COLLECT Belgique Février 2022

COLLeCT
Mensuel ne paraît pas en janvier, en juillet ni en août - 6,90 € - P608061
n° 513 / février 2022
Hito Steyerl
Le monde de l’art en ligne de mire
Hans Holbein
Génial portraitiste
Line Vautrin
De précieux miroirs

© Donation Jorn, Silkeborg/ billedkunst.dk/ DACS 2022
Confiez-nous vos œuvres CoBrA
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ASGER JORN (1914-1973)
Voyageur à l’âne
1957
Vendu 32,974 euros, frais inclus

Vente d’art, design & d’antiquités
FLANDERS AUCTIONS
VENTE 9 ET 10 FÉVRIER 2022
Jef Van Tuerenhout (1926)
'Met haar ogen vol schaduw'
Keith Haring (1958)
‘Subway drawing’
Salvador Dalí (1904)
Guitare signée
Line Vautrin (1913)
‘Miroir soleil XII’
Franz Xaver Hellner (1819)
Ostensoir néo-gothique
Mauro Manetti (XX)
Seau à glace
Niki De Saint Phalle (1930)
‘Flacon aux deux serpents’
Adrien Etienne
Gaudez (1845
Louis C. Kalff (1897)
pour Philips
Elisabeth Vandeweghe
Vase céramique rouge
Un bougeoir du 14
ou 15ème siècle
Ion Mandrescu (1954)
‘Man, Time, Space’
Herman Brood (1946)
‘Friends’
Andy Warhol (1928)
‘Two Dollars’
Auguste Moreau (1834)
‘Cupido’
Roger Raveel (1921)
‘Regarder’
Primavera (XX) Auguste Rodin (1840)
‘Suzon’
Horloge Pontiac de 1950
Evgeni Alexandrovich
Lanceray (1848)
CATALOGUE: WWW.FLANDERSAUCTIONS.BE / EXPOSITION DE LA VENTE D’ART ET
D’ANTIQUITÉS DU 3 AU 7 FÉVRIER 2022 / BEERNEMSTEENWEG 99, 8750 WINGENE
INFO@FLANDERSAUCTIONS.BE / 050 39 00 84

Sommaire
EST. 1971 / février 2022 - N°513
www.collectaaa.be
Séculaires
Lunettes
Yves Saint
Laurent, l’art
et la mode
42
56
Trésors
de l’âge du
bronze 52
SUIVEZ-NOUS ÉGALEMENT
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Rédacteur en Chef
Christophe Dosogne
Rédaction
Els Bracke
Celine De Geest
Christophe Dosogne
Collaborateurs
Gilles Bechet
Laurent de Hemptinne
Thijs Demeulemeester
Gwenaëlle de Spa
Gwennaëlle Gribaumont
Elien Haentjens
Johan Frederik Hel Guedj
Diane Hennebert
Anne Hustache
Christine Vuegen
Traduction
Dynamics Translations
Didier Vanhede
Mise en pages
Renaldo Candreva
Freek Lukas
Impression
Graphius, Gand
Distribution
Librairies
AMP
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au bout d’un an. Pour un
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un numéro manquant, ou toute
autre question, surfez sur :
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En couverture
Hans Holbein le Jeune, Portrait de Jeanne Seymour,
ca. 1536-1537, huile sur bois, 65,4 x 40,7
cm. Vienne, Kunsthistorisches Museum, inv. 881
Membre de l’Union des Editeurs
de la Presse Périodique
www.wemedia.be
Editeur responsable :
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photographes : © CISAC / SABAM Belgium 2022
Portrait : © Silvie Bonne
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à l’annonceur. © Arts Antiques Auctions, Gand

Édito
Un marché mondial dopé à la jeunesse !
L’heure des bilans a sonné, en ce début
d’année, et sans doute aussi celle des traditionnelles
bonnes résolutions qui souvent,
hélas, ne survivent que ce que durent
les roses… Le marché de l’art en revanche
semble avoir négocié, l’an dernier, un
tournant définitif vers sa partielle digitalisation
ainsi qu’en témoignent les chiffres
publiés mi-décembre par les trois plus
grands auctioneers, Christie’s, Sotheby’s
et Phillips. En tout, l’année 2021 les a vues
générer un chiffre d’affaires record de 15,6
milliards de dollars (13,7 milliards d’euros),
Sotheby’s arrivant en tête avec 7,3 milliards
de dollars (6,4 milliards d’euros), sa meilleure
année depuis sa création en 1744 ! A
quoi, ou plutôt à qui, doit-on ce tropisme
euphorique, en pleine pandémie de Covid ?
A l’arrivée d’une nouvelle génération de
jeunes collectionneurs fortunés (nés entre
1980 et 2000), enrichis dans la finance, les
startups et les nouvelles technologies qui,
longtemps rebutés par les ventes physiques
considérées comme passéistes et
démodées, y accède enfin par le biais des
ventes en ligne, mode de consommation
plus conforme à leur attitude. Ces ventes
digitalisées ont littéralement explosé l’an
dernier au point de représenter désormais
près de 25 % du marché, soit 6,8 milliards
de dollars (5,9 milliards d’euros) selon les
chiffres divulgués par l’assureur Hiscox.
Rien que chez Sotheby’s, 92 % des enchères
avaient ainsi été portées électroniquement
à l’échelle mondiale ! Soutenue par
l’émergence tapageuse et sidérante des
NFTs, segment apparu en mars dernier et
déjà multimilliardaire – même si nombre
d’observateurs considèrent qu’il ne
s’agit que pour une très petite partie (9 %)
d’art à proprement parler et bien plutôt
d’insignifiants collectibles – la croissance
du marché mondial a également été
épaulée par l’accroissement du nombre
des milliardaires, toujours plus riches en
dépit de la situation sanitaire et toujours
prêts à payer plus chers les trophées qu’ils
convoitent, des taux d’intérêt au plus
bas et une inflation en hausse qui rend
l’investissement en art particulièrement
attractif et sûr. A l’échelle plus locale, cette
hausse considérable du registre digital a
permis de sauver les plus petites maisons
de vente de l’ornière dans laquelle elles se
débattaient déjà bien avant l’émergence
de la pandémie, en générant un renouveau
des ventes courantes qui donnent accès
à une gamme de prix auxquels les jeunes
générations sont sans doute sensibles.
En revanche, le bilan est plus morose,
voire carrément sombre pour les foires et
autres salons (on en dénombrait 300 dans
le monde en 2019) dont le business model,
basé sur le contact direct entre marchands
et collectionneurs, a été particulièrement
bousculé ces deux dernières années.
Cruciales pour 75 % des galeries, les foires
doivent absolument se réinventer car,
on l’a vu l’automne dernier, les acheteurs
internationaux, effrayés par la pandémie et
peut-être plus soucieux de leur empreinte
écologique, ne voyagent quasiment plus.
Se dirige-t-on pour autant, comme le pensent
certains observateurs et comme l’a
confirmé le joli succès généré en décembre
par la bouture anversoise d’Art Brussels,
vers une nouvelle régionalisation du secteur
? Après des années de mondialisation
effrénée, l’heure de la décroissance et du
retour aux fondamentaux a-t-elle sonné ?
Bien malin qui pourra le dire.
Christophe Dosogne
RUBRIQUES
6 Up to date
10 Personalia
12 Musées
16 Paroles de galeriste : Mara/Nosco Gallery
17 Galeries
21 Paroles de galeriste : Galerie Bruthaus
22 L’artiste du mois : Antoine Grenez
24 Zoom : John Edmonds
DOSSIERS
26 Le Futurisme italien
30 Val Duchesse : des œuvres
religieuses restaurées
34 Hans Holbein le Jeune, brillant
portraitiste
42 Yves Saint Laurent, l’art et la mode
46 Charles Ray, explorateur de la sculpture
48 Hito Steyerl à l’assaut du monde
de l’art
52 Trésors de l’âge du bronze
56 Artistiques lunettes
60 Une reine de la peinture florale :
Rachel Ruysch
78 Les miroirs magiques de Line Vautrin
80 Acquisition muséale chez Thomas
Deprez Fine Arts
VENTES
66 Focus International
68 La surprise du mois : un tondo italien
chez Haynault
69 Ventes en Belgique
AGENDAS
82 Auction calendar
83 Fair calendar
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85 Gallery calendar
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UP TO DATE
Signa temporum, ars temporis…
->
Bague chrétienne, récupérée dans une épave d’époque romaine
au large de Césarée. © Laboratoire des Autorités israéliennes
d’antiquités, Jérusalem
->
Hauser & Wirth, 19 South Audley Street, Mayfair, Londres.
© Courtesy Hauser & Wirth / photo : Sim Canetty-Clarke
->
Un bakhnoug. © photo : Jean-Luc Petit
Lors de fouilles marines sur des épaves
échouées il y a 1700 ans au large de
Césarée, en Méditerranée, les autorités
israéliennes ont découvert, entre autres,
une remarquable bague en or, ornée d’une
intaille chrétienne en pierre verte représentant
le bon pasteur et datant de l’Empire
romain. A l’initiative de la SOFAM, société
de gestion des droits de propriété
intellectuelle, et de la Fondation Roi
Baudouin, la Belgique vient de lancer un
nouveau fonds de soutien pour les arts
visuels, POMONA. Il s’agit de soutenir les
artistes en leur accordant des subventions à
des moments clés de leur développement.
Les possibilités existantes seront également
renforcées par des subventions de
projets et un fonds de solidarité. Un comité
comprenant les artistes Luc Tuymans et
Otobong Nkanga supervisera la qualité, la
transparence et la diversité des bourses
délivrées. www.pomona-artfund.be
A Namur, le Centre culturel accueille aux
Abattoirs de Bomel une grande exposition
consacré à l’un des éléments centraux de la
culture tunisienne, le bakhnoug, textile
monochrome, souvent rouge ou bleu, qui
accompagne les femmes berbères tout au
long de leur vie. La richesse des symboles
abstraits, ainsi que la couleur du bakhnoug
teint aux diverses étapes de la vie de la
femme, construisent un univers symbolique
singulier, racontant de façon discrète
la perception de vie d’une personne, à
travers le geste d’artisanat (jusq. 06-03,
www.centrecultureldenamur.be). Alors
que le musée d’Ixelles vient de se voir
décerné le prix européen Art Explora pour
son projet participatif ‘‘Musée comme chez
soi’’, le musée Horta rend accessible un
espace supplémentaire au sein de sa partie
atelier. Après l’espace couture et le
laboratoire photo (2018), le dernier étage
de la maison (2019), en 2020 c’est le bureau
de dessin qui ouvrait ses portes au
deuxième étage de l’atelier pour accueillir
la collection de moulages de Victor Horta.
Dès ce 3 février, le second bureau de dessin
est lui aussi ouvert au public. Cette salle
informera le visiteur sur l’histoire de la
restauration de la maison-atelier. www.
hortamuseum.be C’est le 26 février que
sera lancée la programmation d’Esch-sur-
Alzette, capitale européenne de la culture
2022 (www.esch2022.lu). La ville luxembourgeoise
et ses environs transfrontaliers
accueilleront ainsi pas moins de 2000
événements culturels en tous genre…
Comme un pied de nez à l’exode des
galeries post-Brexit, Hauser & Wirth a
annoncé l’ouverture d’ici deux ans d’un
nouvel espace londonien de 1400 m² au
cœur de Mayfair, en complément de son
emplacement actuel à Savile Row. Le
bâtiment en brique rouge d’architecture
victorienne classé Grade II, au 19 South
Audley Street, appartenait autrefois à la
maison de porcelaine et verrerie fine
Thomas Goode and Co. Jusqu’au 09-02,
6

UP TO DATE
->
Juan de Juanes, Christ soutenu par des anges,
huile sur panneau, 54 x 58,5 cm. Antenor Auction,
Palma de Majorque, 14-02. © Antenor
Est. 150.000-250.000 €
->
Vue du nouvel espace du musée Horta. © photo : Thierry Mondelaers
l’antenne bruxelloise d’Artcurial expose une
quinzaine d’œuvres de l’artiste congolais
Pili Pili Mulongoy (1914-2007). www.
artcurial.com Challenger des grands
auctioneers Christie’s, Sotheby’s et Phillips,
la maison londonienne Bonhams s’étend
désormais encore plus dans le nord de
l’Europe puisqu’elle vient d’acquérir la salle
de ventes suédoise Bukowskis. Fondée en
1870, devenue leader en Scandinavie,
celle-ci possède notamment des sièges à
Stockholm et Helsinki, comptant neuf
départements pour une centaine d’employés.
Sa principale spécialité est l’art
scandinave. Cette acquisition s’inscrit dans
la stratégie de Bonhams visant à renforcer
sa position internationale et pourrait être
suivie d’autres achats similaires. www.
bonhams.com Quant à elle, après un an
d’existence, la salle bruxelloise Antenor
Auction annonce avoir réalisé, en neuf
ventes, un chiffre de ventes de 4,4 millions
d’euros (prix marteau), soit 5,7 millions
d’euros frais inclus), pas mal pour une
petite nouvelle, même si son équipe est
loin d’être néophyte. Cette riche année
généra ainsi pas moins de trois records du
monde dont un enregistré pour un
exceptionnel retable hennuyer du XVe
siècle, en pierre calcaire polychrome,
adjugé le 30-05-2021 pour 1.007.500 euros
à la Phoebus Fondation de Fernand Huts.
Outre la Belgique, la salle se développe à
l’international, et plus particulièrement
grâce aux attaches méditerranéennes
d’Olivia Roussev, dans l’île de Majorque.
Ainsi, le 14 février, se tient à Palma la vente
d’une peinture très importante, un tableau
de Juan de Juanes (1507-1579) étudié par le
Prado et jamais passé en vente publique.
Estimé entre 150.000 et 250.000 euros, ce
Christ soutenu par des anges de la main de
ce peintre religieux de Valence, qualifié un
temps de second Raphaël, provient d’une
collection privée et pourrait créer la
surprise. www.antenor-auction.com De
manière plus générale, le marché international
de l’art a connu une année 2021
plutôt faste, atteignant même à certains
égards des niveaux records. L’œuvre la plus
chère, In This Case, toile de Jean-Michel
Basquiat de 1983, était ainsi adjugée 81
millions d’euros. Dans le domaine du luxe,
Sotheby’s générait pour la première fois
plus d’un milliard de dollars, tandis que
Christie’s faisait de Beeple l’un des trois
artistes vivants les plus chers en vendant
son NFT Everydays : the First 5,000 Days
pour 60 millions d’euros. Selon l’avis des
observateurs, la demande fut particulièrement
soutenue en raison de l’accalmie
forcée de 2020, alors même que certaines
œuvres très recherchées arrivaient sur le
marché. Cette croissance serait, en outre,
due à l’arrivée d’une nouvelle frange de
collectionneurs disposant d’un volume
important de crypto-monnaies, au marché
asiatique toujours croissant et à une
certaine confiance en l’art comme valeur
d’investissement en période d’inflation.
L’année en cours semble également
présager d’un bon cru ainsi qu’en témoigne,
entre autres, le montant record de
3,4 millions de dollars (2,9 millions d’euros)
obtenu, le 13 janvier, pour un dessin
original de la bande dessinée Spider-Man.
Datée de 1984, l’œuvre réalisée par Mike
Zeck était adjugée par l’antenne de Dallas
->
La salle de ventes Bukowskis, à Stockholm.
© Bukowskis
de la salle américaine Heritage Auctions.
Unique, elle représentait pour la première
fois le célèbre homme-araignée en
costume noir. Son prix reflète l’intérêt croissant
du marché pour les œuvres de la
culture populaire, de la bande dessinée aux
cartes Pokemon qui, pour certains
collectionneurs fortunés, sont comme des
réminiscences de leur enfance qui leur
parlent bien plus qu’une œuvre d’art
contemporain. Une lame de fond dont on
n’a pas fini d’entendre parler… Enfin,
l’Union européenne a décrété, au mois de
décembre, la fermeture presque totale du
marché intérieur à l’ivoire. Le négoce est
donc suspendu sauf dans le but exclusif de
réparer des objets contenant de l’ivoire
ancien. Les exceptions portent sur les
antiquités et les instruments de musique
datant d’avant 1975 contenant de l’ivoire
ancien. Des règles déjà entrées en vigueur
au mois de janvier.
7

UP TO DATE
Un possible Van Dyck redécouvert ?
->
Antoine Van Dyck (?), Isabelle Clara Eugenia,
régente des Pays-Bas, ca. 1628-1632, huile
sur toile. © Artnews
La copie d’un portrait d’Antoine van Dyck,
représentant l’infante d’Espagne et régente
des Pays-Bas espagnols Isabella Clara Eugenia
en habit de religieuse, accrochée depuis
des années dans la maison d’un historien de
l’art, pourrait bien être l’œuvre originelle du
maître flamand. Selon un rapport du quotidien
britannique The Guardian, Christopher
Wright, spécialiste en maîtres anciens connu
pour avoir découvert des trésors négligés
dans des collections publiques et privées,
avait acquis ce tableau pour 65 livres sterling
(environ 170 euros) à un marchand londonien,
en 1970. L’œuvre attirait récemment
l’attention de Colin Harrison, conservateur
principal en art européen de l’Ashmolean
Museum d’Oxford. Après une inspection
minutieuse, l’expert y aurait repéré la
touche typique de Van Dyck, en particulier sa
représentation exigeante des mains. L’œuvre
aurait été réalisée entre 1628 et 1632, période
durant laquelle l’artiste fut le principal portraitiste
de l’aristocratie européenne. En 1632,
il s’installait ainsi à Londres, où le roi Charles
Ier le nommait peintre résident de la cour et
l’anoblissait. Son influence en Europe en tant
que portraitiste fut immense et les copies
de ses œuvres ont proliféré. Dans ce portrait
de l’archiduchesse Isabelle, celle-ci apparaît
en habit de religieuse, la robe pieuse et le
fond sombre et tamisé évoquant la période
de deuil qui suivit la mort de son époux,
l’archiduc Albert VII d’Autriche, en 1621. La
souveraine demeura à la tête des Pays-Bas
espagnols jusqu’à son décès en 1633, période
considérée comme un âge d’or. Suivant
les analyses techniques et la restauration
menées au sein de l’Institut Courtauld de
Londres, il a été établi que cette version du
portrait pouvait être provisoirement attribuée
à l’atelier de Van Dyck, réalisée de son
vivant et sous sa supervision.
Un important
Magritte
chez Sotheby’s
Une des icônes du mouvement surréaliste
sera mise en vente le 2 mars prochain par
Sotheby’s Londres. Peint pour Anne-Marie
Crowet, fille du mécène de René Magritte,
cette version tardive de L’Empire des Lumières
(1961) était jusqu’alors demeurée au
sein de la famille. Avec son époux Roland
Gillion, Anne-Marie Crowet entretint de solides
liens avec le couple Magritte. Dès l’âge
de 16 ans, elle fut peinte par l’artiste dans la
célèbre œuvre Anne-Marie ou Le Combat,
et devint sa muse le restant de sa vie. Figure
phare du surréalisme, l’œuvre exprime toute
la poésie cinématographique et onirique
avec laquelle jouait l’artiste. L’Empire des Lumières
fait partie d’une série éponyme composée
de dix-sept toiles que Magritte entama
dès 1948 et poursuivie dans les années
1950. Des exemplaires sont, entre autres,
conservé dans des musées à Bruxelles,
Venise, New York et Houston. À travers cette
œuvre, l’artiste belge dévoile sa lecture poétique
du monde, en dépassant les frontières
du réel. Une maison, un lampadaire, un ciel
: la faible quantité d’éléments visuels laisse
émerger une émotion à la fois cinématographique
et surréaliste. L’œuvre prend
sens par la contemplation de ce qui pourrait
->
René Magritte, L’Empire des Lumières, 1961, huile sur toile. Sotheby’s, Londres, 02-03.
© Sotheby’s. Est. 60.000.000 £ (52.000.000 €)
représenter le banal, mais qui dépasse sa
dimension réaliste. Le jeu d’ombres et de
lumières permet l’intemporel, le magique, le
rêve. Certains avancent l’idée que le tableau
a été inspiré par L’Aigrette d’André Breton,
que Magritte connaissait bien : « Si seulement
il faisait du soleil cette nuit ». Cet espoir
transparaît dans la toile, dont l’obscurité
étrange lui confère une sensation de fausse
réalité et trouble le spectateur. On estime la
valeur de ce tableau à 60 millions de dollars
(environ 52 millions d’euros). S’il était adjugé
à ce montant, il exploserait le record détenu
jusqu’ici par Le Principe du plaisir, adjugé
26,8 millions de dollars (environ 23 millions
d’euros) en 2018 chez Sotheby’s à New York,
et deviendrait ainsi l’œuvre la plus chère de
l’artiste belge. www.sothebys.com
8

UP TO DATE
Foires et Salons...
Pollinisation
croisée
A l’occasion de la rentrée 2022, la galerie
parisienne Kraemer et Ars Belga invitent
à découvrir l’exposition Contrast
présentée actuellement à Bruxelles,
suivant une formule déjà expérimentée
il y a quelques années à la Biennale des
Antiquaires : à travers une sélection
exceptionnelle de meubles anciens et
d’œuvres contemporaines, plusieurs
objets et pièces de mobilier Louis XIV,
Louis XV et Louis XVI sont mis en
relation avec des tableaux emblématiques
de l’art abstrait, signé Robert
Mangold ou Sam Francis. La présence
d’œuvres historiques de l’art d’aprèsguerre,
par Piero Dorazio et Takis, crée
un contraste étonnant qui sublime, par
exemple, un meuble en marqueterie
Boulle ou encore une rarissime paire
d’appliques réalisées pour le duc
Charles Alexandre de Lorraine,
Gouverneur des Pays-Bas Autrichiens et
oncle de Marie-Antoinette pour la salle
du Dais (salle du trône) de son palais de
Bruxelles, confrontée à une superbe
sculpture minimaliste par Ugo Rondinone.
Mobilier et objets d’art anciens se
mélangent ici à merveille à l’art
contemporain dans une pollinisation
croisée de nature à séduire peut-être
une jeune génération de collectionneurs
(jusq. 28-02) www.arsbelga.com
->
Piero Dorazio, Quasi Finito, 1967; bureau
en marqueterie Boulle, ébène, laiton,
écaille et étain, France, époque Louis XIV.
Courtesy Ars Belga / Kraemer Gallery
EDITIONS LIMITÉES À LA VILLA EMPAIN
La Fondation Boghossian présente la
troisième édition de la Limited Edition Art
Fair, salon qui célèbre le multiple et l’image
imprimée. Créée en 2020, la Limited
Edition Art Fair a pour vocation de
proposer au public des œuvres de natures
diverses : impressions offset, lithographies,
gravures, sérigraphies, estampes, illustrations,
céramiques, photographies, …
toutes conçues en séries limitées. Durant
trois jours, éditeurs renommés, galeries
internationales et institutions belges
incontournables investissent la Villa
Empain. Une section est consacrée aux
œuvres d’une douzaine d’artistes lauréats
du Prix de la Fondation Boghossian ou
ayant résidé à la Villa Empain. La LEAF fait
cette année la part belle aux maisons
d’éditions spécialisées à la production
foisonnante, telles Anima Ludens, Barythé,
Three Star Books ou Taschen. Se déployant
sur les trois étages de la Villa Empain, ce
salon est l’occasion de faire un état des
lieux de l’édition de l’image imprimée et
du multiple, à la fois plurielle et authentique,
innovante, précieuse et accessible.
(du 11 au 13-02) www.villaempain.com
LA BRAFA SOUTIENT BRUSSELS
ART WALK
Mi-décembre, en raison de la situation
sanitaire instable, le CA de la BRAFA décidait
du report de son édition 2022 du 19 au 26
juin. La BRAFA entamera alors un nouveau
chapitre de son histoire avec son déménagement
vers le Brussels Expo sur le plateau
du Heysel, près de l’Atomium, après près
d’une vingtaine d’année sur le site de Tour
& Taxis : « Le propriétaire de Tour & Taxis a
une vision différente de l’avenir. Notre choix
pour un nouvel emplacement s’est donc
porté sur Brussels Expo, lieu d’exposition
emblématique disposant d’espaces adaptés
à une foire internationale comme la nôtre »,
précisent les organisateurs. Dans l’intervalle,
afin de soutenir ses participants, la BRAFA a
choisi d’encourager l’initiative de quelques
galeries bruxelloises qui, du 17 au 20 février,
proposent une Brussels Art Walk suite au
report de la foire afin de nourrir le lien avec
leurs collectionneurs. Les galeries situées
en dehors de Bruxelles et à l’étranger ont
été invitées à participer à cette initiative en
exposant chez un confère à Bruxelles. 32
galeries y participent, dont 6 françaises et 1
galerie basée à Londres. Parmi les participants
citons Galerie Ary Jan, Finch & Co,
Xavier Eeckhout, D’Arschot & cie, Maruani
Mercier, Galerie Alexis Bordes, Jan et Klaas
Muller, Lemaire et Gallery Desmet.
www.brafa.art
->
Kehinde Wiley, Portrait d’Aissatou Dialo
Gueye, 2020, huile sur toile, 213,4 x 152,4 cm.
© de l’artiste / Courtesy Roberts Projects /
Frieze Los Angeles
EN BREF…
ARCO Madrid, la plus importante foire
internationale d’art contemporain
d’Espagne, se tient du 23 au 27 février
et fête son 40e anniversaire (+1 année
manquée en raison de la crise sanitaire).
Un certain nombre de galeries ayant joué
un rôle important dans l’historique de
la foire ont donc été invitées à participer
dans une section honorifique, ARCO 40
(+1) Anniversary, en sus des quelques
150 galeries internationales réunies cette
année. Parmi elles, dix galeries intègrent
la toute nouvelle section de la foire, Never
the Same : Latin American Art, présentant
une sélection d’artistes latino-américains
(infos : www.ifema.es/arco-madrid).
Frieze Los Angeles (du 17 au 20-02,
www.frieze.com) s’installe dans un
nouveau lieu à Beverly Hills, à côté de
l’hôtel Hilton. Pour la première fois, la
foire est dirigée par Christine Messineo,
ancienne directrice de la Galerie Hannah
Hoffman de Los Angeles et actuellement
directrice de Frieze Los Angeles et Frieze
New York. La foire inaugure Frieze
Sculpture Beverly Hills, événement
présentant des œuvres d’artistes
travaillant à une échelle monumentale
dans les Beverly Gardens.
9

Têtes de l’Art
Bernard Rancillac
In memoriam : Il aurait fêté ses 91
ans le 29 août prochain mais c’est fin
novembre que s’éclipsait un peintre
qui a marqué le monde de l’art dès
les années 1960, lorsque la société se
mit en branle et commença à bouillonner,
produisant des affiches célèbres
(dont celle créée à partir de
la photo de Daniel Cohn-Bendit par
Gilles Caron). Né en 1931 à Paris,
Bernard Rancillac commença dans
les années 1950 sa carrière comme
peintre abstrait avant de revendiquer
le retour de la figuration. Il coorganisa,
avec Hervé Télémaque et
le critique Gérald Gassiot-Talabot,
l’exposition Mythologies quotidiennes
en 1964, qui sera un moment fondateur
pour la Figuration narrative.
© AFP / D. R.
Philippe Desomberg
In memoriam : Disparu le 30 décembre,
emporté par le coronavirus,
le sculpteur Philippe Desomberg
avait choisi la pierre bleue comme
matériau de prédilection. Né en 1945
à Charleroi, il fut pendant plus de
trente ans professeur de sculpture
à l’Académie de Braine-l’Alleud. Travaillant
les mêmes thèmes depuis
longtemps, il taillait la pierre pour
en extraire une beauté intemporelle
faite de corporalités, entre ombre
et présence.
Anton Herbert
In memoriam : Le collectionneur Anton
Herbert, initiateur de la Fondation
Herbert, décédait le 7 décembre.
Avec son épouse Annick, l’homme né
en 1938 avait constitué une collection
remarquable, axée sur l’oeuvre
d’artistes internationaux tels que
John Baldessari, Carl Andre, Bruce
Nauman, Sol LeWitt, Marcel Broodthaers
ou Gerard Richter. En 2008,
la création de la Fondation Herbert,
installée en bord de Coupure,
à Gand, permettait de pérenniser
cet ensemble et d’organiser expositions,
publications, études et autres
discussions.
© photo : Yuri van der Hoeven
© photo : Jasmine Van Hevel
Richard Rogers
In memoriam : L’architecte Richard
Rogers décédait le 18 décembre à 88
ans. Avec son alter ego Renzo Piano,
de quatre ans son cadet, ils avaient
dessiné puis édifié le Centre Georges
Pompidou, dont la silhouette dévorée
de tubulures aux teintes primaires
allait les consacrer, jeunes encore,
comme des titans de la discipline. Né
à Florence mais de parents britanniques,
anobli par la reine d’Angleterre,
lauréat des plus prestigieuses
récompenses : médaille d’or du RIBA
(Royal Institute of British Architecture)
en 1985, Lion d’or de la Biennale
de Venise en 2006, Pritzker Prize
en 2007, il fut un ‘‘starchitecte’’ dont
la notoriété illumina le XXe siècle.
Sa dernière œuvre, inaugurée cette
année, s’insère dans le parcours architectural
et ludique du Château
La Coste, près d’Aix-en-Provence.
Aziz Azara
Lauréat : L’artiste afghan Aziz Hazara
(1992) est le lauréat 2021 du
Future Generation Art Prize du PinchukArtCentre
de Kiev (Ukraine), le
plus doté pour les artistes de moins
de 35 ans (100.000 dollars). Membre
de la communauté chiite des Hazaras,
longtemps opprimée, l’artiste est
le fils d’un marchand de légumes et
d’une femme au foyer. Primée, son
installation vidéo Bow Echo donne
à voir des enfants tentant de gravir
contre le vent les montagnes
autour de Kaboul, pour y souffler
l’alerte dans des clairons en plastique,
presque inaudible au milieu
des drones.
© photo : Andrew Zuckerman
© photo : Maksim Belousov
10

Annick Lemoine
Guillaume Désanges
Nomination : Docteure en histoire de
l’art, spécialiste de la peinture européenne
des XVIIe et XVIIIe siècles,
Annick Lemoine prend en ce mois
de février la direction du Petit Palais.
Directrice du musée Cognacq-
Jay depuis 2018, elle fut, entre 2015
et 2018, directrice scientifique du
Festival de l’Histoire de l’Art de Fontainebleau.
Elle a débuté sa carrière
comme maîtresse de conférences à
l’Université Rennes 2 puis devint, de
2009 à 2010, conseillère au cabinet
du ministre de la Culture Frédéric
Mitterand. De 2010 à 2015, Annick
Lemoine a dirigé le département
d’histoire de l’art, les collections
et le patrimoine de l’Académie de
France à Rome.
© photo : Marc Riou
Paul Dujardin
Nomination : Le site du parc du Cinquantenaire
et les musées qui s’y
trouvent vont faire l’objet d’une rénovation
indispensable à l’approche
du bicentenaire de la Belgique, en
2030. L’équipe mise en place à cet
effet par le Musée Art & Histoire sera
dirigée par l’ancien directeur général
de BOZAR, Paul Dujardin (1963). Sa
tâche consistera à réfléchir à l’image
culturelle et à rechercher des partenaires
aux niveaux fédéral, régional
et international.
© photo : Jean-Michel Clajot
Nomination : Le commissaire et critique
d’art indépendant Guillaume
Désanges (1971) a été nommé début
janvier à la tête du Palais de Tokyo,
à Paris. Diplômé en commerce, il
s’oriente vers un DESS en Arts visuels
et multimédia et, dès le début des
années 2000, il s’attache à inventer
des formats, des durées, des espaces,
des manières de discourir et de montrer
les œuvres qui soient singulières
et innovantes. Il était, depuis 2013,
le responsable des expositions à La
Verrière Hermès, à Bruxelles.
© Fondation d’entreprise Hermès
Arnaud Vajda
Nomination : Diplômé en journalisme,
en sciences politiques et en
GRH de l’ULB, Arnaud Vajda (1980)
a débuté sa carrière au SPF Santé
publique, avant de rejoindre en 2010
le Service public de programmation
de la Politique Scientifique Fédérale
(BELSPO), en tant que responsable
du développement de l’organisation.
Fin 2013, il intégrait le SPF Finances
avant de revenir, fin décembre dernier,
chez BELSPO, nommé au poste
de Président du comité de direction.
En charge des différents établissements
scientifiques fédéraux, il doit
s’atteler à la mise en œuvre de la stratégie
fédérale en la matière et au
renforcement des équipes.
© D. R.
Joost Declercq
Intérim : A Ostende, le Mu.ZEE et le
Permeke Museum sont actuellement
en phase de transition. Ce qui se reflète
dans les fermetures et rénovations
actuelles et futures, mais aussi
dans la composition du conseil d’administration.
Directrice générale a.
i., Dominique Savelkoul est actuellement
chargée des affaires courantes.
Le conseil d’administration nommait
également Joost Declercq coordinateur
artistique temporaire. L’ex-directeur
du Musée Dhondt-Dhaenens
devra préparer, entre autres, la mise
sur pied d’une programmation d’exposition
jusqu’en 2024. L’intention
étant de pourvoir définitivement
le poste dans le courant de l’année
2022, après la nomination du directeur
général.
© D. R.
Dieter Van Den Storm
Nomination : Après la gestion calamiteuse
d’Alexandra Lambert (étiquetée
PS), et le récent départ de
l’éphémère directrice générale Yamila
Idrissi (transfuge du parti écolo
flamand Groen), c’est le directeur de
la création Dieter Van Den Storm
qui a temporairement pris les rênes
de MAD Brussels, sis au milieu du
quartier Dansaert. Il est épaulé par
la directrice commerciale Daphrose
Nkundwa. Il leur incombera de fixer
le cap et de redorer le blason d’une
institution dont la finalité demeure
floue, même si elle est censée soutenir
et rendre visibles designers
et créateurs de mode, nombreux
et talentueux dans la capitale belge.
© photo : Frederik Vercruysse
11

