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le cheval barbe et son redressage - Centre de documentation ...

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LE CHEVAL BARBE ET SON REDRESSAGE


.<br />

.<br />

Ir'


Lieutenant LICART<br />

LE CHEVAL BARBE<br />

ET<br />

SON REDRESSAGE<br />

« Co nnaître <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> pour <strong>le</strong> mieux monter,<br />

<strong>le</strong> monter pour <strong>le</strong> mieux connaître. »<br />

(Comte d'AURE.)<br />

.4 oec 43 photographies hors texte <strong>et</strong> 32 croquis dans <strong>le</strong> texte<br />

PARIS<br />

ÉDITIONS BERGER.LEVRAULT<br />

5, Rue Auguste-Comte (VI e )<br />

1930


COPYRIGHT BY ÉDITIONS BEUOER-LEVRAULT, PARIS, IQ3O.<br />

Tous droits <strong>de</strong> traduction, <strong>de</strong> reproduction <strong>et</strong> d'adaptation<br />

réservés pour tous pays.


PRÉFACE<br />

« Toutes vérités ne <strong>son</strong>t pas<br />

bonnes à dire, mai s el<strong>le</strong>s <strong>son</strong>t<br />

bonnes à entendre. »<br />

« Tout dire n'est pas médire. »<br />

Un jour <strong>de</strong> concoms hippique à Oran, j'eus <strong>le</strong> plaisir <strong>de</strong><br />

rencontrer <strong>et</strong> <strong>de</strong> féliciter <strong>de</strong> <strong>son</strong> succès un jeune officier<br />

venant <strong>de</strong> France. Ainsi qu'il arrive parfois, entre cavaliers,<br />

<strong>le</strong> <strong>cheval</strong> fut l'obj<strong>et</strong> principal <strong>de</strong> notre entr<strong>et</strong>ien. Je<br />

répondis <strong>de</strong> mon mieux aux questions que me posait mon<br />

sympathique camara<strong>de</strong> sur <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>, <strong>le</strong> cavalier <strong>et</strong><br />

l'équitation arabes<br />

Comme la plupart <strong>de</strong> ceux qui arrivent dans ce pays, il<br />

tenait pour vraies <strong>le</strong>s nombreuses légen<strong>de</strong>s répandues sur<br />

l'Afrique en général <strong>et</strong> sur <strong>le</strong> cavalier arabe en particulier.<br />

Beaucoup <strong>de</strong> ces légen<strong>de</strong>s, fausses à mon sens, <strong>son</strong>t d'ail<strong>le</strong>urs<br />

encore admises ici comme vraies <strong>et</strong> défendues comme<br />

tel<strong>le</strong>s contre l'évi<strong>de</strong>nce même par un grand nombre <strong>de</strong><br />

per<strong>son</strong>nes. S'il n'est pire sourd que celui qui ne veut entendre,<br />

il n'est aussi plus aveug<strong>le</strong> que celui qui ne veut<br />

point voir : il fait si bon fermer <strong>le</strong>s yeux sous <strong>le</strong> so<strong>le</strong>il<br />

d'Afrique<br />

Vouloir détruire ces idées-légen<strong>de</strong>s ne peut que m'attirer<br />

<strong>de</strong>s reproches <strong>et</strong> me faire accuser <strong>de</strong> bouscu<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s traditions.<br />

Prévoyant l'attaque, j'aime autant riposter avant qu'el<strong>le</strong><br />

ne parte : <strong>le</strong>s traditions comprennent <strong>de</strong>s récits vrais, mais<br />

aussi d'autres qui <strong>son</strong>t faux; ceux-ci constituent souvent<br />

<strong>de</strong>s obstac<strong>le</strong>s au développement du progrès. Ne peut-il<br />

croître plus à l'aise si on l'en débarrasse?<br />

Revenons à l'hippodrome d'Oran. J'ignore si mon camara<strong>de</strong><br />

tira profit <strong>de</strong> notre conversation, mais ce que je peux


— vi —<br />

affirmer, c'est qu'il me fut donné <strong>de</strong> constater avec certitu<strong>de</strong>,<br />

sinon avec plaisir, que j'avais bien mal employé <strong>le</strong><br />

temps que je venais <strong>de</strong> passer en Afrique.<br />

« He knows well who knows enough to know that he<br />

knows nothing » (1).<br />

Et je résolus <strong>de</strong> travail<strong>le</strong>r pour rattraper <strong>le</strong> temps perdu<br />

<strong>et</strong> atténuer un peu mon ignorance.<br />

J'accumulai ainsi pendant <strong>de</strong>ux ans quantité <strong>de</strong> notes,<br />

d'observations; j'étudiai, je fouillai un grand nombre <strong>de</strong><br />

livres; puis, un jour, m<strong>et</strong>tant à profit <strong>le</strong>s nombreux instants<br />

<strong>de</strong> liberté que <strong>le</strong>s officiers ont ici, j'entrepris <strong>de</strong> classer <strong>et</strong><br />

d'ordonner c<strong>et</strong> amas <strong>de</strong> griffonnages.<br />

Étant donné la sup^ ression <strong>de</strong> plusieurs régiments <strong>de</strong> la<br />

Métropo<strong>le</strong>, l'augmentation <strong>de</strong>s régiments <strong>de</strong> cava<strong>le</strong>rie<br />

indigènes dont plusieurs tiennent garni<strong>son</strong> en France, je<br />

crois que beaucoup <strong>de</strong> mes camara<strong>de</strong>s passeront dans<br />

ces régiments. Je me suis imaginé que mon travail pourrait<br />

<strong>le</strong>ur être uti<strong>le</strong>.<br />

Ce livre s'adresse donc surtout à <strong>de</strong>s cavaliers montant à<br />

<strong>cheval</strong>, aimant <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>et</strong> travaillant l'équitation, bref,<br />

à <strong>de</strong>s cavaliers tout court; aussi je <strong>le</strong> <strong>de</strong>stine plus spécia<strong>le</strong>ment<br />

à mes camara<strong>de</strong>s <strong>de</strong> la Métropo<strong>le</strong> appelés à faire connaissance<br />

avec <strong>le</strong>s chevaux <strong>de</strong> l'Afrique du Nord. En <strong>le</strong>s<br />

prévenant <strong>de</strong> ce qu'ils trouveront, ce livre <strong>le</strong>ur fera gagner<br />

du temps; <strong>le</strong>s quelques renseignements sur <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong><br />

<strong>et</strong> l'équitation arabe qu'ils pourront y puiser <strong>son</strong>t susceptib<strong>le</strong>s<br />

<strong>de</strong> réduire la pério<strong>de</strong> inévitab<strong>le</strong> d'acclimatement,<br />

<strong>de</strong> tâtonnements, consécutive à <strong>le</strong>ur arrivée dans un régiment<br />

<strong>de</strong> cava<strong>le</strong>rie indigène.<br />

J'ai défini <strong>le</strong> but; il me reste à dire ce qu'est <strong>le</strong> livre.<br />

D'abord, il est sans prétention. L'auteur, heureusement<br />

pour lui encore jeune, se rend compte <strong>de</strong> <strong>son</strong> défaut <strong>de</strong><br />

capacité <strong>et</strong> <strong>de</strong> savoir. Suivant l'expression du comte <strong>de</strong><br />

Comminges, ce livre est « la science <strong>de</strong>s autres ». Il n'est<br />

qu'un recueil <strong>de</strong> notes auxquel<strong>le</strong>s ont été ajoutés <strong>de</strong>s ren-<br />

(1) « Il sait bien celui qui ea sait assez pour savoir qu'il ne sait rien. »


VII —<br />

seignements glanés un peu partout <strong>et</strong> <strong>le</strong>s déductions<br />

d'observations <strong>et</strong> d'expériences nombreuses <strong>et</strong> attentives.<br />

En <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> toute préoccupation littéraire, je me suis<br />

efforcé d'ordonner <strong>et</strong> d'exprimer <strong>le</strong> tout <strong>le</strong> mieux qu'il m'est<br />

possib<strong>le</strong>.<br />

Je prie <strong>le</strong>s camara<strong>de</strong>s qui me feront l'honneur d'ouvrir<br />

ce livre <strong>de</strong> <strong>le</strong> lire avec une indulgence éga<strong>le</strong> à la simplicité<br />

avec laquel<strong>le</strong> il a été écrit.<br />

Si mes idées n'ont pas la faveur <strong>de</strong> plaire à certains <strong>le</strong>cteurs,<br />

parce que contraires aux <strong>le</strong>urs <strong>et</strong> aux légen<strong>de</strong>s qu'ils<br />

perpétuent pour <strong>de</strong>s motifs que je n'entrevois pas, qu'ils<br />

veuil<strong>le</strong>nt bien m'excuser <strong>et</strong> se persua<strong>de</strong>r surtout que si<br />

mon but n'est pas <strong>de</strong> plaire, il n'est pas non plus <strong>de</strong> dénigrer.<br />

Si ce travail peut être uti<strong>le</strong> à quelques-uns <strong>de</strong> mes camara<strong>de</strong>s,<br />

je m'estimerai récompensé. Dans <strong>le</strong> cas contraire,<br />

c<strong>et</strong>te phrase <strong>de</strong> Sénèque viendra me contenter : « La récompense<br />

d'une bonne action, c'est <strong>de</strong> l'avoir faite. »<br />

T<strong>le</strong>mcen, juin 1923«



PLAN<br />

Je diviserai c<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong> en cinq parties :<br />

Première partie : Le <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>.<br />

Deuxième partie : Comment il est monté.<br />

Troisième partie ; Ce qu'il <strong>de</strong>vient avec <strong>le</strong>s procédés <strong>et</strong> <strong>le</strong>s métho<strong>de</strong>s<br />

employées.<br />

Quatrième partie : Son <strong>redressage</strong>.<br />

•Cinquième part ie : Une métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>redressage</strong>.<br />

Le détail du plan adopté est <strong>le</strong> suivant :<br />

PREMIÈRE PARTIE<br />

LE CHEVAL BARBE<br />

Chapitre I. — Généralités. — Son portrait comparé avec celui<br />

du <strong>cheval</strong> arabe. — Ses qualités, <strong>son</strong> car actère,<br />

ses moyens.<br />

— II. — La population <strong>cheval</strong>ine <strong>de</strong> l'Afrique du Nord,<br />

autrefois, aujourd'hui. — Causes <strong>de</strong> dégénérescence.<br />

— L'é<strong>le</strong>vage en Afrique du Nord. —<br />

Comment est é<strong>le</strong>vé <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>. — Son utilisation.<br />

— III. — Des différentes variétés <strong>de</strong> la race <strong>barbe</strong>.<br />

Les chevaux d'Algérie.<br />

Les chevaux du Maroc.<br />

Les chevaux <strong>de</strong> Tunisie.<br />

DEUXIÈME PARTIE<br />

COMMENT EST MONTÉ LE CHEVAL BARBE<br />

Chapitre I. — Les moyens. — Le harnachement arabe : la sel<strong>le</strong>,<br />

<strong>le</strong>s mors (<strong>le</strong> mors arabe comparé av ec <strong>le</strong> mors<br />

français, <strong>le</strong> mors arabe civil, <strong>le</strong> mors <strong>de</strong> mu<strong>le</strong>t).<br />

Les moyens d'impulsion : éperons, étriers, extrémité<br />

<strong>de</strong>s rênes.<br />

— II <strong>et</strong> IIL — Leur emploi.<br />

— IL — L'éq uitation arabe dans <strong>le</strong>s tribus. — La légen<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

l'Arabe cavalier <strong>et</strong> homme <strong>de</strong> <strong>cheval</strong> accompli.


Chapitre III. — L'éq uitation arabe dans <strong>le</strong>s régiments <strong>de</strong> spahis.<br />

Ce qu'el<strong>le</strong> est.<br />

Ce qu'el<strong>le</strong> <strong>de</strong>vra it être d'après <strong>le</strong> règ<strong>le</strong>ment <strong>de</strong>s<br />

spahis.<br />

Ce qu'il faudrait qu'el<strong>le</strong> soit.<br />

TROISIÈME PARTIE<br />

CE QUE DEVIENT LE CHEVAL BARBE AVEC LE S PROCÉDÉS<br />

ET LES MÉTHODES EMPLOYÉS<br />

Chapitre I. — Comment on <strong>le</strong> trouve dans <strong>le</strong>s régiments. —<br />

Aplombs. — All ures. — Défe nses. — Caractère.<br />

— II. — Causes. — Conséquences. — R emè<strong>de</strong>s,<br />

QUATRIÈME PARTIE<br />

LE REDRESSAGE DU CHEVAL BARBE<br />

Chapitre I. — Choix d'un <strong>cheval</strong>. — A quoi remédier <strong>et</strong> comment.<br />

— Principes généraux <strong>de</strong> dressage. — Les défenses<br />

<strong>de</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> <strong>et</strong> comment <strong>le</strong>s combattre.<br />

— II. — A la recherche d'une métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>redressage</strong>. —<br />

Baucher <strong>et</strong> <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>.<br />

— III, — Le relèvement <strong>de</strong> l'encolure. — Ses eff<strong>et</strong>s.<br />

— IV. — Comment placer l'encolure par <strong>de</strong>s moyens rationnels<br />

déduits <strong>de</strong> <strong>son</strong> étu<strong>de</strong> anatomique.<br />

— V, — L'assouplissement <strong>de</strong>s articulations <strong>de</strong> la nuque<br />

<strong>et</strong> <strong>de</strong> la mâchoire.<br />

— VI. — L'obéissance aux ai<strong>de</strong>s. — La mise en main. —<br />

La légèr<strong>et</strong>é.<br />

CINQUIÈME PARTIE<br />

UNE MÉTHODE DE REDRESSAGE


LE CHEVAL BARBE ET SON REDRESSAGE<br />

PREMIÈRE PARTIE<br />

LE CHEVAL BARBE<br />

CHAPITRE I<br />

I. Généralités. —Son tempérament. — Sa tail<strong>le</strong>. — IL Son portrait. — Comparé<br />

avec celui du <strong>cheval</strong> arabe. — III. Ses qualités. •— Le » meil<strong>le</strong>ur<br />

<strong>cheval</strong> <strong>de</strong> guerre du mon<strong>de</strong> » — So n caractère. Ses moyens. — IV. « Le<br />

<strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> ne saute pas ». — L es rai<strong>son</strong>s pour <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s ses moyens <strong>de</strong><br />

saut <strong>son</strong>t inconnus.<br />

§ I. — Généralités. — Ses origines. — Son tempérament. —<br />

Sa tail<strong>le</strong>.<br />

Le <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> n'est pas <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> arabe. Je crois <strong>de</strong>voir <strong>le</strong><br />

rappe<strong>le</strong>r car j'ai entendu confondre très souvent <strong>et</strong> employer<br />

sans discernement l'un ou l'autre <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux qualificatifs.<br />

Le <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> est é<strong>le</strong>vé dans <strong>le</strong> Nord <strong>de</strong> l'Afrique <strong>de</strong>puis<br />

l'Océan jusqu'à l'Egypte, <strong>de</strong> la Méditerranée jusqu'au désert.<br />

« Tou s <strong>le</strong>s hippologues s'accor<strong>de</strong>nt à reconnaître que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

<strong>barbe</strong> <strong>de</strong>scend <strong>de</strong> l'ancien <strong>cheval</strong> numi<strong>de</strong> si célèbre lors <strong>de</strong>s<br />

guerres puniques <strong>et</strong> qui contribua si puissamment à tenir en<br />

échec, en Afrique, <strong>le</strong>s armées romaines pendant tout <strong>le</strong> temps<br />

<strong>de</strong> <strong>le</strong>ur domination. Mais ils <strong>son</strong>t en dissi<strong>de</strong>nce sur <strong>son</strong> origine<br />

première. D'après <strong>le</strong>s uns, la race <strong>barbe</strong> <strong>de</strong>scendrait du <strong>cheval</strong><br />

arabe. Pour d'autres, el<strong>le</strong> serait indigène du Nord <strong>de</strong> l'Afrique ;<br />

dans ce cas, loin d'être un héritage <strong>de</strong> la souche arabe, sa ph y­<br />

sionomie orienta<strong>le</strong> <strong>et</strong> ses qualités remarquab<strong>le</strong>s seraient dues<br />

LE CHEVAL BARBE


aux influences naturel<strong>le</strong>s du climat, du sol, <strong>de</strong> la nature, <strong>de</strong>s<br />

aliments, el<strong>le</strong>s seraient innées <strong>et</strong> non acquises <strong>et</strong> se transm<strong>et</strong>traient<br />

d'une manière constante en dépit <strong>de</strong>s causes <strong>de</strong> dégradation.<br />

Le <strong>barbe</strong> <strong>de</strong> nos jours est, à peu <strong>de</strong> choses près, ce qu'était<br />

<strong>le</strong> numi<strong>de</strong> ».<br />

Incontestab<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> actuel <strong>de</strong>scend <strong>de</strong> l'ancien<br />

<strong>cheval</strong> numi<strong>de</strong>, mais je ne pense pas qu'il soit <strong>de</strong> nos jours ce<br />

qu'il était autrefois. Dans tous <strong>le</strong>s ouvrages qui nous renseignent<br />

sur la Numidie, nous trouvons relaté que <strong>le</strong>s Numi<strong>de</strong>s<br />

étaient <strong>de</strong>s cavaliers extraordinaires. Après la fondation <strong>de</strong> Carthage,<br />

ils fournirent aux Carthaginois <strong>et</strong> aux Romains en qualité<br />

<strong>de</strong> mercenaires <strong>de</strong>s cavaliers excel<strong>le</strong>nts. Si <strong>le</strong>s Numi<strong>de</strong>s ont<br />

laissé une réputation <strong>de</strong> cavaliers remarquab<strong>le</strong>s, il est permis<br />

<strong>de</strong> croire qu'ils avaient d'excel<strong>le</strong>nts chevaux, ceci étant fonction<br />

<strong>de</strong> cela. Mais il est vraisemblab<strong>le</strong> qi'il s'est passé pour <strong>le</strong>s<br />

chevaux numi<strong>de</strong>s ce qu'il est advenu aux Numi<strong>de</strong>s eux-mêmes :<br />

<strong>de</strong>s mélanges <strong>de</strong> races qui n'ont pas complètement submergé<br />

<strong>le</strong> type ancien mais qui l'ont altéré.<br />

La recherche <strong>de</strong> l'origine du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> nous fait faire un<br />

peu d'histoire ancienne. Je <strong>le</strong> crois nécessaire.<br />

La Numidie, qui correspond probab<strong>le</strong>ment à l'Algérie actuel<strong>le</strong>,<br />

passa <strong>de</strong> la domination romaine sous cel<strong>le</strong> <strong>de</strong>s Vanda<strong>le</strong>s; el<strong>le</strong><br />

fit partie <strong>de</strong> l'empire grec, puis fut conquise par <strong>le</strong>s Arabes.<br />

Avant la fin du vu® sièc<strong>le</strong> <strong>le</strong>s Musulmans étaient maîtres <strong>de</strong> l'Afrique<br />

méridiona<strong>le</strong>. Plus tard, au xi e sièc<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s Arabes ne se<br />

contentèrent plus <strong>de</strong> l'Égypte, <strong>de</strong> la Tripolitaine, <strong>de</strong> la Tunisie,<br />

<strong>de</strong> l'Algérie, du Maroc, ils refoulèrent la race berbère à travers<br />

Sahara <strong>et</strong> Soudan. A c<strong>et</strong>te époque, la Numidie cesse d'avoir une<br />

vie particulière <strong>et</strong> <strong>son</strong> histoire se confond avec cel<strong>le</strong> <strong>de</strong>s divers<br />

empires musulmans qui ont occupé c<strong>et</strong>te partie <strong>de</strong> l'Afrique<br />

jusqu'à la conquête française.<br />

Il semb<strong>le</strong> très probab<strong>le</strong> que <strong>le</strong>s Arabes <strong>et</strong> <strong>le</strong>s Turcs importèrent<br />

dans ce pays <strong>le</strong>urs beaux chevaux <strong>de</strong> la Syrie <strong>et</strong> <strong>de</strong>s plaines<br />

<strong>de</strong> l'Euphrate <strong>et</strong> que ceux-ci eurent une influence profon<strong>de</strong><br />

sur l'évolution <strong>de</strong> la population <strong>cheval</strong>ine du pays conquis.<br />

Au moment <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te conquête, d'ail<strong>le</strong>urs, au vu 6 sièc<strong>le</strong>, la population<br />

<strong>cheval</strong>ine était extrêmement restreinte « c ontrairement


m«**;<br />

Photo 1. — Cheval <strong>barbe</strong>.<br />

Photo 2. — Arabe <strong>barbe</strong>.


à l'idée que l'on s'en fait en général. Peu <strong>de</strong> chefs arabes avaient<br />

à c<strong>et</strong>te époque plus d'un <strong>cheval</strong>, au témoignage d'un Arabe<br />

bien connu Damiry » (i).<br />

Je crois donc qu'il convient plutôt <strong>de</strong> penser que la race <strong>barbe</strong><br />

actuel<strong>le</strong> est un mélange <strong>de</strong> numi<strong>de</strong> <strong>et</strong> d'arabe, <strong>de</strong> syrien. A<br />

la tail<strong>le</strong>, à la légér<strong>et</strong>é <strong>de</strong> l'ancienne race numi<strong>de</strong>, tel<strong>le</strong> qu'el<strong>le</strong><br />

nous est décrite, <strong>le</strong> beau <strong>barbe</strong> ne joint-il pas <strong>le</strong> poitrail admirab<strong>le</strong><br />

<strong>et</strong> <strong>le</strong>s membres d'acier qui caractérisent l'arabe?<br />

Ne peut-on trouver aussi une indication susceptib<strong>le</strong> <strong>de</strong> renforcer<br />

c<strong>et</strong>te opinion dans <strong>le</strong> fait, relaté par <strong>de</strong>s cavaliers indigènes,<br />

qu'un <strong>de</strong>s chevaux du prophète s'appelait « Uskub » ?<br />

Il est donc vraisemblab<strong>le</strong> que la formation <strong>de</strong> la race <strong>barbe</strong><br />

actuel<strong>le</strong> date <strong>de</strong> la première invasion <strong>de</strong> l'Afrique par <strong>le</strong>s Arabes,<br />

vers l'an 700 avant Jésus-Christ.<br />

A grands traits, bros<strong>son</strong>s <strong>le</strong> portrait du <strong>cheval</strong> arabe. Les<br />

robes grises, variant du gris très clair au gris <strong>le</strong> plus foncé, <strong>son</strong>t<br />

cel<strong>le</strong>s que l'on rencontre <strong>le</strong> plus, mais ce serait une erreur do croire<br />

que tous, ou presque tous <strong>le</strong>s chevaux <strong>barbe</strong>s <strong>son</strong>t gris, ou gris<br />

très clair comme on <strong>le</strong> pense d'habitu<strong>de</strong>. Il y a aussi, parmi eux,<br />

une assez gran<strong>de</strong> quantité <strong>de</strong> chevaux bais <strong>et</strong> a<strong>le</strong>zans.<br />

En général <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> a <strong>le</strong>s musc<strong>le</strong>s très développés, conséquence<br />

du tempérament sanguin très répandu dans <strong>le</strong>s pays<br />

chauds. C<strong>et</strong>te particularité lui donne un aspect robuste <strong>et</strong> vigoureux<br />

{photo. 1).<br />

Il est fort pour sa tail<strong>le</strong> qui varie entre 1 m. 38 <strong>et</strong> 1 m. 60<br />

<strong>et</strong> dont la moyenne est <strong>de</strong> 1 m. 48.<br />

§ 2. — Son portrait comparé avec celui du <strong>cheval</strong> arabe.<br />

En examinant <strong>de</strong> plus près <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>, nous trouvons<br />

sa tête souvent longue <strong>et</strong> busquée. Ceux qui ont reçu plus <strong>de</strong><br />

sang arabe <strong>le</strong> portent fièrement si j'ose dire, sur <strong>le</strong>ur figure; ils<br />

héritent <strong>de</strong> la jolie tête fine, expressive, au front large, aux yeux<br />

grands, aux oreil<strong>le</strong>s hardies, du <strong>cheval</strong> arabe {photo. 2).<br />

L'encolure du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>, bien musclée, souvent un peu<br />

(') M. Louis Mprcier [Les hippiatres arabes. Sport Universel du 30 janvier 1925).


chargée, est courte ou moyenne; el<strong>le</strong> est ornée d'une crinière<br />

longue <strong>et</strong> abondante. Le garrot est épais, bien musclé à sa base<br />

<strong>et</strong> souvent bien sorti. Le rein est court, bien soudé, largp, r o­<br />

buste, assez souvent convexe. La croupe est large <strong>et</strong> puissamment<br />

musclée ; la queue est attachée bas <strong>et</strong> pourvue <strong>de</strong> crins<br />

très longs. Les membres indiquent la force <strong>et</strong> la solidité mais<br />

<strong>le</strong>ur conformation montre une aptitu<strong>de</strong> très restreinte aux allures<br />

rapi<strong>de</strong>s, aux gestes amp<strong>le</strong>s <strong>et</strong> étendus; la jambe est peu <strong>de</strong>scendue,<br />

<strong>le</strong> jarr<strong>et</strong> souvent clos, l'épau<strong>le</strong> droite, l'avant-bras court.<br />

Le jarr<strong>et</strong> clos e st d'ail<strong>le</strong>urs « plus disgracieux que nuisib<strong>le</strong>,, il<br />

est fréquent chez <strong>le</strong>s chevaux é<strong>le</strong>vés en pays montagneux <strong>et</strong><br />

chez <strong>le</strong>s suj<strong>et</strong>s <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> énergie » (Jaco u<strong>le</strong>t). Les articulations<br />

<strong>son</strong>t larges <strong>et</strong> soli<strong>de</strong>s, <strong>le</strong> canon est long, <strong>le</strong> tendon sec <strong>et</strong> bien<br />

détaché. En général, <strong>le</strong>s proportions <strong>son</strong>t bonnes.<br />

Le <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> se distingue n<strong>et</strong>tement du <strong>cheval</strong> arabe par<br />

ses formes plus arrondies, ses proportions moins bel<strong>le</strong>s <strong>et</strong> moins<br />

harmonieuses ; ses allures <strong>son</strong>t aussi plus raccourcies, moins rapi<strong>de</strong>s<br />

<strong>et</strong> moins brillantes, mais, par contre, <strong>le</strong> <strong>barbe</strong> est plus<br />

résistant <strong>et</strong> plus rustique. Si <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> »<strong>barbe</strong> donne l'impression<br />

<strong>de</strong> la puissance, <strong>de</strong> la robustesse, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> arabe donne<br />

cel<strong>le</strong> <strong>de</strong> l'harmonie <strong>et</strong> <strong>de</strong> la grâce tout en présentant <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s<br />

conditions <strong>de</strong> solidité <strong>et</strong> <strong>de</strong> force. Irréprochab<strong>le</strong>ment d'aplomb<br />

sur <strong>de</strong>s membres nerveux <strong>et</strong> secs, la proportion existant entre<br />

<strong>son</strong> avant-main <strong>et</strong> <strong>son</strong> arrière-main est parfaite. «Sa charpente<br />

osseuse offre <strong>le</strong>s meil<strong>le</strong>ures dispositions physiques <strong>et</strong> physiologiques<br />

<strong>et</strong> <strong>le</strong> système musculaire présente <strong>le</strong>s plus bel<strong>le</strong>s conditions<br />

<strong>de</strong> développement <strong>et</strong> d'énergie. On lui reproche <strong>son</strong> défaut<br />

<strong>de</strong> tail<strong>le</strong>, mais, dans c<strong>et</strong>te race comme dans <strong>le</strong>s autres, la<br />

tail<strong>le</strong> est en rapport avec la quantité <strong>et</strong> la qualité <strong>de</strong>s aliments.<br />

Le <strong>cheval</strong> <strong>de</strong>s contrées ari<strong>de</strong>s, rocheuses, comme <strong>le</strong> Nedj n'a<br />

que 1 m. 40 au plus, celui <strong>de</strong>s plaines riches <strong>et</strong> ferti<strong>le</strong>s <strong>de</strong> la Mésopotamie,<br />

<strong>de</strong> l'Euphrate <strong>et</strong> du Tigre, <strong>de</strong> la vallée <strong>de</strong> la Bekaha<br />

d'Antioche <strong>et</strong> <strong>de</strong> l'Oronte dans <strong>le</strong> Hauran en Syrie, atteint<br />

1 m. 58 ( 1 ). »<br />

La tête du <strong>cheval</strong> arabe est en tous points admirab<strong>le</strong>. Fière-<br />

P) Vallon.


Photo 3. — Pur-sang arabe.


Photo 4. — Chev al arabe du Hedjaz.<br />

Photo 4 bis. — Cheval arabe du Hedjaz.


ment attachée, el<strong>le</strong> décè<strong>le</strong> la vivacité, l'intelligence <strong>et</strong> la douceur;<br />

<strong>le</strong> front est large, la partie inférieure courte, <strong>le</strong>s yeux<br />

grands, à f<strong>le</strong>ur <strong>de</strong> tête, <strong>son</strong>t brillants <strong>de</strong> clarté <strong>et</strong> d'expression;<br />

<strong>le</strong>s oreil<strong>le</strong>s, p<strong>et</strong>ites, hardies <strong>et</strong> bien plantées <strong>son</strong>t très mobi<strong>le</strong>s<br />

<strong>et</strong> attentives, <strong>le</strong>s lèvres minces, <strong>le</strong>s naseaux bien ouverts <strong>et</strong> mobi<strong>le</strong>s.<br />

Son encolure bien musclée, ce qui parfois la fait paraître<br />

courte, est hardiment sortie.<br />

Le <strong>cheval</strong> arabe a la poitrine d'une bel<strong>le</strong> amp<strong>le</strong>ur, l'épau<strong>le</strong><br />

longue <strong>et</strong> oblique, <strong>le</strong> cou<strong>de</strong> bien détaché ; l'avant-bras est long,<br />

<strong>le</strong> canon court, large <strong>et</strong> soli<strong>de</strong>. Le garrot est bien sorti, sec, musclé<br />

<strong>et</strong> prolongé très en arrière. Le <strong>cheval</strong> arabe, court dans <strong>son</strong><br />

<strong>de</strong>ssus, a <strong>le</strong> rein large <strong>et</strong> bien soudé, la croups musclée, la cuisse<br />

bien dirigée longue <strong>et</strong> puissante ; la queue bien plantée est élégamment<br />

portée. « Le jarr<strong>et</strong> est irréprochab<strong>le</strong> comme forme<br />

<strong>et</strong> direction <strong>et</strong> plus beau que chez <strong>le</strong>s autres races » ( 1 ) {photo. 3,<br />

4 <strong>et</strong> 4 bis).<br />

§ 3. — Les qualités du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>.<br />

Son caractère. — Ses moyens.<br />

Les qualités du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> <strong>son</strong>t nombreuses <strong>et</strong> très appréciab<strong>le</strong>s.<br />

« C'e st <strong>le</strong> plus sobre <strong>et</strong> <strong>le</strong> plus rustique <strong>de</strong>s chevaux<br />

orientaux » (^. 11 est énergique, résistant aux misères aux privations<br />

<strong>et</strong> à toutes <strong>le</strong>s variations <strong>de</strong> température, il se tare moins<br />

vite que <strong>le</strong>s autres, il est rarement mala<strong>de</strong> <strong>et</strong> dure longtemps.<br />

Vallon <strong>le</strong> qualifie justement <strong>de</strong> « meil<strong>le</strong>ur <strong>cheval</strong> <strong>de</strong> guerre du<br />

mon<strong>de</strong> », comme <strong>le</strong> prouvent l'expérience <strong>de</strong> trente ans <strong>de</strong> guerre en<br />

Algérie, <strong>de</strong> trois ans en Grimée <strong>et</strong> en Italie, <strong>le</strong>s campagnes du<br />

Maroc <strong>et</strong> <strong>le</strong>s opérations en Macédoine <strong>et</strong> en Albanie (1914-1918).<br />

Alors qu'au début <strong>de</strong> la <strong>de</strong>rnière guerre la consommation en<br />

chevaux a été <strong>de</strong> près <strong>de</strong> 25.000 par mois ( 2 ), je crois que nous<br />

aurions pu exploiter avec avantage <strong>le</strong>s ressources <strong>cheval</strong>ines<br />

insuffisamment connues <strong>de</strong> l'Afrique du nord.<br />

(') Vallon.<br />

(i) 25.000 par mois, la première année <strong>de</strong> la guerre; 15.000 par mois <strong>le</strong>s années<br />

suivantes.


La soup<strong>le</strong>sse <strong>et</strong> l'adresse naturel<strong>le</strong>s du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> <strong>son</strong>t<br />

vraiment extraordinaires. Dans <strong>le</strong>s terrains <strong>le</strong>s plus diffici<strong>le</strong>s<br />

<strong>son</strong> calme <strong>et</strong> sa sûr<strong>et</strong>é <strong>de</strong> pied surprenants perm<strong>et</strong>tent <strong>le</strong>s escala<strong>de</strong>s<br />

rocheuses <strong>le</strong>s plus audacieuses.<br />

Dans <strong>le</strong>s régions montagneuses <strong>de</strong> l'Afrique du Nord, à travers<br />

<strong>le</strong>s plus mauvais terrains, sur <strong>de</strong>s pentes rocheuses, l'Arabe<br />

laisse marcher <strong>son</strong> <strong>cheval</strong> complètement libre sous lui, <strong>le</strong>s rênes<br />

longues. Instruit par l'expérience, il se confie à l'instinct <strong>et</strong> à<br />

l'adresse naturel<strong>le</strong> <strong>de</strong> <strong>son</strong> <strong>cheval</strong> qui se développe ainsi jusqu'à<br />

un <strong>de</strong>gré qui surprend.<br />

« Da ns <strong>le</strong>s bons chemins, tiens ton <strong>cheval</strong>;<br />

« Dans <strong>le</strong>s mauvais, tiens-<strong>le</strong> si tu veux »,<br />

conseil<strong>le</strong> un dicton arabe. Dans <strong>le</strong>s sentiers <strong>le</strong>s plus abrupts<br />

<strong>et</strong> parsemés <strong>de</strong> rocs, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>, calme, <strong>le</strong>nt, attentif, marche<br />

<strong>et</strong> semb<strong>le</strong> toujours à <strong>son</strong> aise; <strong>son</strong> pied sûr semb<strong>le</strong> s'accrodher<br />

aux rochers <strong>et</strong> s'arc-boute ferme <strong>et</strong> nerveux sur <strong>le</strong>s dal<strong>le</strong>s<br />

<strong>de</strong> pierre <strong>le</strong>s plus glissantes. Les premières fois que j'escaladais<br />

ainsi sur ces chevaux <strong>de</strong>s pentes rocheuses diffici<strong>le</strong>s, dans <strong>le</strong>s<br />

situations <strong>le</strong>s plus critiques, accroché à la crinière <strong>et</strong> tout au<br />

moins un peu inqui<strong>et</strong>, je l'avoue humb<strong>le</strong>ment, en <strong>son</strong>dant du<br />

regard la profon<strong>de</strong>ur <strong>de</strong>s ravins proches, je pensais avec gratitu<strong>de</strong><br />

que <strong>de</strong>s chevaux autres que ces p<strong>et</strong>its <strong>barbe</strong>s seraient incapab<strong>le</strong>s<br />

<strong>de</strong> se tirer d'aussi mauvais pas... Je <strong>le</strong>ur faisais confiance<br />

<strong>et</strong> je passais toujours.<br />

Le caractère du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> est aussi très particulier.<br />

Tous <strong>le</strong>s animaux entiers ont <strong>de</strong>s facultés intel<strong>le</strong>ctuel<strong>le</strong>s plus<br />

développées que ceux qui ne <strong>le</strong> <strong>son</strong>t pas; <strong>le</strong>s chevaux <strong>barbe</strong>s,<br />

qui restent presque tous entiers, ne font pas exception à la règ<strong>le</strong>.<br />

Ceci se trouve encore augmenté du fait, très judicieusement<br />

observé par <strong>le</strong> commandant Rousse<strong>le</strong>t dont nous par<strong>le</strong> <strong>le</strong> général<br />

L'Hotte, que 1'


une tel<strong>le</strong> application, une tel<strong>le</strong> bonne volonté. La rapidité <strong>de</strong>s<br />

progrès réalisés <strong>de</strong> ce fait ne m'a pas moins surpris. Je reviendrai<br />

sur c<strong>et</strong>te importante question quand je par<strong>le</strong>rai <strong>de</strong> <strong>son</strong> <strong>redressage</strong>.<br />

Certes, du fait qu'il est entier, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> est moins obéissant,<br />

moins coulant dans <strong>le</strong>s ai<strong>de</strong>s surtout que la jument ou<br />

<strong>le</strong> <strong>cheval</strong> hongre, mais infiniment moins qu'on <strong>le</strong> prétend d'habitu<strong>de</strong>.<br />

Il se dépense parfois en pure perte au début du travail,<br />

mais il est vite calmé après quelques jolis bonds <strong>de</strong> gaité, indice<br />

<strong>de</strong> bonne humeur, que l'on voit si souvent bruta<strong>le</strong>ment réprimés<br />

avec <strong>de</strong>s moyens <strong>et</strong> <strong>de</strong>s procédés aussi infernaux que stupi<strong>de</strong>s.<br />

Mais n'anticipons pas <strong>et</strong> restons dans <strong>le</strong> ca dre imposé par<br />

ce chapitre.<br />

Les chevaux <strong>barbe</strong>s se montrent très doci<strong>le</strong>s <strong>et</strong> doux avec<br />

'homme qui pourtant, <strong>le</strong> plus souvent, <strong>le</strong> mérite bien peu...<br />

Privé <strong>de</strong> méchanc<strong>et</strong>é ou <strong>de</strong> rancune, <strong>le</strong> <strong>barbe</strong> s'attache beaucoup<br />

à <strong>son</strong> cavalier, à celui qui <strong>le</strong> soigne, ne <strong>le</strong> brutalise pas <strong>et</strong><br />

<strong>le</strong> caresse un peu. Il suit <strong>son</strong> cavalier comme un chien fidè<strong>le</strong>,<br />

vient à l'appel <strong>de</strong> la voix ; sa douceur <strong>et</strong> sa bonté n'ont d'éga<strong>le</strong>s<br />

que sa bonne volonté <strong>et</strong> sa résignation. Il est aussi peu impressionnab<strong>le</strong><br />

<strong>et</strong> sa clémence est infinie. Il est bon, trop bon même;<br />

souvent, je serais bien content <strong>de</strong> <strong>le</strong> voir plus méchant.<br />

Pour compléter la présentation <strong>de</strong> l'ami dont nous allons<br />

nous occuper, il me reste à par<strong>le</strong>r <strong>de</strong> ses moyens. Je crois que<br />

l'on considère trop en France <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> comme un « lapin<br />

à rou<strong>le</strong>ttes ». On <strong>le</strong> c roit sans moyens, d'une médiocre va<strong>le</strong>ur<br />

<strong>et</strong> peu intéressant. Il n'en est rien. Je ne saurais <strong>le</strong> proclamer<br />

trop haut.<br />

Si <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> n'est pas taillé pour la vitesse, il possè<strong>de</strong><br />

par contre <strong>de</strong>s qualités <strong>de</strong> fond extraordinaires. Tous <strong>le</strong>s cavaliers<br />

qui ont été en Afrique ont entendu par<strong>le</strong>r <strong>de</strong> ces fameuses<br />

courses <strong>de</strong> chevaux du pays <strong>de</strong>s Hamyanes (sud <strong>de</strong> Méchéria)<br />

qui se disputent sur <strong>de</strong>s distances <strong>de</strong> 30 à 40 kilomètres.<br />

Au lieu <strong>de</strong> chercher à développer la vitesse chez ces chevaux<br />

qui ne présentent pour cela aucune aptitu<strong>de</strong>, on <strong>de</strong>vrait, à mon<br />

sens, développer <strong>le</strong> fond qu'ils possè<strong>de</strong>nt naturel<strong>le</strong>ment. Ce serait<br />

autrement plus logique <strong>et</strong> plus intéressant.


Dans <strong>le</strong>s steep<strong>le</strong>s <strong>de</strong> « série bis », <strong>barbe</strong> s, arabes, arabe-<strong>barbe</strong>s<br />

<strong>et</strong> anglo-<strong>barbe</strong>s figurent ensemb<strong>le</strong> ; quand je dis « figu rent ensemb<strong>le</strong><br />

» c'est une façon <strong>de</strong> m'exprimer inexacte car ils ne figurent<br />

ensemb<strong>le</strong> qu'au départ... Les arrivées, en eff<strong>et</strong>, <strong>son</strong>t <strong>le</strong> plus<br />

souvent ridicu<strong>le</strong>ment échelonnées. Sans surprise, sans effort <strong>et</strong><br />

sans mérite, sans besoin non plus d'une monte savante, <strong>le</strong>s anglo<strong>barbe</strong>s<br />

« se promènent » <strong>de</strong>vant <strong>le</strong>s autres malgré toutes <strong>le</strong>s surcharges.<br />

Ils galopent bien au-<strong>de</strong>ssus. Étant donné <strong>le</strong>s obstac<strong>le</strong>sjoujoux<br />

qui essayent <strong>de</strong> donner un peu <strong>de</strong> relief aux pistes <strong>de</strong><br />

steep<strong>le</strong>s <strong>de</strong> la plupart <strong>de</strong>s sociétés, <strong>le</strong> plus mauvais anglo-<strong>barbe</strong><br />

pas entraîné est capab<strong>le</strong> <strong>de</strong> battre dans un canter <strong>le</strong> plus vite<br />

<strong>de</strong>s <strong>barbe</strong>s. Bien souvent j'ai comparé ces courses courues d'avance<br />

à un 110 mètres haies où l'on m<strong>et</strong>trait en compétition<br />

un athlète <strong>et</strong> un bébé.<br />

Par contre, dans <strong>de</strong>s cross-countries, même très longs, semés<br />

<strong>de</strong> gros obstac<strong>le</strong>s, s'ils ne <strong>son</strong>t pas mis hors <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur train, <strong>le</strong>s<br />

<strong>barbe</strong>s <strong>son</strong>t dans <strong>le</strong>ur élément. Au championnat du <strong>cheval</strong> d'armes<br />

<strong>de</strong> l'Afrique du Nord j'ai eu l'occasion <strong>de</strong> faire, avec un<br />

p<strong>et</strong>it <strong>barbe</strong> très ordinaire, 25 kilomètres sur route au galop <strong>de</strong><br />

bout en bout un quart d'heure après avoir fait un steep<strong>le</strong> <strong>de</strong><br />

3.500 mètres, <strong>et</strong> <strong>le</strong> <strong>le</strong>n<strong>de</strong>main un cross <strong>de</strong> 15 kilomètres, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

s'appuyant ferme jusqu'au bout.<br />

Voilà « <strong>le</strong> travail » <strong>de</strong>s <strong>barbe</strong>s. Courir <strong>de</strong>s épreuves <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te nature<br />

avec ces bons p<strong>et</strong>its chevaux dont <strong>le</strong> coeur, <strong>le</strong> fond <strong>et</strong> l'énergie<br />

étonnent, est un sérieux plaisir.<br />

Les <strong>barbe</strong>s ne galoperont jamais vite. Dans l'intérêt <strong>de</strong> la<br />

race il faudrait réduire <strong>le</strong>s steep<strong>le</strong>s (<strong>le</strong>s supprimer même vaudrait<br />

encore mieux) multiplier <strong>le</strong>s cross, organiser <strong>de</strong> longs parcours<br />

à travers pays. Cavalier <strong>et</strong> <strong>cheval</strong> y trouveraient <strong>le</strong>ur<br />

compte <strong>et</strong> seraient plus heureux.<br />

§ 4. — Le <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> ne saute pas.<br />

Pour l'obstac<strong>le</strong>, la tail<strong>le</strong> du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> parfois p<strong>et</strong>ite est<br />

largement compensée par une énergie remarquab<strong>le</strong> qui actionne<br />

une musculature puissante. Je n'hésite pas à dire que beaucoup<br />

<strong>de</strong> chevaux <strong>barbe</strong>s possè<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> gros moyens <strong>de</strong> saut. Ces moyens


— 9 —<br />

<strong>son</strong>t d'ail<strong>le</strong>urs très peu connus <strong>et</strong> encore plus rarement exploités.<br />

Je ne cache pas avoir été fort surpris en voyant ces p<strong>et</strong>its<br />

chevaux sauter, en se jouant, <strong>de</strong>s obstac<strong>le</strong>s <strong>de</strong> 1 m. 20 <strong>et</strong> 1 m. 30.<br />

La gran<strong>de</strong> majorité <strong>de</strong>s chevaux <strong>barbe</strong>s possè<strong>de</strong> certainement<br />

<strong>le</strong>s moyens <strong>de</strong> sauter c<strong>et</strong>te hauteur. Seu<strong>le</strong>ment, si l'on veut en<br />

faire <strong>de</strong>s sauteurs, il faut <strong>le</strong>s connaître <strong>et</strong> procé<strong>de</strong>r avec logique.<br />

Avant <strong>de</strong> <strong>le</strong>s m<strong>et</strong>tre à l'obstac<strong>le</strong> il faut commencer par <strong>le</strong>s<br />

redresser, <strong>le</strong>ur donner un équilibre convenab<strong>le</strong>, <strong>le</strong>ur rendre <strong>le</strong><br />

perçant <strong>et</strong> l'impulsion qu'ils ont perdus, <strong>le</strong>ur donner une confiance<br />

absolue dans la main qu'ils ont appris à craindre, faire<br />

jouer, rendre mobi<strong>le</strong> <strong>le</strong>ur balancier qui semb<strong>le</strong> paralysé ; ils<br />

n'osent pas l'allonger, ils ne savent pas s'en servir. C'est là beaucoup<br />

<strong>de</strong> travail, me dirsz-vous. Mais, <strong>de</strong> qui est-ce la faute ? Du<br />

<strong>cheval</strong>? Que non pas ! Nous <strong>le</strong> verrons bien tout à l'heure.<br />

Quand ces différents buts seront atteints, alors, <strong>et</strong> alors seu<strong>le</strong>ment,<br />

on pourra apprendre au <strong>cheval</strong> à sauter. « Le temps <strong>de</strong><br />

la récolte » <strong>et</strong> <strong>de</strong>s satisfactions arrivera bien vite. On sera stupéfait<br />

<strong>de</strong>s résultats atteints <strong>et</strong> <strong>de</strong>s progrès rapi<strong>de</strong>s qui perm<strong>et</strong>tront<br />

à ces sauteurs puissants <strong>et</strong> bondissants <strong>de</strong> se mesurer avec<br />

n'importe quel <strong>cheval</strong> sur n'importe quel obstac<strong>le</strong>.<br />

J'ai vu <strong>de</strong>s chevaux <strong>barbe</strong>s, qui n'étaient pas <strong>de</strong>s phénomènes,<br />

sauter très correctement <strong>de</strong>s obstac<strong>le</strong>s <strong>de</strong> 1 m. 50 à 1 m. 60.<br />

Je ne veux pas dire que tous <strong>le</strong>s chevaux <strong>barbe</strong>s peuvent franchir<br />

<strong>de</strong> tels obstac<strong>le</strong>s, mais je ne crains pas d'affirmer que, comparativement<br />

à la tail<strong>le</strong> <strong>de</strong>s chevaux français <strong>et</strong> toute proportion<br />

gardée, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> a <strong>de</strong>s moyens <strong>de</strong> saut supérieurs<br />

à la plupart <strong>de</strong>s chevaux français que l'on trouve dans nos régiments,<br />

<strong>et</strong> ce, à cause d'une énergie <strong>et</strong> d'une musculature plus<br />

développées que chez <strong>le</strong>s autres races. Je suis sûr <strong>de</strong> faire sourire<br />

beaucoup do mes <strong>le</strong>cteurs, cependant mon idée est très n<strong>et</strong>te<br />

à ce suj<strong>et</strong>; el<strong>le</strong> a <strong>de</strong> plus l'avantage d'avoir une autre base qu'une<br />

simp<strong>le</strong> appréciation superficiel<strong>le</strong>.<br />

Beaucoup <strong>de</strong> chevaux <strong>barbe</strong>s <strong>de</strong> 1 m. 45 <strong>son</strong>t capab<strong>le</strong>s, une<br />

fois redressés, <strong>de</strong> sauter <strong>le</strong>ur hauteur. Combien y a-t-il <strong>de</strong> chevaux<br />

français <strong>et</strong> autres qui peuvent en faire autant ? Pas beaucoup,<br />

je pense, <strong>et</strong> jusqu'à preuve du contraire je continuerai<br />

à penser <strong>de</strong> la sorte.


— 10 —<br />

Que mes camara<strong>de</strong>s qui auront l'honneur <strong>et</strong> <strong>le</strong> plaisir <strong>de</strong> compter<br />

à l'armés d'Afrique ne voient donc dans c<strong>et</strong>te « scie » trè s<br />

répandue : «Le <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> ne saute pas» qu'une excuse commo<strong>de</strong><br />

pour ceux qui la profèrent, <strong>et</strong> qu'ils traduisent <strong>le</strong> plus<br />

souvent ce dicton arabe par ceci : « Je ne veux pas sauter avec<br />

un <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> » ou plus brièvement même : « Je ne veux pas<br />

sauter ».<br />

Est-il besoin <strong>de</strong> prouver que <strong>le</strong> « ph énomène » n 'est pas <strong>le</strong><br />

<strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> qui saute, mais <strong>le</strong> « ca valier <strong>barbe</strong> » q ui saute?<br />

Nous ne serons pas en peine.<br />

M. Louis d'Avrincourt, dans <strong>son</strong> livre très instructif <strong>et</strong> fort<br />

intéressant Dressage en liberté du <strong>cheval</strong> d'obstac<strong>le</strong>, paru en<br />

1913, consacre quelques trop courtes pages aux <strong>barbe</strong>s. Invité<br />

à El Madher, près <strong>de</strong> Gonstantine, par M. Bedou<strong>et</strong>, administrateur<br />

honoraire <strong>de</strong> la province <strong>de</strong> Gonstantine, prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong><br />

la Société d'encouragement <strong>de</strong>s courses en Algérie, M. d'Havrincourt<br />

eut la « b onne fortune » d 'étudier <strong>de</strong> près <strong>le</strong>s races<br />

<strong>barbe</strong>s.<br />

« Il me fit voir à l'œuvre, écrit M. d'Havrincourt, c'est-à-dire<br />

en <strong>le</strong>ur faisant passer <strong>de</strong>s formidab<strong>le</strong>s obstac<strong>le</strong>s, plusieurs <strong>de</strong><br />

ses élèves qui firent mon admiration.<br />

« D ésirant faire connaître <strong>et</strong> apprécier en France <strong>le</strong>s <strong>barbe</strong>s,<br />

je me rendis acquéreur du fameux Messaoud, à qui M. Bedou<strong>et</strong><br />

avait fait gagner toutes <strong>le</strong>s coupes <strong>de</strong> la région, malgré sa mauvaise<br />

caboche <strong>et</strong> sa gueu<strong>le</strong> endiablée {photo. 5).<br />

« Messaoud était un p<strong>et</strong>it <strong>cheval</strong> <strong>de</strong> 1 m. 57, fantastique comme<br />

sauteur <strong>de</strong> volée. Je n'ai jamais rencontré un Irlandais à pouvoir<br />

l'approcher pour un saut haut <strong>et</strong> large en même temps.<br />

« Messaoud, monté par <strong>le</strong> capitaine Grousse, gagna successivement<br />

la Goupe <strong>de</strong> Paris <strong>et</strong> <strong>le</strong> grand prix <strong>de</strong> Biarritz, prouvant<br />

qu'il était aussi bon <strong>et</strong> adroit sur un parcours <strong>de</strong> chasse <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />

grosses banqu<strong>et</strong>tes, que sur <strong>le</strong>s obstac<strong>le</strong>s artificiels <strong>de</strong> la Société<br />

hippique française.<br />

« Messaou d eût pu sauter faci<strong>le</strong>ment, monté, 2 mètres <strong>de</strong> hauteur<br />

avec 90 kilos sur <strong>le</strong>s reins.<br />

« Comme autres bons <strong>barbe</strong>s provenant <strong>de</strong> l'écurie <strong>de</strong><br />

M. Bedou<strong>et</strong>, j'ai en ce moment Saharaoui, propre frère <strong>de</strong> Mes-


Photo 5. — Messaoud<br />

(Extrait <strong>de</strong> Dressage en liberté du <strong>cheval</strong> d'obstac<strong>le</strong>, par Louis d'Avrincourt).<br />

«âiisaûELz:<br />

Photo 6. — Zanziy monté par M. <strong>de</strong> Laissardière Extrait du Sport Universel illustré).


— 11 —<br />

saoud, moins puissant, mais excel<strong>le</strong>nt aussi <strong>et</strong> gagnant <strong>de</strong> nombreuses<br />

coupes.<br />

« Pui s Mordjen, un beau grand <strong>cheval</strong>, qui remporta éga<strong>le</strong>ment<br />

plusieurs coupes <strong>et</strong> un championnat en hauteur à Angoulême.<br />

« I n Challah, appartenant à M. <strong>de</strong> Carcara<strong>de</strong>c, cueillit, en<br />

une seu<strong>le</strong> sai<strong>son</strong> 4.000 francs <strong>de</strong> prix sans sortir <strong>de</strong> Br<strong>et</strong>agne.<br />

Son propriétaire prétend qu'il peut franchir aisément 2 mètres<br />

monté.<br />

« Pour compléter l'éloge <strong>de</strong> ces excel<strong>le</strong>nts p<strong>et</strong>its chevaux trop<br />

méconnus, nous rappel<strong>le</strong>rons la très jolie performance accomplie<br />

par eux au concours <strong>de</strong> Nantes en 1909. Les trois premiers<br />

prix <strong>de</strong>s trois gran<strong>de</strong>s épreuves furent brillamment en<strong>le</strong>vés au<br />

train par <strong>de</strong>s <strong>barbe</strong>s :<br />

« L'Om nium par In-Challah;<br />

« Les Dames par Mordjen;<br />

« La Coupe par Mordjen.<br />

« Il court sur <strong>le</strong>s <strong>barbe</strong>s <strong>et</strong> sur <strong>le</strong>s chevaux en général une légen<strong>de</strong><br />

absur<strong>de</strong> que nous voudrions bien détruire ; à savoir qu'entiers<br />

ils <strong>son</strong>t odieux <strong>de</strong> caractère, ce qui est parfaitement exact ;<br />

mais que. castrés, ils ne va<strong>le</strong>nt plus rien, ce qui est absolument<br />

faux. »<br />

C<strong>et</strong>te année même ( 1 ), nous avons vu <strong>de</strong>s chevaux <strong>barbe</strong>s<br />

figurer toujours très honorab<strong>le</strong>ment dans <strong>de</strong>s concours <strong>de</strong><br />

grands chevaux <strong>et</strong> se classer, parfois, <strong>de</strong>vant <strong>de</strong> gros sauteurs<br />

spécialistes qui cueil<strong>le</strong>nt <strong>de</strong>s lauriers dans tous <strong>le</strong>s coins <strong>de</strong> la<br />

France.<br />

J'ai plaisir à citer <strong>le</strong> t curiculum vitse » d'u n <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> que<br />

mon camara<strong>de</strong> <strong>le</strong> lieutenant Roblin a mis en concours. Avec<br />

sa permission, je citerai quelques phrases d'une <strong>le</strong>ttre où il me<br />

par<strong>le</strong> avec joie <strong>de</strong> <strong>son</strong> <strong>cheval</strong>.<br />

« J'a i pris <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> en Algérie, m'écrit-il, trois semaines avant<br />

<strong>le</strong> départ pour l'A. F. R. Il avait six ans <strong>et</strong> avait été ach<strong>et</strong>é<br />

1.600 francs trois mois plus tôt à Géryvil<strong>le</strong>, sans origine connue.<br />

Il était maigre <strong>et</strong> trottinait dans <strong>le</strong> rang, si bien que per<strong>son</strong>ne<br />

M 1 924.


— 12 —<br />

n'en voulait. J'ai été attiré vers lui par la force <strong>de</strong> ses articulations<br />

vraiment étonnante. En un mois il était très haut d'état<br />

<strong>et</strong> ne trottinait plus; dès l'arrivée à Trêves je <strong>le</strong> dressai à l'obstac<strong>le</strong><br />

sur une haie eb un e barre. »<br />

Voici, rapi<strong>de</strong>ment exposé, <strong>son</strong> palmarès (sans compter <strong>le</strong>s<br />

îlols) :<br />

May enee. — 5 e <strong>et</strong> 6 e prix, « c 'était ses premiers parcours <strong>et</strong><br />

il était un peu fou, étonné par la nouveauté du travail ».<br />

Dusseldorf. — Coupe interalliée. — 7 e prix, « avec un postérieur,<br />

<strong>de</strong>rrière 6 parcours sans faute ».<br />

Cologne. — A la suite d'un parcours <strong>de</strong> chasse, léger effort<br />

<strong>de</strong> tendon. Quelques douches, enveloppements chauds <strong>et</strong> <strong>le</strong><br />

<strong>le</strong>n<strong>de</strong>main il se classe 5 e dans la puissance où il saute <strong>de</strong>s obstac<strong>le</strong>s<br />

<strong>de</strong> 1 m. 40 à 1 m. 60.<br />

Trêves. — 1 er prix (concours régional) « bo iteux <strong>de</strong> nouveau,<br />

quelques jours d'eau blanche <strong>et</strong> je reprends <strong>son</strong> entraînement<br />

en vue <strong>de</strong> Cob<strong>le</strong>nce ».<br />

«Coupe interalliée <strong>de</strong> Cob<strong>le</strong>n ce.— 1 er prix. Puis on doit lui m<strong>et</strong>tre<br />

<strong>le</strong> feu, trois mois à l'écurie, puis il va à Paris avec trois semaines<br />

d'entraînement, 3 épreuves. Essai, Puissance, Coupe, au<br />

total 3 antérieurs <strong>et</strong> un postérieur dans l'eau.<br />

Et ses succès continuent dans <strong>de</strong>s parcours <strong>de</strong> chasse ou <strong>de</strong>s<br />

parcours <strong>de</strong> concours intéralliés.<br />

Mayence sur 170 concurrents : 22 e ;<br />

Mayence sur 120 concurrents : 12°.<br />

4 e coupe interalliée <strong>de</strong> Bonn.<br />

l Gr prix, coupe interalliée <strong>de</strong> Trêves, <strong>et</strong>c...<br />

« Ce qui frappe surtout, m'écrit mon camara<strong>de</strong> Roblin, c'est<br />

<strong>le</strong> calme <strong>et</strong> <strong>le</strong> coulant du <strong>cheval</strong> sur <strong>le</strong> parcours, qualités qu'il<br />

avait acquises dès <strong>son</strong> 3 e ou 4 e parcours. Il ne s'étonne d'aucun<br />

obstac<strong>le</strong> <strong>et</strong> est très adroit. »<br />

M. <strong>le</strong> capitaine <strong>de</strong> Laissardière a bien voulu m'envoyer <strong>son</strong><br />

opinion sur un <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> Zanzi qu'il a monté plusieurs fois<br />

en 1925.<br />

Il m'est très précieux, pour la question que nous traitons en<br />

ce moment, <strong>de</strong> possé<strong>de</strong>r l'avis du capitaine <strong>de</strong> Laissardière dont


— isla<br />

science <strong>et</strong> l'expérience <strong>son</strong>t reconnues <strong>de</strong> tous. C'est avec reconnaissance<br />

que je m'y appuie en <strong>le</strong> citant ici.<br />

Zanzi est un <strong>barbe</strong> <strong>de</strong> Gonstantine ach<strong>et</strong>é c<strong>et</strong>te année à<br />

Alger {photo. 6 ).<br />

« Il est d'un caractère doux, pas peureux, très faci<strong>le</strong> à monter.<br />

Il a <strong>de</strong>ux bonnes allures, <strong>le</strong> trot <strong>et</strong> <strong>le</strong> galop ; on peut même dire<br />

que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> galope ; si on lui laisse prendre un appui sur la<br />

main, il développe <strong>de</strong> très bel<strong>le</strong>s foulées; par contre la pas est<br />

<strong>le</strong>nt <strong>et</strong> raccourci.<br />

« L e <strong>cheval</strong> saute, mais il n'est pas spécia<strong>le</strong>ment bâti pour<br />

<strong>le</strong> saut ; ses qualités se <strong>son</strong>t découvertes <strong>et</strong> développées par <strong>le</strong><br />

travail. J'ai eu <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> un mois à peine avant <strong>le</strong> concours <strong>de</strong><br />

Paris <strong>et</strong> je l'y ai présenté. Il a commencé par rétiver dans <strong>le</strong>s<br />

<strong>de</strong>ux premières épreuves sur <strong>de</strong>s obstac<strong>le</strong>s qu'il ne connaissait<br />

pas, mais il s'est vite familiarisé avec tous <strong>le</strong>s genres d'obstac<strong>le</strong>s.<br />

Il passe très couramment <strong>de</strong>s obstac<strong>le</strong>s <strong>de</strong> 1 m. 20 à 1 m. 40<br />

<strong>et</strong> même <strong>de</strong> 1 m. 50. Je lui ai fait sauter monté toutefois 1 m. 60<br />

mesuré — mais c'est là, je crois, <strong>son</strong> maximum.<br />

« Za nzi en somme est un très bon <strong>cheval</strong> <strong>de</strong> concours que<br />

j'ai emmené à Bruxel<strong>le</strong>s <strong>et</strong> à Londres où il a très bien figuré. 11<br />

a 11 ans, a malheureusement été dressé en haute éco<strong>le</strong> <strong>et</strong> ses<br />

jarr<strong>et</strong>s s'en ressentent ; j'estime, étant donné ce qu'il a fait c<strong>et</strong>te<br />

année pour sa première sortie en concours, que si j'avais eu <strong>le</strong><br />

<strong>cheval</strong> à 6 ans, c'eût été un crack. »<br />

A Paris, il gagne un 12° <strong>et</strong> <strong>de</strong>ux 4° prix;<br />

A Bruxel<strong>le</strong>s, un 5 e ;<br />

A Namur, 3 e <strong>et</strong> 4 e prix ;<br />

Au Touqu<strong>et</strong>, il gagne trois premiers prix, dont la Puissance,<br />

un 10 e <strong>et</strong> un 13 e prix;<br />

A Londres (coupe canadienne) 3 e ; sur 93 chevaux présents ;<br />

A Béthune il gagne un 4 e <strong>et</strong> un 3 e prix.<br />

En 1925, au concours hippique <strong>de</strong> Paris Zanzi est classé 2 e<br />

dans <strong>le</strong> prix La Haye Jousselin.<br />

3 e dans <strong>le</strong> prix Juigné (Puissance) avec un dérobé, mais sans<br />

faute sur <strong>de</strong>s obstac<strong>le</strong>s <strong>de</strong> 1 m. 50;<br />

3 e dans <strong>le</strong> prix Mornay. « auquel Za nzi M. <strong>de</strong> Lassardière,


14 —<br />

en artiste consommé, a fait faire <strong>de</strong>s sauts impressionnants »,<br />

écrit « Florim ond » dans <strong>le</strong> Sport Universel.<br />

Dans la puissance progressive Zanzi parvient à passer sans<br />

faute <strong>le</strong>s quatre obstac<strong>le</strong>s <strong>de</strong> 1 m. 30, 1 m. 45, 1 m. 60 <strong>et</strong> 1 m.70,<br />

« On admire surtout, <strong>le</strong> sty<strong>le</strong> <strong>de</strong> Zanzi écrit « F lorimond »<br />

dans <strong>le</strong> compte rendu <strong>de</strong> l'épreuve [Sport Univ ersel);<br />

4 e dans la Coupe du Touqu<strong>et</strong>, <strong>et</strong>c...<br />

Les photographies n 0 7 <strong>et</strong> 8 présentent un p<strong>et</strong>it <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong><br />

(1 m. 52) Loyauté, 8 ans, sans aucune origine, un <strong>barbe</strong> tout<br />

ce qu'il y a <strong>de</strong> plus


Photo 7. — Loyauté, <strong>barbe</strong>.<br />

Photo 8. — Loyauté, Vichy, 1924.


