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Extrait du bulletin n°8 - RCN Justice & Démocratie
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2ème trimestre 2004<br />
CONGO<br />
droit qui amènerait le primitif à la<br />
civilisation.<br />
Cette démarche imprudente a généré<br />
une grave crise d’orientation de la pensée<br />
juridique de l’Africain qui est<br />
complètement écartelé entre deux<br />
modèles de pensée dont il n’a plus la<br />
maîtrise ni de<br />
l’un, ni de<br />
l’autre.<br />
Ce contraste est bien illustré en RDC<br />
par des lois votées et promulguées pour<br />
régir des matières importantes mais qui<br />
restent ignorées d’une bonne partie de la<br />
population et souvent par ceux-là même<br />
qui sont appelés à les appliquer.<br />
La Loi fondamentale de 1960 en est une<br />
parfaite illustration. En effet, les acteurs<br />
politiques du premier gouvernement<br />
central n’ont pas intériorisé les règles<br />
élémentaires de fonctionnement des<br />
institutions politiques mises en place,<br />
notamment l’exécutif bicéphale et le<br />
parlement bicaméral.<br />
Très vite, de fortes tensions ont surgi<br />
entre le Premier Ministre LUMUMBA et<br />
le Président KASA-VUBU qui n’ont pas<br />
hésité à se paralyser mutuellement suite à<br />
une mauvaise interprétation des<br />
dispositions de cette Constitution,<br />
inspirée par les juristes belges. Il était trop<br />
tentant pour ces deux Congolais de ne<br />
pas exercer l’imperium alors qu’ils<br />
portaient respectivement les titres de<br />
Chef du Gouvernement et de Président<br />
de la République, d’autant plus qu’en<br />
Afrique il est inconcevable qu’un<br />
détenteur du pouvoir ne puisse en jouir.<br />
Nous ne saurions pas faire un inventaire<br />
exhaustif de ces textes légaux mais nous<br />
citerons à titre d’exemples le Code de la<br />
famille congolais en matière de mariage<br />
et des successions et la loi sur<br />
l’organisation et la compétence<br />
" Malheur au peuple qui accepte et judiciaires, … qui sont encore<br />
subit tous les changements avec<br />
superbement ignorés par une<br />
bonne frange du peuple<br />
De beaux<br />
une sorte d’indifférence : c’est une congolais.<br />
textes de lois proie qui s’offre d’elle-même à<br />
sont votés et<br />
toutes les ambitions."<br />
En matière de mariage<br />
promulgués<br />
mais sans<br />
P. DUPRAT<br />
Si le Code de la famille<br />
lendemain<br />
congolais a pu innover sur le<br />
certain car ils ne rencontrent pas les<br />
statut de la personne en se libérant de<br />
attentes des populations auxquelles on les<br />
certaines inadéquations du droit<br />
destine.<br />
napoléonien auquel se référait l’ancien<br />
législateur, il<br />
La conséquence en est que la plupart n’en demeure<br />
des droits des pays africains sont pas néanmoins<br />
Le juge face à la sorcellerie<br />
actuellement inadaptés aux situations inadapté sur la<br />
qu’ils sont censés résoudre.<br />
question du<br />
mariage lorsqu’il<br />
Le cas du droit positif congolais<br />
prône la<br />
monogamie<br />
alors qu’il tolère<br />
la polygamie en<br />
permettant<br />
l’affiliation (3)<br />
des enfants issus<br />
Le droit pénal congolais n’incrimine pas<br />
la sorcellerie faute de pouvoir en établir<br />
la matérialité, les preuves en cette<br />
matière n’étant pas formellement<br />
fiables. Dans la province du Bas-Congo,<br />
les juges assesseurs (spécialistes des<br />
coutumes locales) recourent aux<br />
« révélateurs », experts en sorcellerie,<br />
pour découvrir l’auteur d’un « crime de<br />
sorcellerie ». Mais le juge, ne pouvant<br />
pas appliquer une peine pour un fait<br />
non incriminé par le législateur, renvoie<br />
les parties à la procédure de<br />
conciliation. Cette parade ne résout pas<br />
le problème de l’inadéquation du droit<br />
écrit.<br />
des unions<br />
polygamiques<br />
ou naturelles<br />
sous prétexte<br />
que chaque<br />
enfant doit avoir<br />
un père.<br />
Ne jouissant<br />
d’aucun statut juridique vis-à-vis des<br />
pères de leurs enfants affiliés, les femmes<br />
sont contraintes de vivre dans une union<br />
reconnue par les coutumes, mais<br />
curieusement érigée en infraction par le<br />
législateur.<br />
En matière de successions<br />
Les dispositions du Code de la famille<br />
relatives aux successions sont en<br />
contradiction avec la coutume des<br />
communautés matrilinéaires. En effet, le<br />
droit positif congolais dispose que les<br />
enfants sont les héritiers de première<br />
catégorie de leurs père et mère.<br />
Cependant, chez les matrilinéaires, ce<br />
sont les neveux du de cujus (enfants de ses<br />
sœurs) qui viennent à sa succession,<br />
tandis que ses propres rejetons doivent<br />
attendre celle de leur oncle maternel.<br />
Cette coutume prévaut dans les<br />
provinces du Bas-Congo et du Bandundu<br />
où les coutumes ne reconnaissent point le<br />
testament du de cujus s’il n’a pas prévu la<br />
part successorale des membres du clan.<br />
Le pater familias (oncle maternel du<br />
défunt) liquide toujours la succession en<br />
ignorant les droits de la veuve et des<br />
orphelins qui se résignent longtemps<br />
dans des frustrations s’ils ne se<br />
déterminent pas à affronter la furie du<br />
chef du clan avec les graves conséquences<br />
mystérieuses qui peuvent s’ensuivre en<br />
réclamant leur héritage.<br />
Lors des journées<br />
portes ouvertes au<br />
tribunal de paix de<br />
Matadi, toute<br />
l’assemblée a reconnu<br />
cette réalité mais,<br />
craignant la capacité<br />
de nuisance du pater<br />
familias (sorcellerie),<br />
personne ne peut oser<br />
l’attraire devant le<br />
juge moderne qui ne<br />
pourra assurer la<br />
protection contre les<br />
mauvais sorts.<br />
Voilà la limite du<br />
droit d’origine<br />
D.B.W. étrangère qui, mis à<br />
l’épreuve, ne sait pas<br />
prendre en compte<br />
certaines réalités sociales locales pour<br />
assurer la protection des justiciables. Il<br />
étale donc son inefficacité pour restaurer<br />
la paix sociale qui est fréquemment<br />
troublée par ce forfait, parfois reconnu<br />
par son auteur, mais qui laisse le juge<br />
perplexe quant à l’application de la loi<br />
pénale (voir encadré ci-contre).<br />
Les règles d’organisation, de<br />
compétence et de procédure judiciaires<br />
Une autre démarcation fondamentale<br />
entre le droit moderne et la coutume<br />
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