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Novembre - Nervure Journal de Psychiatrie

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4<br />

■ TABLE RONDE<br />

réel problème vis-à-vis <strong>de</strong>s patients.<br />

Imaginez que l’on trouve un traitement<br />

pour la cardiopathie qui soit plus efficace<br />

qu’un autre : aucun service <strong>de</strong><br />

cardiologie ne le refuserait !<br />

Antoine Pélissolo : Il y a effectivement<br />

un problème en France, car il existe<br />

maintenant un consensus sur l’intérêt<br />

<strong>de</strong> la remédiation cognitive dans le<br />

mon<strong>de</strong>. Il faut encore du temps pour<br />

que ces techniques récentes s’implantent…<br />

Mais je crois que les cliniciens,<br />

voyant les résultats, vont y venir…<br />

Agnès Metton : On peut parfois ai<strong>de</strong>r<br />

les gens à penser, à avoir une meilleure<br />

mémoire, à faire ou refaire certaines<br />

choses qui leur permettent <strong>de</strong> se<br />

débrouiller dans le mon<strong>de</strong>. Mais on<br />

s’aperçoit qu’un certain nombre <strong>de</strong><br />

patients schizophrènes n’ont pas tant<br />

perdu leurs capacités que la possibilité<br />

<strong>de</strong> se servir <strong>de</strong> leurs capacités. Il ne<br />

s’agit pas véritablement <strong>de</strong> détérioration,<br />

mais d’un autre type <strong>de</strong> perte,<br />

d’abandon <strong>de</strong> certaines fonctions, qui a<br />

plus affaire avec le lien social.<br />

Christian Spadone : C’est aussi l’un <strong>de</strong>s<br />

objectifs <strong>de</strong> la remédiation cognitive…<br />

Antoine Pélissolo : Un autre effet intéressant,<br />

pour certains patients, est l’amélioration<br />

<strong>de</strong> l’estime <strong>de</strong> soi : ils obtiennent<br />

<strong>de</strong>s réussites à ces tests alors qu’ils<br />

ne travaillent plus <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>s années<br />

et n’ont aucune insertion. Cette réussite<br />

les conduit à s’impliquer dans un programme<br />

: alors qu’on aurait jamais<br />

pensé qu’ils allaient sortir <strong>de</strong> chez eux<br />

<strong>de</strong>ux fois par semaine, ils viennent faire<br />

<strong>de</strong>s exercices qui paraissent rudimentaires<br />

sur un ordinateur. Cela doit naturellement<br />

se situer dans le cadre d’une<br />

prise en charge multidisciplinaire au<br />

long cours. Les questions qui restent<br />

difficiles tiennent à la définition individuelle<br />

<strong>de</strong>s fonctions cognitives à travailler<br />

sur un patient donné, ce qui doit<br />

passer par une évaluation neuro-psychologique.<br />

François Caroli : Le manque <strong>de</strong> neuropsychologues<br />

est un problème important<br />

! On ne dit pas à la faculté <strong>de</strong> psychologie<br />

qu’il existe <strong>de</strong>s possibilités<br />

d’emploi pour les neuro-psychologues,<br />

plus que pour les psychologues : l’enseignement<br />

y est déconnecté <strong>de</strong> ce<br />

qu’on est amené à proposer... De plus,<br />

les unités thérapeutiques (représentées<br />

par un service, un secteur, un pôle)<br />

ont souvent un fonctionnement binaire,<br />

avec le choix soit d’un modèle, soit<br />

<strong>de</strong> l’autre.<br />

Gérard Massé : Il y a quand même un<br />

point positif du fait <strong>de</strong> la reconnaissance<br />

croissante du mouvement <strong>de</strong> la<br />

réhabilitation psycho-sociale, avec une<br />

montée nette d’un intérêt pratique.<br />

Agnès Metton : En tout cas, on sent<br />

qu’il y a une différence entre les possibilités<br />

ou les propositions thérapeutiques<br />

et ce que recouvre l’état <strong>de</strong> la<br />

science. Aujourd’hui, au plan théorique,<br />

beaucoup <strong>de</strong> travaux neuro-cognitivistes<br />

cherchent à aller au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong>s éléments<br />

modulaires, pour remonter dans<br />

la compréhension <strong>de</strong>s troubles cognitifs<br />

<strong>de</strong>s schizophrènes à <strong>de</strong>s éléments<br />

supra-modulaires, et ils font même<br />

intervenir une notion nouvelle : …<br />

celle <strong>de</strong> la conscience ! Jusqu’où va-t-on<br />

aller avec les théories cognitives : va-ton<br />

redécouvrir l’inconscient avec le<br />

cognitif ?<br />

Antoine Pélissolo : Après les travaux sur<br />

les fonctions élémentaires, apparaissent<br />

<strong>de</strong>puis moins longtemps <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s sur<br />