— 15 —<br />

4 e dans la Puissance, après barrage, ayant touché bien légèrement<br />

une harre d'appel (obstac<strong>le</strong>s <strong>de</strong> 1 m. 50 à 1 m. 60).<br />

Des phénomènes tous ces chevaux ? Allo ns donc ! Journel<strong>le</strong>ment<br />

je vois sauter <strong>de</strong>s chevaux qui ont <strong>de</strong>s moyens <strong>de</strong> saut<br />

analogues <strong>et</strong> même supérieurs. C'est 50 Loyauté qu'on trouverait<br />

dans un régiment <strong>de</strong> cava<strong>le</strong>rie indigène. Seu<strong>le</strong>ment, avant<br />

tout, ils <strong>son</strong>t à redresser, <strong>et</strong> il y a du travail. Pauvres bêtes !<br />

Les moyens <strong>de</strong> saut vraiment surprenants du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong><br />

<strong>son</strong>t généra<strong>le</strong>ment ignorés. En voici quelques rai<strong>son</strong>s :<br />

1° L'absence d'obstac<strong>le</strong>s naturels dans <strong>le</strong> pays. Les Arabes<br />

suivent <strong>de</strong>s pistes <strong>et</strong> <strong>de</strong>s sentiers tracés <strong>le</strong> plus souvent à travers<br />

<strong>de</strong>s roches ou <strong>de</strong>s cailloux, ils s'en écartent rarement.<br />

2° Les Arabes ne sautent pas; ils n'en voient pas l'utilité.<br />

Ils aimeront mieux perdre une <strong>de</strong>mi-heure pour contourner un<br />

obstac<strong>le</strong> que <strong>de</strong> faire un effort pour <strong>le</strong> franchir ; <strong>le</strong> temps ne<br />

compte pas pour eux. D'ail<strong>le</strong>urs, avec <strong>le</strong>s moyens qu'ils emploient<br />

ils font tout aussi bien... Et puis, il faudrait dresser <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>,<br />

ce qui donnerait <strong>de</strong> la peine <strong>et</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rait une persévérance,<br />

un esprit <strong>de</strong> suite <strong>et</strong> <strong>de</strong> continuité dont l'Arabe est absolument<br />

incapab<strong>le</strong>.<br />

3° L'absence presque complète <strong>de</strong> concours hippiques en<br />

Afrique du Nord n'incite pas <strong>le</strong>s officiers à rechercher <strong>et</strong> à développer<br />

<strong>le</strong>s moyens <strong>de</strong> saut naturels <strong>de</strong> ces chevaux. C'est dommage.<br />

Un officier qu i s'occupe <strong>de</strong> concours hippique en Algérie peut<br />

tout juste monter <strong>de</strong>ux ou trois concours par an (1922, 3; 1923,<br />

2 ; <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux à Alger). Les sociétés <strong>de</strong> courses loca<strong>le</strong>s, dont la situation<br />

financière n'est généra<strong>le</strong>ment pas brillante, ne visent que<br />

<strong>de</strong>s éprouves qui rapportent, <strong>et</strong> comme <strong>le</strong> concours hippique ne<br />

fait pas fonctionner <strong>le</strong> pari mutuel, el<strong>le</strong>s n'en organisent pas. Il<br />

est très regr<strong>et</strong>tab<strong>le</strong> qu'el<strong>le</strong>s ne soient pas orientées <strong>et</strong> poussées<br />

même un peu, au besoin, dans c<strong>et</strong>te voie.<br />

Avant la guerre <strong>le</strong>s concours hippiques n'existaient pour ainsi<br />

dire pas en Afrique. Depuis la guerre, quelques timi<strong>de</strong>s tentatives<br />

ont été faites par <strong>de</strong>s sociétés puissantes à Alger <strong>et</strong> à Oran<br />

notamment. Alger fait actuel<strong>le</strong>ment un effort méritoire dans


— <strong>le</strong>ce<br />

sens. J'ai dit timi<strong>de</strong>s tentatives, car <strong>le</strong>s obstac<strong>le</strong>s <strong>son</strong>t <strong>le</strong> plus<br />

souvent insignifiants. Ceci s'explique d'ail<strong>le</strong>urs fort bien puisque<br />

tout <strong>le</strong> mon<strong>de</strong> affirme ici que « <strong>le</strong> <strong>barbe</strong> ne saute pas ».<br />

La perpétuel<strong>le</strong> répétition d'un tel aphorisme finit par <strong>le</strong> faire<br />

adm<strong>et</strong>tre par beaucoup comme une vérité indiscutab<strong>le</strong>. Pour<br />

délimiter la part <strong>de</strong> vérité que peut contenir ce rabâchage obstiné,<br />

je conseil<strong>le</strong> à mes camara<strong>de</strong>s futurs Nord-Africains d'essayer <strong>et</strong><br />

<strong>de</strong> ne pas prêter trop <strong>de</strong> crédit à ce dicton, ainsi qu'à bien d'autres<br />

qu'ils entendront. « Le vrai moyen <strong>de</strong> se gar<strong>de</strong>r du rabâchage,<br />

a dit, je crois, Buffon, c'est d'oublier <strong>le</strong> passé pour ne<br />

s'occuper que du présent <strong>et</strong> <strong>de</strong> l'avenir. »<br />

Quand <strong>le</strong>s concours hippiques seront nombreux en Afrique,<br />

alors, peut-être, <strong>le</strong>s aptitu<strong>de</strong>s pour l'obstac<strong>le</strong> que j'attribue<br />

aux chevaux <strong>barbe</strong>s sauteront aux yeux <strong>de</strong> beaucoup si ce n'est<br />

<strong>de</strong> tous.<br />

'


CHAPITRE II<br />

la population <strong>cheval</strong>ine <strong>de</strong> l'afrique du nord <strong>et</strong> l'é<strong>le</strong>vage<br />

du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong><br />

§ 1 . La population <strong>cheval</strong>ine autrefois, aujourd'hui, — Causes <strong>de</strong> dégénérescence.<br />

— § 2. L'é<strong>le</strong>vage en Afrique du Nord. — § 3. Comment est é<strong>le</strong>va<br />

<strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>. — Son utilisation.<br />

§ 1 . — La population <strong>cheval</strong>ine autrefois, aujourd'hui. — Causes<br />

<strong>de</strong> dégénérescence.<br />

Le général Daumas, dans <strong>son</strong> livre très intéressant Les chevaux<br />

du Sahara, dépeint l'é<strong>le</strong>vage du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> tel qu'il<br />

existait à <strong>son</strong> époque, entre 1830 <strong>et</strong> 1860. C<strong>et</strong>te époque était<br />

cel<strong>le</strong> <strong>de</strong> la sp<strong>le</strong>n<strong>de</strong>ur <strong>et</strong> <strong>de</strong> la prospérité musulmanes, cel<strong>le</strong> qui<br />

justifiait bien la paro<strong>le</strong> du Prophète : « De vra ies richesses <strong>son</strong>t<br />

une nob<strong>le</strong> <strong>et</strong> courageuse race <strong>de</strong> chevaux »; cel<strong>le</strong> aussi où étaient<br />

écoutés <strong>le</strong>s préceptes <strong>de</strong> la religion <strong>de</strong> Mohamed qui recommandaient<br />

aux croyants l'amour du <strong>cheval</strong> <strong>et</strong> <strong>le</strong>s soins du dressage<br />

« fai ts pour donner au <strong>cheval</strong> un corps <strong>de</strong> fer <strong>et</strong> une âme <strong>de</strong><br />

feu ( 1 ) ».<br />

Il ne faudrait pas croire que l'exposé <strong>et</strong> <strong>le</strong>s <strong>de</strong>scriptions que<br />

contiennent <strong>le</strong>s livres du général Daumas <strong>son</strong>t encore vrais<br />

aujourd'hui.<br />

Autrefois, <strong>le</strong>s moeurs guerrières <strong>de</strong>s Arabes pouvaient se donner<br />

libre cours. Leur vie se passait à combattre soit pour résister<br />

à l'envahisseur, soit pour rég<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s querel<strong>le</strong>s inépuisab<strong>le</strong>s,<br />

<strong>le</strong>s rivalités incessantes <strong>de</strong>s tribus entre el<strong>le</strong>s. Dans ces luttes,<br />

<strong>le</strong> succès dépendait <strong>le</strong> plus souvent <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong>s chevaux.<br />

(') I On <strong>de</strong>vine la rai<strong>son</strong> profon<strong>de</strong> <strong>de</strong> ces prescriptions mil<strong>le</strong> fois répétées sous <strong>de</strong>s<br />

formes à pei ne différentes « <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te nécessité qui s'impose à tout Musulman qui<br />

en a <strong>le</strong>s moyens d'é<strong>le</strong>ver un ou <strong>de</strong>s chevaux dans la voie <strong>de</strong> Dieu », c'est à-dire en<br />

vue <strong>de</strong> la guerre sainte... La population <strong>cheval</strong>ine était encore extrêmement restreinte<br />

du temps du Prophète, au vu 6 sièc<strong>le</strong> <strong>de</strong> notre ère. Et <strong>le</strong> Prophète partant à<br />

la conquête du mon<strong>de</strong>, ne pouvait que souhaiter voir augmenter rapi<strong>de</strong>ment sa cava<strong>le</strong>rie,<br />

seu<strong>le</strong> reine <strong>de</strong>s batail<strong>le</strong>s, alors, »<br />

M, Louis Mercier (Les Hippialres arabes], Sport universel du 30 janvier 1925.<br />

LE CHEVAL BARBE 2


— 18 —<br />

L'Arabe avait aussi besoin, à c<strong>et</strong>te époque, d'un bon <strong>cheval</strong><br />

vite <strong>et</strong> résistant pour parer aux nombreuses « razzias », po ur défendre<br />

ses troupeaux, pour lutter <strong>de</strong> vitesse avec <strong>le</strong>s ravisseurs,<br />

pour tenter <strong>de</strong> reprendre <strong>son</strong> bien, ou même encore pour chasser<br />

lorsque la chasse était l'unique <strong>et</strong> primitive industrie <strong>de</strong> l'Arabe.<br />

Alors, l'Arabe aimait <strong>son</strong> <strong>cheval</strong>. Celui-ci était véritab<strong>le</strong>ment<br />

<strong>le</strong> compagnon <strong>de</strong> sa vie aventureuse ; il partageait ses périls<br />

comme aussi ses r<strong>et</strong>ours glorieux; il était soigné, récompensé,<br />

aimé, bien nourri, parce que, d'un moment à l'autre, <strong>son</strong> maître<br />

pouvait avoir besoin <strong>de</strong> lui <strong>et</strong> <strong>de</strong> lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r beaucoup.<br />

La vie <strong>de</strong> l'Arabe, sa famil<strong>le</strong>, <strong>son</strong> honneur, ses biens étaient <strong>le</strong><br />

plus souvent à la merci <strong>de</strong>s jambes <strong>et</strong> <strong>de</strong>s poumons <strong>de</strong> <strong>son</strong> coursier.<br />

Voilà pourquoi, surtout, l'Arabe aimait <strong>son</strong> <strong>cheval</strong>. Voilà<br />

pourquoi, alors, il <strong>le</strong> soignait.<br />

Tout ceci explique fort bien <strong>le</strong> soin que <strong>le</strong>s Arabes avaient<br />

<strong>de</strong> <strong>le</strong>urs chevaux, l'attention avec laquel<strong>le</strong> ils veillaient à l'accoup<strong>le</strong>ment<br />

<strong>de</strong>s juments, <strong>le</strong>s sacrifices qu'ils consentaient volontiers<br />

pour donner aux juments <strong>de</strong>s étalons d'une va<strong>le</strong>ur<br />

reconnue. Dans une <strong>le</strong>ttre au général Daumas, Abd-el-Ka<strong>de</strong>r<br />

dit :<br />

« Le <strong>cheval</strong> est <strong>le</strong> plus beau <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s animaux, mais il faut<br />

que <strong>son</strong> moral répon<strong>de</strong> à <strong>son</strong> physique. Les Arabes en <strong>son</strong>t tel<strong>le</strong>ment<br />

convaincus que si un <strong>cheval</strong> ou une jument ont donné<br />

<strong>de</strong>s preuves incontestab<strong>le</strong>s <strong>de</strong> vitesse, <strong>de</strong> fond, <strong>de</strong> sobriété, d'intelligence,<br />

<strong>de</strong> docilité, ils feront tous <strong>le</strong>s sacrifices imaginab<strong>le</strong>s<br />

pour en tirer race ». C'était vrai quand <strong>le</strong>s Arabes avaient un<br />

indispensab<strong>le</strong> besoin du <strong>cheval</strong>, quand <strong>le</strong>s nécessités <strong>le</strong>ur traçaient<br />

une vie aventureuse <strong>et</strong> guerrière, mais ce n'est plus vrai<br />

aujourd'hui.<br />

Les choses ont bien changé en eff<strong>et</strong>. Les chevaux ayant tel<strong>le</strong>ment<br />

fusionné ont perdu <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur va<strong>le</strong>ur <strong>et</strong>, du fait du changement<br />

profond <strong>de</strong>s habitu<strong>de</strong>s, <strong>de</strong>s coutumes du pays <strong>et</strong> <strong>de</strong>s nécessités,<br />

la population <strong>cheval</strong>ine s'est beaucoup appauvrie.<br />

La vie aventureuse <strong>de</strong> guerre <strong>et</strong> <strong>de</strong> chasse <strong>de</strong>s Arabes d'autrefois<br />

est <strong>de</strong>venue une vie noma<strong>de</strong> aux habitu<strong>de</strong>s pastora<strong>le</strong>s.<br />

Aujourd'hui <strong>le</strong>s « ve rtus guerrières <strong>de</strong>s Bédouins <strong>son</strong>t annihilées<br />

<strong>et</strong>, du même coup, la multiplication du <strong>cheval</strong> qui en était


— 19 —<br />

l'âme <strong>et</strong> <strong>le</strong> mobi<strong>le</strong>. En faisant <strong>de</strong>s Arabes <strong>de</strong> paisib<strong>le</strong>s agriculteurs,<br />

nous avons tué en eux l'amour du <strong>cheval</strong> ( 1 ) > >.<br />

Aussi F « Arabe <strong>et</strong> <strong>son</strong> coursier » <strong>de</strong>v ient <strong>de</strong> plus en plus un<br />

mythe ( 2 ) ».<br />

Au temps d'Abd-el-Ka<strong>de</strong>r, la plupart <strong>de</strong>s Arabes avaient<br />

<strong>de</strong>ux <strong>et</strong> trois chevaux; en outre, quand <strong>le</strong> paisib<strong>le</strong> Arabe <strong>de</strong> nos<br />

jours était un guerrier turbu<strong>le</strong>nt, beaucoup <strong>de</strong> caïds, marabouts<br />

ou chefs importants possédaient plus <strong>de</strong> cinquante chevaux<br />

soignés <strong>et</strong> bien nourris qui servaient à remonter ceux <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs<br />

partisans qui étaient sans monture.<br />

Aujourd'hui, on trouve tout juste un <strong>cheval</strong> par tente dans<br />

<strong>le</strong>s rares qui existent encore dans l'extrême Sud; il n'y a guère<br />

plus que <strong>le</strong>s riches <strong>et</strong> quelques caïds qui peuvent avoir <strong>de</strong>s chevaux<br />

: eux seuls ont <strong>le</strong>s moyens <strong>de</strong> se procurer l'orge nécessaire<br />

à <strong>le</strong>ur entr<strong>et</strong>ien. Quelques tribus, cependant, où <strong>le</strong>s mœurs guerrières,<br />

<strong>le</strong> goût <strong>de</strong> la chasse <strong>et</strong> du <strong>cheval</strong> n'ont pas complètement<br />

disparu s'occupent encore <strong>de</strong> l'é<strong>le</strong>vage du <strong>cheval</strong>; parmi cel<strong>le</strong>sci<br />

on peut citer <strong>le</strong>s tribus <strong>de</strong>s Flittas <strong>et</strong> <strong>de</strong>s Hamyanes qui chassent<br />

encore beaucoup à <strong>cheval</strong> la gazel<strong>le</strong> <strong>et</strong> <strong>le</strong> lièvre au faucon.<br />

D'après <strong>le</strong>s dires <strong>de</strong>s gens du pays, <strong>le</strong>s Arabes, jadis, se rendaient<br />

toujours dans <strong>le</strong>s « souk s » (m archés) <strong>de</strong>s environs, ou<br />

allaient à la vil<strong>le</strong> montés sur <strong>le</strong>ur plus beau <strong>cheval</strong> brillamment<br />

harnaché dont, orgueil<strong>le</strong>ux, ils se paraient; ils étaient<br />

fiers <strong>de</strong> <strong>le</strong> voir admiré. Chacun <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs chevaux avait <strong>son</strong>


— 20 —<br />

<strong>le</strong> manque d'approvisionnements en vue <strong>de</strong>s années <strong>de</strong> dis<strong>et</strong>te<br />

causé autant par l'appauvrissement <strong>de</strong>s Arabes que par <strong>le</strong>ur<br />

défaut <strong>de</strong> prévoyance <strong>et</strong> d'entêtement, <strong>le</strong>s avantages qu'offre<br />

l'é<strong>le</strong>vage du mu<strong>le</strong>t <strong>et</strong> aussi l'absence <strong>de</strong> castration qui perm<strong>et</strong><br />

aux plus mauvais chevaux <strong>de</strong> reproduire, tel<strong>le</strong>s <strong>son</strong>t à mon avis<br />

<strong>le</strong>s causes <strong>de</strong> la déchéance du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>, tant au point <strong>de</strong> vue<br />

<strong>de</strong> la quantité que <strong>de</strong> la qualité.<br />

Le <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> ne disparaît pas cependant; <strong>le</strong>s remontes<br />

militaires agissent avec beaucoup d'efficacité sur la production<br />

<strong>et</strong> l'amélioration <strong>de</strong> la race.<br />

§ 2. — Ué<strong>le</strong>vage en Afrique du Nord.<br />

Si l'on veut avoir une idée à peu près exacte <strong>de</strong> ce qu'est<br />

l'é<strong>le</strong>vage on Afrique du Nord, il est nécessaire <strong>de</strong> tenir compte<br />

<strong>de</strong> certains faits spéciaux qui ont été maintes fois observés.<br />

D'abord, comme partout ail<strong>le</strong>urs, il y a en Afrique pour l'é<strong>le</strong>vage<br />

<strong>de</strong> bonnes <strong>et</strong> <strong>de</strong> mauvaises régions; toutes ne <strong>son</strong>t pas favorab<strong>le</strong>s<br />

à l'é<strong>le</strong>vage; el<strong>le</strong>s n'échappent pas aux règ<strong>le</strong>s si magistra<strong>le</strong>ment<br />

exposées par M. <strong>le</strong> vicomte du Pontavice <strong>de</strong> Heussey<br />

dans une série d'artic<strong>le</strong>s parus en 1924 dans <strong>le</strong> Sport Universel.<br />

« Il faut croire au « cru » pour <strong>le</strong>s animaux comme on croit<br />

au cru pour <strong>le</strong>s fruits, raisins, poires, pommes, qui nous donnent<br />

bon vin ou bon cidre suivant <strong>le</strong>s terrains.<br />

« Da ns <strong>de</strong>s terrains quelconques, si l'on a l'audace d'y é<strong>le</strong>ver,<br />

on aura peut-être par hasard un bon <strong>cheval</strong>, un éclair, mais en<br />

règ<strong>le</strong> généra<strong>le</strong>, mauvais é<strong>le</strong>vage se greffant sur mauvais terrain<br />

continuera à produire <strong>de</strong>s mauvais animaux parce qu'il<br />

n'y a ni « terroir ni cru ».<br />

« L'her be signifie tout, si l'on sait comprendre l'herbe. Si el<strong>le</strong><br />

pousse sur certains sols, sur certains crus, el<strong>le</strong> donnera la vigueur,<br />

la <strong>de</strong>nsité, la nervosité; si el<strong>le</strong> pousse sur certains autres, el<strong>le</strong><br />

affirmera la lymphe, <strong>le</strong>s tissus adipeux, la graisse... <strong>et</strong> l'herbage<br />

c'est l'eau, c'est <strong>le</strong> climat, c'est l'air, c'est l'oxygène, c'est l'espace;<br />

c'est toutes <strong>le</strong>s conditions naturel<strong>le</strong>s visib<strong>le</strong>s ou occultes<br />

qui font <strong>de</strong>s animaux grands ou p<strong>et</strong>its, robustes ou malingres,<br />

vifs ou <strong>le</strong>nts, nerveux ou lymphatiques, résistants ou fragi<strong>le</strong>s.


— 21 —<br />

Et surtout l'herbe c'est <strong>le</strong> cru <strong>et</strong> <strong>le</strong> cru en é<strong>le</strong>vage c'est tout ».<br />

Non seu<strong>le</strong>ment la quantité, mais encore la qualité <strong>de</strong>s aliments<br />

que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> trouve sur <strong>son</strong> sol nourricier, influent sur <strong>le</strong> développement<br />

<strong>et</strong> la composition <strong>de</strong> sa charpente osseuse ainsi<br />

que sur la trempe <strong>de</strong> sa lame. Si certaines régions pourvues <strong>de</strong><br />

riches paturages sur <strong>de</strong>s sols argllo-calcaires <strong>son</strong>t excel<strong>le</strong>ntes<br />

pour l'é<strong>le</strong>vage du <strong>cheval</strong>, par contre, d'autres <strong>son</strong>t pour cela<br />

absolument impropres. C'est une erreur <strong>de</strong> vouloir


— 22 —<br />

on ne sait en obtenir tous <strong>le</strong>s services dont ils <strong>son</strong>t susceptib<strong>le</strong>s<br />

qu'à condition <strong>de</strong> <strong>le</strong>s aimer, <strong>de</strong> <strong>le</strong>s comprendre, d'apprécier<br />

<strong>le</strong>urs facultés intel<strong>le</strong>ctuel<strong>le</strong>s, d'y faire appel au lieu <strong>de</strong> <strong>le</strong>s considérer<br />

comme <strong>de</strong> simp<strong>le</strong>s automates » (Jacou<strong>le</strong>t).<br />

Dans <strong>le</strong>s tribus qui élèvent encore <strong>de</strong>s chevaux, à dix-huit<br />

mois ou <strong>de</strong>ux ans <strong>le</strong> dressage du poulain commence. Dès c<strong>et</strong><br />

âge il est souvent monté pour <strong>de</strong> longues courses <strong>et</strong> <strong>le</strong>s Arabes<br />

s'en servent pour labourer. Mais <strong>le</strong> plus souvent il n'est encore<br />

monté qu' « à poil » ou avec quelques couvertures sur <strong>le</strong> dos,<br />

généra<strong>le</strong>ment sans mors, sans autre moyen qu'un licol au bout<br />

d'une cor<strong>de</strong> en alfa. Les enfants, dès <strong>le</strong>ur plus jeune âge, <strong>le</strong> montent<br />

ainsi à toutes <strong>le</strong>s allures, <strong>le</strong> conduisent à la voix ou en tirant<br />

sur <strong>le</strong> licol <strong>et</strong> <strong>le</strong> dirigent en lui tapant sur la tête du cól é<br />

opposé où ils veu<strong>le</strong>nt tourner. Ce mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> conduite est fort<br />

apprécié <strong>de</strong>s Arabes. Il a l'avantage <strong>de</strong> n'être ruineux ni pour <strong>le</strong><br />

<strong>cheval</strong> ni pour <strong>le</strong> cavalier <strong>et</strong> <strong>de</strong> n'exiger qu'un tact à la portée<br />

<strong>de</strong> tous.<br />

Mais <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> vient d'avoir trois ans. Dans <strong>le</strong>s tribus cavalières,<br />

à c<strong>et</strong> âge, on lui m<strong>et</strong> la sel<strong>le</strong> <strong>et</strong>, tout <strong>de</strong> suite, la bri<strong>de</strong>, <strong>et</strong><br />

quel mors <strong>de</strong> bri<strong>de</strong> ! ! ! Je <strong>le</strong> présenterai tout à l'heure. Entre<br />

<strong>le</strong> licol <strong>et</strong> la bri<strong>de</strong> il n'y a <strong>le</strong> plus souvent aucune transition ; <strong>le</strong><br />

fi<strong>le</strong>t est à peu près inconnu <strong>et</strong> inemployé. Ainsi, à peine poulain,<br />

<strong>le</strong>s Arabes montent <strong>le</strong>ur <strong>cheval</strong> un jour sur <strong>de</strong>ux, sans se soucier<br />

<strong>de</strong> <strong>son</strong> état, pour chasser <strong>le</strong> lièvre ou la gazel<strong>le</strong>. Puis ils l'habituent<br />

aux acrobaties <strong>de</strong> la « fantasia » <strong>et</strong> <strong>le</strong> moment est venu <strong>de</strong><br />

<strong>le</strong> juger, <strong>de</strong> voir s'il a <strong>de</strong> la va<strong>le</strong>ur. A c<strong>et</strong> eff<strong>et</strong>, <strong>le</strong>s chefs arabes<br />

ont l'habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>le</strong> soum<strong>et</strong>tre à <strong>de</strong>s épreuves très pénib<strong>le</strong>s; ils<br />

<strong>le</strong> montent à la chasse au sanglier ou à la gazel<strong>le</strong> en se gardant<br />

bien <strong>de</strong> <strong>le</strong> ménager. La tribu <strong>de</strong>s Hamyanes, cavaliers fameux<br />

<strong>de</strong> la région sud <strong>de</strong> Méchéria est réputée pour ces sortes d'épreuves<br />

qui ont pour but <strong>de</strong> montrer ce que <strong>le</strong>s chevaux « ont<br />

dans <strong>le</strong> ventre ». D es courses <strong>de</strong> chevaux qui se disputent habituel<strong>le</strong>ment<br />

sur 30 ou 40 kilomètres <strong>son</strong>t organisées <strong>et</strong> menées<br />

au galop <strong>de</strong> bout en bout. Les poulains qui, dans ces ru<strong>de</strong>s épreuves,<br />

font preuve <strong>de</strong> fond, <strong>de</strong> vitesse, <strong>de</strong> résistance, <strong>son</strong>t justement<br />

considérés comme <strong>de</strong> très bons chevaux. On peut affirmer,<br />

en eff<strong>et</strong>, que <strong>le</strong>s chevaux qui résistent à <strong>de</strong> tel<strong>le</strong>s épreuves sans


— 23 —<br />

entraînement préalab<strong>le</strong>, ou après quel entraînement !... <strong>son</strong>t<br />

soli<strong>de</strong>s <strong>et</strong> bien trempés. Les autres <strong>son</strong>t vendus.<br />

A quatre ans, <strong>le</strong>s mêmes épreuves recommencent <strong>et</strong> <strong>le</strong>s cavaliers<br />

n'ont pour lui, je <strong>le</strong> répète, aucun ménagement.<br />

Le dressage du <strong>cheval</strong> est alors terminé <strong>et</strong> il peut être monté<br />

par tout <strong>le</strong> mon<strong>de</strong>... Il est alors soumis, <strong>le</strong> restant <strong>de</strong> sa vie, à <strong>de</strong>s<br />

travaux très pénib<strong>le</strong>s <strong>et</strong> à toutes sortes <strong>de</strong> privations.<br />

Pendant tout ce temps, quel<strong>le</strong> a été <strong>son</strong> alimentation? El<strong>le</strong><br />

a été <strong>le</strong> plus souvent misérab<strong>le</strong>, <strong>le</strong> poulain essayant <strong>de</strong> trouvei<br />

sa nourriture en rasant <strong>le</strong>s quelques touffes d'herbe, <strong>de</strong> « drinn »,<br />

<strong>de</strong> « diss » ou d'alfa qu'il trouve sur la terre sèche, à végétation<br />

rare <strong>et</strong> rabougrie, autour <strong>de</strong> la tente <strong>de</strong> <strong>son</strong> maître qui lui distribue<br />

l'orge chichement <strong>et</strong>... quand il en a.<br />

« L'ali mentation <strong>de</strong>s chevaux est plutôt en rapport avec la fortune<br />

du maître qu'avec la tail<strong>le</strong>, l'âge <strong>et</strong> <strong>le</strong>s besoins <strong>de</strong> l'animai.<br />

L'alimentation est la plupart du temps parcimonieuse <strong>et</strong> même<br />

misérab<strong>le</strong>. Chez <strong>le</strong>s Arabes <strong>de</strong> « gran<strong>de</strong> tente », qui <strong>son</strong>t <strong>de</strong> plus<br />

en plus rares, <strong>le</strong> poulain est caressé par <strong>le</strong>s femmes <strong>et</strong> <strong>le</strong>s enfants,<br />

il reçoit <strong>de</strong>s dattes, <strong>de</strong>s farines, du « kouskous » ( 1 ).<br />

Les Arabes riches qui possè<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>s troupeaux <strong>de</strong> chameaux<br />

importants, abreuvent même <strong>le</strong>urs chevaux en remplaçant<br />

l'eau, souvent très rare, par du lait <strong>de</strong> chamel<strong>le</strong>.<br />

« Mais, continue M. Ginieis, il serait une erreur <strong>de</strong> croire c<strong>et</strong>te<br />

sollicitu<strong>de</strong> généra<strong>le</strong>; el<strong>le</strong> n'existe que là où l'opu<strong>le</strong>nce règne<br />

sous la tente; la plupart du temps, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> partage la misère<br />

<strong>de</strong> <strong>son</strong> maître <strong>et</strong> n'en reçoit pas plus <strong>de</strong> soins que <strong>le</strong> maître ne<br />

s'en donne lui-même... A six ans, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> atteint la plénitu<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong> ses forces, il résiste jusqu'à dix ou douze ans aux épreuves<br />

<strong>le</strong>s plus pénib<strong>le</strong>s, puis il ne peut plus servir que s'il est très ménagé<br />

<strong>et</strong> n'est plus bon <strong>le</strong> plus souvent que pour <strong>le</strong>s labours. « Dix<br />

ans <strong>de</strong> sel<strong>le</strong>, dix ans <strong>de</strong> « mer dja » (pâ turage <strong>de</strong> marais) disent<br />

<strong>le</strong>s indigènes, mais, dix ans <strong>de</strong> sel<strong>le</strong> aux mains d'un Arabe représentent<br />

pour un <strong>cheval</strong> une bel<strong>le</strong> carrière. »<br />

Le plus souvent en Algérie ou au Maroc, « <strong>le</strong> dressage » du <strong>cheval</strong><br />

est inexistant. Les indigènes du « b<strong>le</strong>d » utili sent <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

(') M. Ginieis, vétérinaire militaire.


— 24 —<br />

pour labourer, pour <strong>le</strong>s transporter, toujours au pas, d'un endroit<br />

à un autre, ou pour porter <strong>de</strong>s far<strong>de</strong>aux. Il n'est pas rare<br />

<strong>de</strong> voir sur <strong>le</strong> même <strong>cheval</strong> 2 hommes assis sur ces sortes <strong>de</strong> bâts<br />

faits <strong>de</strong> sacs bourrés <strong>de</strong> pail<strong>le</strong> qu'ils emploient conduisant <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

au moyen d'un licol, d'une cor<strong>de</strong> passée dans la bouche <strong>de</strong><br />

l'animal, ou d'un mors <strong>de</strong> mu<strong>le</strong>t (s'rima) casse-mâchoire <strong>de</strong> tout<br />

premier ordre dont je par<strong>le</strong>rai plus loin (voir photos 9 <strong>et</strong> 10,)


Photo 9. — Barbe du Gharb (Maroc occi<strong>de</strong>ntal).<br />

Photo 10. — Barbe du Gharb (Maroc occi<strong>de</strong>ntal).


mémMm<br />

Photo 11. — Cheval <strong>de</strong> Constantine.<br />

Photo 12. — Cheval <strong>de</strong> Constantine.


CHAPITRE III<br />

<strong>de</strong>s différentes variétés <strong>de</strong> la race <strong>barbe</strong><br />

§ 1. Les chevaux d'Algérie, a) Province <strong>de</strong> Constantine. b) Province d'Alger.<br />

c) Province d'Oran. — § 2, Les chevaux du Maroc.<br />

Le modè<strong>le</strong> du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> n'est pas uniforme dans toute<br />

l'Afrique du Nord. Il varie au contraire suivant <strong>le</strong>s régions où il<br />

est é<strong>le</strong>vé. Comme cause <strong>de</strong> ces variétés, j'influence <strong>de</strong> la région,<br />

du terroir, est la plus importante; cel<strong>le</strong> <strong>de</strong> l'homme est à peu<br />

près négligeab<strong>le</strong>.<br />

§ 1. — Les chevaux d'Algérie.<br />

a) La Province <strong>de</strong> Constantine est la plus riche en chevaux;<br />

el<strong>le</strong> fournit <strong>le</strong>s meil<strong>le</strong>urs éléments <strong>de</strong> reproduction. Son sol est<br />

<strong>le</strong> plus ferti<strong>le</strong> <strong>et</strong> <strong>le</strong> plus riche en pâturages, surtout dans <strong>le</strong>s subdivisions<br />

<strong>de</strong> Sétif <strong>et</strong> <strong>de</strong> Constantine.<br />

Les chevaux <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te province <strong>son</strong>t plus grands que ceux <strong>de</strong><br />

la province d'Oran; <strong>le</strong>ur tail<strong>le</strong> varie entre 1 m. 45 <strong>et</strong> 1 m. 65.<br />

« Ces ch evaux <strong>son</strong>t plats, angu<strong>le</strong>ux, la tête est sèche, longue<br />

<strong>et</strong> un peu busquée, <strong>le</strong> nez fuyant, l'encolure droite longue ou<br />

renversée <strong>et</strong> haut greffée, la poitrine haute <strong>et</strong> ogiva<strong>le</strong>, <strong>le</strong> rein<br />

souvent défectueux, <strong>le</strong> <strong>de</strong>ssus tranchant, <strong>le</strong> garrot é<strong>le</strong>vé, la<br />

•croupe longue mais oblique, <strong>le</strong>s hanches saillantes; <strong>le</strong>s tendons<br />

<strong>son</strong>t généra<strong>le</strong>ment mal détachés, <strong>le</strong>s genoux <strong>et</strong> <strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s hauts,<br />

<strong>le</strong>s pieds p<strong>et</strong>its ( 1 ). » {Photos. 11 <strong>et</strong> 12.)<br />

b) La Province d'Alger est <strong>de</strong> beaucoup la plus pauvre en<br />

chevaux; ils <strong>son</strong>t beaucoup moins estimés que ceux <strong>de</strong>s autres<br />

provinces.<br />

Il semb<strong>le</strong> que dans c<strong>et</strong>te région <strong>le</strong>s é<strong>le</strong>veurs tentent d'améliorer<br />

la production du pays en injectant du sang arabe; la majo-<br />

(') Jacou<strong>le</strong>t.


— 26 —<br />

rité <strong>de</strong>s chevaux provenant actuel<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te province <strong>son</strong>t<br />

<strong>de</strong>s arabe-<strong>barbe</strong>s. Les résultats n'en <strong>son</strong>t d'ail<strong>le</strong>urs pas heureux.<br />

Là, justement, <strong>le</strong> « cru » n'y est pas <strong>et</strong> ces chevaux<br />

<strong>de</strong>meurent malgré tout moins bons que ceux <strong>de</strong>s autres provinces.<br />

En général ils <strong>son</strong>t mal établis, manquent d'os, d'étoffe <strong>et</strong><br />

<strong>de</strong> solidité; ils <strong>son</strong>t grê<strong>le</strong>s, légers, en<strong>le</strong>vés, étroits, serrés <strong>de</strong> partout,<br />

dégingandés. On trouve bien rarement parmi <strong>le</strong>s arabe<strong>barbe</strong>s<br />

<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te province, un beau <strong>et</strong> bon <strong>cheval</strong> {photo. 13.)<br />

c) La Province d'Orari tient <strong>le</strong> milieu entre <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux autres.<br />

El<strong>le</strong> possè<strong>de</strong> « la variété <strong>barbe</strong> la plus précieuse sinon la plus<br />

bel<strong>le</strong> <strong>de</strong> l'Algérie » ( 1 ). Ses chevaux <strong>son</strong>t <strong>de</strong> bonne qualité.<br />

« Ils <strong>son</strong>t près <strong>de</strong> terre, étoffés, bien roulés, dépassant rarement<br />

1 m. 52. Leurs lignes <strong>son</strong>t courtes mais correctes dans<br />

<strong>le</strong>ur direction. La tête est carrée au profil droit ou très légèrement<br />

bombée, l'encolure courte ou moyenne, arrondie supérieurement.<br />

L'épau<strong>le</strong> est un peu chargée, <strong>le</strong> garrot épais, <strong>le</strong> dos <strong>et</strong><br />

<strong>le</strong>s reins larges, <strong>le</strong>s hanches <strong>son</strong>t effacées, la croupe en cul <strong>de</strong><br />

pou<strong>le</strong>, la queue attachée bas, <strong>le</strong>s membres <strong>et</strong> <strong>le</strong>s articulations<br />

larges, <strong>le</strong>s genoux souvent renvoyés, <strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s étroits à la<br />

base » {photo. 14).<br />

Dans la province d'Oran, comme subdivisions où l'on trouve<br />

<strong>le</strong>s chevaux <strong>le</strong>s plus estimés il faut citer la subdivision <strong>de</strong> Mostaganem<br />

(Les Arabes <strong>de</strong>s Flittas (Relizane) produisent <strong>le</strong>s meil<strong>le</strong>urs<br />

chevaux <strong>de</strong> l'Algérie) ( 2 ), <strong>le</strong>s subdivisions <strong>de</strong> Mascara, <strong>de</strong><br />

Sidi-bel-Abbès <strong>et</strong> d'Oran qui produisent toutes <strong>le</strong>s trois <strong>de</strong> beaux<br />

<strong>et</strong> très bons chevaux. Une région à citer tout particulièrement<br />

est cel<strong>le</strong> <strong>de</strong> Thiar<strong>et</strong>. La subdivision <strong>de</strong> T<strong>le</strong>mcen est cel<strong>le</strong> qui<br />

produit <strong>le</strong>s plus mauvais chevaux <strong>de</strong> la province; ils <strong>son</strong>t mal<br />

conformés <strong>et</strong> <strong>de</strong> mauvaise qualité. Sa proximité du Maroc en<br />

est cause <strong>et</strong> l'on sent dans <strong>le</strong>s chevaux <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te région <strong>le</strong>s mauvaises<br />

influences du <strong>cheval</strong> marocain qui est <strong>le</strong> plus mauvais<br />

<strong>de</strong>s chevaux <strong>barbe</strong>s.<br />

(') Jacou<strong>le</strong>t.<br />

( 2 ) Le territoire <strong>de</strong>s Flittas commence à 60 kilomètres au sud <strong>de</strong> Mostaganem ;<br />

il touche d'un côté à la plaine <strong>de</strong> la Mina, <strong>de</strong> l'autre aux limites du Tell.


Photo 13. — Cheval <strong>de</strong> la province d'Alger.<br />

Photo 14. — Cheval <strong>de</strong> la province d'Oran.


:<br />

Photo 15. — Ju ment du Rif (plaine <strong>de</strong> Targuist).<br />

Photo 16. — Cheval du Rif (région <strong>de</strong> Targuist).


Photo 17. — Cheval du Ri f.


Photo 18. — Barbe du Gliarb.<br />

Photo J9. — Chevaux du Gharb.


— 11 —<br />

§ 2. — Les chevaux du Maroc.<br />

Vallon, dans <strong>son</strong> hippologie, fait du <strong>cheval</strong> marocain <strong>le</strong> portrait<br />

suivant : « Les chevaux du Maroc <strong>son</strong>t moins purs que ceux<br />

<strong>de</strong> l'Algérie ; ils <strong>son</strong>t plus grands <strong>et</strong> moins élégants. Leurs mouvements<br />

<strong>son</strong>t moins puissants <strong>et</strong> moins étendus. Il y a manque<br />

d'harmonie dans <strong>le</strong>ur organisation, <strong>le</strong>s aplombs <strong>son</strong>t irréguliers,<br />

la charpente osseuse est forte, mais <strong>le</strong>s os manquent <strong>de</strong> <strong>de</strong>nsité<br />

(exostoses) ; la tête est lour<strong>de</strong>, mal attachée <strong>et</strong> peu expressive,<br />

<strong>le</strong>s oreil<strong>le</strong>s longues <strong>et</strong> rapprochées, <strong>le</strong> front étroit <strong>et</strong> bombé,<br />

<strong>le</strong> chanfrein busqué, <strong>le</strong>s lèvres fortes, l'encolure grê<strong>le</strong> <strong>et</strong> renversée,<br />

<strong>le</strong> corps est angu<strong>le</strong>ux ; on trouve rarement <strong>de</strong> bel<strong>le</strong>s proportions;<br />

la poitrine est peu spacieuse, <strong>le</strong> rein souvent mal attaché,<br />

l'épau<strong>le</strong> courte droite <strong>et</strong> collée au tronc, <strong>le</strong> tendon grê<strong>le</strong> <strong>et</strong> fai-,<br />

b<strong>le</strong>, <strong>le</strong> bou<strong>le</strong>t <strong>et</strong> <strong>le</strong> paturon faib<strong>le</strong>s <strong>et</strong> longs, <strong>le</strong> jarr<strong>et</strong> manque<br />

<strong>de</strong> largeur <strong>et</strong> d'épaisseur; <strong>le</strong>s chevaux du Maroc ont moins <strong>de</strong><br />

race, <strong>de</strong> sang <strong>et</strong> <strong>de</strong> vigueur que <strong>le</strong>s autres chevaux <strong>barbe</strong>s ; ils<br />

<strong>son</strong>t moins durs aux fatigues <strong>et</strong> dans <strong>le</strong>s pays montagneux ils<br />

se tarent très vite »<br />

Les chevaux du Maroc semb<strong>le</strong>nt bien être en eff<strong>et</strong> <strong>le</strong>s moins<br />

bons <strong>de</strong>s chevaux <strong>barbe</strong>s. Mais il y a <strong>de</strong>s <strong>de</strong>grés dans <strong>le</strong> mal <strong>et</strong><br />

la production <strong>cheval</strong>ine varie beaucoup, là aussi, selon <strong>le</strong>s régions.<br />

Les ayant parcourues avec d'autres occupations que cel<strong>le</strong>s<br />

d'étudier c<strong>et</strong>te question, je ne peux formu<strong>le</strong>r une appréciation<br />

complète <strong>et</strong> suffisamment documentée. Au hasard <strong>de</strong> mes pérégrinations<br />

j'ai emmagasiné dans mon appareil photographique<br />

la plupart <strong>de</strong>s différents types reproduits ici.<br />

La plus mauvaise région est sans conteste, je crois, <strong>le</strong> Maroc<br />

oriental.<br />

J'ai été étonné <strong>de</strong> trouver à Targuist, dans <strong>le</strong> Rif, une population<br />

<strong>cheval</strong>ine assez <strong>de</strong>nse ayant peu <strong>de</strong> similitu<strong>de</strong> avec <strong>le</strong>s<br />

<strong>barbe</strong>s nord-africains. Avec <strong>le</strong>urs têtes fortes niant la présence<br />

du sang arabe, ces chevaux ressemb<strong>le</strong>nt plutôt à <strong>de</strong>s <strong>de</strong>mi-sangs<br />

« claqu <strong>et</strong>tes » {photos. 15, 16, 17). Peut-être est-ce l'influence <strong>de</strong><br />

juments importées d'Espagne. Ils ont <strong>de</strong> l'os, <strong>de</strong> l'encolure,


— 28 —<br />

mais <strong>son</strong>t dégingandés <strong>et</strong> mal éclatés. Ils accusent souvent<br />

du sang, mais non du sang arabe.<br />

Dans <strong>le</strong>s meil<strong>le</strong>ures ou <strong>le</strong>s moins mauvaises régions pour<br />

l'é<strong>le</strong>vage du <strong>cheval</strong> il faut citer la région <strong>de</strong>s Doukkalas <strong>et</strong> <strong>de</strong>s<br />

Abdas (sud <strong>de</strong> Mazagan) <strong>et</strong> la région <strong>de</strong>s Zemmour (Tif<strong>le</strong>t-Khemiss<strong>et</strong>)<br />

où j'ai vu <strong>le</strong>s plus jolis chevaux du Maroc <strong>et</strong> qui produit<br />

un type bien soudé, bien proportionné, genre Constantine.<br />

La région <strong>de</strong>s Beni-Hassan, dans la bouc<strong>le</strong> du Sabou, m'a semblé<br />

moins bonne. Les plaines du Gharb (<strong>le</strong> couchant) donnent<br />

un modè<strong>le</strong> peu sérieux, peu important, ces chevaux <strong>son</strong>t grê<strong>le</strong>s,<br />

serrés <strong>de</strong> partout, pas <strong>de</strong> garrot, épau<strong>le</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong>ssus droits, genoux<br />

hauts {photos. 18 <strong>et</strong> 19). En remontant vers Ouezzan, épau<strong>le</strong> <strong>et</strong><br />

encolure s'améliorent, mais <strong>le</strong> <strong>de</strong>rrière reste faib<strong>le</strong>, incliné <strong>et</strong> n'est<br />

plus proportionné.<br />

Les photos 20 <strong>et</strong> 21 présentent un type <strong>de</strong> chevaux marocains<br />

tout différent. Ce <strong>son</strong>t <strong>de</strong>s chevaux <strong>de</strong> la région <strong>de</strong> Mogadon<br />

(Tribus <strong>de</strong>s H aha <strong>et</strong> <strong>de</strong>s Chiadma).<br />

En généralisant, on peut dire que <strong>le</strong> <strong>barbe</strong> du Maroc est en ce<br />

moment plutôt médiocre, il manque d'os <strong>le</strong> plus souvent, a<br />

l'épau<strong>le</strong> droite courte <strong>et</strong> plaquée, <strong>le</strong> genou haut, la croupe abattue,<br />

<strong>le</strong> jarr<strong>et</strong> coudé.<br />

Dépôts <strong>de</strong> remonte <strong>et</strong> j um enterics font <strong>de</strong> la bonne besogne<br />

<strong>et</strong> améliorent <strong>de</strong> plus en plus la race avec une réussite bien méritée<br />

par <strong>le</strong>urs efforts persévérants <strong>et</strong> méritoires. Chez <strong>le</strong> <strong>barbe</strong><br />

« rectifié » qui sort <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs établissements l'épau<strong>le</strong> s'incline, la<br />

croupe se relève, <strong>le</strong>s aplombs <strong>et</strong> la solidité <strong>de</strong>viennent très bons.


Photo 20. — Chevaux <strong>de</strong> Mogadon<br />

Photo 21. — Chevaux <strong>de</strong> Mogadon.


DEUXIÈME PARTIE<br />

COMMENT EST MONTÉ LE CHEVAL BARBE<br />

CHAPITRE I<br />

<strong>le</strong>s moyens<br />

§ 1. — Le harnachement arabe -, \ 0 La sel<strong>le</strong>. Sa consti tution, ses caractéristiques<br />

au point <strong>de</strong> vue équestre. — 2° Les mors. La « honte du mors<br />

arabe ». A. Le mors arabe militaire, ses particularités, « o n s'imagine<br />

généra<strong>le</strong>ment qu'il est dur »; <strong>le</strong> mors arabe militaire comparé au mors<br />

rég<strong>le</strong>mentaire français. Indépendamment <strong>de</strong> la torce <strong>de</strong> <strong>le</strong>vier du mors,<br />

d'autres éléments peuvent produire sa dur<strong>et</strong>é ; <strong>le</strong>s qualités que <strong>le</strong> Manuel<br />

à l'usage <strong>de</strong>s gradés <strong>de</strong>s Régiments <strong>de</strong> Spahis attribue au mors<br />

arabe. Comment <strong>le</strong> mors arabe produit l'affaissement do l'encolure. B. Le<br />

mors arabe civil, sa constitution, sa dur<strong>et</strong>é. C. Le mors <strong>de</strong> mu<strong>le</strong>t, sa constitution,<br />

sa dur<strong>et</strong>é. — § 2. — Les moyens d'impulsion : A. Les éperons<br />

arabes; B. L'étrier; C. Le choc <strong>de</strong> l'éperon contre l'étrier; D. L'extrémité<br />

<strong>de</strong>s rênes.<br />

§ 1 . •— Le harnachement arabe.<br />

Maintenant que nous avons fait connaissance avec <strong>le</strong> sympathique<br />

<strong>cheval</strong> harhe, nous allons voir quels <strong>son</strong>t <strong>le</strong>s instruments<br />

utilisés par <strong>le</strong> cavalier arabe pour <strong>le</strong> monter <strong>et</strong> <strong>le</strong> conduire.<br />

Nous verrons ensuite comment il s'en sert.<br />

1° La sel<strong>le</strong>. — La sel<strong>le</strong> arabe civi<strong>le</strong> <strong>et</strong> la sel<strong>le</strong> arabe militaire<br />

<strong>son</strong>t toutes <strong>de</strong>ux à peu près i<strong>de</strong>ntiques. El<strong>le</strong>s diffèrent complètement<br />

<strong>de</strong> nos sel<strong>le</strong>s françaises ou anglaises (fig. 22, photo 23).<br />

La sel<strong>le</strong> arabe est constituée par <strong>de</strong>ux lames <strong>de</strong> bois reliées<br />

entre el<strong>le</strong>s par un pommeau (Kerbous) <strong>et</strong> un troussequin (guedda)<br />

très é<strong>le</strong>vés; <strong>le</strong> tout est recouvert d'une sorte <strong>de</strong> parchemin.<br />

Une housse en filali (peau <strong>de</strong> chèvre) se place sur la sel<strong>le</strong> <strong>et</strong> complète<br />

ce rustique harnachement. La sel<strong>le</strong> est isolée du dos du


30<br />

<strong>cheval</strong> par plusieurs feuil<strong>le</strong>s <strong>de</strong> feutre qui tiennent lieu <strong>de</strong> matelassure.<br />

Les caractéristiques <strong>de</strong> la sel<strong>le</strong> arabe au point <strong>de</strong> vue équestre<br />

<strong>son</strong>t <strong>le</strong>s suivantes ( 1 ) :<br />

« A. Les porte-étrivières <strong>son</strong>t placés très en arrière, <strong>de</strong> sorte<br />

que si l'étrier est porté très court (longueur rég<strong>le</strong>mentaire trois fois<br />

la hauteur du poing fermé plus 3 doigts) <strong>le</strong> cavalier est contraint<br />

d'avoir <strong>le</strong>s jambes très pliées, <strong>le</strong>s mol<strong>le</strong>ts en contact avec <strong>le</strong><br />

corps du <strong>cheval</strong> (photo 24).<br />

Fig. 22. — Sel<strong>le</strong> arabe sans housse.<br />

« B. La forme <strong>de</strong>s étriers perm<strong>et</strong> au cavalier <strong>de</strong> faire porter<br />

sur eux tout <strong>le</strong> poids <strong>de</strong> <strong>son</strong> corps. El<strong>le</strong> lui perm<strong>et</strong> éga<strong>le</strong>ment<br />

d'employer l'ang<strong>le</strong> <strong>de</strong> l'étrier comme ai<strong>de</strong> à l'instar <strong>de</strong> l'éperon,<br />

mais, en rai<strong>son</strong> <strong>de</strong> sa dur<strong>et</strong>é, ce procédé ne doit être employé<br />

qu' excep tionnel<strong>le</strong>ment.<br />

« G . La hauteur du troussequin (guedda) perm<strong>et</strong> au cavalier<br />

<strong>de</strong>bout sur <strong>le</strong>s étriers d'appuyer <strong>le</strong>s fesses sur <strong>le</strong> troussequin <strong>et</strong><br />

<strong>de</strong> conserver sans difficulté c<strong>et</strong>te position aux allures vives. »<br />

Un surfaix passant sous la housse est placé sur la sel<strong>le</strong> <strong>et</strong> un<br />

large poitrail maintient la sel<strong>le</strong> en place.<br />

2° Les mors. — Quand je par<strong>le</strong> du mors, c'est du mors <strong>de</strong><br />

(') Manuel à l'usage <strong>de</strong>s gradés <strong>de</strong>s Régiments <strong>de</strong> Spahis.


Photo 23. — Sel<strong>le</strong> arabe.<br />

Photo 24. — Position du cavalier arabe.


i<strong>de</strong> dont il s'agit, <strong>le</strong> fi<strong>le</strong>t ne faisant pas partie du harnachement<br />

arabe.<br />

Je m'étendrai sur ce paragraphe qui en vaut la peine, m'efforçant<br />

d'expliquer avec <strong>le</strong> plus <strong>de</strong> modération possib<strong>le</strong> ce que<br />

j'appel<strong>le</strong> la « honte du mors arabe ». Nous étudierons non seu<strong>le</strong>ment<br />

<strong>le</strong> mors <strong>de</strong> spahis mais encore <strong>le</strong> mors civil <strong>et</strong> <strong>le</strong> mors <strong>de</strong><br />

mu<strong>le</strong>t que <strong>le</strong>s Arabes m<strong>et</strong>tent parfois dans la bouche <strong>de</strong><br />

<strong>le</strong>urs chevaux.<br />

Ces différents mors <strong>son</strong>t là <strong>de</strong>vant moi pendant que j'écris <strong>et</strong><br />

mon bureau semb<strong>le</strong> transformé en un hi<strong>de</strong>ux arsenal d'instruments<br />

<strong>de</strong> torture propres à faire frémir <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> aux barres <strong>le</strong>s<br />

plus indifférentes.<br />

Pour la commodité <strong>de</strong> l'exposition nous examinerons ces mors<br />

dans l'ordre suivant : <strong>le</strong> mors militaire, <strong>le</strong> mors civil {Vdjem) <strong>et</strong><br />

nous gar<strong>de</strong>rons pour la fin <strong>le</strong> <strong>de</strong>rnier instrument <strong>de</strong> supplice<br />

(j'allais dire chinois...) <strong>le</strong> mors <strong>de</strong> mu<strong>le</strong>t (s'rima).<br />

A. Le mors arabe mili taire, c'est-à-dire <strong>le</strong> mors rég<strong>le</strong>mentaire<br />

dans <strong>le</strong>s régiments <strong>de</strong> cava<strong>le</strong>rie indigènes, diffère sensib<strong>le</strong>ment<br />

du mors <strong>de</strong> bri<strong>de</strong> rég<strong>le</strong>mentaire dans la cava<strong>le</strong>rie métropolitaine<br />

(photo 25).<br />

« La comparai<strong>son</strong> <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux embouchures fait ressortir pour<br />

<strong>le</strong> mors arabe <strong>le</strong>s particularités suivantes :<br />

« a) Les branches <strong>son</strong>t courtes <strong>et</strong> ne se prolongent pas au<strong>de</strong>ssus<br />

<strong>de</strong>s canons comme dans <strong>le</strong> modè<strong>le</strong> français;<br />

« b) Le mors est réuni aux montants <strong>de</strong> la bri<strong>de</strong> par l'intermédiaire<br />

d'anneaux adaptés à l'embouchure el<strong>le</strong>-même ;<br />

« c) La liberté <strong>de</strong> la langue est très prononcée;<br />

« d) La gourm<strong>et</strong>te est constituée par un anneau dont <strong>le</strong> diamètre<br />

est sensib<strong>le</strong>ment égal à la largeur <strong>de</strong> l'embouchure. La<br />

partie postérieure <strong>de</strong> l'anneau, élargie <strong>et</strong> aplatie, porte sur la<br />

<strong>barbe</strong>. La partie opposée, arrondie <strong>et</strong> amincie, traverse une<br />

douil<strong>le</strong> brasée sur <strong>le</strong> somm<strong>et</strong> <strong>de</strong> la liberté <strong>de</strong> langue. Le plan <strong>de</strong><br />

l'anneau tourne autour <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière partie ;<br />

« e) Les anneaux auxquels s'adaptent <strong>le</strong>s rênes ne <strong>son</strong>t pas<br />

fixés aux branches du mors directement mais par l'intermédiaire<br />

d'une tige qui joue dans un œil pratiqué à la partie inférieure<br />

<strong>de</strong> la branche.


— 32 —<br />

« Da ns <strong>le</strong> mors arabe lomme dans <strong>le</strong> mors français, chacune<br />

<strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux branches agit à la façon d'un <strong>le</strong>vier du <strong>de</strong>uxième<br />

genre dans <strong>le</strong>quel la gourm<strong>et</strong>te placée <strong>de</strong>rrière la <strong>barbe</strong> représente<br />

<strong>le</strong> point d'appui. La résistance est sur <strong>le</strong>s barres, la puissance<br />

est à l'extrémité inférieure <strong>de</strong> la branche, mais dans <strong>le</strong><br />

mors français, <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux bras du <strong>le</strong>vier <strong>son</strong>t constitués respectivement<br />

par la partie supérieure <strong>et</strong> la partie inférieure <strong>de</strong> chacune<br />

<strong>de</strong>s branches du mors, chaque branche forme donc, à el<strong>le</strong><br />

seu<strong>le</strong>, un <strong>le</strong>vier. Dans <strong>le</strong> mors arabe, au contraire, chaque branche<br />

Photo 23. — Mors arabe mililaire.<br />

ne constitue que <strong>le</strong> bras inférieur du <strong>le</strong>vier, <strong>le</strong> bras supérieur est<br />

formé par la liberté <strong>de</strong> la langue.<br />

« On dit qu'un mors est plus ou moins dur suivant que <strong>le</strong><br />

<strong>le</strong>vier qu'il représente est plus ou moins puissant, qu'il existe<br />

plus <strong>de</strong> différence entre <strong>le</strong>s longueurs respectives <strong>de</strong> ses <strong>de</strong>ux<br />

bras.<br />

« Il suffit d'examiner <strong>le</strong> mors arabe pour reconnaître qu'il est<br />

beaucoup moins dur qu'on se l'imagine généra<strong>le</strong>ment. »<br />

Les expériences faites avec <strong>le</strong> mors arabe <strong>et</strong> <strong>le</strong> mors rég<strong>le</strong>mentaire<br />

français au moyen d'un pe<strong>son</strong> au cadran noirci à la fumée,<br />

ont démontré que la puissance <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux mors en tant que<br />

<strong>le</strong>viers est à peu près équiva<strong>le</strong>nte. Mais la longueur <strong>de</strong>s bras <strong>de</strong><br />

<strong>le</strong>vier d'un mors ne suffit pas pour déterminer sa dur<strong>et</strong>é. D'au-


— 33 —<br />

très éléments entrent pour cela en ligne <strong>de</strong> compte. Ils <strong>son</strong>t<br />

pour <strong>le</strong> mors arabe :<br />

1° Le passage <strong>de</strong> langue qui a plus <strong>de</strong> 6 centimètres <strong>de</strong> hauteur<br />

alors qu'il est à peu près <strong>de</strong> 3 centimètres dans <strong>le</strong> mors français.<br />

2° L'anneau gourm<strong>et</strong>te aplati dans sa partie inférieure qui<br />

repose sur la <strong>barbe</strong> du <strong>cheval</strong> <strong>et</strong> dont <strong>le</strong>s bords tranchants peuvent<br />

couper la peau du <strong>cheval</strong>.<br />

« La dur<strong>et</strong>é du mors — li<strong>son</strong>s-nous dans <strong>le</strong> Manuel à l'usage<br />

<strong>de</strong>s gradés <strong>de</strong> Spahis, — est d'autre part atténuée par <strong>le</strong> mo<strong>de</strong><br />

d'attache <strong>de</strong>s rênes <strong>et</strong> par <strong>le</strong> fait que <strong>le</strong>s bras du <strong>le</strong>vier formé<br />

par chacune <strong>de</strong>s branches ne <strong>son</strong>t pas dans <strong>le</strong> prolongement l'un<br />

<strong>de</strong> l'autre. » J e ne vois pas pourquoi.<br />

« Pa r la hauteur <strong>de</strong> la liberté <strong>de</strong> langue <strong>et</strong> par <strong>le</strong> mo<strong>de</strong> d'insertion<br />

<strong>de</strong> l'anneau gourm<strong>et</strong>te — dit ce règ<strong>le</strong>ment — il incite<br />

automatiquement <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> à ouvrir sa bouche <strong>et</strong> à décontracter<br />

sa mâchoire. »<br />

Indiscutab<strong>le</strong>ment, <strong>le</strong> mors arabe force <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> à ouvrir la<br />

bouche; il l'incite à décontracter la mâchoire à la manière d'un<br />

<strong>le</strong>vier dont on se servirait pour <strong>de</strong>sserrer <strong>le</strong>s <strong>de</strong>nts d'un noyé.<br />

Le <strong>cheval</strong> cè<strong>de</strong> à la dou<strong>le</strong>ur insupportab<strong>le</strong> provoquée par l'appui<br />

sur <strong>son</strong> palais du passage <strong>de</strong> langue é<strong>le</strong>vé, il cè<strong>de</strong> comme finit<br />

par cé<strong>de</strong>r aussi <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> dont la mâchoire est prise dans l'étau<br />

d'une f<strong>le</strong>xion directe qui se resserre <strong>de</strong> plus en plus sans cession.<br />

Dans ces conditions, il est faci<strong>le</strong> <strong>de</strong> se rendre compte que <strong>le</strong>s<br />

f<strong>le</strong>xions produites par ce mors, bien plus encore que <strong>le</strong>s f<strong>le</strong>xions<br />

directes, exigent une manipulation délicate alliée à beaucoup<br />

<strong>de</strong> tact, car il est absolument nécessaire <strong>de</strong> cess er d'agir à V instant<br />

précis où <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> cè<strong>de</strong>. Ce jeu d'oppositions <strong>de</strong> résistances est<br />

jeu d'artiste. Sans toutefois vouloir exagérer une difficulté<br />

qu'un simp<strong>le</strong> humain peut vaincre, je crois pouvoir dire cependant<br />

qu'il nécessite un tact que ne possè<strong>de</strong> pas <strong>le</strong> cavalier<br />

arabe.<br />

Forcer la mâchoire à s'ouvrir n'est pas la décontracter. Si <strong>le</strong><br />

mors arabe peut forcer <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> à ouvrir la bouche, ce seul<br />

fait ne peut par lui-même produire décontraction <strong>et</strong> soup<strong>le</strong>sse<br />

<strong>de</strong> mâchoire. Pour en venir là, ce n'est pas surtout la qualité<br />

du mors qui doit intervenir mais cel<strong>le</strong> du cavalier. Gomme<br />

LE CHEVAL BARBB 3


— 34 —<br />

l'arch<strong>et</strong>, <strong>le</strong> mors <strong>de</strong> bri<strong>de</strong> a la va<strong>le</strong>ur <strong>de</strong> la main qui l'actionne.<br />

Le mors arabe n'a donc par lui-même <strong>et</strong> <strong>de</strong> par <strong>le</strong> fait <strong>de</strong><br />

sa disposition spécia<strong>le</strong> (« mo<strong>de</strong> d'insertion <strong>de</strong> l'anneau gourm<strong>et</strong>te<br />

» ou « ha uteur <strong>de</strong> la liberté <strong>de</strong> langue ») aucun pouvoir<br />

ni mécanique ni magique pour décontracter ou assouplir l'articulation<br />

maxillaire. C'est la science, c'est <strong>le</strong> doigté, c'est l'habi<strong>le</strong>té<br />

du bon écuyer qui seuls pourront aboutir à la décontraction,<br />

à la soup<strong>le</strong>sse, à la légèr<strong>et</strong>é, en exploitant <strong>le</strong>s eff<strong>et</strong>s du<br />

mors, <strong>et</strong> ce, avec une finesse d'autant plus précise que <strong>le</strong> mors<br />

est plus dur, plus sévère. Un très bon cavalier pourra obtenir<br />

avec <strong>le</strong> mors arabe la soup<strong>le</strong>sse tota<strong>le</strong> <strong>de</strong> la mâchoire parce<br />

qu'il aura en main <strong>le</strong> ta<strong>le</strong>nt suffisant pour percevoir la plus<br />

légère cession musculaire, <strong>et</strong> y cé<strong>de</strong>r avec un à-propos habi<strong>le</strong>,<br />

mais si c<strong>et</strong> instrument délicat vient à tomber entre <strong>le</strong>s mains<br />

d'un cavalier quelconque, adieu soup<strong>le</strong>sse, adieu perçant <strong>et</strong><br />

impulsion, adieu pauvre <strong>cheval</strong>!<br />

C<strong>et</strong>te particularité du mors arabe {forcer Vouverture <strong>de</strong> la<br />

bouche) ne <strong>de</strong>meure un avantage que si <strong>le</strong> cavalier a <strong>le</strong> ta<strong>le</strong>nt<br />

<strong>de</strong> l'exploiter; dans <strong>le</strong> cas contraire, el<strong>le</strong> <strong>de</strong>vient inversement,<br />

en même temps qu'une gran<strong>de</strong> infériorité, un danger lourd <strong>de</strong><br />

conséquences malheureuses.<br />

Pas plus que n'ont existé en Egypte ces chimères semblant<br />

nées d'accoup<strong>le</strong>ments hi<strong>de</strong>ux, n'existent en Afrique <strong>de</strong>s bras<br />

arabes au bout <strong>de</strong>squels se meuvent <strong>de</strong> fines mains d'écuyers.<br />

Aussi ce serait une erreur grave <strong>de</strong> pronostiquer soup<strong>le</strong>sse maxillaire<br />

ou décontraction <strong>de</strong>s musc<strong>le</strong>s digastriques parce que <strong>le</strong>s<br />

chevaux <strong>barbe</strong>s que l'on voit ont la bouche ouverte; la bouche<br />

ne s'ouvre que lorsque <strong>le</strong> mors <strong>et</strong> la dou<strong>le</strong>ur la forcent à s'ouvrir<br />

<strong>et</strong> comme <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>, ainsi, est loin d'être léger, <strong>le</strong> mors<br />

conlinue d'agir, <strong>le</strong> passage <strong>de</strong> langue se transforme en poire<br />

d'angoisse, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> ne peut plus refermer sa bouche, il tire <strong>et</strong><br />

se contracte alors <strong>de</strong> plus en plus la bouche ouverte. Voilà <strong>le</strong> tab<strong>le</strong>au<br />

vrai <strong>de</strong> la réalité.<br />

Pour se convaincre <strong>de</strong> ce que j'avance, il suffit <strong>de</strong> monter<br />

avec une autre embouchure, fi<strong>le</strong>t ou mors sans passage <strong>de</strong><br />

langue ou avec passage <strong>de</strong> langue moins haut, un <strong>cheval</strong> habituel<strong>le</strong>ment<br />

monté en bri<strong>de</strong> arabe par un cavalier ordinaire; <strong>le</strong>


— 35 —<br />

<strong>cheval</strong> ayant l'habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> ne cé<strong>de</strong>r qu'à la dou<strong>le</strong>ur ne cè<strong>de</strong><br />

plus du tout quand on supprime la cause <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te dou<strong>le</strong>ur.<br />

Montez-<strong>le</strong> pendant une heure ou <strong>de</strong>ux, il vous sera faci<strong>le</strong> <strong>de</strong><br />

juger <strong>de</strong> sa soup<strong>le</strong>sse <strong>de</strong> mâchoire, il la contractera sur <strong>le</strong> mors<br />

pendant <strong>de</strong>s heures sans faire généra<strong>le</strong>ment la plus p<strong>et</strong>ite cession.<br />

Si <strong>le</strong> mors arabe avait <strong>le</strong> don <strong>de</strong> décontracter la mâchoire<br />

<strong>et</strong> si <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> généra<strong>le</strong>ment monté avec ce mors avait réel<strong>le</strong>ment<br />

la mâchoire soup<strong>le</strong>, soup<strong>le</strong> el<strong>le</strong> resterait avec n'importe<br />

quel mors <strong>de</strong> bri<strong>de</strong> ou <strong>de</strong> fi<strong>le</strong>t ; un <strong>le</strong>vier ne serait pas nécessaire<br />

pour lui <strong>de</strong>sserrer <strong>le</strong>s <strong>de</strong>nts.<br />

Je continue à citer <strong>le</strong> Manuel à l'usage <strong>de</strong>s gradés <strong>de</strong>s Regiments<br />

<strong>de</strong> Spahis : « Ce résultat obtenu (la décontraction <strong>de</strong> la<br />

mâchoire), l'action <strong>de</strong>s canons sur <strong>le</strong>s barres amène <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

a fléchir la tête sur la partie antérieure <strong>de</strong> l'encolure <strong>et</strong> comme<br />

<strong>le</strong> mors agit uniquement <strong>de</strong> haut en bas, <strong>son</strong> action tend enfin<br />

à affaisser l'encolure. »<br />

Désireux d'écourter c<strong>et</strong>te analyse critique, je me bornerai à<br />

attirer l'attention du <strong>le</strong>cteur sur la phrase que je viens <strong>de</strong> citer<br />

<strong>et</strong> plus spécia<strong>le</strong>ment sur <strong>le</strong>s points suivants : Tous <strong>le</strong>s mors <strong>de</strong><br />

bri<strong>de</strong> que je connais <strong>son</strong>t par rai<strong>son</strong> d'être <strong>de</strong>s abaisseurs <strong>et</strong> ils<br />

agissent « <strong>de</strong> haut en bas » su r <strong>le</strong>s barres du <strong>cheval</strong>, ce n'est<br />

pas une particularité du mors arabe.<br />

Je ne vois pas pourquoi ce mors porterait en lui-même la<br />

propriété d'affaisser l'encolure alors que <strong>le</strong>s autre mors <strong>de</strong> bri<strong>de</strong>,<br />

qui agissent pourtant dans une direction analogue, en seraient<br />

dépourvus. Ce n'est donc pas à mon avis simp<strong>le</strong>ment Vaction du<br />

mors arabe qui « ten d à affaisser l'encolure », mais plus précisément<br />

<strong>et</strong> en réalité, si l'encolure s'affaisse, c'est parce que<br />

l'action du mors est bruta<strong>le</strong> <strong>et</strong> excessive, parce que <strong>le</strong>s Arabes<br />

<strong>son</strong>t absolument incapab<strong>le</strong>s <strong>de</strong> se bien servir d'un mors qui est<br />

trop dur pour eux. Voilà la cause pr oprement dite ou efficiente<br />

<strong>de</strong> l'affaissement <strong>de</strong> l'encolure du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>.<br />

Exactement, d'ail<strong>le</strong>urs, comme <strong>le</strong> mors arabe, <strong>le</strong>s mors <strong>de</strong><br />

bri<strong>de</strong> français peuvent amener l'affaissement <strong>de</strong> l'encolure s'ils<br />

«ont mal employés <strong>et</strong> si <strong>le</strong>ur dur<strong>et</strong>é n'est pas en rapport avec<br />

<strong>le</strong>s possibilités équestres <strong>et</strong> <strong>le</strong>s qualités <strong>de</strong> main <strong>de</strong>s cavaliers qui<br />

s'en servent.


