strong> entre : x 1 . . .x n , y 1 . . .y n ,quels que soient <strong>le</strong>s points distincts l’un <strong>de</strong> l’autre que l’on puisse aussichoisir pour x 0 1 . . .x 0 n, y 0 1 . . .y 0 n dans la région.D) À l’intérieur <strong>de</strong> la région définie à l’instant, tous <strong>le</strong>s pointssont parfaitement <strong>et</strong> librement mobi<strong>le</strong>s par <strong>le</strong> groupe (11), tant qu’ils nesont pas liés par <strong>le</strong>s invariants que <strong>le</strong>s paires individuel<strong>le</strong>s <strong>de</strong> points ontrelativement au groupe. Si donc par exemp<strong>le</strong> : x 0 1 . . .x0 n ; y0 1 . . .y0 n sont<strong>de</strong>ux points distincts quelconques <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te région-là, alors, aussitôt que


Critique <strong>de</strong>s recherches helmholtziennes. 237<strong>le</strong> premier d’entre eux est fixé, <strong>le</strong> second peut occuper encore toutes <strong>le</strong>spositions : y 1 . . .y n qui satisfont <strong>le</strong>s équations :(13) J ( x 0 1 . . .x0 n ; y 1 . . .y n)= J(x01 . . .x 0 n ; y0 1 . . .y0 n),où il est supposé que <strong>de</strong>puis y 0 1 . . .y 0 n vers y 1 . . .y n , une transitioncontinue qui ne comporte que <strong>de</strong>s systèmes <strong>de</strong> va<strong>le</strong>urs réel<strong>le</strong>s satisfaisant(13), est possib<strong>le</strong>.À cela s’ajoute maintenant encore <strong>le</strong> quatrième axiome helmholtzien,que nous n’avons encore pas pris en considération jusqu’à présent,celui qu’on appel<strong>le</strong> souvent l’Axiome <strong>de</strong> monodromie. Nous pouvonsmaintenant lui donner la version suivante :E) Si, à l’intérieur <strong>de</strong> la région introduite ci-<strong>de</strong>ssus, on fixe n − 1points mutuel<strong>le</strong>ment en position généra<strong>le</strong> qui sont choisis <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sortequ’ils ne restent au repos simultanément que par l’action d’un groupeà un paramètre <strong>de</strong> mouvements, <strong>et</strong> si Xf est la transformation infinitésima<strong>le</strong><strong>de</strong> ce groupe à un paramètre, alors <strong>le</strong>s équations finies correspondantes:(14) x ′ ν = x ν + t 1 X x ν + t21 · 2 XX x ν + · · · (ν = 1 ··· n)doivent être constituées <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que, si t croît toujours à partir <strong>de</strong>la va<strong>le</strong>ur nul<strong>le</strong>, tous <strong>le</strong>s autres points : x 1 . . . x n <strong>de</strong> la région reviennentfina<strong>le</strong>ment tous en même temps à <strong>le</strong>ur position initia<strong>le</strong>. Brièvement, i<strong>le</strong>st <strong>de</strong>mandé que <strong>le</strong>s équations (14) représentent un mouvement qui aune pério<strong>de</strong> réel<strong>le</strong>.§ 94.Critique <strong>de</strong>s conclusionsque Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz tire <strong>de</strong> ses axiomes.Dans <strong>le</strong>s précé<strong>de</strong>nts paragraphes, nous avons donné aux axiomeshelmholtziens une version qui fait ressortir clairement <strong>le</strong> caractère« théorie <strong>de</strong>s groupes » qu’a <strong>le</strong> problème dans son ensemb<strong>le</strong>. Nous voulonsmaintenant examiner d’une manière critique <strong>le</strong>s conséquences queMonsieur <strong>de</strong> Helmholtz a tirées <strong>de</strong> ses axiomes. Afin <strong>de</strong> pouvoir effectuercela <strong>de</strong> la manière la plus commo<strong>de</strong> possib<strong>le</strong>, nous traduisons toutd’abord ces conséquences dans <strong>le</strong> langage <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong>s groupes,autant qu’il est possib<strong>le</strong>. Comme Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz s’est restreintdans sa recherche à l’espace <strong>de</strong> dimension trois, nous faisons naturel<strong>le</strong>ment<strong>de</strong> même.


238 Division V. Chapitre 21. § 94.Dans l’espace à trois dimensions chaque groupe <strong>de</strong> mouvementsqui satisfait <strong>le</strong>s exigences helmholtziennes est à six paramètres. Monsieur<strong>de</strong> Helmholtz considère maintenant * , comme nous pouvons l’exprimer,tous <strong>le</strong>s mouvements contenus dans <strong>le</strong> groupe, qui laissent invariantun point déterminé. Puisque <strong>le</strong> groupe <strong>de</strong>s mouvements est transitif,l’ensemb<strong>le</strong> <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s mouvements qui laissent au repos un pointdéterminé, constitue un groupe à trois paramètres. Si, par souci <strong>de</strong> simplicité,nous nous imaginons que <strong>le</strong> point invariant est choisi commeétant l’origine <strong>de</strong>s coordonnées, alors <strong>le</strong>s équations <strong>de</strong> ce groupe à troisparamètres ont la forme :⎧⎪⎨x ′ = λ 1 x + λ 2 y + λ 3 z + · · ·(15)y ′ = µ 1 x + µ 2 y + µ 3 z + · · ·⎪⎩z ′ = ν 1 x + ν 2 y + ν 3 z + · · · ,où <strong>le</strong>s constantes λ, µ, ν <strong>et</strong> <strong>le</strong>s termes d’ordre supérieur qui ont été supprimésne dépen<strong>de</strong>nt que <strong>de</strong> trois paramètres arbitraires <strong>et</strong> où <strong>le</strong> déterminant<strong>de</strong>s λ, µ, ν ne s’annu<strong>le</strong> sûrement pas i<strong>de</strong>ntiquement.Cependant, Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz ne considère pas <strong>le</strong>groupe (15) lui-même, mais il étudie seu<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> quel<strong>le</strong> manière<strong>le</strong>s points infiniment proches <strong>de</strong> l’origine <strong>de</strong>s coordonnées sonttransformés par <strong>le</strong> groupe (15), autrement dit : il se restreint à laconsidération <strong>de</strong>s transformations :⎧⎪⎨dx ′ = λ 1 dx + λ 2 dy + λ 3 dz(16)dy ′ = µ 1 dx + µ 2 dy + µ 3 dz⎪⎩dz ′ = ν 1 dx + ν 2 dy + ν 3 dz,* Gött. Nachr. 1868, p. 202 sq. La manière dont il construit ces mouvementsest remarquab<strong>le</strong>. Il sé<strong>le</strong>ctionne un mouvement déterminé S, par <strong>le</strong>quel un point déterminéP 1 est envoyé vers une nouvel<strong>le</strong> position P , <strong>et</strong> d’un autre côté, il s’imaginedisposer du mouvement <strong>le</strong> plus général contenu dans <strong>le</strong> groupe, par <strong>le</strong>quel P 1 est éga<strong>le</strong>mentenvoyé sur P . Sous ces hypothèses, S −1 T est visib<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> mouvement <strong>le</strong>plus général appartenant au groupe au cours duquel P reste au repos. Avec cela, il estdémontré non seu<strong>le</strong>ment qu’il y a <strong>de</strong> tels mouvements, mais aussi que <strong>le</strong>s équations<strong>de</strong>s mouvements concernés peuvent être rapportées à une forme tel<strong>le</strong> qu’el<strong>le</strong>s peuvents’appliquer aux points qui sont infiniments voisins <strong>de</strong> P . Naturel<strong>le</strong>ment, Monsieur <strong>de</strong>Helmholtz ne calcu<strong>le</strong> pas du tout <strong>de</strong> manière symbolique avec <strong>le</strong>s transformations ;chez lui, <strong>le</strong> concept <strong>de</strong> famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> transformations ne se rencontre pas même une seu<strong>le</strong>fois explicitement. En utilisant <strong>le</strong>s concepts <strong>et</strong> <strong>le</strong>s manières <strong>de</strong> s’exprimer <strong>de</strong> la théorie<strong>de</strong>s groupes, nous donnons en général une forme plus rigoureuse aux développementshelmholtziens.


Critique <strong>de</strong>s recherches helmholtziennes. 239que l’on obtient lorsqu’on différentie <strong>le</strong>s équations (15) <strong>et</strong> que l’on poseensuite : x = y = z = 0. Il est clair que ces transformations en <strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s: dx, dy, dz forment un groupe, <strong>et</strong> pour préciser, nul autre groupeque <strong>le</strong> groupe linéaire homogène qui est attaché [zugeordn<strong>et</strong>] à l’origine<strong>de</strong>s coordonnées par tous <strong>le</strong>s mouvements du groupe, <strong>et</strong> qui indique notammentcomment sont transformés <strong>le</strong>s éléments linéaires : dx : dy : dzpassant par l’origine <strong>de</strong>s coordonnées, dès qu’on l’a fixée (voir Tome I,Théorème 109, p. 603 1 ).Jusqu’à ce point, <strong>le</strong>s développements <strong>de</strong> Monsieur <strong>de</strong> Helmholtzsont irréprochab<strong>le</strong>s. Mais maintenant, il adm<strong>et</strong> tacitement <strong>et</strong> sans unmot <strong>de</strong> justification que tous ses axiomes, qu’il a posés au suj<strong>et</strong> <strong>de</strong>smouvements encore possib<strong>le</strong>s après fixation d’un point, peuvent aussis’appliquer aux points qui sont infiniment voisins du point fixé, <strong>et</strong> doncque s’ils s’appliquent à <strong>de</strong>s points finiment éloignés <strong>le</strong>s uns <strong>de</strong>s autres, ils’ensuit qu’ils s’appliquent en même temps à <strong>de</strong>s points infiniment voisins.Pour l’exprimer plus précisément : il s’imagine <strong>le</strong> groupe linéairehomogène :(16’)⎧⎪⎨x ′ = λ 1 x + λ 2 y + λ 3 zy ′ = µ 1 x + µ 2 y + µ 3 z⎪⎩z ′ = ν 1 x + ν 2 y + ν 3 zcomme un groupe <strong>de</strong> mouvements qui laisse invariante l’origine <strong>de</strong>scoordonnées, <strong>et</strong> il pose à l’avance que <strong>le</strong> groupe (16’) satisfait alorstoujours ses axiomes, lorsque <strong>le</strong> groupe (15) <strong>le</strong>s satisfait. C’est sur c<strong>et</strong>tesupposition que reposent tous ses développements subséquents.Nous voulons d’abord montrer que c<strong>et</strong>te supposition a la même significationqu’une autre supposition, que l’on peut exprimer <strong>de</strong> manièreappropriée, <strong>et</strong> ensuite, au moyen d’une série d’exemp<strong>le</strong>s, nous allonsmontrer clairement l’irrecevabilité <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te supposition dans son intégralité.1 Ce théorème énonce que chaque groupe X 1 f, . . . , X r f <strong>de</strong> l’espace x 1 , . . . , x nassocie à tout point x 0 1 , . . . , x0 n fixé en position généra<strong>le</strong> un groupe linéaire homogène<strong>de</strong> R n parfaitement déterminé, <strong>le</strong>quel indique <strong>de</strong> quel<strong>le</strong> manière sont transformés <strong>le</strong>séléments linéaires passant par ce point.


240 Division V. Chapitre 21. § 94.Le groupe (15) est engendré par trois transformations infinitésima<strong>le</strong>s<strong>de</strong> la forme :(17)⎧⎪⎨⎪⎩(α k1 x + α k2 y + α k3 z + · · ·) p++ (β k1 x + β k2 y + β k3 z + · · ·) q++ (γ k1 x + γ k2 y + γ k3 z + · · ·) r(k = 1,2, 3),où <strong>le</strong>s α, β, γ désignent <strong>de</strong>s constantes <strong>et</strong> où <strong>le</strong>s termes supprimés sontd’un ordre supérieur par rapport à x, y, z. Le groupe à six paramètres d<strong>et</strong>ous <strong>le</strong>s mouvements contient encore, hormis <strong>le</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s(17), trois transformations <strong>de</strong> la forme :(18) p + · · · , q + · · · , r + · · · .D’un autre côté, <strong>le</strong> groupe (16’) est <strong>le</strong> groupe réduit associé augroupe (17), <strong>et</strong> ses transformations infinitésima<strong>le</strong>s * :(19)⎧⎪⎨L k f = (α k1 x+α k2 y + α k3 z) p + (β k1 x + β k2 y + β k3 z) q++ (γ k1 x + γ k2 y + γ k3 z) r⎪⎩(k = 1,2, 3)proviennent <strong>de</strong> (17) lorsqu’on supprime tous <strong>le</strong>s termes d’ordre supérieur,<strong>et</strong> donc el<strong>le</strong>s ne sont pas nécessairement indépendantes <strong>le</strong>s unes<strong>de</strong>s autres. Remarquons en outre (cf.<strong>le</strong> Tome I, p. 606), qu’en tenantcompte <strong>de</strong>s hypothèses posées, <strong>le</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s :(20) p, q, r, L 1 f, L 2 f, L 3 f,* Nous ne voulons pas passer sous si<strong>le</strong>nce <strong>le</strong> fait que Monsieur <strong>de</strong> Helmholtzopère avec <strong>le</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s du groupe linéaire homogène (16’), <strong>et</strong>on peut même dire qu’il considère, quoique <strong>de</strong> manière inconsciente, <strong>le</strong>s groupes àun paramètre qui sont engendrés par certaines <strong>de</strong> ces transformations infinitésima<strong>le</strong>s.Néanmoins, on ne se trouve chez lui en aucune façon <strong>le</strong> concept général <strong>de</strong> transformationinfinitésima<strong>le</strong>, <strong>et</strong> encore moins <strong>le</strong> concept général <strong>de</strong> groupe à un paramètre.


Critique <strong>de</strong>s recherches helmholtziennes. 241engendrent aussi un groupe 2 transitif, qui toutefois n’est pas nécessairementà six paramètres. Ce groupe (20) n’est autre que <strong>le</strong> groupe réduitrelatif au groupe (17), (18) <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s mouvements.L’hypothèse introduite tacitement par Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz amaintenant simp<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> sens que <strong>le</strong> groupe (19) satisfait alors chaqueaxiome ayant été posé au suj<strong>et</strong> <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s mouvements qui sont encorepossib<strong>le</strong>s après fixation d’un point, lorsque <strong>le</strong> groupe (17) satisfaitces axiomes. Mais d’un autre côté, il est clair que <strong>le</strong> groupe (17),(18) <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s mouvements satisfait tous <strong>le</strong>s axiomes helmholtzienssi <strong>et</strong> seu<strong>le</strong>ment si <strong>le</strong> groupe (17) satisfait encore <strong>le</strong>s axiomes restantsqui s’appliquent après fixation <strong>de</strong> l’origine <strong>de</strong>s coordonnées. Enfin, i<strong>le</strong>st évi<strong>de</strong>nt qu’entre <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux groupes (20) <strong>et</strong> (19), on a exactement lamême relation qu’entre <strong>le</strong>s groupes (17), (18) <strong>et</strong> (17). Par conséquent,ce qui a été admis par Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz revient simp<strong>le</strong>ment à supposerque <strong>le</strong> groupe réduit (20) satisfait alors toujours chaque exigencequ’il a posée, lorsque <strong>le</strong> groupe initial (17), (18) <strong>le</strong>s satisfait.Ceci, Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz l’a admis tacitement, sans la moindreindication <strong>de</strong> démonstration, <strong>et</strong> sans faire aucune allusion au fait quecela nécessite à vrai dire une démonstration. Par une série d’exemp<strong>le</strong>s * ,nous voulons montrer que ce qui a été admis n’est pas fondé. Nous allonstrouver qu’un groupe transitif à six paramètres <strong>de</strong> R 3 peut très biensatisfaire certaines <strong>de</strong>s exigences helmholtziennes, sans que <strong>le</strong> grouperéduit qui lui est associé <strong>le</strong>s satisfasse ; d’un autre côté, nous allons voirqu’à un groupe transitif à six paramètres qui ne satisfait pas certaines<strong>de</strong>s exigences helmholtziennes peut très bien être associé un groupe réduitqui satisfait <strong>le</strong>s exigences en question.2 Voici la justification. Dans <strong>de</strong>s coordonnées (x 1 , . . .,x n ), soit un groupe linéairehomogène quelconque constitué d’un certain nombre m n 2 <strong>de</strong> générateursinfinitésimaux :L ν = ∑ n(∑ nj=1 i=1 α )νij x ∂ i ∂x(ν =1··· m)jà coefficients linéaires, donc par hypothèse stab<strong>le</strong> par croch<strong>et</strong>s <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>. Alors la col<strong>le</strong>ction:p 1 , . . . , p n , L 1 , . . . , L mobtenue en <strong>le</strong>ur adjoignant toutes <strong>le</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s du groupe (transitif<strong>et</strong> commutatif) <strong>de</strong>s translations est el<strong>le</strong> aussi stab<strong>le</strong> par croch<strong>et</strong>s (donc engendreun groupe au sens <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>), puisque :[ ] [pk , L ν = ∂∂x k, ∑ n(∑ nj=1 i=1 α )νij x ∂] ∑ ni ∂x j=j=1 α ∂νkj ∂x j= ∑ nj=1 α νkj p j .*<strong>Lie</strong> a communiqué ces exemp<strong>le</strong>s pour la première fois dans <strong>le</strong>s Comptes Rendus<strong>de</strong> 1892 (Vol. 114, p. 463).


242 Division V. Chapitre 21. § 94.Comme nous l’avons vu, une partie <strong>de</strong>s exigences helmholtziennesse ramène à ce que <strong>de</strong>ux points ont un <strong>et</strong> un seul invariant relativementà tous <strong>le</strong>s mouvements du groupe. Maintenant, relativement au group<strong>et</strong>ransitif à six paramètres :(21) q, xq + r, x 2 q + 2xr, x 3 q + 3x 2 r, x 4 q + 4x 3 r, p<strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux points : x 1 , y 1 , z 1 <strong>et</strong> x 2 , y 2 , z 2 ont <strong>le</strong> seul 3 invariant 4 : x 2 − x 1 ,tandis que relativement au groupe réduit associé :(21’) q, r, xr, p,ils ont au contraire <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux invariants 5 : x 2 − x 1 <strong>et</strong> y 2 − y 1 . D’un autrecôté, relativement au groupe transitif à six paramètres :(22) q, xq + r, x 2 q + 2xr, x 3 q + 3x 2 r, p, xp − zr,ces <strong>de</strong>ux points n’ont absolument aucun invariant, tandis que, relativementau groupe réduit associé :(22’) q, r, xr, p, xp − zrils ont l’invariant : y 2 − y 1 .De là, il résulte que <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux groupes (17), (18) <strong>et</strong> (20) ne satisfontpas en général simultanément <strong>le</strong>s exigences qui ont été admises.Considérons ensuite <strong>le</strong> groupe :(23){q, p, xq + r, x 2 q + 2xr, xp + yq + crx 2 p + 2xyq + 2(cx + y) r,que nous avons déjà rencontré à la page 195. D’après la page 196, <strong>de</strong>uxpoints ont un <strong>et</strong> un seul invariant relativement à ce groupe tandis que3 La Proposition 2 p. 178 s’applique à l’origine, qui est un point <strong>de</strong> positiongénéra<strong>le</strong>.4 Effectivement, x 2 − x 1 est annihilé i<strong>de</strong>ntiquement par X (1)k+ X (2)k , pour k =1, . . . , 6, ce qui est trivial pour <strong>le</strong>s cinq premiers opérateurs différentiels, <strong>le</strong> sixièmes’écrivant p 1 + p 2 , d’où (p 1 + p 2 )(x 2 − x 1 ) = 1 − 1 = 0.5D’après l’équation (2) p. 167, une fonction quelconque J =J(x 1 , y 1 , z 1 , x 2 , y 2 , z 2 ) est invariante si <strong>et</strong> seu<strong>le</strong>ment si el<strong>le</strong> est annihilée i<strong>de</strong>ntiquementpar Y (1)l+Y (2)l, pour l = 1, . . .,4. L’annihilation par p 1 +p 2 , par q 1 +q 2 <strong>et</strong>par r 1 + r 2 équivaut à ce que J = J(x 2 − x 1 , y 2 − y 1 , z 2 − z 1 ). Enfin, l’annihilationpar x 1 r 1 + x 2 r 2 implique que J = J(x 2 − x 1 , y 2 − y 1 ). La vérification (similaire)<strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux affirmations qui suivent immédiatement est laissée au <strong>le</strong>cteur.


Critique <strong>de</strong>s recherches helmholtziennes. 243s > 2 points n’ont pas d’invariant essentiel, donc ce groupe satisfait certainesexigences qui décou<strong>le</strong>nt <strong>de</strong>s axiomes helmholtziens (cf.p. 236).Cependant, <strong>le</strong> groupe réduit associé 6 :(23’) q, p, r, xr, xp + yq − cxq, yrne satisfait pas ces exigences, car il contient <strong>de</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s,<strong>et</strong> même trois, à savoir : r, xr, yr, qui ont <strong>de</strong>s courbesintégra<strong>le</strong>s en commun, alors que, d’après la Proposition 1, p. 176, celane peut pas se produire lorsque <strong>de</strong>ux points doivent avoir un <strong>et</strong> un seulinvariant, alors que s > 2 points ne doivent pas avoir d’invariant essentiel.Par conséquent, <strong>le</strong>s exigences en question ne sont pas toujours nécessairementsatisfaites par <strong>le</strong> groupe (20) lorsqu’el<strong>le</strong>s <strong>le</strong> sont par <strong>le</strong>groupe (17), (18).Enfin, l’axiome <strong>de</strong> monodromie peut très bien appartenir aussi auxexigences qui sont satisfaites par <strong>le</strong> groupe (17), (18), sans que cel<strong>le</strong>s-cisoient satisfaites par <strong>le</strong> groupe (20).Le groupe :⎧p, q, xp + yq + r, yp − xq⎪⎨(24)(x 2 − y 2 ) p + 2xyq + 2xr⎪⎩2xyp + (y 2 − x 2 ) q + 2yr,que nous avons déjà trouvé à la page 214 7 , en fournit la démonstration.Ce groupe extrêmement curieux [äusserst merkwürdige Gruppe]satisfait en eff<strong>et</strong> toutes <strong>le</strong>s exigences <strong>de</strong> l’axiome helmholtzien <strong>de</strong> monodromie,tandis que <strong>le</strong> groupe réduit associé :(24’) p, q, r, yp − xq, xr, yrne <strong>le</strong>s satisfait pas.Il est faci<strong>le</strong> <strong>de</strong> voir que <strong>le</strong> groupe (24’) ne satisfait pas l’axiome <strong>de</strong>monodromie. Si nous fixons en eff<strong>et</strong> <strong>de</strong>ux points qui sont mutuel<strong>le</strong>menten position généra<strong>le</strong>, par exemp<strong>le</strong> l’origine <strong>de</strong>s coordonnées <strong>et</strong> <strong>le</strong> pointx 0 , y 0 , z 0 , où x 0 <strong>et</strong> y 0 ne s’annu<strong>le</strong>nt pas, alors <strong>le</strong>s mouvements encorepossib<strong>le</strong>s forment un groupe à un paramètre qui est engendré par la6 Pour obtenir trois transformations infinitésima<strong>le</strong>s linéairement indépendantesfixant l’origine, une combinaison linéaire préalab<strong>le</strong> est requise : r<strong>et</strong>rancher <strong>de</strong> la cinquièm<strong>et</strong>ransformation la troisième multipliée par c, ce qui donne xp + yq − cxq.7 à savoir <strong>le</strong> groupe (58) avec a = 1 <strong>et</strong> b = 0, ce qui a donné <strong>le</strong> groupe 7 p. 215.


244 Division V. Chapitre 21. § 94.transformation infinitésima<strong>le</strong> 8 : (x 0 y−y 0 x) r, <strong>et</strong> dont <strong>le</strong>s équations finiessont par conséquent <strong>de</strong> la forme :x ′ = x, y ′ = y, z ′ = z + t(x 0 y − y 0 x).Mais alors ici, <strong>le</strong> point x, y, z ne r<strong>et</strong>ourne manifestement jamais à saposition initia<strong>le</strong>, quand t croît continuel<strong>le</strong>ment à partir <strong>de</strong> zéro.D’autre part, afin <strong>de</strong> nous persua<strong>de</strong>r que <strong>le</strong> groupe (24) satisfaitl’axiome <strong>de</strong> monodromie, nous <strong>de</strong>vons examiner d’un peu plus près <strong>le</strong>smouvements <strong>de</strong> ce groupe.Si l’on fixe un point x 0 , y 0 , z 0 relativement à l’action dugroupe (24), alors chaque autre point x, y, z se meut en général d’unemanière complètement libre sur la pseudosphère 9 :(25){(x − x0 ) 2 + (y − y 0 ) 2} e −z = const.centrée en ce point : x 0 , y 0 , z 0 ; seuls <strong>le</strong>s points <strong>de</strong> la droite : x = x 0 ,y = y 0 , qui constitue évi<strong>de</strong>mment une pseudosphère par el<strong>le</strong>-même,font exception, car ils restent entièrement au repos.Si donc nous voulons fixer <strong>de</strong>ux points distincts qui ne restent simultanémentau repos que par l’action d’un sous-groupe à un paramètre<strong>de</strong> (24), alors nous <strong>de</strong>vons choisir ces points <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que <strong>le</strong>ur droite<strong>de</strong> liaison [Verbindungslinie] ne soit pas parallè<strong>le</strong> à l’axe <strong>de</strong>s z.Deux tels points sont par exemp<strong>le</strong> l’origine <strong>de</strong>s coordonnées <strong>et</strong> unpoint quelconque x 0 , y 0 , z 0 pour <strong>le</strong>quel x 0 <strong>et</strong> y 0 ne s’annu<strong>le</strong>nt pas tous<strong>de</strong>ux. Les équations finies du groupe à un paramètre qui laisse invariants8 À un facteur multiplicatif près, c’est la seu<strong>le</strong> transformation infinitésima<strong>le</strong> quis’annu<strong>le</strong> en (0, 0, 0) <strong>et</strong> en (x 0 , y 0 , z 0 ).9 L’unique invariant d’une paire <strong>de</strong> points a déjà été calculé p. 214 (faire b = 0).


Critique <strong>de</strong>s recherches helmholtziennes. 245ces <strong>de</strong>ux points se déterminent grâce au système simultané 10 :⎧dx ′dt = y′ + y 0(x ′2 − y ′2 )− 2x 0x ′ y ′x⎪⎨2 0 + y02 x 2 0 + y02dy(26)′dt = −x′ + 2y 0x ′ y ′+ x 0(x ′2 − y ′2 )x 2 0 + y02 x 2 0 + y02dz ⎪⎩′dt = 2(y 0x ′ − x 0 y ′ ),x 2 0 + y02avec <strong>le</strong>s conditions initia<strong>le</strong>s bien connues : [x ′ ] t=0 = x, <strong>et</strong>c. À partir<strong>de</strong> (26), on trouve 11 :ddt (x′ + iy ′ ) = −i{x ′ + iy ′ − (x′ + iy ′ ) 2 },x 0 + iy 0<strong>et</strong> <strong>de</strong> là, par intégration :(27) x ′ + iy ′ =(x 0 + iy 0 )(x + iy){x 0 − x + i(y 0 − y)} e it + x + iy .D’un autre côté, puisque l’on sait que <strong>le</strong> point x, y, z se meut sur la pseudosphèrepassant par lui <strong>et</strong> qui a pour centre l’origine <strong>de</strong>s coordonnées,10 On détermine à l’avance une certaine combinaison linéaire W = α T + β U +γ V <strong>de</strong>s trois <strong>de</strong>rnières transformations infinitésima<strong>le</strong>s (24) (qui s’annu<strong>le</strong>nt déjà à l’origine):W = [ αy +β(x 2 −y 2 )+2γxy ] p+ [ −αx+2βxy +γ(y 2 −x 2 ) ] q + [ 2βx+2γy ] rafin qu’el<strong>le</strong> s’annu<strong>le</strong> aussi en (x 0 , y 0 , z 0 ). Éga<strong>le</strong>r à zéro <strong>le</strong>s trois coefficients <strong>de</strong> p, q, rdans W ∣ (x0,y 0,z 0)donne alors l’unique (à un facteur multiplicatif près) solution :α = y 0 , β = y0, γ = − x0.x 2 0 +y2 0x 2 0 +y2 0Le système considéré <strong>de</strong> trois équations différentiel<strong>le</strong>s ordinaires représente alors <strong>le</strong>scourbes intégra<strong>le</strong>s <strong>de</strong> W , d’inconnues ( x ′ (t), y ′ (t), z ′ (t) ) valant (x, y, z) pour t = 0.11 Il s’agit d’intégrer l’équations différentiel<strong>le</strong> dwdt = −i{ w − w 2 /α } d’inconnueα dwαw−w= 2comp<strong>le</strong>xe w = w(t) ∈ C, où α := x 0 + iy 0 est une constante, c’est-à-dire−idt, ou encore, après décomposition en éléments simp<strong>le</strong>s <strong>et</strong> séparation <strong>de</strong>s quotientsdifférentiels :dw ( 1w − w−α) 1 = −idt.Une intégration donne log wc αw−α= −it+const., puis par exponentiation w = −e it −c ,où c est une constante que l’on détermine par la condition initia<strong>le</strong> w ∣ t=0= x + iy,−x−iyc’est-à-dire c =x 0−x+i(y 0−y). Enfin, on remplace c dans l’expression <strong>de</strong> w. Trèsexceptionnel<strong>le</strong>ment, <strong>le</strong> texte al<strong>le</strong>mand comporte ici une coquil<strong>le</strong> : au dénominateur,entre accola<strong>de</strong>s, il est écrit x − x 0 + i(y − y 0 ).


246 Division V. Chapitre 21. § 94.on obtient encore entre x, y, z <strong>et</strong> x ′ , y ′ , z ′ l’équation :d’où on déduit immédiatement :(x ′2 + y ′2 ) e −z′ = (x 2 + y 2 ) e −z ,(28) z ′ = z + log x′2 + y ′ 2x 2 + y 2 .Ainsi, on a complètement déterminé <strong>le</strong>s transformations finies dugroupe à un paramètre dont il est question dans <strong>le</strong> discours. Il seraitfaci<strong>le</strong> <strong>de</strong> <strong>le</strong>s indiquer sous une forme réel<strong>le</strong>, mais pour notre objectif, cen’est pas du tout nécessaire, car <strong>le</strong>s équations (27) <strong>et</strong> (28) montrent déjàque notre groupe (28) satisfait l’axiome <strong>de</strong> monodromie. Si en eff<strong>et</strong> onsoum<strong>et</strong> l’espace au mouvement continu qui est spécifié par <strong>le</strong>s équations(27), (28), <strong>et</strong> si on laisse la variab<strong>le</strong> t parcourir toutes <strong>le</strong>s va<strong>le</strong>ursréel<strong>le</strong>s entre 0 <strong>et</strong> 2π, alors tous <strong>le</strong>s points r<strong>et</strong>ournent simultanément * à<strong>le</strong>ur position initia<strong>le</strong> pour t = 2π.Ainsi, nous voyons que <strong>le</strong> groupe (24) satisfait en fait l’axiome <strong>de</strong>monodromie, alors que <strong>le</strong> groupe réduit associé (24’) ne <strong>le</strong> satisfait pas.Pour c<strong>et</strong>te raison encore, <strong>le</strong> groupe (24) est alors aussi particulièrementcurieux, parce qu’il montre <strong>de</strong> la manière la plus convaincantequi soit, combien il est impossib<strong>le</strong> <strong>de</strong> déduire quelque chose au suj<strong>et</strong> ducomportement <strong>de</strong> points infiniment voisins à partir du comportement<strong>de</strong> points qui sont finiment éloignés <strong>le</strong>s uns <strong>de</strong>s autres, <strong>et</strong> combien i<strong>le</strong>st péril<strong>le</strong>ux d’extrapo<strong>le</strong>r à ces points-là, comme l’a fait Monsieur <strong>de</strong>Helmholtz, <strong>le</strong>s axiomes qui ont été posés pour <strong>le</strong>s points finiment éloignés<strong>le</strong>s uns <strong>de</strong>s autres.Si en eff<strong>et</strong> l’on fixe un point pour l’action du groupe (24), parexemp<strong>le</strong> l’origine <strong>de</strong>s coordonnées, alors chaque autre point se meuten général, comme nous l’avons vu plus haut, sur l’une <strong>de</strong>s ∞ 1 surfacesinvariantes :(x 2 + y 2 ) e −z = const.Comme on s’en convainc faci<strong>le</strong>ment, <strong>le</strong>s points <strong>de</strong> chacune <strong>de</strong> ces surfacessont transformés par l’action d’un groupe à trois paramètres qui* Les ∞ 2 courbes intégra<strong>le</strong>s qui, à c<strong>et</strong>te occasion, sont parcourues par <strong>le</strong>s points<strong>de</strong> l’espace, sont <strong>le</strong>s courbes obtenues par intersection <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux famil<strong>le</strong>s <strong>de</strong> pseudosphères:(x 2 + y 2 )e −z = const. {(x − x 0 ) 2 + (y − y 0 ) 2 } e −z = const.Leurs projections sur <strong>le</strong> plan <strong>de</strong>s x, y sont alors en général <strong>de</strong>s cerc<strong>le</strong>s, mais ce sontaussi exceptionnel<strong>le</strong>ment <strong>de</strong>s lignes droites.


