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BulletindeContre-infoenCévennes - Bulletin contre-info Cevennes

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40<br />

science & vie<br />

Pendant tout le mois, en plusieurs<br />

points de la vallée, les techniciens et<br />

les ouvriers sont bloqués et repoussés<br />

des terrains expropriés. Les autorités<br />

décident un moratoire des travaux<br />

pendant 3 mois.<br />

30 octobre 2005, dernier jour du<br />

moratoire, la vallée est bloquée par une<br />

marée humaine. Les accès aux zones<br />

de sondage sont bloqués ainsi que les<br />

routes, les autoroutes et les chemins de<br />

fer. Les flics n’arrivent pas à forcer le<br />

barrage et négocient le déblocage de<br />

la vallée en échange de leur départ.<br />

Alors que les opposants célèbrent<br />

leur victoire, à 3h du matin, les<br />

forces de l’ordre occupent les terrains<br />

auxquels ils n’avaient pu accéder<br />

pendant la journée. 15 000 policiers<br />

s’installent dans la vallée (qui compte<br />

50 000 habitants). C’est une véritable<br />

occupation militaire.<br />

16 novembre, 80 000 personnes<br />

manifestent pour réclamer la<br />

suppression du projet et le retrait de<br />

la police.<br />

28 novembre, les keufs attaquent<br />

dans la nuit et prennent possession<br />

des terrains de Venaus, site d’entrée<br />

du prétendu futur tunnel. Une partie<br />

du site est reprise par les manifestants<br />

qui s’installent et occupent jour et nuit,<br />

malgré le froid.<br />

6 décembre, à l’aube, policiers et<br />

gendarmes attaquent les occupants.<br />

Quelques dizaines de personnes sont<br />

blessées dont deux gravement. L’alerte<br />

est donnée par les résistants jusqu’à<br />

Turin : une grève sauvage et massive<br />

est mise en place. Usines, bureaux,<br />

écoles, mairies, cheminots cessent le<br />

travail. L’autoroute est bloquée ainsi<br />

que les chemins de fer. La police est<br />

encerclée.<br />

8 décembre, 30 000 personnes<br />

se dirigent vers Venaus, puis se<br />

scindent : une partie se détache<br />

pour affronter les forces de police ;<br />

lacrymos <strong>contre</strong> pierres, corps à corps.<br />

Les flics abandonnent le terrain. Le<br />

chantier est réoccupé et les engins et<br />

les infrastructures sont sérieusement<br />

endommagés.<br />

12 décembre, le gouvernement<br />

décide une trêve de 6 mois (qui durera<br />

5 ans, jusqu’en 2010 !).<br />

Des procès et des condamnations<br />

auront lieu les années suivantes<br />

concernant les événements de 2005.<br />

Sabotage et lutte sociale<br />

Dans les luttes sociales, il y<br />

a souvent des situations et des<br />

épisodes inconfortables, dangereux,<br />

encombrants, qu’« on » préfère oublier.<br />

Un de ces cas est celui qui concerne les<br />

sabotages apparus en Val de Suse entre<br />

1996 et 1998.<br />

De la période d’avant les batailles<br />

de 2005, certains préfèrent uniquement<br />

se souvenir de conférences, de comités<br />

institutionnels et de manifestations.<br />

Deux jeunes sont morts, certes, mais ils<br />

préfèrent croire que c’est une histoire<br />

« louche » de services secrets, de trafic<br />

d’armes et d’explosifs...<br />

L’hôte ingrat, que beaucoup<br />

voudraient ainsi mettre à la porte,<br />

a un nom bien précis : le sabotage.<br />

L’accepter dans les rangs est en effet<br />

difficile pour certains. Ça implique<br />

le risque de perdre le consensus et de<br />

« compromettre » le travail accompli.<br />

Le risque de fissurer le front du « non ».<br />

C’est comme lorsqu’on se souvient<br />

de 68. Quelques mois de joie, d’émeutes,<br />

de mouvements, d’assemblées<br />

universitaires... puis, rien : après, il<br />

n’y a que « le terrorisme ». C’est ainsi<br />

que disparaît une décennie de luttes<br />

radicales, de répressions brutales,<br />

d’expériences d’envergure. Il y a<br />

même des dirigeants de syndicat qui<br />

se vantent, aujourd’hui,<br />

d’avoir participé à ces années de<br />

lutte sans n’avoir jamais rien fait<br />

d’illégal ; comme si l’histoire des<br />

mouvements sociaux n’était pas faite<br />

d’innombrables épisodes d’illégalisme<br />

de masse (blocages, sabotages,<br />

occupations, piquets, manifs sauvages,<br />

affrontements avec la police, etc). Pas<br />

mal comme coup d’éponge !<br />

L’illégalité est une réponse parmi<br />

d’autres au fait que les lois ne font que<br />

formaliser les rapports de force au sein<br />

de la société ; c’est, entre autres, une<br />

façon de rappeler à nos oppresseurs<br />

que les « frontières » entre le légal et<br />

l’illégal, le « bien et le mal », ce sont<br />

eux qui les ont créées, et qu’elles ne<br />

sont faites que pour préserver leur rôle<br />

de dominants et perpétuer notre place<br />

d’opprimés : ces définitions ils peuvent<br />

donc les garder pour leur bonne<br />

conscience ou pour les gauchistes<br />

« politiquement corrects »; de même<br />

pour leur notion de « justice ».<br />

Outre que l’histoire des opprimés<br />

est remplie d’exemples d’un usage<br />

collectif du sabotage (dans les luttes,<br />

dans les pratiques d’autonomie et dans<br />

les révoltes sociales), on peut aussi<br />

remarquer que le passage de « quelques<br />

individus isolés » à « beaucoup de<br />

gens énervés » ne se fonde sur aucune<br />

certitude mathématique. Cela veut<br />

dire que les luttes ne naissent pas<br />

magnifiques et soudées. Les premiers<br />

chantiers du TAV ont été occupés par<br />

100 personnes, les derniers par 30 000.<br />

La légitimité éthique du sabotage<br />

devrait être reconnue et défendue,<br />

même par ceux qui en critiquent l’utilité<br />

pratique ; par ailleurs, ce n’est pas<br />

parce qu’on n’a pas recours à certaines<br />

formes de lutte qu’on doit les dénigrer.<br />

La tendance à voir des complots<br />

partout est malheureusement banale<br />

et on entend souvent des accusations<br />

envers des actions qui seraient<br />

« <strong>contre</strong> le mouvement ». La réalité<br />

semble toujours propice à suggérer<br />

« d’étranges coïncidences » à ceux qui<br />

en cherchent : tout devient obscur.<br />

Mais, qu’y a-t-il d’obscur dans les<br />

sabotages <strong>contre</strong> les foreuses et les<br />

chantiers du TAV ? Y-a-t-il une<br />

différence de légitimité si cette<br />

pratique est adoptée par des<br />

centaines de personnes (comme<br />

en 2005 à Venaus) ou par une<br />

petite poignée d’individus<br />

(comme entre 96 et 98 dans<br />

toute la vallée) ? Attaquer à

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