36<br />

B. Le mors arabe ci vil. — Nous allons d'abord voir comment<br />

il est fait, puis nous chercherons à nous rendre compte <strong>de</strong> sa<br />

dur<strong>et</strong>é. Le mors <strong>de</strong> bri<strong>de</strong> civil (photo 26) diffère du mors<br />

militaire par sa grossièr<strong>et</strong>é, ses ang<strong>le</strong>s ne <strong>son</strong>t pas ou <strong>son</strong>t peu<br />

arrondis, la plus gran<strong>de</strong> partie est faite d'une latte <strong>de</strong> fer forgé<br />

d'une épaisseur <strong>de</strong> 5 millimètres percée <strong>de</strong> trous pour <strong>le</strong> passage<br />

<strong>de</strong>s anneaux. L'anneau gourm<strong>et</strong>te fait d'une tige <strong>de</strong> fer ron<strong>de</strong><br />

ayant un diamètre <strong>de</strong> 5 millimètres n'est pas aplati à sa partie<br />

inférieure.<br />

Photo 20. — Mors arabe civil.<br />

Si l'on tenait uniquement compte <strong>de</strong> la puissance <strong>de</strong> <strong>le</strong>vier<br />

<strong>de</strong> ce mors, il serait <strong>le</strong> plus doux <strong>de</strong> ceux que nous avons vus<br />

jusqu'ici. Ce qui <strong>le</strong> rend au contraire <strong>le</strong> plus sévère <strong>de</strong>s mors précé<strong>de</strong>nts,<br />

c'est ;<br />

1° Son passage <strong>de</strong> langue aux arêtes vives encore plus é<strong>le</strong>vé<br />

que celui du mors militaire (7 centimètres au lieu <strong>de</strong> 6);<br />

2° L'anneau gourm<strong>et</strong>te plus mince;<br />

3° Et sourtout <strong>le</strong>s bords non arrondis <strong>de</strong> la latte <strong>de</strong> fer épaisse<br />

<strong>de</strong> 5 millimètres qui appuie sur <strong>le</strong>s barres du <strong>cheval</strong>.<br />

Toutes ces particularités réunies font <strong>de</strong> c<strong>et</strong> instrument, <strong>le</strong><br />

modè<strong>le</strong> du genre, un appareil <strong>de</strong> torture <strong>de</strong>s plus perfectionnés<br />

propre à émouvoir la Société protectrice <strong>de</strong>s animaux <strong>et</strong> qui<br />

<strong>de</strong>vrait en tout cas émouvoir profondément <strong>le</strong> cœur d'un cavalier<br />

digne <strong>de</strong> ce nom...<br />

C. Le mors <strong>de</strong> mu<strong>le</strong>t. — Nous allons voir une toute autre<br />

invention encore plus inferna<strong>le</strong>. Le mors <strong>de</strong> mu<strong>le</strong>t peut être


— 37 —<br />

•assimilé à un <strong>le</strong>vier du premier genre. Ce mors a plus d'eff<strong>et</strong><br />

sur <strong>le</strong> passage <strong>de</strong> gourm<strong>et</strong>te que sur <strong>le</strong>s barres. Il est constitué<br />

par un anneau en fer forgé dans <strong>le</strong>quel passe l'extrémité <strong>de</strong> la<br />

mâchoire inférieure (photo 27). La partie antérieure <strong>de</strong> l'anneau<br />

qui repose par ces côtés sur <strong>le</strong>s barres du <strong>cheval</strong> est ron<strong>de</strong>,<br />

la partie postérieure aplatie <strong>et</strong> à bords tranchants vient appuyer<br />

quand on se sert du mors sur la <strong>barbe</strong> du <strong>cheval</strong>.<br />

Viioto 27. — Mer; <strong>de</strong> mu<strong>le</strong>t.<br />

r Le diamètre <strong>de</strong> la tige ron<strong>de</strong> qui repose sur <strong>le</strong>s barres est <strong>de</strong><br />

1 centimètre, la partie postérieure aplatie dans <strong>le</strong> sens vertical<br />

a une épaisseur <strong>de</strong> 5 centimètres. Ce qui rend surtout ce mors<br />

très dur ce <strong>son</strong>t <strong>le</strong>s arêtes coupantes qui reposent sur la <strong>barbe</strong><br />

du <strong>cheval</strong> justement à l'endroit où vient s'appliquer la force<br />

<strong>de</strong> traction du cavalier. C<strong>et</strong> instrument est un « casse-mâchoire »<br />

<strong>de</strong> tout premier ordre d'une invention vraiment génia<strong>le</strong>.<br />

Bien qu'employé <strong>le</strong> plus souvent avec <strong>le</strong>s mu<strong>le</strong>ts, ce mors est<br />

mis parfois dans la bouche <strong>de</strong>s chevaux <strong>et</strong> plus spécia<strong>le</strong>ment<br />

<strong>de</strong>s chevaux <strong>de</strong> bât. Les Arabes disent qu'avec ce mors, il est<br />

impossib<strong>le</strong> au <strong>cheval</strong> <strong>de</strong>.buter <strong>et</strong> <strong>de</strong> tomber...<br />

Quand on étudie tous ces appareils brutaux <strong>et</strong> féroces n'a-t-on<br />

pas l'impression qu'avec c<strong>et</strong> arsenal ce <strong>son</strong>t <strong>de</strong>s lions, <strong>de</strong>s bêtes<br />

sauvages, <strong>de</strong>s fauves terrifiants que ces Arabes cavaliers ont<br />

entrepris <strong>de</strong> dompter? Ils <strong>son</strong>t si doux, si doci<strong>le</strong>s, si naturel<strong>le</strong>ment<br />

soumis, si bons ces pauvres p<strong>et</strong>its chevaux...


— 38 —<br />

2. — Les moyens d'impulsion.<br />

La connaissance <strong>de</strong>s mors arabes doit déjà faire supposer au<br />

<strong>le</strong>cteur que <strong>le</strong>ur gran<strong>de</strong> dur<strong>et</strong>é a pour conséquence l'accu<strong>le</strong>ment<br />

du <strong>cheval</strong>.<br />

Dans <strong>le</strong> but <strong>de</strong> lutter contre c<strong>et</strong> équilibre défectueux, <strong>le</strong> cavalier<br />

arabe s'arme <strong>de</strong> moyens très puissants pour communiquer<br />

au <strong>cheval</strong> « une im pulsion poussée à l'extrême » ( 1 ).<br />

Nous verrons plus loin si <strong>le</strong> remè<strong>de</strong> employé est capab<strong>le</strong> <strong>de</strong><br />

combattre efficacement <strong>le</strong> mal causé par <strong>le</strong> mors.<br />

Photo 28. — Éperons arabes.<br />

Comme moyens d'impulsion <strong>le</strong> cavalier arabe possè<strong>de</strong> <strong>le</strong>s éperons,<br />

<strong>le</strong> coin <strong>de</strong> l'étrier, <strong>le</strong> choc <strong>de</strong> l'éperon contre l'étrier <strong>et</strong>...<br />

<strong>le</strong> fou<strong>et</strong> dont est munie l'extrémité <strong>de</strong>s rênes.<br />

a) Les éperons. — Les éperons arabes militaires <strong>son</strong>t <strong>le</strong>s mêmes<br />

que <strong>le</strong>s éperons rég<strong>le</strong>mentaires français. Les éperons civils, par<br />

contre, <strong>son</strong>t quelque peu différents, ainsi que <strong>le</strong> montre la photographie<br />

n 0 28.<br />

Ces éperons, il est vrai, ne <strong>son</strong>t pas employés par tous <strong>le</strong>s<br />

cavaliers civils mais on en voit assez souvent cependant qui<br />

<strong>son</strong>t affublés <strong>de</strong> tels instruments; fort heureusement, <strong>le</strong>ur emploi<br />

disparaît <strong>de</strong> plus en plus. Ils étaient surtout d'un usage courant<br />

autrefois, quand l'Arabe était un vrai « ca valier »; ils <strong>le</strong> <strong>son</strong>t<br />

encore dans certaines tribus cavalières du Sud où souvent,<br />

( 1 ) Manuel à Vusage <strong>de</strong>s gradés <strong>de</strong>s Régiments <strong>de</strong> Spahis.


— 39 —<br />

paraît-il, <strong>le</strong>s Arabes n'en portent qu'un seul. Je comprends que<br />

ça <strong>le</strong>ur suffise.<br />

Étant donnée la position <strong>de</strong> jambe du cavalier arabe, on se<br />

rend compte combien ces éperons <strong>son</strong>t dangereux. Il n'est pas<br />

étonnant qu'après <strong>le</strong>s fantasias <strong>le</strong>s flancs <strong>de</strong>s chevaux, labourés,<br />

soient pitoyab<strong>le</strong>s à voir.<br />

b) L'étrier. — Les Arabes renforcent encore l'action <strong>de</strong> la<br />

jambe par l'ang<strong>le</strong> <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs grands étriers. Ce moyen est très dur<br />

<strong>et</strong> je dois dire que <strong>le</strong> Manuel <strong>de</strong>s Gradés <strong>de</strong> Spahis n'en préconise<br />

l'emploi qu'exceptionnel<strong>le</strong>ment.<br />

c) Le choc <strong>de</strong> Véperon contre l' étrier. — L'action <strong>de</strong>s jambes<br />

peut être aussi renforcée par <strong>le</strong> choc <strong>de</strong> l'éperon contre l'étrier<br />

« do nt <strong>le</strong> bruit excite <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> beaucoup plus qu'un, appel <strong>de</strong><br />

langue » ( 1 ). Je <strong>le</strong> conçois !...<br />

d) Uextrémité <strong>de</strong>s rênes. —• L'extrémité <strong>de</strong>s rênes est <strong>de</strong> plus<br />

munie d'un fou<strong>et</strong>. Ce qui est visib<strong>le</strong> dans la photographie 24.<br />

Chaque fois que <strong>le</strong> cavalier se sert <strong>de</strong> ce fou<strong>et</strong>, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> reçoit<br />

en même temps un à-coup sur la bouche du doux p<strong>et</strong>it mors<br />

que nous connais<strong>son</strong>s. Naturel<strong>le</strong>ment, <strong>le</strong> pauvre <strong>cheval</strong> discerne<br />

avec difficulté un comman<strong>de</strong>ment fait dans <strong>de</strong> tel<strong>le</strong>s conditions;<br />

il en résulte une répétition <strong>de</strong> comman<strong>de</strong>ments analogues <strong>de</strong><br />

plus en plus accentués <strong>et</strong> brouillés faits par un cavalier qui<br />

commence à jouer <strong>de</strong>s castagn<strong>et</strong>tes avec ses éperons <strong>et</strong> ses<br />

étriers, en gesticulant d'une façon grotesque. On conçoit sans<br />

peine que tout cela ne peut avoir comme eff<strong>et</strong> sur <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> que<br />

d'émousser <strong>son</strong> perçant <strong>et</strong> sa gentil<strong>le</strong>sse...<br />

(') Manuel à l'usage <strong>de</strong>s gradés <strong>de</strong>s Régiments <strong>de</strong> Spahis.


CHAPITRE II<br />

l'équitation dans <strong>le</strong>s tribus arabes<br />

« Nourris-moi comme ton ami<br />

<strong>et</strong> monte-moi comme ton ennemi<br />

», fa it dire au <strong>cheval</strong> un<br />

proverbe arabe.<br />

c I l faut une intelligence pour<br />

par<strong>le</strong>r au <strong>cheval</strong> <strong>et</strong> non pas une<br />

machine fonctionnant bruta<strong>le</strong>ment.<br />

»<br />

(Bauciier.)<br />

§ 1.—La légen<strong>de</strong> <strong>de</strong> o V Arabe cavalier <strong>et</strong> homme <strong>de</strong> <strong>cheval</strong> a ccompli». Ses<br />

idées sur <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>; comment il l'apprécie; <strong>son</strong> habi<strong>le</strong>té équestre. § 2. —<br />

L'équitation arabe dans <strong>le</strong>s tribus, <strong>le</strong>s fantasias. Comment <strong>le</strong>s Arabes<br />

se servent du mors dans <strong>le</strong>s tribus. Conséquences <strong>de</strong> l'emploi d'un mors<br />

trop dur. « 11 ex iste une relation intime entre la puissance <strong>de</strong>s éperons<br />

<strong>et</strong> cel<strong>le</strong> du mors <strong>de</strong> bri<strong>de</strong>. » C omment <strong>le</strong>s Arabes croient pouvoir rétablir<br />

l'équilibre. Les erreurs fondamenta<strong>le</strong>s <strong>de</strong> l'équitation arabe dans <strong>le</strong>s<br />

tribus : a) l'absence <strong>de</strong> dressage; b) la dur<strong>et</strong>é du mors.<br />

§ 1. — La légen<strong>de</strong> <strong>de</strong> « VArabe cavalier<br />

<strong>et</strong> homme <strong>de</strong> <strong>cheval</strong> accompli ».<br />

Nous allons voir maintenant comment <strong>le</strong> cavalier arabe se<br />

sert <strong>de</strong>s instruments que je viens <strong>de</strong> décrire, d'abord dans <strong>le</strong>s<br />

tribus, ce qui fera l'obj<strong>et</strong> <strong>de</strong>ce chapitre, puis dans <strong>le</strong>s régiments<br />

<strong>de</strong> spahis.<br />

La connaissance <strong>de</strong>s moyens employés par <strong>le</strong> cavalier arabe<br />

doit déjà donner une idée <strong>de</strong> ce qu'il est en réalité.<br />

Je sais bien qu'il faut respecter <strong>le</strong>s légen<strong>de</strong>s si l'on veut<br />

éviter <strong>de</strong> chagriner <strong>son</strong> prochain, mais vraiment je suis forcé,<br />

à mon grand regr<strong>et</strong>, d'en démolir une. Que cela me soit pardonné<br />

! L'Arabe n'est pas un cavalier ; il ne peut prétendre à<br />

ce titre.<br />

Il me paraît nécessaire <strong>de</strong> préciser ici une fois pour toutes la<br />

signification que je donne au mot « cavali er ». Dans mon idée,


— 41 —<br />

un cavalier n'est pas seu<strong>le</strong>ment celui qui monte ou qui tient sur<br />

un <strong>cheval</strong>; c'est aussi, c'est surtout, celui qui aime <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>,<br />

qui <strong>le</strong> connaît, qui ne <strong>le</strong> considère pas comme une machine mais<br />

comme un être sensib<strong>le</strong> doué d'intelligence <strong>et</strong> <strong>de</strong> volonté; c'est<br />

celui qui sait dresser <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>, l'utiliser, <strong>le</strong> mener avec intelligence<br />

<strong>et</strong> avec goût; celui qui est instruit en équitation <strong>et</strong> qui<br />

sait appliquer rationnel<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>s connaissances mécaniques,<br />

psychologiques <strong>et</strong> autres que comporte c<strong>et</strong>te science.<br />

Pour être juste je dois ajouter que je crois l'Arabe très capab<strong>le</strong><br />

<strong>de</strong> <strong>de</strong>venir un cavalier, mais il a besoin pour cela d'être<br />

instruit en équitation. Familiarisé avec <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> dès <strong>son</strong> plus<br />

jeune âge, ar<strong>de</strong>nt, vigoureux, soup<strong>le</strong> <strong>et</strong> allant, tel qu'il est en<br />

ce moment, il est tout prêt à abor<strong>de</strong>r avec fruit « l'écol e <strong>de</strong>s<br />

ai<strong>de</strong>s » <strong>de</strong> notre règ<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> cava<strong>le</strong>rie <strong>et</strong> aussi à apprendre à<br />

aimer <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>.<br />

De même que la légen<strong>de</strong> dont j'ai parlé : « <strong>le</strong> b arbe ne saute<br />

pas », cel<strong>le</strong> <strong>de</strong> « l'Arabe cavalier » n' est rien moins qu'une sottise<br />

qui n'aurait jamais dû se répandre. Le pays qui se prête<br />

aux légen<strong>de</strong>s, une répétition tenace qui évoque la réclame connue<br />

« enfonce z-vous bien çà dans la tête », <strong>le</strong>s récits <strong>de</strong>s voyageurs<br />

qui recherchent « l'eff<strong>et</strong> » <strong>et</strong> la vaste crédulité humaine,<br />

ont donné à ces légen<strong>de</strong>s un faux air <strong>de</strong> vérité. En réalité, <strong>le</strong>ur<br />

plus gran<strong>de</strong> va<strong>le</strong>ur rési<strong>de</strong> dans <strong>le</strong>ur vertu <strong>de</strong> provoquer un rire<br />

irrésistib<strong>le</strong> chez celui qui connaît <strong>le</strong>s Arabes... Et quant à c<strong>et</strong>te<br />

magique proposition « l'Arabe est un cavalier » on entend<br />

ajouter <strong>le</strong> complément habituel « <strong>et</strong> un homme <strong>de</strong> <strong>cheval</strong><br />

accompli », alor s, oh ! alors, <strong>le</strong> rire « d'épigastrique <strong>de</strong>vient abdominal<br />

» comme dirait Daud<strong>et</strong>...<br />

Je sais bien que <strong>de</strong>s documents cités par <strong>le</strong> général Descoins<br />

dans Uéquitation arabe. Ses principes. Sa pratique tentent <strong>de</strong><br />

prouver que l'Arabe nord-africain est un cavalier, que :<br />

« Les Arabes avaient reconnu l'utilité d'un dressage méthodique<br />

<strong>et</strong> connaissaient <strong>le</strong>s moyens <strong>le</strong>s plus rationnels pour y<br />

procé<strong>de</strong>r. » « Ils avaient la notion du <strong>cheval</strong> droit, cel<strong>le</strong> <strong>de</strong> la<br />

légèr<strong>et</strong>é. » Ils n'ignoraient pas la succession <strong>de</strong>s buts à poursuivre<br />

: calme, en avant, droit <strong>et</strong> léger. « Ils connaissaient d'une<br />

manière très complète l'art <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> en condition <strong>et</strong>


— 42 —<br />

<strong>de</strong> l'entraîner en vue <strong>de</strong>s courses <strong>de</strong> vitesse <strong>et</strong> <strong>de</strong> fond très en<br />

honneur chez eux, « qu'ils avaient la notion <strong>de</strong> l'équilibre <strong>et</strong><br />

<strong>de</strong>s moyens <strong>de</strong> l'obtenir », q ue, « au début du dressage, il était<br />

fait usage d'un bridon à canons épais <strong>et</strong> sans articulation, dans<br />

<strong>le</strong> but <strong>de</strong> faire la commissure <strong>de</strong>s lèvres. »<br />

Le cavalier employait ensuite un bridon à canons articulés,<br />

analogue au nôtre, dans <strong>le</strong> but <strong>de</strong> placer la tête du <strong>cheval</strong> à la<br />

bonne hauteur. Enfin <strong>le</strong> cavalier en arrivait au travail en bri<strong>de</strong>.<br />

« Ils pratiquaient aussi, paraît-il, <strong>le</strong> passage, <strong>le</strong>s airs re<strong>le</strong>vés, la<br />

courb<strong>et</strong>te, <strong>et</strong>c., <strong>et</strong>c. ( 1 ). »<br />

Il y a, à mon avis, confusion.<br />

D'abord ces ouvrages datent du xiv e sièc<strong>le</strong> <strong>et</strong> il est très uti<strong>le</strong><br />

<strong>de</strong> savoir <strong>et</strong> <strong>de</strong> ne pas oublier que El Nacéri a été écrit pour <strong>le</strong><br />

sultan d'Égypte El Nacer par Abou Bekr-Ibn Bedr (Ibn ou ben<br />

Bedr) ( 2 ) <strong>et</strong> que ce fds <strong>de</strong> Bedr était un Arabe d'Arabie. Bedr<br />

étant une p<strong>et</strong>ite vil<strong>le</strong> du Hedjaz située non loin <strong>de</strong> la Mer Rouge,<br />

sur la route <strong>de</strong> Médine à la Mecque. Ici, nous sommes en Afrique<br />

<strong>et</strong> <strong>le</strong>s Arabes actuels <strong>de</strong>s tribus dont je par<strong>le</strong>, anciens Numi<strong>de</strong>s,<br />

ne doivent avoir qu'un faib<strong>le</strong> lien <strong>de</strong> parenté avec c<strong>et</strong> Abou<br />

Bekr, écuyer consommé.<br />

Les <strong>de</strong>scendants <strong>de</strong>s Numi<strong>de</strong>s centaures qui montaient <strong>le</strong>urs<br />

chevaux « sans sel<strong>le</strong> <strong>et</strong> sans frein » doiv ent avoir en équitation<br />

(!) J'ai eu la bonne fortune <strong>de</strong> pouvoir lire avant d'avoir achevé ce travail, dans la<br />

Revue <strong>de</strong>. Cav a<strong>le</strong>rie <strong>de</strong> mars-avril 1925, un artic<strong>le</strong> <strong>de</strong> M. Louis MERCIER, consul <strong>de</strong><br />

France, il qui un séjour <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> vingt ans en pays arabes, une connaissance approfondie<br />

<strong>de</strong>s langues <strong>et</strong> dia<strong>le</strong>ctes <strong>de</strong> ces régions <strong>et</strong> une longue pratique <strong>de</strong> l'équitation<br />

confèrent une autorité toute particulière.<br />

Ceci me perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> faire profiter <strong>le</strong> <strong>le</strong>cteur <strong>de</strong>s renseignements très précieux contenus<br />

dans c<strong>et</strong> artic<strong>le</strong> {La bri<strong>de</strong> chez <strong>le</strong>s Arabes) :<br />

a Plus dangereux encore est <strong>le</strong> traducteur cavalier, mais insuffisant en arabe, écrit<br />

M. Louis Mercier, car il fait dire au texte, sans <strong>le</strong> vouloir, <strong>de</strong>s choses qui n'ont jamais<br />

été dans la pensée <strong>de</strong> l'auteur. Et c'est probab<strong>le</strong>ment en puisant dans une traduction<br />

<strong>de</strong> ce genre que l'éminen t spécialiste auquel je pense a cru pouvoir affirmer que<br />

<strong>le</strong>s Arabes emploient au dressage du poulain un mors brisé, véritab<strong>le</strong> fi<strong>le</strong>t, avant <strong>de</strong><br />

l'emboucher avecl'instrument que nous sommes convenus d'appe<strong>le</strong>r mors arabe. En<br />

ce qui me concerne, après vingt ans d'observations sur <strong>le</strong> vit <strong>et</strong> <strong>de</strong> patientes recherches<br />

dans nombre <strong>de</strong> manuscrits arabe, je suis arrivé à une conclusion opposée, <strong>et</strong>c...<br />

« Ces observations, il m'a été donné <strong>de</strong> <strong>le</strong>s faire sous toutes <strong>le</strong>s latitu<strong>de</strong>s <strong>et</strong> parmi<br />

<strong>de</strong>s milliers <strong>de</strong> cavaliers parfois. D'où je conclus que selon toutes probabilités, <strong>le</strong> mors<br />

<strong>de</strong> fi<strong>le</strong>t <strong>le</strong>ur a toujours été inconnu; d'une part, <strong>le</strong>s auteurs n'en font pas mention<br />

explicite <strong>et</strong> ne décrivent aucu n efjel <strong>de</strong> rêne directe ; d'autre part, il n'en subsiste<br />

aucune trace, là ou <strong>le</strong>s traditions arabes ont encore chance d'être observées dans <strong>le</strong>ur<br />

pur<strong>et</strong>é originel<strong>le</strong>. »<br />

(•) « Ibn » ou « ben » ; fils <strong>de</strong>...


— 43 —<br />

bi n peu <strong>de</strong> commun avec ces cavaliers arabes, savants frères<br />

d'Abou Bekr, Arabe d'Arabie.<br />

Il y a Arabe d'Arabie <strong>et</strong> Arabe nord-africain.<br />

M. L ouis Mercier dont j'ai déjà parlé <strong>et</strong> qui est justement <strong>le</strong><br />

traducteur du livre précité <strong>de</strong> Ibn Ho<strong>de</strong>il {La parure du cavalier<br />

<strong>et</strong> Vinsigne <strong>de</strong>s preux) écrit dans <strong>le</strong>s Hippiatres arabes f 1 ) :<br />

« De la <strong>le</strong>cture <strong>de</strong> c<strong>et</strong> exposé, il résulte n<strong>et</strong>tement que <strong>le</strong>s<br />

\<br />

r<br />

I<br />

Photo 29. — Extraite <strong>de</strong> l'artic<strong>le</strong> <strong>de</strong> M. L, Mercier dans <strong>le</strong> Sport Universel Ihastré.<br />

Arabes ont eu, avant <strong>le</strong> XV e sièc<strong>le</strong>, une métho<strong>de</strong> équestre <strong>et</strong><br />

un harnachement ausdi rapprochés que possib<strong>le</strong> <strong>de</strong>s nôtres, quant<br />

aux principes directeurs, <strong>et</strong> fort éloignés <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong> — si<br />

métho<strong>de</strong> il y a — <strong>et</strong> du harnachement <strong>de</strong>s Nord-Africains actuels.<br />

« Ils montaient encore sur sel<strong>le</strong> à peu près plate jusqu'à la<br />

(') Sport Universel du 30 janvier 1925.


44:<br />

fin du xiv e sièc<strong>le</strong>. Ils étaient assis en sel<strong>le</strong>, la jambe en avant,<br />

<strong>le</strong> talon plus bas que la pointe du pied, monte, on <strong>le</strong> voit, très<br />

différente <strong>de</strong> cel<strong>le</strong> que nous voyons aujourd'hui pratiquée par<br />

<strong>le</strong>s Magrébins. Les quelques vign<strong>et</strong>tes qui accompagnent c<strong>et</strong><br />

artic<strong>le</strong> <strong>et</strong> que j'extrais <strong>de</strong> La Parure du cavalier en donneront<br />

une idée (fig. 29). »<br />

Quoi qu'il en soit, au xx e sièc<strong>le</strong>, chez <strong>le</strong>s Arabes d'Afrique,<br />

on ne trouve trace ni d'un semblant d'équitation, ni d'un principe<br />

quelconque <strong>de</strong> dressage; ces Arabes <strong>son</strong>t absolument incapab<strong>le</strong>s<br />

<strong>de</strong> se servir <strong>de</strong>s instruments délicats qu'ils emploient avec<br />

indifférence.<br />

J'expose ce qui existe <strong>et</strong> ce que <strong>son</strong>t en réalité <strong>le</strong>s cavaliers<br />

arabes actuels <strong>de</strong> l'Afrique sans m'occuper <strong>de</strong> textes exhumés<br />

<strong>de</strong> la profon<strong>de</strong>ur <strong>de</strong>s sièc<strong>le</strong>s, textes d'ail<strong>le</strong>urs incapab<strong>le</strong>s <strong>de</strong><br />

prouver que l'Arabe d'Afrique est un cavalier comp<strong>le</strong>t, ayant<br />

<strong>de</strong>s connaissances étendues en equitation.<br />

Ces textes ne montrent à mon sens qu'une chose : c'est que<br />

l'Arabe africain n'a pas appris <strong>le</strong> savoir <strong>de</strong> ses conquérants. Il<br />

a tout à apprendre en équitation arabe d'Arabie. Il en ignore <strong>le</strong><br />

premier mot.<br />

De même qu'ils <strong>son</strong>t venus en Afrique, <strong>le</strong>s Arabes ont été en<br />

Espagne <strong>et</strong> nous trouvons là l'occasion <strong>de</strong> faire un rapprochement<br />

intéressant. Le fait que l'Arabe Ibn Ho<strong>de</strong>il surnommé<br />

El Andalousi a écrit, alors que <strong>le</strong>s Arabes occupaient l'Espagne,<br />

un ouvrage traitant du <strong>cheval</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong> l'équitation ( 1 ) qui montre<br />

que « <strong>le</strong>s Arabes avaient la notion <strong>de</strong> l'équilibre <strong>et</strong> <strong>de</strong>s moyens<br />

<strong>de</strong> l'obtenir », ce fait, dis-je, ne peut prouver que <strong>le</strong>s Espagnols<br />

<strong>son</strong>t <strong>de</strong>s cavaliers <strong>et</strong> <strong>de</strong>s maîtres en équitation arabe...<br />

Les <strong>de</strong>ux Arabes Ibn Bedr <strong>et</strong> Ibn Ho<strong>de</strong>il ne peuvent nous<br />

faire conclure que <strong>le</strong>s Nord-Africains <strong>et</strong> <strong>le</strong>s Espagnols <strong>son</strong>t <strong>de</strong>s<br />

cavaliers consommés possédant <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>s sièc<strong>le</strong>s science <strong>et</strong> art<br />

équestre avancés. Je <strong>le</strong> regr<strong>et</strong>te évi<strong>de</strong>mment, mais la réalité<br />

vient prouver <strong>le</strong> contraire quant aux cavaliers arabes qui nous<br />

occupent à présent. C'est un fait.<br />

(') La Parure <strong>de</strong>s cavaliers <strong>et</strong> l 'insigne <strong>de</strong>s preux.


Photo 30. — Cavaliers arabes d'Arabie.<br />

wmsÊmmkïjmv<br />

Photo 30 bis. — Cavalier arabe nord-africain.


Photo 31. — Harnachement arabe d'Arabie.<br />

Photo 82. — Harna chement arabe nord-africain.


— 45 —<br />

En résumé, nous pouvons dégager <strong>de</strong> c<strong>et</strong> exposé que :<br />

1° L'équitation <strong>de</strong>s Arabes d'Arabie actuels, toujours basée<br />

sur l'assi<strong>et</strong>te, n'a pas varié <strong>de</strong>puis <strong>le</strong> xiv e sièc<strong>le</strong> <strong>et</strong> se rapproche<br />

<strong>de</strong> la nôtre (Comparer fîg. 29 <strong>et</strong> photo 30).<br />

2° Equitation <strong>et</strong> harnachement <strong>de</strong>s Nord-Africains actuels<br />

n'ont absolument rien <strong>de</strong> commun avec ceux <strong>de</strong>s Arabes d'Arabie<br />

qui, eux, ont laissé <strong>le</strong>s traités d'équitation ici mentionnés<br />

(Comparer photos 30, 30 bis , 31 <strong>et</strong> 32).<br />

3° La proposition « l'équitation arabe <strong>et</strong> <strong>le</strong> harnachement<br />

arabe (nord-africains sous entendu) forment un tout » e st radica<strong>le</strong>ment<br />

fausse puisque <strong>de</strong> ces ouvrages sur l'équitation écrits<br />

par <strong>de</strong>s Arabes d'Arabie « il résulte n<strong>et</strong>tement que <strong>le</strong>s Arabes<br />

ont eu, avant <strong>le</strong> xv e sièc<strong>le</strong>, mie métho<strong>de</strong> équestre <strong>et</strong> un harnachement<br />

aussi rapprochés que possib<strong>le</strong> <strong>de</strong>s nôtres, quant<br />

aux principes directeurs, <strong>et</strong> fort éloignés <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong> — si<br />

métho<strong>de</strong> il y a — <strong>et</strong> du harnachement <strong>de</strong>s Nord-Africains<br />

actuels ».<br />

4° L'équitation arabe nord-africaine n'existe pas; dépourvue<br />

<strong>de</strong> toute trace <strong>de</strong> métho<strong>de</strong>, el<strong>le</strong> n'est véritab<strong>le</strong>ment qu'un ensemb<strong>le</strong><br />

<strong>de</strong> procédés empiriques <strong>et</strong> brutaux, irrai<strong>son</strong>nés <strong>et</strong> inconscients.<br />

Avant <strong>de</strong> pénétrer dans <strong>le</strong> cœur du suj<strong>et</strong>, finis<strong>son</strong>s-en avec la<br />

légen<strong>de</strong> <strong>de</strong> F « Ara be cavalier <strong>et</strong> homme <strong>de</strong> <strong>cheval</strong> accompli ».<br />

M. Giniéis, directeur <strong>de</strong> rétablissement d'é<strong>le</strong>vage <strong>de</strong> Sidi Tab<strong>et</strong>,<br />

a écrit dans un Recueil <strong>de</strong> Mé<strong>de</strong>cine vétérinaire sur l'appréciation<br />

<strong>et</strong> l'é<strong>le</strong>vage du <strong>cheval</strong> par <strong>le</strong>s Arabes :<br />

« Une <strong>de</strong>s formes du mirage oriental représente l'Arabe<br />

comme un homme <strong>de</strong> <strong>cheval</strong> accompli. Or, l'Arabe, cavalier<br />

adroit mais vio<strong>le</strong>nt, déroute toutes nos connaissances par<br />

sa façon d'apprécier, <strong>de</strong> soigner <strong>et</strong> d'utiliser <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>. Dans<br />

<strong>le</strong> choix du <strong>cheval</strong>, il paraît accor<strong>de</strong>r plus d'importance à la<br />

tail<strong>le</strong> qu'à la conformation, considérer la longueur <strong>et</strong> la gracilité<br />

<strong>de</strong>s membres comme <strong>de</strong>s signes <strong>de</strong> vitesse <strong>et</strong> n'attacher<br />

aucune va<strong>le</strong>ur à la présence <strong>de</strong>s tares. Au début, il<br />

accab<strong>le</strong> <strong>son</strong> nouveau <strong>cheval</strong> <strong>de</strong> soins rai<strong>son</strong>nes <strong>et</strong> <strong>le</strong> pare<br />

d'un riche harnachement; il <strong>le</strong> néglige bientôt d'une manière<br />

complète. Le harnais, jusque-là verni <strong>et</strong> bien rangé, reste sa<strong>le</strong>,


— 46 —<br />

est j<strong>et</strong>é sur <strong>le</strong> sol <strong>de</strong> l'écurie ou sur la litière, se brise, se sépare<br />

en morceaux déchirés que relient <strong>de</strong>s ficel<strong>le</strong>s ou du fil <strong>de</strong> fer<br />

rouillé. Le <strong>cheval</strong> mal abrité, peu nourri, vit à l'aventure au<br />

gré <strong>de</strong>s sai<strong>son</strong>s. Son maître ne lui par<strong>le</strong> jamais, ne <strong>le</strong> caresse<br />

jamais, <strong>le</strong> frappe <strong>de</strong> sa cravache, lui laboure <strong>le</strong>s flancs <strong>de</strong> <strong>son</strong><br />

éperon ou <strong>de</strong>s ang<strong>le</strong>s tranchants <strong>de</strong> <strong>son</strong> étrier, lui meurtrit la<br />

bouche avec un mors barbare, l'assied bruta<strong>le</strong>ment sur <strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s,<br />

<strong>le</strong> surmène, l'utilise boiteux, l'utilise b<strong>le</strong>ssé, l'utilise mala<strong>de</strong>,<br />

l'utilise mourant... sans égard, sans pitié, sans rai<strong>son</strong>... »<br />

J'ai plaisir à constater que je ne suis pas seul <strong>de</strong> mon avis <strong>et</strong><br />

que je ne suis pas seul non plus à <strong>le</strong> dire.<br />

Je n'ai jamais vu un Arabe caresser <strong>de</strong> lui-même un <strong>cheval</strong>;<br />

toujours j'ai été obligé <strong>de</strong> comman<strong>de</strong>r la caresse.<br />

Je cè<strong>de</strong> la paro<strong>le</strong> à M. Giniéis :<br />

« A part <strong>son</strong> habi<strong>le</strong>té équestre, l'Arabe semb<strong>le</strong> donc n'avoir<br />

aucune notion du <strong>cheval</strong>. »<br />

J'ajouterai même que c<strong>et</strong>te habi<strong>le</strong>té équestre est plutôt due<br />

à sa sel<strong>le</strong> où il trouve tout ce qu'il faut pour se cramponner <strong>et</strong><br />

<strong>de</strong> laquel<strong>le</strong> <strong>le</strong> plus mauvais cavalier ne peut tomber.<br />

« Pou r apprécier <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> — nous dit M. Giniéis, — l'Arabe<br />

examine la conformation, la robe, <strong>le</strong>s épis. »<br />

I. — La conformation. — D'après <strong>le</strong> général Damnas, <strong>le</strong>s Arabes<br />

recherchent :<br />

4 parties longues : l'encolure, <strong>le</strong>s rayons supérieurs <strong>de</strong> l'avantmain,<br />

<strong>le</strong> ventre (du passage <strong>de</strong>s sang<strong>le</strong>s au flanc) <strong>et</strong> <strong>le</strong>s hanches.<br />

4 parties courtes : <strong>le</strong>s oreil<strong>le</strong>s, <strong>le</strong> rein, <strong>le</strong>s paturons <strong>et</strong> la queue.<br />

4 parties larges : <strong>le</strong> front, la poitrine, la croupe, <strong>le</strong>s membres.<br />

« T out en respectant ces exigences qui dénotent une compréhension<br />

rai<strong>son</strong>née <strong>de</strong>s qualités plastiques du <strong>cheval</strong>, <strong>le</strong> Bédoin<br />

attache plus d'importance à d'autres facteurs pourtant secondaires<br />

; il <strong>de</strong>man<strong>de</strong> la réunion <strong>de</strong> douze conditions essentiel<strong>le</strong>s<br />

qui se décomposent en 4 groupes formés chacun <strong>de</strong> 3 parties.<br />

Sa monture doit avoir ;<br />

1° 3 parties longues : a) l'encolure; b) <strong>le</strong> garrot, prolongé<br />

en arrière, assure l'équilibre <strong>et</strong> la stabilité <strong>de</strong> la sel<strong>le</strong>; c) la lèvre<br />

inférieure. C<strong>et</strong>te particularité est fort disgracieuse, mais el<strong>le</strong><br />

porte bonheur au propriétaire <strong>de</strong> l'animal.


— 47 —<br />

« Longueur du garrot <strong>et</strong> longueur <strong>de</strong> la lèvre inférieure, dit<br />

un proverbe arabe, donnent toute facilité pour fuir l'ennemi.<br />

Ainsi conformé <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> a <strong>le</strong> souff<strong>le</strong> puissant, du fond, <strong>de</strong> la<br />

vitesse <strong>et</strong> <strong>de</strong>vient un talisman précieux pour la famil<strong>le</strong>. »<br />

2° 3 parties courtes : a) <strong>le</strong> dos <strong>et</strong> <strong>le</strong> rein, un <strong>de</strong>ssus court<br />

indique un <strong>cheval</strong> trapu fort <strong>et</strong> bon sauteur; b) <strong>le</strong>s paturons,<br />

<strong>le</strong>ur brièv<strong>et</strong>é est un indice <strong>de</strong> force; c) <strong>le</strong> tronçon <strong>de</strong> la queue :<br />

ce qui signifie un <strong>cheval</strong> ramassé <strong>et</strong> très rapi<strong>de</strong>. Queue courte,<br />

queue <strong>de</strong> gazel<strong>le</strong>; queue longue, queue <strong>de</strong> bœuf, affirme <strong>le</strong> dicton<br />

arabe.<br />

3° 3 parties larges : a) <strong>le</strong> poitrail. Sa largeur traduit l'écartement<br />

<strong>de</strong> la pointe <strong>de</strong>s épau<strong>le</strong>s, la force <strong>de</strong> la bête <strong>et</strong> l'amp<strong>le</strong>ur<br />

<strong>de</strong> la poitrine; b) <strong>le</strong> passage <strong>de</strong>s sang<strong>le</strong>s dont <strong>le</strong> développement<br />

transversal comman<strong>de</strong> une vaste capacité thoracique, <strong>le</strong> volume<br />

<strong>de</strong>s poumons <strong>et</strong> par conséquent la résistance à la course ; c) l a<br />

croupe, qui doit être en même temps musclée <strong>et</strong> hanchue. Autrefois<br />

<strong>le</strong>s cavaliers choisissaient <strong>de</strong>s chevaux aux hanches tel<strong>le</strong>ment<br />

proéminentes qu'ils y « suspendaient <strong>le</strong>ur outre p<strong>le</strong>ine<br />

d'eau ». Encore faut-il que la saillie ne soit pas causée par la<br />

maigreur <strong>de</strong> la bête...<br />

4° 3 parties ron<strong>de</strong>s : l'aman<strong>de</strong> <strong>de</strong> la joue (c'est-à-dire <strong>le</strong> plat<br />

<strong>de</strong> la joue <strong>et</strong> la ganache), <strong>le</strong> ventre, <strong>le</strong> sabot. Pour tous <strong>le</strong>s professionnels<br />

<strong>le</strong> beau <strong>cheval</strong> possè<strong>de</strong> un front large, plutôt plat<br />

que bombé, jamais creux, <strong>de</strong>s yeux grands, ronds, bien ouverts<br />

à f<strong>le</strong>ur <strong>de</strong> tête. Le chanfrein doit être légèrement tranchant <strong>et</strong><br />

convexe « comme un bec d'oiseau »... jamais concave ni camus,<br />

car « l a courbe du chanfrein se r<strong>et</strong>rouve dans <strong>le</strong> dos... ». Les<br />

canons étroits d'un côté à l'autre, épais d'avant en arrière, aux<br />

tendons bien détachés, longs, mais toujours moins longs que<br />

l'avant-bras, ne « présenteront pas <strong>de</strong> veines sous-cutanées apparentes<br />

qui accumu<strong>le</strong>nt l'eau dans <strong>le</strong> bas <strong>et</strong> provoquent la formation<br />

<strong>de</strong>s mo<strong>le</strong>ttes ». « Les organes génitaux p<strong>et</strong>its, réguliers,<br />

bien sortis, l'anus arrondi ne sera pas enfoncé entre <strong>le</strong>s ischiums<br />

proéminents, sinon l'animal aspire <strong>et</strong> rej<strong>et</strong>te l'air comme par<br />

la bouche ».<br />

« II. — Les robes. — Dominé par <strong>son</strong> égoïsme féroce <strong>et</strong> <strong>son</strong><br />

esprit superstitieux, l'Arabe ne donne pas seu<strong>le</strong>ment à certains


— 48 —<br />

détails une signification objective, il <strong>le</strong>ur attribue une influence<br />

directe sur sa propre <strong>de</strong>stinée.<br />

« Les robes <strong>et</strong> <strong>le</strong>s épis, par exemp<strong>le</strong>, présentent plutôt <strong>de</strong>s<br />

présages heureux ou funestes que <strong>de</strong>s particularités signalétiques<br />

ou <strong>de</strong>s indices <strong>de</strong> la va<strong>le</strong>ur du <strong>cheval</strong>.<br />

«Les chevaux bais, avec une pelote en tête, ont une résistance<br />

incomparab<strong>le</strong>, tous <strong>son</strong>t bons. L'a<strong>le</strong>zan est <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> pur, il va<br />

comme <strong>le</strong> vent, il vo<strong>le</strong> comme l'oiseau. Sa va<strong>le</strong>ur augmente avec<br />

<strong>le</strong> brunissement <strong>de</strong> la robe. » L'a <strong>le</strong>zan brûlé, légèrement panard,<br />

mérite qu'on lui m<strong>et</strong>te <strong>de</strong>s brace<strong>le</strong>ts aux pieds comme aux<br />

femmes, « <strong>le</strong> gris est la f<strong>le</strong>ur <strong>de</strong>s chevaux ». Bien ou mal nourri,<br />

il marche toujours au gré <strong>de</strong> <strong>son</strong> maître. Le <strong>cheval</strong> noir porte<br />

malheur à la mai<strong>son</strong> où s'arrête <strong>le</strong> cavalier qui <strong>le</strong> monte. Sur<br />

cent chevaux bais, disent <strong>le</strong>s Arabes, tous <strong>son</strong>t bons; sur cent<br />

a<strong>le</strong>zans un seul est mauvais; sur cent gris un seul est excel<strong>le</strong>nt.<br />

III. — Les épis. —- Bien plus que <strong>le</strong>s robes <strong>et</strong> que <strong>le</strong>s marques<br />

<strong>de</strong> la tête, du corps ou <strong>de</strong>s membres, <strong>le</strong>s épis exercent sur l'avenir<br />

du <strong>cheval</strong>, <strong>et</strong> principa<strong>le</strong>ment sur la <strong>de</strong>stinée du propriétaire <strong>de</strong><br />

l'animal, une influence inéluctab<strong>le</strong>. Un vrai connaisseur rej<strong>et</strong>te<br />

tout <strong>cheval</strong> qui porte un épis fâcheux. Nous avons vu souvent<br />

<strong>de</strong>s ach<strong>et</strong>eurs expérimentés refuser pour c<strong>et</strong>te rai<strong>son</strong> <strong>de</strong>s chevaux<br />

bien conformés <strong>et</strong> préalab<strong>le</strong>ment choisis. « A quoi donnes-tu<br />

la préférence ? <strong>de</strong>mandais-je un jour à un professionnel <strong>de</strong> la<br />

smala <strong>de</strong>s Souassis, à la conformation ou aux épis? — Aux<br />

épis, répondait-il. La conformation c'est comme un vase à parfums;<br />

<strong>le</strong>s épis, c'est l'essence que tu y verses <strong>et</strong> que tu respires.<br />

Un très beau <strong>cheval</strong> avec un mauvais épi, je ne l'achèterai<br />

jamais... »<br />

« D 'après <strong>le</strong>s Bédouins il y a <strong>le</strong>s épis <strong>de</strong> la vitesse (nuque),<br />

l'épi du flanc (<strong>le</strong>ur hauteur traduit la va<strong>le</strong>ur du <strong>cheval</strong>), <strong>le</strong>s épis<br />

abdominaux donnent <strong>de</strong>s renseignements sur la longévité <strong>de</strong><br />

l'animal <strong>et</strong> la fortune du propriétaire, <strong>le</strong>s épis <strong>de</strong>s bouc<strong>le</strong>s<br />

d'oreil<strong>le</strong>, à la base <strong>de</strong> la conque auriculaire, assurent la fortune<br />

au propriétaire, l'épi du tombeau ouvert qui condamne <strong>le</strong> maître à<br />

une mort certaine. Aussi funeste que <strong>le</strong> tombeau ouvert, <strong>le</strong>s p<strong>le</strong>ureuses<br />

qui <strong>de</strong>scen<strong>de</strong>nt <strong>le</strong> long <strong>de</strong>s joues comme une traînée <strong>de</strong>


— 49 —<br />

larmes ou comme <strong>de</strong>s égratignures dont <strong>le</strong>s femmes sillonnent<br />

<strong>le</strong>ur visage à l'occasion d'un décès, ils annoncent la mort prochaine<br />

du maître <strong>de</strong> la mai<strong>son</strong>, <strong>et</strong>c... Épis qui annoncent que <strong>le</strong><br />

propriétaire mangera <strong>de</strong>s dattes à volonté, sera serré à la gorge<br />

par la misère, aura la poitrine traversée par une bal<strong>le</strong>, la découverte<br />

imprévue d'un trésor caché, que <strong>le</strong> propriétaire du <strong>cheval</strong><br />

est frénétiquement trompé par sa femme, <strong>et</strong>c...<br />

« Des lége n<strong>de</strong>s fabu<strong>le</strong>uses donnent à <strong>le</strong>ur croyance <strong>le</strong> prestige<br />

magique du merveil<strong>le</strong>ux.<br />

«Bien qu'ils semb<strong>le</strong>nt <strong>le</strong>s négliger, <strong>le</strong>s é<strong>le</strong>veurs arabes connaissent<br />

<strong>le</strong>s tares <strong>et</strong> <strong>le</strong>s maladies principa<strong>le</strong>s. La fourbure est guérie<br />

radica<strong>le</strong>ment par une saignée aux ars; la pousse « qui est la<br />

« fourbure du poumon » se traite par un feu en raies sur la<br />

région précordia<strong>le</strong>; la gourme, <strong>le</strong> mala<strong>de</strong> guérit sans traitement;<br />

tout au plus active-t-on la cure en mélangeant <strong>de</strong>s coquil<strong>le</strong>s<br />

d'œufs aux rations habituel<strong>le</strong>s. Si <strong>le</strong> jétage manque, l'affection<br />

est grave <strong>et</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong> une thérapeutique énergique; on fait dono<br />

courir l'animal, on <strong>le</strong> pousse, on l'essouff<strong>le</strong>; quand il est couvert<br />

<strong>de</strong> sueur, on <strong>le</strong> ramène à l'écurie où on lui m<strong>et</strong> une mus<strong>et</strong>te à<br />

<strong>de</strong>mi p<strong>le</strong>ine <strong>de</strong> cendres criblées <strong>et</strong> froi<strong>de</strong>s qu'il respire ; <strong>le</strong>s coliques,<br />

l'envie ou la colère <strong>le</strong>s provoquent faci<strong>le</strong>ment; contre <strong>le</strong>s<br />

diverses formes <strong>de</strong> coliques, on allume <strong>de</strong> la poudre <strong>de</strong> chasse<br />

<strong>et</strong> on brû<strong>le</strong> <strong>de</strong>s excréments secs <strong>de</strong> pou<strong>le</strong> à quelque distance <strong>de</strong>s<br />

naseaux du mala<strong>de</strong>, la vue soudaine <strong>de</strong> la flamme <strong>et</strong> l'aspiration<br />

<strong>de</strong>s fumées guérissent <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>. Contre <strong>le</strong>s coliques <strong>de</strong><br />

sab<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s empiriques indigènes appliquent un feu en raies sur<br />

<strong>le</strong>s reins, <strong>le</strong>s flancs ou <strong>le</strong> ventre <strong>et</strong> administrent par <strong>le</strong>s naseaux<br />

du beurre fondu suffisamment refroidi.<br />

§ 2. — Uéquitalion arabe dans <strong>le</strong>s tribus.<br />

Salluste dans <strong>son</strong> Jugurtha nous apprend que <strong>le</strong>s Numi<strong>de</strong>s<br />

conduisaient <strong>le</strong>urs chevaux « sans sel<strong>le</strong> <strong>et</strong> sans frein ». Leu rs successeurs<br />

actuels ont eu bien tort <strong>de</strong> laisser déchoir à peu près<br />

complètement c<strong>et</strong>te science.<br />

« A peu près complètement », car l'on voit assez souvent <strong>le</strong>s<br />

Arabes monter chevaux ou mu<strong>le</strong>ts sans frein à toutes <strong>le</strong>s allures;<br />

LE CHEVAL BARBE 4


— 50 —<br />

assis très en arrière sur <strong>le</strong> somm<strong>et</strong> <strong>de</strong> la croupe. Je m'imagine<br />

que <strong>le</strong>s Numi<strong>de</strong>s <strong>de</strong>vaient monter ainsi.<br />

Le <strong>cheval</strong> possè<strong>de</strong> en eff<strong>et</strong> « <strong>de</strong>ux axes <strong>de</strong> mouvement », l'un<br />

situé vers <strong>le</strong> garrot, l'autre au somm<strong>et</strong> <strong>de</strong> la croupe; nous exploitons<br />

<strong>le</strong> premier mais <strong>le</strong>s Arabes savent aussi utiliser <strong>le</strong> second.<br />

L'équitation arabe, dans <strong>le</strong>s tribus, diffère beaucoup <strong>de</strong> l'équitation<br />

qui <strong>de</strong>vrait être pratiquée dans <strong>le</strong>s régiments <strong>de</strong> cava<strong>le</strong>rie<br />

indigènes. El<strong>le</strong> est d'ail<strong>le</strong>urs sensib<strong>le</strong>ment plus logique dans<br />

sa conception <strong>et</strong> surtout moins dangereuse. En eff<strong>et</strong>, <strong>le</strong> mors<br />

arabe étant un instrument très dur <strong>et</strong> toujours manié très bruta<strong>le</strong>ment<br />

par <strong>de</strong>s mains ignorantes, indifférentes <strong>et</strong> dépourvues<br />

<strong>de</strong> tact, un fait important <strong>et</strong> gros <strong>de</strong> conséquences est que<br />

l'Arabe <strong>de</strong>s tribus se sert d'habitu<strong>de</strong> très peu <strong>de</strong> <strong>son</strong> mors. Il<br />

monte <strong>son</strong> <strong>cheval</strong> « dans <strong>le</strong> vi<strong>de</strong> », se sert du mors comme d'un<br />

frein puissant. Ainsi employé, ce mors brutal est bien moins<br />

nocif qu'employé <strong>de</strong> la manière apprise aux Spahis dans <strong>le</strong>s<br />

régiments indigènes où <strong>le</strong> mors arabe détourné, je crois, <strong>de</strong> <strong>son</strong><br />

but originel, ne répond plus du tout à celui que l'on prétend<br />

atteindre.<br />

L'extrême dur<strong>et</strong>é du mors arabe implique la nécessité <strong>de</strong> s'en<br />

servir <strong>le</strong> moins possib<strong>le</strong> <strong>et</strong> par intermittence, en cas <strong>de</strong> besoin,<br />

comme d'un « frein <strong>de</strong> secours ».<br />

Ainsi que nous <strong>le</strong> verrons plus loin <strong>le</strong>s prescriptions du<br />

Manuel à l'usage <strong>de</strong>s Gradés <strong>de</strong>s Régiments <strong>de</strong> Spahis ne tiennent<br />

pas compte <strong>de</strong> ce rapport — dur<strong>et</strong>é du mors, s'en servir très<br />

peu — absolument nécessaire si l'on veut réduire au minimum<br />

<strong>le</strong>s dangers afférents à l'emploi d'un mors trop dur.<br />

Les vrais Arabes, <strong>le</strong>s noma<strong>de</strong>s d'Arabie, montent habituel<strong>le</strong>ment<br />

sans mors. « Ce harnachement simp<strong>le</strong> (couverture <strong>de</strong> feutre<br />

<strong>et</strong> longe <strong>de</strong> laine correspondant à <strong>de</strong>s chaîn<strong>et</strong>tes en laiton qui<br />

passent sur <strong>le</strong> chanfrein en manière <strong>de</strong> caveçon) est, selon toute<br />

probabilité, celui dont <strong>le</strong> Bédouin s'est toujours servi <strong>de</strong>puis<br />

qu'il a <strong>de</strong>s chevaux, soit <strong>de</strong>puis <strong>le</strong> iv e sièc<strong>le</strong> <strong>de</strong> notre ère environ.<br />

Et <strong>son</strong> équitation s'en peut logiquement déduire, c'est cel<strong>le</strong> <strong>de</strong><br />

tous <strong>le</strong>s primitifs, réduite aux seuls moyens instinctifs <strong>et</strong> n'exigeant<br />

d'autre dressage préalab<strong>le</strong> du <strong>cheval</strong> que <strong>de</strong> l'accoutumer<br />

dans sa prime jeunesse, douze mois pour la pouliche, dix-huit


— 51 —<br />

pour <strong>le</strong> poulain, à l'imposition du licol <strong>de</strong> la mirchaha <strong>et</strong> du<br />

poids d'un homme léger. Quant au cavalier, il n'apprend pas<br />

plus à monter à <strong>cheval</strong> qu'à marcher. » (M . Louis Mercier, La<br />

bri<strong>de</strong> chez <strong>le</strong>s Arabes.)<br />

D'après ce que m'ont dit <strong>de</strong>s camara<strong>de</strong>s ayant vécu en Syrie,<br />

<strong>le</strong>s Arabes noma<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s confins du désert arabo-syrien (Amarats,<br />

Anézés, Shahs) conduisent <strong>le</strong>urs chevaux au moyen d'un<br />

licol <strong>et</strong> d'une cor<strong>de</strong> en poils <strong>de</strong> chameaux. A <strong>le</strong>ur sel<strong>le</strong> est accroché<br />

un mors dont ils ne se servent que pour <strong>le</strong> combat ou <strong>le</strong>s<br />

fantasias. Aussi, <strong>le</strong>urs chevaux n'ont jamais l'encolure renversée;<br />

craignant peu la main, ils conservent à toutes <strong>le</strong>s allures un port<br />

d'encolure naturel.<br />

Mais restons en Afrique. L'Arabe <strong>de</strong>s tribus se sert <strong>de</strong> <strong>son</strong><br />

<strong>cheval</strong> pour al<strong>le</strong>r au marché ou à la vil<strong>le</strong> voisine; alors il marche<br />

<strong>le</strong> plus souvent au pas <strong>le</strong>s rênes longues, il ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong> rien à<br />

<strong>son</strong> <strong>cheval</strong> <strong>et</strong> il est évi<strong>de</strong>nt que dans ces conditions celui-ci<br />

souffre peu <strong>de</strong> l'instrument qu'il a dans la bouche. L'Arabe<br />

utilise très rarement <strong>le</strong> trot. Il galope à la chasse <strong>et</strong>, là encore,<br />

il monte « dans <strong>le</strong> vi<strong>de</strong> » <strong>et</strong> se sert <strong>de</strong> <strong>son</strong> mors comme d'un frein;<br />

quand il veut ra<strong>le</strong>ntir ou arrêter <strong>son</strong> <strong>cheval</strong>, il donne un « coup<br />

<strong>de</strong> frein ».<br />

Au début <strong>de</strong> <strong>son</strong> emploi, alors qu'il n'a pas encore <strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s<br />

meurtris, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>, redoutant ce terrib<strong>le</strong> mors, obéit souvent à<br />

une simp<strong>le</strong> indication <strong>et</strong> d'autant mieux que <strong>son</strong> cavalier s'est<br />

moins servi du mors.<br />

A la guerre ou à la chasse, étant donné <strong>le</strong> terrain rocail<strong>le</strong>ux<br />

<strong>et</strong> coupé <strong>de</strong> profonds ravins sur <strong>le</strong>quel il évolue <strong>le</strong> plus souvent,<br />

il est nécessaire que l'Arabe puisse arrêter court sa monture.<br />

C'est, je crois, c<strong>et</strong>te nécessité qui lui a fait adopter un<br />

mors très dur avec <strong>le</strong>quel il puisse arrêter rapi<strong>de</strong>ment <strong>et</strong> au<br />

besoin asseoir n'importe quel <strong>cheval</strong>. Nous verrons tout à<br />

l'heure que c'est une profon<strong>de</strong> erreur <strong>de</strong> croire qu'un mors très<br />

dur peut compenser, remplacer, exclure <strong>le</strong> dressage du <strong>cheval</strong>,<br />

<strong>et</strong> une erreur non moins gran<strong>de</strong> <strong>de</strong> penser que plus <strong>le</strong> mors est<br />

dur plus on sera maitre du <strong>cheval</strong> plus tard <strong>et</strong> mieux on <strong>le</strong><br />

conduira.<br />

«Lui(l'Arabe nord-africain) ne connaît que la formu<strong>le</strong> « rên es


— 52 —<br />

sans jambes ou jambes sans rênes » qu'il applique d'ail<strong>le</strong>urs avec<br />

une très gran<strong>de</strong> brutalité, toujours en surprise. Et s'il aventure<br />

un eff<strong>et</strong> d'ensemb<strong>le</strong>, c'est pour obtenir la e abra<strong>de</strong> ou quelque<br />

autre défense dans <strong>de</strong>s conditions singulièrement comprom<strong>et</strong>tantes<br />

pour <strong>le</strong> bon équilibre <strong>de</strong> <strong>son</strong> <strong>cheval</strong>. Celui-ci, soumis à<br />

une main aussi capricieuse <strong>et</strong> flottante, armée d'un pareil instrument<br />

<strong>de</strong> torture, ne cesse <strong>de</strong> trottiner, se traverser, encenser,<br />

s'encapuchonner ou regar<strong>de</strong>r <strong>le</strong>s étoi<strong>le</strong>s, fuyant <strong>son</strong> frein <strong>de</strong><br />

toutes <strong>le</strong>s manières. » (M. Louis Mercier, La bri<strong>de</strong> chez <strong>le</strong>s<br />

Arabes.)<br />

Mais c'est surtout dans <strong>le</strong>s « fant asias » <strong>et</strong> autres jeux aussi<br />

peu cavaliers que l'Arabe fait un abus funeste du mors.<br />

Les « fanta sias » <strong>son</strong> t <strong>de</strong>s sortes <strong>de</strong> jeux que <strong>le</strong>s Arabes exécutent<br />

dans <strong>le</strong>urs réjouissances. Ils consistent à s'élancer <strong>de</strong><br />

toute la vitesse <strong>de</strong> <strong>son</strong> <strong>cheval</strong>, à revenir sur ses pas ou à s'arrêter<br />

tout court, puis à tourbillonner avec <strong>de</strong> grands cris en<br />

déchargeant ses armes ou à lancer cel<strong>le</strong>s-ci en l'air pour <strong>le</strong>s rattraper<br />

au galop. On conçoit sans effort ce que <strong>de</strong>vient <strong>le</strong> pauvre<br />

<strong>cheval</strong> au milieu du .déchaînement <strong>de</strong> ces excentricités démoniaques<br />

(photos 33 <strong>et</strong> 34).<br />

Parmi <strong>le</strong>s jolis tab<strong>le</strong>aux fortement colorés faits par M. Benjamin<br />

Gastineau dans <strong>son</strong> livre La France en Afrique, j'extrais<br />

quelques <strong>de</strong>scriptions <strong>de</strong> jeux arabes <strong>et</strong> <strong>de</strong> fantasias.<br />

« Qui n'a vu <strong>de</strong>s <strong>le</strong>vr<strong>et</strong>tes lancées dans une plaine sur un<br />

lièvre, qui n'a pas fait sortir du gîte un cerf effrayé ne peut<br />

se faire une idée <strong>de</strong> la vélocité <strong>de</strong> ces p<strong>et</strong>its chevaux arabes<br />

qui se ramassent sur eux-mêmes <strong>et</strong> se déten<strong>de</strong>nt avec une<br />

fougue furieuse, <strong>le</strong> sol s'enflamme sous <strong>le</strong>urs pas, <strong>le</strong>urs crinières<br />

flottent en désordre <strong>et</strong> se mê<strong>le</strong>nt aux draperies <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs cavaliers.<br />

Les concurrents se suivent éga<strong>le</strong>ment, se mesurent <strong>et</strong> se<br />

pressent jusqu'à la moitié <strong>de</strong> la course, mais alors <strong>de</strong>ux<br />

coureurs plus agi<strong>le</strong>s se détachent du gros <strong>de</strong> la troupe <strong>et</strong> bientôt<br />

l'un d'eux franchit d'un bond <strong>de</strong> tigre <strong>le</strong> <strong>de</strong>rnier espace qui <strong>le</strong><br />

séparait du trophée, mais, à peine arrivé il tombe à terre <strong>et</strong><br />

rou<strong>le</strong> ensanglanté, l'Arabe lui avait enfoncé ses longs éperons<br />

dans <strong>le</strong> flanc.<br />

« La véritab<strong>le</strong> fantasia commence, la fougue africaine se


Photo 33. — Une fantasia.<br />

Photo 34. — Une fantasia.


