Tuttu un mondu d’ogetti-Anthologie RoCoCo - P.A.Scolca et X.Casanova

864 ROCOCO série
GEORGEs PERETTi
TUTT’UN MONDU D’OGETTI
Corse. Plus loin, après une porte capitonnée de
cuir miel et crevassé, aux semences d’acier vieilli,
des rayonnages superposés faisant le coin,
contiendraient des coffrets de CD et des piles de
vieux disques vinyle aux pochettes impeccables, à
côté d’une platine Lynson Deck de 1983, au capot
refermé, posée sur un ampli Quad 44 éteint, et que
surmonterait une affiche sous verre pour le premier
Festiventu de Calvi. De la première fenêtre
aux croisées immenses, garnie de longs rideaux de
lin écru, dénués de passementerie, on découvrirait
la ligne bleue de la mer, plus ou moins perturbée
par les masses jaunes et bleues des ferries, la vaste
vacuité de la place saint Nicolas, le haut de la statue
de Napoléon par Bartolini. Une écritoire de
style Louis Philippe en noyer sombre et clair, posée
sur une maie, encombrée de lettres, de prospectus
et de feuilles griffonnées, s’accompagnerait d’un
fauteuil Voltaire fraîchement retapissé de toile à
matelas, à rayures taupes et violettes. Le tout s’inscrirait
dans l’espace séparant la première de la seconde
fenêtre, toute aussi immense, toute aussi
lumineuse, un grand rectangle de ciel et de soleil.
Plus loin, une sellette aux jambes fines, au plateau
de marqueterie précieuse, nacre, acajou et palissandre,
supporterait un combiné orange (PTT
1972) ainsi qu’un filofax recouvert de tissu Louis
Vuitton et un bloc-notes Mont-Blanc accompagné
de son Meisterstuck collector. Puis, au-delà d’une
autre porte, de facture byzantine celle-là, chinée
sur un marché d’Alexandrie au cours de la croisière
Costa spéciale couples échangistes, après un bibus
bourré de magazines de décoration hollandais,
surmonté d’un grand vase de Murano dans les tons
de beige et amarante rempli d’immortelles et de