MUSEES
Bouffons !
du 05-02 au 11-09
Musée international
du Carnaval
et du Masque
Binche
www.museebinche.be
Les collections
de Verviers
jusq. 28-08
Keramis
La Louvière
www.keramis.be
Fous du roi, clowns, valets… les bouffons
occupent une place de choix dans notre
imaginaire depuis le Moyen Âge. Cherchant
à amuser le public en adoptant
une attitude subversive, le bouffon est
une figure indispensable de nombreuses
représentations masquées. Cette exposition
se focalise donc sur ce personnage
qui adopte différentes formes et apparaît
dans différents univers : le théâtre et les
marionnettes, les carnavals, les accessoires
et les images. Outre la présentation des
multiples bouffons dans le cadre de leur
apparition, le parcours pose aussi quelques
questions traitant du rôle du bouffon dans
notre société : à quoi sert-il ? pourraiton
s’en passer ? qui sont les bouffons
d’aujourd’hui ? (ah)
Le musée des Beaux-Arts et de la Céramique de Verviers conserve non seulement
une belle collection de peintures et sculptures européennes, mais aussi une des plus
remarquables collections de céramique de Belgique. Elle contient en effet des porcelaines
chinoises, des productions allemandes ou autrichiennes, des services bruxellois,
des faïences bleues ou polychromes de Delft, des œuvres en grès de Raeren, des pièces
d’Andenne et de Strasbourg, ... En juillet dernier, le musée a subi d’énormes dégâts lors
des inondations qui ont ravagé la région. Un bel ensemble de ces céramiques trouvent
donc refuge à La Louvière où elles entrent en dialogue avec les collections de l’ancienne
société Boch. (ah)
Bourdaloue, faïence polychrome. Musées de Verviers. © photo : J. Spitz
Bonnet à grelot d’un fou de carnaval, Allemagne.
© MICM
Teen Spirit
jusq. 22-05
BPS22
Charleroi
www.bps22.be
L’adolescence, cette période charnière de la vie, est l’un des thèmes récurrents de l’art. Cette
exposition collective réunit donc une trentaine d’artistes internationaux autour de ce sujet.
À côté de quelques incontournables de la photographie (Mohamed Bourouissa, Larry Clark,
Nan Goldin) et d’une grande série photographique produite spécifiquement pour l’exposition
(Vincen Beeckman), elle rassemble une majorité d’artistes confirmés et de jeunes talents
proposant d’autres médiums tels la peinture, la vidéo, le dessin ou la sculpture. Certains de ces
artistes, comme Eric Cres, Mike Kelley, Sophie Podolski, Jim Shaw, Emmanuel Van der Auwera
ou encore Thomas Mazzarella usent d’un langage propre à la jeunesse. D’autres, comme
Hernan Bas, Charlotte Beaudry, Larry Clark, Nan Goldin ou Estelle Czernichowski s’intéressent à
l’adolescent et l’intègrent en tant que sujet premier de certaines de leurs créations. (ah)
Hernan Bas, The curious case of Matthew
Manning poltergeist. Collection Peter
Kilchmann. © de l’artiste
12

MUSEES
Sōsaku hanga
du 17-12 au 23-03
Japanmuseum Sieboldhuis
Leyde
www.sieboldhuis.org
Cabinet de
Curiosités
du 12-02 au 21-08
MusVerre
Sars-Poterie
www.musverre.lenord.fr
Cette exposition montre, en environ cent quarante œuvres, l’évolution de ‘‘l’estampe
créative’’ au Japon. Des gravures sur bois y sont réalisées depuis le XVIIe
siècle. A l’origine, maints artisans travaillent pour le compte d’un éditeur qui détermine
le motif ou thème de l’estampe. L’artiste crée alors le motif que le graveur
découpe dans le bloc de bois et l’imprimeur en réalise un tirage sur papier. Mais, au
XXe siècle, un changement s’opère dans la vision de l’estampe japonaise traditionnelle
lorsque, pour la première fois, Yamamoto Kanae (1882-1946) réalise lui-même
une gravure sur bois, en 1904. Car, aux yeux de cet artiste, la xylogravure japonaise
est davantage une forme de reproduction, tandis qu’il considère que l’estampe est
un art. Dès lors, une nouvelle interprétation de la gravure sur bois japonaise a vu le
jour : l’estampe créative ou sōsaku hanga. (eb)
Du XVIe siècle
jusqu’à la fin du
XVIIIe siècle,
les cabinets
de curiosités
conservèrent
jalousement
les merveilles
produites par
la nature et par
l’homme : des
coquillages rares
aux orfèvreries
précieuses, des
dents de narval
au corail rouge,
en passant par
des pièces de
monnaies et des
objets ethnologiques. Cette exposition revisite
le thème du cabinet de curiosités en réunissant
des œuvres contemporaines en verre qui en
évoquent différentes facettes : le monde microscopique,
le monde océanique, les espèces végétales,
le monde des insectes, la monstruosité, les
vanités et la pharmacopée. Parmi les artistes, on
découvre les œuvres d’Elliot Walker, Lilla Tabasso,
Antoine Brodin, Kim Kotomaluce, mais aussi des
Belges Jan Fabre et Koen Van Mechelen. (ah)
Jan Fabre, Holy Dung Beetle with Laurel Tree. © de l’artiste
/ MusVerre
Kawanishi Hide, Girls of the shooting gallery, 1933. Collection Nihon no hanga, Amsterdam.
Thameur Mejri
du 11-02 au 10-07
MAC
Lyon
www.mac-lyon.com
Né à Tunis en 1982, vivant et travaillant dans son pays natal, Thameur Mejri partage avec
toute une génération de concitoyens un sentiment de crise perpétuelle, qu’il interprète
comme le fruit d’une gestion chaotique du collectif. Cette exposition présente pour la
première fois son travail en France. S’inspirant volontiers de la culture populaire mondialisée,
Thameur Mejri utilise des techniques de répétition, de juxtaposition et de superposition
entre une constellation d’objets plus ou moins identifiables et des surfaces aux
couleurs éclatantes. Des éléments du quotidien, des pictogrammes, des mots quelquefois,
semblent flotter dans ces compositions fondées sur un désordre apparent, brouillant
à dessein la lecture de l’œuvre. Peintre mais aussi vidéaste, l’artiste bouscule les frontières
entre les genres : outre dessins, peintures et vidéos, l’exposition présente aussi une
installation immersive d’œuvres récentes. (ah)
Thameur Mejri, Deactivate, 2020. © de l’artiste
13

MUSEES
Francis Bacon,
Man and Beast
du 29-01 au 17-04
Royal Academy
Londres
www.royalacademy.org.uk
Jean
Dubuffet
du 24-02 au 15-08
Guggenheim
Bilbao
www.guggenheimbilbao.eus
Rarement un artiste aura
autant exprimé l’animalité
tapie au cœur de l’homme
que Francis Bacon (1909-
1992). Ses toiles traduisent
sans détour combien, sous
le vernis de la civilisation,
l’homme est tout simplement
un animal. Ce
dernier, en tant que sujet,
est par ailleurs également
présent dans son œuvre.
Cette exposition se penche
donc sur la fascination
exercée par le monde
animal sur l’imaginaire de
l’artiste d’origine irlandaise.
Afin d’alimenter
celui-ci, Bacon se documenta
à travers plusieurs
voyages en Afrique du Sud
ainsi qu’en acquérant de
nombreux livres d’histoire
naturelle. Chronologique,
l’accrochage démarre
avec un groupe de figures
biomorphiques produites
entre 1944 et 1946 et qui suggèrent la désintégration de l’humanité. Les années 1950
sont marquées par l’observation attentive du règne animal, le motif intégrant alors plus
pleinement la peinture de l’artiste. Au centre de l’exposition figurent trois peintures sur
le thème de la corrida, œuvres dans lesquelles culmine la rencontre entre homme et
animal. Elle se conclut par la toute dernière œuvre peinte par le maître : une étude de
taureau. (ah)
Francis Bacon, Study for Bullfight No. 1, 1969, huile sur toile. 198 x 147,5 cm. Collection privée. © The Estate
of Francis Bacon. All rights reserved, DACS / Artimage 2021 / photo : Prudence Cuming Associates Ltd.
Le titre de cette exposition provient tout
droit d’une déclaration faite par l’artiste : « Je
voudrais qu’on regarde mes ouvrages comme
une entreprise de réhabilitation des valeurs
décriées et..., qu’on ne s’y trompe pas, comme
une ardente célébration. » Au cours de sa carrière,
Jean Dubuffet s’est volontairement dressé
contre l’académisme et contre les principes de
beauté et de décorum. Il a surtout témoigné
d’une incroyable et insatiable curiosité envers le
quotidien, l’inattendu, utilisant dans son travail
des matériaux vulgaires, des sujets banals. Par
cette approche, Dubuffet n’a pas seulement
résisté à la norme, mais cherché un moyen de
célébrer la vitalité d’une expérience libérée
de toute contrainte arbitraire. Composée de
fonds provenant du Solomon R. Guggenheim
Museum de New York et de la Peggy Guggenheim
Collection de Venise, l’exposition passe
en revue toute la production de l’artiste et est
organisée chronologiquement, suivant les
périodes charnières qui la rythment. (ah)
Jean Dubuffet, La mésentente, 12 mars 1978, acrylique
sur papier marouflé sur toile, 139,4 × 241,9 cm. New York,
The Solomon R. Guggenheim Museum, par échange
86.3405. © Jean Dubuffet, VEGAP, Bilbao, 2022
Beatrix Potter
du 12-02 au 25-09
Victoria & Albert Museum
Londres
www.vam.ac.uk
Beatrix Potter, The Tale of Jemima Puddle-
Duck artwork, 1908, aquarelle et encre sur
papier. © National Trust Images
Le Victoria and Albert Museum se devait d’organiser cette exposition majeure consacrée à Beatrix
Potter. L’institution conserve en effet la plus importante collection mondiale de ses dessins, de
ses manuscrits, de sa correspondance et de ses photographies. La célèbre autrice et illustratrice
de livres pour enfants fut aussi une naturaliste passionnée se spécialisant entre autres dans la
mycologie. Certainement, l’observation minutieuse qu’elle a mené toute sa vie de la nature
a-t-elle servi la précision anatomique de son dessin. Outre les photos et archives familiales,
l’exposition réunit bien sûr de nombreux dessins préparatoires de ses livres, dont la célèbre série
Peter Rabbit, mais aussi des études de champignons et de très belles aquarelles peintes dans la
campagne, autour des fermes où Beatrix Potter vécut. (ah)
14

MUSEES
James McNeill
Whistler
du 08-02 au 08-05
Musée d’Orsay
Paris
www.musee-orsay.fr
Surrealism
Beyond Borders
du 24-02 au 29-08
Tate Modern
Londres
www.tate.org.uk
La Frick Collection est
l’un des plus importants
musées d’art européen
des États-Unis.
À la faveur de la fermeture
de cette institution
pour travaux, un bel
ensemble d’œuvres
du peintre américain
James Abbott McNeill
Whistler (1834-1903)
s’installe pour quelques
mois au musée d’Orsay
qui possède déjà son
chef d’œuvre, Arrangement
en gris et noir
: portrait de la mère de
l’artiste. Ce sera donc
un plaisir de découvrir,
autour de celui-ci, trois
grands portraits représentatifs de ses célèbres ‘‘symphonies
en blanc’’ et ‘‘arrangements en noir’’ : le
Portrait de Mrs Frederick Leyland, le Portrait de Rosa
Corder, et enfin celui de l’extravagant esthète Robert
de Montesquiou-Fezensac, l’un des ultimes tableaux
peints par l’artiste. Alors que l’année 2022 sera placée
sous le signe de Marcel Proust, dont on célébrera le
centenaire de la mort, cette toile rappelle l’influence
de Montesquiou et de Whistler dans l’élaboration
de La Recherche et la création des personnages du
baron de Charlus et du peintre Elstir. (ah)
James Abbott McNeill Whistler, Symphony in Flesh Color and
Pink: Portrait of Mrs. Frances Leyland, 1871, huile sur toile. New
York, The Frick Collection. © photo : Joseph Coscia Jr.
L’histoire du surréalisme – pictural comme littéraire – fut écrite en se focalisant
majoritairement sur le mouvement fondé et dirigé par André Breton en France.
Or, le surréalisme est bien plus qu’un mouvement, c’est un ‘‘état d’esprit’’
et celui-ci s’est développé sur une sphère géographique bien plus étendue.
De Buenos Aires au Caire, en passant par Lisbonne, Mexico, Prague, Séoul et
Tokyo, des artistes ont tenté de laisser l’inconscient envahir l’art, et aussi de
brandir la poésie artistique face au monde politique et de faire tomber l’hypocrisie
des conventions. Après avoir été présentée à New York, cette exposition
souhaite marquer le coup et réécrire l’histoire du surréalisme. En réunissant des
œuvres réalisées dans une quarantaine de pays, l’exposition tente de rétablir
l’équilibre et, ce faisant, confère une dimension nouvelle, non dénuée d’intérêt,
à ce mouvement majeur de l’histoire de l’art. (ah)
Koga Harue, Umi (the sea), 1929. Tokyo, The National Museum of Modern Art. © photo :
MOMAT / DNPartcom
La Collection Al Thani
jusq. 19-01-2038
Hôtel de la Marine
Paris
www.hotel-de-la-marine.paris
Sculpture représentant un ours, Chine, dynastie
des Han occidentaux, 206 av. J.-C.-25 apr.
J.-C., bronze doré. Collection Al Thani.
Le cheikh Hamad Ben Abdullah Al Thani, cousin de l’émir du Qatar, possède une collection
d’art parmi les plus prestigieuses au monde. Un bel ensemble de celle-ci est présenté en
l’Hôtel de la Marine, dans les galeries qui anciennement servaient de garde-meuble royal. On
y admire, entre autres, une exceptionnelle tête de pharaon de la XVIIIe dynastie, sculptée dans
un morceau de jaspe rouge, une incroyable sculpture de la dynastie chinoise des Han représentant
un ours et un pendentif maya en forme de masque. Une galerie explore le thème du
portrait par le biais de visages sculptés provenant de différentes périodes et de différents lieux.
Une autre galerie réunit des objets façonnés dans des matières précieuses : or, argent et pierres
précieuses. Une section est consacrée aux arts de l’Islam : s’y trouve la fameuse coupe à vin de
l’empereur Jahângîr (1607-1608 apr. J.-C.), soit le plus ancien récipient en jade daté pouvant
être associé avec certitude à un empereur moghol. (ah)
15

16
Paroles de galeristes #0 2.2022 — PART 1
MARRA\NOSCO
Gallery
Nouvelle plateforme
internationale
à Bruxelles
Cyril Moumen de la Gallery Nosco (Royaume-
Uni et France) et Anna Marra de la Galleria Anna
Marra (Italie) ouvrent ensemble un nouveau
chapitre : MARRA\NOSCO Gallery. Peut-être
vous rappelez-vous de leur précédent projet
bruxellois, l’espace de conservation baptisé
Bubble’n’Squeak (lire COLLECT n° 508). L’objectif
est le même : un dialogue entre artistes de
générations et de continents différents.
Quel regard portez-vous sur
votre projet Bubble’n’Squeak ?
Certains artistes ont-ils été
particulièrement appréciés par
les collectionneurs ?
MARRA : « Bubble’n’Squeak
était une bonne occasion de
découvrir de nouveaux artistes
et une nouvelle scène artistique.
Chacune des galeries impliquées
(outre la Galleria Anna
Marra et la Gallery Nosco, la galerie
belgo-italienne Montoro12,
ndlr) a partagé son expérience
et ses réseaux pour développer
quelque chose de tout à fait
neuf. Les collectionneurs locaux
ont beaucoup apprécié nos
expositions. Ils furent particulièrement
attentifs à nos idées,
et même à des artistes pas si
connus en région bruxelloise. »
NOSCO : « Pour être honnête,
je n’ai pas eu une
seconde à moi pour penser
à Bubble’n’Squeak depuis sa
clôture, avec tous ces déplacements
pour participer aux
derniers salons de Barcelone,
Londres, Turin et Miami...
Je ne reste jamais inactif et
cela résume bien le projet
Bubble’n’Squeak dans son
ensemble. Celui qui le souhaite
vraiment peut toujours
accomplir des choses, malgré
les temps difficiles. L’artiste qui
a remporté le plus de succès est
Dan Mihaltianu. Il a eu la gentillesse
de reproduire pour nous
son installation de la Biennale
de Venise. »
Bubble’n’Squeak a existé
pendant près d’un an. MARRA\
NOSCO se veut-elle plus
pérenne ?
MARRA : « Bubble’n’Squeak
était un pop-up curatorial. Lors
de l’année écoulée, nous avons
pu présenter six expositions
internationales et plus de quarante
artistes issus du monde
entier. Je suis très heureuse d’en
avoir fait partie, car cela m’a
permis de découvrir la scène
artistique de l’Europe du Nord.
J’y ai également noué de solides
contacts. La nouvelle galerie
MARRA\NOSCO est le résultat
de la collaboration avec Cyril
Moumen. Cette fois, il ne s’agit
plus d’un projet temporaire,
mais d’une nouvelle galerie avec
un programme intensif qui sera
développé dans les années à
venir, y compris une résidence
d’artistes. »
Les artistes du programme
sont majoritairement issus
de Roumanie et d’Amérique
latine. D’où viennent ces choix
géographiques ?
NOSCO : « L’accent roumain
est né de ma collaboration avec
Anna Marra et Cyril Moumen. © D. R.
« Il est important d’être clair et
transparent. Le reste relève de
l’expérience humaine. »
CYRIL MOUMEN
un peintre, Radu Oreian. J’ai
rencontré Radu par l’intermédiaire
de mes amis de la Plan
B Gallery, spécialisés dans
la promotion de différentes
générations d’artistes roumains.
Pour l’Amérique latine, en 2007,
j’ai rencontré pour la première
fois des artistes brésiliens par
l’intermédiaire d’un ami, à Rio
de Janeiro. S’en sont alors suivis
de nombreux voyages au Pérou,
au Mexique et en Colombie. La
culture latino-américaine me
fascine. »
MARRA : « Notre programmation
ne se concentrera toutefois
pas seulement sur ces zones
géographiques. Deux artistes
italiens réputés participent
également à la première
exposition collective, ainsi
qu’un jeune artiste américain.
Grâce à diverses collaborations
fructueuses avec des galeries et
des commissaires de New York,
je me suis davantage concentrée
sur les artistes américains
et afro-américains au cours des
dernières années. »
Quel est le secret d’une bonne
collaboration entre deux
grandes enseignes de niveau
international ?
MARRA : « Je suis convaincue
qu’une bonne collaboration
rend les individus plus forts.
Une foule de nouvelles opportunités
s’ouvre soudainement.
Nous partageons un intérêt
commun pour la scène artistique
internationale, une vision
similaire et des programmes
particulièrement complémentaires.
»
NOSCO : « Je ne considère pas
ma galerie comme ‘‘grande’’ et
je ne suis pas sûr de connaître
le secret d’une bonne collaboration.
Il est important
d’être clair et transparent. Le
reste relève de l’expérience
humaine. »
MARRA\NOSCO Gallery
Bruxelles
www.marranosco.com

GALERIES
Nicolas Cluzel
Féroce
jusq. 19-02
Bruno Matthys Gallery
Bruxelles
www.brunomatthys.art
Jardin.
Massao Mascaro
du 13-02 au 24-04
Hopstreet Gallery
Deurle
www.hopstreet.be
Les peintures de Nicolas
Cluzel renvoient aux pièces
iconiques de l’histoire de
l’art. Goya, Géricault ou
Delacroix sont convoqués
dans des œuvres qui appellent
un traitement tout
aussi maîtrisé. Partageant
la même puissance dans
les clairs-obscurs mais aussi
dans l’expressivité des
traits, l’artiste emprunte
aux grands romantiques
la même émotion. Et
pourtant, il ne manque pas
de s’affranchir de ses aînés.
Sa vision décalée, grinçante
et cynique se joue
des codes classiques pour
nous emmener dans un
monde d’humour sombre
et de dérision. La figuration
est sacrifiée sur l’autel
de la férocité. De nouvelles écritures qui appellent, en toute logique, de
nouvelles lectures. En contrepoint du travail pictural de Nicolas Cluzel seront
présentées les œuvres d’Anne Bothuon. Se distanciant formellement de ceux
qui sculptent le marbre, l’argile ou la terre cuite, cette artiste a pris un parti
radical. Elle sculpte l’ouate et le tissu, elle brode, coud, teinte et modèle des
personnages à têtes d’animaux en taille réelle. Le résultat, à la fois réaliste et
imaginaire, force la réflexion et attise l’imagination. (gg)
Nicolas Cluzel, Nature morte (I), 2021, huile sur toile, 116 cm x 89 cm © l’artiste – Prix : entre
200 et 3.400 €
La galerie
Hopstreet nous
laisse flâner dans
l’exposition Jardin
du photographe
français Massao
Mascaro (1990), lequel
s’est récemment
distingué
à la Fondation A
Stichting avec Sub
Sole, sa quatrième
et plus récente
série de photographies
prises au
cours de voyages
en Méditerranée,
avec L’Odyssée
comme guide et sur fond de migration contemporaine.
Des images en noir et blanc, tel un poème subtil et
complexe que l’on retrouve dans Jardin, deuxième série
récompensée en 2016 par le BOZAR Nikon Monography
Series Award et consignée en 2019 dans un livre
publié par Witty Kiwi et L’éditeur du dimanche. Une
frêle brindille prise dans un grillage, le regard d’une
jeune femme et des images plus sobres mais suggestives,
produits d’errances à travers les rues et parcs de
Madrid. Comme des chuchotements intenses autour de
l’idée de ‘‘jardin’’. (cv)
Massao Mascaro, Jardin, 2019, photo analogique en noir et blanc,
impression sur papier baryté, 150 x 100 cm. © de l'artiste
Prix : de 1.500 à 2.800 €
Stan Van Steendam
du 05-02 au 13-03
Barbé Urbain
Gand
www.barbe-urbain.com
Stan Van Steendam, Sil, 2021, pigments,
gravats, débris, plâtre et résine époxy
sur bois, 105 x 124 x 16 cm. © de l’artiste /
Courtesy Barbé Urbain
Prix : de 3.000 à 10.000 euros
La peinture de Stan Van Steendam se contorsionne et sort de ses gonds, avec méticulosité
et un séduisant sens tactile. L’artiste belge (1985) s’inspire des traditions abstraites du matiérisme,
dont le monochrome et le minimalisme, un peu à la manière de Robert Ryman, tout en
y apportant sa propre touche, à mains nues, car c’est ainsi qu’il réalise ses œuvres. Ce faisant, il
efface les frontières entre peinture et sculpture. De son environnement de travail, il collecte les
matériaux, détritus et gravats qui serviront dans ses oeuvres. À l’automne dernier, il fut le premier
artiste en résidence au domaine viticole du Valke Vleug à Liezele. Sa deuxième exposition
solo chez Barbé Urbain est Down the trail. Les œuvres sont en grande partie créées dans un
atelier situé dans une zone industrielle de Lisbonne. Ses tableaux présentent brèches et fissures
et quelques sculptures une entaille dans l’espace avec une longue bande de gravats. (cv)
17

GALERIES
Rendez-vous
avec elles...
jusq. 13-03
Centre wallon d’Art contemporain
– La Châtaigneraie
Flémalle
www.cwac.be
Yoo Geun-Taek
du 11-02 au 09-04
Newchild Gallery
Anvers
www.newchildgallery.com
Organisée à l’initiative
de la Province de Liège
et du Centre wallon
d’Art contemporain -
La Châtaigneraie, cette
exposition propose
une mise en lumière
des œuvres signées par
des femmes artistes
appartenant à la collection
de la Province
de Liège. L’occasion
de rendre hommage à
leur créativité et à leur
pugnacité. En effet,
si leurs homologues
masculins doivent se
battre pour obtenir
visibilité et reconnaissance, c’est encore plus vrai pour les
femmes artistes. L’accrochage réunit des œuvres allant des
années 1940 à nos jours, explorant les médiums les plus variés
(vidéo, sculpture, photographie, peinture, dessin, art textile...).
La sélection permet également d’aborder des thèmes très
divers qui ont marqué l’histoire provinciale. Ces plasticiennes
sont accompagnées par quelques présences masculines
célébrant également la femme dans leurs travaux. Enfin, soulignons
que quelques œuvres de l’artothèque de la province
ponctuent l’exposition. Elles sont mises en évidence afin de
faire connaître au public ce service qui valorise la démocratisation
de la culture. (gg)
Dario Caterina, Femme éloignée de l’Afrique, s.d., technique mixte sur
toile, 200 cm x 150 cm. © de l’artiste
La jeune galerie anversoise Newchild présente la première exposition
solo en Europe de Yoo Geun-Taek (1965). L’artiste, figure de
proue de la peinture coréenne de l’après-guerre, est largement
reconnu dans son pays natal et d’autres pays asiatiques. Ses œuvres
figurent également dans la White Rabbit Collection, en Australie. Il
combine les techniques de peinture coréennes traditionnelles avec
de nombreux objets usuels occidentaux, en raison de leur impact
sur la vie quotidienne coréenne, et les applique à des paysages au
lavis sur hanji, papier d’écorce de mûrier fait main. Même s’il élargit
l’utilisation de techniques anciennes, Yoo Geun-Taek n’en réfléchit
pas moins sur le quotidien de son pays au départ de ses propres
expériences et émotions. Contenu et matérialité vont de pair dans
une sorte de peinture méditative qui a parfois quelque chose de
surréaliste. (cv)
Yoo Geun-Taek, Some Dinner, 2019, encre noire, poudre blanche et détrempe
sur papier hanji coréen, 204 x 295 cm. © de l’artiste / Courtesy Newchild Gallery
Prix : de 5.000 à 40.000 €
Carlotta Bailly-Borg
jusq. 19-02
Ballon Rouge
Place du Jardin aux Fleurs 2
Bruxelles
www.ballonrougecollective.com
Carlotta Bailly-Borg, Frustrated, 2021, peinture
acrylique, toile de lin et acier, 230 cm x 75
cm. © de l’artiste / Courtesy Ballon Rouge &
NEVVEN / photo : David Eng – Prix : entre
3.500 et 10.000 €
Artiste française basée à Bruxelles, Carlotta Bailly-Borg (1984) élabore un langage singulier
aux accents surréalistes et développe une œuvre plastique où se télescopent des éléments
empruntés à la mythologie, à la culture Pop, au classicisme ou aux représentations érotiques
japonaises. Cette première exposition solo, imaginée en deux actes à Bruxelles et à Bâle, réunit
des œuvres inédites ainsi que des pièces déjà vues. Véritable signature de l’artiste, la série
intitulée Family Affair est constituée d’un ensemble d’œuvres à défilement vertical représentant
des cordes et des nœuds enrobant des créatures emblématiques. À Bruxelles, l’artiste propose
de nouvelles peintures de grandes dimensions dans lesquelles elle explore des techniques de
transfert de photos afin de leur insuffler une profondeur supplémentaire. Avec un ensemble
d’œuvres allant du dessin à la peinture sur toile en passant par la céramique, la fresque ou la
peinture sous verre, l’artiste explore en permanence de nouveaux modes d’expression. Un
travail inspiré d’une myriade de références transhistoriques et transculturelles. (gg)
18

GALERIES
Alice Neel
jusq. 05-03
Xavier Hufkens
Rue Van Eyck 44
Bruxelles
www.xavierhufkens.com
Andy Warhol
jusq. 12-03
Deodato Art
Bruxelles
www.deodato.be
Une nouvelle exposition
de portraits d’Alice Neel
(1900-1984) fait revivre
l’Amérique du XXe siècle
à travers tous ces visages,
de personnes jeunes ou
âgées. Cet ensemble de
tableaux soigneusement
sélectionnés, peints sur
une période de plus de
cinquante ans, comprend
des œuvres qui
n’ont jamais été exposées
auparavant. Aussi, la sélection
met-elle en lumière
l’évolution de l’œuvre de
l’artiste au fil des décennies.
Qu’il s’agisse de
bébés, de jeunes enfants
ou d’adolescents, d’amis,
d’amants ou de mécènes,
de personnes aisées ou
pauvres, tous ces sujets
étaient tout aussi intéressants
et importants à
ses yeux. Cette galerie de portraits confronte le spectateur à quelques questions
essentielles et existentielles. Quand sommes-nous devenus ce que nous sommes?
Et comment avons-nous changé, évolué ? L’artiste met à nu la psychologie de
ses modèles, livrant sur la toile leur vulnérabilité, leurs incertitudes. On observe
également dans cet accrochage l’importance des enfants comme source vitale et
perpétuelle d’inspiration. (gg)
Alice Neel, Sol Alkaitis, 1965, huile sur toile, 101 × 68 cm. © Courtesy the Estate of Alice Neel /
Xavier Hufkens, Brussels / photo : Kerry McFate – Prix sur demande
La Galerie Deodato Art présente une exposition
consacrée à Andy Warhol, pape du Pop art
qui s’est imposé au rang des plasticiens les plus
influents du XXe siècle. L’accrochage réserve une
place toute particulière aux icônes qui ont inspiré
sa production : de la sulfureuse Marilyn aux rock
stars à l’instar de Mick Jagger, en passant par
des motifs aussi emblématiques que la populaire
soupe Campbell’s. Convoquant les couleurs
vives, Andy Warhol manipule des images de la
culture Pop jusqu’à ce qu’elles deviennent des
icônes. Aujourd’hui, et après toutes ces années,
leur pouvoir de fascination demeure. L’exposition
réunit certaines des œuvres les plus importantes
de Warhol, des séries numérotées (qui atteignent
toujours des records aux enchères) aux historiques
This is Not By Me, mais aussi des sujets plus populaires,
comme Marilyn et Flowers, aux acétates
extrêmement rares de Ladies & Gentlemen. (gg)
Andy Warhol, Vesuvius ll.365, sérigraphie en couleur, 80 cm
x 100 cm © Deodato Art – Prix : entre 300 et 40.000 €
Picasso
jusq. 29-05
Château de Waroux
Ans
www.chateau-waroux.be
Pablo Picasso, Corrida, lithographie, 1961, impression : Mourlot
Frères, Paris. © Succession Picasso / Sabam Belgium 2021
Le Château de Waroux s’attaque au monstre sacré Pablo Picasso. Existe-t-il un
artiste à l’aura plus emblématique, un génie parvenu à explorer des voies esthétiques
aussi différentes et atypiques ? L’exposition de prestige qui lui est consacrée
réunit une centaine d’œuvres, essentiellement gravures, lithographies et
illustrations originales. La visite se structure autour de plusieurs thématiques et
aborde successivement les débuts de l’artiste, sa période espagnole, le cubisme,
l’influence africaine, le surréalisme, la céramique, l’art du portrait et l’engagement
de l’artiste pour la Paix. Le parcours dévoile également d’autres œuvres
d’artistes tels Jean Cocteau ou Dora Maar qui fréquentèrent Picasso. Notons
enfin qu’un court-métrage réalisé par le cinéaste belge Paul Haesaerts présente
Picasso au travail dans son atelier. (gg)
19

GALERIES
LiHa – Adage
jusq. 26-02
The Palm Beach
Bruxelles
www.thepalmbeach.be
Agnès Thurnauer
jusq. 05-03
Michel Rein
Bruxelles
www.michelrein.com
Considérant très
longtemps la
photographie et la
peinture comme
deux disciplines en
concurrence, LiHa
décide d’entreprendre
la synthèse
des deux en
peignant sur des
photos. La rivalité
se mue en complémentarité
: la
photographie inspirant
le tableau et
vice versa, dans un
échange vertueux.
Depuis, la photo n’est plus un support mais une inspiration
qui imprègne toute sa production. L’artiste travaille
actuellement sur un papier blanc augrain fin.Petit à petit,
diverses teintes apparaissent, les pigments, l’acrylique, le
pastel et l’écoline sont manipulés avec un peu plus de maturité.
LiHa travaille à même le sol, jouant tantôt avec des
brosses, tantôt avec des morceaux de bois ou des spatules.
Tour à tour, l'artiste frotte, étale, peigne, lisse... Elle repasse
en couleur et laisse les matières se figer.Le brou de noix et
les pigments sont travaillés sans ménagement.Des mouvements
et des imprévus parfois surprenants se forment
selon les pulsions. Les formes s’affinent dans des compositions
qui tiennent de l’abstraction lyrique. (gg)
LiHa, Pas de deux, 2021, mix media sur papier, 75 cm x 60 cm
© de l’artiste – Prix : entre 450 et 900 €
À travers ses peintures, sculptures et installations, Agnès Thurnauer (1962)
concentre sa pratique autour du langage. Ainsi, l’écriture est souvent
présente dans sa praxis picturale conduisant le spectateur à s’émanciper à
l’infini de sa propre lecture. Cette qualité plastique du langage se ressent
dans ses sculptures faites de moulages de lettres à différentes échelles,
laissant le regard et le corps s’impliquer. Pour Agnès Thurnauer, le rapport
aux œuvres d’art induit la réciprocité. Si l’œuvre d’art lit le monde, c’est
à chacun d’en faire sa propre lecture. Ce langage partagé, au cœur de
notre société, confère à l’art une puissante fonction poétique et politique.
Le travail d’Agnès Thurnauer a été révélé au public par une exposition
personnelle au Palais de Tokyo, en 2003. En 2020, elle installait une œuvre
permanente, Les Matrices Chromatiques, au musée de l’Orangerie. En
septembre 2021, une grande commande publique du ministère de la
Culture, à Ivry-sur-Seine. Notons encore qu’elle aura, en 2022, quatre
expositions monographiques. (gg)
Agnès Thurnauer, Original world #3, 2008, acrylique sur toile, 130 cm x 165 cm
© de l’artiste / Courtesy Michel Rein, Paris / Bruxelles - Prix : entre 8.000 et 21.500 €
François van Zuylen
jusq. 26-02
Gery Art Gallery
Namur
François van Zuylen, My Little Sweet
Neighborhood III, photographie, 6,2 cm x
6,2 cm. © de l’artiste – Prix : 750 €
Intitulé My Little Sweet Neighborhood, ce projet photographique signé François van Zuylen
explore différents éléments du patrimoine immobilier belge. Il propose un regard singulier
sur la façon dont celui-ci a évolué. En filigrane de toutes ces images reviennent incessamment
quelques questions : ces éléments sont-ils conservés, sont-ils entretenus ou sont-ils laissés à
l’abandon, voire détruits ? Destinés à constituer un inventaire et à laisser une trace inaltérable
de ces lieux pouvant paraître anodins, ces clichés invitent le spectateur à une balade ou, mieux,
à une réflexion en se rendant virtuellement ou physiquement sur les lieux photographiés via un
point GPS afin de constater l’évolution de chaque situation. L’objectif étant de tisser des liens
entre passé et présent, en souhaitant insister sur le temps qui passe et imprégner le résultat
d’une forme de nostalgie, François van Zuylen livre des images troubles ou décolorées. Ces
options esthétiques conviennent parfaitement au format Polaroïd. (gg)
20

