MINES AU MALI - Jeune Afrique
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ÉMILIE RÉGNIER POUR J.A.<br />
LE PLUS<br />
DE JEUNE AFRIQUE <strong>MALI</strong><br />
Sur le nouvel<br />
échangeur<br />
de Bamako.<br />
En route pour 2012<br />
Le second mandat du chef de lʼÉtat sʼachève dans dix-huit mois<br />
et, déjà, les esprits se concentrent sur la prochaine échéance<br />
électorale. Pourtant, dʼici là, des questions majeures figurent<br />
dans lʼagenda politique : réforme des institutions, débat sur le<br />
futur code de la personne et de la famille...
LE PLUS<br />
DE JEUNE AFRIQUE<br />
PANORAMA<br />
Les années ATT p. 68<br />
DIPLOMATIE<br />
Un poison nommé Aqmi p. 73<br />
POLITIQUE<br />
La bataille de 2012 p. 74<br />
PORTRAITS<br />
Incontournables<br />
et présidentiables p. 76<br />
Une nouvelle génération<br />
de leaders p. 78<br />
ÉCONOMIE<br />
Lʼâge dʼor des patrons p. 80<br />
INTERVIEW<br />
Ibrahim Diawara,<br />
PDG du groupe Ibi p. 83<br />
AGRICULTURE<br />
Direction: Danielle Ben Yahmed<br />
et Marwane Ben Yahmed<br />
Rédaction en chef: Cécile Manciaux<br />
e<br />
Les investissements gagnent<br />
du terrain p. 90<br />
Rédaction: Cherif Ouazani et Marianne Meunier,<br />
envoyés spéciaux, Mahamadou Camara, à Bamako,<br />
Pierre-François Naudé<br />
Coordination: Balla Moussa Keita<br />
Difcom, 57 bis, rue d’Auteuil 75016 Paris<br />
Tél.: +33 1 44 30 19 60 Fax: +33 1 45 20 08 23<br />
PRÉLUDE<br />
CHERIF OUAZANI<br />
Soldats<br />
de la République<br />
LE PLUS<br />
LES CÉLÉBRATIONS, LE 22 SEPTEMBRE, du cinquantenaire de l’indépendance<br />
du Mali ont été particulièrement fastueuses : bals populaires et<br />
concerts, banquets offi ciels au palais de Koulouba et riz géants dans les<br />
quartiers, balafons et chrysanthèmes, le tout partagé avec les pays voisins<br />
et amis qui ont dépêché chefs d’État pour certains, hauts fonctionnaires<br />
pour d’autres.<br />
Mais, de toutes ces festivités, seule la parade militaire restera dans les<br />
mémoires. Pour deux raisons. D’une part, c’est la première fois depuis<br />
l’indépendance que l’armée malienne organise un tel défi lé, et, d’autre<br />
part, au moment même où les bottes des soldats de l’infanterie battaient<br />
le bitume de l’avenue de l’Indépendance à Bamako, une armée étrangère,<br />
mauritanienne en l’occurrence, affrontait en territoire malien (à<br />
Raz-el-Ma, à 235 kilomètres à l’ouest de Tombouctou) une colonne de<br />
combattants salafi stes. Deux motifs qui ont rendu plus attrayant le défi lé<br />
du 22 septembre.<br />
Les principales curiosités ? L’aviation et les blindés, indispensables<br />
pour la guerre qui se profile : celle contre Al-Qaïda au Maghreb islamique<br />
(Aqmi). On a donc vu voler deux vieux avions de combat Mig-21, trois<br />
avions-cargos Iliouchine et quatre hélicoptères MI24. Quant aux blindés,<br />
pour épargner l’asphalte fraîchement posé, les T34 ont été embarqués sur<br />
des porte-chars.<br />
Dans la tribune réservée aux VIP, un homme d’affaires raille son voisin<br />
qui a du mal à cacher sa fi erté devant l’étalage de la puissance de feu de<br />
l’armée malienne : « S’ils avaient peur d’endommager le bitume, pourquoi<br />
n’ont-ils pas utilisé des patins sur les chenilles? Là on aurait eu l’occasion<br />
de savoir si ces blindés sont toujours opérationnels. » La provocation ne<br />
déstabilise pas son interlocuteur, qui lui répond, sans quitter des yeux la<br />
parade : « Quand bien même elle serait sous-équipée par rapport aux autres<br />
armées de la région, la nôtre a une vertu rare sur notre continent : elle est<br />
républicaine. »<br />
Il est vrai qu’elle se mêle rarement de politique et qu’elle est au service et<br />
aux ordres de l’institution suprême : la présidence de la République. ■<br />
67
68 LE PLUS <strong>MALI</strong><br />
Cité comme modèle de<br />
démocratie dans la<br />
sous-région et sur le<br />
continent, le Mali a<br />
transformé son capital<br />
sympathie en admiration<br />
grâce à ses progrès économiques<br />
et sociaux. Cette mutation est le fait du<br />
président Amadou Toumani Touré, ATT<br />
pour ses compatriotes. Nul opposant,<br />
même parmi ses adversaires les plus<br />
tenaces, ne saurait contester les bienfaits<br />
de ses choix politiques (consensus<br />
et dialogue permanent) et de sa stratégie<br />
de développement.<br />
Rival malheureux du chef de l’État<br />
en 2002 et en 2007, Ibrahim Boubacar<br />
Keïta (IBK, voir p. 76), ancien Premier<br />
ministre d’Alpha Oumar Konaré<br />
et patron du Rassemblement pour le<br />
Mali (RPM, troisième force politique<br />
du pays), le concède volontiers. « Les<br />
avancées enregistrées par notre pays<br />
sont indéniables, dit-il, et notre satisfaction<br />
est double. D’une part, nous<br />
sommes heureux pour le Mali. D’autre<br />
part, si le mérite en revient au président<br />
de la République, notre décision<br />
de l’accompagner durant ses deux man-<br />
2002-2010<br />
LESANNÉES<br />
LES ANNÉES<br />
ATT<br />
Dynamisme économique, chantiers tous azimuts, progrès sociaux<br />
et sanitaires, respect de la démocratie... Le bilan dʼAmadou<br />
Toumani Touré est plutôt positif. Même ses détracteurs le<br />
concèdent. Parmi ses derniers défis: réorganiser les institutions<br />
et faire adopter un code de la personne et de la famille.<br />
CHERIF OUAZANI, envoyé spécial<br />
dats nous gratifie d’une part de responsabilité<br />
dans l’œuvre accomplie. » De<br />
bonne guerre…<br />
UN PRAGMATISME PAYANT<br />
Les performances d’ATT sont d’autant<br />
plus méritoires qu’elles ont été réalisées<br />
dans une conjoncture internationale<br />
des plus défavorables. Trois mois<br />
après son investiture, le 8 juin 2002,<br />
une crise durable frappe de<br />
plein fouet la Côte d’Ivoire<br />
et le port d’Abidjan, par<br />
où transitent plus de 80 %<br />
des échanges extérieurs<br />
du Mali. Jamais le pays<br />
n’a paru aussi enclavé. Les<br />
recettes douanières, principal<br />
pourvoyeur du Trésor public, chutent<br />
de manière vertigineuse, le coût<br />
des importations s’envole et les produits<br />
maliens à l’export sont de moins<br />
en moins compétitifs.<br />
Mais à quelque chose malheur est<br />
bon. ATT lance alors un ambitieux<br />
programme d’infrastructures routières.<br />
Huit ans et 800 milliards de F CFA<br />
(plus de 1,2 milliard d’euros) plus tard,<br />
Bamako se trouve relié par voie ter-<br />
restre aux quatre autres ports en eau<br />
profonde d’<strong>Afrique</strong> de l’Ouest : Dakar,<br />
au Sénégal (par voie ferroviaire, à la<br />
suite de la réhabilitation du Transrail);<br />
Lomé, au Togo; Cotonou, au Bénin; et<br />
Takoradi, au Ghana. Le marché malien<br />
a atteint un tel seuil de rentabilité que<br />
les administrations de ces différents<br />
ports ont jugé utile d’ouvrir des représentations<br />
commerciales à Bamako.<br />
Mieux : la concurrence féroce qu’elles<br />
se livrent pour arracher plus de parts<br />
de marché s’affi che sur les panneaux<br />
publicitaires le long des boulevards et<br />
avenues de la capitale malienne.<br />
La crise ivoirienne ne sera pas le seul<br />
obstacle pour le président Touré. Il lui<br />
faudra aussi affronter l’envolée des<br />
cours pétroliers, couplée à un effondrement<br />
des prix du coton (premier poste<br />
de recettes en devises avec près de<br />
400000 tonnes exportées en 2003), et,<br />
À l’agenda de 2011 : une<br />
nouvelle Constitution pour<br />
moderniser les institutions.<br />
depuis 2007, la crise fi nancière internationale,<br />
sévèrement accentuée par un<br />
euro fort (sur lequel est indexé le franc<br />
CFA) qui pénalise les exportations et<br />
atténue les performances minières du<br />
pays, notamment la production aurifère<br />
(voir p. 90).<br />
À la complexité de la conjoncture économique<br />
internationale se sont additionnés<br />
des obstacles internes: une réapparition<br />
de l’irrédentisme touareg, sous la<br />
JEUNE AFRIQUE N° 2597 • DU 17 <strong>AU</strong> 23 OCTOBRE 2010
forme d’une rébellion armée, en 2006,<br />
et une sérieuse menace salafiste (voir<br />
p. 73) depuis qu’Al-Qaïda au Maghreb<br />
islamique (Aqmi) a jeté son dévolu sur<br />
le septentrion malien pour y installer<br />
un Tora Bora dans le Sahel. Au grand<br />
dam de la classe politique, qui a appelé<br />
à la solution militaire pour éradiquer la<br />
rébellion touarègue, ATT a privilégié<br />
la voie du dialogue en obtenant une<br />
médiation algérienne avec le succès que<br />
JEUNE AFRIQUE N° 2597 • DU 17 <strong>AU</strong> 23 OCTOBRE 2010<br />
l’on sait. Quant au problème salafi ste,<br />
il s’agit d’un phénomène transnational<br />
qui mérite une réponse régionale, voire<br />
internationale, et dépasse les capacités<br />
du seul État malien. ATT (et, cela aussi,<br />
nul ne pourra le contester) fut le premier<br />
à tirer la sonnette d’alarme en appelant,<br />
dès septembre 2007, à la tenue d’un sommet<br />
régional sur la question. En vain.<br />
« Malgré toutes ces difficultés, explique<br />
le Premier ministre, Modibo Sidibé,<br />
Élu en<br />
mai 2002,<br />
le chef<br />
de l’État<br />
achèvera<br />
son second<br />
et dernier<br />
mandat<br />
en 2012.<br />
DENIS/REA<br />
LE PLUS<br />
le Mali est le seul pays de la région à<br />
satisfaire aux critères de convergence<br />
de l’Union économique et monétaire<br />
ouest-africaine [UEMOA]. Ce résultat<br />
est le fruit d’un habile dosage entre<br />
la prudence d’une gestion des grands<br />
équilibres fi nanciers et la témérité d’une<br />
stratégie d’investissements publics dans<br />
les infrastructures de base et l’amélioration<br />
du climat des affaires. »<br />
Et nul n’en voudra à ATT d’avoir promis<br />
dans son Programme de développement<br />
économique et social (PDES, plan<br />
quinquennal qui lui a servi d’argument<br />
électoral en 2007) une croissance économique<br />
annuelle de 7 %, alors que le<br />
PIB ne devrait croître que de<br />
quelque 5 % en 2010, contre<br />
4,4 % en 2009. D’ailleurs,<br />
malgré les difficultés citées<br />
plus haut, la croissance enregistrée<br />
par le Mali est la plus<br />
forte des quinze pays membres<br />
de la Communauté économique<br />
des États de l’<strong>Afrique</strong><br />
de l’Ouest (Cedeao).<br />
« LA GRÂCE DU DÉVELOPPEMENT »<br />
À moins de dix-huit mois de la fi n de<br />
son second et dernier mandat, le président<br />
Touré pourrait s’endormir sur ses<br />
lauriers après les travaux accomplis. Il y<br />
a bien sûr la transformation de Bamako<br />
en capitale moderne, avec ses larges<br />
avenues, ses centres commerciaux, sa<br />
nouvelle cité administrative, son parc<br />
d’attractions et de loisirs, l’élargissement<br />
de son réseau de distribution<br />
d’eau potable et d’évacuation des eaux<br />
usées… La « grâce du développement »,<br />
comme le formule Choguel Maïga, président<br />
du Mouvement patriotique pour<br />
le renouveau (MPR, se réclamant de<br />
Moussa Traoré, renversé par ATT en<br />
mars 1991), touche, outre le district de<br />
Bamako, les huit régions du pays.<br />
De la sablonneuse Nioro du Sahel<br />
à la populeuse Sikasso, de Ménaka à<br />
Kéniéba, aucune partie de l’immense<br />
Mali (plus de deux fois la superficie<br />
de la France) n’a été oubliée par l’opération<br />
développement tous azimuts.<br />
Les chantiers sont partout, et même<br />
les ruraux ont pris l’habitude de se<br />
mouvoir au milieu de gros engins de<br />
travaux publics. Les capacités de production<br />
énergétique ont été triplées,<br />
passant de 200 à 600 mégawatts, le<br />
taux d’électrifi cation est passé de 21 %<br />
en 2002 à 28 % en 2010. Les villages<br />
les plus reculés sont aujourd’hui desservis<br />
par des routes bitumées, pour<br />
69
70 LE PLUS <strong>MALI</strong><br />
les plus chanceux, ou par des pistes en<br />
latérite. Du coup, la production agricole,<br />
dynamisée par un nouveau cadre<br />
juridique (voir pp. 90-91), accède bien<br />
plus facilement aux milliers de marchés<br />
du pays, où elle s’écoule grâce<br />
à des circuits de commercialisation<br />
devenus fl uides.<br />
RÉVISION CONSTITUTIONNELLE<br />
POUR LA BONNE C<strong>AU</strong>SE<br />
Mais ces performances économiques<br />
semblent insuffisantes aux yeux<br />
d’ATT et face à son ambition pour le<br />
pays. Son credo, pour le temps qu’il lui<br />
reste à passer au palais de Koulouba,<br />
est de « consolider le socle démocratique<br />
pour mieux asseoir le développement<br />
économique ». Ainsi, il a chargé<br />
Daba Diawara, ancien ministre de la<br />
Fonction publique, de piloter le Comité<br />
d’appui aux réformes institutionnelles<br />
(Cari), avec pour objectif de dépoussiérer<br />
les textes fondamentaux, dont la<br />
