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EDITORIAL Des fois, dans les maisons, il y a comme une sorte de mauvaise odeur persistante. Alors, on cherche. La litière du chat qui n’a pas été changée ? Le rabiot de camembert oublié au frigo ? Les chaussures de foot du gamin, abandonnées dans l’entrée ? Ou, comme on disait jadis dans Loft Story : “C’est qui qu’a pété ?” En France, aujourd’hui, on a beau chercher, on finit par se dire que c’est un peu tout ça à la fois. Il y a un climat, une ambiance, une “atmosphère”, comme aurait dit Arletty. Nos compatriotes sont nerveux et irascibles ; ce qui se vérifie plus encore dans les grandes villes qu’à la campagne. Divorcent plus souvent qu’à leur tour et tiennent la palme mondiale de consommation d’anxiolytiques. La faute à la crise financière, évidemment, qu’on peine parfois à déchiffrer, mais dont on sent bien qu’elle est comme la braise sous les cendres, prête à rallumer l’incendie planétaire au premier coup de vent mauvais. La faute à ces usines qui fer- FLASH 2 - FLASH #3 - 4 DECEMBRE 2008 Drôle de climat Par Nicolas GAUTHIER ment quotidiennement. À ce dimanche, naguère sacré et dont on tente de nous persuader qu’il ne sera plus jamais chômé. À ces nouveaux sacrifices qu’on nous demande chaque jour que Dieu fait. Travailler plus pour finalement gagner moins. Et travailler de plus en plus tard pour économiser l’argent des caisses de retraites, argent dont ceux qui nous gouvernent actuellement prônent un usage vétilleux, alors qu’ils s’apprêtent à balancer des milliards d’euros par les fenêtres pour venir à la rescousse de financiers faillis et de grands patrons maladroits. Et puis, il y a la crise du politique. Le Parti socialiste à la ramasse. Le Parti communiste disparu. Les trotskistes de la LCR qui se cherchent. Le Front national qui ne se porte pas au mieux. L’UMP qui bruisse de mille vents de révolte, libéraux accusant Nicolas Sarkozy de ne pas être assez libéral, gaullistes lui reprochant de trahir ce qui pouvait demeurer de l’héritage du Général, électeurs lepénistes qu’il a plumés et qui commencent à l’avoir mauvaise. Plus grave, ce sentiment persistant, voulant que malgré les gesticulations élyséennes, la France ne soit plus gouvernée. Que ça navigue à vue. D’où cet autre sentiment, plus mortifère encore : celui qu’on nous ment en permanence. Sur l’Irak et l’Afghanistan. La prétendue “guerre contre le terrorisme”. Le déficit des comptes de la Nation – une fois encore, pas d’argent pour les pêcheurs et les paysans, mais de véritables fortunes pour les cols blancs de la finance. Et, pour tout arranger, la persécution des Français, telle que dénoncée dans notre numéro 1. Et sur laquelle nous reviendrons le jeudi 18 décembre prochain, dans notre numéro 4. Car oui, c’est un fait : la colère gronde. Quelques semaines avant mai 68, il paraissait que la France s’ennuyait. Quarante ans plus tard, elle est en colère. Et on la comprend. VOUS! ABONNEZ- LES BULLETINS D’ABONNEMENT COMPLIQUÉS, C’EST TERMINÉ ! NOM :............................................................................................................................................................... PRÉNOM : ................................................................................................................................................... ADRESSE : ................................................................................................................................................... ................................................................................................................................................................................... ................................................................................................................................................................................... E-MAIL :............................................................................................................................................................ o CEE :70 € o ÉTRANGER 100 € o SOUTIEN :PRIX LIBRE CHÈQUE À RENVOYER À L’ORDRE DE FLASH, 10 RUE PRIMATICE, 75013 PARIS 50 € POUR UN AN, SOIT 26 NUMÉROS Ma télé après coup Quand l’ANPE fait l’unanimité TOTALEMENT INEFFICACE ! A fin de libérer du temps de cerveau pour la pub, afin également de ne pas trop plomber le moral des Français qui surnagent encore, les émissions les plus intéressantes passent tard dans la soirée.C’est le cas de l’excellent 90’ Enquêtes, présenté par Carole Rousseau sur TMC. Dans le cadre de la crise économique et financière qui secoue actuellement la planète, le magazine s’intéressait l’autre jour aux catégories sociales les plus touchées par le chômage dans notre belle France, à