Critique <strong>de</strong>s recherches helmholtziennes. 247a la même structure 12 que <strong>le</strong> groupe <strong>de</strong>s mouvements euclidiens d’unplan, <strong>et</strong> qui lui est <strong>de</strong> surcroît semblab<strong>le</strong> par une transformation ponctuel<strong>le</strong>réel<strong>le</strong>.Les points qui sont infiniment voisins <strong>de</strong> l’origine <strong>de</strong>s coordonnéesse comportent d’une manière tota<strong>le</strong>ment différente. Afin <strong>de</strong> se constituerune image <strong>de</strong> la façon dont sont transformés ces points, lorsque l’origine<strong>de</strong>s coordonnées est fixée, on peut au mieux envisager <strong>le</strong> groupe par <strong>le</strong>quelsont transformés <strong>le</strong>s ∞ 2 éléments linéaires passant par l’origine<strong>de</strong>s coordonnées, car chaque point qui est infiniment voisin <strong>de</strong> l’origine<strong>de</strong>s coordonnées détermine un tel élément linéaire. Si on entendpar x ′ , y ′ , z ′ <strong>le</strong>s coordonnées homogènes d’un élément linéaire, alors cegroupe est :y ′ p ′ − x ′ q ′ , x ′ r ′ , y ′ r ′ ,<strong>et</strong> on vérifie alors immédiatement que la variété <strong>de</strong>s ∞ 2 éléments linéairesest transformée par l’action d’un groupe projectif qui est dualistiquedu groupe <strong>de</strong>s mouvements euclidiens d’un plan.Ainsi, on voit que, lors du passage <strong>de</strong>s points finiment éloignés auxpoints infiniment voisins, un saut plus total peut se produire, <strong>et</strong> que <strong>le</strong>spoints infiniment voisins obéissent dans <strong>de</strong> tel<strong>le</strong>s circonstances à <strong>de</strong>slois tout autres que cel<strong>le</strong>s auxquel<strong>le</strong>s sont soumis <strong>le</strong>s points finimentéloignés <strong>le</strong>s uns <strong>de</strong>s autres.Grâce aux exemp<strong>le</strong>s précé<strong>de</strong>nts, il a été suffisamment démontréque la supposition que Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz a introduite tacitement<strong>et</strong> qui a été décrite plus précisément aux pages 239 sq. est erronée. Etmaintenant, comme ses considérations ultérieures prennent entièrementc<strong>et</strong>te supposition comme point <strong>de</strong> départ <strong>et</strong> n’ont force <strong>de</strong> preuve quesur la base <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te supposition, nous parvenons donc au résultat queMonsieur <strong>de</strong> Helmholtz n’a pas démontré l’assertion qu’il énonce à lafin <strong>de</strong> son travail, à savoir : il n’a pas démontré que ses axiomes suffisentà caractériser <strong>le</strong>s mouvements euclidiens <strong>et</strong> non-euclidiens.Après nous être convaincus <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te façon que <strong>le</strong>s développements<strong>de</strong> Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz ne constituent pas une démonstration, nous12 [g<strong>le</strong>ichzusammenges<strong>et</strong>zt ist] : possè<strong>de</strong> <strong>le</strong>s mêmes constantes <strong>de</strong> structure dans<strong>le</strong>s croch<strong>et</strong>s <strong>de</strong> <strong>Lie</strong>. En eff<strong>et</strong>, <strong>le</strong>s mouvements encore possib<strong>le</strong>s par <strong>le</strong> sous-groupe<strong>de</strong> (24) qui laisse fixe l’origine sont engendrés par <strong>le</strong>s trois générateurs infinitésimaux :P := (x 2 − y 2 )p + 2xyq + 2xr, Q := 2xyp + (y 2 − x 2 )q + 2yr, yp − xq.Ils satisfont bien <strong>le</strong>s mêmes relations <strong>de</strong> commutation : [ P, yp−xq ] = −Q ; [ Q, yp−xq ] = P <strong>et</strong> : [ P, Q ] = 0 que <strong>le</strong>s trois générateurs infinitésimaux : p, q, yp − xq <strong>de</strong>smouvements euclidiens du plan.


248 Division V. Chapitre 21. § 95.allons nous rattacher tout d’abord dans <strong>le</strong> § 95 aux hypothèses que Monsieur<strong>de</strong> Helmholtz a posées au cours <strong>de</strong> ses calculs.§ 95.Considérations se rattachant aux calculs helmholtziens.Dans <strong>le</strong> paragraphe précé<strong>de</strong>nt, nous avons vu que Monsieur <strong>de</strong>Helmholtz applique sans plus <strong>de</strong> façons ses axiomes à <strong>de</strong>s points infinimentvoisins. Dans la supposition erronée que cela soit autorisé rési<strong>de</strong>la faib<strong>le</strong>sse <strong>de</strong>s développements helmholtziens ; l’introduction <strong>de</strong> c<strong>et</strong>tesupposition ôte toute force <strong>de</strong> preuve à sa réf<strong>le</strong>xion.Mais on peut éviter c<strong>et</strong>te erreur, si l’on dispose dès <strong>le</strong> début <strong>le</strong>saxiomes helmholtziens <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte qu’ils se réfèrent simp<strong>le</strong>ment à <strong>de</strong>spoints infiniment voisins ; on peut alors toujours s’arranger pour que <strong>le</strong>scalculs helmholtziens parviennent effectivement au but en prenant pourbase <strong>le</strong>s axiomes formulés <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te façon. Comme cela est possib<strong>le</strong> <strong>de</strong>diverses manières <strong>et</strong> puisque cela ne vaut pas la peine <strong>de</strong> discuter àfond <strong>le</strong>s différentes possibilités, nous nous contenterons <strong>de</strong> ce qui suit :nous poserons un système d’axiomes qui se réfère à <strong>de</strong>s points infinimentvoisins <strong>et</strong> qui, sans concor<strong>de</strong>r avec <strong>le</strong>s hypothèses que Monsieur<strong>de</strong> Helmholtz a introduites tacitement dans ses calculs, sont cependanttrès analogues avec cel<strong>le</strong>s-ci. <strong>Ens</strong>uite, nous démontrerons par <strong>de</strong>s calculsqui ne s’écartent pas dans <strong>le</strong>ur principe <strong>de</strong> ceux <strong>de</strong> Monsieur <strong>de</strong>Helmholtz, que ce système d’axiomes suffit pour la caractérisation <strong>de</strong>smouvements euclidiens <strong>et</strong> non-euclidiens <strong>de</strong> l’espace ordinaire.Les axiomes que nous posons s’énoncent ainsi 1 :I) L’espace trois fois étendu est une variété numérique.II) Les mouvements <strong>de</strong> c<strong>et</strong> espace forment un groupe continu réel<strong>de</strong> transformations ponctuel<strong>le</strong>s.III) Si l’on fixe un point réel en position généra<strong>le</strong>, alors <strong>le</strong> groupelinéaire homogène, qui détermine <strong>de</strong> quel<strong>le</strong> manière <strong>le</strong>s ∞ 2 élémentslinéaires réels qui passent par ce point sont transformés, possè<strong>de</strong> exactementtrois paramètres.IV) Chaque sous-groupe réel à un paramètre du groupe linéairehomogène mentionné à l’instant est constitué <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que par sonaction, tous <strong>le</strong>s éléments linéaires réels qui ne restent pas au repos décriventun cône réel qu’ils parcourent continûment, à l’intérieur duquel1 La finitu<strong>de</strong> du nombre <strong>de</strong>s paramètres du groupe n’est pas explicitement <strong>de</strong>mandé.


Critique <strong>de</strong>s recherches helmholtziennes. 249ils r<strong>et</strong>ournent fina<strong>le</strong>ment <strong>et</strong> simultanément, mais sans revenir en arrière,à <strong>le</strong>ur situation initia<strong>le</strong> ; ou bien, pour exprimer cela plus précisément :si :x ′ 1 = α 1(t) x ′ + α 2 (t) y ′ + α 3 (t) z ′y ′ 1 = β 1(t) x ′ + β 2 (t) y ′ + β 3 (t) z ′z ′ 1 = γ 1 (t) x ′ + γ 2 (t) y ′ + γ 3 (t) z ′sont <strong>le</strong>s équations finies d’un tel sous-groupe à un paramètre sous <strong>le</strong>urforme canonique, il se produit fina<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> cas, lorsque la variab<strong>le</strong>réel<strong>le</strong> t croît continuel<strong>le</strong>ment à partir <strong>de</strong> 0 <strong>et</strong> pour une certaine va<strong>le</strong>urfinie positive <strong>de</strong> t, que : x ′ 1 : y ′ 1 : z ′ 1 est proportionnel à : x ′ : y ′ : z ′ .Nous allons montrer que ces axiomes suffisent entièrement à caractériser<strong>le</strong>s mouvements euclidiens <strong>et</strong> non-euclidiens.Tout d’abord, nous <strong>de</strong>vons déterminer quel<strong>le</strong> forme possè<strong>de</strong> <strong>le</strong>groupe linéaire homogène mentionné dans <strong>le</strong>s axiomes.Soit : x ′ 1 , x′ 2 , x′ 3 <strong>le</strong>s coordonnées <strong>de</strong> l’élément linéaire passant parun point fixé en position généra<strong>le</strong> ; d’après <strong>le</strong>s hypothèses posées, <strong>le</strong>groupe linéaire homogène g attaché à ce point contient alors trois transformationsinfinitésima<strong>le</strong>s indépendantes <strong>de</strong> la forme :(29)1,2,3∑µ να kµν x ′ µ p′ ν (k = 1,2, 3).Parmi ces transformations infinitésima<strong>le</strong>s, il peut y en avoir au plus une 2qui fixe chaque élément linéaire : x ′ 1 : x′ 2 : x′ 3 , <strong>et</strong> par conséquent il estcertain que la variété <strong>de</strong>ux fois étendue <strong>de</strong>s ∞ 2 éléments linéaires :x ′ 1 : x ′ 2 : x ′ 3 est transformée par g via l’action d’un groupe projectif g,qui possè<strong>de</strong> soit trois, soit <strong>de</strong>ux paramètres.Si nous rapportons projectivement notre variété <strong>de</strong>s ∞ 2 élémentslinéaires aux points réels d’un plan, alors g se présente comme ungroupe projectif g ′ du plan ayant <strong>de</strong>ux ou trois paramètres. Chaque sousgrouperéel à un paramètre <strong>de</strong> g ′ est alors constitué <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte quedans la forme canonique <strong>de</strong> ses équations finies :x ′ = ϕ(x, y; t),y ′ = ψ(x, y; t),<strong>le</strong>s quantités x ′ <strong>et</strong> y ′ sont <strong>de</strong>s fonctions périodiques <strong>de</strong> la variab<strong>le</strong> réell<strong>et</strong>. Tous <strong>le</strong>s points réels qui ne restent pas invariants par l’action d’un telgroupe à un paramètre, se meuvent alors sur <strong>de</strong>s courbes réel<strong>le</strong>s qu’ilsparcourent continûment dans toute <strong>le</strong>ur extension, <strong>et</strong> pour préciser, <strong>de</strong>2 Dans <strong>le</strong> groupe linéaire en dimension n quelconque, seu<strong>le</strong> l’homothétie <strong>de</strong> générateurinfinitésimal x ′ 1 p′ 1 + · · · + x′ n p′ n laisse fixe toutes <strong>le</strong>s éléments linéaires.


250 Division V. Chapitre 21. § 95.tel<strong>le</strong> manière que, sans revenir en arrière, ils reviennent fina<strong>le</strong>ment <strong>et</strong>simultanément à <strong>le</strong>ur position initia<strong>le</strong> ; si la droite à l’infini ne <strong>de</strong>vaitpas rester invariante par l’action du groupe à un paramètre en question,alors un point situé dans la région finie pourrait naturel<strong>le</strong>ment traverseraussi l’infini au cours <strong>de</strong> son mouvement.Maintenant, nous allons tout d’abord rechercher tous <strong>le</strong>s groupesréels projectifs à un paramètre du plan qui ont la constitution décriteà l’instant. Nous <strong>le</strong>s connaissons 3 , donc il ne nous sera pas diffici<strong>le</strong> d<strong>et</strong>rouver tous <strong>le</strong>s groupes projectifs réels du plan à <strong>de</strong>ux ou à trois paramètresqui contiennent seu<strong>le</strong>ment <strong>de</strong>s sous-groupes à un paramètre <strong>de</strong>c<strong>et</strong>te nature. Enfin, à partir <strong>de</strong> là, nous pourrons conclure quel<strong>le</strong> formepossè<strong>de</strong> <strong>le</strong> groupe linéaire homogène (29).D’après <strong>le</strong>s pages 107 <strong>et</strong> 384, tout groupe projectif réel à un paramètredu plan peut être rapporté, via une transformation projectiveréel<strong>le</strong> <strong>de</strong> ce plan, à l’une <strong>de</strong>s sept formes suivantes :⎧⎪⎨p + y q; p + x q; y q; q;(30) x p + c y q (c≠0, 1); y p − x q + c (x p + yq) (c≠ 0);⎪⎩y p − x q.Maintenant, quels sont ceux, parmi ces groupes à un paramètre, qui ontici la constitution que nous <strong>de</strong>mandons ?Les cinq premiers ne l’ont certainement pas. En eff<strong>et</strong>, par l’action<strong>de</strong> chacun d’entre eux, au moins une droite réel<strong>le</strong> reste au repos 4 , dont<strong>le</strong>s points sont transformés par l’action d’un groupe à un paramètre, <strong>et</strong>pour préciser, <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> manière que sur c<strong>et</strong>te droite, soit <strong>de</strong>ux points réelsséparés, soit <strong>de</strong>ux points réels qui coïnci<strong>de</strong>nt, conservent <strong>le</strong>ur position.Il décou<strong>le</strong> <strong>de</strong> là qu’un point réel d’une tel<strong>le</strong> droite qui ne reste pas aurepos peut certes se mouvoir librement en général sur la droite, maisqu’il n’est pas en état <strong>de</strong> parcourir continûment la droite <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> façon3 D’après <strong>le</strong>s développements substantiels du Tome III qui précè<strong>de</strong>nt c<strong>et</strong>te DivisionV.4 Pour <strong>le</strong>s groupes numéro 1, 3, 4 <strong>et</strong> 5, une tel<strong>le</strong> droite fixe est, respectivement{y = 0}, {x = 0}, {x = 0} <strong>et</strong> {y = 0}. Pour <strong>le</strong> groupe numéro 2, c’est la droite à l’infiniqui est invariante. On vérifie cela en effectuant <strong>le</strong> changement <strong>de</strong> carte projectivex ′ = 1 x , y′ = y xqui transforme comme suit <strong>le</strong>s champs <strong>de</strong> vecteurs basiques :∂∂x = −x′ x ′ ∂∂x ′ −x ′ y ′ ∂∂y ′ <strong>et</strong>∂∂y = x′ ∂∂y ′ , d’où∂∂x +x ∂ ∂y = −x′ x ′ ∂∂x+(1−x ′ y ′ ) ∂′ ∂y, ′ce qui montre que la droite {x ′ = 0} reste invariante dans ce système <strong>de</strong> coordonnées.Dans <strong>le</strong>s cinq cas, en restriction à chaque droite invariante respective, <strong>le</strong> groupe estéquiva<strong>le</strong>nt ou bien à ∂ x (<strong>le</strong> point à l’infini est fixe) ou bien à x∂ x (l’origine <strong>et</strong> <strong>le</strong> pointà l’infini sont tous <strong>de</strong>ux fixes).


Critique <strong>de</strong>s recherches helmholtziennes. 251qu’il r<strong>et</strong>ourne fina<strong>le</strong>ment à sa position initia<strong>le</strong> sans revenir en arrière ;en eff<strong>et</strong>, il ne peut pas franchir <strong>le</strong>s points invariants <strong>de</strong> la droite.Le groupe à un paramètre :y p − x q + c (x p + y q) (c≠ 0)satisfait tout aussi peu notre exigence. En eff<strong>et</strong>, par son action, chaquepoint réel non invariant décrit une spira<strong>le</strong> logarithmique 5 ;il parcourtalors c<strong>et</strong>te spira<strong>le</strong> continûment sans revenir en arrière, donc, évi<strong>de</strong>mment,il ne r<strong>et</strong>ourne pas à sa position initia<strong>le</strong>.Par conséquent, <strong>le</strong> groupe à un paramètre :(31) y p − x q,par l’action duquel tout point réel décrit un cerc<strong>le</strong>, est <strong>le</strong> seul qui satisfaitnotre exigence parmi <strong>le</strong>s groupes (30).Si on considère maintenant <strong>le</strong>s différents types <strong>de</strong> groupes projectifsréels du plan à <strong>de</strong>ux <strong>et</strong> à trois paramètres (voir pp. 106 sq. <strong>et</strong> p. 384),alors on vérifie immédiatement que presque chacun d’entre eux contientun sous-groupe réel à un paramètre qui possè<strong>de</strong> l’une <strong>de</strong>s six premièresformes (30), ou toutefois pour <strong>le</strong> moins, qui peut être ramené à l’une<strong>de</strong> ces formes par une transformation projective réel<strong>le</strong>. Le seul groupeprojectif réel à <strong>de</strong>ux ou à trois paramètres qui ne contient aucun sousgroupeà un paramètre tel que <strong>le</strong>s six premiers <strong>de</strong> (30), est <strong>le</strong> groupeprojectif réel à trois paramètres :(32) p + x (x p + y q), q + y (x p + y q), y p − x q<strong>de</strong> la conique imaginaire : x 2 + y 2 + 1 = 0.Il décou<strong>le</strong> <strong>de</strong> là que, sous <strong>le</strong>s hypothèses posées, <strong>le</strong> groupe g définià la page 249 est toujours à trois paramètres <strong>et</strong> qu’il peut être ramené,via une transformation projective réel<strong>le</strong>, à la forme (32).En revenant maintenant au groupe linéaire homogène (29), on vérifieimmédiatement (cf.p. 110) que par une transformation linéaire homogèneréel<strong>le</strong>, celui-ci reçoit la forme :x ′ µ p′ ν − x′ ν p′ µ + α µν (x ′ 1 p′ 1 + x′ 2 p′ 2 + x′ 3 p′ 3 )(µ, ν = 1, 2,3; α µν + α νµ =0).5 En coordonnées polaires, ce générateur s’écrit ∂ θ +cr ∂ r ; ses courbes intégra<strong>le</strong>ssatisfont dθ drdt= 1 <strong>et</strong>dt = cr, d’où θ = θ 0 + t <strong>et</strong> r = r 0 e c t : ce sont <strong>de</strong>s spira<strong>le</strong>s nonpériodiques lorsque c ≠ 0.


252 Division V. Chapitre 21. § 96.En calculant <strong>le</strong>s croch<strong>et</strong>s <strong>de</strong> ces transformations par paires, on déduitenfin que tous <strong>le</strong>s α µν s’annu<strong>le</strong>nt 6 .Avec cela, nous sommes parvenus au résultat que, sous <strong>le</strong>s hypothèsesposées, <strong>le</strong> groupe linéaire homogène réel (29) peut toujours êtresupposé <strong>de</strong> la forme :x ′ 1 p′ 2 − x′ 2 p′ 1 , x′ 2 p′ 3 − x′ 3 p′ 2 , x′ 3 p′ 1 − x′ 1 p′ 3 .Mais il décou<strong>le</strong> <strong>de</strong> là que chaque groupe réel <strong>de</strong> transformations qui satisfaitnos Axiomes III <strong>et</strong> IV dans <strong>le</strong> voisinage <strong>de</strong> chaque point réel :x 0 1 , x0 2 , x0 3 en position généra<strong>le</strong> contient trois transformations infinitésima<strong>le</strong>sdu premier ordre en <strong>le</strong>s x ν −x 0 ν, que l’on peut s’imaginer rapportéesà la forme :(x µ − x 0 µ ) p ν − (x ν − x 0 ν ) p µ + · · · (µ, ν =1, 2,3; µ < ν),alors qu’au contraire, il ne contient pas d’autres transformations infinitésima<strong>le</strong>sdu premier ordre, <strong>et</strong> en particulier aucune <strong>de</strong> la forme :(x 1 − x 0 1) p 1 + (x 2 − x 0 2) p 2 + (x 3 − x 0 3) p 3 + · · · .Mais avec cela, la détermination <strong>de</strong> tous ces groupes est ramenée auproblème qui a déjà été résolu au § 84 (p. 365 sq.). Ainsi, nous pouvonstout d’abord en conclure que <strong>le</strong>s groupes concernés sont finis, <strong>et</strong>pour préciser, qu’ils comportent six paramètres. En outre, on obtientqu’ils sont semblab<strong>le</strong>s, via une transformation ponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong>, soit augroupe <strong>de</strong>s mouvements euclidiens, soit au groupe projectif réel d’une<strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux surfaces du second <strong>de</strong>gré :x 2 1 + x2 2 + x2 3 + 1 = 0, x2 1 + x2 2 + x2 3 − 1 = 0.Par conséquent, chaque groupe réel <strong>de</strong> l’espace trois fois étenduqui satisfait nos Axiomes III <strong>et</strong> IV peut être transformé, via une transformationponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong>, soit en <strong>le</strong> groupe <strong>de</strong>s mouvements euclidiens,soit en l’un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux groupes <strong>de</strong> mouvements non-euclidiens. En6 Posons R µν ′ := x′ µ p′ ν −x′ ν p′ µ (générateur infinitésimal <strong>de</strong>s rotations autour <strong>de</strong> ladroite {x ′ µ = x ′ ν = 0}) <strong>et</strong> D ′ := x ′ 1p ′ 1+x ′ 2p ′ 2+x ′ 3p ′ 3 (générateur infinitésimal <strong>de</strong>s homothéties<strong>de</strong> centre l’origine). On a <strong>le</strong>s relations <strong>de</strong> commutation [ R 12 ′ , 23] R′ = R′[ ] 13 ,R′12 , R 13′ = −R′23 , [ R 13 ′ , ] R′ 23 = −R′12 <strong>et</strong> aussi [ R µν ′ , D′] = 0. Il en décou<strong>le</strong> que<strong>le</strong> croch<strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>Lie</strong> :ˆR′ 12 +α 12D ′ , R 23+α ′˜ ′ 23D = ˆR˜12, ′ R 23′ + α23ˆR′ 12 , D ′˜ + α ˆD′ 12 , R 23˜ ′ + α12α 23ˆD′ , D ′˜= R ′ 13= λ`R ′ 13 + α 13D ′´qui doit être combinaison linéaire <strong>de</strong>s trois générateurs infinitésimaux R µν ′ + α µν D ′ne peut l’être que lorsque α 13 = 0, avec λ = 1. De même, α 12 = 0 <strong>et</strong> α 23 = 0.


Critique <strong>de</strong>s recherches helmholtziennes. 253d’autres termes : nos Axiomes I . . . IV suffisent effectivement à caractériserces trois sortes <strong>de</strong> mouvements.§ 96.Quel<strong>le</strong>s conclusions peut-on tirer <strong>de</strong>s axiomes helmholtziens ?Nous voulons à présent faire complètement abstraction <strong>de</strong>s recherchesque Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz lui-même a engagées sur la base<strong>de</strong> ses axiomes <strong>et</strong> nous voulons établir, comme nous l’avons déjà annoncéa la page 220, quel<strong>le</strong>s conclusions peuvent être tirées <strong>de</strong>s axiomeshelmholtziens en eux-mêmes. Nous nous limitons donc à nouveau àl’espace ordinaire trois fois étendu.Dans <strong>le</strong> § 93, nous avons indiqué comment <strong>le</strong>s axiomes helmholtzienspeuvent être formulés, quand on <strong>le</strong>s interprète <strong>de</strong> la façon qui a étéexposée au § 92 <strong>et</strong> lorsqu’on emploie <strong>de</strong> surcroît <strong>le</strong>s concepts <strong>et</strong> <strong>le</strong>s manières<strong>de</strong> s’exprimer <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong>s groupes. Il nous reste maintenantà voir quels sont <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> l’espace trois fois étendu qui satisfont<strong>le</strong>s exigences posées dans <strong>le</strong> § 93.Chacun <strong>de</strong>s groupes requis est réel, fini <strong>et</strong> continu, <strong>et</strong> relativement àson action, <strong>de</strong>ux points ont un <strong>et</strong> un seul invariant, tandis qu’un nombre<strong>de</strong> points supérieur à <strong>de</strong>ux n’a pas d’invariant essentiel. Mais puisque,d’après <strong>le</strong> Théorème 37 p. 215, chaque groupe <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te espèce est semblab<strong>le</strong>,via une transformation ponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong>, à l’un <strong>de</strong>s groupes quisont rassemblés à la page 215, il ne nous reste alors qu’à exclure, parmices groupes-là, ceux qui ne correspon<strong>de</strong>nt pas aux exigences restantesdu § 93.Ces exigences restantes reviennent toutes à ce que nos groupes,à l’intérieur d’une certaine région finie <strong>de</strong> l’espace trois fois étendu,doivent possé<strong>de</strong>r certaines propriétés. Puisque l’origine <strong>de</strong>s coordonnéesest un point en position généra<strong>le</strong> pour tous <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> lapage 215, nous pouvons clairement adm<strong>et</strong>tre que la région en questionest constituée <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s points réels qui se trouvent dans un certainvoisinage <strong>de</strong> l’origine <strong>de</strong>s coordonnées. Par conséquent, nous <strong>de</strong>vonsseu<strong>le</strong>ment rechercher encore, parmi <strong>le</strong>s groupes <strong>de</strong> la page 215, quelssont ceux qui possè<strong>de</strong>nt <strong>le</strong>s propriétés suivantes :Premièrement, l’invariant : J ( x 1 , y 1 , z 1 ; x 2 , y 2 , z 2)<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux pointsdoit être constitué <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que la relation :(33) J ( x 1 , y 1 , z 1 : x 2 , y 2 , z 2)= J(x01 , y 0 1, z 0 1; x 0 2, y 0 2, z 0 2),


254 Division V. Chapitre 21. § 96.pour chaque paire <strong>de</strong> systèmes <strong>de</strong> va<strong>le</strong>urs distincts l’un <strong>de</strong> l’autre :x 0 1 , y0 1 , z0 1 <strong>et</strong> x0 2 , y0 2 , z0 2 , fournit une véritab<strong>le</strong> équation entre x 1, y 1 , z 1 ,x 2 , y 2 , z 2 , dans un certain voisinage <strong>de</strong> l’origine <strong>de</strong>s coordonnées.Deuxièmement, après fixation <strong>de</strong> l’origine <strong>de</strong>s coordonnées,chaque point quelconque x 0 , y 0 , z 0 qui est situé dans un certain voisinage<strong>de</strong> l’origine <strong>de</strong>s coordonnées, doit pouvoir encore se transformeren tous <strong>le</strong>s points x, y, z <strong>de</strong> ce voisinage, qui satisfont l’équation :(34) J ( x, y, z; 0, 0, 0 ) = J ( x 0 , y 0 , z 0 ; 0, 0, 0 ) ,<strong>et</strong> à travers laquel<strong>le</strong> un transfert continu entre tous <strong>le</strong>s points <strong>de</strong> c<strong>et</strong>tesorte est généra<strong>le</strong>ment possib<strong>le</strong> * .Troisièmement, l’axiome <strong>de</strong> monodromie doit être satisfait.Nous recherchons tout d’abord, pour chaque groupe individuel <strong>de</strong>la page 215, si la première <strong>de</strong> ces exigences est satisfaite, <strong>et</strong> lorsqu’el<strong>le</strong>l’est, nous nous <strong>de</strong>mandons alors si la <strong>de</strong>uxième est satisfaite ; <strong>et</strong> nousne prendrons en considération l’axiome <strong>de</strong> monodromie que dans <strong>le</strong>s<strong>de</strong>rnières lignes. Comme par ail<strong>le</strong>urs <strong>le</strong> groupe <strong>de</strong>s mouvements euclidiens<strong>et</strong> <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux groupes <strong>de</strong> mouvements non-euclidiens satisfontévi<strong>de</strong>mment toutes nos exigences, dès <strong>le</strong> début, nous <strong>le</strong>s laissons simp<strong>le</strong>ment<strong>de</strong> côté.Le fait que <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux groupes :(35) p, q, r, xq − yp, yr + zq, zp + xr<strong>et</strong> :(36) p − xU, q − yU, r + zU, xq − yp, yr + zq, zp + xrsatisfont notre première exigence est à portée <strong>de</strong> main, puisque parexemp<strong>le</strong>, pour <strong>le</strong> premier d’entre eux, l’équation (33) s’énonce <strong>de</strong> lamanière suivante :{(x2 − x 1 ) 2 + (y 2 − y 1 ) 2 − (z 2 − z 1 ) 2 == (x 0 2 − x0 1 )2 + (y 0 2 − y0 1 )2 − (z 0 2 − z0 1 )2 ,<strong>et</strong> ceci est toujours une véritab<strong>le</strong> équation entre x 1 , y 1 , z 1 , x 2 , y 2 , z 2 .Néanmoins, ces <strong>de</strong>ux groupes ne satisfont pas la <strong>de</strong>uxième exigence.* À vrai dire, dans <strong>le</strong> § 93, on <strong>de</strong>man<strong>de</strong> encore plus, mais nous verrons que c<strong>et</strong>teexigence suffit déjà complètement.


Critique <strong>de</strong>s recherches helmholtziennes. 255En eff<strong>et</strong>, l’équation (34) correspondante a, pour <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux groupes, laforme :(37) x 2 + y 2 − z 2 = x 2 0 + y 2 0 − z 2 0.Et maintenant, après fixation <strong>de</strong> l’origine <strong>de</strong>s coordonnées, <strong>le</strong> pointx 0 , y 0 , z 0 peut à vrai dire en général être transformé encore en tous <strong>le</strong>spoints qui satisfont l’équation (37) ; mais pour tous <strong>le</strong>s points x 0 , y 0 , z 0qui se trouvent sur la conique du second <strong>de</strong>gré : x 2 0 + y2 0 − z2 0 = 0, celan’est plus valab<strong>le</strong> ; effectivement, pour ces points, l’équation (37) reçoitla forme :x 2 + y 2 − z 2 = 0,<strong>et</strong> il est clair que chaque point <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te espèce peut se transformer entous <strong>le</strong>s points qui satisfont c<strong>et</strong>te équation, à l’exception <strong>de</strong> l’origine<strong>de</strong>s coordonnées, car, sous <strong>le</strong>s hypothèses posées, el<strong>le</strong> reste au repos.Nous voyons donc que <strong>le</strong>s groupes (35) <strong>et</strong> (36) sont déjà exclus,sans qu’on utilise l’axiome <strong>de</strong> monodromie.Pour <strong>le</strong> groupe :(38) p, q, xp+r, yq+cr, x 2 p+2xr, y 2 q+2cyr (c ≠ 0),on peut écrire l’équation (33) correspondante sous la forme :(x 2 − x 1 )(y 2 − y 1 ) c= (x0 2 − x0 1 )(y0 2 − y0 1 )c.e 1 2 (z 1+z 2 )e 1 2 (z0 1 +z0 2 )Si c est négatif, alors c<strong>et</strong>te équation n’a plus <strong>de</strong> sens aussitôt que l’onpose x 0 2 = x 0 1 <strong>et</strong> y2 0 = y1 0 ;si au contraire, c est positif, el<strong>le</strong> fournit alors, pour toute paire <strong>de</strong> systèmes<strong>de</strong> va<strong>le</strong>urs x 0 1 , y0 1 , z0 1 <strong>et</strong> x0 2 , y0 2 , z0 2 distincts l’un <strong>de</strong> l’autre, une véritab<strong>le</strong>équation entre x 1 , y 1 , z 1 , x 2 , y 2 , z 2 . Le groupe (38) satisfait doncnotre première exigence seu<strong>le</strong>ment lorsque c est positif.Mais il ne satisfait pas notre <strong>de</strong>uxième exigence, même dans <strong>le</strong>cas : c > 0. En eff<strong>et</strong>, pour notre groupe, l’équation (34) reçoit la forme :x · y c= x 0 · y0c ,e 1 2 z e 1 2 z 0<strong>et</strong> après fixation <strong>de</strong> l’origine <strong>de</strong>s coordonnées, <strong>le</strong> point x 0 , y 0 , z 0 <strong>de</strong>vraitpouvoir occuper toutes <strong>le</strong>s positions qui satisfont c<strong>et</strong>te équation dans uncertain voisinage <strong>de</strong> l’origine <strong>de</strong>s coordonnées. C’est à vrai dire effectivement<strong>le</strong> cas pour un point x 0 , y 0 , z 0 en position généra<strong>le</strong>. Cependant,en choisissant par exemp<strong>le</strong> x 0 = y 0 = 0, <strong>le</strong> point x 0 , y 0 , z 0 <strong>de</strong>vraitencore pouvoir être transformé en tous <strong>le</strong>s points se trouvant dans uncertain voisinage <strong>de</strong> l’origine <strong>de</strong>s coordonnées qui satisfont l’équation :


256 Division V. Chapitre 21. § 96.xy c = 0, mais cela est impossib<strong>le</strong>, car après fixation <strong>de</strong> l’origine <strong>de</strong>scoordonnées, tous <strong>le</strong>s points <strong>de</strong> la droite : x = y = 0 restent en généralau repos (voir p. 205).Par conséquent, <strong>le</strong> groupe (38) est lui aussi exclu, sans qu’on soitobligé <strong>de</strong> se préoccuper <strong>de</strong> l’axiome <strong>de</strong> monodromie.Qui plus est, notre première exigence n’est même encore jamaissatisfaite par <strong>le</strong> groupe :⎧p, q, xp + yq + ar, yp − xq + r,⎪⎨(39) (x 2 − y 2 ) p + 2xyq + 2(ax − y) r⎪⎩2xyp + (y 2 − x 2 ) q + 2(x + ay) r,puisque l’équation (33) correspondante ne fournit en eff<strong>et</strong> pas toujoursune véritab<strong>le</strong> équation entre x 1 , y 1 , z 1 , x 2 , y 2 , z 2 , lorsqu’on pose : x 0 2 =x 0 1, y 0 2 = y 0 2.Il en va autrement pour <strong>le</strong> groupe :⎧p, q, xp + yq + r, yp − xq⎪⎨(40) (x 2 − y 2 ) p + 2xyq + 2xr⎪⎩2xyp + (y 2 − x 2 ) q + 2yr.Pour celui-ci, l’équation (33) s’écrit en eff<strong>et</strong> :{(x2 − x 1 ) 2 + (y 2 − y 1 ) 2} e −(z 1+z 2 ) == { (x 0 2 − x0 1 )2 + (y 0 2 − y0 1 )2} e −(z0 1 +z0 2 ) ,<strong>et</strong> ceci constitue toujours une équation véritab<strong>le</strong> entre x 1 , y 1 , z 1 ,x 2 , y 2 , z 2 . Notre première exigence est donc satisfaite ; mais la<strong>de</strong>uxième ne l’est pas.En eff<strong>et</strong>, l’équation (34) s’écrit maintenant :(x 2 + y 2 ) e −z = (x 2 0 + y 2 0) e −z 0,<strong>et</strong> si notre <strong>de</strong>uxième exigence <strong>de</strong>vait être satisfaite, après fixation <strong>de</strong>l’origine <strong>de</strong>s coordonnées, alors par exemp<strong>le</strong>, chaque point x 0 , y 0 , z 0pour <strong>le</strong>quel x 0 = y 0 = 0 <strong>de</strong>vrait pouvoir être transformé encore en tous<strong>le</strong>s autres points qui satisfont l’équation : x 2 + y 2 = 0 ou encore, puisqu’ils’agit <strong>de</strong> quantités réel<strong>le</strong>s, <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux équations : x = y = 0. Maiscela est impossib<strong>le</strong>, car, en même temps que l’origine <strong>de</strong>s coordonnées,tous <strong>le</strong>s points <strong>de</strong> la droite : x = y = 0 restent généra<strong>le</strong>ment au repos.Par conséquent, <strong>le</strong>s groupes (39) <strong>et</strong> (40) n’entrent pas non plus enligne <strong>de</strong> compte.


