Green Islands in the City - Grüne Inseln in der Stadt

Imaginer son jardin urbain
« Si la musique est le lien entre le son et le silence, si elle remplit
l’espace entre la vie et la mort, alors cela vaut aussi pour l’art du
jardin. “Dans la musique, on est constamment confronté à des
phénomènes sur lesquels on n’a aucun contrôle.” Il en va de même
avec l’art du jardin. Dans un concert, ce ne sont pas les
applaudissements qui sont décisifs pour l’artiste, mais le silence
avec lequel est abordée sa musique. Percevoir la musique
s’apprend, tout comme s’apprend la perception du jardin 1 . »
Les réflexions que les architectes paysagistes expriment par la suite sur leur création au quotidien
rejoignent le propos du chef d’orchestre Daniel Barenboim : que ce soit dans les 25 contributions de
paysagistes ou dans celle signée d’un architecte pluridisciplinaire, les analogies sont frappantes. À la fois
complexes, poétiques et visionnaires, les positions et ébauches de ces auteurs révèlent un vrai désir de
jardins. Aussi différentes soient-elles, elles disent des perceptions au fond semblables, et toutes
accordent aux jardins en ville une importance culturelle et écologique majeure. Ces architectes
paysagistes offrent ici une remarquable diversité d’approches, quand bien même ils ne peuvent bien sûr
représenter la profession de façon exhaustive.
Dans tous ces projets se retrouve une approche plurielle et créative de l’espace libre au sein du contexte
urbain. Il suffit de les observer les uns après les autres pour découvrir toute la richesse thématique des
jardins urbains et la multiplicité des perspectives professionnelles à l’œuvre ici. Tous expriment une
force d’imagination et une capacité à se positionner aussi dans un lieu abstrait. Un lieu ne doit pas être
nécessairement concret pour qu’un projet voie le jour, même s’il n’existe pas de lieu où il n’y a rien –
parmi les paysagistes représenté(e)s ici, toutes et tous sont unanimes sur ce point –, et si la plupart
s’inspirent pour ainsi dire in situ. « Même dans un soi-disant néant, on trouve des empreintes, il y a un
désir, une demande, au sens d’une mission. » (Christof Geskes et Kristina Hack). La conjonction d’un
espace concret, d’exigences données et de l’empirie que porte en elle la personne créatrice peut faire
émerger un lieu nouveau à partir d’un prétendu « néant ». « La créativité ne dépend pas directement
d’un lieu donné, comme c’est le cas pour un jardin. Un texte, une musique ou une image n’ont pas
besoin d’un lieu pour produire des nostalgies ou des représentations à partir d’éléments apparemment
simples. Dans un jardin réussi, le lieu vient se superposer à l’idée de son aménagement et s’en retrouve
renforcé. C’est ainsi que naît la poésie de cette interaction. » Ainsi définissent les architectes
paysagistes Breimann & Bruun leur propre travail. Ce sont la volonté et la capacité à façonner qui
permettent de relever le défi d’un espace vide (Rainer Schmidt) pour le prendre comme un cadeau créatif
(Simons & Hinze).
La plupart des architectes paysagistes n’entendent pas véritablement rattacher leur travail à un ou
plusieurs modèles. Ce sont plutôt des impressions marquantes qui les accompagnent, des projets ou
des espaces verts, ou même, comme le confiait encore en février de cette année Winfried Häfner,
décédé prématurément un mois plus tard, « la nature, l’art et la vie, bien sûr ». Dans un deuxième temps,
des noms sont néanmoins cités, ceux de personnalités historiques telles que Friedrich Ludwig von Sckell
1 Cité d‘après Beitmann, Bert: Theorie der schönen Gartenkunst 2009. Geschichte der Gartenkunst vol. XII / I–IV , p. 17.
www.gartenkunst-beitmann.de