Aspects culturels, spirituels et religieux de la douleur - APF Formation

- Celui de la confrontation à la douleur. A ma connaissance il n’y a que dans cette culture
hindouiste qu’existe une telle structuration et organisation de la douleur comme un mécanisme
de purification absolue.
Tous ces mécanismes doivent permettre aux hindouistes de purifier leur corps et les amener à une
samsara meilleure, autrement dit à une réincarnation dans un corps qui soit de plus haute lignée. Mais
cela peut prendre du temps, beaucoup de temps, parfois jusqu’à 400 millions d’années !
Que faire pour que le processus d’atteinte de la « moksha » soit plus rapide ?
Mon observation du Kumba Mella m’a permis de voir comment étaient mis en pratique ces différents
mécanismes de purification, notamment ceux en rapport avec la douleur. J’en reviens donc aux
caractéristiques des différents groupes doloristes qui participent à ce pèlerinage et que j’évoquais
précédemment.
Il existe d’abord les Acémètes, qui pensent que le sommeil est inducteur d’impuretés par le rêve. Il faut
donc contrôler ses rêves en dormant le moins possible, par séquence de une ou deux heures, afin de
se purifier. Ce sont en quelque sorte les plus théoriciens puisqu’ils considèrent déjà que le corps est
dépassé et qu’il faut concentrer sa recherche de purification sur ses productions mentales.
Un autre groupe est formé par les Stylites. Ils considèrent que tout le monde est impur, dans le sens où
le sol est impur : il faut donc s’élever du sol. Ils vivent au-dessus du sol dans des cabanes sur pilotis, se
déplacent à dos d’éléphant…
Les Girovagues constituent un groupe distinct. Ils considèrent que le fait de rester sur place est une
induction d’impureté et doivent donc se déplacer en permanence. Le Girovague va d’un temple à un
autre dans toute l’Inde : c’est cette déambulation ritualisée qui a pour fonction la purification. Lorsqu’ils
mourront ils entreront directement dans la « moksha ».
Les Stationnaires sont quant à eux très peu nombreux, ce qui n’est pas étonnant si l’on considère la
douleur extrême à laquelle ils se soumettent. Le Stationnaire est un individu qui décide de rester sur
place, en général cela se caractérise par le fait qu’il replie et ligature sa jambe gauche. Il présente son
corps comme un corps figé. Le courage et le degré de purification de l’individu est directement lié à la
douleur que l’on estime qu’il a pu vivre en se privant volontairement d’un membre.
Il existe aussi les Hanging People, les Suspendus. Ceux-ci ont un autre pèlerinage qui a lieu tous les
ans lors de la pleine lune de juillet, à Kataragama au sud du Sri Lanka. Il s’agit donc d’un pèlerinage
hindouiste en territoire bouddhiste. Le pèlerinage regroupe toutes les formes de dolorisme, parmi
lesquelles je voudrais vous détailler plus particulièrement la pratique spécifique de l’accrochage du
corps. Un individu s’est préparé en jeûnant pendant 40 jours afin de maigrir et on lui accroche la peau à
Douleur et souffrance dans les situations de handicap - De l’évaluation à l’accompagnement de la personne… p.6
Journées d’étude APF Formation – Unesco -–21, 22 et 23 janvier 2004