Sur la réforme du droit d'auteur - daryo.net
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Les ayants-<strong>droit</strong>s préfèrent recourir au chantage que de poursuivre les pirates par des moyens judiciaires<br />
conventionnels. C’est devenu un véritable modèle économique.<br />
4.6.1 Être frappé par <strong>la</strong> foudre<br />
En Suède, avec 9 millions d’habitants, environ 10 personnes sont frappées par <strong>la</strong> foudre chaque année, et<br />
deux meurent. C’est bien sûr tragique, mais ce risque d’un sur un million n’est pas suffisant pour que les<br />
gens aient au quotidien peur d’être frappés par <strong>la</strong> foudre et pour changer leurs habitudes. Personne ne<br />
porte de casque avec prise de terre dans les rues de Stockholm.<br />
Avant 2011 35 , le risque de se faire prendre pour piratage était à peu près aussi élevé que celui d’être tué<br />
par <strong>la</strong> foudre. Ça arrivait une fois ou deux par an, donc personne ne prenait <strong>la</strong> menace au sérieux.<br />
En 2011, avec trois procureurs et dix enquêteurs consacrés à <strong>la</strong> tâche, on atteignit les huit personnes<br />
prises par an. Autrement dit, en augmentant « massivement » les ressources judiciaires consacrées au<br />
problème (qui auraient pu être dépensées ailleurs), on a amené le risque de condamnation au niveau de<br />
celui d’être frappé (et pas tué) par <strong>la</strong> foudre. C’est une augmentation considérable, mais pas suffisante<br />
pour impressionner qui que ce soit. Certains peuvent prendre quelques précautions supplémentaires en<br />
s’abonnant à un service d’anonymisation pour quelques euros par mois, mais le risque global de se faire<br />
prendre ne décourage personne.<br />
D’après l’agence de presse suédoise TT 36 , 20% de <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion suédoise, soit 1,4 million, pirate des<br />
œuvres culturelles. Un tiers d’entre eux pourraient être envoyés en prison si <strong>la</strong> police les découvrait.<br />
Mais, bien sûr, seulement une infime minorité a une chance d’arriver en prison.<br />
« Nous aurions besoin de milliers d’enquêteurs » a déc<strong>la</strong>ré un des agents spécialisés, tout à fait conscient<br />
de ce qui arrivait.<br />
Du point de vue des grosses boîtes de pro<strong>du</strong>ction, utiliser <strong>la</strong> justice conventionnelle pour arriver à bout<br />
<strong>du</strong> piratage est peine per<strong>du</strong>e, parce que le risque d’être pris est ridicule, mais aussi parce que les étapes<br />
d’un procès en « bonne et <strong>du</strong>e forme » basé sur des «preuves » sont beaucoup trop lentes et que<br />
déclencher des centaines de procé<strong>du</strong>res engorgerait les tribunaux plutôt qu’autre chose.<br />
C’est pourquoi elles essayent d’accélérer les procé<strong>du</strong>res. Aux États-Unis, elles y ont <strong>la</strong>rgement réussi. La<br />
raison pour <strong>la</strong>quelle Jammie Thomas a eu l’attention des médias n’était pas qu’elle était <strong>la</strong> première à<br />
être poursuivie pour piratage, ou que les montants demandés étaient exorbitants. Les montants étaient<br />
ceux usuellement réc<strong>la</strong>més par l’in<strong>du</strong>strie <strong>du</strong> disque. Jammie Thomas a fait <strong>la</strong> une car elle était <strong>la</strong><br />
première à p<strong>la</strong>ider non coupable, et à résister à l’in<strong>du</strong>strie de <strong>la</strong> musique. Au lieu de payer, elle est allée<br />
en justice.<br />
Récapitulons : <strong>la</strong> boîte de pro<strong>du</strong>ction a poursuivi Thomas pour 3,6 millions, mais a offert un arrangement<br />
à l’amiable de 2000$. Il n’est pas difficile de comprendre pourquoi <strong>la</strong> plupart des gens payent<br />
directement, même s’ils sont innocents. Perdre 2000$ n’est rien par rapport à <strong>la</strong> peur de devoir payer un<br />
avocat et de perdre des millions. Il est plus simple de céder au chantage.<br />
4.6.2 Le chantage comme technique « commerciale »<br />
Du chantage organisé. Voilà ce dont il s’agit. Les maisons de disques américaines ont poursuivi des<br />
grands-mères de 80 ans, des gens sans ordinateurs et même des morts. En forçant les fournisseurs<br />
d’accès à Inter<strong>net</strong> à donner les historiques des clients, ils ont mis sur p<strong>la</strong>ce une in<strong>du</strong>strie <strong>du</strong> chantage. Il<br />
n’y a rien qui explique que l’on reçoive un mail. Peu importe notre innocence. « Envoyons des mails et<br />
récupérons l’argent ». Tout à y gagner, rien à perdre.<br />
La clé de cette stratégie pour les ayants-<strong>droit</strong>s est qu’ils peuvent forcer les fournisseurs d’accès à Inter<strong>net</strong><br />
à leur donner les historiques de connexion de leurs clients. Si c’est possible, les infractions au <strong>droit</strong><br />
d’auteur deviennent une manne en elles-mêmes. Puisque rares sont les citoyens à s’y opposer et à