(41)<strong>et</strong> :Critique <strong>de</strong>s recherches helmholtziennes. 257Les <strong>de</strong>ux groupes :{p, q, xq + r, xp + yq + cr, x 2 q + 2xr,x 2 p + 2xyq + 2(y + cx) r(42) p, q, r, 2xp + yq, xq + yr, x 2 p + xyq + 1 2 y2 rne satisfont pas non plus notre première exigence ; dans <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux cas eneff<strong>et</strong>, l’équation (33) correspondante ne fournit aucune équation véritab<strong>le</strong>entre x 1 , y 1 , z 1 , x 2 , y 2 , z 2 , aussitôt que l’on pose x 0 2 = x0 1 , y0 2 = y0 1 .Enfin, <strong>le</strong> groupe :(43) r, p − yr, q + xr, xq, xp − yq, ypsatisfait certes notre première exigence, mais pas la <strong>de</strong>uxième. L’équation(34) correspondante s’écrit en eff<strong>et</strong> : z = z 0 , <strong>et</strong> par conséquent,après fixation <strong>de</strong> l’origine <strong>de</strong>s coordonnées, chaque autre point x 0 , y 0 , z 0<strong>de</strong>vrait pouvoir se transformer encore en tous <strong>le</strong>s autres points qui s<strong>et</strong>rouvent sur <strong>le</strong> plan : z = z 0 . Les points pour <strong>le</strong>squels x 0 = y 0 = 0montrent que cela n’est pas <strong>le</strong> cas, car ils restent tous au repos aprèsfixation <strong>de</strong> l’origine <strong>de</strong>s coordonnées.Par ce qui précè<strong>de</strong>, on a démontré que <strong>le</strong> groupe <strong>de</strong>s mouvementseuclidiens <strong>et</strong> <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux groupes <strong>de</strong> mouvements non-euclidiens sont <strong>le</strong>sseuls groupes qui satisfont <strong>le</strong>s exigences énoncées au § 93 ; ce sont <strong>le</strong>sseuls groupes <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te espèce, même lorsqu’on laisse complètement <strong>de</strong>côté l’axiome <strong>de</strong> monodromie.Nous voyons donc que <strong>le</strong>s axiomes helmholtziens sont suffisantspour la caractérisation <strong>de</strong>s mouvements euclidiens <strong>et</strong> non-euclidiens, sion <strong>le</strong>s interprète <strong>de</strong> la même manière qu’aux § 92 <strong>et</strong> 93 ; mais nousvoyons en même temps qu’en prenant pour base c<strong>et</strong>te interprétation,l’axiome <strong>de</strong> monodromie est <strong>de</strong> toute façon superflu. Mais bien qu’il sesoit avéré que l’on peut se passer <strong>de</strong> l’un <strong>de</strong>s axiomes <strong>de</strong> Helmholtz,se présente juste après la question <strong>de</strong> savoir si on ne peut pas se passeraussi encore d’autres parties <strong>de</strong> ces axiomes. Dans <strong>le</strong> Chapitre 23 nousmontrerons qu’il faut répondre par l’affirmative à c<strong>et</strong>te question.Mais il y a encore un point qui mérite d’être pris en considération.Dans <strong>le</strong>s § 92 <strong>et</strong> 93, nous avons interprété <strong>le</strong>s axiomes helmholtziensd’une certaine manière. Nous sommes loin d’affirmer que c<strong>et</strong>te interprétationqui est la nôtre soit la seu<strong>le</strong> possib<strong>le</strong>, <strong>et</strong> nous dirons plutôtsans détour que <strong>le</strong>s axiomes en question autorisent <strong>de</strong>s interprétations


258 Division V. Chapitre 21. § 96.diverses. Cela rési<strong>de</strong> dans la nature <strong>de</strong>s choses : Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz,qui n’avait pas à sa disposition <strong>le</strong>s concepts <strong>et</strong> la langue spécialisée instruite<strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong>s groupes, a dû s’ai<strong>de</strong>r <strong>de</strong> longues circonlocutionspar <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s, cependant, il n’a pas pu prendre en compte toutes <strong>le</strong>sexceptions imaginab<strong>le</strong>s ; ainsi, il est tout à fait compréhensib<strong>le</strong> que sesaxiomes apparaissent avoir d’autant plus <strong>de</strong> sens variés qu’on <strong>le</strong>s examineplus soigneusement. Maintenant, bien que nous n’affirmions pasavoir donné la seu<strong>le</strong> interprétation possib<strong>le</strong> <strong>de</strong>s axiomes helmholtziens,nous croyons toutefois que nous <strong>le</strong>ur avons attribué l’interprétation laplus intéressante qui soit, cel<strong>le</strong> qui est en accord avec <strong>le</strong>ur teneur ; nousy avons même déjà trop introduit maint <strong>le</strong>cteur.Nous ne voulons pas rentrer plus avant dans la considération <strong>de</strong>sdiverses conceptions que l’on peut avoir au suj<strong>et</strong> <strong>de</strong>s axiomes helmholtziens; toutefois, nous voulons encore en discuter brièvement.En eff<strong>et</strong>, la manière dont on peut interpréter ces axiomes dépendpour l’essentiel du fait <strong>de</strong> savoir si on lit en eux qu’ils doivent être valab<strong>le</strong>ssans exception à l’intérieur d’une certaine région, ou si l’on adm<strong>et</strong>qu’ils doivent être valab<strong>le</strong>s seu<strong>le</strong>ment en général, donc pour <strong>de</strong>s pointsqui sont mutuel<strong>le</strong>ment en position généra<strong>le</strong>. Dans <strong>le</strong>s paragraphes 92<strong>et</strong> 93, nous nous sommes décidés pour la première conception, maisla <strong>de</strong>uxième possè<strong>de</strong> aussi une certaine légitimité, au moins en ce quiconcerne <strong>le</strong> troisième axiome helmholtzien, l’axiome sur la libre mobilité.Afin <strong>de</strong> montrer quel<strong>le</strong> influence c<strong>et</strong>te conception a sur la portée <strong>de</strong>saxiomes helmholtziens, nous voulons fina<strong>le</strong>ment rechercher encore cequi advient lorsque <strong>le</strong>s axiomes helmholtziens sont satisfaits seu<strong>le</strong>mentpar <strong>de</strong>s points qui sont mutuel<strong>le</strong>ment en position généra<strong>le</strong>. Nous allonsvoir que ces axiomes ne suffisent alors pas à caractériser <strong>le</strong>s mouvementseuclidiens <strong>et</strong> non-euclidiens, même si on adm<strong>et</strong> en plus l’axiome<strong>de</strong> monodromie.Si un groupe réel doit satisfaire <strong>le</strong>s axiomes helmholtziens seu<strong>le</strong>menten ce qui concerne <strong>de</strong>s points qui sont mutuel<strong>le</strong>ment en positiongénéra<strong>le</strong>, alors il doit, quand on fait d’abord abstraction <strong>de</strong> l’axiome <strong>de</strong>monodromie, possé<strong>de</strong>r <strong>le</strong>s propriétés suivantes : si un point en positiongénéra<strong>le</strong> est fixé, tout autre point en position généra<strong>le</strong> se meut librementsur une surface ; si <strong>de</strong>ux points qui sont mutuel<strong>le</strong>ment en position généra<strong>le</strong>sont fixés, tout autre troisième point en position généra<strong>le</strong> se meutlibrement sur une courbe ; si trois points qui sont mutuel<strong>le</strong>ment en positiongénéra<strong>le</strong> sont fixés, tous <strong>le</strong>s points restent au repos. Il est clair que<strong>le</strong>s groupes rassemblés à la page 215 satisfont toutes ces exigences <strong>et</strong>qu’ils sont <strong>le</strong>s seuls à <strong>le</strong>s satisfaire.


Critique <strong>de</strong>s recherches helmholtziennes. 259Si nous adm<strong>et</strong>tons en plus l’axiome <strong>de</strong> monodromie, alors tout unnombre <strong>de</strong>s groupes dont il s’agit seront exclus, parce qu’ils ne satisfontpas l’axiome <strong>de</strong> monodromie ; mais il reste alors non seu<strong>le</strong>ment<strong>le</strong>s mouvements euclidiens <strong>et</strong> non-euclidiens, mais en outre encore ungroupe, à savoir <strong>le</strong> groupe 7 à la page 215. On a démontré aux pages 243sq. qu’il satisfait complètement l’axiome <strong>de</strong> monodromie helmholtzien.Par conséquent, sous <strong>le</strong>s hypothèses posées, l’axiome <strong>de</strong> monodromiene suffit pas à exclure aussi ce groupe.En définitive [Al<strong>le</strong>s in Al<strong>le</strong>m], nous pouvons énoncer brièvement<strong>le</strong> résultat du présent paragraphe ainsi :Les mouvements euclidiens <strong>et</strong> non-euclidiens sont complètementcaractérisés par <strong>le</strong>s axiomes helmholtziens, lorsqu’on interprète cesaxiomes <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte qu’ils doivent être satisfaits sans exception partous <strong>le</strong>s points à l’intérieur d’une certaine région ; <strong>et</strong> quand on <strong>le</strong>s interpète<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te manière, l’axiome <strong>de</strong> monodromie est alors superflu.Si au contraire on <strong>de</strong>man<strong>de</strong> seu<strong>le</strong>ment que <strong>le</strong>s axiomes helmholtzienssoient satisfaits par <strong>de</strong>s points qui sont mutuel<strong>le</strong>ment en position généra<strong>le</strong>,alors ces axiomes ne sont pas suffisants pour caractériser <strong>le</strong>s mouvementseuclidiens <strong>et</strong> non-euclidiens, <strong>et</strong> il ne suffisent d’ail<strong>le</strong>urs mêmepas lorsqu’on adm<strong>et</strong> en plus l’axiome <strong>de</strong> monodromie.Nous avons vu que <strong>le</strong>s axiomes helmholtziens suffisent certes pourla caractérisation <strong>de</strong>s mouvements euclidiens <strong>et</strong> non euclidiens, lorsqu’on<strong>le</strong>s interpète d’une certaine manière, mais qu’ils contiennent <strong>de</strong>séléments superflus quand on <strong>le</strong>s interprète ainsi, <strong>et</strong> par conséquent, ilsne représentent pas une véritab<strong>le</strong> solution du problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. Dans <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux chapitres suivants, nous allons maintenanttraiter <strong>le</strong> problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz d’un point <strong>de</strong> vue nouveau,<strong>et</strong> nous allons <strong>le</strong> résoudre <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux façons différentes, à savoir, dans <strong>le</strong>Chapitre 22, en établissant certains axiomes qui se réfèrent à <strong>de</strong>s pointsinfiniment voisins, <strong>et</strong> dans <strong>le</strong> Chapitre 23, via <strong>de</strong>s axiomes qui se réfèrentà <strong>de</strong>s points finiment éloignés.


Chapitre 22.Première solution du problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz.Le problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz, comme nous l’avons formuléà la page 163, <strong>de</strong>man<strong>de</strong> d’indiquer <strong>de</strong>s propriétés qui sont communesà la famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> mouvements euclidiens <strong>et</strong> aux <strong>de</strong>ux famil<strong>le</strong>s <strong>de</strong> mouvementsnon-euclidiens <strong>et</strong> grâce auxquel<strong>le</strong>s ces trois famil<strong>le</strong>s se distinguent<strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>s autres famil<strong>le</strong>s possib<strong>le</strong>s <strong>de</strong> mouvements.Comme ce problème est en fait indéterminé, nous <strong>le</strong> spécifions plusprécisément dès <strong>le</strong> début par l’exigence que l’ensemb<strong>le</strong> <strong>de</strong>s propriétésà indiquer doivent non seu<strong>le</strong>ment être suffisantes pour caractériser nostrois famil<strong>le</strong>s, mais encore être nécessaires, c’est-à-dire que ces troisfamil<strong>le</strong>s-là <strong>de</strong> mouvements ne doivent pas seu<strong>le</strong>ment être caractériséespar une fraction <strong>de</strong>s propriétés en question. Mais cependant, même sousc<strong>et</strong>te version déterminée, <strong>le</strong> problème adm<strong>et</strong> encore <strong>de</strong>s solutions trèsdiverses, puisque dans <strong>le</strong> choix <strong>de</strong>s propriétés requises, on n’est parail<strong>le</strong>urs soumis à aucune limitation supplémentaire.Parmi <strong>le</strong>s propriétés qui sont communes à nos trois famil<strong>le</strong>s <strong>de</strong>mouvements, il s’en trouve une qui nous touche <strong>de</strong> près, à savoir quechacune <strong>de</strong>s trois famil<strong>le</strong>s constitue un groupe réel continu, dont <strong>le</strong>stransformations sont inverses l’une <strong>de</strong> l’autre par paires. Nous supposonsalors <strong>de</strong>puis <strong>le</strong> début c<strong>et</strong>te propriété comme quelque chose <strong>de</strong>donné * , <strong>et</strong> nous <strong>de</strong>vons maintenant simp<strong>le</strong>ment <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r encore : Parquel<strong>le</strong>s propriétés peut-on distinguer <strong>le</strong> groupe <strong>de</strong>s mouvements euclidiens<strong>et</strong> <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux groupes <strong>de</strong> mouvements non-euclidiens parmi tous<strong>le</strong>s groupes réels continus possédant <strong>de</strong>s transformations inverses parpaire ? Pour alléger <strong>le</strong> discours, nous supprimerons toujours dans la* Nous ne voulons pas passer sous si<strong>le</strong>nce <strong>le</strong> fait qu’il est tout à fait possib<strong>le</strong> d’établird’autres exigences dont décou<strong>le</strong>nt c<strong>et</strong>te propriété <strong>de</strong> type « groupe ». Mais on peutbien sûr soutenir qu’il est conforme à la nature <strong>de</strong>s choses d’établir dès <strong>le</strong> début cesexigences quant à la nature <strong>de</strong>s groupes. Dans <strong>le</strong> concept <strong>de</strong> mouvement se trouve eneff<strong>et</strong> <strong>le</strong> fait qu’on peut accomplir <strong>de</strong>ux mouvements l’un après l’autre, <strong>et</strong> il décou<strong>le</strong><strong>de</strong> là immédiatement que l’ensemb<strong>le</strong> <strong>de</strong>s transformations qui représentent <strong>de</strong>s changements<strong>de</strong> lieu possib<strong>le</strong>s par mouvement forme un groupe. Nous ajoutons seu<strong>le</strong>mentencore l’hypothèse que <strong>le</strong> groupe est continu <strong>et</strong> qu’il est constitué <strong>de</strong> transformationsinverses l’une <strong>de</strong> l’autre. Du reste, dans <strong>le</strong> Chapitre 21, nous avons déjà donné unesolution qui ne fait pas usage <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière propriété <strong>de</strong>s groupes.


Première solution au problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. 261suite <strong>le</strong>s mots : « possédant <strong>de</strong>s transformations inverses par paires »,<strong>et</strong> ces mots seront ainsi à chaque fois sous-entendus.Dans <strong>le</strong> présent chapitre nous allons répondre à c<strong>et</strong>te questiond’une manière tel<strong>le</strong> que nous nous limiterons aux propriétés qui se réfèrentà <strong>de</strong>s points infiniment voisins. Nous allons introduire un nouveauconcept, à savoir <strong>le</strong> concept <strong>de</strong> libre mobilité dans l’infinitésimal, <strong>et</strong>nous montrerons que chaque groupe réel continu agissant sur un espacedont la dimension est strictement supérieure à <strong>de</strong>ux qui possè<strong>de</strong> la libremobilité dans l’infinitésimal en un point <strong>de</strong> position généra<strong>le</strong> est semblab<strong>le</strong>,via une transformation ponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong> <strong>de</strong> l’espace en question,soit au groupe <strong>de</strong>s mouvements euclidiens, soit à l’un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux groupes<strong>de</strong> mouvements non-euclidiens <strong>de</strong> l’espace en question. Par conséquent,il sera alors démontré que <strong>le</strong>s propriétés que nous aurons réunies dans<strong>le</strong> concept <strong>de</strong> libre mobilité dans l’infnitésimal, seront <strong>de</strong>s propriétéscaractéristiques tel<strong>le</strong>s que cel<strong>le</strong>s que nous recherchons * .Dans <strong>le</strong> § 97 nous prendrons tout d’abord en considération <strong>le</strong> plan,dans <strong>le</strong>quel, à vrai dire, <strong>le</strong> concept <strong>de</strong> libre mobilité dans l’infinitésimalne suffit encore pas pour caractériser <strong>le</strong>s mouvements euclidiens <strong>et</strong>non-euclidiens. Dans <strong>le</strong> § 98, nous traiterons <strong>de</strong> l’espace ordinaire troisfois étendu, <strong>et</strong> dans <strong>le</strong> § 99, <strong>de</strong> l’espace à un nombre quelconque <strong>de</strong> dimensions.Dans <strong>le</strong> § 100 enfin, nous étudierons brièvement <strong>le</strong>s liens quiexistent entre nos développements <strong>et</strong> ceux <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>.§ 97.Soit G un groupe réel continu d’un espace quelconque <strong>et</strong> soit Fune figure quelconque dans c<strong>et</strong> espace. Alors, si G contient un sousgroupecontinu à au moins un paramètre par l’action duquel la figureF reste invariante, nous voulons dire qu’après fixation <strong>de</strong> F , un mouvementcontinu est encore possib<strong>le</strong> par <strong>le</strong> groupe G. Si au contraire<strong>le</strong> plus grand sous-groupe continu <strong>de</strong> G qui laisse F invariante estseu<strong>le</strong>ment constitué <strong>de</strong> la transformation i<strong>de</strong>ntique, alors nous disonsqu’après fixation <strong>de</strong> F , plus aucun mouvement continu n’est possib<strong>le</strong>.En utilisant une tel<strong>le</strong> manière <strong>de</strong> s’exprimer, nous définissonsmaintenant ce que nous entendons par « libre mobilité dans l’infinitésimal» pour un plan.Définition. Un groupe réel continu du plan possè<strong>de</strong> la libre mobilitédans l’infinitésimal en un point réel P lorsque <strong>le</strong>s conditions suivantessont remplies : Après fixation <strong>de</strong> P , un mouvement continu doit*Ce qui suit est une refonte <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> que <strong>Lie</strong> a conduite aux pages 284 à 321du Leipziger Berichte <strong>de</strong> 1890.


262 Division V. Chapitre 22. § 97.encore être possib<strong>le</strong> ; au contraire, aucun mouvement ne doit plus êtrepossib<strong>le</strong>, aussitôt que l’on a fixé, outre P , un élément linéaire quelconquepassant par P .Nous cherchons maintenant tous <strong>le</strong>s groupes réels continus du planqui possè<strong>de</strong>nt la libre mobilité dans l’infinitésimal en un point réel <strong>de</strong>position généra<strong>le</strong>.Soit G un groupe ayant <strong>le</strong>s qualités requises <strong>et</strong> soit P un point réel<strong>de</strong> position généra<strong>le</strong>, en <strong>le</strong>quel G possè<strong>de</strong> la libre mobilité dans l’infinitésimal.Si ensuite g est <strong>le</strong> plus grand sous-groupe continu <strong>de</strong> G par<strong>le</strong>quel <strong>le</strong> point P reste au repos, chaque élément linéaire réel passant parP doit pouvoir tourner continûment autour <strong>de</strong> P par l’action <strong>de</strong> g ; carsi tel n’était pas <strong>le</strong> cas, g laisserait au moins un <strong>de</strong> ces éléments linéairesau repos, <strong>et</strong> g serait alors <strong>le</strong> plus grand sous-groupe continu <strong>de</strong> G par<strong>le</strong>quel <strong>le</strong> point P <strong>et</strong> l’élément linéaire en question restent invariants, <strong>et</strong>g <strong>de</strong>vrait par conséquent se réduire à la transformation i<strong>de</strong>ntique, alorsque nous avons toutefois supposé qu’après fixation <strong>de</strong> P , un mouvementcontinu était encore possib<strong>le</strong>.Il décou<strong>le</strong> <strong>de</strong> là immédiatement que G n’est pas seu<strong>le</strong>ment transitif,mais qu’il est même aussi réel-primitif * . Si en eff<strong>et</strong> il était intransitifou s’il était réel-imprimitif, il laisserait invariante une famil<strong>le</strong> réel<strong>le</strong> <strong>de</strong>courbes : ϕ(x, y) = const., <strong>et</strong> alors par conséquent, en même tempsque chaque point réel x, y fixé en position généra<strong>le</strong>, l’élément linéaireréel : dx : dy passant par ce point, qui est déterminé par l’équation :ϕ x dx + ϕ y dy = 0, resterait simultanément au repos ; mais comme,après fixation d’un point P qui se trouve bien sûr aussi en position généra<strong>le</strong>,aucun élément linéaire réel passant par ce point ne doit rester aurepos, nous parvenons ainsi à une contradiction.Il est par ail<strong>le</strong>urs faci<strong>le</strong> <strong>de</strong> vérifier que notre groupe est à trois paramètres.En eff<strong>et</strong>, si on fixe <strong>le</strong> point P <strong>et</strong> un élément linéaire réel quelconquepassant par ce point, alors aucun mouvement continu n’est encorepossib<strong>le</strong>, <strong>et</strong> il ne reste donc plus aucun paramètre arbitraire dans <strong>le</strong>groupe. Comme en outre P , en tant que point <strong>de</strong> position généra<strong>le</strong>, peutprendre ∞ 2 positions différentes à cause <strong>de</strong> la transitivité du groupe,<strong>et</strong> comme, après fixation <strong>de</strong> P , <strong>le</strong>s éléments linéaires réels passant parP peuvent encore tourner tout autour <strong>de</strong> P , la fixation du point <strong>et</strong> <strong>de</strong>* Par souci <strong>de</strong> brièv<strong>et</strong>é, nous appelons réel-primitif tout groupe réel qui est primitif,dès qu’on se restreint au domaine réel, bien qu’il puisse être imprimitif dans <strong>le</strong>domaine comp<strong>le</strong>xe (cf. p. 363).


Première solution au problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. 263l’élément linéaire fournit donc exactement trois conditions pour <strong>le</strong>s paramètres<strong>de</strong> G, <strong>et</strong> par conséquent, <strong>le</strong> nombre <strong>de</strong> ces paramètres est simp<strong>le</strong>mentégal à trois. Et maintenant, puisque nous avons déjà déterminéaux pages 370 sq. tous <strong>le</strong>s groupes réels à trois paramètres du plan quisont réels-primitifs, nous obtenons <strong>le</strong> théorème suivant.Théorème 38. Si un groupe réel continu du plan possè<strong>de</strong> la libremobilité dans l’infinitésimal en un point réel <strong>de</strong> position généra<strong>le</strong>, alorsil est à trois paramètres <strong>et</strong> il est semblab<strong>le</strong>, via une transformation ponctuel<strong>le</strong>réel<strong>le</strong> <strong>de</strong> ce plan, soit au groupe réel continu projectif à trois paramètres<strong>de</strong> la conique 1 :x 2 + y 2 + 1 = 0,soit au groupe réel continu projectif <strong>de</strong> la conique 2 :x 2 + y 2 − 1 = 0,soit à l’un <strong>de</strong>s groupes projectifs à trois paramètres <strong>de</strong> la forme :où c désigne une constante réel<strong>le</strong>.p, q, yp − xq + c (xp + yq),En ce qui concerne <strong>le</strong>s groupes que l’on a trouvés ici, il est avanttout remarquab<strong>le</strong> qu’ils possè<strong>de</strong>nt tous la libre mobilité dans l’infinitésima<strong>le</strong>n tous <strong>le</strong>s points réels d’une certaine partie du plan, alors que nousavons <strong>de</strong>mandé seu<strong>le</strong>ment qu’ils possè<strong>de</strong>nt c<strong>et</strong>te propriété en un pointréel <strong>de</strong> position généra<strong>le</strong> 3 . Ce phénomène trouve son origine dans <strong>le</strong> faitque chaque groupe qui possè<strong>de</strong> la libre mobilité dans l’infinitésimal enun point réel <strong>de</strong> position généra<strong>le</strong> possè<strong>de</strong> aussi c<strong>et</strong>te propriété en tous<strong>le</strong>s points réels qui se trouvent dans un certain voisinage du point enquestion.D’un autre côté, <strong>le</strong>s groupes que l’on a trouvés montrent que dans<strong>le</strong> plan, la libre mobilité dans l’infinitésimal ne suffit encore pas pourcaractériser <strong>le</strong> groupe <strong>de</strong>s mouvements euclidiens <strong>et</strong> <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux groupes <strong>de</strong>1 Trois générateurs infinitésimaux sont : p+x 2 p+xyq, q+xyp+y 2 q <strong>et</strong> yp−xp ;ils annu<strong>le</strong>nt en eff<strong>et</strong> l’équation <strong>de</strong> la conique en restriction à la conique.2 Trois générateurs infinitésimaux sont : −p + x 2 p + xyq, −q + xyp + y 2 q <strong>et</strong>yp − xp.3 De toute façon, par analyticité, dès qu’el<strong>le</strong> est satisfaite en un seul point, lalibre mobilité dans l’infinitésimal est alors satisfaite en tous <strong>le</strong>s points qui n’appartiennentpas à un certain sous-ensemb<strong>le</strong> analytique fermé <strong>de</strong> codimension 1, doncnotamment en tous <strong>le</strong>s points d’un certain ouvert <strong>de</strong>nse.


264 Division V. Chapitre 22. § 97.mouvements non-euclidiens, car en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> ces trois groupes, chaquegroupe <strong>de</strong> la forme 4 :p, q, yp − xq + c (xp + yq) (c ≷0)possè<strong>de</strong> effectivement encore la libre mobilité dans l’infinitésimal entout point réel qui n’est pas infiniment éloigné. Si l’on veut exclure cesgroupes, afin <strong>de</strong> ne conserver que <strong>le</strong>s mouvements euclidiens <strong>et</strong> noneuclidiens,on doit donc établir un axiome spécial. Cependant, c<strong>et</strong>te observationne coïnci<strong>de</strong> pas avec la remarque <strong>de</strong> Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz,d’après laquel<strong>le</strong> dans <strong>le</strong> plan, <strong>le</strong> groupe euclidien <strong>et</strong> <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux groupesnon-euclidiens ne sont pas <strong>le</strong>s seuls relativement auxquels <strong>de</strong>ux pointsont un <strong>et</strong> un seul invariant, tandis qu’un nombre <strong>de</strong> points supérieur à<strong>de</strong>ux n’a pas d’invariant essentiel.Nous voulons maintenant compléter <strong>le</strong>s résultats acquis en recherchantaussi tous <strong>le</strong>s groupes réels continus projectifs du plan qui possè<strong>de</strong>ntla libre mobilité dans l’infinitésimal en un point réel <strong>de</strong> positiongénéra<strong>le</strong>. La connaissance <strong>de</strong> ces groupes nous sera uti<strong>le</strong> plus tard,lorsque nous envisagerons l’espace trois fois étendu.Exactement comme plus haut, nous vérifions tout d’abord quechaque groupe projectif du plan qui satisfait nos exigences est transitif<strong>et</strong> possè<strong>de</strong> trois paramètres. D’après notre énumération <strong>de</strong>s groupesprojectifs du plan à trois paramètres (voir p. 106), on obtient à nouveauque chacun <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong>mandés laisse invariant soit une conique, soitun point.Si une conique reste invariante, alors son équation doit être réel<strong>le</strong>,car sinon la conique imaginaire conjuguée resterait aussi invariante <strong>et</strong>notre groupe ne pourrait pas alors être à trois paramètres.Et maintenant, puisque chaque conique dont l’équation est réel<strong>le</strong> peutêtre ramenée, via une transformation projective réel<strong>le</strong>, à l’une <strong>de</strong>s <strong>de</strong>uxformes : x 2 + y 2 ± 1 = 0, ce cas-là est déjà réglé.Si d’un autre côté un point reste invariant, alors ce point ne peutpas être réel 5 , car sinon, si un point réel en position généra<strong>le</strong> était fixé,chaque élément linéaire passant par ce point ne pourrait pas tourner autour<strong>de</strong> lui, <strong>et</strong> donc il n’y aurait aucun point réel <strong>de</strong> position généra<strong>le</strong>4 Les courbes intégra<strong>le</strong>s du troisième champ sont <strong>de</strong>s spira<strong>le</strong>s s’enroulant autour<strong>de</strong> l’origine, qui dégénèrent en cerc<strong>le</strong>s pour c = 0.5 Les transformations sont projectives, donc la droite passant par <strong>le</strong> point universel<strong>le</strong>mentfixe <strong>et</strong> <strong>le</strong> point P qu’on fixe en position généra<strong>le</strong> serait stabilisée, ce quicontredirait la libre mobilité dans l’infinitésimal en P .


Première solution au problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. 265en <strong>le</strong>quel il possè<strong>de</strong>rait la libre mobilité dans l’infinitésimal. Par conséquent,<strong>le</strong> point invariant est imaginaire <strong>et</strong> <strong>le</strong> point imaginaire conjuguéreste simultanément au repos, ainsi que la droite <strong>de</strong> liaison réel<strong>le</strong> passantpar <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux.Si nous déplaçons alors <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux points appropriés grâce à un<strong>et</strong>ransformation réel<strong>le</strong> projective en <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux points du cerc<strong>le</strong> notregroupe se transforme en un sous-groupe à trois paramètres du groupesuivant à quatre paramètres :(1) p, q, yp − xq, xp + yq,<strong>et</strong> nous <strong>de</strong>vons par conséquent seu<strong>le</strong>ment rechercher encore tous <strong>le</strong>ssous-groupes à trois paramètres <strong>de</strong> ce groupe, qui satisfont notre exigence.Si un sous-groupe réel G <strong>de</strong> (1) à trois paramètres possè<strong>de</strong> la libremobilité dans l’infinitésimal en un point x 0 , y 0 <strong>de</strong> position généra<strong>le</strong>,alors, quand on fixe ce point, <strong>le</strong>s ∞ 1 éléments linéaires : dx : dy quipassent par ce point sont transformés par l’action d’un groupe à un paramètre.Si nous nous imaginons maintenant que <strong>le</strong> point : x 0 , y 0 estdéplacé sur l’origine <strong>de</strong>s coordonnées grâce à une transformation réel<strong>le</strong>du groupe à <strong>de</strong>ux paramètres : p, q, alors <strong>le</strong> groupe G reçoit une nouvel<strong>le</strong>forme dans laquel<strong>le</strong> il y a en tout cas une transformation infinitésima<strong>le</strong><strong>de</strong> la forme :(2) yp − xq + c (xp + yq),car : xp + yq laisse généra<strong>le</strong>ment au repos chaque élément linéaire passantpar l’origine <strong>de</strong>s coordonnées. De plus, comme groupe transitif, Gcontient encore <strong>de</strong>ux transformations infinitésima<strong>le</strong>s <strong>de</strong> la forme 6 :p + α (xp + yq),q + β (xp + yq).En calculant maintenant <strong>le</strong>s croch<strong>et</strong>s avec (2), on obtient :−q + c p, p + c q,<strong>et</strong> comme c est réel, <strong>et</strong> que G ne peut contenir que trois transformationsinfinitésima<strong>le</strong>s indépendantes, on en déduit que α <strong>et</strong> β s’annu<strong>le</strong>nt tous<strong>de</strong>ux, <strong>et</strong> que par conséquent G possè<strong>de</strong> la forme :p, q, yp − xq + c (xp + yq).Ainsi, la proposition suivante est vali<strong>de</strong>.6 — après combinaison linéaire via (2) —


266 Division V. Chapitre 22. § 98.Proposition 1. Si un groupe projectif réel continu du plan possè<strong>de</strong>la libre mobilité dans l’infinitésimal en un point réel <strong>de</strong> position généra<strong>le</strong>,alors il est à trois paramètres <strong>et</strong> il est semblab<strong>le</strong>, via une transformationprojective 7 réel<strong>le</strong> du plan, à l’un <strong>de</strong>s groupes projectifs indiquésdans <strong>le</strong> Théorème 38.Parmi <strong>le</strong>s groupes projectifs rassemblés dans <strong>le</strong> Théorème 38, ily en a <strong>de</strong>ux qui ne possè<strong>de</strong>nt pas la libre mobilité dans l’infinitésima<strong>le</strong>n certains points réels, à savoir premièrement <strong>le</strong> groupe <strong>de</strong> la conique :x 2 +y 2 −1 = 0, <strong>et</strong> <strong>de</strong>uxièmement <strong>le</strong> groupe : p, q, yp−xq+c (xp+yq).Pour <strong>le</strong> premier, la libre mobilité dans l’infinitésimal n’a pas lieu en tous<strong>le</strong>s points réels <strong>de</strong> la conique <strong>et</strong> aussi en tous <strong>le</strong>s points <strong>de</strong> la coniquequi ne sont par réels 8 , <strong>et</strong> pour <strong>le</strong> <strong>de</strong>uxième, en tous <strong>le</strong>s points réels <strong>de</strong> ladroite à l’infini. Au contraire, il n’y a aucun point exceptionnel tel 9Théorème 39. Si un groupe projectif réel continu du plan possè<strong>de</strong>sans exception la libre mobilité dans l’infinitésimal en tous <strong>le</strong>s pointsréels, alors il est transitif à trois paramètres <strong>et</strong> il peut être transformé,via une transformation réel<strong>le</strong> projective, en <strong>le</strong> groupe projectif réel àtrois paramètres <strong>de</strong> la conique : x 2 + y 2 + 1 = 0.§ 98.Les recherches <strong>de</strong>s précé<strong>de</strong>nts paragraphes doivent maintenant êtreaccomplies pour l’espace ordinaire trois fois étendu. Nous définissonsdonc tout d’abord ce que nous entendons ici par « libre mobilité dansl’infinitésimal ».Définition. Un groupe réel continu <strong>de</strong> l’espace trois fois étendupossè<strong>de</strong> la libre mobilité dans l’infinitésimal en un point réel P lorsque<strong>le</strong>s conditions suivantes sont remplies : Si l’on fixe <strong>le</strong> point P <strong>et</strong> unélément linéaire quelconque passant par ce point, alors un mouvementcontinu doit toujours être possib<strong>le</strong> ; si au contraire on fixe encore, outreP <strong>et</strong> c<strong>et</strong> élément linéaire-là, un élément <strong>de</strong> surface quelconque, quipasse par <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux, alors aucun mouvement continu ne doit être encorepossib<strong>le</strong>.7 Comparé au Théorème 38, tout est projectif, maintenant.8 En eff<strong>et</strong>, puisque la conique (<strong>le</strong> cerc<strong>le</strong>) est stabilisé, <strong>le</strong>s directions tangentes sontel<strong>le</strong>s aussi fixées, dans <strong>le</strong> domaine réel aussi bien que dans <strong>le</strong> domaine comp<strong>le</strong>xe.9 En eff<strong>et</strong>, ce n’est qu’en <strong>le</strong>s points, tous purement comp<strong>le</strong>xes, <strong>de</strong> la coniquequ’on n’a pas libre mobilité dans l’infinitésimal.