— 53 —<br />

donne libre carrière. Deux cavaliers se détachent <strong>de</strong>s tribus <strong>et</strong><br />

traversent au galop <strong>le</strong> champ <strong>de</strong> courses en faisant tournoyer<br />

au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs têtes <strong>le</strong>urs longs fusils qu'ils j<strong>et</strong>tent en l'air<br />

<strong>et</strong> qu'ils reçoivent droits, en habi<strong>le</strong>s jong<strong>le</strong>urs; puis se dressant<br />

<strong>de</strong> toute <strong>le</strong>ur hauteur sur <strong>le</strong>urs étriers, ils placent la crosse <strong>de</strong><br />

<strong>le</strong>ur arme sous <strong>le</strong>ur aissel<strong>le</strong> <strong>et</strong> ajustent <strong>le</strong>ur ennemi pendant<br />

cinq ou dix minutes avec une précision admirab<strong>le</strong>, sans paraître<br />

<strong>le</strong> moins du mon<strong>de</strong> gênés par la course furibon<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs chevaux<br />

qui s'animent étrangement aux cris <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs maîtres en<br />

bondissant comme <strong>de</strong>s gazel<strong>le</strong>s. Ces <strong>de</strong>ux éclaireurs <strong>son</strong>t suivis<br />

<strong>de</strong> trois, <strong>de</strong> quatre, <strong>de</strong> huit puis <strong>de</strong> dix autres. Enfin <strong>le</strong>s tribus<br />

entières s'ébran<strong>le</strong>nt, tournoient comme une trombe dans la<br />

plaine en répétant l'exercice <strong>de</strong>s premiers cavaliers <strong>et</strong> faisant<br />

r<strong>et</strong>entir l'air <strong>de</strong> nombreuses détonations. Aussitôt <strong>le</strong>s armes<br />

chargées, <strong>le</strong>s chevaux rompus à ce manège « <strong>et</strong> <strong>le</strong>urs barres<br />

aussi... » p ivotent sur eux-mêmes <strong>et</strong> reviennent sur <strong>le</strong>urs pas<br />

avec la même rapidité pour recommencer une nouvel<strong>le</strong> charge<br />

guerrière. Quel<strong>le</strong> rage anime ces Africains ! Quel<strong>le</strong> sauvage fureur!<br />

Comme ils se précipitent sur l'ennemi! Comme ils manœuvrent<br />

à <strong>le</strong>ur aise sur <strong>le</strong>urs chevaux rapi<strong>de</strong>s ! La lutte <strong>le</strong>s exalte.<br />

Ils chargent au milieu d'une ron<strong>de</strong> inferna<strong>le</strong> en j<strong>et</strong>ant <strong>de</strong>s cris<br />

aigus, assourdissants... »<br />

Je recomman<strong>de</strong> d'examiner avec un peu d'attention <strong>le</strong>s photographies<br />

représentant <strong>de</strong>s fantasias, un <strong>de</strong> ces jeux équestres<br />

auxquels se livrent <strong>le</strong>s Arabes... Les attitu<strong>de</strong>s, <strong>le</strong>s gestes douloureux<br />

<strong>de</strong> l'encolure, <strong>de</strong> la tête, <strong>de</strong> la mâchoire <strong>et</strong> <strong>de</strong>s postérieurs<br />

<strong>son</strong>t expressifs. Ils montrent bien (la photographie par<strong>le</strong><br />

mieux qu'un texte) combien <strong>son</strong>t à <strong>le</strong>ur aise ces pauvres malheureux<br />

chevaux, que la main du cavalier est bonne <strong>et</strong> peu<br />

dur <strong>le</strong> mors arabe...<br />

Toutes ces pauvres bouches béantes <strong>et</strong> tordues indiquentel<strong>le</strong>s,<br />

p arce qu'el<strong>le</strong>s <strong>son</strong>t ouvertes, une quelconque soup<strong>le</strong>sse <strong>de</strong><br />

la mâchoire??? Une décontraction confiante??? El<strong>le</strong>s attestent<br />

<strong>le</strong> contraire, el<strong>le</strong>s crient qu'el<strong>le</strong>s souffrent <strong>et</strong> que <strong>le</strong>urs palais<br />

<strong>son</strong>t meurtris.<br />

Comme beaucoup d'autres photographies placées dans c<strong>et</strong><br />

ouvrage, cel<strong>le</strong>s-ci donnent une idée réel<strong>le</strong> <strong>de</strong>s bienfaits <strong>et</strong> <strong>de</strong>s


— 54 —<br />

qualités particulières du mors arabe « beaucoup moins dur qu'on<br />

se l'imagine généra<strong>le</strong>ment ». J'en rappel<strong>le</strong> quelques-unes ici (il<br />

est curieux <strong>de</strong> <strong>le</strong>s lire en regardant ces photographies).<br />

« Il incite automatiquement <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> à décontracter sa mâchoire.<br />

C<strong>et</strong>te décontraction obtenue, <strong>le</strong> mors agissant uniquement<br />

<strong>de</strong> haut en bas amène <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> à fléchir la tête sur la<br />

partie antérieure <strong>de</strong> l'encolure. »<br />

Les cavaliers arabes abusent encore du mors dans <strong>le</strong>s différentes<br />

fêtes données à l'occasion <strong>de</strong>s visites, <strong>de</strong>s mariages, <strong>et</strong>c...<br />

Dans ces fêtes comme dans <strong>le</strong>s fantasias, l'Arabe se soucie peu<br />

<strong>de</strong> malmener <strong>et</strong> <strong>de</strong> martyriser <strong>son</strong> <strong>cheval</strong>; ce qu'il cherche avant<br />

tout, c'est d'être admiré, remarqué. A coups <strong>de</strong> mors ils font<br />

cabrer <strong>le</strong>urs chevaux, <strong>le</strong>s saignent pour qu'ils paraissent fougueux,<br />

<strong>le</strong>s font bondir, ruer à grand renfort <strong>de</strong> « coups <strong>de</strong> <strong>son</strong>n<strong>et</strong>te<br />

» <strong>et</strong> d'éperons, dans <strong>le</strong> but unique <strong>de</strong> se faire remarquer,<br />

<strong>de</strong> passer pour d'extraordinaires cavaliers, d'attirer sur eux<br />

l'attention <strong>de</strong>s femmes qui poussent pour <strong>le</strong>s exciter davantage<br />

<strong>de</strong> gutturaux « you-yous »...<br />

J'ai dit tout à l'heure : da?is <strong>le</strong>s premiers temps que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

est monté il obéit souvent à une simp<strong>le</strong> indication du mors.<br />

Ceci n'est vrai, j'insiste, qu'à ce moment, alors que l'impulsion<br />

n'est pas encore détruite. Il en est tout autrement plus tard<br />

quand l'abus <strong>et</strong> la trop gran<strong>de</strong> dur<strong>et</strong>é du mors ont produit sur<br />

l'impulsion <strong>et</strong> sur <strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s <strong>le</strong>urs désastreux eff<strong>et</strong>s; ce qui ne<br />

tar<strong>de</strong> guère. L'obéissance à une simp<strong>le</strong> indication du mors peut<br />

durer plus longtemps chez quelques rares chevaux spécia<strong>le</strong>ment<br />

soli<strong>de</strong>s, bien conformés, <strong>de</strong> bonne composition, <strong>et</strong> si <strong>le</strong> cavalier<br />

ne se sert du mors que très peu <strong>et</strong> avec beaucoup <strong>de</strong> modération.<br />

Malheureusement, ce n'est pas <strong>le</strong> cas général. Qu'adviendra-t-il<br />

donc <strong>le</strong> plus souvent? L'abus d'un mors trop dur aura<br />

vite fait <strong>de</strong> faire perdre au <strong>cheval</strong> confiance dans la main <strong>de</strong><br />

<strong>son</strong> cavalier, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> poussé en avant sans être maintenu ne se<br />

livrera plus, trouvant sur la main une résistance qui <strong>le</strong> porte<br />

sur l'arrière-main, il perdra vite toute impulsion <strong>et</strong> <strong>de</strong>viendra<br />

inobéissant à l'action <strong>de</strong>s jambes.<br />

Quand <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> en arrive à ce point, l'Arabe renforce ses.


— 55 —<br />

moyens d'impulsion <strong>et</strong> s'affub<strong>le</strong> d'éperons du genre <strong>de</strong> ceux<br />

décrits dans un précé<strong>de</strong>nt chapitre. De tels moyens d'impulsion<br />

ont pour conséquence inévitab<strong>le</strong> un emploi du mors plus<br />

fréquent <strong>et</strong> plus vio<strong>le</strong>nt, car <strong>le</strong> cavalier sera obligé <strong>de</strong> s'opposer<br />

par <strong>le</strong>s rênes à l'eff<strong>et</strong> produit par l'action trop énergique<br />

<strong>de</strong>s jambes. « I l ne faudra pas longtemps dans ces conditions<br />

pour que, sa paresse aidant, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> ne répon<strong>de</strong> plus à une<br />

forte action <strong>de</strong>s jambes que dans <strong>le</strong>s limites restreintes qu'on<br />

lui assigne <strong>et</strong> on aura atrophié chez lui <strong>de</strong> gaité <strong>de</strong> cœur la<br />

faculté précieuse <strong>de</strong> répondre aux <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s <strong>le</strong>s plus légères.<br />

Il <strong>de</strong>viendra, suivant l'expression consacrée, « froid aux jambes »<br />

(Saint-Phal<strong>le</strong>).<br />

Ainsi, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> envoyé trop bruta<strong>le</strong>ment en avant <strong>et</strong> reçu<br />

sur un mors trop dur manié sans précautions perdra inévitab<strong>le</strong>ment<br />

<strong>son</strong> impulsion. « L'arrière-main recevant une sujétion<br />

insupportab<strong>le</strong> du fait <strong>de</strong> la dur<strong>et</strong>é du mors <strong>et</strong> se trouvant surchargée<br />

en souffre <strong>et</strong> il est aisé <strong>de</strong> comprendre que plus<br />

F arrière-main sera douloureuse, plus el<strong>le</strong> sera sensib<strong>le</strong> à l'action<br />

du mors <strong>et</strong> qu'alors celui-ci aura besoin <strong>de</strong> moins <strong>de</strong> dur<strong>et</strong>é<br />

pour agir. Ce ne sera pas par <strong>de</strong>s embouchures dures que l'on<br />

parviendra à rétablir l'équilibre, car, plus on excitera la sensibilité<br />

<strong>de</strong> l'arrière-main plus aussi, pour se soulager, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

se portera en avant ( 1 ). »<br />

Si l'emploi brutal d'un mors trop dur est dangereux <strong>et</strong> nuisib<strong>le</strong>,<br />

nous voyons donc aussi, comme on l'a déjà dit avant<br />

Baucher, « que l'éperon est un rasoir dans la main d'un singe ».<br />

«Sur un <strong>cheval</strong> mal équilibré — dit Baucher — l'eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> l'éperon<br />

ne fait qu'augmenter <strong>le</strong>s résistances du <strong>cheval</strong>, <strong>son</strong> abus<br />

a <strong>le</strong>s plus graves inconvénients. »<br />

Malgré la puissance <strong>de</strong>s moyens d'impulsion que l'Arabe emploie<br />

pour rem<strong>et</strong>tre <strong>son</strong> <strong>cheval</strong> dans <strong>le</strong> mouvement en avant,<br />

<strong>le</strong> mors étant trop dur, ils <strong>de</strong>viennent tôt ou tard fata<strong>le</strong>ment<br />

insuffisants <strong>et</strong> <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> se m<strong>et</strong> en arrière <strong>de</strong> la main <strong>et</strong> peu après<br />

en arrière <strong>de</strong>s jambes.<br />

Les jarr<strong>et</strong>s <strong>de</strong>venant <strong>de</strong> plus en plus douloureux, « <strong>le</strong>s ressorts<br />

( l ) Comte d'Aure.


— 56 —<br />

étant forcés sans avoir été assouplis », <strong>le</strong> mal ne peut faire que<br />

s'accentuer. « Quand <strong>le</strong>s choses en <strong>son</strong>t là, el<strong>le</strong>s ne peuvent<br />

qu'empirer, écrit Baucher, <strong>le</strong> cavalier, dégoûté bientôt <strong>de</strong> l'impuissance<br />

<strong>de</strong> ses efforts, rej<strong>et</strong>era la responsabilité <strong>de</strong> sa propre<br />

ignorance sur <strong>son</strong> <strong>cheval</strong>, il flétrira du nom <strong>de</strong> rosse un animal<br />

dont, avec plus <strong>de</strong> discernement <strong>et</strong> <strong>de</strong> science, il aurait pu<br />

faire une monture doci<strong>le</strong> aux allures agréab<strong>le</strong>s. »<br />

Le mors est ici, comme presque toujours d'ail<strong>le</strong>urs, la source<br />

<strong>de</strong>s résistances, du mauvais équilibre <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur conséquence.<br />

Le colonel A. Gerhard, dans <strong>son</strong> Traité <strong>de</strong>s résistances du<br />

<strong>cheval</strong>, dit qu'il existe une relation intime entre la puissance<br />

<strong>de</strong>s éperons <strong>et</strong> cel<strong>le</strong> du mors <strong>de</strong> bri<strong>de</strong>. Or, étant donnée la faute<br />

initia<strong>le</strong> du mors arabe trop dur <strong>et</strong> <strong>le</strong>s possibilités équestres <strong>de</strong>s<br />

Arabes, pour rétablir l'équilibre, il faudrait augmenter tantôt<br />

la puissance <strong>de</strong>s moyens d'impulsion, tantôt cel<strong>le</strong> du mors selon<br />

que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> tenterait d'échapper à l'un ou à l'autre <strong>de</strong> ces<br />

moyens pour rétablir <strong>son</strong> équilibre compromis ou pour fuir la<br />

dou<strong>le</strong>ur.<br />

Après s'être servi d'éperons fantastiques, il <strong>de</strong>viendrait nécessaire<br />

<strong>de</strong> <strong>le</strong>s remplacer par <strong>de</strong>ux poignards, puis par <strong>de</strong>ux<br />

sabres au bout <strong>de</strong>s talons, <strong>et</strong> puis... je ne vois plus que l'hélice<br />

ou <strong>le</strong> pétard <strong>de</strong> dynamite capab<strong>le</strong>s <strong>de</strong> déplacer <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> franchement<br />

en avant...<br />

C<strong>et</strong>te « lutte pour l'équilibre » me semb<strong>le</strong> comparab<strong>le</strong> à cel<strong>le</strong><br />

qu'entreprendrait quelqu'un qui voudrait équilibrer <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux<br />

plateaux d'une balance en m<strong>et</strong>tant alternativement dans l'une<br />

<strong>et</strong> dans l'autre un poids supérieur à celui qui se trouve dans <strong>le</strong><br />

plateau opposé; ce procédé pourrait continuer jusqu'à la fin,<br />

c'est-à-dire, dans l'exemp<strong>le</strong> choisi, jusqu'à rupture du fléau sans<br />

que l'équilibre ait été atteint.<br />

C<strong>et</strong>te espèce d'équitation instinctive qu'emploient, <strong>le</strong>s Arabes<br />

suffisait peut-être au temps du général Damnas, quand <strong>le</strong>s chevaux<br />

étaient é<strong>le</strong>vés avec une sorte <strong>de</strong> tendresse <strong>et</strong> mil<strong>le</strong> gâteries...<br />

Peut-être, en ce temps-là, supportaient-ils mieux <strong>et</strong> plus<br />

allègrement la main dure <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs cavaliers <strong>et</strong> <strong>le</strong>s raies sanglantes<br />

<strong>de</strong> <strong>le</strong>urs éperons?... Je ne peux y croire.<br />

« Ce contact <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s jours <strong>de</strong> l'Arabe avec <strong>son</strong> <strong>cheval</strong>.


— hl —<br />

écrivait <strong>le</strong> général Daumas, prépare c<strong>et</strong>te docilité que l'on a<br />

tant vantée, c<strong>et</strong>te docilité qu'on admire chez tous <strong>le</strong>s chevaux<br />

arabes. » C <strong>et</strong>te docilité <strong>de</strong> ces pauvres chevaux tenaillés entre<br />

<strong>le</strong>s outils infernaux <strong>de</strong> ces cavaliers, n'était-el<strong>le</strong> pas plutôt en<br />

réalité une sombre résignation, un navrant abrutissement???<br />

Pour moi, <strong>le</strong> doute n'est plus possib<strong>le</strong>.<br />

Les erreurs fondamenta<strong>le</strong>s <strong>de</strong> l'équitation arabe dans <strong>le</strong>s tribus<br />

<strong>son</strong>t donc l'absence <strong>de</strong> dressage <strong>et</strong> la dur<strong>et</strong>é du mors.<br />

a) Uabsence du dressage.—Les Arabes Nord-Africains actuels<br />

n'ont pas <strong>le</strong>s connaissances que nous avons en equitation, ils<br />

n'en soupçonnent même pas <strong>le</strong> plus élémentaire <strong>de</strong>s principes.<br />

Ils n'ont pas du tout assimilé science <strong>et</strong> qualités équestres <strong>de</strong><br />

<strong>le</strong>urs conquérants. Ils <strong>son</strong>t tout à fait ces prétendus cavaliers<br />

<strong>de</strong> la nature, cavaliers innés, centaures ou autres, monstres fort<br />

laids qui peuvent arriver peut-être à routiner quelques chevaux,<br />

mais qui <strong>son</strong>t incapab<strong>le</strong>s d'en dresser. Ils <strong>son</strong>t parfaitement<br />

excusab<strong>le</strong>s <strong>de</strong> ne pas connaître l'utilité du dressage ; ils ignorent<br />

que chez <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> monté il ne peut exister d'allures naturel<strong>le</strong>s,<br />

qu'el<strong>le</strong>s <strong>de</strong>viennent artificiel<strong>le</strong>s du fait du poids du cavalier <strong>et</strong><br />

surtout à cause <strong>de</strong> la répartition inéga<strong>le</strong> <strong>de</strong> ce poids entre l'avant<br />

<strong>et</strong> l'arrière-main ( 1 ).<br />

C<strong>et</strong>te rupture <strong>de</strong> l'équilibre naturel du <strong>cheval</strong>, du fait qu'il est<br />

monté, rend nécessaire un dressage ayant pour but <strong>de</strong> rétablir<br />

l'équilibre troublé par <strong>le</strong> poids du cavalier.<br />

« Dresser un <strong>cheval</strong>, écrit Gustave Le Bon, c'est prolonger<br />

sa durée parce que cela réduit pour lui la somme d'effort<br />

dépensé. » Tous <strong>le</strong>s hommes marchent, <strong>de</strong>ux jambes <strong>le</strong>s<br />

portent, cependant on fait une gran<strong>de</strong> différence entre celui à<br />

qui l'art <strong>de</strong> la gymnastique a donné la science <strong>de</strong> s'en servir <strong>et</strong><br />

celui qui n'a que la démarche grossière <strong>et</strong> naturel<strong>le</strong>. Il en est<br />

donc <strong>de</strong> même du <strong>cheval</strong>, il faut que l'art dénoue la nature<br />

engourdie en lui si l'on veut tirer un parti avantageux <strong>de</strong>s membres<br />

qu'el<strong>le</strong> lui a donnés ( 2 ).<br />

(') li53 expériences du général Morris <strong>et</strong> <strong>de</strong> Baucher, faites en 1835, prouvent que<br />

<strong>le</strong> poids du cavalier est réparti <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux tiers environ sur l'avant-main, l'autre tiers<br />

sur rarrière-main.<br />

( 3 ) Le no uveau Newcasl<strong>le</strong>, ouvrage imprimé en 1771 <strong>et</strong> généra<strong>le</strong>ment attribué au<br />

savant Bourgelat.


— 58 —<br />

b) La dur<strong>et</strong>é du mors. —- Dans <strong>le</strong>ur jugement simpliste, <strong>le</strong>s<br />

Arabes ont commis la grave erreur <strong>de</strong> croire que plus <strong>le</strong> mors<br />

serait dur, plus il serait efficace. C'est une erreur analogue à<br />

cel<strong>le</strong> <strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>cins qui emploient en permanence <strong>le</strong>s remè<strong>de</strong>s<br />

<strong>le</strong>s plus vio<strong>le</strong>nts.<br />

Il est bien prouvé « que <strong>le</strong>s barres du <strong>cheval</strong> <strong>son</strong>t assez sensib<strong>le</strong>s<br />

pour que <strong>le</strong> mors <strong>le</strong> plus doux soit suffisamment actif quand<br />

on n'a pas gâté la bouche du <strong>cheval</strong> ». Ainsi que je <strong>le</strong> disais tout<br />

à l'heure <strong>le</strong> mors est la source <strong>de</strong>s résistances. C'est en vain que<br />

l'on se pend aux rênes <strong>et</strong> qu'on m<strong>et</strong> dans la bouche du <strong>cheval</strong><br />

un instrument d'une puissance barbare pour mieux <strong>le</strong> maîtriser.<br />

Le mors <strong>de</strong>s Arabes <strong>et</strong> la façon dont ils l'emploient éteignent<br />

donc fata<strong>le</strong>ment l'impulsion quoi qu'ils puissent faire pour la<br />

provoquer à nouveau.<br />

« Plus d'impulsion, plus <strong>de</strong> <strong>cheval</strong> », dit <strong>le</strong> général L'Hotte,<br />

<strong>et</strong> Saint-Phal<strong>le</strong>, dans <strong>son</strong> sty<strong>le</strong> imagé, compare <strong>le</strong> manque d'impulsion<br />

à l'eff<strong>et</strong> que peut produire un gouvernail sur un bateau<br />

privé <strong>de</strong> mouvement en avant.<br />

Gustave Le Bon, dans <strong>son</strong> livre : Uéquitalion actuel<strong>le</strong> <strong>et</strong> ses<br />

principes, cite <strong>de</strong>ux peup<strong>le</strong>s célèbres par <strong>le</strong>ur habi<strong>le</strong>té équestre :<br />

<strong>le</strong>s Gauchos <strong>et</strong> <strong>le</strong>s Arabes.<br />

« Si <strong>le</strong>s Arabes — dit-il — savaient placer la tête <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs chevaux<br />

<strong>et</strong> n'abusaient pas quelquefois du mors, on pourrait certainement<br />

affirmer <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur équitation qu'el<strong>le</strong> est parfaite. »<br />

Je trouve c<strong>et</strong>te affirmation un peu rapi<strong>de</strong> <strong>et</strong> subordonnée à<br />

bien <strong>de</strong>s « si ». Si ils n'abusaient pas du mors, si ils savaient<br />

placer la tête <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs chevaux (il faudrait pour cela qu'ils en<br />

comprennent d'abord l'utilité), <strong>et</strong> j'ajouterai : si ils dressaient<br />

<strong>le</strong>urs chevaux, si ils avaient tous <strong>le</strong>s mains <strong>et</strong> <strong>le</strong> tact d'un bon<br />

écuyer, indispensab<strong>le</strong>s pour se servir sans danger <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs mors,<br />

si ils avaient aussi <strong>le</strong> moindre sentiment du <strong>cheval</strong>, si ils aimaient<br />

<strong>le</strong> <strong>cheval</strong> ; alors, alors en eff<strong>et</strong>, peut-être, <strong>le</strong>ur équitation pourrait<br />

paraître parfaite. C<strong>et</strong>te phrase me fait penser au dicton connu :<br />

« Avec <strong>de</strong>s « si » on pourrait m<strong>et</strong>tre Paris dans une bouteil<strong>le</strong> ».


CHAPITRE III<br />

l'equitation arabe dans <strong>le</strong>s régiments <strong>de</strong> spahis<br />

« Quand on fait <strong>de</strong>s règ<strong>le</strong>ments, il<br />

est dangereux <strong>de</strong> conclure <strong>de</strong> la possibilité<br />

à l'acte <strong>et</strong> du particulier au<br />

général » (PORTALIS).<br />

§ 1. Ce qu'el<strong>le</strong> est. — Le cavalier d'aujourd'hui n'est pas ce qu'il était<br />

autrefois. Aujourd'hui plus que Jamais instruction équestre <strong>et</strong> dressage<br />

du <strong>cheval</strong> <strong>son</strong>t nécessaires. Les « bonnes rai<strong>son</strong>s » pour une instruction<br />

restreinte. •— § 2. Ce qu'el<strong>le</strong> <strong>de</strong>vrait être d'après <strong>le</strong> « Manuel à l'usage<br />

<strong>de</strong>s gradés <strong>de</strong>s Régiments <strong>de</strong> Spahis ». — Examen critique <strong>de</strong> ce règ<strong>le</strong>ment.<br />

— § 3. Ce qu'il faudrait qu'el<strong>le</strong> soit. — Avec <strong>le</strong> mors arabe il<br />

faut pratiquer une équitation arabe.<br />

§ 1. — Ce qu'el<strong>le</strong> est.<br />

Chausser <strong>le</strong> burnous rouge ne confère pas à l'Arabe (pas plus<br />

qu'à l'Européen d'ail<strong>le</strong>urs...) <strong>le</strong>s qualités équestres peu communes<br />

nécessaires pour se servir convenab<strong>le</strong>ment du mors arabe.<br />

Le cavalier d'aujourd'hui n'est pas ce qu'il était autrefois.<br />

Tout <strong>le</strong> mon<strong>de</strong> <strong>le</strong> dit, <strong>le</strong> sait. L'instruction doit être adaptée à<br />

c<strong>et</strong>te réalité présente. Les données du problème-instruction<br />

étant changées, il est nécessaire <strong>de</strong> travail<strong>le</strong>r différemment.<br />

Autrefois, <strong>le</strong>s Régiments <strong>de</strong> Spahis étaient composés uniquement<br />

d'engagés volontaires. Ces engagés indigènes arrivaient au<br />

Régiment avec <strong>le</strong>urs chevaux qui restaient <strong>le</strong>ur propriété ; tous<br />

étaient <strong>de</strong>s cavaliers familiarisés avec <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> qu'ils montaient<br />

dès <strong>le</strong>ur plus jeune âge.<br />

A c<strong>et</strong>te époque l'é<strong>le</strong>vage était florissant <strong>et</strong> l'on pouvait dire,<br />

alors, que presque tous <strong>le</strong>s Arabes étaient <strong>de</strong>s cavaliers, ou plus<br />

exactement, <strong>de</strong>s gens qui montaient beaucoup à <strong>cheval</strong>...<br />

Plus tard, <strong>le</strong>s jeunes Bédoins qui venaient s'engager dans <strong>le</strong>s<br />

Régiments <strong>de</strong> Spahis étaient présentés au Colonel <strong>et</strong> j'ai bien<br />

souvent entendu dire que <strong>le</strong> Colonel ne <strong>le</strong>s acceptait que s'ils


— 60 —<br />

avaient la peau du cou-<strong>de</strong>-pied durcie par l'ètri er. Ils portaient<br />

ainsi toujours sur eux <strong>le</strong>ur « brev <strong>et</strong> <strong>de</strong> spécialité <strong>de</strong> cavalier ».<br />

Que <strong>le</strong>s temps ont changé ! Il n'en est plus ainsi. D'abord, <strong>le</strong>s<br />

Arabes ne montent plus à <strong>cheval</strong> comme autrefois; ensuite, à<br />

l'heure actuel<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s Régiments <strong>de</strong> Spahis ne <strong>son</strong>t plus uniquement<br />

composés d'engagés volontaires ; ils comprennent au contraire<br />

une très gran<strong>de</strong> majorité d'appelés.<br />

« Aucune comparai<strong>son</strong> ne peut être faite entre <strong>le</strong> spahi cavalier<br />

<strong>de</strong> métier <strong>et</strong> <strong>le</strong> cavalier <strong>de</strong> circonstance que nous donnera<br />

<strong>le</strong> service <strong>de</strong> dix-huit mois » é crit <strong>le</strong> Général Descoins dans un<br />

artic<strong>le</strong> paru dans une Revue <strong>de</strong> Cava<strong>le</strong>rie.<br />

Si autrefois on pouvait se dispenser (dans une certaine mesure<br />

encore...) <strong>de</strong> faire <strong>de</strong> l'instruction équestre <strong>et</strong> du dressage<br />

<strong>de</strong> chevaux, si on pouvait se perm<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> partir en campagne<br />

avec <strong>de</strong>s « b<strong>le</strong>us », vouloir continuer <strong>de</strong> tels procédés sous prétexte<br />

que « ç a se faisait », comme je l'ai quelquefois entendu<br />

dire, serait une erreur impardonnab<strong>le</strong>.<br />

Instruction équestre <strong>et</strong> dressage du <strong>cheval</strong> ne peuvent donc<br />

plus rester ce qu'ils étaient autrefois.<br />

C<strong>et</strong>te nécessité d'une instruction équestre <strong>et</strong> du dressage <strong>de</strong>s<br />

chevaux a été exposée par <strong>le</strong> Général Descoins dans <strong>son</strong> rapport<br />

au Général commandant la Cava<strong>le</strong>rie d'Algérie i 1 ). El<strong>le</strong> se trouve<br />

encore accrue du fait <strong>de</strong> la dur<strong>et</strong>é du mors arabe.<br />

A défaut <strong>de</strong> bonnes, <strong>de</strong> nombreuses rai<strong>son</strong>s <strong>son</strong>t parfois fournies<br />

en faveur d'une instruction restreinte ; el<strong>le</strong>s <strong>son</strong>t à peu près<br />

<strong>de</strong> c<strong>et</strong> ordre <strong>et</strong> <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te va<strong>le</strong>ur :<br />

« Le s chevaux? Ils ont tous été montés avant d'arriver au<br />

Régiment, par conséquent, il n'y a pas besoin <strong>de</strong> faire du dressage<br />

(sic)... Les cavaliers? Ils <strong>son</strong>t tous déjà montés sur <strong>de</strong>s chevaux,<br />

<strong>de</strong>s mu<strong>le</strong>ts, <strong>de</strong>s ânes ou <strong>de</strong>s chameaux... ils savent tous<br />

tenir à <strong>cheval</strong>, <strong>et</strong> puis, tout <strong>le</strong> mon<strong>de</strong> tient sur la sel<strong>le</strong> arabe.<br />

Par conséquent, la bri<strong>de</strong>, <strong>le</strong>s éperons, tire <strong>de</strong>ssus, rentre <strong>de</strong>dans,<br />

<strong>et</strong> en avant, ça marchera toujours... »<br />

(') 6 Les régiments <strong>de</strong> spahis reçoivent aujourd'hui un contingent notab<strong>le</strong> <strong>de</strong><br />

cavaliers dont il faut faire entièrement l'instruction <strong>et</strong> <strong>de</strong> chevaux qu'il est nécessaire<br />

<strong>de</strong> dresser avant <strong>de</strong> <strong>le</strong>s m<strong>et</strong>tre en service » [V equitation arabe. Ses principes.<br />

Sa pratique).


— 61 —<br />

§ 2. — Ce qu'el<strong>le</strong> <strong>de</strong>vrait être d'après <strong>le</strong> Manuel à l'usage <strong>de</strong>s gradés<br />

<strong>de</strong>s Régiments <strong>de</strong> spahis.<br />

Ce règ<strong>le</strong>ment <strong>de</strong>vrait être étudié non seu<strong>le</strong>ment par <strong>le</strong>s gradés<br />

<strong>de</strong>s Régiments <strong>de</strong> Spahis, mais encore <strong>et</strong> surtout par <strong>le</strong>s officiers<br />

français qui débutent dans ces Régiments. Ils y trouveraient<br />

quantité d'enseignements indispensab<strong>le</strong>s pour éviter <strong>le</strong>s nombreux<br />

« non-sens » que l'on voit se produire; entre autres «l'abus<br />

en instruction du travail sans étriers qui est un non-sens dans<br />

une equitation dont la caractéristique est l'appui constant sur<br />

<strong>le</strong>s étriers ; l'abus <strong>de</strong> la conduite à <strong>de</strong>ux mains en bridon, ce qui<br />

a pour résultat <strong>de</strong> consacrer beaucoup <strong>de</strong> temps à apprendre au<br />

cavalier <strong>le</strong> contraire <strong>de</strong> ce qu'il <strong>de</strong>vra faire lorsqu'il usera <strong>de</strong> la<br />

bri<strong>de</strong> »... L e principe <strong>de</strong> la rêne tendue, <strong>de</strong>s doigts fermés sur<br />

<strong>le</strong>s rênes, <strong>et</strong>c...<br />

Pas plus que je ne me perm<strong>et</strong>s <strong>de</strong> contester qu'un très bon<br />

cavalier peut arriver à la légèr<strong>et</strong>é avec <strong>le</strong> mors arabe, je ne prétends<br />

qu'il y a une façon <strong>de</strong> s'en servir plus rationnel<strong>le</strong> que<br />

cel<strong>le</strong> exposée dans <strong>le</strong> Manuel à l'usage <strong>de</strong>s gradés <strong>de</strong>s Régiments<br />

<strong>de</strong> Spahis : « Dan s l'emploi du mors arabe il est particulièrement<br />

essentiel <strong>de</strong> cé<strong>de</strong>r aussitôt que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> cè<strong>de</strong>. « Ouvrir<br />

<strong>le</strong>s doigts dès que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> mobilise sa mâchoire ». « Si <strong>le</strong> cavalier<br />

ne cè<strong>de</strong> pas à la moindre cession du <strong>cheval</strong>, la pa<strong>le</strong>tte du<br />

mors maintient l'écartement <strong>de</strong>s mâchoires <strong>et</strong> <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> se contracte<br />

la bouche ouverte » ( 1 ).<br />

Mais ce que je crois, c'est qu'en général <strong>le</strong> cavalier arabe n'a<br />

pas <strong>le</strong>s qualités <strong>de</strong> main nécessaires pour appliquer avec précision,<br />

justesse, tact <strong>et</strong> finesse ces excel<strong>le</strong>ntes prescriptions. C'est<br />

là un <strong>de</strong>s points <strong>le</strong>s plus importants sur <strong>le</strong>squels mon opinion<br />

diffère d'avec <strong>le</strong> règ<strong>le</strong>ment.<br />

Quand je dis que je n'attribue pas à l'Arabe <strong>le</strong>s qualités <strong>de</strong><br />

main nécessaires pour qu'il puisse se servir sans danger <strong>de</strong> <strong>son</strong><br />

mors (qualités si rares même chez nous...) je par<strong>le</strong>, bien entendu,<br />

en général.<br />

Ce n'est pas en n'envisageant que <strong>le</strong>s exceptions que l'on doit<br />

(!) L'équilalion arabe. Ses principes. Sa pratique (général DESCOINS).


— 62 —<br />

formu<strong>le</strong>r une règ<strong>le</strong>. Les dérogations à une règ<strong>le</strong> généra<strong>le</strong> ne l'infirment<br />

pas; el<strong>le</strong>s en constatent au contraire l'existence puisque,<br />

sans règ<strong>le</strong>, l'exception n'existerait pas. Or, je crois bien que je<br />

prends pour règ<strong>le</strong> ce que <strong>le</strong> Règ<strong>le</strong>ment <strong>de</strong>s Spahis semb<strong>le</strong> envisager<br />

comme l'exception... Où est la règ<strong>le</strong> <strong>et</strong> où est l'exception?<br />

D'après mes observations, que j'aflirme dépourvues <strong>de</strong> parti<br />

pris, d'après l'étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la réalité <strong>et</strong> <strong>de</strong> nombreuses photographies<br />

prises un peu partout au hasard, sans.aucun doute pour<br />

moi, l'exception, l'exception rare même, est <strong>le</strong> cavalier arabe capab<strong>le</strong><br />

du tact, <strong>de</strong> la légèr<strong>et</strong>é, du doigté, <strong>de</strong> l'art <strong>et</strong> <strong>de</strong> la science<br />

nécessaires pour se bien servir <strong>de</strong> c<strong>et</strong> instrument délicat entre<br />

tous.<br />

Si j'osais, je soupçonnerais bien un peu <strong>le</strong> Manuel à F usage<br />

<strong>de</strong>s gradés <strong>de</strong>s Régiments <strong>de</strong> Sp ahis <strong>de</strong> situer l'exception là où<br />

je la place moi-même. « Ces attitu<strong>de</strong>s essentiel<strong>le</strong>ment défectueuses,<br />

dit-il (encolure vertica<strong>le</strong>, tête horizonta<strong>le</strong>, mâchoire<br />

contractée) dont on ne voit que <strong>de</strong> trop jréquents exem p<strong>le</strong>s, ren<strong>de</strong>nt<br />

<strong>le</strong> <strong>cheval</strong> impossib<strong>le</strong> à manier <strong>et</strong> l'usent prématurément.<br />

El<strong>le</strong>s dénotent d'une façon caractéristique la dur<strong>et</strong>é <strong>de</strong> la main<br />

du cavalier <strong>et</strong> l'inexpérience <strong>de</strong> celui-ci »...<br />

Nous allons à présent examiner ce règ<strong>le</strong>ment avec attention.<br />

Le Manuel à Vusage <strong>de</strong>s gradés <strong>de</strong>s Régiments <strong>de</strong> Spahis comprend<br />

cinq parties :<br />

P e partie. —• Généralités. L'instructeur. Le cavalier indigène.<br />

Le <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>. Le harnachement arabe. Des moyens équestres<br />

du cavalier arabe. De la position du cavalier en sel<strong>le</strong> arabe.<br />

2 e partie. — Équitation. Métho<strong>de</strong> d'instruction <strong>de</strong>s recrues.<br />

3 e partie. — Éco<strong>le</strong> du cavalier à <strong>cheval</strong>.<br />

4 e partie. — Perfectionnement <strong>de</strong> l'équitation <strong>de</strong>s gradés.<br />

5 e partie. — Dressage du <strong>cheval</strong>.<br />

Je ne détail<strong>le</strong>rai pas chacune <strong>de</strong> ces parties, je me bornerai à<br />

cueillir dans chacune d'el<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s passages <strong>et</strong> <strong>le</strong>s idées susceptib<strong>le</strong>s<br />

<strong>de</strong> nous fournir <strong>de</strong>s éléments d'appréciation <strong>et</strong> <strong>de</strong> conclusion.<br />

première partie<br />

a) Des moyens équestres du cavalier arabe. — « Des expl ications


— 63 —<br />

données précé<strong>de</strong>mment sur <strong>le</strong> mors arabe, il résulte que si l'on<br />

suppose <strong>le</strong> cavalier monté, en marche sur une ligne droite, une<br />

action simultanée sur <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux rênes du mors bien employé sur<br />

un <strong>cheval</strong> dressé p roduira la mobilité do la mâchoire <strong>et</strong> la f<strong>le</strong>xibilité<br />

<strong>de</strong> la tête au bout d'une encolure affaissée. »<br />

J'ai déjà parlé <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te simili-soup<strong>le</strong>sse <strong>de</strong> mâchoire, je n'y<br />

reviendrai pas. A quelques exceptions près, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> arabe<br />

dressé <strong>et</strong> <strong>le</strong> cavalier arabe capab<strong>le</strong> <strong>de</strong> bien employer ce mors<br />

<strong>son</strong>t p<strong>le</strong>ins <strong>de</strong> qualités, mais malheureusement ils <strong>le</strong>s gâtent par<br />

<strong>le</strong> même défaut que la jument du paladin Roland...<br />

« L'affaissement <strong>de</strong> l'encolure n'est pas à condamner, au<br />

•contraire, pour l'emploi du <strong>cheval</strong> arabe dont <strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s coudés<br />

<strong>et</strong> souvent défectueux supporteraient généra<strong>le</strong>ment mal la surcharge<br />

qui résulterait pour eux <strong>de</strong> l'élévation <strong>de</strong>.l'encolure. »<br />

C<strong>et</strong> affaissement <strong>de</strong> l'encolure, parfaitement réel d'ail<strong>le</strong>urs,<br />

prouve <strong>de</strong> façon très n<strong>et</strong>te que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> est acculé <strong>et</strong> que ses<br />

jarr<strong>et</strong>s <strong>son</strong>t ruinés ; mais c<strong>et</strong>te position d'encolure est-el<strong>le</strong> une<br />

qualité ?<br />

Tous <strong>le</strong>s écuyers reconnaissent qu'il ne peut y avoir <strong>de</strong> <strong>cheval</strong><br />

équilibré <strong>et</strong> faci<strong>le</strong>ment maniab<strong>le</strong> qu'avec l'encolure re<strong>le</strong>vée. On<br />

pourra me dire, évi<strong>de</strong>mment, que je ne connais rien en équitation<br />

arabe, que je ne comprends pas <strong>le</strong> <strong>barbe</strong>... C'est commo<strong>de</strong>...<br />

Mais, que vou<strong>le</strong>z-vous, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> est fait comme <strong>le</strong>s autres;<br />

il a quatre pattes, <strong>le</strong> nez, la queue <strong>et</strong> <strong>le</strong> centre <strong>de</strong> gravité à la<br />

même place que <strong>le</strong>s autres, <strong>et</strong>, comme <strong>le</strong>s autres, je pense que<br />

<strong>le</strong> <strong>barbe</strong> ne peut être placé <strong>et</strong> convenab<strong>le</strong>ment équilibré qu'avec<br />

une tête fléchie sur une encolure é<strong>le</strong>vée. « L'enc olure basse, écrit<br />

très justement Gustave Le Bon, enseigne simp<strong>le</strong>ment au <strong>cheval</strong><br />

à se soustraire aux exigences <strong>de</strong> <strong>son</strong> cavalier. »<br />

L'encolure affaissée <strong>de</strong>meurera donc toujours <strong>et</strong> dans n'importe<br />

quel<strong>le</strong> sorte d'équitation une position défectueuse car el<strong>le</strong><br />

indique que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> lutte contre <strong>le</strong> mors ou la main, contre la<br />

dou<strong>le</strong>ur ou contre un mauvais équilibre.<br />

L'affaissement <strong>de</strong> l'encolure dégage évi<strong>de</strong>mment <strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s,<br />

mais d'abord, pourquoi <strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s ont-ils besoin d'être dégagés?<br />

Parce qu'ils <strong>son</strong>t abîmés sans doute. Ne valait-il pas mieux ne<br />

pas <strong>le</strong>s abîmer? Et qu'est-ce donc qui <strong>le</strong>s a abîmés sinon ce mors


— 64 —<br />

auquel on s'ingénie à trouver toutes <strong>le</strong>s qualités?... Mais c'est<br />

ainsi. On ne veut pas voir <strong>le</strong>s dégâts qu'il comm<strong>et</strong> <strong>et</strong> on lui<br />

attribue <strong>le</strong>s qualités propres à <strong>le</strong>s réparer...<br />

Ce n'est pas clans ses eff<strong>et</strong>s qu'on attaque un mal, c'est dans<br />

sa cause.<br />

Ainsi que j'ai eu l'occasion <strong>de</strong> <strong>le</strong> dire, c<strong>et</strong> affaissement <strong>de</strong> l'encolure,<br />

conséquence inévitab<strong>le</strong> <strong>de</strong> l'accu<strong>le</strong>ment, est bien un eff<strong>et</strong><br />

du mors, mais <strong>de</strong> sa trop gran<strong>de</strong> dur<strong>et</strong>é. Ce mors trop dur nécessiterait,<br />

je <strong>le</strong> répète, pour que <strong>son</strong> emploi soit inoffensif, une<br />

main d'écuyer; seul en eff<strong>et</strong> un écuyer peut, à la rigueur, se<br />

passer du fi<strong>le</strong>t.<br />

Il est à remarquer d'ail<strong>le</strong>urs que l'encolure n'est complètement<br />

affaissée que lorsque <strong>le</strong> cavalier ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong> rien à <strong>son</strong> <strong>cheval</strong>,<br />

quand il a <strong>le</strong>s rênes longues, en station, au pas, <strong>et</strong> quelquefois<br />

au galop avec quelques rares chevaux spécia<strong>le</strong>ment calmes, résistants,<br />

bien établis, qui <strong>son</strong>t arrivés à une indifférente placidité<br />

ou qui ne <strong>son</strong>t pas encore dressés tout à fait à 1'equitation<br />

arabe...<br />

Le cavalier arabe n'ayant aucun principe <strong>et</strong> aucune connaissance<br />

en équitation (j'ai eu tout <strong>le</strong> temps <strong>et</strong> toute <strong>le</strong>s occasions<br />

pour m'en rendre compte d'une façon certaine) ne fait jamais<br />

un tourner, par exemp<strong>le</strong>, sans agir avec <strong>son</strong> mors d'avant en<br />

arrière; résultat : l'action du mors étant en contradiction avec<br />

<strong>le</strong>s jambes au lieu d'en être la conséquence, provoque forcément<br />

<strong>le</strong>s résistances à la main. Ce n'est là qu'un exemp<strong>le</strong> entre mil<strong>le</strong><br />

autres pareils. En supposant un <strong>cheval</strong> dressé, il sera <strong>de</strong> la sorte<br />

rétif avant quinze jours avec <strong>le</strong> cavalier arabe <strong>le</strong> meil<strong>le</strong>ur, ou <strong>le</strong><br />

moins mauvais...<br />

Aussi, dès que <strong>le</strong> cavalier arabe veut se servir du mors <strong>et</strong><br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r quelque chose à <strong>son</strong> <strong>cheval</strong>, fata<strong>le</strong>ment, celui-ci, craignant<br />

<strong>le</strong> mors <strong>et</strong> cherchant à se soustraire à <strong>son</strong> action, porte<br />

au vent ou s'encapuchonné. Schématiquement, on peut représenter<br />

ces <strong>de</strong>ux positions extrêmes comme l'indique la figure 35.<br />

Le plus souvent <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> arabe porte <strong>le</strong> nez au vent à cause<br />

<strong>de</strong> la position <strong>de</strong> main du cavalier arabe (fig. 36). Il tente <strong>de</strong><br />

rapprocher <strong>le</strong> mors <strong>de</strong> l'endroit où se trouve la main du cavalier;<br />

il porte sa tête <strong>de</strong> B en B z en renversant <strong>son</strong> encolure, croyant


Fig. 35. — Le port au veni <strong>et</strong> rencapuchonnement.<br />

B*<br />

Fig. 36. — Eff<strong>et</strong>s du renversement <strong>de</strong> l'encolure<br />

sur la distance qui sépare <strong>le</strong> mors <strong>de</strong> la main.<br />

A<br />

Fig. 37. — Encolure renversée. Pour tenter <strong>de</strong> rétablir l'équilibre,<br />

<strong>le</strong> <strong>cheval</strong> pousse en avant la base <strong>de</strong> <strong>son</strong> encolure.<br />

Vboto 38. — Encolure renversée.


— 65 —<br />

qu'ainsi <strong>le</strong>s rênes seront moins tendues <strong>et</strong> pour diminuer aussi la<br />

puissance <strong>de</strong> <strong>le</strong>vier du mors.<br />

II n'est plus possib<strong>le</strong> au <strong>cheval</strong> ainsi placé, encolure renversée<br />

<strong>et</strong> tête horizonta<strong>le</strong>, <strong>de</strong> baisser <strong>son</strong> encolure car chaque fois qu'il<br />

voudra <strong>le</strong> faire il rencontrera <strong>le</strong> mors. Si <strong>son</strong> cavalier lui rend<br />

<strong>de</strong>s rênes, ou il baissera très pru<strong>de</strong>mment la tête car il sait fort<br />

bien qu'ayant la tête basse <strong>le</strong> mors agit sur ses barres avec plus<br />

<strong>de</strong> puissance, ou il profitera <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te liberté inattendue pour<br />

tenter d'échapper à la main <strong>de</strong> <strong>son</strong> cavalier. A la moindre action<br />

du mors il rem<strong>et</strong>tra sa tête dans c<strong>et</strong>te position horizonta<strong>le</strong>.<br />

C'est pour ces rai<strong>son</strong>s que l'on voit peu <strong>de</strong> chevaux <strong>barbe</strong>s<br />

s'encapuchonner, ils ont tous plutôt la position inverse qui procè<strong>de</strong><br />

d'ail<strong>le</strong>urs du même défaut.<br />

Je disais tout à l'heure que l'encolure n'est complètement<br />

affaissée <strong>et</strong> ne peut dégager avec efficacité <strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s que lorsque<br />

<strong>le</strong> cavalier ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong> rien au <strong>cheval</strong>.<br />

J'insiste sur ce mot « complètement » car, chez <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> portant<br />

au vent, la partie inférieure <strong>de</strong> Vencolure <strong>de</strong>meure affaissée. C'est<br />

un fait important qui, à ma connaissance, n'a jamais été mentionné<br />

nul<strong>le</strong> part.<br />

Dans la position du <strong>cheval</strong> qui porte au vent, l'encolure ne<br />

se « casse » p£ u garrot, aux <strong>de</strong>rnières vertèbres cervica<strong>le</strong>s<br />

comme on pourvut <strong>le</strong> croire, mais <strong>le</strong> plus en avant possib<strong>le</strong>. Le<br />

<strong>cheval</strong> lutte contre <strong>le</strong>s eff<strong>et</strong>s du raccourcissement <strong>de</strong> <strong>son</strong> balancier,<br />

il cherche à rétablir ainsi l'équilibre <strong>et</strong> à décharger ses jarr<strong>et</strong>s<br />

trop comprimés. Dans <strong>le</strong> but <strong>de</strong> reporter du poids en avant<br />

il place <strong>son</strong> encolure non pas dans la position 0 A, mais dans la<br />

position 0 B, en refoulant <strong>le</strong> poids <strong>de</strong> <strong>son</strong> balancier en avant<br />

dans <strong>le</strong> sens indiqué par la flèche sur la figure 37 <strong>et</strong> photographie<br />

38.<br />

D'après <strong>le</strong> capitaine <strong>de</strong> Saint-Phal<strong>le</strong> <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> peut avancer<br />

<strong>son</strong> centre <strong>de</strong> gravité <strong>de</strong> trois façons :<br />

H peut déplacer l'équilibre, faire passer en avant <strong>de</strong> <strong>son</strong><br />

centre <strong>de</strong> gravité <strong>le</strong> poids nécessaire pour perm<strong>et</strong>tre <strong>le</strong> mouvement<br />

dans ce sens : soit en abaissant <strong>et</strong> en étendant l'encolure,<br />

soit en baissant l'encolure étendue <strong>et</strong> en marquant un<br />

glissement <strong>de</strong> toute la masse vers l'avant-main, soit en é<strong>le</strong>vant<br />

LE CHEVAL BARDE 9


— 66 —<br />

F encolure <strong>et</strong> en ne penchant en avant par <strong>le</strong> jeu <strong>de</strong>s bou<strong>le</strong>ts<br />

<strong>et</strong> <strong>de</strong>s jarr<strong>et</strong>s que <strong>le</strong> reste du corps.<br />

Pour préciser <strong>et</strong> compléter c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière façon, je crois qu'on<br />

pourrait dire :<br />

En é<strong>le</strong>vant la partie supérieure <strong>de</strong> l'encolure <strong>et</strong> en affaissant<br />

sa base, dans <strong>le</strong> but <strong>de</strong> j<strong>et</strong>er du poids en avant pour contrebalancer<br />

l'eff<strong>et</strong> produit par l'élévation <strong>de</strong> la partie supérieure<br />

qui en reporte en arrière, à la façon <strong>de</strong> l'homme qui pour pouvoir<br />

se porter en avant en m<strong>et</strong>tant <strong>le</strong> haut du corps en arrière<br />

est obligé d'avancer la ceinture.<br />

Je ne crois pas que <strong>le</strong> « jeu <strong>de</strong>s jarr<strong>et</strong>s <strong>et</strong> <strong>de</strong>s bou<strong>le</strong>ts » s eul,<br />

sans déplacement préalab<strong>le</strong> <strong>de</strong> l'équilibre vers l'avant, puisse<br />

provoquer <strong>le</strong> mouvement dans ce sens. Pour que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> qui<br />

a l'encolure renversée puisse avançer, il faut qu'il avance <strong>son</strong><br />

centre <strong>de</strong> gravité ; il <strong>le</strong> fait en affaissant, en comprimant, en<br />

écrasant la base <strong>de</strong> <strong>son</strong> encolure <strong>de</strong> façon à en refou<strong>le</strong>r <strong>le</strong> poids<br />

vers l'avant. Ce déplacement du centre <strong>de</strong> gravité entraînera <strong>le</strong>s<br />

épau<strong>le</strong>s, <strong>le</strong>s antérieurs, alors, pourront entrer en action pour<br />

étayer la masse <strong>et</strong> <strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s en jeu pour la pousser.<br />

C<strong>et</strong> affaissement <strong>de</strong> l'encolure, dont par<strong>le</strong> <strong>le</strong> règ<strong>le</strong>ment décè<strong>le</strong><br />

donc un mauvais équilibre du <strong>cheval</strong>, une mauvaise répartition<br />

du poids, l'accu<strong>le</strong>ment ayant pour conséquence fina<strong>le</strong> <strong>de</strong>s jarr<strong>et</strong>s<br />

surchargés, forcés, ruinés, épuisés, rompus.<br />

« Il n'en est pas moins vrai — dit <strong>le</strong> règ<strong>le</strong>ment — que l'attitu<strong>de</strong><br />

dont il s'agit » (il pourrait dire plus exactement : <strong>le</strong> mors<br />

dont il s'agit...) « prédispo se <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> à se m<strong>et</strong>tre en arrière <strong>de</strong><br />

la main <strong>et</strong> même en arrière <strong>de</strong>s jambes si el<strong>le</strong> n'est pas compensée<br />

par une impulsion poussée à l'extrême.<br />

« C'est ici que <strong>le</strong> reste du harnachement arabe intervient pour<br />

obliger <strong>le</strong> cavalier à corriger ce que l'eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> la bri<strong>de</strong> pourrait<br />

avoir <strong>de</strong> défectueux. » « Les jambes constamment au contact, ne<br />

peuvent agir que pour pousser <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> en avant » <strong>et</strong> plus loin :<br />

« Le ca valier dispose donc <strong>de</strong> moyens d'impulsion très puissants<br />

avec <strong>le</strong>squels il n'a pas à craindre que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> se m<strong>et</strong>te en<br />

arrière <strong>de</strong>s jambes <strong>et</strong> à plus forte rai<strong>son</strong> en arrière <strong>de</strong> la main. »<br />

Ici, <strong>le</strong> Manuel <strong>de</strong>s Spahis comm<strong>et</strong> l'erreur que j'ai signalée<br />

dans <strong>le</strong> chapitre précé<strong>de</strong>nt, à savoir : la vaine course à l'équi-


— 67 —<br />

ibre par <strong>de</strong>s moyens trop durs, qui rej<strong>et</strong>tent trop vio<strong>le</strong>mment<br />

<strong>de</strong>. Charyb<strong>de</strong> en Scylla une impulsion qui ne peut que sombrer<br />

entre ces <strong>de</strong>ux forces bruta<strong>le</strong>s.<br />

En outre, d'après la position du cavalier arabe, <strong>le</strong>s jambes<br />

se trouvant « co nstamment au contact » d es flancs du <strong>cheval</strong><br />

<strong>et</strong> agissant toujours ainsi à l'endroit où el<strong>le</strong>s <strong>son</strong>t susceptib<strong>le</strong>s<br />

<strong>de</strong> produire <strong>le</strong>ur maximum d'eff<strong>et</strong>, <strong>le</strong> cavalier ne possè<strong>de</strong> plus<br />

aucune « réserve <strong>de</strong> comman<strong>de</strong>ment » pour contraindre <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

à l'obéissance. Dans ces conditions, celui-ci, sa paresse aidant,<br />

<strong>de</strong>viendra vite froid aux jambes, blasé <strong>de</strong> l'éperon, <strong>et</strong> prendra<br />

l'habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> n'y plus cé<strong>de</strong>r. C'est <strong>le</strong> terme fatal <strong>et</strong> constaté<br />

auquel ces instruments <strong>et</strong> c<strong>et</strong>te equitation l'amènent tôt ou tard.<br />

La certitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te inobéissance à la jambe est augmentée<br />

encore du fait que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> ne trouve pas dans la main un appui<br />

confiant pour l'impulsion qui lui est communiquée, mais au<br />

contraire une souffrance qui fait rebondir c<strong>et</strong>te impulsion en<br />

arrière du centre <strong>de</strong> gravité. Ce qui provoque la surcharge, puis<br />

la ruine <strong>de</strong>s jarr<strong>et</strong>s <strong>et</strong> l'extinction du moteur.<br />

b) Étu<strong>de</strong> du mo<strong>de</strong> d'action <strong>de</strong>s ai<strong>de</strong>s. — « Le s jambes n'ont<br />

qu'un but unique : produire l'impulsion.<br />

« L' action d'une jambe isolée pour produire <strong>le</strong> déplacement<br />

latéral <strong>de</strong> F arrière-main n'est jamais employé dans l'équitation<br />

arabe. »<br />

Je prie <strong>le</strong> <strong>le</strong>cteur <strong>de</strong> bien remarquer c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière phrase.<br />

Nous verrons quelques pages plus loin que ce principe n'est pas<br />

respecté.<br />

Les rênes. — Après avoir indiqué <strong>le</strong>s différents eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong> rênes,<br />

<strong>le</strong> Règ<strong>le</strong>ment poursuit ; « Le cavalier doit éviter soigneusement<br />

<strong>de</strong> porter la main en arrière en tirant éga<strong>le</strong>ment sur <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux<br />

rênes. C'est un procédé que seuls, <strong>le</strong>s cavaliers expérimentés »<br />

(inexpérimentés sans doute) « emploient pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>le</strong> ra<strong>le</strong>ntissement<br />

ou l'arrêt. Il a fata<strong>le</strong>ment pour résultat <strong>de</strong> déséquilibrer<br />

<strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>et</strong> par suite n'a pas sa place dans une equitation<br />

rationnel<strong>le</strong>. » « Ils peuvent (<strong>le</strong>s déplacements <strong>de</strong> main), lorsqu'un<br />

cavalier habi<strong>le</strong> monte un <strong>cheval</strong> mis, se réduire à <strong>de</strong>s<br />

torsions ou <strong>de</strong>s rotations du poign<strong>et</strong>. » « L'action <strong>de</strong>s doigts sur<br />

<strong>le</strong>s rênes sollicite la f<strong>le</strong>xion complète <strong>de</strong> la mâchoire <strong>et</strong> <strong>de</strong> la


—— 68 —<br />

partie antérieure <strong>de</strong> l'encolure dans <strong>le</strong> plan médian du <strong>cheval</strong><br />

(mise en main). »<br />

Sans employer <strong>le</strong> terme, <strong>le</strong> Manuel à l'usage <strong>de</strong>s Spahis <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />

d'abord la main fixe; or, sans assi<strong>et</strong>te il ne peut y avoir<br />

<strong>de</strong> main fixe <strong>et</strong> la fixité du cavalier arabe est un peu comparab<strong>le</strong><br />

à cel<strong>le</strong> <strong>de</strong> l'oeuf sur un j<strong>et</strong> d'eau ou d'une bil<strong>le</strong> sur un tambour...<br />

Au trot, <strong>le</strong> cavalier porte tout <strong>son</strong> poids sur <strong>le</strong>s étriers, c'est<br />

l'articulation du genou qui supporte toutes <strong>le</strong>s réactions, <strong>le</strong>s<br />

fesses ne portent plus sur la sel<strong>le</strong> <strong>et</strong> viennent « au besoin » s'appuyer<br />

légèrement sur la guédda (troussequin) (phot 39). Le<br />

corps est légèrement penché en avant. Le trot en<strong>le</strong>vé est rigoureusement<br />

interdit en sel<strong>le</strong> arabe.<br />

Au galop, c'est encore l'articulation du genou qui supporte<br />

toutes <strong>le</strong>s réactions; <strong>le</strong> cavalier est <strong>de</strong>bout sur <strong>le</strong>s étriers <strong>et</strong><br />

conserve toujours <strong>le</strong>s jambes en arrière <strong>de</strong>s sang<strong>le</strong>s, <strong>le</strong> corps<br />

est penché en avant d'une façon plus accentuée (photo 40).<br />

En poursuivant notre analyse, nous voyons que <strong>le</strong> Manuel<br />

<strong>de</strong>s Spahis <strong>de</strong>man<strong>de</strong> au cavalier arabe <strong>de</strong> conduire <strong>son</strong> <strong>cheval</strong><br />

avec <strong>de</strong>s « torsions » ou <strong>de</strong>s « rota tions » <strong>de</strong> poign<strong>et</strong>. Tout ceci,<br />

en eff<strong>et</strong>, nécessite un <strong>cheval</strong> « mis », or, je n'hésite pas à déclarer<br />

qu'un -<strong>cheval</strong> <strong>de</strong> troupe « mis » es t un <strong>cheval</strong> mythe. Tout ce<br />

qui est <strong>de</strong>mandé à ce cavalier arabe est beaucoup trop compliqué.<br />

L'indigène se soucie bien du <strong>cheval</strong> qu'il n'a jamais vu conduire<br />

qu'en tirant <strong>de</strong>ssus <strong>et</strong> « en rentrant <strong>de</strong>dans » !...<br />

Il est à remarquer aussi que <strong>le</strong> Manuel <strong>de</strong>s Spahis <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />

la mise en main par <strong>le</strong>s rênes seu<strong>le</strong>s. C<strong>et</strong>te « pression <strong>de</strong>s<br />

doigts sur <strong>le</strong>s rênes » qui doit solliciter la f<strong>le</strong>xion <strong>de</strong> la mâchoire<br />

<strong>et</strong> <strong>de</strong> la partie antérieure <strong>de</strong> l'encolure » me semb<strong>le</strong> avoir pour<br />

conséquence <strong>de</strong> rej<strong>et</strong>er du poids en arrière, <strong>de</strong> surcharger <strong>le</strong>s<br />

jarr<strong>et</strong>s, d'en<strong>le</strong>ver au <strong>cheval</strong> tout perçant, <strong>de</strong> l'accu<strong>le</strong>r. « La véritab<strong>le</strong><br />

équitation consiste à comman<strong>de</strong>r aux forces <strong>et</strong> non à <strong>le</strong>s<br />

détruire. » (Co mte d'Aure.) On obtient fata<strong>le</strong>ment ainsi que <strong>le</strong><br />

<strong>cheval</strong> se m<strong>et</strong>, non sur la main, mais en arrière <strong>de</strong> la main <strong>et</strong><br />

ce, d'autant plus vite que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> redoute un mors trop dur.<br />

« Il fa ut que <strong>le</strong>s rênes n'agissent que par l'eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> l'impulsion<br />

donnée par <strong>le</strong>s jambes » di t Saint-Phal<strong>le</strong>; « <strong>de</strong> la sorte l'usage<br />

<strong>de</strong>s rênes, loin <strong>de</strong> nuire à l'impulsion, en <strong>de</strong>vient une conséquence,


Photo 39. — C avalier au trot.<br />

Photo 40. — C avalier au galop.


