du génie - Amicale 17 RGP
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TÉMOIGNAGE<br />
LE BARRAGE<br />
D'octobre 1958 à octobre 1959, j'ai participé au sein de<br />
la 75 e Compagnie <strong>du</strong> <strong>génie</strong> Aéroporté de la 25 e DP à la construction<br />
<strong>du</strong> barrage électrifié (Barrage Avant côté tunisien).<br />
J'étais sergent et j'eus alors pour chef de section le Souslieutenant<br />
LOMBARD (appelé) puis les Adjudants DESBOIS et<br />
LORRAIS et comme commandants de compagnie le Capitaine<br />
PRIMAUX puis le Capitaine BASTID.<br />
C'est une période dont les anciens de la 75 ne parlent<br />
pas beaucoup et pourtant ils peuvent être fiers <strong>du</strong> travail qu'ils ont<br />
fourni pendant plus de 15 mois.<br />
J'ai complété et ravivé mes souvenirs en reprenant<br />
contact avec le Lieutenant-colonel SCHOULZ, qui présent à l'unité<br />
de 1959 à 1961, y commandait comme Sous-lieutenant la 3 e<br />
Section pendant la période des travaux sur le Barrage Avant. Son<br />
aide m'a été précieuse.<br />
En 1956, profitant de l'accueil de la Tunisie et <strong>du</strong> Maroc,<br />
le gouvernement provisoire de la république algérienne commence<br />
à s'organiser et à entretenir des camps d'incorporation et d'instruction<br />
le long des frontières. L'Armée de Libération Nationale y<br />
prépare des hommes pour le combat. Une fois formés, ces soldats<br />
repassent la frontière en unités constituées pour renforcer les six<br />
Willayas (circonscription de commandement dont l'ensemble couvrait<br />
toute l'Algérie).<br />
Il a donc fallu construire un obstacle défensif dont la fonction<br />
première était d'enrayer et de ralentir le passage de ces djounouds<br />
ainsi que des agents de liaison, des transporteurs d'armes<br />
et de fonds qui faisaient la navette au travers des frontières.<br />
La seconde fonction <strong>du</strong> barrage était, à chaque franchissement,<br />
une tentative, une localisation <strong>du</strong> point où avait lieu l'incident,<br />
en vue d'intervenir en force.<br />
A cette fin, toute tentative de coupure ou de neutralisation<br />
de la haie électrique déclenchait une alerte sonore à l'intérieur <strong>du</strong><br />
poste de surveillance (tous les 10 km) et l'appareillage de mesure,<br />
utilisant le principe de WHEATSTONE, indiquait par simple lecture<br />
sur des cadrans, le lieu de fonctionnement.<br />
Le plus proche des détachements blindés qui circulaient<br />
en permanence sur la piste le long <strong>du</strong> barrage, prévenu par radio,<br />
pouvait alors réagir rapidement sur les lieux. (on appelait cela la<br />
herse).<br />
Le commandement avait donc opté pour la construction<br />
de la "ligne MORICE", <strong>du</strong> nom <strong>du</strong> ministre des armées de l<br />
'époque, sur les deux frontières.<br />
Il va de soi, qu'un tel ouvrage, réalisé sur plus de 1500<br />
kilomètres de frontière, ne pouvait être parfaitement étanche, particulièrement<br />
de nuit.<br />
A sa mise en service, le barrage fit de nombreuses victimes<br />
par électrocution parmi les candidats au franchissement. Puis<br />
assez rapidement, le F.L.N. mit au point des techniques, soit pour<br />
passer sans déclencher l'arc électrique (tunnel, échelle, etc) donc<br />
sans localisation possible, soit pour neutraliser l'obstacle rapidement<br />
et franchir dans la foulée avant la réaction de la HERSE et<br />
s'évanouir dans la nature (utilisation de cisailles isolantes, bengalores,<br />
etc.) On assista donc à une course permanente entre techniques<br />
nouvelles de franchissement côté F.L.N. et parades côté<br />
Armée Française, par renforcements successifs de l'ouvrage, dont<br />
le plus lourd fut la pose de mines, d'abord hors des barbelés puis<br />
dans les barbelés.<br />
Le tracé de ce barrage côté tunisien, commencé en fin<br />
1956, poursuivi en 1957, passait à certains endroits assez loin de<br />
la frontière, pour des raisons tenant à la nature <strong>du</strong> relief, à l'implantation<br />
des unités d'intervention, à l'économie des moyens de<br />
