New Spaces_09_FR
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Gaggenau<br />
new spaces <strong>09</strong><br />
48unités<br />
Page 49
2 Editorial<br />
Gaggenau new spaces vous souhaite la bienvenue<br />
Entre continuité et mutation – le difficile équilibre que beaucoup<br />
de créateurs tentent de trouver dans le monde entier retient notre<br />
attention. Préserver des valeurs tout en créant du nouveau, tel est<br />
le projet des inventeurs australiens de la « Tower Skin », une membrane<br />
spectaculaire avec laquelle des bâtiments vieillissants vont<br />
faire peau neuve. La redécouverte de plantes aromatiques et de<br />
légumes sauvages par des chefs de renom international est aussi<br />
une illustration de la nouvelle approche du développement durable.<br />
Découvrez la Serpentine Gallery de Londres en évolution constante<br />
sur le plan artistique et la vénérable manufacture de porcelaine de<br />
Meissen qui redevient initiatrice de tendances sur le plan international.<br />
Chez Gaggenau aussi, nous élaborons et réalisons des produits<br />
qui tirent parti de l’antagonisme créateur entre tradition et<br />
progrès. Pour que vous puissiez apprécier les résultats, nous vous<br />
présentons notre département design dont la direction a changé.<br />
Je vous souhaite de prendre plaisir à lire ce numéro et vous<br />
adresse mes meilleures salutations.<br />
Sven Schnee<br />
Direction<br />
Gaggenau International
PHOTOS : MONIKA HÖFLER (CI-DESSUS), MORLEY VON STERNBERG/ARCAIDIMAGES.COM (CI-DESSOUS)<br />
10<br />
44<br />
50<br />
Mentions légales<br />
Gaggenau new spaces <strong>09</strong><br />
Publié par Gaggenau Hausgeräte GmbH, Marketing international<br />
Direction produit Sven Schnee<br />
Direction projet Annette Kaiser<br />
Sommaire<br />
04 Thinking the Future I Tower Skin, l’art de l’habillage à Sydney<br />
10 Inside Gaggenau Design évolutif<br />
14 Best Practice Propriété à Highgate, quartier londonien<br />
20 Kitchen Love L’architecte Hendrik Müller à Munich<br />
22 Thinking the Future II Herbes et légumes sauvages à nos tables<br />
28 Thinking the Future III Porcelaine de Meissen et architecture<br />
34 Gaggenau Online new spaces sur Internet<br />
35 Sights and Scenes Halte aux Emirats<br />
43 What’s Next? Spectaculaires projets architectoniques<br />
44 Projects Résidence de luxe à Lisbonne<br />
48 <strong>New</strong> Products Nouvelle table de cuisson induction Full Zone<br />
50 Thinking the Future IV Métamorphose permanente de la Serpentine Gallery<br />
58 Worldwide Du nouveau dans l’univers Gaggenau<br />
Rédacteur en chef Peter Würth (resp. lég. presse) Direction artistique Dirk Linke Chef de service Inga Borg Conception Lukas Niehaus Rédaction photo Trine Skraastad<br />
Rédaction finale Sebastian Schulin Traduction TransForm, Cologne Fabrication Claude Hellweg (direction), Oliver Lupp Auteurs de cette édition Barbara Bierach,<br />
Carole Corm, Wolf-Christian Fink, Adam Gollner, Josephine Grever, Cornelia Haff , Tobias Moorstedt, Anuschka Seifert, Petra Thorbrietz Questions ou suggestions sur le contenu<br />
newspaces@gaggenau.com Edition et adresse de la rédaction HOFFMANN UND CAMPE VERLAG GmbH, une entreprise du GANSKE VERLAGSGRUPPE, Harvestehuder Weg 42,<br />
20149 Hamburg, tél. +49 40 44188-257, fax +49 40 44188-236 Direction Dr. Kai Laakmann, Dr. Andreas Siefke, Bernd Ziesemer Direction produit Inga Borg Litho fi lestyle<br />
medienproduktion, Hamburg Impression Neef+Stumme, Wittingen Copyright © 2011 by Gaggenau.<br />
Reproduction uniquement avec mention de la source et exemplaire justifi catif. Le contenu ne refl ète pas nécessairement l’opinion du responsable de la publication.<br />
3
4 Thinking the Future I<br />
Peau douce pour cœurs durs Texte : Barbara Bierach
Enveloppe fl exible<br />
A Pékin, le Water Cube, la piscine des J.O.,<br />
est protégé par une membrane transparente.<br />
PHOTO : IWAN BAAN
6 Thinking the Future I<br />
Selon Chris Bosse, de<br />
fines membranes<br />
doivent déplacer les<br />
frontières de la structure<br />
et de l’architecture et<br />
transformer les tours<br />
de bureaux sans<br />
visage de l’ère du béton<br />
en bâtiments basse<br />
consommation durables<br />
et vivables.<br />
Bloc aff ublé de blanc<br />
Une Tower Skin, censée valoriser la tour administrative<br />
démodée de l’University of Technology de Sydney.<br />
LAVA. Ce n’est pas seulement le nom du bureau d’architectes<br />
de Chris Bosse (Laboratory for Visionary Architecture). C’est<br />
aussi ce à quoi doit ressembler sa dernière création : de la<br />
lave. Bientôt, ce que les locaux qualifi ent de bâtiment le plus<br />
laid de Sydney rayonnera fi èrement la nuit, se détachant de la<br />
métropole australienne, comme si du magma en fusion coulait<br />
de la façade. Ou des motifs graphiques, selon l’humeur du<br />
maître des lieux.<br />
Il s’agit en l’occurrence de l’University of Technology de<br />
Sydney (UTS), dont la tour administrative de 32 étages, la Broadway<br />
Tower de 1969, doit être transformée. Depuis la pose de<br />
la première pierre, les critiques qualifi ent le bâtiment de « vantard<br />
», « rebelle » et « détesté ». Les diatribes devraient maintenant<br />
cesser, grâce à une membrane enveloppant la tour. Cette<br />
peau légère et fl exible pour façades se nomme « Tower Skin »,<br />
elle est faite d’un tissu composite en nylon et éthylène tétrafl uoroéthylène<br />
ou EFTE. C’est ce que LAVA projette d’installer autour<br />
de la tour existante à l’aide d’une construction en acier. La<br />
tension de surface permet à la peau d’épouser les formes des<br />
éléments de façade et de toiture, pour un eff et visuel maximum<br />
en consommant le minimum de matériau.<br />
Une fois installé, le cocon remplit plusieurs fonctions : esthétique,<br />
qui donne le lifting nécessaire à l’aspect béton des années<br />
60 ; technique, car la membrane crée un microclimat qui<br />
rend la tour plus facile à éclairer et à aérer ; et communicatrice,<br />
car les DEL de la peau extérieure peuvent véhiculer n’importe<br />
quel message. Fonction écologique enfi n : la Tower Skin peut<br />
non seulement emmagasiner de l’énergie comme de gigantesques<br />
panneaux solaires, mais elle peut aussi collecter l’eau<br />
de pluie et la rendre utilisable.<br />
L’idée a vite plu. The Independent a déjà demandé si<br />
LAVA ne pouvait pas, de grâce, emballer tout le Barbican<br />
Centre de Londres ou, en banlieue, le centre entier de Croydon<br />
dans un tel « préservatif géant ». La critique spécialisée aussi a<br />
réagi. Pour le projet de l’UTS Tower, LAVA a remporté le ZEROprize<br />
Re-Skinning Award du World Urban Forum, parrainé par<br />
l’ONU. Il récompense « les progrès révolutionnaires réalisés<br />
dans la conception et le développement de technologies de<br />
rénovation et de réaménagement d’anciens bâtiments qui améliorent<br />
la qualité de vie ainsi que l’effi cacité énergétique ».<br />
L’UTS n’a plus qu’à se lancer dans la révolution. L’université<br />
dispose, certes, d’un plan directeur pour le City Campus<br />
et des fonds nécessaires, mais elle se demande encore si elle<br />
trouve, elle aussi, la force d’innovation pour le chantier de la<br />
Tower Skin. L’école veut d’abord dépenser 120 millions de dollars<br />
australiens pour une Business School dessinée par Frank<br />
Gehry. Cependant, lors d’un débat public auquel il participait à<br />
Sydney, la première question du public a été : « Vous ne pouvez<br />
pas plutôt nous aider avec l’horrible Broadway Tower ? »
Des ombrelles pour le désert<br />
Sur la place centrale de Masdar, ville verte des Emirats, les ombrelles à membrane s’ouvrent comme des fl eurs à<br />
l’aube, pour off rir de l’ombre pendant la journée. Le soir, elles se referment pour lui permettre de se rafraîchir.<br />
7
8 Thinking the Future I<br />
Les formes organiques<br />
fascinent Chris Bosse<br />
Il use de procédés numériques<br />
pour s’aff ranchir<br />
de l’angle droit.
« Beaucoup de gens acceptent mal les formes non<br />
standardisées. Je crois que nous devons aussi<br />
faire avancer la révolution numérique sur le plan<br />
architectural et créer une nouvelle ère ».<br />
Frank Gehry ne souhaite pas prêter la main pour la tour<br />
d’ivoire à la diff erence de Chris Bosse et de Thomas Wallisser,<br />
fondateurs de LAVA. Le duo, qui a des bureaux à Stuttgart,<br />
Sydney, Abou Dhabi et Shanghaï, ne se contente pas de théorie.<br />
A 40 ans à peine, Chris Bosse, qui travaille à Sydney, est le<br />
cerveau à l’origine de quelques-uns des plus intéressants projets<br />
architecturaux d’Asie et d’Australie. Le plus célèbre étant<br />
certainement le cube bleu du centre nautique construit pour les<br />
Jeux Olympiques de Pékin. Pour la structure cellulaire du « Water<br />
Cube », qui évoque du papier bulles géant, Chris Bosse a<br />
remporté l’Atmosphere Award de la Biennale de Venise.<br />
Le Royal Institute of British Architects (RIBA) a décerné à Chris<br />
Bosse, l’AR Emerging Architecture Award, pour sa recherche<br />
expérimentale sur les formes, il déplace « les frontières de la<br />
structure et de l’architecture ». Le prestigieux institut se réfère à<br />
des projets tels que Masdar City, la ville au bilan carbone neutre<br />
située au sud d’Abou Dhabi (voir page 38) dont le City Center<br />
est sorti de l’atelier de Chris Bosse et consorts. Pour qu’un lieu<br />
en plein air confortable puisse voir le jour, même dans le désert,<br />
LAVA a recouvert les places et les allées d’ombrelles de troisième<br />
génération. Comme pour le Water Cube, on a fait appel,<br />
ici aussi, à la technologie des membranes de Chris Bosse ainsi<br />
qu’aux tout derniers matériaux de construction : les ombrelles<br />
s’ouvrent comme des fl eurs à l’aube, pour off rir de l’ombre durant<br />
la journée. Le soir, elles se referment pour que la place<br />
puisse se rafraîchir. Les modules solaires des ombrelles produisent<br />
de l’électricité. La nuit, des DEL assurent un éclairage tamisé.<br />
Pour Chris Bosse, « 90% des qualités durables d’un bâtiment<br />
sont aff aire de design, pas de technique », ce qui ne doit<br />
pas masquer son amour de la technologie : « Nous sommes la<br />
première génération d’architectes à avoir grandi avec le tout<br />
numérique. Pour moi, l’ordinateur est plus qu’un accessoire,<br />
c’est mon partenaire designer ». Le numérique est là pour que<br />
l’on « puisse aujourd’hui concevoir et construire mieux et moins<br />
cher, sans être esclave de l’angle droit ». La Tower Skin de la<br />
Broadway Tower en est un bon exemple : un nouveau bâtiment<br />
coûterait 150 millions de dollars australiens, alors que sa transformation<br />
avec des matériaux composites est réalisable pour un<br />
dixième du prix. Mais n’est-ce pas cacher une bâtisse dysfonctionnelle<br />
sous un masque plus fl atteur ? De son bureau, Chris<br />
Bosse peut voir l’UTS, ses doigts jouent avec une maquette du<br />
« Green Void », une installation d’intérieur pour une exposition<br />
d’architecture à Sydney. Elle aussi vit de la membrane, et des<br />
technologies de l’information : du Lycra a été haubané en cinq<br />
points, reliés par le plus court chemin calculé par ordinateur,<br />
pour une surface minimum. Le résultat semble compliqué, mais<br />
il est assez simple. Chris Bosse a surtout réalisé ce projet pour<br />
provoquer les conservateurs, pour qui seuls Mies van der Rohe<br />
ou Le Corbusier étaient des architectes sérieux : « Beaucoup de<br />
gens acceptent mal les formes non standardisées. Je crois que<br />
nous devons aussi faire avancer la révolution numérique sur le<br />
plan architectural et créer une nouvelle ère ». « Rendre beau »<br />
ne suffi t pas. LAVA cherche plutôt des réponses intégrées aux<br />
questions du XXI e siècle où la population croissante vit dans une<br />
promiscuité toujours plus grande. Plus qu’à l’ancien credo de la<br />
« forme suit la fonction », Chris Bosse s’intéresse à la « pensée<br />
intégrée : il faut certes construire écologique, mais il faut intégrer<br />
à la réfl exion les plans de déplacement et les aspects socioculturels<br />
». L’UTS, par exemple, est la meilleure université du<br />
pays pour les métiers techniques et créatifs. Elle regroupe des<br />
disciplines telles que sciences de l’ingénieur, architecture, design<br />
de mode, design produit et design médiatique. Il serait<br />
donc tentant d’utiliser tout ce savoir pour transformer un bâtiment<br />
mal aimé.<br />
Vu sous cet angle, Tower Skin est déjà presque une mission<br />
philosophique pour Chris Bosse. « Mies van der Rohe a<br />
dit : « less is more », moi je préfère dire : « more with less ».<br />
« Nous devons résister à l’urbanisation croissante et arrêter de<br />
consommer toujours plus de ressources et d’énergie ». Ainsi,<br />
Chris Bosse trouve souvent plus intéressant d’adapter les structures<br />
existantes aux évolutions permanentes de la vie. « Nous<br />
avons connu quatre générations d’iPhones en trois ans, mais les<br />
bâtiments perdurent souvent plus de 200 ans. Je réfl échis à une<br />
architecture ouverte sur l’avenir, et à la question de savoir comment<br />
créer des structures qui peuvent s’adapter en permanence<br />
au présent ». A l’époque de sa construction, l’UTS Tower était<br />
en eff et à la pointe du progrès. Mais il est clair aujourd’hui que<br />
les hommes n’aiment pas travailler dans des bâtiments entièrement<br />
climatisés, hermétiques, coupés du monde extérieur. Si<br />
l’on ne fait que détruire, « on devrait accepter que les villes<br />
soient constamment en chantier », pense Chris Bosse. Il trouve<br />
qu’il est simplement plus intelligent de transformer. ¤<br />
Complément d’information<br />
www.l-a-v-a.net<br />
http://l-a-v-a.blogspot.com/<br />
9
10 Inside Gaggenau<br />
Quo vadis, cuisinière?<br />
Les cuisines deviennent de plus en plus complexes.<br />
Pour Sven Baacke, le nouveau designer en chef de<br />
Gaggenau, ce n’est qu’une stimulation de plus pour<br />
poser de nouveaux jalons<br />
Texte : Wolf-Christian Fink Photos : Monika Höfl er<br />
Nouvelle inspiration<br />
Avec son équipe, le designer<br />
en chef Sven Baacke est<br />
responsable de la ligne<br />
des appareils Gaggenau.<br />
Maturité esthétique et<br />
perfection technique doivent<br />
être mises à l’unisson.
