intérieurs
intérieurs
intérieurs
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
INTÉRIEURS<br />
Journal de l’exposition<br />
Dieter APPELT<br />
Né en 1935 à Niegmegk (Allemagne),<br />
vit et travaille à Berlin.<br />
Dieter Appelt construit ses photographies<br />
comme des sculptures, en<br />
superposant des couches de lumière. Il<br />
expérimente le dispositif de la photographie<br />
dans sa capacité à traduire et<br />
capturer le passage du temps dans<br />
l’image, à considérer l’image comme le<br />
dépôt de souvenirs fragmentés.<br />
Admirateur d’Ezra Pound, il réalise en<br />
1981 une série de photographies des<br />
lieux où vécut le poète. « Il en résulte<br />
pour lui une conception de l’image photographique<br />
comme stratification,<br />
comme construction de dépôts successifs,<br />
superposition de prises de vue<br />
qu’il applique aussi bien à son propre<br />
visage qu’à des objets peu identifiables.<br />
Ce sont les modalités d’application de<br />
ce principe qui varient, et aussi les dispositifs.<br />
Ezra Pound, 1981<br />
photographie noir et blanc,<br />
29 x 39 cm<br />
collection Frac BN<br />
Dan GRAHAM<br />
Né en 1942, vit et travaille à New York.<br />
Depuis ses débuts en 1964, Dan<br />
Graham fut tour à tour galeriste, écrivain,<br />
théoricien, photographe, vidéaste,<br />
architecte. Son œuvre se révèle tout<br />
aussi polymorphe, influencée par l’art<br />
conceptuel mais aussi ancrée dans le<br />
contexte politique, social et culturel<br />
dans lequel elle est créée. En 1966, il<br />
signe son œuvre manifeste Homes for<br />
America, un article en double page<br />
dans Arts Magazine, qui a pour sujet le<br />
développement de formes architecturales,<br />
héritées du mouvement<br />
moderne et appliquées à la construction<br />
en série de maisons populaires et<br />
leurs aménagements <strong>intérieurs</strong>.<br />
Issu de ce projet Living-room of Model<br />
House- Salon of Model House, both<br />
view of same house, Staten Island,<br />
N.Y., 1967 présente en diptyque des<br />
Par exemple, la prise de vue pourra se<br />
répéter des milliers de fois sur la<br />
même plaque, avec un diaphragme très<br />
fermé – un système d’engendrement<br />
d’images emprunté notamment à la<br />
chronophotographie de Marey et aux<br />
photographies futuristes de Bragaglia<br />
ou de Coburn. Un objet placé sur une<br />
sellette tournante et très peu éclairé<br />
par des flashs intermittents dépose<br />
peu à peu de multiples facettes qui se<br />
mêlent et se confondent. »<br />
Michel Frizot<br />
Lynne COHEN<br />
Née en 1944 à Racine (Etats-Unis),<br />
vit et travaille à Ottawa (Canada)<br />
Men’s club, 1989<br />
photographie noir et blanc,<br />
cadre en formica, 72 x 91 cm<br />
collection Frac BN<br />
photographies d’<strong>intérieurs</strong> de maisons<br />
américaines, privilégieant la symétrie<br />
dans la composition du mobilier et<br />
celle des motifs peints, révélant une<br />
mise en scène ostentatoire et naïve.<br />
Les deux pièces photographiées n’offrent<br />
pas de perspectives extérieures,<br />
la baie vitrée du living-room est voilée<br />
et le miroir du salon reflète le motif en<br />
trompe-l’œil du premier plan.<br />
L’agencement des plans se redouble et<br />
s’abolit, dans le même plan où il se<br />
projette.<br />
Chaque photographie est accompagnée<br />
d’une légende manuscrite indiquant la<br />
fonction de la pièce ainsi que le type<br />
d’habitat et leur localisation géographique.<br />
Ainsi, sous la forme codifiée de<br />
l’illustration de magazine de décoration,<br />
Dan Graham fait une typologie de<br />
l’usage social de l’habitat.<br />
Issue du Pop Art et attirée par le minimalisme<br />
et l’art conceptuel, Lynne<br />
Cohen opte pour la photographie,<br />
médium qui va lui servir à faire la liaison<br />
entre « l’objet ordinaire et l’objet<br />
artistique». Les lieux photographiés<br />
par l’artiste, toujours vides de toute<br />
présence humaine, sont un constat<br />
d’une réalité si extraordinaire que l’on<br />
se demande si l’artiste n’ a pas ellemême<br />
réalisé l’agencement. Elle photographie<br />
des « d’installations » trouvées<br />
dans des espaces aussi divers que<br />
des appartements, des bureaux, des<br />
lieux fermés (Corridor, Men’s Club), ou<br />
plus récemment, des champs de tir,<br />
des laboratoires...<br />
Selon elle, “l’emplacement du mobilier<br />
dit clairement qui est le maître des<br />
lieux. Il délimite une frontière entre eux<br />
et nous. La présence humaine ne se fait<br />
pas seulement sentir dans la disposition<br />
du mobilier ; les canapés et les<br />
chaises ressemblent à des gens, les<br />
pièces contiennent de nombreuses<br />
allusions au corps humains : mannequins,<br />
schémas ou silouettes. Souvent<br />
aussi on perçoit une présence humaine<br />
un peu inquiétante, on décèle un indice<br />
d’une activité qui vient de se terminer<br />
ou s’apprête à commencer”.<br />
En photographiant à la chambre grand<br />