Constitution de février 1992.<br />
Pas question de revoir son article 30,<br />
qui limite à deux le nombre de mandats<br />
présidentiels et l’empêche de se<br />
représenter en 2012. En revanche, la<br />
pyramide institutionnelle devrait être<br />
revue, avec l’introduction d’une chambre<br />
haute (Sénat) au sein du Parlement,<br />
la création d’une Cour des comptes afin<br />
de rationaliser la dépense publique, et<br />
une meilleure répartition des compétences<br />
et attributions entre l’exécutif,<br />
le législatif et le judiciaire.<br />
Autre défi inscrit à l’agenda politique<br />
de 2011 : le code de la personne et de<br />
la famille – adopté l’an dernier, mais<br />
QUELQUES REPÈRES ET INDICATEURS COMPARÉS, DE 2002 À 2010<br />
M<strong>AU</strong>RITANIE<br />
SÉN. M<strong>AU</strong>RITANIE<br />
<strong>MALI</strong><br />
Tombouctou<br />
Tom<br />
Gao<br />
Koulikoro<br />
Bamako Ségou<br />
BURKINA<br />
Sikasso FASO<br />
GUINÉE<br />
CÔTE<br />
D’IVOIRE GHANA<br />
BÉNIN<br />
resté non promulgué compte tenu du<br />
tollé et des nombreuses manifestations<br />
qu’il avait provoqués. La confrontation<br />
entre modernistes et conservateurs<br />
autour de ce projet de loi aurait pu<br />
amener ATT à passer la patate chaude<br />
à son successeur. Mais cela ne lui ressemble<br />
pas. « Je mènerai à son terme<br />
300 km<br />
ALGÉRIE<br />
NIGER<br />
Un PIB multiplié par trois en huit ans<br />
(En milliards de dollars, en prix courants)<br />
8,8 9 9,1<br />
3,2 4,2 5 5,5 6,1<br />
7,2<br />
Taux de croissance<br />
(en %, évolution du PIB en prix constants)<br />
7,6<br />
6,1<br />
4,3<br />
5,3<br />
4,3 5 4,4 5,1<br />
2,3<br />
2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010*<br />
*Estimation SOURCES:<br />
L’ÉCOLE EN VOIE DE GUÉRISON ?<br />
LE <strong>MALI</strong> A, DE TOUT TEMPS, eu mal à son école.<br />
La situation s’est aggravée depuis la révolution de<br />
mars 1991 qui a emporté le régime de Moussa Traoré.<br />
L’ère démocratique fut propice à la revendication syndicale,<br />
d’autant que, au milieu des années 1990, le plan<br />
d’ajustement structurel du Fonds monétaire international<br />
(FMI) a accentué le mal-être des enseignants,<br />
fragilisé leur statut et fortement réduit leur pouvoir<br />
d’achat. Résultat: une lente dégradation de la qualité<br />
de l’enseignement, des années scolaires mises en péril<br />
par la multiplication des grèves et débrayages à tous<br />
les échelons, du primaire au supérieur.<br />
En décembre 2008, sur instruction du président ATT,<br />
le Premier ministre Modibo Sidibé organisa le Forum<br />
national de l’éducation, qui réunit tous les acteurs du<br />
secteur, avec la participation du monde économique et<br />
de la société civile. Depuis, des réunions périodiques<br />
regroupent les partenaires du dialogue autour de l’éco-<br />
PNUD - BANQUE MONDIALE - FMI, OCTOBRE 2010<br />
Superficie<br />
1240190 km 2<br />
Population<br />
13,4 millions d’hab.<br />
(11,7 millions en 2002),<br />
dont 32,1 % d’urbains<br />
(28,9 % en 2002)<br />
Espérance de vie<br />
54,8 ans (45,4 ans en 2002)<br />
Taux d’alphabétisation<br />
26,2 % (22,85 % en 2002)<br />
Indice de développement<br />
humain (IDH)<br />
0,371, soit le 178 e rang sur<br />
182 pays (0,352 en 2002, soit<br />
le 173 e rang sur 177 pays)<br />
PIB par habitant<br />
657,50 dollars<br />
(274,60 dollars en 2002)<br />
Infl ation 2,1 %<br />
(4,9 % en 2002)<br />
Monnaie Franc CFA<br />
Parité au 1.10.2010 :<br />
1 euro = 655,96 F CFA,<br />
1 dollar = 467,03 F CFA<br />
cette bataille, car il y va de l’avenir du<br />
Mali », affi rme-t-il sur un ton déterminé.<br />
ATT va donc quitter Koulouba en<br />
laissant au pays de nombreuses réalisations<br />
économiques, certes. Il devra<br />
aussi lui faire adopter une nouvelle<br />
Constitution et un code de la personne<br />
et de la famille. ■<br />
le. La pluralité des interlocuteurs syndicaux est réglée<br />
par la mise en place de regroupements: la Fédération<br />
de l’éducation nationale (FEN) pour le primaire, la Coordination<br />
des syndicats de l’enseignement secondaire<br />
(Coses) et la Fédération de l’éducation nationale, des<br />
sports, des arts, de la recherche et de la culture (Fenarec)<br />
pour le supérieur et la recherche. Outre la satisfaction<br />
de certaines revendications salariales (hausse de<br />
5 % des revenus de la fonction publique, revalorisations<br />
salariales de 7 000 F CFA [10,70 euros] pour les 32500<br />
instituteurs et de 10000 F CFA pour les 7000 professeurs<br />
de lycée), les syndicats ont pu obtenir l’intégration des<br />
enseignants contractuels et, surtout, la création du<br />
Conseil supérieur de l’éducation, un cadre de dialogue<br />
permanent. Ces dispositions n’ont certes pas aplani<br />
tous les problèmes de l’école malienne, mais elles ont<br />
contribué à apaiser les menaces d’année blanche qui<br />
planaient sur chaque rentrée scolaire. ■ CH.O.<br />
JEUNE AFRIQUE N° 2597 • DU 17 <strong>AU</strong> 23 OCTOBRE 2010
PUBLI-INFORMATION<br />
Le Ministèredel’Agriculture<br />
se donne les moyens<br />
pour une agriculturedepointe<br />
Le Projet pour le Développement Économique et<br />
Social (PDES) qui est le contrat social proposé par<br />
Son Excellence, Monsieur Amadou Toumani Touré,<br />
Président de la République, Chef de l'État, au peuple<br />
malien, la veille des élections présidentielles 2007,<br />
vise àassurer une croissance économique forte et<br />
soutenue destinée àcréer des opportunités d’emplois<br />
et de richesse pour le pays. Un plan d’action<br />
s’en est suivi pour traduireenactions concrètes,<br />
les orientations définies par le PDES, la Lettrede<br />
Cadrage du Président de la République et la Déclaration<br />
de Politique Générale (DPG) du Premier Ministre.<br />
L ’objectif<br />
spécifique de production<br />
agricole de ce plan d’action<br />
est d’atteindre 10000 000<br />
de tonnes par an de céréales à<br />
l’horizon 2012 en vue de contribuer<br />
àlaréduction de la pauvreté et de<br />
promouvoir le développement économique<br />
et social du pays.<br />
L’atteinte de cet objectif passe par<br />
la mise en œuvreducadrestratégique<br />
comprenant, entres autres :unapprovisionnement<br />
correct des producteurs<br />
en intrants de qualité et àdes coûts<br />
accessibles soutenu par de mesures<br />
appropriées de subvention, l’équipement<br />
des exploitations, notamment<br />
par la motorisation, la réalisation<br />
d’aménagements hydro-agricoles pour<br />
sécuriser la production agricole, avec<br />
objectifs de 103 000 ha, défini dans le<br />
programme gouvernemental etc.<br />
Au plan des résultats obtenus, la<br />
production céréalière auMali aévolué<br />
de 3693 240 tonnes en 2006-2007 à<br />
6334 440 tonnes en 2009-2010, soit un<br />
taux d’augmentation annuel de 18 %.<br />
Suite àlacrise alimentaire survenue<br />
en 2008 et la nécessité de couvrir totalement<br />
les besoins céréaliers du pays,<br />
le Gouvernement de la République du<br />
Mali alancé pendant la campagne agricole<br />
2008/2009 l’opération «Initiative<br />
Riz ». Cette action volontariste essentiellement<br />
axée sur la subvention des<br />
engrais minéraux (à hauteur de 22 à<br />
43 %) et des semences améliorées (à<br />
50 %leprix de cession), la facilitation<br />
de l’accès àl’équipement agricole et le<br />
renforcement du dispositif<br />
d’appui conseil par le recrutement<br />
de nouveaux agents<br />
techniques (plus de 300 agents recrutés<br />
depuis 2009). Lesrésultats obtenus<br />
en 2008-2009 ont porté sur 1607 647<br />
tonnes de riz paddy.Cela apermis l’approvisionnement<br />
correcte des marchés<br />
avec àlaclé des prix les plus bas de la<br />
sous-région. Àl’observation, ces prix<br />
sont inférieurs àlamoyenne des cinq<br />
dernières années.<br />
Au regard detous ces résultats satisfaisants<br />
obtenus en 2008 dans le<br />
domaine de la production rizicole,<br />
les programmes d’intensification et<br />
la subvention d’intrant qui les soutiennent<br />
ont été étendus àd’autres<br />
cultures porteuses comme le maïs, le<br />
coton, le blé, le sorgho et le niébé.<br />
La relance de la culture ducoton en<br />
2009-2010, apermis d’accroître laproduction<br />
de 190 000 tonnes en 2008-<br />
2009 à236 400 tonnes en 2009-2010,<br />
soit une augmentation d’environ 24 %.<br />
La production cotonnière attendue au<br />
terme de la campagne agricole 2010-<br />
2011 est estimée à300 000 tonnes.<br />
Au niveau de la recherche agricole,<br />
les efforts fournis par l’Institut d’Économie<br />
Rurale et ses partenaires ont<br />
permis d’adapter l’offre de technologies<br />
àlafois àl’écologie des zones<br />
agricoles et àlasituation des producteurs<br />
en termes de variétés améliorées<br />
et de technologies agricoles. Lesrésultats<br />
obtenus suivant une stratégie de<br />
recherche participative, ont été large-<br />
RÉPUBLIQUE<br />
DU <strong>MALI</strong><br />
LE PRÉSIDENT AMADOU TOUMANI TOURÉ lors du<br />
lancement de la campagne agricole 2009-2010àKasséla.<br />
ment adoptés par les producteurs qui<br />
obtiennent des résultats significatifs :<br />
les variétés de Sorgho de 1,5 tonnes/ha<br />
sont passées à2,5 tonnes/ha ;lemil de<br />
1,2 à1,7 tonnes/ha ;lemaïs de 2,5 à5<br />
tonnes/ha ;leriz :de5à7tonnes/ha.<br />
Dans le cadre des aménagements<br />
hydro-agricolesbeaucoupd’effortsont<br />
été consentis par les Gouvernements<br />
successifs. Lessuperficies aménagées<br />
sont aujourd’hui de 345 240 ha contre<br />
une superficie de 50 000 ha en 1960<br />
et de 270 000 ha en 2002, soit une<br />
augmentation de 60,5 en 8ans c’està-direentrelapériode<br />
2002-2010.<br />
L’équipement agricole se modernise<br />
par l’introduction àgrande échelle de<br />
la motorisation avec, en toile de fond,<br />
l’implantation d’usines de montage de<br />
tracteurs et autres équipements agricoles<br />
àSamanko et àSikasso.<br />
En dépit de ces résultats satisfaisants,<br />
des difficultés sont àsignaler,<br />
notamment en ce qui concerne le volet<br />
commercialisation. En effet la commercialisation<br />
connaît des contraintes dans<br />
sa mise en œuvre. Des dispositions sont<br />
prises pour corriger ces insuffisances.<br />
Ainsi, le Mali avec cette volonté<br />
politique affichée et les résultats<br />
déjà obtenus en cette phase de l’Initiative<br />
Riz, est en passe de devenir<br />
une puissance Agricole.<br />
Source Ministèredel’Agriculture.<br />
DR
DIPLOMATIE<br />
Un Un poison<br />
nommé nomméAqmi Aqmi<br />
La multiplication des opérations menées par les salafistes<br />
dʼAl-Qaïda au Maghreb islamique dans le Nord embarrasse<br />
ATT et pollue la fin de son mandat.<br />
Àceux qui, d’Alger à Paris,<br />
en passant par Nouakchott,<br />
Londres ou Washington,<br />
reprochent à son pays<br />
d’être « le maillon faible de la lutte<br />
antiterroriste au Sahel », le président<br />
Amadou Toumani Touré (ATT)<br />
répond, avec une pointe d’humour :<br />
« Pour qu’il y ait un maillon faible, il<br />
faudrait qu’il y ait une chaîne. Or celle-ci<br />
n’a jamais existé malgré toutes<br />
nos tentatives pour créer un mécanisme<br />
régional. » À tort ou à raison,<br />
la présence des djihadistes d’Al-Qaïda<br />
au Maghreb islamique (Aqmi) dans<br />
le nord du Mali fait passer des nuits<br />
blanches au palais de Koulouba et<br />
entame sérieusement le capital sympathie<br />
dont jouit le pays.<br />
La première manifestation des<br />
salafi stes dans le septentrion malien<br />
a eu lieu en 2003, quand un groupe<br />
terroriste appartenant au Groupe salafi<br />
ste pour la prédication et le combat<br />
(GSPC, ancêtre d’Aqmi) s’y était réfugié<br />
après avoir kidnappé une trentaine<br />
de touristes allemands, autrichiens<br />
et suisses dans le Sud algérien. Sol-<br />
JEUNE AFRIQUE N° 2597 • DU 17 <strong>AU</strong> 23 OCTOBRE 2010<br />
Le président malien et son<br />
homologue mauritanien,<br />
Mohamed Ould Abdelaziz,<br />
le 21 septembre, à Bamako. HABIB KOUYATÉ/AFP<br />
licité par Berlin, Vienne et Berne,<br />
ATT s’était engagé dans une médiation<br />
avec les ravisseurs. Avec succès,<br />
puisqu’elle a abouti à la libération des<br />
otages. Cependant, le paiement d’une<br />
rançon lui a valu bien des déboires,<br />
notamment avec le voisin du nord :<br />
l’Algérie.<br />
Depuis, le scénario s’est plusieurs fois<br />
répété et, à chaque rapt, ATT affi che sa<br />
disponibilité, « pour des<br />
raisons humanitaires »,<br />
à sauver la vie des otages.<br />
Accusé de laxisme,<br />
voire de complicité,<br />
en septembre 2007, il<br />
demande à ses pairs de<br />
la région de se réunir en<br />
sommet pour sauver le Sahel.<br />
LUTTE SANS MERCI<br />
Trois ans après, la rencontre n’a toujours<br />