— 69 —<br />

en nécessite l'emploi, l'exerce <strong>et</strong> par conséquent la développe, il<br />

ne faut pas que <strong>le</strong> mors vienne sur <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> mais que celui-ci<br />

soit envoyé sur <strong>le</strong> mors, un mors énergique ne ferait qu'aggraver<br />

sa résistance. » Cela <strong>de</strong>meurera toujours vrai dans n'importe<br />

quel<strong>le</strong> equitation fût-el<strong>le</strong> iroquoise ou mohegane...<br />

Comme tous <strong>le</strong>s écuyers, <strong>le</strong> comte d'Aure insiste pour que <strong>le</strong><br />

<strong>cheval</strong> « soit poussé par <strong>le</strong>s jambes <strong>et</strong> maintenu par <strong>le</strong> poids<br />

égal <strong>de</strong>s rênes <strong>et</strong> l'appui du mors, il sera renfermé, captivé <strong>et</strong><br />

entraîné <strong>de</strong> tel<strong>le</strong> sorte qu'il ne pourra dévier <strong>de</strong> la ligne qui lui<br />

sera tracée par la main. »<br />

Dans <strong>le</strong> Manuel d'équitation <strong>et</strong> <strong>de</strong> dressage sur <strong>le</strong>quel semb<strong>le</strong><br />

s'appuyer <strong>le</strong> Manuel <strong>de</strong>s Spahis nous pouvons lire : « En équitation<br />

secondaire c'est principa<strong>le</strong>ment par <strong>le</strong> travail sur <strong>le</strong>s<br />

lignes droites, par <strong>le</strong>s allongements <strong>et</strong> <strong>le</strong>s ra<strong>le</strong>ntissements d'allure<br />

qu'on amène <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> à prendre c<strong>et</strong>te attitu<strong>de</strong> (<strong>le</strong> placer).<br />

Les jambes jouent ici un rô<strong>le</strong> c apital; el<strong>le</strong>s doivent toujours précé<strong>de</strong>r<br />

Vaction <strong>de</strong> l a main car la tête ne se ramène, l'encolure ne<br />

se fléchit que par Vejj<strong>et</strong> du mouvement en avant. Une fois engagé<br />

dans l'impulsion <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> rencontre la main ; cel<strong>le</strong>-ci maintenue<br />

fixe <strong>et</strong> basse offre à la bouche un soutien moel<strong>le</strong>ux qui restreint<br />

l'extension <strong>de</strong> l'encolure, fixe la tête <strong>et</strong> amène cel<strong>le</strong>-ci à s'infléchir.<br />

»<br />

Dans <strong>le</strong>s ouvrages <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s écuyers sans exception, on peut<br />

trouver confirmation <strong>de</strong> la remarque que je me suis permise.<br />

Et <strong>le</strong> Manuel <strong>de</strong>s Spahis <strong>de</strong> continuer : « Lo rsque <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

ne répond pas à c<strong>et</strong>te action (action <strong>de</strong>s rênes pour la mise en<br />

main), <strong>le</strong> cavalier doit discerner si <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> est lourd parce<br />

qu'il a trop <strong>de</strong> poids sur l'avant-main (ce qu'on appel<strong>le</strong> une résistance<br />

<strong>de</strong> poids) ou s'il tire parce qu'il est trop ar<strong>de</strong>nt (ce qu'on<br />

appel<strong>le</strong> une résistance <strong>de</strong> forces). Dans <strong>le</strong> premier cas il faut<br />

faire passer du poids d'avant en arrière sans changer l'allure <strong>et</strong><br />

surtout sans altérer l'impulsion. Ce résultat sera obtenu par <strong>de</strong>s<br />

<strong>de</strong>mi-arrêts. Après avoir fait un <strong>de</strong>mi-arrêt, <strong>le</strong> cavalier re<strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />

la cession <strong>de</strong> la mâchoire par la pression moel<strong>le</strong>use <strong>de</strong>s<br />

doigts, <strong>et</strong>c... Dans <strong>le</strong> second cas, <strong>le</strong> cavalier opère une série <strong>de</strong><br />

pressions légères se succédant à interval<strong>le</strong>s très courts. C<strong>et</strong>te<br />

action porte <strong>le</strong> nom <strong>de</strong> « vibra tions ».


— 70 —<br />

On lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> beaucoup <strong>de</strong> discernement à ce cavalier qui z<br />

ne l'oublions pas, est Arabe.<br />

Puis, <strong>le</strong> Manuel <strong>de</strong>s Spahis passe à l'accord <strong>de</strong>s ai<strong>de</strong>s <strong>et</strong> recomman<strong>de</strong>,<br />

comme <strong>le</strong> Règ<strong>le</strong>ment provisoire <strong>de</strong> la Cava<strong>le</strong>rie, <strong>le</strong> principe<br />

« main s sans jambes <strong>et</strong> jambes sans mains ».<br />

DEUXIÈME PARTIE — EQUITATION<br />

« Si certains procédés d'équitation <strong>et</strong> <strong>de</strong> dressage employés<br />

jadis en Europe ont été abandonnés <strong>et</strong> remplacés par d'autres,<br />

cela tient beaucoup à ce que <strong>le</strong> modè<strong>le</strong> du <strong>cheval</strong> <strong>de</strong> sel<strong>le</strong> s'est<br />

modifié. Les métho<strong>de</strong>s d'équitation se <strong>son</strong>t transformées pour<br />

se m<strong>et</strong>tre en harmonie avec <strong>le</strong> modè<strong>le</strong> du <strong>cheval</strong>. Il ne faut<br />

donc pas s'étonner si certains procédés, qui donnent d'excel<strong>le</strong>nts<br />

résultats avec <strong>le</strong>s chevaux arabes, en donnent <strong>de</strong> moins<br />

bons sur <strong>de</strong>s chevaux d'une autre race <strong>et</strong> inversement. »<br />

Malgré <strong>de</strong>s observations nombreuses <strong>et</strong> attentives, je n'ai<br />

jamais vu que <strong>le</strong>s moyens spéciaux employés avec <strong>le</strong>s chevaux<br />

<strong>barbe</strong>s aient donné « d'exce l<strong>le</strong>nts résultats »; j'ai toujours constaté<br />

qu'ils étaient déplorab<strong>le</strong>s. Quant au modè<strong>le</strong> du <strong>cheval</strong><br />

<strong>barbe</strong>, je ne vois pas qu'il diffère <strong>de</strong> celui <strong>de</strong>s autres chevaux au<br />

point <strong>de</strong> motiver une équitation <strong>et</strong> <strong>de</strong>s procédés particuliers...<br />

Si, cependant, il existe bien une différence entre <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong><br />

<strong>et</strong> <strong>le</strong>s autres chevaux : il est bien plus doux <strong>et</strong> naturel<strong>le</strong>ment<br />

plus doci<strong>le</strong>. Est-ce là une rai<strong>son</strong> pour <strong>le</strong> monter avec <strong>de</strong>s instruments<br />

plus durs que ceux employés avec <strong>le</strong>s chevaux <strong>de</strong>s autresraces?<br />

Dans c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>uxième partie, <strong>le</strong> Manuel <strong>de</strong>s Spahis affirme<br />

« qu 'il est infiniment plus faci<strong>le</strong> d'apprendre à monter à <strong>cheval</strong><br />

avec <strong>le</strong> harnachement arabe qu'avec <strong>le</strong> harnachement français »,<br />

<strong>et</strong> il cite un passage du livre du Général Daumas : Les chevaux<br />

du Sahara <strong>et</strong> <strong>le</strong>s mœurs du désert : « Les Arabes acquièrent très<br />

promptement la tenue <strong>et</strong> la confiance à <strong>cheval</strong> tandis qu'il nous<br />

faut plusieurs années pour obtenir un médiocre cavalier. Nos<br />

hommes <strong>son</strong>t pourtant vigoureux <strong>et</strong> bien constitués. D'où peut<br />

donc provenir un tel état d'infériorité? Suivant moi, <strong>de</strong> notre<br />

harnachement qui veut <strong>de</strong>s bassins larges, <strong>de</strong>s reins soup<strong>le</strong>s.


— 71 —<br />

<strong>de</strong>s conformations privilégiées, en un mot, quand <strong>le</strong> <strong>le</strong>ur convient<br />

à tous <strong>le</strong>s bassins, à tous <strong>le</strong>s reins, à tous <strong>le</strong>s ventres, à toutes<br />

<strong>le</strong>s cuisses inimaginab<strong>le</strong>s, sert aux vieillards comme aux jeunes<br />

gens <strong>et</strong> obtient <strong>de</strong> tous ce que nous ne saurions exiger que d'un<br />

p<strong>et</strong>it nombre. »<br />

Évi<strong>de</strong>mment, on est plus soli<strong>de</strong> en sel<strong>le</strong> arabe qu'en sel<strong>le</strong> française,<br />

on peut s'accrocher faci<strong>le</strong>ment au pommeau ou au troussequin<br />

é<strong>le</strong>vés... Si <strong>le</strong> harnachement arabe ne comprenait que la<br />

sel<strong>le</strong> tout serait parfait, mais il comprend aussi, il comprend<br />

surtout, je peux dire, <strong>le</strong> mors, ce dur mors avec <strong>le</strong>quel il est<br />

infiniment plus diffici<strong>le</strong> d'apprendre à monter à <strong>cheval</strong>. Si donc<br />

la sel<strong>le</strong> arabe « convient à tous <strong>le</strong>s ventres », ce mors ne convient<br />

pas à toutes <strong>le</strong>s mains <strong>et</strong> a fortiori aux mains <strong>de</strong>s prétendus<br />

cavaliers arabes.<br />

TROISIÈME PARTIE.<br />

ÉCOLE DU CAVALIER A CHEVAL<br />

Dans <strong>le</strong> Manuel <strong>de</strong>s Spahis, l'éco<strong>le</strong> du cavalier à <strong>cheval</strong> comprend<br />

quatre parties : Travail préparatoire; Travail en bridon;<br />

Travail en bri<strong>de</strong>; Travail en armes.<br />

Je me bornerai à indiquer ici quelques différences qui existent<br />

entre <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux règ<strong>le</strong>ments.<br />

a) Travail en bridon. — Pour arrêter ou ra<strong>le</strong>ntir <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>, <strong>le</strong><br />

Règ<strong>le</strong>ment <strong>de</strong>s Spahis dit : « Jam bes en surveillance ; action <strong>de</strong>s<br />

doigts (éventuel<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> la main) sur <strong>le</strong>s rênes. Si <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

s'appuie sur <strong>le</strong> mors à l'arrêt, é<strong>le</strong>ver progressivement la main, <strong>le</strong>s<br />

jambes toujours en surveillance prêtes à intervenir si <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

essaie <strong>de</strong> recu<strong>le</strong>r. »<br />

Et ceci doit être appris à <strong>de</strong>s cavaliers indigènes 1 ! 1 Je doute<br />

qu'ils soient susceptib<strong>le</strong>s du tact <strong>et</strong> <strong>de</strong> la compréhension équestre<br />

suffisants pour avoir <strong>le</strong>s « jam bes en surveillance », pour «é<strong>le</strong>ver<br />

moel<strong>le</strong>usement <strong>et</strong> légèrement la main, <strong>le</strong>s jambes toujours<br />

en surveillance »...<br />

L'instructeur, qui par<strong>le</strong> plus ou moins bien l'arabe <strong>et</strong> souvent<br />

même qui ne <strong>le</strong> par<strong>le</strong> pas du tout, arrivera-t-il, en se servant<br />

d'interprètes à faire sentir ces nuances à ces « ca valiers <strong>de</strong> la<br />

nature »?... Le Règ<strong>le</strong>ment provisoire <strong>de</strong> la Cava<strong>le</strong>rie perd moins


— 72 —<br />

<strong>de</strong> vue qu'il fait <strong>de</strong> l'équitation élémentaire, <strong>et</strong>, bien que s'adressant<br />

à <strong>de</strong>s cavaliers français capab<strong>le</strong>s d'une autre compréhension<br />

<strong>et</strong> ayant <strong>de</strong>s instructeurs parlant la même langue qu'eux<br />

il dit simp<strong>le</strong>ment : « Arrêtez : S'asseoir en se grandissant du haut<br />

du corps <strong>et</strong> agir par rênes directes jusqu'à ce que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

soit arrêté. » Ainsi, il est certain que <strong>le</strong> principe fondamental <strong>de</strong><br />

conduite : « jambes sans mains <strong>et</strong> mains sans jambes » sera<br />

respecté, que <strong>le</strong>s indications, n<strong>et</strong>tes dans la tête du cavalier,<br />

arriveront n<strong>et</strong>tes au <strong>cheval</strong>.<br />

On me répondra évi<strong>de</strong>mment que <strong>le</strong> mors n'est pas <strong>le</strong> même,<br />

que la crainte <strong>de</strong> l'accu<strong>le</strong>ment dicte ces préceptes au Manuel<br />

<strong>de</strong>s Spahis; tout cela est fort bien <strong>et</strong> très juste, mais <strong>le</strong> fait <strong>de</strong><br />

m<strong>et</strong>tre un mors très dur dans la bouche du <strong>cheval</strong> ne donne pas<br />

plus <strong>de</strong> tact au cavalier qui s'en sert.<br />

« Au galop, dit <strong>le</strong> Manuel <strong>de</strong>s Spahis, <strong>le</strong> contact avec la bouche<br />

du <strong>cheval</strong> est conservé. »<br />

Si <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> fixe <strong>son</strong> balancier au trot, au pas <strong>et</strong> au galop, au<br />

contraire, il a besoin <strong>de</strong> <strong>le</strong> mobiliser; « il éte nd <strong>et</strong> ramène alternativement<br />

<strong>son</strong> balancier pour j<strong>et</strong>er <strong>son</strong> centre <strong>de</strong> gravité en<br />

avant ou <strong>le</strong> faire refluer en arrière » ( 1 ), or, étant donné la position<br />

<strong>de</strong> la main du cavalier en sel<strong>le</strong> arabe (au-<strong>de</strong>ssus du pommeau<br />

é<strong>le</strong>vé), la main est très éloignée <strong>de</strong> l'axe <strong>de</strong> suspension du pendu<strong>le</strong><br />

représenté par l'encolure. Si <strong>le</strong>s rênes <strong>son</strong>t ajustées, <strong>le</strong> cavalier<br />

est obligé <strong>de</strong> faire <strong>de</strong> très grands déplacements <strong>de</strong> mains<br />

pour gar<strong>de</strong>r <strong>le</strong> contact avec la bouche du <strong>cheval</strong>. Plus la main<br />

est basse <strong>et</strong> rapprochée <strong>de</strong> c<strong>et</strong> axe d'oscillation <strong>de</strong> l'encolure,<br />

moins el<strong>le</strong> a besoin <strong>de</strong> se déplacer pour conserver ce contact.<br />

Ce fait est bien connu <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s cavaliers qui sautent ; plus<br />

la main est basse, moins <strong>le</strong> cavalier est obligé <strong>de</strong> rendre <strong>de</strong>s rênes<br />

sur l'obstac<strong>le</strong>.<br />

Connaissant l'assi<strong>et</strong>te du cavalier arabe, <strong>le</strong> mors dont il se<br />

sert <strong>et</strong> la crainte que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> en a, il est faci<strong>le</strong> <strong>de</strong> se représenter<br />

<strong>le</strong> contact qui peut exister au galop entre la main haute du cavalier<br />

arabe <strong>et</strong> la bouche meurtrie <strong>de</strong> <strong>son</strong> pauvre <strong>cheval</strong>...<br />

Au galop, si <strong>le</strong> cavalier arabe laisse la main à sa place régie-<br />

Ci (Jacou<strong>le</strong>t )


— 73 —<br />

mentaire (au-<strong>de</strong>ssus du kerbouss-pommeau é<strong>le</strong>vé), il lui est impossib<strong>le</strong><br />

<strong>de</strong> conserver <strong>le</strong> contact avec la bouche d'un <strong>cheval</strong> placé.<br />

Avec la position <strong>de</strong> main du cavalier arabe, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> peut<br />

galoper <strong>de</strong> trois manières différentes :<br />

Les rênes <strong>son</strong>t longues <strong>et</strong> la possibilité <strong>de</strong> mobiliser <strong>son</strong> balancier<br />

est laissée au <strong>cheval</strong>.<br />

Le <strong>cheval</strong>, pas habitué à c<strong>et</strong>te liberté d'encolure, s'en servira<br />

timi<strong>de</strong>ment — s'il s'en sert •— car il aura peur <strong>de</strong> rencontrer la<br />

main (<strong>et</strong> quel<strong>le</strong> main!) <strong>et</strong> <strong>de</strong> trouver <strong>le</strong> mors (<strong>et</strong> quel mors!) au<br />

bout <strong>de</strong> l'extension <strong>de</strong> <strong>son</strong> encolure.<br />

Ou bien -—• c'est <strong>le</strong> cas général —- <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> renversera <strong>son</strong> encolure<br />

<strong>et</strong> m<strong>et</strong>tra sa tête horizonta<strong>le</strong> pour essayer <strong>de</strong> se soustraire<br />

à l'action du mors qui l'empêche <strong>de</strong> mobiliser <strong>son</strong> balancier. Il<br />

se contractera ainsi la bouche ouverte <strong>et</strong> accélérera <strong>le</strong> plus souvent<br />

l'allure pour fuir la dou<strong>le</strong>ur <strong>de</strong>s jarr<strong>et</strong>s <strong>et</strong> tenter <strong>de</strong> rétablir<br />

l'équilibre tandis que <strong>le</strong> cavalier tirera sur ses rênes <strong>de</strong> plus en<br />

plus fort, comme il convient... pour tenir <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> qui lui<br />

échappe, c<strong>et</strong>te brute <strong>de</strong> <strong>cheval</strong> cabochard qui veut l'embal<strong>le</strong>r!...<br />

Étant donné la position <strong>de</strong> la main du cavalier arabe, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

ne pourra plus baisser la tête <strong>et</strong> restera dans c<strong>et</strong>te attitu<strong>de</strong><br />

pitoyab<strong>le</strong> <strong>et</strong> souffr<strong>et</strong>euse que nous montrent sans voi<strong>le</strong> <strong>le</strong>s photographies<br />

contenues dans c<strong>et</strong> ouvrage.<br />

Ou bien <strong>le</strong>s rênes <strong>de</strong>meureront <strong>de</strong>mi-tendues <strong>et</strong> <strong>le</strong> cavalier,<br />

bien heureux possesseur d'une « ma in tissée <strong>de</strong> soie » <strong>et</strong> d'une<br />

soup<strong>le</strong>sse extraordinaire <strong>de</strong>s cou<strong>de</strong>s <strong>et</strong> <strong>de</strong>s épau<strong>le</strong>s, peut arriver<br />

— ô prodige ! — à conserver avec la bouche du <strong>cheval</strong> un semblant<br />

<strong>de</strong> contact » (je dis « semb lant <strong>de</strong> contact » car en réalité<br />

<strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>de</strong>meure dans <strong>le</strong> vi<strong>de</strong>); ceci peut se rencontrer, mais<br />

exceptionnel<strong>le</strong>ment. L'encolure <strong>de</strong>meure malgré tout bloquée <strong>et</strong><br />

immobi<strong>le</strong> pour <strong>le</strong>s rai<strong>son</strong>s exposées ci-<strong>de</strong>ssus; la tête reste loin<br />

<strong>de</strong> la vertica<strong>le</strong>, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> encore gêné dans ses actions se tient<br />

seul; F arrière-main semb<strong>le</strong> surchargée, <strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s comprimés ;<br />

l'avant-main seu<strong>le</strong> paraît avoir la possibilité <strong>de</strong> bascu<strong>le</strong>r; l'arrière-main<br />

ne peut quitter <strong>le</strong> sol que pénib<strong>le</strong>ment.<br />

En regardant avec attention ma col<strong>le</strong>ction <strong>de</strong> photographies<br />

<strong>de</strong> chevaux bar<strong>de</strong>s au galop montés par <strong>de</strong>s Arabes, nous c


— 74 —<br />

tâtons qu'ils galopent <strong>le</strong> « galop avec base Mpéda<strong>le</strong> <strong>et</strong> base quadrupéda<strong>le</strong><br />

» déc rit par Gustave Le Bon.<br />

« C<strong>et</strong>te forme <strong>de</strong> galop, écrit-il, est cel<strong>le</strong> d'un <strong>cheval</strong> très renfermé<br />

entre <strong>le</strong>s ai<strong>de</strong>s avec prédominance <strong>de</strong> l'action du mors.<br />

El<strong>le</strong> diffère du galop en quatre temps ordinaire par la disparition<br />

<strong>de</strong>s bases latéra<strong>le</strong>s <strong>et</strong> par F intercalation d'une base Mpéda<strong>le</strong><br />

postérieure. C'est ce galop que représentaient <strong>le</strong>s anciens écuyers<br />

du temps <strong>de</strong> la Guérinière, <strong>et</strong> à ce point <strong>de</strong> vue on voit que <strong>le</strong>urs<br />

représentations, contrairement à ce qu'on a soutenu, étaient fort<br />

correctes, au moins pour la base bipéda<strong>le</strong> » (Voir fig. 41). « Avec<br />

<strong>le</strong>s mors très brutaux dont on faisait alors usage, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

était forcément conduit à c<strong>et</strong>te forme <strong>de</strong> galop. » « Dans <strong>le</strong><br />

galop ordinaire, après <strong>le</strong> poser d'un postérieur (phase initia<strong>le</strong><br />

<strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>s formes possib<strong>le</strong>s <strong>de</strong> galop) <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> pose simultanément<br />

l'autre postérieur <strong>et</strong> un antérieur. R<strong>et</strong>ardons <strong>le</strong> poser<br />

<strong>de</strong> c<strong>et</strong> antérieur en agissant sur F avant-main <strong>et</strong> nous avons<br />

nécessairement une base bipéda<strong>le</strong>. »<br />

Ces bases bipéda<strong>le</strong>s postérieures qui indiquent la dur<strong>et</strong>é, la<br />

crainte du mors ou une action trop bruta<strong>le</strong> <strong>de</strong> celui-ci, <strong>son</strong>t<br />

n<strong>et</strong>tement visib<strong>le</strong>s dans beaucoup <strong>de</strong> photographies contenues<br />

dans ce livre (Voir notamment photo 42).<br />

Ainsi donc, dans tous <strong>le</strong>s cas envisagés précé<strong>de</strong>mment, <strong>le</strong><br />

<strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> étant au galop, si la main ne se rapproche pas du<br />

centre d'oscillation <strong>de</strong> l'encolure, <strong>le</strong> résultat, à quelques <strong>de</strong>grés<br />

près, est <strong>le</strong> même ; <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> ne se sert pas <strong>de</strong> <strong>son</strong> balancier qui<br />

<strong>de</strong>meure paralysé par <strong>le</strong> mors ou par la crainte <strong>et</strong> il galope avec<br />

une encolure entièrement contractée, figée, bloquée <strong>de</strong> partout.<br />

L'arrière-main du <strong>cheval</strong> est écrasée; on a l'impression qu'el<strong>le</strong><br />

rampe (voir photos), F avant-main seul bascu<strong>le</strong>. Le <strong>cheval</strong>,<br />

dans c<strong>et</strong>te position, peine terrib<strong>le</strong>ment, tout <strong>le</strong> poids <strong>de</strong> sa masse<br />

venant comprimer ses jarr<strong>et</strong>s.<br />

Que trouve-t-on au bout <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te impasse noire, oeuvre du<br />

mors arabe? Le triste accu<strong>le</strong>ment, la ruine <strong>de</strong>s jarr<strong>et</strong>s <strong>et</strong> la<br />

ruine du <strong>cheval</strong>.<br />

Si l'on veut se convaincre que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> restant à peu près<br />

placé au galop est l'exception, c'est faci<strong>le</strong> : il suffit <strong>de</strong> regar<strong>de</strong>r<br />

<strong>de</strong>s photographies <strong>de</strong> cavaliers arabes au galop <strong>et</strong> <strong>de</strong> compter


Fig. 41. — Galop <strong>de</strong> la Guerini ère.<br />

Photo 42. — Galop avec base bipéda<strong>le</strong> postérieure.


Photo 43. — Cavaliers arabes au galop <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>de</strong> l'officier a la tête basse ; il est en fi<strong>le</strong>t).<br />

Photo 44. — Cavaliers arabes au galop.


— 75 —<br />

combien <strong>de</strong> chevaux <strong>son</strong>t placés <strong>et</strong> paraissent avoir <strong>de</strong>s allures<br />

aisées (photos 43 <strong>et</strong> 44).<br />

Il est possib<strong>le</strong> d'éviter c<strong>et</strong> écueil en faisant poser la main <strong>de</strong>s<br />

cavaliers indigènes, quand ils galopent, en avant du kerbouss<br />

(pommeau) sur l'encolure du <strong>cheval</strong>; la main gêne moins ainsi<br />

<strong>le</strong>s mouvements du balancier, el<strong>le</strong> est plus fixe <strong>et</strong> <strong>le</strong>s chevaux<br />

plus calmes. Il serait à souhaiter que <strong>le</strong> Manuel <strong>de</strong>s Spahis<br />

comman<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te position <strong>de</strong> main pour <strong>le</strong> galop <strong>et</strong> à plus forte<br />

rai<strong>son</strong> pour <strong>le</strong>s sauts d'obstac<strong>le</strong>s car je vous assure que <strong>le</strong> cavalier<br />

arabe doit aussi sauter avec ce mors...<br />

« Étant <strong>de</strong> pied ferme, marcher au trot ou au galop <strong>et</strong> inversement,<br />

» <strong>de</strong>m an<strong>de</strong> <strong>le</strong> Manuel <strong>de</strong>s Spahis.<br />

Notre Règ<strong>le</strong>ment provisoire <strong>de</strong> la Cava<strong>le</strong>rie n'en par<strong>le</strong> pas;<br />

il est moins exigeant bien que ces mouvements soient davantage<br />

possib<strong>le</strong>s <strong>et</strong> moins dangereux faits par <strong>de</strong>s cavaliers français<br />

avec <strong>le</strong>s moyens dont ils disposent. Qui connaît <strong>le</strong> cavalier<br />

<strong>et</strong> <strong>le</strong> mors arabes se rend compte <strong>de</strong> ce que peut <strong>de</strong>venir <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

égaré au milieu <strong>de</strong> ces exigences : départs au galop <strong>de</strong> pied ferme<br />

<strong>et</strong> passages du galop à l'arrêt... Pauvres chevaux !... Pauvres jarr<strong>et</strong>s<br />

!...<br />

« Au comman<strong>de</strong>ment « recu <strong>le</strong>r » agi r avec <strong>le</strong>s jambes •— dit<br />

plus loin <strong>le</strong> Manuel <strong>de</strong>s Spahis —- po ur m<strong>et</strong>tre <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> sur la<br />

main, puis porter <strong>le</strong> haut du corps en arrière en faisant sentir<br />

une action <strong>de</strong>s rênes. »<br />

Inuti<strong>le</strong> <strong>de</strong> dire que <strong>le</strong> Règ<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> Cava<strong>le</strong>rie se gar<strong>de</strong> bien<br />

<strong>de</strong> par<strong>le</strong>r d'action <strong>de</strong> jambes dans <strong>le</strong> recu<strong>le</strong>r. « Agir par rênes<br />

directes » dit -il simp<strong>le</strong>ment pour ne pas produire <strong>de</strong> confusion<br />

chez <strong>le</strong> cavalier <strong>et</strong> maintenir intact dans <strong>son</strong> esprit <strong>le</strong> principe<br />

énoncé au début : « Jambes sans mains, mains sans jambes. »<br />

« En avant, allonger : <strong>de</strong>s jambes. Ra<strong>le</strong>ntir, arrêter, recu<strong>le</strong>r : <strong>de</strong>s<br />

rênes. »<br />

Une particularité du Manuel <strong>de</strong>s Spahis est qu'il n'apprend<br />

<strong>le</strong>s voltes, <strong>de</strong>mi-voltes, <strong>de</strong>mi-voltes renversées, ligne brisée, que<br />

dans <strong>le</strong> travail en bri<strong>de</strong> ; <strong>le</strong> Règ<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> Cava<strong>le</strong>rie, au contraire,<br />

apprend ces figures <strong>de</strong> manège dans <strong>le</strong> travail en bridon <strong>et</strong> <strong>le</strong><br />

travail en bri<strong>de</strong> n'est que la répétition du travail en bridon. On<br />

aperçoit ici <strong>le</strong> souci <strong>de</strong> la progression méthodique <strong>et</strong> du ména-


— 76 —<br />

gement du <strong>cheval</strong>. Il est plus logique, en eff<strong>et</strong>, <strong>de</strong> faire l'apprentissage<br />

<strong>de</strong> la conduite du <strong>cheval</strong> avec l'instrument <strong>le</strong> plus doux<br />

pour rendre moins préjudiciab<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s fautes commises par <strong>le</strong>s<br />

jeunes cavaliers au début <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur instruction.<br />

b) Travail en bri<strong>de</strong>. — Le « <strong>de</strong> mi-tour sur place » e st aussi<br />

enseigné dans <strong>le</strong> Manuel <strong>de</strong>s Spahis; mais il est à remarquer<br />

qu'il prescrit pour l'exécution <strong>de</strong> ce mouvement : « A rrêter <strong>le</strong><br />

<strong>cheval</strong>, porter la main <strong>et</strong> <strong>le</strong> poids du corps franchement à droite<br />

<strong>et</strong> agir en même temps <strong>de</strong> la jambe droite pour rej<strong>et</strong>er <strong>le</strong>s hanches<br />

à gauche. » Or, 38 pages avant exactement, dans <strong>le</strong> chapitre<br />

concernant 1'« étu<strong>de</strong> du mo<strong>de</strong> d'action <strong>de</strong>s ai<strong>de</strong>s », ce règ<strong>le</strong>ment<br />

dit : « L'action d'une jambe isolée pour produire <strong>le</strong> déplacement<br />

latéral <strong>de</strong> l'arrière-main n'est jamais employée en equitation<br />

arabe »... Dans l'équitation supérieure éga<strong>le</strong>ment, <strong>le</strong> même règ<strong>le</strong>ment<br />

prescrit la marche sur <strong>de</strong>ux pistes.<br />

QUATRIÈME PARTIE<br />

El<strong>le</strong> traite du perfectionnement <strong>de</strong> l'équitation <strong>de</strong>s sous-officiers<br />

<strong>et</strong> <strong>de</strong>s officiers.<br />

Quelques officiers indigènes qui ont du goût pour l'équitation<br />

<strong>et</strong> qui entreprennent <strong>de</strong> dresser <strong>le</strong>urs chevaux se ren<strong>de</strong>nt vite<br />

compte qu'il <strong>le</strong>ur est impossib<strong>le</strong> d'obtenir <strong>de</strong>s résultats avec <strong>le</strong><br />

mors arabe (la tâche serait ardue pour beaucoup <strong>de</strong> bons cavaliers)<br />

<strong>et</strong> ils arrivent vite à monter <strong>le</strong>urs chevaux en mors français<br />

ou en fi<strong>le</strong>t. Parmi ceux qui aiment <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>et</strong> qui veu<strong>le</strong>nt<br />

travail<strong>le</strong>r, beaucoup ne prennent <strong>le</strong> mors arabe que pour <strong>le</strong>s<br />

revues <strong>et</strong> <strong>le</strong>s prises d'armes; <strong>le</strong>urs chevaux n'en vont que mieux<br />

<strong>et</strong> s'usent moins vite. Tous ceux qui ont « lâché » <strong>le</strong> mo rs arabe<br />

se ren<strong>de</strong>nt compte <strong>de</strong> l'ineptie d'un tel instrument <strong>et</strong> ne <strong>le</strong><br />

reprennent plus. Combien en ai-je entendu dire : « Mon <strong>cheval</strong><br />

ne peut supporter <strong>le</strong> mors arabe, je <strong>le</strong> conduis bien mieux en<br />

simp<strong>le</strong> fi<strong>le</strong>t, ainsi il ne se défend plus, il est soumis; mais dès<br />

que je lui rem<strong>et</strong>s <strong>le</strong> mors arabe je ne peux plus <strong>le</strong> tenir. » Ce<br />

n'est pas surprenant !...<br />

Je citerai seu<strong>le</strong>ment dans c<strong>et</strong>te partie du Manuel <strong>de</strong>s Spahis<br />

quelques-uns <strong>de</strong> ses enseignements.


— 77 —<br />

î<br />

« Dé part au galop à droite :<br />

a) S'assurer que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> est léger sur la rêne droite. Le cas<br />

échéant déterminer c<strong>et</strong>te légèr<strong>et</strong>é ;<br />

« h) Pression simultanée <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux jambes pour produire un<br />

surcroît d'impulsion;<br />

« c) Au moment où <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> répond à Vaction <strong>de</strong>s jambes en se<br />

portant sur la main, cel<strong>le</strong>-ci opère une sorte <strong>de</strong> <strong>de</strong>mi-arrêt en s'é<strong>le</strong>vant<br />

un peu <strong>et</strong> en se portant en arrière <strong>et</strong> à gauche (direction <strong>de</strong><br />

la rêne droite en avant du kerbouss) ; si c<strong>et</strong>te action ne détermine<br />

pas Ven<strong>le</strong>ver au galop, la réitérer à la ca<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> la marche, en<br />

s'attachant à ce qu'el<strong>le</strong> se produise au moment du poser <strong>de</strong><br />

l'antérieur gauche. On arrive même par <strong>le</strong> dressage à ce que <strong>le</strong><br />

<strong>cheval</strong> possédant suffisamment d'impulsion, Taction préliminaire<br />

<strong>de</strong>s jambes <strong>de</strong>vienne inuti<strong>le</strong> : <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> partira au galop à<br />

droite sur la seu<strong>le</strong> indication <strong>de</strong> la main. »<br />

« Au moment où <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> répond à l'action <strong>de</strong>s jambes en<br />

se portant sur la main, cel<strong>le</strong>-ci opère une sorte <strong>de</strong> <strong>de</strong>mi-arrêt<br />

en se portant en arrière. » Voilà un procédé arabe pour partir<br />

au galop évi<strong>de</strong>mment très spécial. Si j'étais <strong>cheval</strong>, j'entendrais<br />

excatement : « En avant-halte », ce qui est assez diffici<strong>le</strong> à comprendre...<br />

Dans ces conditions, <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux comman<strong>de</strong>ments<br />

contradictoires, je choisirais celui qui me fatigue <strong>le</strong> moins, <strong>le</strong><br />

<strong>de</strong>rnier : je resterais sur place indifférent à <strong>de</strong>s <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s aussi<br />

nébu<strong>le</strong>uses <strong>et</strong> je me dirais dans mon for intérieur d'animal :<br />

« Maitre insensé ! Tu vas encore m'appe<strong>le</strong>r bourrique <strong>et</strong> me saigner,<br />

mais que veux-tu que je fasse?... Quand tu me donneras <strong>de</strong>s<br />

ordres clairs, n<strong>et</strong>s, tout simp<strong>le</strong>ment compréhensib<strong>le</strong>s, j'obéirai<br />

bien volontiers. En attendant, cause toujours, tu m'instruis... »<br />

Au suj<strong>et</strong> <strong>de</strong> « c<strong>et</strong> te action <strong>de</strong> rênes qui doit déterminer l'en<strong>le</strong>ver<br />

au galop » (sorte <strong>de</strong> <strong>de</strong>mi-arrêt, la main se portant en<br />

haut <strong>et</strong> en arrière) je dirai qu'en supposant qu'on puisse « en<strong>le</strong>ver<br />

» <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> avec <strong>le</strong>s rênes ce n'est pas avec <strong>le</strong> mors arabe que<br />

<strong>le</strong> <strong>cheval</strong> sera doué <strong>de</strong> ce surcroît d'impulsion qui rendra inuti<strong>le</strong><br />

« l'action préliminaire <strong>de</strong>s jambes » pou r <strong>le</strong> départ au galop.<br />

On peut très bien arriver par un dressage basé sur la loi <strong>de</strong>s associations<br />

par contiguïté à arrêter <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> au moyen <strong>de</strong>s éperons<br />

au flanc ou <strong>de</strong> la cravache sur <strong>le</strong>s oreil<strong>le</strong>s ou ail<strong>le</strong>urs, ou bien


— 78 —<br />

encore... à se porter en avant quand on tire sur <strong>le</strong>s rênes, mais<br />

est-ce à recomman<strong>de</strong>r? Dans toute équitation juste, <strong>le</strong>s jambes<br />

seu<strong>le</strong>s provoquent ou augmentent l'impulsion; <strong>le</strong>s rênes la règ<strong>le</strong>nt<br />

mais ne doivent en aucun cas la provoquer.<br />

Si <strong>le</strong> principe <strong>de</strong> base d'emploi <strong>de</strong>s ai<strong>de</strong>s « E n avant, <strong>de</strong>s<br />

jambes, arrêter, <strong>de</strong>s rênes » n' est pas respecté, avant peu, surtout<br />

entre <strong>de</strong> tel<strong>le</strong>s mains <strong>et</strong> <strong>de</strong> tels moyens, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> ne comprendra<br />

plus rien, s'accu<strong>le</strong>ra <strong>et</strong> <strong>de</strong>viendra rétif.<br />

C<strong>et</strong>te manière <strong>de</strong> faire qui prend sur l'impulsion est à proscrire<br />

avec plus <strong>de</strong> rigueur encore en équitation arabe à cause<br />

<strong>de</strong> l'emploi d'un mors très dur.<br />

« C'est éga<strong>le</strong>ment par l'eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> la main décrit ci-<strong>de</strong>ssus qu'on<br />

obtient <strong>le</strong> changement <strong>de</strong> pied », a joute <strong>le</strong> Manuel <strong>de</strong>s Spahis.<br />

CINQUIÈME PARTIE. —- DRESSAGE<br />

Le débourrage est supprimé. « Le jeune <strong>cheval</strong> arrivant dans<br />

un régiment présente, <strong>le</strong> plus souvent, la physionomie suivante :<br />

comme il a été monté soit avec un mors <strong>de</strong> mu<strong>le</strong>t, soit avec<br />

un mors à canons plats, mal ajusté presque toujours à l'embouchure<br />

trop étroite <strong>et</strong> à gourm<strong>et</strong>te coupante, ses barres, <strong>son</strong><br />

palais <strong>et</strong> sa <strong>barbe</strong> ont été offensés en sorte que, craignant la<br />

main du cavalier, il refuse <strong>le</strong> contact du mors. Cela ne l'empêche<br />

pas <strong>de</strong> donner à l'allure du pas, une vitesse norma<strong>le</strong> <strong>et</strong><br />

même allongée car, à c<strong>et</strong>te allure, <strong>le</strong> cavalier <strong>le</strong> mène avec <strong>le</strong>s<br />

rênes complètement flottantes.<br />

« Mais si, pour une rai<strong>son</strong> quelconque, <strong>le</strong> cavalier veut se<br />

servir <strong>de</strong>s rênes, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> caractérise immédiatement sa résistance<br />

en portant au vent <strong>et</strong> en contournant <strong>son</strong> encolure. »<br />

En réalité, ce défaut ne fait que se confirmer au régiment<br />

car main <strong>et</strong> mors arabes <strong>son</strong>t parfaitement incapab<strong>le</strong>s <strong>de</strong> redonner<br />

confiance à ce pauvre malheureux <strong>cheval</strong>.<br />

C<strong>et</strong>te présentation du Manuel <strong>de</strong>s Spahis serait incomplète<br />

si j'om<strong>et</strong>tais <strong>de</strong> signa<strong>le</strong>r qu'iVpréconise <strong>le</strong>s fantasias qui « méritent<br />

d'être largement encouragées au même titre que <strong>le</strong>s courses<br />

militaires, <strong>le</strong>s rallye-papers <strong>et</strong> <strong>le</strong>s cross country ». « Un capitaine<br />

-commandant avisé trouvera dans ces exercices sportifs un puis­


— 79 —<br />

sant moyen d'émulation <strong>et</strong> aussi une source <strong>de</strong> progrès sérieux<br />

pour ses meil<strong>le</strong>urs cavaliers. »<br />

J'ai vu <strong>de</strong>s chevaux <strong>de</strong> spahis qu'on était arrivé, avec quelque<br />

peine, à rendre calmes à l'obstac<strong>le</strong>, francs <strong>et</strong> droits <strong>de</strong>vant eux;<br />

un entraînement aux fantasias fut un jour commencé : tir à<br />

<strong>cheval</strong>, <strong>de</strong>mi-tours au galop <strong>et</strong> — ô merveil<strong>le</strong> d'invention! —<br />

tir en sautant <strong>de</strong>s obstac<strong>le</strong>s !...<br />

Pendant ces exercices, j'entendais dire que <strong>le</strong> cavalier lâchant<br />

ses rênes au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> l'obstac<strong>le</strong> pour tirer <strong>son</strong> coup <strong>de</strong> fusil,<br />

ne gênait pas <strong>son</strong> <strong>cheval</strong> <strong>et</strong> que, par conséquent, ce travail était<br />

excel<strong>le</strong>nt pour <strong>le</strong> cavalier comme pour <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>. Oui, mais hélas I<br />

s'il abandonnait ses rênes, <strong>le</strong> cavalier <strong>le</strong>s reprenait aussi pour<br />

arrêter <strong>son</strong> <strong>cheval</strong> ; celui-ci, impressionné d'entendre <strong>son</strong> cavalier...<br />

cracher du feu <strong>et</strong> trouvant une liberté à laquel<strong>le</strong> il n'était<br />

pas habitué, filait à tombeau ouvert après avoir sauté... On se<br />

représente <strong>le</strong> « coup <strong>de</strong> frein » que donnait <strong>le</strong> cavalier serrant...<br />

<strong>le</strong>s <strong>de</strong>nts <strong>et</strong> empêtré avec <strong>son</strong> mousqu<strong>et</strong>on pour m<strong>et</strong>tre un<br />

•terme rapi<strong>de</strong> à c<strong>et</strong>te course à la mort...<br />

Comme <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> est aussi sensib<strong>le</strong> aux fautes <strong>de</strong> main <strong>de</strong> <strong>son</strong><br />

cavalier pendant <strong>le</strong> saut qu'après, ce que je prévoyais ne manqua<br />

pas d'arriver : après la troisième excitation semblab<strong>le</strong>, la<br />

moitié <strong>de</strong>s chevaux dérobait ou refusait l'obstac<strong>le</strong>; parmi eux<br />

se trouvaient <strong>de</strong>s chevaux que je n'avais jamais vu refuser ; l'autre<br />

moitié gagnait à la main avant ou après, prévoyant une vio<strong>le</strong>nte<br />

dou<strong>le</strong>ur sur <strong>le</strong>s barres puisqu'ils venaient <strong>de</strong> sauter, ou parce<br />

qu'ils allaient sauter. Seuls, quelques pauvres vieux chevaux<br />

<strong>de</strong>venus avec <strong>le</strong> temps <strong>et</strong> c<strong>et</strong>te équitation comparab<strong>le</strong>s à <strong>de</strong>s<br />

chevaux <strong>de</strong> bois, <strong>et</strong> <strong>de</strong> mauvais bois même, mélancoliques,<br />

insouciants, blasés, résignés, continuaient, tristement écœurés,<br />

<strong>le</strong>ur misérab<strong>le</strong> métier.<br />

Je suis certain que l'on ne manquera pas <strong>de</strong> me dire que je<br />

n'ai jamais observé que <strong>de</strong> mauvais cavaliers, incapab<strong>le</strong>s, <strong>et</strong>c.<br />

A part quelques très très rares exceptions, c'est bien l'exacte<br />

vérité <strong>et</strong>, cependant, je peux dire en avoir vu plusieurs milliers<br />

<strong>de</strong>s contrées <strong>le</strong>s plus différentes, échelonnés <strong>de</strong> la <strong>de</strong>rnière recrue<br />

arrivée au vieux spahi ayant dix <strong>et</strong> vingt ans <strong>de</strong> service ; ceux-ci<br />

d'ail<strong>le</strong>urs, étaient aussi ignorants que ceux-là. Mais la source


— 80 —<br />

du mal n'est pas surtout <strong>le</strong> cavalier, c'est <strong>le</strong> mors. Tout ce qui<br />

pourra être imaginé pour contre-balancer ses funestes eff<strong>et</strong>s sera<br />

impuissant car il est certainement plus possib<strong>le</strong> <strong>de</strong> correspondre<br />

avec la lune que <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s écuyers <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s cavaliers arabes.<br />

Il est certain que beaucoup <strong>de</strong> cavaliers français ou indigènes<br />

estiment <strong>le</strong>ur main très capab<strong>le</strong> <strong>de</strong> manier avec avantage un<br />

instrument aussi dangereux. J'envie <strong>le</strong>ur main précieuse <strong>et</strong> <strong>le</strong>ur<br />

bel<strong>le</strong> assurance <strong>et</strong> je suis étonné, vraiment, lorsque j'y pense,<br />

que l'Écuyer en chef n'ait ajouté encore <strong>le</strong> noir habit <strong>de</strong>s « dieux $><br />

à <strong>le</strong>urs éperons d'or...<br />

Que pourrait-on me dire encore? Que je ne connais rien en<br />

équitation arabe? Oui, c'est cela; <strong>et</strong> mon appareil photographique<br />

non plus... Il ne faut pas nous en vouloir...<br />

Avant <strong>de</strong> terminer ce paragraphe, je crois nécessaire <strong>de</strong> rassemb<strong>le</strong>r<br />

<strong>le</strong>s idées éparses dans c<strong>et</strong>te partie <strong>de</strong> chapitre.<br />

Il ressort très n<strong>et</strong>tement <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong> que <strong>le</strong> Manuel <strong>de</strong>s<br />

Spahis, bien fait pour <strong>de</strong> très bons cavaliers, <strong>de</strong>man<strong>de</strong> beaucoup<br />

trop <strong>et</strong> même l'impossib<strong>le</strong> à <strong>de</strong>s cavaliers qui <strong>de</strong>meureront toujours<br />

incapab<strong>le</strong>s <strong>de</strong> se servir <strong>de</strong> l'instrument qu'ils ont entre <strong>le</strong>s<br />

mains autrement que d'une façon désastreuse.<br />

Le Manuel <strong>de</strong>s Spahis ne tient aucun compte <strong>de</strong>s réalités <strong>et</strong><br />

<strong>de</strong>s possibilités équestres <strong>de</strong>s Arabes quand il <strong>de</strong>man<strong>de</strong> plus que<br />

<strong>le</strong> Règ<strong>le</strong>ment provisoire <strong>de</strong> la Cava<strong>le</strong>rie à <strong>de</strong>s cavaliers susceptib<strong>le</strong>s<br />

<strong>de</strong> moins <strong>de</strong> compréhension <strong>et</strong> <strong>de</strong> tact équestre que nos<br />

cavaliers <strong>de</strong> la Métropo<strong>le</strong>.<br />

La conséquence certaine <strong>de</strong> tout cela, c'est <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> rétif <strong>et</strong><br />

acculé.<br />

Dans <strong>le</strong> Règ<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> la Cava<strong>le</strong>rie, <strong>le</strong>s principes clairement<br />

exposés <strong>son</strong>t respectés d'un bout à l'autre <strong>et</strong> intégra<strong>le</strong>ment maintenus<br />

avec une n<strong>et</strong>te simplicité justement voulue. Il est regr<strong>et</strong>tab<strong>le</strong><br />

qu'il n'en soit pas <strong>de</strong> même dans <strong>le</strong> Manuel <strong>de</strong>s Spahis.<br />

« Il n'est pas d'homme dont un bon instructeur ne puisse,<br />

avec du travail <strong>et</strong> <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong>, arriver à faire un cavalier<br />

honorab<strong>le</strong>. »<br />

Pour que c<strong>et</strong>te phrase du Manuel <strong>de</strong>s Spahis reste toujours<br />

vraie, il est nécessaire d'y ajouter <strong>de</strong>ux conditions : d'abord,<br />

employer <strong>de</strong>s moyens qui soient à la portée, non du maître,


81<br />

mais <strong>de</strong> l'élève; ensuite que <strong>le</strong> maître ne s'aventure pas avec<br />

<strong>de</strong>s cavaliers indigènes dans ce réseau embrouillé <strong>de</strong> mil<strong>le</strong> subtilités<br />

(cé<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s doigts, pressions plus ou moins accentuées <strong>et</strong><br />

réitérées, <strong>de</strong>mi-arrêts, vibrations, rotations ou torsions <strong>de</strong> poign<strong>et</strong>s,<br />

jambes en surveillance, ai<strong>de</strong>s actives ou passives, <strong>et</strong> j'en<br />

passe...).<br />

Le cavalier arabe ne comprendra pas tout cela. Il s'empêtrera<br />

dans ce réseau; il essayera peut-être <strong>de</strong> faire ce que lui dit <strong>son</strong><br />

instructeur (surtout quand celui-ci <strong>le</strong> regar<strong>de</strong>ra) mais n'en saisissant<br />

pas l'utilité, quand il sera livré à lui-même il reprendra « sa<br />

manière » <strong>de</strong> monter, cel<strong>le</strong> <strong>de</strong> ses pères, qu'il trouve suffisante.<br />

Deux moyens se présentent pour tirer parti <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te équitation<br />

<strong>et</strong> du cavalier arabe : changer <strong>le</strong> mors, ou tenter <strong>de</strong> faire<br />

un écuyer <strong>de</strong> ce cavalier. Entre ces <strong>de</strong>ux solutions, je crois qu'il<br />

n'est pas possib<strong>le</strong> d'hésiter. L'outil <strong>et</strong> <strong>son</strong> emploi étant trop<br />

délicats, la solution logique, puisqu'on ne peut changer la main,<br />

est <strong>de</strong> changer l'outil.<br />

Tous mes camara<strong>de</strong>s cavaliers seraient heureux <strong>et</strong> trouveraient<br />

normal qu'un tel mors soit en<strong>le</strong>vé <strong>de</strong>s mains <strong>de</strong> semblab<strong>le</strong>s<br />

cavaliers.<br />

§ 3. — Ce qu'il faudrait qu'el<strong>le</strong> soit.<br />

Que <strong>de</strong>vrait être l'équitation arabe dans <strong>le</strong>s Régiments? Le<br />

Manuel <strong>de</strong>s Spahis y répond lui-même :<br />

« La métho<strong>de</strong> d'instruction doit se rapprocher <strong>le</strong> plus possib<strong>le</strong><br />

<strong>de</strong>s moyens employés dans <strong>le</strong>s tribus du Sud pour former un<br />

cavalier. Il convient donc <strong>de</strong> se gar<strong>de</strong>r soigneusement <strong>de</strong> <strong>le</strong>s rebuter<br />

par <strong>de</strong>s exercices trop méthodiques dont ils ne comprendraient d'ail<strong>le</strong>urs<br />

pas Vobj<strong>et</strong>.<br />

« L'indigène en tribu n'est donc, en aucune circonstance,<br />

astreint à <strong>de</strong>s exercices méthodiques comme ceux qui se pratiquent<br />

dans nos manèges <strong>et</strong> don t <strong>le</strong> b ut est d 1 apprendre à monter à <strong>cheval</strong>;<br />

il se sert du <strong>cheval</strong> dans un but déterminé <strong>et</strong> apprend à<br />

monter à <strong>cheval</strong> par l'usage. »<br />

« La métho<strong>de</strong> d'instruction à employer dans <strong>le</strong>s escadrons<br />

<strong>de</strong>vra reposer sur <strong>de</strong>s données analogues. »<br />

LH CHEVAL BARBE 6


— 82 —<br />

Si l'on veut conserver <strong>le</strong> mors arabe malgré ses inconvénients<br />

<strong>et</strong> ses dangers, il faut que l'équitation arabe soit simp<strong>le</strong>, très<br />

simp<strong>le</strong>, infiniment plus simp<strong>le</strong> que cel<strong>le</strong> indiquée dans <strong>le</strong> Manuel<br />

<strong>de</strong>s Spahis. Il serait à coup sûr moins ruineux pour <strong>le</strong>s chevaux<br />

<strong>et</strong> pour l'État <strong>de</strong> ne pas détourner ce mors primitif <strong>de</strong> <strong>son</strong> but<br />

primitif <strong>et</strong> originel. Il faut chercher à perfectionner l'équitation<br />

instinctive <strong>de</strong>s Arabes <strong>et</strong> non la compliquer.<br />

Avec <strong>le</strong> mors arabe, il faut pratiquer une équitation arabe.<br />

C'est-à-dire monter <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> dans <strong>le</strong> vi<strong>de</strong>, <strong>le</strong> conduire rênes<br />

flottantes sans chercher <strong>le</strong> contact avec la bouche du <strong>cheval</strong><br />

<strong>et</strong> se servir du mors <strong>le</strong> moins possib<strong>le</strong> à la façon d'un frein puissant,<br />

comme s'en servent <strong>le</strong>s indigènes <strong>de</strong>s tribus du désert<br />

soustraits à la civilisation européenne.<br />

On pourrait uti<strong>le</strong>ment dresser <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> à l'obéissance à la<br />

voix ainsi que <strong>de</strong>vaient <strong>le</strong> faire <strong>le</strong>s Numi<strong>de</strong>s, en se servant <strong>de</strong><br />

la voix avant d'agir avec <strong>le</strong> mors; par association d'idées, <strong>le</strong><br />

<strong>cheval</strong> redoutant <strong>le</strong> mors <strong>de</strong>viendrait vite obéissant à ce moyen.<br />

Ce frein puissant <strong>de</strong>viendrait alors, ce qui serait encore mieux,<br />

« un fre in <strong>de</strong> secours » dont <strong>le</strong>s occasions d'intervention seraient<br />

réduites au minimum.<br />

Avec <strong>le</strong> mors arabe il faut donc pratiquer une équitation<br />

arabe, sinon, c'est la ruine rapi<strong>de</strong> <strong>et</strong> certaine du <strong>cheval</strong>. Pour<br />

<strong>le</strong> bonheur <strong>de</strong>s chevaux, <strong>le</strong>ur utilisation meil<strong>le</strong>ure <strong>et</strong> plus longue,<br />

il faut supprimer toutes ces voltes, <strong>de</strong>mi-tours sur place, départs<br />

au galop <strong>de</strong> pied ferme, <strong>et</strong>c., <strong>et</strong>c., <strong>et</strong> surtout <strong>le</strong>s sauts d'obstac<strong>le</strong>s<br />

qui ne <strong>de</strong>vraient jamais être pratiqués avec <strong>le</strong> mors arabe<br />

qui rend ces exigences possib<strong>le</strong>s seu<strong>le</strong>ment pour d'excel<strong>le</strong>nts <strong>et</strong><br />

rares cavaliers (je ne par<strong>le</strong> pas <strong>de</strong>s fantasias <strong>et</strong> autres excitations<br />

du même goût...). Je suis persuadé que tous mes camara<strong>de</strong>s<br />

cavaliers qui ont vu sauter <strong>de</strong>s spahis <strong>son</strong>t <strong>de</strong> c<strong>et</strong> avis.<br />

C<strong>et</strong>te manière que j'indique pour tirer parti <strong>de</strong>s moyens <strong>et</strong><br />

<strong>de</strong>s cavaliers arabes — pratiquer une équitation arabe — n'est<br />

qu'une <strong>de</strong>mi-mesure qui est certes loin d'approcher du parfait<br />

mais el<strong>le</strong> présente l'avantage <strong>de</strong> ne pas changer <strong>le</strong>s conceptions<br />

équestres ataviques <strong>de</strong> l'indigène; el<strong>le</strong> aurait aussi celui <strong>de</strong> ne<br />

pas user prématurément <strong>et</strong> <strong>de</strong> moins abrutir une bel<strong>le</strong> race <strong>de</strong><br />

chevaux...


Si l'on veut faire pratiquer par <strong>le</strong>s Arabes une equitation française<br />

même élémentaire avec <strong>le</strong>s instruments <strong>et</strong> <strong>le</strong>s moyens<br />

qu'ils emploient, fata<strong>le</strong>ment, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> renversera <strong>son</strong> encolure,<br />

s'accu<strong>le</strong>ra, perdra tout <strong>son</strong> perçant <strong>et</strong> <strong>de</strong>viendra rétif.<br />

Ou bien, si l'on veut faire <strong>de</strong> l'équitation française avec <strong>le</strong>s<br />

cavaliers arabes, il faut <strong>le</strong>ur donner <strong>de</strong>s instruments analogues<br />

à ceux qu'emploient <strong>le</strong>s cavaliers français; ceci fait, au lieu <strong>de</strong><br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r davantage aux indigènes, il faut <strong>le</strong>ur <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r moins<br />

<strong>et</strong> simplifier encore notre équitation élémentaire pour la m<strong>et</strong>tre<br />

à <strong>le</strong>ur portée.<br />

C<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière solution paraît être la meil<strong>le</strong>ure <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s<br />

points <strong>de</strong> vue. Harnachement, équitation, règ<strong>le</strong>ment <strong>et</strong> instruction<br />

équestre uniques pour toute la cava<strong>le</strong>rie produiraient sans<br />

conteste <strong>de</strong> sérieux avantages que ces temps <strong>de</strong> mélange entre<br />

cava<strong>le</strong>rie métropolitaine <strong>et</strong> cava<strong>le</strong>rie indigène rendraient plus<br />

considérab<strong>le</strong>s encore. L'amalgame n'en serait que meil<strong>le</strong>ur. Chaque<br />

année, <strong>de</strong> nombreux spahis <strong>son</strong>t envoyés en France dans <strong>le</strong>s<br />

éco<strong>le</strong>s <strong>et</strong> <strong>le</strong>s remontes <strong>et</strong> <strong>de</strong> nombreux officiers qui connaissent<br />

très bien <strong>le</strong> règ<strong>le</strong>ment d'équitation métropolitain qu'ils n'auront<br />

pas à appliquer étant spahis <strong>et</strong> qui ignorent tota<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> règ<strong>le</strong>ment<br />

spécial à la cava<strong>le</strong>rie indigène, <strong>son</strong>t versés à l'armée d'Afrique.<br />

L'instruction ne pourrait qu'y gagner en qualité <strong>et</strong> l'État<br />

en économie <strong>de</strong> chevaux.<br />

L'expérience est faite d'ail<strong>le</strong>urs. El<strong>le</strong> est concluante. J'ai eu<br />

un très grand plaisir à en constater <strong>le</strong>s brillants résultats. A<br />

l'Éco<strong>le</strong> <strong>de</strong> cava<strong>le</strong>rie, <strong>le</strong>s spahis <strong>son</strong>t instruits en équitation française<br />

avec <strong>le</strong> harnachement français. Ils <strong>de</strong>viennent très vite <strong>de</strong><br />

très bons cavaliers. Les aptitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> cavalier, l'adresse naturel<strong>le</strong><br />

que <strong>le</strong>s Arabes possè<strong>de</strong>nt font qu'ils se trouvent dans <strong>le</strong>s meil<strong>le</strong>ures<br />

conditions possib<strong>le</strong>s pour recevoir avec un profit maximum<br />

la bonne instruction équestre française d'un règ<strong>le</strong>ment sanctionné<br />

par une expérience <strong>et</strong> par <strong>de</strong>s résultats indiscutab<strong>le</strong>s <strong>et</strong><br />

indiscutés.<br />

Et du point <strong>de</strong> vue moral, psychologique même, sur <strong>le</strong>quel je<br />

ne veux pas m'étendre, croit-on que nous ne tirerions pas <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te<br />

solution <strong>de</strong> très appréciab<strong>le</strong>s avantages?


TROISIÈME PARTIE<br />

CE QUE DEVIENT LE CHEVAL BARBE<br />

AVEC LES PROCÉDÉS ET LES MÉTHODES EMPLOYÉS<br />

CHAPITRE I<br />

comment on <strong>le</strong> trouve dans <strong>le</strong>s régiments<br />

§ 1.— Sa silhou<strong>et</strong>te. — Aplombs, conséquences; l'encolure affaissée, <strong>le</strong><br />

<strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> est acculé ; l'accu<strong>le</strong>ment; <strong>le</strong> col ferme, <strong>le</strong> jarr<strong>et</strong> coudé.<br />

§ 2. — Ses allures.— Le <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> est plus beau au repos qu'en action.<br />

Si <strong>le</strong> cavalier se sert du mors, Varrière-main est écrasée. Les allures <strong>son</strong>t<br />

rai<strong>de</strong>s <strong>et</strong> gênées. — Conséquences <strong>de</strong> la rai<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> la colonne vertébra<strong>le</strong><br />

<strong>et</strong> <strong>de</strong> la mâchoire. — Les allures du <strong>cheval</strong> sous lui du <strong>de</strong>vant <strong>et</strong> sous lui<br />

du <strong>de</strong>rrière. — Les forces qui élèvent <strong>le</strong> centre <strong>de</strong> gravité <strong>son</strong>t l'élément<br />

<strong>le</strong> plus important <strong>de</strong> la dépense dans la locomotion anima<strong>le</strong>. — Le<br />

<strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> au pas, au trot, au galop. — « Il y a <strong>de</strong>s chevaux qui participent<br />

à l'accu<strong>le</strong>ment <strong>et</strong> à la surcharge <strong>de</strong>s épau<strong>le</strong>s » ; à quoi tient c<strong>et</strong>te<br />

apparente anomalie. — Le <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> se débat entre <strong>de</strong>ux dou<strong>le</strong>urs.<br />

§ 3. — Ses défenses. — El<strong>le</strong>s <strong>son</strong>t toutes conséquence <strong>de</strong> l'accu<strong>le</strong>ment <strong>et</strong><br />

<strong>de</strong> jarr<strong>et</strong>s douloureux. — L'équitation « dite arabe » qui interdit l'emploi<br />

d'une jambe isolée favorise encore l'accu<strong>le</strong>ment <strong>et</strong> <strong>le</strong>s résistances. —<br />

L'encolure est un timon. — L'absence d'eff<strong>et</strong> latéral du mors arabe <strong>et</strong><br />

l'emploi unique en équitation arabe <strong>de</strong> la rêne contraire d'opposition<br />

pour conduire <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> facilitent aussi <strong>le</strong>s résistances.<br />

§ 4. — Son caractère. — Les meil<strong>le</strong>urs chevaux <strong>de</strong>viennent rétifs.<br />

C<strong>et</strong>te troisième partie — complément nécessaire <strong>de</strong>s chapitres<br />

précé<strong>de</strong>nts — expose <strong>le</strong>s conséquences <strong>de</strong>s moyens, <strong>de</strong>s procédés<br />

<strong>et</strong> <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s d'équitation que nous venons d'étudier.<br />

Pour se rendre compte <strong>de</strong> ce que <strong>le</strong>s faits relatés ici <strong>son</strong>t bien<br />

conformes à la réalité, point n'est besoin d'observations minutieuses,<br />

il suffit tout simp<strong>le</strong>ment d'ouvrir <strong>le</strong>s yeux avec l'intention<br />

d'y voir.


— 86 —<br />

Nous examinerons d'abord <strong>le</strong>s aplombs du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> en<br />

station non monté, puis nous verrons successivement ce que<br />

<strong>son</strong>t <strong>de</strong>venues ses allures, <strong>son</strong> caractère <strong>et</strong> quel<strong>le</strong>s <strong>son</strong>t <strong>le</strong>s défenses<br />

qu'il emploie pour se soustraire aux eff<strong>et</strong>s du mors <strong>et</strong> aux<br />

exigences <strong>de</strong> <strong>son</strong> cavalier.<br />

§ 1. — Sa Silhou<strong>et</strong>te.<br />

Les résultats d'observations faites sur 150 chevaux <strong>barbe</strong>s<br />

pris au hasard dans un régiment <strong>de</strong> spahis <strong>son</strong>t <strong>le</strong>s suivants :<br />

108 chevaux ont une attitu<strong>de</strong> se rapprochant <strong>de</strong> cel<strong>le</strong> indiquée<br />

schématiquement par la figure 45 (figure exagérée à <strong>de</strong>ssein),<br />

5 chevaux ont <strong>de</strong>s aplombs semblab<strong>le</strong>s à ceux indiqués par la<br />

figure 46.<br />

1 seul <strong>cheval</strong> es t placé comme <strong>le</strong> représente la figure 47.<br />

36 chevaux possè<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>s aplombs réguliers (fig. 48).<br />

Je m'empresse <strong>de</strong> faire remarquer que parmi ces 36 chevaux<br />

se trouvent 16 jeunes chevaux <strong>de</strong> quatre <strong>et</strong> cinq ans ayant été<br />

encore peu montés; 6 qui <strong>son</strong>t <strong>le</strong> plus souvent montés en bridon<br />

ou en fi<strong>le</strong>t (chevaux <strong>de</strong> gradés ou <strong>de</strong> bât), <strong>le</strong>s 14 chevaux restant<br />

qui présentent <strong>de</strong>s aplombs réguliers (à peu près <strong>le</strong> onzième<br />

<strong>de</strong>s chevaux observés) <strong>son</strong>t particulièrement bien établis, possè<strong>de</strong>nt<br />

une bel<strong>le</strong> encolure bien oblique <strong>et</strong> surtout un beau garrot<br />

bien sorti, bien musclé <strong>et</strong> très prolongé en arrière. J'ai remarqué<br />

en outre qu'un tiers environ <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>rniers <strong>son</strong>t légèrement<br />

ensellés.<br />

Le mors arabe accentue donc la défectuosité <strong>de</strong>s jarr<strong>et</strong>s, d'habitu<strong>de</strong><br />

<strong>et</strong> à tort uniquement attribuée à l'hérédité. J'ai vu beaucoup<br />

<strong>de</strong> jeunes chevaux arriver au régiment avec <strong>de</strong>s jarr<strong>et</strong>s<br />

sains <strong>et</strong> bien dirigés.<br />

Nous nous occuperons uniquement <strong>de</strong> l'attitu<strong>de</strong> usuel<strong>le</strong> <strong>de</strong>s<br />

chevaux <strong>barbe</strong>s (72 % <strong>de</strong>s chevaux observés) (photo 49 <strong>et</strong><br />

fig. 45).<br />

Ce rassemb<strong>le</strong>r, <strong>le</strong>s extrémités <strong>de</strong>s membres se rapprochant,<br />

est celui appris par Bauch er dans la première partie <strong>de</strong> sa vie,<br />

celui partiqué par <strong>le</strong> général Faverot <strong>de</strong> Kerbrech <strong>et</strong> <strong>le</strong> capitaine<br />

Raab.