Première solution au problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. 267Nous cherchons maintenant tous <strong>le</strong>s groupes réels continus <strong>de</strong> R 3qui possè<strong>de</strong>nt la libre mobilité dans l’infinitésimal en un point réel <strong>de</strong>position généra<strong>le</strong>.Soit G un groupe ayant la qualité requise <strong>et</strong> soit P <strong>le</strong> point réel<strong>de</strong> position généra<strong>le</strong> en <strong>le</strong>quel G possè<strong>de</strong> la libre mobilité dans l’infinitésimal.Si on fixe ensuite P <strong>et</strong> en outre aussi un élément linéairequelconque passant par lui, alors chaque élément <strong>de</strong> surface passant par<strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux doit encore pouvoir tourner continûment autour <strong>de</strong> l’élémentlinéaire en question, sinon aucun mouvement continu ne serait encorepossib<strong>le</strong> après fixation <strong>de</strong> l’élément linéaire concerné, en contradictionavec notre hypothèse.Se laisse déduire <strong>de</strong> là que G est transitif. En eff<strong>et</strong>, si ∞ 1 surfacesréel<strong>le</strong>s : ϕ(x 1 , x 2 , x 3 ) = const. restaient invariantes, alors P en communavec <strong>le</strong> plan tangent à la surface : ϕ = const. passant par lui détermineraitun élément <strong>de</strong> surface qui ne pourrait tourner autour d’aucunélément linéaire contenu en lui. D’un autre côté, si ∞ 2 courbes réel<strong>le</strong>srestaient invariantes, alors on pourrait <strong>le</strong>s arranger d’une infinité <strong>de</strong> manièresen une famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ 1 surfaces invariantes, <strong>et</strong> l’on reviendrait doncà la situation dont on a démontré à l’instant qu’el<strong>le</strong> est impossib<strong>le</strong>.À travers notre point P passent ∞ 2 éléments linéaires : dx 1 : dx 2 :dx 3 , qui forment une variété plane <strong>de</strong>ux fois étendue. Si l’on fixe P ,alors c<strong>et</strong>te variété est transformée par un groupe réel projectif g qui estmanifestement constitué <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte qu’après fixation d’un élémentlinéaire réel quelconque, chaque élément <strong>de</strong> surface <strong>le</strong> contenant peuttourner autour <strong>de</strong> l’élément linéaire, tandis qu’absolument aucun mouvementcontinu n’est encore possib<strong>le</strong>, aussitôt qu’on fixe un élémentlinéaire réel quelconque <strong>et</strong> un élément <strong>de</strong> surface quelconque <strong>le</strong> contenant1 . Mais en rapportant maintenant <strong>le</strong>s ∞ 2 éléments linéaires passantpar P <strong>de</strong> manière projective aux points réels d’un plan, <strong>le</strong> groupe gse transforme alors en un groupe réel projectif g ′ <strong>de</strong> ce plan qui estisomorphe-holoédrique à g, <strong>et</strong> comme <strong>le</strong>s éléments <strong>de</strong> surface réels passantpar P correspon<strong>de</strong>nt en même temps aux éléments linéaires réels<strong>de</strong> ce plan, nous reconnaissons alors immédiatement que <strong>le</strong> groupe g ′possè<strong>de</strong> la libre mobilité dans l’infinitésimal sans exception en tous<strong>le</strong>s points <strong>de</strong> ce plan. D’après <strong>le</strong> Théorème 39, il décou<strong>le</strong> <strong>de</strong> là queg ′ est transitif à trois paramètres <strong>et</strong> qu’il peut être transformé, via un<strong>et</strong>ransformation réel<strong>le</strong> projective du plan, en <strong>le</strong> groupe <strong>de</strong> la conique :x 2 + y 2 + 1 = 0. Par conséquent <strong>le</strong> groupe g ′ est aussi transitif à trois1 Fixer ou bien seu<strong>le</strong>ment un élément-plan ou bien seu<strong>le</strong>ment un élément-lignelaisse bien entendu encore <strong>de</strong>s <strong>de</strong>grés <strong>de</strong> liberté.


268 Division V. Chapitre 22. § 98.paramètres <strong>et</strong> il laisse invariante une conique imaginaire d’élémentslinéaires dont nous pouvons nous imaginer l’équation rapportée à laforme :(3) dx 2 1 + dx 2 2 + dx 2 3 = 0,via une transformation linéaire homogène en dx 1 , dx 2 , dx 3 .En appliquant cela au groupe G, on obtient avant tout que G està six paramètres. Si en eff<strong>et</strong> l’on fixe <strong>le</strong> point P , ainsi qu’un élémentlinéaire réel passant par P <strong>et</strong> un élément <strong>de</strong> surface réel quelconque qui<strong>le</strong>s contient tous <strong>de</strong>ux, alors <strong>le</strong>s paramètres <strong>de</strong> G seront ainsi soumis àexactement 3+2+1 = 6 conditions, ce qui décou<strong>le</strong> <strong>de</strong> la transitivité <strong>de</strong>G <strong>et</strong> <strong>de</strong> la propriété <strong>de</strong> g qu’on a décrite plus haut. Mais alors, commed’après <strong>le</strong>s hypothèses qu’on a justement posées, plus aucun mouvementcontinu n’est encore possib<strong>le</strong>, <strong>le</strong> nombre <strong>de</strong> ces paramètres doitêtre précisément égal à six.En outre, il est clair qu’après fixation <strong>de</strong> P , <strong>le</strong> groupe transitif àsix paramètres G transforme <strong>le</strong>s ∞ 2 éléments linéaires réels par uneaction à trois paramètres, <strong>et</strong> pour préciser, <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que reste invarianteune conique imaginaire du second <strong>de</strong>gré constituée d’élémentslinéaires. Si donc nous nous imaginons P transféré sur l’origine <strong>de</strong>scoordonnées via une transformation ponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong>, <strong>et</strong> si ensuite onproduit une transformation linéaire homogène réel<strong>le</strong> en x 1 , x 2 , x 3 pourque la conique d’éléments linéaires rattachée à P soit représentée parl’équation (3), alors G reçoit une nouvel<strong>le</strong> forme tel<strong>le</strong> que dans <strong>le</strong> voisinage<strong>de</strong> l’origine <strong>de</strong>s coordonnées, il contient six transformations infinitésima<strong>le</strong>sindépendantes <strong>de</strong> la forme :p 1 + · · · , p 2 + · · · , p 3 + · · · ,x µ p ν − x ν p µ + α µν (x 1 p 1 + x 2 p 2 + x 3 p 3 ) + · · ·(µ, ν = 1,2, 3; µ < ν).Comme G est à six paramètres, <strong>le</strong>s constantes réel<strong>le</strong>s α µν doivent icitoutes s’annu<strong>le</strong>r ensemb<strong>le</strong>, comme on s’en convainc aisément en calculant<strong>le</strong>s croch<strong>et</strong>s.Le groupe G appartient donc aux groupes réels que nous avonsdéterminés aux pages 385 sq. ; comme il est à six paramètres, nous obtenons<strong>le</strong> théorème suivant.Théorème 40. Si un groupe réel continu <strong>de</strong> l’espace trois foisétendu possè<strong>de</strong> la libre mobilité dans l’infinitésimal en un point <strong>de</strong> positiongénéra<strong>le</strong>, alors il est transitif à six paramètres <strong>et</strong> il est équiva<strong>le</strong>nt,via une transformation ponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong> <strong>de</strong> c<strong>et</strong> espace, soit au groupe


Première solution au problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. 269<strong>de</strong>s mouvements euclidiens 2 , soit à l’un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux groupes <strong>de</strong> mouvementsnon-euclidiens <strong>de</strong> c<strong>et</strong> espace, <strong>et</strong> par conséquent dans <strong>le</strong> <strong>de</strong>uxièmecas ou bien au groupe projectif réel continu à six paramètres par <strong>le</strong>quella surface imaginaire 3 : x 2 1 + x2 2 + x2 3 + 1 = 0 reste invariante, oubien au groupe projectif réel continu <strong>de</strong> la surface réel<strong>le</strong> non réglée :x 2 1 + x 2 2 + x 2 3 − 1 = 0.Nous voyons ainsi que dans l’espace trois fois étendu, la libre mobilitédans l’infinitésimal suffit parfaitement pour caractériser <strong>le</strong>s mouvementseuclidiens <strong>et</strong> non-euclidiens, ce qui offre un nouvel exemp<strong>le</strong>du fait que l’espace trois fois étendu se distingue essentiel<strong>le</strong>ment <strong>de</strong>l’espace <strong>de</strong>ux fois étendu.Nous pouvons maintenant indiquer aussi immédiatement tous <strong>le</strong>sgroupes projectifs réels continus <strong>de</strong> l’espace ordinaire, qui possè<strong>de</strong>nt lalibre mobilité dans l’infinitésimal en un point <strong>de</strong> position généra<strong>le</strong>.Chaque groupe projectif G <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te espèce est en eff<strong>et</strong> semblab<strong>le</strong>,via une transformation ponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong>, à l’un <strong>de</strong>s trois groupes duthéorème démontré à l’instant. Mais d’après <strong>le</strong> Théorème 19, p. 292,chacun <strong>de</strong> ces groupes peut être transformé à nouveau en un groupeprojectif seu<strong>le</strong>ment au moyen d’une transformation projective, donc onobtient que la transformation ponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong> par laquel<strong>le</strong> <strong>le</strong> groupe Gest semblab<strong>le</strong> à l’un <strong>de</strong> nos trois groupes, est projective. Enfin, si noustenons encore compte du fait que l’un <strong>de</strong>s groupes du Théorème 40possè<strong>de</strong> la libre mobilité dans l’infinitésimal en chaque point réel <strong>de</strong>l’espace sans exception, tandis que <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux autres groupes ne possè<strong>de</strong>ntc<strong>et</strong>te propriété que dans une portion <strong>de</strong> l’espace, nous pouvons énoncernotre résultat <strong>de</strong> la manière suivante :Théorème 41. Si un groupe projectif réel continu <strong>de</strong> l’espace ordinair<strong>et</strong>rois fois étendu possè<strong>de</strong> la libre mobilité dans l’infinitésimal entous <strong>le</strong>s points réels <strong>de</strong> c<strong>et</strong> espace sans exception, alors ce groupe esttransitif à six paramètres <strong>et</strong> il est constitué <strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>s transformationsprojectives réel<strong>le</strong>s par l’action <strong>de</strong>squel<strong>le</strong>s reste invariante une surfaceimaginaire non-dégénérée du second <strong>de</strong>gré qui est représentée par uneéquation réel<strong>le</strong>.2 Six générateurs sont : p 1 , p 2 , p 3 <strong>et</strong> x 2 p 1 − x 1 p 2 , x 3 p 1 − x 1 p 3 , x 3 p 2 − x 2 p 3 .3 Six générateurs dans l’un <strong>et</strong> l’autre cas sont : p 1 , p 2 , p 3 <strong>et</strong> ±p 1 + x 1 (x 1 p 1 +x 2 p 2 + x 3 p 3 ), ±p 2 + x 2 (x 1 p 1 + x 2 p 2 + x 3 p 3 ), ±p 3 + x 3 (x 1 p 1 + x 2 p 2 + x 3 p 3 ).


270 Division V. Chapitre 22. § 99.Proposition 2. Si un groupe projectif réel continu <strong>de</strong> l’espace ordinair<strong>et</strong>rois fois étendu ne possè<strong>de</strong> pas la libre mobilité dans l’infinitésima<strong>le</strong>n tous <strong>le</strong>s points réels <strong>de</strong> c<strong>et</strong> espace, mais la possè<strong>de</strong> seu<strong>le</strong>menten <strong>le</strong>s points réels d’une certaine région, alors ce groupe est transitif àsix paramètres, <strong>et</strong> pour préciser, il est semblab<strong>le</strong>, via une transformationprojective réel<strong>le</strong>, soit au groupe projectif réel continu d’une surfaceréel<strong>le</strong> du second <strong>de</strong>gré non réglée, soit au groupe <strong>de</strong>s mouvements euclidiens.§ 99.Avant que nous passions à la généralisation <strong>de</strong>s énoncés du précé<strong>de</strong>ntparagraphe à l’espace ayant nombre quelconque <strong>de</strong> dimensions,nous <strong>de</strong>vons en quelques mots clarifier certaines manières <strong>de</strong> s’exprimer,dont nous ferons usage (cf.aussi la Remarque p. 338).Par chaque point d’un espace n fois étendu x 1 . . .x n passent ∞ n−1éléments linéaires : dx 1 : · · · : dx n qui forment une variété projective(n − 1)-fois étendue. Maintenant, dans l’espace ordinaire troisfois étendu, nous avons qualifié par <strong>le</strong> nom : « Élément <strong>de</strong> surface »chaque touffe unie [ebene Büschel] <strong>de</strong> ∞ 1 tels éléments linéaires, <strong>et</strong>dans R n , nous voulons plutôt dire pour cela : Élément d’une variétéà <strong>de</strong>ux dimensions, ou plus brièvement : M 2 -élément. Pareil<strong>le</strong>ment,chaque botte unie [ebene Bün<strong>de</strong>l] <strong>de</strong> ∞ 2 éléments linéaires <strong>de</strong>vra êtredésignée comme Élément d’une variété à trois dimensions, ou plus brièvementcomme M 3 -élément, <strong>et</strong> ainsi <strong>de</strong> suite. Enfin, nous voulons nousréserver <strong>le</strong> droit d’employer aussi l’appellation : M 1 -élément pour <strong>le</strong>séléments linéaires.À présent nous pouvons définir ce que nous entendons par libremobilité dans l’infinitésimal dans R n .Définition. Un groupe réel continu <strong>de</strong> transformations ponctuel<strong>le</strong>s<strong>de</strong> R n possè<strong>de</strong> la libre mobilité dans l’infinitésimal en un point réel Plorsque <strong>le</strong>s conditions suivantes sont remplies : Si l’on fixe <strong>le</strong> pointP , puis un M 1 -élément réel quelconque passant par lui, puis un M 2 -élément réel quelconque passant par <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux, puis un M 3 -élément réelpassant par <strong>le</strong>s trois, <strong>et</strong>c. , <strong>et</strong> tout <strong>de</strong> suite enfin un M q -élément réel quelconque,qui passe par tous <strong>le</strong>s éléments antérieurs, alors un mouvementcontinu doit être possib<strong>le</strong> aussi longtemps <strong>et</strong> seu<strong>le</strong>ment aussi longtempsque q < n − 1.Nous sommes tout près <strong>de</strong> présumer que <strong>le</strong>s énoncés que nousavons trouvés dans <strong>le</strong> § 98 pour l’espace à trois dimensions se laissent


Première solution au problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. 271transférer à chaque espace à n > 3 dimensions. En d’autres termes,nous sommes sur <strong>le</strong> point <strong>de</strong> présumer que <strong>le</strong>s énoncés suivants sontvali<strong>de</strong>s :Théorème 42. Si un groupe réel continu <strong>de</strong> R n (n 3) possè<strong>de</strong> lalibre mobilité dans l’infinitésimal en un point réel <strong>de</strong> position généra<strong>le</strong>,alors il est transitif à 1 n(n + 1) paramètres <strong>et</strong> il est semblab<strong>le</strong>, via une2transformation ponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong> <strong>de</strong> R n , soit au groupe <strong>de</strong>s mouvementseuclidiens, soit à l’un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux groupes <strong>de</strong> mouvements non-euclidiens,donc dans <strong>le</strong> <strong>de</strong>uxième cas ou bien au groupe projectif réel continu <strong>de</strong>la variété :x 2 1 + x2 2 + · · · + x2 n + 1 = 0ou bien au groupe projectif réel continu <strong>de</strong> la variété :x 2 1 + x 2 2 + · · · + x 2 n − 1 = 0.Théorème 43. Si un groupe projectif réel continu <strong>de</strong> R n (n 3)possè<strong>de</strong> la libre mobilité dans l’infnitésimal en tous <strong>le</strong>s points réels <strong>de</strong>c<strong>et</strong> espace sans exception, alors ce groupe est transitif à 1 n(n + 1)2paramètres <strong>et</strong> il est constitué <strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>s transformations projectivesréel<strong>le</strong>s par l’action <strong>de</strong>squel<strong>le</strong>s reste invariante une surface imaginairenon-dégénérée du second <strong>de</strong>gré qui est représentée par une équationréel<strong>le</strong>.Proposition 3. Si un groupe projectif réel continu <strong>de</strong> R n (n 3)ne possè<strong>de</strong> pas la libre mobilité dans l’infinitésimal en tous <strong>le</strong>s pointsréels <strong>de</strong> c<strong>et</strong> espace, mais la possè<strong>de</strong> seu<strong>le</strong>ment en <strong>le</strong>s points d’une certainerégion, alors ce groupe est transitif à 1 n(n + 1) paramètres, <strong>et</strong>2pour préciser, il est semblab<strong>le</strong>, via une transformation projective réel<strong>le</strong>,soit au groupe d’une variété réel<strong>le</strong> du second <strong>de</strong>gré non réglée, soit augroupe <strong>de</strong>s mouvements euclidiens <strong>de</strong> c<strong>et</strong> espace.Nous allons maintenant montrer que <strong>le</strong>s choses se comportent effectivementainsi. À c<strong>et</strong>te fin, nous avons évi<strong>de</strong>mment seu<strong>le</strong>ment besoin<strong>de</strong> montrer qu’en adm<strong>et</strong>tant la validité <strong>de</strong> nos énoncés dans un espaceà n 3 dimensions, <strong>le</strong>ur justesse en décou<strong>le</strong> toujours dans l’espace àn + 1 dimensions ; car puisque nos énoncés sont déjà reconnus vraispour n = 3, <strong>le</strong>ur justesse sera alors démontrée pour tout n 3.Nous posons donc à l’avance que <strong>le</strong>s Théorème 42 <strong>et</strong> 43 ainsi quela Proposition 3 sont déjà démontrés pour l’espace à n 3 dimensions.Sous ces hypothèses nous cherchons d’abord tous <strong>le</strong>s groupes


272 Division V. Chapitre 22. § 99.réels continus <strong>de</strong> R n+1 qui possè<strong>de</strong>nt la libre mobilité dans l’infinitésima<strong>le</strong>n un point réel quelconque <strong>de</strong> position généra<strong>le</strong>.Soit G un groupe réel continu <strong>de</strong> R n+1 qui possè<strong>de</strong> la libre mobilitédans l’infinitésimal en un point réel P <strong>de</strong> position généra<strong>le</strong>. Siensuite on fixe <strong>le</strong> point P , puis un M 1 -élément réel quelconque passantpar lui, puis un M 2 -élément réel quelconque passant par <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux,<strong>et</strong>c. , <strong>et</strong> fina<strong>le</strong>ment un M n−1 -élément réel quelconque passant par tous<strong>le</strong>s éléments précé<strong>de</strong>nts, alors chaque M n -élément réel qui passe par <strong>le</strong>M n−1 -élément fixé peut encore tourner continûment autour <strong>de</strong> c<strong>et</strong> élément; car s’il ne <strong>le</strong> pouvait pas, aucun mouvement continu ne seraitencore possib<strong>le</strong> après fixation <strong>de</strong>s n − 1 élément sus-nommés.Il décou<strong>le</strong> <strong>de</strong> là que G est transitif. Si en eff<strong>et</strong> il était intransitif,alors R n+1 se décomposerait d’une manière, ou bien même d’une infinité<strong>de</strong> manières, en ∞ 1 variétés réel<strong>le</strong>s invariantes n fois étendues,donc il passerait par <strong>le</strong> point P , qui est en position généra<strong>le</strong>, au minimumun M n -élément réel qui resterait invariant en même temps que P ,en conséquence <strong>de</strong> quoi il ne pourrait pas se tourner continûment autourd’aucun M n−1 -élément réel contenu en lui.Par ail<strong>le</strong>urs, souvenons-nous à ce suj<strong>et</strong> que <strong>le</strong>s ∞ n M 1 -élémentsréels passant par P forment une variété lisse n fois étendue, qui — <strong>le</strong>point P étant fixé — est transformée par l’action d’un groupe projectifréel g. Imaginons-nous <strong>le</strong>s M 1 -éléments <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te variété rapportés projectivementaux points réels d’un espace lisse n fois étendu R n ′ ; alorschaque M 1 -élément passant par P se transforme en un point <strong>de</strong> R n ′ ; àchaque M 2 -élément passant par P correspond clairement <strong>et</strong> <strong>de</strong> manièreréversib<strong>le</strong> un M 1-élément ′ réel <strong>de</strong> R n ′ ; en général, à chaque M q -élémentréel passant par P correspond clairement <strong>et</strong> <strong>de</strong> manière réversib<strong>le</strong> unM q−1 ′ -élément <strong>de</strong> R′ n ; <strong>et</strong> enfin, au groupe g correspond un groupe projectifréel g ′ <strong>de</strong> R n ′ qui lui est isomorphe-holoédrique. Si maintenantnous fixons dans R n ′ un point, puis un M 1 ′ -élément réel quelconque passantpar ce point, puis un M 2-élément ′ réel quelconque passant par <strong>le</strong>s<strong>de</strong>ux, <strong>et</strong>c. , <strong>et</strong> fina<strong>le</strong>ment un M n−2-élément ′ réel quelconque qui passepar tous <strong>le</strong>s éléments précé<strong>de</strong>nts, alors chaque M n−1 ′ -élément réel quipasse par <strong>le</strong> point <strong>et</strong> par tous ces éléments doit pouvoir se tourner encoreautour du M n−2 ′ -élément ; sinon, l’exigence <strong>de</strong> libre mobilité dansl’infinitésimal au point P ne serait pas satisfaite par notre groupe G. Parconséquent, <strong>le</strong> groupe projectif réel g ′ <strong>de</strong> R n ′ possè<strong>de</strong> la libre mobilitédans l’infinitésimal sans exception en chaque point réel <strong>de</strong> R n ′ .


Première solution au problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. 273Mais puisque d’après notre hypothèse, <strong>le</strong> Théorème 43 est vali<strong>de</strong>dans l’espace n fois étendu R n ′ , <strong>le</strong> groupe g′ est alors à 1 n(n + 1) paramètres<strong>et</strong> peut être rapporté, via une transformation projective réel<strong>le</strong>2<strong>de</strong> R n, ′ à une forme tel<strong>le</strong> qu’il laisse invariante la variété imaginaire dusecond <strong>de</strong>gré :x ′ 12 + x ′ 22 + · · · + x ′ n2 + 1 = 0.Par conséquent, <strong>le</strong> groupe g est aussi à 1 n(n + 1) paramètres <strong>et</strong> il peut2être rapporté, via une transformation linéaire homogène réel<strong>le</strong> <strong>de</strong>s différentiel<strong>le</strong>s: dx 1 . . .dx n+1 , à une forme tel<strong>le</strong> qu’il laisse invariante lavariété imaginaire <strong>de</strong>s M 1 -éléments qui est représentée par l’équation :(4) dx 2 1 + · · · + dx2 n + dx2 n+1 = 0.Si nous revenons maintenant au groupe G, nous reconnaissonsqu’après fixation <strong>de</strong> P , <strong>le</strong>s ∞ n M 1 -éléments réels sont transformés <strong>de</strong>1n(n + 1) manières différentes par ce groupe, <strong>et</strong> pour préciser, <strong>de</strong> tel<strong>le</strong>2sorte qu’une certaine variété imaginaire du second <strong>de</strong>gré constituée <strong>de</strong>M 1 -éléments reste invariante. Si en particulier nous nous imaginons que<strong>le</strong> point P est transféré sur l’origine <strong>de</strong>s coordonnées par une transformationponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong>, nous pouvons toujours parvenir, grâce à un<strong>et</strong>ransformation linéaire homogène réel<strong>le</strong> en <strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s x 1 . . . x n+1 , àce que c<strong>et</strong>te variété imaginaire soit représentée par l’équation (4).Enfin, on doit encore remarquer que G est à 1 (n+1)(n+2) paramètres.Si nous fixons en eff<strong>et</strong> <strong>le</strong> point P , alors <strong>le</strong>s paramètres <strong>de</strong> G sont2soumis à n+1 conditions, puis, si nous fixons tous <strong>le</strong>s ∞ n M 1 -élémentsréels passant par P , <strong>le</strong>s paramètres <strong>de</strong> G sont soumis à 1 n(n+1) conditionssupplémentaires, car ces ∞ n M 1 -éléments se transforment, après2fixation <strong>de</strong> P , précisément <strong>de</strong> 1 n(n+1) manières différentes. Et maintenant,comme aussitôt que sont fixés P ainsi que tous <strong>le</strong>s M 1 -éléments2réels passant par lui, tous <strong>le</strong>s M 2 -, M 3 -, . . .M n -éléments réels passantpar P <strong>de</strong>meurent en même temps au repos, en conséquence <strong>de</strong> quoiplus aucun mouvement continu n’est encore possib<strong>le</strong>, alors <strong>le</strong> nombre<strong>de</strong> paramètres <strong>de</strong> G doit être simp<strong>le</strong>ment égal à :n + 1 + n(n+1)1 ·2= (n+1)(n+2)1 ·2.À présent, il est faci<strong>le</strong> <strong>de</strong> déterminer G.Si en eff<strong>et</strong> nous nous imaginons <strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s x 1 . . . x n+1 choisiescomme ci-<strong>de</strong>ssus, donc en particulier <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que P soit l’origine<strong>de</strong>s coordonnées, alors, dans <strong>le</strong> voisinage <strong>de</strong> l’origine <strong>de</strong>s coordonnées,


274 Division V. Chapitre 22. § 99.<strong>le</strong> groupe G contient visib<strong>le</strong>ment 1 n(n + 1) transformations infinitésima<strong>le</strong>sindépendantes <strong>de</strong> la forme2:∑n+1p 1 + · · · , · · · , p n+1 + · · · , x µ p ν − x ν p µ + α µν(µ, ν =1··· n+1; µ < ν),1x τ p τ + · · · ,où <strong>le</strong>s α µν sont <strong>de</strong>s constantes réel<strong>le</strong>s. Comme G a exactement 1 2 (n +1)(n+2) paramètres, on obtient <strong>de</strong> plus immédiatement en calculant <strong>le</strong>scroch<strong>et</strong>s que tous <strong>le</strong>s α µν s’annu<strong>le</strong>nt. Par conséquent, <strong>le</strong> groupe G appartientaux groupes réels que nous avons déterminés aux pages 385 sq.,<strong>et</strong> pour préciser, on obtient que G peut être transformé via une transformationponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong> <strong>de</strong> R n+1 , soit en <strong>le</strong> groupe <strong>de</strong>s mouvementseuclidiens <strong>de</strong> c<strong>et</strong> espace, soit en <strong>le</strong> groupe projectif réel continu <strong>de</strong> l’une<strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux variétés du second <strong>de</strong>gré :x 2 1 + · · · + x2 n+1 ± 1 = 0.Ainsi, on a démontré que, aussitôt que <strong>le</strong> Théorème 43 est valab<strong>le</strong>dans un espace <strong>de</strong> dimension n 3, <strong>le</strong> Théorème 42 est toujours vraidans un espace à n + 1 dimensions.Mais si <strong>le</strong> Théorème 42 vaut dans un espace à n + 1 dimensions,alors <strong>le</strong> Théorème 43 <strong>et</strong> la Proposition 3 va<strong>le</strong>nt en même temps dans c<strong>et</strong>espace.En eff<strong>et</strong>, chaque groupe projectif réel continu G <strong>de</strong> R n+1 , qui possè<strong>de</strong>la libre mobilité dans l’infinitésimal en un point réel <strong>de</strong> position généra<strong>le</strong>est semblab<strong>le</strong>, sous <strong>le</strong>s hypothèses qu’on a justement posées, viaune transformation ponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong>, soit au groupe <strong>de</strong>s mouvementseuclidiens <strong>de</strong> R n+1 , soit à l’un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux groupes <strong>de</strong> mouvements noneuclidiens<strong>de</strong> c<strong>et</strong> espace. Mais d’après <strong>le</strong> Théorème 19, p. 292, c<strong>et</strong>t<strong>et</strong>ransformation ponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong> est nécessairement projective, <strong>et</strong> parconséquent, nous parvenons tout simp<strong>le</strong>ment, avec <strong>le</strong>s hypothèses quenous avons posées, au Théorème 43 <strong>et</strong> à la Proposition 3.Avec cela, on a démontré que, aussitôt que <strong>le</strong>s Théorèmes 42 <strong>et</strong> 43<strong>et</strong> que la Proposition 3 va<strong>le</strong>nt dans un espace à n 3 dimensions, ilsont aussi vrais dans l’espace à n + 1 dimensions. Puisque nous <strong>le</strong>savons déjà démontrés dans l’espace ordinaire trois fois étendu, ils sontdonc vali<strong>de</strong>s en toute généralité.Si donc n 3, alors <strong>le</strong> groupe <strong>de</strong>s mouvements euclidiens <strong>et</strong> <strong>le</strong>s<strong>de</strong>ux groupes <strong>de</strong> mouvements non-euclidiens <strong>de</strong> R n sont complètement


Première solution au problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. 275caractérisés par l’exigence qu’il doivent avoir la libre mobilité dansl’infinitésimal en un point <strong>de</strong> position généra<strong>le</strong>.Mentionnons encore que <strong>le</strong>s développements qui précè<strong>de</strong>nt neva<strong>le</strong>nt pas seu<strong>le</strong>ment pour <strong>le</strong>s groupes réels dont <strong>le</strong>s transformationsfinies sont représentées par <strong>de</strong>s équations analytiques, mais aussi pour<strong>le</strong>s groupes dont <strong>le</strong>s équations finies sont non-analytiques, pourvu seu<strong>le</strong>mentque ces équations autorisent un certain nombre <strong>de</strong> différentiationspar rapport aux variab<strong>le</strong>s <strong>et</strong> par rapport aux paramètres (voir p. 365 <strong>et</strong>p. 366).§ 100.Sur <strong>le</strong> discours d’habilitation <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>.Les recherches sur la libre mobilité dans l’infinitésimal que nousvenons <strong>de</strong> conduire sont en relation avec certaines réf<strong>le</strong>xions que<strong>Riemann</strong> à indiquées sans son discours d’habilitation. Nous voulonsdonc généra<strong>le</strong>ment entrer plus avant dans <strong>le</strong> contenu <strong>de</strong> ce discours,d’autant plus qu’il a plusieurs points <strong>de</strong> contact avec toutes <strong>le</strong>s recherchesrécentes sur <strong>le</strong>s fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> la géométrie.<strong>Riemann</strong> n’est jamais faci<strong>le</strong> à lire, mais sa célèbre allocution « Sur<strong>le</strong>s hypothèses qui servent <strong>de</strong> fon<strong>de</strong>ment à la géométrie » présente <strong>de</strong>sdifficultés <strong>de</strong> compréhension d’un type tout à fait spécial. <strong>Riemann</strong> a dûprésenter sa soutenance <strong>de</strong>vant une assemblée qui ne consistait qu’enpartie <strong>de</strong> mathématiciens, <strong>et</strong> pour c<strong>et</strong>te raison, il s’est efforcé d’être <strong>le</strong>plus général possib<strong>le</strong>, afin d’être intelligib<strong>le</strong> ; mais <strong>de</strong> manière sousjacente,la n<strong>et</strong>t<strong>et</strong>é <strong>et</strong> la détermination <strong>de</strong> l’expression a subi <strong>de</strong>s dommagesen <strong>de</strong> très nombreux endroits, <strong>et</strong> la conséquence en est que maintenant,<strong>le</strong> mathématicien est justement assez souvent dans <strong>le</strong> doute quantà ce que <strong>Riemann</strong> a effectivement voulu dire.C<strong>et</strong>te insuffisance se fait particulièrement sensib<strong>le</strong> dans la partie<strong>de</strong> l’exposé où <strong>Riemann</strong> par<strong>le</strong> <strong>de</strong> la mobilité <strong>de</strong>s figures d’un espace nfois étendu ; <strong>Riemann</strong> s’ai<strong>de</strong> d’expressions qui certes peuvent semb<strong>le</strong>rcompréhensib<strong>le</strong>s à <strong>de</strong>s non-mathématiciens, mais dont <strong>le</strong> sens véridiquene peut qu’être <strong>de</strong>viné par <strong>le</strong> mathématicien.Malheureusement, à ce jour, personne n’a encore jusqu’à présentexaminé <strong>le</strong> contenu du discours <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> sous toutes ses fac<strong>et</strong>tesaussi précisément que nous l’avons effectué dans <strong>le</strong> Chapitre 21, dont<strong>le</strong> contenu est celui <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> helmholtzienne « Sur <strong>le</strong>s faits qui s<strong>et</strong>rouvent au fon<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> la géométrie ». Certes, on a rétabli la théorieriemanienne <strong>de</strong> la mesure <strong>de</strong> courbure d’un R n d’après <strong>le</strong>s indications<strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>, <strong>et</strong> on s’est convaincu que la longueur d’un élément


276 Division V. Chapitre 22. § 100.courbe peu véritab<strong>le</strong>ment, aussitôt que la mesure <strong>de</strong> courbure est partoutconstante, être rapportée à la forme indiquée par <strong>Riemann</strong>. Maisjustement, <strong>le</strong>s considérations <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> sur la mobilité <strong>de</strong>s figuressemb<strong>le</strong>nt avoir peu ou pas du tout attiré l’attention, bien que ces considérationssoient précisément d’une importance toute particulière pour laconception <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> au suj<strong>et</strong> <strong>de</strong> la question sur <strong>le</strong>s fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> lagéométrie. D’un autre côté, il y a aussi encore par ail<strong>le</strong>urs une série <strong>de</strong>passages dans <strong>le</strong> discours <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> dont un éclaircissement urgentest souhaitab<strong>le</strong> [dringend zu wünschen ist].Il serait très méritoire que quelqu’un se soumît à l’effort <strong>de</strong> suivrepas à pas l’enchaînement <strong>de</strong>s idées <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> <strong>et</strong> répondît, autant quepossib<strong>le</strong>, aux diverses questions qu’on peut alors s’imposer [die sich daaufdrängen]. Nous n’avons toutefois pas l’intention <strong>de</strong> réaliser cela, <strong>et</strong>nous nous contenterons <strong>de</strong> quelques indications, qui nous l’espérons,pourront contribuer à stimu<strong>le</strong>r un tel travail à fond <strong>de</strong>s pensées riemanniennes.Comme nous l’avons déjà mentionné auparavant, <strong>Riemann</strong> s’imagineen premier lieu que <strong>le</strong>s points <strong>de</strong> l’espace n fois étendu sont déterminéspar n coordonnées x 1 . . .x n . Nous avons dit à ce moment-là(voir p. 161), que <strong>Riemann</strong> a cherché à démontrer cela. Mais peut-êtreavons-nous fait ainsi du tort à <strong>Riemann</strong>.On peut aussi interpréter cela en disant que <strong>Riemann</strong> considéraitque la déterminabilité <strong>de</strong>s points par <strong>de</strong>s coordonnées est une chosequi va <strong>de</strong> soi. Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz semb<strong>le</strong> adm<strong>et</strong>tre que <strong>Riemann</strong> aétabli l’hypothèse en question en tant qu’axiome * .Afin <strong>de</strong> pouvoir effectuer <strong>de</strong>s déterminations <strong>de</strong> mesure à l’intérieurd’un espace n fois étendu, <strong>Riemann</strong> établit comme l’hypothèse laplus simp<strong>le</strong> que chaque ligne, donc chaque variété une fois étendue, estmesurab<strong>le</strong> au moyen <strong>de</strong> chaque autre ** . Pour une réalisation effective dumesurage [Messung], il est ensuite nécessaire <strong>de</strong> possé<strong>de</strong>r une expressionpour la longueur d’un élément courbe, donc une expression pourla longueur d’un morceau infiniment p<strong>et</strong>it <strong>de</strong> ligne entre <strong>de</strong>ux points infinimentvoisins x ν <strong>et</strong> x ν + dx ν . Il pose à l’avance que c<strong>et</strong>te longueurd’un élément courbe est une fonction homogène du premier <strong>de</strong>gré endx 1 . . .dx n , qui reste inchangée lorsque tous <strong>le</strong>s dx ν changent <strong>de</strong> signe,<strong>et</strong> qui en outre dépend encore <strong>de</strong> x 1 . . .x n .* voir Gött. Nachr. 1868, p. 198.**voir RIEMANN, ges. Werke, 1. Ausg., p. 258 sq.