pas pu se tenir. Offi ciellement à<br />
cause des calendriers des chefs d’État,<br />
offi cieusement pour des raisons d’ego<br />
surdimensionnés, de douteuses volontés<br />
de leadership régional et de suspicions<br />
entre partenaires.<br />
LE PLUS<br />
Selon ATT, « si Aqmi est dans le Sahel,<br />
c’est parce que nous n’y sommes pas ».<br />
Son « nous » n’est ni royal ni académique,<br />
mais est celui d’une présence militaire<br />
conjointe des forces de sécurité des<br />
pays de la sous-région, des patrouilles<br />
mixtes le long des frontières (avec l’Algérie,<br />
le Niger et la Mauritanie), là où<br />
elles sont le plus sensibles. « S’ils me<br />
reprochent mon laxisme, qu’est-ce qui<br />
les empêche de tenir le sommet pour<br />
me le dire de vive voix? s’étrangle-til<br />
en parlant de ses voisins. Quant au<br />
lieu de la réunion, il m’importe peu<br />
que cela soit à Bamako, Alger, Tripoli<br />
ou Niamey, pourvu que l’on mette tous<br />
les problèmes sur la table. »<br />
La multiplication des prises d’otages<br />
embarrasse ATT et pollue la fi n de<br />
son deuxième et dernier mandat. « Ce<br />
n’est pas une poignée d’illuminés, de<br />
brigands et de trafiquants qui pourra<br />
occulter tout ce qui a été entrepris<br />
dans mon pays. Il est vrai que le nombre<br />
de touristes qui viennent visiter le<br />
pays Dogon, la mosquée de Djenné ou<br />
la ville sacrée de Tombouctou pourrait<br />
baisser, mais, en aucune manière,<br />
l’image du Mali ne sera ternie. Les<br />
salafi stes d’Aqmi ne pourront jamais<br />
y essaimer leur doctrine criminelle. »<br />
Contrairement à sa gestion de la<br />
rébellion touarègue (au grand dam de<br />
la classe politique malienne, en 2006,<br />
il avait prôné le dialogue au détriment<br />
d’une solution exclusivement militaire),<br />
le président malien préconise une lutte<br />
sans merci contre les djihadistes. « Il<br />
se trouve que, tout seul, je n’en ai pas<br />
les moyens [les effectifs de son armée<br />
se situent autour de 20 000 hommes,<br />
sous-équipés, NDLR]. D’où mes appels<br />
répétés pour une Conférence régionale<br />
dédiée à la sécurité du Sahel. Quant à<br />
« Si Aqmi est dans le Sahel,<br />
c’est parce que nous n’y<br />
sommes pas. » Amadou Toumani Touré<br />
ceux qui parlent de notre complicité<br />
avec les criminels, que Dieu leur pardonne.<br />
Ils insultent la mémoire de nos<br />
hommes tombés sous les balles des<br />
salafistes », dit-il, amer, en pensant<br />
à la trentaine de soldats et officiers<br />
maliens tués lors d’accrochages avec<br />
les djihadistes. Pour ATT et sa diplomatie,<br />
Aqmi est un véritable poison. ■<br />
CHERIF OUAZANI<br />
73
74 LE PLUS <strong>MALI</strong><br />
POLITIQUE<br />
La bataille bataillede2012 de 2012<br />
À un an et demi de la fin du second mandat du chef<br />
de lʼÉtat, leaders et militants de tous bords sont dopés<br />
par la perspective de lui succéder. Tout le monde<br />
se positionne. État des lieux des forces en présence.<br />
Àpeine éteints les lampions<br />
du cinquantenaire de l’indépendance,<br />
fastueusement<br />
fêté le 22 septembre, classe<br />
politique et société civile ne pensent<br />
plus qu’à cela. Dans les salons et dans<br />
les bars, dans la rue et dans les grin<br />
(think-tanks à la malienne), la présidentielle<br />
de 2012 est devenue l’incontournable<br />
sujet de conversation. Même<br />
s’il se trouve quelques esprits pervers<br />
convaincus que le président Amadou<br />
Toumani Touré (ATT) serait tenté<br />
de faire réviser la Constitution pour<br />
briguer un troisième mandat, seules<br />
deux questions taraudent les esprits à<br />
Bamako : qui sera candidat ? qui sera<br />
le prochain locataire du palais de Koulouba?<br />
Une fi èvre électorale précoce a déjà<br />
gagné les partis politiques et quelques<br />
personnalités. Cheikh Modibo Diarra<br />
(voir p. 77), ancien de la prestigieuse<br />
agence spatiale américaine (Nasa),<br />
directeur général de Microsoft en<br />
<strong>Afrique</strong> et toujours gendre de Moussa<br />
Traoré, s’est d’ores et déjà lancé dans<br />
la course, le 19 septembre, en créant<br />
un parti : le Rassemblement pour le<br />
développement du Mali (RDM).<br />
Sur son chemin vers le palais de<br />
Koulouba, il trouvera certainement<br />
son beau-frère, Cheick Boucadry<br />
Traoré, président de la Convergence<br />
africaine pour le renouveau (Care).<br />
Les deux hommes se disputeront les<br />
maigres terres électorales sur lesquelles<br />
chasse en maître le Mouvement<br />
patriotique pour le renouveau (MPR)<br />
de Choguel Maïga, qui se réclame, lui<br />
aussi, de Moussa Traoré.<br />
S’ils sont les premiers à dégainer, les<br />
héritiers de l’ancien président malien<br />
ne constituent pas, loin s’en faut, l’essentiel<br />
de la classe politique malienne.<br />
Celle-ci compte plus d’une centaine de<br />
partis, dont l’histoire et le parcours<br />
sont faits d’alliances et de ruptures, de<br />
coalitions et de désamours, de passions<br />
et de trahisons. Avec du charisme pour<br />
les uns, de la gouaille pour d’autres, de<br />
l’opportunisme pour certains.<br />
Hamed Diané<br />
Séméga<br />
(en blanc,<br />
au centre),<br />
ministre de<br />
l’Équipement<br />
et président<br />
du PDES, lors<br />
du lancement<br />
du parti,<br />
le 17 juillet.<br />
E. DAOU BAKARY<br />
Le scrutin présidentiel de 2012 sera le<br />
cinquième de l’histoire du Mali démocratique<br />
et sans doute le plus ouvert,<br />
car il sera le premier sans grandissime<br />
favori : Alpha Oumar Kona-<br />
ré, en 1992 et 1997 ; et ATT,<br />
en 2002 et 2007.<br />
La vie politique malienne<br />
est dominée par trois grandes<br />
formations : l’Alliance pour la<br />
démocratie au Mali (Adema,<br />
de Dioncounda Traoré), l’Union<br />
pour la République et le développement<br />
(URD, de Soumaïla<br />
Cissé, voir p. 77) et le Rassemblement<br />
pour le Mali (RPM,<br />
d’Ibrahim Boubacar Keïta, dit IBK, voir<br />
p. 76), par ordre décroissant, selon le<br />
poids de leur représentation au Parlement.<br />
Si, pour l’URD et le RPM, la question<br />
du choix du candidat à la présidentielle<br />
ne se pose pas tant la position de<br />
leurs leaders respectifs semble incontournable,<br />
pour l’Adema, la situation est<br />
autrement plus complexe.<br />
PEUR DES PRIMAIRES?<br />
Le président du parti, Dioncounda Traoré,<br />
n’est pas le candidat naturel, et de<br />
nombreux cadres historiques de l’Adema<br />
aspirent à l’investiture. L’épreuve des<br />
primaires est attendue avec beaucoup<br />
d’appréhension par les militants. Pour la<br />
petite histoire, le RPM et l’URD (dans un<br />
ordre chronologique) sont nés de scissions<br />
au sein de l’Adema, à la suite, justement,<br />
de mésaventures liées au choix<br />
du candidat qui porterait les couleurs<br />
du parti à une présidentielle… Malgré<br />
cette hémorragie, l’Adema demeure<br />
la première force politique du pays, et<br />
l’absence d’un leader charismatique (un<br />
vide sidéral s’est installé depuis le retrait<br />
de son fondateur, Alpha Oumar Konaré)<br />
risque d’ouvrir de nouvelles plaies à l’occasion<br />
des primaires prévues au cours<br />
du second semestre de 2011.<br />
Par ailleurs, le trio Adema-URD-RPM<br />
est en voie de se transformer en quatuor.<br />
Le 17 juillet, une nouvelle formation<br />
politique, le Parti pour le développement<br />
économique et social (PDES, en<br />
référence au programme présidentiel<br />
du même nom), est née. Sans réellement<br />
bouleverser la donne, la création<br />
d’un parti se réclamant d’ATT (voir « En<br />
coulisses » ci-contre) ne laisse pas indifférents<br />
les états-majors politiques.<br />
En dehors de ces quatre mastodontes<br />
de la vie politique malienne, une<br />
dizaine de partis ont le statut de force<br />
d’appoint, à l’instar du MPR de Choguel<br />
JEUNE AFRIQUE N° 2597 • DU 17 <strong>AU</strong> 23 OCTOBRE 2010
Maïga, du Parti de la renaissance africaine<br />
(Parena, de Tiébilé Dramé) ou du<br />
Congrès national d’initiative démocratique<br />
(Cnid, de Mountaga<br />
Tall), ainsi que d’autres<br />
petites formations représentées<br />
au Parlement ou<br />
ne disposant que d’élus<br />
locaux.<br />
Pour l’heure, la plupart<br />
des partis politiques se<br />
sont engagés dans un<br />
processus de rencontres<br />
bilatérales et multilatérales, avec pour<br />
ordre du jour d’échanger autour de la<br />
prochaine échéance électorale.<br />
UNE FÊTE DE LA DÉMOCRATIE<br />
Cités parmi les candidats les plus<br />
sérieux, IBK et Soumaïla Cissé affichent<br />
leur optimisme. « Un scrutin,<br />
analyse l’ancien Premier ministre d’Alpha<br />
Oumar Konaré, est sans doute assimilé<br />
à une noce démocratique, mais il<br />
peut également être un facteur d’instabilité.<br />
Toutefois, les discussions que j’ai<br />
eues avec de nombreuses personnalités<br />
politiques me laissent penser que ce<br />
sera plutôt une fête de la démocratie.<br />
Jamais, s’enthousiasme IBK, la classe<br />
politique de mon pays ne m’a paru aussi<br />
mature. »<br />
Même sentiment chez Soumaïla<br />
Cissé, qui garde sous le boisseau toute<br />
annonce de son éventuelle participation<br />
à la course à Koulouba, son mandat de<br />
président de l’UEMOA n’expirant qu’en<br />
mars 2011.<br />
De son côté, l’Adema consulte également<br />
le reste de la classe politique,<br />
20 juin 1960<br />
Indépendance de la<br />
Fédération du Mali, qui<br />
regroupe le Sénégal<br />
et le Soudan français.<br />
Le 20 août, la Fédération<br />
du Mali éclate.<br />
Le Sénégal déclare<br />
son indépendance.<br />
22 septembre 1960<br />
Proclamation de<br />
l’indépendance du<br />
Soudan français, qui<br />
devient la République<br />
du Mali. Modibo Keita<br />
devient président<br />
de la République.<br />
y compris le MPR, son ennemi intime<br />
puisqu’il se réclame de Moussa Traoré.<br />
Objectif de ces conciliabules: élaborer<br />
« Jamais la classe politique<br />
de mon pays ne m’a paru<br />
aussi mature. »<br />
CHRONOLOGIE POLITIQUE<br />
30 juin 1962 Le pays<br />
crée le franc malien<br />
et quitte la zone CFA.<br />
19 novembre 1968 Coup<br />
d’État du lieutenant<br />
Moussa Traoré.<br />
19 juin 1979 Victoire<br />
de Moussa Traoré<br />
à la présidentielle.<br />
Réélu le 9 juin 1985.<br />
1 er juin 1984 Le Mali<br />
intègre l’Union<br />
économique et monétaire<br />
ouest-africaine et revient<br />
au franc CFA.<br />
JEUNE AFRIQUE N° 2597 • DU 17 <strong>AU</strong> 23 OCTOBRE 2010<br />
IBRAHIM BOUBACAR KEÏTA, dit IBK<br />
une charte de bonne conduite, préparer<br />
le terrain aux alliances électorales et le<br />
report de voix en cas de second tour.<br />
Presque tout entière tournée vers<br />
la bataille électorale de 2012, la classe<br />
politique ne doit cependant pas<br />
occulter deux importantes étapes, qui<br />
fi gurent dans l’agenda politique avant<br />
le suprême scrutin : l’adoption, sans<br />
doute par référendum, d’une nouvelle<br />
Constitution, et le débat, qui s’annonce<br />
houleux, sur le code de la personne et<br />
de la famille. Ces deux questions, qui<br />
devront être tranchées par l’Assemblée<br />
nationale, ne sont pas programmées<br />
avant janvier 2011. En effet, la session<br />
parlementaire d’automne, inaugurée<br />
le 4 octobre, est consacrée exclusivement<br />
à la discussion autour du budget<br />
de l’État.<br />
Une loi de fi nances, un référendum<br />
portant sur la révision de la Constitution<br />
et un débat sur le statut personnel…<br />
La classe politique a de quoi s’occuper,<br />
fourbir ses armes et aiguiser ses<br />
arguments avant que la campagne 2012<br />
soit ouverte. ■<br />
CHERIF OUAZANI<br />
26 mars 1991 Coup d’État<br />
du lieutenant-colonel<br />
Amadou Toumani Touré,<br />
qui met en place un<br />
Comité de transition<br />
pour le salut du peuple<br />
(CTSP).<br />
26 avril 1992 Victoire<br />
d’Alpha Oumar Konaré<br />
à la présidentielle. Il est<br />
réélu le 17 mai 1997.<br />
12 mai 2002 Victoire<br />
d’Amadou Toumani<br />
Touré à l’élection<br />
présidentielle. Il est<br />
réélu le 29 avril 2007.<br />
EN COULISSES<br />
Lessilences<br />
Les silences<br />
du Palais Palais<br />
LE PLUS<br />
Le président Amadou Toumani<br />
Touré (ATT) a longtemps<br />
posé son veto quant à l’idée<br />
de créer un parti se réclamant de<br />
son action. Il a fini par donner sa<br />
bénédiction à son ministre de l’Équipement<br />
et des Transports, Hamed<br />
Diané Séméga, qui a offi ciellement<br />
transformé le Mouvement citoyen<br />
(MC, organisation des comités de<br />
soutien à l’action présidentielle) en<br />
Parti pour le développement économique<br />
et social (PDES), dont l’acronyme<br />
