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Arnold et Laica :<br />
des fidèles compagnons, qui comptent<br />
Christophe avance derrière le troupeau. L’entourant joyeusement, Arnold, cinq<br />
ans, et Laica, deux ans, ses deux border collies, le suivent pas à pas toujours à<br />
l’affût de la moindre consigne venant de leur maître pour conduire les brebis.<br />
« Si cette année, je garde à nouveau un troupeau, c’est surtout pour mes deux<br />
chiens. Ils attendaient ça depuis si longtemps. Disons que cette estive, c’est 70%<br />
pour eux et 30% pour moi. Ça me fait plaisir de les voir travailler.<br />
En plus pour Laica, c’est la première fois. Elle est efficace et très douce quand elle<br />
contourne et rabat le troupeau. La première estive avec Arnold a été très dure pour<br />
nous deux : nous gardions 3000 brebis et la météo était terrible, orages violents,<br />
tempêtes de neige, pluies diluviennes. Mes pieds et les pattes d’Arnold étaient<br />
en sang ». Travaillant patte dans la main, maître et chiens forme une équipe<br />
solidaire et compétente.<br />
Aux petits soins de ces dames<br />
« Je préfère les soigner au jour le jour, plutôt qu’à la petite semaine ». Attentif,<br />
Christophe repère aisément les brebis blessées ou malades. « Celles qui boitent<br />
ont souvent une épine de pin dans l’onglon. Il faut l’extraire et désinfecter ». D’autres<br />
se font des écorchures, qui s’infectent dangereusement en altitude à cause de<br />
mouches spécifiques qui y pondent leurs larves. « Les animaux souffrant de<br />
maladies infectieuses ont les oreilles qui pendent et sont à la traîne derrière les<br />
autres. Les agneaux sont fragiles aux coups de froid et aux infections dont souffrent<br />
leurs mères. Alors je leur administre à l’aide d’une seringue des antibiotiques ».<br />
Après avoir reconnue l’animal malade, Christophe le saisit avec sa houlette<br />
par la patte arrière. Une fois la brebis immobilisée, il lui prodigue les soins.<br />
Avant de la relâcher, il la marque d’une croix rouge pour la reconnaître et suivre<br />
sa rémission. Les pertes se situent autour de 3% à 6% dans un troupeau.<br />
Myiases : une blessure colonisée par des<br />
larves de mouches. S’ils ne sont pas retirés,<br />
les asticots creusent et se nourrissent de<br />
la chaire. Affaiblie, la brebis peut en mourir.<br />
Pour extraire l’épine de pin,<br />
qui s’est enfoncée dans l’onglon,<br />
il faut tailler à l’aide d’un couteau.<br />
Après avoir saisit la<br />
pâte arrière de la brebis,<br />
Christophe l’immobilise<br />
Un agneau reçoit une piqûre de pénicilline<br />
pour soigner une infection pulmonaire.<br />
Puis l’onglon est aspergé<br />
d’un produit désinfectant et cicatrisant.<br />
L’homme<br />
seul face à<br />
la nature, un<br />
défi, ponctué<br />
de grands<br />
moments de<br />
plénitude.<br />
Une vie hors des chemins battus<br />
Contraste saisissant que celui, entre ces jeunes citadins<br />
aux préoccupations parfois superficielles, mais souvent<br />
artificielles, et Christophe, 24 ans, faisant face aux aléas<br />
de la vie pastorale.<br />
Jovial, accueillant, rien ne prédestinait ce grand jeune<br />
homme dynamique originaire du Puy-de-Dôme à<br />
la solitude de longues estives. « La montagne m’a<br />
toujours attirée, surtout les reliefs escarpés du Mercantour,<br />
couverts d’une flore variée et abondante poussant dans un<br />
environnement sec et rocailleux ».<br />
Sa première « montagne » (ndlr : estive), il la découvre<br />
à 19 ans après un baccalauréat sciences et technologies<br />
de l’agronomie et du vivant. « Ça a été très difficile de faire<br />
face à tant de responsabilités et à une vie aussi austère sans<br />
y être préparé », avoue Christophe sans faux-semblants.<br />
Apprenant à ne compter que sur lui-même et à la force<br />
de sa volonté, il s’initie aux secrets du métier.<br />
« Aujourd’hui c’est ma quatrième saison de berger. Je me<br />
sens plus à mon aise car je suis entouré de bons chiens sur<br />
qui je peux vraiment compter ». Entre temps, il a passé<br />
un BTS en production animale en haute-Loire pour se<br />
spécialiser dans la tonde. « Je me considère plutôt comme<br />
tondeur. J’aime cette activité noble et très enrichissante.<br />
Chaque saison est une expérience inoubliable ».<br />
De nature à ne jamais se reposer sur ses lauriers,<br />
Christophe va suivre une formation de bûcheron et<br />
continuer à tracer son chemin : « Nous avons tous des<br />
sentiments et des penchants, dont nous ne pouvons pas<br />
déterminer les origines. Certainement ont-ils leur signification<br />
et leur sens. Alors loin du tourbillon quotidien de la vie, je<br />
réfléchis et je cherche à me découvrir ». Belle leçon de vie,<br />
que nous livre décidément ce jeune homme.<br />
Reportage aux Vacheries de Marie : Jean-Charles Vinaj (photos). Miriam Berger (texte)<br />
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