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SÉQUENCE 3 : CHARLES BAUDELAIRE, POÈTE MAUDIT ?

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<strong>SÉQUENCE</strong> 3 :<br />

<strong>CHARLES</strong> <strong>BAUDELAIRE</strong>, <strong>POÈTE</strong> <strong>MAUDIT</strong> ?<br />

En quoi Charles Baudelaire peut-il être considéré comme un poète maudit ?<br />

Corpus :<br />

Oeuvre intégrale :<br />

Les Fleurs du Mal,<br />

section «Spleen & Idéal»,<br />

Charles Baudelaire<br />

Méthode EAF Production Finale Date Limite<br />

LE COMMENTAIRE<br />

INITIATION À LA DISSERTATION<br />

Séquence 4 - Charles Baudelaire, Poète maudit ? - Mme Loriant - Année 2012-2013<br />

Objet d’étude :<br />

Poésie et quête de sens du XVIIe siècle à nos jours<br />

Lectures analytiques :<br />

1.«L’Albatros»<br />

2. «Elévation»<br />

3.«Spleen IV»<br />

FLORILÈGE POÉTIQUE<br />

Lectures complémentaires :<br />

1.«Les poètes Maudits», Verlaine<br />

2. «L’Alchimie du verbe», Rimbaud<br />

Lecture cursive : Une saison en enfer,<br />

Rimbaud<br />

Notions littéraires<br />

LES MOUVEMENTS POÉTIQUES DU XIXE SIÈCLE<br />

LES FORMES POÉTIQUES


5<br />

10<br />

15<br />

Séquence 4 - Charles Baudelaire, Poète maudit ? - Mme Loriant - Année 2012-2012<br />

L’Albatros<br />

Souvent, pour s’amuser, les hommes d’équipage<br />

Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers,<br />

Qui suivent, indolents compagnons de voyage,<br />

Le navire glissant sur les gouffres amers.<br />

À peine les ont-ils déposés sur les planches,<br />

Que ces rois de l’azur, maladroits et honteux,<br />

Laissent piteusement leurs grandes ailes blanches<br />

Comme des avirons traîner à côté d’eux.<br />

Ce voyageur ailé, comme il est gauche et veule !<br />

Lui, naguère si beau, qu’il est comique et laid !<br />

L’un agace son bec avec un brûle-gueule,<br />

L’autre mime, en boitant, l’infirme qui volait !<br />

Le Poète est semblable au prince des nuées<br />

Qui hante la tempête et se rit de l’archer ;<br />

Exilé sur le sol au milieu des huées,<br />

Ses ailes de géant l’empêchent de marcher.<br />

Charles Baudelaire, Les Fleurs du Mal, 1857


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Séquence 4 - Charles Baudelaire, Poète maudit ? - Mme Loriant - Année 2012-2013<br />

Lecture analytique 2 :<br />

Elévation<br />

Au-dessus des étangs, au-dessus des vallées,<br />

Des montagnes, des bois, des nuages, des mers,<br />

Par delà le soleil, par delà les éthers,<br />

Par delà les confins des sphères étoilées,<br />

Mon esprit, tu te meus avec agilité,<br />

Et, comme un bon nageur qui se pâme dans l'onde,<br />

Tu sillonnes gaiement l'immensité profonde<br />

Avec une indicible et mâle volupté.<br />

Envole-toi bien loin de ces miasmes morbides;<br />

Va te purifier dans l'air supérieur,<br />

Et bois, comme une pure et divine liqueur,<br />

Le feu clair qui remplit les espaces limpides.<br />

Derrière les ennuis et les vastes chagrins<br />

Qui chargent de leur poids l'existence brumeuse,<br />

Heureux celui qui peut d'une aile vigoureuse<br />

S'élancer vers les champs lumineux et sereins;<br />

Celui dont les pensers, comme des alouettes,<br />

Vers les cieux le matin prennent un libre essor,<br />

- Qui plane sur la vie, et comprend sans effort<br />

Le langage des fleurs et des choses muettes!<br />

Charles Baudelaire, Les Fleurs du Mal, 1857


5<br />

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Séquence 4 - Charles Baudelaire, Poète maudit ? - Mme Loriant - Année 2012-2013<br />