Bruthaus Gallery
Un art qui compte,
loin de la grande ville
Le coronavirus joue au chat et à la souris avec
l’agenda des foires, les artistes font le tour des
galeries et certains marchands se regroupent
dans les grandes villes pour faciliter la vie aux
collectionneurs. Comment une galerie provinciale
parvient-elle à conserver ambition et originalité ?
Nous avons posé la question à la Bruthaus Gallery
de Waregem.
Quelle fut votre croissance l’an
dernier et quelle impression
gardez-vous de 2021 ?
Joris Vander Borght (qui gère la
galerie avec son épouse Nancy
De Vos) : « Le confinement
total de 2020 a aiguisé notre
jugement et nous a convaincus
de continuer sur notre lancée.
Au lieu d’adopter un comportement
prudent et attentiste, Bruthaus
a accéléré ses ambitions.
2021 fut une année agitée et
étrange à la fois qui nous a permis
de réaliser certains rêves.
J’ai, par exemple, présenté des
œuvres de deux artistes (Willem
Boel et Thomas Renwart) en
même temps, ce qui a constitué
un enrichissement tant
pour eux que pour le public.
Nous avons, pour la première
fois, engagé une assistante de
galerie et joué résolument la
carte des réseaux sociaux pour
notre promotion. Le succès s’est
traduit par l’acquisition muséale
de trois œuvres importantes de
trois artistes. »
Les artistes vont et viennent.
Comment la Bruthaus Gallery
s’en accommode-t-elle ?
« Les allées et venues d’artistes
sont un cycle naturel que nous
comprenons parfaitement. Il
nous arrive de devoir mettre
un terme à une collaboration
avec un artiste car il nous paraît
difficile de réaliser notre objectif
de progression de sa carrière
artistique. Mais nous constatons
que des artistes de qualité,
forts et dynamiques souhaitent
travailler avec nous.Nous
sommes galeristes parce que
nous croyons à l’importance, au
besoin vital de l’art et à l’importance
de l’artiste qui construit et
interprète le monde. »
La Bruthaus Gallery constitue
un cas à part en raison de son
isolement géographique. Estce
un facteur déterminant dans
votre vision de l’art ?
« Cette région est connue pour
la quantité de ses collectionneurs
capables d’acquérir des
œuvres difficiles. Les premières
années, nous avons dû travailler
dur pour nous faire connaître,
mais nous collaborons depuis
avec le S.M.A.K. et des amateurs
de plus en plus nombreux
ont trouvé le chemin de notre
espace. Nous ne sommes du
reste pas si isolés que cela, au
contraire ! Il ne faut pas oublier
que nous sommes situés sur
l’axe entre le musée Dhondt
Dhaenens, le musée Raveel
et la Deweer Gallery (Keteleer
Gallery) d’Otegem. Nous
voulions une galerie spacieuse
et abordable à la fois, afin de
ne pas mettre en péril notre
équilibre financier. Claessens
Artist Canvas, qui produit depuis
1905 la meilleure toile en lin
de la région de la Lys, située
à deux pas d’ici, est l’une des
premières sociétés dont nous
avons fait la connaissance. Des
artistes comme Jackson Pollock
ou Gerhard Richter ne voulaient
peindre que sur leurs toiles ! Dès
le début, nous avons pu utiliser
Nancy De Vos et Joris Vander Borght. © D. R.
« Nous ne suivons aucune
tendance mais essayons d'anticiper
qui deviendra important. »
JORIS VANDER BORGHT
leurs ateliers d’usine pour de
grandes installations in situ non
commerciales. » Joris Vander
Borght sait par expérience ce
que signifie être un artiste et
c’est cette vision que la galerie
suit obstinément avec lui. « Nous
ne montrons pas les choses que
nous aimons voir, mais l’art que
nous jugeons important. Ce qui,
selon moi, est pertinent sur le
plan de l’histoire de l’art, il est
crucial de le montrer. L’authenticité
et l’intégrité comptent
énormément, un artiste ne doit
pas essayer de ‘‘plaire’’, mais
plutôt expérimenter et remonter
aux sources. »
Art Rotterdam est reportée
au mois de mai, qu'allez-vous
faire ?
« Une entreprise se doit d’être
flexible. Nous sommes prêts, ce
salon est donc mis en réserve et
notre programme ‘‘maison’’ va
se dérouler normalement. Les
foires d’art comptent beaucoup
pour les artistes, ils leur offrent la
possibilité de se faire connaître
d’un public étranger. Nous nous
positionnons depuis plusieurs
années davantage au niveau
international, ce qui donne un
formidable coup de pouce à
notre crédibilité. Nous avons déjà
participé plusieurs fois à Art Rotterdam
et Artissima Turin et nous
poserons bientôt aussi notre candidature
pour Art Cologne. Mais
si la participation à des salons
étrangers nous paraît importante,
nous ne refusons pas non
plus les invitations plus locales, à
Art Brussels par exemple ! »
Joost Pauwaert, Guy
Slabbinck et Dennis Ceylan
jusq. 20-02
www.bruthausgallery.com
Paroles de galeristes #02.2022 — PART 2
21

L’ARTISTE DU MOIS
Antoine Grenez
Dans cette série, COLLECT s’intéresse à la place occupée par les jeunes
artistes dans le monde contemporain. Pourquoi ont-ils choisi cette voie,
d’où leur vient leur inspiration et comment se positionnent-ils ?
Ce mois-ci, nous nous intéressons au Namurois Antoine Grenez (1994).
TEXTE : ELIEN HAENTJENS
PORTRAIT : GUY KOKKEN
Le jeune photographe Antoine
Grenez partage son temps entre les
commandes, notamment pour VICE
ou la marque de mode bruxelloise
Filles à Papa, et son travail artistique. Il
y joue avec les frontières entre réalité et
fiction, menant des recherches sur les
moyens de rendre l’invisible visible : « Au fil
des derniers mois, j’ai dévoré des ouvrages
sur la psychanalyse, la science-fiction et les
civilisations anciennes. J’essaie de comprendre
ce qui se passe dans notre subconscient
et s’il fait partie d’une mémoire
collective globale, peu traitée dans les
livres d’histoire classiques. Voilà pourquoi
je m’intéresse également aux rêves ou
aux effets des substances psychédéliques
comme celles utilisées par les peuples
primitifs de la forêt amazonienne. En
examinant la situation dans son ensemble,
je tente de comprendre ma propre position
dans ce monde. (…) Il y a quelques années,
j’ai assisté à une fête dans la mythique
discothèque Berghain de Berlin. J’ai alors
eu le sentiment que l’énergie qui venait de
cette expérience collective était bien plus
puissante que ce que je ne pourrais jamais
exprimer avec mes photographies. Depuis,
j’ai intégré la musique, la performance et la
danse dans mon travail. Ces genres artistiques
permettent de faire plus facilement
de nouvelles rencontres et mettent l’accent
sur le collectif, tandis que la photographie
a plutôt des vertus documentaires.
En parallèle, je considère que les textes
et la recherche font partie intégrante de
mon travail. » Plutôt que de présenter ses
images en série dans un cube blanc, pour
chaque exposition, Antoine Grenez crée
un patchwork imprégné de références :
« Je préfère combiner mes images avec
toutes sortes de textes et du matériel de
recherche, permettant aux visiteurs de
plonger plus profondément dans mon
univers. Un bon exemple en est l’exposition
Résistance heureuse, série de photographies
que j’ai prises de jeunes de ma
région pendant le confinement. Il m’arrive
également de demander à des amis artistes
d’écrire sur les murs leur interprétation
à côté de mes photos, afin de créer une
œuvre collective dans une perspective plus
large. De plus, la photographie constitue
un excellent moyen de capturer le moment
présent, tandis que je cherche à approfondir
ma quête du réseau subconscient.
(…) Mon grand rêve serait, d’ici quelques
années, d’ouvrir mon propre club. Dans ce
22

L’ARTISTE DU MOIS
Quadryptique Embuscade, 2019, éd. 1/3, tirage jet d’encre, 150 x 100 cm. © de l’artiste - 6.000 €
Selon moi,
toutes les réponses
se trouvent dans
la nature.
cadre, je souhaiterais organiser des fêtes
rituelles où les gens se connecteraient
plus étroitement les uns aux autres, mais
aussi avec notre environnement naturel ou
nos ancêtres. Dans cette optique, j’étudie
entre autres la méthode Kirlian qui permet
de réaliser des photographies visualisent
l’ ‘‘aura’’ des être ou des choses. Il serait
intéressant de penser ce club comme un
gigantesque ensemble Kirlian me permettant
de visualiser l’échange d’énergie entre
les personnes présentes. »
LES RÉPONSES SONT DANS LA NATURE
Dans cette même perspective, les similitudes
entre microcosme et macrocosme
fascinent l’artiste. Par exemple, dans ses
photographies, il visualise régulièrement
les motifs agrandis du savon sur la peau,
qui ressemblent à un paysage de rivières.
Il est aussi fasciné par les plantes : « Ma
série Embuscade joue avec la relation entre
les plantes et la façon dont les militaires
les utilisent pour leur camouflage. Dans
ma quête de forces plus profondes dans
notre existence, je retourne bien souvent à
la nature. Par exemple, j’examine certains
motifs géométriques, des forces naturelles
qui sont également utilisées dans
le bio-mimétisme, ou le fonctionnement
de la lumière. Même si quelque chose
dans la nature peut paraître chaotique, on
peut toujours y déceler un certain ordre.
Selon moi, toutes les réponses se trouvent
dans la nature et il est grand temps pour
nous, en tant qu’êtres humains, de faire
preuve de plus de modestie à ce propos.
On peut d’ailleurs apprendre beaucoup
des tribus de la forêt amazonienne qui
peuvent communiquer avec les plantes.
Dans notre société occidentale, nous avons
perdu le contact avec notre nature sauvage.
En même temps, l’esprit de chacun
crée ses propres connexions. Par mon
travail artistique, j’aimerais que le spectateur
expérimente la réalité à travers mon
regard. » Antoine Grenez est essentiellement
inspiré par les cinéastes, moins par
les photographes : « Soit je suis extrêmement
critique par rapport au travail de mes
collègues, soit je râle de ne pas en avoir eu
moi-même l’idée. Pour le travail de Geert
Goiris, l’un de mes professeurs à Saint-Luc
Bruxelles, je fais toutefois une exception. Je
suis impressionné par sa lecture des objets
qui nous entourent et sa faculté de rendre
visible l’invisible. J’aime aussi la poésie avec
laquelle le documentariste chilien Patrizio
Guzman dépeint les coutumes des peuples
traditionnels et j’aimerais pouvoir travailler
comme le réalisateur allemand Werner
Herzog. Bien qu’il ait été photographe
dans les années 1970, il est surtout réputé
pour ses documentaires intellectuels, d’inspiration
anthropologique, à forte signification
symbolique. Par exemple, il s’est
mis en quête de la mémoire de l’eau. Il est
beau de voir la façon dont ces artistes vont
à contre-courant d’une vision trop occidentale
du monde. » Malgré son désir d’un
mode de vie plus naturel, Antoine Grenez
a les pieds bien ancrés dans le monde
technologique d’aujourd’hui : « Pendant
la pandémie, avec notre collectif Chanoirs,
nous avons développé un jeu vidéo en
application qui permet de découvrir nos
œuvres dans la peau d’un chat. Dans cet
environnement virtuel, les utilisateurs
peuvent se rencontrer et se parler. En
parallèle, ils peuvent visualiser une œuvre
dans leur intérieur et l’acheter immédiatement
avec de la crypto-monnaie. Contrairement
à d’autres œuvres d’art en NFT,
ils reçoivent également une copie physique
de l’œuvre. Rien de tel qu’une belle
impression ! De même, le code numérique
unique associé à mes photographies me
permet de les suivre et de percevoir un
pourcentage lors de chaque revente. Nous
controns ainsi la tendance dominante du
marché de l’art, dans laquelle l’artiste n’a
aucun contrôle sur son œuvre après la première
vente, et nous défendons une économie
alternative plus libre. Les nouvelles
technologies comme les NFTs contribuent
donc également à lutter contre la spéculation
sur le marché de l’art. »
SURFER
www.antoinegrenez.com
www.chanoirs.com
23

ZOOM
John Edmonds
Entre héritage et identité
Lauréat du prix Foam Paul Huf
2021, John Edmonds examine les
questions d’identité et de pouvoir
d’un point de vue afro-américain,
une manière apparemment simple
mais complexe sur un plan culturel.
TEXTE : LAURENT DE HEMPTINNE
The Villain, 2018. © de l’artiste
Né en 1989 dans la capitale fédérale
américaine, le photographe
John Edmonds vit et travaille
aujourd’hui à Brooklyn, New
York. Détenteur d’un MFA en photographie
de la Yale University School of Art et
d’un BFA en photographie de la Corcoran
School of Arts and Design, il est reconnu
pour des projets qui participent du renouveau
actuel autour de la blackness. Il n’est
d’ailleurs pas anodin que la photographie
trouve une place de choix dans ce mouvement
d’empowerment et d’affirmation de la
diversité des identités noires, notamment
queer. Dans sa démarche, John Edmonds
se focalise entre autres sur les gestes
performatifs et la construction de soi des
jeunes noirs dans les rues de l’Amérique.
Dans d’autres séries, il réalise des portraits
évocateurs d’amoureux, d’amis proches
et d’inconnus. Plus récemment, il revisite
l’histoire de l’art. Lauréat de nombreux
prix internationaux, tant aux Etats-Unis
qu’en Europe, John Edmonds renégocie
ainsi l’intersection entre race, genre,
24

ZOOM
Guard for the Gods, 2020. © de l’artiste
John Edmonds renégocie l’intersection entre
race, genre, sexualité et spiritualité en
les replaçant dans une perspective historique
et en revisitant les clichés du passé.
sexualité et spiritualité en les replaçant
dans une perspective historique et en revisitant
les clichés du passé. Ainsi, l’artiste
recontextualise dans le débat actuel sur
les restitutions des pillages coloniaux le
célèbre portrait Kiki de Montparnasse avec
un masque africain (1926) de Man Ray.
QUESTIONNER L’HÉRITAGE CULTUREL
Les objets d’art africain qu’il utilise dans
son œuvre revêtent de nombreuses facettes,
fonctionnant comme des symboles
de l’héritage culturel africain traditionnel
ou comme porteurs de significations à
l’intention de la diaspora et du patrimoine
mémoriel de la communauté noire. Quelle
que soit leur origine, ils fonctionnent
comme un moyen d’explorer des sujets
tels que le déplacement et l’expropriation
dans la société contemporaine. Pour la
plupart, ils sont détournés de leur destinée
commerciale pour être glorifiés par
l’artiste, au même titre que ceux conservés
dans les musées d’Occident. Par le prisme
de la création, ils deviennent sujets de
désir et d’intrigue, compliquant les questions
de pouvoir, d’identité et de provenance
- Cet art prend-il une signification
autre lorsqu’il est utilisé, en photographie,
par un africain, un afro-américain ou un
blanc ? - tandis qu’ils transcendent temps,
espace et communautés. Non seulement
l’artiste élargit dans son œuvre la tradition
du portrait en studio, mais il revendique
de manière réfléchie sa place dans
la réécriture du passé en l’ancrant dans le
monde actuel, où l’authenticité et l’identité
sexuelle ou de genre paraissent plus complexes.
Une dialectique révélée dans des
œuvres intimes articulées par la lumière,
utilisée tant comme accessoire plastique
que comme outil narratif, liant l’intime
au sacré, le singulier à l’universel. Dans
cette perspective, l’artiste encourage ses
modèles à user de leurs propres vêtements
et accessoires comme autant de symboles
iconographiques d’une même quête identitaire.
VISITER
John Edmonds. A Sidelong Glance
FOAM
Amsterdam
www.foam.org
du 18-02 au 19-06
SURFER
www.johnedmonds.studio
25

Futurisme
Rêves d’un
monde nouveau
Le futurisme fut longtemps considéré comme un mouvement artistique
bref mais violent. Dans une perspective plus large, musées et historiens
de l’art ont récemment été confrontés, un peu contre leur gré, à la
proximité du mouvement avec le fascisme. Le Rijksmuseum Twenthe lève
le voile sur ce côté obscur.
TEXTE : BERNADETTE VAN DER GOES
Giacomo Balla, Coups de feu un dimanche, 1918, huile sur toile. Rome, Banca D’Italia.
26

Durant l’hiver 1912, cinq hommes
aux vêtements de couleurs vives
se tiennent sur un trottoir parisien.
Bien en rang, ils regardent
la caméra. Les artistes italiens Luigi Russolo,
Carlo Carrà, Umberto Boccioni et
Gino Severini, aux côtés du poète Filippo
Tommaso Marinetti souhaitent alors
radicalement changer le monde. Avec
l’artiste Giacomo Balla, absent de l’image,
ils représentent la première génération
des futuristes italiens, courant artistique
d’avant-garde extrême du début du XXe
siècle. Marinetti en est le fondateur, l’artisan
et l’idéologue. Le cliché a sans doute
été pris lors de la première exposition internationale
des futuristes, en février 1912,
qui, après Paris, est présentée à Londres,
Berlin, Bruxelles, Amsterdam, Munich,
Zurich et dans huit autres villes. Quelques
années plus tard, l’artiste tchèque Rougena
Zatkova réalise un portrait de Marinetti
en chef de file charismatique. Après une
formation artistique à Prague et Munich,
celle-ci s’établit à Rome. Sa toile révèle
les caractéristiques indubitables de l’art
futuriste. Elle ne peint pas de portrait
statique, mais réalise une représentation
caléidoscopique en noir, blanc et gris, dont
émergent les yeux perçants de Marinetti
avec, comme point de repère unique, un
vortex de vagues et de rayures.
Rougena Zatkova, Portrait de Filippo Tommaso Marinetti,
1915-1916, huile sur toile. Héritiers Marinetti.
Jules Schmalzigaug, La dynamique de la danse, 1913, huile sur toile. Anvers, The Phoebus Foundation.
GLORIFIER ET ANÉANTIR
Filippo Tommaso Marinetti (1876-1944),
fils d’un riche avocat italien et lui-même
écrivain, poète et éditeur, se révolte au
début du XXe siècle contre le passé italien
et contre tout ce qui fait obstacle à
l'avenir que mérite son pays. Dans le futur
(il futuro), tout doit changer radicalement,
estime-t-il. En peu de temps, il se
fait de nombreux adeptes dans toutes les
couches de la société. Son Manifeste du
Futurisme, publié le 20 février 1909 dans
Le Figaro, est perçu comme une provocation.
Il y glorifie la guerre, le militarisme, le
patriotisme et l’anarchie. Et il appelle à la
destruction dans toute l’Italie des musées,
bibliothèques et académies comme thuriféraires
des vestiges du passé : « Une voiture
rugissant, aux allures de mitrailleuse
quand elle roule, est plus belle que la Victoire
de Samothrace. Une œuvre d’art sans
caractère agressif ne pourra jamais être un
chef-d’œuvre. » Marinetti rêve d’un monde
nouveau et il est prêt à aller très loin. Ses
idées le conduisent, dans les années 1920,
à devenir un actif défenseur du fascisme et
de Benito Mussolini.
LA MÉTHODE DES CHANTEURS DE RUE
Mais Marinetti n’en est pas encore là
lorsqu’il pose, en 1912, avec les premiers
futuristes à Paris. Après la publication de
son manifeste, il se rend très vite compte
Marinetti considérait
l'art comme un outil
politique.
que s’il souhaite toucher un grand
nombre de personnes, il doit appliquer ‘‘la
méthode des chanteurs de rue’’, se faire
entendre constamment et recourir à de
nombreuses illustrations. Considèrant
comme lui l’art comme un outil politique,
un groupe de jeunes peintres, dont
Umberto Boccioni est le plus bruyant,
se forme alors autour de lui. En l’espace
d’un an, ils développent leur propre langage
visuel : sur le plan stylistique, ces
artistes s’inspirent des cubistes tout en
s’opposant à leurs thèmes traditionnels.
Au lieu de classiques natures mortes et
de nus, les futuristes optent pour une vie
moderne trépidante, avec la foule dans
la ville, l’industrie, la technologie, les
véhicules rapides, la vitalité, l’action, la
révolution, la violence, l’agressivité. L’art
doit provoquer une sensation dynamique,
il doit pétarader. Ces peintres désirent
non seulement illustrer ce qu’ils voient,
mais aussi mettre en scène les bruits, le
vacarme, voire les odeurs et, par la même
occasion, secouer le spectateur. Dans
27

Luigi Russolo, La Rivolta (La Révolte), ca. 1911, huile sur toile. La Haye, Kunstmuseum.
Dans nos régions, les
futuristes n'ont guère
été collectionnés.
OMISSION
Dans nos régions, les œuvres des futuristes
ne font guère l’objet de collections.
Le Kunstmuseum de La Haye possède La
Révolte de Luigi Russolo citée plus haut et
le Stedelijk Museum d’Amsterdam, trois
œuvres de Giacomo Balla. Le musée Krölun
monde moderne, complexe, tout est
en perpétuel mouvement et beaucoup
d’événements se déroulent en même
temps. Les futuristes trouvent les moyens
de saisir ces instants exprimés en tourbillons,
formes et couleurs aux rythmes
chaotiques, surfaces stylisées abstraites.
Giacomo Balla illustre, de cette manière,
les ondes sonores dans son tableau Coup
de feu un dimanche.
Citroen qui possède aussi la célèbre toile
Les Funérailles de Galli l’anarchiste de
Carlo Carrà, acquise en 1948 par le Museum
of Modern Art de New York. D’autres
expositions internationales des futuristes
suivront, dont, en 1913, une exposition à
Rome qui voyagera ensuite à Rotterdam
avant de retourner à Berlin. Deux ans plus
tard, les peintres futuristes sont présentés
à San Francisco et deviennent très
populaires aux États-Unis. Les principaux
tableaux futuristes de la première période
se trouvent encore dans des collections
américaines.
JULES SCHMALZIGAUG
Divers artistes européens s’inspirent des
futuristes italiens, de leur manière de
reproduire la dynamique, la vitesse et le
mouvement, mais pas de leurs choix politiques.
En 1912, Marcel Duchamp peint
son célèbre Nu descendant un escalier et
des peintres avant-gardistes russes, dont
Kasimir Malevitch, connaissent eux aussi
une période futuriste. On relève des traits
futuristes chez des peintres du Blaue
Reiter, et lorsqu'en 1912, le Belge Jules
Schmalzigaug voit à Paris l’exposition
des futuristes italiens, son enthousiasme
est si grand qu’il décide de passer deux
ans à Venise où il développe un langage
visuel futuriste. Après sa mort en 1917, ses
œuvres tombent dans l’oubli, mais sont
redécouvertes depuix ces dix dernières
années à l’occasion de plusieurs expositions,
notamment aux musées royaux des
Beaux-Arts de Belgique. Au Pays-Bas, l’influence
des futuristes se limite à quelques
tableaux de Jan Sluijters et Leo Gestel.
D’autres artistes néerlandais lanceront un
mouvement d’avant-garde qui connaîtra
une grande répercussion au niveau international,
De Stijl.
TOUT S’EST VENDU
Au début, les futuristes italiens remportent
un vif succès et gagnent en
influence. Lors de leur première exposition
internationale itinérante de 1912, toutes
les œuvres sont déjà vendues à Berlin. Le
Kunstmuseum de La Haye possède dans
sa collection l’impressionnant tableau La
Révolte de Luigi Russolo, présent à Berlin.
Il est acquis par un banquier allemand et
acheté dans les années 1920 par l’artiste et
collectionneur néerlandais Paul Citroen
qui, à l’époque, habite dans la capitale
allemande. En 1954, il vend l’œuvre au
marchand américain Myrtil Frank, lequel
la revend deux mois plus tard au Kunstmuseum
de La Haye. Ce n’est pas de la
seule peinture futuriste de la collection
Les futuristes à Paris, de gauche à droite : Luigi Russolo, Carlo Carrà, Filippo Tommaso Marinetti, Umberto
Boccioni et Gino Severini, 1912. © D. R.
28

Le mouvement
artistique
d'avant-garde
le plus extrême.
ler-Müller d’Otterlo n’a longtemps possédé
aucune œuvre futuriste, mais a rattrapé
son retard ces cinquante dernières années.
Même si Helene Kröller-Müller, lorsqu’elle
créa sa collection pendant la première décennie
du XXe siècle, était bien informée
des évolutions dans l’art, elle omit bel et
bien les futuristes. Ce qu’elle regretta après
coup, « car il serait également souhaitable
de présenter la phase futuriste dans une
collection qui témoigne de l’évolution de
l’art », écrivait-elle en 1925. A partir des
années 1970, les directeurs successifs se
sont employés à y remédier. Trois œuvres
futuristes ont été acquises simultanément
en mai 2021, dont un tableau de Jules
Schmalzigaug. Le Kröller-Müller possède
aujourd’hui une vingtaine d’œuvres qui
constituent ainsi la plus grande collection
futuriste des Pays-Bas. Elles seront bientôt
présentées dans le cadre d’une grande exposition
Futurisme et Europe que le musée
organisera l’an prochain.
BRUTALITÉ ET ESPRIT GUERRIER
L’art est le miroir des grands bouleversements
historiques et sociaux. Alors que,
en 1915, l’Italie est sur le point de prendre
part à la Première Guerre mondiale et que
le peintre et sculpteur Umberto Boccioni
meurt peu après, la première génération
des futuristes se désintègre. L’influence
internationale du mouvement faiblit,
même si la force motrice de Marinetti
poursuit sans relâche ses efforts pour créer
une Italie neuve et forte. Il tire non seulement
profit du vent politique existant,
mais attire des artistes toujours plus nombreux,
issus de disciplines très diverses.
Un art futuriste voit ainsi le jour dans les
années 1920, touchant tous les aspects
de la vie quotidienne ; un arte totale au
sein duquel architecture, théâtre, danse,
cinéma, mode, typographie, art intérieur,
céramique et même cuisine rejoignent
peinture, sculpture et poésie. Ce mouvement
fait toutefois le choix malencontreux
de glorifier de plus en plus guerre et
violence. Les futuristes organisent ainsi
des soirées théâtrales incendiaires se
Gino Severini, Dynamique de formes lumineuses dans l'espace, 1912, huile sur toile. Rome, Galleria Nazionale
d’Arte Moderna e Contemporanea.
terminant souvent en bagarre. Après l’arrivée
au pouvoir de Mussolini, en 1922, les
plasticiens optent de plus en plus souvent
pour les thèmes symbolisant la brutalité :
machines, avions, scènes guerrières aux
accents fascistes. Marinetti soutient immédiatement
Mussolini, espérant que sa
révolution plastique puisse être soutenue
par celle du Duce. « La guerre possède une
beauté qui lui est propre », écrit-il en 1935.
Il se réjouit de la participation de l’Italie à
la Seconde Guerre mondiale et reste fidèle
à Mussolini jusqu’à sa mort, en 1944.
VISITER
Marinetti et le futurisme : manifeste pour
un monde nouveau
Rijksmuseum Twenthe
Enschede
www.rijksmuseumtwenthe.nl
du 13-02 au 19-06
29

La foi restaurée
Oeuvres religieuses de Val Duchesse
Cette année, le récent musée L se
transforme en lieu de découverte
du patrimoine religieux. À Louvainla-Neuve,
nous nous sommes
glissés dans les coulisses de la
restauration, notamment de trois
vierges, dont la plus ancienne
date du XIIIe siècle. Des pratiques
de dévotion tombées depuis
longtemps dans l’oubli sont ainsi
révélées au grand jour.
TEXTE : CELINE DE GEEST
Le musée L expose sept sculptures
et un panneau peint qui appartiennent
à la Donation royale. Ces
œuvres proviennent du prieuré de
Val Duchesse situé dans la vallée de la
Woluwe. Construit au XIIIe siècle, le domaine
porta plus tard le nom de château
de Val Duchesse. L’endroit accueillit la
première communauté religieuse féminine
des Pays-Bas, laquelle se conformait aux
règles de saint Dominique de Guzmàn.
L’abbé Adolphe Mignot (1903-2001), souvent
nommé l’ermite de Val Duchesse,
fut le dernier prieur. Solitaire, cet ecclésiastique
rassembla une série impressionnante
de sculptures du Moyen Âge et de la
Renaissance en provenance d’Espagne, de
Flandre et de France, et collectionna aussi
des vases grecs, étrusques et italiens, collection
qu’il finit par confier à la Donation
royale. En présentant quelques-unes de
ces œuvres religieuses, le musée L souhaite
mettre en évidence les impressionnants
travaux de restauration réalisés par
l’Institut royal du Patrimoine artistique
(IRPA). Cet organisme fédéral réunit historiens
de l’art, photographes, chimistes,
physiciens, conservateurs-restaurateurs,
experts en imagerie, ingénieurs et géologues
avec pour objectif commun de préserver
l’art et le patrimoine belges pour les
générations futures.
L’ermite de Val
Duchesse rassembla
un ensemble
impressionnant de
sculptures du Moyen
Âge et de la Renaissance
en provenance
d’Espagne, de Flandre
et de France.
LA DORMITION
L’histoire des sculptures du prieuré est
bien plus mouvementée que leur apparence
le laisse supposer. « Leur datation
varie entre le XIIIe et le XVIIe siècle »,
explique Matthieu Somon, docteur en
histoire de l’art de l’Université Panthéon-
Sorbonne à Paris, chargé par l’institution
louvaniste d’étudier cette collection.
« Ces sculptures offrent une bonne idée
des pratiques de dévotion populaires au
Moyen Âge et à l’époque moderne. C’est le
cas du relief représentant la Dormition de
la Vierge, décrit dans le catalogue composé
par l’abbé Mignot comme datant du
30

Sedes sapientiae dite ‘’Vierge ancienne’’, XIIIe s., Espagne (Aragon ?), bois de saule, polychromie d’origine sur les visages uniquement, 125 × 43 × 25 cm. Collection
de l’abbé Mignot - Dépôt de la Donation royale, inv. D105
31

L’histoire des
statues du prieuré
est bien plus
mouvementée que
leur apparence
le laisse supposer.
XVe siècle et lié à la Dormition conservée
au Rijksmuseum et attribuée à Adriaen
van Wesel (ca. 1475). Létude technique
et stylistique de l’œuvre dans nos ateliers
nous a amenés à réfuter cette datation. La
découverte d’une empreinte au plâtre lors
du traitement nous a plutôt transportés
dans le monde du XIXe siècle où les copies
étaient très en vogue. La restauratrice
Emmanuelle Mercier le résume parfaitement
dans le catalogue de l’exposition :
‘‘La relation entre les trois reliefs est claire :
celui de Val Duchesse est une copie en bois
réalisée à partir d’une empreinte au plâtre
du relief d’Adrien van Wesel.’’ »
HENRI BLES
Spulignons aussi quelques paysages exégétiques
du peintre du sud des Pays-Bas,
Henri Bles (1500-1555). « Bles agrémentait
ses compositions de rochers anthropomorphiques
incitant le spectateur à
méditer sur les significations cachées des
Écritures », explique Matthieu Somon. « À
noter, en outre, la présence d’un exceptionnel
Christ sur un âne, daté du XVIe
siècle. Il s’agit d’une scène typique relative
à la procession du dimanche des Rameaux
pour rappeler l’entrée du Christ à Jérusalem.
Nous exposons aussi une série
de Sedes Sapientiae, trois majestueuses
Vierges présentant l’enfant Jésus, assises
sur un trône. Leur juxtaposition permet
au visiteur de comparer les particularités
symboliques de chacune d’elles à l’aide
de leurs attributs et de leur posture. On
découvre peu à peu la place de ces sculptures
dans la vie spirituelle médiévale.
Contrairement à de nombreuses autres
œuvres, celles du prieuré constituent des
témoins tangibles d’un volet important du
quotidien des Européens au Moyen Âge et
à l’époque moderne. »
Relief de la Dormition de la Vierge, copie tardive (entre 1863 et 1904), d’après un relief d’Adriaen van Wesel,
chêne avec traces de peinture récente et de patine artificielle, 78 × 55 × 27,5 cm. Collection de l’abbé Mignot
- Dépôt de la Donation royale, inv. D467
Vierge à l’Enfant en majesté dite ‘‘Vierge dorée’’, fin du
XIIIe s., Espagne ( Castille ? ), polychromie ancienne
non originelle, 115 × 52 × 32 cm. Collection de l’abbé
Mignot - Dépôt de la Donation royale, inv. D680
32