La perfection est-elle perfectible ? Non, répond le rhétoricien :<br />
ce qui est parfait est absolu et ne peut donc être amélioré. Sven<br />
Baacke, le nouveau designer en chef de Gaggenau, le voit plutôt<br />
d’un œil pragmatique : chez Gaggenau, la perfection est le<br />
résultat de l’interaction idéale entre la forme et la fonction. De<br />
nouvelles fonctions peuvent engendrer de nouvelles formes.<br />
C’est ce que l’homme de 36 ans appelle le « design évolutif »,<br />
un design qui se développe lui-même pour ainsi dire, une « survie<br />
du plus apte » au plan technique et esthétique.<br />
Avec son équipe de six collègues, ce natif de Stuttgart<br />
est responsable depuis cette année de l’esthétique des appareils<br />
Gaggenau, une tâche à laquelle il s’est préparé depuis<br />
plusieurs années aux côtés de son prédécesseur, Reinhard<br />
Segers. Sven Baacke a d’abord croisé la route de Gaggenau en<br />
tant que designer indépendant. Au début, il associait surtout la<br />
marque à la qualité, à l’image de l’inusable hotte de la maison<br />
familiale. Plus tard, à la mort de son grand-père, il tomba sur une<br />
vénérable carte de garantie Gaggenau, une relique qu’il<br />
conserve aujourd’hui dans son bureau. L’équipe des designers<br />
Ergonomie exemplaire<br />
Parfaitement simple,<br />
simplement parfait :<br />
l’échantillon d’un<br />
bouton de commande<br />
pour le four.<br />
Forme parfaite<br />
Cette navette de métier à<br />
tisser, faite en bois et munie<br />
d’une pointe en métal, est<br />
une trouvaille personnelle<br />
que Sven Baacke conserve<br />
sur son bureau.<br />
11<br />
Gaggenau considèrent que leur mission est à mi-chemin entre<br />
tradition et innovation. D’un côté, les appareils ont des cycles de<br />
vie particulièrement longs, échappant ainsi à toute approche<br />
conceptuelle dictée par une mode ou une tendance. De l’autre,<br />
les habitudes alimentaires et les conditions de logement nouvelles,<br />
couplées à la préoccupation des clients pour le durable<br />
et l’effi cacité énergétique, exigent aussi des ajustements esthétiques<br />
et fonctionnels : « Le comportement de l’usager change.<br />
La cuisine devient plus ouverte et l’aération, par exemple, plus<br />
complexe. En outre, la précieuse chaleur ne doit plus être évacuée<br />
en air vicié ; les solutions de recyclage de l’air gagnent<br />
donc en importance », explique Sven Baacke.<br />
Chez Gaggenau, les cuisines professionnelles sont encore<br />
et toujours une source d’inspiration dont la technologie<br />
est utilisée pour les appareils de maison, les fours combi-vapeur<br />
Gaggenau par exemple. Parallèlement, les clients peuvent<br />
compter sur une parfaite intégration des appareils à l’ensemble<br />
esthétique et fonctionnel de leur propre cuisine. Les tendances<br />
techniques n’interviennent dans la conception que si elles ap-
12 Inside Gaggenau<br />
portent une véritable amélioration fonctionnelle : « Ainsi, par<br />
exemple, seul un affi chage tactile TFT moderne permet de commander<br />
la table de cuisson induction Full Zone CX 480 », explique<br />
le designer au sujet d’une innovation actuelle.<br />
D’autres critères du fameux esprit Gaggenau sont défi nis<br />
dans une charte du design nouvellement conçue. Celle-ci repose<br />
d’une part sur l’histoire tricentenaire de l’entreprise et sur<br />
sa tradition d’une exigence de qualité sans compromis. D’autre<br />
part, elle décrit et illustre les fondements des principes de<br />
conception : « Concentration sur des outils de conception traditionnels,<br />
sélection de matériaux naturels et maîtrise des proportions<br />
confèrent à nos appareils maturité esthétique et perfection<br />
technique. Leur profi l intemporel se caractérise par des surfaces<br />
généreuses et des formes claires », c’est ce que le guide<br />
résume des maximes de l’entreprise.<br />
En matière de design, l’équipe de Sven Baacke travaille<br />
au présent sur le futur. Actuellement, dans les lumineux bureaux<br />
soigneusement protégés des regards, les écrans affi chent les<br />
Beauté et perfection<br />
Pour les designers<br />
de Gaggenau, même<br />
la vitre de l’écran<br />
de commande d’un<br />
four n’est pas une<br />
chose secondaire.<br />
L’avenir en<br />
ligne de mire<br />
Sven Baacke à<br />
son bureau. Au<br />
second plan,<br />
des éléments<br />
de four.<br />
produits Gaggenau des années 2013 à 2015. Comme toujours,<br />
leur création a d’abord été le fruit d’une collaboration étroite<br />
avec les techniciens, puis ils ont été présentés en interne<br />
comme des modèles fonctionnels complets. Ceux-ci serviront<br />
alors de base pour la suite du développement technique et esthétique<br />
jusqu’à la phase de production en série.<br />
Evidemment, par éthique professionnelle, les designers<br />
Gaggenau ne répondent que prudemment aux questions sur les<br />
produits du futur. Néanmoins, les thèmes sont déjà défi nis : l’utilisation<br />
intuitive par éléments de commande simples, la conception<br />
modulaire (pour les accessoires aussi) et l’effi cacité énergétique<br />
vont continuer à gagner en importance. Une liste noire a<br />
également été établie, avec tout ce qu’on est sûr de ne pas trouver<br />
chez Gaggenau : « Gaggenau n’a jamais utilisé d’affi chages<br />
complexes, de voyants de contrôle clignotants, ni de DEL. Et on<br />
n’en trouvera pas davantage chez nous à l’avenir », ajoute Sven<br />
Baacke, qui promet que les appareils Gaggenau continueront<br />
de poser des jalons à tous les niveaux. ¤
« Gaggenau n’a jamais utilisé d’affichages complexes,<br />
de voyants de contrôle clignotants, ni de DEL. Et on<br />
n’en trouvera pas davantage chez nous à l’avenir ».<br />
Sven Baacke<br />
Légère diff érence<br />
Parfois, tout est dans<br />
la nuance :<br />
un échantillon de coloris.<br />
13
14 Best Practice<br />
Une maison qui ne manque pas de personnalité<br />
A Highgate, dans le nord-ouest de Londres, une<br />
famille a fait installer une cuisine grandiose dans<br />
une construction rapportée<br />
Texte : Josephine Grever Photos : Alexander James
Annexe de verre<br />
La cuisine entièrement vitrée de la maison de style<br />
georgien, à Highgate. Le mur du fond en pierres naturelles<br />
établit un lien visuel avec l’habitation principale.
16 Best Practice<br />
Surprise derrière la porte<br />
La porte s’ouvre sur une réserve qui off re plus de<br />
place qu’il n’en faut pour ranger des conserves<br />
faites maison et d’autres provisions.
Légumes au menu<br />
Conseillère nutritionniste, Vicki Lee attache de l’importance à<br />
une alimentation saine. Grâce au grand réfrigérateur et à la<br />
réserve, il y a toujours des produits frais à la maison.<br />
Des maisons pimpantes, des haies taillées au cordeau, une<br />
High Street avec des magasins chics et des cafés – Highgate<br />
dans le nord-ouest de Londres est un quartier huppé.<br />
La famille Lee y habite dans une villa de style georgien. En<br />
semaine, la journée commence à sept heures pour Vicki, la<br />
maîtresse de maison. Elle prépare alors le petit-déjeuner :<br />
fruits frais, porridge, œufs brouillés. Peu après sept heures,<br />
le reste de la famille prend place au comptoir, dans la cuisine<br />
emplie de l’odeur du café et du cacao. David, le mari,<br />
est avocat. Barnaby, le fi ls, a neuf ans, Jemima, la fi lle, six<br />
ans. L’école et le temps qu’il fait sont les sujets de conversation<br />
matinaux. Une demi-heure plus tard, la maison redevient<br />
silencieuse. La jeune fi lle au pair conduit Barnaby et Jemima<br />
à l’école, dans le quartier voisin de Hampstead. M. Lee fait<br />
son jogging matinal pour se rendre à son bureau dans la<br />
City. Et Mme Lee boit un café tranquillement avant de s’asseoir<br />
à son bureau. Elle est avocate comme son mari mais<br />
suit actuellement une formation de conseillère nutritionniste.<br />
« C’est plus compatible avec la vie de famille. Les enfants<br />
sont petits », dit-elle. « Je peux mieux disposer de mon temps<br />
comme bon me semble. » Elle porte un pantalon, un pull de<br />
cachemire et une écharpe, le tout assorti dans les tons gris.<br />
Son look minimaliste cadre parfaitement avec la cuisine gris<br />
ardoise équipée d’appareils Gaggenau et conçue par<br />
Ramón Casadó de bulthaup, à Mayfair. Une pièce vaste et<br />
lumineuse, ouverte sur un coin lecture et télévision, au-delà<br />
d’une table de noyer très conviviale. Une baie entièrement<br />
vitrée, côté jardin – le regard peut vagabonder sur la pelouse,<br />
les fl eurs et les plates-bandes de plantes aromatiques.<br />
« Ici, tout est ouvert et communicatif », dit Mme Lee.<br />
« Après notre installation dans cette maison, la cuisine est<br />
devenue peu à peu le centre de notre vie de famille. » Elle<br />
ajoute en souriant que cela a changé bien des choses.<br />
« C’est agréable de cuisiner et de manger dans cette<br />
pièce. Pour moi, ce sont deux plaisirs complémentaires. »<br />
La maison date du début du XVIII e siècle. Des générations<br />
de médecins l’ont habitée, d’où son appellation « Apothecary<br />
». La famille s’y est installée en 2006. Cinq chambres et,<br />
de surcroît, un appartement pour le personnel de maison –<br />
idéal pour une famille qui a besoin de place pour permettre<br />
aux enfants de remuer et pour recevoir des amis. Par contre,<br />
il a fallu refaire l’intérieur. Les Lee savaient exactement ce<br />
qu’ils voulaient : quelque chose de simple et de convivial, à<br />
la fois intime et conçu pour d’importantes réceptions.<br />
« Nous savions bien entendu que les transformations sont<br />
limitées dans une maison de style georgien », dit Mme Lee.<br />
« Servir des produits frais,<br />
ce n’est pas bien sorcier.<br />
Il suffi t d’une recette<br />
sympa, d’ingrédients de<br />
qualité – et d’une<br />
cuisinière adéquate. »<br />
« Nous aimons les proportions classiques, les lignes caractéristiques<br />
de cette période et nous nous sommes contentés d’y<br />
apporter avec précaution quelques changements. Nous voulions<br />
en tout cas préserver le cachet d’origine de la maison. »<br />
Et ils y sont arrivés ! La distribution classique des pièces<br />
a été conservée. Au rez-de-chaussée, il y a la salle à manger qui<br />
est une pièce commune et des bureaux. A l’étage, un élégant<br />
salon. Les chambres occupent les niveaux supérieurs. Les couleurs<br />
vives d’origine ont fait place à des tons subtils de beige et<br />
de brun. « C’est moderne mais sans excès », dit Vicki Lee en<br />
ouvrant la porte du salon. Une pièce sympathique avec du parquet,<br />
d’épais tapis dans les tons de beige, une cheminée et de<br />
confortables fauteuils à oreilles.<br />
« Pour être franche, c’est une pièce que nous utilisons peu,<br />
même quand nous recevons des amis », avoue-t-elle. C’est bien
Tradition et modernité<br />
Les papiers peints et les tapis clairs de même que les nombreuses nuances<br />
de beige et de brun allègent cette maison de style georgien (ci-dessus). Dans<br />
la cuisine rapportée, le mur du fond en pierres naturelles, la table de bois et<br />
les chaises de Hans Wegener forment un contraste séduisant (droite).<br />
connu, tout le monde préfère se tenir dans la cuisine. C’est la<br />
partie de la maison qui a été entièrement transformée lors des<br />
travaux de modernisation. Le petit cottage, qui donnait sur le<br />
jardin, a été démoli. On l’a remplacé par un simple parallélépipède<br />
vitré pour y loger une grande cuisine avec coin repas.<br />
C’est John, le frère de David Lee, un architecte installé à Manchester,<br />
qui l’a conçu, avec carreaux de porcelaine et chauff age<br />
au sol. L’électroménager est intégré dans un ensemble mural<br />
gris ardoise. « Nous avons pu y loger l’essentiel », dit Vicki Lee<br />
en ouvrant la porte qui donne – oh ! surprise ! – sur la réserve à<br />
l’intérieur de laquelle on peut pénétrer. Pâtes, riz, pots de confi -<br />
ture, corbeille à pique-nique, il y a de la place pour tout. Le rêve !<br />
Vicki Lee n’est jamais prise au dépourvu quand des amis arrivent<br />
à l’improviste. « Je suis perfectionniste. Je prévois tout à<br />
l’avance. Alors, il faut de la place pour ranger les choses ».<br />
Ce qu’elle attend de sa cuisine ? Qu’elle soit esthétique<br />
et surtout fonctionnelle. Que tout soit à portée de main. Elle ne<br />
saurait renoncer à ses deux lave-vaisselle. « Je n’aime pas voir<br />
traîner des assiettes sales. » Le réfrigérateur spacieux est également<br />
indispensable. « J’y conserve des denrées tout comme<br />
dans la réserve. Les fruits et les légumes n’ont leur place sur les<br />
plans de travail qu’au moment où je les utilise dans une préparation.<br />
» L’appareil électroménager qu’elle apprécie le plus ? Elle<br />
répond sans hésiter : le four combi-vapeur intégré dans l’élément<br />
mural. « C’est un appareil fabuleux », dit-elle. « La cuisson<br />
à la vapeur est l’une des méthodes de préparation les plus<br />
saines. Les précieuses vitamines et les sels minéraux, le goût et<br />
la couleur des aliments sont préservés. » Et quelle est la composition<br />
des repas d’une conseillère nutritionniste ? « Je veille au<br />
bon équilibre de notre alimentation, bien entendu », dit Vicki<br />
Lee. « Tout le reste est secondaire. » Mon mari et moi mangeons<br />
beaucoup de salades et de poissons grillés, les enfants préfèrent<br />
les pâtes. Je ne leur interdis pratiquement rien. » Seuls les<br />
plats cuisinés sont exclus.<br />
Le soir, quand la lumière est allumée, l’intérieur de la cuisine<br />
s’off re aux regards. Le mur en pierres naturelles, les meubles<br />
en bois fort sympathiques et la lampe Cocoon de Tobia Scarpa,<br />
qui fait beaucoup d’eff et au-dessus de la table de cuisine, accentuent<br />
l’ambiance décontractée. Il n’y a pas que le matin que<br />
la cuisine est le centre de la ville familiale. David Lee est assis à<br />