ressemble étrangement à<br />
celui du programme présidentiel.<br />
Le PDES est un bébé né avec<br />
des moustaches. À peine agréé<br />
par l’administration, il revendique<br />
17 députés, élus en tant qu’indépendants,<br />
nombre qui lui permet<br />
de disposer d’un groupe parlementaire<br />
et de postes stratégiques<br />
au sein du bureau de l’hémicycle.<br />
Autre fait marquant: le PDES éjecte<br />
du podium des trois premières<br />
forces politiques maliennes le Rassemblement<br />
pour le Mali (RPM,<br />
d’Ibrahim Boubacar Keïta, dit IBK,<br />
voir p. 76) et ses 11 députés.<br />
L’ENTRÉE EN JEU du PDES signifi<br />
e que le président ATT veut peser<br />
dans sa succession. Le nouveau<br />
parti, animé par des personnalités<br />
de premier plan, dont l’ancien<br />
ministre et grand argentier<br />
de la campagne électorale d’ATT<br />
en 2002 et 2007, Ousmane Thiam,<br />
devient donc l’instrument politique<br />
dont le chef de l’État s’est<br />
passé tout au long de sa longue<br />
carrière. Tous ceux qui ont prétendu<br />
que, en attendant l’issue de son<br />
dernier mandat, ATT ne serait plus<br />
qu’un président de la République<br />
en sursis, donc sans réelle infl uence,<br />
se mordent déjà les doigts. Les<br />
prétendants au palais de Koulouba<br />
devront faire avec lui. Au-delà de<br />
son refus d’aborder publiquement<br />
la question de sa succession. ■<br />
CH.O.<br />
75
76 LE PLUS <strong>MALI</strong><br />
PORTRAITS<br />
Incontournables<br />
et présidentiables<br />
Quelques poids lourds charismatiques ont déjà<br />
annoncé quʼils seraient en lice pour la présidentielle<br />
de 2012, dʼautres sʼy préparent discrètement.<br />
En tout cas, candidats ou non, leur avis comptera.<br />
SOUMANA SACKO<br />
Ancien Premier ministre<br />
LʼINCORRUPTIBLE<br />
DANS L’IMAGINAIRE DES <strong>MALI</strong>ENS,<br />
Soumana Sacko reste l’incorruptible<br />
ministre des Finances des années<br />
Moussa Traoré. Premier ministre de<br />
la transition de 1991 à 1992, avec pour<br />
bilan l’organisation de la conférence<br />
nationale et des premières élections<br />
pluralistes, cet économiste de 61 ans formé aux États-Unis est<br />
mal connu des jeunes. D’autant qu’il a passé huit ans au Zimbabwe,<br />
en tant que secrétaire exécutif de la Fondation pour le<br />
renforcement des capacités en <strong>Afrique</strong>. De retour au pays depuis<br />
2008, il essaie de gommer ce handicap en allant à la rencontre<br />
de la jeunesse. Il lui manque cependant un ancrage et une véritable<br />
tribune politiques. Même si on le sait proche d’Amadou Toumani<br />
Touré, le fait qu’il se soit récemment opposé au projet de<br />
réforme constitutionnelle proposé par le président risque fort de<br />
lui coûter un appui indispensable. Pour le moment, il compte sur<br />
des comités de soutien, avec comme plus fervent partisan Habib<br />
Dembélé, dit Guimba, comédien populaire et candidat « pour<br />
rire » à la présidentielle de 2002. ■ MAHAMADOU CAMARA<br />
HAMED SOW<br />
Président d’honneur du Parti pour le développement économique et la solidarité<br />
(PDES), président d’Africa Mining and Infrastructures Corporation (Amic)<br />
LʼAMI DU PRÉSIDENT<br />
HAMED SOW FAIT PARTIE des<br />
incertitudes de 2012. Sorti indemne<br />
de l’enquête administrative sur sa<br />
gestion du Centre pour le développement<br />
de l’entreprise (CDE-Bruxelles,<br />
une institution de l’Union européenne),<br />
dont il a été le directeur, il<br />
démissionne du gouvernement fi n<br />
2008 pour prendre la tête d’Amic, une<br />
structure associée à d’importants<br />
fonds d’investissement. Diplômé<br />
de l’Institut national des sciences et<br />
techniques nucléaires de Saclay, et<br />
titulaire d’un doctorat en économie<br />
de la production de l’université Paris-<br />
Dauphine, à 58 ans, Hamed Sow est<br />
apprécié de l’élite et des jeunes, qui<br />
louent sa compétence et son sérieux.<br />
Son image est également liée à<br />
celle du Parti pour le développement<br />
économique et la solidarité (PDES),<br />
la formation présidentielle créée en<br />
M. SUPER KONÉ<br />
IBK Président du Rassemblement<br />
pour le Mali (RPM), ancien Premier ministre<br />
JAMAIS DEUX SANS TROIS<br />
IBRAHIM BOUBACAR KEÏTA, alias IBK,<br />
deux fois candidat à la présidentielle,<br />
en 2002 et 2007, tentera sans doute de nouveau<br />
sa chance en 2012. Ministre des Affaires<br />
étrangères, puis Premier ministre (1994-<br />
2000) et président de l’Assemblée nationale<br />
(2002-2007), il est très populaire auprès des<br />
Maliens, qui lui reconnaissent une autorité<br />
naturelle et un sens de l’État indiscutable.<br />
À 65 ans, bien qu’à la tête d’un parti<br />
affaibli, le RPM, fondé en 2001 et troisième<br />
sur l’échiquier politique national, IBK apparaît<br />
comme le chef de fi le de l’opposition et<br />
marque sa différence, tout en prenant soin<br />
de ménager le chef de l’État sur les questions<br />
de politique étrangère et en cultivant<br />
ses réseaux internationaux. Seul grand candidat<br />
potentiel à pouvoir dès à présent affi -<br />
cher son ambition présidentielle, IBK pousse<br />
son avantage en évoquant les problèmes<br />
de l’école et la nécessaire restauration<br />
de l’autorité de l’État. Sa victoire en 2012<br />
passerait, entre autres, par le ralliement de<br />
représentants d’une nouvelle génération<br />
qui verraient en lui un passeur capable de<br />
les préparer pour le futur. ■ M.CA.<br />
juillet, dont il est le président d’honneur.<br />
Il est également le principal<br />
auteur du projet sur lequel ATT s’est<br />
fait réélire en 2007. Si la tentation lui<br />
venait d’être candidat en 2012, il jouirait<br />
d’un important atout, sa grande<br />
proximité avec ATT. C’est aussi une<br />
faiblesse, car il ne fera rien sans l’aval<br />
du président. ■ M.CA.<br />
JEUNE AFRIQUE N° 2597 • DU 17 <strong>AU</strong> 23 OCTOBRE 2010<br />
E. DAOU BAKARY<br />
ÉMILIE RÉGNIER POUR J.A.
SOUMAÏLA CISSÉ Président de la Commission de l’UEMOA<br />
UN INTERNATIONAL EN RÉSERVE<br />
BASÉ À OUAGADOUGOU, au Burkina Faso, où il dirige la<br />
Commission de l’Union économique et monétaire ouestafricaine<br />
(UEMOA) depuis 2004, Soumaïla Cissé rentrera<br />
au Mali en mars 2011, à l’issue de son second mandat.<br />
Soit un an exactement avant la présidentielle. Nul doute<br />
que l’enfant de Niafunké (région de Tombouctou) sera sur<br />
la ligne de départ, lui qui a pris une tout autre dimension<br />
depuis sa défaite au second tour, en 2002, face à Amadou<br />
Toumani Touré.<br />
Cet ingénieur informaticien a quitté l’Alliance pour<br />
la démocratie au Mali (Adema) en 2003 pour créer, avec<br />
d’autres transfuges, l’Union pour la République et la<br />
démocratie (URD) – un parti, présidé par l’ancien Premier<br />
ministre Younoussi Touré, désormais présent sur tout le<br />
territoire et devenu la deuxième force politique du pays<br />
avec 34 députés. Loin de l’exclure de la scène politique<br />
MODIBO<br />
SIDIBÉ<br />
Premier ministre<br />
MONSIEUR LOYAL<br />
SUR LE PAPIER, Modibo<br />
Sidibé a tous les atouts pour<br />
fi gurer en bonne position<br />
dans la campagne de 2012.<br />
Premier ministre depuis<br />
septembre 2007, il a derrière<br />
lui une longue carrière au<br />
sein du gouvernement.<br />
D’abord directeur de cabinet<br />
d’Amadou Toumani Touré<br />
(ATT) pendant la transition,<br />
entre 1991 et 1992, il fut<br />
ensuite ministre de la Santé<br />
puis ministre des Affaires<br />
étrangères sous le président<br />
Alpha Oumar Konaré, avant<br />
d’être nommé secrétaire général de la présidence par ATT, élu en 2002.<br />
Cette longévité à des postes clés de l’appareil d’État a permis à<br />
Modibo Sidibé, 58 ans, de prouver ses qualités de travailleur rigoureux<br />
et discret, mais aussi sa loyauté envers les présidents qu’il<br />
a servis. Docteur en sciences pénales et criminologie, également<br />
diplômé de l’École nationale de police du Mali, le Premier ministre,<br />
prisonnier de sa fonction, n’affi che pas ouvertement d’ambition présidentielle.<br />
Sans doute est-il dans l’attente d’un signal du président?<br />
Dans ce cas, il devra trouver un point de chute au sein d’un parti politique,<br />
par exemple l’Alliance pour la démocratie au Mali (Adema), qui<br />
n’a pas de leader incontesté. L’ancien président Konaré, qui est issu<br />
du parti majoritaire, pourrait l’appuyer en ce sens. D’ici là, Modibo<br />
Sidibé devra casser son image de technocrate pour gagner en popularité<br />
et faire face aux déçus d’ATT, qui ne manqueront pas de le rendre<br />
responsable de tous leurs maux. ■<br />
JEUNE AFRIQUE N° 2597 • DU 17 <strong>AU</strong> 23 OCTOBRE 2010<br />
ÉMILIE RÉGNIER POUR J.A.<br />
malienne, son éloignement<br />
au Burkina Faso, où il côtoie<br />
les chefs d’État de la sousrégion<br />
et travaille avec les<br />
bailleurs de fonds, a permis à<br />
Soumaïla Cissé de renforcer sa<br />
stature internationale. Secrétaire<br />
général de la présidence,<br />
ministre des Finances, puis<br />
de l’Équipement entre 1992<br />
et 2002, il a su cultiver une image de gestionnaire rigoureux<br />
et compétent, et est apprécié des milieux d’affaires.<br />
À 61 ans, fort d’un parti en ordre de marche, le challenge<br />
pour Soumaïla Cissé est de rendre palpable et concrète<br />
son action à la tête de l’UEMOA aux yeux de ses compatriotes.<br />
Pour se rapprocher d’eux. ■ M.CA.<br />
M.CA.<br />
LE PLUS<br />
CHEICK MODIBO<br />
DIARRA<br />
Président du Rassemblement pour<br />
le développement du Mali (RDM),<br />
président de Microsoft <strong>Afrique</strong><br />
LʼÉTOILE DU <strong>MALI</strong><br />
SON ANCIEN POSTE DE NAVIGA-<br />
TEUR interplanétaire à la Nasa a fait<br />
de lui une icône africaine. À 58 ans,<br />
Cheick Modibo Diarra veut revenir<br />
sur la scène malienne. Le 19 septembre,<br />
ce natif de Ségou a créé son<br />
parti, le RDM, et ses déclarations<br />
laissent peu de doutes: il sera candidat<br />
en 2012. Gendre de l’ancien<br />
président Moussa Traoré, il n’est<br />
pas sûr de bénéfi cier du soutien de<br />
tout le clan, puisque l’un des fi ls du<br />
général, Boucadry Traoré, a aussi<br />
annoncé sa candidature. Quant à<br />
son frère, Sidi Sosso Diarra, le Monsieur<br />
Anticorruption du pays, il quittera<br />
son poste de vérificateur général<br />
en 2011 et pourrait lui apporter<br />
un appui majeur. ■ M.CA.<br />
C. LARTIGE/SIPA<br />
VINCENT FOURNIER/J.A. 77
78 LE PLUS <strong>MALI</strong><br />
Une Unenouvellegénérationdeleaders<br />
nouvelle génération de leaders<br />
NÉ À BAMAKO EN 1968, Madani<br />
Amadou Tall a quitté le Mali à l’âge<br />
de 6 ans. En France, où il grandit,<br />
il obtient une licence en sciences<br />
politiques, puis un diplôme de<br />
fi nance de marché et un master en<br />
politiques économiques internationales<br />
à l’université Johns-Hopkins<br />
de Washington. Pendant ses quinze<br />
ans d’expérience aux États-Unis,<br />
E. DAOU BAKARY POUR J.A.<br />
MADANI TALL<br />
Président d’Avenir et Développement du Mali (ADM)<br />
UN GOLDEN BOY DONT LA COTE MONTE<br />
il devient l’un des golden boys africains<br />
les plus en vue, jusqu’à devenir<br />
vice-président d’une fi liale du groupe<br />
Bank of America.<br />
En 2002, Madani Tall, qui vouait<br />
une admiration sans faille à ATT et<br />
a œuvré à son élection en tant que<br />
vice-président de sa campagne<br />
en Amérique du Nord, est rappelé<br />
au pays. À 34 ans, il devient le<br />
conseiller économique du président<br />
nouvellement élu et prend en charge<br />
des dossiers dans les secteurs des<br />
télécoms, de l’énergie et de l’agriculture,<br />
autant de champs d’expression<br />
pour ses idées progressistes, qu’il<br />
aime défendre avec conviction. Alors<br />
que beaucoup le jugeaient « trop<br />
technocrate », il affi che son goût<br />
PUB<br />
1/2 page<br />
format total : L = 205 x H = 145<br />
surface utile : L = 185 x H = 125<br />
pour la politique et met en place,<br />
à partir de 2007, son association,<br />
Avenir et Développement du Mali<br />
(ADM), active dans tous le pays, où<br />
elle apporte un soutien aux populations<br />
dans les secteurs sociaux.<br />
Prochaine étape: l’ADM, qui<br />
compte déjà, selon ses partisans,<br />
10000 militants et plus de<br />
100 conseillers communaux (dont<br />
Madani lui-même, élu en 2009 dans<br />
le pays dogon), prendra le statut de<br />
parti à la faveur de son congrès qui se<br />
tiendra fi n octobre. Brillant et réputé<br />
compétent, son président tentera<br />
peut-être sa chance à l’élection de<br />
2012. À moins qu’il ne choisisse de<br />
soutenir un candidat, par loyauté, ou<br />
un autre, par conviction. ■ M.CA.
