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SROR / Luxembourg N° 02/2013<br />

<strong>Le</strong> <strong>Porte</strong>-<strong>Voix</strong> Page 14 Février 2013<br />

Dossier – L'épineuse question des Touaregs dans le Sahel<br />

<strong>Le</strong>s Touaregs: histoire d'un cycle de ré<strong>be</strong>llions et de<br />

répressions<br />

L'offensive des armées française et malienne dans le Nord-Mali en janvier dernier a démontré que la haine entre les soldats<br />

maliens, d'origine sub-saharienne, à l'égard de la population touareg, établie essentiellement dans le nord du pays, était<br />

tenace. <strong>Le</strong> conflit déclenché il y a un peu plus d'un an n'a fait qu'exacer<strong>be</strong>r les tensions.<br />

Car l'histoire du Mali est jalonnée par les re<strong>be</strong>llions des Touaregs, suivies<br />

invariablement par les exactions commises à leur encontre par le<br />

gouvernement malien.<br />

A l'origine peuple nomade, le territoire des Touaregs recouvrait le désert<br />

saharien, de la Mauritanie au Mali et au Niger, en passant par l'Algérie, la<br />

Lybie et le Maroc. <strong>Le</strong>s Touaregs ont d'abord bénéficié de la bienveillance du<br />

colonisateur français. Mais la division de leur territoire historique sera actée<br />

lors des indépendances des pays d'Afrique de l'Ouest. S'ensuivit, un peu<br />

partout dont au Mali, un cycle ininterrompu de révoltes.<br />

<strong>Le</strong>s deux articles récents qui vont suivre évoqueront ce problème épineux.<br />

(Chr. Beghin)<br />

Zone d'établissement des Touaregs<br />

Au commencement étaient les Touaregs…<br />

Ce peuple d'origine <strong>be</strong>rbère, présent au Mali, au Niger ou au Burkina Faso, n'a jamais admis la domination noire<br />

consacrée par la décolonisation. Au printemps 2012, l'offensive de son aile laïque au nord du Mali a précipité<br />

l'ascension des islamistes.<br />

<strong>Le</strong>ur surnom d'«hommes bleus», les Touaregs le doivent au<br />

turban indigo qui ceint leur tête et déteint sur leur visage.<br />

<strong>Le</strong>s nobles ont un caractère fier, des manières solennelles, la<br />

démarche lente. <strong>Le</strong>ur stature est généralement haute, leurs<br />

membres maigres… leur teint blanc, mais plus ou moins basané<br />

par le soleil…» En 1863, l'explorateur Henri Duveyrier décrit ainsi<br />

les Touaregs, ce peuple étrange dont les vêtements, de loin, «leur<br />

donnent l'allure de fantômes noirs…» C'est le début d'une<br />

fascination qui dure encore. <strong>Le</strong>s Touaregs se prêtent au mythe.<br />

D'origine <strong>be</strong>rbère, ils sont vus comme musulmans mais<br />

modérément, peut-être anciennement chrétiens comme le<br />

montreraient la persistance du motif de la croix dans leurs bijoux<br />

et le bât de leurs chameaux. Ils vivent de rien sous les étoiles, ou<br />

bien de rapines, sont adeptes de la parité homme-femme, ils<br />

aiment la France et possèdent une écriture dont ils se servent<br />

avec parcimonie, et dont Henri Duveyrier veut croire qu'elle vient<br />

des hiéroglyphes de l'Égypte ancienne…<br />

Tout cela est parfois vrai, ou à moitié, ou pas du tout, mais<br />

qu'importe. Longtemps, les Touaregs n'ont pas écrit leur histoire.<br />

«Ce sont toujours les étrangers qui l'écrivent, dit l'historienne<br />

Anne Saint Girons (*). Sans doute parce que ce qui fonde un<br />

peuple, c'est le mythe. Et parce que la cosmogonie dynamique<br />

des Touaregs s'accommode mieux du mouvement perpétuel qui<br />

refonde l'histoire à chaque répétition du conteur.»<br />

Cette attitude est en train de changer avec la multiplication des<br />

blogs et des sites Internet édités par ceux qui préfèrent s'appeler<br />

les Kel Tamachek, «ceux qui parlent tamachek». Il s'agit d'une<br />

langue commune, avec des variantes, à un peuple réparti en cinq<br />

pays, principalement le Mali et le Niger, ainsi que la Libye, la<br />

Mauritanie et le Burkina Faso. Même leur nombre est incertain:<br />

1,5 million en tout, si l'on en croit les statistiques officielles des<br />

différents pays. Non, 3,5 millions, dont 85 % au Mali et au Niger,<br />

disent des sources touaregs citées par Anne Saint Girons. Ils<br />

viennent probablement de Libye, et il est difficile de fixer leur<br />

arrivée dans les régions sahariennes. <strong>Le</strong> voyageur Henri<br />

Duveyrier a l'œil exercé. Il décrit, au XIXe siècle, une société à<br />

nulle autre pareille qui l'enchante par ses raffinements. <strong>Le</strong> chef,<br />

l'amenokal, gouverne par consensus et après de multiples<br />

consultations. Ce sont les hommes qui sont voilés d'un turban<br />

indigo qui déteint sur leur visage, leur valant le surnom<br />

d'«hommes bleus.» Et ce sont les femmes qui découvrent leur<br />

visage. La monogamie règne. <strong>Le</strong>s femmes nobles ne travaillent<br />

pas. Elles savent lire et écrire, détiennent la richesse et surtout<br />

transmettent le nom et le statut. <strong>Le</strong> fils d'un noble et d'une<br />

roturière n'est pas noble, tandis que le fils d'une aristocrate et<br />

d'un roturier sera noble. <strong>Le</strong>s femmes s'adonnent à la broderie, et<br />

(Suite en page 15)

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