Herri Bles, Incendie de Sodome, milieu du XVIe s., huile sur panneau, 21,5 x 33,7 cm. TreM.A - Fondation Société archéologique de Namur, inv. B0245
LA VIE D’UNE SCULPTURE
Leur intégration dans un musée peut
parfois occulter les fonctions initiales
des sculptures religieuses. En dehors de
leur contexte originel, à savoir l’église
ou l’abbaye, il arrive qu’on oublie qu’elles
intervenaient dans le cadre de rituels souvent
très prégnants. « N’oublions pas que
des miracles étaient associés à certaines
sculptures », souligne Matthieu Somon.
« On les transportait lors de processions,
on les touchait et on leur parlait. Elles
pouvaient aussi être ornées et changeaient
de place dans l’église selon les exigences
du calendrier liturgique. » La possibilité
de suivre le parcours des sculptures à
l’intérieur et à l’extérieur de l’église justifie
la valeur de la restauration. « Notre travail
permet au public d’accéder à la collection
de Val Duchesse. Entrent aussi en ligne de
compte la préservation contre un climat
dommageable, l’étude souvent interdisciplinaire
de la collection et la valorisation
esthétique, la valeur cachée sous la poussière…
En tant que restaurateurs, nous
avons tenté de respecter l’historicité, la
« En plus d’être des objets esthétiques,
ces sculptures sont les témoins tangibles d’un
pan important du quotidien des Européens,
au Moyen Âge et à l’époque moderne. »
MATTHIEU SOMON
valeur de souvenir de cette collection, tout
en nous concentrant sur sa lisibilité, en
regard des connaissances propres à notre
époque. » Cet avantage offert aux visiteurs,
permet aussi aux étudiants de l’Université
catholique de Louvain-la-Neuve (UCL)
d’acquérir des connaissances directes à
partir de véritables témoins de l’histoire
et non par le truchement d’un livre ou
d’une image projetée. « Une méthode plus
pédagogique, mais aussi plus agréable »,
conclut Matthieu Somon.
VISITER
Formes du Salut
Musée L
www.museel.be
du 25-02 au 05-06
33

Holbein le Jeune
Génial portraitiste
Considéré comme l’un des artistes
les plus habiles, polyvalents et
inventifs du début du XVIe siècle,
le talent de Hans Holbein s’est
essentiellement illustré dans les
portraits, témoignages de l’identité
de ses commanditaires, éclairant
la culture de l’érudition, de la
mode, du luxe et de l’esprit de la
Renaissance. A l’occasion de sa
première rétrospective américaine,
retour sur la carrière de cet
Européen avant la lettre.
TEXTE : CHRISTOPHE DOSOGNE
A
juste titre, Hans Holbein le Jeune
(ca. 1497/98-1543) est considéré
comme une figure clé du
courant renaissant. Sensible au
mouvement humaniste, philosophie qui
place l’homme et les valeurs humaines
au-dessus de toutes les autres, il mêle le
réalisme issu de la tradition gothique à
cette nouvelle tendance idéaliste, créant
une forme d’expression qui fait de lui un
représentant exemplaire de la Renaissance
en Europe du Nord. Par son ouverture à
toutes les influences et sa capacité à élaborer
une œuvre de portée universelle, il
réalise la synthèse des courants artistiques
du début du XVIe siècle et porte l’art du
portrait à un haut degré d’excellence.
L’HUMANISME, D’AUGSBOURG
À BÂLE
Né à Augsbourg, fils du peintre Hans
Holbein l’Ancien (1460-1524) et frère cadet
d’Ambrosius avec lequel il étudia dans
l’atelier paternel, l’un des plus fameux
et recherché de la ville, il bénéficia sans
doute aussi de l’enseignement de son
oncle maternel, Hans Burgkmair (1473-
1531), l’un des plus grands peintres allemands
de l’époque. Dès 1516, il se rendit
à Bâle, alors haut lieu de l’humanisme, où
il demeura une décennie, y réalisant les
portraits de la haute bourgeoisie commerçante.
Sans doute accompagné de
son oncle, il était à Milan en 1518, où il
s’imprégna des profonds bouleversements
apportés à la peinture par le retour aux
sources de l’Antiquité gréco-romaine.
Rentré à Bâle en 1519, il y intégra la guilde
des peintres et se rapprocha de l’humaniste
Bonifacius Amerbach, proche ami
d’Erasme de Rotterdam à qui il sera
présenté en 1523. De ce grand penseur
humaniste, il réalisera deux portraits qui
deviendront plus tard ses laisser-passer
pour l’Angleterre où Érasme les fit envoyer
à des proches. Lors d’un voyage en France
en 1524, Holbein découvrit l’œuvre de
Léonard de Vinci dont il apprit la fameuse
technique ‘‘des trois crayons’’, consistant
à exécuter des portraits à l’encre noire, à
la sanguine et à la craie blanche. Durant
cette période, il accomplit également de
nombreux voyages en Italie, à Rome et
Florence. D’abord influencé par l’œuvre de
Matthias Grünewald, dont son père était
proche, son style s’ouvrira aux nouvelles
conceptions de la Renaissance italienne,
l’artiste n’hésitant pas à intégrer dans ses
œuvres des éléments d’architecture.
Hans Holbein le
Jeune a porté l’art du
portrait à un niveau
inégalé, dépassant
dans ce genre tous
ses contemporains.
MARCHANDS, COURTISANS
ET ARISTOCRATES
En 1526, fuyant les troubles de la Réforme
qui secouent les villes suisses, Holbein
part pour Londres, recommandé par
Érasme auprès de Thomas More. Il y est
alors particulièrement frappé par l’atmosphère
de liberté intellectuelle et spirituelle
dont, en proie au fanatisme et à l’intolérance
religieuse, Bâle manque cruellement,
poussant notamment Érasme à se
réfugier à Fribourg. Dès 1533, il retourne
à Londres où Thomas More étant tombé
en disgrâce et la liberté d’esprit réduite, il
se voit forcé de trouver de nouveaux commanditaires.
Ceux-ci ne sont dès lors plus
des humanistes mais de riches marchands
souhaitant être représentés avec tous les
attributs de leur puissance économique.
Cette époque constitue l’apogée de sa carrière,
lors de laquelle il exécute le fameux
portrait des Ambassadeurs, célèbre par
son procédé d’anamorphose. Si le regard
se positionne par rapport à la tranche
droite du tableau, on voit apparaître un
crâne humain au milieu des deux personnages.
La présence de ce crâne confère à
ce tableau le statut de memento mori, les
deux sujets représentés étant invités à se
34

Portrait de Simon George de Cornouailles, ca. 1535-1540, huile sur panneau, diam. 31 cm. Francfort, Staedel Museum, inv. 1065
souvenir qu’ils sont eux aussi mortels. Dès
1536, l’artiste est nommé peintre-valet
de chambre du roi Henry VIII et devient
rapidement le peintre officiel de la cour
d’Angleterre, pays où quelques années plus
tard il s’éteindra en pleine gloire.
VISITER
Holbein: Capturing Character
The Morgan Library & Museum
New York
www.themorgan.org
du 11-02 au 15-05
Un homme amoureux
C’est à Londres, à la cour du roi Henry VIII que l’artiste
a rencontré l’aristocrate qui lui a commandé ce sublime
portrait. Il s’agissait alors d’un impératif pour bien faire ‘‘sa
cour’’, que ce soit à son souverain ou à une future épouse,
ainsi qu’en témoignent l’œillet rouge (symbole de l’amour
pur et ardent dans le langage des fleurs) qu’il tient de sa
main droite et la broche en or fixée sur son béret. Celle-ci,
figurant l’union de Léda et de Jupiter ayant pris l’apparence
d’un cygne, révèle les visées érotiques du commanditaire. Il
arbore un somptueux costume taillé à la dernière mode et
a choisi l’une des images les plus modernes de la Renaissance:
le portrait de profil, dérivé des monnaies antiques,
inscrit dans un tondo.
35

Portrait d’un Noble avec un Faucon, 1542, huile sur panneau, 18,8 x 24,6 cm. La Haye, Mauritshuis, inv. 277
36

Privilège marchand
Jean d’Anvers, ca. 1532, huile sur panneau, diam. 13,1 cm. Londres, The Victoria & Albert Museum, inv. P.158-1910
Nombreux dans le port de Londres à
l’époque où Holbein exerce ses talents,
quantité de marchands continentaux
résident alors dans le kontor qui jouxte
Dowgate. Ce lieu accueille la steelyard ou
‘‘poutre du roi’’ qui sert à peser les marchandises
importées depuis le Nord de
l’Europe dans la capitale anglaise. Souvent
identifié à l’orfèvre Hans von Antwerpen,
le sujet de cet exceptionnel portrait
(dont une seconde version, de profil, est
conservée dans la Royal Collection) serait
plus vraisemblablement, en raison de la
richesse des fourrures de son costume, un
marchand fortuné de la Ligue hanséatique.
A l’époque, la Steelyard, ou Maison allemande,
est entourée d’un mur qui protège
entrepôts, pesage, église, bureaux et logements
des marchands, installés là depuis
1320. Originaires de Cologne, ils sont
exempts de tous les péages londoniens et
ont le droit de commercer dans toutes les
foires d’Angleterre. Les marchands anglais,
jaloux de leurs prérogatives, tenteront pendant
de nombreuses années de persuader
le monarque de révoquer les privilèges
de ces ‘‘étrangers’’. Ils n’y réussiront qu’en
1597, sous le règne d’Elizabeth Ière. La
Steelyard sera fermée en 1598.
Fauconnerie
A l’époque de l’exécution de ce portrait, Holbein est installé depuis
une décennie à Londres où il s’est fait une grande réputation dans la
représentation des membres de la cour. L’homme peint ici, dont l’identité
est incertaine, arbore fièrement un rapace (peut-être un autour)
qu’il vient de décapuchonner. Héritière des grandes traditions d’affaitage
médiévales, la fauconnerie est alors un sport particulièrement
en vogue, mais réservé exclusivement à la noblesse jusqu’en 1792.
La merveilleuse technique picturale de l’artiste, également mise en
œuvre dans le second portrait autographe que possède le Mauritshuis,
s’illustre ici dans le rendu des crevés rouges de la manche, le regard
appuyé et la finesse de la barbe du personnage, ainsi que dans la petite
cloche de laiton ornant les pattes de l’oiseau.
37

Pour la postérité
Compositeur, juriste et humaniste suisse,
Bonifacius Amerbach (1495-1562), fils de
l’imprimeur bâlois Johannes Amerbach,
était le plus proche confident d’Erasme
de Rotterdam. En 1519, il s’apprêtait à
poursuivre en Avignon des études juridiques
entamées à Fribourg-en-Brisgau.
Le danger de ce long voyage était encore
accru par la peste qui sévissait à l’époque
dans le sud de la France, raison de plus
pour laisser son apparence à la postérité…
Pour ce faire, il fit appel à Holbein,
qui séjournait alors à Bâle. Amerbach ne
laissant rien au hasard, l’épigraphe figurant
sur la plaque de gauche, qui satisfait
à un topos humaniste louant l’authenticité
de l’image représentée, fut rédigée
par ses soins. En reconnaissance de
l’immense talent de l’artiste, il présenta
Holbein à Erasme en 1523.
Portrait de Bonifacius Amerbach, 1519, technique mixte sur bois, 29,9 x 28,3 cm. Bâle, Kunstmuseum, inv. 314
L’allié anglais
Le philosophe humaniste, auteur et homme d’État Thomas More
(ca. 1477/78-1535), sert le roi Henry VIII d’Angleterre en tant
que diplomate et conseiller privé avant d’être élu président de la
Chambre des Communes en 1523. C’est grâce aux chaudes recommandations
d’Erasme que, arrivé en Angleterre en 1526 pour
fuir la Réforme protestante, Holbein est introduit dans les cercles
humanistes anglais. En 1529, More succède au cardinal Wolsey en
tant que Lord chancelier, mais trois ans plus tard, il démissionne
en raison du divorce du roi avec Catherine d’Aragon. Il refuse également
de souscrire à l’Acte de Suprématie faisant du souverain
le chef de l’Eglise d’Angleterre. Cela lui vaudra d’être condamné
pour haute trahison et décapité. La sympathie de l’artiste pour
cet homme auquel il devait sa carrière anglaise est ici évidente,
ainsi qu’en témoigne le brillant rendu des étoffes et ornements. Il
s’agit d’un des portraits les plus éloquents et populaires d’Holbein,
puisque plusieurs versions en seront réalisées, celle-ci étant
considérée comme l’originale.
Sir Thomas More, 1527, huile sur panneau, 74,9 x 60,3 cm. New York,
The Frick Collection, inv. 1912.1.77
38

Double Portrait du bourgmestre de Bâle Jacob Meyer zum Hasen et de son épouse Dorothea Kannengiesser, 1516, huile sur panneau, 39,7 x 31,9 cm. Bâle, Kunstmuseum, inv. 312
Portraits novateurs
Ce n’est pas les noces des deux protagonistes,
célébrées au plus tard en 1513, qui
motiva la réalisation de ce double portrait,
mais l’élection au poste de bourgmestre
de Bâle, le 24 juin 1516, de Jacob Meyer
zum Hasen, alors premier mayeur issu des
rangs des corporations. Pour les bustes
placés dans un décor architectural rappelant
les arcs de triomphe antiques, l’artiste
s’est peut-être inspiré d’une gravure sur
bois de son oncle, Hans Burgkmair, datée
de 1512. Par l’étonnant positionnement de
ces deux personnages, l’un par rapport à
l’autre à des profondeurs différentes dans
un espace pictural uniforme, Holbein ne
dépassa pas seulement le talent de son
mentor, mais se montra aussi novateur
dans l’art du portrait allemand de l’époque,
initié notamment par son père, Holbein
l’Ancien, dont il fut l’élève à Augsbourg.
39

L’esprit humaniste
Ce portrait d’Érasme de Rotterdam fut réalisé par Holbein
juste avant son départ pour l’Angleterre. L’humaniste, âgé de
62 ans, se trouvait alors à Fribourg-en-Brisgau pour échapper
aux troubles de la Réforme survenus à Bâle. Le tableau
relève de la typologie du portrait dit ‘‘en capsule’’, dont le
cadre doré profilé formait la partie intérieure d’une capsule
pouvant être fermée par un couvercle. Leur petit format
favorisait la diffusion de ces portraits, par exemple comme
cadeaux à des amis humanistes ou à des personnes partageant
les mêmes idées. La diffusion de ces portraits dans
toute l’Europe et en Angleterre contribua ainsi fortement à
assurer la notoriété de Holbein en tant que peintre de premier
ordre, proche du courant de pensée alors en vogue. S’il
en existe plusieurs versions, cet exemplaire est généralement
considéré comme un autographe de l’artiste.
Portrait d’Erasme de Rotterdam ‘‘en rond’’, ca. 1532, huile sur panneau, diam. 14,2 cm.
Bâle, Kunstmuseum, inv. 324
Peintre du roi
Portrait du roi Henry VIII d’Angleterre, ca. 1537, huile sur panneau, 28 x 20 cm.
Madrid, Museo Nacional Thyssen-Bornemisza, inv. n° 191 (1934.39)
Le portrait était le genre le plus populaire dans l’Angleterre
du XVIe siècle, l’un des rares accessibles aux artistes après le
schisme entre l’Église de Rome et l’Église d’Angleterre dont
Henry VIII devint le chef. Ce portrait du célèbre souverain
Tudor constitue un magnifique exemple du style de Holbein,
caractérisé par le rendu monumental de personnages dotés
d’une profondeur psychologique considérable. La pose
frontale du modèle et la position des mains transmettent sa
puissante personnalité et son port majestueux. Ce portrait
est proche de celui du monarque en pied, peint à fresque
par l’artiste sur un mur du palais de Whitehall, malheureusement
détruit par un incendie en 1698, mais connu par de
nombreuses copies.
40

Réalisme souverain
Holbein devint peintre officiel de la cour du roi Henry VIII en
1536. Parmi les premières peintures réalisées à la demande du
monarque anglais figure ce portrait de sa nouvelle souveraine,
Jeanne Seymour (1509-1537). En tant que dame d’honneur,
elle avait servi ses deux épouses précédentes, Catherine d’Aragon,
répudiée en 1532, et Anne Boleyn, exécutée en 1536. Plutôt
que ses compétences esthétiques, Henry VIII appréciait la
capacité de l’artiste à reproduire les visages de façon réaliste,
c’est pourquoi il lui confia la réalisation de ce portrait. L’artiste
fit ici preuve d’une maîtrise totale, avant de peindre celui de
sa quatrième compagne, Anne de Clèves, à Düren en 1539.
Reine durant seize mois à peine, Jeanne Seymour décéda en
couches, après avoir donné à son époux cet héritier mâle tant
espéré, le futur Edward VI.
Portrait de Jeanne Seymour, ca. 1536-1537, huile sur bois, 65,4 x 40,7 cm. Vienne,
Kunsthistorisches Museum, inv. 881
Un dessinateur de grand talent
George Brooke, 9e Baron Cobham (ca. 1497-1558), ca. 1532-1543, craie noire,
plume, encre et pointe de métal sur papier préparé rose pâle, 28,9 x 20,3
cm. The Royal Collection Trust, inv. RCIN 912195
Le grand nombre de dessins qu’Holbein réalisa pour ses clients,
talent dont Érasme lui-même avait vanté les mérites, donne à penser
que l’artiste dessinait d’abord très précisément ses sujets avant
d’en transférer l’image sur un autre support dans son atelier. George
Brooke, 9e baron de Cobham (ca. 1497-1558) était un éminent courtisan
et soldat sous le règne du roi Henry VIII, élevé dans l’Ordre de
la Jarretière par son fils, Edward VI.
41

Yves Saint Laurent
De l’esthétique de surface à l’esthétique du corps
Témoin de l’évolution de la création
au XXe siècle, le couturier Yves Saint
Laurent imagina des collections
directement inspirées des beauxarts,
embrassant toutes les cultures
à travers l’histoire. Un fabuleux
mécanisme de citations et autres
interprétations.
TEXTE : GWENNAËLLE GRIBAUMONT
Yves Saint Laurent, Robe Hommage à Piet Mondrian, jersey de laine écru, incrusté noir, rouge, jaune et
bleu, automne-hiver 1965, musée Yves Saint Laurent Paris. © Yves Saint Laurent / photo : Nicolas Mathéus
Il y a soixante ans, Yves Saint Laurent
(1936-2008) se lançait dans une
aventure placée sous le signe de la
haute couture qui l'installait durablement,
au rang des créateurs de mode les
plus inventifs et influents de la seconde
moitié du XXe siècle. Cet anniversaire
est célébré de manière tout à fait exceptionnelle.
D’un format inédit, Yves Saint
Laurent aux musées investit les collections
permanentes de six prestigieuses institutions
parisiennes : le Centre Pompidou, le
musée d’Art moderne de Paris, le musée du
Louvre, le musée d’Orsay, le musée national
Picasso-Paris et le musée Yves Saint
Laurent Paris. Ses réalisations, présentées
en contrepoint d’œuvres phares conservées
dans ces musées, mettent en lumière
le dialogue débordant et incessant qu’il entretenait
avec l’art et la littérature, sources
d’inspiration inépuisables. Éclectique à
souhait, Yves Saint Laurent multiplia les
citations, les jeux de rapprochements et les
renvois aux beaux-arts, toutes disciplines,
42

Pablo Picasso, Portrait de Nusch Eluard, automne
1937. © Succession Picasso - Gestion droits d'auteur,
Eluard Nusch (1906-1946), Paris Photo / RMN-Grand
Palais (Musée national Picasso-Paris) / photo :
Adrien Didierjean
Yves Saint Laurent, Veste Hommage à Pablo Picasso, drap de laine bleu, noir et ivoire, automne-hiver 1979,
musée Yves Saint Laurent Paris. © Yves Saint Laurent / photo : Nicolas Mathéus
cultures et époques confondues. Aussi, il
est d’emblée important de souligner que
le couturier ne copiait jamais. Il ne se limitait
pas à transposer une peinture sur un
vêtement. Il en réalisait la ‘‘translation’’, en
intégrant l’œuvre dans la structure du vêtement.
Yves Saint Laurent : « Je crois que
le travail du couturier approche beaucoup
celui d’un artiste. J’ai d’ailleurs constamment
puisé une qualité d’inspiration dans
le travail des peintres contemporains :
Picasso, Matisse, Mondrian... »
« Je crois que le travail du couturier approche
beaucoup celui d’un artiste. J’ai d’ailleurs
constamment puisé une qualité d’inspiration
dans le travail des peintres contemporains :
Picasso, Matisse, Mondrian... »
YVES SAINT LAURENT
ICONIQUE MONDRIAN
Le couturier tenta de traduire en trois dimensions,
et en mouvement, des tableaux.
Il eut le génie de passer du plan au volume,
de l’esthétique de la surface à l’esthétique
du corps. À ses yeux, l’art moderne,
le décloisonnement et la circulation des
formes apparaissaient comme une source
d’inspiration essentielle pour réinventer
la mode, ses lignes et ses couleurs. Yves
Saint Laurent : « Mes robes sont comme
des masses de couleurs en mouvement
plutôt que des formes. » Le premier artiste
à ouvrir la marche, et sans doute le plus
iconique, est Piet Mondrian. En 1965, la
collection automne-hiver présente une
série de huit robes de cocktail influencées
par la simplicité de Courrèges, mais directement
inspirées par l’œuvre de l’artiste
néerlandais que Saint Laurent découvrit
dans une monographie reçue en cadeau.
Les jeux de lignes et de couleurs mais
aussi la rigueur, la pureté et l’équilibre de
la composition séduisent le couturier qui
observe dans ce motif toutes les qualités
pour structurer un vêtement. Sa ‘‘Collection
Mondrian’’, qui assure à la maison
de couture un succès sans précédent,
participe également, et très activement,
à faire connaître en France l’œuvre de cet
artiste alors peu connu du grand public et
43

Martial Raysse, Made in Japan - La grande odalisque,
1964, peinture acrylique, verre, mouche, passementerie
en fibre synthétique, sur photographie marouflée
sur toile. © Adagp, Paris
Yves Saint Laurent, Manteau, fourrure de renard vert, printemps-été 1971, musée Yves Saint Laurent Paris.
© Yves Saint Laurent / photo : Nicolas Mathéus
« Mes robes sont
comme des masses
de couleurs en
mouvement plutôt
que des formes. »
YVES SAINT LAURENT
ignoré par les musées jusqu’en 1969, date
de sa première rétrospective au musée
de l’Orangerie. Sa collection suivante,
qualifiée par la presse de ''mode colorée,
jeune, vivante et audacieuse'', présente
des motifs géométriques bicolores et/ou
tricolores dont les effets optiques rappellent
directement ceux employés deux
ans plus tôt par Alain Jacquet dans sa
réinterprétation du Déjeuner sur l’herbe
d’Édouard Manet. En toute transparence,
Yves Saint Laurent pointe en permanence
ses sources : « Toujours influencée par la
peinture, je dois ma collection de juillet 66
aux peintres américains comme Wesselmann,
Roy Lichtenstein. Toutes mes robes
étaient éclairées de paysages, de lunes et
de soleil. » Comment aurait-il pu résister
au charme du Pop art, expression de sa
jeunesse ? Pour la collection automnehiver
1966, il réalise en jersey, la « seule
matière moderne » selon lui, un ensemble
de robes courtes aux couleurs acidulées
et deux modèles directement inspirés par
les Great American Nudes du peintre Pop
américain Tom Wesselmann.
PICASSO ET TOUS LES AUTRES
Ces premiers dialogues avec les artistes se
poursuivront durant toute sa carrière avec
des références à Henri Matisse, Georges
Braque, Pierre Bonnard, Fernand Léger,
Vincent van Gogh ou encore Pablo Picasso,
maître absolu, qui tient une place toute
particulière. Fasciné par ce « génie à l’état
pur », Yves Saint Laurent lui rend hommage
à différents moments de sa carrière,
des arlequins de la période bleue au vocabulaire
cubiste. Ce dernier représente un
réel défi. Comment transposer les jeux de
décomposition et de déstructuration de
Picasso à la couture qui est, par définition,
synonyme d’exigence et de construction,
de plans et d’harmonie ? Yves Saint Laurent
: « Une année, je n’arrivais pas à faire
ma collection. C’était un drame, rien ne
sortait. Le dimanche, je vais visiter une exposition
sur les ballets russes et je découvre
les maquettes de costumes que Picasso
avait fait pour Le Tricorne de Serge Diaghilev...
Le lendemain, j’ai pris un morceau de
velours noir, une jupe de velours bleu et
j’ai intercalé des panneaux de velours dans
le bleu de la jupe. Tout le reste est venu, je
m’en souviens parfaitement... » Aussi, cet
intérêt pour l’art de son époque n’exclut
pas de s’appuyer sur des œuvres du passé,
traduisant des motifs observés sur des
vases grecs à figures noires et rouges, des
œuvres Bambara, des objets d’arts du Japon
ou de Chine… Chercheur boulimique, Saint
44

Sa ‘‘Collection Mondrian’’, qui assure à la
maison de couture un succès sans précédent,
participe également, et très activement, à faire
connaître en France l’œuvre de cet artiste
Laurent multiplia également les citations
aux grands maîtres de l’histoire de la peinture,
de Zurbarán à Watteau ou Boucher,
en passant par Goya. Son spectre d’interprétation
apparaît sans limite. Même les
arts décoratifs chers à Louis XIV l’inspirent.
Mises à l’honneur dans la galerie
d’Apollon (musée du Louvre), quelques
vestes brodées, objets d’art à part entière,
traduisent sa fascination pour la lumière,
pour l’or – couleur du soleil – et pour les
grands décors de stucs. Des pièces taillées
telles des parures, entièrement recouvertes
de fils d’or et de cristal de roche. Parmi
les peintres qu’Yves Saint Laurent affectionnait,
Henri Matisse occupe une place
centrale: « Pour moi, c’est “le” peintre. [...]
J’aime Matisse avec sa vie tout à fait calme
et sa recherche de la couleur, constamment.
» En 1981, la création par le couturier
d’une ‘‘blouse roumaine’’ directement
inspirée par l’œuvre du peintre, constitue le
meilleur témoignage de cet attachement.
Réalisée par Matisse au printemps 1940,
au terme de plusieurs versions, La Blouse
roumaine, davantage encore que le portrait
d’un modèle, est celui de ce vêtement
folklorique aux motifs brodés que Matisse
appréciait tant. Yves Saint Laurent avait
découvert l’œuvre au musée national d’Art
moderne: « J’ai toujours eu envie de créer
cette blouse. J’aime les costumes folkloriques
de l’Est. Leurs coupes sont extrêmement
simples. Une blouse roumaine n’a pas
d’époque. Tous ces vêtements de paysans
traversent les siècles sans se démoder ».
Yves Saint Laurent puise à l’envi dans ce
vocabulaire infini que lui offre l’histoire de
l’art. Il cite directement des artistes ou des
œuvres appartenant à sa propre collection
qu’il compose amoureusement avec son
compagnon Pierre Bergé. Il emprunte aussi
des motifs qu’il observe dans les livres de
sa bibliothèque qu’il considère comme un
vaste musée imaginaire. Enfin, il interprète
des œuvres rencontrées dans les musées
qu’il fréquentait. Soit tout un vocabulaire
lui permettant de se renouveler en conservant
une homogénéité.
VISITER
Yves Saint Laurent aux musées
jusq. 15-05
Musée d’Art moderne
Paris
www.mam.paris.fr
Yves Saint Laurent, toile d’une cape Hommage à George Braque, toile de coton
écru, applications de tissu noir et graphite, printemps-été 1988, musée Yves Saint
Laurent Paris © Yves Saint Laurent / photo : Nicolas Mathéus
Yves Saint Laurent, veste Hommage à Vincent Van Gogh, broderie de paillettes,
tubes, rocailles et rubans, printemps-été 1988, musée Yves Saint Laurent Paris.
© Yves Saint Laurent / photo : Nicolas Mathéus
45

Charles Ray
D’étonnantes explorations sculpturales
Pourquoi Charles Ray passe-t-il
pour l’un des sculpteurs importants
de notre temps ? Les réponses se
trouvent dans deux expositions
à Paris : une carte blanche au
Centre Pompidou et à la Bourse de
Commerce, ses premières grandes
expositions monographiques en
Europe. L’artiste américain aborde la
sculpture sous tous ses angles, ainsi
que notre existence quotidienne.
Cette démarche protéiforme,
réalisée dans divers matériaux,
reprend à son compte une grande
partie de l’histoire de l’art, d'abord
dans des poses souvent étonnantes
et provocantes, voire drôles. Plus
traditionnelles ensuite, mais
toujours surprenantes.
TEXTE : CHRISTINE VUEGEN
Boy with frog (2009) est une œuvre
très connue. Nombre d’amateurs
d’art et de touristes ont pu la
contempler à Venise, parfois sans
savoir qui en était le créateur et ce qu’il
avait déjà réalisé. Cette sculpture blanche
d’un garçon nu tenant une grenouille
par la patte arrière fut la première œuvre
publique de Charles Ray (1953) et une
commande du collectionneur François
Pinault. Installée à l’extrémité de la Punta
della Dogana jusqu’à son retrait en 2013,
les Vénitiens ont souhaité la remplacer
par un lampadaire. Lorsque l’artiste reçut
cette commande, il pensa immédiatement
à ce garçon à la grenouille, c’était
cinq semaines avant son opération du
cœur. Or, dans les écoles américaines, la
grenouille est le premier animal que les
élèves dissèquent. Un garçon de douze
ans servit de modèle pour cette sculpture
de deux mètres cinquante de haut,
réalisée en acier inoxydable mais d’un
blanc immaculé, comme le plus pur des
marbres. Récemment, l’artiste constatait
que son rapport à l'art avait évolué au fil du
temps vers une pensée plus ‘‘sculpturale’’.
Dans Boy with frog, il mettait en exergue
l’interaction entre réalisme, stylisation et
hyperréalisme. Pour ce faire, il élimina le
mamelon gauche formant un triangle. Plus
grand que nature, l’enfant semble curieux
et stupéfait par son propre pouvoir,
contemplant sa proie. Il rappelle les kouroï
de la Grèce antique, le Spinario ou Tireur
d’épine romano-hellénistique et le David
de Donatello. Charles Ray souhaitait créer
‘‘un bourgeois de Venise’’. S’il apprécie
beaucoup la sculpture antique grecque, il a
aussi étudié de près Les Bourgeois de Calais
d’Augustes Rodin. Échelle, matériau, tous
les éléments sont réunis pour faire sens :
« Je souhaite créer une machine à sens »,
déclarait-il en 2011 dans un entretien au
magazine Purple.
HOMMAGE ET CITATIONS
À première vue, il paraît incroyable que ce
même artiste ait réalisé le groupe de sculptures
Oh! Charley, Charley, Charley… (1992)
pour la Documenta 9 de Cassel, dont Jan
Hoet était le commissaire, une composition
de huit hommes nus, prolifération
d’autoportraits sous la forme de mannequins
absolument identiques. L’artiste
s’y montrait influencé par le moderniste
britannique Anthony Caro, car il s’agit
d’un ensemble d’éléments détachés dans
l’espace, comme les pièces métalliques de
Early One Morning (1962) de ce dernier.
L’approche sculpturale de ce dernier a,
dès le début, influencé Charles Ray. Ainsi,
Plank piece I & II (1973), deux photos en
noir et blanc de l’artiste qui suspend un
personnage burlesque sur une planche
appuyée contre un mur, est une œuvre précoce
étonnante. Tout aussi emblématique,
Ink box (1986) compose un cube minimaliste
couvert d’encre de journal qui semble
près de salir le ‘‘white cube’’. L’humain
n’est jamais loin, même si on ne détecte
pas toujours sa présence, comme dans
Unpainted sculpture (1997), épave d’une
Pontiac après un accident mortel, reproduite
par des scans 3D en fibre de verre
et peinte en gris tourterelle. Baled truck
(2014), en acier inoxydable massif, camion
comprimé en un bloc, fait par ailleurs
penser à César ou à Chamberlain. Mais
Charles Ray se réfère aussi aux méthodes
utilisées par la mafia pour éliminer les
cadavres. À ses yeux, une sculpture étince-
46

Echelle, matériau,
tous les éléments
constitutifs de
l'oeuvre servent à
générer du sens.
est moins célébré que Jeff Koons ou Paul
McCarthy, Charles Ray jouit pourtant
d'une solide notoriété ayant participé à
trois Biennales de Venise et cinq Biennales
du Whitney (New York). Aux Etats-Unis,
il est représenté par Matthew Marks. Ces
deux expositions parisiennes consacrent
ses sculptures qui sont, dès le début, inscrites
dans l’espace et le temps, déstabilisant
la notion quotidienne de réalité.
VISITER
Boy with frog, 2009, acier inoxydable peint, 247 x 91 x 96,5 cm, Pinault Collection. © de l’artiste / Courtesy
Matthew Marks Gallery / photo : Charles Ray
Charles Ray
Bourse de Commerce – Pinault Collection
du 16-02 au 06-06
Centre Pompidou
du 16-02 au 20-06
Paris
www.boursedecommerce.fr
www.centrepompidou.fr
lante est comme un sarcophage. Unbaled
truck (2021) est, de fait, la reconstruction
d’un camion devenu tas de ferraille, provenant
d’un cimetière de voitures et présentant
des traces de compression, telle une
résurrection. Minimalisme, pop art, hyperréalisme
et, après 2000, références toujours
plus nombreuses à la sculpture grecque
et romaine : l’artiste traite d’une partie de
l’histoire de l’art, des genres séculaires de
la nature morte au portrait de chevalier
qu’il retranscrit dans des sculptures très
personnelles. Cette démarche laborieuse
nécessite d’y travailler des années durant
et il a, jusqu’à présent, seulement une
centaine de sculptures à son actif. S’il
LIRE
Coll., Charles Ray (catalogue), coédition
Bourse de Commerce – Pinault Collection /
Centre Pompidou, Paris, 2022, ISBN 979-1-
02040-709-2, 45 €
47

