IRM DES PERITONEOCELES
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<strong>IRM</strong> <strong>DES</strong><br />
<strong>PERITONEOCELES</strong><br />
J Villeval (1), M De Graef (1), R Guillon (1), C.Courtieu (1)<br />
A Maubon (2), JP Rouanet (1)<br />
(1) Imagerie médicale, CMC Beausoleil, Montpellier,<br />
France<br />
(2) Service de radiologie, CHU Dupuytren, Limoges,<br />
France
DEFINITION<br />
La péritonéocèle est définie par l'abaissement du point le plus bas du péritoine<br />
pelvien (cul de sac de Douglas) entre la face postérieure du vagin et la face<br />
antérieure du rectum.<br />
L’espace péritonéal est le quatrième compartiment virtuel à analyser dans un bilan de<br />
statique pelvienne avec les compartiments urinaire, génital et rectal.<br />
Le terme de prolapsus péritonéal ou de péritonéocèle paraît plus le plus approprié,<br />
quel que soit le contenu ou la topographie du péritoine prolabé. En effet le terme<br />
couramment employé en Europe est élytrocèle (terme topographique signifiant<br />
littéralement hernie dans le vagin); il ne prend pas en compte les prolapsus du<br />
péritoine qui ne se développent pas vers le vagin. Le terme employé par les Anglosaxons<br />
est généralement entérocéle (hernie de l’intestin grêle) ou sigmatocèle<br />
(hernie du sigmoïde) selon le contenu des éléments prolabés; il ne tient pas compte<br />
de la topographie du prolapsus péritonéal.<br />
Le contenu de la péritonéocèle est variable : graisse péritonéale isolée et/ou anses<br />
grêles et/ou sigmoïde.<br />
Lorsque le contenu est uniquement graisseux, la péritonéocéle se traduit par<br />
l’interposition d’un hypersignal spontané T1 et T2 entre rectum et vagin plus ou<br />
moins étendu en hauteur. Il peut n’être démasqué qu’au cours de la poussée en<br />
clinique et en imagerie avec mise en place de valves dans les cul de sacs vaginaux,<br />
souvent le cul de sac antérieur .
PHYSIO-PATHOLOGIE<br />
Les hypothèses principales avancées pour expliquer l’apparition d’une<br />
péritonéocèle sont:<br />
- Certains culs de sac de Douglas sont anormalement profonds<br />
et/ou mal verrouillés par le déplacement postérieur du col utérin à<br />
l’effort ou sous l’effet de la poussée abdominale; le fond du cul de<br />
sac,ainsi soumis aux efforts de poussée, finit par pénétrer la cloison<br />
recto-vaginale.<br />
- La persistance congénitale du segment périnéal du cul de sac<br />
péritonéal inter-recto-vaginal est un facteur facilitateur.<br />
Ces péritonéocèles constituent un piège clinique car elles se<br />
traduisent par une empreinte sur la face postérieure du vagin et<br />
peuvent en imposer cliniquement pour une rectocèle.
PHYSIO-PATHOLOGIE<br />
- Les péritonéocèles dites d ’entraînement ne sont qu ’un élément<br />
contingent d ’un prolapsus total ou partiel plus ou moins exteriorisé,<br />
comparable aux hernies par glissement.<br />
- Les péritonéocèles iatrogènes sont les plus fréquentes; dans 75%<br />
des cas elles sont généralement secondaires à un acte chirurgical:<br />
- hystérectomie (voie haute ou voie basse)<br />
- hysteropexies pariétales antérieures en particulier.<br />
- toutes interventions comportant une fixation de l’étage<br />
antérieur et/ou de l’étage moyen du pelvis.<br />
La fixation des compartiments antérieur et/ou moyen vers l ’avant et<br />
le haut ouvre largement le péritoine rétro-utérin permettant aux<br />
forces de pulsion de s ’exercer au fond de l ’excavation et de<br />
repousser et distendre le cul de sac.
