Lire la chronique - Le Québec, une histoire de famille

Mélanie, vous venez de quel coin du
Québec?
Je suis née à Saint-Ferréol-les-Neiges. Mes
grands-parents Paré, du côté de ma mère,
avaient un chalet là-bas, au lac des Trois-
Castors, un peu après le mont Sainte-Anne.
Mais on est vite déménagés. Quand j’ai
commencé la maternelle, je vivais à
L’Ancienne-Lorette, et c’est vraiment là
que j’ai grandi.
À quoi ressemblait votre famille?
Mes grands-parents Gagné ont eu
17 enfants. En fait, ma grand-mère a eu
19 grossesses, mais elle a perdu deux bébés.
Mon père aurait été le 13 e , en fait, il est le
11 e enfant et le 7 e garçon de suite! Quand
j’étais plus jeune, lors des partys de famille,
il y avait du monde partout! Les partys de
Noël, c’était fou! Je me rappelle, certaines
années, il y avait quatre générations. J’ai
même des cousines que j’ai toujours appelées
«ma tante» parce qu’elles sont beaucoup
plus vieilles que moi. Dans ma famille
immédiate, je n’ai qu’une sœur, qui est mon
aînée de deux ans. Maintenant, il ne me
reste qu’une seule grand-maman, une Paré,
du côté de ma mère. Mon grand-papa est
décédé en 1999, à 91 ans, puis ma grand-mère
l’a suivi quelques mois plus tard.
Est-ce que toute la famille se réunit encore?
Certains membres de la famille sont vraiment
tissés plus serré. On est quelques
cousins et cousines à Montréal, mais le
noyau est encore à Québec. Il y a des sœurs
qui se regroupent avec leurs enfants et leurs
petits-enfants, mais il n’y a plus de très gros
partys comme avant. En vivant à Montréal,
on en rate plusieurs... Chose certaine, une
personne qui arrive dans notre famille
pour la première fois n’est pas capable
de suivre tout le monde. Les Gagné, c’est
vraiment du monde qui parle, qui parle...
C’est étourdissant! (rires)
Connaissez-vous un peu l’histoire de vos
grands-parents?
Mon grand-papa Gagné est né au Lac-Saint-
Jean. Il est ensuite déménagé à Kénogami,
puis il a suivi son père en Gaspésie pour
faire de la drave. C’est là qu’il a rencon-
tré ma grand-mère. Ensuite, ils se sont
ins tallés à Québec, et mon grand-père a
bâti la maison sur la rue Saint-Édouard, à
L’Ancienne-Lorette, en 1935. Il travaillait
aux chantiers maritimes de la Davie. Mon
père nous racontait que puisqu’ils étaient
17 enfants, tout le monde dormait dans les
mêmes lits, cordés deux d’un côté, deux
de l’autre bord... À table, ils prenaient une
bouchée puis, quand ils avaient fini, c’était
merci, bonsoir! Ils donnaient la place à un
GaGné
UnE viE
aprEs
l’aUtrE
Ces dernières années, l’animatrice Mélanie
Gagné a beaucoup parlé de son fils Mathis,
décédé peu après sa naissance. Sans oublier
cette triste page de son histoire, Mélanie a
commencé un nouveau chapitre de sa vie, il y a
près d’un an et demi, avec l’arrivée de son petit
Christophe. Comblée par la maternité, celle
qu’on peut maintenant voir à MétéoMédia
nous ouvre son album de famille, qui
comprend une impressionnante parenté:
sa grand-mère a porté 19 enfants!
Par Martin Grenier
PHOTO: ALEXANDRE DESLAURIERS
«Mon père nous
racontait que
puisqu’ils étaient
17 enfants, tout le
monde dormait
dans les mêmes
lits, cordés deux
d’un côté, deux de
l’autre bord...»

