travail manuel <strong>le</strong> pousse à s’engager dans <strong>le</strong> groupe des prêtres dits du Prado où se pratique unespiritualité orientée vers <strong>le</strong>s plus pauvres.Maroc 1973‐1981L’Algérie n'ayant pas besoin de prêtres à ce moment‐là, il est recruté par l'évêque de Rabat etpart pour Casablanca à la paroisse d’Aïn Sebha. Il est aumônier d'un collège technique Lyauteydépendant de l'ambassade de France, mais ouvert à tous. Laïcité oblige, il doit faire <strong>le</strong> catéà l'extérieur tout en gardant de bons rapports avec <strong>le</strong> corps enseignant. Nombreux contacts avec <strong>le</strong>smilieux musulmans à I'ancienne église des Roches Noires transformée en mosquée.Puis appui à I’ACO au profit des ouvriers notamment portugais. Voyages et rencontres avec cesmêmes milieux dans tout <strong>le</strong> Maroc.Graulhet depuis 1981Revenu pour effectuer l'année de formation exigée des prêtres du Prado, il fréquente l’équipetoulousaine animée par un formateur spécialisé pendant un an. La suite est connue de tous, puisquec’est <strong>le</strong> service en paroisse à Graulhet et en plus la responsabilité durant quelques annéesd'aumônier régional des gens du voyage.Jean‐Pierre SénatCe n’est qu’un « Au revoir »L’heure a sonné. Le père Robert Bès nous quitte après trente ans de sacerdoce à Graulhet. Je refused’y croire, bien que prévenue de puis plusieurs mois. Cela fait mal, très mal.En effet, depuis huit ans, je chemine avec l’abbé Robert afin d’assumer la catéchèse aux enfants des« gens du voyage », parfois même à quelques adultes. Tous rejetés, qualifiés d’adjectifs b<strong>le</strong>ssants,dépourvus de délicatesse, par une grande majorité de croyants et de non‐croyants. Pour ne b<strong>le</strong>sserpersonne, je dirai : « C’est humain ». Notre mission est une mission ingrate, diffici<strong>le</strong>, où nous‐mêmessommes souvent critiqués. Désireux de continuer malgré et contre tout, notre catéchèse s’affirme,heureux d’évangéliser ces enfants différents mais spontanés, comme tous <strong>le</strong>s enfants du monde, en<strong>le</strong>ur apportant la joie du Christ ressuscité.Je reverrai toujours <strong>le</strong> père Bès en ce 1 er mai 2012 lors du pè<strong>le</strong>rinage à Sainte‐Germaine de Pibrac. Unso<strong>le</strong>il généreux était au rendez‐vous. Les « gens du voyage », parents et enfants, en particulier ceuxde Toulouse, étaient fort nombreux. Ce jour‐là, j’ai vu <strong>le</strong> père Bès transformé, radieux. À chaquestation du chemin de Croix, inspiré par l’Esprit Saint, l’improvisation du père Robert s’est vouluecompréhensib<strong>le</strong> pour tous : paro<strong>le</strong>s p<strong>le</strong>ines de foi, paro<strong>le</strong>s à la ferveur à nul<strong>le</strong> autre pareil<strong>le</strong>. Tout envoulant rester égal à lui‐même, je dirais que ce jour‐là, il s’est surpassé. Ce chemin de Croix était‐ilpour lui une dernière fois ? Je ne sais.Le père Bès est un grand priant. Combien de fois, lors d’une trop longue attente « d’enfants etparents du voyage », qui tardaient à se joindre à nous, ou ne répondaient pas au « oui » formulé pareux, combien de fois alors, n’ai‐je pas surpris <strong>le</strong> père Bès se retirer, al<strong>le</strong>r à l’écart, loin de nous ‐comme <strong>le</strong> faisait Jésus pour prier‐ invoquant Dieu, Père, Fils et esprit, la Sainte Vierge Marie,égrenant <strong>le</strong> chape<strong>le</strong>t ?Pauvre parmi <strong>le</strong>s pauvres, me faisant souvent penser à saint Martin, j’ai toujours cru que <strong>le</strong> père Bèsatteignait la sainteté. S’il me lit aujourd’hui, il me répondra : « Dieu seul est saint ». Combien de fois,père Robert, ne m’avez‐vous pas fait l’éloge de sœur Marie des Neiges, aujourd’hui décédée ? Il estdéjà loin <strong>le</strong> temps où Rémy Roblin était des nôtres. « Tout passe et nous passons ». Beaucoup d’entrenous regrettent déjà <strong>le</strong> départ du père Bès. Ne s’occupait‐il pas de la Fraternité ? Des handicapés ?18