Hito Steyerl
Aborder le monde
de l’art avec
audace...
Hito Steyerl est l’une des plus captivantes personnalités artistiques de notre
époque. À coups de critiques et de boutades, elle souligne depuis trente
ans des problèmes sociaux mis en sourdine, comme le contrôle de l’État et
la violence coloniale. Sur le plan international, elle fait partie des artistes les
plus influents de sa génération. Est-elle aussi critique à l’égard de sa propre
renommée ?
TEXTE : CELINE DE GEEST
Liquidity Inc., 2014, vidéo HD monocanal dans un environnement architectonique, 30’ 15’’. Vue d’installation au MoMA, 2014. © de l’artiste
48

Hito Steyerl a élevé le concept
de multimédia à un niveau
inédit. Elle n’a pas d’égal pour
raconter des histoires par un
mélange d’images, de sons, d’essais, de
performances et d’installations. Pour sa
grande exposition rétrospective organisée
au Stedelijk Museum d’Amsterdam, ces
techniques seront omniprésentes. Dans
ses récentes installations vidéo, l’artiste a
développé des environnements architectoniques,
par lesquels elle entraîne
le spectateur dans son œuvre. Ainsi, la
vidéo Liquidity Inc., où l’eau et des conditions
météo extrêmes servent de métaphores
à la fluidité des capitaux et des
informations numériques, contemplée
depuis une vague bleue formant tribune.
L’histoire projetée est celle de Jacob
Wood, analyste financier ayant perdu
son emploi lors du krach économique de
2008, devenu depuis un adepte des arts
martiaux. Ttruffé de syntaxe numérique,
hashtags, GIF et mèmes, univers réel et
virtuel s'y chevauchent allègrement. Dans
un monde où on attend des humains
qu’ils soient aussi souples que les valeurs
virtuelles et les données numériques, il
vaut mieux suivre le rythme. Sur l’écran,
le jeune Bruce Lee s’adresse au spectateur
: « Vous devez être informes, flous,
How Not to Be Seen: A Fucking Didactic Educational.MOV File, 2013, vidéo et audio numériques HD monocanal,
dans un environnement architectonique, 15’52’’. © de l’artiste / Courtesy Andrew Kreps Gallery, New
York / Esther Schipper, Berlin / VG Bild-Kunst, Bonn, 2021 / photo : Hito Steyerl
comme l’eau. Lorsque vous versez de
l’eau dans une tasse, elle devient tasse.
Lorsque vous versez de l’eau dans une
bouteille, elle devient bouteille. Lorsque
vous versez de l’eau dans une théière, elle
devient théière. L’eau peut s’égoutter et
peut s’écraser. Faites comme l’eau, cher
ami. » On remarque que la tribune est
faite de tatamis de judo, tel un radeau
qui nous tient au sec lors des tempêtes,
qu'elles soient financières, virtuelles ou
météorologiques.
« Hito Steyerl
considère la société
avec une sorte de
clairvoyance à l’égard
de la politique et de
l’éthique. »
KAREN ARCHEY
Liquidity Inc., 2014, vidéo HD monocanal dans un environnement architectonique, 30’ 15’’. © de l’artiste /
Courtesy Andrew Kreps Gallery, New York / Esther Schipper, Berlin / VG Bild-Kunst, Bonn, 2021 / photo :
Hito Steyerl
RETOUR AUX SOURCES
« Hito Steyerl est d’abord une conteuse
hors pair d’histoires complexes », déclare
la curatrice et critique d’art américaine
Karen Archey, établie entre New York et
Amsterdam. Au Stedelijk Museum, elle
est responsable de l’art contemporain et
des collections numériques : « C’est ce
fabuleux talent de conteuse, associé à
une aptitude exceptionnelle à distinguer
les questions occultées et que le public
doit mieux comprendre, qui ont fait d’elle
une voix cruciale de l’art contemporain. »
L’artiste est née à Munich en 1966, puis a
étudié le cinéma en Allemagne et au Japon,
avant d’effectuer un doctorat en philosophie
à Vienne. Ces études supérieures n’ont
jamais été dissociées de sa pratique, où cinéma
et philosophie sont étroitement imbriqués.
Sa recherche universitaire portait
49

SocialSim, 2020, vidéo HD monocanal et simulation informatique live Dancing Mania, 18’19’’, Dancing Mania durée variable. © de l’artiste / Courtesy Andrew Kreps
Gallery, New York / Esther Schipper, Berlin / VG Bild-Kunst, Bonn, 2021 / photo : Hito Steyerl
sur la diffusion, à une vitesse fulgurante,
d’images et de connaissances apportée par
la technologie numérique. Dans l’un de ses
essais, elle nomme cela circulationnisme,
déclarant que la plupart des images n'en
sont plus une simple représentation, mais
qu’elles interviennent dans la réalité.
En 2015,
Hito Steyerl fut la
première à gagner
l’Eye Art & Film
Prize, décerné par
le Musée du cinéma
d’Amsterdam.
penhague, et est maintenant au Stedelijk
Museum. Dans Factory of the Sun, l’artiste
examine la possibilité d’utiliser des images
de la technologie de surveillance qui
représente un moyen d’opprimer certains
groupes humains. Mais ceux-ci ont-ils la
possibilité de se rebeller par cette même
technologie ? La réponse est, semble-t-il, à
trouver dans un étrange mélange de bulletins
d’information, documentaires, jeux et
vidéos musicales.
LE POUVOIR DU MUSÉE
« En dépit de sa notoriété, Hito Steyerl se
distingue par la constance de ses critiques»,
souligne Karen Archey. « Le Stedelijk
souhaite offrir une vue d’ensemble
BOUTADES
Dans ses vidéos sur l’influence d’Internet
sur notre quotidien, ces concepts théoriques
prennent une étonnante forme
ludique. L’artiste fut l’une des toutes premières,
au tournant de ce siècle, à traiter
du langage de la nouvelle ère numérique,
dans le but d’en faire un sujet de discussion.
Ses premiers faits d’armes notoires
furent des participations à de grandes
expositions internationales comme
Manifesta 5, en 2004, et la Documenta
12 de Cassel, en 2007. A la Biennale de
Venise, son œuvre fut présentée pour la
première fois en 2013, puis en 2015. Elle
a ainsi exposé dans le Pavillon allemand
une de ses œuvres les plus controversées,
Factory of the Sun, sorte de science-fiction
avec chaises de plage. Cette installation
vidéo fut ensuite montrée au Museum
of Contemporary Art de Los Angeles, au
Whitney Museum of American Art de New
York, au Kunsthal Charlottenborg de Code
son œuvre, de sa première création de
1994, Deutschland und das Ich, aux œuvres
plus récentes qui ont vu le jour lors de la
pandémie. L’artiste jette un regard critique
sur la société dès les films qu’elle a réalisés
lors de ses études. Ses premières œuvres
traitaient de la nationalité allemande à
l’époque de la réunification. » Formule-telle
une critique du monde artistique, en
dépit de son aversion pour les structures
de pouvoir ? « Je pense qu’elle nous aide
à comprendre à quel point nous sommes
parfois affectés par les abus de pouvoir,
et l’art n’est pas immunisé contre des
questions souvent considérées comme
externes, par exemple la militarisation et
l’inégalité écologique. Elle suit dans son
œuvre Guards, qui sera présentée au Stedelijk,
deux agents de sécurité noirs dans
un musée américain. Ceux-ci parlent de
leur passé traumatisant dans l’armée et la
police. Une autre œuvre, Drill, fut réalisée
pour le centre d’art contemporain de
New York, le Park Avenue Armory. On y
plonge dans l’histoire de ce bâtiment, un
ancien arsenal, comme lieu de naissance
de la National Rifle Association. Le lobby
de la NRA est connu pour ses manœuvres
visant à bloquer la législation anti-armes.
Des œuvres comme The Empty Center,
Abstract et Is the Museum a Battlefield
50

« En dépit de sa
notoriété, Hito
Steyerl se distingue
par la constance
de ses critiques. »
KAREN ARCHEY
examinent la façon dont les architectes
célèbres (‘‘starchitectes’’) établissent un
lien inattendu entre les institutions d’art,
la spéculation immobilière et même les
fabricants d’armes. »
QUI AIME BIEN CHÂTIE BIEN
Cela peut paraître un exercice d’équilibre
difficile pour une artiste qui a exposé
dans tous les grands musées du monde :
comment faire partie d’un système et en
même temps tirer sur lui à boulets rouges
? Karen Archey : « Il existe de nombreux
aspects spécifiques au monde de l’art, et
notamment au marché de l’art sur lequel
elle porte une grande attention, les ports
francs utilisés par certains collectionneurs
afin d’éviter les taxes sur l’achat
d’œuvres d’art. L’œuvre est mise en réserve
tant qu’elle peut prendre de la valeur, puis
est revendue avec bénéfice. » Comme de
nombreux autres artistes, Hito Steyerl
est tout à fait consciente du sponsoring
des musées et réfléchit à leur source de
financement. Elle participe toutefois au
marché de l’art et est représentée par deux
grandes galeries internationales : Andrew
Kreps Gallery (New York) et Esther Schipper
(Berlin). Mais elle agit d’une manière
tout à fait lucide, estime Karen Archey :
« Je pense que ses critiques à l’encontre
des musées et collections reposent en fin
de compte sur une notion d’amour et l’exigence
de responsabiliser ces institutions. »
VISITER
Hito Steyerl: I Will Survive
Stedelijk Museum
www.stedelijk.nl
du 29-01 au 12-06
Factory of the Sun, 2015, environnement vidéo HD monocanal, grille LED lumineuse, transats, 23’. © de l’artiste / Courtesy Andrew Kreps Gallery, New York / Esther
Schipper, Berlin / VG Bild-Kunst, Bonn, 2021 / photo : Hito Steyerl
51

Eclats de l’âge
du bronze
Période encore largement
méconnue, les deux millénaires
qui précédèrent l’apparition de
l’écriture en Europe recèlent de
nombreuses pièces largement
abordables, ainsi que quelques
trésors.
TEXTE : GILLES BECHET
Disque astronomique de Nebra, ca. 1600 - 1560 av. J.-C. © State Office for Heritage Management and
Archaeology Saxony-Anhalt / photo : Juraj Lipták
L’âge du bronze européen peut sans
doute être considéré comme le
premier âge d’or du continent. Cette
période qui s’étend de 2700 à 800
avant l’ère commune a vu se développer
des populations réputées frustres qui
nous ont pourtant laissé des objets d’une
grande qualité et d’un grand raffinement
d’exécution. En l’absence d’écriture, on dispose
de peu d’éléments pour comprendre
leur organisation sociale, politique et
culturelle. Et ce que l’on ne connaît pas
laisse souvent place aux fantasmes nourris
par les récits fondateurs des Etats-nations.
Un des nombreux paradoxes sur cette
période plein d’inconnues, c’est la finesse
d’exécution atteinte par des artisans qui
vivaient généralement dans des hameaux
d’une petite dizaine d’habitations. Malgré
cela, les échanges étaient nombreux. La
similitude des objets retrouvés sur des
zones souvent fort éloignées indique que
des forgerons voyageaient pour partager
52

leurs techniques et que comme l’étain
et le cuivre nécessaires pour former le
bronze n’étaient pas disponibles partout,
les échanges commerciaux devaient être
nombreux. La quantité d’armes retrouvées
nous laisse penser que le guerrier incarnait
une des fonctions centrales de ces
sociétés. Une des particularités de l’âge du
bronze, c’est la multiplication des dépôts
non funéraires qui rassemblent des objets
métalliques, armes, bijoux ou objets de
cérémonie sans que l’on en connaisse la finalité
exacte. Certains ont parlé de dépôts
de fondeurs, de marchands ou de dépôts
votifs. C’est cette dernière hypothèse qui
aujourd’hui est généralement retenue.
Même si elle n’est pas entièrement satisfaisante
puisqu’elle ne permet pas d’expliquer
la variabilité importante de ceux-ci.
BEAUCOUP D’OBJETS EN CIRCULATION
Les antiquités représentent un marché
de niche et la période protohistorique,
qui n’a pas l’aura des antiquités grecques,
romaines ou égyptiennes, intéresse des
collectionneurs passionnés initiés par une
lecture, l’enthousiasme d’un professeur
d’histoire ou la visite d’une exposition.
« L’âge du bronze correspond au début
de la production en série. Il n’est pas rare
de voir dans certains dépôts 500 à 800
Double hybride d'un cheval serpent, 1200–1000 av. J.-C., trésor de Kallerup, Thy, Jutland, Danemark, bronze.
National Museum of Denmark/Ofret Museum. © CC-BY-SA / photo : Søren Greve
Un des nombreux paradoxes de cette période
pleine d'inconnues est la finesse d'exécution
atteinte par des artisans qui vivaient
généralement dans des hameaux d'une petite
dizaine d'habitations.
Le Berlin Gold Hat, ca. 1000 – 800 av. J.-C. Berlin, Neues
Museum. © bpk - Photo Agency / Museum für Vor- und
Frühgeschichte, Staatliche Museen zu Berlin
exemplaires d’une même hache », note
ainsi Daniel Lebeurrier, expert en antiquités
depuis vingt-cinq ans et fondateur
de la Galerie Gilgamesh à Paris. C’est ce
qui explique qu’il y a beaucoup d’objets en
circulation dans des prix relativement raisonnables.
On trouvera une belle épée ou
une lame de hache pour environ 150 euros.
Des maisons de vente françaises comme
Aguttes ou Millon organisent régulièrement
des ventes de collections d’antiquités
préhistoriques. La France et la Belgique
regorgent d’objets de l’âge du bronze et,
pour des raisons culturelles, les collectionneurs
ont tendance à acheter ‘‘local’’.
Si l’intérêt pour les objets de l’âge du
bronze est d’abord européen, on verra aux
Etats-Unis des descendants d’immigrés
danois s’intéresser aux haches de pierre
polie fréquentes au Danemark. « Ce sont
des collections très liées à la typologie.
On collectionnera les haches ou les épées
d’époques et de provenances différentes. Il
y a beaucoup d’échanges entre collectionneurs
qui ne passent pas nécessairement
par les salles de vente ou les galeries. »
Les belles pièces qui attirent les collectionneurs
ne sont pas rares car le bronze
de cette période est généralement très
stable et de belle qualité. Pour ce qui est
des objets exceptionnels, c’est autre chose.
Certaines pièces peuvent présenter un
intérêt purement archéologique sans rien
avoir de tape-à-l’œil ou de spectaculaire
qui suscitera la convoitise du plus grand
nombre. Quand les pièces réunissent les
deux qualités, elles finissent la plupart
du temps dans un musée. C’est le cas de
quelques unes de celles présentées cet
hiver au British Museum dans l’exposition
The world of Stonehenge.
53

1995, sans certificat de provenance, par
un vendeur qui prétendait agir au nom
d’un collectionneur suisse anonyme. Il put
être racheté en 1996 par le Museum für
Vor-und Frühgeschichte de Berlin. L’Epée
d’Ommerschans est une des six épées
cérémonielles connues en Europe. Massive
et sans poignée, mesurant 69 cm, elle
est coulée dans un alliage d’une grande
pureté. Elle doit son nom à la localité
néerlandaise où elle fut découverte. Elle
aurait été exhumée à la fin du XIXe siècle
dans la province d’Overijssel en même
temps qu’une douzaine d’objets de plus
petite taille. Mise en vente par son propriétaire,
un collectionneur allemand, chez
Christie’s en juillet 2017, elle était adjugée
550.000 euros au Rijksmuseum de Leyde
qui était sur sa piste depuis 1927.
Pendentif solaire, 1000–800 av. J-C., or. © The Trustees of the British Museum
PAS DE LÉGISLATION EUROPÉENNE
SUR LES FOUILLES
Si les premières collections se sont constituées
à la fin du XIXe siècle, à la faveur
d’une exploitation plus intensive des
sols par l’agriculture qui fit remonter à la
surface de nombreuses pièces de cette
époque, l’abondance des sites d’enfouis-
UNE OPÉRATION UNDERCOVER
Le disque astronomique de Nebra fut retrouvé
sur un site préhistorique du centre
de l’Allemagne, aux côtés de deux épées,
deux haches et de brassards incomplets,
par des chasseurs de trésor munis d’un
détecteur de métaux. Ceux-ci ont d’abord
tenté de vendre leur trouvaille à des
archéologues locaux avant de se raviser
quand ils ont réalisé que l’objet appartenait
légalement à l’État de Sachsen-Anhalt
où il avait été trouvé. Quelques années
plus tard, ils tentèrent de le négocier à un
collectionneur suisse qui, en fait, travaillait
pour la police. Le précieux disque put ainsi
être récupéré à l’issue d’une opération
undercover dans le bar du Hilton de Bâle.
Autres pièces phare de cette période, les
intrigants chapeaux coniques en or dont
on ne connaît que quatre exemplaires,
retrouvés en Allemagne, en Suisse et en
France. L’exemplaire le mieux conservé est
celui du musée de Berlin, connu comme le
Berlin Gold Hat. Constitué d’une feuille d’or
fin, l’objet qui atteint 74,5 cm de hauteur
est couvert de 1739 symboles de la lune et
du soleil qui correspondraient au calendrier
des cycles lunaires sur une période
de 19 ans. L’objet fut mis sur le marché en
Hache (deuxième en partant de la gauche), France, âge du bronze récent, bronze à patine verte, L. 12,5 cm.
Collection Bigot, Auction Art, Remy Le Fur et associés, Paris, 29-09-2021. © Auction Art - 190 €
54

La Cape de Mold, 1900–1600 av. J.-C. Mold, Flintshire, Wales, or. © The Trustees of the British Museum
L'âge du bronze correspond au début de
la production en série. Il n'est pas rare de voir
dans certains dépôts 500 à 800 exemplaires
d'une même hache.
sement suscite de nombreuses fouilles
sauvages. Beaucoup de ces objets sans
certificat de provenance sont refusés par
les maisons de vente ayant pignon sur rue,
et se retrouvent sur des sites de vente en
ligne. Ainsi sur le site Catawiki, on peut
trouver des lames de hache en bronze
entre 25 et 100 euros, des boucles d’oreille
en or pour 350 euros ou un bracelet spiralé
en or pour 1.550 euros. D’un point de vue
archéologique, les fouilles sauvages sont
dommageables car elles négligent tout
le contexte riche d’informations souvent
capitales et aussi parce qu’elles peuvent
faire disparaître dans des collections privées,
parfois pour de longues années, des
pièces d’un grand intérêt patrimonial. « Il
n’y a pas de législation européenne pour
les fouilles. Chaque pays a ses habitudes
et ses directives. Si l’usage du détecteur de
métaux n’est pas autorisé en France, ni en
Belgique, il est toléré en Grande-Bretagne.
Et ce n’est pas nécessairement une mauvaise
chose, car beaucoup de découvertes
sont signalées et acquises par le gouvernement
britannique», explique Eugène Warmenbol,
titulaire de la chaire d’archéologie
protohistorique du Nord-Ouest de
l’Europe à l’Université libre de Bruxelles.
Dans les années à venir, les objets de l’âge
du bronze continueront à occuper leur
niche dans le marché. « Il faut à peu près
100 ans pour revendre une collection
familiale. On devrait donc bientôt voir pas
mal de collections de la fin du XIXe siècle
apparaître sur le marché », reprend Daniel
Lebeurrier, qui s’attend encore à de belles
découvertes. Quant aux fouilles sauvages,
elles se poursuivront aussi dans toute
l’Europe jusque dans les Balkans avec de
potentielles découvertes exceptionnelles.
Mais, la terre n’est pas inépuisable : « C’est
un patrimoine qui s’érode. Les travaux
agricoles à l’aide de gros engins font de
gros dégâts dans les couches meubles, de
même que les produits chimiques déversés
sur les champs ne sont pas sans effet
sur les pièces de bronze de plus de 3000
ans qui peuvent se dissoudre ou se corroder
irrémédiablement en une dizaine
d’années. »
VISITER
The world of Stonehenge
British Museum
Londres
www.britishmuseum.org
du 17-02 au 17-07
55

Besicles, binocles
et lunettes…
De l’art d’y voir plus clair
Les yeux sont des trésors fragiles !
Ils nous font voir des merveilles,
qui se troublent lorsque la myopie,
la presbytie et autres faiblesses les
atteignent. Des besicles salutaires à
l’accessoire clinquant, nos yeux ont
pu et peuvent toujours compter sur
un arsenal d’outils qui les aident,
tout en les sublimant.
TEXTE : ANNE HUSTACHE
Les lunettes sont nées au XIIIe siècle.
Mais comment faisait-on avant ? Car
les faiblesses liées à la vue existent
forcément depuis les temps les plus
reculés. Nos ancêtres durent certainement
recourir à des stratagèmes comme ces
ballons de verre remplis d’eau à propos
desquels le philosophe Sénèque constate
qu’un objet observé à travers eux appa-
Le béryl et le cristal
de roche étaient
utilisés dans les
monastères pour
combattre la presbytie.
raît plus grand. Quant à lui, Pline l’Ancien
rapporte que l’empereur Néron utilisait
une émeraude pour suivre le combats des
gladiateurs. Des pierres grossissantes,
dites pierres de lecture, comme le béryl et
le cristal de roche étaient utilisées dans
les monastères pour combattre la presbytie
dont souffraient les moines copistes.
L’histoire de l’invention d’outils correcteurs
de la vue est évidemment intimement liée
à celle de l’étude de l’optique et, dans ce
domaine, les travaux du mathématicien,
physicien, philosophe, et physiologiste
arabe Alhazen, de son vrai nom Ibn al-Haytham
(965-1040), paraissent déterminants
puisqu’il est considéré comme le fondateur
de l’optique physiologique, apparue autour
de l’an mille. Son traité fut d’ailleurs traduit
en latin au XIIe siècle, et largement répandu
comme par hasard, peu avant l’invention
des lunettes de correction de vue, en
Italie. Au XIIIe siècle, en effet, à Florence, le
physicien Salvino degli Armati (1245-1317)
met au point une paire de verres enchâssés
dans un cercle de bois. Celles-ci seront
largement perfectionnées à Venise grâce au
verre de Murano. Ensuite, ces artisans iront
installer des ateliers dans toute l’Europe.
Depuis le XVIe, l’évolution des techniques
et de la science optique a ensuite inventé
des outils toujours plus variés et efficaces
au service du regard.
VISITER
Musée de la Lunette
Morez (France)
www.musee-lunette.fr
Se protéger de la neige
ca. 1200
Les paysages enneigés sur lesquels se reflète un soleil
parfois éclatant, mais aussi le vent glacial, constituent
de véritables dangers pour les yeux. Dans les régions du
Grand Nord, les peuples autochtones, notamment inuits,
ont vite trouvé une solution pour protéger leurs yeux. A
défaut de verre, ils tirèrent profit de ce que la nature leur
fournissait. Dans des matériaux comme l’ivoire, le bois ou
l’os de renne, ils ouvrirent deux petites fentes pour se protéger
des vents violents et réduire la lumière pénétrant
dans l’œil tout en s’assurant une bonne vision de loin.
Paire de lunettes de soleil, Canada (Nunavut), culture inuit,, ivoire.
Gatineau, Musée canadien de l’histoire.
56

Symbole d’érudition
XVIe siècle
Les premières lunettes sont en fait des ‘‘besicles’’, soit des
lunettes sans branches et qui se fixent sur le nez. Elles
consistent en deux lentilles convexes rondes, en verre,
aux qualités optiques supérieures, enchâssées dans des
cercles de bois, de corne ou, comme ici, de cuir. Souvent,
elles sont attachées individuellement à des manchons
rivetés par un clou. Elles furent d’abord principalement
utilisées par les moines copistes, mais progressivement,
comme en témoignent de nombreuses peintures, symbolisèrent
l’érudition et seront dès lors vivement prisées par
les nobles comme un signe de leur statut.
Besicles, cuir. Morez, Musée de la Lunette, Coll. Essilor – Pierre Marly.
© photo : Studio Vision
Doux raffinement
ca. 1780-1800
En Chine, les lunettes existent depuis le XVe siècle. Elles
semblent avoir été diffusées par les explorateurs et les
missionnaires le long des routes commerciales. Cette paire
témoigne d’un raffinement certain tant dans l’emploi des
matières que du décor : le pont assez élevé, qui relie les
deux cerclages de verre, est composé de jolies courbes se
terminant en un motif de feuillage. Les branches délicates
comportent des charnières en leur centre, pour qu’elles se
replient aisément. Elles sont terminées chacune par une
pastille d’écaille de tortue en forme de pétale.
Lunettes à montures de cuivre et d’écailles de tortue et de corne, verres
circulaires taillés, Chine, 6,50 x 30 cm, 79 gr. Amsterdam, Rijksmuseum,
inv. BK-NM-10253-A
Luxueuses et apotropaïques
XVIIe siècle
‘‘Portes du Paradis’’, Art moghol, Inde, lentilles taillées dans des émeraudes au XVIIe siècle,
monture en or et argent sertie de diamants du XIXe siècle, L. 12,5 cm. Sotheby’s, Londres,
27-10-2021. © Sotheby’s - Non vendues.
Cette paire de lunettes est composée de deux lentilles,
taillées en forme de larmes au XVIIe siècle, époque où le
commerce des émeraudes est intense et les empereurs
moghols en raffolent, associant de nombreuses vertus à
ces pierres précieuses. La qualité de la taille reflète d’ailleurs
leur extraordinaire savoir-faire dans ce domaine :
les deux lentilles, de 27 carats chacune, sont issues d’une
seule pierre, une exceptionnelle émeraude d’environ 300
carats, originaire de Colombie. De manière audacieuse, la
maîtrise de l’optique et l’art de tailler une pierre précieuse
sont ici réunis. Si ces lunettes étaient portées, ce n’était
pas pour corriger la vue : elles devaient éloigner le mal. La
couleur verte de l’émeraude est en effet associée au Prophète,
au Paradis et à l’éternité, d’où le surnom de ‘‘Portes
du Paradis’’ qui fut donné à cette paire de lunettes.
57

Provocateur
fin du XVIIIe siècle
L’histoire des binocles est intéressante. En effet, sous la Révolution française,
au lendemain de la Terreur (1792-1795), un vent de folie souffle sur la jeunesse
dorée parisienne. Un groupe de jeunes gens, les Incroyables et les Merveilleuses,
farouches opposants au régime républicain des Jacobins, s’affiche dans des costumes
extravagants : des redingotes déformées pour évoquer la silhouette d’un
bossu, des cravates énormes, une coiffure grotesque, un langage absurde et surtout
une grosse paire de lunettes, laissant présager une myopie prononcée. Peu
pratique à porter au quotidien, le binocle pouvait également se porter en bijou,
accroché à une chaîne. Cet accessoire n’a été porté qu’une dizaine d’années, et
pourtant le terme de ‘‘binocle’’ est resté dans notre langage pour parler familièrement
des lunettes ou péjorativement de leur porteur, binoclard.
Binocle, argent et nacre, insertion sur le manche de deux initiales S et B, peut-être celles de son
propriétaire. Morez, Musée de la Lunette, Coll. Essilor – Pierre Marly. © photo : Pierre Guénat
D’une sobriété parfaite
fin du XIXe–début du XXe siècle
Le XIXe siècle marque les débuts de l’industrie lunetière
et de la fabrication de masse, tendant à la standardisation.
A Morez (Jura), où fut fabriqué cet accessoire, deux
spécialités vont connaître un fort succès : les pince-nez,
apparus vers 1840, qui permettent de porter les verres
en les faisant simplement tenir sur le nez puis, à la fin
du XIXe siècle, des montures fines baptisées ‘‘fils’’ ou
‘‘cheveux’’. Ce pince-nez constitue un parfait exemple
du succès de l’industrie lunetière. Les techniciens et
mécaniciens travaillant dans la lunetterie vont rivaliser
d’invention et il existe de nombreux modèles de pincenez,
le système de fixation faisant l’objet de constantes
petites améliorations. Réalisé en acier trempé doublé or,
ce modèle est d’une pureté remarquable.
Pince-nez, acier trempé, doublé or. Morez, Musée de la Lunette, Coll. Essilor – Pierre
Marly. © photo : Pierre Guénat
D’or et d’émail
ca. 1860
Le XIXe siècle a connu un grand développement des accessoires
permettant de porter des lentilles correctrices sans
les branches des lunettes : pince-nez, monocles, binocles et
lorgnons. Ce lorgnon est dit face-à-main car il est monté sur un
manche. Il comporte un binocle, soit deux cerclages d’or qui
se replient l’un sur l’autre grâce à un système à ressorts. Il comporte
aussi un anneau a la base du manche. Confectionné en or
finement ciselé, cet élégant accessoire porte un poinçon à tête
d’aigle et un poinçon d’orfèvre. L’émail vert utilisé pour le décor
du manche offre un riche contraste avec les motifs floraux qui
le décorent.
Lorgnon face-à-main, époque Napoléon III, or et émail. © Delaval Antiques
58

Le signe d’une époque
XIXe– début XXe siècle
Monocle, acier trempé doublé or. Morez, Musée de la Lunette, Coll. Essilor –
Pierre Marly. © photo : Pierre Guénat
Sous Louis XV, le lancetier était à la mode : cet ancêtre du
monocle consistait en un unique verre de lunette circulaire
monté sur un manche. Le premier monocle attesté fut porté
par l’antiquaire Philipp von Stosch (1691-1757), qui s’en servait
pour examiner de près les gravures qu’il recherchait à Rome.
Simple verre de lunette circulaire, cerclé ou non, cet accessoire
est fixé entre l’arcade sourcilière et le haut de la pommette.
Parfois, comme c’est le cas ici, le cerclage est muni d’un rebord,
la galerie, afin qu’il tienne bien sur l’œil. Il comporte aussi une
chaîne ou un cordon qui l’attache au vêtement. Le monocle
fut essentiellement porté par les hommes, s’imposant au XIXe
siècle comme un accessoire indispensable des classes aisées.
Il fut populaire chez les officiers supérieurs de l’armée qui y
voyaient un bon moyen de détourner une règle empêchant les
‘‘binoclards’’ de monter en grade. Ce fut un accessoire également
très prisé des dandys.
Les plus excentriques
années 1940
Edward Melcarth, Paire de lunettes de soleil pour Peggy Guggenheim. © D. R.
Il est difficile de séparer les fameuses lunettes de soleil en forme
d’ailes de papillon (ou de chauve-souris ?) de celle pour qui elles
furent inventées, Peggy Guggenheim. La grande collectionneuse
d’art moderne les a plus que souvent portées, comme en témoignent
les nombreuses photos prises au fil des ans. Leur taille
imposante et leur ligne vaguement surréaliste les rendent de fait
inoubliables. Ces incroyables lunettes relèvent apparemment
d’une unique incursion dans ce domaine par Edward Melcarth,
peintre réaliste proche de la collectionneuse, mais totalement
oublié aujourd’hui. Cet accessoire a indubitablement contribué à
renforcer la personnalité excentrique de l’Américaine, amoureuse
de Venise, et ce n’est pas pour rien, d’ailleurs, que la réinterprétation
qu’en a faite Alexander Wang fut adoptée par Lady Gaga.
Du monde des insectes
1997
Cette paire de lunettes solaires est devenue emblématique de
la première collection de haute couture présentée par le styliste
Thierry Mugler, en janvier 1997. Intitulé Les insectes, le défilé
témoignait de la fascination du couturier pour l’entomologie et de
l’association qu’il faisait entre femme et insecte, soit un être fragile
et un prédateur à la fois. Son tailleur fourmi, ses capes chrysalide,
cocon ou hanneton témoignent aussi de l’influence du roman La
Métamorphose (1912) de Franz Kafka, du film La Mouche (1986) de
David Cronenberg et du documentaire français Microcosmos : Le
Peuple de l’herbe (1996). Ces lunettes Mouche impressionnent par
la rigueur un peu agressive de leur ligne. Elles résultent aussi d’un
tour de force technique, car réalisées au départ d’un seul morceau
de plexiglas moulé et brossé.
Thierry Mugler, Lunettes de soleil ‘‘mouche”, plexiglas monobloc transparent
bleu foncé. Paris, Musée Galliera, inv. GAL2020.2.50
59

Hotte de raisins, roses trémières, iris, mauves, soucis africains, clématites, marron d’Inde et mûres avec papillons et autres insectes suspendus devant un arc en pierre,
1681, huile sur toile, 65,7 x 50,8 cm. Christie’s, New York, 30-10-2018. © Christie’s Images Ltd. - 137.500 $ (120.900 €)
60

