BulletindeContre-infoenCévennes - Bulletin contre-info Cevennes
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RessouRces humaines<br />
LES ASSEMBLÉES<br />
GÉNÉRALES INTERPRO<br />
Ces nombreuses activités de blocage<br />
sont issues pour l’essentiel des AG<br />
interpro, AG de ville ou AG de lutte<br />
(la dénomination pouvait varier selon<br />
les contextes locaux et les militants en<br />
présence). Elles ont donc en général<br />
reproduit les limites du mouvement :<br />
suivistes des initiatives syndicales,<br />
souvent soucieuses de respecter les<br />
règles et la mascarade de l’idéologie<br />
démocratique. Parfois, là où il n’y<br />
avait pas de grève phare à soutenir,<br />
elles marquaient la volonté de salariés<br />
et de citoyens de se retrouver pour<br />
discuter et faire quelque chose entre<br />
les manifs. Ailleurs, elles furent tout<br />
simplement la vitrine citoyenne des<br />
intersyndicales locales : presque rien<br />
ne se faisait sans la présence et l’accord<br />
de chefaillons (qui venaient, bien sûr,<br />
à titre individuel) ; les centrales ont<br />
ainsi redoré leur blason et recruté pour<br />
leurs actions. Presque partout, ces<br />
réunions ont pour l’essentiel rassemblé<br />
des militants (syndicalistes, partis<br />
d’extrême-gauche, associations, etc.).<br />
Dans certaines grosses villes, il y<br />
eut des assemblées plus autonomes visà-vis<br />
du discours syndical, mais pas<br />
forcément de la pratique : beaucoup<br />
de ces AG ont fait le coup-de-poing<br />
sur les piquets aux côtés des syndicats<br />
et se sont pliées à leur cadence.<br />
Ailleurs, elles n’ont pas évité l’écueil<br />
« mouvementiste », qui se caractérise<br />
par cette volonté tenace de « faire<br />
converger les luttes », de les coordonner<br />
(avec à la clé des AG d’AG), et ce,<br />
même quand les luttes en question sont<br />
embryonnaires voire inexistantes.<br />
Souvent, les plus critiques de ces<br />
AG envers les stratégies syndicales<br />
ont par <strong>contre</strong>coup magnifié les autres<br />
blocages. De plus, de nombreux<br />
militants ont tendance à fétichiser ces<br />
assemblées et à en faire une fin en<br />
soi, aussi vides soient-elles parfois de<br />
substance et de perspective.<br />
Il arrive fréquemment qu’on attende<br />
de ces assemblées des actions clés en<br />
main, alors qu’elles devraient plutôt<br />
être des points de ren<strong>contre</strong> (non pas de<br />
« convergence ») entre des luttes déjà<br />
existantes ; ou entre des perspectives<br />
de lutte qui partent de ses propres<br />
conditions de vie, au moins autant que<br />
par élan de solidarité avec d’autres.<br />
Le contexte et le rythme effréné<br />
d’un tel mouvement fait qu’il est<br />
difficile d’échapper à l’activisme, ou à<br />
cette espèce d’unité de façade militante<br />
dans les réunions et les actions, en dépit<br />
des divergences. Pourtant, ce devrait<br />
être des espaces attirant de nombreux<br />
exploités quels que soient leur statut ou<br />
situation particulière, des moments où<br />
la parole est libérée et où sont abordées<br />
les questions de fond, celles qui<br />
dérangent car elles cristallisent souvent<br />
les contradictions au sein même<br />
des opprimés.<br />
Par exemple, la critique du salariat<br />
fut quasi absente de cette lutte, alors<br />
même que le refus de travailler deux<br />
ans de plus en fut la question centrale.<br />
Pourtant, l’exploitation du travail est un<br />
pilier central de la domination à travers<br />
les siècles, bien avant l’avènement du<br />
capitalisme industriel. Dans le sillage<br />
de cette question, ce sont les conditions<br />
même de l’existence capitaliste qui<br />
méritaient d’être posées : produire et<br />
consommer des marchandises inutiles<br />
et destructrices (de la vie humaine<br />
et de la planète) accumulées comme<br />
seule perspective de bonheur, devenir<br />
propriétaire à crédit, vivre endetté,<br />
servir de cobaye aux industries de mort,<br />
crever seul relégué dans un mouroir<br />
tarifé. Toute cette vie qu’une retraite<br />
misérable vient couronner aurait pu être<br />
discutée, pour imaginer et réfléchir en<br />
d’autres termes que ce qui est toujours<br />
présenté comme indépassable, et pour<br />
ainsi dire « naturel ».<br />
Ainsi en est-il de la démocratie<br />
triomphante, pilier idéologique du<br />
capitalisme. La démocratie est vendue<br />
comme le meilleur des systèmes.<br />
L’exercice du Pouvoir y est certes<br />
moins violent qu’en dictature, mais<br />
c’est le principe même du Pouvoir<br />
‒ celui d’un seul, de quelques-uns<br />
ou de beaucoup sur d’autres ‒, qui<br />
est à l’origine des différentes formes