table devant un verre de vin bien mérité après une journée de<br />
travail. Les enfants chipent dans un plat. Il arrive souvent que<br />
des amis passent. On parle de politique et de football tout en<br />
épluchant des légumes ou en triant des feuilles de salade. Une<br />
atmosphère détendue qui ne saurait être plus agréable. Comme<br />
rien ne sépare le coin repas du reste de la cuisine, la discussion<br />
ne s’interrompt pas quand il faut aller extraire un plat du four.<br />
« Une cuisine idéale. Pour nous, c’est un rêve devenu réalité »,<br />
dit Mme Lee. Elle a ce qu’elle voulait : une maison avec beaucoup<br />
de cachet et de charme où la vie et le travail s’organisent<br />
en toute décontraction. « Force est de constater qu’on réussit<br />
mieux un plat quand on le prépare dans un cadre sans fausse<br />
note, » ajoute-t-elle. ¤
Best Practice 19
20 Kitchen Love<br />
Hendrik Müller, comment se présente pour vous<br />
la cuisine idéale ?<br />
Il est important de pouvoir y travailler sans problème. Il faut donc<br />
la concevoir de façon sensée, compte tenu de la disposition<br />
logique des diff érents éléments. Les goûts, cela se discute. Pas<br />
le sens des choses.<br />
Cela s’applique aussi à votre cuisine ?<br />
Tout à fait ! Notre cuisine linéaire est toute en longueur, avec<br />
une petite table devant la fenêtre, mon endroit préféré. De la<br />
cuisine, on accède à la salle à manger dont le plafond à caissons<br />
est entièrement boisé comme dans certaines auberges.<br />
Les vieilles fenêtres avec survitrage donnent sur notre jardin<br />
planté de pommiers.<br />
Quelle est votre approche de la table ?<br />
Les repas ont pour nous une grande importance sur le plan<br />
culturel et social. Inviter quelqu’un chez soi et lui préparer un<br />
repas, c’est un témoignage de confi ance, une marque d’estime.<br />
S’agissant des produits alimentaires, leur authenticité est un<br />
aspect déterminant – nous achetons essentiellement du bio,<br />
des produits régionaux et de saison. Nous faisons en sorte de<br />
rarement jeter quelque chose.<br />
Existe-t-il une règle empirique, valable tout autant pour le travail<br />
du cuisinier que de l’architecte ?<br />
Il faut qu’il y ait un rapport équilibré entre les éléments formant<br />
un contraste, que ce soient des matériaux ou des épices employés<br />
en cuisine. Acidulé, salé, sucré par exemple. Ce principe<br />
L’architecte Hendrik Müller (né en 1973 à Böblingen en<br />
Souabe) gère avec Georg Thiersch le bureau d’architecture<br />
eins:33. Tous deux ont été formés à l’Académie<br />
des beaux-arts de Stuttgart où ils ont suivi entre autres les<br />
cours de David Chipperfi eld. Récompensés par des prix<br />
prestigieux, les showrooms, les présentations de salon<br />
et les corporate interiors de Hendrik Müller ont été déterminants<br />
dans la perception de certaines marques comme<br />
Gaggenau. Son bureau a conçu des sièges administratifs<br />
à Pékin, des parcs d’aff aires à Dubaï, des chalets dans les<br />
Alpes, un restaurant pour Porsche, une petite papeterie,<br />
etc. Hendrik Müller vit et cuisine à Munich avec sa femme<br />
Sandra et leur fi ls Matti.<br />
« Un péché mortel ? Un mauvais éclairage »<br />
Hendrik Mül ler s’exprime sur la cuisine aux<br />
différents sens du terme Interview : Cornelia Haff<br />
appliqué à la cuisine souabe, cela donne des ravioles avec des<br />
oignons sautés et de la salade de pommes de terre. Le salé, ce<br />
sont les ravioles, les oignons apportent une note légèrement<br />
sucrée et la salade de pommes de terre a une certaine acidité.<br />
On vous sent enthousiaste…<br />
C’est mon plat préféré. Aussi loin que je me rappelle, j’ai toujours<br />
vu ma grand-mère préparer des ravioles pour le Vendredi<br />
saint. Elles sont farcies de viande alors que le carême n’est pas<br />
terminé. C’est une tradition qui se perpétue d’une génération à<br />
l’autre, même ici, dans mon « exil » munichois.<br />
Votre bureau d’architecte opère à l’échelon international –<br />
quelles découvertes gastrosophiques avez-vous faites à<br />
l’étranger ?<br />
En mangeant avec les autres, on apprend beaucoup de choses<br />
sur la culture d’un pays. En Chine, on mange assis autour d’une<br />
table ronde. Les plats sont disposés au milieu et on se sert tout<br />
simplement. La table est ronde car le cercle a une signifi cation<br />
cosmologique en Chine. A Téhéran, les gens font preuve d’une<br />
hospitalité à donner le vertige. Depuis, je crains par-dessus tout<br />
de recevoir la visite de ceux qui m’ont reçu – ce serait ma ruine.<br />
Le péché mortel dans une cuisine …?<br />
... un mauvais éclairage. La cuisine est le centre de la maison,<br />
également du fait de l’évolution anthropologique. Autrefois, on<br />
se réunissait autour du poêle car c’était la seule source de<br />
chaleur. Aujourd’hui, la cuisine est un espace social. Les tubes<br />
néon au plafond, cela vous donne le coup de grâce. ¤<br />
PHOTOS : MONIKA HÖFLER (P. DE GAUCHE), BENNE OCHS (P. DE DROITE)
1 Couverts à salade en<br />
corne, Lorenzi<br />
Pour des raisons professionnelles,<br />
ma femme et moi avons séjourné à<br />
Turin et Milan où la cuisine locale<br />
nous a durablement marqués tout<br />
autant que le style de vie italien.<br />
Ces couverts de l’entreprise traditionnelle,<br />
au n° 9 de la Via Montenapoleone<br />
à Milan, sont un rappel<br />
de notre intermède italien.<br />
2 Couteau à pain,<br />
manufacture Windmühlen<br />
Chaque matin, lors de la préparation<br />
du petit-déjeuner, ce couteau<br />
nous aide à démarrer la journée<br />
du bon pied. Avec son manche<br />
en bois d’olivier, agréable au<br />
toucher, et sa lame bien coupante,<br />
fabriquée à Solingen, ce<br />
couteau est une merveille.<br />
5<br />
3<br />
3 Poêle en fer, Turk<br />
Lourde, inusable, rustique.<br />
Pour moi qui aime les aliments<br />
brièvement poêlés, c’est un<br />
ustensile indispensable.<br />
Grâce à la répartition optimale<br />
de la chaleur, les pores d’une<br />
viande se ferment rapidement.<br />
Mon steak reste saignant et<br />
mes oignons sautés gardent<br />
leur moelleux. Un cadeau que<br />
m’ont fait de bons amis.<br />
4 Moulin à poivre, Zassenhaus<br />
Il date des années 60 et je le<br />
tiens de ma grand-mère. Les<br />
moulins actuels de la manufacture<br />
sont certainement plus performants<br />
en raison de leur mécanisme<br />
en céramique mais leur<br />
forme a perdu de son élégance.<br />
Le cerisier massif a fait place à<br />
du « hêtre teinté façon cerisier ».<br />
1<br />
7<br />
6<br />
2<br />
5 Cocotte, Le Creuset<br />
Les mois d’hiver, nous aimons bien,<br />
ma femme et moi, perpétuer la<br />
tradition du « rôti » du dimanche.<br />
Notre préférence va au bœuf braisé<br />
dans une cocotte en fonte de la<br />
marque Le Creuset, posée sur la<br />
cuisinière. La chaleur se répartit<br />
uniformément dans la cocotte, ce<br />
qui limite la consommation d’énergie.<br />
C’est l’un des premiers ustensiles<br />
de cuisine dont nous nous<br />
sommes équipés.<br />
6 Couverts Nuovo Milano<br />
d’Ettore Sottsass, Alessi<br />
Encore aujourd’hui, choisir des<br />
couverts a quelque chose de<br />
défi nitif. Des couverts devant à la<br />
fois être intemporels et inusables,<br />
nous avons opté pour ces modèles<br />
classiques. Leur ligne aux<br />
courbes harmonieuses, le bon<br />
équilibre de la forme et de la fonction<br />
et l’acier inoxydable mat sont<br />
pour moi l’expression la plus aboutie<br />
de l’harmonie et de la grâce.<br />
7 Bols en céramique, Spin<br />
Ils proviennent de la manufacture<br />
de porcelaine chinoise<br />
Spin et je les ai découverts à<br />
Shanghai, au restaurant japonais<br />
Shintori. En souvenir des soirées<br />
exceptionnelles que j’y ai<br />
passées, je me suis acheté des<br />
bols, des assiettes, des gobelets<br />
et des vases de la marque Spin.<br />
Ce sont des pièces uniques du<br />
plus bel effet.<br />
4
22 Thinking the Future II<br />
Retour aux racines<br />
Légumes bio, plantes sauvages ou écorces –<br />
la cuisine fait la part belle à la nature<br />
Texte : Adam Gollner
Beaucoup de restaurants parmi les<br />
meilleurs au monde trouvent le moyen de<br />
faire figurer sur leur carte des produits de<br />
saison récoltés sur place, des produits bio<br />
et d’autres d’une grande rareté. Il y a même<br />
des cuisiniers qui utilisent leur propre récolte,<br />
d’autres des plantes sauvages qu’ils<br />
ont cueillies et nombreux sont ceux qui<br />
font confiance à « leurs » paysans.<br />
Propre<br />
récolte<br />
23<br />
PHOTOS : PURESTOCK/GETTY IMAGES
Pomme de terre version luxe<br />
On redécouvre des variétés de<br />
légumes et de tubercules centenaires<br />
qui sont bien plus savoureuses,<br />
comme la Bonnotte au goût<br />
de châtaigne, la pomme de terre<br />
la plus chère qui soit.<br />
Très<br />
rares<br />
Le goût des légumes frais est comme<br />
une mise en garde : aucun procédé<br />
scientifique ne peut l’imiter. Même les techniques<br />
ultramodernes ne peuvent<br />
restituer ou reproduire la saveur d’un<br />
topinambour cuit à point ou l’arôme subtil<br />
du céleri en branches qui vient d’être<br />
récolté. Et c’est ainsi que dans le monde<br />
entier des cuisiniers d’avant-garde remettent<br />
au goût du jour des légumes rares.<br />
PHOTO : IMAGES ETC LTD/GETTY IMAGES
Une modeste bicoque en bois dans un coin poussiéreux de<br />
Rancho Santa Fe, l’une des régions les plus riches des Etats-<br />
Unis. Le Chino Farm Vegetable Shop n’est pas bien grand et<br />
ses 25 hectares de terres agricoles n’ont rien de particulier. Il en<br />
est tout autrement des produits récoltés et vendus à la ferme.<br />
On croirait qu’ils proviennent d’une autre planète tant ils brillent.<br />
Des étals de toutes les couleurs de l’arc-en-ciel. Des carottes<br />
bleues, des betteraves veinées de blanc, des racines de yam<br />
pourpres, originaires du Japon, et des monticules de choux palmiers<br />
dont se délectera la clientèle. Des choux de Bruxelles en<br />
miniature, de la grosseur d’un petit pois, sont présentés et disposés<br />
comme des colliers d’émeraudes dans de petites corbeilles.<br />
Les fraises Mara des bois ont déjà fait fondre de plaisir<br />
même de grands gaillards. On est ébloui par la diversité des<br />
salades, des navets et des radis. Des orties aux feuilles de mizuna,<br />
bien des spécialités ne sont en vente qu’à la ferme. On ne<br />
les trouve dans aucun supermarché, voilà pourquoi les restaurants<br />
gastronomiques les ont adoptées.<br />
Dans leurs restaurants californiens, des chefs renommés<br />
comme Wolfgang Puck (Spago) et Alice Waters (Chez Panisse)<br />
utilisent des produits en provenance de la Chino Farm qu’ils<br />
font venir par avion, ce qui a encore accru leur notoriété. Les<br />
grands cuisiniers misent entre-temps sur des producteurs qui<br />
innovent, comme la famille Chino, et que les médias comparent<br />
déjà à des stars. Une révolution s’accomplit dont les leaders<br />
sont … des légumes.<br />
Dans ces restaurants, même les viandes sont servies avec des<br />
légumes multicolores à profusion. Par le passé, les légumes<br />
jugés fades et même insipides gâchaient presque le plaisir que<br />
l’on prenait à manger de la viande. Les choses ont changé. Aujourd’hui,<br />
la viande accompagne en quelque sorte les légumes<br />
originaux dont la saveur et la fraîcheur se suffi sent à ellesmêmes.<br />
« A chaque saison correspondent des légumes frais,<br />
des herbes aromatiques, des épices et des plantes sauvages<br />
qui jouent un rôle important dans la composition de nos menus<br />
», explique René Redzepi, le chef du Noma à Copenhague<br />
(se reporter à new spaces 04), considéré comme l’un des<br />
meilleurs restaurants du monde. « Voilà pourquoi la verdure occupe<br />
plus de place dans nos assiettes que dans celles de la<br />
plupart des autres restaurants gastronomiques. » Mais le Noma<br />
n’est pas le seul à avoir fait ce choix, comme on peut s’en<br />
convaincre en se rendant au George’s at the Cove, à San Diego.<br />
La Jolla, un quartier de San Diego en bord de mer, est tout aussi<br />
sélect que Beverly Hills et presque aussi huppé que l’est<br />
Rancho Santa Fe. Une des spécialités : la queue de bœuf braisée.<br />
On imagine qu’il s’agit d’un plat pour « carnivores ». En fait,<br />
il y a plus de légumes que de viande dans l’assiette. La queue<br />
de bœuf est servie avec des poireaux et des blettes très<br />
tendres, des chanterelles et des orties frites, bien croustillantes,<br />
le tout parsemé de ciboulette. La viande fond dans la bouche.<br />
Mais sans ces légumes au goût extraordinaire et à la texture<br />
exceptionnelle que l’on doit à Mère Nature, ce plat ne serait pas<br />
ce qu’il est.<br />
Il y a une dizaine d’années, le George’s n’était qu’un<br />
piège à gogos, une gargote qui ne servait que des assiettes<br />
terre-mer, donc de la viande et des fruits de mer. Aujourd’hui, la<br />
carte est diff érente. Des produits toniques entrent dans la composition<br />
des menus. Le restaurant s’est réinventé. Tout le mérite<br />
revient au chef Trey Foshee qui a décidé, lui aussi, de mettre à<br />
l’honneur les légumes de la Chino Farm où il se rend presque<br />
tous les jours avec son équipe pour s’approvisionner. « Nous<br />
proposons une cuisine basée sur des produits de saison. Nos<br />
ingrédients sont frais et de surcroît arrivés à pleine maturité,<br />
d’où leur saveur incomparable », explique Trey Foshee. Une entrée<br />
typique : la salade de carottes. Rien de folichon, pense-t-on.<br />
Erreur ! Car une salade faite de carottes multicolores provenant<br />
de la Chino Farm, c’est un régal pour les yeux et pour les papilles<br />
! Finement râpées, les carottes pourpres, blanches et violettes<br />
sont servies avec des kumquats, du miel et du yaourt aux<br />
