LUX 308 novembre_décembre 2020
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PERSPECTIVES
COLORIMÉTRIE
De XYZ à LMS, vers plus de personnalisation
La colorimétrie, considérée comme la science de la couleur, a pour objectif de spécifier les couleurs
de manière universelle en s’appuyant sur un ensemble de données et de procédures. Fondée sur
des évaluations visuelles, la CIE (Commission internationale de l’éclairage) travaille, à présent,
au lien entre colorimétrie et physiologie expliquant, comme le précise Sophie Jost 1 , certains désaccords.
Dès 1931, la CIE a normalisé le système colorimétrique XYZ
largement utilisé depuis lors. Dans ce système, obtenu par transformation
linéaire du système colorimétrique RGB (rouge, vert, bleu),
les primaires théoriques ont été choisies pour que toutes les couleurs
aient des composantes trichromatiques X, Y et Z positives, et pour
que Y représente la luminance.
Rappelons que ce système CIE 1931 est valable pour un observateur
de référence avec un champ visuel de 2° (pour lequel la vision des
couleurs est due uniquement aux cônes). Pour des champs visuels
plus large (pour lesquels les bâtonnets sont présents), la CIE a normalisé,
en 1964, un autre système colorimétrique appelé X 10
Y 10
Z 10
,
correspondant à un champ visuel de 10°.
Fonctions colorimétriques
2
1
x y z I m s
NOUVEL ENSEMBLE
Depuis ces dates, des améliorations considérables ont été réalisées
au niveau de la mesure et du contrôle de la couleur qui se sont traduites
par d’immenses progrès portant sur la connaissance de la
vision des couleurs. « En particulier, souligne Sophie Jost, en ce qui
concerne la détermination d’un système dont les fonctions colorimétriques
seraient directement liées à la sensibilité des cônes et ayant une signification
physiologique. »
En effet, si l’on en revient aux fondamentaux, la vision des couleurs
commence, avec l’absorption des photons, par les pigments visuels
contenus dans les cônes de la rétine dans laquelle existent trois familles
de cônes :
- les cônes L (Long), sensibles aux grandes longueurs d’ondes ;
- les cônes M (Medium), sensibles aux longueurs d’ondes moyennes ;
- les cônes S (Short), sensibles aux courtes longueurs d’onde.
Ainsi, la lumière, en tant que stimulus déclenche une sensation de couleur
qui peut être définie par les trois signaux L, M, S correspondant à
trois types de cônes. « Malgré la difficulté de la tâche, poursuit Sophie
Jost, la CIE a récemment déterminé les sensibilités spectrales fondamentales
des cônes (correspondant à un rayonnement externe, incident sur la
cornée), solution qio a permis de déduire un nouvel ensemble de fonctions
colorimétriques fondamentales nommé LMS. »
ASSURER LES INDUSTRIELS
Cette colorimétrie, basée sur la physiologie, pourrait expliquer le désaccord
parfois constaté entre des couleurs visuellement différentes
alors que les valeurs colorimétriques sont identiques. En effet, certaines
études ont démontré que des erreurs importantes peuvent
exister, dans la spécification actuelle des couleurs, en utilisant l’observateur
colorimétrique standard CIE 1931 « en particulier lors de
l’utilisation de sources de lumière à spectre étroit comme les LED », précise
la responsable de la division-1 de CIE-France. Et d’ajouter qu’« en
prenant en compte le champ de vision, l’âge de l’observateur, tout en
considérant les variabilités interindividuelles, la colorimétrie LMS pourrait
expliquer les désaccords entre individus et permettre la mise en place
0
360 460 560
660
Longueur d’onde (nm)
Fonctions colorimétriques CIE-XYZ et CIE-LMS.
d’une colorimétrie plus individualisée ». Aussi, par le biais du Comité
Technique TC1.98, la CIE travaille à évaluer l’opportunité de la colorimétrie
LMS afin que les industriels de la couleur, de l’imagerie
et de l’éclairage soient assurés qu’elle est adaptée à leur utilisation.
NOUVELLES OPPORTUNITÉS
Ce lien entre colorimétrie et physiologie, pourrait, en outre, être plus
simple à utiliser et plus facile à comprendre, tout en offrant de nouvelles
opportunités pour résoudre les problèmes de mesure et de
perception des couleurs. « Aussi bien dans l’industrie que dans la vie
quotidienne en prenant en compte les variations dues à l’âge, au champ
de vision et à la diversité des observateurs », commente Sophie Jost.
Les travaux du comité technique consisteront, d’une part, à définir
une feuille de route, répertoriant les mesures colorimétriques de
la CIE actuellement basées sur les fonctions XYZ, et, d’autre part, à
envisager de créer de nouvelles mesures basées sur les fonctions fondamentales
du cône LMS.
Pour certaines mesures existantes, tels les modèles d’apparence colorée,
la feuille de route pourrait recommander une simple transition
vers le système LMS conservant des valeurs très similaires pour ces
mesures. « Dans d’autres cas, plus complexes, la feuille de route pourrait
suggérer l’ouverture d’un nouveau comité technique », conclut Sophie
Jost. JD
1. Sophie Jost est responsable de la division-1 Vision et couleur de la CIE-France et chercheuse au sein
du laboratoire Génie civil et bâtiments de l’ENTPE (École nationale des travaux publics de l’État).
PUBLICATIONS CIE DE RÉFÉRENCE (EN ANGLAIS)
- CIE 170-1:2006 Fundamental chromaticity diagram with physiological axes. Part 1
- CIE 170-2:2015 Fundamental Chromaticity Diagram with Physiological Axes.
Part 2: Spectral Luminous Efficiency Functions and Chromaticity Diagrams
- CIE 015:2018 Colorimetry, 4 th Edition
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