Rachel Ruysch
L’art de composer des bouquets
En avril 2013, à Paris, Artcurial
adjugeait plus de 400.000 euros
(hors frais) un vase de fleurs signé
d’une obscure artiste femme, jadis
fameuse mais aujourd’hui bien
plus confidentielle, Rachel Ruysch.
En décembre de la même année,
Sotheby’s London générait le record
du monde pour une de ses œuvres,
frappée 1,4 million de livres sterling.
Partons à la redécouverte du travail
de cette artiste hollandaise, active
dans la seconde moitié du XVIIe et
la première moitié du XVIIIe siècle,
considérée en son temps comme
la plus exquise peintre de fleurs
d’Europe.
TEXTE : CHRISTOPHE DOSOGNE
D’abord stupéfait par ces impressionnants
bouquets, l’œil du
spectateur s’y accroche à l’aile
d’une libellule, glisse sur le velouté
d’un pétale de tulipe avant de descendre
le long d’une tige vert tendre. Circulant
dans une multitude de couleurs, il termine
son voyage en frôlant l’élytre d’un scarabée
et en découvrant quatre œufs délicatement
déposés dans le nid d’un oiseau. L’auteur
de ces spectaculaires natures mortes
a alors plus de 70 ans ! Rachel Ruysch
(1664-1750) est en ce temps-là au sommet
de son art, maîtrisant parfaitement tous
les ressorts de la peinture de fleurs qui a
fait sa renommée. Fille aînée du médecin
néerlandais Frederik Ruysch et de Maria
Post, elle-même fille de l’architecte Pieter
Post, Rachel naît à La Haye mais, dès ses
trois ans, déménage à Amsterdam où son
père, professeur d’anatomie et de botanique,
a trouvé un emploi. Il possède une
vaste collection de squelettes d’animaux,
d’échantillons de minéraux et de botanique.
L’enfant l’assiste à la préparation de
ses spécimens de fleurs, préservés à l’aide
d’une liquor balsamicum, un mélange de
cire, de colle de poisson et de dentelle qu’il
a mis au point à l’origine pour conserver
et étudier des parties anatomiques.
Au départ de cette technique, Frederik
Ruysch crée des paysages fantastiques
composés d’organes humains conservés et
de squelettes de bébés. Egalement peintre
amateur, il en exécute des dessins scientifiques.
Très populaire, sa collection attire
force touristes et invités illustres.
Faisant preuve d’une
véritable science
de la composition,
les bouquets
luxuriants de Rachel
Ruysch se montrent
exemplaires dans
l’équilibre des masses
et des couleurs.
INSPIRÉE PAR LA RÉALITÉ
Sa fille, Rachel, dont le grand-oncle et
les oncles maternels sont des peintres
reconnus, utilise elle aussi cet ensemble de
premier ordre, qui donne alors l’impression
de fleurir pour toujours. Elle y exerce ses
talents de dessinatrice et peint les fleurs
et insectes qui y sont conservés. Impressionné
par son talent, dès 1678, alors qu’elle
a quatorze ans, son père l’autorise à entrer
en apprentissage chez une connaissance,
Willem van Aelst, éminent peintre de fleurs
d’Amsterdam dont l’atelier donne sur celui
d’une autre fameuse artiste de ce genre,
Maria van Oosterwijck. La jeune fille y étudie
jusqu’au décès de son maître en 1683.
Encore imprégnée de la collection paternelle,
dans les premiers travaux qu’elle
esquisse, elle peint quantité de sous-bois
mettant en scène petits animaux, reptiles,
papillons et champignons. « Rachel n’a pas
61

son pareil pour rendre la structure de la
mousse à l’aide de pinceaux minuscules et
de petites éponges trempées dans la peinture
», explique l’historienne néerlandaise
Heleen Debruyne. « Elle s’y spécialise également
dans la peinture de natures mortes
florales. » Outre la technique picturale,
Willem van Aelst lui enseigne comment
disposer un bouquet de façon asymétrique
dans un vase pour qu’il ait l’air plus spontané
et moins formel cette technique permet
d’obtenir un effet plus réaliste et tridimensionnel
que ceux obtenus jusqu’ici par
des maîtres aussi fameux que Jan Davidszoon
de Heem. A Amsterdam, l’apprentie
fréquente sans doute les peintres de fleurs
Une fois mariée, Rachel Ruysch continua à
travailler comme peintre, sa contribution
aux revenus du couple lui permettant
rapidement de déléguer les tâches ménagères
et la garde de ses dix enfants…
Jan et Maria Moninckx, Alida Withoos et
Johanna Helena Herolt-Graff, tous ont à
peu près son âge et sont employés par la
propriétaire de l’Hortus Botanicus d’Amsterdam,
Agnès Block qui, comme le père
de Rachel, travaillle avec les collection-
neurs de plantes Jan et Caspar Commelijn.
Quoi qu’il en soit, son œuvre s’inscrit dans
la tradition des grands peintres de fleurs
hollandais, particulièrement admirés pour
la précision de leur pinceau et leur sens de
l’harmonie. Ses premières œuvres signées,
réalisées dans les années 1680, s’inspirent
de la manière populaire d’Otto Marseus
van Schrieck. Mais, faisant preuve d’une
véritable science de la composition, ses
bouquets luxuriants se singularisent vite
par l’équilibre des masses et des couleurs.
L’habileté de Ruysch réside dans l’observation
minutieuse de chaque fleur, de manière
extrêmement naturaliste. Dans son
travail, elle accorde une grande attention
aux détails. Chaque pétale est ainsi minutieusement
créé à l’aide d’un pinceau particulièrement
fin. Elle s’illustre aussi par ses
arrangements élaborés, difficiles à observer
dans la nature puisque combinant des
plantes qui fleurissent à des saisons différentes.
Comme dans la plupart des œuvres
florales du dernier tiers du XVIIe siècle,
les couleurs y sont aussi plus soigneusement
équilibrées. En outre, contrairement
aux natures mortes du début de ce siècle,
l’artiste délaisse la dimension allégorique
et la notion de vanité illustrée par les fleurs
éphémères, au profit de l’effet décoratif.
D’un point de vue stylistique, son oeuvre,
avec ses compositions joyeuses et ses
couleurs brillantes, fait pleinement partie
du mouvement rococo. Ses compositions
asymétriques, aux fleurs tombantes et tiges
sauvages, paraissent ainsi posséder une
grande énergie. Leur fond est généralement
sombre, ce qui correspond à la mode dans
la peinture de fleurs de la seconde moitié
du XVIIe siècle, prisant particulièrement
ces arrangements et l’artiste trouve donc
rapidement son public.
Vase avec fleurs, 1700, huile sur toile, 60,2 x 79,5 cm. La Haye, Mauritshuis, inv. 151
RENOMMÉE INTERNATIONALE
Dès l’âge de dix-huit ans, Rachel Ruysch
produit et vend des œuvres signées de
façon indépendante. En 1693, elle épouse
le portraitiste amstellodamois Juriaen
Pool (1665-1745) avec lequel elle s’ins-
62

Nature morte d’une tulipe et autres fleurs avec melon sur un rebord, 1748, huile sur panneau, 16 x 17,5 cm. Sotheby’s, Londres, 08-12-2021. © Sotheby’s Digital Studio
390.100 £ (455.000 €)
talle en 1699 à La Haye et qui lui fera dix
enfants. À cette époque, on attend des
femmes qu’elles s’adonnent à des activités
plus traditionnelles comme la couture, la
broderie ou le filage. Pourtant, tout au long
de son mariage et de sa vie d’adulte, Rachel
Ruysch continuera à travailler comme
peintre, sa contribution aux revenus du
couple lui permettant rapidement de
déléguer les tâches ménagères et la garde
de ses nombreux enfants. A La Haye, elle
se voit proposer l’adhésion à la confrérie
de peintres Pictura, en tant que première
femme membre ! Et, en 1701, elle et son
mari deviennent membres de la guilde des
Contrairement aux natures mortes de la
première moitié du XVIIe siècle, Rachel Ruysch
délaisse la dimension allégorique et la notion
de vanité illustrée par les fleurs éphémères,
au profit de l’effet décoratif.
peintres de la ville. De fait, le succès de Rachel
Ruysch est rapide et les commandes
d’un cercle international de mécènes
affluent. Sa réputation est telle qu’en 1708,
elle est appelée à devenir peintre de la cour
de l’électeur palatin Johann Wilhelm, à
Düsseldorf. Amateur éclairé, ce prince a
un goût très sûr pour la peinture hollandaise
du Siècle d’Or, la collectionnant avec
science et appelant auprès de lui plusieurs
peintres de renom. Ses collections
constituent aujourd’hui encore le fond de
63

Vase de fleurs sur un entablement, nid et insectes, 1739, huile sur toile, 52 x 41,5 cm. Provenance : ancienne Collection Six, Amsterdam. Artcurial, Paris, 10-04-2013.
© Artcurial - 497.474 €
64

De son vivant, les
peintures de Ruysch
se négociaient entre
750 et 1.200 florins.
A titre comparatif,
Rembrandt lui-même
ne reçut que rarement
plus de 500 florins
pour une de ses
œuvres !
l’Alte Pinakothek de Munich. Eu égard à sa
nombreuse progéniture, l’artiste néerlandaise
obtient un contrat pour des œuvres
peintes à domicile (une par an) qu’elle fait
envoyer périodiquement à Düsseldorf,
jusqu’à la mort du prince en 1716. Rachel
Ruysch vend aussi ses œuvres à de riches
collectionneurs, parfois royaux, prêts à
payer un prix élevé. Qui plus est, en 1723,
elle gagne 75.000 florins à la loterie d’Etat.
Aussi n’a-t-elle besoin de vendre que
quelques tableaux par an, qu’elle ne cède
d’ailleurs guère facilement et que l’on doit
commander des mois à l’avance. De son
vivant, ses peintures se négocient ainsi
entre 750 et 1.200 florins. A titre comparatif,
Rembrandt lui-même ne reçut que
rarement plus de 500 florins pour une de
ses œuvres ! Alors que ce dernier, mort à
63 ans, réalisera pas moins de 400 peintures,
Rachel Ruysch, qui à peint jusqu’à
l’âge de 83 ans, n’en a réalisé que quelques
centaines, dont plus de 250 sont documentées.
Ce qui n’empêche pas les historiens
de l’art de considérer aujourd’hui l’artiste
comme l’une des plus talentueuses des
deux sexes dans le domaine de la nature
morte.
VISITER
En pleine floraison. Natures mortes
de fleurs au XVIIe siècle
Mauritshuis
La Haye
www.mauristhuis.nl
du 10-02 au 06-06
Une cote ascendante
Essentiellement anglo-saxon et
presqu’exclusivement concentré sur sa
peinture, le marché de Rachel Ruysch,
peintre rarissime en ventes publiques
(seule une œuvre était proposée en
2020), connaît une embellie certaine
depuis 2013. Cette année-là, Sotheby’s
établit le record du monde pour
l’artiste, en adjugeant à Londres une
nature morte florale de 1710 pour 1,4
million de livres sterling (1,6 million
d’euros) hors frais. Quelques temps
auparavant, Artcurial avait obtenu
400.000 euros (hors frais) d’un vase
de fleurs de 1739 qui avait figuré dans
les collections de la famille Six, à
Amsterdam. Un progrès en partie dû
à un certain retour d’intérêt pour l’art
ancien, mais qui doit aussi beaucoup
à la grande qualité d’un travail qu’on
redécouvre peu à peu. Récemment,
Sotheby’s générait ainsi à Londres,
en janvier 2021, 1,4 million d’euros
pour une nature morte dans un vase,
au-delà de l’estimation, mais aussi
455.000 euros début décembre pour
une nature morte au melon, tandis
que Christie’s obtenait dans la même
ville, en octobre dernier, 146.000 euros
d’une nature morte de fruits. Deux prix
sans doute plus conformes à la cote de
cette peintre, l’essentiel de ses œuvres
s’échangeant aujourd’hui dans une
fourchette de prix allant de 100.000 à
500.000 euros. (cd)
Nature morte avec fruits, 1709, huile sur toile, H. 92,7 cm. Munich, Alte Pinakothek, inv. 420
65

Focus
International
120.000 $ (106.000 €)
Ecole anglaise, XVIe siècle, Portrait
d’une dame inconnue (probablement
la reine Élizabeth Ire), huile sur panneau,
32 x 23 cm. Butterscotch Auction
Gallery, Pound Ridge (NY), 21-09.
© Butterscotch
350.000 £ (412.000 €)
Importante broche mosaïque imitant une broderie, Fabergé, Saint-
Pétersbourg, ca. 1913, or, platine, diamants, rubis, topazes, saphirs,
grenats et émeraudes, L. 4,3 cm. Christie’s, Londres, 19-11.
© Christie’s Images Ltd.
55.800 €
Ecole flamande, Le Boulanger d’Eeklo, début du
XVIIe siècle, huile sur panneau, 22 x 33 cm. Thomas
Enchères et Expertises OVV, Le Mans, 05-12.
© Thomas Enchères
ON A VENDU
Un portrait de la
reine Élizabeth Ire
redécouvert ?
Une énigmatique huile sur panneau,
d’abord cataloguée comme
‘‘École anglo-néerlandaise’’
suscitait une spectaculaire bataille
d’enchères, le 21 novembre, lors
d’une vente organisée par Butterscotch
Auction, dans le nord de
l’État de New York, après qu’une
réévaluation de dernière minute
ait suggéré qu’il s’agissait peutêtre
d’une représentation de la
reine Élizabeth Ier d’Angleterre au
début de sa vie. Adjugée 120.000
dollars (106.000 euros ) hors frais,
soit dix fois son estimation, à un
collectionneur américain, l’œuvre
provenait d’un collectionneur
privé de Scarsdale (New York),
qui vendait un certain nombre de
tableaux hérités de sa grand-mère
au début des années 2000. Pensant
à l’origine qu’il s’agissait de
la reine d’Écosse Mary Stuart, les
experts avait estimé l’œuvre entre
5.000 et 10.000 dollars. Il semblerait,
selon divers avis, qu’il s’agirait
plutôt d’un portrait de la jeune
princesse Élizabeth, réalisé vers
1555, soit trois ans avant son accession
au trône à l’âge de 25 ans. Il se
rapprocherait de portraits apparentés
conservés en Angleterre,
même si des tests scientifiques sur
les pigments et le panneau sont
encore à faire afin de confirmer
cette identification.
Grand succès
pour la collection
Fabergé chez
Christie’s
La fascination pour Fabergé
n’a pas de limite, ainsi qu’en
témoignait la dispersion de la
collection Harry Woolf, tenue à
Londres le 29 novembre dernier,
qui surpassait par deux fois son
estimation. L’homme d’affaires
londonien avait réuni en près de
50 ans un ensemble de 86 joyaux
signés Fabergé, constituant l’une
des plus importantes collections
d’objets de la maison russe mises
sur le marché. Aussi, la vacation
déclenchait-elle de féroces batailles
d’enchères et enregistrait
des adjudications bien au-delà
des estimations, prouvant une
fois de plus que l’intérêt pour les
créations originales de Fabergé
est loin de s’essouffler. Il faut dire
qu’une collection Fabergé d’une
telle envergure, provenant d’une
seule et même personne, est très
rarement mise sur le marché.
L’intérêt global manifesté et la
vive participation témoignent de
la fascination persistante pour la
maison Fabergé, son incomparable
savoir-faire et le prestige lié
à la possession d’une pièce d’une
telle réputation. Selon Christie’s,
les enchérisseurs en salle et au
téléphone venaient de dix-huit
pays et de quatre continents, les
acheteurs russes étant en tête
avec 21 % des plus offrants. Au
total, la vente générait 5.203.250
livres sterling (6,12 millions d’euros).
Les points forts résidaient
surtout dans les nombreuses
figurines d’animaux réalisées en
matériaux précieux. Le prix le
plus élevé était toutefois atteint
par une importante broche en
mosaïque datée vers 1913, cédée
à 350.000 livres sterling (412.000
euros), contre une estimation de
70.000 à 90.000 livres.
Une légende
flamande surprend
Le Mans
Le récit fantastique remonterait
au début du XVIe siècle… Dans la
ville d’Eeklo, aujourd’hui en province
de Flandre-Orientale, un
boulanger astucieux se proposait
de changer le caractère des gens,
en respectant un processus très
précis. Il lui suffisait de découper
leur tête, immédiatement
remplacée par un chou pour
éviter l’hémorragie ; pendant ce
temps, les têtes étaient enduites
d’une préparation dont il avait
le secret, puis passées au four
à pain, et enfin, toutes neuves,
replacées sur les bustes. On ne
sait si elle fut expérimentée, mais
la recette a, au moins, inspiré
un peintre de l’école flamande
du début du XVIIe siècle, qui
imagina la scène proposée avec
succès, le 5 décembre dernier,
au Mans. Estimée au plus haut
4.000 euros, l’œuvre s’est envolée
à 55.800 euros.
Record du monde
pour un marbre
antique chez
Sotheby’s
En 1776, Douglas Hamilton, 19
ans, huitième duc de Hamilton,
est en voyage à Rome. La Ville
éternelle est la dernière étape
de son Grand Tour à travers
l’Europe, qui a duré quatre ans et
l’a conduit dans les plus grande
villes culturelles. S’il s’y fait
portraiturer, l’aristocrate anglais
souhaite également rapporter un
souvenir antique de nature à lui
rappeler son périple. Il fait donc
l’acquisition d’une sculpture en
marbre de la déesse grecque
Aphrodite. L’œuvre, datant de
l’Empire romain, est une copie
d’un modèle créé par le célèbre
sculpteur grec Praxitèle au IVe
siècle avant l’ère commune.
Expédiée en Écosse, puis vendue
en 1921 à l’éditeur américain William
Randolph Hearst, l’Aphrodite
Hamilton, plus vue depuis
1949, faisait son grand retour le
7 décembre dernier, lors d’une
vente chez Sotheby’s, à Londres.
Son subtil mélange de beauté
terrestre et de majesté divine
séduisait cinq enchérisseurs qui
se la disputaient durant vingt
minutes, avant de la laisser à un
collectionneur asiatique anonyme,
pour 18,6 millions de livres
sterling (25,2 millions d’euros),
frais inclus. Il s’agit d’un nouveau
record du monde pour un
marbre antique aux enchères !
66

18.600.000 £ (25.233.000 €)
Aphrodite Hamilton, Rome impériale,
Ier-IIe siècle (restaurations du XVIIIe
siècle), marbre, H. 187 cm. Sotheby’s,
Londres, 07-12. © Sotheby’s Digital
Studio
Est. 600.000-800.000 €
Benhard Strigel, Ange vêtu d’une tunique jaune tenant un encensoir,
huile sur panneau, 48,7 x 61 cm. Artpaugée OVV, Toulouse,
04-02. © Artpaugée
Vue d’une partie du mobilier de la
résidence de François et Betty Catroux.
Sotheby’s, Paris, 24-02. © Sotheby’s
Digital Studio
Le microscope de
Darwin bat des
records
Un microscope ayant appartenu
à Charles Darwin était adjugé
598.500 livres sterling (plus de
700.000 euros) chez Christie’s, le
15 décembre, à Londres. Il s’agit
d’une somme inédite pour un
objet scientifique datant du XIXe
siècle. Cet instrument avait été
conçu vers 1825 par Charles Gould
pour la société Cary. Sa date
de fabrication coïncide avec la
période durant laquelle Darwin se
consacrait à l’étude des zoophytes
et des organismes tels que le corail
ou l’anémone de mer. D’après
Christie’s, il s’agit de l’un des six
microscopes associés au naturaliste
britannique encore existant.
C’est toutefois le seul lui ayant
appartenu à être jamais apparu
sur le marché.
Un SMS aux
enchères
À l’issue de 32 minutes de vente, le
marteau de Claude Aguttes tombait
le 21 décembre pour adjuger
le tout premier SMS envoyé au
monde. Le nouveau propriétaire,
un professionnel des télécommunications
canadien, déboursait
132.680 euros (frais inclus) pour
cette réplique du protocole de
communication du tout premier
SMS jamais envoyé et immortalisé
sous la forme d’un NFT. Vodafone
prenait la décision de reverser le
produit de la vente à l’Agence des
Nations unies pour les réfugiés
(UNHCR).
ON VENDRA
Un ange inédit
à Toulouse
Le peintre renaissant allemand
Bernhard Strigel (1460-1528), actif
à Menningen (Rhénanie-Palatinat),
fut notamment l’auteur de
commandes pour l’empereur
Maximilien d’Autriche. Longtemps
influencé par Roger Van
der Weyden et de Dirk Bouts, à 60
ans il est au sommet de son art
grâce à deux voyages à Vienne
qui lui permettent de s’imprégner
des recherches d’Albrecht Dürer,
de Hans Baldung, d’Albrecht
Altdorfer, de Lucas Cranach ou de
Joachim Patinir. Ce qui est manifeste
dans le paysage de l’Ange
vêtu d’une tunique jaune tenant
un encensoir, proposé le 4 février
à Toulouse. Les souvenirs hérités
du Moyen Âge s’y dispersent, tout
comme les leçons apprises dans
l’atelier familial, où ce proche de
Bartolomeus Zeitblom peignit
longtemps dans la veine de Bouts.
Il épouse ici les bouleversements
de son époque, l’œuvre ayant
sans doute fait partie d’un retable
démembré sous la Réforme
protestante qui fit rage en Allemagne.
Cet ange, ainsi qu’un sujet
similaire du même auteur acquis
en 2008 par le Louvre Abu Dhabi,
s’est ensuite retrouvé en France
au début du XIXe siècle, avant de
resurgir récemment dans une collection
toulousaine, identifié par le
cabinet Turquin. On l’estime entre
600.000 et 800.000 euros.
Cent portraits
chez Artcurial
Artcurial présente, le 15 février à
Paris, lors de sa vente en maîtres
anciens & du XIXe siècle, cent
portraits pour un siècle, une
collection témoignant de la
splendeur du XVIIIe siècle français,
période durant laquelle peinture,
architecture, littérature et
mode s’épanouirent en France et
influencèrent le monde entier. À
travers cette collection des personnalités
du Siècle des Lumières,
des membres de la famille royale,
des figures de la cour de Versailles,
gens de robes ou d’épées, paysans
ou encore prélats sont sublimés
par les plus grands artistes tels que
Louis-Michel Van Loo, Joseph-
Siffrède Duplessis ou Élisabeth-
Louise Vigée Le Brun. La célèbre
portraitiste du XVIIIe siècle a ainsi
réalisé plusieurs portraits de cette
collection, comme celui de Marie-
Antoinette, reine de France (est.
40 000-60 000 euros) ou encore
le portrait de Joseph Hyacinthe
François de Paule de Rigaud,
comte de Vaudreuil (est. 50.000-
70.000 euros).
Le style de François
Catroux chez
Sotheby’s
Le 24 février, Sotheby’s dispersera
la collection de François et Betty
Catroux, issue de leur appartement
du palais Maeterlinck, écrin méditerranéen
sur la Côte d’Azur, à Nice.
Ce couple mythique a su créer un
style à deux, glamour et intemporel.
Dès les années 1970, alors que Betty
devient la muse d’Yves Saint Laurent,
François multiplie les projets,
chacun poursuivant, à sa manière,
sa carrière. François Catroux, dont
l’esprit moderne lui permet toutes
les audaces, sera le décorateur de
Marie-Hélène et Guy de Rothschild,
du magnat de l’étain Antenor Patiño,
de la couturière Hélène Rochas, de
Diane von Furstenberg et son mari
Barry Diller, de la princesse Firyal de
Jordanie, de Roman Abramovitch et
tant d’autres, pour beaucoup d’entre
eux clients et amis. François Catroux
a ainsi créé des intérieurs au style
unique, qui associent le raffinement
des savoir-faire français, le
confort, le sens de la perspective, et
la connaissance des arts du monde.
Dans le palais Maeterlinck, il mêla
des œuvres majeures de designers
contemporains, comme Ron Arad
dont la vente propose plusieurs
pièces importantes, Ingo Maurer,
Martin Szekely, Serge Manzon et
Ettore Sottsass. Ces œuvres dialoguent
ici avec celles d’artistes du
XXe siècle dont Luis Tomasello, Lucio
Fontana, Tom Wesselman, Zoran
Music, ou encore Victor Vasarely et
Xavier Veilhan, ainsi que Christian
Bérard et Jean Cocteau.
67

72.000 €
La surprise du mois
LLe 6 décembre, jour de la Saint-Nicolas,
finissait en beauté pour la salle
bruxelloise Haynault qui proposait
une vente en tableaux, mobilier et
objets d’art, classique et contemporain,
souvenirs historiques et armes anciennes.
Ce sont les maîtres anciens qui ouvraient
la séance, avec notamment le numéro 6,
une Vierge à l’Enfant d’Antonio Di Arcangelo.
Cet artiste, actif dans sa ville natale de
Florence entre 1518 et 1538, est également
connu sous le nom d’Antonio del Ceraiolo,
ce surnom de ‘‘ceraiolo’’ dérivant de la
profession de son père, un fabricant de
bougies ou ceraiolo. Selon Giorgio Vasari, il
fut d’abord l’élève de Lorenzo di Credi, puis
de Ridolfo Ghirlandaio, dans la biographie
duquel il est mentionné. L’homme de
lettres souligne les qualités de portraitiste
de Ceraiolo et mentionne deux de ses
retables, tous deux conservés aujourd’hui
au Museo del Cenacolo di San Salvi, à
Florence. Le premier, une Crucifixion avec
les saints François et Marie-Madeleine, se
trouvait à l’origine dans l’église de San Jacopo
tra’ i fossi ; le second, un Saint Michel,
fut réalisé initialement pour la basilique de
la Santissima Annunziata. La plupart des
œuvres de ce peintre, dont le talent s’inscrit
clairement dans l’imitation de Raphaël,
composent des images à mi-hauteur de la
Vierge et de l’Enfant Jésus, généralement
avec le jeune Jean-Baptiste, saint patron de
Florence. L’œuvre, découverte par Haynault
au sein d’une famille princière européenne
s’inscrit, à quelques détails près, dans cette
veine. Estimée raisonnablement entre
20.000 et 30.000 euros par le fameux
cabinet parisien d’Eric Turquin, qui signalait
un certain amincissement de la couche
picturale, elle était emportée contre 72.000
euros (hors frais). Un prix légèrement
inférieur à ceux obtenus à Londres, en 2017
et 2018, pour des compositions de même
style, mais qui se comprend sans doute
par le format (un tondo), plutôt atypique,
et l’absence de Jean-Baptiste aux côtés du
Christ et de sa mère.
Antonio di Arcangelo, dit Antonio del Ceraiolo,
Vierge à l’Enfant, tondo de bois clair, D. 63 cm.
Haynault, 06-12. © Haynault
68

Ventes
Belgique
Collect-1/2pQ-fev.qxp_320 14/01/22 11:51 Page1
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à 18h30
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Scooter à sidecar de la marque Torck,
type ‘‘Vespa’’, 1954. Carlo Bonte, 24-11.
© Carlo Bonte
24.000 €
Constant Permeke, Le Cheval rouge,
1929, huile sur toile, 60 x 65 cm. Millon,
30-11. © Millon
Importante huile sur toile ovale marouflée sur toile
"Portrait d'un noble sur fond de paysage"
Par l'atelier de Hyacinthe Rigaud. Ecole française
Epoque : circa 1705 - 1710. Dim.:+/-120,5x96cm
ON A VENDU
Torck chez
Carlo Bonte
Le 24 novembre, Carlo Bonte adjugeait
une singulière collection
de voitures à pédales du constructeur
belge Torck de Deinze.
Les enchérisseurs sont intervenus
avec frénésie pour acquérir
ce patrimoine exceptionnel. Le
clou de la vente, une ‘‘voiture
promotionnelle’’, camion avec
remorque spécialement construit
pour l’Expo 58, générait pas
moins de 15.240 euros. De son
côté, une exceptionnel Vespa vert
olive à sidecar de 1954 s’adjugeait
9.144 euros. Un modèle d’avantguerre
noir laqué, Nr 1 Baby de
1929 changeait de propriétaire
pour le même montant. Le modèle
le plus ancien de la vente,
une rare voiture à pédales duo
de 1905-1910 par le constructeur
Puls-Bovie était vendue 13.335
euros. Notons enfin la somme
de 12.700 euros déboursée pour
le panneau d’affichage émaillé
de Torck, de la collection Andreas
Maurer.
Made in Belgium
chez Millon
Millon enregistrait de beaux
résultats lors de sa vente Art
Made in Belgium du 30 novembre.Une
aquarelle sans titre
de Paul Delvaux (1897-1994) s’y
vendait, par exemple, 35.000
euros (est. 20.000-30.000 euros).
Avec son vocabulaire unique,
l’artiste explore ici le thème de
l’amitié, un sujet traité à plusieurs
reprises dans ses peintures
et dessins. Comme presque
toujours chez Delvaux, la scène
est théâtrale. Elle se déroule sur
un sol à damiers devant une
fenêtre à balustre aux épais
rideaux rouges, donnant sur
un paysage nocturne avec de
grands arbres. L’univers onirique
de Paul Delvaux s’y révèle, mais
cette fois-ci sans les soucis qui
hantent en général ce genre de
scènes, l’ambiance étant paisible,
voire chaleureuse. Un Constant
Permeke (1886-1952), Le Cheval
rouge (1929) était, quant à lui,
adjugé 24.000 euros (est. 10.000-
15.000 euros). L’artiste a peint ce
tableau lorsqu’il habitait Jabbeke,
Lampe de table "Pigeon" à corps en cuivre patiné
et réflecteur en verre opalin. Monogrammé sur la queue F.X.L.
pour François-Xavier Lalanne et numéroté 391/900
Portant l'estampille de l'éditeur Artcurial à Paris. Année: 1992
Ecole française. Dim.:+/-13,5x22x27cm.
EXPOSITION
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Belgique
82.725 €
Plat ‘‘Province’’, Chine, dynastie
Kangxi/Yongzheng, ca. 1720-1730,
famille verte aux armoiries de
Flandre. Rob Michiels, 03 & 04-12.
© Rob Michiels
28.600 €
Guy Vandenbranden, Sans titre, 1959,
huile sur toile, 110 x 90 cm. Cornette,
05-12. © Cornette
64.000 €
Sam Francis, Sans Titre, dripping à l’acrylique
sur papier. Haynault, 06-12. © Haynault
près de Bruges. Le Cheval rouge
fait penser au tableau intitulé
La Carriole de 1926, propriété du
Mu.ZEE. Cette scène nocturne est
typique de cette période, emblématique
dans la vie de l’artiste.
Dans la section art contemporain,
citons Romeu ‘my deer’ VI
de Berlinde De Bruyckere (1964),
sculpture en cire, résine époxy et
corde, qui rapportait 20.000 euros
(est. 20.000-30.000 euros). De
son côté, un dessin à l’encre de
Chine par Rik Wouters (1882-1916),
Femme nue assise, dépassait les
attentes (6.000-8.000 euros) avec
une offre à 12.500 euros. Enfin, une
toile de l’expressionniste belge
Michel Frère (1961-1999), surtout
connu pour ses grandes compositions
abstraites, estimée 15.000 à
20.000 euros était emportée 15.000
euros.
Sculpture Guanyin
chez Rob Michiels
La vente d’art asiatique des 3 et
4 décembre chez Rob Michiels
Auctions réservait des surprises
aux amateurs européens et
asiatiques. Une grande statue
Guanyin en bronze d’environ 115
cm, incrustée d’argent, estimée
25.000 à 50.000 euros était ainsi
vendue 40.800 euros. Les amateurs
vietnamiens étaient, quant
à eux, charmés par un vase
chinois bleu et blanc destiné au
marché local, orné de guirlandes
de nuages, de la période
Kangxi, dont le prix indicatif était
de 8.000 à 12.000 euros mais
qui s’adjugeait 45.900 euros.
Petit mais raffiné, un plat doucai
‘‘phoenix’’ était, malgré son
modeste diamètre de 11,5 cm, estimé
entre 5.000 et 10.000 euros
pour finalement s’adjuger 12.112
euros. L’une des pièces maîtresses
de la vente était toutefois
un vase moonflask bleu et blanc
avec cerf, marque et période
Qianlong, dont l’estimation était
de 60.000 à 120.000 euros et qui
fut adjugé 82.875 euros. Ces prix
s'entendent frais inclus.
Art belge et
contemporain
chez Cornette
Cornette de Saint Cyr organisait
une vente d’art belge et contemporain,
les 5 et 6 décembre. Une
sérigraphie d’Andy Warhol de
1972 à l’effigie de Mao y trouvait
preneur pour 35.100 euros, tandis
qu’un dessin de Keith Haring à
la craie blanche sur papier noir
d’une collection privée bruxelloise
était adjugé 24.700 euros
(est. 20.000-30.000 euros) et
qu’une superbe huile sur toile
de Guy Vandenbranden, œuvre
de 1959, rapportait 28.600 euros,
dépassant largement l’estimation
de 15.000 à 25.000 euros. De
son côté, une petite sculpture
de Henry Moore, œuvre de 1957
(est. 20.000-25.000 euros) faisait
l’objet d’une offre à 25.200 euros.
Notons encore cette sculpture en
acier en deux parties de Bernar
Venet (1941), créée en 2003, qui
générait une offre à 32.760 euros
(est. 15.000-18.000 euros) ou ces
deux Karel Appel, une gouache
sur papier de 1953 et une acrylique
sur papier sur toile de 1980,
qui rapportaient respectivement
23.940 et 21.420 euros. D’Yves
Zurstrassen (1956), une huile
de 2015 estimée 10.000 à 15.000
euros, était vendue 20.160 euros.
Signalons enfin de Sol Lewitt,
une œuvre à l’aquarelle et graphite
sur papier de 1986 estimée
10.000 à 15.000 euros, vendue
26.000 euros.
Agréables surprises
chez Haynault
La vente des 6, 7 et 8 décembre
chez Haynault réservait quelques
surprises dans les diverses
spécialités proposées. Le 6
décembre, les maîtres anciens
étaient bien représentés avec
une Vierge à l’enfant d’Antonio
Di Arcangelo, connu sous le nom
d’Antonio Del Ceraiolo (actif à
Florence entre 1518 et 1538) (lire
par ailleurs), mais aussi une
superbe Allégorie de la musique
par l’artiste anversois Andries
Cornelis Lens (1739-1822). Cette
œuvre rapportait 6.000 euros, au
niveau de l’estimation. Parmi les
artistes contemporains, citons un
remarquable dripping de Sam
Francis. Estimée 50.000 à 70.000
euros, cette œuvre de 1988
trouvait preneur contre 64.000
euros. Du côté des arts décoratifs,
un collectionneur déboursait
la somme de 8.000 euros pour
une baigneuse en porcelaine
du XVIIIe siècle d’après Etienne
Maurice Falconet (1716-1791),
contre une estimation de 4.000 à
6.000 euros.
70