format et utilisant la lumière du lieu,<br />
un cadre identique aux couleurs contenues<br />
dans l’image, elle transforme le<br />
simple tirage photographique en<br />
tableau ou composition picturale. C’est<br />
un attrait pour le réel qui se révèle «<br />
plus fort » que l’imaginaire qui la<br />
pousse à renforcer l’impression par<br />
l’ajout de cadres formatés.<br />
Living-room of Model House- Salon of Model House, both view of<br />
same house, Staten Island, N.Y., 1967<br />
photographie couleur, diptyque, 102 x 72 cm<br />
collection Frac BN<br />
INTÉRIEURS<br />
Journal de l’exposition<br />
Fariba HAJAMADI<br />
Née en 1957 à Ispahan,<br />
vit et travaille à New York.<br />
Fariba Hajamadi développe une<br />
réflexion conceptuelle de l’image<br />
considérant que celle-ci doit être “travaillée<br />
comme les mots d’une phrase”.<br />
Ses œuvres présentent un univers<br />
ambivalent et polysémique.<br />
Puisant dans les archives qu’elle a<br />
constituées depuis des années lors de<br />
visites dans les musées du monde<br />
entier, elle réalise des montages où se<br />
juxtaposent les images provenant de<br />
lieux divers. Ces montages sont<br />
ensuite transférés sur toile ou sur panneaux<br />
de bois, parfois retouchés ou<br />
simplement recouverts d’un filtre<br />
coloré. Ces compositions « hybrides »<br />
s’articulent en polyptiques où les lieux<br />
sont recréés selon des thématiques<br />
imaginaires.<br />
Bed of Rasors, Swarms of Reasons,<br />
dont le titre est emprunté au poète<br />
mexicain Octavio Paz, illustre la façon<br />
dont le jeu des images redoublé du jeu<br />
des mots attise la curiosité du spectateur<br />
et l’incite à démêler le sens des<br />
lectures possibles.<br />
Dans cette œuvre sont juxtaposés deux<br />
espaces. L’un, privé, évoque le salon<br />
d’une demeure historique ; l’autre,<br />
public, celui d’un musée d’histoire<br />
naturelle où trône de façon incongrue<br />
parmi des insectes, une guêpière. La<br />
tonalité de l’ensemble est trouble, sensuelle.<br />
A l’évocation d’un monde plein<br />
Karen KNORR<br />
Née en 1954 à Francfort-sur-le-Main (Allemagne),<br />
vit et travaille à Londres<br />
Dans la série Connoisseurs dont fait<br />
partie la photographie The Analysis of<br />
Beauty, Karen Knorr parodie les idées<br />
reçues de la beauté et du bon goût<br />
encore prégnant dans la société britannique<br />
à laquelle elle appartient.<br />
Shattering an Old Dream of Symetry<br />
(Briser un vieux rêve de symétrie) met<br />
en scène une femme dont la pose de<br />
trois-quart et l’arc qu’elle tient renvoient<br />
aux personnages de la mythologie<br />
peints sur les murs alors que la<br />
porte reprend clairement un vocabulaire<br />
antique.<br />
de raffinement et de séduction s’opposent<br />
des signes de mort avec les collections<br />
d’insectes et de violence physique<br />
et sociale symbolisé par le corset.<br />
La question du temps et de la mémoire<br />
est mise à l’épreuve, les agrégats<br />
d’images de Fariba Hajamadi recomposent<br />
une sorte de “musée imaginaire”<br />
où chaque spectateur tentera<br />
vainement d’identifier son propre souvenir.<br />
Bed of Razors / Swarms of Reasons, 1993<br />
photo émulsion sur panneau de frêne<br />
176,4 x 154,3 cm<br />
Bénédicte HÉBERT<br />
Née en 1967 à Saint-Hilaire du<br />
Harcouet, vit et travaille à Caen.<br />
Bénédicte Hébert centre son travail sur<br />
les enjeux et les statuts de l’image.<br />
Qu’elle utilise la photographie ou la<br />
vidéo, ses œuvres sont autant de questionnements<br />
sur la notion de représentation.<br />
Shattering an old Dream of Symmetry, 1988,<br />
cibachrome sur papier, cadre en bois<br />
avec plaque de cuivre, 57,5 x 57,5 cm<br />
collection Frac BN<br />
Sans titre, 1997<br />
photographies couleur<br />
contrecollée sous plexiglass<br />
50 x 35 cm chaque<br />
Ses photographies captent l’univers<br />
intimiste, la chambre, le fouillis d'objets<br />
quotidiens ou bien encore une<br />
nature morte de fleurs, dans le reflet<br />
éteint de l'écran du téléviseur. Celui-ci<br />
sert alors de cadre à l'image, perd sa<br />
fonction de diffuseur en ne devenant<br />
que récepteur passif d’une autre<br />
image.<br />
L'écran, “cette lucarne sur le monde",<br />
qui d'ordinaire déverse son flux d'images<br />
ininterrompu devient dans ces photographies<br />
tantôt source lumineuse,<br />
tantôt miroir réfléchissant l'espace<br />
environnant.<br />
Par de multiples mises en abymes,<br />
Bénédicte Hébert sème le doute en<br />
invitant le spectateur à s'interroger sur<br />
l'exactitude de ses perceptions visuelles.<br />
“Connaisseurs et Collectionneurs des<br />
Grandes œuvres d’Art ont construit<br />
leurs demeures et leurs jardins, choisi<br />
leurs tableaux et leur mobilier, selon<br />
les règles néo-classiques de la<br />
Symétrie et de l’Ordre, des<br />
Convenances et de la Beauté, qui assurent<br />
une position d’Hommes de Goût.”<br />
Karen Knorr, catalogue Compustures, 1987.