— 87 —<br />

Ce rassemb<strong>le</strong>r avec l'encolure basse amène la ferm<strong>et</strong>ure <strong>de</strong><br />

la plupart <strong>de</strong>s ang<strong>le</strong>s articulaires; il fatigue énormément <strong>le</strong><br />

<strong>cheval</strong> <strong>et</strong> provoque l'instabilité dans <strong>son</strong> équilibre, la base <strong>de</strong><br />

sustentation se raccourcissant au détriment <strong>de</strong> la solidité.<br />

C<strong>et</strong>te station rassemblée du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> est cel<strong>le</strong> du <strong>cheval</strong><br />

acculé, el<strong>le</strong> enlève au <strong>cheval</strong> tout perçant <strong>et</strong> décè<strong>le</strong> l'absence<br />

d'impulsion.<br />

a<br />

Fig. 45.<br />

Fig. 16.<br />

•"X<br />

Fig. 47.<br />

Fig. 48.<br />

Schémas <strong>de</strong>s différents aplombs du <strong>cheval</strong> (exagérés à <strong>de</strong>ssein).<br />

Les postérieurs étant rapprochés du centre <strong>de</strong> gravité, l'arrière-main<br />

est écrasée; la croupe semb<strong>le</strong> souvent plus basse que<br />

<strong>le</strong> <strong>de</strong>vant. L'encolure effondrée dénote aussi l'accu<strong>le</strong>ment, car<br />

si <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> affaisse <strong>son</strong> encolure c'est pour rétablir l'équilibre<br />

compromis au détriment <strong>de</strong> l'arrière-main. On a l'impression<br />

très n<strong>et</strong>te que si <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> ainsi placé re<strong>le</strong>vait l'encolure<br />

sans éloigner <strong>le</strong>s postérieurs du centre <strong>de</strong> gravité, <strong>le</strong> poids qui<br />

passerait sur l'amère-main <strong>de</strong> ce fait provoquerait la station<br />

rassemblée du lapin jouant du tambour.


— 88 —<br />

L'encolure affaissée est <strong>le</strong> propre <strong>de</strong>s chevaux fatigués <strong>et</strong> usés<br />

dans <strong>le</strong>ur arrière-main. « Le poids porté en avant se substitue,<br />

en quelque sorte, à la force qui fait défaut », dit <strong>le</strong> général<br />

L'Hotte, qui compare c<strong>et</strong>te position à cel<strong>le</strong> du vieillard qui se<br />

voûte <strong>et</strong> en arrive même à la nécessité d'étayer sa masse au<br />

moyen d'un bâton pour amoindrir l'effort nécessaire à la propulsion<br />

que ses jarr<strong>et</strong>s doivent fournir.<br />

Je rappel<strong>le</strong> ici, en passant, que chez <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>, qu'il<br />

soit en station non monté ou en action monté, c<strong>et</strong> affaissement<br />

d'encolure subsiste toujours tota<strong>le</strong>ment ou en partie. A cause<br />

<strong>de</strong> la position <strong>de</strong> main du cavalier arabe, <strong>le</strong> plus souvent, <strong>le</strong><br />

<strong>cheval</strong> renverse <strong>son</strong> encolure au lieu <strong>de</strong> s'encapuchonner ; dans<br />

<strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux cas, il y a affaissement <strong>de</strong> la base <strong>de</strong> l'encolure. Plus <strong>le</strong><br />

<strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> acculé portera au vent plus il sera contraint <strong>de</strong><br />

tenir la tête haute <strong>et</strong> plus il s'efforcera d'affaisser la partie inférieure<br />

<strong>de</strong> <strong>son</strong> encolure en accentuant la courbure postérieure du<br />

chape<strong>le</strong>t <strong>de</strong>s vertèbres cervica<strong>le</strong>s pour porter en avant <strong>le</strong> plus<br />

<strong>de</strong> poids possib<strong>le</strong>.<br />

L'examen du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> montre donc sans aucun doute<br />

qu'il est acculé.<br />

« Un <strong>cheval</strong> est acculé — écrit Baucher — toutes <strong>le</strong>s fois que<br />

ses forces <strong>et</strong> <strong>son</strong> poids se trouvent refoulés sur la partie postérieure.<br />

L'accu<strong>le</strong>ment est <strong>le</strong> principe <strong>de</strong>s défenses puisqu'il tend<br />

à prendre constamment sur l'action propre au mouvement, à<br />

reporter <strong>le</strong> centre <strong>de</strong> gravité en arrière <strong>et</strong> au <strong>de</strong>là du milieu du<br />

corps du <strong>cheval</strong>, à rej<strong>et</strong>er ainsi <strong>le</strong> poids du corps sur l'arrièremain.<br />

Le <strong>cheval</strong> n'est plus soumis momentanément à l'action<br />

<strong>de</strong>s jambes, <strong>le</strong>s forces se trouvent en arrière <strong>de</strong>s jambes du cavalier.<br />

»<br />

« B aucher a très bien défini l'accu<strong>le</strong>ment — écrit Gustave<br />

Le Bon — mais il ne sut pas montrer à ses élèves <strong>le</strong>s moyens<br />

<strong>de</strong> l'éviter. Aussi sa métho<strong>de</strong> tomba-t-el<strong>le</strong> en France dans un<br />

comp<strong>le</strong>t discrédit. A la fin <strong>de</strong> sa vie, ce grand écuyer remédia<br />

à ce grave défaut par <strong>le</strong> relèvement <strong>de</strong> l'encolure, mais il était<br />

trop tard, <strong>le</strong> jugement porté resta définitif. Ainsi disposé — dit<br />

plus loin Gustave Le Bon — (station rassemblée par convergence<br />

<strong>de</strong>s antérieurs <strong>et</strong> <strong>de</strong>s postérieurs), F avant-main <strong>et</strong> l'ar-


Photo 49. — Attitu<strong>de</strong> caractéristique du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>.


— 89 —<br />

rière-main se trouvent éga<strong>le</strong>ment équilibrés, mais c<strong>et</strong> équilibre<br />

est fort instab<strong>le</strong>. Il peut être rompu aussi faci<strong>le</strong>ment au profit<br />

du mouvement en arrière qu'au profit du mouvement en avant.<br />

De toutes façons, la tendance à l'impulsion est annulée par suite<br />

<strong>de</strong> ia concentration <strong>de</strong>s forces vers <strong>le</strong> centre <strong>de</strong> gravité. Si <strong>le</strong>s<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>s du cavalier ne <strong>son</strong>t pas absolument justes, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

s'encapuchonne <strong>et</strong> s'accu<strong>le</strong>. L'encapuchonnement lui est d'ail<strong>le</strong>urs<br />

rendu extrêmement faci<strong>le</strong> par l'affaissement <strong>de</strong> <strong>son</strong> encolure.<br />

A moins d'une habi<strong>le</strong>té supérieure <strong>de</strong> <strong>son</strong> cavalier, l'animal<br />

ainsi dressé a beaucoup perdu <strong>de</strong> <strong>son</strong> impulsion <strong>et</strong> <strong>de</strong> sa franchise<br />

<strong>et</strong> est très près d'être rétif. » Gu stave Le Bon, dans <strong>son</strong><br />

livre l'Équitation actuel<strong>le</strong> <strong>et</strong> ses -principes, dis tingue <strong>de</strong>ux accu<strong>le</strong>ments<br />

: l'un « qui arrive au recu<strong>le</strong>r dès que c<strong>et</strong>te position s'exagère,<br />

l'autre qu'il appel<strong>le</strong> « l'accu<strong>le</strong>ment psychologique » <strong>et</strong> qui<br />

est ainsi défini : « C'e st celui <strong>de</strong> l'animal qui ne se porte plus<br />

en avant sous l'influence <strong>de</strong>s jambes <strong>de</strong> <strong>son</strong> cavalier <strong>et</strong> se trouve<br />

par conséquent, entièrement soustrait à <strong>son</strong> action. C<strong>et</strong>te forme<br />

<strong>de</strong> l'accu<strong>le</strong>ment est la plus dangereuse. » Chez <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>,<br />

se trouvent ces <strong>de</strong>ux accu<strong>le</strong>ments avec prédominence du second.<br />

Avant <strong>de</strong> par<strong>le</strong>r <strong>de</strong>s jarr<strong>et</strong>s du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>, je crois intéressant<br />

<strong>de</strong> citer quelques idées <strong>de</strong> Gustave Le Bon sur l'encolure.<br />

« En <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> <strong>son</strong> rô<strong>le</strong> au point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> l'équilibre, il paraît<br />

certain que l'encolure agit pour amortir <strong>le</strong>s chocs sur <strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s<br />

<strong>de</strong> l'animal. El<strong>le</strong> peut être considérée en eff<strong>et</strong> comme une charnière<br />

mobi<strong>le</strong> qui lorsqu'el<strong>le</strong> fonctionne, décompose <strong>le</strong>s chocs <strong>et</strong><br />

ne <strong>le</strong>s transm<strong>et</strong> qu'amortis par l'intermédiaire <strong>de</strong> la chaîne <strong>de</strong>s<br />

vertèbres aux reins, puis aux jarr<strong>et</strong>s supportant à un moment<br />

donné tout <strong>le</strong> poids du corps. Une encolure courte ou une encolure<br />

longue mais rigi<strong>de</strong>, dont par conséquent <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> ne se<br />

sert pas, n'amortit rien <strong>et</strong> l aisse arriver aux jarr<strong>et</strong>s tous <strong>le</strong>s chocs<br />

sans <strong>le</strong>s atténuer. Quand <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> ne sait pas se servir <strong>de</strong> <strong>son</strong><br />

encolure ou quand <strong>le</strong> cavalier l'empêche <strong>de</strong> s'en servir, l'état <strong>de</strong> ses<br />

jarr<strong>et</strong>s <strong>le</strong> montre clairement. »<br />

C'est tout à fait <strong>le</strong> cas du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>, <strong>le</strong> résultat <strong>de</strong>s moyens<br />

arabes <strong>et</strong> <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te espèce d'équitation franco-arabe ou « dite<br />

arabe » prat iquée dans <strong>le</strong>s régiments.<br />

L'absence d'eff<strong>et</strong> latéral du mors arabe offre <strong>le</strong> précieux avan-


— 90 —<br />

//_ ibia. t<br />

ca.lcan.eu<br />

itibio-tarsi ea<br />

Fig. 50. — Sque<strong>le</strong>tte du jarr<strong>et</strong>.<br />

tage <strong>de</strong> conserver au <strong>cheval</strong> <strong>le</strong> « col fe rme »; c<strong>et</strong> avantage est à<br />

considérer d'autant plus que si l'encolure affaissée du <strong>cheval</strong><br />

<strong>barbe</strong> était mol<strong>le</strong> au garrot, il serait à peu près impossib<strong>le</strong> <strong>de</strong><br />

<strong>le</strong> diriger. Ce « col ferme » facilite ra beaucoup <strong>son</strong> <strong>redressage</strong>.<br />

L'accu<strong>le</strong>ment du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> causé par l'emploi brutal d'un<br />

mors trop dur, fait paraître ses jarr<strong>et</strong>s coudés. Ils semb<strong>le</strong>nt<br />

étranglés à la base, mais en réalité c'est parce qu'ils <strong>son</strong>t plu»<br />

larges qu'ils ne <strong>de</strong>vraient à <strong>le</strong>ur partie supérieure ; la ferm<strong>et</strong>ure<strong>de</strong><br />

l'ang<strong>le</strong> tibio-tarsien, l'écartement du <strong>le</strong>vier calcanéen du tibia,<br />

la cor<strong>de</strong> calcanéenne qui se trouve ainsi à une plus gran<strong>de</strong> distance<br />

du tibia, <strong>son</strong>t cause <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te anomalie (flg. 50).<br />

Sous <strong>le</strong> poids <strong>de</strong> la masse, <strong>le</strong> jarr<strong>et</strong> tend alors à se fermer ce<br />

qui augmente la fatigue <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te articulation, « aus si <strong>le</strong> jarr<strong>et</strong><br />

coudé n'existe guère sans jar<strong>de</strong> <strong>et</strong> est fort menacé d'éparvin »<br />

(Jacou<strong>le</strong>t).<br />

La colonne <strong>de</strong> support étant oblique, <strong>le</strong> poids <strong>de</strong> là masse n'est<br />

plus étayé par <strong>son</strong> assise osseuse comme dans la position vertica<strong>le</strong><br />

du membre, c'est l'appareil ligamenteux qui associe ensemb<strong>le</strong><br />

<strong>le</strong>s os du tarse <strong>et</strong> du métatarse qui travail<strong>le</strong> <strong>le</strong> plus;,<br />

conséquence : usure <strong>et</strong> tares.


— 91 —<br />

§ 2 . — Ses allures.<br />

Les allures défectueuses du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> <strong>son</strong>t la conséquence<br />

norma<strong>le</strong> <strong>de</strong> ses aplombs irréguliers <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>son</strong> mauvais équilibre.<br />

Quand on examine <strong>le</strong>s chevaux <strong>de</strong> spahis, on est frappé <strong>de</strong><br />

voir combien ils <strong>son</strong>t plus beaux au repos qu'en action.<br />

Lorsque <strong>le</strong> cavalier ne se sert pas du mors, l'avant-main du<br />

<strong>cheval</strong> se trouve chargé par la position affaissée <strong>de</strong> l'encolure <strong>et</strong><br />

surchargé encore par <strong>le</strong> poids du cavalier surtout quand celui-ci<br />

penche <strong>le</strong> haut du corps en avant (position norma<strong>le</strong> au trot <strong>et</strong><br />

au galop), l'animal fatigue alors très vite <strong>de</strong>s membres antérieurs.<br />

Dès que <strong>le</strong> mors agit, sa dur<strong>et</strong>é <strong>et</strong> <strong>son</strong> emploi brutal provoquent<br />

fata<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> r<strong>et</strong>rait <strong>de</strong>s forces en arrière <strong>et</strong> mènent à<br />

l'accu<strong>le</strong>ment. « C'est par <strong>de</strong>s poids égaux qu'on maintient l'équilibre<br />

comme c'est par <strong>de</strong>s poids différents qu'on fait pencher<br />

un obj<strong>et</strong> plus d'un côté que <strong>de</strong> l'autre. Quand un corps quelconque<br />

sent une résistance vers un point, il cè<strong>de</strong> en se portant<br />

du côté opposé » (Comte d'Aure).<br />

Les allures du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> <strong>son</strong>t gênées, incertaines, raccourcies,<br />

répétées, el<strong>le</strong>s semb<strong>le</strong>nt comprimées. El<strong>le</strong>s indiquent une<br />

gran<strong>de</strong> rai<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> toute la colonne vertébra<strong>le</strong> ; encolure, rein,<br />

queue, <strong>son</strong>t figés ; seuls <strong>le</strong>s membres travail<strong>le</strong>nt pénib<strong>le</strong>ment <strong>et</strong><br />

sans soup<strong>le</strong>sse. La colonne vertébra<strong>le</strong> est une barre presque<br />

inf<strong>le</strong>xib<strong>le</strong> « au lieu d'être un ressort à la fois soup<strong>le</strong> <strong>et</strong> puissant<br />

entre <strong>le</strong>s mains du cavalier, recevant du rein <strong>et</strong> <strong>de</strong> l'arrièremain<br />

une poussée vigoureuse réglée, à l'autre extrémité, par la<br />

f<strong>le</strong>xibilité <strong>de</strong> la mâchoire, el<strong>le</strong> reste étrangère au travail <strong>de</strong> la<br />

locomotion laissant tout l'effort à produire aux membres postérieurs<br />

» {Baucher <strong>et</strong> l' équitation d'extérieur, par Boisgilbert).<br />

Comme chez tous <strong>le</strong>s chevaux insuffisamment dressés, <strong>le</strong>s articulations<br />

du cou aux <strong>de</strong>rnières vertèbres cervica<strong>le</strong>s <strong>et</strong> cel<strong>le</strong>s <strong>de</strong><br />

la mâchoire <strong>son</strong>t rai<strong>de</strong>s. « Si l e <strong>cheval</strong> a bon caractère, il n'y a<br />

que moitié mal — ai-je lu quelque part — mais s'il est ombrageux,<br />

<strong>le</strong> cavalier n'est plus maître du <strong>cheval</strong> car <strong>le</strong> cavalier n'a<br />

aucun moyen d'action fourni par <strong>le</strong> dressage ; il est dans la situa­


tion du pilote dont <strong>le</strong> bateau n'obéit que faib<strong>le</strong>ment par temps<br />

calme <strong>et</strong> pas du tout par temps orageux. »<br />

Les mouvements du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> en action <strong>son</strong>t moins allongés<br />

du fait que « <strong>le</strong>s antérieurs à l'appui <strong>son</strong>t plus près <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur<br />

<strong>le</strong>ver ce qui contraint <strong>le</strong> membre au soutien à précipiter <strong>son</strong><br />

poser ». Les enjambées <strong>de</strong>viennent éga<strong>le</strong>ment plus p<strong>et</strong>ites, « <strong>le</strong>s<br />

membres postérieurs étant moins éloignés <strong>de</strong> la limite extrême<br />

<strong>de</strong> <strong>le</strong>ur oscillation en avant <strong>son</strong>t incapab<strong>le</strong>s d'entamer beaucoup<br />

<strong>de</strong> terrain » (voi r fig. 51, sur laquel<strong>le</strong> A représente l'appui du<br />

membre, P <strong>le</strong> poser <strong>et</strong> L <strong>le</strong> <strong>le</strong>ver). La surcharge <strong>de</strong>s membres<br />

restreint aussi l'amplitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s mouvements, la vitesse <strong>de</strong>s allures<br />

Fig. 51. — Influence du rassemb<strong>le</strong>r par convergence <strong>de</strong>s antérieurs<br />

<strong>et</strong> <strong>de</strong>s postérieurs sur <strong>le</strong>s mouvements du <strong>cheval</strong> en. action.<br />

diminue tandis que tend vers l'épuisement la fatigue <strong>de</strong>s os, <strong>de</strong>s<br />

musc<strong>le</strong>s <strong>et</strong> <strong>de</strong>s tendons. Une partie <strong>de</strong> l'effort d'impulsion est<br />

dépensée en outre à sou<strong>le</strong>ver <strong>le</strong> corps au lieu <strong>de</strong> <strong>le</strong> porter en<br />

ayant : <strong>le</strong> déplacement vertical <strong>de</strong> la croupe doit se faire avant<br />

que se produise l'impulsion, d'où fatigue, usure <strong>et</strong> tares précoces<br />

<strong>de</strong>s jarr<strong>et</strong>s <strong>et</strong> <strong>de</strong>s bou<strong>le</strong>ts.<br />

C<strong>et</strong>te dépense <strong>de</strong> forces pour é<strong>le</strong>ver <strong>le</strong> centre <strong>de</strong> gravité est<br />

<strong>le</strong> plus considérab<strong>le</strong> <strong>de</strong>s trois termes <strong>de</strong> la locomotion horizonta<strong>le</strong><br />

calculée par Marey. Je crois intéressant pour <strong>le</strong> <strong>le</strong>cteur <strong>de</strong><br />

citer ici une partie d'une « Co mmunication sur un modè<strong>le</strong> mécanique<br />

perm<strong>et</strong>tant d'expliquer <strong>le</strong>s dépenses d'énergie nécessitées<br />

par <strong>le</strong>s mouvements <strong>de</strong> la locomotion anima<strong>le</strong> », c ommunication<br />

faite par M. H. Magne <strong>et</strong> écrite dans un Recueil <strong>de</strong><br />

Mé<strong>de</strong>cine vétérinaire publié par l'Éco<strong>le</strong> d'Alfort (numéro du<br />

30 décembre 1919).<br />

« M arey, à la suite <strong>de</strong> ses étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> chronophotographie, a<br />

décomposé <strong>le</strong> travail total <strong>de</strong> la locomotion horizonta<strong>le</strong> en trois<br />

termes <strong>et</strong> il a calculé la va<strong>le</strong>ur <strong>de</strong> chacun d'eux.


— 93 —<br />

« Le premier est constitué par <strong>le</strong> travail dépensé dans <strong>le</strong>s<br />

variations <strong>de</strong> la force vive du corps. La vitesse <strong>de</strong> progression<br />

dans tous <strong>le</strong>s mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> locomotion n'est pas constante, el<strong>le</strong><br />

passe périodiquement par <strong>de</strong>s maxima <strong>et</strong> <strong>de</strong>s minima; <strong>le</strong> corps<br />

produit donc périodiquement un certain travail positif pour<br />

porter sa vitesse du minimum au maximum <strong>et</strong> un travail négatif<br />

équivalant pour la faire varier en sens inverse. Ces travaux proportionnels<br />

au carré <strong>de</strong>s variations <strong>de</strong> la vitesse <strong>de</strong>viennent considérab<strong>le</strong>s<br />

aux allures vives.<br />

« Le <strong>de</strong>uxième terme représente <strong>le</strong> travail nécessaire pour<br />

Fig. 52. — Décomposition <strong>de</strong>s mouvements d'élévation <strong>et</strong> d'abaissement<br />

du centre <strong>de</strong> gravité du corps dans la locomotion anima<strong>le</strong>.<br />

donner aux musc<strong>le</strong>s <strong>le</strong>urs mouvements d'oscillation ; sa va<strong>le</strong>ur<br />

est toujours p<strong>et</strong>ite <strong>et</strong> el<strong>le</strong> ne dépend, comme cel<strong>le</strong> du précé<strong>de</strong>nt,<br />

que <strong>de</strong> la longueur du pas <strong>et</strong> <strong>de</strong> sa vitesse ; el<strong>le</strong> ne change pas<br />

quand <strong>le</strong> terrain est incliné.<br />

« Il e n est tout autrement du troisième. Son existence est due<br />

aux mouvements d'élévation <strong>et</strong> d'abaissement du centre <strong>de</strong><br />

gravité du corps. Sur <strong>le</strong>s chronophotographies <strong>de</strong> Marey il est<br />

faci<strong>le</strong> <strong>de</strong> constater que la trajectoire A P B R G s uivie par <strong>le</strong><br />

centre <strong>de</strong> gravité n'est pas une droite parallè<strong>le</strong> au sol mais qu'el<strong>le</strong><br />

est composée par une série <strong>de</strong> courbes que l'on peut sans erreur<br />

possib<strong>le</strong> assimi<strong>le</strong>r à <strong>de</strong>s arcs <strong>de</strong> cerc<strong>le</strong> (Voir fig. 52). Dans <strong>le</strong>s<br />

allures symétriques (pas, trot, amb<strong>le</strong>) <strong>le</strong>s points ou <strong>de</strong>ux arcs<br />

<strong>de</strong> cerc<strong>le</strong> se coupent, correspon<strong>de</strong>nt au début <strong>et</strong> à la fin <strong>de</strong>s<br />

pério<strong>de</strong>s d'appui <strong>et</strong> <strong>de</strong> soutien <strong>de</strong>s membres <strong>et</strong> <strong>le</strong>s somm<strong>et</strong>s <strong>de</strong><br />

ces arcs <strong>de</strong> cerc<strong>le</strong>, au milieu <strong>de</strong> ces pério<strong>de</strong>s. Les forces qui cau­


— 94 —<br />

sent ces mouvements verticaux effectuent donc <strong>de</strong>s travaux<br />

successivement positifs <strong>et</strong> négatifs dont il est faci<strong>le</strong> <strong>de</strong> calcu<strong>le</strong>r<br />

la va<strong>le</strong>ur en déterminant expérimenta<strong>le</strong>ment la hauteur <strong>de</strong> la<br />

flèche P. N. Aux vitesses ordinaires, ce terme constitue l'élément<br />

<strong>le</strong> plus important <strong>de</strong> la dépense. C'est lui qui grève si lour<strong>de</strong>ment<br />

<strong>le</strong>s opérations locomotrices <strong>de</strong>s animaux que Baron dans <strong>le</strong> langage<br />

imagé dont il a l'habitu<strong>de</strong> comparait à <strong>de</strong>s voitures roulant<br />

sur <strong>de</strong>s roues déjantées.<br />

« Rai <strong>son</strong>nons pour plus <strong>de</strong> simplicité sur un bipè<strong>de</strong> marchant<br />

à une allure où <strong>le</strong>s pério<strong>de</strong>s d'appui <strong>son</strong>t éga<strong>le</strong>s aux pério<strong>de</strong>s<br />

<strong>de</strong> soutien. Quand un pied arrive à l'appui 0, l'extrémité supérieure<br />

du membre se trouve en A, el<strong>le</strong> effectue une oscillation<br />

A P B ; arrivé en B <strong>le</strong> membre quitte <strong>le</strong> sol au moment où <strong>le</strong><br />

membre opposé y arrive en Q <strong>et</strong> <strong>le</strong> centre <strong>de</strong> gravité recommence<br />

à parcourir un arc <strong>de</strong> cerc<strong>le</strong> B R C i<strong>de</strong>ntique au précé<strong>de</strong>nt.<br />

On voit donc que l'extrémité supérieure <strong>de</strong>s membres, ou<br />

<strong>le</strong> centre <strong>de</strong> gravité qui lui est invariab<strong>le</strong>ment lié, effectue <strong>le</strong><br />

même mouvement que <strong>le</strong> moyeu d'une roue privée <strong>de</strong> sa jante<br />

<strong>et</strong>c., <strong>et</strong>c. »<br />

On se rend compte du travail que fournissent <strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s du<br />

<strong>cheval</strong> acculé qui supportent la plus gran<strong>de</strong> partie du poids <strong>de</strong><br />

la masse. « L'imp ulsion se fait <strong>de</strong> bas en haut aux dépens <strong>de</strong> la<br />

rapidité <strong>et</strong> <strong>de</strong> l'intégrité <strong>de</strong> sa transmission. » « Le <strong>cheval</strong> sous<br />

lui du <strong>de</strong>rrière se fatigue au repos comme en marche, manque<br />

<strong>de</strong> chasse, est souvent malhabi<strong>le</strong> <strong>et</strong> exposé à une ruine hâtive »<br />

(Jacou<strong>le</strong>t).<br />

Comme ses autres allures, <strong>le</strong> pas du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> est court <strong>et</strong><br />

incertain, il a <strong>le</strong> pas <strong>de</strong> tout <strong>cheval</strong> qui poussé en avant sans<br />

être maintenu n'ose se livrer. Quand il marche rênes longues,<br />

il affaisse exagérément <strong>son</strong> encolure, si l'avant-main est ainsi<br />

surchargé, par contre <strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s se trouvent dégagés. Quand <strong>le</strong><br />

cavalier touche ou ajuste ses rênes généra<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> se<br />

m<strong>et</strong> à trottiner ; il fuit <strong>le</strong> mors qu'il redoute, n'osant lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r<br />

l'appui qui favorise <strong>le</strong>s allures franches <strong>et</strong> étendues. C'est par<br />

accu<strong>le</strong>ment qu'il trottine. C<strong>et</strong>te fausse légèr<strong>et</strong>é suffirait à prouver<br />

que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> est <strong>de</strong>rrière la main, il se m<strong>et</strong>tra vite <strong>de</strong>rrière <strong>le</strong>s<br />

jambes pour <strong>de</strong>venir fina<strong>le</strong>ment rétif si l'on persiste à employer


— 95 —<br />

<strong>le</strong> même mors. Si <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> supporte au pas <strong>de</strong>s rênes <strong>de</strong>mi-tendues,<br />

il fait <strong>de</strong> très p<strong>et</strong>its pas répétés qui indiquent la gêne <strong>et</strong><br />

la crainte <strong>de</strong> la main <strong>de</strong> <strong>son</strong> cavalier. Lorsque <strong>le</strong> cavalier se sert<br />

du mors, à peu près invariab<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> renverse <strong>son</strong> encolure<br />

comme nous l'avons vu <strong>et</strong> place sa tête horizonta<strong>le</strong>. Ainsi<br />

placé, chaque fois qu'il veut baisser la tête, étant donnée la position<br />

<strong>de</strong> main du cavalier, il rencontre <strong>le</strong> mors qu'il craint. Il en<br />

résulte un manque comp<strong>le</strong>t <strong>de</strong> liai<strong>son</strong> entre la bouche du <strong>cheval</strong><br />

<strong>et</strong> la main du cavalier.<br />

Le trot du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> monté en mors arabe est lui aussi<br />

dur, inégal <strong>et</strong> d'une désagréab<strong>le</strong> rai<strong>de</strong>ur.<br />

Au galop, même si <strong>le</strong> cavalier abandonne <strong>le</strong>s rênes, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

ne profite pas <strong>de</strong> la liberté qui lui est laissée, il n'ose mobiliser<br />

<strong>son</strong> balancier, il a trop peur que <strong>son</strong> terrib<strong>le</strong> maître sanctionne<br />

d'un brutal coup <strong>de</strong> mors un abaissement d'encolure qu'il ne<br />

lui perm<strong>et</strong> d'ail<strong>le</strong>urs jamais d'habitu<strong>de</strong>. Ce galop pénib<strong>le</strong>, écourté,<br />

saccadé, dur, tracassé, est composé d'une succession <strong>de</strong> p<strong>et</strong>its<br />

sauts en avant exécutés par un pauvre animal craintif <strong>et</strong> qui<br />

semb<strong>le</strong> affolé. Je <strong>le</strong> comprends, il y a vraiment <strong>de</strong> quoi ne pas<br />

être tranquil<strong>le</strong>...<br />

Comme <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> a besoin, au galop surtout, <strong>de</strong> mobiliser <strong>son</strong><br />

encolure, dès que <strong>le</strong> cavalier veut se servir du mors ou prendre<br />

contact avec la bouche du <strong>cheval</strong>, c<strong>et</strong>te allure <strong>de</strong>vient plus pénib<strong>le</strong><br />

encore; l'avant-main seul bascu<strong>le</strong>, l'arrière-main, écrasée<br />

par <strong>le</strong> poids <strong>de</strong> la masse, quitte à peine <strong>le</strong> sol tandis que <strong>le</strong><br />

<strong>cheval</strong> essaie <strong>de</strong> soulager ses jarr<strong>et</strong>s en « cass ant » <strong>son</strong> encolure<br />

<strong>le</strong> plus en avant possib<strong>le</strong>.<br />

Si la plus gran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong>s chevaux <strong>barbe</strong>s montrent <strong>de</strong> façon<br />

évi<strong>de</strong>nte qu'ils <strong>son</strong>t en arrière <strong>de</strong> la main <strong>et</strong> même en arrière<br />

<strong>de</strong>s jambes, certains cependant, en très p<strong>et</strong>it nombre, paraissent<br />

sur <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s ; ceux-ci tentent d'échapper à la main <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur<br />

cavalier en tirant <strong>le</strong> nez au vent. Ce serait une erreur <strong>de</strong> croire<br />

que ces chevaux <strong>son</strong>t en réalité sur <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s. Ici encore <strong>le</strong><br />

défaut est l'accu<strong>le</strong>ment, l'écrasement d'une arrière-main douloureuse,<br />

la ruine <strong>de</strong>s jarr<strong>et</strong>s causée par un mors trop dur <strong>et</strong> manié<br />

par <strong>de</strong>s mains incapab<strong>le</strong>s <strong>de</strong> s'en servir. Ces chevaux fuient la<br />

dou<strong>le</strong>ur qui tenail<strong>le</strong> <strong>le</strong>urs jarr<strong>et</strong>s; ils tirent parce qu'ils essayent,


— 96 —<br />

en proj<strong>et</strong>ant du poids en avant, <strong>de</strong> rétablir l'équilibre rompu.<br />

Ainsi que <strong>le</strong> fait remarquer <strong>le</strong> lieutenant-colonel Gerhardt<br />

dans <strong>son</strong> Traité <strong>de</strong>s résistances du <strong>cheval</strong> : « Il y a <strong>de</strong>s chevaux<br />

qui participent à l'accu<strong>le</strong>ment <strong>et</strong> à la surcharge <strong>de</strong>s épau<strong>le</strong>s; ils<br />

paraissent à la fois acculés <strong>et</strong> sur <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s. A quoi tient c<strong>et</strong>te<br />

apparente anomalie? L'accu<strong>le</strong>ment, bravant l'action <strong>de</strong>s jambes,<br />

favorise l'immense majorité <strong>de</strong>s résistances, amoindrit ses moyens<br />

en laissant au <strong>cheval</strong> la disposition <strong>de</strong> ses forces, mais lui perm<strong>et</strong><br />

<strong>de</strong> faire usage <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te réserve pour se soustraire aux ai<strong>de</strong>s <strong>de</strong><br />

<strong>son</strong> cavalier <strong>et</strong> même pour <strong>le</strong>s tourner contre lui. Quoique la<br />

maladresse, la brutalité, la faib<strong>le</strong>sse, la sensibilité ou la souffrance<br />

d'un organe puissent occasionner <strong>le</strong>s défenses, cel<strong>le</strong>s-ci<br />

ne peuvent dégénérer en rétivité que grâce à l'accu<strong>le</strong>ment qui<br />

lui sert <strong>de</strong> point d'appui. » Ces c hevaux <strong>son</strong>t faussement légers<br />

ou très lourds à la main. Ils se m<strong>et</strong>tent en défense contre <strong>le</strong><br />

cavalier en s'immobilisant, puis, si on <strong>le</strong>s attaque, ils partent<br />

en avant en cherchant à forcer la main. Ils <strong>son</strong>t diffici<strong>le</strong>s à arrêter,<br />

font <strong>de</strong>s bonds <strong>et</strong> <strong>de</strong>s rua<strong>de</strong>s. »<br />

Ainsi donc, on peut dire que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> tel que nous <strong>le</strong><br />

trouvons dans <strong>le</strong>s régiments se débat entre <strong>de</strong>ux dou<strong>le</strong>urs : cel<strong>le</strong><br />

du mors <strong>et</strong> sa résultante, cel<strong>le</strong> <strong>de</strong>s jarr<strong>et</strong>s.<br />

On peut affirmer aussi que presque tous <strong>le</strong>s chevaux <strong>barbe</strong>s<br />

<strong>son</strong>t acculés, à l'exception <strong>de</strong> quelques jeunes chevaux pas encore<br />

trop « c abossés » <strong>et</strong> <strong>de</strong> quelques autres particulièrement bien<br />

établis <strong>et</strong> soli<strong>de</strong>ment constitués; <strong>de</strong> ce fait, ces <strong>de</strong>rniers ont<br />

l'avantage <strong>de</strong> pouvoir supporter plus longtemps la torture <strong>de</strong><br />

ces moyens <strong>et</strong> <strong>de</strong> pouvoir lutter avec plus d'efficacité contre ces<br />

procédés. Sont-ils plus heureux parce qu'ils connaîtront plus<br />

longtemps c<strong>et</strong>te vie misérab<strong>le</strong>?<br />

« L e <strong>cheval</strong> semb<strong>le</strong> vouloir se m<strong>et</strong>tre au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> <strong>son</strong> état<br />

<strong>de</strong> quadrupè<strong>de</strong> en é<strong>le</strong>vant la tête — a dit Buffon. — Dans c<strong>et</strong>te<br />

nob<strong>le</strong> attitu<strong>de</strong>, il regar<strong>de</strong> l'homme face à face. »<br />

Le <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>, tel que nous <strong>le</strong> trouvons présente un autre<br />

aspect : arrêté, il baisse tristement la tête <strong>et</strong> fixe <strong>le</strong> sol d'un air<br />

las; en action <strong>et</strong> monté, c'est d'un air excédé, suppliant <strong>et</strong> d'un<br />

œil <strong>de</strong> martyr qu'il regar<strong>de</strong> <strong>le</strong>s cieux...


— 97 —<br />

§ 3. — Les défenses du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>.<br />

« Les neuf dixièmes <strong>de</strong>s défenses du <strong>cheval</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong> ses résistances,<br />

plongea<strong>de</strong>s vio<strong>le</strong>ntes, coups <strong>de</strong> rein, sacca<strong>de</strong>s, <strong>et</strong>c... proviennent<br />

<strong>de</strong>s contraintes inopportunes qu'une main inintelligente exerce<br />

sur <strong>son</strong> encolure <strong>et</strong> sur <strong>le</strong> chape<strong>le</strong>t <strong>de</strong> ses vertèbres d'un bout à<br />

l'autre <strong>de</strong> la colonne vertébra<strong>le</strong>. » (Ca pitaine J.-B Dumas.)<br />

Les défenses du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> <strong>son</strong>t toutes conséquence <strong>de</strong> l'accu<strong>le</strong>ment<br />

<strong>et</strong> <strong>de</strong> jarr<strong>et</strong>s douloureux : cabrer, pointer, lança<strong>de</strong>s. 11<br />

est rare <strong>de</strong> trouver <strong>de</strong>s chevaux <strong>barbe</strong>s qui ruent, car généra<strong>le</strong>ment<br />

c'est sur la partie la plus chargée que la défense prend <strong>son</strong><br />

point d'appui.<br />

« La défense du <strong>cheval</strong> est calculée d'après sa position <strong>et</strong> ses<br />

aplombs; celui au <strong>de</strong>vant faib<strong>le</strong> rue, celui trop assis ou qui aura<br />

<strong>le</strong> <strong>de</strong>rrière faib<strong>le</strong>, s'il vient à se défendre pointera. » « C' est la<br />

sensibilité dans <strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s qui amène <strong>le</strong> plus <strong>de</strong> défenses parce<br />

que, n'excluant pas la force, el<strong>le</strong> se trouve dans <strong>le</strong> cas d'être<br />

continuel<strong>le</strong>ment excitée par l'eff<strong>et</strong> du mors qui, tendant à ra<strong>le</strong>ntir,<br />

à arrêter ou recu<strong>le</strong>r <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>, agit directement sur c<strong>et</strong>te<br />

partie. C<strong>et</strong>te irritabilité détermine la défense, laquel<strong>le</strong>, dans ce<br />

cas, se manifeste par <strong>de</strong>s pointes, <strong>de</strong>s bonds en avant ou la fuite<br />

<strong>et</strong> quelquefois même <strong>de</strong>s rua<strong>de</strong>s. » « Afin <strong>de</strong> se soustraire à c<strong>et</strong>te<br />

nouvel<strong>le</strong> sujétion (<strong>le</strong> mors), <strong>le</strong>s chevaux ayant <strong>de</strong> la faib<strong>le</strong> se dans<br />

<strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s ou dans l'arrière-main, se trouvant naturel<strong>le</strong>ment<br />

assis, pointeront au contraire si <strong>le</strong> mors a une action trop gran<strong>de</strong><br />

parce qu'ils chercheront à reporter en avant <strong>le</strong>s pesanteurs surchargeant<br />

<strong>le</strong>ur arrière-main ( 1 ). »<br />

« Le <strong>cheval</strong> résiste naturel<strong>le</strong>ment <strong>et</strong> avec d'autant plus d'avantage<br />

que la mauvaise répartition <strong>de</strong> <strong>son</strong> poids <strong>et</strong> <strong>de</strong> ses forces<br />

suffira pour annu<strong>le</strong>r l'action du cavalier ( 2 ).<br />

Si <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> s'emporte quelquefois <strong>et</strong> tente <strong>de</strong> forcer<br />

la main <strong>de</strong> <strong>son</strong> cavalier en se livrant à <strong>de</strong>s lança<strong>de</strong>s <strong>et</strong> à <strong>de</strong>s<br />

bonds en avant, c'est donc bien pour fuir la dou<strong>le</strong>ur qui écrase<br />

ses jarr<strong>et</strong>s, pour tenter <strong>de</strong> rétablir l'équilibre en reportant du<br />

V) Comte d'Aure.<br />

(*) Baucher.<br />

LE C HEVAL BARBE 7


— 98 —<br />

poids en avant. Nous avons vu que <strong>le</strong> cavalier ne peut qu'aggraver<br />

la cause <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te défense en s'acharnant à tirer sur <strong>le</strong>s<br />

rênes pour ra<strong>le</strong>ntir <strong>son</strong> <strong>cheval</strong>.<br />

L'équitation arabe, en interdisant l'emploi d'une jambe isolée<br />

<strong>et</strong> en ne se préoccupant pas d'assouplir l'arrière-main, favorise<br />

encore <strong>le</strong>s résistances du <strong>cheval</strong> <strong>et</strong> l'accu<strong>le</strong>ment. « Assouplissez<br />

tout ou n'assouplissez rien », d it très logiquement <strong>le</strong> lieutenantcolonel<br />

Gerhardt.<br />

Le général L'Hotte, dans ses « questions équestres », nous<br />

donne à ce suj<strong>et</strong> l'exemp<strong>le</strong> suivant que nous avons tous eu l'occasion<br />

d'observer : « Ce <strong>son</strong>t <strong>le</strong>s hanches bien plutôt que <strong>le</strong> bout<br />

<strong>de</strong> <strong>de</strong>vant qui impriment la direction; el<strong>le</strong>s agissent, dit-il,<br />

comme la barre d'un bateau —- l'encolure peut prendre <strong>de</strong>s attitu<strong>de</strong>s<br />

indépendantes du reste du corps tandis qu'il n'en est pas<br />

<strong>de</strong> même <strong>de</strong>s hanches par suite <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur soudure intime au tronc —<br />

quand il y a opposition entre la direction donnée par <strong>le</strong> bout <strong>de</strong><br />

<strong>de</strong>vant <strong>et</strong> cel<strong>le</strong> donnée par <strong>le</strong>s hanches, c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière l'emporte<br />

toujours.<br />

« E xemp<strong>le</strong> ; Un <strong>cheval</strong> tient à l'écurie <strong>et</strong> veut y r<strong>et</strong>ourner<br />

par un <strong>de</strong>mi-tour à gauche, c'est en vain que <strong>le</strong> cavalier ouvrira<br />

la rêne droite <strong>et</strong> infléchira la tête <strong>et</strong> l'encolure à droite, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

fera <strong>de</strong>mi-tour à gauche si <strong>le</strong>s hanches résistant <strong>le</strong> poussent dans<br />

c<strong>et</strong>te direction en se refusant à dévier à gauche, c'est donc <strong>de</strong><br />

l'exploitation <strong>de</strong>s hanches que <strong>le</strong> cavalier doit surtout se préoccuper<br />

pour exercer sa puissance <strong>de</strong> domination sur <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>. »<br />

L'assouplissement <strong>de</strong>s hanches est certes absolument nécessaire<br />

pour capter <strong>le</strong>s forces du <strong>cheval</strong>, mais je crois que dans<br />

l'exemp<strong>le</strong> cité par <strong>le</strong> général L'Hotte, ce qui perm<strong>et</strong> surtout au<br />

<strong>cheval</strong> <strong>de</strong> résister, c'est <strong>le</strong> défaut d'impulsion; s'il y avait en<br />

la circonstance mouvement en avant, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> serait forcé <strong>de</strong><br />

« suivre <strong>son</strong> nez » <strong>et</strong> <strong>son</strong> encolure.<br />

Si <strong>le</strong>s hanches peuvent être justement comparées à la barre<br />

d'un bateau, il est plus compréhensib<strong>le</strong> <strong>de</strong> comparer l'encolure<br />

au timon d'une voiture. C<strong>et</strong>te comparai<strong>son</strong> a déjà été faite par<br />

<strong>le</strong> lieutenant-colonel Gerhardt, je crois.<br />

De même que s'il y a mouvement en avant la voiture suivra la


— 99 —<br />

direction du timon; s'il y a mouvement en avant, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

suivra forcément cel<strong>le</strong> <strong>de</strong> <strong>son</strong> encolure.<br />

L'absence d'eff<strong>et</strong> latéral du mors arabe <strong>et</strong> l'emploi unique,<br />

dans c<strong>et</strong>te équitation, <strong>de</strong> la rêne contraire d'opposition pour<br />

conduire <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>, facilitent aussi <strong>le</strong>s résistances.<br />

« Pou r tourner à droite, la rêne gauche d'opposition charge la<br />

hanche droite, écrit <strong>le</strong> capitaine <strong>de</strong> Saint-Phal<strong>le</strong>, <strong>de</strong> plus si <strong>le</strong><br />

<strong>cheval</strong> fait <strong>de</strong>s difficultés pour avancer en tournant <strong>le</strong> reflux<br />

du poids que la rêne d'opposition provoque sur <strong>le</strong> postérieur<br />

du <strong>de</strong>dans favorise c<strong>et</strong>te résistance. »<br />

§ 4. — Le caractère du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>.<br />

Naturel<strong>le</strong>ment, <strong>le</strong> caractère du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> se ressent lui<br />

aussi <strong>de</strong>s moyens <strong>et</strong> <strong>de</strong>s procédés arabes.<br />

En même temps que perçant <strong>et</strong> énergie, il perd gaîté, entrain<br />

<strong>et</strong> bonne humeur ; il <strong>de</strong>vient maussa<strong>de</strong>, triste <strong>et</strong> résigné. Comme<br />

ses allures, <strong>son</strong> caractère est étouffé. Sournoisement il r<strong>et</strong>ient<br />

ses forces pour tenter <strong>de</strong> se dérober à l'emprise <strong>de</strong> <strong>son</strong> cavalier;<br />

il emploie l'inertie contre celui qu'il a appris à regar<strong>de</strong>r comme<br />

<strong>son</strong> ennemi. Il ne se livre jamais complètement.<br />

Au départ <strong>de</strong> l'écurie, après quelques bonds <strong>de</strong> gaîté (quand<br />

il lui en reste) <strong>le</strong> plus souvent réprimés avec brutalité, il s'en va<br />

sans entrain vers <strong>le</strong> terrain <strong>de</strong> manoeuvres ou <strong>le</strong> manège, sa<br />

« chambre <strong>de</strong> tortures ». L'ar<strong>de</strong>ur qu'il m<strong>et</strong> pour s'y rendre<br />

prouve qu'il sait ce qui l'y attend... L'éperon viendra bien <strong>de</strong><br />

temps en temps réveil<strong>le</strong>r <strong>son</strong> impulsion abattue, mais il r<strong>et</strong>ombera<br />

vite dans ses allures tristes <strong>et</strong> traînantes. Au r<strong>et</strong>our, au<br />

contraire, malgré un travail toujours pénib<strong>le</strong>, malgré <strong>son</strong> cavalier,<br />

il montre <strong>de</strong> plus brillantes allures, plus d'allant, <strong>de</strong> vigueur<br />

<strong>et</strong> d'énergie : il lui tar<strong>de</strong> <strong>de</strong> finir c<strong>et</strong>te corvée, <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre sa bouche<br />

à l'aise, <strong>de</strong> reposer ses barres meurtries <strong>et</strong> ses pauvres jarr<strong>et</strong>s<br />

rompus, <strong>de</strong> se débarrasser <strong>de</strong> <strong>son</strong> cavalier.<br />

Les meil<strong>le</strong>urs chevaux, bien établis, plus résistants, qui ont<br />

du caractère, <strong>de</strong>viennent rétifs. Dans ce cas, ils n'échappent<br />

pas à la règ<strong>le</strong> généra<strong>le</strong> appliquée même aux humains ; ils <strong>son</strong>t<br />

taxés <strong>de</strong> mauvais caractère <strong>et</strong> ils <strong>son</strong>t maltraités...


— 100 —<br />

La solidité <strong>et</strong> la résistance <strong>de</strong> ces chevaux <strong>son</strong>t vraiment<br />

extraordinaires ; malgré c<strong>et</strong>te equitation, malgré ces instruments,<br />

malgré ces cavaliers, ils se tarent très peu <strong>et</strong> durent relativement<br />

longtemps.<br />

Je ne saurais mieux conclure qu'en citant une phrase du<br />

grand écuyer Baucher qui s'applique à merveil<strong>le</strong> au <strong>cheval</strong><br />

<strong>barbe</strong> : « Le <strong>cheval</strong> bien organisé <strong>et</strong> faci<strong>le</strong> d'éducation contribue<br />

à perpétuer <strong>le</strong>s routines funestes. »


CHAPITRE II<br />

CAUSES. CONSÉQUENCES. REMÈDES<br />

Les causes d'usure : Le mors <strong>et</strong> <strong>son</strong> emploi; l'impossib<strong>le</strong> est <strong>de</strong>mandé au<br />

cavalier; l'absence <strong>de</strong> dressage. — Conséquences : usure rapi<strong>de</strong> <strong>et</strong> prématurée<br />

du <strong>cheval</strong>. — Les remè<strong>de</strong>s ; une seu<strong>le</strong> solution logique <strong>et</strong> vraiment<br />

efficace ; supprimer <strong>le</strong> mors; par quoi <strong>le</strong> remplacer?<br />

La col<strong>le</strong>ction assez complète <strong>de</strong>s faits exposés précé<strong>de</strong>mment<br />

suffit pour situer <strong>le</strong>s causes.<br />

Nous pouvons affirmer que la cause principa<strong>le</strong> du mal qui<br />

atteint, ruine, déforme <strong>et</strong> sabote la race <strong>barbe</strong>, est <strong>le</strong> mors arabe.<br />

C<strong>et</strong>te cause est encore aggravée du fait que <strong>le</strong>s Arabes font<br />

un usage inintelligent <strong>et</strong> abusif <strong>de</strong> ce mors dont ils <strong>son</strong>t incapab<strong>le</strong>s<br />

<strong>de</strong> se servir convenab<strong>le</strong>ment, <strong>et</strong> qu'en somme on <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />

l'impossib<strong>le</strong> au mors comme au cavalier.<br />

L'absence <strong>de</strong> dressage est aussi une cause sérieuse <strong>de</strong> l'état<br />

dans <strong>le</strong>quel se trouve <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong> sa ruine rapi<strong>de</strong>.<br />

« Lor squ'on <strong>le</strong> monte (<strong>le</strong> <strong>cheval</strong>) — écrit Le Bon — avec un<br />

dressage rudimentaire consistant simp<strong>le</strong>ment à lui apprendre à<br />

supporter <strong>le</strong> mors <strong>et</strong> <strong>le</strong> poids d'un cavalier <strong>et</strong> à tourner à droite<br />

ou à gauche quand on tire <strong>le</strong>s rênes correspondantes, ses allures<br />

ne <strong>son</strong>t pas modifiées mais simp<strong>le</strong>ment gênées. » « Le <strong>cheval</strong> non<br />

équilibré par <strong>le</strong> dressage dépense plus que nécessaire. Avec <strong>le</strong>s<br />

effrayants budg<strong>et</strong>s <strong>de</strong> guerre d'aujourd'hui, c'est par centaines<br />

<strong>de</strong> millions que se chiffrerait en quelques années une prolongation<br />

<strong>de</strong> durée <strong>de</strong>s chevaux en service dans la cava<strong>le</strong>rie. » « Le<br />

capitaine Van <strong>de</strong>n Meer fait remarquer avec rai<strong>son</strong>, dans <strong>son</strong><br />

livre sur l'équitation, que <strong>le</strong>s chevaux <strong>le</strong>s plus vieux <strong>et</strong> <strong>le</strong>s<br />

moins tarés se trouvent parmi <strong>le</strong>s chevaux d'éco<strong>le</strong>. »<br />

Si l'erreur du mors arabe est excusab<strong>le</strong> <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s indigènes<br />

<strong>de</strong> l'Afrique du Nord, el<strong>le</strong> est inadmissib<strong>le</strong> <strong>de</strong> la nôtre.<br />

Les conséquences <strong>de</strong> tout ce que nous avons étudié dans <strong>le</strong>s<br />

chapitres précé<strong>de</strong>nts <strong>son</strong>t évi<strong>de</strong>ntes : <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> est vite<br />

ruiné <strong>et</strong> prématurément usé.


— 102 —<br />

Malgré l'extraordinaire résistance que possè<strong>de</strong> <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>,<br />

<strong>le</strong> mors arabe <strong>et</strong> <strong>son</strong> emploi ont tôt fait <strong>de</strong> l'épuiser <strong>et</strong> <strong>de</strong> saccager<br />

<strong>son</strong> impulsion.<br />

La surcharge <strong>et</strong> l'écrasement <strong>de</strong> F arrière-main, l'accu<strong>le</strong>ment<br />

qui comprime <strong>et</strong> ruine <strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s, l'encolure figée que <strong>le</strong> cavalier<br />

paralyse, <strong>le</strong>s allures pénib<strong>le</strong>s qui en résultent, l'absence<br />

presque complète <strong>de</strong> dressage du <strong>cheval</strong> <strong>et</strong> d'instruction équestre<br />

du cavalier arabe, <strong>le</strong>s défenses auxquel<strong>le</strong>s se livre <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> pour<br />

lutter contre <strong>le</strong> mors, la rai<strong>de</strong>ur <strong>de</strong>s hanches jamais assouplies<br />

en équitation arabe, ont tôt fait d'user à fond <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>,<br />

d'étouffer ses allures <strong>et</strong> ses brillantes qualités.<br />

Sous <strong>de</strong>s yeux indifférents qu'une réalité trop lumineuse<br />

offense <strong>et</strong> qui trouvent meil<strong>le</strong>ur <strong>de</strong> rester entr'ouverts, ou sous<br />

<strong>de</strong>s yeux cataractés d'un parti pris déformant <strong>le</strong>s images, voilà<br />

comment est usée <strong>et</strong> « massacrée » une bel<strong>le</strong> race <strong>de</strong> chevaux...<br />

Il est regr<strong>et</strong>tab<strong>le</strong> que tous ceux qui en <strong>son</strong>t témoins n'éprouvent<br />

pas <strong>le</strong> besoin <strong>de</strong> crier fort, avec un diapa<strong>son</strong> plus autorisé<br />

que <strong>le</strong> mien surtout, pour réclamer la fin <strong>de</strong> la « hon te du mors<br />

arabe ».<br />

Il est absolument certain <strong>et</strong> prouvé qu'avec un mors moins<br />

dur, ces chevaux soli<strong>de</strong>s, résistants <strong>et</strong> bien trempés dureraient<br />

beaucoup plus, car supprimer ce mors serait supprimer du même<br />

coup la majorité <strong>de</strong>s tares, la ruine <strong>de</strong>s jarr<strong>et</strong>s, l'accu<strong>le</strong>ment avec<br />

toutes ses conséquences néfastes.<br />

Connaître la cause <strong>de</strong> l'usure <strong>et</strong> <strong>de</strong> la déformation du <strong>cheval</strong><br />

<strong>barbe</strong> est insuffisant, il <strong>de</strong>vient nécessaire, pour épuiser la question,<br />

<strong>de</strong> chercher <strong>de</strong>s remè<strong>de</strong>s efficaces <strong>et</strong> d'une application possib<strong>le</strong>.<br />

Différentes <strong>de</strong>mi-mesures peuvent être envisagées :<br />

Le Manuel à l'usage <strong>de</strong>s gradés <strong>de</strong>s Régiments <strong>de</strong> Spahis donne,<br />

pour habituer <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> au mors arabe, un ingénieux moyen qui<br />

pourrait être exploité : « A dapter au mors arabe, pendant <strong>le</strong><br />

temps nécessaire, une paire <strong>de</strong> rênes supplémentaires. Cel<strong>le</strong>s-ci<br />

<strong>son</strong>t bouclées aux anneaux supérieurs du mors (porte-mors <strong>de</strong><br />

montants <strong>de</strong> bri<strong>de</strong>). Lorsque <strong>le</strong> cavalier se borne à agir sur el<strong>le</strong>s,<br />

<strong>le</strong> mors se comporte à peu près comme un bridon. »


— 103 —<br />

Mais ce moyen ne peut être mis en pratique d'une façon durab<strong>le</strong><br />

car <strong>le</strong> cavalier indigène ne ferait pas la différence entre<br />

ces <strong>de</strong>ux eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong> rênes. Se souciant bien peu du <strong>cheval</strong> <strong>et</strong> en<br />

général ne l'aimant pas, il emploierait bien vite ses moyens habituels<br />

quand l'instructeur n'aurait pas <strong>le</strong>s yeux fixés sur lui ou<br />

qu'il serait livré à lui-même. Peu lui importe <strong>de</strong> causer <strong>de</strong> la<br />

dou<strong>le</strong>ur, <strong>de</strong> faire souffrir, d'user <strong>son</strong> <strong>cheval</strong>. « Monte-moi comme<br />

ton ennemi », fait dire au <strong>cheval</strong> un proverbe arabe, <strong>et</strong> il s'en<br />

charge...<br />

Un autre moyen indiqué par <strong>le</strong> général Descoins dans un<br />

artic<strong>le</strong> paru dans une Revue <strong>de</strong> Cava<strong>le</strong>rie est <strong>le</strong> suivant :<br />

« Il conviendrait, dans l'intérêt <strong>de</strong> l'État, <strong>de</strong> revenir aux<br />

errements anciens en rendant aux spahis indigènes la propriété<br />

<strong>de</strong> <strong>le</strong>ur monture. De la sorte une proportion notab<strong>le</strong> <strong>de</strong> chevaux<br />

arriveraient aux régiments en même temps que <strong>le</strong>urs proprité<br />

taires s'engageraient. »<br />

Ceci serait je crois réalisab<strong>le</strong> si <strong>le</strong>s régiments <strong>de</strong> spahis étaiencomposés<br />

comme autrefois presque uniquement d'engagés, fils<br />

<strong>de</strong> « gran<strong>de</strong>s tentes » ou fils d'Arabes riches.<br />

L'intérêt du <strong>cheval</strong> n'y est pas non plus envisagé ; il s'userait<br />

presque aussi rapi<strong>de</strong>ment. La perte <strong>de</strong> l'État serait peut-être<br />

un peu moindre, sa perte immédiate surtout, mais la race <strong>barbe</strong><br />

n'en tirerait aucun bénéfice.<br />

Quand on voit un enfant jouer avec un revolver nécessitant<br />

une manipulation pru<strong>de</strong>nte <strong>et</strong> rai<strong>son</strong>née, la logique, <strong>le</strong> simp<strong>le</strong><br />

bon sens veu<strong>le</strong>nt, si l'on veut écarter <strong>le</strong> danger, qu'on <strong>le</strong> lui<br />

enlève <strong>de</strong>s mains. Il <strong>de</strong>vrait en être <strong>de</strong> même du mors arabe ;<br />

<strong>le</strong>s conseils <strong>de</strong> la logique <strong>de</strong>vraient être suivis sans hésiter; il<br />

faudrait en<strong>le</strong>ver <strong>le</strong> mors arabe <strong>de</strong>s mains, inhabi<strong>le</strong>s à s'en servir,<br />

dans <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s il se trouve.<br />

Deman<strong>de</strong>r au cavalier arabe plus qu'il n'est capab<strong>le</strong> d'obtenir<br />

avec un tel mors sans tenir compte <strong>de</strong> ses capacités équestres<br />

ne peut faire qu'augmenter <strong>le</strong> danger, qu'accentuer <strong>le</strong>s eff<strong>et</strong>s<br />

désastreux du mors, qu'aggraver la faute contre <strong>le</strong> bon sens<br />

cependant suffisamment confirmée.<br />

La solution logique du problème est donc <strong>de</strong> changer <strong>le</strong> mors<br />

du cavalier arabe.


— 104 —<br />

Il faudrait lui donner un mors qui fût à la portée <strong>de</strong> ses<br />

moyens <strong>et</strong> qui ne risque pas <strong>de</strong> produire <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s aussi contraires<br />

à une bonne utilisation du <strong>cheval</strong>.<br />

Le mors rég<strong>le</strong>mentaire français vaudrait mieux que celui dont<br />

j'ai entrepris <strong>de</strong> faire <strong>le</strong> procès, mais étant données <strong>le</strong>s conceptions<br />

équestres actuel<strong>le</strong>s <strong>de</strong> l'Arabe, il y aurait intérêt à lui<br />

m<strong>et</strong>tre entre <strong>le</strong>s mains un instrument encore plus inoffensif avec<br />

<strong>le</strong>quel, sa sévérité se donnant même libre cours, il m<strong>et</strong>trait<br />

quatre ou cinq ans <strong>de</strong> plus pour arriver à « finir » <strong>son</strong> <strong>cheval</strong>.<br />

C<strong>et</strong>te solution, la seu<strong>le</strong> logique à mon avis, serait certes préférab<strong>le</strong><br />

<strong>et</strong> donnerait <strong>de</strong> meil<strong>le</strong>urs résultats que cel<strong>le</strong> qui consiste à<br />

essayer <strong>de</strong> faire un écuyer du cavalier arabe.<br />

Mais ce qu'il faudrait surtout, c'est commencer par détruire la<br />

légen<strong>de</strong> 1' « Ar abe cavalier » (j 'y reviens!); la remplacer par la<br />

réalité ; « L 'Arabe est un excel<strong>le</strong>nt cavalier en puissance » ;<br />

s'élancer hardiment <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te base soli<strong>de</strong>, nouvel<strong>le</strong>, instruire <strong>le</strong><br />

cavalier arabe <strong>et</strong> faire passer en somme dans <strong>le</strong> réel ce qu'il détient<br />

en puissance.