De l’aumônerie ? Qui d’autre rendait visite aux malades à l’Hôpital de chez nous ? De même, <strong>le</strong>srésidents des deux maisons de retraite lui tenaient à cœur. Le père Bès est toujours allé ver <strong>le</strong>ssouffrants, <strong>le</strong>s démunis, <strong>le</strong>s rejetés. Jamais, il ne pourra <strong>le</strong>s oublier. N’était‐il pas lui aussi souffrant dese rendre compte d’une tel<strong>le</strong> détresse humaine ?Ce n’est qu’un « Au revoir », père Robert. Je sais qu’à votre départ, vous ne montrerez pas votreémotion, mais que vous aurez <strong>le</strong> courage de sourire et d’encourager ceux que vous devez laisser.Sachez que nous vous aimons bien et que nous ne vous oublierons pas. Au revoir, père Robert etmerci.Je voudrais que <strong>le</strong> père Kouamé qui nous quitte aussi, sache qu’il laissera <strong>le</strong> souvenir d’un jeuneprêtre assumant sa mission d’une autre façon‐à laquel<strong>le</strong> nous n’étions pas habitués‐ comme tous <strong>le</strong>sjeunes prêtres d’ici ou d’ail<strong>le</strong>urs. Merci pour votre travail accompli parmi nous et <strong>le</strong> temps que vousnous avez consacré.Soyez heureux à Albi et prenez soin de vous père Robert. Vous nous rendrez parfois visite, ce que jesouhaite de tout cœur. Continuer la route sans vous va être dur. Mais je sais qu’en nous quittant,vous n’oublierez pas de me dire et de nous dire avec notre diacre Michaël : « LATCHO DROM », «Bonne route ! »Anny AlibertInterview père Badjosse KOUAMÉ mardi 29 mai 2012Père Kouamé : J’ai un ami Jésus‐Christ qui est là…Père, que retenez‐vous de votre passage à la paroisse de Graulhet ?Je suis arrivé <strong>le</strong> 5 janvier 2010 sur la paroisse et j’ai été intronisé <strong>le</strong> dimanche 24 janvier parMonseigneur Pierre‐Marie Carré qui m’avait donné comme mission de venir « aider <strong>le</strong>s prêtres deGraulhet ».Le contexte était différent de celui de ma précédente paroisse de Crépy‐en‐Valois, vil<strong>le</strong>proche de Roissy‐Char<strong>le</strong>s de Gaul<strong>le</strong> et cité‐dortoir où la population relativement jeune part <strong>le</strong> matinet rentre <strong>le</strong> soir après sa journée de travail. Les deux paroisses de Crépy et de Graulhet n’ont pas <strong>le</strong>même projet. Je suis passé dans plusieurs paroisses avec une majorité de jeunes qui s’occupaient dela paroisse.Une paroisse vivante prise en charge par <strong>le</strong>s plus de 60 ansCe qui me frappe ici à Graulhet, ce sont <strong>le</strong>s personnes de plus de 60 ans, <strong>le</strong>s retraités qui prennent encharge la paroisse. C’est ce qui m’édifie dans cette paroisse de Graulhet ; el<strong>le</strong> n’a rien à envier à uneparoisse jeune. C’est une paroisse vivante et prise en charge par ses paroissiens. Je pense que <strong>le</strong>sparoissiens devraient être fiers de cela.Accompagner toute personne qui voudrait connaître Jésus‐ChristLe jour où Mgr m’a présenté et intronisé, je soulignais que dans ma mission: « Je ne suis pas là pourun groupe précis. Je suis là pour toute personne de 0 à 77 ans qui voudrait connaître Jésus‐Christ. » Sije rencontre des jeunes, c’est bien, mais j’accompagne toute personne. Je me suis senti à l’aise aveccette tranche d’âge des paroissiens graulhétois.Au sujet de la cohabitation avec l’équipe en place<strong>Voir</strong> des prêtres de plus de 70 ans qui sont fiers et qui continuent la pastora<strong>le</strong>, c’est encourageant. Çaveut dire que cela vaut la peine d’être prêtre. Dans l’Église, on est prêtre à vie. Si tu ne peux plusbouger, tu peux encore prier. C’est une chance que tout se soit bien passé. C’est un côté édifiant.19