PHOTOS: COLLECTION PERSONNELLE
la famille Gagné
dans le salon
familial. le père
de Mélanie est
en bas à droite,
en salopette.
autre. (rires) Grand-maman disait tout
le temps: «Un de plus, un de moins, c’est
pas ça qui va les rendre plus pauvres!»
Quel est le métier de vos parents?
Mon père était représentant dans le
domaine du vêtement. Il a toujours fait
beaucoup de route, de la Gaspésie au Lac-
Saint-Jean, en passant par la Côte-Nord
et l’Abitibi... Il connaît vraiment beaucoup
de gens à travers le Québec. Ma mère est
restée à la maison au début, puis elle est
retournée sporadiquement sur le marché
du travail, comme secrétaire pour la Ville.
Mes parents sont retraités depuis deux ans
environ.
PHOTO: ERIC MYRE
votre père vous a-t-il beaucoup manqué?
Selon mes souvenirs, ma mère me disait
que j’étais un monstre quand mon père
partait. Je m’enfermais dans le garde-robe,
je prenais sa robe de chambre et je pleurais
en disant: «Je veux mon papa yaya!» Ma
sœur était obligée d’aller me donner à
boire parce que je ne voulais pas sortir!
Je viens d’avoir un petit garçon de 16 mois,
et ma mère me dit que Christophe me
redonne la monnaie de ma pièce! (rires)
Quand il était plus petit, il pleurait toujours
pour aller dans les bras de son papa.
la vie de maman ressemble à ce que vous
imaginiez?
DEs GaGné EXCEptiOnnEls
106 7 jours 28 septembre
Éric GaGnÉ
Très rares sont les
Québécois qui parviennent
à se hisser
jusqu’aux ligues majeures
de baseball. En plus de
réussir cet exploit, Éric
Gagné a remporté
l’honneur suprême en
2003: le trophée Cy
Young, remis au meilleur
lanceur. Sa fiche avec les
Dodgers de Los Angeles:
55 victoires préservées
en 55 présences. Ainsi,
un petit gars de Mascouche
fait désormais
partie de l’histoire du
baseball!
la petite
Mélanie et
son papa,
Yvan
PHOTO: MAISON GÉNÉRALE DES URSULINES DE L’UNION CANADIENNE
Mélanie, au centre, avec son
père et sa grande sœur, valérie
C’est plus rock’n’roll, plus mouvementé, et
c’est plus d’amour que je l’aurais imaginé.
J’ai un petit bonhomme qui est pas mal
avancé pour son âge, c’est un peu déstabilisant.
Il est vraiment trop grand. Il porte
du 4 ou 5 ans et il n’a que 16 mois. C’est
vraiment un bébé géant! Tout va trop vite
dans le cas de Christophe. C’est hyper
stimulant! Il est un super beau petit
bonhomme en santé, mais il faut être
en forme pour le suivre. Quand on me
demande si j’en veux un autre, je dis
qu’on n’a pas fermé la porte, mais je ne
me serais jamais vue enceinte en m’occupant
de Christophe. Je n’y arriverais
Malvina GaGnÉ
Née à Saint-Michel en
1837, Malvina Gagné
choisit l’enseignement
comme première vocation,
à l’âge de 15 ans. L’appel
de la foi l’amène plus
tard chez les Ursulines, à
Québec. Rebaptisée mère
Saint-Raphaël, elle part
en 1882 vers le Lac-Saint-
Jean, que l’on commence
à coloniser depuis les
années 1850. Avec trois
consœurs, elle fondera le
couvent des Ursulines de
Roberval, à l’origine de la
première école ménagère
agricole au pays!
pas. Il me demande toute mon énergie.
(rires)
Quelle place occupe votre petit Mathis
dans votre vie?