Lecture analytique 3 :<br />

Spleen IV<br />

Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle<br />

Sur l'esprit gémissant en proie aux longs ennuis,<br />

Et que de l'horizon embrassant tout le cercle<br />

Il nous verse un jour noir plus triste que les nuits ;<br />

Quand la terre est changée en un cachot humide,<br />

Où l'Espérance, comme une chauve-souris,<br />

S'en va battant les murs de son aile timide<br />

Et se cognant la tête à des plafonds pourris ;<br />

Quand la pluie étalant ses immenses traînées<br />

D'une vaste prison imite les barreaux,<br />

Et qu'un peuple muet d'infâmes araignées<br />

Vient tendre ses filets au fond de nos cerveaux,<br />

Des cloches tout à coup sautent avec furie<br />

Et lancent vers le ciel un affreux hurlement,<br />

Ainsi que des esprits errants et sans patrie<br />

Qui se mettent à geindre opiniâtrement.<br />

– Et de longs corbillards, sans tambours ni musique,<br />

Défilent lentement dans mon âme ; l'Espoir,<br />

Vaincu, pleure, et l'Angoisse atroce, despotique,<br />

Sur mon crâne incliné plante son drapeau noir.<br />

Charles Baudelaire, Les Fleurs du Mal, 1857


SÉANCE 2 :<br />

LA1. L’ALBATROS<br />

Deuxième poème de la section Spleen & Idéal, «L’Albatros» est encore fortement influlencé<br />

par le romantisme. Mais Baudelaire prend tout de même des distances avec ce mouvement,<br />

que l’on sent imposées par une autre influence : celle du Parnasse, qui rejette l’expression<br />

personnelle des sentiments dans la poésie. Pour exprimer les états d’âmes liés à sa condition<br />

de poète, le précurseur du symbolisme va donc user d’un «stratagème» : celui de l’emploi<br />

de correspondances. En effet, il va dans un premier temps évoquer une simple anecdote<br />

de voyage et la mettre en scène afin de lui donner une dimension symbolique.<br />

I. Une anecdote maritime dramatisée<br />

1. Le milieu marin comme «cadre théâtral»<br />

Ce poème se présente comme une anecdote piochée au hasard, une scène observée à<br />

plusieurs reprises, puisque racontée au présent d’habitude et introduite par l’adverbe «souvent».<br />

Dès les premiers vers s’installe un cadre, à travers le champ lexical de la mer, les sonorités<br />

(liquides, sifflantes et assonance en -ant) qui évoquent le vent et les remous. Ce décor<br />

semble destiné à mettre sous les projecteurs le protagoniste de la scène : l’albatros, désigné<br />

par des périphrases valorisantes : «compagnons de voyage», «vastes oiseau des mers».<br />

2. Des opposants cruels<br />

Face à eux, les marins sont caractérisés par leur cruauté, soulignée dès le vers 1 par<br />

l’absurdité de leur acte (CC de but «pour s’amuser»), puis par le rejet du verbe «prennent» qui<br />

porte à lui tout seul la notion de capture. Cette cruauté est mise en scène dans le second quatrain<br />

à travers les expressions du jeu et du mime. Par ailleurs, les marins sont désignés par<br />

des expressions au pluriel, et à cette supériorité de nombre s’ajoute celle de la force : en effet,<br />

ils sont les sujets des verbes d’action «agace» ; «miment», tandis que les Albatros, eux, semblent<br />

relativement passifs : «laissent» + verbe d’état «être».<br />

3. Un jeu de contrastes<br />

L’indice temporel «À peine» annonce un changement brutal de situation, qui va s’illustrer<br />

par une forte opposition entre la situation des oiseaux dans le ciel, et celle qu’ils occupent<br />

à terre . En effet, les périphrases qui associent l’oiseau et la mer font appel au lexique de la<br />

royauté : «rois de l’azur» ; «prince des nuées», ou encore à la notion de grandeur «vastes oiseaux<br />

des mers». Celle qui le désigne après sa capture fait apparaître le lexique du handicap :<br />

«l’infirme qui volait», présent aussi dans le gérondif «en boitant». De plus, toute une série d’antithèses<br />

va venir opposer aux premières images celles de l’Albatros au sol : les couples d’adjectifs<br />

«maladroits et honteux», «gauche et veule» ou encore «comique et laid» (qui répond<br />

directement à «naguère si beau»), ainsi que l’adverbe «piteusement» insistent lourdement sur<br />

la maladresse de l’oiseau.