<strong>de</strong>s fonctions plus élaborées. Certaines<br />

équipes (comme celle <strong>de</strong> Marie-Christine<br />

Hardy, ou le laboratoire <strong>de</strong> Roland<br />

Jouvent) développent <strong>de</strong>s programmes<br />

visant à améliorer la théorie <strong>de</strong> l’esprit<br />

ou l’agentivité. Les sciences cognitives<br />

sont débutantes, mais elles sont <strong>de</strong><br />

moins en moins éparpillées, car on peut<br />

maintenant faire converger <strong>de</strong>s informations<br />

très riches et diverses. L’approche<br />

clinique, l’imagerie, la génétique,<br />

les tests neuro-psychologiques<br />

convergent progressivement.<br />

Agnès Metton : Dans <strong>de</strong> nombreux<br />

domaines, on fait <strong>de</strong>s recherches sur<br />

<strong>de</strong>s questions théoriques, et parallèlement<br />

on met en place <strong>de</strong>s outils thérapeutiques<br />

; puis les jonctions se<br />

font…<br />

Christian Spadone : Comment prendon<br />

en charge au long cours un patient<br />

déficitaire ?<br />

Gérard Massé : La schizophrénie est<br />

sans doute la seule maladie psychiatrique<br />

dont on se dit d’emblée qu’elle<br />

doit être suivie au long cours. La<br />

réflexion en termes d’organisation <strong>de</strong>s<br />

soins porte sur les outils thérapeutiques<br />

et les avancées dans les dispositifs <strong>de</strong><br />

soins… Le secteur a été un progrès<br />

dans ce domaine. La question centrale<br />

dans la prise en charge <strong>de</strong>s patients<br />

souffrant <strong>de</strong> schizophrénie est celle <strong>de</strong><br />

la continuité d’un traitement au long<br />

cours. Cette question est abordée<br />

désormais après l’annonce du diagnostic<br />

: donner un nom <strong>de</strong> maladie,<br />

dégager <strong>de</strong>s stratégies <strong>de</strong> soin et entrer<br />

dans <strong>de</strong>s alliances avec les familles, sont<br />

<strong>de</strong>s points importants. Le concept <strong>de</strong><br />

handicap psychique est par ailleurs une<br />

évolution forte, qui positionne le soin<br />

au niveau social : la maladie mentale est<br />

un facteur <strong>de</strong> handicaps, et nécessite<br />

<strong>de</strong> mettre en place <strong>de</strong>s stratégies <strong>de</strong><br />

réadaptation, <strong>de</strong> rééducation, et <strong>de</strong><br />

réhabilitation, qui constituent un autre<br />

plan du soin par rapport au soin somatique<br />

et au soin curatif. Le premier<br />

enjeu, face aux jeunes patients qui<br />

entrent en schizophrénies, est qu’ils<br />

accrochent sur un suivi thérapeutique<br />

dans la durée, qu’ils maintiennent un<br />

traitement, qu’ils rechutent le moins<br />

N°8 - TOME XIX - NOVEMBRE 2006<br />

possible, et que très tôt le problème<br />

<strong>de</strong> l’insertion soit posé, d’emblée si possible,<br />

en tenant compte <strong>de</strong>s aspects<br />

cognitifs. Les objectifs doivent être valorisants,<br />

c’est-à-dire donner à ces jeunes<br />

patients les raisons d’une véritable adhésion<br />

aux soins. Les familles et les<br />

patients acceptent <strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong>s<br />

stratégies conjointes proposées à partir<br />

du diagnostic <strong>de</strong> schizophrénie.<br />

Pour les secteurs <strong>de</strong> psychiatrie générale<br />

qui sont correctement dotés, les patients<br />

qui souffrent <strong>de</strong> schizophrénie parviennent,<br />

après plusieurs années, à une<br />

stabilisation sociale, encore insatisfaisante<br />

dans la mesure où elle est hors <strong>de</strong>

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