Première solution au problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. 277Ce qui importe maintenant pour cela, c’est <strong>de</strong> déterminer plus précisémentla forme <strong>de</strong> la longueur d’un élément courbe. À c<strong>et</strong>te fin,<strong>Riemann</strong> adm<strong>et</strong> sans aucun mot <strong>de</strong> justification que <strong>de</strong>ux points quelconques<strong>de</strong> R n qui ne sont pas infiniment voisins ont aussi une distanc<strong>et</strong>out à fait déterminée l’un par rapport à l’autre, à savoir il pose àl’avance <strong>et</strong> sans plus <strong>de</strong> façons l’existence d’une fonction :Ω ( x 1 . . .x n ; x 0 1 . . .x 0 n),qui a la même va<strong>le</strong>ur pour tous <strong>le</strong>s points x 1 . . .x n qui « sont aussi lointainementdistants (g<strong>le</strong>ich weit abstehen) » du point x 0 1 . . .x0 n . On nevoit pas si <strong>Riemann</strong> a voulu faire une nouvel<strong>le</strong> hypothèse avec cela, ousi il a voulu signifier que l’existence d’une tel<strong>le</strong> fonction Ω décou<strong>le</strong> <strong>de</strong>l’existence d’une longueur d’élément courbe ayant la constitution indiquée.En tout cas, c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière possibilité n’est pas immédiatementclaire, car il est certain que l’existence d’une tel<strong>le</strong> fonction Ω décou<strong>le</strong><strong>de</strong> l’existence d’une longueur d’élément courbe seu<strong>le</strong>ment lorqu’entre<strong>de</strong>ux points, une ligne la plus courte possib<strong>le</strong> est en même temps déterminéeau moyen d’une tel<strong>le</strong> longueur d’élément courbe ; il <strong>de</strong>vrait doncêtre démontré d’abord que l’existence <strong>de</strong> tel<strong>le</strong>s lignes <strong>le</strong>s plus courtespossib<strong>le</strong>s, décou<strong>le</strong> <strong>de</strong>s hypothèses qui ont été faites auparavant sur lalongueur d’un élément courbe.On peut se convaincre directement que l’existence d’une longueur d’élémentcourbe :ω ( x 1 ...x n ; dx 1 ...dx n),qui est une fonction homogène quelconque du premier <strong>de</strong>gré par rapport àdx 1 ... dx n , ne perm<strong>et</strong> pas toujours d’en tirer l’existence d’une fonction distance:Ω ( x 1 ...x n ; y 1 ...y n)entre <strong>de</strong>ux points finiment éloignés l’un <strong>de</strong> l’autre.Soit en eff<strong>et</strong> Γ <strong>le</strong> plus grand groupe continu <strong>de</strong> transformations ponctuel<strong>le</strong>sréel<strong>le</strong>s <strong>de</strong> R n par <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s la longueur ω(x,dx) d’un élément courbereste invariante. Alors nous pouvons manifestement exprimer aussi l’existence<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te longueur d’un élément courbe en disant : <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux points infinimentvoisins x ν <strong>et</strong> x ν + dx ν ont l’invariant : ω(x,dx) relativement à Γ. De même,l’existence d’une fonction distance Ω(x,y) reviendrait à ce que <strong>de</strong>ux points x ν<strong>et</strong> y ν qui sont finiment éloignés l’un <strong>de</strong> l’autre ont l’invariant Ω(x,y) relativementau groupe Γ.Mais maintenant, <strong>de</strong>ux points infiniment voisins x ν <strong>et</strong> x ν + dx ν peuventtrès bien avoir un invariant <strong>de</strong> la forme ω(x,dx) relativement à un groupe, sans


278 Division V. Chapitre 22. § 100.que <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux points x ν <strong>et</strong> y ν aient un invariant. Cela est encore montré par <strong>le</strong>groupe (22) <strong>de</strong> R 3 mentionné à la page 242 :q, xq + r, x 2 q + 2xr, x 3 q + 3x 2 r, p, xp − zr.En eff<strong>et</strong>, par son action <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux points infiniment voisins x,y,z <strong>et</strong> x + dx,y + dy, z + dz ont l’invariant : dy − z dx, alors que <strong>de</strong>ux points finimentéloignés l’un <strong>de</strong> l’autre n’ont aucun invariant.On peut bien sûr encore penser que <strong>le</strong>s choses se passent tout autrementsi, avec <strong>Riemann</strong>, on ajoute l’hypothèse que la longueur ω(x,dx) d’un élémentcourbe ne modifie pas sa va<strong>le</strong>ur, lorsque tous <strong>le</strong>s dx ν changent <strong>de</strong> signe. Dansce cas, on ne peut rien déduire <strong>de</strong> l’exemp<strong>le</strong> donné à l’instant, car dans cescirconstances, l’invariant : dy − z dx ne satisfait pas l’exigence <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>.Nous voulons cependant ne pas donner suite aux questions suggérées par cela.Poursuivons notre rapport sur l’enchaînement <strong>de</strong>s idées <strong>de</strong><strong>Riemann</strong>.<strong>Riemann</strong> pose donc à l’avance qu’il y a une fonction :Ω ( )x 1 . . .x n ; x 0 1 . . .x 0 nqui a la même va<strong>le</strong>ur pour tous <strong>le</strong>s points qui sont aussi lointainementdistants <strong>de</strong> x 0 1 . . .x0 n . Comme cela semb<strong>le</strong> être <strong>le</strong> cas, <strong>le</strong> concept général<strong>de</strong> fonction distance dans une variété n fois étendue apparaît ici pour lapremière fois.Au suj<strong>et</strong> <strong>de</strong> la fonction Ω, <strong>Riemann</strong> suppose qu’en tant que fonction<strong>de</strong> x 1 . . .x n , dans un voisinage du système <strong>de</strong> va<strong>le</strong>urs : x 0 1 . . .x0 n ,el<strong>le</strong> croît <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s côtés, <strong>et</strong> par conséquent, el<strong>le</strong> a un minimum pour :x ν = x 0 ν ; il adm<strong>et</strong> <strong>de</strong> plus que ses quotients différentiels du premier <strong>et</strong>du <strong>de</strong>uxième ordre sont tous finis pour x ν = x 0 ν . Sous ces hypothèses, lapremière différentiel<strong>le</strong> <strong>de</strong> Ω doit s’annu<strong>le</strong>r pour x ν = x 0 ν <strong>et</strong> la secon<strong>de</strong> :d 2 Ω =∑1...nµ ν∂ 2 Ω∂x µ ∂x νdx µ dx νne doit <strong>de</strong>venir négative pour aucun système <strong>de</strong> va<strong>le</strong>urs : dx 1 . . .dx n ,lorsqu’on substitue : x ν = x 0 ν .<strong>Riemann</strong> se restreint à la considération du cas où la différentiel<strong>le</strong>d 2 Ω se transforme, pour x ν = x 0 ν, en une forme quadratique constammentpositive par rapport à dx 1 . . .dx n . Le carré <strong>de</strong> la longueur ds d’unélément courbe appartenant au point x 0 1 . . . x0 n ne peut alors se distinguer


Première solution au problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. 279<strong>de</strong> l’expression :∑1...nµ ν[ ∂ 2 Ω∂x µ ∂x ν]x=x 0 dx µ dx νque par un facteur constant dépendant <strong>de</strong> x 0 1 . . .x 0 n, <strong>et</strong> par conséquentla longueur d’un élément courbe en un point quelconque x 1 . . .x n estdéterminée par une équation <strong>de</strong> la forme :(5) ds 2 =∑1...nµ να µ ν (x 1 . . .x n ) dx µ dx ν ,où <strong>le</strong>s α µν sont <strong>de</strong>s fonctions réel<strong>le</strong>s dont <strong>le</strong> déterminant ne s’annu<strong>le</strong> pasi<strong>de</strong>ntiquement, <strong>et</strong> où <strong>le</strong> membre <strong>de</strong> droite est une fonction constammentpositive <strong>de</strong> dx 1 . . .dx n pour <strong>de</strong>s va<strong>le</strong>urs généra<strong>le</strong>s <strong>de</strong> x 1 . . .x n .Nous avons restitué la dérivation <strong>de</strong> l’expression <strong>de</strong> la longueurd’un élément courbe d’une manière détaillée, parce qu’el<strong>le</strong> est d’un intérêtparticulier, notamment via l’introduction d’une fonction distance.L’expression trouvée pour la longueur d’un élément courbe perm<strong>et</strong>d’utiliser <strong>le</strong> calcul <strong>de</strong>s variations, <strong>et</strong> on obtient qu’entre <strong>de</strong>ux points quise trouvent à l’intérieur d’une certaine région, une <strong>et</strong> une seu<strong>le</strong> ligne laplus courte est possib<strong>le</strong> <strong>et</strong> qu’el<strong>le</strong> se trouve entièrement à c<strong>et</strong>te région.De plus, il est clair que par chaque point x 1 . . .x n , il passe une uniqueligne la plus courte contenant un élément linéaire : dx 1 : . . . : dx n donnépassant par ce point.<strong>Riemann</strong> considère maintenant un M 2 -élément quelconque passantpar un point quelconque x 1 . . .x n , <strong>et</strong> il s’imagine <strong>le</strong>s lignes <strong>le</strong>s pluscourtes qui passent par chacun <strong>de</strong>s ∞ 1 éléments linéaires <strong>de</strong> ce M 2 -élément. La variété <strong>de</strong>ux fois étendue ainsi engendrée est uniquementdéterminée par <strong>le</strong> M 2 -élément choisi, <strong>et</strong> sa mesure gaussienne <strong>de</strong> courbureau point x 1 . . . x n a une va<strong>le</strong>ur entièrement déterminée. La va<strong>le</strong>ur<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te mesure gaussienne <strong>de</strong> courbure, qui dépend seu<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> laforme indiquée (5) <strong>de</strong> la longueur d’un élément courbe, <strong>Riemann</strong> l’appel<strong>le</strong>la « mesure <strong>de</strong> courbure [Mass <strong>de</strong>r Krümmung] » que l’espace nfois étendu, muni <strong>de</strong> la longueur (5) d’un élément courbe, possè<strong>de</strong> aupoint x 1 . . . x n dans la direction du M 2 -élément choisi. Il affirme <strong>de</strong> surcroîtque réciproquement, la longueur (5) d’un élément courbe d’un espacen fois étendu est en général complètement déterminée, aussitôt quela mesure <strong>de</strong> courbure est donnée en chaque point dans <strong>le</strong>s directions <strong>de</strong>12 n(n − 1) M 2-éléments qui sont mutuel<strong>le</strong>ment en position généra<strong>le</strong>.


280 Division V. Chapitre 22. § 100.Parmi <strong>le</strong>s variétés n fois étendues qui ont une longueur d’élémentcourbe <strong>de</strong> la forme (5) mentionnée ci-<strong>de</strong>ssus, <strong>Riemann</strong> considère en particuliertoutes cel<strong>le</strong>s pour <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s la mesure <strong>de</strong> courbure est constanteen tous lieux, donc pour <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s c<strong>et</strong>te mesure <strong>de</strong> courbure a la mêmeva<strong>le</strong>ur en tous <strong>le</strong>s points <strong>et</strong> en tous <strong>le</strong>s M 2 -éléments passant par cespoints. Il dit ce qui suit au suj<strong>et</strong> <strong>de</strong> ces variétés :« Le caractère commun <strong>de</strong> ces variétés dont la mesure <strong>de</strong> courbureest constante, peut aussi être exprimé en disant que <strong>le</strong>s figures peuventse mouvoir * sans élargissement [Dehnung] en el<strong>le</strong>s. Car il est évi<strong>de</strong>ntque <strong>le</strong>s figures en el<strong>le</strong>s ne pourraient pas coulisser [verschiebar sein]<strong>et</strong> pivoter [drehbar sein] librement, si la mesure <strong>de</strong> courbure n’était pasla même en chaque point <strong>et</strong> dans toutes <strong>le</strong>s directions. Mais d’autrepart, <strong>le</strong>s rapports métriques <strong>de</strong> la variété sont complètement déterminéspar la mesure <strong>de</strong> courbure ; donc <strong>le</strong>s rapports métriques autour d’unpoint <strong>et</strong> dans toutes <strong>le</strong>s directions sont exactement <strong>le</strong>s mêmes qu’autourd’un autre point, <strong>et</strong> par conséquent, à partir <strong>de</strong> ce premier point, <strong>le</strong>smêmes constructions peuvent être transférées, d’où il s’ensuit que, dans<strong>le</strong>s variétés dont la mesure <strong>de</strong> courbure est constante, on peut donneraux figures chaque position quelconque. »En ces termes, il est exprimé que l’exigence d’après laquel<strong>le</strong> lamesure <strong>de</strong> courbure doit être partout constante, a la même significationque certaines exigences concernant la mobilité <strong>de</strong>s figures. Si nous plaçonsc<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière exigence au tout début, nous pouvons restituer <strong>de</strong> lamanière suivante l’enchaînement <strong>de</strong>s idées <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> d’une manièrequelque peu plus précise, quoique non absolument précise :<strong>Riemann</strong> cherche, parmi <strong>le</strong>s variétés dont la longueur d’un élémentcourbe a la forme (5), toutes cel<strong>le</strong>s dans <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s figures peuventoccuper chaque position quelconque, c’est-à-dire, dans <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s <strong>le</strong>sfigures peuvent coulisser <strong>et</strong> tourner, sans subir d’élargissement. Il parvientà ce résultat que <strong>le</strong>s variétés dont la mesure <strong>de</strong> courbure estconstante en tous lieux sont <strong>le</strong>s seu<strong>le</strong>s dans <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s figures sontmobi<strong>le</strong>s <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te manière.Mais maintenant, que doit-on entendre là-<strong>de</strong>ssous, quand on ditque <strong>le</strong>s figures peuvent occuper chaque position quelconque, ou encorequ’el<strong>le</strong>s doivent pouvoir coulisser <strong>et</strong> tourner librement ?Tout d’abord, nous voulons établir ce que cela veut dire que <strong>le</strong>sfigures doivent être mobi<strong>le</strong>s sans élargissement <strong>et</strong> en général.*Ici à vrai dire, <strong>Riemann</strong> aurait même dû ajouter <strong>le</strong> mot « librement ».


Première solution au problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. 281Quand <strong>Riemann</strong> par<strong>le</strong> d’un mouvement <strong>de</strong>s figures, il s’imagineindubitab<strong>le</strong>ment que ce mouvement est continu, ce que montrent notamment<strong>le</strong>s mots « coulisser » <strong>et</strong> « tourner » dont il fait usage. Maismaintenant, chaque mouvement continu amène avec lui une modificationcontinue <strong>de</strong>s cordonnées du point qui se meut, <strong>et</strong> fournit ainsi unefamil<strong>le</strong> continue <strong>de</strong> ∞ 1 transformations réel<strong>le</strong>s :(6) x ′ ν = f ν(x 1 . . .x n ; t) (ν = 1 ···n)<strong>de</strong> la variété x 1 . . .x n , <strong>et</strong> pour préciser, une famil<strong>le</strong> dans laquel<strong>le</strong> s<strong>et</strong>rouve la transformation i<strong>de</strong>ntique (cf.p. 223). Si <strong>le</strong>s figures ne doiventsubir aucun élargissement au cours <strong>de</strong> ce mouvement, alors la longueur<strong>de</strong> chaque ligne doit rester inchangée, autrement dit : <strong>le</strong>s ∞ 1 transformations(6) doivent laisser invariante la longueur (5) d’un élément linéaire.Inversement, il est évi<strong>de</strong>nt que chaque famil<strong>le</strong> (6) <strong>de</strong> ∞ 1 transformationsqui laisse invariante la longueur (5) d’un élément linéaire <strong>et</strong> quicontient la transformation i<strong>de</strong>ntique, représente un mouvement continurelativement auquel <strong>le</strong>s figures ne subissent aucun élargissement. Parconséquent, l’exigence que <strong>le</strong> mouvement <strong>de</strong>s figures soit en généralpossib<strong>le</strong> sans élargissement, revient à ce qu’il doive exister au moinsune famil<strong>le</strong> continue <strong>de</strong> ∞ 1 transformations contenant la transformationi<strong>de</strong>ntique qui laisse invariante la longueur (5) d’un élément linéaire.Maintenant, l’ensemb<strong>le</strong> <strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>s transformations réel<strong>le</strong>s, relativementauxquel<strong>le</strong>s la longueur (5) d’un élément linéaire reste invariante,constitue certainement un groupe G, <strong>et</strong> ce groupe G contienttoujours un certain sous-groupe continu G, qui n’est contenu dans aucunsous-groupe continu plus grand <strong>de</strong> G. Si ensuite (6) est une famil<strong>le</strong><strong>de</strong> ∞ 1 transformations réel<strong>le</strong>s continues qui contient la transformationi<strong>de</strong>ntique <strong>et</strong> qui appartient au groupe G, alors c<strong>et</strong>te famil<strong>le</strong> déterminevisib<strong>le</strong>ment un mouvement continu au cours duquel <strong>le</strong>s figures nesubissent aucun élargissement. Inversement, si (6) est un mouvementcontinu au cours duquel <strong>le</strong>s figures ne subissent aucun élargissement,alors la famil<strong>le</strong> (6) appartient évi<strong>de</strong>mment au groupe G. Il décou<strong>le</strong> <strong>de</strong> làque G est complètement déterminé par l’ensemb<strong>le</strong> <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s mouvementsau cours <strong>de</strong>squels <strong>le</strong>s figures ne subissent aucun élargissement ;en même temps, il est clair que <strong>le</strong>s transformations <strong>de</strong> G déterminenttoutes <strong>le</strong>s positions que l’on peut donner aux figures par <strong>de</strong>s mouvementscontinus sans élargissement.Et maintenant, qu’est-ce que cela veut dire, lorsque <strong>Riemann</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>que <strong>le</strong>s figures puissent coulisser <strong>et</strong> tourner librement sans élargissement?


282 Division V. Chapitre 22. § 100.Manifestement, <strong>le</strong> mot « librement » est si indéterminé, qu’onpourrait en tirer n’importe quel<strong>le</strong> conclusion. On en est donc réduit àindiquer <strong>de</strong>s présomptions.Nous croyons qu’avec la possibilité libre <strong>de</strong> coulisser [belibigeVerschiebbarkeit] pour <strong>le</strong>s figures, <strong>Riemann</strong> s’est imaginé qu’au coursdu mouvement dont une figure est susceptib<strong>le</strong> sans subir d’élargissement,un point <strong>de</strong> la figure sé<strong>le</strong>ctionné arbitrairement peut être envoyésur chaque autre point <strong>de</strong> l’espace. Avec c<strong>et</strong>te interprétation, l’exigence<strong>de</strong> possibilité libre <strong>de</strong> coulisser revient évi<strong>de</strong>mment à ce que <strong>le</strong> groupedéfini plus haut doive être transitif.D’un autre côté, par « rotations » [Drehungen], <strong>Riemann</strong> peut entout cas seu<strong>le</strong>ment entendre <strong>le</strong>s mouvements qui sont encore possib<strong>le</strong>saprès fixation d’un point quelconque. L’exigence <strong>de</strong> possibilité libre d<strong>et</strong>ourner [beliebigen Drehbarkeit] pour <strong>le</strong>s figures, nous la comprenonsdonc maintenant en disant que <strong>le</strong> mouvement <strong>le</strong> plus général qui estencore possib<strong>le</strong> sans élargissement après fixation <strong>de</strong> l’origine <strong>de</strong>s coordonnées,doit dépendre d’autant <strong>de</strong> paramètres qu’autorise l’invariance<strong>de</strong> l’expression :∑1...nµ να µν (0 . . .0) dx µ dx ν ,<strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que <strong>le</strong> groupe transitif G doive contenir <strong>le</strong> plus grandnombre possib<strong>le</strong> <strong>de</strong> paramètres.Afin <strong>de</strong> nous rendre compte <strong>de</strong> la portée <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te exigence, nous<strong>de</strong>vons rechercher quels sont <strong>le</strong>s mouvements qui sont encore possib<strong>le</strong>ssans élargissement après fixation d’un point réel en position généra<strong>le</strong>.Pour <strong>de</strong>s raisons <strong>de</strong> simplicité, nous supposons que l’origine <strong>de</strong>scoordonnées est un point <strong>de</strong> position généra<strong>le</strong>, <strong>et</strong> nous nous imaginons<strong>de</strong> plus que la longueur <strong>de</strong> l’élément courbe est rapportée, via une transformationlinéaire homogène <strong>de</strong> x, à une forme tel<strong>le</strong> que pour :el<strong>le</strong> prend la forme :x 1 = x 2 = · · · = x n = 0,(7) dx 2 1 + dx2 2 + · · · + dx2 n .Chaque mouvement qui est encore éventuel<strong>le</strong>ment possib<strong>le</strong> sans élargissementaprès fixation <strong>de</strong> l’origine <strong>de</strong>s coordonnées est alors représentépar une transformation <strong>de</strong> la va<strong>le</strong>ur :n∑(8) x ′ k = α kν x ν + · · ·1(k = 1 ···n),


Première solution au problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. 283par l’action <strong>de</strong> laquel<strong>le</strong> la longueur (5) d’un élément courbe reste invariante; à ce suj<strong>et</strong>, <strong>le</strong> déterminant <strong>de</strong>s α kν ne doit pas s’annu<strong>le</strong>r <strong>et</strong> <strong>le</strong>stermes supprimés sont du <strong>de</strong>uxième ordre en x, <strong>et</strong> d’ordre supérieur.Sous <strong>le</strong>s hypothèses posées il est clair que la transformation réduiteissue <strong>de</strong> (8) :n∑(9) x ′ k = α kν x ν1(k = 1 ···n)doit laisser invariante l’expression différentiel<strong>le</strong> (7). En outre, il estfaci<strong>le</strong> <strong>de</strong> voir que la transformation (8) est complètement déterminée,aussitôt qu’on connaît la transformation réduite associée (9). La transformationréduite associée (9) indique en eff<strong>et</strong> comment sont transformés<strong>le</strong>s ∞ n−1 éléments linéaires passant par l’origine <strong>de</strong>s coordonnées.Maintenant, une unique ligne la plus courte est dirigée par chaque élémentlinéaire dx 1 : · · · : dx n passant par l’origine <strong>de</strong>s coordonnées <strong>et</strong>chaque point x 1 . . .x n <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te ligne la plus courte est complètementdéterminé, lorsque, mis à part l’élément linéaire en question, on connaîtaussi sa distance r à l’origine <strong>de</strong>s coordonnées. Si donc l’on sait que parla transformation (8) qui laisse invariante la longueur (5) d’un élémentcourbe, l’élément linéaire : dx 1 : · · · : dx n est transformé en l’élémentlinéaire : dx ′ 1 : · · · : dx ′ n, alors en même temps, la nouvel<strong>le</strong> positionx ′ 1 . . .x′ n que <strong>le</strong> point x 1 . . . x n reçoit par la transformation (8), est el<strong>le</strong>aussi déterminée, car en eff<strong>et</strong>, x ′ 1 . . .x′ n est évi<strong>de</strong>mment <strong>le</strong> point qui s<strong>et</strong>rouve à la distance r <strong>de</strong> l’origine <strong>de</strong>s coordonnées sur la ligne la pluscourte dirigée par l’élément linéaire : dx ′ 1 : · · · : dx ′ n.Nous voyons à partir <strong>de</strong> là que chaque mouvement sans élargissementqui est encore possib<strong>le</strong> après fixation <strong>de</strong> l’origine <strong>de</strong>s coordonnées,est parfaitement déterminé par la façon dont il déplace <strong>le</strong>s ∞ n−1éléments linéaires passant par l’origine <strong>de</strong>s coordonnées. Si donc nous<strong>de</strong>mandons que <strong>le</strong> mouvement <strong>le</strong> plus général encore possib<strong>le</strong> sans élargissementaprès fixation <strong>de</strong> l’origine <strong>de</strong>s coordonnées dépen<strong>de</strong> du plusgrand nombre <strong>de</strong> paramètres, alors cela revient à <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r qu’aprèsfixation par <strong>le</strong> groupe G <strong>de</strong> l’origine <strong>de</strong>s coordonnées, <strong>le</strong>s éléments linéairespassant par ce point sont transformés par un groupe projectifayant <strong>le</strong> plus grand nombre possib<strong>le</strong> <strong>de</strong> paramètres.Si nous rassemblons <strong>le</strong>s résultats acquis, nous pouvons dire :Lorsque <strong>Riemann</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong> qu’il existe une longueur d’élément courbeconstamment positive <strong>de</strong> la forme (5) <strong>et</strong> que <strong>le</strong>s figures <strong>de</strong> l’espacex 1 . . .x n puissent coulisser <strong>et</strong> tourner librement sans élargissement,il <strong>de</strong>man<strong>de</strong> avec cela exactement la même chose que lorsqu’on exige


284 Division V. Chapitre 22. § 100.qu’une longueur d’élément courbe (5) reste invariante par un groupecontinu G qui premièrement, est transitif <strong>et</strong> <strong>de</strong>uxièmement, transforme<strong>de</strong> la manière la plus généra<strong>le</strong> possib<strong>le</strong> <strong>le</strong>s ∞ n−1 éléments linéairespassant par chaque point réel fixé en position généra<strong>le</strong> (cf.pp. 355 sq.).Si nous relions maintenant <strong>le</strong>s développements <strong>de</strong>s pages 353 sq.avec ceux <strong>de</strong>s pages 385 sq., nous reconnaissons immédiatement quechaque groupe réel continu G ayant la constitution ici <strong>de</strong>mandée peutêtre transformé, via une transformation ponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong>, soit en <strong>le</strong>groupe <strong>de</strong>s mouvements euclidiens <strong>de</strong> R n , soit en l’un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux groupes<strong>de</strong> mouvements non-euclidiens. Les exigences que <strong>Riemann</strong> énonce ausuj<strong>et</strong> <strong>de</strong> la mobilité <strong>de</strong>s figures suffisent donc, en commun avec l’exigencequ’il existe une longueur d’élément courbe, pour caractériser cestrois groupes <strong>de</strong> mouvements.Nous insérons à présent encore quelques remarques au suj<strong>et</strong> <strong>de</strong> lasolution que <strong>Riemann</strong> a lui-même donnée à son problème.<strong>Riemann</strong> dit : « Car il est évi<strong>de</strong>nt que <strong>le</strong>s figures ne pourraient pascoulisser <strong>et</strong> tourner librement, si la mesure <strong>de</strong> courbure n’était pas lamême en chaque point <strong>et</strong> dans toutes <strong>le</strong>s directions ». De la constance <strong>de</strong>la mesure <strong>de</strong> courbure, il déduit maintenant que <strong>le</strong>s rapports métriquessont, dans toutes <strong>le</strong>s directions autour d’un point, exactement <strong>le</strong>s mêmesqu’autour d’un autre point, <strong>et</strong> <strong>de</strong> là il décou<strong>le</strong> à nouveau que <strong>le</strong>s figurespeuvent coulisser <strong>et</strong> tourner librement sans élargissement <strong>de</strong> la manièrequi a été décrite plus haut.Maintenant, l’exigence que la mesure <strong>de</strong> courbure soit constanteen tous <strong>le</strong>s points <strong>et</strong> dans toutes <strong>le</strong>s directions <strong>de</strong> M 2 -éléments passantpar ces points, est visib<strong>le</strong>ment nécessaire, lorsque <strong>le</strong> groupe G doit êtr<strong>et</strong>ransitif <strong>et</strong> lorsqu’il doit être en outre constitué <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte qu’aprèsfixation d’un point réel en position généra<strong>le</strong>, chaque M 2 -élément réelpassant par ce point peut encore être transformé en tout autre. Inversement,si <strong>le</strong> groupe est constitué <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte qu’après fixation d’unpoint réel en position généra<strong>le</strong>, chaque M 2 -élément réel peut encore êtr<strong>et</strong>ransformé en tout autre, on en déduit aisément que <strong>le</strong> groupe est transitif<strong>et</strong> que la mesure <strong>de</strong> courbure a la même va<strong>le</strong>ur en tous <strong>le</strong>s points<strong>et</strong> dans toutes <strong>le</strong>s directions <strong>de</strong> M 2 -éléments passant par ces points.Mais il décou<strong>le</strong> <strong>de</strong> là, d’après <strong>Riemann</strong>, que <strong>le</strong>s figures peuvent coulisser<strong>et</strong> tourner librement sans élargissement <strong>et</strong> à nouveau, cela revientà ce qu’après fixation d’un point réel <strong>de</strong> position généra<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s élémentslinéaires passant par ce point sont transformés par G <strong>de</strong> la manière laplus généra<strong>le</strong> possib<strong>le</strong>.


Première solution au problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. 285Par conséquent, la proposition suivante décou<strong>le</strong> <strong>de</strong>s développementsriemanniens :Si G est <strong>le</strong> plus grand groupe réel continu qui laisse invariante uneexpression différentiel<strong>le</strong> constamment positive <strong>de</strong> la forme (5), <strong>et</strong> si cegroupe est constitué <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte qu’après fixation d’un point réel enposition généra<strong>le</strong>, chaque M 2 -élément réel passant par ce point peutêtre transformé en tout autre, alors il transforme <strong>le</strong>s ∞ n−1 élémentslinéaires passant par ce point <strong>de</strong> la manière la plus généra<strong>le</strong> possib<strong>le</strong>.<strong>Riemann</strong> pose à l’avance que <strong>le</strong> carré <strong>de</strong> la longueur d’un élémentcourbe est une expression différentiel<strong>le</strong> du second ordre constammentpositive <strong>et</strong> il ajoute l’exigence que <strong>le</strong>s figures puissent coulisser <strong>et</strong> tournerlibrement sans subir d’élargissement. C<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière exigence a, sion l’interprète <strong>de</strong> la manière dont nous l’avons envisagée, la même significationque l’exigence que l’expression différentiel<strong>le</strong> en questionadm<strong>et</strong>te un groupe réel continu qui est transitif <strong>et</strong> qui transforme <strong>de</strong> lamanière la plus généra<strong>le</strong> possib<strong>le</strong> <strong>le</strong>s éléments linéaires réels passantpar <strong>le</strong> point réel <strong>de</strong> position généra<strong>le</strong> qui a été fixé.Il est clair que <strong>le</strong> groupe réel G, sous ces hypothèses, possè<strong>de</strong> lalibre mobilité dans l’infinitésimal en chaque point <strong>de</strong> position généra<strong>le</strong>.D’un autre côté, dans <strong>le</strong>s §§ 97–99, nous avons démontré que chaquegroupe réel G <strong>de</strong> R n (n > 2), qui possè<strong>de</strong> la libre mobilité dans l’infinitésima<strong>le</strong>n un point réel <strong>de</strong> position généra<strong>le</strong> peut être transformé,via une transformation ponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong> soit en <strong>le</strong> groupe <strong>de</strong>s mouvementseuclidiens, soit en l’un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux groupes <strong>de</strong> mouvements noneuclidiens.Par conséquent, <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux exigences riemanniennes : Existenced’une longueur quadratique d’élément courbe constamment positive,<strong>et</strong> possibilité pour <strong>le</strong>s figures <strong>de</strong> coulisser <strong>et</strong> <strong>de</strong> tourner librementsans élargissement, ces <strong>de</strong>ux exigences suffisent pour la caractérisation<strong>de</strong>s mouvements euclidiens <strong>et</strong> non-euclidiens, pourvu qu’on interprètela possibilité <strong>de</strong> coulisser <strong>et</strong> <strong>de</strong> tourner librement comme cela a été faitplus haut. Mais nous voyons en même temps que l’exigence <strong>de</strong> libremobilité dans l’infinitésimal, en commun avec l’exigence que <strong>le</strong>s mouvementsdoivent constituer un groupe, ces <strong>de</strong>ux exigences peuvent apparemmentêtre complètement substituées aux exigences poursuivies par<strong>Riemann</strong>.Nous allons encore montrer que l’on peut déduire l’existence d’une longueurquadratique d’élément courbe constamment positive directement à partir<strong>de</strong> l’exigence <strong>de</strong> libre mobilité dans l’infinitésimal, sans s’appuyer sur <strong>le</strong>s développements<strong>de</strong>s §§ 97–99.


286 Division V. Chapitre 22. § 100.Tout d’abord, on peut montrer d’une manière essentiel<strong>le</strong>ment plus simp<strong>le</strong>que précé<strong>de</strong>mment que chaque groupe projectif réel continu, qui possè<strong>de</strong> lalibre mobilité dans l’infinitésimal en tout <strong>le</strong>s points réels <strong>de</strong> l’espace, coïnci<strong>de</strong>avec <strong>le</strong> groupe projectif réel d’une surface imaginaire du second <strong>de</strong>gré, dontl’équation est réel<strong>le</strong>.Pour <strong>le</strong> plan, nous avons démontré cela dans <strong>le</strong> § 97. Afin <strong>de</strong> démontrerc<strong>et</strong>te proposition en général, nous supposons que nous l’avons démontrée dansl’espace à n − 1 2 dimensions <strong>et</strong> nous démontrons ensuite qu’el<strong>le</strong> est aussivali<strong>de</strong> dans l’espace à n dimensions.Si donc la proposition est démontrée pour l’espace à n − 1 dimension,il en décou<strong>le</strong> immédiatement que chaque groupe projectif réel γ <strong>de</strong> R n quipossè<strong>de</strong> la libre mobilité dans l’infinitésimal en un point <strong>de</strong> position généra<strong>le</strong>,a 1 2n(n + 1) paramètres <strong>et</strong> qu’il peut être ramené, via une transformationprojective réel<strong>le</strong>, à la forme :1...n∑p µ +j k1...n∑α µ j k x j p k +1...n∑x µ p ν − x ν p µ +τβ µ τ x τ Uγ µ ν τ x τ Uτ(µ, ν =1··· n; γ µ ν τ + γ ν µ τ = 0).Mais il s’ensuit <strong>de</strong> là par <strong>de</strong>s calculs, qui ne diffèrent pratiquement pas <strong>de</strong> ceux<strong>de</strong>s pages 290 sq., que γ peut recevoir, par une transformation projective réel<strong>le</strong>,la forme :p µ + cx µ U, x µ p ν − x ν p µ (µ, ν =1··· n).Si maintenant en particulier γ doit possé<strong>de</strong>r la libre mobilité dans l’infinitésima<strong>le</strong>n tous <strong>le</strong>s points réels <strong>de</strong> l’espace, alors c doit être positif, <strong>et</strong> par suitedans ce cas γ consiste, après un choix approprié <strong>de</strong>s variab<strong>le</strong>s, en toutes <strong>le</strong>stransformations projectives réel<strong>le</strong>s qui laissent invariante la variété :x 2 1 + · · · + x 2 n + 1 = 0.Ainsi, nous avons démontré directement que notre proposition vaut pourR n si el<strong>le</strong> vaut pour R n−1 <strong>et</strong> puisqu’el<strong>le</strong> est vraie dans <strong>le</strong> plan, el<strong>le</strong> est doncgénéra<strong>le</strong>ment démontrée.Considérons maintenant un groupe quelconque <strong>de</strong> R n qui, dans <strong>le</strong> voisinaged’un point réel en position généra<strong>le</strong>, possè<strong>de</strong> la libre mobilité dans l’infinitésimal.On obtient ensuite <strong>de</strong> la même manière qu’aux pages 267 sq. queG est transitif, qu’il a 1 2n(n + 1) paramètres <strong>et</strong> qu’il peut être rapporté à laforme :p ν + · · · , x µ p ν − x ν p µ + · · · (µ, ν = 1···n),via une transformation réel<strong>le</strong>.