TIEMAN<br />
COULIBALY<br />
Président de l’Union pour la démocratie<br />
et le développement (UDD)<br />
ENGAGÉ VOLONTAIRE<br />
SON ÉLECTION, EN MARS, à la tête<br />
de l’Union pour la démocratie et le<br />
développement (UDD) est la consécration<br />
d’un long parcours militant.<br />
Natif de Bamako, Tieman Coulibaly<br />
a été formé à l’université de<br />
Saint-Étienne (France), avant de rentrer<br />
au pays en 1994 pour intégrer le<br />
groupe familial fondé par son père,<br />
Moussa Balla Coulibaly. Il entrera<br />
ensuite chez Panafcom Mali, une<br />
agence alors affi liée au réseau mondial<br />
Young & Rubicam, avant de fonder<br />
Stellis Communication en 2006.<br />
Dès 1994, il anime les comités,<br />
sous-sections, puis la section de la<br />
commune V de Bamako de l’UDD. À<br />
la recherche d’un ancrage politique,<br />
il tente sa chance aux législatives<br />
de 2007, à Diéma (région de Kayes,<br />
Ouest). Ce sera un échec. Il se rend<br />
alors aux quatre coins du pays pour<br />
conquérir les militants de l’UDD, dont<br />
il sera secrétaire à la communication,<br />
secrétaire général adjoint puis secrétaire<br />
général.<br />
Avec 3 députés, 186 conseillers<br />
communaux, et désormais dotée<br />
d’un jeune chef charismatique de<br />
43 ans, l’UDD a pour objectif d’attirer<br />
de nouveaux cadres et de peser sur<br />
les échéances de 2012. ■ M.CA.<br />
JEUNE AFRIQUE N° 2597 • DU 17 <strong>AU</strong> 23 OCTOBRE 2010<br />
ÉMILIE RÉGNIER POUR J.A.<br />
MOUSSA MARA<br />
Président de Yelema<br />
TOUT POUR<br />
LA JEUNESSE<br />
À 35 ANS, MOUSSA MARA a<br />
déjà mis en ballottage l’ancien<br />
Premier ministre IBK, lors de<br />
l’élection législative de 2007<br />
à Bamako, sa ville natale, et<br />
a conquis le fauteuil de maire<br />
de la commune IV en 2009,<br />
en tant qu’indépendant. Mais<br />
il ne sera édile que quelques<br />
mois, à la suite de l’invalidation de l’élection, en décembre 2009.<br />
En juillet 2010, Moussa Mara crée Yelema (« changement », en langue<br />
bamanan), « un parti de jeunes, pour les jeunes ». Depuis, malgré un<br />
emploi du temps chargé, l’expert-comptable (directeur associé du cabinet<br />
Sec Diarra) sillonne le pays pour implanter son parti et, fi n octobre,<br />
publiera L’État au Mali, son second essai, dans lequel il évoque sa vision<br />
de la construction d’un État fort au service des citoyens. Dans les prochains<br />
mois, Moussa Mara sera confronté à un nouveau scrutin municipal. En cas<br />
d’échec, il sera affaibli pour 2012. S’il gagne, sa victoire lui donnera une<br />
nouvelle légitimité. Reste à savoir si ce sera suffisant pour prétendre à un<br />
leadership au sein de la nouvelle génération politique. ■ M.CA.<br />
HOUSSEINI AMION GUINDO<br />
Député, président de la Convergence pour le développement du Mali (Codem)<br />
SENSIBLE, SOCIAL, SURDOUÉ<br />
ÉMILIE RÉGNIER POUR J.A.<br />
DERRIÈRE LA MODESTIE de Housseini Amion Guindo se cache l’un<br />
des politiciens les plus doués de sa génération. À 40 ans, le professeur<br />
d’histoire-géographie, promoteur de lycées privés et président d’un<br />
club de football, est déjà courtisé par les plus grands partis.<br />
Natif de Bandiagara, ce Dogon polyglotte (il parle quatre langues<br />
nationales) a grandi dans la région de Sikasso (Sud), où il a été élu<br />
député lors d’une partielle, en 2005, contre le candidat de la majorité,<br />
et réélu deux ans plus tard. En 2008, il crée son parti, la Convergence<br />
pour le développement du Mali (Codem), qui compte 7 députés et<br />
s’est imposé aux communales de<br />
2009 comme la quatrième force<br />
politique du pays. Guindo, qui se<br />
pose en représentant des valeurs<br />
rurales, tire son engagement d’un<br />
drame survenu alors qu’il avait<br />
9 ans, quand il a vu mourir faute<br />
de soins, à une semaine d’intervalle,<br />
une sœur et un frère. Son ambition:<br />
changer la société malienne<br />
et faire « de la santé et de l’éducation<br />
des droits constitutionnels ».<br />
Membre de la mouvance présidentielle,<br />
son parti n’en garde pas<br />
moins une liberté de ton et marque<br />
sa différence, notamment sur le<br />
code de la famille ou la privatisation<br />
de la fi lière coton. ■ M.CA.<br />
ÉMILIE RÉGNIER POUR J.A.<br />
LE PLUS<br />
79
80 LE PLUS <strong>MALI</strong><br />
ÉCONOMIE<br />
Lʼâge Lʼâgedʼordes dʼor des patrons<br />
Le pays affi che la plus forte croissance de la Communauté<br />
économique des États de lʼ<strong>Afrique</strong> de lʼOuest. Un essor quʼil<br />
doit notamment au dynamisme de ses chefs dʼentreprise,<br />
dans tous les secteurs.<br />
« Les opportunités de croissance<br />
et de développement<br />
d’entreprises sont<br />
nombreuses. Elles sont<br />
favorisées par la stabilité politique,<br />
souligne Amadou Sangaré, senior<br />
manager chez Deloitte France, inscrit<br />
à l’ordre des experts-comptables du<br />
Mali. Et, en outre, la culture entrepreneuriale<br />
des Maliens est à l’origine du<br />
dynamisme perceptible dans tous les<br />
secteurs. Cela dit, le gouvernement ne<br />
promeut pas assez certaines filières<br />
minières (fer, manganèse, bauxite…),<br />
qui sont pourtant d’importants réservoirs<br />
de croissance. »<br />
En juillet 2010, le Mali a obtenu le<br />
satisfecit des experts du FMI venus<br />
s’enquérir de la santé d’une économie<br />
MOUSSA OUMAR DIAWARA<br />
PDG de Noor Holding<br />
TOUT EST POSSIBLE<br />
À 34 ANS, MOUSSA OUMAR DIAWARA se voit bien<br />
détrôner les compagnies aériennes qui dominent<br />
le marché ouest-africain. Avec le transporteur libyen<br />
Nayzak Air, il est en train de créer Noor Airways<br />
(les formalités et les pourparlers avec les avionneurs<br />
sont en cours) pour faire du cabotage entre les capitales<br />
sous-régionales depuis Bamako. Les fréquents<br />
échecs des aventures aériennes en <strong>Afrique</strong> de l’Ouest<br />
ne le dissuadent pas : « Il suffit d’avoir de bonnes<br />
méthodes de gestion. »<br />
C’est qu’en général Moussa Oumar Diawara est<br />
sûr de lui. Ancien directeur commercial de l’assureur<br />
français AGF au Mali et plus jeune député du pays<br />
– de la commune I de Bamako –, il appartient à cette<br />
génération de trentenaires maliens qui ont réussi<br />
en montant leur propre affaire. Noor Assur, la compagnie<br />
d’assurances qu’il a créée en 2002, emploie<br />
50 personnes et a réalisé un chiffre d’affaires de<br />
900 millions de F CFA (1,37 million d’euros) en 2009.<br />
Détenu par le même holding, Noor Investissement,<br />
société d’import-export (d’arachides notamment,<br />
vers l’<strong>Afrique</strong> du Sud), est moins fl orissant (son<br />
qui devrait croître de 5,1 % en 2010<br />
(contre 4,4 % en 2009). Selon eux, le<br />
pays a bien résisté à la crise internationale,<br />
notamment grâce à l’or, la première<br />
ressource (voir p. 88), dont les<br />
cours ont atteint les plus hauts niveaux<br />
en 2009.<br />
Avec une infl ation maîtrisée à 2 % et<br />
un défi cit budgétaire de 1,6 %, le Mali<br />
fait aussi fi gure de bon élève de l’Union<br />
économique et monétaire ouest-africaine<br />
(UEMOA), puisqu’il respecte la<br />
plupart des six critères de convergence.<br />
Cette bonne image auprès des bailleurs<br />
de fonds se traduit par une hausse de<br />
l’appui budgétaire. « De 158 milliards<br />
de F CFA [près de 241 millions d’euros,<br />
NDLR] en 2009, il atteignait déjà<br />
140 milliards en août 2010 », selon<br />
Sanoussi Touré, ministre de l’Économie<br />
et des Finances. En outre, la vente<br />
en juillet 2009 de 51 % de l’opérateur<br />
historique de téléphonie, la Sotelma, à<br />
Maroc Télécom, pour 180 milliards de<br />
F CFA (voir p. 88), a permis de payer<br />
une partie de la dette intérieure, évaluée<br />
à une centaine de milliards de<br />
francs CFA.<br />
Autre moteur de l’économie derrière<br />
le métal jaune, l’agriculture connaît un<br />
réel regain d’intérêt de la part d’investisseurs<br />
nationaux et internationaux, grâce<br />
à une politique volontariste de subvention<br />
des intrants et de facilités pour<br />
l’obtention de terres (voir pp. 90-91).<br />
Alliée à une bonne pluviométrie, cette<br />
politique devrait permettre d’atteindre<br />
une production évaluée à 7,5 millions<br />
de tonnes de céréales (riz, maïs, mil…)<br />
pour la campagne 2010-2011, confirmant<br />
ainsi la vocation du Mali à devenir<br />
le grenier de la sous-région.<br />
Même le coton, autrefois délaissé par<br />
les paysans à cause de cours mondiaux<br />
en berne, connaîtra une bonne récolte<br />
avec environ 300000 t. Sans atteindre<br />
les 600 000 tonnes de 2003 (qui faisaient<br />
du Mali le premier producteur au<br />
sud du Sahara), ce contexte de hausse<br />
des cours rend favorable la fi nalisation<br />
de la privatisation de cette fi lière.<br />
chiffre d’affaires tournant autour de 50 millions de<br />
F CFA), mais il lui a ouvert une porte. Important des<br />
produits détergents de Tunisie, Diawara a fi nalement<br />
décidé de créer une unité de production au Mali, Noor<br />
Clean, qui doit entrer en activité début 2011, avec<br />
une capacité de production de 1 million de fl acons<br />
par jour. « Je n’ai pas de domaine de prédilection,<br />
dit Moussa Diawara. Je suis à l’image du continent:<br />
tout est possible. » ■ MARIANNE MEUNIER<br />
JEUNE AFRIQUE N° 2597 • DU 17 <strong>AU</strong> 23 OCTOBRE 2010<br />
ÉMILIE RÉGNIER POUR J.A.
Abidine Yattara, 34 ans, PDG de la SESG (voir p. 86), l’un des nombreux jeunes patrons du pays.<br />
Les récentes infrastructures – cité<br />
administrative, échangeur et troisième<br />
pont de Bamako –, dont la plupart ont<br />
été inaugurées en septembre pour le<br />
cinquantenaire de l’indépendance, ont<br />
aussi favorisé la croissance du pays.<br />
Laissant cependant certains chefs d’entreprises<br />
quelque peu frustrés. « Ces<br />
réalisations effectuées par des entre-<br />
Diaspora business<br />
Forte de 4 millions de membres répartis sur tous les<br />
continents, dont l’<strong>Afrique</strong> pour les trois quarts (Côte<br />
d’Ivoire, Sénégal, Congo, Gabon…), la diaspora malienne<br />
représente un apport conséquent pour l’économie<br />
du pays. Bien que difficiles à quantifi er, les transferts<br />
d’argent des Maliens de l’étranger sont estimés par la Banque<br />
africaine de développement (BAD) à environ 428 millions<br />
d’euros par an. Ils sont essentiellement destinés à couvrir<br />
les besoins ponctuels des familles et à fi nancer les secteurs<br />
sociaux (puits, maternités, mosquées…).<br />
Le défi pour le gouvernement est de rediriger cette manne<br />
vers des investissements productifs, qui n’en représentent<br />
aujourd’hui que 5 %. Pour Badra Alou Macalou, ministre<br />
des Maliens de l’extérieur, il s’agit de « faire du migrant un<br />
véritable agent de développement du pays ». Dans ce sens, la<br />
première édition du Forum des investisseurs de la diaspora<br />
malienne (Fidima) s’est tenue à Bamako en décembre 2009,<br />
en présence de nombreux cadres vivant à l’étranger.<br />
Ce forum a révélé une réelle volonté d’investir au pays,<br />
encore freinée par un climat des affaires difficile. « Les tracasseries<br />
administratives et la difficulté de trouver des par-<br />
JEUNE AFRIQUE N° 2597 • DU 17 <strong>AU</strong> 23 OCTOBRE 2010<br />
prises chinoises laissent peu de valeur<br />
ajoutée dans le pays et ne favorisent<br />
pas les transferts de technologie », estime<br />
Djiby Keita, entrepreneur en BTP.<br />
UNE CULTURE ENTREPRENEURIALE<br />
Il reste au gouvernement à mettre<br />
en place les conditions du développement<br />
d’acteurs nationaux forts, dans<br />
LE PLUS<br />
tous les secteurs de l’économie, en<br />
pariant sur le dynamisme entrepreneurial<br />
et en continuant d’améliorer le<br />
climat des affaires. Dans le classement<br />
« Doing Business » 2010 de la Banque<br />
mondiale, le Mali a gagné six places.<br />
Mais il n’est encore qu’au 156 e rang sur<br />
183 pays. ■<br />
MAHAMADOU CAMARA<br />
tenaires fi ables sur place m’ont fait renoncer à mon projet<br />
de société de téléphonie », raconte Idrissa Traoré, installé<br />
en Belgique. Cet avis n’est pas partagé par Amadou Bah,<br />
promoteur de la société de transport Bah Express, pour qui<br />
« ces difficultés sont largement compensées par les nombreuses<br />
opportunités et la possibilité de gagner de l’argent<br />
pour qui se bat bien ». Quant à Amadou Sangaré, senior<br />
manager à la cellule <strong>Afrique</strong> de Deloitte France, inscrit à<br />
l’ordre des experts-comptables du Mali, il estime que « les<br />
membres de la diaspora, notamment ceux de la deuxième<br />
génération, dynamisent l’économie grâce à un nouvel état<br />
d’esprit, une double culture et une pratique du transfert de<br />
compétences ».<br />
Un exemple concret : celui de Bacary Diarra, 39 ans, diplômé<br />
de l’École supérieure des sciences économiques et<br />
commerciales (Essec) et fondateur, en France, de Proveqtüs,<br />
une société spécialisée dans les ressources humaines, qui<br />
accompagne plusieurs grands groupes français. En 2009,<br />
il a créé Proveqtüs <strong>Afrique</strong>, à Bamako, afin de lutter contre<br />
« la fuite des cerveaux en recrutant les talents de la diaspora<br />
africaine pour l’<strong>Afrique</strong> ». ■ M.CA.<br />
81<br />
ÉMILIE RÉGNIER POUR J.A.