épices qui en exaltent la saveur.<br />
Des produits de saison au goût intense se suffi sent à<br />
eux-mêmes. C’est quand ils sont préparés simplement qu’ils<br />
sont souvent les meilleurs. Par contre, il est décisif de savoir<br />
comment les présenter, s’il faut les couper fi nement, combien<br />
de temps les blanchir, quel mode de cuisson privilégier et avec<br />
quoi les associer. De nos jours, les grands chefs coupent des<br />
légumes avec autant de soin qu’un boucher pare un rôti. La préparation<br />
de ces légumes demande autant de temps, d’expérience<br />
et de créativité qu’il en faut pour détailler un morceau de<br />
viande. La clientèle le sait et accepte sans sourciller de payer un<br />
peu plus cher. Au restaurant Guggenheim de Bilbao, les légumes<br />
sont d’une extrême fraîcheur car ils proviennent du potager<br />
situé juste à côté du bâtiment emblématique de l’architecte<br />
Frank Gehry.<br />
Les légumes sont traités avec autant de délicatesse que<br />
les inestimables chefs-d’œuvre à l’intérieur du musée. La carte<br />
poétique et très épurée mentionne comme légumes des radis<br />
noirs braisés et des endives confi tes. « J’ai commencé par cultiver<br />
moi-même des plantes qui étaient sauvages à l’origine<br />
comme le chardon de montagne mais aussi des salsifi s et de la<br />
mâche », explique le chef basque Josean Martínez Alija. « Les<br />
légumes bio, le voilà le vrai luxe ! »<br />
« Les carottes<br />
seront demain<br />
notre foie gras. »<br />
Massimo Bottura<br />
Thinking the Future II 25
26 Thinking the Future II<br />
« Nous cherchons en<br />
pleine nature des<br />
baies et des aromates<br />
que d’autres<br />
dédaigneraient. »<br />
René Redzepi<br />
Son constat est de plus en plus partagé dans le monde entier :<br />
le vrai luxe consiste bien moins à présenter de façon ostentatoire<br />
des ingrédients onéreux qu’à tirer parti des largesses de la<br />
nature dans toute leur authenticité. Ces légumes rares, qui sont<br />
cultivés dans la région, nous permettent de découvrir l’exotisme<br />
insoupçonné de notre environnement et nous rendent perceptible<br />
l’insaisissable.<br />
En février 2011, Massimo Bottura, chef de l’Osteria Francescana<br />
à Modène, a été consacré meilleur cuisinier du monde<br />
en raison de cette faculté qu’il a d’interpréter les traditions de<br />
son pays natal en se projetant dans l’avenir. « Les carottes seront<br />
demain notre foie gras », dit-il. Et ce n’est pas une boutade.<br />
Josean Martínez Alija fait école : pour proposer à la clientèle<br />
une cuisine de saison, de plus en plus de restaurants ont<br />
leur propre potager. A Montréal, au Canada, le restaurant Joe<br />
Beef, véritable institution, s’est doté d’un grand potager. Et c’est<br />
ainsi que juste à côté de la terrasse, à l’arrière du restaurant, de<br />
vieilles variétés de tomates, des cucurbitacées et des herbes<br />
magiques poussent à merveille. Quand il n’y a rien à récolter<br />
dans le potager, il arrive que les cuisiniers, qui font partie de la<br />
brigade, rapportent des parcs publics de Montréal un chou ornemental<br />
ou quelques blettes.<br />
Michael Hoff mann est à la fois chef du Margaux à Berlin<br />
et maraîcher. Son « Voyage de légumes » qu’il décline en huit<br />
plats pour près de 140 euros est réputé dans le monde entier.<br />
Beaucoup d’ingrédients proviennent de son propre potager<br />
– 2 000 mètres carrés plantés de plus de 70 variétés de<br />
plantes aromatiques et de légumes. Lola et Bill Zimmerman,<br />
propriétaires du Herbfarm, un restaurant près de Seattle, gèrent<br />
aussi une ferme bio avec un jardin où ils cultivent du cerfeuil<br />
musqué et du thym cumin pour rehausser l’exquise saveur de<br />
leur cuisine. Des préparations comme le clafoutis au laurier et la<br />
soupe d’orties à la livèche refl ètent les trésors de leur potager.<br />
« Avoir un jardin est un luxe de nos jours », selon Michel Pitrat,<br />
biologiste français et auteur d’« Histoires de légumes ». La so-<br />
ciété basée sur l’agriculture a disparu de notre monde moderne,<br />
si bien que ce mode de vie dont elle était jadis synonyme est<br />
devenu un privilège. Navets, carottes et pommes de terre dont<br />
se nourrissaient les paysans au XVII e siècle sont assimilés de<br />
nos jours à des produits de luxe et poussent dans les jardins de<br />
quelques privilégiés.<br />
Beaucoup de chefs ne se contentent plus d’utiliser des<br />
légumes de leur propre récolte et vont eux-mêmes cueillir des<br />
plantes sauvages. Le Noma de Copenhague est célèbre pour sa<br />
cuisine créative qui fait la part belle aux légumes. Les cuisiniers<br />
sont continuellement à la recherche de trésors d’un autre temps<br />
qu’abritent encore les forêts à l’état naturel et les ronciers au<br />
bord des chemins. « Nous cherchons en pleine nature des baies<br />
et des aromates que d’autres dédaigneraient et nous utilisons<br />
des denrées que l’on ne peut pas se procurer dans le commerce<br />
», explique le chef René Redzepi.<br />
En septembre 2010, la troisième édition de « Cook it<br />
raw » a fédéré l’avant-garde de la cuisine mondiale. Initiée par<br />
Alessandro Porcelli, « consultant culinaire » à Copenhague,<br />
l’aventure a conduit René Redzepi, David Chang, Massimo Bottura,<br />
Daniel Patterson et d’autres encore, non loin du cercle<br />
polaire, dans une région sauvage près de la ville de Levi en Finlande.<br />
Au programme : pêche, cueillette de baies et chasse pour<br />
redécouvrir les produits de la nature – herbes, baies, racines,<br />
mousses, champignons et jeunes pousses de fougères au goût<br />
de noisettes vertes. Il n’y a pas qu’en Russie qu’on apprécie la<br />
sève de bouleau, légèrement sucrée. Les pays nordiques y ont<br />
pris goût.<br />
Pour certains, dont les esprits créateurs du Coi, le restaurant<br />
de San Francisco, la nouvelle cuisine axée sur les légumes<br />
tient de la performance artistique. Le chef Daniel Patterson a<br />
baptisé l’une de ses créations d’une grande originalité « Abstraction<br />
de légumes d’hiver ». Il prédit un renforcement de cette<br />
tendance. Selon lui, « Les racines, les feuilles, les baies et les<br />
fl eurs, qui poussent à l’état sauvage, joueront un rôle très important<br />
en raison de leur forte charge émotionnelle. »<br />
Cette esthétique romantique a pour origine le « Gargouillou<br />
» de Michel Bras, chef à Laguiole. C’est un pêle-mêle<br />
magique d’une soixantaine d’ingrédients dont de simples<br />
légumes frais, une spécialité emblématique. Dans le monde<br />
entier, des chefs se sont inspirés de cet hommage ludique<br />
aux paysages français et déclinent le gargouillou avec sa<br />
« terre », une brioche noire en morceaux avec de la tomate<br />
en poudre. ¤<br />
Complément d’information<br />
Chino Farm, 6123 Calzada Del Bosque, Rancho Santa Fe, CA 92067, USA<br />
www.chezpanisse.com; www.wolfgangpuck.com<br />
www.noma.dk; www.georgesatthecove.com<br />
www.restauranteguggenheim.com; www.osteriafrancescana.it<br />
www.joebeef.ca; www.margaux-berlin.de; www.theherbfarm.com<br />
www.coirestaurant.com; www.michel-bras.com
Les légumes bio, cultivés dans nos<br />
régions – un régal pas seulement<br />
pour les écolos ! Tandis que nous sommes<br />
tiraillés entre cuisine moléculaire<br />
postmoderne et nostalgie du passé,<br />
quelques chefs aux idées avant-gardistes<br />
suivent leur propre voie qui les conduit<br />
dans des jardins derrière leur restaurant,<br />
dans des forêts ombragées et des<br />
fermes voisines où les fruits de la terre et<br />
les trésors de la nature n’attendent qu’à<br />
être découverts.<br />
Arrachés à la terre<br />
Promesses d’avenir, des herbes<br />
et des légumes oubliés comme<br />
les carottes noires.<br />
Bonnes<br />
idées<br />
PHOTO : DARQUÉ/PHOTOCUISINE
28 Thinking the Future III<br />
« Nous réinventons le mur »<br />
La manufacture de porcelaine de Meissen<br />
compte devenir une entreprise novatrice sur<br />
le marché du luxe hightech<br />
Texte : Tobias Moorstedt<br />
PHOTOS : SVEN DÖRING (PAGE DE GAUCHE), ZOOEY BRAUN/ARTUR (PAGE DE DROITE)
Un patron perspicace<br />
Christian Kurtzke, ici dans l’atelier réservé aux<br />
artistes sollicités par la manufacture de porcelaine.<br />
De nouveaux éléments muraux en porcelaine<br />
(à gauche). Les carreaux de porcelaine,<br />
comme ceux de la gamme Royal Opulent, sont<br />
synonymes de la plus grande élégance. La<br />
porcelaine de Meissen est alors magnifi ée par<br />
de l’or ou du platine – un travail fait main.
Aspect raffi né<br />
Les murs de cette propriété viticole<br />
ont été surfaçés avec de l’or<br />
qui leur confère un brillant soyeux.
PHOTOS : KILIAN BISHOP (PAGE DE GAUCHE), ROLAND HALBE/ARTUR (EN BAS DE LA PAGE DE DROITE)<br />
Perfection et qualité<br />
Contrairement aux carreaux traditionnels, ceux de la catégorie<br />
Architecture Meissen sont réalisés en porcelaine de<br />
manière individuelle à la manufacture. Les contrôles de<br />
qualité visent la perfection jusque dans les moindres détails.<br />
La journée commence bien pour Christian Kurtzke. Un collaborateur<br />
entre dans la salle lumineuse du dernier étage de la manufacture<br />
de porcelaine Meissen et lui montre un prototype.<br />
L’homme avance prudemment, avec une tablette dans ses mains<br />
ouvertes. On ne voit pas ce qu’il transporte sur la tablette. En<br />
fait, rien. Le produit révolutionnaire, c’est la tablette ! Une plaque<br />
de porcelaine d’un blanc profond. Christian Kurtzke la prend<br />
dans ses mains, la soupèse, touche sa surface, examine sa<br />
couleur à la lumière et dit : « Parfait ! Un magnifi que off -white. »<br />
Dans sa voix transparaissent enthousiasme, énergie et<br />
confi ance. Et il y a de quoi ! Utilisés comme revêtements muraux<br />
à partir de 2011, les carreaux de porcelaine, dernières créations<br />
de la manufacture de Meissen, deviendront indissociables de<br />
l’architecture d’intérieur moderne.<br />
Christian Kurtzke dirige l’entreprise depuis trois ans.<br />
Fondée en 1710 par l’alchimiste Johann Friedrich Böttger et le<br />
prince électeur Auguste le Fort, la manufacture de porcelaine<br />
dont les produits ont dominé le marché européen pendant des<br />
siècles, était en diffi culté avant son arrivée. Dettes et pertes<br />
menaçaient sa survie. Opération suicide ! Néanmoins, il n’a pas<br />
hésité un instant. « En Europe, à part Gaggenau, il y a peu de<br />
marques qui ont une aussi longue histoire. » Son objectif : ne<br />
plus confi ner dans le vaisselier ou la vitrine rococo la marque<br />
Meissen mais lui ouvrir grand toute la maison.<br />
Au printemps 2011, alors que se tenait le Salone Internazionale<br />
del Mobile, épicentre du design, la manufacture a ouvert<br />
à Milan la « Villa Meissen », dans un palais somptueux juste<br />
à côté de Gucci, Louis Vuitton et Dior. Le bon voisinage, selon<br />
Christian Kurtzke, qui a créé les départements « Fine Art »,<br />
« Fine Living » et « Architecture Meissen » et qui, à l’avenir,<br />
veut développer des œuvres d’art en série limitée, des objets<br />
déco, des revêtements muraux et, par la suite, des tissus<br />
d’ameublement, des meubles et des tapis, à l’exemple de la<br />
marque française Hermès.<br />
Jusqu’à présent, la stratégie s’est avérée effi cace. En<br />
2010, l’augmentation des résultats de l’entreprise dans le haut<br />
Thinking the Future III 31<br />
de gamme a atteint jusqu’à 70 pour cent. Lors d’une vente aux<br />
enchères à Londres, des vases et des statues ont dépassé les<br />
150 000 euros. Le chiff re d’aff aires devrait doubler dans les dix<br />
prochaines années.<br />
Christian Kurtzke est maintenant dans le studio d’architecture<br />
de la manufacture de Meissen. Il est sûr d’une chose :<br />
les revêtements muraux de porcelaine de toutes les couleurs<br />
dont il est entouré remporteront un grand succès. Des hôtels de<br />
luxe et de grands studios de design sont déjà acquéreurs. La<br />
porcelaine est utilisée dans la boutique phare de la manufacture<br />
horlogère Lange & Söhne et le sera bientôt dans les showrooms<br />
de Gaggenau. « Haute qualité et longue histoire vont bien ensemble<br />
», dit Sven Schnee, directeur de Gaggenau International.<br />
« Comme la manufacture de Meissen est en mesure d’individualiser<br />
sa production et de tenir compte de souhaits<br />
particuliers, c’est le partenaire qu’il nous faut. »<br />
C’est lors d’une visite du château de Dresde que Christian<br />
Kurtzke a eu l’idée de créer le département « Architecture<br />
Meissen » en découvrant la Procession des princes, une frise<br />
murale en plein air de 25 000 éléments de porcelaine que ni les<br />
intempéries ni les incendies causés par la guerre n’ont réellement<br />
détériorés en surface en plus de 100 ans. Bien que fragile,<br />
la porcelaine est une matière d’une grande dureté. Christian<br />
Kurtzke s’est dit que cette œuvre était aussi l’illustration d’une<br />
technologie pour laquelle il devait exister une demande. La porcelaine<br />
a des caractéristiques qui sont intéressantes pour les<br />
architectes d’intérieurs. Contrairement aux autres carreaux, ceux<br />
en porcelaine ne sont pas pressés à sec mais obtenus par coulage<br />
et sont de ce fait absolument imperméables même sans<br />
émaillage ni enduit pour joints. La porcelaine ne contient pas<br />
de produits nocifs et elle est compatible avec les aliments. Et<br />
Christian Kurtzke d’ajouter : « C’est un ancien artisanat d’art et<br />
pourtant doté d’une technologie écologique. »<br />
Enfant, Christian Kurtzke mangeait déjà dans de la porcelaine<br />
de Meissen, les jours de fête, cela s’entend. « A la maison, nous<br />
avions un service décoré de bleu », dit-il. Le manager de 41 ans<br />
Ambiance sélect<br />
Les carreaux de porcelaine de Meissen sont coulés et se<br />
prêtent parfaitement à une utilisation dans la salle de bains.