Première solution au problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. 287Il décou<strong>le</strong> <strong>de</strong> là qu’après fixation <strong>de</strong> l’origine <strong>de</strong>s coordonnées, <strong>le</strong>s différentiel<strong>le</strong>sdx 1 ...dx n sont transformées <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que l’expression différentiel<strong>le</strong>:(10) dx 2 1 + · · · + dx2 nreste invariante. Maintenant, comme l’origine <strong>de</strong>s coordonnées est un point<strong>de</strong> position généra<strong>le</strong> <strong>et</strong> comme notre groupe est transitif, nous obtenons doncgénéra<strong>le</strong>ment pour chaque point <strong>de</strong> position généra<strong>le</strong> une expression différentiel<strong>le</strong><strong>de</strong> ce type qui lui est attachée [zugeordn<strong>et</strong>] <strong>et</strong> pour préciser, nous trouvonsl’expression différentiel<strong>le</strong> attachée au point x 0 1 ...x0 n, lorsque nous soum<strong>et</strong>tonsl’expression (10) à une transformation quelconque :x ′ ν = f ν(x 1 ...x n )(ν =1··· n),qui envoie l’origine <strong>de</strong>s coordonnées sur <strong>le</strong> point x 0 1 ...x0 n , <strong>et</strong> quand nous effectuonsaprès la substitution : x ′ ν = x 0 ν dans <strong>le</strong>s coefficients <strong>de</strong> l’expressionainsi obtenue.Les expressions différentiel<strong>le</strong>s qui sont attachées <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te manière auxpoints <strong>de</strong> l’espace, sont transformées par <strong>le</strong>s transformations <strong>de</strong> notre groupeexactement comme <strong>le</strong>s points eux-mêmes, <strong>et</strong> <strong>de</strong> là, il décou<strong>le</strong> à nouveau,que notre groupe laisse invariante une certaine expression différentiel<strong>le</strong> <strong>de</strong> laforme :1...n∑k να k ν (x 1 ...x n )dx k dx ν ,qui revêt la forme (10) à l’origine <strong>de</strong>s coordonnées, <strong>et</strong> qui par conséquent s<strong>et</strong>ransforme, pour tous <strong>le</strong>s points réels x 1 ...x n <strong>de</strong> position généra<strong>le</strong>, en uneforme quadratique constamment positive par rapport à dx 1 ...dx n .Ainsi, sans utiliser <strong>le</strong> Théorème 42, p. 271, on a démontré que chaquegroupe réel qui possè<strong>de</strong> la libre mobilité dans l’infinitésimal en un point <strong>de</strong>position généra<strong>le</strong>, laisse invariante une expression différentiel<strong>le</strong> du second <strong>de</strong>gréconstamment positive, <strong>et</strong> on a donc démontré qu’avec l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’axiome<strong>de</strong> libre mobilité dans l’infinitésimal, on peut déduire l’axiome <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>sur la longueur d’un élément courbe, sans même présenter tous <strong>le</strong>s groupes quipossè<strong>de</strong>nt la libre mobilité dans l’infinitésimal * .Pour terminer, nous voulons encore prononcer quelques mots au suj<strong>et</strong>d’un passage <strong>de</strong> la soutenance ora<strong>le</strong> <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>, qui nous paraît inintelligib<strong>le</strong>dans la version déjà présentée [die uns in <strong>de</strong>r vorliegen<strong>de</strong>n Fassung unverständlichercheint].Nous voulons dire <strong>le</strong> passage à la page 265 <strong>de</strong> ses Œuvres complètes (1 èreédition), où <strong>Riemann</strong> applique ses recherches sur la détermination <strong>de</strong>s rapportsmétriques d’une gran<strong>de</strong>ur n fois étendue dans l’espace.p. 292).* <strong>Lie</strong> a déjà signalé cela en 1890 dans <strong>le</strong> Leiziger Berichten (voir la Remarque


288 Division V. Chapitre 22. § 100.Le « premièrement » dans la phrase « El<strong>le</strong>s peuvent premièrement s’exprimer<strong>et</strong>c. » présente avant tout <strong>de</strong>s difficultés. Ce « premièrement » signa<strong>le</strong>un « <strong>de</strong>uxièmement » à venir, qui vient aussi, car il vient dans la phrase : « Sil’on suppose <strong>de</strong>uxièmement <strong>et</strong>c. ». Mais ce « <strong>de</strong>uxièmement » ne correspondpas du tout au « premièrement ». En eff<strong>et</strong>, tandis qu’après <strong>le</strong> « premièrement »,<strong>de</strong>s conditions sont indiquées qui sont nécessaires <strong>et</strong> suffisantes pour la détermination<strong>de</strong>s rapports métriques <strong>de</strong> l’espace (euclidien), lorsque certaines hypothèsessont faites, <strong>Riemann</strong> ne donne pas après <strong>le</strong> « <strong>de</strong>uxièmement », commeon <strong>de</strong>vrait s’y attendre véritab<strong>le</strong>ment, une autre version <strong>de</strong> ces conditions, maisil introduit une hypothèse tout à fait nouvel<strong>le</strong>. Les mots : « Si l’on suppose<strong>de</strong>uxièmement <strong>et</strong>c. » ne correspon<strong>de</strong>nt donc pas au « premièrement », mais aumembre <strong>de</strong> phrase : « lorsqu’on adm<strong>et</strong> comme hypothèses . . . dans ses partiesinfinitésima<strong>le</strong>s ». On voit donc que <strong>le</strong> « premièrement » n’a rien à voir avec <strong>le</strong>« <strong>de</strong>uxièmement », <strong>et</strong> qu’il est au fond tout à fait superflu. En fait, <strong>le</strong> passag<strong>et</strong>out entier <strong>de</strong>vient passab<strong>le</strong>ment clair * si on supprime <strong>le</strong> « premièrement »entre <strong>le</strong>s mots « dans ses parties infinitésima<strong>le</strong>s » <strong>et</strong> « El<strong>le</strong>s peuvent premièrements’exprimer », si on supprime l’alinéa, <strong>et</strong> si enfin, on ajoute <strong>le</strong> mot« euclidien », comme cela a été indiqué plus haut.D’après une communication que nous <strong>de</strong>vons à la bonté <strong>de</strong> Monsieur H.Weber, l’éditeur <strong>de</strong>s œuvres <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>, il n’y a aucun doute que <strong>Riemann</strong> avéritab<strong>le</strong>ment écrit <strong>le</strong> « premièrement » ; la possibilité d’une autre version estdonc exclue. En conséquence <strong>de</strong> cela, il ne reste aucune autre possibilité qued’adm<strong>et</strong>tre qu’ici se présente une inadvertance stylistique <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>*À vrai dire, il resterait toujours à établir ce que <strong>le</strong>s mots « Enfin on pourraittroisièmement <strong>et</strong>c. » veu<strong>le</strong>nt dire, <strong>et</strong> nous n’y sommes pas parvenus. Du reste, il s<strong>et</strong>rouve par ail<strong>le</strong>urs aussi encore <strong>de</strong>s passages dans la soutenance ora<strong>le</strong> <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> quinous paraissent pour <strong>le</strong> moins inintelligib<strong>le</strong>s.


Chapitre 23.Deuxième solution du problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz.Souvenons-nous <strong>de</strong>s remarques effectuées tout au début <strong>de</strong> l’introductiondu précé<strong>de</strong>nt chapitre (p. 260 sq.). Nous prenons maintenant icien considération <strong>le</strong> point <strong>de</strong> vue annoncé là-bas, i.e. nous <strong>de</strong>mandons ànouveau quel<strong>le</strong>s propriétés sont communes au groupe <strong>de</strong>s mouvementseuclidiens ainsi qu’aux <strong>de</strong>ux groupes <strong>de</strong> mouvements non-euclidiens <strong>et</strong>qui font que ces trois groupes sont remarquab<strong>le</strong>s parmi tous <strong>le</strong>s groupescontinus possédant <strong>de</strong>s transformations inverses l’une <strong>de</strong> l’autre parpaires. Tandis que dans <strong>le</strong> précé<strong>de</strong>nt chapitre, nous avons considéré <strong>de</strong>spropriétés caractéristiques qui se réfèrent seu<strong>le</strong>ment à <strong>de</strong>s points infinimentvoisins, nous voulons maintenant utiliser seu<strong>le</strong>ment <strong>de</strong>s propriétésqui concernent <strong>le</strong>s rapports mutuels <strong>de</strong> points finiment éloignés <strong>le</strong>s uns<strong>de</strong>s autres.Chez <strong>Riemann</strong>, la différence entre <strong>le</strong>s axiomes qui se rapportentaux points infiniment voisins <strong>et</strong> ceux qui se rapportent aux points finimentéloignés <strong>le</strong>s uns <strong>de</strong>s autres n’est pas encore faite. Les axiomesutilisés par <strong>Riemann</strong>, qui à vrai dire ne sont pas formulés expressémentpar lui, ou en tout cas ne sont cependant formulés ni précisément, nidistinctement, se réfèrent en partie à une espèce <strong>de</strong> points, en partieà l’autre. L’exigence <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> sur l’existence d’une longueur d’élémentcourbe se réfère à <strong>de</strong>s points infiniment proches. Mais maintenant,comme nous l’avons déjà mis en évi<strong>de</strong>nce aux pages 277 sq., l’existenced’une fonction distance entre <strong>de</strong>ux points finiment éloignés l’un<strong>de</strong> l’autre ne décou<strong>le</strong> pas encore <strong>de</strong> l’existence d’une longueur d’élémentcourbe, tant qu’on ne sait rien <strong>de</strong> plus précis sur la nature <strong>de</strong> lalongueur d’un élément courbe. Tout <strong>de</strong> même, <strong>Riemann</strong> suppose aussisans plus <strong>de</strong> justification l’existence d’une tel<strong>le</strong> fonction distance, <strong>et</strong>c’est une hypothèse qui se réfère à <strong>de</strong>s points finiment éloignés <strong>le</strong>s uns<strong>de</strong>s autres. Enfin, <strong>le</strong>s exigences <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> — exprimées à vrai dire<strong>de</strong> manière très indéterminée — sur la mobilité <strong>de</strong>s figures sans élargissementse réfèrent évi<strong>de</strong>mment aussi à <strong>de</strong>s points finiment éloignés<strong>le</strong>s uns <strong>de</strong>s autres, mais, à cause <strong>de</strong> la nature particulière <strong>de</strong> la longueurd’un élément courbe, que <strong>Riemann</strong> déduit <strong>de</strong> la fonction distance qu’il


290 Division V. Chapitre 22. § 100.a supposée, ces exigences se laissent aussi immédiatement appliquer à<strong>de</strong>s points infiniment voisins (cf.pp. 280 sq.).Les axiomes <strong>de</strong> Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz se réfèrent, dans la versionqu’il <strong>le</strong>ur a donnée au début <strong>de</strong> son travail, à <strong>de</strong>s points finimentéloignés <strong>le</strong>s uns <strong>de</strong>s autres ; cependant, il <strong>le</strong>s applique non seu<strong>le</strong>mentà <strong>de</strong> tels points, mais encore aussi à <strong>de</strong>s points infiniment voisins, unprocédé dont nous avons suffisamment montré l’inadmissibilité dans <strong>le</strong>Chapitre 21. La différence <strong>de</strong> nature entre <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux genres d’axiomes,i.e. entre ceux relatifs aux points finiment éloignés <strong>et</strong> ceux relatifs auxpoints infiniment voisins, apparaît, dans notre exposition, pour la premièrefois distinctement à l’expression. À vrai dire, <strong>Riemann</strong> fait <strong>de</strong>sallusions qui peuvent conduire à présumer qu’il a eu <strong>de</strong>s pensées similaires,mais ses expressions * sont fixées <strong>de</strong> manière si généra<strong>le</strong> qu’on nene peut pas trancher quant à ce qu’il a voulu dire.Ce que nous avons appelé notre première solution du problème <strong>de</strong><strong>Riemann</strong>-Helmholtz se réfère seu<strong>le</strong>ment à <strong>de</strong>s points infiniment voisins,ce que l’on peut exprimer <strong>de</strong> manière plus précise comme suit : c<strong>et</strong>te solutionrésout <strong>le</strong> problème <strong>de</strong> déterminer tous <strong>le</strong>s groupes qui sont définispar certaines propriétés dans l’infinitésimal. À vrai dire, il faut aboutirà ce que l’exigence, d’après laquel<strong>le</strong> <strong>le</strong>s mouvements doivent formerun groupe, se réfère à <strong>de</strong>s points finiment éloignés <strong>le</strong>s uns <strong>de</strong>s autres,<strong>et</strong> une tel<strong>le</strong> exigence ne se laisse en général pas élu<strong>de</strong>r, puisqu’il s’agitnécessairement, lorsqu’on considère <strong>le</strong>s mouvements, <strong>de</strong> changements<strong>de</strong> lieu finis.Notre <strong>de</strong>uxième solution traite un problème qui se réfère seu<strong>le</strong>mentà <strong>de</strong>s points finiment éloignés <strong>le</strong>s uns <strong>de</strong>s autres ; <strong>le</strong> concept <strong>de</strong>points infiniments voisins intervient ici pour autant que nous <strong>de</strong>mandonsque <strong>le</strong>s points séparés restent aussi séparés, <strong>et</strong> donc que <strong>de</strong>uxpoints finiment éloignés <strong>le</strong>s uns <strong>de</strong>s autres restent finiment éloignés aucours <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s mouvements, <strong>et</strong> ne sont jamais transformés en <strong>de</strong>spoints inifiniment voisins ** .Si, pour <strong>le</strong> problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz, on pose au fon<strong>de</strong>ment<strong>de</strong>s axiomes qui se réfèrent à <strong>de</strong>s points finiment éloignés <strong>le</strong>s uns<strong>de</strong>s autres, alors la solution est beaucoup plus diffici<strong>le</strong> que lorsqu’onutilise <strong>de</strong>s axiomes au suj<strong>et</strong> <strong>de</strong> points infiniment voisins. C’est sur c<strong>et</strong>te<strong>de</strong>rnière base que notre première solution (voir <strong>le</strong> Chapitre 22) a été*Voir ses Œuvres Complètes, 1 ère Édition, p. 267.**La solution du problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz que nous avons donnée dans<strong>le</strong> Chapitre 21 sur la base <strong>de</strong>s axiomes <strong>de</strong> Helmholtz partage <strong>le</strong> même caractère.


Deuxième solution au problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. 291achevée définitivement, y compris pour l’espace à n dimensions ; maisau contraire, notre <strong>de</strong>uxième solution, qui est exposée dans <strong>le</strong> présentchapitre, est achevée définitivement, au moins en un certain sens, seu<strong>le</strong>mentpour l’espace, à vrai dire <strong>le</strong> plus important, <strong>de</strong> dimension trois.Pour l’espace à n dimensions, nous montrons seu<strong>le</strong>ment qu’il est suffisant<strong>de</strong> poser certains axiomes qui se rapportent à <strong>de</strong>s points finimentéloignés <strong>le</strong>s uns <strong>de</strong>s autres, <strong>et</strong> qui en tout cas requièrent moins que <strong>le</strong>saxiomes helmholtziens ; mais nous ne prétendons toutefois pas que pourn > 3 ces axiomes ne contiennent pas d’éléments superflus ; nous estimonsmême qu’il est vraisemblab<strong>le</strong> qu’ils en contiennent.Dans <strong>le</strong> § 101, nous démontrons en premier lieu une propositiongénéra<strong>le</strong> sur <strong>le</strong>s groupes relativement auxquels <strong>de</strong>ux points possè<strong>de</strong>ntun invariant. Dans <strong>le</strong> § 102, nous traitons ensuite l’espace à trois dimensions,<strong>et</strong> à c<strong>et</strong>te occasion, la proposition démontrée dans <strong>le</strong> § 101 sera <strong>de</strong>quelque utilité. Dans <strong>le</strong> § 103 enfin, nous résolvons <strong>le</strong> cas d’un espaceà quatre dimensions <strong>et</strong> nous indiquons encore pour terminer commenton peut parvenir au but dans <strong>le</strong>s espaces à un nombre <strong>de</strong> dimensionssupérieur à quatre.§ 101.Pendant <strong>le</strong> compte rendu critique du travail <strong>de</strong> Helmholtz, nousavons déjà mentionné que l’on doit être extrêmement précautionneuxlorsqu’on veut déduire quelque chose au suj<strong>et</strong> du comportement <strong>de</strong>points infiniment voisins à partir du comportement <strong>de</strong> points finimentéloignés <strong>le</strong>s uns <strong>de</strong>s autres. Toutefois, nous ne disons pas par là qu’onne peut rien déduire au suj<strong>et</strong> du comportement <strong>de</strong> ces points-là à partirdu comportement <strong>de</strong> ces points-ci. En eff<strong>et</strong>, <strong>le</strong> théorème suivant est vraien tout cas.Théorème 44. Si, relativement à un groupe continu <strong>de</strong> l’espacen fois étendu qui est constitué <strong>de</strong> transformations infinitésima<strong>le</strong>s, <strong>de</strong>uxpoints finiment éloignés <strong>le</strong>s uns <strong>de</strong>s autres x 1 . . .x n <strong>et</strong> y 1 . . .y n ont uninvariant, alors aussi, <strong>de</strong>ux points infiniment voisins x ν <strong>et</strong> x ν +dx ν possè<strong>de</strong>ntau moins un invariant relativement au groupe, ou pour s’exprimer<strong>de</strong> manière plus précise : <strong>le</strong> groupe laisse invariante au minimumune expression <strong>de</strong> la forme :J ( x 1 . . .x n , dx 1 . . .dx n).Par souci <strong>de</strong> simplicité, nous démontrons tout d’abord ce théorèmepour <strong>le</strong>s groupes finis continus.


292 Division V. Chapitre 23. § 101.Soit :X k f =n∑ν=1ξ kν (x 1 . . .x n ) ∂f∂x ν(k =1··· r)un groupe quelconque à r paramètres ; on peut poser :n∑Y k f = ξ kν (y 1 . . . y n ) ∂f .∂y νν=1Si ensuite <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux points x ν <strong>et</strong> y ν doivent avoir un invariant Ω(x, y),alors il est nécessaire <strong>et</strong> suffisant que <strong>le</strong>s r équations :(1) X k f + Y k f = 0 (k = 1 ···r)en <strong>le</strong>s 2n variab<strong>le</strong>s x ν <strong>et</strong> y ν aient une solution en commun, ou, ce quirevient au même, que tous <strong>le</strong>s 2n × 2n déterminants <strong>de</strong> la matrice :ξ(2)k1 (x) . . . ξ kn (x) ξ k1 (y) . . . ξ kn (y)∣∣(k = 1,2··· r)s’annu<strong>le</strong>nt i<strong>de</strong>ntiquement.Si maintenant c<strong>et</strong>te condition est remplie <strong>et</strong> si nous posons : y ν =x ν + dx ν , on obtient immédiatement que <strong>le</strong>s 2n × 2n déterminants <strong>de</strong>la matrice :ξ(2’)k1 (x) . . . ξ kn (x) dξ k1 (x) . . . dξ kn (x)∣∣(k = 1 ···r)s’annu<strong>le</strong>nt i<strong>de</strong>ntiquement. Par conséquent, <strong>le</strong> groupe en <strong>le</strong>s 2n variab<strong>le</strong>sx ν , x ′ ν provenant <strong>de</strong> X 1f . . .X r f par prolongation (voir <strong>le</strong> Tome I,pp. 524 sq.) :n∑{ n∑ }∂ξ kν (x) ∂fX k f +x ′ τ∂xν=1 τ=1 τ ∂x ′ (k = 1 ···r)νest sûrement intransitif, <strong>et</strong> il laisse invariante au minimum une fonction: ω(x 1 . . .x n , x ′ 1 . . .x′ n ). Du reste, il est faci<strong>le</strong> <strong>de</strong> voir que l’on peuttoujours choisir c<strong>et</strong>te fonction ω <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte qu’el<strong>le</strong> n’est pas indépendante<strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s x ′ . Si en eff<strong>et</strong> <strong>le</strong>s r équations (1) n’ont pas <strong>de</strong> solutioncommune indépendante <strong>de</strong> y 1 . . .y n , alors <strong>le</strong>s équations :n∑{ n∑ }∂ξ kν (x) ∂f(3) X k f +x ′ τ = 0∂xν=1 τ=1 τ ∂x ′ (k = 1 ···r)νn’ont visib<strong>le</strong>ment pas non plus <strong>de</strong> solution commune indépendante<strong>de</strong> x ′ 1 . . .x′ n . D’autre part, si <strong>le</strong>s équations (1) ont une solution :Ω(x 1 . . .x n ) qui est indépendante <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s y, alors el<strong>le</strong>s ont aussi la


Deuxième solution au problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. 293solution : Ω(y 1 . . .y n ) indépendante <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s x, <strong>et</strong> alors il est visib<strong>le</strong>que l’expression :n∑ ∂Ω(x 1 . . . x n )x ′ τ∂x ττ=1est une solution commune <strong>de</strong>s équations (3) qui n’est pas indépendante<strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s x ′ .Il décou<strong>le</strong> <strong>de</strong> là que <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux points infiniment voisins x ν <strong>et</strong>x ν +dx ν ont toujours un invariant relativement au groupe X 1 f . . . X r f,aussitôt que <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux points x ν <strong>et</strong> y ν en ont un, <strong>et</strong> la véracité <strong>de</strong> notreThéorème 44 est donc démontrée pour tous <strong>le</strong>s groupes continus finis.Jusqu’à présent, pour la démonstration du Théorème 44, nous noussommes limités aux groupes continus finis, mais il n’est pas diffici<strong>le</strong> <strong>de</strong>voir que notre démonstration s’applique en général à tous <strong>le</strong>s groupescontinus finis ou infinis qui sont constitués <strong>de</strong> transformations infinitésima<strong>le</strong>s.Si en eff<strong>et</strong> Xf est la transformation infinitésima<strong>le</strong> généra<strong>le</strong> d’ungroupe <strong>et</strong> si Y f a la même signification que ci-<strong>de</strong>ssus, alors <strong>le</strong>s <strong>de</strong>uxpoints x ν <strong>et</strong> y ν ont un invariant relativement à ce groupe si <strong>et</strong> seu<strong>le</strong>mentsi, dans la col<strong>le</strong>ction <strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>s équations :Xf + Y f = 0ne sont pas contenues plus que 2n −1 équations qui sont indépendantes<strong>le</strong>s unes <strong>de</strong>s autres. Et si c<strong>et</strong>te condition est remplie, alors dans la col<strong>le</strong>ction<strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>s équations :n∑{ n∑ }∂ξ ν (x) ∂fXf +x ′ τ = 0,∂xν=1 τ=1 τ ∂x ′ νsont contenues au maximum 2n−1 équations qui sont indépendantes <strong>le</strong>sunes <strong>de</strong>s autres, <strong>et</strong> par suite, <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux points x ν <strong>et</strong> x ν +dx ν ont sûrementun invariant.Avec cela, notre théorème est démontré en général.On sait déjà que <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux points x ν <strong>et</strong> y ν finiment éloignés l’un <strong>de</strong>l’autre ont, relativement à un groupe continu donné, l’invariant Ω(x, y),<strong>et</strong> ceci soulève donc la question <strong>de</strong> savoir si l’on ne peut pas déduire <strong>de</strong>Ω un invariant pour <strong>de</strong>ux points infiniment voisins x ν <strong>et</strong> x ν +dx n u ; carces <strong>de</strong>ux points ont un invariant, comme il suit du Théorème 44. Nousne voulons pas nous engager en plus pour répondre à c<strong>et</strong>te question,mais seu<strong>le</strong>ment mentionner que l’invariant cherché pour <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux pointsx ν <strong>et</strong> x ν +dx ν peut toujours être indiqué simp<strong>le</strong>ment quand l’expression


294 Division V. Chapitre 23. § 101.Ω(x, x + dx) est développab<strong>le</strong> en série entière ordinaire par rapport àdx 1 . . .dx n ; on obtient en eff<strong>et</strong> alors l’invariant désiré en recherchantla fonction homogène du plus bas <strong>de</strong>gré par rapport à dx 1 . . . dx n quiest contenue dans <strong>le</strong> développement <strong>de</strong> Ω(x, x + dx) par rapport auxpuissances <strong>de</strong> dx 1 . . .dx n . Mais quand Ω(x, x + dx) n’est pas développab<strong>le</strong>en série entière ordinaire par rapport à dx 1 . . .dx n , on ne peutpas déduire immédiatement l’invariant entre x ν <strong>et</strong> x ν + dx ν à partir <strong>de</strong>l’expression <strong>de</strong> Ω(x, x + dx).Il est souhaitab<strong>le</strong> <strong>de</strong> possé<strong>de</strong>r un critère simp<strong>le</strong> par <strong>le</strong>quel on peutvérifier si <strong>de</strong>ux points infiniment voisins ont, ou n’ont pas un invariantrelativement à un groupe. Si en eff<strong>et</strong> on s’est convaincu qu’ils n’ont pasd’invariant, alors d’après <strong>le</strong> Théorème 44, il est immédiatement clairque <strong>de</strong>ux points finiment éloignés l’un <strong>de</strong> l’autre n’ont pas non plusd’invariant. Nous allons montrer pour cela comment on peut parvenir àun tel critère.Considérons un groupe continu quelconque G, fini ou infini, qui estconstitué <strong>de</strong> transformations infinitésima<strong>le</strong>s. Parmi <strong>le</strong>s transformationsinfinitésima<strong>le</strong>s <strong>de</strong> G, qui laissent invariant un point x 0 1 . . .x 0 n <strong>de</strong> positiongénéra<strong>le</strong>, il y en a un certain nombre, disons exactement m n 2 ,indépendantes <strong>le</strong>s unes <strong>de</strong>s autres :(4)∑1...nµ να k µ ν (x µ − x 0 µ ) ∂f∂x ν+ · · ·(k =1··· m),qui sont du premier ordre en <strong>le</strong>s x µ − x 0 µ <strong>et</strong> à partir <strong>de</strong>squel<strong>le</strong>s on nepeut déduire, par combinaison linéaire, aucune transformation du secondordre, ou d’un ordre supérieur, en <strong>le</strong>s x µ −x 0 µ. Les transformationsinfinitésima<strong>le</strong>s (4) sont alors visib<strong>le</strong>ment constituées <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que<strong>le</strong>s termes du premier ordre, dans chaque transformation infinitésima<strong>le</strong><strong>de</strong> G qui fixe <strong>le</strong> point x 0 1 . . .x0 n , se laissent exprimer par combinaisonlinéaire à partir <strong>de</strong>s termes du premier ordre <strong>de</strong>s transformations (4).Il décou<strong>le</strong> <strong>de</strong> là que <strong>le</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s :(5) A k f =∑1...nµ να k µ ν x ′ µ∂f∂x ′ ν(k =1··· m)en <strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s x ′ 1 . . .x ′ n engendrent <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur côté un groupe linéairehomogène à m paramètres, qui est entièrement déterminé par <strong>le</strong> groupeG <strong>et</strong> <strong>le</strong> point x 0 1 . . .x0 n . Ce groupe linéaire homogène, dont l’existencenous est déjà connue dans <strong>le</strong> cas d’un groupe continu fini, d’après <strong>le</strong>


Deuxième solution au problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. 295Tome I, p. 599 sq., a une signification très simp<strong>le</strong> : il indique notamment<strong>de</strong> quel<strong>le</strong> manière <strong>le</strong>s points :x 0 ν + dx ν = x 0 ν + x ′ ν dt (k =1··· m)infiniment voisins <strong>de</strong> x 0 1 . . .x0 n sont transformés par <strong>le</strong> groupe G, aussitôtque l’on fixe <strong>le</strong> point x 0 1 . . .x0 n . On vérifie cela immédiatement,si l’on pense que <strong>le</strong>s termes du premier ordre dans <strong>le</strong>s transformationsinfinitésima<strong>le</strong>s (4) sont <strong>le</strong>s seuls par <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s sont effectivement transformés* <strong>le</strong>s points infiniment voisins du point x 0 1 . . .x0 n .Si maintenant <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux points infiniment voisins x ν <strong>et</strong> x ν + dx νont, relativement au groupe G, l’invariant ω(x 1 . . .x n , dx 1 . . .dx n ),alors il est clair qu’après fixation du point x 0 ν, <strong>le</strong> point infinimentvoisin : x 0 ν + dx ν est transformé <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que l’expression :ω(x 0 1 . . .x0 n , dx 1 . . .dx n ) reste invariante, <strong>et</strong> donc dans ce cas,ω(x 0 1 . . .x0 n , x′ 1 . . .x′ n ) est un invariant du groupe (5).Si d’un autre côté <strong>le</strong> groupe (5) possè<strong>de</strong> un invariant : ϕ(x ′ 1 . . .x ′ n),il s’ensuit que <strong>de</strong>ux points infiniment voisins quelconques ont un invariantrelativement au groupe G. En eff<strong>et</strong>, si G est intransitif <strong>et</strong> siχ(x 1 . . .x n ) est un invariant quelconque <strong>de</strong> G, alors l’expression :n∑ ∂χ(x)dx ν∂x νν=1est visib<strong>le</strong>ment un invariant <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux points infiniment voisins x ν <strong>et</strong>x ν + dx ν . Mais si G est transitif, alors en s’imaginant que toutes <strong>le</strong>stransformations <strong>de</strong> G s’exercent sur l’expression :ϕ(dx 1 . . .dx n ),on obtient une expression complètement déterminée <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te espèce quiest attachée à chaque point <strong>de</strong> l’espace, <strong>et</strong> toutes ces expressions sontéchangeab<strong>le</strong>s l’une avec l’autre par <strong>le</strong>s transformations <strong>de</strong> G, ce qui neveut toutefois rien dire d’autre qu’il y a une expression :ω(x 1 . . . x n , dx 1 . . .dx n )invariante par G, <strong>et</strong> par conséquent que <strong>de</strong>ux points infiniment voisinsquelconques ont un invariant relativement à G (cf.p. 287).*Jusqu’à présent, nous avons habituel<strong>le</strong>ment interprété x ′ 1 . . . x′ n comme <strong>le</strong>s coordonnéeshomogènes <strong>de</strong>s ∞ n−1 éléments linéaires passant par <strong>le</strong> point x 0 1 . . . x0 n ,mais cependant, l’interprétation du groupe (5) que nous indiquons ici, nous l’avonsdéjà mentionnée aussi (cf.p. 238).


296 Division V. Chapitre 23. § 101.Nous voyons à partir <strong>de</strong> là que <strong>de</strong>ux points infiniment voisins quelconquesont un invariant relativement à G si <strong>et</strong> seu<strong>le</strong>ment si <strong>le</strong> groupe linéairehomogène (5) défini à l’instant en <strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s x ′ 1 . . .x′ n possè<strong>de</strong>un invariant. Nous énonçons donc ce résulat <strong>de</strong> la manière suivante :Proposition 1. Si l’on souhaite déci<strong>de</strong>r si <strong>de</strong>ux points infinimentvoisins quelconques ont un invariant, relativement à un groupe continuqui est constitué <strong>de</strong> transformations infinitésima<strong>le</strong>s, alors il n’est pasnécessaire <strong>de</strong> connaître <strong>le</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s du groupelui-même, mais il suffit <strong>de</strong> connaître <strong>le</strong>s termes du premier ordre en <strong>le</strong>sx ν −x 0 ν, dans <strong>le</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s du groupe qui laissentinvariant un point x 0 1 . . . x0 n en position généra<strong>le</strong>.Il est d’une importance particulière <strong>de</strong> pouvoir déci<strong>de</strong>r si <strong>de</strong>uxpoints infiniment voisins x ν <strong>et</strong> x ν +dx ν possè<strong>de</strong>nt un invariant ω(x, dx)qui est homogène du premier ordre en <strong>le</strong>s dx ν . S’ils ont en eff<strong>et</strong> un telinvariant, on peut <strong>le</strong> considérer comme longueur d’un élément courbe,<strong>et</strong> l’on trouve par intégration que chaque courbe a une certaine longueur.Il n’est pas diffici<strong>le</strong> d’établir si un tel invariant existe ou non ; àc<strong>et</strong>te fin, on doit évi<strong>de</strong>mment constater simp<strong>le</strong>ment si <strong>le</strong> groupe (5) possè<strong>de</strong>un invariant qui est homogène du premier ordre en <strong>le</strong>s x ′ ν. Maiscela est très faci<strong>le</strong>.Si la transformation :n∑ ∂fUf =ν=1x ′ ν∂x ′ νse laisse exprimer par combinaison linéaire à partir <strong>de</strong>s transformationsinfinitésima<strong>le</strong>s (5), alors tous <strong>le</strong>s invariants éventuels <strong>de</strong> (5) sont homogènesd’ordre zéro, <strong>et</strong> il n’y en aura sûrement aucun qui est homogènedu premier ordre. Si au contraire Uf ne se peut pas s’exprimer par combinaisonlinéaire à partir <strong>de</strong>s transformations (5) <strong>et</strong> si <strong>le</strong> groupe (5) a engénéral un invariant, alors il en a toujours aussi un qui est homogène dupremier ordre ; car, sous <strong>le</strong>s hypothèses posées, <strong>le</strong>s équations :(5’) A k f =∑1...nµ να k µ ν x ′ µ∂f∂x ′ ν= 0 (k =1··· m)ont certainement une solution commune. Maintenant, puisque l’équationUf = 0 n’est pas conséquence <strong>de</strong> (5’) <strong>et</strong> puisque <strong>le</strong>s m croch<strong>et</strong>s[A k , U] s’annu<strong>le</strong>nt i<strong>de</strong>ntiquement, il est clair que <strong>le</strong>s équations :A 1 f = 0, . . ., A m f = 0, Uf = f


Deuxième solution au problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. 297ont éga<strong>le</strong>ment une solution commune.On voit donc qu’à partir <strong>de</strong> l’existence d’un invariant <strong>de</strong> <strong>de</strong>uxpoints à distance finie on ne peut pas déduire avec certitu<strong>de</strong> l’existenced’une longueur d’élément courbe, <strong>et</strong> par conséquent, qu’à <strong>de</strong>ux pointsfiniment éloignés l’un <strong>de</strong> l’autre peut très bien être associée une fonctiondistance, sans que <strong>le</strong>s courbes aient une longueur. Si en eff<strong>et</strong> <strong>de</strong>uxpoints finiment éloignés l’un <strong>de</strong> l’autre ont un invariant, il décou<strong>le</strong> duThéorème 44 que <strong>de</strong>ux points infiniment voisins x ν <strong>et</strong> x ν + dx ν ont auminimum un invariant, mais cependant, l’invariant en question peut êtrehomogène d’ordre zéro par rapport à tous <strong>le</strong>s dx ν , alors que <strong>le</strong>s courbesn’ont toutefois une longueur que lorsqu’il existe un invariant ω(x, dx)qui est homogène du premier ordre en <strong>le</strong>s dx ν .Le groupe du plan à trois paramètres :p, q, xp + yqfournit un exemp<strong>le</strong> pour cela. Relativement à lui, <strong>de</strong>ux points finimentéloignés l’un <strong>de</strong> l’autre ont un <strong>et</strong> un seul invariant, à savoir :y 2 − y 1x 2 − x 1,<strong>et</strong> pareil<strong>le</strong>ment, <strong>de</strong>ux points infiniment voisins ont un <strong>et</strong> un seul invariant,à savoir :dydx .Ainsi, bien que <strong>de</strong>ux points finiment éloignés l’un <strong>de</strong> l’autre possè<strong>de</strong>ntune fonction distance, <strong>le</strong>s courbes n’ont cependant pas <strong>de</strong> longueur relativementà ce groupe.Inversement, nous avons vu précé<strong>de</strong>mment qu’à partir <strong>de</strong> l’existenced’un invariant ω(x, dx) qui est homogène du premier ordre en dx,on ne peut en aucune façon déduire l’existence d’une fonction distanceentre <strong>de</strong>ux points finiment éloignés l’un <strong>de</strong> l’autre (voir p. 277 sq.).Nous pouvons maintenant exprimer aussi ce <strong>de</strong>rnier fait <strong>de</strong> la manièresuivante : Même si <strong>le</strong>s courbes ont une longueur, ce n’est pourtant paspour c<strong>et</strong>te raison que <strong>de</strong>ux points finiment éloignés l’un <strong>de</strong> l’autre ontune fonction distance, ou qu’ils possè<strong>de</strong>nt une ligne <strong>de</strong> liaison la pluscourte.Les considérations précé<strong>de</strong>ntes sur <strong>le</strong>s relations entre <strong>le</strong>s invariants<strong>de</strong> points finiment éloignés <strong>le</strong>s uns <strong>de</strong>s autres <strong>et</strong> <strong>le</strong>s invariants <strong>de</strong> pointsinfiniment voisins peuvent encore être complétées d’une manière essentiel<strong>le</strong>; on peut ainsi <strong>le</strong>s généraliser aussi en introduisant trois points ou


298 Division V. Chapitre 23. § 102.plus, en épuisant <strong>le</strong>s différentiel<strong>le</strong>s d’ordre <strong>de</strong>ux <strong>et</strong> d’ordre supérieur en<strong>le</strong>s x ν , <strong>et</strong> ainsi <strong>de</strong> suite. Nous nous réservons <strong>le</strong> droit <strong>de</strong> traiter d’unemanière détaillée <strong>de</strong> ces questions à une autre occasion.Nous nous tournons maintenant vers <strong>le</strong> problème véritab<strong>le</strong> du présentchapitre, i.e. vers la solution du problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz,<strong>et</strong> pour préciser, nous nous limitons tout d’abord, comme cela a été annoncéplus haut, à l’espace trois fois étendu.§ 102.Nous affirmons que <strong>le</strong>s mouvements euclidiens <strong>et</strong> non-euclidiens<strong>de</strong> R 3 sont entièrement caractérisés, lorsque l’on pose <strong>le</strong>s axiomes suivants:I) R 3 est une variété numérique.II) Les mouvements <strong>de</strong> R 3 forment un groupe réel continu, qui estengendré par <strong>de</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s.III) Si l’on fixe un point réel quelconque : y1 0, y0 2 , y0 3 en positiongénéra<strong>le</strong>, alors tous <strong>le</strong>s autres points réels : x 1 , x 2 , x 3 , en <strong>le</strong>squels unautre point réel : x 0 1, x 0 2, x 0 3 peut encore être transformé, satisfont uneéquation réel<strong>le</strong> <strong>de</strong> la forme :(6) W ( y 0 1 , y0 2 , y0 3 ; x0 1 , x0 2 , x0 3 ; x 1, x 2 , x 3)= 0,qui n’est pas réalisée pour : x 1 = y 0 1, x 2 = y 0 2, x 3 = y 0 3, <strong>et</strong> qui représente(en général) une surface réel<strong>le</strong> passant par <strong>le</strong> point : x 0 1, x 0 2, x 0 3.IV) Autour du point : y1, 0 y2, 0 y3, 0 une région finie trois fois étenduepeut être délimitée <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte qu’après fixation du point : y1 0, y0 2 , y0 3 ,chaque autre point réel : x 0 1 , x0 2 , x0 3 <strong>de</strong> la région peut encore être transformécontinûment en chaque autre point réel appartenant à la régionqui satisfait l’équation (6) <strong>et</strong> pouvant être relié au point : x 0 1, x 0 2, x 0 3 parune série <strong>de</strong> points continue <strong>et</strong> irréductib<strong>le</strong>.Si l’on raye <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux mots mis entre parenthèses dans l’Axiome III,ces axiomes suffisent sûrement aussi ; ce qui suit <strong>le</strong> montre, quand onsupprime partout <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux mots mis entre parenthèse. Si on conservedans l’Axiome III <strong>et</strong> dans la suite <strong>le</strong>s mots mis entre parenthèse, alors lasuite montre, si nous ne nous trompons pas, que <strong>le</strong>s axiomes sont encoreaussi satisfaits.