RÉPUBLIQUE DU <strong>MALI</strong><br />
<strong>MINES</strong> <strong>AU</strong> <strong>MALI</strong> :<br />
un cinquantenaire sur fond de diversification<br />
L’histoireduMali se confond<br />
avec celledel’or depuis<br />
le célèbrepèlerinage àla<br />
Mecque de l’Empereur<br />
Kankou Moussa au XIV e<br />
siècle. Cinquanteans après<br />
l’indépendance, le Mali,<br />
qui asufairedeson secteur<br />
minier un atout pour le<br />
développement, met en place<br />
sous l’impulsion du Président<br />
de la République, Amadou<br />
Toumani Touré, une véritable<br />
politique de diversification<br />
des ressourcesminières<br />
et minérales.<br />
REPUBLIQUE DU <strong>MALI</strong><br />
MINISTERE DES <strong>MINES</strong><br />
!(<br />
!<br />
<strong>AU</strong>TORITEPOURLAPROMOTIONDE LA RECHERCHEPÉTROLIÉRrE<br />
Opérateurs et opportunités<br />
Légende<br />
d'exploration<br />
" Capitale<br />
Capitale Régionale<br />
Chef lieu de Cercle<br />
Limite de Région<br />
Eni/Sipex (4consolidé)<br />
Mali oil/Heritage(7,11)<br />
Marckmore Energy (6)<br />
Selier (18)<br />
Sipex (20)<br />
Fleuve<br />
^` Forage d'exploration<br />
Mali Petroleum/Sphere<br />
PetroleumQSC (8,10)<br />
Frontière<br />
Petroma (25)<br />
Bassin Sédimentaire Afex Global/G lencore (13)<br />
Socle<br />
Falcon Martagon (17)<br />
Tinc Petroleum(24)<br />
UN APPORT SUBSTANTIEL ÀL'ÉCONOMIE DU PAYS<br />
> Le Mali occupe le 3 e rang des pays africains producteurs<br />
d’or après l’<strong>Afrique</strong> du Sud et le Ghana. Avec une<br />
production moyenne de 50 tonnes par an, le pays dispose<br />
d’un potentiel aurifère important, exploité pour le<br />
moment par sept grandes mines qui se situent dans les<br />
principales zones minières :régions de Kayes et Sikasso.<br />
D’intenses activités d’orpaillage sont aussi menées dans<br />
les zones birrimiennes du pays. Avec plus de 80 des recettes<br />
d’exportation, près de 7%du PIB, plus de 10 000<br />
emplois directs créés et des actions concrètes de développement<br />
des communautés, l’or représente unpan<br />
essentiel de l’économie nationale. Il acontribué en 2009<br />
pour plus de 160 milliards de FCFA au budget national.<br />
UNE DIVERSIFICATION<br />
DE LA PRODUCTION MINIÈRE<br />
> Lancée par le Ministère des Mines, la politique de<br />
diversification de la production, axée sur l’exploitation<br />
d’autres ressources que l’or, commence àporter ses<br />
fruits. Pour ce qui concerne le fer, le Mali compte des<br />
réserves estimées à2milliards de tonnes, essentiellement<br />
dans la région de Kayes (1,160 milliard detonnes),<br />
mais des indices ont également été décelés au Sud de<br />
Bamako, ainsi que dans l’Adrar des Iforas. L’exploitation<br />
des gisements de ferdeTienfala, dans la région de Koulikoro,<br />
débutera en2011, àl’initiative deSahara Mining,<br />
filialedel’entreprise indienne Sandeep Garg.<br />
SÉNÉGAL<br />
!(<br />
Oranto /G lencore(12)<br />
Moh Oil Pvt.Ltd (5)<br />
Coopération avec PDVSA (16)<br />
Blocs libres(1,3,9,14,15,19,<br />
21,22,23,26,27,28,29)<br />
Kayes<br />
Kenieba<br />
Bafoulabe<br />
Yelimane<br />
GUINÉE<br />
Nioro<br />
Kita<br />
Diema<br />
25<br />
BAMAKO<br />
M<strong>AU</strong>RITANIE<br />
24<br />
!(<br />
Kati<br />
" !(<br />
Kangaba<br />
Nara<br />
Kolokani Banamba<br />
Yanfolila<br />
Bougouni<br />
Niono<br />
18<br />
17 !(<br />
Segou<br />
Baroueli<br />
Koulikoro<br />
Dioila<br />
Kolondiéba<br />
CÔTED' IV OIRE<br />
Bla<br />
Sikasso<br />
Kodiolo<br />
13<br />
Ke_Macina<br />
!(<br />
3<br />
9<br />
12<br />
Tenenkou<br />
!(<br />
Djénné<br />
San Tominian<br />
Koutiala Yorosso<br />
20<br />
BASSIN DE TAOUDENNI<br />
BASSINNARA/MACINA<br />
ATOUILA1<br />
^`<br />
8<br />
Youwarou<br />
1<br />
4<br />
Tombouctou<br />
Goudam<br />
Diré<br />
Niafounke<br />
Mopti<br />
Bankass Koro<br />
19<br />
!(<br />
YARBA1<br />
^`<br />
Douentza<br />
6<br />
16<br />
23<br />
Gourma_Rharous<br />
BURKINA FASO<br />
SITUATION DES BLOCSPÉTROLIERS<br />
1:3 000 000<br />
Km<br />
26/10/2009<br />
0 150 300 ·<br />
29<br />
10<br />
Gao<br />
Dans le même temps, la société NRC envisage de produire<br />
environ 3millions de tonnes d’alumine àl’horizon<br />
2015, avec la bauxite, dont les réserves immenses sont<br />
estimées à1,2 milliarddetonnes.<br />
Outre lefer et la bauxite, le sous sol malien est riche<br />
en d’autres substances minérales, telles que le cuivre, le<br />
zinc, et le plomb, avec de nombreux indices dans le Sud<br />
et dans le Nord dupays. D’autres minerais stratégiques<br />
tels que le lithium, l’étain, l’uranium et le tantaleexistent<br />
également en quantité suffisante pour une exploitation<br />
industrielle.<br />
L’OR NOIR EN PERSPECTIVE<br />
> La recherche pétrolièreest aussi une activité pharedu<br />
département des mines. L’exploration bat son plein dans<br />
les cinq bassins sédimentaires et suscite l’espoir. Ces<br />
bassins sont divisés en 29 blocs, dont 15 ont été attribués<br />
àdes sociétés ou consortiums de sociétés (ENI-Sipex,<br />
Sipex, Afex-Glencore, Oranto-Glencore, MPSA, MOID-<br />
Héritage, Mohan, Selier, Petroma, Martagon-Falcon,<br />
MarkmoreetTink), 14 blocs sont actuellement libres.<br />
Le secteur minier au Mali est, àn’en pas douter, àl’entame<br />
d’une nouvelle étape. Le Ministère des Mines sous<br />
l’impulsion du Ministre Abou Bakar Traoré, est àpied<br />
d'œuvrepour doter le secteur minier d’une vision stratégique<br />
globale. Cettevision assureralepassage d’un pays<br />
minier émergent en une puissance minière dans la sous<br />
région :LeMali.<br />
ALGÉRIE<br />
5<br />
22<br />
7<br />
Bourem<br />
!(<br />
21<br />
28<br />
^`<br />
ANSONG O1<br />
Tessalit<br />
GRABENDE GAO<br />
Abeibara<br />
Kidal<br />
!( 14<br />
26<br />
TinEssako<br />
IN TAMAT1<br />
15 ^`<br />
BASSINDU TAMNESNA<br />
11<br />
TAHABANAT1<br />
Menako<br />
27<br />
BASSIN DESIULLEMENDEN<br />
^`<br />
NIGER<br />
Bloc Superficie Bloc Superficie<br />
km² km²<br />
1 84700 16 32 792<br />
3 22500 17 19 972<br />
4 47500 18 19 529<br />
5 59909 19 15 009<br />
6 23620 20 117 808<br />
7 39804 21 25 074<br />
8 35112 22 19 856<br />
9 38500 23 10 301<br />
10 37 544 24 29 368<br />
11 32 810 25 37 594<br />
12 53 625 26 19 602<br />
13 63 977 27 20 550<br />
14 40 996 28 9334<br />
15 19 997 29 7490<br />
PUBLI-INFORMATION
E. DAOU BAKARY<br />
INTERVIEW IbrahimDiawara<br />
Ibrahim Diawara<br />
« «Ceuxqui Ceux qui font preuve dʼaudace<br />
ont onttoutesles toutes les chancesderéussir chances de réussir »<br />
Eau, énergie, télécoms,<br />
transport aérien,<br />
matériaux, construction...<br />
Le patron dʼIbi a de la suite<br />
dans les idées. Il crée de<br />
nouvelles activités au gré<br />
des besoins de ses sociétés.<br />
Ibrahim Diawara est le symbole<br />
du jeune Malien autodidacte<br />
parti faire fortune à l’étranger<br />
et qui revient au pays la valise<br />
pleine d’idées. C’est en 1991, après le<br />
bac, qu’il rejoint son frère commerçant<br />
en Thaïlande, qu’il quitte trois ans plus<br />
tard pour l’Indonésie, avant d’atterrir<br />
JEUNE AFRIQUE N° 2597 • DU 17 <strong>AU</strong> 23 OCTOBRE 2010<br />
finalement en Australie, où il découvre<br />
le potentiel de l’énergie solaire.<br />
Dix ans après le retour au pays de ce<br />
Soninké polyglotte (il parle sept langues),<br />
qui avoue volontiers avoir « ciré<br />
des chaussures à l’âge de 12 ans pour<br />
gagner de l’argent », le groupe qu’il a<br />
créé, Ibi, pèse 10 milliards de F CFA<br />
(plus de 15,2 millions d’euros), emploie<br />
350 personnes et est présent dans<br />
plusieurs secteurs d’activité. Il a commencé<br />
par l’adduction d’eau, l’énergie<br />
solaire et les télécommunications, avec<br />
Diawara Solar (20 % du chiffre d’affaires<br />
du groupe), pour poursuivre dans<br />
le transport aérien et l’ensemencement,<br />
avec Mali Aero Company (40 % du CA),<br />
et enfin dans les matériaux, avec Stones<br />
(40 % du CA), qui, depuis 2004,<br />
LE PLUS<br />
PDG DU GROUPE IBI<br />
fabrique des pavés, tuiles, carrelages<br />
et revêtements de sol. Aujourd’hui, à<br />
40 ans, cet entrepreneur audacieux et<br />
soucieux du détail ne compte pas s’arrêter<br />
en si bon chemin et planifie déjà<br />
l’expansion régionale de son groupe. ■<br />
JEUNE AFRIQUE : Quelle est votre<br />
vision pour le développement d’Ibi?<br />
IBRAHIM DIAWARA : D’ici à<br />
dix ans, le groupe Ibi sera un leader<br />
panafricain sur tous ses marchés. Pour<br />
l’activité transport aérien, nous avons<br />
l’ambition de devenir un acteur sousrégional<br />
important, notamment grâce<br />
à l’acquisition de deux avions Dash 8,<br />
qui pourront transporter 50 personnes<br />
et compléteront notre flotte de trois<br />
83
84 LE PLUS <strong>MALI</strong><br />
ÉMILIE RÉGNIER POUR J.A.<br />
avions King Air. Pour accompagner<br />
cela, nous sommes en train de bâtir un<br />
centre de maintenance aéronautique<br />
de plus de 3 000 m 2 , pour 2 milliards<br />
de F CFA.<br />
De son côté, notre société Stones<br />
aura des parts de marché importantes<br />
pour les matériaux de revêtement<br />
de sol, notamment grâce à l’investissement<br />
de 12 milliards de F CFA que<br />
nous effectuons à Gouroudapé, près de<br />
Bafoulabé [dans la région de Kayes, à<br />
ABIDINE YATTARA<br />
PDG de la SESG<br />
LʼHOMME DES SABLES<br />
400 km au nord-ouest de Bamako,<br />
NDLR], pour produire du carbonate<br />
de calcium, un élément notamment<br />
utilisé pour la peinture. Enfin, dans<br />
quatre mois, notre nouvelle société de<br />
construction, Builders, sera opérationnelle,<br />
avec déjà 40 employés.<br />
N’est-ce pas risqué pour un jeune<br />
groupe de se disperser dans des secteurs<br />
d’activité aussi différents ?<br />
Il ne s’agit pas réellement de diversi-<br />
LES BURE<strong>AU</strong>X D’ABIDINE YATTARA sont au bord du Niger, face au<br />
chantier du « troisième pont », qui doit bientôt désengorger Bamako.<br />
Ce n’est pas un hasard: la matière première de la Société d’exploitation<br />
de sable et de gravier (SESG) vient de là.<br />
Créée en 2003, entrée en activité en 2007, la SESG fabrique des<br />
agrégats à partir du sable et du gravier extraits du fl euve. Le métier<br />
est technique et semble a priori réservé aux ingénieurs. Mais Abidine<br />
Yattara, 34 ans, a arrêté ses études après son baccalauréat. « Au Mali,<br />
c’est le cas de beaucoup de chefs d’entreprise, il faut surtout un<br />
carnet d’adresses pour réussir », dit-il. Dans son secteur, en effet,<br />
les relations comptent. La plupart des marchés étant publics, son<br />
principal client est l’État. C’est le cas pour les opérations de dragage<br />
du Niger, sur 3 kilomètres, que la SESG réalise actuellement à 400 km<br />
à l’est de Bamako. Le contrat s’élève à 2 milliards de F CFA (plus<br />
de 3 millions d’euros).<br />
À la tête de l’unique entreprise de dragage du pays, Abidine Yattara<br />
se fait cependant du souci. La concurrence chinoise l’inquiète.<br />
Il n’a pas de mots assez durs pour les chefs d’État africains qui laissent<br />
carte blanche à l’empire du Milieu au détriment des entrepreneurs<br />
locaux. Comme pour la construction du troisième pont, dont il aperçoit<br />
le chantier, planté d’un drapeau rouge, par la fenêtre de son bureau. ■<br />
MARIANNE MEUNIER<br />
fi cation. Nous ne faisons que saisir des<br />
opportunités en prolongeant des activités<br />
déjà existantes, dans lesquelles<br />
nous avons prouvé notre savoir-faire.<br />
Par exemple, le centre de maintenance<br />
aéronautique va d’abord nous<br />
servir, puis permettre de proposer des<br />
services à de nombreuses compagnies<br />
qui n’en disposent pas à proximité.<br />
Quant à Builders, il va d’abord être<br />
utile au sein du groupe, puis séduire<br />
d’autres clients grâce à une nouvelle<br />
technologie utilisant davantage de fer<br />
dans les constructions, avec des coûts<br />