savoir les jeunes et les seniors. Nous détenons en effet sur ces deux plans de tristes records européens. En 2007, 20 % des moins de 25 ans étaient chômeurs ; pour les plus de 50 ans, les chiffres étaient de 5,5 % en moyenne. Les Français sont aussi les plus jeunes retraités : 58,8 ans, contre plus de 60 ans pour nos voisins. Et l’on sait que les mises à la retraite anticipée sont depuis belle lurette le moyen de faire baisser les taux de chômage. Ainsi, le pourcentage d’actifs en France parmi les personnes entre 55 et 64 ans est l’un des Le monde selon ZEON plus faibles au monde : 39 %, contre 47 % pour l’Europe et 80 % au Japon. Comment, donc, remédier à ce faible taux d’emploi des extrêmes ? Grâce à l’ANPE, l’Agence nationale pour l’emploi créée en 1967 par Chirac. Les journalistes de 90’ Enquêtes sont donc allés tendre leur micro aux chômeurs sortant de nos coûteux bureaux de placement. Et là, jeunes ou vieux, cadres ou OS, avec ou sans diplômes, sont unanimes : l’ANPE, passage obligé de tout chômeur, est totalement inefficace. À cela une raison majeure, disent les analystes : le décalage fondamental entre les agents, la structure, et ce dont ils sont censés traiter. Pour résumer : les fonctionnaires de l’ANPE ne connaissent pas le monde réel du travail. Si bien que dans leur grande majorité, les chômeurs ont non seulement le sentiment que l’ANPE ne peut rien pour eux, mais, plus grave, qu’on les contraint à passer par là uniquement pour justifier l’existence de l’ANPE et de ses fonctionnaires. TOPOLINE Barack Obama, un président (FED)érateur… EN SAVOIR PLUS ? L’information alternative : www.nationspresse.info et www.voxnr.com
Gauchisme à la Prévert ou gauchisme à la Baader, qu’on soit dans les nuages ou qu’on fonce droit dans le mur, sur le plan de l’inefficacité politique – les années de prison mises à part – ça revient au même.À quinze ans, rebelle dans l’âme et cherchant ma voie, comme tous, j’ai commencé naïf : ma première passion, je l’avoue, fut pour André Breton. André Breton et sa Révolution surréaliste,moi qui croyais, en bon ado petit bourgeois, que le désir, le rêve et l’association d’idées automatiques, c’était autrement plus révolutionnaire que la vulgaire lutte sociale pour l’amélioration des conditions de vie et du travail.Tu parles ! Que reste-t-il aujourd’hui de la Révolution surréaliste ?Trois mauvais poèmes à jeux de mots foireux, deux provocations de potaches parfaitement dérisoires et déjà épinglées, à l’époque, par Drieu la Rochelle dans Gilles (roman à lire pour ceux qui s’intéressent sérieusement à cette période) ; sans oublier une mauvaise compréhension du freudisme – lui-même très dévalué – et, c’est vrai, quelques beaux tableaux de Marx Ernst venus embellir depuis les salons de quelques milliardaires à la Pinault. Pas de quoi renverser le régime ! Du coup, à dix-huit ans, plus circonspect, je me méfiais de Jean-Paul Sartre,l’idole des étudiantes nunuches d’après-guerre. Sartre qui proposait à son tour, après la Révolution surréaliste passablement éventée, sa nouvelle révolution elle aussi plus révolutionnaire que la vraie : la Révolution existentialiste ! Cette fois pour tout foutre en l’air, il ne s’agissait plus de dégoiser des poèmes à la con, allongé sur un divan, mais Fausses idoles et faux rebelles : DE BRETON À BESANCENOT… Quand on est jeune et novice dans le débat d’idées, on croit qu’en politique c’est comme en sport, qu’il y a deux équipes : la vôtre et celle d’en face, les bons et les méchants, le pouvoir et l’opposition… Puis avec la pratique, pour ceux qui passent à la pratique – les autres n’y comprennent jamais rien - on découvre que dans la vraie vie, comme dans 1984 de George Orwell, c’est plus compliqué que ça. Il y a le pouvoir, l’opposition au pouvoir et… Goldstein. Soit l’opposant créé par le pouvoir, ou plutôt favorisé par le pouvoir - ne soyons pas “complotiste” – pour dévier les énergies contestataires vers le stérile, l’inutile… d’écouter du jazz sur un Tepaz, à huit dans une chambre de bonne, tous habillés en noir ! Autre arnaque pour jeunes verbeux fébriles – toujours issus des beaux quartiers – cette fois très bien décrite dans le film : Les Tricheurs de Marcel Carné (une petite dénonciation anti-jeune qui ne lui sera pas pardonnée par les nouveaux “révolutionnaires” de la Nouvelle vague)… Breton, Sartre… après m’être laissé prendre par le premier et méfié du second,je finis par trouver le truc pour repérer le faux rebelle :pour cacher que dans le réel il ne fait pas grand chose de révolutionnaire,à part fumer des cigarettes (comme Malraux) et prendre des taxis pour dîner en ville,le faux opposant en fait des tonnes dans le symbolique. Ce manque d’engagement réel,il le compense par