Deuxième solution au problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. 299Par G, nous voulons entendre un groupe continu fini ou infini quelconquequi est engendré par <strong>de</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s <strong>et</strong> quisatisfait <strong>le</strong>s Axiomes III <strong>et</strong> IV.Puisque <strong>le</strong>s équations (6) sont i<strong>de</strong>ntiquement réalisées pour : x 1 =x 0 1, x 2 = x 0 2, x 3 = x 0 3, il y a toujours, parmi l’ensemb<strong>le</strong> <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>spoints réels : x 1 , x 2 , x 3 qui satisfont l’équation (6), une famil<strong>le</strong> continuenon divisée en plusieurs parties, dans laquel<strong>le</strong> est contenu <strong>le</strong> point :x 0 1, x 0 2, x 0 3. D’après l’Axiome III, c<strong>et</strong>te famil<strong>le</strong> <strong>de</strong> points forme (en général)une surface passant par <strong>le</strong> point : x 0 1, x 0 2, x 0 3 (il est cependant imaginab<strong>le</strong>aussi qu’el<strong>le</strong> se réduise à une courbe passant par ce point, voire àce point lui-même). Quoi qu’il en soit, nous voulons l’appe<strong>le</strong>r une pseudosphèreappartenant au groupe G, <strong>et</strong> pour préciser, une pseudosphère<strong>de</strong> centre : y1, 0 y2, 0 y3 0 (cf.p. 171).Notre Axiome III exprime maintenant visib<strong>le</strong>ment qu’une pseudosphère<strong>de</strong> centre : y1 0, y0 2 , y0 3 ne passe jamais par son centre. En celarési<strong>de</strong> <strong>le</strong> fait que <strong>de</strong>ux points séparés restent aussi séparés, quand toutes<strong>le</strong>s transformations <strong>de</strong> G agissent, <strong>et</strong> donc que <strong>de</strong>ux points finiment éloignésl’un <strong>de</strong> l’autre ne peuvent jamais être transformés en <strong>de</strong>ux pointsinfiniment voisins (cf.p. 290).Mais notre Axiome IV peut à présent être exprimé <strong>de</strong> la manièresuivante : autour du point : y1, 0 y2, 0 y3, 0 une région finie trois fois étenduepeut être délimitée <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte qu’après fixation du point : y1, 0 y2, 0 y3,0chaque autre point réel <strong>de</strong> la région peut se mouvoir <strong>de</strong> manière complètementlibre sur la pseudosphère centrée en <strong>le</strong> point : y1 0, y0 2 , y0 3 quipasse par lui.Avant <strong>de</strong> passer à la détermination <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s groupes G qui satisfontnos axiomes, nous voulous encore comparer en peu <strong>de</strong> mots nos axiomes auxaxiomes helmholtziens.Dans ses axiomes, Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz <strong>de</strong>man<strong>de</strong> réel<strong>le</strong>ment plus quenous, même quand on fait complètement abstraction <strong>de</strong> son axiome <strong>de</strong> monodromie.Comme cela a été démontré auparavant, il décou<strong>le</strong> en eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> ses troispremiers axiomes que <strong>le</strong>s mouvements forment en général un groupe continufini, qui est engendré par <strong>de</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s ; toutefois, nous<strong>de</strong>mandons simp<strong>le</strong>ment dans notre Axiome II que <strong>le</strong>s mouvements forment ungroupe continu engendré par <strong>de</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s, donc nousn’excluons pas <strong>de</strong>puis <strong>le</strong> début la possibilité que <strong>le</strong> groupe soit infini. D’autrepart, nos Axiomes III <strong>et</strong> IV exigent essentiel<strong>le</strong>ment moins que <strong>le</strong> troisièmeaxiome helmholtzien.En eff<strong>et</strong>, alors que Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz exige que chaque point soitmobi<strong>le</strong> d’une manière parfaitement libre, tant qu’il n’est pas restreint par <strong>le</strong>s


300 Division V. Chapitre 23. § 102.équations qui existent entre lui <strong>et</strong> <strong>le</strong>s points mobi<strong>le</strong>s restants, nous <strong>de</strong>mandonsseu<strong>le</strong>ment qu’après fixation d’un point, chaque autre point soit parfaitementlibre, tant qu’il n’est pas limité par <strong>le</strong>s équations existant entre lui <strong>et</strong> <strong>le</strong>point fixé. À vrai dire, nous ajoutons encore l’exigence apparemment nouvel<strong>le</strong>qu’une pseudosphère ne passe jamais par son centre, mais c<strong>et</strong>te exigence n’estrien <strong>de</strong> plus qu’une version précise <strong>de</strong> ce que Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz a aussi<strong>de</strong>mandé implicitement. En eff<strong>et</strong>, ce <strong>de</strong>rnier exige en particulier qu’après fixationdu point : y1 0,y0 2 ,y0 3 , chaque autre point puisse se mouvoir d’une manièrecomplètement libre sur la pseudosphère passant par lui <strong>et</strong> centrée en <strong>le</strong> point :y1 0,y0 2 ,y0 3 . Si maintenant une <strong>de</strong>s pseudosphères en question passait par soncentre, alors, après fixation <strong>de</strong> : y1 0,y0 2 ,y0 3 , aucun point P <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te pseudosphèrene pourrait se mouvoir <strong>de</strong> manière parfaitement libre sur sa pseudosphère, carparmi <strong>le</strong>s transformations non-dégénérées <strong>de</strong> G qui laissent au repos <strong>le</strong> point :y1 0,y0 2 ,y0 3 , il n’y en a aucune qui transforme <strong>le</strong> point P en <strong>le</strong> point invariant :y1 0,y0 2 ,y0 3 .Venons-en maintenant à la détermination <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s groupes quisatisfont nos axiomes.Nous démontrons en premier lieu que chaque groupe <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te espèceest transitif <strong>et</strong> que <strong>de</strong>ux points finiment éloignés l’un <strong>de</strong> l’autre ontun <strong>et</strong> un seul invariant relativement à G.Si G était intransitif, il laisserait sûrement invariantes ∞ 1 surfacesréel<strong>le</strong>s dont <strong>le</strong>s équations pourraient être rapportées, au moyen d’un<strong>et</strong>ransformation ponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong>, à la forme : x 3 = const. Si maintenantnous fixions un point réel : y1 0, y0 2 , y0 3 en position généra<strong>le</strong>, alors chaqueautre point : x 0 1, x 0 2, x 0 3 pourrait évi<strong>de</strong>mment encore occuper seu<strong>le</strong>ment<strong>le</strong>s positions qui satisfont l’équation : x 3 = x 0 3, <strong>et</strong> par conséquent,l’équation (6) serait nécessairement <strong>de</strong> la forme : x 3 = x 0 3 . Donc la pseudosphèrecentrée en <strong>le</strong> point : y1 0, y0 2 , y0 3 serait représentée par l’équation: x 3 = const., à la suite <strong>de</strong> quoi une <strong>de</strong> ces pseudosphères passeraitpar son centre, ce qui est exclu. Ainsi, G ne peut pas être intransitif,mais il doit au contraire être transitif.En outre, il décou<strong>le</strong> <strong>de</strong> l’Axiome IV qu’après fixation d’un pointréel en position généra<strong>le</strong>, chaque autre point réel peut occuper (en général)encore exactement ∞ 2 positions différentes. Ainsi, il est clair quepar l’action <strong>de</strong> G, chaque paire <strong>de</strong> points <strong>de</strong> R 3 ne peut pas être transforméeen chaque autre paire <strong>de</strong> points, mais plutôt : une paire <strong>de</strong> pointsreçoit, via l’action <strong>de</strong> G, au maximum ∞ 5 positions différentes. Parconséquent, si Xf est une transformation infinitésima<strong>le</strong> quelconque <strong>de</strong>G, <strong>et</strong> si Y f a la même signification qu’à la page 292, alors il n’y a sûrement,parmi l’ensemb<strong>le</strong> <strong>de</strong>s équations : Xf +Y f = 0, pas plus que cinqéquations qui sont indépendantes <strong>le</strong>s unes <strong>de</strong>s autres, donc ces équations


Deuxième solution au problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. 301ont au minimum une solution en commun : Ω(x 1 , x 2 , x 3 ; y 1 , y 2 , y 3 ),c’est-à-dire que <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux points x ν <strong>et</strong> y ν ont en tout cas un invariantrelativement à G, à savoir l’invariant Ω(x, y).De la transitivité <strong>de</strong> G il décou<strong>le</strong> maintenant immédiatement que<strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux points x ν <strong>et</strong> y ν ont seu<strong>le</strong>ment un invariant relativement à G ;en eff<strong>et</strong>, s’ils avaient <strong>de</strong>ux ou même trois invariants, alors chaque paire<strong>de</strong> points occuperait au maximum ∞ 4 positions différentes par l’action<strong>de</strong> G, <strong>et</strong> par conséquent, après fixation d’un point en position généra<strong>le</strong>,chaque autre point pourrait se mouvoir au plus sur une courbe, ce qui s<strong>et</strong>rouve être en contradiction avec l’Axiome IV.Ainsi, G est réel<strong>le</strong>ment transitif <strong>et</strong> <strong>de</strong>ux points x ν <strong>et</strong> y ν finimentéloignés l’un <strong>de</strong> l’autre ont, relativement à G, seu<strong>le</strong>ment un invariant :Ω(x, y). Nous pouvons conclure <strong>de</strong> là que l’équation (6) peut être ramenéeà la forme :(6’) Ω ( x 1 , x 2 , x 3 ; y 0 1 , y0 2 , y0 3)= Ω(x01 , x 0 2 , x0 3 ; y0 1 , y0 2 , y0 3).Nous démontrons maintenant que notre groupe est réel-primitif.(Puisque l’ensemb<strong>le</strong> <strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>s pseudosphères <strong>de</strong> centre :y1, 0 y2, 0 y3 0 est représenté par une équation <strong>et</strong> puisque, parmi ces pseudosphères,se trouvent ∞ 1 surfaces réel<strong>le</strong>s, il est clair que seu<strong>le</strong>mentun nombre discr<strong>et</strong> <strong>de</strong> pseudosphères <strong>de</strong> centre : y1 0, y0 2 , y0 3 peut seréduire à <strong>de</strong>s courbes ou à <strong>de</strong>s points.) Comme (<strong>de</strong> plus) aucune <strong>de</strong>spseudosphères <strong>de</strong> centre : y1, 0 y2, 0 y3 0 ne peut passer par son centre, ilparaît clair qu’après fixation du point : y1, 0 y2, 0 y3, 0 aucune courbe ousurface passant par ce point ne peut rester au repos, <strong>et</strong> par conséquent,G est effectivement réel-primitif.À présent, il est faci<strong>le</strong> aussi <strong>de</strong> démontrer que G est fini <strong>et</strong> pourpréciser, qu’il a au plus six paramètres.Tout d’abord, il est en eff<strong>et</strong> certain qu’au moins ∞ 2 pseudosphèresdifférentes appartiennent à G. S’il n’y avait en eff<strong>et</strong> que ∞ 1 pseudosphères,alors il ne passerait par chaque point qu’une pseudosphère <strong>et</strong>chaque point serait <strong>le</strong> centre <strong>de</strong> la pseudosphère passant par lui ; maisceci ne doit pas être.<strong>Ens</strong>uite, soit P 1 , P 2 , P 3 <strong>et</strong> P quatre points réels quelconquesqui sont mutuel<strong>le</strong>ment en position généra<strong>le</strong>. Puisqu’il y a ∞ 2 pseudosphèresdifférentes, <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux pseudosphères centrées en P 1 <strong>et</strong> en P 2 passantpar P se coupent nécessairement en une courbe réel<strong>le</strong> C passant parP . Si maintenant C se trouvait aussi dans la pseudosphère centrée en P 3


302 Division V. Chapitre 23. § 102.passant par P , alors toutes <strong>le</strong>s pseudosphères passant par P se couperaientgénéra<strong>le</strong>ment en la courbe C ; si donc l’on fixait P , la courbe Cpassant par P resterait el<strong>le</strong> aussi nécessairement au repos. Mais nousavons démontré à l’instant que cela est impossib<strong>le</strong>. On obtient donc que<strong>le</strong>s trois pseudosphères <strong>de</strong> centres P 1 , P 2 <strong>et</strong> P 3 qui passent par P ontseu<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> point P en commun, mais n’ont pas en commun <strong>de</strong> courberéel<strong>le</strong> passant par ce point. Si maintenant nous fixons <strong>le</strong>s trois points P 1 ,P 2 <strong>et</strong> P 3 , alors P peut en tout cas se mouvoir seu<strong>le</strong>ment sur la variétéintersection[Schnittmannigfaltigkeit] <strong>de</strong>s trois pseudosphères passantpar P centrées en P 1 , P 2 <strong>et</strong> P 3 , <strong>et</strong> comme c<strong>et</strong>te variété-intersection neconsiste qu’en <strong>le</strong> point P , ce point P doit rester au repos. En d’autrestermes : dès qu’on fixe trois points réels qui sont mutuel<strong>le</strong>ment en positiongénéra<strong>le</strong>, tous <strong>le</strong>s points <strong>de</strong> R 3 restent généra<strong>le</strong>ment au repos.Maintenant, puisque G est transitif <strong>et</strong> puisqu’après fixation d’un point,chaque autre point réel en position généra<strong>le</strong> peut encore décrire une surface,la fixation <strong>de</strong> trois point revient à imposer au plus six conditions.Donc <strong>le</strong> groupe G est fini, <strong>et</strong> pour préciser, il a au plus six paramètres.Si nous fixons un point réel P en position généra<strong>le</strong>, alors la variétéprojective <strong>de</strong>s ∞ 2 éléments linéaires passant par P se transformepar l’action d’un groupe projectif réel g, qui a visib<strong>le</strong>ment au plus troisparamètres. Mais maintenant, d’après notre détermination <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>sgroupes projectifs réels du plan (voir p. 106 sq. <strong>et</strong> p. 380 sq.), nous obtenonsque chaque groupe projectif réel du plan qui a moins <strong>de</strong> trois paramètreslaisse au repos au moins un point réel. Si donc g avait moins d<strong>et</strong>rois paramètres, il laisserait au repos au minimum un élément linéaireréel passant par P , <strong>et</strong> il décou<strong>le</strong>rait <strong>de</strong> là que G serait réel-imprimitif,alors qu’il doit cependant être réel-primitif. Par conséquent g a exactementtrois paramètres, à la suite <strong>de</strong> quoi G a exactement six paramètres.Ainsi :Si un groupe réel G satisfait nos Axiomes III <strong>et</strong> IV, alors il est réelprimitifà six paramètres ; en outre, <strong>de</strong>ux points finiment éloignés l’un<strong>de</strong> l’autre ont, relativement à son action, seu<strong>le</strong>ment un invariant ; <strong>et</strong> parail<strong>le</strong>urs, G est constitué <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que <strong>le</strong>s ∞ 2 éléments linéairesréels passant par chaque point réel fixé en position généra<strong>le</strong> sont transforméspar l’action d’un groupe à trois paramètres.Avant toute chose, nous <strong>de</strong>vons maintenant établir quel<strong>le</strong>s sont <strong>le</strong>sdifférentes formes que peut prendre <strong>le</strong> groupe g défini ci-<strong>de</strong>ssus. Noussavons que g a trois paramètres <strong>et</strong> qu’il ne laisse invariant aucun élémentlinéaire. Si donc nous rapportons projectivement <strong>le</strong>s ∞ 2 éléments


Deuxième solution au problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. 303linéaires réels passant par P aux points réels d’un plan, alors g se transformeen un groupe projectif réel g à trois paramètres <strong>de</strong> ce plan, <strong>et</strong> pourpréciser, en un groupe par l’action duquel aucun point réel ne reste invariant.Mais d’après <strong>le</strong>s pages 106 <strong>et</strong> 384, chaque tel groupe g est semblab<strong>le</strong>,via une transformation projective réel<strong>le</strong> du plan, soit au groupeprojectif réel d’une conique non-dégénérée qui est représentée par uneéquation réel<strong>le</strong>, soit au groupe :p, q, y p − x q + c (x p + y q).Par conséquent, g laisse invariante soit une conique non-dégénérée dusecond <strong>de</strong>gré formée d’éléments linéaires qui est représentée par uneéquation réel<strong>le</strong>, soit il laisse invariant un élément <strong>de</strong> surface réel <strong>et</strong> dansc<strong>et</strong> élément, <strong>de</strong>ux éléments linéaires conjugués.Lorsque <strong>le</strong> <strong>de</strong>uxième cas se produit, à chaque point réel en positiongénéra<strong>le</strong> est associé par G un élément <strong>de</strong> surface réel invariant passantpar ce point, donc G laisse invariante une équation <strong>de</strong> Pfaff réel<strong>le</strong>, quinaturel<strong>le</strong>ment, à cause <strong>de</strong> la primitivité <strong>de</strong> G, ne doit pas être intégrab<strong>le</strong>.Si nous nous imaginons c<strong>et</strong>te équation rapportée à la forme : dz − ydxpar une transformation ponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong> <strong>de</strong> R 3 , alors G se transformeen un groupe réel à six paramètres G ′ , par l’action duquel l’équation :dz − ydx = 0 reste invariante. De plus, nous pouvons faire en sorte,via une transformation ponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong> à travers laquel<strong>le</strong> l’équation<strong>de</strong> Pfaff en question reste invariante, que l’origine <strong>de</strong>s coordonnées :x = y = z = 0 soit un point <strong>de</strong> position généra<strong>le</strong> relativement à l’action<strong>de</strong> G ′ (voir <strong>le</strong> Tome II, p. 402 sq.).Si nous fixons l’origine <strong>de</strong>s coordonnées, alors l’élément <strong>de</strong> surface: dz = 0 reste invariant, ainsi que <strong>de</strong>ux éléments linéaires imaginairesconjugués contenus en lui ; nous pouvons toujours, via une transformationréel<strong>le</strong> à travers laquel<strong>le</strong> l’origine <strong>de</strong>s coordonnées <strong>et</strong> l’équation: dz − ydx = 0 restent invariantes, transformer ces <strong>de</strong>ux élémentslinéaires en <strong>le</strong>s éléments linéaires :(7) dz = dx + idy = 0, d¯z = dx − idy = 0.Maintenant, puisque G ′ est transitif, <strong>et</strong> puisque, après fixation <strong>de</strong> l’origine<strong>de</strong>s coordonnées, <strong>le</strong>s éléments linéaires passant par l’origine sonttransformés par l’action d’un groupe à trois paramètres, G ′ doit contenirtrois transformations infinitésima<strong>le</strong>s du premier ordre en <strong>le</strong>s x, y, zdans <strong>le</strong> voisinage <strong>de</strong> l’origine <strong>de</strong>s coordonnées, mais au contraire, aucun<strong>et</strong>ransformation du second ordre, ou d’un ordre supérieur. Mais parail<strong>le</strong>urs, nous connaissons toutes <strong>le</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s quilaissent invariante l’équation : dz−ydx = 0 <strong>et</strong> qui sont du premier ordre


304 Division V. Chapitre 23. § 102.en <strong>le</strong>s x, y, z (voir <strong>le</strong> Tome II, p. 405), <strong>et</strong> nous reconnaissons immédiatementque parmi ces transformations, il y en a seu<strong>le</strong>ment quatre par<strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux éléments linéaires (7) restent invariants <strong>et</strong> à partir<strong>de</strong>squel<strong>le</strong>s on ne peut déduire, par combinaison linéaire, aucune transformationdu second ordre ou d’un ordre supérieur, <strong>et</strong> ce sont <strong>le</strong>s quatre :yp −xq + · · · , xp+yq +2zr + · · · , zp+· · · , zq + · · · ,où <strong>le</strong>s termes supprimés sont d’ordre <strong>de</strong>ux ou supérieur par rapport àx, y, z. Si nous tenons compte du fait que notre groupe G ′ contient précisémenttrois transformations infinitésima<strong>le</strong>s indépendantes du premierordre <strong>et</strong> que cel<strong>le</strong>s-ci ne doivent laisser au repos aucun élément linéairepassant par l’origine <strong>de</strong>s coordonnées, alors nous trouvons faci<strong>le</strong>mentque <strong>le</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s <strong>de</strong> G ′ , qui laissent au repos l’origine<strong>de</strong>s coordonnées, ont la forme :yp − xq + c (xp + yq + 2zr) + · · · , zp + · · · , zq + · · · .En outre, en tant que groupe transitif, G ′ contient naturel<strong>le</strong>ment encor<strong>et</strong>rois transformations infinitésima<strong>le</strong>s d’ordre zéro <strong>de</strong> la forme :(8) p + · · · , q + · · · , r + · · · .Le groupe linéaire homogène, que G ′ associe à l’origine <strong>de</strong>s coordonnées(cf. p. 294), est évi<strong>de</strong>mment <strong>de</strong> la forme :(9) y ′ p ′ − x ′ q ′ + c (x ′ p ′ + y ′ q ′ + 2z ′ r ′ ), z ′ p ′ , z ′ q ′ .Mais maintenant, <strong>de</strong>ux points finiment éloignés l’un <strong>de</strong> l’autre doiventavoir un invariant par rapport à G ′ , donc d’après <strong>le</strong>s pages 294 sq., <strong>le</strong>groupe linéaire homogène (9) doit possé<strong>de</strong>r un invariant, ce qui ne peutmanifestement se produire que si c s’annu<strong>le</strong>, <strong>et</strong> par conséquent on obtientqu’en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s transformations (8), G ′ en contient encore trois<strong>de</strong> la forme :(10) yp − xq + · · · , zp + · · · , zq + · · · ,<strong>et</strong> chaque transformation infinitésima<strong>le</strong> <strong>de</strong> G ′ peut être exprimée parcombinaison linéaire à partir <strong>de</strong> ces six-là.Rappelons maintenant à ce suj<strong>et</strong> que <strong>le</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s<strong>de</strong> G peuvent aussi être interprétées comme transformations <strong>de</strong>contact infinitésima<strong>le</strong>s du plan x, z, <strong>et</strong> qu’à chacune <strong>de</strong> ces transformations<strong>de</strong> contact infinitésima<strong>le</strong>s est associée une fonction caractéristiquepar laquel<strong>le</strong> el<strong>le</strong> est parfaitement déterminée. En particulier, <strong>le</strong>s fonctionscaractéristiques <strong>de</strong>s transformations (10) s’énoncent <strong>de</strong> la manière


suivante :Deuxième solution au problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. 305x 2 + y 2 + · · · , yz + β 3 (x, y) + · · · , xz + α 3 (x, y) + · · · ,où α 3 <strong>et</strong> β 3 sont certaines fonctions entièrement homogènes <strong>de</strong> <strong>de</strong>grétrois par rapport à x <strong>et</strong> à y, <strong>et</strong> où <strong>le</strong>s termes supprimés sont à chaquefois d’un rang en x, y, z qui est supérieur à celui <strong>de</strong>s termes qui sontécrits (voir <strong>le</strong> Tome II, p. 526 sq. <strong>et</strong> p. 532 sq.). Mais maintenant, G ′doit nécessairement contenir aussi la transformation infinitésima<strong>le</strong> dontla fonction caractéristique possè<strong>de</strong> la forme :(11) { yz+β 3 +· · · , xz+α 3 +· · ·} = z 2 +λ 2 (x, y) z+λ 4 (x, y)+· · · ,où nous entendons par λ 2 <strong>et</strong> par λ 4 <strong>de</strong>s fonctions entièrement homogènes<strong>de</strong> <strong>de</strong>gré 2 <strong>et</strong> 4 par rapport à x <strong>et</strong> y (loc. cit., p. 321 <strong>et</strong> p. 526 sq.).La seu<strong>le</strong> transformation infinitésima<strong>le</strong> dont la fonction caractéristiquepossè<strong>de</strong> la forme (11) serait du second ordre en x, y, z, alors que G ′ necontient cependant absolument aucune transformation infinitésima<strong>le</strong> dusecond ordre. Par conséquent, nous parvenons au résultat qu’il n’y a pasdu tout <strong>de</strong> groupe G ′ à six paramètres ayant la constitution considéréeici, <strong>et</strong> donc que <strong>le</strong> <strong>de</strong>uxième <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux cas distingués à la page 303 nepeut pas du tout se réaliser.Si l’on veut éviter <strong>le</strong>s calculs avec <strong>le</strong>s fonctions caractéristiques, on peutaussi procé<strong>de</strong>r <strong>de</strong> la manière suivante : G ′ laisse invariante l’équation <strong>de</strong> Pfaff :dz − ydx = 0 <strong>et</strong>, quand on fixe un point réel en position généra<strong>le</strong>, alors <strong>de</strong>uxéléments linéaires imaginaires conjugués restent au repos dans l’élément linéaireque l’équation : dz − ydx = 0 attache à ce point. Il décou<strong>le</strong> <strong>de</strong> làque G ′ , interprété comme groupe <strong>de</strong> transformations <strong>de</strong> contact du plan x,z,laisse invariantes <strong>de</strong>ux équations différentiel<strong>le</strong>s ordinaires conjuguées du secondordre. Ainsi, grâce à une transformation <strong>de</strong> contact (imaginaire) du plan,nous pouvons parvenir à ce que <strong>le</strong>s courbes intégra<strong>le</strong>s <strong>de</strong> l’une <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>uxéquations différentiel<strong>le</strong>s soient transformées en <strong>le</strong>s points du plan. Nous pouvonsdonc nous supposer <strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s x,y,z choisies <strong>de</strong>puis <strong>le</strong> début <strong>de</strong> tel<strong>le</strong>sorte que G ′ , interprété comme groupe <strong>de</strong> transformations <strong>de</strong> contact du planx,z, ne consiste qu’en <strong>de</strong>s transformations ponctuel<strong>le</strong>s prolongées, <strong>et</strong> qui enoutre laisse invariante encore une équation différentiel<strong>le</strong> ordinaire du secondordre. Mais maintenant, nous avons vu à la page 76 que chaque groupe continufini <strong>de</strong> transformations ponctuel<strong>le</strong>s du plan qui laisse invariante une équationdifférentiel<strong>le</strong> ordinaire du second ordre est semblab<strong>le</strong>, via une transformationponctuel<strong>le</strong>, à un groupe projectif du plan. Par conséquent, nous pouvonsadm<strong>et</strong>tre que G ′ , lorsqu’en général il existe, provient par prolongation d’ungroupe projectif du plan à six paramètres ; avec cela, nous n’avons naturel<strong>le</strong>mentpas besoin <strong>de</strong> considérer comme différents l’un <strong>de</strong> l’autre <strong>de</strong>ux groupesprojectifs qui, à l’intérieur du groupe projectif général, sont conjugués l’un à


306 Division V. Chapitre 23. § 103.l’autre [g<strong>le</strong>ichberechtigt sind], ou sont dualistiques l’un <strong>de</strong> l’autre ; nous pouvonsdonc supposer que G ′ provient par prolongation du groupe linéaire général:p, r, xp, zp, xr, zrdu plan, <strong>et</strong> ainsi, que dans <strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s choisies x,y,z, il possè<strong>de</strong> la forme :p, r, xp − yq, zp − y 2 q, xr + q, zr + yq.Mais nous avons déjà démontré aux pages 191 sq. au suj<strong>et</strong> <strong>de</strong> ce groupe querelativement à lui, <strong>de</strong>ux points finiment éloignés l’un <strong>de</strong> l’autre n’ont aucun invariant.Ainsi, on obtient à nouveau qu’un groupe G ′ <strong>de</strong> la nature ici <strong>de</strong>mandéen’existe pas du tout.Il reste encore à traiter <strong>le</strong> premier <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux cas distingués à lapage 303.Si ce cas se produit, <strong>le</strong>s ∞ 2 éléments linéaires passant par chaquepoint réel fixé en position généra<strong>le</strong> sont transformés par l’action d’ungroupe à trois paramètres, <strong>et</strong> pour préciser, <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> façon qu’un cônenon-dégénéré du second <strong>de</strong>gré constitué d’éléments linéaires reste invariant.Par conséquent, G laisse invariante une équation réel<strong>le</strong> <strong>de</strong> laforme :1,2,3∑µ να µν (x 1 , x 2 , x 3 ) dx µ dx ν = 0,dont <strong>le</strong> déterminant ne s’annu<strong>le</strong> pas. Maintenant, puisque notre G est àsix paramètres, on obtient, grâce au Théorème 35 p. 391, qu’il peut êtr<strong>et</strong>ransformé, via une transformation ponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong> <strong>de</strong> R 3 , soit en <strong>le</strong>groupe <strong>de</strong>s mouvements euclidiens, soit en l’un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux groupes <strong>de</strong>smouvements non-euclidiens, soit en l’un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux groupes suivants :p 1 , p 2 , p 3 , x 1 p 2 − x 2 p 1 , x 2 p 3 + x 3 p 2 , x 3 p 1 + x 1 p 3 ;p 1 + x 1 U 1 , p 2 + x 2 U 2 , p 3 − x 3 U 3 ,x 1 p 2 − x 2 p 1 , x 2 p 3 + x 3 p 2 , x 3 p 1 + x 1 p 3 .Cependant, <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rniers groupes ne satisfont pas notre Axiome III,car pour ces <strong>de</strong>ux-là l’origine <strong>de</strong>s coordonnées est un point en positiongénéra<strong>le</strong> <strong>et</strong> une <strong>de</strong>s pseudosphères ayant pour centre l’origine <strong>de</strong>s coordonnées,est la conique :x 2 1 + x2 2 − x2 3 = 0,mais c<strong>et</strong>te pseudosphère passe par son centre, ce qui est justement exclupar l’Axiome III.