inférieurs de 30 % à ceux pratiqués sur<br />
le marché.<br />
Que répondez-vous à ceux qui vous<br />
accusent de gagner de l’argent<br />
uniquement grâce aux marchés<br />
d’État ?<br />
Au Mali, comme dans la plupart des<br />
pays en développement, l’État est le<br />
principal client. Je pense que sa vocation<br />
est, entre autres, de favoriser la<br />
création de champions nationaux grâce<br />
aux commandes publiques. C’est vrai<br />
que nous en profitons, mais essentiellement<br />
pour l’activité d’ensemencement<br />
de nuages, conduite par Mali Aero<br />
Company dans le cadre de l’opération<br />
« pluies provoquées ».<br />
Nous sommes aussi fi ers de dire que<br />
les carreaux du palais présidentiel de<br />
Koulouba sont fabriqués par Stones,<br />
avec des matières premières 100 %<br />
locales…<br />
Pour ce qui est de l’activité transport<br />
aérien, pensez-vous que vous<br />
ferez le poids face aux compagnies<br />
internationales ou aux pavillons<br />
nationaux qui s’organisent ?<br />
Nous n’avons pas le même modèle.<br />
Ces compagnies utilisent des avions<br />
gros-porteurs, avec le risque qu’ils ne<br />
soient pas toujours pleins, alors que<br />
nos petits porteurs de 50 places seront<br />
certainement remplis, surtout grâce à<br />
une clientèle d’affaires souhaitant, par<br />
exemple, rallier Bamako à Conakry, en<br />
Guinée, par un vol direct.<br />
Comment financez-vous vos<br />
activités?<br />
Nous sommes un groupe sain et<br />
bien géré, qui génère des profits que<br />
nous réinvestissons pour le développement.<br />
Par ailleurs, nous sommes<br />
appuyés par des banques locales, par<br />
exemple la Banque malienne de solidarité<br />
[BMS], qui nous accompagne<br />
JEUNE AFRIQUE N° 2597 • DU 17 <strong>AU</strong> 23 OCTOBRE 2010
pour le projet de carrière à Bafoulabé.<br />
Mais nous n’excluons pas de faire<br />
appel dans le futur à des institutions<br />
de fi nancement régionales ou internationales.<br />
Avez-vous, comme la plupart des<br />
chefs d’entreprise africains autodidactes,<br />
du mal à déléguer?<br />
Il ne faut pas généraliser. Pour ma<br />
part, j’ai placé un directeur à la tête<br />
de chacune de mes filiales et je leur<br />
fais confiance en pratiquant un management<br />
participatif. Étant moi-même<br />
régulièrement en déplacement, ils ont<br />
par exemple la capacité de prendre des<br />
engagements fi nanciers. Mon rôle se<br />
limite à la coordination des activités<br />
et au développement.<br />
Trouvez-vous suffisamment de<br />
ressources humaines qualifiées au<br />
Mali?<br />
Il est vrai que, pour la plupart des<br />
métiers de techniciens, le Mali manque<br />
encore de compétences. Nous avons<br />
donc des expatriés dans chacune de<br />
nos fi liales, notamment des Sud-Africains,<br />
des Chinois, des Américains et<br />
des Philippins, mais aussi des ressortissants<br />
de la sous-région, originaires de<br />
Côte d’Ivoire, du Bénin et du Sénégal.<br />
Cela favorise-t-il réellement le transfert<br />
de compétences?<br />
Oui, les étrangers contribuent à former<br />
les Maliens, c’est le cas par exemple<br />
pour nos pilotes, qui sont formés par<br />
leurs collègues sud-africains. La société<br />
Stones a quant à elle été, un temps, dirigée<br />
par un Italien, qui a depuis passé la<br />
main à des Maliens. Par ailleurs, nous<br />
faisons appel à une société de gestion<br />
de ressources humaines, Proveqtüs,<br />
pour nous aider dans la formation de<br />
notre personnel et pour recruter des<br />
cadres africains compétents.<br />
Comment jugez-vous l’environnement<br />
des affaires au Mali?<br />
L’environnement des affaires est<br />
globalement propice à l’expansion des<br />
entreprises. Et ce dans beaucoup de<br />
secteurs d’activité. En effet, les efforts<br />
du gouvernement en matière de promotion<br />
des investissements et du secteur<br />
privé sont à saluer. Ceux qui font<br />
preuve d’audace et investissent dans<br />
des secteurs porteurs encore vierges<br />
ont toutes les chances de réussir, malgré<br />
la persistance de certaines tracasseries<br />
administratives.<br />
JEUNE AFRIQUE N° 2597 • DU 17 <strong>AU</strong> 23 OCTOBRE 2010<br />
ÉMILIE RÉGNIER POUR J.A.<br />
Aussi, il faut le reconnaître, la stabilité<br />
politique est un atout, surtout<br />
quand on voit ce qui se passe dans<br />
d’autres pays de la sous-région.<br />
Qu’est-ce qui vous a poussé à rentrer<br />
au pays après dix ans en Asie et<br />
en Océanie?<br />
Je me suis dit que de nombreuses<br />
opportunités existaient dans mon pays,<br />
LE PLUS<br />
MOHAMED BEN HACKO<br />
Directeur général de Go Voyages Mali, <strong>Afrique</strong> de l’Ouest et <strong>Afrique</strong> centrale<br />
UN FRANCHISÉ SANS FRONTIÈRES<br />
LES PROCHAINS MOIS S’ANNONCENT CHARGÉS pour Mohamed<br />
Ben Hacko, 34 ans. D’ici à la fi n de l’année 2011, il doit avoir ouvert<br />
neuf bureaux de Go Voyages sur le continent. Sur sa liste: le Sénégal,<br />
la Côte d’Ivoire, le Cameroun, le Congo-Brazzaville. Mais aussi des<br />
pays dont l’image est actuellement entachée par Al-Qaïda au Maghreb<br />
islamique (Aqmi): la Mauritanie et le Niger. Détenteur de la franchise<br />
Go Voyages pour le Mali depuis 2006 – et, depuis 2009, pour le reste<br />
de l’<strong>Afrique</strong> de l’Ouest et pour l’<strong>Afrique</strong> centrale –, il subit directement<br />
les conséquences du phénomène Aqmi. En 2009, il a affrété des vols<br />
pour 15 000 passagers vers le Mali. De janvier à août 2010, ils n’ont<br />
été que 5000.<br />
Mohamed Ben Hacko compte cependant rester dans le secteur du<br />
tourisme, où il a fait ses premières armes il y a une dizaine d’années<br />
en créant une agence à Bamako, Sud Voyages, après avoir repris une<br />
entreprise agroalimentaire familiale, Riko Glace. Il prévoit même une<br />
augmentation de son chiffre d’affaires, qui devrait passer de 3 milliards<br />
de F CFA (près de 4,6 millions d’euros) en 2009 à 4 milliards en 2010.<br />
La progression tient à la diversification des produits, comme des<br />
week-ends en Europe (à Venise notamment) ou en Tunisie destinés<br />
à une clientèle malienne. Une agence Go Voyages Mali doit également<br />
ouvrir à Montreuil, en banlieue parisienne, en décembre prochain,<br />
avec pour objectif d’aller à la rencontre de la clientèle malienne immigrée<br />
en France, qui a peu recours à internet pour l’achat de billets<br />
d’avion, mode principal de vente pour Go Voyages. ■<br />
M.M.<br />
et que je pourrais apporter davantage<br />
en investissant sur place qu’en me limitant<br />
au simple commerce entre l’<strong>Afrique</strong><br />
et l’Asie. J’ai failli renoncer au début,<br />
après la création de Diawara Solar, ma<br />
première société au Mali, qui a connu<br />
des difficultés. Mais avec le recul, je ne<br />
regrette absolument pas. ■<br />
Propos recueillis à Bamako<br />
par MAHAMADOU CAMARA<br />
85
88 LE PLUS <strong>MALI</strong><br />
TÉLÉCOMS<br />
Match Matchserré serré entre entreOrange Orange<br />
et Sotelma<br />
Téléphonie fixe, mobile ou internet,<br />
depuis quelques mois, aucun jour ne<br />
passe sans que lʼun des deux opérateurs<br />
du pays lance une promotion.<br />
Bonus de crédit, SMS à moitié prix, appels gratuits<br />
vers les fi xes, pack internet… telles sont les armes<br />
de la bataille que se livrent au Mali deux opérateurs<br />
français, par fi liales interposées. En effet, Orange<br />
Mali est détenu par le sénégalais Sonatel, fi liale de France<br />
Télécom, alors que Sotelma et sa fi liale mobile, Malitel, sont<br />
depuis 2009 dans le giron de Maroc Télécom, dont l’actionnaire<br />
de référence est SFR.<br />
Le match a longtemps tourné à l’avantage d’Orange, qui,<br />
grâce à des moyens plus importants, s’est installé sur le marché<br />
dès 2002, alors que l’opérateur historique était englué dans des<br />
problèmes de gestion administrative. Avec un réseau dense et<br />
une politique commerciale agressive, Orange occupe la première<br />
place, avec 2,5 millions d’abonnés au mobile (85 % de<br />
parts de marché) et un chiffre d’affaires de 151 milliards de<br />
F CFA (près de 230,2 millions d’euros). Mais depuis quelques<br />
mois, avec l’arrivée à leurs commandes de Maroc Télécom, qui,<br />
en 2009, a racheté 51 % de l’opérateur national malien pour<br />
180 milliards de F CFA, Sotelma et Malitel ont repris du poil de<br />
la bête. Avec un plan d’investissement de 23 millions d’euros<br />
sur cinq ans, le réseau se déploie et affi che 500000 abonnés<br />
La « monoculture de l’or »: c’est<br />
ce qu’évoque encore le Mali,<br />
troisième producteur africain<br />
de métal jaune, après l’<strong>Afrique</strong><br />
du Sud et le Ghana, pour la plupart<br />
des opérateurs miniers. Peut-être plus<br />
pour très longtemps. « Notre mot d’ordre,<br />
c’est la diversification, confie un<br />
conseiller du ministère des Mines. Le<br />
nouveau code minier doit être fi nalisé<br />
en décembre prochain. Son point central<br />
est une fi scalité plus incitative, plus<br />
souple, plus transparente, et, surtout,<br />
plus appliquée. »<br />
Lancé en 2007 par Ahmed Sow (voir<br />
p. 76), prédécesseur de l’actuel ministre<br />
des Mines, Igor Diarra, le projet<br />
de nouveau code minier devait être<br />
adopté par les députés au premier trimestre<br />
de 2009. Ce retard, d’un an et<br />
demi aujourd’hui, est dû aux discussions<br />
intensives avec les opérateurs pour un<br />
partenariat « gagnant-gagnant », explique-t-on<br />
au ministère. L’enjeu est de<br />
faire migrer les opérateurs vers ce nouveau<br />
code et ne pas renouveler l’échec<br />
du code de 1999 – à l’époque, la loi leur<br />
en donnant le droit, tous les miniers,<br />
sauf un, étaient restés sous la législation<br />
du code minier de 1991.<br />
Si l’or reste de loin le premier produit<br />
d’exportation du Mali (15 % du PIB, une<br />
production moyenne de 50 tonnes par an<br />
et 800 t de réserves estimées), l’objectif<br />
des autorités est désormais d’attirer de<br />
nouveaux investisseurs en valorisant au<br />
maximum les autres ressources du pays,<br />
aussi nombreuses que sous-exploitées.<br />
Au premier rang des espoirs maliens<br />
fi gure l’or noir. L’exploration pétrolière<br />
bat son plein dans 5 bassins sédimentaires,<br />
divisés en 28 blocs dont 15 sont<br />
Une « cabine téléphonique » de Bamako,<br />
le commerce de proximité par excellence.<br />
MATIÈRES PREMIÈRES Un géantqui géant qui sʼignore<br />
au mobile. Dans certaines régions du pays ou certains quartiers<br />
de Bamako, son service est meilleur, et les tarifs pour<br />
les appels internationaux plus bas que ceux d’Orange. Cette<br />
guerre commerciale, qui a permis de faire passer le taux de<br />
pénétration de 5 % à 42 % entre 2003 et 2008, se fait au<br />
bénéfi ce des clients, qui attendent malgré tout avec impatience<br />
l’arrivée, en 2011, d’un troisième opérateur, synonyme de nouvelle<br />
baisse des prix. ■ MAHAMADOU CAMARA<br />
déjà attribués à des sociétés partenaires<br />
de l’État malien, parmi lesquelles l’italien<br />
ENI, l’algérien Sipex, l’américain<br />
Glencore…<br />
Le sous-sol malien est également riche<br />
en calcaire (avec des réserves estimées à<br />
122 millions de t), de marbres (60 millions<br />
de t) ou de métaux comme la bauxite<br />
(1,5 milliard de t), le manganèse<br />
(150 millions de t), le plomb et le zinc<br />
(1,7 million de t), et le fer (2 milliards<br />
de t). Première initiative d’envergure,<br />
la société Sahara Mining, filiale de la<br />
compagnie indienne Sandeep Garg,<br />
doit commencer prochainement l’extraction<br />
d’environ 50000 t de minerai<br />
de fer dans la chaîne montagneuse de<br />
Tienfala, à une vingtaine de kilomètres<br />
de la capitale. Montant de l’investissement:<br />
40 millions de dollars. ■<br />
PIERRE-FRANÇOIS N<strong>AU</strong>DÉ<br />
JEUNE AFRIQUE N° 2597 • DU 17 <strong>AU</strong> 23 OCTOBRE 2010<br />