QUATRIÈME PARTIE<br />

LE REDRESSAGE DU CHEVAL BARBE<br />

« Il n'y a pas <strong>de</strong> dressage possib<strong>le</strong><br />

sans impulsion. » (FILLIS.)<br />

« Tout revient en equitation à<br />

comman<strong>de</strong>r l'équilibre. » (SAINT-<br />

PHALLE.)<br />

« L 'équilibre <strong>et</strong> <strong>le</strong> mouvement,<br />

voilà <strong>le</strong> grand secr<strong>et</strong> <strong>de</strong> l'équitation.»<br />

(J. JANIN.)<br />

CHAPITRE I<br />

a quoi remédier <strong>et</strong> comment<br />

§ 1. Choix d'un <strong>cheval</strong>. — « La jeune branche se redresse sans grand travail,<br />

mais <strong>le</strong> gros bois ne se redresse jamais.» —• Il faut faire la part <strong>de</strong>s<br />

beautés <strong>et</strong> <strong>de</strong>s défectuosités. — Les compensations. — Le <strong>cheval</strong> en station.<br />

— Le <strong>cheval</strong> en action. — Le <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> rétif est <strong>le</strong> plus souvent un excel<strong>le</strong>nt<br />

<strong>cheval</strong>. — 11 faut <strong>le</strong> monter à l'extérieur pour juger sa va<strong>le</strong>ur <strong>et</strong> observer<br />

ses allures au r<strong>et</strong>our vers l'écurie. — § 2. A quoi remédier : à l'accu<strong>le</strong>ment.<br />

•— Comment- y remédier. — Première phase : rem<strong>et</strong>tre <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

dans <strong>son</strong> équilibre naturel. — Deuxième phase : provoquer un nouvel équilibre<br />

qui tiendra compte du poids du cavalier <strong>et</strong> <strong>de</strong> sa répartition inéga<strong>le</strong>.<br />

—• Trois ième phase : équilibre entre « <strong>le</strong>s forces qui chassent en avant <strong>et</strong><br />

cel<strong>le</strong>s qui modèrent ». — Comment redresser <strong>le</strong>s chevaux « sur <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s »;<br />

<strong>le</strong>s chevaux qui participent à l'accu<strong>le</strong>ment <strong>et</strong> à la surcharge <strong>de</strong>s épau<strong>le</strong>s. —•<br />

§ 3. Principes <strong>de</strong> dressage. — Côté moral du dressage. — Théorie psychologique<br />

<strong>de</strong> l'obéissance. — Le « self recovering ». — La caresse-confiance <strong>et</strong> la<br />

caresse-récompense. — « L'équité doit rég<strong>le</strong>r <strong>et</strong> peine <strong>et</strong> récompense. » —<br />

« La volonté du cavalier doit être un mur... »—• § 4. Les défenses du <strong>cheval</strong><br />

<strong>barbe</strong> <strong>et</strong> comment <strong>le</strong>s combattre, — « Il faut chercher à combatte <strong>le</strong>s défenses<br />

en cherchant à rétablir l'équilibre. » — Avant d'entreprendre <strong>de</strong> lutter<br />

contre un défaut, il faut en rechercher la cause. — De l'emploi <strong>de</strong>s rênes<br />

rigi<strong>de</strong>s sur <strong>le</strong>s chevaux qui se cabrent ou ne se portent pas en avant à l'attaque<br />

<strong>de</strong>s jambes.<br />

Connaissant <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>, <strong>son</strong> caractère, ses défauts, <strong>le</strong>


— 106 —<br />

m a h vìi is équilibre résultant <strong>de</strong> la dur<strong>et</strong>é du mors arabe <strong>et</strong> sachant<br />

aussi comment <strong>le</strong> cavalier s'en sert, nous sommes en possession<br />

<strong>de</strong>s données indispensab<strong>le</strong>s pour entreprendre un <strong>redressage</strong><br />

intelligent du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>.<br />

Avant <strong>de</strong> rechercher <strong>le</strong>s procédés <strong>de</strong> <strong>redressage</strong> <strong>le</strong>s plus aptes<br />

à produire, dans <strong>le</strong> cas concr<strong>et</strong> qui nous occupe, <strong>de</strong>s résultats rapi<strong>de</strong>s<br />

<strong>et</strong> certains, je crois uti<strong>le</strong> <strong>de</strong> donner quelques indications<br />

concernant <strong>le</strong> choix d'un <strong>cheval</strong> parmi <strong>le</strong>s <strong>barbe</strong>s, <strong>de</strong> rappe<strong>le</strong>r<br />

ensuite <strong>de</strong>s principes généraux <strong>de</strong> dressage qui éclaireront notre<br />

route <strong>et</strong> d'indiquer enfin <strong>le</strong>s moyens <strong>de</strong> lutter contre <strong>le</strong>s défenses<br />

<strong>le</strong>s plus usuel<strong>le</strong>s du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> auxquel<strong>le</strong>s on pourrait se heurter<br />

avant même que d'entreprendre <strong>son</strong> <strong>redressage</strong>.<br />

§ 1 . — Choix d'un <strong>cheval</strong>.<br />

Ce livre étant surtout <strong>de</strong>stiné aux officiers q ui ne connaissent<br />

pas <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>, je me perm<strong>et</strong>s <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre à <strong>le</strong>ur service<br />

quelques observations faites pendant <strong>le</strong>s huit années que j'ai<br />

vécues avec lui. El<strong>le</strong>s pourront <strong>le</strong>ur être uti<strong>le</strong>s à <strong>le</strong>urs débuts<br />

dans la cava<strong>le</strong>rie indigène.<br />

Quand j'ai voulu choisir un <strong>cheval</strong> à mon arrivée dans un<br />

régiment <strong>de</strong> spahis, j'ai été très embarrassé. Surpris par <strong>le</strong>s<br />

allures, la soup<strong>le</strong>sse <strong>et</strong> la façon d'être spécia<strong>le</strong> <strong>de</strong> ces chevaux que<br />

je ne connaissais pas, je me trouvais incapab<strong>le</strong> d'ém<strong>et</strong>tre une<br />

appréciation à <strong>le</strong>ur suj<strong>et</strong> <strong>et</strong> il me fallut <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r conseil à <strong>de</strong>s<br />

cavaliers qui, à défaut <strong>de</strong> connaissances équestres, avaient<br />

l'habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> monter ces chevaux.<br />

C'est la pratique qui familiarise avec <strong>le</strong>s chevaux <strong>barbe</strong>s<br />

qui peut <strong>le</strong> mieux servir <strong>de</strong> gui<strong>de</strong> pour formu<strong>le</strong>r <strong>de</strong>s appréciations<br />

sur eux. En attendant que mes camara<strong>de</strong>s l'acquièrent, je<br />

<strong>le</strong>ur dirai précisément ce qui m'aurait été bien uti<strong>le</strong> <strong>de</strong> savoir<br />

quand j'ai pris contact avec <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>.<br />

Si certaines idées concernant ce suj<strong>et</strong> peuvent s'appliquer<br />

à toutes <strong>le</strong>s races, d'autres <strong>son</strong>t plutôt spécia<strong>le</strong>s à cel<strong>le</strong> qui nous<br />

occupe.<br />

« Un jeune <strong>cheval</strong> fatigué par un travail prématuré ou rebuté


— 107 —<br />

par un emploi inepte est encore p<strong>le</strong>in <strong>de</strong> ressources qui peuvent<br />

être exploitées. Un vieux <strong>cheval</strong> désagréab<strong>le</strong> ne <strong>de</strong>viendra jamais<br />

sensib<strong>le</strong>ment meil<strong>le</strong>ur. » Écoutez <strong>le</strong>s gens qui connaissent <strong>le</strong><br />

<strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>, <strong>le</strong>ur expérience a formé ce dicton africain : « La<br />

jeune branche se redresse sans grand travail, mais <strong>le</strong> gros bois<br />

ne se redresse jamais. »<br />

Je ne par<strong>le</strong>rai pas <strong>de</strong>s beautés <strong>de</strong> chaque partie du <strong>cheval</strong>,<br />

ce n'est pas mon but; je signa<strong>le</strong>rai seu<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>s beautés, <strong>le</strong>s<br />

points <strong>de</strong> force, <strong>le</strong>s défectuosités qui présentent plus particulièrement<br />

<strong>de</strong> l'importance chez <strong>le</strong>s chevaux <strong>barbe</strong>s.<br />

Le parfait n'étant pas <strong>de</strong> ce mon<strong>de</strong>, <strong>de</strong> même que chez <strong>le</strong>s<br />

autres races, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> <strong>le</strong> plus parfait est celui qui a <strong>le</strong><br />

moins <strong>de</strong> défauts ; il est donc nécessaire <strong>de</strong> faire la part <strong>de</strong>s<br />

beautés <strong>et</strong> <strong>de</strong>s défectuosités <strong>et</strong> d'établir la balance <strong>de</strong>s compensations.<br />

« De beaux points <strong>de</strong> force <strong>son</strong>t une <strong>de</strong>s compensations<br />

<strong>le</strong>s plus heureuses q u'on puisse trouver à un modè<strong>le</strong> défectueux. »<br />

Vous examinez d'abord <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> en station avant <strong>de</strong> <strong>le</strong><br />

monter pour l'essayer.<br />

Cherchez avant tout, chez <strong>le</strong> <strong>barbe</strong>, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> ayant <strong>de</strong> l'ensemb<strong>le</strong>,<br />

<strong>de</strong>s formes trapues, <strong>de</strong>s lignes courtes. Ne vous éloignez<br />

pas <strong>de</strong> la tail<strong>le</strong> moyenne plutôt p<strong>et</strong>ite (1 m. 48) ; chez <strong>le</strong>s chevaux<br />

<strong>barbe</strong>s, <strong>le</strong>s grands <strong>son</strong>t souvent <strong>le</strong>s moins bons; <strong>le</strong>s chevaux<br />

<strong>le</strong>s mieux faits, <strong>le</strong>s mieux suivis, <strong>le</strong>s mieux établis, <strong>son</strong>t parmi<br />

<strong>le</strong>s moyens <strong>et</strong> même <strong>le</strong>s p<strong>et</strong>its. La musculature très puissante<br />

du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> vient souvent fort à propos compenser <strong>le</strong> manque<br />

<strong>de</strong> tail<strong>le</strong>. Cherchez donc la puissance, la robustesse, la solidité<br />

bien plus que la silhou<strong>et</strong>te <strong>et</strong> la tail<strong>le</strong>, car cel<strong>le</strong>s-ci ne s'allient<br />

généra<strong>le</strong>ment pas avec cel<strong>le</strong>s-là.<br />

Ne vous laissez pas trop influencer par <strong>de</strong> mauvais aplombs ;<br />

rappe<strong>le</strong>z-vous que la gran<strong>de</strong> majorité <strong>de</strong>s chevaux que vous<br />

examinerez <strong>son</strong>t acculés ; vous aurez d'ail<strong>le</strong>urs vite fait <strong>de</strong> faire<br />

disparaître ou d'atténuer très sensib<strong>le</strong>ment c<strong>et</strong>te défectuosité<br />

en provoquant un meil<strong>le</strong>ur équilibre.<br />

Considérez surtout avec soin <strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s. Ne prenez pas un<br />

<strong>cheval</strong> qui a <strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s trop fatigués ou exagérément coudés;<br />

une bonne direction <strong>de</strong>s jarr<strong>et</strong>s rend <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> maniab<strong>le</strong> <strong>et</strong><br />

facilite sa conduite. Ne soyez pas toutefois exigeant quant à la


— 108 —<br />

n<strong>et</strong>t<strong>et</strong>é car vous perdriez, je <strong>le</strong> crains, votre temps en recherches.<br />

N'attachez pas d'importance aux jarr<strong>et</strong>s clos (à moins<br />

d'une trop gran<strong>de</strong> exagération, s'entend), c'est là plutôt un indice<br />

d'énergie; ils ne gêneront pas <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> dans ses allures.<br />

Tout <strong>de</strong> suite après <strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s, regar<strong>de</strong>z <strong>le</strong> rein. Un beau rein,<br />

large, court <strong>et</strong> puissant amoindrit considérab<strong>le</strong>ment la défectuosité<br />

présentée par <strong>de</strong>s jarr<strong>et</strong>s un peu faib<strong>le</strong>s ou mal placés.<br />

Jarr<strong>et</strong>s mauvais <strong>et</strong> mauvais rein font un ménage mal assorti<br />

qui ne peut enfanter que déboires. Chez <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> surtout,<br />

qui a toujours <strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s plus ou moins fatigués ou forcés, fuyez<br />

<strong>le</strong> rein long, faib<strong>le</strong> <strong>et</strong> mal attaché.<br />

Certes la vue d'un beau corsage est plaisanté, mais ne rej<strong>et</strong>ez<br />

pas un <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> sur <strong>le</strong> simp<strong>le</strong> examen <strong>de</strong> la poitrine ; s'il vous<br />

plaît, essayez-<strong>le</strong> quand même; <strong>le</strong> défaut d'amp<strong>le</strong>ur sera souvent<br />

rach<strong>et</strong>é par une bel<strong>le</strong> profon<strong>de</strong>ur qui pourra pallier ce défaut.<br />

L'adresse naturel<strong>le</strong>, la puissante énergie <strong>de</strong> votre futur compagnon<br />

en compenseront <strong>le</strong>s conséquences ordinaires.<br />

Si l'avant-main est léger <strong>et</strong> paraît manquer <strong>de</strong> moyens,<br />

cherchez la puissance <strong>de</strong> l'arrière-main, ceci pourra compenser<br />

cela.<br />

Les Arabes attachent avec rai<strong>son</strong> une gran<strong>de</strong> importance à<br />

l'encolure. Ils la veu<strong>le</strong>nt longue ; c<strong>et</strong>te appréciation est <strong>de</strong>s plus<br />

justes en ce qui concerne aussi bien la race arabe <strong>et</strong> sa dérivée<br />

la race anglaise <strong>de</strong> course que la race <strong>barbe</strong>.<br />

« En allongeant <strong>le</strong> cou <strong>et</strong> la tête pour boire dans un ruisseau<br />

qui cou<strong>le</strong> à f<strong>le</strong>ur <strong>de</strong> terre, si <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> reste bien d'aplomb sans<br />

replier un <strong>de</strong> ses membres antérieurs, soyez assuré, dit Abd-el-<br />

Ka<strong>de</strong>r, qu'il a <strong>de</strong> la qualité <strong>et</strong> que toutes <strong>le</strong>s parties <strong>de</strong> <strong>son</strong> corps<br />

<strong>son</strong>t en harmonie (1). » L' encolure sera très souvent, je peux<br />

même dire toujours, mal dirigée <strong>et</strong> affaissée; peu importe, ceserà<br />

votre travail <strong>de</strong> la re<strong>le</strong>ver avant <strong>de</strong> r<strong>et</strong>irer toutes <strong>le</strong>s satisfactions<br />

que vous comptez bien <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à l'ami que vous choisissez.<br />

Son regard déjà, paraît reconnaissant parce que vous<br />

al<strong>le</strong>z <strong>le</strong> tirer <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te galère <strong>et</strong> <strong>de</strong>sserrer enfin sa camiso<strong>le</strong> <strong>de</strong><br />

force tressée par <strong>de</strong>s moyens arabes ; il vous fera honneur en<br />

M Jacou<strong>le</strong>t.


— 109 —<br />

recouvrant, joyeux, ses brillantes allures <strong>et</strong> sa fière énergie qu'-il<br />

rem<strong>et</strong>tra doci<strong>le</strong>ment entre vos mains quand il vous tiendra pour<br />

<strong>son</strong> ami.<br />

Avec c<strong>et</strong>te bel<strong>le</strong> encolure, vous chercherez naturel<strong>le</strong>ment un<br />

garrot bien prolongé en arrière, une bel<strong>le</strong> épau<strong>le</strong> longue <strong>et</strong> bien<br />

dirigée <strong>et</strong> surtout, j'insiste, très mobi<strong>le</strong>, jouant aisément.<br />

Beau balancier, épau<strong>le</strong> bel<strong>le</strong>, sol<strong>de</strong> du compte rein—jarr<strong>et</strong>s<br />

n<strong>et</strong>tement créditeur, voilà pour <strong>le</strong> « fourreau ».<br />

« Pre nds gar<strong>de</strong>, dit un dicton arabe, <strong>de</strong> trouver un cœur <strong>de</strong><br />

vache sous une peau <strong>de</strong> lion. »<br />

Ce qu'il faut chercher avant tout, c'est la « lame ».<br />

« Ce n'est rien pour un cavalier suffisant, écrit Saint-Pbal<strong>le</strong>,<br />

que d'amener un <strong>cheval</strong> à <strong>de</strong>venir calme, tandis qu'il est infiniment<br />

diffici<strong>le</strong>, quelquefois impossib<strong>le</strong> même au plus habi<strong>le</strong><br />

écuyer, <strong>de</strong> rendre généreux l'animal qui ne l'est pas. »<br />

Les instruments <strong>et</strong> <strong>le</strong>s procédés barbares auxquels <strong>son</strong>t soumis<br />

habituel<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>s chevaux <strong>barbe</strong>s ont pour conséquences<br />

inévitab<strong>le</strong>s l'abrutissement, la triste résignation s'ils <strong>son</strong>t lymphatiques<br />

ou bien la rétivité s'ils <strong>son</strong>t vigoureux <strong>et</strong> énergiques.<br />

C'est pourquoi je n'hésite pas à conseil<strong>le</strong>r à mes camara<strong>de</strong>s<br />

<strong>de</strong> choisir <strong>le</strong>ur monture parmi <strong>le</strong>s chevaux rétifs. Ce <strong>son</strong>t <strong>le</strong> plus<br />

souvent d'excel<strong>le</strong>nts chevaux. « Po ur être <strong>de</strong>venu ou resté rétif,<br />

il faut que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> ait assez <strong>de</strong> volonté pour ne pas vouloir<br />

cé<strong>de</strong>r à <strong>de</strong>s ai<strong>de</strong>s maladroites, » nous dit Saint-Phal<strong>le</strong>.<br />

Quand <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> rétif sera équilibré <strong>et</strong> confiant entre <strong>de</strong>s ai<strong>de</strong>s<br />

justes <strong>et</strong> calmes, ses allures seront vite régularisées, il sera faci<strong>le</strong>ment<br />

contenu <strong>et</strong> sa fougue aisément captée par un cavalier<br />

adroit. Il emploiera alors « pou r <strong>le</strong> service <strong>de</strong> <strong>son</strong> maître toute<br />

l'énergie qu'il m<strong>et</strong>tait auparavant à lui désobéir ».<br />

Choisissez donc un <strong>cheval</strong> généreux <strong>et</strong> vibrant, ayant du<br />

perçant, <strong>de</strong> l'impulsion. « Pas d'i mpulsion, pas <strong>de</strong> <strong>cheval</strong> » disai t,<br />

je crois, <strong>le</strong> général L'Hotte. Cherchez <strong>le</strong> sang qui actionnera<br />

énergiquement <strong>le</strong>s régions même défectueuses.<br />

Si vous m<strong>et</strong>tez <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> en liberté avant <strong>de</strong> <strong>le</strong> monter, ne<br />

soyez pas étonné s'il ne se sert pas <strong>de</strong> <strong>son</strong> balancier : on lui a<br />

appris à ne pas s'en servir; craignant <strong>de</strong> trouver <strong>le</strong> mors <strong>et</strong> la


— 110 —<br />

dou<strong>le</strong>ur au bout <strong>de</strong> l'extension <strong>de</strong> <strong>son</strong> encolure, il n'ose pas la<br />

mobiliser. Ne vous arrêtez donc pas à une encolure qui vous semb<strong>le</strong>ra<br />

figée, qui ne « tirera pas <strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s sous la masse »; quand<br />

<strong>le</strong> <strong>cheval</strong> sentira que vous lui perm<strong>et</strong>tez <strong>de</strong> s'en servir, il ne se<br />

fatiguera pas longtemps en contractions craintives <strong>et</strong> inuti<strong>le</strong>s.<br />

L'accu<strong>le</strong>ment sera souvent évi<strong>de</strong>nt chez <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> en liberté;<br />

quand vous en aurez supprimé la cause, <strong>le</strong> mal disparaîtra.<br />

Cherchez dans l'action une épau<strong>le</strong> bien vivante, libre, à<br />

oscillations amp<strong>le</strong>s. Vous ne r<strong>et</strong>irerez généra<strong>le</strong>ment pas <strong>de</strong><br />

satisfactions d'un <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> aux épau<strong>le</strong>s mal inclinées <strong>et</strong><br />

inertes.<br />

Mais montez-<strong>le</strong>s surtout <strong>le</strong>s chevaux <strong>barbe</strong>s que vous avez<br />

remarqués. « Bandons-nous <strong>le</strong>s yeux <strong>et</strong> montons <strong>de</strong>ssus, conseil<strong>le</strong><br />

un dicton arabe. » Vous serez souvent surpris par <strong>de</strong>s révélations<br />

inattendues. Le cavalier attentif aura mil<strong>le</strong> observations intéressantes<br />

à faire tant sur <strong>le</strong> caractère <strong>et</strong> l'intelligence <strong>de</strong> sa monture<br />

que sur l'étendue <strong>de</strong> ses moyens. Contrairement au maçon,<br />

ce n'est pas au pied d'un mur que vous pourrez juger <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>et</strong><br />

vous rendre compte <strong>de</strong> la mesure <strong>de</strong> <strong>son</strong> cœur <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>son</strong> énergie.<br />

Sortez-<strong>le</strong> au contraire bien vite <strong>et</strong> essayez-<strong>le</strong> à travers pays, dans<br />

<strong>le</strong> cadre aux horizons lointains qui lui convient; atten<strong>de</strong>z-vous<br />

à être surpris à la sensation <strong>de</strong> ce que pourra <strong>de</strong>venir c<strong>et</strong>te « lame »<br />

ébréchée quand vous serez parvenu à lui redonner <strong>son</strong> perçant.<br />

Seu<strong>le</strong>ment, un conseil, essayez-<strong>le</strong> sans hâte si vous vou<strong>le</strong>z établir<br />

une appréciation voisine <strong>de</strong> la réalité. Ne vous contentez pas <strong>de</strong> <strong>le</strong><br />

monter aux trois allures un quart d'heure ou une <strong>de</strong>mi-heure dans<br />

une carrière ou un manège; ce n'est guère que dans la <strong>de</strong>uxième<br />

<strong>de</strong>mi-heure <strong>et</strong> même parfois à la fin <strong>de</strong> l'heure que vous verrez « ce<br />

qu'il a dans <strong>le</strong> ventre ». Méfiez-vous en eff<strong>et</strong> du « p<strong>et</strong> <strong>de</strong> feu »<br />

du <strong>barbe</strong> au début du travail, il est souvent trompeur; ne jugez<br />

pas <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> sur ses bonds <strong>de</strong> gaîté du premier quart d'heure :<br />

il veut simp<strong>le</strong>ment voir si <strong>le</strong> cavalier qui <strong>le</strong> monte aujourd'hui<br />

lui perm<strong>et</strong> un peu <strong>de</strong> gaîté, ou bien c'est pour vous dire sa joie<br />

d'avoir un autre mors moins gênant sur <strong>le</strong>s barres. Ne vous occupez<br />

pas <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te gaîté du début, n'en tenez aucun compte <strong>et</strong><br />

quand <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> aura fini <strong>de</strong> s'amuser, observez <strong>et</strong> essayez <strong>de</strong><br />

voir.


—T 111<br />

Quittez donc <strong>le</strong> quartier pour une bonne heure d'extérieur;<br />

vous ne perdrez pas votre temps car il passera vite. La façon<br />

dont votre <strong>cheval</strong> s'éloignera du quartier vous fournira <strong>de</strong>s indications<br />

sur <strong>son</strong> « désir d'avancement » si j'ose dire, sur <strong>son</strong> entrain,<br />

<strong>son</strong> courage au travail. Au r<strong>et</strong>our vers l'écurie, ouvrez l'œil...<br />

Vous verrez <strong>le</strong> geste <strong>et</strong> <strong>le</strong>s allures dont il est capab<strong>le</strong>, allures qui<br />

persisteront dans un sens comme dans l'autre quand <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

redressé sera sorti <strong>de</strong> l'accu<strong>le</strong>ment <strong>et</strong> <strong>de</strong>s moyens qui l'éteignent.<br />

§ 2. — A quoi remédier <strong>et</strong> comm ent?<br />

Vous avez à présent choisi votre <strong>cheval</strong> généreux <strong>et</strong> vibrant.<br />

A quoi faut-il remédier?<br />

On peut dire que tous <strong>le</strong>s chevaux <strong>barbe</strong>s <strong>son</strong>t acculés physiquement<br />

ou psychologiquement <strong>et</strong>, <strong>le</strong> plus souvent même, ces<br />

<strong>de</strong>ux sortes d'accu<strong>le</strong>ment se trouvent réunies. Tous <strong>le</strong>s défauts<br />

<strong>de</strong>s chevaux <strong>barbe</strong>s ou autres qui cherchent à se dérober à l'action<br />

du mors ont la même cause : <strong>le</strong> manque d'impulsion, <strong>le</strong><br />

manque d'engagement dans <strong>le</strong> mouvement en avant.<br />

Le <strong>cheval</strong> que vous avez pris est donc à peu près certainement<br />

acculé <strong>et</strong> vous l'aurez choisi parmi ceux chez <strong>le</strong>squels <strong>le</strong>s conséquences<br />

<strong>de</strong> ce défaut ne <strong>son</strong>t pas trop profondément incrustées<br />

dans <strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s.<br />

Ce que je dirai s'applique donc à tous <strong>le</strong>s chevaux <strong>barbe</strong>s qui<br />

ont été montés en mors arabe <strong>et</strong> par <strong>de</strong>s cavaliers arabes ainsi<br />

qu'aux chevaux d'autres races affligés <strong>de</strong>s mêmes défauts.<br />

C'est un « r<strong>et</strong>ou rnement » comp<strong>le</strong> t qu'il faut faire subir à ces<br />

chevaux : ils redoutent la main <strong>et</strong> ne craignent plus la jambe.<br />

Ils <strong>de</strong>vront redouter la jambe <strong>et</strong> perdre toute crainte <strong>de</strong> la<br />

main.<br />

Le Manuel à l'usage <strong>de</strong>s gradés <strong>de</strong>s régiments <strong>de</strong> spahis cite<br />

une phrase p<strong>le</strong>ine <strong>de</strong> bon sens <strong>et</strong> <strong>de</strong> logique imagée qui s'applique<br />

très bien au cas qui nous occupe : « Q uand un arbuste a été<br />

courbé dans un sens, si l'on veut <strong>le</strong> rem<strong>et</strong>tre droit, on commence<br />

par <strong>le</strong> courber en sens inverse. » Voilà comment il faut débuter<br />

<strong>le</strong> redressasse du <strong>barbe</strong>. Il faut commercer par lui donner <strong>le</strong> défaut


— 112 —<br />

opposé. « C'est ainsi, dit la Guérinière, qu'on corrige un défaut<br />

par <strong>son</strong> contraire. »<br />

Avant quoi que ce soit, il faut donc non seu<strong>le</strong>ment chercher<br />

à rem<strong>et</strong>tre <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> dans <strong>son</strong> équilibre naturel (près <strong>de</strong>s trois<br />

cinquièmes du poids du <strong>cheval</strong> <strong>son</strong>t sur l'avant-main), mais encore,<br />

il faut accentuer c<strong>et</strong> équilibre, reporter sur l'avant-main <strong>le</strong><br />

plus <strong>de</strong> poids possib<strong>le</strong>, m<strong>et</strong>tre <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> résolument sur <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s.<br />

Ceci obtenu, on <strong>de</strong>vra provoquer un nouvel équilibre qui tiendra<br />

compte du poids du cavalier <strong>et</strong> <strong>de</strong> sa répartition inéga<strong>le</strong> sur<br />

l'avant-main <strong>et</strong> sur l'arrière-main ( 1 ).<br />

Alors, <strong>et</strong> alors seu<strong>le</strong>ment, on pourra entreprendre d'établir<br />

l'équilibre entre <strong>le</strong>s « forces qui chassent en avant <strong>et</strong> cel<strong>le</strong>s qui<br />

modèrent ». (Généra l L'Hotte.)<br />

Il faut donc tout d'abord m<strong>et</strong>tre <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> en avant, l'équilibrer<br />

ensuite, puis régulariser ses allures, <strong>le</strong>s développer, « rég<strong>le</strong>r l'emploi<br />

<strong>de</strong>s forces ». Il est nécessaire <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r dans c<strong>et</strong> ordre :<br />

provoquer l'impulsion, s'en emparer ensuite. M<strong>et</strong>tre d'abord<br />

franchement <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> sur <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s en exigeant une obéissance<br />

aux jambes instantanée <strong>et</strong> complète, ensuite capter c<strong>et</strong>te impulsion<br />

débordante que <strong>le</strong>s doigts laisseront s'écou<strong>le</strong>r ou r<strong>et</strong>iendront<br />

en s'ouvrant ou en se fermant plus ou moins. La main<br />

viendra rég<strong>le</strong>r en quelque sorte <strong>le</strong> débit <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te impulsion qu'auront<br />

fait jaillir <strong>le</strong>s jambes; <strong>le</strong> cours en sera dirigé par <strong>le</strong> moyen<br />

<strong>de</strong>s ai<strong>de</strong>s.<br />

Entreprendre d'une autre manière <strong>le</strong> <strong>redressage</strong> d'un <strong>cheval</strong><br />

acculé serait moins logique <strong>et</strong> <strong>le</strong>s résultats obtenus seraient<br />

moins comp<strong>le</strong>ts <strong>et</strong> moins certains. Il serait infiniment plus long<br />

<strong>et</strong> diffici<strong>le</strong> aussi <strong>de</strong> chercher, dès <strong>le</strong> début, à reporter progressi-<br />

(') Les experiences du général Morris <strong>et</strong> <strong>de</strong> Bau cher faites en 1835 ont fourni <strong>le</strong>s<br />

résultats suivants ; Le <strong>cheval</strong> était placé chacun <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux bipè<strong>de</strong>s, antérieur <strong>et</strong> postérieur,<br />

sur <strong>le</strong> plancher d'une bascu<strong>le</strong>. Le <strong>cheval</strong> étant tenu dans un état comp<strong>le</strong>t d'immobilité,<br />

la tête dans la position ordinaire plutôt basse qu'é<strong>le</strong>vée, <strong>le</strong>s poids ci-<strong>de</strong>ssous<br />

furent enregistres : Avant-main, 210 kilos... Arrière-main, 174 kilos... Total : 384<br />

Le <strong>cheval</strong> étant monté par Baucher qui pesait 64 kilos, <strong>le</strong> poids indiqué fut :<br />

Avant-main, 251 (+ 41); Arrière-main, 197 (+ 23). Total ; 448 kilos.<br />

Les 64 kil os <strong>de</strong> Baucher étaient, donc répartis <strong>de</strong> la façon suivante : 41 kilos sur<br />

l'avant-main du <strong>cheval</strong> (près <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux tiers) <strong>et</strong> 23 kilos sur <strong>son</strong> arrière-main. En s'asseyant<br />

davantage, <strong>le</strong> haut du corps en arrière, l'arrière-main fut surchargée <strong>de</strong> 10 kilos.<br />

En penchant <strong>le</strong> corps en avant, <strong>le</strong> poids du corps reposant sur <strong>le</strong>s étriers, Bauchef<br />

surchargea l'avant <strong>de</strong> 12 kilos.


— 113 —<br />

vement vers l'avant juste la quantité <strong>de</strong> poids nécessaire à un<br />

bon équilibre; <strong>le</strong>s allures resteraient éteintes <strong>et</strong> r<strong>et</strong>enues malgré<br />

la plus extraordinaire puissance du cavalier.<br />

Un nageur qui veut traverser un courant n'arrivera pas au<br />

but qu'il veut atteindre s'il se dirige droit <strong>de</strong>ssus, mais au contraire,<br />

il touchera la rive opposée à l'endroit qu'il aura choisi s'il<br />

nage résolument vers un point situé en amont. Il en est exactement<br />

<strong>de</strong> même dans <strong>le</strong> cas présent : En se bornant à piquer droit<br />

sur <strong>le</strong> point à atteindre, en ne visant que lui dès <strong>le</strong> départ, on<br />

risque fort <strong>de</strong> ne pouvoir vaincre <strong>le</strong> courant <strong>de</strong>s habitu<strong>de</strong>s défectueuses<br />

du <strong>cheval</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong> ne jamais atteindre <strong>le</strong> but. On ne fera<br />

ainsi que sou<strong>le</strong>ver l'éteignoir qui coiffe <strong>le</strong>s brillantes qualités <strong>et</strong><br />

<strong>le</strong>s allures énergiques du <strong>cheval</strong> acculé à redresser.<br />

En<strong>le</strong>vez donc délibérément, pour commencer, <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux bottes<br />

énergiques ce triste éteignoir <strong>et</strong> l'ar<strong>de</strong>nte flamme du <strong>barbe</strong><br />

jaillira en avant, joyeuse, brillante <strong>et</strong> claire.<br />

Combien ai-je vu <strong>de</strong> chevaux <strong>barbe</strong>s que <strong>de</strong> bons cavaliers<br />

cependant, venant <strong>de</strong> France, ne parvenaient pas à redresser<br />

convenab<strong>le</strong>ment ! Ces chevaux, souvent faussement légers, grattaient<br />

sur place; ils rampaient mais ne travaillaient pas dans<br />

l'impulsion. La tête se plaçait parfois, mais <strong>de</strong>s résistances se<br />

groupaient à la base d'une encolure mal re<strong>le</strong>vée. Tantôt acculés,<br />

tantôt sur <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s, ils parvenaient rarement à se fixer dans<br />

<strong>le</strong> bon équilibre d'où naît la vraie légèr<strong>et</strong>é. Pourquoi? Parce que<br />

<strong>le</strong>ur <strong>redressage</strong> avait été mal débuté. Je considère qu'il est absolument<br />

nécessaire <strong>de</strong> commencer <strong>le</strong> <strong>redressage</strong> du <strong>cheval</strong> acculé<br />

en lui donnant <strong>le</strong> défaut opposé.<br />

Le <strong>cheval</strong> <strong>de</strong>vra donc passer successivement par <strong>le</strong>s aplombs<br />

correspondants aux équilibres que l'on peut représenter par <strong>le</strong>s<br />

figures ci-<strong>de</strong>ssous :<br />

Les figures 53 <strong>et</strong> 54 représentent <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> tel qu'il est. La<br />

station rassemblée par convergence <strong>de</strong>s antérieurs <strong>et</strong> <strong>de</strong>s postérieurs<br />

(fig. 53) est, nous <strong>le</strong> savons, cel<strong>le</strong> du <strong>cheval</strong> acculé.<br />

L'encolure, dans c<strong>et</strong>te position, est forcément affaissée.<br />

La figure 54 représente <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> acculé en action, gêné par la<br />

main du cavalier <strong>et</strong> par un mors trop dur. C'est tout à fait la<br />

lb <strong>cheval</strong> c.'.rbe 8


— 114 —<br />

silhou<strong>et</strong>te du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> monté par un cavalier arabe quand<br />

celui-ci se sert du mors.<br />

Les figures 55 <strong>et</strong> 56 représentent <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> à la fin <strong>de</strong> la première<br />

phase <strong>de</strong> <strong>son</strong> <strong>redressage</strong> : <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> est sur <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s. L'encolure<br />

m i<br />

ftg.55<br />

fig.S 1 )'<br />

fig 55<br />

fig.56<br />

r<br />

fiq 57 fig 58<br />

Schémas <strong>de</strong>s différents équilibres du <strong>cheval</strong> pendant <strong>son</strong> <strong>redressage</strong>.<br />

s'est re<strong>le</strong>vée <strong>et</strong> est voisine <strong>de</strong> l'horizonta<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s se <strong>son</strong>t<br />

redressés, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> est sous lui du <strong>de</strong>vant, <strong>le</strong> poids qui écrasaib<br />

<strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s est passé sur <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s, c'est la position naturel<strong>le</strong><br />

du <strong>cheval</strong>.<br />

Le <strong>cheval</strong> en action monté a très visib<strong>le</strong>ment l'équilibre du<br />

<strong>cheval</strong> sur <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s, il est sous lui du <strong>de</strong>vant, <strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s <strong>son</strong>t


— 115 —<br />

loin <strong>et</strong> pas encore engagés sous la masse, l'encolure est plutôt<br />

légèrement en <strong>de</strong>ssous <strong>de</strong> l'horizonta<strong>le</strong>, l'avant-main est surchargé.<br />

Pour atteindre la <strong>de</strong>uxième phase du <strong>redressage</strong>, <strong>le</strong><br />

nouvel équilibre nécessaire au <strong>cheval</strong> monté, à cause <strong>de</strong> la répartition<br />

inéga<strong>le</strong> du poids du cavalier sur <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux bipè<strong>de</strong>s antérieur<br />

<strong>et</strong> postérieur, il ne restera plus qu'à re<strong>le</strong>ver l'encolure (fig. 57 <strong>et</strong><br />

58). « Le relèvement du balancier aura pour eff<strong>et</strong> statique <strong>de</strong> décharger<br />

l'avant-main; <strong>son</strong> abaissement qui l'amène dans une<br />

position voisine <strong>de</strong> l'horizonta<strong>le</strong> aura pour eff<strong>et</strong> statique <strong>de</strong><br />

charger <strong>le</strong>s antérieurs. » (L . <strong>de</strong> Sévy.)<br />

Le relèvement <strong>de</strong> l'encolure <strong>de</strong>vra être <strong>de</strong>mandé en même<br />

temps que l'on forcera <strong>le</strong>s postérieurs à s'engager sous la masse.<br />

Ainsi placé, l'équilibre du <strong>cheval</strong> est régulier ; <strong>son</strong> poids <strong>et</strong><br />

celui du cavalier <strong>son</strong>t répartis convenab<strong>le</strong>ment sur l'avant-main<br />

<strong>et</strong> sur l'arrière-main. Les antérieurs <strong>son</strong>t sur <strong>le</strong>ur ligne d'aplomb,<br />

<strong>le</strong>s postérieurs seuls <strong>son</strong>t très légèrement ramenés sous la masse.<br />

Avec c<strong>et</strong> équilibre, <strong>le</strong> maximum d'impulsion <strong>et</strong> <strong>de</strong> brillant dans<br />

<strong>le</strong>s allures peut être obtenu.<br />

Ainsi que <strong>le</strong> constate Le Bon, ce rassemb<strong>le</strong>r « se ra pprochant<br />

beaucoup <strong>de</strong> celui <strong>de</strong> l'ancienne éco<strong>le</strong> <strong>de</strong> Versail<strong>le</strong>s » es t celui<br />

enseigné <strong>et</strong> pratiqué par Bauch er vers la fin <strong>de</strong> sa vie. « En tre<br />

<strong>le</strong> <strong>cheval</strong> en station régulière <strong>et</strong> <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> rassemblé pa-r simp <strong>le</strong><br />

engagement <strong>de</strong>s postérieurs à peine y a-t-il, dit Le Bon, 3 ou<br />

4 centimètres <strong>de</strong> différence <strong>de</strong> hauteur du somm<strong>et</strong> <strong>de</strong> la croupe<br />

au sol. »<br />

« Dès qu'on aura rétabli l'équilibre <strong>et</strong> l'harmonie entre l'avantmain<br />

<strong>et</strong> l'arrière-main, écrit Bauch er, l'éducation du <strong>cheval</strong><br />

sera moitié faite. »<br />

Alors on pourra passer à la troisième phase du <strong>redressage</strong> :<br />

établir la balance entre « <strong>le</strong>s forces qui chassent en avant <strong>et</strong><br />

cel<strong>le</strong>s qui modèrent ». Le cavalier, maître <strong>de</strong> l'encolure, pourra<br />

la ployer ou l'étendre, « r amener » o u produire <strong>de</strong>s <strong>de</strong>scentes<br />

d'encolure. Le <strong>cheval</strong> <strong>de</strong>viendra léger aux ai<strong>de</strong>s <strong>et</strong> chargera à<br />

la volonté du cavalier l'un ou l'autre <strong>de</strong> ses bipè<strong>de</strong>s; <strong>le</strong> cavalier<br />

comman<strong>de</strong>ra alors vraiment à l'équilibre, pouvant déplacer<br />

à <strong>son</strong> gré <strong>le</strong> centre <strong>de</strong> gravité du <strong>cheval</strong>. « En sachant combiner<br />

ses ai<strong>de</strong>s <strong>et</strong> <strong>son</strong> assi<strong>et</strong>te, <strong>le</strong> cavalier est maître <strong>de</strong> l'équilibre du


— 116 —<br />

<strong>cheval</strong>, c'est-à-dire maître du <strong>cheval</strong> lui-même. » (Sain t-Phal<strong>le</strong>.)<br />

« Quand un écuyer a su conduire <strong>son</strong> <strong>cheval</strong> à ce point, affirme<br />

très justement Le Bon, il comprend aisément que la vieil<strong>le</strong><br />

lutte entre F equitation rassemblée <strong>et</strong> F equitation allongée<br />

s'évanouit faute d'obj<strong>et</strong>. »<br />

En résumé, on peut diviser en trois parties <strong>le</strong> <strong>redressage</strong> du<br />

<strong>cheval</strong> acculé.<br />

Première partie : Équilibre naturel, m<strong>et</strong>tre <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> sur <strong>le</strong>s<br />

épau<strong>le</strong>s (défaut inverse).<br />

Deuxième partie : Nouvel équilibre nécessaire à cause du poids<br />

du cavalier, relèvement <strong>de</strong> l'encolure, engagement <strong>de</strong>s postérieurs.<br />

Troisième partie : Balance entre « <strong>le</strong>s forces qui chassent en<br />

avant <strong>et</strong> cel<strong>le</strong>s qui modèrent »,<br />

Les très rares chevaux <strong>barbe</strong>s que vous trouverez véritab<strong>le</strong>ment<br />

sur <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s (je pourrais me dispenser d'en faire mention)<br />

seront faci<strong>le</strong>ment redressés par <strong>le</strong> relèvement comp<strong>le</strong>t <strong>de</strong> l'encolure.<br />

Tous <strong>le</strong>s mouvements tendant à faire passer du poids<br />

sur l'arrière-main, recu<strong>le</strong>rs, <strong>de</strong>mi-arrêts, ra<strong>le</strong>ntissements, mobiliser<br />

<strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s autour <strong>de</strong>s hanches, ramèneront vite <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

dans <strong>le</strong> nouvel équilibre nécessaire à tout <strong>cheval</strong> monté.<br />

J'ai déjà dit ail<strong>le</strong>urs que chez <strong>le</strong>s chevaux qui participent à l'accu<strong>le</strong>ment<br />

<strong>et</strong> à la surcharge <strong>de</strong>s épau<strong>le</strong>s, <strong>le</strong> défaut à combattre<br />

est aussi l'accu<strong>le</strong>ment, il faudra donc débuter <strong>le</strong>ur <strong>redressage</strong><br />

comme celui <strong>de</strong>s chevaux acculés, en recherchant avant tout<br />

une obéissance aux jambes absolue; <strong>le</strong>s porter « en avant coûte<br />

que coûte, en <strong>le</strong>ur faisant craindre la jambe, dût-on augmenter<br />

momentanément <strong>le</strong> poids sur <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s; une fois l'obéissance<br />

aux jambes obtenue, assouplir l'arrière-main, dit <strong>le</strong> lieutenantcolonel<br />

Gerhardt, <strong>de</strong> manière à préparer c<strong>et</strong>te partie à recevoir<br />

un excé<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> charge à <strong>son</strong> tour. Alterner, <strong>et</strong> insensib<strong>le</strong>ment <strong>le</strong><br />

<strong>cheval</strong> se m<strong>et</strong>tra d'aplomb ».


— 117 —<br />

§ 3. — Principes <strong>de</strong> dressage.<br />

« L'éducation est une maîtresse<br />

douce, insinuante, ennemie <strong>de</strong> la<br />

vio<strong>le</strong>nce <strong>et</strong> <strong>de</strong> la contrainte. «<br />

(ROLLIN.)<br />

Avant <strong>de</strong> nous m<strong>et</strong>tre à la recherche d'une métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>redressage</strong>,<br />

je crois uti<strong>le</strong> <strong>de</strong> citer quelques principes <strong>de</strong> dressage. Vérités<br />

absolues, ces principes <strong>de</strong>meurent toujours vrais quels que<br />

soient la métho<strong>de</strong> <strong>et</strong> <strong>le</strong>s procédés employés.<br />

« Le s procédés <strong>de</strong> domptage <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>redressage</strong> qui ont obtenu<br />

<strong>le</strong> plus <strong>de</strong> faveur <strong>son</strong>t bien certainement ceux qui reposent sur<br />

la douceur, la patience <strong>et</strong> <strong>le</strong> tact. Parmi <strong>le</strong>s anciens écuyers,<br />

M. <strong>de</strong> Pluvinel recommandait <strong>de</strong> commencer l'éducation du<br />

<strong>cheval</strong> « en cherchant la manière <strong>de</strong> lui travail<strong>le</strong>r la cervel<strong>le</strong><br />

plus que <strong>le</strong>s reins <strong>et</strong> <strong>le</strong>s jambes, en prenant gar<strong>de</strong> <strong>de</strong> l'ennuyer<br />

si faire se peut <strong>et</strong> d'étouffer sa gentil<strong>le</strong>sse, car el<strong>le</strong> est aux chevaux<br />

comme la f<strong>le</strong>w sur <strong>le</strong> fruit. » (Ja cou<strong>le</strong>t.)<br />

« L e moral du <strong>cheval</strong>, dit <strong>le</strong> général L'Hotte, est la source<br />

d'où émane sa prédisposition à nous livrer ses forces ou au contraire<br />

à <strong>le</strong>s r<strong>et</strong>enir. De là <strong>le</strong>s chevaux francs, généreux ou, au<br />

contraire, rétifs, ramingues. »<br />

« U n <strong>cheval</strong> bien dressé •— dit Dupai.y <strong>de</strong> Clam -— est celui<br />

dont toutes <strong>le</strong>s parties du corps <strong>son</strong>t bien assouplies <strong>et</strong> dont la<br />

volonté est tel<strong>le</strong>ment gagnée qu'il obéisse aux opérations <strong>le</strong>s<br />

moins sensib<strong>le</strong>s. »<br />

Dans VEquitation actuel<strong>le</strong> <strong>et</strong> ses principes, Le Bon écrit :<br />

« Pour obtenir du <strong>cheval</strong> <strong>le</strong> meil<strong>le</strong>ur parti possib<strong>le</strong>, il faut prendre<br />

la peine d'étudier <strong>son</strong> caractère, ne pas <strong>le</strong> considérer, avec beaucoup<br />

<strong>de</strong> cavaliers, comme un être stupi<strong>de</strong> sur <strong>le</strong>quel il n'y a<br />

qu'à taper pour <strong>le</strong> faire marcher. La psychologie mo<strong>de</strong>rne est<br />

un peu plus avancée qu'au temps <strong>de</strong> Descartes <strong>et</strong> <strong>le</strong> <strong>de</strong>rnier <strong>de</strong>s<br />

-écoliers sait qu'on ne regar<strong>de</strong> plus aujourd'hui <strong>le</strong>s animaux<br />

comme <strong>de</strong> simp<strong>le</strong>s machines privées <strong>de</strong> rai<strong>son</strong>nement.<br />

« Le dressage du <strong>cheval</strong> repose sur <strong>de</strong>s principes fondamentaux<br />

•<strong>de</strong> psychologie. Lorsque, dans un avenir fort lointain, l'étu<strong>de</strong>


— 118 —<br />

<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te science fera partie <strong>de</strong> l'éducation <strong>de</strong>s écuyers, <strong>le</strong> dressage<br />

du <strong>cheval</strong> <strong>de</strong>viendra une opération beaucoup plus simp<strong>le</strong> <strong>et</strong><br />

beaucoup plus rapi<strong>de</strong> qu'aujourd'hui. »<br />

« Ce côté moral du dressage, écrit <strong>le</strong> capitaine <strong>de</strong> Saint-Phal<strong>le</strong>,<br />

a une influence à laquel<strong>le</strong> on doit avoir constamment recours,<br />

car, sans el<strong>le</strong>, pas <strong>de</strong> soumission, pas d'équitation possib<strong>le</strong>. Tous<br />

<strong>le</strong>s maîtres l'adm<strong>et</strong>tent au moins implicitement <strong>et</strong> <strong>son</strong>t <strong>de</strong>s psychologues<br />

instinctifs sinon conscients. »<br />

« Le <strong>cheval</strong> fera tout ce qu'on voudra si, en exécutant ce qu'on<br />

lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, il s'attend à quelque récompense. » ( Xénophdn.)<br />

« Mais vous <strong>de</strong>vez être prodigue <strong>de</strong> vos récompenses <strong>et</strong> chiche<br />

<strong>de</strong> vos corrections, autrement vous gâterez votre <strong>cheval</strong> » (duc<br />

<strong>de</strong> Newcast<strong>le</strong>).<br />

« I l faudra que <strong>le</strong> cavalier soit curieux <strong>de</strong> <strong>le</strong> caresser quand<br />

il lui obéira librement » (<strong>de</strong> la Broue).<br />

« Cé<strong>de</strong>z dès que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> cè<strong>de</strong>. » « Faire toujours suivre la<br />

concession d'une caresse ou d'un repos », <strong>et</strong>c... <strong>et</strong>c...<br />

« La psychologie équestre n'est donc pas une nouveauté<br />

comme on pourrait <strong>le</strong> croire, continue <strong>le</strong> capitaine <strong>de</strong> Saint-Phal<strong>le</strong>,<br />

en lisant quelques auteurs qui semb<strong>le</strong>nt penser que l'équitation<br />

y peut trouver une source <strong>de</strong> progrès inconnue <strong>de</strong> nos <strong>de</strong>vanciers.<br />

En réalité, nous voyons que la connaissance <strong>de</strong> la psychologie<br />

anima<strong>le</strong> servit <strong>de</strong> base à l'éducation du <strong>cheval</strong> dès Xénophon...<br />

« L' appât <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te récompense lui fait alors répéter <strong>le</strong> mouvement<br />

par voie d'association sans qu'il ait pour cela besoin <strong>de</strong><br />

comprendre que tel<strong>le</strong> est ma volonté. » (Sain t-Phal<strong>le</strong>.)<br />

Aristote, dans <strong>son</strong> traité « De la mémoire <strong>et</strong> <strong>de</strong> la réminiscence »<br />

a posé en principe que <strong>le</strong>s idées associab<strong>le</strong>s se rattachent toujours<br />

entre el<strong>le</strong>s par un rapport <strong>de</strong> ressemblance, <strong>de</strong> contraste ou <strong>de</strong><br />

contiguïté, en donnant à ce <strong>de</strong>rnier terme un sens très général,<br />

qui s'applique au temps aussi bien qu'à l'espace.<br />

« L 'éducation du <strong>cheval</strong>, dit Le Bon, est surtout basée sur<br />

<strong>le</strong> principe <strong>de</strong>s associations par contiguïté. Le principe <strong>de</strong>s associations<br />

par contiguïté est <strong>le</strong> suivant : Lorsque <strong>de</strong>s impressions<br />

ont été produites simultanément ou se <strong>son</strong>t succédé immédiatement,<br />

il suffit que l'une soit présentée à l'esprit pour que <strong>le</strong>s<br />

autres s'y représentent aussitôt... Il suffira <strong>de</strong> faire suivre immé­


— 119 —<br />

diatement <strong>et</strong> toujours l'obéissance d'une récompense (caresse,<br />

avoine, sucre, <strong>et</strong>c...) <strong>et</strong> <strong>le</strong> refus d'obéissance d'une punition (éperon,<br />

cravache, gron<strong>de</strong>rie) pour que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> finisse par perdre<br />

toute velléité <strong>de</strong> résistance. » « Puis, par la répétition, <strong>le</strong>s « associations<br />

conscientes » se transformant en « associations inconscientes<br />

», en réf<strong>le</strong>xes, l'obéissance <strong>de</strong>vient absolue. » « L'éducation<br />

est l'art <strong>de</strong> faire passer <strong>le</strong> conscient dans l'inconscient ('). *<br />

Le colonel Blacque Belair, écuyer en chef <strong>de</strong> l'Éco<strong>le</strong> <strong>de</strong> cava<strong>le</strong>rie<br />

<strong>de</strong> Saumur, écrivait dans la préface <strong>de</strong> VÉquitation actuel<strong>le</strong><br />

<strong>de</strong> Gustave Le Bon, dont j'ai déjà beaucoup parlé : « V otre<br />

chapitre sur la constitution menta<strong>le</strong> du <strong>cheval</strong> <strong>et</strong> celui intitulé :<br />

Bases psychologiques, <strong>son</strong>t <strong>de</strong>s chefs-d'œuvre, <strong>et</strong> ceux qui ne<br />

<strong>le</strong>s possè<strong>de</strong>nt pas <strong>et</strong> ne s'inspirent pas <strong>de</strong>s règ<strong>le</strong>s que vous posez<br />

ne peuvent prétendre à rien en équitation.<br />

« L'ap plication <strong>de</strong>s lois <strong>de</strong> l'association au dressage, l'établissement<br />

d'un langage conventionnel qui en décou<strong>le</strong>, la théorie<br />

psychologique <strong>de</strong> l'obéissance, l'influence <strong>de</strong> la répétition <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />

l'intensité <strong>de</strong>s impressions, la transformation <strong>de</strong>s associations<br />

conscientes en associations inconscientes, tels <strong>son</strong>t <strong>le</strong>s <strong>de</strong>grés<br />

menant, rationnel<strong>le</strong>ment, progressivement <strong>et</strong> insensib<strong>le</strong>ment,<br />

comme vous <strong>le</strong> montrez, à la perfection dans <strong>le</strong> dressage. »<br />

De la Broue écrivait : « S'il est rétif (<strong>le</strong> <strong>cheval</strong>) pour avoir été<br />

trop gourmandé <strong>et</strong> contraint, il faudra observer autant <strong>de</strong> douceur<br />

<strong>et</strong> <strong>de</strong> cérémonies comme s'il était poulain. Si <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

est rebuté ou rétif pour avoir été trop ru<strong>de</strong>ment <strong>et</strong> longuement<br />

exercé <strong>et</strong> trop âprement battu avec <strong>le</strong>s éperons, il faudra premièrement<br />

laisser séjourner jusqu'à ce qu'il ait repris ses forces <strong>et</strong><br />

premiers esprits. 11 f audra aussi que <strong>le</strong> cavalier soit curieux <strong>de</strong><br />

<strong>le</strong> caresser quand il lui obéira librement, car la douceur est autant<br />

<strong>et</strong> plus nécessaire aux chevaux estonnez <strong>et</strong> rebutez qu'à ceux<br />

que l'on exerce pour <strong>le</strong>ur apprendre ce qu'ils n'ont jamais sceu. »<br />

Gomme <strong>le</strong>s débuts du dressage, ceux du <strong>redressage</strong> ont une<br />

influence considérab<strong>le</strong> sur toute sa suite.<br />

Il faudra donc au début du <strong>redressage</strong> employer surtout la<br />

douceur, m<strong>et</strong>tre <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> en complète confiance, bien lui mon-<br />

( l ) Psychologie <strong>de</strong> l'éduration, <strong>de</strong> Gustave Lu BON.


— 120 —<br />

trer <strong>et</strong> lui montrer longtemps que <strong>le</strong> cavalier qui <strong>le</strong> monte n'est<br />

plus celui qui <strong>le</strong> montait autrefois. Au <strong>cheval</strong> « estonné <strong>et</strong> rebuté »<br />

il faudra faire oublier <strong>le</strong>s mauvais procédés dont il fut la victime<br />

malheureuse. En résumé, douceur, patience <strong>et</strong> gentil<strong>le</strong>sse.<br />

Suivez en tous points <strong>le</strong>s conseils <strong>de</strong> la Broue <strong>et</strong> vous en tirerez<br />

rapi<strong>de</strong>ment profit. « Laissez séjourner jusques à ce qu'il ait<br />

repris ses forces <strong>et</strong> premiers esprits. » Laiss ez votre <strong>cheval</strong> se<br />

reposer tranquil<strong>le</strong> quelques jours à l'écurie <strong>et</strong> profitez-en pour<br />

lui soigner <strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s. Al<strong>le</strong>z <strong>le</strong> voir souvent, caressez-<strong>le</strong>. L'homme<br />

est faib<strong>le</strong> par ses travers <strong>et</strong> <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> aussi. Le <strong>barbe</strong> est très<br />

souvent gourmand <strong>et</strong> très sensib<strong>le</strong> aux gâteries, sachez en profiter,<br />

vous obtiendrez beaucoup ; si <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> est rétif el<strong>le</strong>s amolliront<br />

<strong>son</strong> caractère.<br />

Durant c<strong>et</strong>te pério<strong>de</strong> précédant <strong>le</strong> <strong>redressage</strong> proprement dit<br />

<strong>et</strong> que j'appel<strong>le</strong>rai <strong>le</strong> self-recovering ( 1 ), pendant laquel<strong>le</strong> <strong>le</strong><br />

<strong>cheval</strong> reprendra « ses forces <strong>et</strong> premiers esprits » si vous avez<br />

la chance d'avoir un manège ou une carrière, m<strong>et</strong>tez quelquefois<br />

votre <strong>cheval</strong> en liberté, laissez-<strong>le</strong> flâner, jouer, se rou<strong>le</strong>r à <strong>son</strong><br />

aise <strong>et</strong> caressez-<strong>le</strong>; qu'il ait tout loisir <strong>de</strong> s'apercevoir qu'il peut<br />

maintenant sortir <strong>de</strong> l'écurie sans être maltraité <strong>et</strong> sans souffrir.<br />

Je ne saurais trop conseil<strong>le</strong>r <strong>de</strong> faire grand cas du « self-recovering<br />

» avec tous <strong>le</strong>s chevaux à redresser quels qu'ils soient <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />

ne pas considérer c<strong>et</strong>te pério<strong>de</strong> comme facultative ou inuti<strong>le</strong>.<br />

Ainsi que je l'ai bien souvent entendu dire : En équitatior, al<strong>le</strong>r<br />

<strong>le</strong>ntement, doucement, c'est gagner du temps.<br />

Pendant c<strong>et</strong>te pério<strong>de</strong>, il ne faut pas craindre d'abuser <strong>de</strong> la<br />

caresse. Pour <strong>le</strong> moment, <strong>le</strong> but <strong>de</strong>s caresses n'est pas <strong>de</strong> récompenser,<br />

il est <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> en confiance, <strong>de</strong> lui montrer<br />

que <strong>son</strong> nouveau maître est animé à <strong>son</strong> égard <strong>de</strong>s meil<strong>le</strong>ures<br />

intentions <strong>et</strong> qu'il veut <strong>de</strong>venir <strong>son</strong> ami. Le but est d'amadouer<br />

<strong>le</strong> <strong>cheval</strong>, <strong>de</strong> conquérir sa confiance <strong>et</strong> sa sympathie; la caresse<br />

n'a donc pas à présent forme <strong>de</strong> récompense, el<strong>le</strong> n'a pas à se<br />

préoccuper du moment où el<strong>le</strong> est octroyée.<br />

Mais, plus tard, quand <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> comprend <strong>le</strong> langage conventionnel<br />

<strong>de</strong> <strong>son</strong> cavalier, quand il connaît <strong>le</strong>s ai<strong>de</strong>s, la caresse doit<br />

( r l Self : soi-même...; to recover recouvrer, se rétablir.


— 121 —<br />

être un satisfecit <strong>et</strong> doit récompenser. Il faut bien se gar<strong>de</strong>r,<br />

alors, d'en faire un gaspillage irréfléchi; l'excès <strong>de</strong>viendrait un<br />

défaut. « L 'équité doit rég<strong>le</strong>r <strong>et</strong> peine <strong>et</strong> récompense. » Et la<br />

récompense est certainement <strong>le</strong> moyen d'éducation <strong>le</strong> meil<strong>le</strong>ur<br />

<strong>et</strong> <strong>le</strong> plus puissant à condition qu'il soit appliqué <strong>et</strong> dosé même<br />

avec mesure <strong>et</strong> à propos (loi <strong>de</strong>s associations) exactement comme<br />

doit l'être aussi la correction.<br />

Assurément, il ne faut pas être chiche <strong>de</strong> caresses, mais il est<br />

nécessaire, je crois, <strong>de</strong> n'en donner qu'à bon escient; faute <strong>de</strong><br />

c<strong>et</strong>te précaution, el<strong>le</strong>s risquent <strong>de</strong> perdre c<strong>et</strong>te saveur <strong>de</strong> récompense<br />

que nous avons tout avantage à <strong>le</strong>ur conserver.<br />

« Plus <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> s'est obstiné dans sa révolte, plus il faut récompenser<br />

sa soumission », a dit Saint-Phal<strong>le</strong>. Si l'on doit récompenser<br />

à propos, il faut aussi savoir corriger avec autorité quand c'est<br />

nécessaire <strong>et</strong> toujours avec mesure. Comme <strong>le</strong> dressage, <strong>le</strong> <strong>redressage</strong><br />

doit être tendre <strong>et</strong> sévère <strong>et</strong> non pas froid <strong>et</strong> mou.<br />

Récompenses <strong>et</strong> corrections tombant à tort <strong>et</strong> à travers sans<br />

Bouci d es lois d'association capita<strong>le</strong>s en dressage, laisseront <strong>le</strong><br />

<strong>cheval</strong> insensib<strong>le</strong>, <strong>et</strong> c'est tout naturel.<br />

« C omme l'homme, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> ne fait bien que ce qu'il fait<br />

volontiers. Dégoûtez-<strong>le</strong> <strong>de</strong> <strong>son</strong> travail, vous perdrez tout <strong>le</strong><br />

bénéfice <strong>de</strong> <strong>son</strong> bon vouloir <strong>et</strong> vous serez obligé <strong>de</strong> réduire sa<br />

mauvaise humeur par la force <strong>et</strong> par <strong>le</strong>s corrections. » (S aint-<br />

Phal<strong>le</strong>.) Mauvais travail...<br />

Pour compléter ces principes <strong>de</strong> dressage, je citerai encore<br />

un passage <strong>de</strong> Le Bon : « La volonté du cavalier doit être un mur<br />

que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> se sente impuissant à franchir. Le mur est illusoire<br />

sans doute, mais l'art du cavalier consiste à persua<strong>de</strong>r <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

<strong>de</strong> <strong>son</strong> existence. Le jour ou l'expérience enseigne au <strong>cheval</strong> que<br />

<strong>le</strong> mur est fictif, il ne l'oubliera pas <strong>et</strong> à dater <strong>de</strong> ce jour, <strong>le</strong><br />

dressage sera sérieusement compromis. »<br />

Au <strong>cheval</strong> diffici<strong>le</strong> <strong>de</strong> caractère, il faudra surtout prouver<br />

qu'on est <strong>le</strong> plus fort <strong>et</strong> employer persévérance <strong>et</strong> ferm<strong>et</strong>é, mais<br />

il faudra toujours faire suivre la concession, même légère au<br />

début, d'une caresse ou d'un repos; il sera essentiel <strong>de</strong> lui faire<br />

comprendre aussi que <strong>le</strong>s châtiments ne <strong>son</strong>t pas une attaque<br />

mais une répression (loi <strong>de</strong>s associations).


— 122 —<br />

« L a soumission nous étant indispensab<strong>le</strong>, il faut non seu<strong>le</strong>ment<br />

l'obtenir, mais encore ne pas lui nuire par <strong>de</strong>s <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s<br />

inopportunes ou mal faites, <strong>et</strong> enfin la conserver si <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

voulait en sortir. Cela nécessite trois qualités : <strong>de</strong> la progression<br />

dans <strong>le</strong>s exigences, <strong>de</strong> la justesse dans la manière <strong>de</strong> <strong>le</strong>s présenter<br />

<strong>et</strong> enfin <strong>de</strong> l'autorité dans <strong>le</strong>s ai<strong>de</strong>s.<br />

« La progression dans <strong>le</strong>s exigences consiste à ne rien <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r<br />

sans que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> y ait été préparé par <strong>le</strong>s exercices précé<strong>de</strong>nts.<br />

Ce <strong>son</strong>t <strong>le</strong>s résultats déjà obtenus qui perm<strong>et</strong>tent d'en acquérir<br />

<strong>de</strong> nouveaux. »<br />

11 faut en somme suivre <strong>le</strong>s progrès <strong>et</strong> non <strong>le</strong>s précé<strong>de</strong>r.<br />

« On peut poser en principe, dit <strong>le</strong> général L'Hotte, que <strong>le</strong>s<br />

théories savantes quel<strong>le</strong>s qu'el<strong>le</strong>s soient ne sauraient <strong>de</strong>meurer<br />

présentes à l'esprit du praticien, lorsque, se trouvant en p<strong>le</strong>ine<br />

exploitation du <strong>cheval</strong>, il est aux prises avec sa monture. Pour<br />

diriger <strong>le</strong> cavalier d'une manière constante dans sa pratique,<br />

il lui faut d'autres gui<strong>de</strong>s plus simp<strong>le</strong>s. Il <strong>le</strong>s trouvera dans la<br />

succession <strong>de</strong>s buts à poursuivre, parce que, simp<strong>le</strong>s à envisager<br />

<strong>et</strong> peu nombreux, ils peuvent être toujours présents à <strong>son</strong> esprit.<br />

Ces buts peuvent s'exprimer en trois mots : calme, en avant <strong>et</strong><br />

droit. Il ne faut rechercher <strong>le</strong> suivant qu'après avoir atteint<br />

<strong>le</strong> précé<strong>de</strong>nt. »<br />

« M <strong>et</strong>tre en confiance, calmer, soum<strong>et</strong>tre », professe Saint-<br />

Phal<strong>le</strong>.<br />

« Ré tablir <strong>le</strong> calme <strong>et</strong> la confiance, dit Baucher.<br />

Tous <strong>le</strong>s écuyers <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s temps ont placé la recherche <strong>de</strong> la<br />

confiance <strong>et</strong> du calme en tête <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs principes <strong>de</strong> dressage;<br />

a fortiori, calmer <strong>et</strong> m<strong>et</strong>tre en confiance doit être au début <strong>de</strong><br />

tout <strong>redressage</strong>. Dans <strong>le</strong> cas qui nous occupe, je crois qu'il faut<br />

ordonner <strong>le</strong>s différents buts à poursuivre comme suit :<br />

M<strong>et</strong>tre en confiance — calmer. — Obéissance aux ai<strong>de</strong>s —<br />

soum<strong>et</strong>tre. Le tout précédé du « self-recovering » dont j'ai<br />

parlé tout à l'heure.<br />

Parmi ces buts très généraux seront intercalés <strong>le</strong>s divers<br />

équilibres par <strong>le</strong>squels <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>de</strong>vra passer pendant <strong>son</strong> <strong>redressage</strong>,<br />

ainsi que <strong>le</strong>s différentes phases du travail <strong>de</strong> relèvement<br />

<strong>de</strong> l'encolure exposées plus loin.