Le problème clinique et<br />
thérapeutique<br />
La responsabilité d’une péritonéocèle dans une symptomatologie clinique<br />
de prolapsus est souvent difficile à affirmer:<br />
Classiquement la péritonéocèle se manifeste par:<br />
– Gêne, inconfort, douleurs positionnelles…<br />
– Diagnostic differentiel clinique difficile avec une rectocèle souvent associée( «<br />
boule vaginale », tumeur vulvaire …<br />
Faire le diagnostic de péritonéocèle est important pour les raisons<br />
suivantes:<br />
– les petites péritonéocèles sont généralement mal décelées en per-opératoire<br />
entrainant un risque accru de récidive si elles ne sont pas corrigées au cours de<br />
l’intervention.<br />
– La correction par voie basse est plus difficile et la péritoneocéle peut ne pas être<br />
décelée et prise en compte.<br />
– Le geste opératoire peut être modifié sur le péritoine lui-même (suture, excision,<br />
douglassectomie) ou associée à un geste supplementaire pour les étages<br />
antérieurs ou postérieurs (périnéorraphie antérieure, périnéorraphie postérieure,<br />
…).
TECHNIQUE <strong>IRM</strong><br />
En dehors de l’examen clinique l’exploration préopératoire par l’imagerie du<br />
plancher pelvien reposait avant l’<strong>IRM</strong> sur des examens ionisants comme le<br />
colpocystogramme et ses variantes, cystographie, défécographie..<br />
. Depuis 1995, l'<strong>IRM</strong> est utilisée pour l'étude du plancher pelvien , avec un<br />
engouement récent concernant les séquences dynamiques et la possibilité<br />
de sensibiliser l'examen en couplant l'<strong>IRM</strong> à un examen clinique par valves<br />
1) Préparation de l’examen<br />
Avant l'examen il est primordial de rencontrer la patiente, pour la rassurer,<br />
bien préciser l'indication clinique de l'examen (incontinence urinaire,<br />
prolapsus pelvien, constipation, incontinence fécale, douleur pelvienne,<br />
gêne fonctionnelle…), connaître ses antécédents (parité, traumatismes,<br />
interventions antérieures), lui expliquer l'examen et ses différentes phases<br />
(séquences statiques, séquences dynamiques, examen clinique). Enfin il<br />
faut la mettre à l'aise quant à une éventuelle fuite urinaire ou fécale qui sera<br />
le témoin de poussées correctement réalisées.
TECHNIQUE <strong>IRM</strong><br />
L’opacification rectale est indispensable ;en effet l’inconstance de<br />
l’hyposignal de l’air digestif ne permet pas une bonne définition de la<br />
paroi rectale antérieure.<br />
Immédiatement avant l'examen, le balisage rectal est réalisée à<br />
l’aide d’une seringue de 60cc de gel d'échographie. Le contenu<br />
rectal apparaît alors en hypersignal sur les séquences T2, ce qui<br />
permet de mieux mettre en évidence la cloison recto-vaginale et le<br />
cul de sac de Douglas. Dans certains cas de la même façon une<br />
opacification vaginale peut être associée.
TECHNIQUE <strong>IRM</strong><br />
La patiente est placée en décubitus strict ou les fesses légèrement<br />
surélevées si un examen clinique est prévu dans la machine. Une<br />
alèse est placée sous la patiente, pour éviter les conséquences de<br />
l'émission d'urine ou de matières lors des mouvements de poussée.<br />
La vessie est idéalement en semi-réplétion. Une vessie trop pleine<br />
est désagréable pour la patiente et les rapports anatomiques<br />
peuvent en être modifiés. De plus les patientes auront de la difficulté<br />
à réaliser correctement les séquences en poussée.<br />
Une opacification vaginale est possible, elle n'est pas indispensable,<br />
les parois vaginales étant généralement facilement reconnues. Si<br />
elle est réalisée, du gel d'échographie stérile peut être utilisé, plutôt<br />
qu'un tampon vaginal dont le volume modifie les rapports<br />
anatomiques et qui reste rarement en position médiane.