construction et de surveillance.<br />
Pour améliorer l'obstacle, fut alors décidée la réalisation<br />
<strong>du</strong> Barrage-Avant, qui partant de la région de NEGRINE au sud et<br />
remontant jusqu'au Cap ROUX au nord doublait la ligne MORICE<br />
en passant au plus près possible de la frontière ;<br />
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Ainsi les bandes rebelles , signalées entre les deux<br />
réseaux, étaient prises dans une masse et neutralisées plus efficacement.<br />
C' est à la construction de ce Barrage Avant que la 75 e<br />
CGAP a participé, détachée de la 25 e DP et mise à la disposition<br />
<strong>du</strong> Génie Divisionnaire N° 2 de la Zone Est Constantinois, de juin<br />
1958 à octobre 1959.<br />
Au cours de cette période, la compagnie, partant <strong>du</strong> sud<br />
algérien se vit attribuer six tronçons successifs de barrage à réaliser<br />
: NEGRINE, BIR el ATER, BEKARIA, AIN ZERGA, LAMY,Col<br />
des 4 vents, LETARF, le Cap ROUX, soit un total de plus de 100<br />
kilomètres.<br />
Dans l’avancement des travaux de construction <strong>du</strong><br />
Barrage vers le nord, le commandement réservait à la 75 les tronçons<br />
présentant le plus de contraintes techniques et de difficultés<br />
opérationnelles, <strong>du</strong> fait de la nature <strong>du</strong> relief, des problèmes d'accès,<br />
de l'éloignement des bases d'approvisionnement et des unités<br />
d'intervention.<br />
La compagnie releva le défi crânement, sans état d'âme.<br />
A chaque début de mise en chantier d'un tronçon, l'unité,<br />
après une reconnaissance rapide, prenait deux jours pour installer,<br />
à l'emplacement le mieux adapté, son camp de toile et y organiser<br />
son dispositif défensif.<br />
Il ne faut pas oublier que la 75 e C.G.A.P formait corps.<br />
Donc tout ce qui concernait la vie d'un corps de troupe devait trouver<br />
place au bivouac, sous les guitounes et y fonctionner. Du groupe<br />
effectifs-secrétariat assurant la gestion complète de plus de<br />
300 hommes (officiers, sous-officiers et hommes <strong>du</strong> rang), au<br />
groupe assurant toute l'intendance, en passant par l'approvisionnement<br />
en munitions et explosifs, en carburants, l'atelier 3 e échelon<br />
des véhicules et engins, <strong>du</strong> Toubib et son infirmerie, aux<br />
feuillées, en passant par le trésorier, le vaguemestre, l'ordinaire, la<br />
popote, le ravitaillement en vivres et tout cela changeait d'implantation<br />
et de rattachement tous les deux à trois mois en plein djebel.<br />
S'ajoutant à cela le recrutement, la gestion et le paiement<br />
d'environs 300 ouvriers civils.<br />
Le plus souvent, les premiers jours de notre installation,<br />
les fellagas venaient "tâter" le dispositif par un harcèlement de nuit<br />
aux armes automatiques : ce fut le cas à AIN ZERGA, au Col des<br />
4 vents et au Cap ROUX.<br />
<br />
Puis il fallait passer à la mission. Le chantier se déroulait<br />
en s'appuyant le plus souvent sur une route ou piste existante<br />
parallèle à la frontière qui, une fois l'ouvrage achevé, devait servir<br />
pour la circulation des unités de surveillance et d'intervention<br />
(herse).<br />
Sur quelques tronçons la Compagnie a même eu à créer<br />
cette piste sur plusieurs kilomètres.<br />
La première phase <strong>du</strong> chantier consistait à dégager le<br />
long de cette piste une plate-forme aussi plane que possible, large<br />
d'une bonne vingtaine de mètres.<br />
Les travaux de déboisement lors de la traversée de forêts<br />
de chênes lièges, de pétardements de rochers, de dégagement et<br />
nivellement au bull-dozer et la finition à la pelle-pioche et à la scie,<br />
se succédaient en fonction de la nature <strong>du</strong> terrain et de la végétation.<br />
Alors commençait, après piquetage <strong>du</strong> tracé, la seconde<br />
phase, la construction échelonnée de l'ouvrage. Successivement<br />
et dans l'ordre en partant côté tunisien, un réseau dense de barbelés<br />
sur piquets fer, puis une haie de barbelés électrifiés posée<br />
BIR EL ATER, le barrage (1958)