32 Thinking the Future III<br />
Perfection du travail manuel<br />
Qu’il s’agisse d’exécuter des éléments en relief ou de mélanger<br />
à la main des peintures produites dans le laboratoire<br />
de la manufacture, l’expérience du personnel se nourrit de<br />
plus de trois siècles de savoir-faire.<br />
n’est pas uniquement impliqué dans les aff aires et le management<br />
mais également dans l’histoire de l’art. « Cela fait partie<br />
de la culture générale », dit-il. Il a découvert que dans l’histoire<br />
de la manufacture, les directeurs ne se sont pas occupés<br />
exclusivement de bilans et de logistique. Ils ont toujours exercé<br />
une grande infl uence sur l’orientation artistique de l’entreprise.<br />
Lui-même, tel un chef designer, ne manque pas de suggérer<br />
l’utilisation de nouvelles couleurs et de formes originales. « J’ai<br />
le nez creux quand il s’agit de deviner ce qui aura du succès sur<br />
le marché. »<br />
Malgré la poussière sur son lieu de travail, Christian<br />
Kurtzke porte toujours des costumes coupés près du corps,<br />
avec un pin’s au revers représentant les épées croisées qui sont<br />
le logo de la manufacture. Les responsables politiques américains<br />
expriment leur patriotisme en arborant un pin’s qui représente<br />
le drapeau de leur pays. Avec le sien, Christian Kurtzke<br />
entend montrer que Meissen est non pas une étape mais la<br />
tâche de toute une vie. Quand il a du temps, il arpente un dédale<br />
de couloirs conduisant à de multiples caves qui occupent<br />
un vaste périmètre, il essaie de mémoriser la topographie des<br />
lieux et examine les stocks. Parfois, il a l’impression d’être<br />
un archéologue qui vient juste d’ouvrir une chambre mortuaire.<br />
« Dans nos archives, nous avons 700 000 modèles et<br />
plus de 200 000 produits sur une période de trois siècles, dit-il,<br />
« aussi bien des pièces majeures que des accessoires. » Il a<br />
toujours son smartphone à la main qu’il utilise pour photographier<br />
certaines pièces et les montrer ensuite à des collaborateurs<br />
et à des clients. Christian Kurtzke a trouvé par exemple<br />
une tasse datant de 1760 dont la forme aux lignes épurées et<br />
élégantes est extrêmement moderne. Commercialisée en 2010<br />
comme tasse à café expresso, elle s’est vendue à ce jour à plus<br />
de 10 000 exemplaires. Auparavant, il fallait compter jusqu’à<br />
deux ans et demi avant qu’une nouvelle ligne de produits ne soit<br />
mise en vente. « Parce qu’on avait toujours présent à l’esprit un<br />
service avec de nombreuses pièces. » Au XXI e siècle, il faut fabriquer<br />
aussi des pièces individuelles, des sets cadeaux et<br />
concrétiser des idées spontanées. « Nous pensons en cycles de<br />
quelques semaines », dit le manager. Dans l’atelier d’architecture,<br />
de grands outils mystérieux sont accrochés à un mur, des<br />
règles, des compas et des fi ls à plomb utilisés autrefois dans la<br />
réalisation de revêtements muraux. Ce ne sont pas seulement<br />
des objets décoratifs. Ils sont là pour rappeler aux architectes,<br />
aux designers et aux gros clients que les choses sont faites à la<br />
main. Pour s’en rendre compte, il suffi t de se déplacer dans les<br />
couloirs d’une grande sobriété d’où l’on a banni le superfl u. L’air<br />
saturé de poussière et l’odeur des peintures en témoignent :<br />
nous sommes bien dans une manufacture. Au musée, à côté<br />
des ateliers de production, qui attirent chaque année des milliers<br />
de visiteurs, on voit surtout d’opulentes statues et des fi gurines<br />
d’animaux aux couleurs éclatantes et aux nombreuses dorures.<br />
Par son architecture aux lignes droites, le<br />
musée aux grandes fenêtres est à l’opposé du baroque caractéristique<br />
de la marque à son origine. « La ligne Architecture<br />
tranchera avec l’aspect opulent, royal et baroque de la porcelaine<br />
de Meissen, telle que les gens l’imaginent. Par ses formes<br />
modernes et épurées, elle ciblera une clientèle jeune et citadine.<br />
Lignes claires, couleurs mates, dépouillement raffi né, de<br />
grands classiques vont voir le jour. »<br />
La porcelaine est un produit moderne, une synthèse de<br />
la nature et de la technique, d’un travail manuel archaïque et<br />
d’un design pointu. Dans l’atelier de production, les éléments<br />
muraux sont posés sur des structures métalliques, à côté de<br />
tasses, d’assiettes, de vases et de fi gurines. On voit bien que la<br />
famille de produits s’agrandit. Les carreaux bruts sont grisblancs.<br />
« Nous pouvons préparer n’importe quelle couleur dans<br />
nos ateliers et ainsi réagir rapidement pour donner satisfaction<br />
au client, quels que soient ses souhaits », dit Christian Kurtzke.<br />
La matière en soi autorise cette souplesse d’adaptation et se<br />
prête aux processus de production les plus divers. On peut lui<br />
donner toutes les formes au coulage. Les carreaux peuvent être<br />
lisses, structurés en surface ou décorés de manière originale<br />
sans que la porcelaine soit détériorée par l’opération de garnissage-découpage.<br />
Le directeur ne manque pas non plus d’imaginer<br />
des fi gurines et des modèles en trois dimensions, par<br />
exemple un crochet qui sort du mur. Des scènes surréalistes,<br />
des possibilités infi nies. « Nous réinventons le mur. »<br />
Chez Gaggenau, Sven Schnee s’intéresse aux caractéristiques<br />
de la porcelaine. En partenariat avec la manufacture de<br />
Meissen, il projette de donner une dimension nouvelle à l’identité<br />
de la marque Gaggenau, présentée pour la première fois à<br />
Pékin, fi n 2011. Pour habiller l’Heritage Wall de Gaggenau,<br />
l’idée est de remplacer le sapin en provenance de la Forêt-Noire<br />
par un revêtement de porcelaine. « Une formidable interaction<br />
entre nature et haute technologie », dit Sven Schnee. Le design,<br />
c’est un vrai trompe-l’œil, une illusion qui est le fruit du travail<br />
artisanal. Meissen détient ici une réelle expertise. ¤<br />
DROITE)<br />
DE (PAGE BRAUN/ARTUR ZOOEY :<br />
Complément d’information<br />
www.meissen.com PHOTO
Matière authentique<br />
Le revêtement mural est en « grès de Böttger », la<br />
matière la plus ancienne et une des plus authentiques<br />
au programme Architecture de Meissen. Il<br />
est fabriqué à la main à la « Rote Münze », nom<br />
donné à une manufacture dans la manufacture.
34 Gaggenau Online<br />
Version compacte<br />
new spaces en ligne<br />
Une sélection d’articles de l’actuelle version papier de<br />
new spaces publié par Gaggenau est désormais en ligne sur<br />
www.gaggenau-newspaces.com. On peut les lire de partout,<br />
à tout moment. La page d’accueil propose un aperçu des<br />
thèmes et une brève description des articles correspondants.<br />
Chaque article peut être sélectionné individuellement, il est<br />
alors disponible en version intégrale, avec textes et illustrations.<br />
Il est possible de télécharger en PDF, au choix, soit l’article<br />
original tiré du magazine, soit une version texte uniquement.<br />
Confortable<br />
et attrayante<br />
L’édition en ligne de<br />
new spaces off re de<br />
nouvelles fonctions en<br />
plusieurs langues.<br />
Les photos des articles mis en ligne peuvent être consultées<br />
avec leurs explications dans une galerie d’images.<br />
Désormais, en plus de l’allemand et de l’anglais, new spaces<br />
propose aussi en ligne des éditions en français, en espagnol et<br />
en turc, qui peuvent être sélectionnées directement sur l’interface.<br />
Pour pouvoir être relues, toutes les versions papier sont<br />
archivables pour les lecteurs, afi n que l’off re sur Internet de<br />
new spaces puisse être utilisée de façon tout aussi variée que<br />
l’ensemble de l’off re en ligne de la marque Gaggenau. ¤ PHOTO<br />
: COURTESY OF APPLE
Gaggenau<br />
new spaces <strong>09</strong><br />
Halte aux Emirats<br />
1.<br />
Cuisine gastronomique sur le green<br />
Le Showroom Mobile de Gaggenau<br />
fait halte à Dubaï<br />
Fin 2010, quelle n’a pas été la surprise des habitués du<br />
célèbre club de golf de Montgomerie à Emirates Hills, un<br />
quartier de Dubaï, de voir la silhouette caractéristique du<br />
Showroom Mobile de Gaggenau se détacher pendant des<br />
semaines du green verdoyant. En partenariat avec la chaîne<br />
d’hôtels de luxe « The Address » et avec le concours de<br />
quelques-uns de ses chefs cuisiniers et de ceux de l’hôtel<br />
Armani de Dubaï, le mois de novembre, à la fois doux et<br />
ensoleillé, a été entièrement placé sous le signe du dépaysement<br />
culinaire. Les cuisines régionales d’Inde et du Japon et<br />
celles novatrices d’Europe ont été magistralement célébrées<br />
dans le showroom tout en transparence. Organisé en collaboration<br />
avec Bang & Olufsen, le BEO Masters Golf Tournament,<br />
disputé le 23 novembre, a été un moment fort. Pour<br />
l’occasion, le Showroom Mobile est devenu un espace dédié<br />
aux sens, les sonorités, les images et les plaisirs gustatifs<br />
créant un scénario exceptionnel.<br />
Régals culinaires<br />
Dans le Showroom Mobile<br />
de Gaggenau, des chefs<br />
étaient aux petits soins avec<br />
les habitués du club de golf<br />
de Montgomerie, à Dubaï.<br />
Sights and Scenes 35<br />
PHOTOS : MARTIN PFEIFFER (2)
36 Sights and Scenes<br />
2.<br />
« Je suis vraiment fière de la diversité »<br />
Suzanne Husseini réinterprète la cuisine arabe traditionnelle dont elle<br />
vante le raffinement et les ingrédients qui la compose<br />
Texte : Carole Corm<br />
Réinterprétation<br />
Moussaka d’aubergines, pois<br />
chiches et pignons, le tout<br />
assaisonné de cannelle,<br />
menthe et jus de grenade.<br />
Les cuisiniers au pouvoir ! On imagine<br />
à quoi ressemblerait alors le Proche-<br />
Orient. Les plats locaux et les traditions<br />
revêtiraient une grande importance, on<br />
encouragerait l’agriculture biologique et<br />
il y aurait des produits frais en abondance.<br />
Quel meilleur prélude à la redéfi -<br />
nition d’une région qui s’y emploie actuellement<br />
?<br />
On ferait alors intervenir Suzanne<br />
Husseini, une Palestinienne qui vit à Dubaï<br />
et qui a une conception de la vie tout<br />
à fait optimiste. Sa devise est assurément<br />
: « Yes we can ». Avec son émission<br />
de télévision « Sohbe Taibe » et son<br />
livre de cuisine « When Suzanne Cooks »<br />
(Motivate Publishing), elle a modernisé la<br />
cuisine très variée du Proche-Orient.<br />
« J’aimerais mettre fi n à une idée fausse<br />
selon laquelle les recettes de cuisine<br />
arabe sont compliquées », dit-elle. « Il<br />
faut connaître bien entendu certains<br />
tours de main. Beaucoup de plats à base<br />
de produits frais sont synonymes d’équilibre<br />
alimentaire. La cuisine arabe est<br />
comparable à un verger. »<br />
La cuisine est une aff aire de femmes<br />
mais, à la télévision arabe, on voit surtout<br />
des hommes aux fourneaux. Pendant des<br />
années, des émissions surannées ont<br />
montré comment préparer le malfouf<br />
mehchi, du chou farci avec du riz, et des<br />
plats occidentaux d’un autre temps<br />
comme le bœuf Stroganov. Habillée de<br />
façon impeccable et les yeux maquillés<br />
comme le seraient ceux d’une star du<br />
cinéma italien, elle explique tout avec un<br />
optimisme contagieux, de la fattouche,<br />
salade paysanne, au kibbé, plat de boulettes<br />
de céréales et de viande hachée.<br />
« Un beau bouquet de plantes aromatiques<br />
fraîches suffi t à m’inspirer un plat<br />
dans lequel les utiliser », dit-elle. Une<br />
approche aussi décontractée correspond<br />
bien à la façon dont la plus jeune génération<br />
conçoit la vie au Proche-Orient. Les<br />
expatriés aux Emirats sont enthousiastes,<br />
eux aussi. Ils aimeraient en savoir davantage<br />
sur la cuisine locale car jusqu’à présent<br />
ils connaissent surtout deux préparations<br />
: le schawarma et le hoummous.<br />
Que Suzanne Husseini ait grandi non<br />
pas au Proche-Orient mais à Ottawa, au<br />
Canada où, malgré le froid, ses parents<br />
ont émigré quand elle était enfant explique<br />
peut-être son amour pour la cuisine<br />
arabe et son envie de la faire découvrir<br />
aux autres. Pour elle, la cuisine arabe<br />
était alors le lien avec ce monde que la<br />
famille avait laissé derrière elle.<br />
« Au début, mes camarades de classe<br />
s’étonnaient de mon goûter inhabituel.<br />
Avec le temps, elles l’ont trouvé cool »,<br />
dit-elle en se remémorant cette période.<br />
« Ma mère faisait toujours des monticules<br />
de falafels. J’en emportais à l’école. Mes<br />
camarades les trouvaient exotiques mais<br />
après les avoir goûtés elles se sont mises<br />
à les apprécier et bientôt elles m’en ont<br />
passé commande. »
Cuisinière starisée<br />
Suzanne Husseini est impressionnante<br />
également par son<br />
apparence. Plus ternes, ses<br />
collègues, qui cuisinent à la<br />
télé, n’ont qu’à bien se tenir.<br />
Suzanne Husseini rêvait d’être enseignante<br />
: « Je savais que j’étais faite pour<br />
enseigner. » Elle a travaillé dans des<br />
écoles, enseigné aux adultes les principes<br />
d’une alimentation équilibrée et a<br />
même donné des cours de pilates. Mais<br />
ce sont ses cours de cuisine que l’on<br />
préférait. C’est ainsi qu’elle a décidé de<br />
renouer avec les goûts et les saveurs de<br />
son enfance : « Ma mère faisait beaucoup<br />
de choses elle-même, du pain arabe, de<br />
la confi ture, de l’hoummous, du fromage<br />
et du labneh, une sauce épaisse au<br />
yaourt. » Elle a donc commencé à donner<br />
des cours de cuisine à Dubaï.<br />
Elle espère faire bouger les choses.<br />
« Ce pays est connu pour sa générosité<br />
et son hospitalité proverbiales. Malheu-<br />
37<br />
reusement, beaucoup de merveilleuses<br />
pratiques liées à la préparation et au<br />
partage des repas à la maison ont sombré<br />
dans l’oubli. Qui a envie de faire la<br />
cuisine chez soi ? » Même les restaurants,<br />
qui proposent des plats traditionnels<br />
du Proche-Orient, semblent s’être<br />
fourvoyés. « Ils servent tous les mêmes<br />
choses. De la bonne cuisine bourgeoise<br />
? Des clous ! » Elle aimerait aider<br />
les gens à prendre conscience de ce<br />
qu’ils ont perdu. « J’aimerais que dans<br />
les familles on se remette à faire la cuisine,<br />
à manger et à se régaler tous ensemble.<br />
Il faut non pas chasser les enfants<br />
de la cuisine mais les faire<br />
participer et leur apprendre à préparer<br />
un repas équilibré. Il y a tant de délicieux<br />
ingrédients dans la cuisine arabe. Je suis<br />
vraiment fi ère de cette diversité. »<br />
Sa philosophie est bien dans l’air du<br />
temps, ce qui lui a valu le soutien de<br />
Gaggenau. Elle cuisine à l’occasion<br />
d’événements orchestrés par Gaggenau.<br />
Il lui arrive aussi d’utiliser la nouvelle Cuisine<br />
Mobile de Gaggenau, comme elle<br />
l’a fait récemment lors du Bride Show à<br />
Dubaï. Son dernier livre de cuisine<br />
« When Suzanne Cooks » a été sponsorisé<br />
par Gaggenau. « Je voulais que cette<br />
cuisine raffi née et exigeante soit présentée<br />
comme elle le mérite, dans un livre à<br />
sa mesure », dit-elle. Elle a confi é la réalisation<br />
des photos et la conception à Petrina<br />
Tinslay et Alison Attenborough, qui<br />
ont déjà travaillé pour Nigella Lawson et<br />
Vogue Food.<br />
Elle est en train de négocier la présentation<br />
de deux émissions de télévision<br />
sur la cuisine, l’une en arabe, l’autre en<br />
anglais. Gaggenau sera partie prenante<br />
car elle s’adresse aux téléspectateurs<br />
arabes et occidentaux. Elle ira loin car<br />
elle a déjà fait du chemin avec sa réinterprétation<br />
des meilleures recettes traditionnelles<br />
de la cuisine arabe.