TECHNIQUE <strong>IRM</strong><br />
2) Les séquences:<br />
Le choix des séquences est dicté par deux nécessités :<br />
Un bilan morphologique statique précis doit permettre d’évaluer<br />
l’anatomie des portions ilio-coccygienne et pubo-rectale des levator<br />
ani et déceler les anomalies spontanées.<br />
Une étude dynamique des troubles de la statique doit permettre une<br />
approche fonctionnelle simultanée des trois compartiments pelviens<br />
classiques (urinaire, génital, digestif) et du compartiment péritonéal.<br />
1- L'examen morphologique, centré sur le pelvis, commence par<br />
des séquences pondérées en T2 dans les trois plans de l’espace ;<br />
les séquences en écho de spin ont une meilleure résolution<br />
anatomique que les séquences en écho de gradient ; en pratique,<br />
nous utilisons un turbo spin écho classique (TE = 90 msec, TR =<br />
1800 msec, TSE factor = 18, FOV = 300 mm, 5mm/0,5mm, NSA =<br />
2, matrice = 243X512, scan time = 1’05’’). Un contrôle respiratoire<br />
permet d'acquérir la séquence en phase expiratoire précoce et<br />
réduit les artéfacts de mouvement.
Séquence statique sagittale T2<br />
avec opacification rectale et tracé de la ligne pubococcygienne<br />
Ligne pubo<br />
coccygienne
Coronal T2 :<br />
faisceaux ilio-coccygien<br />
Séquence T2 statique<br />
Axial T2 :<br />
faisceaux pubo rectaux
T1 T2<br />
Péritoneocéle spontané post-hysterectomie
Séquence sagittale dynamique.<br />
A retenue, B neutre, C poussée<br />
moyenne, D poussée maximale.<br />
Volumineuse péritonéocèle<br />
(« sigmatocèle » et<br />
« entérocèle »)<br />
spontanée nettement majorée<br />
par la poussée.<br />
A<br />
B<br />
C D
TECHNIQUE <strong>IRM</strong><br />
2- <strong>IRM</strong> dynamique:<br />
Les séquences dynamiques permettent une acquisition séquentielle<br />
rapide, de l'ordre de la seconde réalisées pendant les mouvements<br />
de retenue et de poussée pelvienne par la patiente.<br />
Chaque équipe a perfectionné sa technique d'<strong>IRM</strong> dynamique<br />
opposant les tenants de séquences rapides en turbo spin-écho T2<br />
au fort contraste naturel nécessitant peu de préparation de la<br />
patiente et les tenants de séquences en écho de gradient rapide T1<br />
permettant d'acquérir plus d'images moins contrastées et<br />
nécessitent une préparation importante de la patiente avec balisage<br />
vésical, vaginal, et rectal, se rapprochant ainsi du<br />
colpocystogramme.Dans ce dernier cas,l’examen <strong>IRM</strong> devient plus<br />
invasif et limite l’accessibilité de cette technique .
Séquence dynamique : cul de sac de Douglas normal<br />
(1)
Sagittal T2<br />
Séquence statique<br />
Péritoneocèle (flèches rouges)et cervico-cystoptose<br />
(flèches jaunes) démasquées sur les séquences<br />
dynamiques<br />
Séquence dynamique<br />
Retenue Poussée<br />
Poussée maximale
TECHNIQUE <strong>IRM</strong><br />
Il faut savoir cependant varier les acquisitions (épaisseur de coupe,<br />
nombre de coupes, incidence...) pour répondre à un problème<br />
particulier pre ou post-operatoire.<br />
Une acquisition volumique 3D est également réalisée par certaines<br />
équipes afin de déterminer le volume des muscles élévateurs.<br />
Le faible contraste entre les différents organes des séquences<br />
pondérées T1 les rend peu utiles en <strong>IRM</strong> de la statique pelvienne,<br />
sauf en cas de pathologie associée.<br />
La séquence utilisée est une séquence turbo spin-écho T2<br />
dynamique (TR 2300 msec, TE 60 msec, 3 coupes<br />
10mm/1mm et 4 positions (retenue, neutre, poussée<br />
moyenne, poussée maximale) NSA = 1, matrice = 205X<br />
256, scan time = 28’’).
