Influences tokhariennes sur la mythologie chinoise - Sino-Platonic ...
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Serge Papillon, "<strong>Influences</strong> <strong>tokhariennes</strong> <strong>sur</strong> <strong>la</strong> <strong>mythologie</strong> <strong>chinoise</strong>,"<br />
-<strong>Sino</strong>-P<strong>la</strong>tonie Papers-, 136 (May, 2004)<br />
iranienne, <strong>la</strong> montagne n'est pas équivalente à une vache: ce sont les eaux de <strong>la</strong> déesse-rivière<br />
et du fleuve-océan qui sont assimi<strong>la</strong>bles à des vaches 46 •<br />
Par effet de l'influence iranienne, les S<strong>la</strong>ves de l'île de Rügen, <strong>sur</strong> <strong>la</strong> Baltique, ont<br />
vénéré Mithra sous le nom de Sventovit jusqu'au douzième siècle. Il as<strong>sur</strong>ait aussi bien <strong>la</strong><br />
victoire militaire que <strong>la</strong> prospérité agricole 47. Sa grande fête annuelle avait lieu après les<br />
récoltes. Le nom iranien de Mithra n'était pas inconnu ·des S<strong>la</strong>ves, puisque c'est de lui que<br />
provient le s<strong>la</strong>ve commun *mirb, avec sa signification initiale de «traité, paix »48. En iranien,<br />
son nom signifie « contrat» : il contrôle le respect des contrats passés entre les hommes.<br />
Sur l'île de Rügen, Mithra était représenté par une statue à quatre têtes, ce qui rappelle<br />
Huangdi et Varuna. Par ailleurs, Mithra et Huangdi étaient tous les deux des' dieux du<br />
Tonnerre et ils avaient une fonction militaire. fi est possible que Mithra, Huangdi et Odin<br />
soient les héritiers d'un même dieu indo-européen habitant une montagne-source.<br />
Indépendamment de toutes les considérations précédentes, on peut trouver une raison<br />
de penser que le mont Kunlun est d'origine tokharienne. Au pied de cette montagne, on trouve<br />
une Eau Rouge (ou Eau de Cinabre) qui donne l'immortalité à quiconque en boit, or les<br />
Mandchous ont un mot, niktan, désignant un élixir de cinabre qui confère l'immQrtalité 49 • Ce<br />
terme provient certainement du tokharien *;Uiktar, qui n'est pas attesté mais qui serait, d'après<br />
les lois phonétiques, l'équivalent rigoUreux du terme grec nectar, désignant <strong>la</strong> boisson des<br />
dieux de l'Olympe. Le il est une voyelle proche du i, qui peut être transformée en un i en<br />
contexte pa<strong>la</strong>tal. Ainsi, le terme « dieu » est parfois écrit Rikte par les Koutchéens.<br />
Le nom des dieux en tokharien commun, *Rilkte, est évidemment un dérivé de *Rilktar.<br />
TI apparaît ainsi une caractéristique de <strong>la</strong> théologie tokharienne: les dieux sont, par définition,<br />
des êtres qui boivent l'élixir d'immortalité.<br />
4. Y<strong>la</strong>iiiiikte.<br />
Au début du premier millénaire de notre ère, les Tokhariens se sont convertis au<br />
bouddhisme. Ils n'ont pas pour autant abandonné leurs anciennes croyances, et c'est pourquoi<br />
nous n'en sommes pas complètement ignorants. A propos du royaume agnéen, les annales de<br />
<strong>la</strong> dynastie des Sui (581-618) ont noté «qu'on y vénère <strong>la</strong> loi bouddhique et qu'il s'y trouve<br />
des sortes de brahmanes ». Très certainement, ces « sortes de brahmanes» étaient des prêtres.<br />
Ce témoignage est à rapprocher d'un passage des annales des Wei du Nord (386-534), selon<br />
lequel <strong>la</strong> coutume des Agnéens «était de servir les dieux et les esprits tout en vénérant et en<br />
suivant <strong>la</strong> loi du Bouddha ». Les textes agnéens nous donnent le nom de l'un de ces dieux :<br />
W<strong>la</strong>iildit. Son nom koutchéen est Y<strong>la</strong>iiUikte. L'agnéen Rlcat et le koutchéen nakte (ou iüikte en<br />
l'absence d'accent tonique <strong>sur</strong> <strong>la</strong> première syl<strong>la</strong>be) signifient« dieu ».<br />
Les Koutchéens désignaient Y<strong>la</strong>iiUikte par l'expression iiakte1[lts saswe «seigneur des<br />
dieux» (B99 a4) et le considéraient comme équivalent au dieu indien Indra. L'eau de pluie<br />
était appelée y<strong>la</strong>inRe!fè war «eau d'Y<strong>la</strong>i » en koutchéen et une signification possible de y<strong>la</strong>i<br />
est «fraffeur»: ce terme peut dériver du verbe *welh2- «frapper» de l'indo-européen<br />
commun . Y<strong>la</strong>iiiakte serait donc le « Dieu Frappeur ».<br />
Indra était le dieu indien du Tonnerre. TI tenait une massue de jet, le vajra, qui<br />
symbolisait <strong>la</strong> foudre. «Craint en tant que Seigneur des tempêtes et <strong>la</strong>nceur d'éc<strong>la</strong>ir, il est<br />
aussi <strong>la</strong> source de toute fertilité »51. n était le dispensateur des pluies et il résidait dans les<br />
46 Cornillot, 1998, p. 87.<br />
47 Cornillot, 1994, p. 225.<br />
48 Ibid., p. 259.<br />
:: Wang Pengling, «Tokharian Words in Altaic RegnaI Titles », Central Asialie Journal, 1955, p. 178.<br />
Adams, 1999, p. 519.<br />
51 Voir Daniélou, 1992, pp. 169-176, pour une description complète d'Indra.<br />
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