38 Sights and Scenes<br />
2.<br />
Rêves écologiques au pays des Mille et Une nuits<br />
Un jour, il n’y aura plus de pétrole. Voilà pourquoi, en prévision de l’avenir,<br />
les Emirats arabes unis jouent la carte de l’architecture durable<br />
Texte : Petra Thorbrietz<br />
La première étape<br />
Au Masdar Institute of<br />
Science and Technology, tout<br />
fonctionne à l’énergie solaire<br />
(ci-dessus et en haut, page<br />
de droite).<br />
PHOTO : ROLAND HALBE, ARCHITECTURE : NIGEL YOUNG/FOSTER + PARTNERS<br />
Les réalisations orientales de rêve ont<br />
été modelées autrefois dans la glaise.<br />
Façonnées à la main et séchées au soleil,<br />
les briques servaient à construire des<br />
maisons étroites et charmantes – chacun<br />
était son propre maître d’œuvre. L’architecture<br />
était simple mais effi cace. Des<br />
ruelles ombragées séparaient les maisons<br />
aux toits couverts de palmes naturelles<br />
et aux façades enduites d’un mélange<br />
de coraux fossilisés et de calcaire<br />
coquillier – un matériau qui n’emmagasine<br />
pratiquement pas la chaleur. Des<br />
citernes servaient à recueillir l’eau. Les<br />
seules ressources disponibles provenaient<br />
du désert, des airs et de la mer.<br />
Elles étaient parfaitement appropriées<br />
pour permettre aux populations de<br />
supporter le climat extrême. En hiver,<br />
la vie de nomade sous la tente, d’une<br />
oasis à l’autre dans le désert, reprenait<br />
ses droits.<br />
Il faut se remémorer l’histoire des<br />
populations du golfe Persique pour saisir<br />
l’évolution prodigieuse de cette région<br />
du monde, placée sous la domination de<br />
quelques tribus arabes pendant des millénaires.<br />
Créés en 1971, les Emirats<br />
arabes unis (E.A.U) regroupent Abu Dhabi,<br />
Dubaï, Sharjah, Ajman, Umm al-<br />
Qaiwain, Ras al-Khaïmah et Fujaïrah. La<br />
manne pétrolière, qui s’est traduite par<br />
leur montée en puissance sur la scène<br />
mondiale, a permis aux Emirats, sous la<br />
conduite de quelques cheiks, de se doter,<br />
en l’espace d’à peine deux générations,<br />
de tout ce qui était l’apanage des<br />
nations industrielles : gratte-ciel d’acier et<br />
de verre, autoroutes à six voies, centres<br />
commerciaux, piscines, climatisation.<br />
Mais, à peine ces pays connaissent-ils<br />
la prospérité que celle-ci est appelée<br />
à disparaître. Que se passerait-il si les<br />
ressources pétrolières venaient à s’épuiser<br />
? Aucun pays ne s’est posée la
question de manière aussi radicale que<br />
les Emirats.<br />
La richesse inépuisable fait place aux<br />
énergies renouvelables. Actuellement,<br />
les Emirats ne ménagent pas leurs efforts<br />
pour devenir la Mecque des technologies<br />
écologiques ultramodernes, un<br />
terrain d’expérimentation créative, un<br />
laboratoire de matière grise pour la société<br />
à l’échelle du monde. « Nous voulons<br />
créer la Silicon Valley des énergies<br />
alternatives », dit le sultan Ahmed al-Jaber,<br />
directeur d’Abu Dhabi Future Energy<br />
Company. Son gouvernement l’a chargé<br />
d’une mission : créer la première ville<br />
sans émissions polluantes, sans déchets<br />
ni voitures – un modèle planétaire. Depuis<br />
2008, Masdar City, l’écopolis visionnaire,<br />
prend forme à 30 km à l’est d’Abu<br />
Dhabi, la capitale. Elle devait être achevée<br />
en 2016 mais la crise fi nancière internationale<br />
n’a pas épargné les monarchies<br />
pétrolières. Le concept ambitieux a<br />
subi quelques coupes et le rythme s’est<br />
ralenti. Nouvelle échéance : 2025.<br />
Sur les quelques 50 000 habitants<br />
qu’il est prévu d’accueillir, certains se<br />
sont déjà installés : des étudiants, des<br />
membres du corps enseignant du Masdar<br />
Institute of Science and Technology,<br />
le premier au monde à se consacrer uniquement<br />
au développement durable en<br />
liaison avec l’écologie sur la base de<br />
nouvelles énergies. C’est le noyau créatif<br />
d’un parc technologique d’environ 1 500<br />
entreprises et instituts qui, au milieu du<br />
désert, font partie de ce qu’ils expérimentent.<br />
Ils veulent prouver que l’homme sait<br />
s’adapter et qu’il parvient à rester maître<br />
du terrain malgré le changement climatique<br />
et la raréfaction des ressources.<br />
L’architecture joue un rôle central<br />
dans ce contexte. Le Britannique Norman<br />
Foster s’est inspiré des cités arabes traditionnelles<br />
pour son concept de « ville<br />
verte » dans le désert. Construites côte à<br />
côte, les maisons ne sont séparées que<br />
par des ruelles ombragées et toiturées<br />
par des éléments photovoltaïques transparents.<br />
Pas de gratte-ciel dont la climatisation<br />
consomme beaucoup d’énergie<br />
mais des tours à vent traditionnelles pour<br />
ventiler les bâtiments, en association<br />
avec des techniques modernes de récupération<br />
de l’énergie comme les frigopompes<br />
installées dans les profondeurs<br />
de la terre. Des éoliennes aux portes de<br />
la ville et la plus grande centrale solaire<br />
au monde – 100 000 modules sur une<br />
superfi cie équivalant à 500 terrains de<br />
ARCHITECTURE : NIGEL YOUNG/FOSTER + PARTNERS (CI-DESSUS, PHOTO : PANOS PICTURES/VISUM (CI-DESSOUS)<br />
39<br />
Un visionnaire<br />
dans le désert<br />
Chargé de concevoir l’écopolis<br />
Masdar City, le<br />
Britannique Norman Foster<br />
s’est inspiré des cités arabes<br />
traditionnelles et de leur<br />
concept de construction.
40 Sights and Scenes<br />
Oasis du XXI e siècle<br />
La construction alvéolaire dont<br />
l’action est comparable à celle de<br />
tours de refroidissement facilite les<br />
échanges de chaleur. Le jardin, au<br />
dernier étage, permet de se promener<br />
presque à l’air libre (ci-dessous).<br />
football – fournissent de l’électricité. L’infrastructure<br />
de la ville a été conçue par<br />
les laboratoires d’idées les plus réputés<br />
du monde des sciences et de l’industrie<br />
internationale comme le Massachusetts<br />
Institute of Technology, BP, Rolls Royce,<br />
Bosch Solar Energy et l’institut RWTH<br />
d’Aix-la-Chapelle. Sa réalisation nécessitera<br />
22 milliards de dollars.<br />
Toutes les énergies sont renouvelables.<br />
On procède au dessalement de<br />
l’eau de mer avec des installations fonctionnant<br />
à l’énergie solaire. Les ordures<br />
sont recyclées et les voitures interdites<br />
de cité. Pour se déplacer, les habitants<br />
Ruelles ombragées<br />
Selon les principes de l’architecture<br />
traditionnelle, les<br />
bâtiments sont très rapprochés.<br />
Des panneaux solaires<br />
font de l’ombre.<br />
montent dans des cabines électriques ou<br />
marchent comme leurs ancêtres.<br />
Masdar défi nit des standards dans<br />
une région où les habitants consomment<br />
pour l’instant deux fois plus d’énergie<br />
que les Allemands et 25 pour cent de<br />
plus que les Américains. Aucun autre<br />
Etat au monde ne gaspille de cette façon<br />
les matières premières dont il dispose.<br />
Il faut dire qu’un litre d’essence coûte<br />
ARCHITECTURE : FOSTER + PARTNER/COURTESY: MASDAR CITY (À DROITE), COURTESY: MASDAR CITY (À GAUCHE)
l’équivalent de 27 centimes d’euro, un<br />
kilowatt, un sixième. L’été, beaucoup de<br />
familles partent en vacances sans couper<br />
la climatisation dans leur appartement<br />
pour qu’il soit agréablement tempéré à<br />
leur retour. Inaugurée récemment, la tour<br />
Burj Dubai de 828 m, la plus haute du<br />
monde, consomme jusqu`à 150 mégawatts<br />
d’électricité – une fois et demie<br />
la production de la centrale solaire aux<br />
portes de Masdar, à 130 km.<br />
Les superlatifs peuvent être écologiques,<br />
ce que veulent prouver, au Qatar,<br />
l’émirat voisin, les stades de football pour<br />
la Coupe du Monde 2022. Les pompes à<br />
chaleur des neufs stades à construire et<br />
des trois à adapter fonctionnent à l’énergie<br />
solaire. A partir de la chaleur, on produit<br />
du froid acheminé jusqu’au terrain<br />
de jeu pour y modifi er les conditions ambiantes.<br />
Et c’est indispensable, faute de<br />
quoi la température atteint les 50 degrés<br />
et l’hygrométrie 85 pour cent. Diffi cile de<br />
jouer alors au football ! Il fera 27 degrés,<br />
promet le cheik Mohammed bin Hamad<br />
bin Khalifa Al Thani et les stades seront<br />
les premiers au monde sans empreinte<br />
carbone. Si tout fonctionne comme prévu,<br />
les structures de sport modulaires<br />
pourront être démontées après la Coupe<br />
du monde et réutilisées à un autre<br />
endroit.<br />
A Dubaï, métropole de 2,5 millions<br />
d’habitants réputée pour ses réalisations<br />
architecturales très audacieuses, le bilan<br />
énergétique et le bilan carbone deviennent<br />
de plus en plus importants. En<br />
2008, le gouvernement a déclaré que<br />
tous les bâtiments construits à l’avenir<br />
devaient être respectueux de l’environnement.<br />
Toutefois, dans cet Etat du Golfe,<br />
le chic écologique n’a rien de commun<br />
avec les modestes maisons à énergie<br />
zéro qui existent en Europe. Passionné<br />
De l’ombre<br />
Les façades penchées et<br />
d’immenses toits solaires font<br />
pratiquement barrage au<br />
soleil (ci-contre et ci-dessous).<br />
41<br />
de mécanique, David Fisher a conçu par<br />
exemple le premier gratte-ciel tournant<br />
autour de son axe. Grâce à l’intégration<br />
de panneaux solaires et de turbines éoliennes,<br />
le bâtiment de 400 m de hauteur,<br />
qui comporte 80 étages pivotants, générera<br />
dix fois plus d’énergie qu’il n’en<br />
consomme. Véritable chef-d’œuvre, ce<br />
fascinant bâtiment n’a toutefois pas été<br />
construit, son concepteur étant empri-<br />
Prodige énergétique<br />
Dans le centre administratif de<br />
Masdar City, l’air ascendant est<br />
brassé par la chaleur.<br />
COURTESY : MASDAR CITY (3)
42 Sights and Scenes<br />
L’avenir se prépare<br />
dans le désert<br />
Vue aérienne de<br />
Masdar City, l’écopolis<br />
au milieu des sables.<br />
Le cadre environnant<br />
fait penser à un paysage<br />
lunaire.<br />
sonné en Israël depuis 2010 pour délit<br />
économique. Le concept de l’Oasis<br />
Tower est tout aussi révolutionnaire :<br />
c’est une ferme verticale, sans émissions<br />
de CO 2 , qui, à une hauteur vertigineuse,<br />
est censée associer des cultures, des<br />
aquariums, des bassins d’aquaculture et<br />
des étables, y compris bien entendu l’installation<br />
de valorisation du méthane.<br />
C’est l’architecte indien Rahul Surin qui a<br />
conçu ce projet pour fertiliser le désert<br />
de manière inattendue. Son objectif :<br />
aider l’agriculture, l’un des secteurs les<br />
plus polluants au monde, à produire proprement<br />
hors sol. L’eau utilisée sera recy-<br />
PHOTO : ABACA PRESS/ACTION PRESS<br />
clée en permanence et largement réemployée.<br />
Les importations considérables<br />
de denrées alimentaires par les Emirats,<br />
synonymes d’émissions de dioxyde de<br />
carbone, seront ainsi superfl ues. On ne<br />
s’est pas contenté de l’imaginer sur le<br />
papier : l’ O-14 est devenu réalité à Dubaï<br />
en 20<strong>09</strong>. C’est un immeuble de bureaux<br />
futuriste de 22 étages dont la façade a<br />
des « trous » comme le gruyère. La lumière<br />
du jour pénètre à l’intérieur des<br />
bureaux par plus d’un millier de perforations.<br />
La façade, une épaisse coque de<br />
béton, protège de la chaleur, celle-ci formant<br />
avec la gaine intérieure du bâtiment<br />
un système passif de refroidissement.<br />
C’est aux architectes Jesse Reiser et<br />
Nanoko Umemoto ainsi qu’à leur studio<br />
new-yorkais d’architecture RUR que l’on<br />
doit la conception de ces espaces de<br />
travail de toute beauté.<br />
Pour Ras al Khaimah, l’émirat le plus<br />
septentrional, le Hollandais Rem Koolhaas<br />
a conçu une nouvelle ville écologique<br />
dans le désert. La Gateway Eco<br />
City sera réalisée essentiellement avec<br />
des matériaux provenant de la région, elle<br />
ne générera ni émissions polluantes ni<br />
ordures et sera dotée de technologies<br />
solaires de la dernière génération. Beaucoup<br />
de ruelles étroites et de places<br />
feront de la ville une techno-oasis parfaite<br />
également sur le plan esthétique. Son<br />
achèvement est prévu pour 2012.<br />
Les Hollandais ont la réputation<br />
d’être de grands architectes et des spécialistes<br />
de l’aménagement des sites. Ils<br />
vivent exposés au risque d’élévation du<br />
niveau de la mer sous l’eff et du réchauffement<br />
climatique. L’architecture fl ottante<br />
est un terrain d’expérimentation dans<br />
lequel excelle WaterStudio qui a ainsi<br />
conçu pour Dubaï une mosquée ...fl ottante.<br />
Elle suscite de vifs débats sur Internet,<br />
par blogs interposés, entre défenseurs<br />
et détracteurs. Il y est question<br />
d’esthétique, de développement durable,<br />
de bilan carbone mais aussi d’aspects<br />
pratiques. Un blogueur s’interroge : « Où<br />
laisser mes sandales, à l’entrée de la<br />
mosquée ? » Bonne question !<br />
Complément d’information<br />
www.masdarcity.ae
3<br />
What’s Next?<br />
Nouveaux projets à<br />
travers le monde<br />
4<br />
5<br />
1<br />
2<br />
What’s Next? 43<br />
1 THE SKY RING Kaohsiung, Taiwan / Centre maritime et culturel / X_TU<br />
Architects (Anouk Legendre & Nicolas Desmazières avec N. Jomain, M.<br />
Chapus, R. Péquin, T. Van Gaver) /Projet pour concours / www.x-tu.com<br />
2 STADE DE FOOTBALL FC BATE BORISOV Barysaw, Biélorussie / Stade /<br />
OFIS Architects / Achèvement prévu pour 2012 / www.ofi s.si<br />
3 ONE OCEAN PAVILION Yeosu, South Jeolla, Corée du Sud / Pavillon pour<br />
Expo 2012 / soma Vienne et partenaire local dmp / Achèvement prévu février<br />
2012 / www.soma-architecture.com / Rendering : isochrom<br />
4 WAVESCAPE Yeosu, Corée du Sud / Pavillon d’exposition / Y Design Offi ce<br />
and AQSO / Proposition de design / www.ynotwhy.com<br />