C’est sûr que la place de Mathis va
toujours être particulière. Ma peine a
beaucoup changé. Quand Mathis a cessé
de vivre, je n’avais pas d’enfant, je perdais
un bébé naissant, donc je ne savais pas
ce qu’il allait devenir. Mais depuis que
Christophe grandit, je me rends compte
de tout ce que je n’ai pas pu vivre avec
Mathis. Je vis une autre réalité, je réalise
autre chose par rapport à son décès. Ça ne
change rien au fait qu’il est parti depuis
tout ce temps-là, que je vais quand même
lui faire un coucou au cimetière... Il a
encore sa place et il va toujours l’avoir.
Toutefois, j’essaie de ne pas donner l’impression
de traîner sa mort comme un
boulet. On en a beaucoup parlé dans les
médias, mais la vie continue, la vie est
encore belle. C’est un petit ange, on souhaite
qu’il nous protège. Son petit frère
va bien, et c’est ça qui est important.
Depuis son départ, vous vous impliquez
beaucoup auprès des enfants...
Oui, ça fait maintenant six ans que je
participe au téléthon Opération Enfant
Soleil. Ç’a été une bénédiction pour moi.
C’est un groupe d’amis qui m’a aidée à
traverser des moments difficiles. C’est un
la petite
Mélanie
cuisine
avec sa
maman,
Danielle
la première
communion
de Mélanie,
en 1984
« Tous les enfants Gagné ont aussi passé le journal…
À L’Ancienne-Lorette, les Gagné avaient pas mal
le monopole.»
super événement. Et même si ça ne dure
qu’une fin de semaine, il reste que ceux
qui s’impliquent commencent à faire la
tournée du Québec au mois de mars, en
plus d’événements sporadiques durant
l’année. Je suis aussi porte-parole de
l’organisme Parents Orphelins.
sur une note plus joyeuse, avez-vous une
histoire de famille à nous raconter?
Quand il était petit, mon père aidait son
frère Arthur à vendre du savon et de l’eau
de javel en faisant du porte-à-porte! On en
a fait, du chemin, depuis ce temps-là! (rires)
Tous les enfants Gagné ont aussi passé le
journal. Ils se passaient la «run» de journaux
d’un enfant à l’autre. À L’Ancienne-
Lorette, les Gagné avaient pas mal le
monopole. (rires) Ensuite, ils donnaient
les sous à grand-maman et ils gardaient
les pourboires.
allez-vous raconter l’histoire de votre
famille à Christophe?
Pauvre petit, il va être étourdi! (rires)
Il n’aura pas une aussi grande famille, ça,
c’est sûr! Je ne pense pas qu’il va avoir
l’occasion de connaître toutes ses tantes
et ses oncles, ou plutôt ses grands-tantes
et ses grands-oncles... On ne sait plus
comment les appeler; il y a tellement de
générations chez les Gagné! On se mêle
facilement... (rires)
PHOTOS: COLLECTION PERSONNELLE
lEs GaGné
En brEf
• Les 34 000 Gagné du Québec
forment notre 10 e famille la plus
nombreuse. Ils descendent
principalement de deux frères,
Louis et Pierre Gagné, baptisés
à l’église Saint-Martin d’Igé,
en Basse-Normandie.
• Certains Gagné descendent
aussi de François Gagné,
venu du Poitou.
• Le pionnier Pierre Gagné est
décédé trois ans après son
arrivée en Nouvelle-France.
Il compte aujourd’hui deux
fois moins de descendants
que son frère Louis.
• Un des fils de Pierre a ajouté
le surnom Bellavance à son
patronyme, si bien qu’il est
aussi l’ancêtre des Bellavance
du Québec!
• De nombreux Bouchard, dont
Marie-Mai et l’ex-premier
ministre Lucien, doivent leur
existence à la fille du pionnier
Louis Gagné. Prénommée Louise,
elle a épousé l’ancêtre Claude
Bouchard dit le Petit Claude,
en 1654, à l’âge de... 12 ans!
• Avant de partir en Nouvelle-
France, l’ancêtre Louis Gagné
a travaillé ici, au moulin de
Guémançais (à 3 km de
Saint-Cosme-en-Vairais).