PIERRE-YVES BRUN<strong>AU</strong>D/PICTURETANK
Message<br />
Depuis ces dernières, la lla<br />
préprésentation du Nord Mali a<br />
conduit à une e désaffectation<br />
désaffec ectation<br />
de la clientèle èle touris touristique, istique,<br />
notamment française eeteuro- et euroopéenne parce que la zone ne<br />
serait pas sûre. En réalité,<br />
Il indiquait à cette<br />
occasion, la mise en<br />
oeuvre d’actions vigoureuses<br />
en matière<br />
on n’a jamais enregistré registré<br />
Niger) et au<br />
un quelconque enlèvement vement<br />
Sud, dans les régions de<br />
d’étranger nulle part art sur<br />
Kayes, Koulikoro et Sikasso.<br />
le territoire du mali, à l’exception<br />
d’un cas particulier. articulier.<br />
Le gouvernement du Mali est en train<br />
Cette situation résulte e de no-<br />
de se donner les moyens pour metmettre tradition d’hospitalité, alité, codifi codifiée fiéetre<br />
en oeuvre le plan d’action de la<br />
dans la Charte de Kurukan<br />
n Fuga<br />
nouvelle stratégie de développement<br />
(en 1236) qui stipule « Chacun Chacu cun ale a le<br />
du tourisme qui vient d’être adoptée<br />
droit à la vie et à la préservat<br />
préservation ation de<br />
le 30 juin 2010, 2010 2010, afin defaire defaire du Mali<br />
son intégrité physique…» Peut-on de sécurité et de développement l’une des plus grandes destinations<br />
mieux dire pour garantir la sécurité communautaire dans cette partie du de l’<strong>Afrique</strong> de l’ouest.<br />
de l’individu.<br />
Mali dont la stratégie<br />
Tous les étrangers qui<br />
visitent ou résident<br />
Le Mali dispose dehauts<br />
devait s’appuyer sur<br />
une occupation ra-<br />
Ce plan d’action qui couvre le période<br />
2010-2012, porte principale-<br />
au Mali bénéficient de lieux touristiques au tionnelle de l’espace ment sur le développement de l’offre<br />
cette protection.<br />
Par conséquent, le<br />
Mali se trouve victi-<br />
centre du pays, comme<br />
les régions deMopti avec<br />
par l’administration<br />
d’État, une mobilité<br />
accrue des troupes<br />
par l’amélioration de la qualité des<br />
infrastructures d’accueil et de transport,<br />
l’aménagement de nouveaux<br />
me et otage de cette Djenné et le pays Dogon, en prévention et sites et le renforcement des compé-<br />
tradition qui pousse<br />
le Président de la<br />
de Ségou avec son<br />
en intervention, un<br />
maillage pertinent<br />
tences ainsi que celle de la promotion<br />
de la destination, est évalué à<br />
République à s’inves- Festival sur le Fleuve de la zone cible par 33 025 405 000 FCFA.<br />
tir pour encadrer au<br />
maximum les étrangers<br />
qui sont amenés<br />
Niger et au sud, dans<br />
les régions de Kayes,<br />
des infrastructures<br />
pour les Forces Armées<br />
et de Sécurité<br />
Conscient qu’il n’existe nulle part au<br />
monde de sécurité zéro, qu’au sur-<br />
à visiter l’immensité<br />
désertique du Nord<br />
Koulikoro et Sikasso. et une mobilisation<br />
sociale afin deréduiplus,<br />
la situation de l’insécurité est<br />
plus grande dans le pays de ceux qui<br />
Mali.<br />
re voire de supprimer complètement déconseille le Mali, le Gouvernement<br />
les causes d’insécurité.<br />
continue d’oeuvrer au quotidien pour<br />
C’est dans un tel contexte que le<br />
assurer la quiétude du Mali, un pays<br />
Président de la République du Mali Au delà de cette préoccupation, le où il fait bon vivre.<br />
a évoqué, le7septembre 2010, de- développement du tourisme au Mali<br />
vant le Parlement européen, des aspects<br />
relatifs à la gestion sécuritaire<br />
de cet espace, éléments de la Politi-<br />
n’est pas concentré seulement sur<br />
le Nord Mali. Tout au contraire, les<br />
principaux sites touristiques se trou-<br />
Ministère de l’Artisanat<br />
et du Tourisme du Mali<br />
Tél. :+223 20 29 53 44 /20296450<br />
que nationale de lutte contre l’insévent au Centre (Régions de Mopti Fax :+223 20 29 93 27<br />
curité et le terrorisme dans la bande avec Djenné et le Pays Dogon, de Email :malitourismeinfo@yahoo.fr<br />
sahélo-saharienne.<br />
Ségou avecson Festival sur le Fleuve Site :www.malitourisme.com<br />
DIFCOM C.C. -Photos Ministère de l’Artisanat et du Tourisme
90 LE PLUS <strong>MALI</strong><br />
AGRICULTURE<br />
Les Lesinvestissements<br />
investissements<br />
gagnent gagnentduterrain du terrain<br />
Portée par un nouveau cadre juridique et par les leçons<br />
tirées de la crise alimentaire de 2008, la production décolle.<br />
Les filières sʼorganisent. Et sʼindustrialisent timidement.<br />
Le rêve d’Amadou Toumani Touré<br />
de « faire du Mali une puissance<br />
agricole » est-il en train de<br />
se réaliser? En tout cas, l’État a<br />
décidé de mettre les moyens pour développer<br />
le secteur, qui contribue à 36 %<br />
du produit intérieur brut (PIB) et occupe<br />
environ 80 % de la population active.<br />
La politique mise en œuvre, qui vise<br />
notamment à atteindre une production<br />
de 10 millions de tonnes de céréales en<br />
2012 et à créer des fi lières agro-industrielles,<br />
a contribué à faire venir les<br />
investisseurs, nationaux comme étrangers,<br />
attirés par le cadre institutionnel<br />
et la disponibilité des terres.<br />
Le vote de la loi d’orientation agricole,<br />
en 2005, a été le point de départ de la<br />
modernisation de l’agriculture, à travers<br />
des programmes d’aménagements<br />
hydrauliques, une mécanisation accrue<br />
et la promotion de fi lières porteuses.<br />
En 2008, la crise alimentaire et son<br />
corollaire, la hausse des prix, ont donné<br />
un coup d’accélérateur à cette stratégie.<br />
En effet, la réponse du gouvernement<br />
malien pour assurer la sécurité alimentaire<br />
a été l’« Initiative riz »: même si elle<br />
n’a eu aucun impact sur les prix, cette<br />
dernière, à travers la subvention des<br />
intrants et des engrais pour 34 milliards<br />
de F CFA (52 millions d’euros), a permis<br />
une augmentation de la production de<br />
50 %, à 1,6 million de t.<br />
EUPHORIE CÉRÉALIÈRE<br />
LE LONG DU NIGER<br />
Pour mener à bien ses ambitions agricoles,<br />
l’État malien dispose d’un outil<br />
de premier ordre : l’Office du Niger.<br />
Créé en 1932 par le colon français pour<br />
mettre en valeur les 5 millions d’hectares<br />
de terres potentiellement arables<br />
grâce au delta du Niger, l’organisme,<br />
CYRIL ACHCAR Directeur général du groupe Achcar Mali Industries (AMI)<br />
<strong>AU</strong> CHAMP ET <strong>AU</strong> MOULIN<br />
À 34 ANS, Cyril Achcar,<br />
marié et père de deux<br />
enfants, porte sur ses<br />
épaules le poids d’un<br />
groupe fondé par son<br />
grand-père Émile en 1950,<br />
qui emploie désormais<br />
700 personnes et pesait,<br />
en 2009, 32 milliards<br />
de F CFA (près de 51,9 millions<br />
d’euros).<br />
Né à Bamako d’un père<br />
libanais et d’une mère<br />
française, formé à l’École<br />
supérieure de commerce de Rouen (France), il a gravi<br />
tous les échelons pour devenir, en 2004, directeur<br />
général des différentes fi liales d’Achcar Mali Industries<br />
(AMI), dont les activités s’étendent de la farine<br />
à l’eau minérale, en passant par les aliments pour<br />
E. DAOU BAKARY POUR J.A.<br />
dirigé par Kassoum Denon, n’affiche<br />
aujourd’hui que 98 000 ha irrigués.<br />
Cependant, d’importants investisseurs<br />
se bousculent à son portillon, au premier<br />
rang desquels la Libye, qui, à<br />
travers la société Malibya Agriculture,<br />
aménage 100000 ha, en collaboration<br />
avec le Centre national chinois du riz<br />
hybride.<br />
Le groupe malien Tomota, appuyé par<br />
des techniciens indiens, produit déjà des<br />
bétail, la confiserie et le transport. Mais la principale<br />
fi liale du groupe (72 % du CA), Grands Moulins du<br />
Mali (GMM), qui produit environ 100000 tonnes<br />
de farine par mois à Koulikoro (à 60 kilomètres de<br />
Bamako), perd des parts de marché du fait de la<br />
concurrence des farines importées à bas coûts.<br />
Pour y faire face, Cyril Achcar a choisi de remonter<br />
la fi lière en développant la production de blé à Diré,<br />
dans la région de Tombouctou, à travers la Compagnie<br />
malienne pour le développement du blé (CMDB). Les<br />
10000 t produites sur une surface de 2000 ha servent à<br />
alimenter le moulin de GMM et préfigurent un tournant<br />
historique pour l’entreprise, qui a vocation à « devenir<br />
un véritable groupe agro-industriel intégré ».<br />
Le jeune patron continue de chercher de nouvelles<br />
niches de développement. La production de jus de<br />
fruits et de lait en poudre fait déjà partie des projets<br />
en cours. ■<br />
M.CA.<br />
JEUNE AFRIQUE N° 2597 • DU 17 <strong>AU</strong> 23 OCTOBRE 2010
oléagineux (tournesol) sur une zone de<br />
2000 ha, avec la possibilité de s’étendre<br />
sur 140 000 ha. Quant au Grand Distributeur<br />
céréalier du Mali (GDCM), il<br />
occupe 7 400 ha pour produire du blé<br />
afin d’alimenter son moulin et de faire<br />
de l’élevage.<br />
L’État a par ailleurs signé d’autres<br />
conventions, avec Sosumar et Sukala<br />
pour le sucre, ainsi qu’avec le Millenium<br />
Challenge Account (MCA), l’Union économique<br />
et monétaire ouest-africaine<br />
(UEMOA) et la Communauté des États<br />
sahélo-sahariens (Cen-Sad) pour une<br />
superficie totale de 193000 ha.<br />
Accompagnée par une mécanisation<br />
de l’agriculture et une bonne pluviométrie,<br />
la politique du gouvernement<br />
a contribué à atteindre une production<br />
céréalière de 7,5 millions de t pour<br />
la campagne 2010-2011 (en hausse<br />
de 23 %), qui couvre entièrement les<br />
besoins du pays, avec un excédent de<br />
plus de 3 millions de t.<br />
TRANSFORMATION À PETITS PAS<br />
Les fruits et légumes ne sont pas en<br />
reste. Avec un potentiel de 200000 t, les<br />
exportations de mangues sont passées<br />
de 1 000 t en 2005 à environ 12 000 t<br />
en 2009, grâce à la mise en place dans<br />
la région de Sikasso (Sud) du Périmètre<br />
logistique en zone agricole (Plaza),<br />
incluant une unité de traitement et de<br />
conditionnement qui emploie 200 personnes.<br />
Mais pour cette fi lière, comme<br />
JEUNE AFRIQUE N° 2597 • DU 17 <strong>AU</strong> 23 OCTOBRE 2010<br />
Zones agricoles irriguées, sur les<br />
rives du Niger, près de Tombouctou.<br />
pour celles de la tomate (64000 t), de la<br />
pomme de terre (95000 t), de l’oignon<br />
(260 000 t) ou encore de l’échalote<br />
(100000 t), le principal défi réside dans<br />
la transformation.<br />
La Comafruit, créée en 2009 par des<br />
investisseurs maliens et français, devrait<br />
montrer l’exemple: elle prévoit de produire<br />
5000 t de purée de mangue dès<br />
2011 et 20000 t à terme, « qui seront<br />
utilisées dans la fabrication de sorbets<br />
ou diluées à 30 % pour faire des jus de<br />
fruits », explique son directeur général,<br />
Lamine Ba.<br />
Quant au coton, autrefois première<br />
source de devises du Mali, il connaît un<br />
regain d’intérêt du fait de la hausse des<br />
cours mondiaux. La production devrait<br />
dépasser 300000 t en 2010, contre environ<br />
200000 t les deux années précédentes,<br />
ce qui va sans doute accélérer la privatisation<br />
de la Compagnie malienne de<br />
développement des textiles (CMDT) et<br />
favoriser la transformation sur place, qui<br />
ne dépasse guère 2 % de la production.<br />
L’élevage, lui, reste le parent pauvre<br />
du secteur agro-industriel malien. Malgré<br />
plus de 32 millions de têtes de bétail<br />
(bovins, camelins, caprins, ovins), qui<br />
en font le premier cheptel d’<strong>Afrique</strong> de<br />
l’Ouest et le troisième secteur d’exportation,<br />
aucune initiative d’envergure n’a<br />
encore été prise par le gouvernement ou<br />
les opérateurs privés pour favoriser son<br />
industrialisation. ■<br />
MAHAMADOU CAMARA<br />
BERNARD FOUBERT/AFP