II. La portée symbolique du récit<br />

SÉANCE 2 :<br />

LA1. L’ALBATROS<br />

1. L’identification du poète à l’albatros<br />

C’est le dernier quatrain qui révèle la dimension symbolique du poème. A travers une<br />

comparaison «Le poète est semblable...», Baudelaire tisse une correspondance entre la situation<br />

de l’albatros et celle du poète. Mais le quatrain précédent annonçait déjà ce glissement de<br />

l’anecdote au symbole par le passage du pluriel «les albatros» au singulier «Ce voyageur ailé».<br />

Ce changement de nombre renvoie d’ailleurs au titre dont on comprend mieux le choix du<br />

singulier. Toute l’efficacité de cette identification réside dans l’expression indirecte des sentiments<br />

: pas de première personne, pas de verbe de sentiments, mais une simple association<br />

entre l’albatros et « le Poète», généralisé par une majuscule. Cette prise de distance permet<br />

d’éviter l’exaltation du moi romantique qui se voit alors rejetée par le Parnasse.<br />

2. Le refus du pittoresque pour une dimension symbolique<br />

D’ailleurs Baudelaire va aussi tâcher d’éviter l’exploitation du pittoresque afin de rendre<br />

son analogie universelle : il propose un cadre marin, mais il ne le situe pas géographiquement ;<br />

il utilise un indice temporel «souvent» et un présent d’habitude, voire de répétition ; il désigne<br />

les marins par des pluriels «les hommes d’équipages», ou par des expressions vagues «l’un» ;<br />

«l’autre». Ils apparaissent donc comme une foule, une groupe humain qui se facilement associé,<br />

via les correspondances, à la société dans laquelle le poète se sent «exilé».<br />

3. La figure du poète en homme de génie exclu<br />

Mais le symbole le plus frappant reste celui des ailes, qui renvoie à l’inspiration ou au<br />

génie poétique. En effet, ce sont elles qui, au début du poème, confèrent toute sa grandeur à<br />

l’oiseau : «vastes» ; «grandes ailes blanches» ; «voyageur ailé». Mais c’est aussi sur elles que<br />

va reposer l’infirmité de l’albatros comme le montre la comparaison avec les avirons vers 8.<br />

Cette correspondance prend tout son sens dans la chute du poème, où le déterminant possessif<br />

est alors attribué au poète. L’opposition entre le ciel et le sol, matérialisée par les verbes<br />

«volait» et l’expression «l’empêchent de marcher» se révèle le symbole d’une verticalité que<br />

connaît le poète : si la poésie lui permet d’accéder à une dimension supérieure du monde, elle<br />

l’empêche aussi de s’intégrer à la société.<br />

Baudelaire choisit donc une anecdote presque banale pour en faire le symbole de la<br />

condition du poète. Il exploite pour cela les figures de l’analogie (l’ensemble du poème est<br />

construit sur une métaphore filée) afin d’établir des correspondances entre l’oiseau et le poète.<br />

Il ne sera d’ailleurs pas le seul a exploiter la métaphore de l’oiseau-poète (à ce sujet, lire le<br />

Cygne de Mallarmé).


I. Une opposition entre deux mondes<br />

1. Une réalité plate et basse<br />

! Vocabulaire négatif (monde obscur, impur, dysharmonieux)<br />

! sonorités disgracieuses<br />

! monde de la matière, monde réel et terrestre vu comme un fardeau (idée de poids)<br />

2. Un idéal céleste et harmonieux<br />

! figures lumineuses et positives, monde de la légèreté<br />

! idéal, qui relève de la Chimère et de l’utopie (fantasme)<br />

II. L’élévation de l’esprit<br />

1. Un mouvement spirituel<br />

SÉANCE 3 :<br />

LA 2 - « ÉLÉVATION »<br />

! Indices spatiaux renvoient à la hauteur, CL du vol, mais aussi de la nage ce qui montre bien qu’il<br />

s’agit de correspondances pour évoquer un mouvement abstrait : l’ascension de l’âme<br />

! Grâce à cette élévation, peut alors interpréter tous les symboles, les mystères : "comprend sans effort<br />

/ Le langage des fleurs et des choses muettes" vers l9-20, retrouver les correspondances et servir<br />

de messager parce qu'il est libéré des contraintes terrestres (l'adjectif attribut "heureux" est mis en valeur<br />

par l'inversion au vers 15), l'isolement du distique final avec le tiret montre l'allégement du réel au<br />

profit de l'immatérialité des signes du langage.<br />

2. L’analogie poétique<br />

! La structure du poème<br />

Les deux premiers quatrains de Elévation forment une phrase avec dans Q1 (quatrain 1) des compléments<br />

de lieu qui évoquent la nature terrestre puis la nature céleste (introduites par les locutions "audessus"<br />

et "par-delà" repesées), et dans Q2 la principale avec adresse à "mon esprit". Les rimes de ces<br />

deux quatrains sont importantes : Q1 "vallées" et "mers" représentent le bas tandis que "éthers" et "étoilées"<br />

représentent le haut => on note une opposition de sens mais un rapprochement par la rime; Q2:<br />