5 COMER TIERRA Miami, Floride, Etats-Unis / Eglise / maison hubertz (Bryce<br />
Hubertz et Marit Gamberg) / Projet pour concours / www.maisonhubertz.com
Magicien de<br />
la lumière<br />
Carlos Gonçalves<br />
a mis de la poésie<br />
dans cette résidence<br />
à Lisbonne<br />
Texte : Anuschka Seifert
Projects 45<br />
Contraste captivant<br />
La vieille façade donnant sur la Rua<br />
Pedrouços a été entièrement<br />
intégrée au nouveau bâtiment.<br />
Les River Houses – une machine à remonter le temps, aux<br />
portes de Lisbonne. Il faut à peine cinq minutes pour atteindre<br />
le centre historique de la ville avec le célèbre monastère des<br />
Hiéronymites et la légendaire tour de Belém, ou encore le<br />
Centre culturel ultramoderne. Construire une résidence de<br />
grand standing, telle un îlot d’exclusivité pratiquement au milieu<br />
de la ville – l’architecte portugais Carlos Gonçalves en rêvait<br />
depuis longtemps. Tous les jours, il emprunte la Rua Pedrouços<br />
cahotante pour se rendre en voiture au centre ville. De jolies<br />
villas et des palais de granit à deux étages sur son chemin. Mais<br />
partout, les façades vieux rose sont décrépies.<br />
Il aime les symphonies en sourdine de sa ville, son « parfum<br />
impossible à confondre ». Celui de l’Atlantique apporté par<br />
le vent qui souff le doucement dans les rues et transporte le<br />
drôle de bruit que font les trams. « Simpático ! » Carlos Gonçalves<br />
ne peut s’empêcher d’imaginer ce que l’on pourrait faire<br />
avec ces splendides maisons, comment les sauver, établir avec<br />
élégance un lien entre tradition et modernité.<br />
« Autrefois, il n’y avait, côte à côte, que des immeubles<br />
délabrés. Un mécanicien avait même installé son atelier dans un<br />
des palais », se rappelle l’architecte qui a 50 ans. « Partout, on<br />
s’aff aire pour transformer Lisbonne en métropole, démolissant<br />
de vieilles maisons qui, ailleurs, auraient été classées. » Une<br />
décadence qui ne manque pas de romantisme et au milieu<br />
de laquelle surgissent soudain des palais de verre. Des projets<br />
ambitieux qui ne tiennent pas compte du cadre environnant.<br />
Carlos Gonçalves craint que la démolition des petits<br />
palais ne soit plus qu’une question de temps. Et pourtant, un<br />
jour, son Atelier d’Arquitectura reçoit une demande de l’entreprise<br />
Leirimundo qui réalise de prestigieux projets immobiliers :<br />
pourrait-il imaginer de transformer les vieilles maisons du 111 au<br />
123 de la Rua Pedrouços en une résidence de grand standing ?<br />
« Ce fut un grand moment de bonheur. »
« La clarté architectonique<br />
et le jeu des<br />
ombres et de la<br />
lumière nous procurent<br />
une merveilleuse<br />
sensation de bien-être. »
Le magicien joue avec la lumière<br />
Le soleil et les ombres dansent sur les façades.<br />
Lisbonne est célèbre pour son extraordinaire<br />
lumière. Les cuisines équipées d’appareils<br />
Gaggenau constituent l’espace de communication<br />
à l’intérieur des appartements.<br />
Carlos Gonçalves restait assis des jours dans les jardins des<br />
alentours, orientés vers le sud, vers le fl euve. « J’observais la<br />
lumière du matin au soir, les jours de pluie et de soleil, pour<br />
savoir comment elle se réfracte, comment elle change, si les<br />
bâtiments alentours jettent des ombres et comment celles-ci<br />
progressent sur les murs. » Ensuite, il monte sur les toits rouges<br />
où il découvre et redécouvre l’élégant quartier de Restelo-Belém,<br />
à cinq minutes de là, le Centro Cultural ultramoderne de<br />
Belém, construit avec les mêmes pierres que le monastère des<br />
Hiéronymites qui lui fait face et que la tour de Belém, sentinelle<br />
et réalisation emblématique de Lisbonne.<br />
Le quartier fut épargné par le terrible tremblement de<br />
terre de 1755. « Depuis cette catastrophe, Restelo-Belém est le<br />
quartier préféré des personnes fortunées, des aristocrates et<br />
des diplomates. La largeur du Tage y est impressionnante. Dans<br />
le lointain, la ville blanche s’étage jusqu’au sommet de ses sept<br />
collines. Carlos Gonçalves se tourne vers le nord : le parc<br />
Monsanto s’étend jusqu’à l’horizon. Il est planté de pins méditerranéens<br />
mais aussi de vieux arbres en provenance des anciennes<br />
colonies. La nuit tombe peu à peu sur Lisbonne. La lune<br />
se refl ète dans les eaux du Tage qui brillent. Fabuleux ! « C’est le<br />
plus bel endroit de la ville pour construire une résidence de<br />
grand standing. » L’architecte en est convaincu.<br />
De retour à son atelier, il ne s’assoit pas devant sa planche à<br />
dessin. « Je ne l’utilise pratiquement pas. » Il ne réalise pas de<br />
plans non plus. Il se met à peindre tout simplement sur une<br />
grande surface blanche ; il commence par intégrer dans le projet<br />
River Houses les impressions qu’il a glanées – lumière, couleurs,<br />
matières, emplacement, corps du bâtiment…<br />
C’est un artiste, un virtuose, un magicien qui, par la perspective,<br />
transforme la lumière, la pierre et le verre en une structure<br />
changeante. Le fl euve, les paysages, l’urbanité aussi sont<br />
pris en compte. Il n’y a pas de transition entre la forme extérieure<br />
du bâtiment et les parties intérieures, conçues à la façon<br />
d’un tout. C’est un archéologue qui met au jour les strates, un<br />
poète qui se passionne pour la notion de « pièce », pour qui les<br />
murs ne sont jamais blancs en raison du dialogue ininterrompu<br />
et changeant de la lumière et des ombres.<br />
Tous les jours pendant deux ans, Carlos Gonçalves est<br />
sur le chantier. « J’avais la chance de connaître personnellement<br />
quelques-uns des acheteurs. Nous pouvions ainsi développer<br />
en commun certaines idées. J’ai conçu les autres appartements<br />
comme s’ils m’étaient destinés à moi et à mes meilleurs amis. »<br />
Les River Houses, ce sont aujourd’hui quatre bâtiments avec 14<br />
vastes appartements baignés de lumière. On a pu entièrement<br />
intégrer la merveilleuse façade donnant sur la Rua Pedrouços.<br />
Un vieux palais a été énucléé. Deux nouveaux immeubles ont été<br />
construits. « Dès que la porte côté rue se referme, on est dans<br />
un autre monde », estime-t-il. La clarté des lignes et des perspectives<br />
fait penser à l’architecture du Bauhaus. Des espaces<br />
verts vallonnés et un éclairage pop art mais aussi des lampadaires<br />
dans les pièces sur jardin adoucissent ce qui peut paraître<br />
austère. « Notre quotidien est suffi samment chaotique »,<br />
dit-il. « Les gens voyagent rien que pour éprouver la sensation<br />
du temps. D’un temps qui tranche avec le quotidien. Ici, c’est<br />
une machine à remonter le temps qui vous transporte là où tout<br />
n’est que calme et détente. »<br />
Le mieux, c’est de se rendre sur la terrasse inondée de lumière<br />
et de s’asseoir sous la pergola pour lire et « de ne plus rien<br />
prévoir pour le reste de la journée, de s’immerger tout simplement<br />
dans cette qualité magique du temps et de laisser son<br />
regard vagabonder. » Le soleil fait briller les carreaux de faïence<br />
verts des deux nouveaux bâtiments du complexe, évocateurs de<br />
l’agréable fraîcheur des eaux du fl euve. « J’ai eu la chance de<br />
pouvoir utiliser uniquement les meilleurs matériaux. » Du Jatoba,<br />
une essence d’une extrême fi nesse habituellement employée<br />
dans la construction navale. Il en a fait des parquets. D’immenses<br />
plaques de marbre en provenance des meilleures carrières<br />
portugaises. Du marbre, couleur terre, dans les tons de<br />
gris et d’un noir absolu.<br />
Des pièces aveugles, au milieu des appartements, ont<br />
été dotées de bandes lumineuses. Avec élégance, Carlos Gonçalves<br />
résout les problèmes d’obscurité. Il fait entrer en cascade<br />
la lumière du jour qui s’accroche aux escaliers, du troisième<br />
étage à la cave. La transition entre les murs et les doubles plafonds<br />
est masquée par un trait de lumière, une nouvelle ligne<br />
d’horizon en quelque sorte.<br />
Carlos Gonçalves adore être à ses fourneaux. Il a pensé<br />
les cuisines jusque dans les moindres détails et les a entièrement<br />
équipées d’appareils Gaggenau. « Je voulais que l’on<br />
puisse faire le tour du bloc avec table de cuisson induction. »<br />
On a ainsi tout à portée de la main, les plus petits ustensiles de<br />
cuisine mais aussi le combiné réfrigérateur-congélateur, le lavevaisselle<br />
et le micro-ondes. Pour lui, la cuisine est un espace de<br />
communication à intégrer dans l’habitat. « D’ici, on voit la salle<br />
de séjour et, par la porte coulissante qui est vitrée du sol au<br />
plafond, le regard porte jusqu’au milieu du jardin. »<br />
Il a créé un ensemble exceptionnel. « Un petit paradis<br />
avec des pièces qui respirent. » Une approche architecturale de<br />
l’espace qui a sa propre poésie, des couleurs et un rythme qui<br />
n’appartiennent qu’à lui. Carlos Gonçalves est un magicien de<br />
la lumière. Un explorateur du passé qu’il fait revivre au présent,<br />
continuant ainsi à écrire l’histoire de ce lieu, quelque part entre<br />
les arbres magiques de Monsanto, le Mont Saint de Lisbonne,<br />
ville blanche, et le Tage. ¤<br />
Complément d’information<br />
www.aacg.pt<br />
Projects 47
48 <strong>New</strong> Products<br />
Confort de cuisson révolutionnaire<br />
La nouvelle table de cuisson induction<br />
Full Zone chauffe l’ustensile là où il est :<br />
pour plus de flexibilité dans la cuisine
Une technique novatrice pour une nouvelle génération de<br />
tables de cuisson : la nouvelle table de cuisson induction Full<br />
Zone CX 480 off re un confort littéralement « illimité » pour cuisiner<br />
en consommant peu d’énergie. Ce nouveau concept utilise<br />
pour la première fois toute la surface comme zone de cuisson :<br />
l’ustensile est chauff é là où il est placé. La taille des casseroles<br />
ou des poêles, quatre au maximum, n’a donc plus aucune importance,<br />
tout comme leur position. Si l’ustensile est déplacé, la<br />
table de cuisson détecte le nouvel emplacement et continue<br />
de fonctionner en toute fi abilité. C’est ce que permettent<br />
48 micro-inducteurs disposés en rangs serrés et en quinconce<br />
sous la surface en vitrocéramique. Un grand et bel écran<br />
tactile rend l’utilisation simple et rapide : la forme, la taille et la<br />
position de l’ustensile fi gurent sur l’écran. D’une légère pression<br />
du doigt sur le tableau de commande, on peut choisir la<br />
position de cuisson et activer ou ajuster le niveau de puissance.<br />
Une touche permet d’affi cher en toutes lettres les informations<br />
en temps réel.<br />
Enfi n, en un seul geste, la table de cuisson induction se<br />
transforme en Teppan Yaki (accessoire optionnel du système<br />
Gastro Norm). ¤<br />
Informations produit<br />
CX 480 Table de cuisson induction Full Zone<br />
Dimensions Largeur 80 cm<br />
Variantes Cadre en inox<br />
Sans cadre<br />
49<br />
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Equipement Une seule grande surface de cuisson de près<br />
de 2 800 cm², placement libre des ustensiles<br />
de cuisson, de toutes formes et de toutes tailles,<br />
jusqu’à 4 en utilisation simultanée, puissance<br />
maximale de 4,4 kW pour les gros ustensiles,<br />
Complément d’information<br />
affi chage tactile TFT couleur convivial avec<br />
conseils d’utilisation<br />
www.gaggenau.com
50 Thinking the Future IV<br />
La Serpentine Gallery sous les projecteurs<br />
Chaque année, un pavillon d’été à Kensington<br />
Garden devient un terrain de jeu et un<br />
atelier expérimental pour les architectes<br />
Texte : Josephine Grever<br />
PHOTO : 2007 JOHN OFFENBACH, OLAFUR ELIASSON ET KJETIL THORSEN. PAVILLON SERPENTINE GALLERY 2007
2007<br />
Olafur Eliasson et Kjetil Thorsen<br />
Une réalisation sphérique de 15 m de hauteur avec une rampe extérieure,<br />
tendue de cordes de nylon blanc et déployée en spirale ascendante. Les visiteurs<br />
se retrouvent ainsi à la hauteur de la cime des arbres.<br />
51<br />
PHOTO : 2007 LUKE HAYES, OLAFUR ELIASSON ET KJETIL THORSEN. PAVILLON SERPENTINE GALLERY 2007
52 Thinking the Future IV<br />
« Des bâtiments temporaires<br />
sont toujours des laboratoires<br />
où sont testées des méthodes<br />
et des matières nouvelles.<br />
Ils nous font pressentir tout<br />
ce qui est possible. »<br />
Julia Peyton-Jones<br />
2001<br />
Daniel Libeskind<br />
Dix-huit pans tendus d’aluminium<br />
et montés sur une plate-forme de bois. Une structure géométrique en zigzag<br />
que les visiteurs ont surnommée « Euclid on Acid ».<br />
PHOTO : 2007 HÉLÈNE BINET, DANIEL LIBESKIND WITH ARUP. PAVILION SERPENTINE GALLERY 2001
Peter Zumthor est l’un des grands noms de l’architecture contemporaine, tout<br />
comme Jean Nouvel, Zaha Hadid, Daniel Libeskind, Frank Gehry, Rem Koolhaas,<br />
Oscar Niemeyer ou SANAA, à une seule diff érence près : il n’a jamais rien construit à<br />
Londres contrairement aux autres à qui l’on doit respectivement au moins un bâtiment.<br />
Maintenant, l’architecte suisse se rattrape puisqu’il conçoit cette année le pavillon d’été<br />
de la Serpentine Gallery, dans Hyde Park, à Londres. Il complète ainsi la liste de la fi ne<br />
fl eur de l’architecture mondiale d’avant-garde qui a déjà exercé ses talents ici, en plein<br />
cœur de Londres, montrant pendant trois mois – le pavillon ne reste pas plus longtemps<br />
en place – ce qu’elle imagine quand, soustraite aux contraintes bureaucratiques<br />
en matière de conception et à celles des maîtres d’œuvre, elle peut expérimenter à<br />
loisir sur la pelouse attenante à la galerie et repousser les limites de la pratique<br />
architecturale.<br />
Car, telle est l’idée sous-jacente au pavillon d’été : « Les structures éphémères sont<br />
petites mais elles restituent le langage de l’architecte tout aussi clairement que ses<br />
réalisations permanentes. Ce sont toujours des laboratoires où sont testées des méthodes<br />
