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La traduction en milieu diglossique - Manioc

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l’histoire des populations anglophones, hispanophones, germanophones ou autres. « Culture »signifie » ici la prise <strong>en</strong> compte, dans l’acte de <strong>traduction</strong> des paramètres, certes linguistiqueset littéraires, mais aussi philosophiques, anthropologiques, psychologiques, sociologiques ethistoriques, toutes choses que faute de temps, l’institution scolaire et universitaire ne peutpr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> charge. D’où la nécessité de créer des filières de <strong>traduction</strong>__chose qui existedepuis longtemps pour l’interprétation__différ<strong>en</strong>tes des filières de langues étrangères, aumoins au niveau de la lic<strong>en</strong>ce. Car si on a prévu des institutions pour former des interprètes,ri<strong>en</strong> de tel n’existe pour les traducteurs. Il suffit d’une lic<strong>en</strong>ce, d’une maîtrise, d’un CAPES,d’une agrégation ou d’un doctorat dans n’importe quelle langue étrangère ou d’êtresimplem<strong>en</strong>t bilingue de naissance pour se s<strong>en</strong>tir autorisé à traduire un roman, par exemple. Untel manque nous interpelle beaucoup au GEREC-F d’autant que la problématique de la<strong>traduction</strong> créole/français et vice-versa est quelque chose de très particulier comme nousallons le voir maint<strong>en</strong>ant.Traduire <strong>en</strong> <strong>milieu</strong> <strong>diglossique</strong>Nous sommes, dans les pays créolophones, confrontés à une situation inédite sur laquelle nes’est jamais p<strong>en</strong>chée la traductologie traditionnelle. En effet, nous disposons de deux languesdont l’une, le français, jouit du statut de « langue haute » et est une vieille langue littérairepatinée par des siècles d ‘usage tandis que l’autre, le créole, se trouve <strong>en</strong> position de « languebasse » et est une langue jeune, <strong>en</strong>core massivem<strong>en</strong>t ancrée dans l’oralité (bi<strong>en</strong> que l’onécrive des textes <strong>en</strong> créole depuis le <strong>milieu</strong> du XVIIIe siècle c’est-à-dire depuis deux bonssiècles). Cette situation que l’on qualifie de diglossie, concept qui a connu maintsremaniem<strong>en</strong>ts depuis un demi-siècle, change la donne du problème traductologique. En effet,les traductologues réfléchiss<strong>en</strong>t non seulem<strong>en</strong>t à partir de langues écrites mais surtout delangues au statut plus ou moins comparable : l’anglais et le français, l’espagnol et l’allemandetc… Nous par contre, nous sommes sommés de réfléchir et de travailler à partir de deuxlangues à l’équipem<strong>en</strong>t et au statut complètem<strong>en</strong>t différ<strong>en</strong>ts et qui s’affront<strong>en</strong>t au sein d’unseul et même écosystème linguistique. Nous sommes égalem<strong>en</strong>t confrontés, avec l’exist<strong>en</strong>ced’une lic<strong>en</strong>ce et d’une maîtrise de créole ainsi qu’un CAPES de créole, à un problème depédagogisation de créole et donc de la <strong>traduction</strong> créole/français. Le problème est à la foissimple et énorme : comm<strong>en</strong>t traduire d’une langue ou vers une langue hautem<strong>en</strong>t littérairecomme le français d’une langue ou vers une langue principalem<strong>en</strong>t orale comme le créole ?Ici, le concept de la base de la traductologie traditionnelle, à savoir l’équival<strong>en</strong>ce, vole <strong>en</strong>éclat. Impossible, <strong>en</strong> effet, de chercher des équival<strong>en</strong>ts <strong>en</strong>tre une langue comme le créole quiest <strong>en</strong> voie de se constituer <strong>en</strong> langue littéraire depuis une cinquantaine d’années et une languecomme le français qui <strong>en</strong> dispose d’une solidem<strong>en</strong>t charp<strong>en</strong>tée depuis au moins dix siècles.Notre apport, au Gerec-F, a consisté donc à inscrire la problématique traductologique dans unchamp qu’elle n’avait jamais abordé et qui précisém<strong>en</strong>t constitue un gisem<strong>en</strong>t heuristique trèsimportant, <strong>en</strong> raison des problématiques qui s’y déploi<strong>en</strong>t <strong>en</strong> rapport avec des phénomènesatypiques liés précisém<strong>en</strong>t aux dissymétries générées par le statut <strong>diglossique</strong>, assorti del’opposition anthropolittéraire langue orale/langue écrite. D’ailleurs, certains paradoxespeuv<strong>en</strong>t être relevés qui démontr<strong>en</strong>t à l’évid<strong>en</strong>ce la fécondité de la démarche générée à partirde la théorisation de la diglossie littéraire, initiée par les catalanistes et les occitanistes etpoursuivie par les créolistes. <strong>La</strong> traductologie devi<strong>en</strong>t alors la voie royale pour créer lesconditions vers la souveraineté scripturale du créole à l’instar des grandes langueseuropé<strong>en</strong>nes, à ceci près que le statut politique des créoles diffère de beaucoup de celui deslangues concernées au XVIe siècle par la <strong>traduction</strong> de la Bible.

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