JOURNÉES D’EXPERTISE
À BRUXELLES
Peter Paul Rubens et atelier Madone à l‘Enfant. Huile sur panneau, 101 x 72 cm. Résultat : € 213.000
1798
JOURNÉES D’EXPERTISE À BRUXELLES POUR NOS VENTES DE PRINTEMPS 2022
Maîtres Anciens, Bijoux, Argenterie, Arts Décoratifs : 9 février
Art Moderne, Art Contemporain, Photographie : 10 février
Art d’Asie, Arts d’Afrique et d’Océanie :
10 février
6 rue du Grand Cerf — 1000 Bruxelles — T 02-514 05 86 — bruxelles@lempertz.com

Ventes
Belgique
12.000 €
John Andrew Perello (JONONE), Da Boy who cried wolf, 2015,
acrylique sur toile, 147 x 202 cm. Horta, 06 & 07-12. © Horta
40.000 €
Émile Claus, Fog – Lanternes allumées, ca. 1916,
huile sur toile, 43 x 45,5 cm. Vanderkindere, 07 &
08-12. © Vanderkindere
28.000 €
Constant Permeke, La Tentation de
saint Antoine, huile et gouache sur
papier, signée ‘‘Permeke’’, 100 x 71 cm.
Bernaerts, 08-12. © Bernaerts
Street art
chez Horta
Les 6 et 7 décembre, Horta
dispersait son dernier catalogue
de l’année. Parmi les lots offerts
figurait une sculpture en bronze
patiné d’une femme assise par
l’artiste polonaise Katarzyna
Kobro (1898-1951). Estimée 10.000
à 12.000 euros, cette œuvre se
vendait 31.000 euros. Une bague
en platine ornée d’un diamant
solitaire semi-poli de ± 4 carats,
avec certificat HRD portant la
mention ‘‘I VVS1’’, estimée 18.000
à 20.000 euros, trouvait preneur
contre 28.500 euros, tandis
qu’une bague en or blanc avec
saphir de Ceylan de ± 9 carats et
diamants pour ± 1,25 carat, avec
certificat GRS, estimée 14.000 à
15.000 euros, faisait l’objet d’une
offre à 13.000 euros, et qu’une
tiare en argent et or, ornée de diamants
taille rose de +/- 12 carats
créait la surprise en s’adjugeant
17.000 euros (est. 6.800-7.000 euros).
Côté art contemporain, une
œuvre en acrylique de l’artiste
urbain américain John Andrew
Perello (JONONE) de 2015 quittait
la salle contre 12.000 euros.
Enfin, Pigeon Nicolas, sculpture
en bronze patinée de François
Pompon, était vendue 12.000
euros (est. 8.000-10.000 euros).
Un Claus pour
Vanderkindere
Les 7 et 8 décembre, Vanderkindere
tenait sa vente de fin
d’année en dispersant quelques
merveilles parmi les tableaux
de maîtres belges. Une œuvre
remarquable portant le monogramme
E.C. (pour Émile Claus),
datée de 1916 et estimée 40.000
à 50.000 euros rapportait 40.000
euros. À noter, une autre œuvre
intéressante pour les amateurs
du postimpressionnisme avec
le Grand pommier devant la
Lys (1909) d’Anna De Weert.
Cette huile sur toile (91 x 117 cm),
estimée entre 25.000 et 35.000
euros, était emportée par un collectionneur
contre 36.000 euros.
Côté mobilier et objets d’art,
un meuble cabinet d’Anvers du
XVIIe siècle, en ébène à placage
d’écaille de tortue jaune-brun et
orné de sculptures en bronze, estimé
6.000 à 8.000 euros rapportait
11.500 euros, tandis qu’une
grande vasque en marbre de 72,5
cm de hauteur, ornée de bronzes
dorés en forme d’angelots et de
guirlandes de fleurs, peut-être
de la main d’Elias Robert (1819-
1874), suscitait l’engouement des
enchérisseurs. Estimée 1.000 à
5.000 euros, elle rapportait la coquette
somme de 28.000 euros.
Ventes de
décembre
chez Bernaerts
Bernaerts peut jeter un regard
satisfait sur les dernières
enchères de l’année écoulée,
lors desquelles nombre de belles
pièces étaient adjugées. Ainsi,
une toile de 1988 de Philippe
Vandenberg (1952-2009) quittait
la salle au prix record pour
l’artiste de 60.000 euros (est.
15.000-20.000 euros). Philippe
Vandenberg réalisa des œuvres
lyriques abstraites jusqu’à la fin
des années 1980. Mais les bouleversements
dans la politique
mondiale et le mécontentement
face à la récupération de ses œuvres
par le marché de l’art l’ont
poussé à réorienter radicalement
sa pratique. Avec ses tableaux
inspirés du langage visuel du
capitalisme, de la culture urbaine
et des cartoons, il dénonça les
conséquences de l’appétit de
pouvoir et d’argent. Ce tableau
aux personnages dignes de bandes
dessinées, dans une palette
colorée, constitue le préambule
à cette série d’œuvres. Quant à
elle, une figure féminine à l’huile
et gouache de Constant Permeke,
intitulée La Tentation de
saint Antoine, générait une offre
à 28.000 euros. Andries Cornelis
Lens (1739-1822) était également
présent dans la vente avec la toile
Vénus et Adonis. Cet artiste fut
l’une des forces motrices du néoclassicisme
à Anvers, qui joua un
rôle crucial dans le développement
de l’Académie des beauxarts
de la métropole. Après un
voyage d’étude en Italie, en
passant par Paris où le néoclassicisme
avait le vent en poupe, il
favorisa en qualité de directeur
de l’Académie l’étude des sculptures
antiques et des maîtres de
la Renaissance italienne comme
Raphaël et Titien. Sa toile trouva
preneur pour 24.000 euros.
Quant à lui, un groupe en bronze
à patine noire signé de René Iché
(1897-1954) et fondu par Valsuani,
était adjugé 22.000 euros.
L’experte Rose-Hélène Iché situe
ce tirage entre 1946 et 1949. Enfin,
L’abolition de la peine de mort
de Jean-Ignace Isidore Gérard
Grandville (1803-1847) s’adjugeait
au prix marteau de 20.000 euros.
Par cette œuvre, l’artiste dénonce
la peine capitale.
Une figure Yombe
chez Native
Le 11 décembre, la salle bruxelloise
Native proposait une vente
en art tribal, moderne et du
72

Bavikhoofsestraat 74 - 8530 Harelbeke tel.:056/711 580 - info@debaveye.be
van Blarenberghe
Coffret en bronze avec plaques
décoratives, XIXe
DVC salles des ventes
Ellermanstraat 36-38 - Antwerpen - tél. 03/232.36.64
e-mail: dvc@dvc.be - www.dvc.be
PROCHAINES VENTES
19 et 20 février 2022
EXPOSITION: 11-15 février
Art Moderne et Contemporain
Art Classique et Antiquités (XVI°-XIX° siècle)
avec une collection privée de Gand
Art Ethnique avec une belle collection
de Papouasie & d’Océanie (Prigogine - Bruxelles)
Cafetière en argent: Augustin
Van de Winckele 1777, Courtrai
Grand bar et tables de café, cuivre et incrustations
de cristal de roche, Marc Dhaenens
Vente d’Art et d’Antiquités : les 16 & 17 février à 13.30h
Exposition : samedi 12, dimanche 13
& lundi 14 février, de 14h00 à 18h30
Catalogue illustré complet (1 semaine avant la vente) sur :
www.debaveye.be
Andy Warhol (25.000-50.000)
Dessin original avec cachets/numérotation de la
Fondation Andy Warhol au verso. Présenté dans
le livre “Love Sex & Desire - Drawings 1950-1962”
de Michael Dayton Hermann
ARTS D’ASIE, EUROPÉENS ET ISLAMIQUES
23-25 FÉVRIER 2022
www.coronariauctions.com
info@coronariauctions.com
73

Ventes
Belgique
148.000 €
Figure Yombe Phemba, Congo,
début du XXe siècle, bois et miroir, H.
24 cm. Native, 11-12. © Native
37.000 €
Georges-Louis Leclerc, Histoire naturelle
des oiseaux, Paris, 1770-1786, Imprimerie
royale, gravures de François-Nicolas
Martinet. Arenberg Auctions, 17 & 18-12.
© Arenberg Auctions
77.000 €
Joan Blaeu, Toonneel der Steden van de Vereenighde Nederlanden, met
hare beschrijvingen, Amsterdam, 1652, 2 parties en 2 volumes. Arenberg
Auctions, 17 & 18-12. © Arenberg Auctions
XXe siècle. Parmi les lots dans
la première catégorie figurait
une statuette Yombe Phemba,
trouvée dans la région de Kangu
au Congo, selon les archives du
musée Scheut fondé par les prêtres
de la mission installée dans
ce village. Il s’agit d’une figure
de maternité tenant dans ses
mains une plante hallucinogène
destinée à exacerber les pouvoirs
chamaniques. Cette sculpture en
bois fut montrée au palais des
Beaux-Arts à Bruxelles en 1988
dans l’exposition L’art d’Afrique
noire dans les collections privées
belges et reproduite dans le
catalogue sous la direction de
Marie-Louise Bastin. Estimée 40
à 60.000 euros, elle était frappée
148.000 euros (hors frais).
Ornithologie chez
Arenberg Auctions
Les amateurs d’oiseaux et de
gravures anciennes étaient comblés
chez Arenberg Auctions. Les
17 et 18 décembre, la salle proposait
entre autres une première
édition de l’Histoire naturelle des
oiseaux de 1770-1786. Cet ouvrage
composé par Georges-Louis Leclerc,
comte de Buffon, naturaliste
français et intendant des jardins
du roi de France Louis XV, comprend
973 gravures d’oiseaux, superbement
coloriés à la main et
en partie rehaussés à la gomme
arabique. Les plaques gravées
par François-Nicolas Martinet
montrent, en complément
d’oiseaux d’Europe, quelques
espèces exotiques comme des
perroquets, autruches et paons.
Cette exceptionnelle encyclopédie,
au prix indicatif de 20.000 à
25.000 euros, trouvait preneur à
37.000 euros. Parmi les atlas et
livres topographiques, une toute
première édition néerlandaise
de Toonneel der Steden van de
Vereenighde Nederlanden, met
hare beschrijvingen de Joan
Blaeu, dont seuls 75 exemplaires
sont connus, créait la surprise.
Cet atlas comprend 129 cartes
des Provinces Unies et 96 du
Royaume-Uni des Pays-Bas et
date de 1652. La composition de
l’ouvrage, publié pour la première
fois en latin après le traité
de Westphalie, reflète la lutte
de la République néerlandaise
pour gagner son indépendance
vis-à-vis de l’Espagne. Cet atlas
des villes des Pays-Bas s’inscrivait
dans un projet de plus grande
envergure et très ambitieux de
Blaeu de construire un théâtre
qui montrerait les villes du
monde. Cette œuvre se révélant
difficile à réaliser de son vivant,
Blaeu commença par les Pays-
Bas qui étaient le théâtre des
principaux événements de son
époque de même que sa patrie.
Estimé 28.000 à 35.000 euros,
l'atlas quittait la salle contre
77.000 euros.
ON VENDRA
Varia pour
MonsAntic
Lors de sa vente publique des 6
et 7 février, MonsAntic disperse
plus de 800 lots dont une montre
bracelet d’homme par Jaeger
Lecoultre, en or jaune 18 carats,
mouvement à remontoir avec
dateur, estimée entre 600 et 800
euros, une huile sur toile intitulée
La robe soleil (1973) et signée Luc
Perot (1922-1985), estimée entre
2.800 et 3.600 euros ou une paire
de chandeliers en argent à cinq
bras de lumière démontables et
adaptables, estimée entre 600
et 800 euros. Elle propose aussi,
comme toujours, sculptures, tableaux,
dessins, pastels, gravures,
anciens, modernes et contemporains,
de nombreuses antiquités,
objets d’art, meubles d’époque
et de style, lustres anciens, horlogerie,
objets de vitrine, porcelaines,
verreries, faïences, bijoux,
argenterie, …
Des classique
aux Lalanne chez
Vanderkindere
C’est une belle trouvaille pour
Vanderkindere qui propose, les
15 et 16 février, une très jolie et
amusante lampe de table Pigeon
signée FXL, monogramme du
designer français François-Xavier
Lalanne (1927-2008). Avec son
épouse Claude, il a révolutionné
l’approche de la sculpture
moderne en partageant
le sentiment que l’œuvre d’art
peut avoir une fonction. Toute
leur carrière fut donc tendue
par la volonté de restituer à
la sculpture, trop longtemps
sacralisée, une dimension
familière, un éventuel usage.
On la regarde mais on la touche
aussi, on l’ouvre, on s’y assoit,
on s’y allonge, on y mange, on
la porte au cou. La nature, et
plus particulièrement le monde
animal, leur offrit pour ce faire
une infinité de formes reconnaissables
par tous. Ainsi de ce
74

François-Xavier Lalanne, Pigeon, 1992, éd. 391/900, lampe de table, cuivre patiné
et verre opalin, 13,5 x 22 x 27cm. Vanderkindere, 15 & 16-02. © Vanderkindere
Une oeuvre de Jacques-Guillaume van Blarenberghe. Debaveye, 16 & 17-02.
© Debaveye
volatile familier à corps en cuivre
patiné et réflecteur en verre
opalin. D’une édition de 900,
cette création de 1992 pourrait
bien s’adjuger plusieurs dizaines
de milliers d’euros tant la cote
de l’artiste s’est envolée ces dernières
années. Plus classiques,
plusieurs huiles sur toiles devraient
également émailler cette
vente, notamment une grande
Nature morte au homard et aux
fruits entourée de divers animaux
dont des perroquets, un singe,
un écureuil et un chat, attribuée
à l’artiste anversois du XVIIe
siècle Alexander Adriaenssen, ou
ce Portrait d’un noble sur fond de
paysage de l’atelier de Hyacinthe
Rigaud, ca. 1705-1710, dans un bel
encadrement d’époque en bois
sculpté et doré. Enfin, notons cet
important Saint Jean-Baptiste
en bois sculpté et polychromé,
travail allemand du XVe siècle
(H.:+/-99cm).
Magritte
chez Debaveye
Debaveye met aux enchères,
les 16 et 17 février, un Magritte,
certifié par Georgette, L’école
buissonnière, dessin au crayon
mentionné dans le catalogue
raisonné de l’artiste. On y trouve
également des œuvres de Silvain
Christian, Floris Jespers, Hugo
Azcuy Castillo, Modest Huys,
Emmanuel Viérin, Albert Servaes,
Eisman-Semenowski, Luc-Peter
Crombé, Jacques-Guillaume van
Blarenberghe et Louis Robbe. On
annonce également une grande
collection de pièces en argent
massif du XVIIIe siècle, comme
une cafetière en argent massif,
de style Louis XVI, avec têtes de
bélier et guirlandes. De l’orfèvre
de Courtrai Augustin Jozef Vandewinckele,
on propose une cafetière
de 1777, et du Gantois F.I.
Dupret une de 1767, ainsi que des
VENTES AUX
ENCHÈRES
D'OBJETS D'ART
ET D'ANTIQUITÉS
JORDAENS SA
VENTES
LES MARDI 22 ET MERCREDI 23 FÉVRIER
À PARTIR DE 19H.
EXPOSITION
LES VENDREDI 18 ET SAMEDI 19 FÉVRIER
DE 10H À 17H.
Drabstraat 74 I 2640 Mortsel I info@jordaens.eu
03 449 44 30 I Catalogues et livestream: www.jordaens.eu

Ventes
Belgique
EST. 3.000-5.000 €
Georges Lavroff, La Nuit, ca. 1925,
bronze doré, H. 84 cm. FW Auction, 20-02.
© FW Auction
EST. 1.000-2.000 €
Paire de vase Canton de famille rose avec scènes
de palais, Chine, XIXe siècle. Coronari Auctions,
du 23 au 25-02. © Coronari Auctions
EST. 4.000-6.000 €
Maurice Sys, Sans titre, huile sur toile. Maison Jules,
26 & 27-02. © Maison Jules
soucoupes, pichets et couverts
ecclésiastiques français du XIXe
siècle. Également au catalogue,
un grand bar en cuivre et des
tables basses de Marc Dhaenens
avec cristal de roche incrusté, une
exceptionnelle boîte décorative
en bronze avec plaques du XIXe
siècle. Parmi les bronzes, citons
Aizelin, Bouret, Cartier, Coustou,
Desmarets, Drouot, Gaudez,
Grard, Marioton, Mercié, Moreau
Hip & Math, Paillet, Picault, Plé,
Puji et Villanis.
Un bronze russe
pour FW Auction
Parmi une belle sélection variée,
la salle namuroise FW Auction
présentera, le 20 février, un
extraordinaire bronze de l’artiste
russe Georges Lavroff (1895-1991).
Haute de 84 centimètres, format
inconnu jusqu’à ce jour et le
double de ceux déjà présentés
en vente, l’œuvre intitulée La
Nuit, réalisé vers 1925, est estimée
prudemment entre 3.000
et 5.000 euros. Mais également
toute une collection de céramiques
de Mithé Espelt, dont
la cote ne cesse d’augmenter
et laisse présager qu’elle aura
bientôt le même succès que Line
Vautrin (estimation de départ :
300 euros). La salle présentera
également la deuxième partie de
la collection du Vicomte de C., en
Haute-Corse, dont la première
partie avait été dispersée le 14
novembre dernier.
Tableaux modernes
et mobilier Art
déco chez Horta
Parmi les «lots-phares» de la
vente des 21 et 22 février, Horta
proposera au sein des bijoux un
lot se composant d’un bracelet
et d’une broche en or jaune,
agrémentés de saphirs de Ceylan
de couleur naturelle pour ± 48
carats au total et de rubis pour ±
5 carats, estimés 18.000 à 20.000
euros. Du côté des tableaux,
notons ce beau portrait à l’huile
sur panneau signé Gustave Van
de Woestyne et représentant
Madame Félicien Brys, œuvre
prisée entre 15.000 et 20.000
euros. D’Henriette Ronner Knip,
un Chat endormi (1897) est
estimé de même, tandis qu’un
pastel sur toile signé Firmin Baes,
Jeune femme dans son intérieur
vaut entre 10.000 et 12.000 euros.
Parmi le nombreux mobilier
annoncé, outre plusieurs pièces
françaises d’époque Art déco,
signées Maurice Rinck, Christian
Kraas, Batistin Spade, Alfred
Porteneuve et Jules Leleu, on
notera ce bar à vins en métal
argenté repoussé aux motifs de
grappes de raisins et de feuilles
de vigne reposant sur un chariot
à roulette, prise en haut relief de
branches de vigne. Cet ensemble
signé de l’artiste italien Franco
Lapini (1936-2017) est attendu
entre 7.000 et 10.000 euros.
Belle offre chez
Coronari Auctions
Lors de sa première vente du
printemps, les 23, 24 et 25 février,
Coronari Auctions se concentrera
sur l’art asiatique et européen.
Dans la seconde section, on annonce
une sélection exceptionnelle
de maîtres anciens. Outre une
sublime représentation de la Visite
d’Anna et Joachim à la Vierge Marie
et à Jésus par l’artiste allemand
Hermann Tom Ring (1521-1596),
on trouve également une oeuvre
allemande du XVe siècle à double
face, représentant la dormition de
Marie, ainsi que quelques joyaux
flamands et français des XVIIe
et XVIIIe siècles. Pour ceux qui
préfèrent l’art moderne, notons
des œuvres de Guy Vandenbranden,
Constant Permeke, Pierre
Alechinsky, Roger Raveel, Paul
Delvaux et René Magritte, entre
autres. Dans le domaine de la
sculpture, un bronze français du
XIXe siècle, Mercure et Iris, en sus
76

SALLE DE VENTES MAISON JULES
VENTE D’ART, ANTIQUITÉS & VINTAGE
SAMEDI 26 & DIMANCHE 27 FÉVRIER à 10h
Rétrospective permanente de Jan Frans De Boever
ATTENTION ! NOUVELLE ADRESSE
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Atteignable facilement, proche du R4
(sortie Oostakker)
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JEAN BRUSSELMANS
YVAN THEYS
ALBERT SAVERYS
Exposition :
VENDREDI 18/02 – de 10 à 18.00
SAMEDI 19/02 – de 10 à 18.00
DIMANCHE 20/02 – de 10 à 18.00
VENDREDI 25/02 – de 10 à 18.00
LUNDI 21/02 au JEUDI 24/02
de 14 à 18.00
POSSIBILITÉ D’ENCHÉRIR
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Chsée de St-Job n° 638 - 1180 Bxl Tel : 02/372 92 19 - salledeventesaintjob@gmail.com
d’œuvres de plusieurs artistes
(Paul Édouard Dreux, Alfred Barye,
Jan Desmarets, etc.). Les amateurs
de céramiques européennes, de
mobilier, livres anciens, icônes, tapis
et argenterie ne seront pas en
reste, tandis que l’offre asiatique
n’est en rien inférieure aux objets
d’art et antiquités susmentionnés.
Tout d’abord, remarquons un vase
carré chinois qianjiang cai à fond
rouge corail et paysages, marqué
Daoguang. Les collectionneurs
de porcelaine seront également
ravis par la vaste sélection de vases
de famille rose, verte et qianjiang
cai. Un vase Hua Mulan mérite
sans aucun doute une mention
spéciale, de même que plusieurs
vases de Canton et de Nankin de
grande qualité, en sus d’une vaste
sélection de porcelaine bleue et
blanche de grande qualité, issue
de cinq siècles de production artistique
chinoise. Dans ce registre,
signalons une théière ajourée de
la période Kangxi, d’une grande
beauté. Il convient en outre de
souligner l’exceptionnelle offre
en bronzes chinois, ainsi que du
mobilier intemporel et une vaste
collection de parchemins, mais
aussi de l’art japonais et des autres
régions d’Asie.
Maurice Sys
chez Maison Jules
Lors de la première de Maison
Jules à sa nouvelle adresse,
l’église de Sint-Amandsberg,
une offre attrayante en articles
de premier ordre est à nouveau
proposée, entrecoupée d’objets
remarquables, d’art abordable et
autres trouvailles intéressantes.
Une gouache de Raoul De Keyser
(est. 9.000-11.000 euros) devrait
attirer l’attention, tout comme des
œuvres de Pierre Alechinsky, Jo
Delahaut, Marcel-Louis Baugniet,
Octave Landuyt, Jean Brusselmans,
Foris Jespers, Jef Lambeaux,
Jozef Willaert, Albert Saverys
et Xavier De Cock. En outre,
on proposera une collection de
sculptures gantoises. La vente se
déroulera les 26 et 27 février.
D.H Chiparus
Dim: 58 x 89 cm
G.Bogaert
Pili Pili
Dim: 60 x 73 cm
E.Picault
77

Miroir, mon beau
miroir… quelle est
ta valeur ?
Mirror Soleil N°1, ca. 1955, résine et verre, signé, D. 28,4 cm. Flanders Auctions, Wingene, 09 & 10-02. © Flanders Auctions – Est. 5.000-10.000 €
78

Poétesse du métal, Line Vautrin
imagina quantité de petits objets
en bronze – poudriers, boîtes à
fard, piluliers ou cendriers – mêlant
espièglerie, humour et poésie.
Cependant, ce sont ses fascinants
miroirs qui semblent, depuis une
dizaine d’années, ultra-convoités.
TEXTE : GWENNAËLLE GRIBAUMONT
Encouragée et formée par son
père, bronzier d’art, Line Vautrin
(1913-1997) apprend très tôt des
techniques comme la ciselure et la
dorure, compétences nécessaires à l’élaboration
de ses premières créations : boutons,
bijoux (broches et colliers) puis une
multitude de petits objets sur lesquels elle
vient graver des rébus ou des fragments de
poèmes de grands écrivains français (Rimbaud,
Prévert et Verlaine). À partir des
années 1960, la créatrice met au point un
nouveau matériau qu’elle nomme ‘‘Talosel’’
(acronyme d’acétate de cellulose élaboré),
soit une matière brevetée par ses soins,
constituée de couches de résine superposées,
grattées, scarifiées lui permettant de
conférer un aspect de métal vieilli à des
objets en plastique, en les travaillant à
chaud. Ces créations de Line Vautrin sont
à présent les plus prisées sur le marché,
plus encore quand elles sont intégrées aux
cadres délicatement ouvragés de ses miroirs.
Elle en imagina quelque 150 modèles
dont les titres, à eux seuls, racontent tous
une histoire.
REDÉCOUVERTE
Depuis la redécouverte de l’artiste dans
les années 1980, ses miroirs ne cessent de
prendre de la valeur. Le point culminant
de cette progression est atteint en 2015,
avec un chiffre d’affaire de 3.681.749 euros,
montant record largement entraîné par
la vente, le 20 mai chez Christie’s Paris,
d’une grande partie de la collection de
l’artiste par sa fille Marie-Laure Bonnaud-
Vautrin. Intitulée Un souhait a traversé
Paris, la vacation dispersait plus de 200
objets dont les estimations allaient de 300
à 100.000 euros ; des bijoux, des coffrets,
des sculptures et une quinzaine de miroirs,
dont certains spécialement conçus pour
sa collection privée. Ces derniers furent
Miroir, talosel champagne, lumaline, D. 64 cm. FW Auction, 19-09-2021. © FW Auction – 74.000 €
Les créations de Line
Vautrin en ‘‘Talosel’’
sont les plus prisées
sur le marché
adjugés entre 30.000 et 90.000 euros. À
une exception près, non des moindres !
Estimé entre 80.000 et 120.000 euros, le
miroir intitulé Si tous les gars du monde
(inspiré de la chanson éponyme de Marcel
Achard) décrochait le montant record de
421.500 euros, frais inclus. Difficilement
égalable, ce résultat sort très nettement
de la courbe de calibration. Les miroirs
se situent, pour l’écrasante majorité,
entre 20.000 et 100.000 euros, avec de très
rares montants avoisinant les 150.000
euros pour des œuvres aux détails et/ou
à la taille exceptionnels. Autre élément
étonnant, le nombre très conséquent de
miroirs mis en vente. Le site de référence
Artprice en recense, pour l’année 2021,
près de cinquante dont treize furent enregistrés
lors d’une même vente chez Christie’s,
au mois de mai.
COUPS D’ÉCLAT
En septembre dernier, la salle de ventes
FW Auction (Fernelmont) adjugeait un
magnifique miroir Solaire, en talosel
champagne avec de jolies incrustations,
estimé entre 20.000 et 30.000 euros, pour
74.000 euros. Par ailleurs,, l’antenne parisienne
de Millon adjugeait, en novembre
dernier, un miroir à 95.000 euros (prix au
marteau), multipliant par trois l’estimation
basse. Enfin, en juin 2021, un miroir
signé Line Vautrin boostait l’audience de
l’émission française Affaire conclue. Un très
beau modèle Étincelle y était adjugé pour
la somme de 127.000 euros ! Un record et
un coup de pub sans précédent pour le
programme de France 2, la vendeuse –
elle-même brocanteuse – précisant qu’elle
l’avait acquis dans un vide-grenier pour
150 euros. On croit rêver…
SURFER
www.flandersauctions.be
79

Acquisitions
muséales
Le rôle des
membres
de la ROCAD
Sans le travail de défricheur des marchands, notamment belges, nombre
de musées n’auraient sans doute pas toujours la possibilité d’enrichir
leurs collections de pièces rares, voire uniques, de nature à renforcer leur
aura internationale et de les rendre accessibles au plus grand nombre.
Nous poursuivons notre tour d’horizon en donnant la parole à un des
jeunes membres de la ROCAD, particulièrement proactif en la matière, la
galerie bruxelloise Thomas Deprez Fine Arts, spécialisée dans l’art belge
de la fin du XIXe siècle.
Henry de Groux, Alexandre pleurant Darius, ca. 1892, huile sur toile, 65,5 x 81,5 cm. Collection Mu.ZEE, Ostende. © Courtesy Thomas Deprez Fine Arts / photo : Cédric Verhelst
80

COLLECT : Quelle est la marche
à suivre pour proposer
l’acquisition d’une œuvre
à un musée ?
Thomas Deprez : «C’est une question à laquelle
il m’est difficile de répondre, même
si, avec une moyenne de six à sept ventes
muséales par an, nous sommes incontestablement
parmi les leaders en Belgique.
Dans un monde idéal, un conservateur
de musée trouve lui-même les œuvres de
nature à enrichir la collection placée sous
sa responsabilité. Si les meilleurs entretiennent
des liens étroits avec des collectionneurs
privés et scrutent attentivement
les possibilités d’enchères, l’acquisition
auprès de marchands présente pour eux
des avantages considérables. Un bon
marchand se préoccupe autant qu’une
institution des problèmes de restauration,
de recherche documentaire, de conseil
et de rigueur scientifique. Ses critères
d’exigence en termes d’authenticité, de
pedigree, de rareté, d’originalité ou d’état
de conservation en regard de l’âge et de
l’histoire des œuvres sont très proches de
ceux des musées. Ma formation d’historien
de l’art joue donc un rôle important
dans les choix qui sont faits. Un tableau
impressionniste des années 1930 ou une
œuvre symboliste des années 1950 – aussi
parfaits soient-ils sur un plan esthétique –
ne sont pas pertinents sur le plan de l’histoire
de l’art et ne méritent donc pas d’être
exposés dans un musée. Nous recherchons
les thèmes, matériaux ou techniques qui
ont, à un moment donné, eu un impact
historique important. Nous accordons
également une attention particulière
aux œuvres déjà célébrées en leur temps.
Une fois identifié un ajout potentiel à la
collection d’un musée, celui-ci doit à son
tour répondre aux critères mis en avant
par l’institution. Les musées développent
tous une politique spécifique, et toute
acquisition potentielle doit être prioritaire
dans le cadre de cette politique ou
constituer une opportunité exceptionnelle
qui ne peut être ignorée. Avant d’arrêter
leurs décisions, ils voudront évidemment
s’assurer que l’œuvre n’a pas été volée ou
détournée, ou qu’elle n’a pas été réalisée
à partir de matériaux problématiques ou
dans des circonstances équivoques. Nous
étudions et évaluons tous ces paramètres
au préalable. »
Est-ce fastidieux en termes de temps
et de négociations ?
« Dans un monde idéal, les conservateurs
feraient le premier pas, ce qui rendrait la
procédure beaucoup plus simple. Bien
sûr, la réalité est toute autre et chaque
cas de figure unique. Evidemment, nous
faisons tout notre possible pour proposer
“Ma formation
d'historien de l'art joue
un rôle important
dans les choix qui sont
faits.”
un prix correct, dans un dialogue ouvert
garantissant que les attentes des deux
parties soient rencontrées. Parfois, les
choses s’échauffent un peu. Sachant pertinemment
que nous ne devons pas payer
de TVA à l’exportation, les Américains
demandent parfois carrément une ‘‘remise
musée’’ de 20 % sur le montant total. La
négociation peut alors s’envenimer. Mais,
il s’agit avant tout d’établir une relation
de confiance même si l’expérience nous
a appris que tout ne se passe pas toujours
sans heurts. Il faut souvent faire preuve de
souplesse et une acquisition cruciale peut
être différée pour des raisons budgétaires.
Dans la mesure du possible, nous signons
alors un contrat de vente avec un délai de
paiement de six mois ou nous cherchons
d’autres solutions. En Belgique, les nombreuses
associations d’amis jouent souvent
un rôle fondamental dans l’enrichissement
des collections des musées et, pour des
sommes exceptionnelles, un conservateur
peut solliciter l’aide d’organismes extérieurs
comme la Fondation Roi Baudouin.
Mais toutes les tentatives d’acquisitions
n’aboutissent pas, loin s’en faut. Les pierres
d’achoppement sont nombreuses, parfois
en raison de dissensions internes à l’institution
qui peuvent refroidir un mécène,
mais le plus souvent à cause de la maigreur
des fonds disponibles qu’il faut souvent
ventiler et partager entre de nombreux
départements. »
Quelle œuvre êtes-vous parvenu
à vendre, à qui et pourquoi ?
« L’une des dernières pièces que nous
ayons vendues à un musée belge, en 2021,
figurait dans notre exposition Henry de
Groux (1866-1930) : Obsessions & Symphonies,
organisée en collaboration avec
nos collègues parisiens Mathieu Néouze
et Trebosc-Van Lelyveld. La base de cette
exposition monographique était une
collection privée française, considérée
comme la plus importante au monde
pour l’œuvre de cet artiste symboliste
belge de premier ordre. Cette exposition,
un projet dont nous sommes très fiers, est
rapidement devenue exceptionnelle par
son niveau et sa portée. Conservant l’une
des plus importantes collections d’œuvres
de James Ensor, le Mu.ZEE d’Ostende a
ainsi saisi l’occasion de compléter sa collection
fin-de-siècle avec l’un des premiers
chefs-d’œuvre d’un esprit proche de celui
du maître ostendais. L’œuvre d’Henry
de Groux, Alexandre pleurant Darius,
concentre toutes les caractéristiques du
symboliste belge et rejoint deux autres de
ses œuvres dans la collection de l’institution,
notamment un grand portrait
de son ami James Ensor, rencontré vers
1883 et qui fut comme lui membre du
groupe des XX. Cette œuvre, la première
à être entrée dans la collection française,
n’avait plus été vue depuis plus d’un siècle
et n’était connue que d’une photographie
inversée, publiée en 1899. Lors de
l’exposition Henry De Groux (1866-1930).
Maître de la Démesure, organisée en 2019
au musée Rops de Namur, les commissaires
n’avaient pas connaissance de cette
œuvre ni de la collection qui l’abritait. Les
expositions commerciales et les redécouvertes
qu’elles provoquent constituent
donc autant d’occasions pour les musées
d’acquérir des œuvres importantes longtemps
demeurées en mains privées, de les
préserver et de les rendre accessibles aux
plus grand nombre. »
SURFER
www.thomasdeprezfinearts.com
www.rocad.be
81