TECHNIQUE <strong>IRM</strong><br />
3) Déroulement de l’examen<br />
La durée totale de l'examen est d’environ 20 minutes :<br />
1 - séquences statiques en T2 dans les 3 plans de l'espace, pour<br />
étude anatomique fine.<br />
2 - séquences dynamiques simples, comportant 4 positions, en<br />
apnée : en retenue, en position neutre, en poussée pelvienne<br />
moyenne, en poussée pelvienne maximum.<br />
3 - Examen clinique pendant les séquences dynamiques. Il est<br />
possible de sensibiliser les examens en réalisant un examen<br />
clinique <strong>IRM</strong> pendant les mouvements de poussée. Le but est de<br />
faire apparaître le prolapsus d'un compartiment qui pourrait être<br />
masqué par l'importance du prolapsus d'un autre compartiment<br />
(rectocèle masquée par une cystocèle, élytrocèle masquée par une<br />
rectocèle…). Le but est de se rapprocher des conditions de<br />
l’examen clinique et d’associer le même principe à l’examen <strong>IRM</strong>.<br />
En pratique ces manœuvres sont réalisées à l'aide de valves de<br />
spéculums à usage unique placés successivement dans le cul de<br />
sac vaginal antérieur, puis dans le cul de sac vaginal postérieur lors<br />
des séquences dynamiques. Elles apparaissent en hyposignal<br />
rectiligne.
TECHNIQUE <strong>IRM</strong><br />
Il est aussi possible dans l’absolu de réaliser les séquences en les<br />
couplant à un examen clinique (manœuvre de Bonney par exemple)<br />
dans l’<strong>IRM</strong>. Les machines actuelles étant équipées d’un aimant<br />
horizontal l’examen est réalisé en décubitus ce qui de ce point de<br />
vue est comparable aux conditions de l’examen clinique mais pas à<br />
celles de la défécographie. Cependant une étude comparative de la<br />
statique pelvienne en décubitus et position assise, a priori plus<br />
favorable pour révéler des pathologies liées à la gravité ne retrouve<br />
pas de différence significative.
<strong>IRM</strong> dynamique avec valves antérieure et postérieure(2)
Séquence dynamique montrant une rectocèle dominante<br />
masquant partiellement une importante peritonéocèle (3)
Séquence sagittale dynamique.<br />
A retenue, B neutre, C poussée<br />
moyenne, D poussée maximale.<br />
Péritonéocèle spontanée la<br />
poussée démontre l’association<br />
avec une rectocèle .<br />
contenu uniquement graisseux, la<br />
péritonéocéle se traduit par<br />
l’interposition d’un hypersignal<br />
spontané T1 et T2 entre rectum<br />
et vagin<br />
A<br />
B<br />
C D
Séquence sagittale dynamique en poussée<br />
maximale.<br />
A- Sans valve<br />
B-C- Valve antérieure<br />
C- valve postérieure<br />
La mise en place de la valve antérieure<br />
démasque une péritonéocèle (flèche).<br />
A B C
Femme de 54 ans consultant pour douleurs pelviennes.<br />
Sagittal T2 Statique<br />
Sagittal T1 statique<br />
PERITONEOCELE SPONTANEE
Repos Poussée forte<br />
Antécédents d’hystérectomie<br />
Volumineuse péritonéocèle (sigmatocèle, enterocèle)apparaissant<br />
uniquement en poussée comme la rectocéle associée.
Volumineuse rectocéle masquant une<br />
importante péritonéocèle (4)
Antécédent de chirurgie pelvienne :<br />
hysterectomie<br />
Burch pour incontinence urinaire d’effort<br />
Péritonéocèle avec enterocèle.<br />
Sagittal T2<br />
repos<br />
Repos poussée poussée forte
etenue<br />
neutre<br />
poussée poussée maximale<br />
SEQUENCE STATIQUE<br />
Air intra-rectal délimitant un<br />
cul de sac de Douglas apparemment<br />
normal<br />
SEQUENCE DYNAMIQUE<br />
Péritonéocèle associée à<br />
une rectocèle
CONCLUSION<br />
Le diagnostic de péritonéocèle n’est pas toujours facile à<br />
l’examen clinique. L’<strong>IRM</strong> statique dépiste les<br />
péritonéocèles spontanés ; l’<strong>IRM</strong> dynamique démontre<br />
les petites péritonéocèles souvent non détéctées en<br />
per-opératoire.<br />
Ce diagnostic est facile en <strong>IRM</strong> à condition d’une<br />
technique satisfaisante et de bonnes connaissances<br />
anatomiques pelviennes et cliniques en terme de<br />
prolapsus pelvien féminin.
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