Deuxième solution au problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. 307Ainsi on a démontré que <strong>le</strong>s mouvements euclidiens <strong>et</strong> noneuclidienssont effectivement entièrement caractérisés par <strong>le</strong>s axiomesposés à la page 298.§ 103.Nous allons maintenant montrer que <strong>le</strong>s mouvements euclidiens <strong>et</strong>non-euclidiens <strong>de</strong> R 4 sont entièrement caractérisés, lorsqu’on pose <strong>le</strong>saxiomes suivants.I) R 4 est une variété numérique.II) Les mouvements <strong>de</strong> R 4 forment un groupe réel continu, qui estengendré par <strong>de</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s.III) Si l’on fixe un point réel quelconque : y1 0 . . .y0 4 en positiongénéra<strong>le</strong>, alors tous <strong>le</strong>s autres points réels : x 1 , x 2 , x 3 en <strong>le</strong>squels unautre point réel : x 0 1 . . .x 0 4 peut encore être transformé, satisfont uneéquation réel<strong>le</strong> <strong>de</strong> la forme :(12) W ( y 0 1 . . .y 0 4 ; x 0 1 . . .x 0 4 ; x 1 . . .x 4)= 0,qui n’est pas réalisée pour : x 1 = y 0 1, . . .,x 4 = y 0 4, <strong>et</strong> qui représente engénéral une variété trois fois étendue passant par <strong>le</strong> point : x 0 1 . . .x0 4 .IV) Autour du point : y1 0 . . .y0 4 , une région finie quatre fois étenduepeut être délimitée <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que <strong>le</strong>s conditions suivantes sontsatisfaites : Si l’on fixe <strong>le</strong> point : y1 0 . . .y0 4 , alors chaque autre pointréel : x 0 1 . . .x 0 4 <strong>de</strong> la région peut encore être transformé continûmenten tous <strong>le</strong>s points réels : x 1 . . . x 4 qui satisfont l’équation (12). Si l’onfixe, outre <strong>le</strong> point : y1 0 . . .y0 4 , encore un <strong>de</strong>uxième point réel : z0 1 . . .z0 4<strong>de</strong> la région, alors chaque autre point réel : x 0 1 . . .x0 4 <strong>de</strong> la région peutencore être transformé continûment en tous <strong>le</strong>s points réels : x 1 . . .x 4<strong>de</strong> la région qui satisfont <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux équations : (12) <strong>et</strong> :(13) W ( z 0 1 . . .z0 4 ; x0 1 . . .x0 4 ; x 1 . . .x 4)= 0.Avec cela, il est à chaque fois supposé que <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux points : x 0 1 . . .x 0 4 <strong>et</strong>x 1 . . .x 4 sont reliés l’un à l’autre par une série continue <strong>et</strong> irréductib<strong>le</strong><strong>de</strong> points <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te sorte.Nous faisons à nouveau remarquer expressément à ce suj<strong>et</strong> que cesaxiomes contiennent peut-être certains éléments superflus, bien qu’ils<strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt moins que <strong>le</strong>s axiomes helmholtziens. En eff<strong>et</strong>, Monsieur <strong>de</strong>Helmholtz <strong>de</strong>man<strong>de</strong> en plus que lorsque trois points sont fixés, chaquequatrième point est encore complèment libre <strong>de</strong> se mouvoir, autant que


308 Division V. Chapitre 23. § 103.l’autorisent <strong>le</strong>s équations par <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s il est lié avec <strong>le</strong>s points fixés ; àc<strong>et</strong> eff<strong>et</strong>, c’est même son axiome <strong>de</strong> monodromie qui se présente.Soit à nouveau G un groupe quelconque qui satisfait nos axiomes.La variété passant par <strong>le</strong> point : x 0 1 . . .x 0 4 qui est définie par l’équation(12), nous l’appe<strong>le</strong>rons naturel<strong>le</strong>ment encore une pseudosphère <strong>de</strong>centre : y1 0 . . .y0 4 relative à G. Notre Axiome III exprime ensuite qu’engénéral, <strong>le</strong>s pseudosphères sont <strong>de</strong>s variétés réel<strong>le</strong>s trois fois étendues<strong>et</strong> qu’une pseudosphère ne passe jamais par son centre.On peut maintenant démontrer, exactement comme dans <strong>le</strong> précé<strong>de</strong>ntparagraphe, que G est transitif, <strong>et</strong> que <strong>de</strong>ux points finiment éloignésl’un <strong>de</strong> l’autre : x 1 . . .x 4 <strong>et</strong> : y 1 . . .y 4 ont un <strong>et</strong> un seul invariant :Ω(x, y) relativement à G. Il décou<strong>le</strong> alors immédiatement <strong>de</strong> là quel’équation (12) peut être ramenée à la forme :(14) Ω ( x 1 . . .x 4 ; y 0 1 . . .y0 4)= Ω(x01 . . . x 0 4 ; y0 1 . . .y0 4).Nous ne <strong>de</strong>vons donc pas nous attar<strong>de</strong>r plus longtemps sur ce suj<strong>et</strong>.De même, la démonstration que G est réel-primitif se présentepresque exactement comme au § 102. Parmi <strong>le</strong>s pseudosphères <strong>de</strong>centre : y 0 1 . . .y 0 4, il y en a seu<strong>le</strong>ment un nombtre discr<strong>et</strong> qui ne sont pas<strong>de</strong>s variétés réel<strong>le</strong>s à trois dimensions, mais qui sont seu<strong>le</strong>ment <strong>de</strong>uxfois ou une fois étendues, voire même se réduisent à un point. Commepar ail<strong>le</strong>urs aucune pseudosphère ne passe par son centre, alors aprèsfixation du point : y 0 1 . . .y 0 4, il est certain qu’aucune variété ponctuel<strong>le</strong>passant par ce point ne peut rester au repos. Par conséquent, G doit êtreréel-primitif.Enfin, exactement comme au § 102, on peut aussi démontrer queG est fini, <strong>et</strong> pour préciser, qu’il a au plus six paramètres.Si en eff<strong>et</strong> P 1 . . .P 4 <strong>et</strong> P sont cinq points mutuel<strong>le</strong>ment en positiongénéra<strong>le</strong>, alors <strong>le</strong>s quatre pseudosphères <strong>de</strong> centres P 1 . . .P 4 passant parP ne peuvent se couper qu’en P ; car si el<strong>le</strong>s se coupaient en une variétéM passant par P qui ne consistait pas seu<strong>le</strong>ment en <strong>le</strong> point P , alorstoutes <strong>le</strong>s pseudosphères passant par P se couperaient généra<strong>le</strong>ment enla variété M, par suite <strong>de</strong> quoi M resterait aussi en même temps aurepos après fixation <strong>de</strong> P , ce qui est exclu. Si maintenant nous fixons<strong>le</strong>s quatre points P 1 . . .P 4 , alors P ne peut visib<strong>le</strong>ment se mouvoir quesur l’intersection <strong>de</strong>s pseudosphères centrées en P 1 . . .P 4 qui passentpar P , <strong>et</strong> puisque c<strong>et</strong>te intersection consiste seu<strong>le</strong>ment en <strong>le</strong> point P luimême,P doit rester au repos, <strong>et</strong> parce que P est un point en positiongénéra<strong>le</strong>, chaque point <strong>de</strong> l’espace reste en même temps généra<strong>le</strong>ment


Deuxième solution au problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. 309au repos. Sous <strong>le</strong>s hypothèses posées, la fixation <strong>de</strong> P 1 . . .P 4 nécessiteau plus : 4 + 3 + 2 + 1 = 10 conditions, donc on obtient que G est fini,<strong>et</strong> pour préciser, qu’il a au plus dix paramètres.Choisissons maintenant, parmi <strong>le</strong>s pseudosphères <strong>de</strong> centre P 1 , unequelconque d’entre el<strong>le</strong>s en position généra<strong>le</strong>, <strong>et</strong> appelons-la K 1 . SiP 2 est un point quelconque <strong>de</strong> K 1 , il y a ∞ 1 pseudosphères <strong>de</strong> centreP 2 , mais dont aucune ne coïnci<strong>de</strong> avec K 1 , car une pseudosphère necontient jamais son centre.Si nous fixons P 1 , alors P 2 peut se mouvoir d’une manière complètementlibre sur la pseudosphère K 1 , qui, sous <strong>le</strong>s hypothèses posées,est certainement une variété réel<strong>le</strong> trois fois étendue. Si, hormisP 1 , nous fixons aussi encore P 2 , alors chaque autre point P 3 <strong>de</strong> K 1 peutseu<strong>le</strong>ment se mouvoir sur la variété M ′ qui est découpée dans K 1 parla pseudosphère <strong>de</strong> centre P 2 qui passe par P 3 ; <strong>et</strong> d’après l’Axiome IV,P 3 peut se mouvoir d’une manière complètement libre sur c<strong>et</strong>te variété.Nous pouvons ajouter que, sous <strong>le</strong>s hypothèses posées, M ′ est en généralune variété réel<strong>le</strong> <strong>de</strong>ux fois étendue.Si nous déterminons <strong>le</strong>s points <strong>de</strong> K 1 par trois coordonnées :x 1 , x 2 , x 3 <strong>et</strong> si nous appelons : y 0 1 , y0 2 , y0 3 <strong>le</strong>s coordonnées <strong>de</strong> P 2, <strong>et</strong> :x 0 1 , x0 2 , x0 3 cel<strong>le</strong>s <strong>de</strong> P 3, nous pouvons aussi exprimer tout cela commesuit : Si P 1 est fixé, alors <strong>le</strong>s points : x 1 , x 2 , x 3 <strong>de</strong> la pseudosphère K 1 sonttransformés <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte qu’après fixation d’un point réel : y 0 1, y 0 2, y 0 3 <strong>de</strong>K 1 , chaque autre point réel x 0 1 , x0 2 , x0 3 <strong>de</strong> K 1 peut encore être envoyé surtous <strong>le</strong>s points réels : x 1 , x 2 , x 3 <strong>de</strong> K 1 qui satisfont une équation <strong>de</strong> laforme :W ( y 0 1 , y0 2 , y0 3 ; x0 1 , x0 2 , x0 3 ; x 1, x 2 , x 3)= 0;en général, c<strong>et</strong>te équation détermine une variété réel<strong>le</strong> <strong>de</strong>ux fois étenduese trouvant sur K 1 . Et maintenant, lorsqu’on fixe P 1 , <strong>le</strong>s points <strong>de</strong> la variététrois fois étendue K 1 sont visib<strong>le</strong>ment transformés par un groupeG 1 ; d’après ce qui a justement été dit, il s’ensuit <strong>de</strong> plus que ce groupesatisfait tous <strong>le</strong>s axiomes posés dans <strong>le</strong> paragraphe précé<strong>de</strong>nt, par suite<strong>de</strong> quoi nous pouvons conclure que G 1 a six paramètres <strong>et</strong> qu’il peutêtre transformé en <strong>le</strong> groupe <strong>de</strong>s mouvements euclidiens, ou en <strong>le</strong>s <strong>de</strong>uxgroupes <strong>de</strong> mouvements non-euclidiens <strong>de</strong> R 3 , via une transformationponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong> en <strong>le</strong>s variab<strong>le</strong>s : x 1 , x 2 , x 3 . D’autre part, nous avons vuplus haut que G est transitif <strong>et</strong> qu’il a au plus dix paramètres, donc <strong>le</strong>sous-groupe <strong>de</strong> G par <strong>le</strong>quel P 1 reste invariant n’a certainement pas plusque six paramètres. Par conséquent, on obtient que G possè<strong>de</strong> exactementdix paramètres, <strong>et</strong> qu’après fixation <strong>de</strong> P 1 , <strong>le</strong>s points <strong>de</strong> R 4 sonttransformés par un groupe à six paramètres ; en même temps, <strong>le</strong>s points


310 Division V. Chapitre 23. § 103.<strong>de</strong> chaque pseudosphère <strong>de</strong> centre P 1 qui est généra<strong>le</strong>ment située sonttransformés par un groupe isomorphe-holoédrique à six paramètres, quiest semblab<strong>le</strong>, par une transformation ponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong> <strong>de</strong> R 3 , soit augroupe <strong>de</strong>s mouvements euclidiens, soit à l’un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux groupes <strong>de</strong>mouvements non-euclidiens.Si nous fixons P 1 <strong>et</strong> P 2 , alors <strong>le</strong>s points <strong>de</strong> K 1 sont encore transforméspar l’action d’un groupe à trois paramètres, <strong>et</strong> il en va <strong>de</strong> mêmepour <strong>le</strong>s points <strong>de</strong> chaque autre pseudosphère <strong>de</strong> centre P 1 qui est généra<strong>le</strong>mentsituée. Les groupes réels à trois paramètres en question sontnaturel<strong>le</strong>ment isomorphes-holoédriques l’un avec l’autre. Mais si unsous-groupe réel à trois paramètres <strong>de</strong>s mouvements euclidiens ou noneuclidiens<strong>de</strong> R 3 est isomorphe-holoédrique avec un sous-groupe à troisparamètres qui laisse invariant un point réel, alors il est manifestementlui-même <strong>le</strong> sous-groupe à trois paramètres qui laisse invariant un certainpoint réel (cf. p. 385 <strong>et</strong> Chap. 10). Par conséquent, lorsque P 1 <strong>et</strong> P 2sont fixés, sur chaque pseudosphère <strong>de</strong> centre P 1 qui est généra<strong>le</strong>mentsituée, un certain point réel doit en général rester au repos, <strong>et</strong> pour préciser,<strong>le</strong>s points en question doivent visib<strong>le</strong>ment constituer une courbequi passe par P 2 . La symétrie montre qu’après fixation <strong>de</strong> P 1 <strong>et</strong> <strong>de</strong> P 2 , ilpasse aussi en même temps par P 1 une courbe continue dont <strong>le</strong>s pointsrestent entièrement au repos.Si donc nous fixons P 1 <strong>et</strong> P 2 , alors il passe par P 1 ainsi que par P 2une courbe continue dont <strong>le</strong>s points restent au repos. On peut s’imaginerque ces <strong>de</strong>ux courbes coïnci<strong>de</strong>nt, mais il est aussi possib<strong>le</strong> qu’el<strong>le</strong>s diffèrentl’une <strong>de</strong> l’autre. Nous voulons laisser en suspens la question <strong>de</strong>savoir si <strong>le</strong> <strong>de</strong>uxième cas peut réel<strong>le</strong>ment se produire. Afin <strong>de</strong> pouvoirnous exprimer d’une manière commo<strong>de</strong>, nous voulons appe<strong>le</strong>r pseudodroitel’ensemb<strong>le</strong> <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux courbes. Ainsi nous pouvons dire : Pourchaque paire <strong>de</strong> points P 1 <strong>et</strong> P 2 <strong>de</strong> R 4 , une pseudodroite est déterminéequi passe par P 1 <strong>et</strong> par P 2 ; si on fixe P 1 <strong>et</strong> P 2 , alors <strong>le</strong>s points <strong>de</strong> c<strong>et</strong>tepseudodroite restent entièrement au repos.Il est clair que chaque point <strong>de</strong> la pseudosphère K 1 détermine unepseudodroite passant par P 1 <strong>et</strong> que <strong>le</strong>s pseudodroites ainsi déterminéespassent en général toutes par P 1 ; car si nous fixons en même temps queP 1 un point P en position généra<strong>le</strong> qui ne se trouve pas sur K 1 , alorsun point P ′ sur K 1 reste aussi au repos <strong>et</strong> la pseudodroite déterminéepar P 1 <strong>et</strong> par P coïnci<strong>de</strong> donc avec cel<strong>le</strong> qui est déterminée par P 1 <strong>et</strong>par P ′ . Par conséquent, exactement ∞ 3 pseudodroites passant par P 1sont en général déterminées, mais puisque chacune <strong>de</strong> ces pseudodroitesconsiste éventuel<strong>le</strong>ment en <strong>de</strong>ux courbes, dont l’une seu<strong>le</strong>ment passe


Deuxième solution au problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. 311par P 1 lui-même, il n’est pas certain <strong>de</strong>puis <strong>le</strong> début que la famil<strong>le</strong> <strong>de</strong>scourbes passant par P 1 , qui est déterminée par ces ∞ 3 pseudodroites,est constituée <strong>de</strong> ∞ 3 courbes différentes.Comme ∞ 3 pseudodroites différentes passant par P sont déterminées<strong>et</strong> comme, d’autre part, ∞ 3 éléments linéaires différents passentaussi par P 1 , il y a parmi ces éléments linéaires un certain nombre, i.e.∞ m (0 m 3) qui sont différents, <strong>et</strong> qui sont constitués <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorteque par chacun d’entre eux passent certaines <strong>de</strong> ces pseudodroites-là,alors qu’aucune tel<strong>le</strong> pseudodroite ne passe par <strong>le</strong>s éléments linéairesrestants. Nous allons démontrer que <strong>le</strong> nombre m en question est simp<strong>le</strong>mentégal à trois.En eff<strong>et</strong>, si P 1 est fixé, alors <strong>le</strong>s pseudodroites passant par P 1 sontéchangeab<strong>le</strong>s l’une avec l’autre, <strong>et</strong> donc la variété <strong>de</strong>s ∞ m éléments linéairesdéfinie à l’instant reste au repos. Comme <strong>de</strong> plus à chaque point<strong>de</strong> la pseudosphère K 1 est associée l’une <strong>de</strong>s pseudodroites passant parP 1 <strong>et</strong> comme, après fixation <strong>de</strong> P 1 , chaque point <strong>de</strong> K 1 peut être encor<strong>et</strong>ransformé en chaque autre, alors, après fixation <strong>de</strong> P 1 , chacune <strong>de</strong>spseudodroites déterminées passant par P 1 peut aussi être transforméeen chaque autre <strong>et</strong> par conséquent aussi, chacun <strong>de</strong>s ces ∞ m élémentslinéaires-là peut être transformé en chaque autre. Il décou<strong>le</strong> <strong>de</strong> là quepar chacun <strong>de</strong> ces ∞ m éléments linéaires passent ∞ 3−m pseudodroitesdifférentes, <strong>et</strong> que la pseudosphère K 1 se décompose en ∞ m variétésréel<strong>le</strong>s (3 − m) fois étendues, <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte que chacun <strong>de</strong> nos ∞ m élémentslinéaires est associé à l’une <strong>de</strong> ces variétés ; après fixation <strong>de</strong> P 1 ,ces ∞ m variétés (3 − m) fois étendues sont échangeab<strong>le</strong>s l’une avecl’autre. Si maintenant on avait m = 1 ou = 2, alors, après fixation <strong>de</strong>P 1 , <strong>le</strong>s points <strong>de</strong> K 1 se transformeraient <strong>de</strong> manière réel<strong>le</strong>-imprimitive,ce qui n’est évi<strong>de</strong>mment pas <strong>le</strong> cas. Si d’un autre côté, on avait m = 0,alors un nombre discr<strong>et</strong> d’éléments linéaires réels passant par P 1 resteraitau repos en même temps que P 1 , <strong>et</strong> notre groupe G à dix paramètresserait donc réel-imprimitif, alors qu’il doit cependant être réel-primitif.Par conséquent, <strong>le</strong> nombre m défini plus haut est réel<strong>le</strong>ment égal à3, en conséquence <strong>de</strong> quoi il passe en général par P 1 une pseudodroitedirigée par chaque élément linéaire réel.Ainsi, on a démontré qu’il existe, entre <strong>le</strong>s ∞ 3 éléments linéairesen P 1 <strong>et</strong> <strong>le</strong>s ∞ 3 points réels <strong>de</strong> la pseudosphère K 1 , une relation qui entout cas est univoque <strong>et</strong> réversib<strong>le</strong> [ein<strong>de</strong>utig umkehrbar] à l’intérieurd’une certaine région <strong>et</strong> qui reste maintenue par toutes <strong>le</strong>s transformations<strong>de</strong> G qui laissent invariant <strong>le</strong> point P 1 . Si nous nous rappelonsalors qu’après fixation <strong>de</strong> P 1 , <strong>le</strong>s ∞ 3 éléments linéaires passant par P 1


312 Division V. Chapitre 23. § 103.sont transformés par l’action d’un groupe projectif réel g, nous reconnaissonsdonc immédiatement que ce groupe g est semblab<strong>le</strong> au groupeG 1 , par <strong>le</strong>quel <strong>le</strong>s points <strong>de</strong> K 1 sont transformés en même temps, <strong>et</strong>pour préciser, que g est semblab<strong>le</strong> à G 1 via une transformation ponctuel<strong>le</strong>réel<strong>le</strong> <strong>de</strong> R 3 . Mais comme G 1 était <strong>de</strong> son côté semblab<strong>le</strong>, via un<strong>et</strong>ransformation ponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong> <strong>de</strong> R 3 , soit au groupe <strong>de</strong>s mouvementseuclidiens, soit à l’un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux groupes <strong>de</strong> mouvements non-euclidiens<strong>de</strong> c<strong>et</strong> espace, il en décou<strong>le</strong> donc, en tenant compte du Théorème 19,p. 292, que g est à six paramètres <strong>et</strong> qu’il peut être transformé au moyend’une transformation projective réel<strong>le</strong> en l’un <strong>de</strong>s trois groupes <strong>de</strong> mouvementsmentionnés.Ainsi, notre groupe G à dix paramètres est constitué <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sortequ’après fixation d’un point réel en position généra<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s ∞ 3 élémentslinéaires réels passant par ce point sont transformés par l’action d’ungroupe à six paramètres, <strong>et</strong> pour préciser, d’un groupe euclidien ounon-euclidien.Si <strong>le</strong>s éléments linéaires en question sont transformés par l’actiond’un groupe euclidien, alors, en même temps que chaque point réel enposition généra<strong>le</strong>, une botte [Bün<strong>de</strong>l] réel<strong>le</strong> <strong>de</strong> ∞ 2 éléments linéairespassant par un tel point reste invariante, donc G laisse invariante uneéquation <strong>de</strong> Pfaff réel<strong>le</strong> :4∑(15)α ν (x 1 . . .x 4 ) dx ν = 0,1qui ne doit naturel<strong>le</strong>ment pas être intégrab<strong>le</strong>, parce que sinon G seraitréel-imprimitif. Mais maintenant, il est connu d’après la théorie du problème<strong>de</strong> Pfaff, qu’à toute équation <strong>de</strong> Pfaff non intégrab<strong>le</strong> à quatrevariab<strong>le</strong>s est associée un système invariant simultané. Ce système simultané,qui est éga<strong>le</strong>ment réel pour l’équation réel<strong>le</strong> (15), <strong>de</strong>vrait naturel<strong>le</strong>mentrester invariant par G, donc dans ce cas G <strong>de</strong>vrait être réelimprimitif; par conséquent, <strong>le</strong> cas où <strong>le</strong>s ∞ 3 éléments linéaires passantpar un point réel fixé sont transformés <strong>de</strong> manière euclidienne n’entregénéra<strong>le</strong>ment pas en ligne <strong>de</strong> compte.D’un autre côté, si <strong>le</strong>s éléments linéaires en question se transforment<strong>de</strong> manière non-euclidienne, alors à chaque point réel en positiongénéra<strong>le</strong> <strong>et</strong> associée une conique du second <strong>de</strong>gré réel<strong>le</strong> ou imaginaireconstituée d’éléments linéaires, qui, par un choix approprié <strong>de</strong>svariab<strong>le</strong>s, reçoit ou bien la forme :(16) dx 2 1 + · · · + dx2 4 = 0,


ou bien la forme :Deuxième solution au problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. 313(17) dx 2 1 + dx2 2 + dx2 3 − dx2 4 = 0.Maintenant, puisque G a dix paramètres <strong>et</strong> que <strong>le</strong>s éléments linéairespassant par chaque point réel fixé se transforment par l’action d’ungroupe à six paramètres, on obtient grâce aux développements <strong>de</strong>spages 385 sq., que G peut être transformé via une transformation ponctuel<strong>le</strong>réel<strong>le</strong> <strong>de</strong> R 4 soit en <strong>le</strong> groupe <strong>de</strong>s mouvements euclidiens, soit enl’un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux groupes <strong>de</strong> mouvements non-euclidiens — ces cas sontpossib<strong>le</strong>s, lorsque la forme (16) se produit —, ou bien qu’il est semblab<strong>le</strong>,via une transformation ponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong> <strong>de</strong> R 4 soit au groupeprojectif d’une <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux variétés :soit au groupe :x 2 1 + x2 2 + x2 3 − x2 4 = ±1,p 1 . . .p 4 , x µ p ν − x ν p µ , x µ p 4 + x 4 p µ (µ, ν = 1,2, 3)— ces cas correspon<strong>de</strong>nt à la forme (17).Mais <strong>le</strong>s trois <strong>de</strong>rniers groupes n’entrent pas du tout en ligne <strong>de</strong>compte, car pour chacun d’entre eux, il y a visib<strong>le</strong>ment, parmi <strong>le</strong>s pseudosphèresayant un centre donné, toujours une pseudosphère qui passepar son centre. Par conséquent, il ne reste plus que <strong>le</strong>s mouvements euclidiens<strong>et</strong> non-euclidiens, <strong>et</strong> on a donc démontré que ces trois famil<strong>le</strong>s<strong>de</strong> mouvements <strong>de</strong> R 4 sont complètement caractérisées par <strong>le</strong>s axiomesindiqués à la page 307.À présent, nous voulons indiquer <strong>de</strong> quel<strong>le</strong> manière ces considérationsse réalisent pour <strong>le</strong>s espaces <strong>de</strong> dimension supérieure à quatre.Dans R n (n > 2) nous <strong>de</strong>mandons pareil<strong>le</strong>ment que l’espacesoit une variété numérique <strong>et</strong> que <strong>le</strong>s mouvements forment un groupecontinu engendré par <strong>de</strong>s transformations infinitésima<strong>le</strong>s. Si un pointréel : y1 0 . . .y0 n en position généra<strong>le</strong> est fixé, alors tout autre pointréel : x 0 1 . . .x0 n peut être envoyé encore seu<strong>le</strong>ment sur <strong>le</strong>s points réels :x 1 . . .x n qui satisfont une certaine équation :W ( y 0 1 . . .y 0 n ; x 0 1 . . .x 0 n ; x 1 . . .x n)= 0.Avec cela, nous supposons que c<strong>et</strong>te équation représente en général unevariété réel<strong>le</strong> (n − 1) fois étendue, <strong>et</strong> qu’el<strong>le</strong> n’est pas satisfaite pour :x 1 = y1, 0 . . .,x n = yn.0La variété réel<strong>le</strong> passant par <strong>le</strong> point : x 0 1 . . .x0 n qui est déterminéepar l’équation : W = 0, nous l’appelons bien sûr une pseudosphère


314 Division V. Chapitre 23. § 103.<strong>de</strong> centre : y1 0 . . .y0 n . Notre <strong>de</strong>rnière exigence exprime alors visib<strong>le</strong>mentqu’une pseudosphère ne peut jamais passer par son centre.Enfin, nous <strong>de</strong>mandons encore que dans R n , puisse être délimitéeune région finie n fois étendue, à l’intérieur <strong>de</strong> laquel<strong>le</strong> <strong>le</strong>s exigencessuivantes soient satisfaites : Si l’on fixe un point P 1 <strong>de</strong> la région, alorstout autre point <strong>de</strong> la région doit pouvoir se mouvoir d’une manière entièrementlibre sur la pseudosphère <strong>de</strong> centre P 1 passant par lui. Si l’onfixe q points P 1 . . .P q <strong>de</strong> la région qui sont mutuel<strong>le</strong>ment en positiongénéra<strong>le</strong>, alors, tant que q est < n − 1, chaque autre point en positiongénéra<strong>le</strong> appartenant à la région doit pouvoir se mouvoir d’une manièreentièrement libre sur la variété passant par P qui est l’intersection <strong>de</strong>s qpseudosphères <strong>de</strong> centres P 1 . . .P q .Nous affirmons que ces exigences suffisent pour caractériser <strong>le</strong>smouvements euclidiens <strong>et</strong> non-euclidiens. Mais nous voulons seu<strong>le</strong>mentindiquer la démonstration <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te assertion.Nous supposons que notre assertion est déjà démontrée pour l’espaceà n − 1 dimensions <strong>et</strong> nous démontrons, en prenant c<strong>et</strong>te hypothèsepour base, que notre assertion est vraie aussi pour pour l’espace àn dimensions. Comme nous avons l’avons déjà démontrée dans <strong>le</strong>s casn = 3 <strong>et</strong> n = 4, sa validité en général sera alors établie.Mais pour démontrer que notre assertion est vraie dans R n , aussitôtqu’el<strong>le</strong> l’est dans R n−1 , nous procédons comme dans <strong>le</strong> cas n = 4. Nousmontrons que chaque groupe G qui satisfait nos axiomes est transitif <strong>et</strong>que relativement à lui, <strong>de</strong>ux points finiment éloignés l’un <strong>de</strong> l’autre ontun <strong>et</strong> un seul invariant ; <strong>de</strong> plus, chaque groupe tel est fini, réel-primitif,<strong>et</strong> il contient au plus 1 n(n + 1) paramètres. Si à présent nous fixons un2point réel P 1 en position généra<strong>le</strong>, alors on obtient faci<strong>le</strong>ment que <strong>le</strong>spoints <strong>de</strong> chaque pseudosphère <strong>de</strong> centre P 1 généra<strong>le</strong>ment située sonttransformés par un groupe qui satisfait tous <strong>le</strong>s axiomes dans R n−1 , <strong>et</strong>par conséquent, grâce à l’hypothèse prise pour base, ce groupe peutêtre transformé, via une transformation ponctuel<strong>le</strong> <strong>de</strong> R n−1 , soit en <strong>le</strong>groupe <strong>de</strong>s mouvements euclidiens, soit en l’un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux groupes <strong>de</strong>mouvements non-euclidiens <strong>de</strong> c<strong>et</strong> espace.Il décou<strong>le</strong> <strong>de</strong> là tout d’abord que G contient précisément 1 n(n+1) 2paramètres. De plus, exactement comme dans <strong>le</strong> cas n = 4, on peut démontrerque <strong>de</strong>ux points <strong>de</strong> R n déterminent une pseudodroite. Pour cela,on peut se baser sur <strong>le</strong>s recherches <strong>de</strong> Monsieur Werner, qui, à l’initiative<strong>de</strong> <strong>Lie</strong>, a déterminé <strong>le</strong>s plus grands sous-groupes qui sont contenusdans <strong>le</strong> groupe projectif d’une variété non-dégénérée du second <strong>de</strong>grédans l’espace à n > 5 dimensions.


Deuxième solution au problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-Helmholtz. 315Après que l’existence <strong>de</strong>s pseudodroites est connue, on montre ànouveau, exactement comme dans <strong>le</strong> cas n = 4, que <strong>le</strong>s ∞ n−1 élémentslinéaires réels passant par chaque point réel fixé en position généra<strong>le</strong>sont transformés par G <strong>de</strong> manière euclidienne ou non-euclidienne.Enfin, on démontre faci<strong>le</strong>ment qu’ils ne peuvent certainement pas êtr<strong>et</strong>ransformés <strong>de</strong> manière euclidienne, <strong>et</strong> grâce à la considération <strong>de</strong>s casrestants, on obtient que G peut être transformé, via une transformationponctuel<strong>le</strong> réel<strong>le</strong> <strong>de</strong> R n , soit en <strong>le</strong> groupe <strong>de</strong>s mouvements euclidiens,soit en l’un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux groupes <strong>de</strong> mouvements non-euclidiens <strong>de</strong> R n .Nous voulons terminer <strong>le</strong> présent chapitre en rectifiant une p<strong>et</strong>iteerreur qui s’est glissée aux pages 229 sq. À c<strong>et</strong> endroit-là, nousavons en eff<strong>et</strong> dit que <strong>le</strong> troisième axiome <strong>de</strong> Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz estconstitué <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux parties, dont la secon<strong>de</strong> contient certaines exigencesqui ne décou<strong>le</strong>nt pas <strong>de</strong> cel<strong>le</strong>s qui sont posées dans la première, bienque, d’après sa version, c<strong>et</strong>te secon<strong>de</strong> partie semb<strong>le</strong> contenir seu<strong>le</strong>ment<strong>de</strong>s conséquences <strong>de</strong> la première. Mais en fait, <strong>le</strong>s choses se passenttout autrement. Si en eff<strong>et</strong> on comprend ce que nous avons appelé àce moment-là la première partie du troisième axiome helmholtzien d<strong>et</strong>el<strong>le</strong> sorte que, quand un point P 1 est fixé, chaque autre point doit pouvoirse mouvoir d’une manière entièrement libre sur la pseudosphère <strong>de</strong>centre P 1 qui passe par lui, <strong>et</strong> si l’on en tire la conclusion qu’une pseudosphèrene peut jamais passer par son centre, alors à vrai dire, ce quenous avons appelé la secon<strong>de</strong> partie du troisième axiome helmholtzienne contient rien qui ne décou<strong>le</strong> pas déjà <strong>de</strong> la première partie ; cela estmontré par <strong>de</strong>s considérations similaires à cel<strong>le</strong>s que nous avons développéesdans <strong>le</strong> présent chapitre, <strong>et</strong> par exemp<strong>le</strong>, dansR 3 , afin <strong>de</strong> démontrerque trois pseudosphères dont <strong>le</strong>s centres sont mutuel<strong>le</strong>ment enposition généra<strong>le</strong> se coupent généra<strong>le</strong>ment en un seul point. Et maintenant,puisqu’au cours <strong>de</strong> notre recherche sur <strong>le</strong>s axiomes helmholtziens,nous avons toujours interprété cela <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte qu’une pseudosphèrene doit pas passer par son centre (cf. p. 253), notre division en <strong>de</strong>uxparties du troisième axiome effectuée aux pages 229 sq. est erronée. Àvrai dire, il reste toujours <strong>de</strong>s chances que Monsieur <strong>de</strong> Helmholtz aitproposé <strong>le</strong>s conséquences qu’il tire <strong>de</strong> son troisième axiome, sans <strong>le</strong>sjustifier, bien que <strong>le</strong>ur justification ne soit pas du tout aussi simp<strong>le</strong> quecela.


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Quatrième <strong>de</strong> couverture :<strong>Sophus</strong> <strong>Lie</strong>, <strong>Friedrich</strong> <strong>Engel</strong><strong>et</strong> <strong>le</strong> problème <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong>-HelmholtzEst-il possib<strong>le</strong> <strong>de</strong> caractériser l’espace euclidien tridimensionnelqui s’offre si immédiatement à l’intuition physique au moyend’axiomes mathématiques simp<strong>le</strong>s <strong>et</strong> naturels ? Plus généra<strong>le</strong>ment, estilpossib<strong>le</strong> <strong>de</strong> caractériser <strong>le</strong>s espaces <strong>de</strong> Bolyai-Lobatchevskiĭ à courbureconstante négative, ainsi que <strong>le</strong>s espaces <strong>de</strong> <strong>Riemann</strong> à courbureconstante positive, à l’exclusion <strong>de</strong> toute autre géométrie contraire àune intuition directe ?À une époque (1830–50) où l’émergence nécessaire <strong>de</strong>s géométriesdites non-euclidiennes <strong>de</strong>venait incontestab<strong>le</strong>, c’est <strong>Riemann</strong> quia sou<strong>le</strong>vé c<strong>et</strong>te question profon<strong>de</strong> <strong>et</strong> diffici<strong>le</strong> dans son discours d’habilitation(1854), sans chercher, toutefois, à la résoudre complètement.Helmholtz (1868) l’interprétera en conceptualisant <strong>le</strong> mouvement <strong>de</strong>scorps dans l’espace <strong>et</strong> il tentera d’établir rigoureusement que <strong>le</strong> caractèremétrique <strong>et</strong> loca<strong>le</strong>ment homogène d’un espace se déduit d’axiomes<strong>de</strong> mobilité maxima<strong>le</strong> pour <strong>de</strong>s corps rigi<strong>de</strong>s.Mais il fallut attendre <strong>le</strong>s travaux <strong>de</strong> <strong>Sophus</strong> <strong>Lie</strong>, <strong>et</strong> notammentla Theorie <strong>de</strong>r Transformationsgruppen (2100 pages, 1888–93) écriteen collaboration avec <strong>Friedrich</strong> <strong>Engel</strong>, pour qu’une solution complète<strong>et</strong> rigoureuse soit apportée à ce fascinant problème, à la fois au planlocal <strong>et</strong> au plan global. L’introduction historique, philosophique <strong>et</strong> mathématiqueainsi que la traduction que nous proposons ici aspirent àfaire connaître un aspect <strong>de</strong> l’œuvre monumenta<strong>le</strong> <strong>de</strong> <strong>Sophus</strong> <strong>Lie</strong> qui<strong>de</strong>meure essentiel<strong>le</strong>ment peu évoqué au sein <strong>de</strong> la philosophie traditionnel<strong>le</strong><strong>de</strong> la géométrie.Joël Merker, agrégé <strong>de</strong> mathématiques <strong>et</strong> <strong>de</strong> philosophie, spécialisted’analyse <strong>et</strong> <strong>de</strong> géométrie à plusieurs variab<strong>le</strong>s réel<strong>le</strong>s ou comp<strong>le</strong>xes,chercheur au CNRS - Département <strong>de</strong> Mathématiques <strong>et</strong> Applications,Éco<strong>le</strong> Norma<strong>le</strong> Supérieure.

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