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Le Taon – Février 1998 (Volume 2, No 2) - UQAM

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3. Nationalisons l’industrie du tabac<br />

par Léo-Paul Lauzon et Martin Poirier<br />

Pour réduire les méfaits du tabagisme<br />

La consommation de tabac coûte extrêmement cher à la société; des études évaluent à plus de<br />

neuf milliards de dollars les coûts annuels de la cigarette en soins de santé, pertes de productivité<br />

et décès prématurés. Alors que nous payons tous pour ces dégâts, une minorité de fabricants,<br />

étrangers par surcroît, s'enrichissent allègrement. Comme les taxes sur le tabac ont eu un succès<br />

mitigé en raison du lobby intensif des fabricants de tabac, il reste une option pour le<br />

gouvernement: nationaliser l'industrie du tabac.<br />

Comme il l'a fait dans le domaine des boissons alcoolisées, le gouvernement du Québec devrait<br />

créer un monopole d'État chargé de fabriquer et de distribuer les produits du tabac. Une telle<br />

politique permettrait d'exercer un meilleur contrôle sur la contrebande et la consommation de<br />

cigarettes, tout en s'assurant que la collectivité, qui paie pour les dommages du tabac, en récolte<br />

également les bénéfices.<br />

Qui profite de la fabrication du tabac?<br />

Au Canada, trois fabricants du tabac se partagent près de 100% du marché. Ces trois<br />

compagnies sont toutes, à des degrés différents, contrôlées par des entreprises américaines et<br />

anglaises. Environ 60% des bénéfices de ces compagnies sont expédiés à l'extérieur du pays sous<br />

forme de dividendes. Une grande part des 40% restant prend le chemin de l'Ontario. <strong>Le</strong> Québec<br />

ne retire donc presque rien de cette industrie, d'autant plus qu'elle est parvenue à maturité et que<br />

les investissements au Québec sont, par conséquent, insignifiants.<br />

Alors que nous payons tous pour les dommages du tabac, l'industrie, elle, s'enrichit à nos<br />

dépens. Au cours des dix dernières années, la compagnie Rothmans, deuxième fabricant au<br />

Canada, a réussi à augmenter ses bénéfices de 111%, malgré le fait que l'industrie canadienne<br />

des cigarettes soit en décroissance. Au cours de l'année 1997, l'entreprise a réalisé un rendement<br />

sur l'avoir des actionnaires de 40,2%, comparativement à «seulement» 16,8% en 1988. Imperial<br />

Tobacco, le premier fabricant au pays, a connu une croissance de la rentabilité encore plus<br />

spectaculaire: 153% de bénéfices additionnels en 1996 par rapport à 1987.<br />

<strong>Le</strong>s compagnies privées, un obstacle au contrôle de la contrebande<br />

Dans un souci d'équité, les gouvernements prélèvent des taxes importantes sur les produits du<br />

tabac. Ces taxes permettent de financer partiellement les coûts sociaux du tabagisme. Or, les<br />

fabricants se sont toujours attaqués vigoureusement à ces mesures justes et raisonnables.<br />

<strong>No</strong>us savions tous que les fabricants de tabac étaient complaisants face à la contrebande: les<br />

cigarettes de contrebande étaient en grande majorité fabriquées au Canada et exportées<br />

massivement aux États-Unis, d'où elles revenaient par les réseaux de contrebandiers. <strong>Le</strong>s<br />

journaux nous ont toutefois appris un fait des plus troublants: un représentant de la compagnie<br />

R.J. Reynolds a participé activement à ces réseaux de contrebande, et on peut supposer que les<br />

autres fabricants se sont également mêlés à ces activités illégales.<br />

Tant que l'entreprise privée contrôlera la fabrication de tabac, les gouvernements devront se<br />

battre avec un puissant lobby prêt à tout pour mettre en échec ses politiques sociales. <strong>No</strong>us<br />

devrions tirer des leçons de l'expériences des boissons alcoolisées, où la contrebande demeure<br />

sous contrôle grâce au monopole étatique malgré des taxes beaucoup plus élevées que celles<br />

appliquées auparavant aux cigarettes.

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