et des matières nouvelles. Elles nous font pressentir tout ce qui est possible »,<br />
selon Julia Peyton-Jones, directrice de la galerie depuis 1991. « Il s’agit aussi de donner<br />
une orientation positive au débat sur l’architecture contemporaine. »<br />
Les pavillons d’été sont ainsi devenus des réalisations phares. Les stars de l’architecture<br />
se pressent sur les rangs. Elles ne se font pas prier quand elles sont sollicitées<br />
par Julia Peyton-Jones. Les pavillons sont comme un regard tourné vers l’avenir,<br />
une piste de réfl exion pour les urbanistes, les chefs d’entreprise et les responsables<br />
politiques. Ils sont en avance sur leur temps et permettent rétrospectivement de dresser<br />
l’inventaire d’un futur déjà conjugué au passé.<br />
En 2000, Julia Peyton-Jones a eu l’idée de permettre chaque été à un architecte<br />
de renom d’utiliser comme plate-forme la pelouse à côté de la galerie. Les directives<br />
valables pour tous jusqu’à présent : concevoir et réaliser en six mois une « œuvre accessible<br />
» de 300 m 2 . Le jour, ce lieu sert de café et le soir c’est un espace pour des<br />
concerts, des projections cinématographiques ou des débats. Les architectes ne doivent<br />
rien avoir construit jusque-là dans la capitale britannique, c’est la seule condition à<br />
remplir. Le budget est serré. Les matériaux sont fournis gracieusement par des entreprises<br />
qui d’habitude en font commerce. Elles fi gurent parmi les sponsors, aux côtés<br />
de nombreux particuliers et de bien d’autres fi rmes. Mis en place pour trois mois, les<br />
pavillons ouvrent en juillet. Les architectes de renom sont très motivés car ils peuvent<br />
donner libre cours à leur créativité, oser quelque chose d’inédit, jouer avec les formes<br />
et la matière, tester – également les réactions du public.<br />
Zaha Hadid, qui utilise à l’extrême la géométrie dans l’espace urbain, a « ouvert le<br />
bal » en 2000 avec un simple pavillon de toile fait de pans asymétriques soutenus par<br />
des piliers d’acier. En 2001, Daniel Libeskind a imaginé dix-huit pans tendus d’aluminium<br />
et montés sur une plate-forme de bois. Une structure en zigzag que les visiteurs<br />
ont surnommée ironiquement « Euclid on Acid » (« Euclide shooté au LSD »). En 2002,<br />
le pavillon de Toyo Ito, un simple cube d’acier et de verre avec des parois qui évoquent<br />
les facettes d’un prisme et modifi ent sans cesse les angles de vue et les perspectives,<br />
a été plébiscité par le public. En 2003, Oscar Niemeyer a incliné les murs de son pavillon<br />
d’acier, d’aluminium, de béton et de verre, leur donnant la forme des vagues, et<br />
tracé des courbes avec l’avant-toit. Sa règle d’or : « Un simple dessin doit rendre saisissable<br />
tout projet, grand ou petit. »<br />
En 2006, Rem Koolhaas a conçu un ballon dirigeable en nylon translucide, gonfl<br />
é d’air. Un an plus tard, Olafur Eliasson et Kjetil Thorsen ont réalisé une sphère de<br />
15 m de hauteur avec une rampe extérieure, tendue de cordes de nylon blanc et déployée<br />
en spirale ascendante. Les visiteurs se retrouvaient ainsi à la hauteur de la cime<br />
des arbres. Frank Gehry a construit un pavillon fait de madriers et de surfaces vitrées,<br />
53
54 Thinking the Future IV
2010<br />
Jean Nouvel<br />
Une construction ouverte de tous les côtés et associant l’acier,<br />
le plastique et le tissé. Le pavillon de Jean Nouvel<br />
dessinait, dynamique, un angle à 45 degrés avec le sol.<br />
PHOTO : PHILIPPE RUAULT, ATELIERS JEAN NOUVEL. PAVILLON SERPENTINE GALLERY 2010. VG BILD-KUNST, BONN 2011
2006<br />
Rem Koolhaas<br />
Un ballon dirigeable en nylon translucide,<br />
gonfl é d’air, qui se frotte au vent et au soleil.<br />
PHOTO : 2007 JOHN OFFENBACH, REM KOOLHAAS ET CECIL BALMOND AVEC ARUP. PAVILLON SERPENTINE GALLERY 2006. VG BILD-KUNST, BONN 2011
« Le matin, les joggers viennent<br />
y lire le journal. D’autres,<br />
munis de leur ordinateur portable,<br />
travaillent. Le soir, place aux<br />
échanges artistiques et intellectuels ! »<br />
le tout disposé en diagonale dans plusieurs directions. En 20<strong>09</strong>, le bureau d’architecture<br />
japonais SANAA a fasciné avec une construction en aluminium toute en légèreté,<br />
fl ottant, telle un nuage, au-dessus de Hyde Park tandis que celle, rouge écarlate, de<br />
Jean Nouvel, en 2010, associait l’acier, le plastique et le tissé, dessinant, dynamique,<br />
un angle à 45 degrés avec le sol.<br />
De nationalité suisse, Hans Ulrich Obrist, historien d’art, commissaire d’expositions<br />
et, depuis 2006, co-directeur de la galerie, a voulu que les manifestations proposées<br />
en soirée soient des « expériences intellectuelles ». A la façon d’un marathon, une<br />
série d’entretiens publics enchaîne exposés, débats et performances. Et le non moins<br />
populaire « sleep over » : dans le pavillon, les visiteurs peuvent explorer avec des artistes<br />
et des musiciens « les paramètres psychédéliques de l’insomnie ». Dans les pavillons,<br />
comme aime à le raconter Hans Ulrich Obrist, le spectacle n’est jamais le<br />
même. « Le matin, les joggers viennent y lire le journal. Plus tard, les gens s’y arrêtent<br />
pour déjeuner. D’autres, munis de leur ordinateur portable, y travaillent, silencieux. Le<br />
soir, place aux échanges artistiques et intellectuels ! Nos pavillons comptent parmi les<br />
endroits les plus fréquentés de Londres en été. »<br />
A l’automne, les pavillon sont vendus. « Le produit de la vente couvre 40 % de<br />
nos frais », confi rme la galerie. Le pavillon conçu par Zaha Hadid en 2000 a été acheté<br />
par la Royal Shakespeare Company et jusqu’en 2004 – il a alors été cédé à un parc de<br />
loisirs – a servi de résidence d’été pour des lectures et des workshops devant le<br />
théâtre de la compagnie à Stratford-upon-Avon. D’autres pavillons ont été installés dans<br />
le jardin de collectionneurs dont la galerie tait les noms. On sait seulement que trois<br />
d’entre eux sont désormais la propriété d’un seul et même collectionneur. L’architecture<br />
devient ainsi objet de collection.<br />
Peter Zumthor s’en étonne. « L’espace construit est un objet d’usage courant », dit-il,<br />
lucide. « Un toit au-dessus de la tête pour protéger de la pluie ». De telles remarques<br />
pleines de bon sens ont fait de lui un personnage haut en couleur. Né à Bâle en 1943,<br />
il a commencé sa carrière professionnelle en tant qu’ébéniste. Chacun de ses nouveaux<br />
projets se distingue par la précision des détails, la perfection du travail artisanal,<br />
l’interaction pertinente de la topographie, des matières, de la forme et de la lumière.<br />
« Je suis toujours inspiré par un endroit », dit ce puriste souvent récompensé. « Quand<br />
le donneur d’ordres a vraiment envie de créer quelque chose de particulier, on obtient<br />
une architecture qui, bien au-delà de la forme et la construction, a un rapport sensuel<br />
avec la vie », précise-t-il. Il ne dit qu’une chose à propos du pavillon qui sera installé à<br />
partir de juillet à Hyde Park : « Imaginez un gamin qui réalise ses rêves. Il examine l’endroit,<br />
réfl échit à ce dont il a besoin et fait de son mieux. » ¤<br />
Complément d’information<br />
www.serpentinegallery.org<br />
Hans Ulrich Obrist<br />
Thinking the Future IV 57
58 Worldwide<br />
Gaggenau<br />
new spaces 07<br />
365<br />
Gaggenau<br />
new spaces 08<br />
Gaggenau<br />
new spaces<br />
récompensé<br />
En 2010/2011, new spaces, le magazine<br />
publié par Gaggenau, a également<br />
obtenu plusieurs distinctions prestigieuses,<br />
à savoir l’iF communication<br />
design award (catégorie print media –<br />
communication de l’entreprise), qui est<br />
très convoité, de même que le nouvel<br />
International Corporate Media Award,<br />
catégorie « magazines clients B2B » et<br />
le traditionnel Good Design Award décerné<br />
par l’Athenaeum de Chicago, catégorie<br />
« graphics/identity/packaging ».<br />
www.ifdesign.de<br />
www.corporate-media-award.com<br />
www.chi-athenaeum.org<br />
jours<br />
Page 34<br />
15040 cm2 Page 48<br />
Pattaya<br />
Thai Polo Open 2011<br />
Plus de 800 invités ont apprécié les préparations<br />
culinaires de la Cuisine Mobile<br />
de Gaggenau à l’occasion du championnat<br />
de polo le plus réputé de Thaïlande,<br />
disputé au Thai Polo & Equestrian Club<br />
de Pattaya. Le 22 janvier, cet événement<br />
caritatif a mobilisé des membres de<br />
la famille royale, des personnalités internationales,<br />
des amateurs de polo et<br />
des journalistes. La grande fi nale sportive<br />
s’est accompagnée d’un programme<br />
d’animation avec présentation de voitures,<br />
épreuves de polo pour enfants et<br />
concert de l’Orchestre symphonique de<br />
Bangkok. Dans la Cuisine Mobile de<br />
Gaggenau, on était aux petits soins avec<br />
les invités. Avec four traditionnel, four<br />
combi-vapeur, tiroir chauff ant et Vario<br />
induction série 400, l’équipement était<br />
parfait pour l’occasion et les mets exquis,<br />
préparés sous les yeux des invités, soulignaient<br />
l’élégance de l’événement à caractère<br />
sportif.<br />
www.gaggenau.com<br />
Moscou<br />
Gaggenau Academy<br />
of Culinary Art<br />
Depuis l’automne 2010, il y a une nouvelle<br />
adresse prestigieuse pour les gourmets<br />
dans la capitale russe : « l’Académie<br />
Gaggenau de l’art culinaire » présente<br />
des appareils Gaggenau dans une ambiance<br />
de workshop au top niveau. L’académie<br />
est à 20 km du centre de Moscou,<br />
dans le nouveau quartier « Benelux »<br />
longé par la chaussée Novorizhskoye. En<br />
partenariat avec l’entreprise russe « Design<br />
Project », un showroom, entièrement<br />
équipé d’appareils Gaggenau, a été réalisé<br />
pour accueillir des événements culinaires<br />
avec le concours de chefs réputés,<br />
de Moscou et des environs. Ceux-ci<br />
font une démonstration de leurs talents<br />
tout en expliquant le fonctionnement<br />
pratique des appareils Gaggenau à leurs<br />
actuels et futurs propriétaires. Ces master<br />
classes sont complétées par des<br />
cours – art de la table et œnologie – en<br />
rapport avec le menu du moment.<br />
www.akademiya-gaggenau.ru
Singapour<br />
Gaggenau et la présentation<br />
de l’Audi A8<br />
Deux premières à Singapour en présence<br />
de grands noms d’Hollywood. Du<br />
1 er au 3 décembre 2010, la présentation<br />
de la nouvelle Audi A8 s’est accompagnée<br />
d’un programme spectaculaire<br />
dans les locaux futuristes de « The Promontory<br />
@ Marina Bay ». Des journalistes,<br />
des représentants du secteur automobile<br />
et des invités triés sur le volet ont<br />
été les témoins du dévoilement tant attendu<br />
de la luxueuse limousine, nouvelle<br />
icône de la marque allemande. Parmi les<br />
personnalités présentes, outre Kevin<br />
Spacey, qui a obtenu deux oscars pour<br />
son rôle dans « The Usual Suspects » et<br />
« American Beauty », l’investisseur américain<br />
Jim Rogers et Dick Lee, auteur-compositeur-interprète<br />
et star à Singapour.<br />
Un talk show a permis au public de mieux<br />
connaître ces personnalités. Des barmen<br />
du « Hyde & Seek », un bar branché de<br />
Bangkok, avaient fait le déplacement<br />
et préparaient dans la Cuisine Mobile de<br />
Gaggenau des cocktails rafraîchissants<br />
dont les invités reçus dans le pavillon<br />
ouvert se sont délectés en raison du climat<br />
tropical. Parmi les favoris : le « Berry<br />
Gaggenau » (cerises, liqueur de violettes,<br />
vodka, marasquin, jus de limette et sucre)<br />
ou encore le « Latin Winter » (pommes<br />
Fuji cuites à la vapeur, épices, vodka et<br />
jus de citron).<br />
www.gaggenau.com; www.audi.de<br />
Londres<br />
Présentation de<br />
l’AC 402 au<br />
showroom bulthaup<br />
Une première dans le showroom de<br />
Londres où l’on peut découvrir l’AC 402,<br />
la nouvelle hotte de plafond aspirante. Un<br />
showroom bulthaup, équipé d’appareils<br />
Gaggenau, a ouvert ses portes le 1 er décembre<br />
2010 au cœur de Holland Park, à<br />
Londres. Beaucoup de journalistes et de<br />
professionnels ont assisté à l’inauguration<br />
de la nouvelle vitrine de l’entreprise<br />
installée à Aich en Bavière. Le showroom<br />
a été conçu selon le concept bulthaup<br />
d’« espaces vivants », capables de<br />
s’adapter en souplesse à diff érents<br />
modes de vie et approches de l’habitat.<br />
Des architectes, des bureaux d’étude,<br />
des chefs de projet mais aussi des<br />
clients ont pu se convaincre sur place de<br />
la parfaite interaction des cuisines<br />
bulthaup et des appareils Gaggenau.<br />
www.bulthaup.co.uk<br />
Zurich<br />
André’s Cooking<br />
Academy<br />
Cuisiner avec des professionnels : André’s<br />
Cooking Academy est l’une des<br />
adresses de Zurich où la créativité culinaire<br />
est à l’honneur. Fondée par André<br />
Jaeger et quelques-uns de ses amis,<br />
l’école de cuisine permet d’acquérir,<br />
dans un cadre moderne et sympathique,<br />
certains tours de main et une connaissance<br />
des denrées internationales. Des<br />
séminaires sur l’huile d’olive et des cours<br />
de cuisine japonaise sous la direction de<br />
Sala Ruch, à la tête du restaurant de Zurich<br />
« Sala of Tokyo », fi gurent par<br />
exemple au programme. Régulièrement<br />
invité par André Jaeger, Rico Zandonella<br />
(restaurant « Rico’s Kunststuben » à Küsnacht),<br />
originaire du Tessin, utilise les<br />
appareils Gaggenau dont est équipée<br />
l’école pour concocter une cuisine inventive<br />
dans le sillage de celle du fameux<br />
chef étoilé Horst Petermann. Les salles<br />
raffi nées et très design de la Cooking<br />
Academy peuvent être louées pour des<br />
réceptions privées et des événements<br />
d’entreprise.<br />
www.andres-cooking-academy.com<br />
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PHOTO : A NAKARIN (À GAUCHE CI-DESSUS)
Q9G1LA0061