Auction calendar
FEBRUARY / MARCH 2022
Belgium
FEBRUARY
1 Berg van Barmhartigheid
juwelen en lederwaren
BRUSSEL
2 Berg van Barmhartigheid
juwelen BRUSSEL
4 Maison des Huissiers
de Justice
Deurwaarderstukken BRUSSEL
4-14 Bernaerts
Timed Online: archeologie,
etnografisch en divers
ANTWERPEN
5 ABS Veilingen Mechelen
Deurwaarderstukken
MECHELEN
24-25 Monsantic
Kunst en antiek BERGEN
7 Amberes
Burgerveiling ANTWERPEN
7-12 Rops
Online kunst en antiek
NAMEN
9-10 Flanders Auctions
Kunst, antiek, design en
religiosa WINGENE
11 Maison des Huissiers
de Justice
Deurwaarderstukken BRUSSEL
12 Berg van Barmhartigheid
Speciale verkoop
BRUSSEL
12 ABS Veilingen Mechelen
Deurwaarderstukken
MECHELEN
12-13 Maison Jules
Kunst in de kerk GENT
14 Amberes
Burgerveiling ANTWERPEN
15 Berg van Barmhartigheid
Juwelen en zilver
BRUSSEL
16-17 Debaveye
Kunst en antiek HARELBEKE
18 Maison des Huissiers
de Justice
Deurwaarderstukken
BRUSSEL
18-19 Coronari Auctions
Aziatische, Europese en
Islamitische Kunst NAZARETH
19 ABS Veilingen Mechelen
Deurwaarderstukken
MECHELEN
19-20 DVC
Kunst en antiek GENT
20 FW Auctions
Vente d’archeologie NAMEN
21 Amberes
Burgerveiling ANTWERPEN
21-22 Galerie Moderne
Kunst en antiek BRUSSEL
21-22 Horta
Kunst en antiek BRUSSEL
21-22 Elysée Liège
Kunst en antiek LUIK
22 Berg van Barmhartigheid
Juwelen BRUSSEL
25 Maison des Huissiers de
Justice
Deurwaarderstukken BRUSSEL
26 ABS Veilingen Mechelen
Deurwaarderstukken
MECHELEN
28 Amberes
Burgerveiling ANTWERPEN
28 Uccle Saint Job
Kunst en antiek UKKEL
MARCH
1-2 Athena
Kunst BRUSSEL
4 Maison des Huissiers
de Justice
Deurwaarderstukken BRUSSEL
5 ABS Veilingen Mechelen
Deurwaarderstukken
MECHELEN
7 Amberes
Burgerveiling ANTWERPEN
8 Berg van Barmhartigheid
Juwelen en wijn
BRUSSEL
The Netherlands
FEBRUARY
5 Van Sabben Poster
Auctions
Posters HOORN
7-11 Korst Vander Hoeff
Kunst en antiek
S-HERTOGENBOSCH
7-13 Derksen Veilingbedrijf
Kunst, antiek, design,
brocante ARNHEM
3-13 Notarishuis Arnhem
Bezorgveiling ONLINE
6-9 Van Spengen
Kunst en antiek ONLINE
7 e.v.d. Veilinghuis Omnia
Algemene kunst- en
antiekveiling KOLHAM
8-22 Venduehuis Den Haag
Classical Paintings &
Drawings ONLINE
10-12 Onder de Boompjes
Kunst en antiek LEIDEN
10-20 Notarishuis Arnhem
Ophaalveiling ONLINE
13 Veilinghuis Peerdeman
Kunst, antiek, design,
sieraden, zilver UTRECHT
22 e.v.d. Veilinghuis Omnia
Kunst en antiek
KOLHAM/HOOGEZAND
22-8/3 Venduehuis
Den Haag
Collector’s choice: European
interiors & asian arts
ONLINE
26-27 Korst Vander Hoeff
Inboedel en curiosa
S-HERTOGENBOSCH
28 Vendu Rotterdam
Algemene veiling TIMED
ONLINE AUCTION
MARCH
1-3 Veilinghuis De Jager
Kunst, antiek, juwelen en
Aziatica GOES
07-10 Venduhuis De Eland
Kunst en antiek DIEMEN
8-22 Venduehuis Den Haag
Silver, jewellery & watches
ONLINE
France
FEBRUARY
1 Ader
Online: Livres de
Photgraphies PARIS
1 Nice Enchères
Livres & BDs NICE
1 Cannes Enchères
Vente Courante PARIS
3 Thierry de Maigret
Vente Classique (Drouot)
PARIS
3 Bonhams
Montres PARIS
4 Tajan
Arts d’Asie PARIS
4 Siboni
Materiel pour Supermarche
SCEAUX
4 Tessier & Sarrou
et Associés
Souvenirs Historiques,
(Drouot) PARIS
4 Beaussant Lefèvre
Mobilier d’un Appartement
Parisien (Drouot)
PARIS
4 Ader
Orfèvrerie du XIVE (Drouot)
PARIS
4-22 Aguttes
Online Only: Design
NEUILLY
6 Rouillac
Bijoux, Montres & Orfevrerie
TOURS
7 Rouillac
Argenterie & Arts de la Table
TOURS
8 Cannes Enchères
Horlogerie & Joaillerie
PARIS
8 Siboni
Licence de Taxi Parisien
SCEAUX
9 Artcurial
Winter Sale PARIS
9 Aguttes
Montres NEUILLY
9 Libert Damien
Vente Classique (Drouot)
PARIS
9 De Baecque & Associés
Arts Premiers (Drouot) PARIS
9-10 Ader
Estampes Anciennes et
Modernes PARIS
10 Aguttes
Vente Caritative NEUILLY
10 Boisgirard-Antonini
Vente Classique NICE
10 Thierry de Maigret
Vente Classique (Drouot)
PARIS
10 Lucien Paris
Par Autorité de justice et à
divers amateurs PARIS
10-24 Aguttes
Online Only: Art
Contemporain NEUILLY
11 Daguerre
Un Appartement (Drouot)
PARIS
11 Ader
Art & Utopie (Drouot) PARIS
11 Dupont & Associés
Collection Marie Bell (Drouot)
PARIS
11 Binoche et Giquello
Art Précolombien (Drouot)
PARIS
12 Tessier & Sarrou
et Associés
Albums & Bande Dessinée
(Drouot) PARIS
12 Thierry & Lannon
Belle Vente
BREST
12 Coutau Begarie
Collection Football
PARIS
13 Siboni
Bijoux, argenterie, mobilier
SCEAUX
13 Mercier
Grande Vente Cataloguée
d’Art Classique
PARIS
14 Mercier
Belle vente de Bijoux PARIS
15 Nice Enchères
Vente collections niçoises NICE
15 Ader
Manuscrits & Lettres
PARIS
15 Boisgirard-Antonini
Estampes & Affiches
Modernes PARIS
15 Artcurial
Cent Portraits PARIS
15-1 Christie’s
Online: Oceania Now PARIS
16 Alde
Monnaies PARIS
16 Piasa
French Design PARIS
16-4 Artprecium
Online: Les aubaines
PARIS
17-28 Aguttes
Online Only: Rendez Vous
Classique NEUILLY
18 Alde
Livres anciens
PARIS
18 Binoche et Giquello
Arts Premiers (Drouot)
PARIS
19 Mercier
Grande Vente Cataloguée
d’Art du Xxe PARIS
20 Osenat
Les Ecrins de Versailles
VERSAILLES
82

Auction calendar
FEBRUARY / MARCH 2022
22 May Associés
Interieurs du Xxe PARIS
22 Boisgirard-Antonini
Arts d’Asie PARIS
22 Artcurial
Maîtres anciens & du XIXe
siècle PARIS
24 Crait + Müller
Classique & Moderne
(Drouot) PARIS
24 Sotheby’s
François & Betty Catroux
PARIS
24 Lucien Paris
Hotel Parisien PARIS
25 Osenat
L’Esprit du Xxe Siècle
FONTAINEBLEAU
25 Ader
Art d’Extreme Orient
(Drouot) PARIS
25 Coutau Begarie
Mobilier & Objets d’art
PARIS
25 Chayette Cheval
Vente Classique
STAINS
25 Cannes Enchères
Litographies PARIS
26 Strasbourg Enchères
Belle Deco & Mobilier
STRASBOURG
26 Osenat
Mobilier & Objets d’Art
VERSAILLES
26 Cannes Enchères
Art Moderne
PARIS
27 Osenat
Les interieurs de Versailles
VERSAILLES
27 Cannes Enchères
Art Contemporain
PARIS
28 Osenat
Montres VERSAILLES
6 Osenat
Art Russe VERSAILLES
7 Cornette de Saint Cyr
La Robe Noire de Didier
Ludot PARIS
8 Thierry de Maigret
Tableaux Modernes (Drouot)
PARIS
8 Artcurial
Livres & Manuscrits PARIS
8 Libert Damien
Bijoux, Argenterie & Mobilier
d’un Chateau (Drouot)
PARIS
9 iasa
Scandinavian Design PARIS
10 Lucien Paris
Intérieurs PARIS
10 Christie’s
Paul Destribats PARIS
United Kingdom
FEBRUARY
1-10 Christie’s
The Collector LONDON
2-9 Sotheby’s
Fine Watches LONDON
2-8 Sotheby’s
Original Film Posters
LONDON
3-9 Sotheby’s
The Enigma: Black Diamond
LONDON
3-10 Sotheby’s
Fine Jewels, Handbags
LONDON
9 Bonhams
Jewels (Knightsbridge)
LONDON
11 Sotheby’s
A Single Owner’s Collection
LONDON
14 Phillips
Online: My Kawaii Valentine
LONDON
22 Bonhams
Watches (Knightsbridge)
LONDON
22-23 Dreweats
Space Exploration
Photography NEWSBURY
23 Bonhams
In the Palm of Your Hand
(Knightsbridge) LONDON
23-9 Christie’s
Online: First Open: Post War
and Contemporary
MARCH
1 Christie’s
20th / 21st Centuray Art
Evening Sale LONDON
1 Dreweats
The Transport Sale
NEWSBURY
2 Christie’s
Post War and Contemporart
LONDON
2 Dreweats
Fine Clocks NEWSBURY
2 Bonhams
Travel & Exploration
(Knightsbridge) LONDON
2 Bonhams
Sir Michael Caine
(New Bond) LONDON
2-3 Sotheby’s
Modern & Contemporary
LONDON
3 Bonhams
British Cool (New Bond)
LONDON
3-4 Phillips
20th Century
& Contemporary Art
Evening Sale
LONDON
4 Christie’s
Impressionist and
Works on paper LONDON
8 Dreweats
Fine Silver, Jewellery
NEWSBURY
Germany
FEBRUARY
1 Hermann Historica
Online: Antiken,
Plakatsammlung von
Engelhardt, Alte Waffen &
Rüstungen MÜNCHEN
2-4 Hermann Historica
Schusswaffen aus fünf
Jahrhunderten MÜNCHEN
5 Auction Partners
Auktion nr 196 KÖNIGSWINTER
22 Quittenbaum
Italienisches Design, Murano
Glas MÜNCHEN
23 Nagel Auctionen
oderne & Zeitgenössische
Kunst, Design STUTTGART
23 Quittenbaum
Internationales Design
MÜNCHEN
24 Quittenbaum
Oiva Toikka - Birds, Showtime
MÜNCHEN
MARCH
7 Gorny & Mosch
Ancient Coins MÜNCHEN
8 Gorny & Mosch
Middle Age to Modern TImes
MÜNCHEN
10 Gorny & Mosch
Online: Ancient to Modern
Times MÜNCHEN
MARCH
1-10 Rouillac
Online: Affiches d’Artistes
TOURS
3 Sotheby’s
Online: Fine Jewels PARIS
4 Drouot Estimations
Montres, Bijoux, Mode PARIS
6 Rouillac
Tableaux & Dessins Modernes
TOURS
14-22 Sotheby’s
Online: Chinese Art
LONDON
15-16 Dreweats
Interiors NEWSBURY
15-16 Bonhams
The Connoisseur’s Library
Sal (Knightsbridge)
LONDON
15-25 Dreweats
Timed Online: Fine Art
NEWSBURY
9 Phillips
New Now LONDON
9 Bonhams
Jewels, British & Europan
Art (Knightsbridge)
LONDON
9 Bonhams
Modern & Contemporary
(New Bond)
LONDON
83

Auction calendar
LEAF
Limited
Edition
Art Fair
Le salon
du multiple
et de l’image
imprimée
11 13
fevrier
2022
Tickets :
www.villaempain.com
FONDATION
BOGHOSSIAN
VILLA EMPAIN
Illustration: Thomas Perino, À travers le miroir, 2018

Fair calendar
FEBRUARY / MARCH 2022
Belgium
16-22 Art Capital2022
PARIJS
24-27 UVNT Art Fair 2022
MADRID
16-25 Asia Week
NEW YORK
FEBRUARY
6 Brocante d’hiver
HERVE
10-11 filliège
LIÈGE
11-13 LEAF
BRUSSEL
23-28 World Money Fair ‘22
ONLINE
MARCH
10-13 Lille Art up!
LILLE
Sweden
FEBRUARY
7-13 Stockholm Design Week
STOCKHOLM
17-22 The Palm Beach Show
PALM SPRINGS
MARCH
10-13 Superfine
MIAMI
The Netherlands
FEBRUARY
04-05 Holland Coin Fair
DEN HAAG-NOOTDORP
France
FEBRUARY
Germany
MARCH
8-10 Düsseldorf Photo
Weekend
DÜSSELDORF
Spain
FEBRUARY
23-27 ARCOmadrid
MADRID
Switserland
MARCH
3-6 Art Genève
GENÈVE
USA
FEBRUARY
03-06 Outsider Art Fair
NEW YORK
02-06 Salon Retromobile
PARIS
23-27 ArtMadrid’22
MADRID
04-06 Fort Myers Art Fest
FORT MYERS
05-06 Salon Européen de la
Brocane et de l’Antique
STRASBOURG
11-13 BiblioMania
PARIJS
23-27 Drawing Room
MADRID
24-27 JustMad:
Contemporary art fair
MADRID
08-09 Fine Print Fair
LOS ANGELES
10-13 Intersect Palm Springs
PALM SPRINGS
RECHERCHE
D'UN TABLEAU
Peter Morrens, ‘Point Blank Press’ reeks, (1998-...)
fijne spot & milde satire in de hedendaagse kunst
met
Pascal Bernier
Sara Bjarland
Franck Bragigand
Michael Ray Charles
Leo Copers
Ronnie Cutrone
Anno Dijkstra
Maurice Droogh
Joëlle Dubois
Sacha Eckes
Hans-Peter Feldmann
Loek Grootjans
Rokni Haerizadeh
Harmen De Hoop
Folkert de Jong
Les Levine
Carine Lampens
William Ludwig Lutgens
Enrique Marty
Mat
Karl Mechnig
Peter Morrens
Jan De Nys
William Phlips
Lionel Scoccimaro
Andres Serrano
Idris Sevenans
Jo De Smedt
Walter Swennen
Zena Van den Block
Jesse Van Dun
Johan De Wit
curator Jan De Nys
Représentant la conversion de Saint-Hubert
Fernand Dresse (1916—1993)
Je recherche un tableau représentant la conversion de Saint-Hubert
peint par l’artiste carolorégien Fernand Dresse. Ce tableau de grande
taille (environ 1.5 x 0.8 m) a été réalisé au début des années 1950.
Fernand Dresse demanda à mon oncle de poser pour le personnage
du saint. En guide de remerciement, il lui offrit un portrait dont l’image
ci-jointe est une copie de celle du grand tableau.
DISKUS Diepestraat, 48 9300 AALST
open op ZA & ZO van 04—27/02/2022 tussen 14 tot 19u
Je demande que le propriétaire (privé ou public) de cette toile se fasse
connaître à la rédaction qui fera suivre. Cela me permettrait d’aller
admirer la toile à l’endroit où elle se trouve.
D’avance, merci. M. Deville
85

Museum calendar
FEBRUARY / MARCH 2022
Belgium
ANTWERPEN
FOMU
△ Masculinities:
Liberation through
Photography
t/m 13-03
△ Max Pinckers
t/m 13-04
M HKA
△ Anthea Hamilton
17-02 t/m 15-05
BRUGGE
Musea Brugge
△ It’s only a matter of
time
t/m 06-03
BRUSSELS
Art et Marges Musée
△ Dans un pli du temps
j. 13-03
Botanique
△ A Voyage into the
Moon - Mira Sanders &
Cédric Noël
j. 06.02
Design Museum
Brussels
△ CRUSH. Rencontres
inattendues entre design
et art
j. 06-03
Fine Arts Museum
△ EUROPALIA. Voies de
la modernité
j. 13-02
△ REMEDIES - Aimé
Mpane & Rachel Labastie
j. 13-02
△ To see with ellipse -
Fabrice Samyn
j. 13-02
Fondation A Stichting
△ One, two, Three, More
- Helen Levitt
j. 10-04
La Centrale
△ La Vie matérielle
j. 13-03
La Verrière
△ Buildings in Belgium,
Buildings in Oil,
Buildings in Silk -
LucyMcKenzie
j. 26-03
Musée BELvue
△ Raoul Servais. Un univers
entre magie et réalisme
j. 06-03
Musee Mode et
Dentelle
△ Brussels Touch
j. 22-05
Museum Kunst &
Geschiedenis
△ Before Time Began
t/m 29-05
Trinkhall Museum
△ Pierre De Peet et
Pascal Tassini
j. 01-02
CHARLEROI
Musée de la
Photographie
Charleroi
△ Michel Vanden
Eeckhoudt
j. 15-05
△ Soleil Noir - Gaëlle
Henkens et Roger Job
j. 15-05
△ Arbres-Troncs - Zoé
Van der Haegen
j. 15-05
△ Melanie De Biasio
j. 15-05
△ Danielle Rombaut
j. 15-05
FLÉMALLE
Centre wallon d’Art
contemporain – La
Châtaigneraie
△ J’ai rendez-vous avec
elles
j. 13-03
GENT
Design Museum
△ 10 jaar Muller Van
Severen
t/m 06-03
Kunsthal Gent
△ Subtle Matter Fluid
Hands - Maika Garnica
t/m 20-02
Museum Dr. Guislain
△ Circonstances. Fernand
Deligny
t/m 29-05
△ Circonstances -
Fernand Deligny
t/m 29-05
S.M.A.K.
△ POPART van Warhol
tot Panamarenko Uit de
Collectie Matthys-Colle
& S.M.A.K.
t/m 08-05
GRAND-HORNU
CID
△ Cosmos. Design from
here and beyond
t/m 27-02
GRIMBERGEN
Cultuurcentrum
Strombeek
△ Sunny Afternoon -
Rirkrit Tiravanija
18-02 t/m 30/04
HASSELT
Cultuurcentrum
Hasselt
△ Japanse kinderen -
Osamu Yokonami
t/m 06-03
△ The night is like snow
(Notte come neve) -
Peter H. Waterschoot
t/m 06-03
△ When the water clouded
over - Michael Dans
t/m 06-03
HORNU
Centre d’innovation
et de design au
Grand-Hornu
△ Cosmos- Design d’ici
et au-delà
j. 27-02
MACS
△ Gaillard & Claude. A
Certain Decade - Aline
Bouvy. Cruising Bye
27-02 au 18-09
LA LOUVIÈRE
Keramis - Centre de
la Céramique de la
Fédération Wallonie-
Bruxelles (asbl)
△ Grande Ourse - Alice
Lothon
j. 13-03
△ parcours dans les
collections: Raconte-moi
Boch
j. 13-03
△ À quoi ça tient? -
Camille Nicolle
j. 13-03
△ Les collections de
Verviers à Keramis
j. 28-08
MIIL
△ Zoonose
11-02 au 26-03
LEUVEN
M Museum
△ Richard Long
t/m 20-03
△ L’heure de la Soupe -
Alexis Gautier
t/m 20-03
△ Prendre le temps
t/m 23-04-2023
LIÈGE
La Boverie
△ Inside Magritte
j. 06-03
△ Charles Szymkowicz, le
monde et l’intime
j. 06-03
MECHELEN
Kazerne Dossin
△ Universal Human
Rights. Why they matter
09-02 t/m 11-12
Museum Hof van
Busleyden
△ Uitbundig Verleden.
De Bourgondiërs door
Romantische ogen
t/m 27-02
Museum Hof van
Busleyden/De Garage
△ Comment Tuer L’amant
de Sa Femme Quand
on a Été Élevé Comme
Moi Dans la Tradition -
Michiel Ceulers
j. 20-02
MORLANWELZ
Musée Royal de
Mariemont
△ Le Mysthère Mithra.
Plongée au coeur d’un
culte romain
t/m 17-04
NAMUR
Centre culturel de
Namur - Abattoirs de
Bomel
△ Rouge Bleu. Parole de
la matière
j. 06-03
Musée Félicien Rops
△ Dans les yeux de Van
Gogh. L’Empreinte
des artistes belges sur
Vincent Van Gogh
j. 20-03
SINT-MARTENS LATEM
Museum Dhondt-
Dhaenens
△ untitled 2018 (the
infinite dimensions
of smallness) - Rirkrit
Tiravanija
t/m 31-05
TERVUREN
Africa Museum
△ Menselijke Zoo Humain
t/m 06-03
△ Mensentuin - Koloniale
tentoonstellingen
wereldwijd
t/m 06-03
TOURNAI
Musée des Beaux-
Arts de Tournai
△ Toute une histoire,
regard sur les collections
#3
j. 02-2023
86

Gallery calendar
FEBRUARY / MARCH 2022
Belgium
AALST
DISKUS
△ Fijne spot & milde
satire in de hedendaagse
kunst
04-02 t/m 27-02
ANTWERPEN
Tim Van Laere Gallery
△ Swim the Mountains
Climb the Sea
t/m 19-02
Coppejans Gallery
△ Archief 2022 -
Denmark, Nico Dockx,
Jan Henderikse, Wim
Nival, Laurence Petrone
t/m 12-02
De Zwarte Panter
△ Tabula Rasa - Kiro Urdin
03-02 t/m 10-04
△ Alles stroomt - Frieda
Van Dun
03-02 t/m 10-04
Galerie Art Forum
△ Christian De Wulf, Jaak
Hillen
t/m 30-03
Nadya Kotova Gallery
△ Epic Sentiment by
Oleg Maslov
t/m 12-03
Rossaert
△ Historie van de film in
de Rosaaert
t/m 27-03
Stieglitz 19
△ Champu - Vincent
Delbrouck
t/m 26-02
Zeno X Gallery
△ Placenta Saturninr
Bercal - Anne-Mie Van
Kerckhoven
t/m 26-03
ASSE
De Ziener
△ Norman Dilworth. I
seek and sometimes
I find
t/m 06-03
BRUSSELS
Aliénor Prouvost
△ L’énergie du geste,
la force de la couleur-
Gérard Schneider
j. 26-02
Almine Rech
△ Time and Again -
Jean-Baptiste Bernadet
j. 26-02
Ballon Rouge
△ Carlotta Bailly-Borg
j. 19-02
Belgian Gallery
△ Peau nue - Manu vb
Tintoré
j. 24-02
Bernier Eliades Gallery
△ Animal Farm - Dionisis
Kavallieratos, Bharti
Kher, Jonathan Meese,
Susan Rothenberg, Boyd
Webb, Marnie Weber,
Robert Wilson, Hugue
De Wurstemberger
j. 10-03
Bruno Matthys Gallery
△ Féroce - Nicolas Cluzel
j. 19-02
Brussels Expo
△ Antoine de Saint-
Exupéry. Le Petit Prince
parmi les Hommes
25-02 au 30-06
Chapitre XII
△ Pierre Bernard. Les
neurones miroirs
05-02 au 12-03
CLEARING
△ Neïl Beloufa
j. 05-03
Dauwens & Beernaert
Gallery
△ Combiticket - Karl Philips
j. 28-03
Deodato Art
△ Andy Warhol : ICON
ICON ICON
j. 12-03
Dvir Gallery
△ Conversation - Miroslaw
Balka, Yudith Levin
j. 19-02
Esther Verhaeghe Art
Concepts
△ Space Oddities -
Sabine Tress
j. 12-02
Fondation Thalie
△ Inner Bodies - Kiki
Smith
j. 01-05
Galerie de la
Beraudière
△ Germaine Richier & La
Couleur
j. 29-04
Galerie Deletaille
△ Natures Mortes -
Living Country
11-02 au 02-04
Galerie DYS
△ Salt ‘n Paper - Oeuvres
sur papier de Abel
Burger, Kate Lyddon,
Maldo Nollimerg,
Simone Pellegrini
j. 13-02
Galerie Faider
△ Zhu Tian Meng -
recent works
j. 19-02
Galerie mhaata
△ Promontoires du
silence - Didier Goupy
j. 20-03
Galerie Nathalie
Obadia
△ Agnès Varda - Calder,
Richier, Schlegel, Székely
par Agnès Varda
j. 05-03
Gallery Sofie Van den
Bussche
△ Brothers forever -
Koen Muller en Rik
Vermeersch
j. 20-02
Hangar
△ In the Shadow of Trees
j. 26-03
Husk Gallery
△ Shifting Places - Jan Valik
j. 26-02
Irène Laub Gallery
△ Stijn Cole. Souvenirs
j. 19-02
La maison commune
△ HOPE
17-02 au 12-03
Le Botanique
△ The Phenomenal
Park - Tmm Lab’, Mira
Sanders & Cédric Noël
j. 06-02
le salon d’art
△ Lotus in mud - Koyuki
Kazahaya
j. 05-03
l’Enfant Sauvage
△ Mélanie Patris - Quetin
Yvelin - Pauline Caplet
j. 20-02
LKFF
△ bij mijn venster - à ma
fenêtre
j. 13-03
Macadam Gallery
△ Raw & Flow - David
Moreno
j. 06-02
Marie-Laure Fleisch
△ Eloge de la ligne -
Safaa Erruas, Katharina
Hinsberg
j. 26-02
Maruani Mercier
△ Herman Nitsch
j. 12-02
Melissa Ansel
△ Un fil d’or me sépare
de toi. Laurent David,
Charlotte Marchand,
Hélène Picard
j. 27-02
Mendes Wood DM
△ Neïl Beloufa
j. 10-04
Michèle Schoonjans
Gallery
△ Curtain Walls - Améli
Scotta
j. 26-02
Modesti Perdriolle
Gallery
△ The Spring of the
Ancestors - Paban Das
Baul, Charley Case,
Mayur and Tushard
Vayeda
j. 26-02
Pierre Marie Giraud
△ Life - Jos Devriendt
j. 26-02
Rodolphe Janssen
△ Next time you see me,
it won’t be me - Tom
Poelmans
j. 12-03
Super Dakota
△ Ecosystems of
Relations
j. 19-02
Templon
△ Ed & Nancy Kienholz
j. 26-02
Xavier Hufkens
△ Joy & Rain - Rachel
Eulena Williams
j. 19-02
GENK
Uitstalling Art Gallery
△ Colbert Mashile. Kua
Le Kua (There and There)
t/m 27-03
HERENTALS
pop-up Gallery
Aspalathos
△ Kijk - Pierre François
18-02 t/m 06-03
HINGENE
Den Heeck
△ Wim Maes -
eenmanstentoonstelling
13-02 t/m 10-04
KNOKKE-HEIST
Maurice Verbaet
△ The Path to Purity.
Works from the Sixties -
René Guiette (1893-1976)
t/m 28-02
NAMUR
Galerie Détour
△ Souffles d’Ardoises -
Anne Jones
j. 05-02
OOSTEEKLO
Galerie William
Wauters
△ Winter 21-22 - Karel
Dierickx, Paul Van
Gysegem, Yvan Theys,
Jos Verdegem
t/m 20-02
OUDENAARDE
Koninklijke Academie
voor Beeldende Kunst
Oudenaarde
△ Transferida - Babi
Avelino
t/m 26-03
OUDENBURG
De 11 Lijnen
△ Sturtevant & Tina
Braegger - Curiosity
Killed the Cat
t/m 26-02
TOURNAI
Rasson Art Gallery
△ Koen Vanmechelen
- Marc Lagrange -
Emmanuel Barcilon
j. 26-02
WIJNEGEM
Axel Vervoordt
△ Chaos & Order -
Group exhibition
t/m 21-05
WORTEGEM-PETEGEM
Verduyn Gallery
△ Light and Fragility -
Tania Font, Viani, Nadine
Callebaut
t/m 27-02
87

Chambre Royale Belgo –
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Hauwere (belge, vers 1930, scènes de
Bruxelles) courriel : l.rodembourg@
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Pierre Otto Bauer (1897-1982?) et sur
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Yper Museum en 2022 à l’occasion du
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l’artiste Louise De Hem, nous demandons
aux propriétaires d’œuvres/
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le conservateur Jan Dewilde (janv.
dewilde@ieper.be - Tél. 057/23.94.50).
Toutes les informations seront traitées
avec la discrétion nécessaire.
Guy Poelvoorde cherche des tableaux
de l’école de Bruges, l’école Irlandaise,
Paul Permeke, Paul Klein, Gaston
Bogaert, des chiens et des chevaux.
tél 0475/39.34.98 www.guyart.com
La famille de l’artiste est à la
recherche d’œuvres de l’artiste Renée
Demeester, issues de collections
privées, pour illustrer son prochain
catalogue monographique. Merci de
contacter son neveu Paul Gonze par
email : paul.gonze@gmail.com ou par
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Albert Dupuis (1923-2010) pour une
prochaine exposition et catalogue
au Musée Charlier. Contact : Michèle
Schoonjans de la fondation F.A.D.
- gsm: 0478 71 62 96 ou courriel
michele@micheleschoonjans.be of
mailto:fondation.albert.dupuis.2010@
gmail.com
Renseignements : 09 216 20 20 ou collect@ips.be
89

Saddle blanket, 2020, gevilt wol, 42 x 40 x 42 cm © photo : Mathijs Labadie.
48
Christien Meindertsma faisait
partie des ambassadeurs de la
récente Dutch Design Week et
s’est rendue entretemps à Londres
pour la remise de l’Earthshot Prize,
trophée qu’elle a créé à la demande
du prince William. Même si ses
professeurs à la Dutch Design
Academy n’ont pas immédiatement
compris son œuvre, celle-ci
est désormais incluse dans les
plus prestigieuses collections
institutionnelles.
TEXTE : ELIEN HAENTJENS
du commun, où la recherche de l’origine
des matériaux occupe une place centrale.
Lorsque, en 2004, elle achève ses études par
la publication du livre Checked Baggage (où
elle documentait le contenu d’un container
confisqué par la douane, ndlr), elle est
considérée comme une brebis galeuse. Ses
professeurs de la Design Academy d’Eindhoven,
parmi lesquels Hella Jongerius, n’y
ont d’abord rien compris. Depuis, toute
une génération de créateurs, notamment
à Eindhoven, a suivi cette approche d’un
design basé sur la recherche et ses œuvres
Pigeon Service, 2015. © photo : Mathijs Labadie.
font désormais partie des collections du
Museum of Modern Art de New York, du
Victoria & Albert Museum de Londres
et du Vitra Design Museum de Weil-am-
Rhein. Dans un de ses premiers projets,
Pig 05049 (2007), la créatrice a par exemple
étudié ce que l’on fabrique au départ d’un
seul cochon. En dehors de produits triviaux,
son livre relevait : des médicaments,
du papier photographique, des cigarettes
ou de l’après-shampooing. Dans un projet
ultérieur, elle s’est plongée plus avant dans
l’histoire du cochon aux Pays-Bas, en Belgique
et en France : « Ce projet a débuté
avec des lampes créées pour la marque
néerlandaise de design Thomas Eyck, en
collaboration avec la corderie Steenbergen.
Comme, en un rien de temps, de nombreuses
copies plus abordables inondèrent
le marché et que j’attache beaucoup
d’importance à la traçabilité des matériaux,
j’ai recherché l’origine du matériau
de base. N’y étant pas parvenue, j’ai décidé
de remonter jusqu’au producteur. Je me
suis donc rendue en Belgique et comme la
récolte de lin menaçait d’être vendue à un
acheteur chinois, pour revenir ensuite ici
sous la forme de produits bon marché, je
l’ai acquise moi-même. Ce projet a pris une
telle ampleur qu’ avec ce matériau j’ai dû
inventer d’autres produits ».
SOUS LE CHARME DU LIN
« Quelques années plus tard, le musée
Texture de Courtrai m’a commandé un
revêtement mural à réaliser en collabora-
Flax Field, 2019, vlas, 200 x 300 cm. Courtesy Friedman Benda et Christien Meindertsma. © photo : Daniel Kukla
tion avec Jos Vanneste, entreprise belge
spécialisée dans la filature et le tuffetage
manuel de tapis. Lorsque j’ai découvert
une photographie historique d’un bâtiment
ayant servi, pendant la Première
Guerre mondiale, de prison pour pigeons
(les Allemands pensaient que les pigeons
transportaient des messages destinés
à l’Angleterre, ndlr), j’ai tenté une autre
approche. C’est ainsi qu’est né Pigeon
Service (2015). Avec Jos Vanneste, j’ai
inventé une étoffe de lin tuffeté qui imite
l’éclat des plumes de pigeon. En même
temps, chaque pigeon a reçu une étiquette
personnalisée et cachée indiquant le
cheminement du fil, par exemple ‘‘Belgique-Inde-Belgique’’.
Tels des pigeons
voyageurs, après traitement de nombreux
matériaux reviennent dans leur pays d’origine.
J’ai en outre souhaité rendre visible
49
« Nous sommes
également matière »
Christien Meindertsma
hristien Meindertsma n’a que
faire du mobilier tape-à-l’œil,
fabriqué industriellement. Ces
C15 dernières années, la créatrice
néerlandaise a effectué un parcours hors
Met verhalende projecten en installaties
bewandelt Christien Meindertsma de dunne
grens tussen kunst en design.
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Jules Wabbes (Brussels,
1919-1974), round table,
wenge end grain wood
and bronze. Belgium,
ca. 1961. Manufactured
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H 74 x Diam 178 cm.
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Fondée en 1919, la ROCAD – Belgian Royal Chamber of Art Dealers – est
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