"agilité" et "volupté" représentent l'abstrait tandis que "onde" et "profonde" représentent le concret =><br />

renforcement du sens avec l'embrassement des rimes. Q3 continue cette adresse avec une exhortation<br />

à poursuivre ce mouvement puis avec les deux derniers quatrains, nous avons une généralisation sur le<br />

bonheur du poète dans ce moment: après l'exhortation, c'est la réflexion sur l'envol avec le passage à la<br />

deuxième personne du singulier " la troisième.<br />

! Le rythme poétique au vers 1, le rythme renforce le parallélisme entre les deux parties du vers, construites<br />

sur la répétition de la locution "au-dessus", cette répétition met en valeur les différents éléments<br />

du vers. De nombreux enjambements marquent l'envol (vers 7-8, vers 15-16, vers 19-20). La diergol du<br />

vers 10 (purifier) soutient l'élan et agrandit l'espace.


Texte support : « Quand le ciel bas et lourd... », Spleen IV,<br />

in Les Fleurs du Mal, 1857 (Section Spleen et Idéal)<br />

Problématique :<br />

Comment le spleen baudelairien est-il défini dans ce poème ?<br />

SÉANCE 4 :<br />

LA3 - SPLEEN IV<br />

Introduction : vers la fin de la section « Spleen et Idéal », 4 poèmes, les pièces 75, 75, 77 et 78 portent<br />

toutes le même titre. Nous avons ici le 4e et dernier. Chacun présente un visage différent de l’ennui qui<br />

accable le poète. Le spleen dans sa forme aiguë se présente comme une maladie. Ce poème mêle les<br />

conséquences sur le physique et mentales. Il s’agit ici d’une ultime bataille qui oppose les deux postulations<br />

du spleen et de l’idéal, à travers deux sentiments de l’espoir et de l’angoisse. Baudelaire nous propose<br />

dans ce poème une véritable définition du spleen, en partant des circonstances de son apparition et<br />

en développement le récit d’une lutte intérieure.<br />

Axes d'étude :<br />

I. Les circonstances du spleen<br />

1. Le paysage : climat et couleurs<br />

Les trois premiers quatrains sont reliés par l’anaphore de «Quand» qui introduit des subordonnées<br />

circonstancielles. Ces quatrains qui ne forment donc qu’une seule et même phrase dont la proposition<br />

principale sera le quatrième. Le poète insiste ainsi sur les circonstances de l’apparition du spleen et la notion<br />

d’enfermement : Le climat est humide, pluvieux et étouffant, on devine un ciel plombé de nuages («<br />

bas et lourd » vers1). Par ailleurs, l’obscurité domine le paysage : «jour noir», oxymore qui insiste sur<br />

l’absence totale de clarté, qui va à l’encontre de l’écoulement logique du temps qui veut la journée soir<br />

lumineuse et la nuit obscure (comparatif «plus que»).<br />

2. Les correspondances entre l'environnement et l'état intérieur du poète<br />

Ce climat introduit une idée d’enfermement à travers l’association du ciel à un couvercle. Celle impression<br />

est d’ailleurs reproduite dans la forme du poème : ces trois quatrains sont renfermés sur euxmêmes<br />

: anaphore avec « quand ». Le « couvercle » et le « cercle » (rime riche) enferme le lecteur. On<br />

est dans une sorte de sphère, de laquelle rien ne peut s’échapper (« couvercle », « cachot », « murs »,<br />

«plafonds », « barreaux », « prison », « filets », tous ces mots désignent notre Terre). Même l’horizon<br />

n’ouvre à rien. Cette idée d’enfermement ne s’illustre d’ailleurs pas que par la figure du cercle. Les lignes<br />

droites évoquées sont celles de la pluie, et deviennent les barreaux d’une prison. Comme chez les romantiques,<br />

les perturbations atmosphériques influent sur le psychisme ; les idées noires ressortent (« un jour<br />

noir » oxymore qui renforce l’idée de ténèbres ; « nuit » vers 4). La rime «nuit/ennuis» illustre parfaitement<br />

cette influence, mais chez Baudelaire, on ne sait jamais si c’est le paysage qui influe sur son humeur ou<br />

l’inverse. En effet, c’est «le ciel» qui «pèse» sur «l’esprit», mais ce dernier est déjà «gémissant en proie<br />

aux longs ennuis». On a donc l’impression d’une double influence, ou d’un effet d’écho.