la surenchère dans le signe… Ainsi, dans la vraie vie, un paysan qui passe à la télé met son costume du dimanche – celui qu’il mettait jadis pour aller à la messe.José Bové, lui, se looke en plouc : moustaches à la gauloise, pipe, pull-over tricoté main vert chlorophylle… comme ça le bobo de Canal +, qui s’y connaît vachement question campagne, sait qu’il a à faire à un vrai paysan. L’agriculteur,lui,ne s’y reconnaît pas du tout mais on s’en fout, la paysannerie aujourd’hui en France c’est 2 %. Cette méthode de détection des factices me permit, après Sartre, d’éviter le piège Althusser. C’est qu’après la Révolution surréaliste et la Révolution exis- C’EST À LA UNE ! CES GUIGNOLS QUI JOUENT AUX IDOLES C’est justement parce qu’on n’a plus le droit d’en parler librement qu’on va justement vous en causer. De qui ? De quoi ? De ceux, tout simplement, devant lesquels il est désormais obligatoire de plier le genou. Faux curés, faux écolos, faux paysans, fausses princesses, faux comiques, ayant ceci de commun d’être tous statufiés ; post-mortem pour les uns, de leur vivant pour les autres. Grands prêtres du néo-cléricalisme ambiant – pour ceux qui ne communient pas Par Alain SORAL tentialiste vint la Révolution structuraliste :le nouveau truc des années soixante-dix pour être sûr de ne jamais faire la révolution pour de vrai ! Alexandre Adler, un modèle de fidélité révolutionnaire,s’en réclame encore, c’est tout dire. Cette fois, fini la poésie, la musique… la nouvelle trouvaille d’Althusser, c’était :“re-Lire le Capital”, mais en ayant bien conscience de la “coupure épistémologique” à l’intérieur de l’œuvre entre avant et après 1844 (sic) ! Il était là le grand secret.Voilà pourquoi tout avait foiré jusqu’ici ! Une fois de plus la clef de la révolution ne se trouvait pas dans l’action collective et le peuple,mais dans l’herméneutique à Normale Sup ! Plus c’était imbitable dans le commentaire, plus c’était loin de l’interprétation littérale – et du monde ouvrier – plus c’était révolutionnaire ! Avec ça, la bourgeoisie Giscard pouvait dormir sur ses deux oreilles ; ce qu’elle fit d’ailleurs…. Après cette débauche de jargonnage,il ne faut pas s’étonner que le concept passe sérieusement de mode à l’aube des années quatre-vingt,et je n’insisterai pas sur le lien existant entre la baisse de niveau qui s’en suivit et la carrière d’un Bernard-Henri Lévy.Là-dessus tout a été dit,écrit,et il est certain que la médiocrité actuelle, les ralliements de gauche à Sarkozy auraient été impensables, impossibles sans cette table rase opérée par la Nouvelle philosophie… à la religion des droits de l’homme, une seule issue, le bûcher –, ces turlupins ont au moins le mérite de nous faire rigoler, même jaune. À cause, peut-être, de leur exhibitionnisme pour le moins obscène – l’abbé Pierre qui confesse avoir été au tapin, sœur Emmanuelle qui avoue son onanisme adolescent –, tout cela nous amène à une tyrannie conjointe, celle de la “transparence”… Au nom de laquelle il conviendrait de déballer la moindre de ses turpitudes. Ils veulent qu’on déballe ? Déballons donc. Oublions donc BHL pour sauter directement au dernier faux dur de service : le révolutionnaire anticapitaliste de chez Drucker, l’Olivier Besancenot… À la classe ouvrière ce que José Bové est à la paysannerie, il en fait des tonnes dans le signe, le petit droit-de-l’hommiste sans-papiériste :T-shirt du Che pour cacher son statut de fonctionnaire (avec préférence nationale,mais juste pour lui), petit poing serré vers le travailleur syndiqué pour lui faire oublier que la LCR est le lieu exclusif de l’étudiant bobo, bouche tendue aux sexualités trans-genres mais accolade virile à son pote Joey Starr (histoire de bien confondre,dans son mépris de gauche, banlieue et racaille…). Dans un parfait souci de positionnement marketing, même le sigle de sa nouvelle boutique pour jeunes reprend le nom d’une émission phare de Canal + : NPA, pour Nul Par Ailleurs ! Nouveau parti anticapitaliste… Du surréalisme au trotsko-boboïsme, en passant par l’existentialisme et le structuralisme, au fond c’est toujours de ça qu’il s’agit : empêcher le combat anticapitaliste, et faire semblant, en minant toute opposition cohérente, toute union trans-classes, pour que le Système continue à régner… Voilà pourquoi, tandis qu’un Céline dut s’exiler quatre ans pour ne pas être tué, tandis qu’un Drieu préféra faire ce travail lui-même, tandis qu’un Blondin sombra dans l’alcoolisme et le cyclisme pour n’avoir pu accomplir cette impossible union sacrée, le pouvoir libéral reconnaissant offre aux tartuffes expos dans les musées, prix Nobel et autres après-midi télé… FLASH #3 - 4 DECEMBRE 2008 - 3
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