Le courage de dire N° 92 - Unadfi
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séparer le Mal <strong>de</strong> Dieu (Yahvé) créant ainsi « le titre » <strong>de</strong> Satan. Ce <strong>de</strong>rnier <strong>de</strong>viendra bientôt le<br />
« bouc émissaire <strong>de</strong> Dieu » et « l’instigateur même du Mal ». Quant aux apparences physiques<br />
du Diable, elles sont, rappelle encore l’ouvrage, « les fruits <strong>de</strong> l’héritage mythologique » <strong>de</strong><br />
civilisations antiques.<br />
Quelques siècles plus tard, au Moyen Age, Satan (« le Diable ») <strong>de</strong>vient, pourrait-on <strong>dire</strong>, une<br />
obsession, et à la Renaissance, il <strong>de</strong>vient une phobie. <strong>Le</strong> mon<strong>de</strong> occi<strong>de</strong>ntal est alors traversé<br />
par <strong>de</strong>s guerres, <strong>de</strong>s famines, <strong>de</strong>s épidémies, <strong>de</strong>s troubles religieux… S’ensuivent <strong>de</strong>s « vagues<br />
meurtrières » à l’encontre <strong>de</strong> tous ceux qui, refusant l’orthodoxie chrétienne, sont catalogués <strong>de</strong><br />
diaboliques. C’est le temps <strong>de</strong> l’inquisition et <strong>de</strong>s prêtres exorcistes. <strong>Le</strong> temps aussi <strong>de</strong> la non<br />
différenciation entre sorcellerie et satanisme.<br />
<strong>Le</strong> véritable culte <strong>de</strong> Satan naît au début du 17 e siècle, qui voit l’irruption <strong>de</strong> sociétés secrètes<br />
et <strong>de</strong> rites « sauvages » inspirés <strong>de</strong> pratiques païennes et gnostiques. <strong>Le</strong>s décennies suivantes<br />
adopteront une approche plus sceptique du phénomène du satanisme jusqu’à un certain 19 e<br />
siècle, plongé dans le romantisme noir, qui vouera même une sorte <strong>de</strong> fascination à Satan. Par<br />
la suite apparaîtront <strong>de</strong>s « théoriciens » tels Aleister Crowley et Anton La Vey qui « marqueront »<br />
le satanisme. <strong>Le</strong> culte sataniste prend <strong>de</strong>ux formes différentes selon qu’il est le fait <strong>de</strong>s<br />
fondamentalistes ou d’amateurs. <strong>Le</strong>s premiers s’attachent au culte <strong>de</strong> Satan ou <strong>de</strong> Lucifer, ce<br />
<strong>de</strong>rnier étant rattaché à la Wicca dont les tenants se disent héritiers <strong>de</strong>s sorciers… <strong>Le</strong>s seconds<br />
n’appartiennent pas à un courant défini, adoptant plutôt une forme <strong>de</strong> syncrétisme. Quant aux<br />
jeunes qui, la plupart du temps, ne possè<strong>de</strong>nt aucune culture religieuse, leurs pratiques pseudosataniques<br />
peuvent s’assimiler à un « bricolage », avec le double danger toutefois <strong>de</strong> tomber<br />
dans l’écueil <strong>de</strong> « cérémonies déviantes » ou <strong>de</strong> se faire recruter par <strong>de</strong>s groupuscules mieux<br />
organisés. En marge, trois autres mouvances baignent également dans un « ensemble d’images<br />
et <strong>de</strong> références imprégnées <strong>de</strong> la thématique et <strong>de</strong> la symbolique satanistes ». Il s’agit <strong>de</strong> celles<br />
<strong>de</strong>s gothiques, <strong>de</strong> la musique metal et <strong>de</strong>s motards <strong>de</strong> Hells Angels. Tous mobilisent l’image du<br />
Diable qui, à leurs yeux, symbolisent provocation et révolte. Reste cependant que le gothisme<br />
peut être une porte d’entrée sur le satanisme et que la musique metal préoccupe en raison <strong>de</strong>s<br />
risques <strong>de</strong> « passages à l’acte ». <strong>Le</strong>s satanistes se livrent en effet au prosélytisme au cours<br />
<strong>de</strong>s concerts, là où ils rencontrent « <strong>de</strong>s hommes jeunes, amateurs <strong>de</strong> musique violente et <strong>de</strong><br />
culture marginale, tatoués, piercés et parfois drogués» qui rentrent dans le profil sociologique <strong>de</strong>s<br />
a<strong>de</strong>ptes potentiels ! L’autre mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> recrutement reste la toile du net.<br />
Pourtant les Pouvoirs Publics constatent finalement peu <strong>de</strong> dérives <strong>de</strong> la part d’auditeurs <strong>de</strong><br />
musique ou <strong>de</strong> gothiques. <strong>Le</strong> « danger potentiel » viendrait plutôt <strong>de</strong> microstructures non<br />
déclarées aux plans juridique et associatif, agissant sans contraintes. Il est d’ailleurs constaté<br />
que la « quasi-totalité » <strong>de</strong>s passages à l’acte sataniste ont été « le fait d’individus affiliés à <strong>de</strong><br />
tels groupuscules ». En conclusion, l’on observe que le « cœur doctrinal » du satanisme <strong>de</strong>meure<br />
commun : critiquer l’ordre social existant, ainsi que les « notions d’égalité, <strong>de</strong> solidarité », « <strong>de</strong><br />
fraternité et d’ai<strong>de</strong> aux plus démunis ». L’Etat reste donc très attentif aux ramifications entre<br />
certaines structures satanistes et la nébuleuse néonazie. Il l’est également face à un satanisme<br />
potentiellement « porteur <strong>de</strong> pratiques aux consonances sectaires affirmées » qui s’illustre par<br />
la mise en pratique d’actes troublant l’ordre public et attentatoires aux Droits <strong>de</strong> l’Homme et aux<br />
libertés fondamentales.<br />
<strong>N°</strong><strong>92</strong>, 4 ème trimestre 2006, <strong>Le</strong> <strong>courage</strong> <strong>de</strong> <strong>dire</strong>