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AGIR<br />
N’Autre Ecole<br />
Palais du Travail<br />
9 place Lazare Goujon<br />
69100 Villeurbanne<br />
fede-educ@cnt-f.org<br />
La CNT Education réunit<br />
l'ensemble des personnels<br />
–précaires ou titulaires–<br />
travaillant dans le<br />
secteur éducatif du privé<br />
comme du public (instituteurs,<br />
professeurs, agents<br />
administratifs et techniques,<br />
etc.). Elle syndique<br />
également des<br />
lycéenNEs et des étudiantEs<br />
et agit en étroite<br />
relation avec les autres<br />
syndiquéEs de la CNT<br />
(chômeurs, salariés de<br />
l'industrie, PTT...)<br />
10__offensive<br />
<br />
enfants issus de milieux défavorisés à assumer de telles<br />
responsabilités; on entend ainsi souvent de la part d’enseignants,<br />
de directeurs d’école, de chefs d’établissements:<br />
«Je ne les laisse pas se déplacer<br />
seuls, ils sont trop perturbés», sans que la question<br />
de l’éducation à l’autonomie et au déplacement<br />
ne soit abordée de façon globale. Si l’École<br />
ne le fait pas, qui va mettre en œuvre une<br />
telle éducation à la fois pour tout le monde et<br />
dans un cadre collectif et socialisé? Force est de<br />
constater que les pédagogies qui se proposent<br />
de conduire une telle éducation à la responsabilité et à l’autonomie<br />
progressive et raisonnée (pédagogies Freinet et institutionnelle)<br />
sont aujourd’hui en grande difficulté face à la rigidification<br />
du système scolaire et de la mentalité enseignante.<br />
ÉDUQUER À LA VILLE ET À LA VIE<br />
L’ensemble des éléments décrits plus haut s’imbrique malheureusement<br />
pour constituer une forme d’assignation à l’ici<br />
et maintenant que vivent principalement les enfants issus de<br />
milieux défavorisés.<br />
La conjonction des réglementations destinées à les protéger<br />
avec celles qui se proposent à l’inverse de réprimer les déplacements<br />
ou le stationnement d’enfants dans les espaces publics,<br />
les déplacements sans ticket interagissent aujourd’hui pour<br />
confiner les enfants des quartiers dans un espace réduit qu’ils<br />
ne comprennent plus et qui ne les comprend pas davantage.<br />
Les pressions pénales ou morales qui s’exercent sur les parents<br />
ajoutent encore une chape à cet enfermement en contribuant à<br />
identifier l’environnement urbain et social comme une source<br />
de danger pour l’enfant, mais aussi, à travers lui, pour les<br />
parents eux-mêmes. Pour y échapper, les parents ont tendance<br />
à retirer leurs enfants des institutions dans lesquelles ceuxci<br />
pourraient poser problème et renforcent ainsi leur isole-<br />
Une assignation<br />
à l’ici et maintenant<br />
vécue<br />
principalement<br />
par les enfants<br />
de milieux<br />
défavorisés.<br />
ment et le manque d’expériences éducatives qu’ils subissent.<br />
Les enfants ne rêvent plus alors que de sortir de cet ennui; mais<br />
sans éducation préalable, leurs excursions à un<br />
âge plus avancé viennent souvent malheureusement<br />
vérifier les peurs et les annonces initiales<br />
qui pesaient sur eux.<br />
Une logique se dessine ainsi sur le plan global<br />
d’une politique sociale et éducative, à l’échelle<br />
du pays, voire même de l’international, entre<br />
enfermement dans une famille réduite, un quartier,<br />
et pourquoi pas dans un centre fermé et<br />
plus tard en prison pour une portion en augmentation d’enfants<br />
et de jeunes issus de milieux défavorisés.<br />
Pour ne pas être implacable, ce destin n’en est pas pour autant<br />
rare et nécessite a minima qu’on se pose la question de<br />
bâtir de nouvelles politiques et pratiques éducatives qui tiendraient<br />
enfin compte de cette éducation à donner à la Ville<br />
et à la vie sociale, pour tous les enfants.<br />
Pour cela, on ne peut plus se poser les questions uniquement<br />
sous la forme unique et traditionnelle de l’aide à l’accès. Ce<br />
n’est pas seulement en aidant économiquement les familles<br />
que l’on parviendra à combler le fossé qui existe entre l’offre<br />
éducative et de loisirs actuelle et les besoins des enfants<br />
isolés. Il faut également développer et généraliser d’autres<br />
formes d’accueil comme l’accueil en milieu ouvert, les permanences<br />
éducatives de quartier ouvertes le soir et le weekend,<br />
l’accompagnement durable des enfants par des équipes<br />
stabilisées et valorisées, et une culture de l’animation qui<br />
devrait être moins axée sur la logique d’activité que sur la<br />
logique d’accompagnement de l’expression et de l’initiative<br />
des enfants. Laurent Ott (enseignant et éducateur à Longjumeau-91)