II. Le combat intérieur du poète<br />

SÉANCE 4 :<br />

LA3 - SPLEEN IV<br />

1. La progression de la lutte et ses différentes étapes<br />

Ces quatrains annoncent une situation de crise, qui va donner lieu à une lutte de l’esprit contre le<br />

spleen. Tout indique que cette bataille est mentale, se déroule à l’intérieur de l’esprit du poète, esprit personnifié<br />

en être de douleur : v.2 : sur l’esprit, v.12 : au fond de nos cerveaux v.20 : sur mon crâne. C’est<br />

donc un combat purement intellectuel. C’est d’abord à travers l’Allégorie de l’espérance que se dessine<br />

cette lutte : celle-ci se débat pour sortir d’un cachot (l’image du crâne, dont les parois sont «pourries») en<br />

vain. Le verbe «cogner» souligne la violence des chocs qui marquent ce premier échec). Dans un second<br />

temps, l’esprit se voit véritablement pris au piège : «filets», et se pose non plus seulement en prisonnier,<br />

mais en véritable victime d’un traquenard organisé silencieusement par un «peuple» d’envahisseurs. Troisième<br />

étape de la lutte : l’agression sonore, «sautent avec furie», associe les son à des coups portés et<br />

s’accompagne de cris de douleur. Le poème se clot par l’armistice du poète : Le « drapeau noir » connote<br />

le drapeau des pirates qui usurpent une terre. En signe de soumission à ce pouvoir tyrannique, le poète «<br />

s’incline».<br />

2. Les protagonistes de scène de combat<br />

Au delà du climat qui renvoie à l’état intérieur du poème, Baudelaire va proposer des correspondances<br />

pour désigner les assaillants et l’esprit attaqué. Il propose d’abord un bestiaire infernal : « chauvesouris»<br />

est la figure choisie pour désigner l’Espérance. Ce choix est symbolique car les chauves-souris<br />

sont aveugles. On imagine donc aisément cet animal se heurter à répétition contre les parois d’un cachot.<br />

Ici, l’animal est donc associé à l’espoir, dont l’aile est «timide», ce qui souligne une certaine faiblesse. Les<br />

«araignées», elles, sont au contraire les assaillantes : «infâmes», elles sont, nous l’avons vu, de véritables<br />

guerrières pernicieuses : elles attaquent en nombre «peuple» et leur attaque est pernicieuse :<br />

«muet», elles prennent donc leur proie par surprise. Enfin, Baudelaire sort du bestiaire avec son dernier<br />

prédateur : les «cloches» qui semblent, elles extrêmement vives et rapides «sautent avec furie». Ces cloches<br />

sont aussi un signal : elles renvoient au glas, qu’on sonne pour annoncer la mort.<br />

3. La représentation de la mort (la mort comme seule issue au spleen)<br />

La douleur est alors plus forte que jamais (« hurlement »), puis elle devient moins vigoureuse (elle<br />

n’est plus qu’un gémissement). Le tiret vers 17 marque chez Baudelaire un changement radical de thème<br />

: celui de la mort et de l’enterrement : la mort apporte le repos et le calme : « sans tambours ni musique<br />

» et les sonorités vocaliques sourdes. Le cinquième quatrain est effectivement dominé par la Mort,<br />

qui semble être finalement la seule issue. Les « corbillards » annoncent le changement de rythme" Et le<br />

silence pèse sur tout le quatrain. L’Espoir (contre rejet = placé en fin de vers) laisse place à l’Angoisse.<br />

L’esprit n’est plus qu’un crâne. Comme une défaite, l’homme, qui aspirait à s’élever, est violemment («<br />

planté ») ramené à sa condition première. On passe de l’indéfini : «l’esprit», «nous verse», «nos cerveaux»,<br />

«des esprits», à une appropriation, une personnalisation : «mon âme», «mon crâne». Cette défaite<br />

est donc bien celle du poète (cf. dans chaque Spleen, le JE apparaît clairement) qui est désormais<br />

régi par l’Angoisse victorieuse et esclave du spleen.<br />

Ce quatrième spleen illustre donc le combat intérieur du poète entre espoir et angoisse. A travers<br />

les correspondances du paysage des animaux, il nous présente d’abord les circonstances du spleen, puis<br />

le véritablement déroulement cette lutte. Ainsi il nous permet de définir le spleen : ......................................<br />

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