— 123 —<br />

Nous pouvons récapitu<strong>le</strong>r ainsi <strong>le</strong>s principes exposés :<br />

Douceur, patience, ferm<strong>et</strong>é.<br />

Appliquer théorie psychologique <strong>de</strong> l'obéissance [sine qua non).<br />

Être tendre <strong>et</strong> sévère, distribuer « peine <strong>et</strong> récompense »<br />

avec à-propos <strong>et</strong> mesure.<br />

« La volonté du cavalier doit être un mar... »<br />

Succession <strong>de</strong>s buts à poursuivre.<br />

Suivre <strong>le</strong>s progrès <strong>et</strong> non <strong>le</strong>s précé<strong>de</strong>r.<br />

§ 4. — Les défenses du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>. Comment <strong>le</strong>s combattre.<br />

« Il faut chercher à combattre la<br />

défense en cherchant à rétablir l'équilibre.<br />

»<br />

(D'AURE.)<br />

Avant <strong>de</strong> terminer ce chapitre, je signa<strong>le</strong>rai rapi<strong>de</strong>ment <strong>le</strong>s<br />

défenses habituel<strong>le</strong>s du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> <strong>et</strong> <strong>le</strong>s moyens <strong>le</strong>s plus<br />

efficaces d e <strong>le</strong>s combattre.<br />

Les neuf dixièmes <strong>de</strong>s défenses que vous rencontrerez chez <strong>le</strong>s<br />

chevaux <strong>barbe</strong>s proviennent, non <strong>de</strong> la « c aboche », mais <strong>de</strong><br />

jarr<strong>et</strong>s douloureux. On voit trop souvent hélas, une bruta<strong>le</strong><br />

sévérité se substituer ici à la plus élémentaire logique.<br />

Surtout avec <strong>le</strong>s chevaux <strong>barbe</strong>s malmenés dont, en général,<br />

on abuse <strong>et</strong> qui souffrent, avant d'entreprendre <strong>de</strong> lutter contre<br />

un défaut, il faut en rechercher la cause. Ce serait une erreur<br />

stupi<strong>de</strong> <strong>de</strong> vouloir combattre <strong>le</strong> mal en faisant du mal, c'est un<br />

calmant qu'il faut pour apaiser la dou<strong>le</strong>ur contre laquel<strong>le</strong> <strong>le</strong><br />

<strong>cheval</strong> se défend <strong>le</strong> plus souvent.<br />

Il ne faut pas non plus prendre pour mauvais vouloir ce qui<br />

n'est que crainte d'affronter une dou<strong>le</strong>ur trop gran<strong>de</strong>, ignorance<br />

ou faib<strong>le</strong>sse.<br />

L'excuse <strong>de</strong> toutes ces « lap alissa<strong>de</strong>s » que je débite doit être<br />

recherchée dans tout ce que j'ai vu <strong>de</strong>puis qu'il m'est possib<strong>le</strong><br />

d'observer <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>...<br />

Les défenses du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> proviennent <strong>le</strong> plus souvent <strong>de</strong><br />

jarr<strong>et</strong>s écrasés par <strong>le</strong> poids <strong>de</strong> la masse refoulée en arrière par


— 124 —<br />

un mors trop dur <strong>et</strong> mal employé. Les chevaux <strong>barbe</strong>s qui se<br />

défen<strong>de</strong>nt pointent, se cabrent <strong>et</strong> refusent <strong>de</strong> se porter en avant<br />

à l'attaque <strong>de</strong> la jambe ou <strong>de</strong> l'éperon (conséquence la plus grave<br />

<strong>de</strong> l'accu<strong>le</strong>ment.<br />

« La défense part toujours <strong>de</strong> la partie la moins chargée. »<br />

« Les ch evaux suj<strong>et</strong>s à se cabrer, dit Dupaty <strong>de</strong> Clam, ont <strong>le</strong>s<br />

forces réunies dans <strong>le</strong>ur arriére-main, il faut <strong>le</strong>s répandre dans<br />

toutes <strong>le</strong>s autres parties, ceux-là <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt plutôt <strong>le</strong>s jambes<br />

du cavalier que la main. 11 n'est d'autre parti à prendre que <strong>de</strong> <strong>le</strong><br />

m<strong>et</strong>tre en équilibre sur <strong>le</strong>s jambes <strong>de</strong> manière qu'el<strong>le</strong>s travail<strong>le</strong>nt<br />

toutes éga<strong>le</strong>ment à soutenir tout <strong>le</strong> corps. »<br />

Pour combattre <strong>le</strong>s défenses du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> au début <strong>de</strong> <strong>son</strong><br />

<strong>redressage</strong>, il faut donc porter <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> en avant coûte que coûte,<br />

charger <strong>le</strong> <strong>de</strong>vant. Quelques <strong>le</strong>çons <strong>de</strong> « rênes rigi<strong>de</strong>s » à défaut<br />

d'un <strong>redressage</strong> comp<strong>le</strong>t obligeront au début <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> à se<br />

porter en avant à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> du cavalier, à cé<strong>de</strong>r.<br />

J'ai fait un grand usage <strong>de</strong>s rênes rigi<strong>de</strong>s <strong>et</strong> j'ai obtenu par<br />

<strong>le</strong>ur emploi <strong>de</strong>s résultats décisifs.<br />

L'idée <strong>de</strong>s rênes rigi<strong>de</strong>s revient, si je ne me trompe, au général<br />

L'Hotte; ce <strong>son</strong>t <strong>de</strong>ux tiges soli<strong>de</strong>s que l'on place à l'endroit <strong>de</strong>s<br />

rênes, une <strong>de</strong>s extrémités est fixée à l'anneau du fi<strong>le</strong>t (avec <strong>le</strong><br />

mors arabe à l'anneau porte-mors), l'autre est dans la main<br />

du cavalier. En poussant <strong>de</strong>vant soi, étant à <strong>cheval</strong>, ces <strong>de</strong>ux<br />

rênes rigi<strong>de</strong>s comme s'il s'agissait <strong>de</strong>s brancards d'une brou<strong>et</strong>te,<br />

on charge <strong>le</strong> <strong>de</strong>vant en forçant <strong>le</strong> balancier à s'étendre; <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>,<br />

pour éviter la chute, est obligé d'étayer <strong>le</strong> poids <strong>de</strong> sa masse au<br />

moyen <strong>de</strong> ses membres suspenseurs <strong>et</strong> se porte ainsi en avant.<br />

Je n'ai jamais vu un <strong>cheval</strong> résister à ce moyen, cela doit lui<br />

être impossib<strong>le</strong>. Les rênes rigi<strong>de</strong>s qui forcent <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> à l'obéissance<br />

sans qu'il puisse s'y soustraire offrent une gran<strong>de</strong> puissance<br />

<strong>de</strong> domination <strong>et</strong> produisent un eff<strong>et</strong> moral souvent décisif.<br />

Deux simp<strong>le</strong>s bâtons <strong>et</strong> <strong>de</strong>ux bouts <strong>de</strong> ficel<strong>le</strong> suffisent pour<br />

confectionner c<strong>et</strong> appareil qui manque bien un peu d'élégance,<br />

mais qui présente une gran<strong>de</strong> utilité pratique.<br />

Le lieutenant-colonel Gerhardt indique un autre moyen <strong>de</strong><br />

lutter contre <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> qui se cabre : « Mobiliser l'arrière-main<br />

pour pouvoir la déplacer <strong>et</strong> en<strong>le</strong>ver ses points d'appui à la


— 125 —<br />

défense. » Ce moyen n'est pas applicab<strong>le</strong> au <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> au<br />

début <strong>de</strong> <strong>son</strong> <strong>redressage</strong> car on ne lui a jamais appris à obéir<br />

à l'eff<strong>et</strong> d'une jambe isolée. Pour combattre donc <strong>le</strong>s défenses<br />

pré-<strong>redressage</strong> du <strong>barbe</strong>, il n'y a que « la chambrière au <strong>de</strong>rrière »<br />

ou <strong>le</strong>s rênes rigi<strong>de</strong>s. J'ai peu employé <strong>le</strong> premier <strong>de</strong> ces moyens,<br />

mais j'ai toujours obtenu avec <strong>le</strong> second, que je crois très supérieur,<br />

<strong>de</strong>s résultats immédiats <strong>et</strong> décisifs.<br />

Très peu <strong>de</strong> chevaux <strong>barbe</strong>s ruent.<br />

« Les chevaux ayant <strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s douloureux, <strong>et</strong> par c<strong>et</strong>te rai<strong>son</strong><br />

portant sur <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s, ruent si l'on cherche à <strong>le</strong>s asseoir avec<br />

trop <strong>de</strong> force. Il faut donc, lorsqu'on rencontre <strong>de</strong>s jarr<strong>et</strong>s douloureux,<br />

faire agir la main avec assez <strong>de</strong> légèr<strong>et</strong>é, <strong>de</strong> fixité <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />

ménagement pour ne pas provoquer une irritabilité qui ferait<br />

* sortir <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>de</strong> <strong>son</strong> aplomb. Enfin, lorsqu'une gran<strong>de</strong> rai<strong>de</strong>ur<br />

dans <strong>le</strong>s hanches <strong>et</strong> <strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s (rai<strong>de</strong>ur produite souvent dans<br />

c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière partie par différentes tares) ne perm<strong>et</strong> pas à l'arrière-main<br />

<strong>de</strong> s'assouplir pour établir l'équilibre, <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s<br />

auront à supporter une pesanteur plus forte, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> s'appuiera<br />

sur la main. En agissant avec ménagement <strong>et</strong> en rai<strong>son</strong> <strong>de</strong> la<br />

force du <strong>cheval</strong>, ce <strong>de</strong>rnier sera bientôt ramené <strong>et</strong> assoupli<br />

tandis qu'au contraire, en agissant avec trop <strong>de</strong> force, si l'on<br />

veut <strong>le</strong> ramener trop promptement, l'arrière-main recevant une<br />

sujétion insupportab<strong>le</strong>, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> peut se cabrer, se renverser,<br />

se porter en avant avec vio<strong>le</strong>nce, s'appuyer sur <strong>le</strong> mors avec tant<br />

<strong>de</strong> force que <strong>le</strong> cavalier n'en sera plus maître (M. »<br />

Vous trouverez aussi quelques chevaux <strong>barbe</strong>s qui trottinent<br />

avec entêtement. J'en par<strong>le</strong> à c<strong>et</strong> endroit car ils se servent <strong>de</strong><br />

c<strong>et</strong>te allure désagréab<strong>le</strong> comme d'une véritab<strong>le</strong> défense. Ces<br />

chevaux trottinent par accu<strong>le</strong>ment sans prendre appui sur la<br />

main. Rétablir l'équilibre est encore ici <strong>le</strong> remè<strong>de</strong>.<br />

Il faudra forcer <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> à se livrer, <strong>le</strong> prendre énergiquement<br />

dans <strong>le</strong>s jambes, fixer la main <strong>et</strong> <strong>le</strong> pousser à l'extrême vitesse <strong>de</strong><br />

l'allure qu'il s'obstine à prendre, sa paresse n'y trouvant plus<br />

<strong>son</strong> compte, il finira par se livrer dans l'allure qu'on lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>.<br />

Ou bien, ce qui est préférab<strong>le</strong>, on pourra maintenir l'allure à<br />

V) D'Aure.


— 126 —<br />

un train modéré <strong>et</strong> la soutenir très longtemps, lorsque la fatigue<br />

commencera à venir, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>, peu à peu, en viendra à baisser<br />

sa tête <strong>et</strong> à étendre <strong>son</strong> encolure pour ai<strong>de</strong>r sa marche par la<br />

position du centre <strong>de</strong> gravité. Si la main se fait démente à ce<br />

moment précis, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> finira par prendre l'habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> chercher<br />

dans la position basse <strong>de</strong> <strong>son</strong> encolure l'ai<strong>de</strong> qu'el<strong>le</strong> lui<br />

apporte, puis en <strong>le</strong> caressant <strong>et</strong> en <strong>le</strong> m<strong>et</strong>tant au pas on lui fera<br />

comprendre qu'il répond au désir <strong>de</strong> <strong>son</strong> cavalier.<br />

En exploitant la loi <strong>de</strong>s associations par contiguïté, on aboutira<br />

très vite au but recherché. Si <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> sent que chaque fois<br />

qu'il lève la tête il est gêné par <strong>le</strong> mors <strong>et</strong> que, au contraire,<br />

chaque fois qu'il la baisse, ses barres <strong>son</strong>t moins comprimées,<br />

il adoptera vite c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière attitu<strong>de</strong> plus « confortab<strong>le</strong> »<br />

pour lui, attitu<strong>de</strong> d'ail<strong>le</strong>urs naturel<strong>le</strong>.<br />

Parmi <strong>le</strong>s chevaux <strong>barbe</strong>s à redresser, quelques-uns, très rares,<br />

pourront paraître sur <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s <strong>et</strong> chercher à « emmen er » <strong>le</strong>ur<br />

cavalier. La cause est encore la dou<strong>le</strong>ur <strong>de</strong>s jarr<strong>et</strong>s; il ne faudra<br />

donc pas m<strong>et</strong>tre au <strong>cheval</strong> qui aura ce défaut un mors plus dur<br />

qui aurait pour conséquence d'augmenter la dou<strong>le</strong>ur <strong>de</strong>s jarr<strong>et</strong>s.<br />

« Le mors <strong>de</strong>vant rég<strong>le</strong>r, arrêter <strong>et</strong> diriger <strong>le</strong>s mouvements est<br />

<strong>le</strong> principal agent qui sert à rétablir l'équilibre, mais il faut ici<br />

consulter <strong>le</strong>s causes qui font sortir un <strong>cheval</strong> <strong>de</strong> <strong>son</strong> aplomb avant<br />

d'employer <strong>de</strong>s embouchures plus ou moins dures » (d'Aure).<br />

En même temps que faire agir la main avec assez <strong>de</strong> légèr<strong>et</strong>é,<br />

<strong>de</strong> fixité <strong>et</strong> <strong>de</strong> ménagement pour ne pas irriter la dou<strong>le</strong>ur <strong>de</strong>s<br />

jarr<strong>et</strong>s, il faudra tromper <strong>le</strong>s appuis <strong>et</strong> s'efforcer ainsi <strong>de</strong> ne pas<br />

laisser <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> prendre sur la main l'appui qui lui est nécessaire<br />

pour augmenter l'allure.


CHAPITRE II<br />

A LA RECHERCHE D'UNE MÉTHODE DE REDRESSAGE<br />

« Le s préceptes <strong>de</strong> notre ancienne<br />

equitation nous <strong>son</strong>t toujours nécessaires,<br />

sans nul doute; ils doivent<br />

être seu<strong>le</strong>ment plus ou moins modifiés<br />

en rai<strong>son</strong> <strong>de</strong> l'emploi auquel on<br />

veut astreindre <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>, comme en<br />

rai<strong>son</strong> <strong>de</strong> l'espèce à laquel<strong>le</strong> on s'adresse.<br />

»<br />

(D'AURE.)<br />

§ 1. Généralités. — § 2. Bauclier <strong>et</strong> <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>. —- Les <strong>de</strong>ux métho<strong>de</strong>s<br />

<strong>de</strong> Baucher. — Pourquoi la <strong>de</strong>uxième peut être appliquée avec fruits au<br />

<strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> à redresser. — Avantages <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong> Baucher : gran<strong>de</strong><br />

puissance <strong>de</strong>s moyens auxquels <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> est forcé <strong>de</strong> cé<strong>de</strong>r; pirou<strong>et</strong>tes<br />

renversées sur l'éperon <strong>et</strong> f<strong>le</strong>xions directes <strong>de</strong> la mâchoire.<br />

Généralités.<br />

Ainsi que <strong>le</strong> constate Le Bon, <strong>le</strong>s ouvrages relatifs au <strong>redressage</strong><br />

font défaut <strong>et</strong> cependant <strong>le</strong> <strong>redressage</strong> est plus fréquent<br />

<strong>et</strong> plus diffici<strong>le</strong> que <strong>le</strong> dressage ; on a plus souvent à redresser un<br />

<strong>cheval</strong> qu'à dresser un <strong>cheval</strong> neuf, surtout en Afrique ou tous<br />

<strong>le</strong>s chevaux ont été montés (<strong>et</strong> comment !) a vant d'arriver dans<br />

<strong>le</strong>s régiments.<br />

La métho<strong>de</strong> que j'indiquerai détruit l'accu<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> façon<br />

sûre <strong>et</strong> complète <strong>et</strong> m<strong>et</strong> <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> sous la domination absolue<br />

du cavalier. El<strong>le</strong> donne <strong>de</strong>s résultats rapi<strong>de</strong>s <strong>et</strong> surtout durab<strong>le</strong>s.<br />

Simp<strong>le</strong>, el<strong>le</strong> peut être appliquée faci<strong>le</strong>ment <strong>et</strong> sans danger. El<strong>le</strong><br />

s'inspire <strong>de</strong>s principes d'équitation magistra<strong>le</strong>ment exposés dans<br />

<strong>le</strong> Manuel d'équitation <strong>et</strong> dressage : « Des conseils <strong>de</strong> Pluvinel,<br />

<strong>de</strong> la Guérinière, du comte d'Aure, <strong>de</strong> Baucher, <strong>de</strong>s généraux<br />

L'Hotte, Faverot <strong>de</strong> Kerbrech, Ju<strong>le</strong>s <strong>de</strong> Benoist <strong>et</strong> <strong>de</strong> Beauchesne.<br />

» Ces principes <strong>de</strong>meureront éternel<strong>le</strong>ment vrais, seuls<br />

l'application <strong>et</strong> <strong>le</strong>s moyens seront modifiés pour être adaptés à


— 128 —<br />

l'espèce qui nous occupe en tenant compte <strong>de</strong> <strong>son</strong> tempérament<br />

<strong>et</strong> surtout du défaut commun à tous <strong>le</strong>s chevaux <strong>barbe</strong>s : l'accu<strong>le</strong>ment.<br />

Mais il <strong>de</strong>meure entendu que « la métho<strong>de</strong> ne peut<br />

donner qu'une directive ; el<strong>le</strong> laisse à la perspicacité <strong>et</strong> au savoirfaire<br />

du cavalier <strong>le</strong> soin <strong>de</strong> suppléer à ce qu'el<strong>le</strong> a forcément<br />

d'incomp<strong>le</strong>t » (Saint-P hal<strong>le</strong>). Métho<strong>de</strong>s <strong>et</strong> procédés viennent au<br />

secours <strong>de</strong> l'art <strong>et</strong> <strong>le</strong> secon<strong>de</strong>nt, mais ils en <strong>son</strong>t absolument<br />

distincts.<br />

Certes, <strong>le</strong>s chevaux <strong>barbe</strong>s pourraient être redressés avec <strong>le</strong>s<br />

procédés d'équitation ordinaires, mais ce serait long, très long<br />

<strong>et</strong> diffici<strong>le</strong> pour la majorité <strong>de</strong>s cavaliers; <strong>de</strong>s résultats comp<strong>le</strong>ts<br />

<strong>et</strong> durab<strong>le</strong>s ne seraient obtenus que par <strong>de</strong>s cavaliers exceptionnel<strong>le</strong>ment<br />

puissants <strong>et</strong> doués <strong>de</strong> rares qualités.<br />

Les données <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong> exposée plus loin ont l'avantage<br />

d'avoir été puisées aux <strong>de</strong>ux sources fécon<strong>de</strong>s <strong>de</strong> l'observation<br />

<strong>et</strong> <strong>de</strong> l'expérience du <strong>barbe</strong>. Par <strong>son</strong> emploi, <strong>de</strong>s résultats ont<br />

été atteints qui — avec <strong>le</strong>s procédés habituel<strong>le</strong>ment employés —<br />

n'auraient été obtenus qu'au prix <strong>de</strong> beaucoup plus <strong>de</strong> temps, <strong>de</strong><br />

difficultés <strong>et</strong> d'efforts. Je crois même que <strong>le</strong>s moyens ordinaires<br />

appliqués à ces chevaux, étant donné ce qu'ils <strong>son</strong>t <strong>de</strong>venus,<br />

ne pourraient produire <strong>de</strong>s résultats aussi comp<strong>le</strong>ts <strong>et</strong> aussi<br />

définitifs.<br />

Pour étudier c<strong>et</strong>te métho<strong>de</strong>, nous emploierons <strong>le</strong> premier procédé<br />

qui se présente à l'esprit : l'analyse; dans une secon<strong>de</strong> opération,<br />

la synthèse, nous recoudrons <strong>le</strong>s faits analysés sur <strong>le</strong>squels<br />

nous possé<strong>de</strong>rons alors <strong>de</strong>s idées claires <strong>et</strong> précises.<br />

§ 2. — Baacher <strong>et</strong> <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>.<br />

Nous avons vu que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> tel que nous <strong>le</strong> trouvons<br />

est <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> bauchérisé <strong>de</strong> 1849 dépeint par <strong>le</strong> général L'Hotte,<br />

monté par <strong>de</strong> mauvais cavaliers, avec <strong>de</strong>s procédés qui conduisent<br />

tout droit à l'accu<strong>le</strong>ment.<br />

Or, la métho<strong>de</strong> que je préconise contient certains moyens<br />

enseignés par Baucher lui-même vers la fin <strong>de</strong> sa vie pour combattre<br />

l'accu<strong>le</strong>ment, ce défaut dans <strong>le</strong>quel tombaient tous <strong>le</strong>s


— 129 —<br />

chevaux <strong>de</strong> ses élèves qui ne possédaient ni la science ni <strong>le</strong>s<br />

moyens du maître. Nous savons que Baucher, à c<strong>et</strong>te époque,<br />

remédia à ce grave défaut par <strong>le</strong> relèvement <strong>de</strong> l'encolure.<br />

« Baucher a enseigné <strong>de</strong>ux métho<strong>de</strong>s, la première d'une application<br />

diffici<strong>le</strong> <strong>et</strong> délicate, qui fut pratiquée par <strong>le</strong> général<br />

Faverot <strong>de</strong> Kerbrech <strong>et</strong> <strong>le</strong> capitaine Raab; la <strong>de</strong>uxième, moins<br />

renfermée, en apparente contradiction avec la première, d'une<br />

application plus faci<strong>le</strong>, cel<strong>le</strong> <strong>de</strong>stinée aux cavaliers qui ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt<br />

à <strong>le</strong>urs chevaux que <strong>le</strong>s qualités suivantes : être très maniab<strong>le</strong>s<br />

avec une franchise absolue, <strong>de</strong>s allures plus rapi<strong>de</strong>s <strong>et</strong> plus<br />

brillantes, sans aucune <strong>de</strong> ces sour<strong>de</strong>s résistances dont nous par<strong>le</strong>rons<br />

plus loin, qui influent pour toute la vie sur l'attitu<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

certains animaux <strong>et</strong> qu'il est cependant possib<strong>le</strong> <strong>de</strong> détruire à<br />

tout âge. » ( Préface <strong>de</strong>s <strong>de</strong>rnières instructions <strong>de</strong> Baucher, par<br />

Boisgilbert.)<br />

La <strong>de</strong>rnière métho<strong>de</strong> Baucher, cel<strong>le</strong> qui ne comporte pas <strong>le</strong>s<br />

f<strong>le</strong>xions d'encolure, cel<strong>le</strong> décrite par Boisgilbert, peut être appliquée<br />

avec fruits au <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> à redresser.<br />

Si <strong>le</strong>s moyens qui <strong>son</strong>t préconisés <strong>son</strong>t d'un emploi délicat<br />

avec <strong>de</strong>s pur-sang, <strong>de</strong>s chevaux très sensib<strong>le</strong>s vibrants <strong>et</strong> chauds,<br />

par contre ils conviennent parfaitement aux chevaux <strong>barbe</strong>s<br />

indifférents aux jambes, blasés <strong>de</strong> l'éperon <strong>et</strong> d'un caractère<br />

froid <strong>et</strong> calme en général ; dans ces conditions, <strong>le</strong>s moyens <strong>de</strong><br />

Baucher n'exigent pas un tact, un doigté, un sens <strong>de</strong> la mesure,<br />

un discernement supérieurs à ceux que possè<strong>de</strong> un cavalier<br />

ordinaire.<br />

« Avec <strong>le</strong>s chevaux qui ont déjà travaillé <strong>et</strong> qui <strong>son</strong>t restés<br />

ou <strong>son</strong>t <strong>de</strong>venus rétifs, il est rare que la douceur réussisse, parce<br />

qu'ils ont si bien pris l'habitu<strong>de</strong> d'avoir <strong>le</strong> <strong>de</strong>ssus sur <strong>le</strong> cavalier,<br />

qu'il <strong>le</strong>ur faut <strong>de</strong>s arguments très convaincants pour <strong>le</strong>ur faire<br />

comprendre qu'en changeant <strong>de</strong> maître ils doivent changer <strong>de</strong><br />

caractère. On est presque toujours forcé avec <strong>le</strong>s chevaux <strong>de</strong><br />

c<strong>et</strong>te sorte <strong>de</strong> recourir aux corrections » (Saint-Phal<strong>le</strong>).<br />

En employant <strong>le</strong>s procédés habituels <strong>de</strong> dressage, on est obligé,<br />

en eff<strong>et</strong>, pour forcer <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> à obéir, <strong>de</strong> recourir à la vio<strong>le</strong>nce<br />

dès <strong>le</strong> début du <strong>redressage</strong>. Non seu<strong>le</strong>ment je ne pense pas que ce<br />

soit très recommandab<strong>le</strong>, mais encore je ferai remarquer que dans<br />

<strong>le</strong> <strong>cheval</strong> baabe 9


— 130 —<br />

la correction, il faut un tact que peu <strong>de</strong> cavaliers possè<strong>de</strong>nt^<br />

Je crois qu'on peut ici convaincre sans corriger. Il suffit d'employer<br />

<strong>de</strong>s procédés qui obligent <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> à obéir, <strong>de</strong>s procédés<br />

qui forcent <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> à cé<strong>de</strong>r sans qu'il puisse s'y soustraire. Je<br />

fais une gran<strong>de</strong> différence entre ces procédés qui forcent <strong>le</strong><br />

<strong>cheval</strong> à cé<strong>de</strong>r (<strong>le</strong>s rênes rigi<strong>de</strong>s en <strong>son</strong>t un) <strong>et</strong> ceux qui corrigent,<br />

qui châtient un défaut d'obéissance qui peut être au début<br />

du <strong>redressage</strong> crainte ou ignorance.<br />

Baucher nous fournit justement ces procédés « besif » con tre<br />

<strong>le</strong>squels « il n 'y a rien à faire » pou r <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>, rien d'autre que<br />

d'exécuter Vordre <strong>de</strong> <strong>son</strong> cavalier. Je tiens pour infiniment pré»<br />

cieux ces procédés qui plient sans qu'il soit besoin <strong>de</strong> battre,<br />

qui contraignent avec énergie certes mais sans vio<strong>le</strong>nce ; ce <strong>son</strong>t<br />

pour <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> qui <strong>le</strong>s ressent <strong>de</strong>s arguments bien plus persuasifs<br />

que s'ils étaient frappants.<br />

Les moyens enseignés par Baucher ont c<strong>et</strong>te puissance inéluctab<strong>le</strong><br />

; ils produisent vite une complète obéissance aux ai<strong>de</strong>s <strong>et</strong><br />

une sensibilité qui rend rapi<strong>de</strong>ment <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> aussi léger aux<br />

jambes qu'aux mains, ce qui constitue, écrit <strong>le</strong> général L'Hotte,<br />

la véritab<strong>le</strong> légèr<strong>et</strong>é <strong>et</strong> Saint-Phal<strong>le</strong> d'ajouter ; « Sensibilité aux<br />

rênes, sensibilité aux jambes <strong>son</strong>t la source <strong>de</strong> toute finesse en<br />

equitation. »<br />

Par ces procédés auxquels <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>, une fois qu'il y aura été<br />

soumis, ne pourra plus se dérober, on obtiendra très vite la f<strong>le</strong>xibilité<br />

<strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s ressorts <strong>et</strong> pour toujours la possession complète<br />

<strong>de</strong>s forces du <strong>cheval</strong> qui se trouvera alors entièrement soumis<br />

entre <strong>le</strong>s mains <strong>et</strong> <strong>le</strong>s jambes du cavalier.<br />

Les procédés que j'emprunterai à Baucher pour <strong>le</strong> re dressage<br />

du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> <strong>et</strong> qui ont <strong>le</strong>s qualités dont je viens <strong>de</strong> par<strong>le</strong>r<br />

<strong>son</strong>t : <strong>le</strong>s« pirou<strong>et</strong>tes renversées sur l'éperon <strong>et</strong> <strong>le</strong>s f<strong>le</strong>xions directes<br />

<strong>de</strong> la mâchoire ». (Les cavaliers qui ne connaîtraient pas ces<br />

procédés en trouveront plus loin l'exposition détaillée dans <strong>le</strong>s<br />

chapitres traitant <strong>de</strong> « l'assou plissement <strong>de</strong>s articulations <strong>de</strong> la<br />

nuque <strong>et</strong> <strong>de</strong> la mâchoire » <strong>et</strong> <strong>de</strong> « l'obéissance aux ai<strong>de</strong>s ».)<br />

a) Les pirou<strong>et</strong>tes renversées sur l'éperon. «— Nous avons vu<br />

précé<strong>de</strong>mment que la dur<strong>et</strong>é du mors arabe, l'incapacité compréhensib<strong>le</strong><br />

<strong>de</strong> ceux qui s'en servent, un emploi abusif, permanent


— 131 —<br />

<strong>et</strong> irrai<strong>son</strong>né <strong>de</strong> la jambe <strong>et</strong> <strong>de</strong> l'éperon à l'endroit où ils peuvent<br />

produire <strong>le</strong>ur maximum d'eff<strong>et</strong>, <strong>le</strong> manque <strong>de</strong> soutien, <strong>de</strong> liai<strong>son</strong>,<br />

entre la bouche du <strong>cheval</strong> <strong>et</strong> la main du cavalier, avaient<br />

pour conséquence inévitab<strong>le</strong> <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>de</strong>rrière la<br />

main <strong>et</strong> fina<strong>le</strong>ment en arrière <strong>de</strong>s jambes. Le mors <strong>et</strong> la crainte<br />

du mors éteignant l'impulsion en la contenant sans cesse malgré<br />

la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> la jambe, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>de</strong>vient vite froid aux jambes<br />

blasé <strong>de</strong> l'éperon <strong>et</strong> finit par s'habituer à n'y plus cé<strong>de</strong>r.<br />

Or, ce <strong>cheval</strong> inerte à <strong>de</strong>s moyens autrement plus puissants<br />

que ceux que nous employons habituel<strong>le</strong>ment, il s'agit <strong>de</strong> <strong>le</strong><br />

rendre sensib<strong>le</strong> <strong>et</strong> léger à la jambe. Voilà <strong>le</strong> « Hic ».<br />

Pour y arriver, il est nécessaire d'employer au début <strong>de</strong>s procédés<br />

énergiques <strong>et</strong> puissants qui obligeront <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> à cé<strong>de</strong>r;<br />

ces procédés lui feront tout d'abord redouter l'éperon, puis la<br />

crainte respectueuse <strong>de</strong> l'éperon •—• commencement <strong>de</strong> la sagesse<br />

— amènera l'obéissance au mol<strong>le</strong>t <strong>et</strong> « au vent <strong>de</strong> la botte » (loi<br />

<strong>de</strong>s associations par contiguïté).<br />

Avec <strong>le</strong>s pirou<strong>et</strong>tes renversées sur l'éperon <strong>de</strong> Baucher, l'éperon<br />

sera vite redouté. C<strong>et</strong> emploi énergique <strong>de</strong>s ai<strong>de</strong>s latéra<strong>le</strong>s<br />

qui renforcent mutuel<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>urs eff<strong>et</strong>s obligent <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> à<br />

cé<strong>de</strong>r dans <strong>le</strong> sens <strong>de</strong>mandé par <strong>le</strong> cavalier ; ce procédé ne perm<strong>et</strong><br />

ni confusion ni lutte <strong>et</strong> ne laisse au <strong>cheval</strong> d'autre ressource<br />

que cel<strong>le</strong> d'obéir ou <strong>de</strong> tomber; c'est pourquoi <strong>le</strong>s pirou<strong>et</strong>tes sur<br />

l'éperon produisent sur <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> un eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> domination très<br />

puissant qui <strong>le</strong> soum<strong>et</strong> rapi<strong>de</strong>ment <strong>et</strong> provoque — souvent au<br />

bout <strong>de</strong> quelques jours — l'obéissance parfaite à une seu<strong>le</strong><br />

jambe ou aux <strong>de</strong>ux jambes.<br />

« Les chevaux — dit très justement Le Bon — <strong>son</strong>t un peu<br />

comme <strong>le</strong>s peup<strong>le</strong>s <strong>et</strong> <strong>le</strong>s enfants : <strong>le</strong>s impressions fortes <strong>son</strong>t à<br />

peu près <strong>le</strong>s seu<strong>le</strong>s qui se fixent rapi<strong>de</strong>ment dans <strong>le</strong>ur esprit <strong>et</strong><br />

dont ils se souviennent toujours. Le grand avantage <strong>de</strong>s impressions<br />

fortes, c'est d'avoir à peine besoin d'être renouvelées. I l ne<br />

faut pas, même d'ail<strong>le</strong>urs, <strong>le</strong>s renouve<strong>le</strong>r afin d'éviter <strong>le</strong>s luttes.<br />

L'intensité <strong>de</strong>s impressions perm<strong>et</strong> alors d'éviter <strong>le</strong>ur répétition.<br />

»<br />

Le <strong>cheval</strong>, qui a beaucoup <strong>de</strong> mémoire comme chacun sait,<br />

<strong>et</strong> plus particulièrement <strong>le</strong> <strong>barbe</strong> qui a <strong>de</strong>s facultés intel<strong>le</strong>ctuel<strong>le</strong>s


— 132 —<br />

plus développées que cel<strong>le</strong>s <strong>de</strong>s autres chevaux, ne m<strong>et</strong>tra pas<br />

longtemps à s'apercevoir que <strong>son</strong> cavalier possè<strong>de</strong> un moyen <strong>de</strong><br />

<strong>le</strong> dominer <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>le</strong> forcer « hic e t nunc » à obéir à la jambe s'il<br />

vient à y manquer; dans ces conditions, il jugera qu'il a tout<br />

avantage à cé<strong>de</strong>r avec soumission; il <strong>le</strong> fera d'autant plus volontiers<br />

que la récompense viendra l'encourager à propos dans c<strong>et</strong>te<br />

voie <strong>et</strong> d'autant plus résolument que <strong>son</strong> cavalier m<strong>et</strong>tra un soin<br />

plus grand à ne jamais se contrecarrer, à laisser se produire librement<br />

sans entrave V impulsion commandée par l a jambe.<br />

Dès qu'il faut obéir, <strong>le</strong> parti <strong>le</strong> plus sage<br />

Est <strong>de</strong> savoir se faire un heureux esclavage.<br />

Il est nécessaire d'employer dès <strong>le</strong> début <strong>de</strong> l'engagement ces<br />

forces imposantes qui doivent bouscu<strong>le</strong>r la défense.<br />

Quand <strong>le</strong> défenseur se sera aperçu <strong>de</strong> l'inanité <strong>de</strong> ses efforts<br />

contre c<strong>et</strong>te énergie irrésistib<strong>le</strong>, il ne voudra plus jouer c<strong>et</strong>te<br />

partie où c'est toujours lui qui est fait échec <strong>et</strong> mat. Un très grand<br />

pas sera fait alors dans la voie du <strong>redressage</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong> la soumission.<br />

Ces procédés inéluctab<strong>le</strong>s auront alors à intervenir <strong>de</strong> moins<br />

en moins <strong>et</strong> seront relégués <strong>de</strong> plus en plus en arrière vers <strong>le</strong>s<br />

réserves généra<strong>le</strong>s où el<strong>le</strong>s seront désormais cantonnées au repos.<br />

La garni<strong>son</strong> <strong>de</strong>s défenses, <strong>le</strong>s hanches, convaincue <strong>de</strong> l'inutilité<br />

<strong>de</strong>s résistances, se laissera occuper <strong>et</strong> se soum<strong>et</strong>tra doci<strong>le</strong>ment;<br />

après s'être imposé, <strong>le</strong> cavalier habi<strong>le</strong> se fera tolérer <strong>et</strong> agira <strong>de</strong><br />

tel<strong>le</strong> sorte que la soumission soit agréab<strong>le</strong> au <strong>cheval</strong> ; la contrainte<br />

<strong>de</strong>vra se changer en gaîté <strong>et</strong> en bon vouloir, c'est <strong>le</strong> terme <strong>le</strong><br />

plus captivant <strong>de</strong> tout dressage bien compris.<br />

Dans <strong>le</strong> courant du <strong>redressage</strong>, <strong>le</strong> cavalier n'aura à faire intervenir<br />

ces réserves que par temps <strong>de</strong> révolte, <strong>de</strong> rébellion ou <strong>de</strong><br />

rappel à l'ordre si <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>, par trop familier, venait à perdre<br />

<strong>le</strong> respect <strong>de</strong> la botte sous prétexte qu'el<strong>le</strong> lui frô<strong>le</strong> <strong>le</strong> ventre, ou<br />

exécutait <strong>le</strong>s ordres avec une froi<strong>de</strong>ur sournoise, un entrain <strong>et</strong><br />

une bonne volonté insuffisants.<br />

Il est absolument essentiel, je trouve, <strong>de</strong> possé<strong>de</strong>r ces réserves<br />

<strong>de</strong> comman<strong>de</strong>ment irrésistib<strong>le</strong>s qui <strong>son</strong>t « la gar<strong>de</strong> » du cavalier


— 133 —<br />

menacé. Le défaut <strong>de</strong> répression a toujours été considéré comme<br />

<strong>de</strong> la faib<strong>le</strong>sse ou <strong>de</strong> la peur, si <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> par hasard, par oubli ou<br />

par coup <strong>de</strong> <strong>son</strong><strong>de</strong>, s'aperçoit que <strong>son</strong> cavalier ne possè<strong>de</strong> pas<br />

ces réserves <strong>de</strong> comman<strong>de</strong>ment, il <strong>le</strong> manœuvrera, s'enhardira<br />

p<strong>et</strong>it à p<strong>et</strong>it <strong>et</strong> en viendra à peu près sûrement à organiser ses<br />

résistances, à s'armer <strong>et</strong> à se défendre ; alors, c'est la lutte, la<br />

batail<strong>le</strong>, avec ses conséquences aléatoires ; dans ce cas-ci, <strong>le</strong><br />

cavalier risque fort d'être « roui:. » <strong>et</strong> il aurait mieux fait <strong>de</strong> (-ava<strong>le</strong>r<br />

dans d'autres manèges ces chevaux plus soumis qui galopent<br />

infatigab<strong>le</strong>ment sur <strong>de</strong>s voltes immuab<strong>le</strong>s.<br />

b) Les fexions directes <strong>de</strong> la mâchoire. — Nous savons que <strong>le</strong><br />

<strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> tel que nous <strong>le</strong> trouvons généra<strong>le</strong>ment a la bouche<br />

p<strong>le</strong>ine — bien que béante — <strong>de</strong> résistances <strong>et</strong> <strong>de</strong> sournoises<br />

contractions qui <strong>son</strong>t développées <strong>et</strong> non détruites par un mors<br />

trop délicat pour être d'un usage inoffensif entre <strong>de</strong>s mains<br />

arabes.<br />

Avec <strong>le</strong>s moyens habituels : tromper <strong>le</strong>s appuis, rendre, reprendre,<br />

il serait très diffici<strong>le</strong> <strong>de</strong> fai. e disparaître complètement<br />

ces résistances soli<strong>de</strong>ment implantées dans <strong>de</strong>s bouches « p erdues<br />

». Il ne s'agit pas <strong>de</strong> jouer à cache-cache avec el<strong>le</strong>s, il faut<br />

<strong>le</strong>s détruire <strong>et</strong> pour cela <strong>le</strong>s extirper <strong>de</strong> force.<br />

Les f<strong>le</strong>xions directes <strong>de</strong> la mâchoire <strong>de</strong> Baucher désagrégeront<br />

à tout jamais, certainement <strong>et</strong> vite <strong>le</strong>s résistances <strong>le</strong>s plus<br />

tenaces <strong>et</strong> <strong>le</strong>s plus obstinées.<br />

Pour obtenir la décontraction <strong>de</strong> la mâchoire, dit <strong>le</strong> Manuel<br />

d'équitation <strong>et</strong> <strong>de</strong> dressage, « on <strong>de</strong>vra engager <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> dans<br />

une allure détendue, division <strong>de</strong>s appuis, différentes combinai<strong>son</strong>s<br />

<strong>de</strong> rênes, rendre, reprendre, <strong>de</strong>mi-arrêts, vibrations, amèneront<br />

tôt ou tard la décontraction <strong>de</strong>mandée ». Et il s'empresse<br />

d'ajouter : « D ans la pratique <strong>de</strong>s assouplissements <strong>de</strong> bouche,<br />

il faut exercer un contrô<strong>le</strong> sévère sur la conservation <strong>de</strong> l'impulsion.<br />

» Les f <strong>le</strong>xions directes <strong>de</strong> la mâchoire présentent c<strong>et</strong> avantage<br />

très précieux, dans <strong>le</strong> <strong>redressage</strong> qui nous occupe, <strong>de</strong> ne<br />

pas risquer <strong>de</strong> prendre sur l'impulsion.<br />

Baucher nous fournit donc <strong>le</strong>s moyens <strong>de</strong> redresser rapi<strong>de</strong>ment<br />

<strong>le</strong> <strong>cheval</strong>, <strong>de</strong> <strong>le</strong> rendre très vite obéissant aux ai<strong>de</strong>s, <strong>de</strong><br />

nous assurer <strong>de</strong> la domination complète <strong>de</strong> ses furces ; ceci obtenu,


— 134 —<br />

ces procédés sévères n'ont nul<strong>le</strong>ment besoin d'être continue»<br />

<strong>et</strong> <strong>le</strong>s moyens <strong>de</strong> d'Aure pourront être appliqués au <strong>cheval</strong> ; il<br />

y sera parfaitement soumis.<br />

Les procédés <strong>de</strong> Baucher <strong>de</strong>meureront seu<strong>le</strong>ment un moyen<br />

puissant <strong>et</strong> infcillib<strong>le</strong> pour soum<strong>et</strong>tre à la minute <strong>et</strong> avec certitu<strong>de</strong><br />

<strong>le</strong> <strong>cheval</strong> qui tenterait d'échapper aux ai<strong>de</strong>s du cavalier<br />

ou n'en aurait pas un respect suffisant.


CHAPITRE III<br />

LE RELÈVEMENT DE L'ENCOLURE<br />

§ 1. Ses eff<strong>et</strong>s ; 1° Sur <strong>le</strong> centre <strong>de</strong> gravité du <strong>cheval</strong>. Nécessité <strong>de</strong> donner<br />

au <strong>cheval</strong> un nouvel équilibre; 2° Sur <strong>le</strong>s allures. De l'influence produite<br />

sur <strong>le</strong>s allures par <strong>le</strong>s différentes positions <strong>de</strong> l'encolure ; <strong>le</strong> relèvement <strong>de</strong><br />

l'encolure doit toujours s'accompagner <strong>de</strong> l'engagement <strong>de</strong>s postérieurs;<br />

3° Sur la domination du <strong>cheval</strong>. D'où provient la domination <strong>et</strong> <strong>le</strong> ra<strong>le</strong>ntissement<br />

forcé du <strong>cheval</strong> qui a l'encolure re<strong>le</strong>vée. L'encolure re<strong>le</strong>vée n'est<br />

pas compatib<strong>le</strong> avec la contraction <strong>de</strong> tous ses musc<strong>le</strong>s. Comment s'explique<br />

l'influence du relèvement <strong>de</strong> l'encolure sur la suppression <strong>de</strong> la<br />

pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> suspension au galop.<br />

§ 2. Il y a <strong>de</strong>ux relèvements <strong>de</strong> l'encolure : a) L'encolure renversée. Le <strong>cheval</strong><br />

qui porte au vent a la base <strong>de</strong> l'encolure affaissée:<br />

b) L'élévation complète <strong>de</strong> l'encolure. Pourquoi <strong>le</strong> relèvement <strong>de</strong><br />

l'encolure d'un <strong>cheval</strong> qui porte au vent ne peut empêcherl'embal<strong>le</strong>ment.<br />

Dans quel ordre faut-il s'occuper <strong>de</strong>s articulations du « bout du <strong>de</strong>vant ».<br />

§ 1. — Ses eff<strong>et</strong>s.<br />

Tous <strong>le</strong>s écuyers <strong>son</strong>t d'accord pour reconnaître qu'il ne peut<br />

y avoir <strong>de</strong> mise en main sans élévation <strong>de</strong> l'encolure <strong>et</strong> décontraction<br />

complète <strong>de</strong> la nuque <strong>et</strong> <strong>de</strong> la mâchoire.<br />

« Sans un port é<strong>le</strong>vé <strong>de</strong> la tête <strong>et</strong> <strong>de</strong> l'encolure résultant d'un<br />

mouvement en avant soup<strong>le</strong> <strong>et</strong> énergique, — dit Boisgilbert —<br />

il ne peut y avoir <strong>de</strong> <strong>cheval</strong> faci<strong>le</strong> à conduire. »<br />

« Les chevaux placés l'encolure basse <strong>son</strong>t dans l'impossibilité<br />

d'être conduits aisément; pour <strong>le</strong>s rendre maniab<strong>le</strong>s il faut la<br />

re<strong>le</strong>ver. Aussi pour en arriver à la légèr<strong>et</strong>é doit-on é<strong>le</strong>ver l'encolure<br />

par <strong>le</strong> ramener. Le centre <strong>de</strong> gravité étant plus près <strong>de</strong>s<br />

propulseurs, ceux-ci en disposent mieux <strong>et</strong> <strong>le</strong>s antérieurs <strong>son</strong>t<br />

plus libres. » (Saint-Phal<strong>le</strong>.)<br />

« La mise en main ne donne d'eff<strong>et</strong>s uti<strong>le</strong>s qu'avec l'encolure<br />

haute, avec l'encolure basse, el<strong>le</strong> enseigne simp<strong>le</strong>ment au <strong>cheval</strong><br />

à se soustraire aux exigences <strong>de</strong> <strong>son</strong> cavalier. » (Le Bon.)<br />

Nous avons vu dans un chapitre précé<strong>de</strong>nt que <strong>le</strong> relèvement


— 136 —<br />

<strong>de</strong> l'encolure concordant avec l'engagement <strong>de</strong>s postérieurs<br />

constitue la <strong>de</strong>uxième phase du <strong>redressage</strong> du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> tel<br />

que je <strong>le</strong> comprends; <strong>le</strong> but <strong>de</strong> la première phase étant <strong>de</strong> redonner<br />

au <strong>cheval</strong> <strong>son</strong> équilibre naturel <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>le</strong> m<strong>et</strong>tre sur <strong>le</strong>s<br />

épau<strong>le</strong>s (défaut inverse).<br />

Dans ce chapitre, je m'efforcerai <strong>de</strong> préciser <strong>le</strong>s eff<strong>et</strong>s du relèvement<br />

<strong>de</strong> l'encolure <strong>et</strong> <strong>de</strong> faire ressortir toute <strong>son</strong> importance.<br />

« Le dressage du <strong>cheval</strong>, dit Le Bon, est fort avancé quand on<br />

a obtenu <strong>le</strong> placement convenab<strong>le</strong> <strong>de</strong> l'encolure <strong>et</strong> <strong>de</strong> la tête. »<br />

Le relèvement <strong>de</strong> l'encolure produit <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s très distincts :<br />

sur <strong>le</strong> centre <strong>de</strong> gravité du <strong>cheval</strong>, sur ses allures, sur sa domination.<br />

1° Le changement <strong>de</strong> position <strong>de</strong> Vencolure déplace <strong>le</strong> centre <strong>de</strong><br />

gravité du <strong>cheval</strong>. — « L'e ncolure est incontestab<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> facteur<br />

<strong>le</strong> plus important <strong>de</strong>s déplacements <strong>de</strong> l'équilibre. Si <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

veut ra<strong>le</strong>ntir, quel<strong>le</strong>s que soient <strong>son</strong> allure <strong>et</strong> sa vitesse, il<br />

relève <strong>son</strong> encolure afin <strong>de</strong> produire <strong>le</strong> recul du centre <strong>de</strong> gravité<br />

<strong>et</strong> par conséquent <strong>de</strong> diminuer l'entraînement <strong>de</strong> sa masse. »<br />

(Saint-Phal<strong>le</strong>.)<br />

Les expériences faites par <strong>le</strong> général Morris <strong>et</strong> par Baucher,<br />

confirmées par cel<strong>le</strong>s du capitaine Dumas, démontrent que <strong>le</strong>s<br />

<strong>de</strong>ux tiers du poids du cavalier <strong>son</strong>t supportés par l'avant-main<br />

du <strong>cheval</strong>.<br />

« Le <strong>cheval</strong> à l'état naturel, — écrit Le Bon — se porte surtout<br />

sur l'avant-main. Il exagère encore c<strong>et</strong>te tendance quand<br />

il supporte <strong>le</strong> poids d'un cavalier, ce qui diminue sa solidité <strong>et</strong><br />

l'expose aux chutes en avant. En re<strong>le</strong>vant l'encolure — li<strong>son</strong>snous<br />

plus loin — on peut diminuer d'une vingtaine <strong>de</strong> kilos<br />

c<strong>et</strong>te surcharge. Le poids du cavalier ne produit donc pas une<br />

simp<strong>le</strong> surcharge, mais aussi une rupture <strong>de</strong> l'équilibre naturel<br />

existant entre l'avant-main <strong>et</strong> l'arrière-main du <strong>cheval</strong>, <strong>et</strong>c...<br />

Donc par <strong>le</strong> fait qu'un <strong>cheval</strong> est monté il n'y a plus chez lui<br />

d'allures naturel<strong>le</strong>s. Le <strong>cheval</strong> cherchera l'attitu<strong>de</strong> la moins gênante<br />

momentanément, sans se préoccuper <strong>de</strong> ses inconvénients<br />

futurs. Il imitera <strong>le</strong> conscrit sur <strong>le</strong> dos duquel on place un sac<br />

<strong>et</strong> qui, si on <strong>le</strong> laissait faire, se pencherait en avant pour se soulager<br />

sans <strong>son</strong>ger aux conséquences lointaines <strong>de</strong> l'inclinai<strong>son</strong>


— 137 —<br />

<strong>de</strong> la colonne vertébra<strong>le</strong>, <strong>de</strong> la compression <strong>de</strong>s viscères, <strong>et</strong>c...<br />

Il faut que <strong>le</strong> chef chargé <strong>de</strong> dresser <strong>le</strong> conscrit auquel l'expérience<br />

a enseigné <strong>le</strong>s meil<strong>le</strong>ures attitu<strong>de</strong>s à adopter vienne <strong>le</strong>s<br />

lui enseigner.<br />

« Il en est <strong>de</strong> même pour <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> : on doit lui enseigner à<br />

rectifier <strong>son</strong> équilibre. Si nous ne lui apprenons pas, nous aurons<br />

bientôt un animal habitué à charger <strong>son</strong> avant-main, <strong>et</strong>c... il<br />

n'échappera pas à une usure prématurée <strong>de</strong>s membres antérieurs<br />

qui réduira considérab<strong>le</strong>ment la durée <strong>de</strong> <strong>son</strong> service. »<br />

Il est donc nécessaire d'équilibrer <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> si l'on veut qu'il<br />

soit maniab<strong>le</strong> <strong>et</strong> que <strong>le</strong>s antérieurs ne s'usent pas prématurément.<br />

Ce résultat ne peut être obtenu que par <strong>le</strong> relèvement <strong>de</strong> l'encolure<br />

qui aura pour eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> décharger l'avant-main <strong>et</strong> <strong>de</strong> répartir<br />

à peu près éga<strong>le</strong>ment sur celui-ci <strong>et</strong> sur l'arrière-main <strong>le</strong> poids<br />

du <strong>cheval</strong> monté.<br />

« En re<strong>le</strong>vant l'encolure <strong>et</strong> en fléchissant la tête, <strong>le</strong> poids <strong>de</strong><br />

l'avant-main est reporté sur <strong>le</strong> centre <strong>et</strong> l'arrière-main <strong>de</strong> l'animal.<br />

» (Le Bon.)<br />

Les expériences faites par <strong>le</strong> général Morris <strong>et</strong> par Baucher<br />

en 1835 <strong>et</strong> cel<strong>le</strong>s faites par <strong>le</strong> général Morris <strong>et</strong> par Bellanger,<br />

vétérinaire en premier <strong>de</strong>s Gui<strong>de</strong>s, indiquent <strong>de</strong> façon indiscutab<strong>le</strong><br />

<strong>le</strong>s eff<strong>et</strong>s produits sur <strong>le</strong> centre <strong>de</strong> gravité du <strong>cheval</strong> par<br />

<strong>le</strong> relèvement <strong>de</strong> l'encolure. Le tab<strong>le</strong>au ci-<strong>de</strong>ssous résume ces<br />

expériences.<br />

Expériences faites par <strong>le</strong> général Morris <strong>et</strong> par Baucher :<br />

Le <strong>cheval</strong>, tenu dans un état comp<strong>le</strong>t d'immobilité, est placé<br />

chacun <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux bipè<strong>de</strong>s, antérieur <strong>et</strong> postérieur, sur <strong>le</strong>s plateaux<br />

<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux bascu<strong>le</strong>s.<br />

Suivant <strong>le</strong>s opérations effectuées, <strong>le</strong>s poids enregistrés <strong>son</strong>t<br />

<strong>le</strong>s suivants :<br />

Différence en plus<br />

Avant-main Arrière-main Total <strong>de</strong> F avant-main<br />

210 kg. 174 kg. 384 kg. 36 kg.<br />

La tête du <strong>cheval</strong> baissée, <strong>le</strong> nez à hauteur du poitrail :<br />

218 kg. (+S) 166 kg. (—8) 384 kg. 52 kg.<br />

La tête re<strong>le</strong>vée, <strong>le</strong> bout du nez à hauteur du garrot ;<br />

200 kg. (— 10) 184 kg. (+ 10) 384 kg. 16 kg.


— 138 —<br />

La tête étant dans sa position première mais ramenée sur l'encolure,<br />

par l'action du fi<strong>le</strong>t en l'é<strong>le</strong>vant un peu :<br />

202 kg. (— 8) 182 kg. (+ 8) 384 kg. 20 kg.<br />

Plus la tête est é<strong>le</strong>vée, du moins par l'action <strong>de</strong> la main, plus<br />

<strong>son</strong> poids <strong>et</strong> celui <strong>de</strong> l'encolure <strong>son</strong>t éga<strong>le</strong>ment répartis sur <strong>le</strong>s<br />

extrémités, si toutefois la position ri est pas forcée.<br />

Baucher étant monté sur <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>, <strong>son</strong> poids <strong>de</strong> 64 kilos était<br />

réparti <strong>de</strong> la façon suivante : 41 kilos sur l'avant-main, 23 kilos<br />

sur l'arrière-main :<br />

251 kg. (+ 41) 197 kg. (+ 23) 448 <strong>le</strong>g. 54 kg.<br />

Baucher étant assis davantage, <strong>le</strong> haut du corps en arrière,<br />

10 kilos <strong>de</strong> <strong>son</strong> poids passèrent sur l'arrière-main du <strong>cheval</strong>,<br />

puis ramenant la tête du <strong>cheval</strong> suivant sa métho<strong>de</strong>, il surchargea<br />

encore l'arrière-main <strong>de</strong> 8 kilos :<br />

233 kg. (—18) 215 kg. (+ 18) 448 kg. 18 kg.<br />

2° Le relèvement <strong>de</strong> V encolure a une gran<strong>de</strong> influence sur <strong>le</strong>s<br />

allures.<br />

« Av ec <strong>le</strong> nouvel équilibre donné par <strong>le</strong> dressage <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

modifie entièrement ses allures. Au lieu d'un pas traînant, d'un<br />

trot sec <strong>et</strong> court, d'un galop dur <strong>et</strong> précipité, il a un pas rapi<strong>de</strong><br />

<strong>et</strong> ca<strong>de</strong>ncé, un trot allongé sans réactions désagréab<strong>le</strong>s, un<br />

galop très doux dont la vitesse est exactement giaduée parla<br />

volonté <strong>de</strong> celui qui <strong>le</strong> monte. Ainsi, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> travail<strong>le</strong> sans<br />

contraction inuti<strong>le</strong>, sans gêne, sans perte <strong>de</strong> forces; il produit<br />

par conséquent <strong>le</strong> maximum d'eff<strong>et</strong> uti<strong>le</strong> avec la moindre dépense<br />

possib<strong>le</strong> <strong>de</strong> forces. » (Le B on.)<br />

Il est absolument évi<strong>de</strong>nt que <strong>le</strong> relèvement <strong>de</strong> l'encolure<br />

contribue à donner au <strong>cheval</strong> <strong>de</strong>s allures brillantes, é<strong>le</strong>vées,<br />

<strong>et</strong> que « <strong>le</strong>s allures courtes <strong>et</strong> re<strong>le</strong>vées <strong>son</strong>t mères <strong>de</strong>s allures<br />

allongées. Pour avoir <strong>de</strong>s allures rapi<strong>de</strong>s <strong>et</strong> aisées, il est indispensab<strong>le</strong><br />

que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> soit assoupli par une gymnastique spécia<strong>le</strong><br />

aux p<strong>et</strong>ites allures, équilibré. » (L e Bon.)<br />

Je crois intéressant <strong>de</strong> communiquer quelques notes sur <strong>le</strong>s<br />

différentes directions <strong>de</strong> l'encolure extraites <strong>de</strong> L'extérieur du,<br />

Cheval, <strong>de</strong> Goubeaux <strong>et</strong> Barrier.<br />

Indépendamment <strong>de</strong>s formes particulières qu'el<strong>le</strong> affecte, l'en­


— 139 —<br />

colure peut avoir trois directions : vertica<strong>le</strong>, horizonta<strong>le</strong>, intermédiaire<br />

oblique à 45°. Sur la figure 59, M N représente l'épau<strong>le</strong>,<br />

O B, O A, O G l'en colure, B M, A M, G M <strong>le</strong>s musc<strong>le</strong>s supérieurs<br />

<strong>de</strong> l'encolure <strong>et</strong> B N, A N, C N <strong>le</strong> mastoïdo-huméral.<br />

1° Position vertica<strong>le</strong>. — La tête est légère à la main, <strong>le</strong>s mouvements<br />

<strong>de</strong> l'épau<strong>le</strong> <strong>son</strong>t étendus, <strong>le</strong> mastoïdo-huméral (B N)<br />

à une gran<strong>de</strong> longueur <strong>et</strong> partant une gran<strong>de</strong> étendue <strong>de</strong> contraction<br />

pour sou<strong>le</strong>ver l'ang<strong>le</strong> scapulo-huméral <strong>et</strong> faire largement<br />

entamer <strong>le</strong> terrain au membre antérieur ; <strong>de</strong> plus, <strong>le</strong> poids <strong>de</strong> la<br />

M<br />

Fig. 59. — Schéma <strong>de</strong>s différentes positions <strong>de</strong> l'encolure <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur influence sur <strong>le</strong>s allures.<br />

tête B R s'insère à l'extrémité du <strong>le</strong>vier cervical sous un ang<strong>le</strong><br />

très aigu avec une inci<strong>de</strong>nce qui diminue l'intensité <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te<br />

résistance. Voilà pourquoi <strong>le</strong>s suj<strong>et</strong>s qui portent l'encolure dans<br />

c<strong>et</strong>te attitu<strong>de</strong> <strong>son</strong>t légers à la main, puisque la tête semb<strong>le</strong> moins<br />

peser sur la tige cervica<strong>le</strong> en rai<strong>son</strong> <strong>de</strong> l'inci<strong>de</strong>nce peu perpendiculaire<br />

<strong>de</strong> sa ligne <strong>de</strong> gravitation. C<strong>et</strong>te insertion est très favorab<strong>le</strong><br />

aux musc<strong>le</strong>s extenseurs (B M) po ur résister au poids <strong>de</strong> la<br />

tête <strong>et</strong> la porter en arrière afin <strong>de</strong> dégager <strong>le</strong>s antérieurs.<br />

2° Position horizonta<strong>le</strong>. — El<strong>le</strong> est <strong>le</strong> propre <strong>de</strong>s chevaux peu<br />

énergiques, <strong>de</strong>s races communes <strong>et</strong> qui commencent à se fatiguer;<br />

ils <strong>son</strong>t pesants à la main <strong>et</strong> ont <strong>de</strong>s allures raccourcies.


— 140 —<br />

Le mastoïdo-huméral G N a moins <strong>de</strong> longueur <strong>et</strong> une faib<strong>le</strong><br />

étendue <strong>de</strong> contraction, <strong>son</strong> insertion sur l'épau<strong>le</strong> est plus perpendiculaire<br />

que précé<strong>de</strong>mment, d'où plus favorisé sous <strong>le</strong> rapport<br />

<strong>de</strong> <strong>son</strong> action. La ligne <strong>de</strong> gravitation <strong>de</strong> la tête G R tend à<br />

se rapprocher <strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong> la perpendiculaire au <strong>le</strong>vier cervical,<br />

ce qui donne à la résistance qu'el<strong>le</strong> représente une intensité<br />

plus considérab<strong>le</strong>, ce qui explique <strong>le</strong>s chevaux lourds à la<br />

main; la tête déplace <strong>le</strong> centre <strong>de</strong> gravité en avant <strong>et</strong> dégage <strong>le</strong>s<br />

postérieurs.<br />

3° Position intermédiaire oblique à 45°. — C'est <strong>le</strong> juste milieu.<br />

Le cavalier expérimenté doit chercher à soustraire à sa monture<br />

la propriété <strong>de</strong> <strong>son</strong> balancier cervical; <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> ainsi aura<br />

abdiqué, à <strong>son</strong> insu, entre <strong>le</strong>s mains du cavalier, <strong>le</strong> gouvernail<br />

ou la puissance dont il disposait. Le moyen indispensab<strong>le</strong> pour<br />

comman<strong>de</strong>r l'équilibre est d'être maître <strong>de</strong> l'encolure.<br />

Ges quelques notes montrent la gran<strong>de</strong> influence produite<br />

sur <strong>le</strong>s allures par <strong>le</strong> relèvement <strong>de</strong> l'encolure. Ge relèvement<br />

du balancier agit directement sur <strong>le</strong> jeu <strong>de</strong> l'ang<strong>le</strong> scapulo-huméral,<br />

sur <strong>le</strong> geste <strong>de</strong> l'épau<strong>le</strong>, au moyen du musc<strong>le</strong> mastoïdo-huméral,<br />

qui est capab<strong>le</strong> <strong>de</strong> plus ou moins <strong>de</strong> puissance <strong>de</strong> contraction,<br />

suivant la position <strong>de</strong> l'encolure.<br />

L'encolure étant re<strong>le</strong>vée, si <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> ne proj<strong>et</strong>te pas ses épau<strong>le</strong>s<br />

suffisamment haut <strong>et</strong> en avant, c'est parce que <strong>le</strong>s hanches<br />

ne <strong>le</strong>s poussent pas assez. « Si l es épau<strong>le</strong>s s'éten<strong>de</strong>nt mal, écrit<br />

<strong>le</strong> général L'Hotte, c'est parce que <strong>le</strong>s hanches ne <strong>le</strong>s chassent<br />

pas bien. Les hanches, ce foyer <strong>de</strong>s forces impulsives, qui doivent<br />

s'animer, vibrer sous la plus légère pression <strong>de</strong>s talons,<br />

ne <strong>son</strong>t pas suffisamment agissantes, diligentes suivant l'expression<br />

<strong>de</strong> la Guèrinière ».<br />

Le relèvement <strong>de</strong> Vencolure doit donc s'accompagner toujours<br />

<strong>de</strong> l'engagement <strong>de</strong>s postérieurs sous la masse.<br />

« L'engagement <strong>de</strong>s postérieurs est essentiel; si l'on se bornait<br />

au simp<strong>le</strong> relèvement <strong>de</strong> l'encolure avec la main, on arriverait<br />

très vite à écraser F arrière-main du <strong>cheval</strong> <strong>et</strong> à provoquer c<strong>et</strong><br />

éloignement <strong>de</strong>s membres postérieurs observé souvent sur <strong>le</strong>s<br />

chevaux <strong>de</strong> voiture, dont l'encolure est maintenue par un enrênement<br />

artificiel. » (Le Bon.)


— 141 —<br />

Il faut déplacer en arrière <strong>le</strong> centre <strong>de</strong> gravité, mais sans<br />

déplacer <strong>le</strong> « foyer locomoteur ». Tandis que l'on cherche à re<strong>le</strong>ver<br />

l'encolure, il est nécessaire « d'allu mer » <strong>le</strong> « foyer locomoteur ».<br />

La mise en main — écrit <strong>le</strong> capitaine <strong>de</strong> Saint-Phal<strong>le</strong> — comporte<br />

naturel<strong>le</strong>ment « la soup<strong>le</strong>sse absolue <strong>de</strong> tout <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>et</strong><br />

l'engagement <strong>de</strong>s propulseurs : la soup<strong>le</strong>sse pour rendre possib<strong>le</strong><br />

<strong>le</strong> changement immédiat <strong>de</strong> l'équilibre; l'engagement <strong>de</strong>s<br />

propulseurs pour <strong>le</strong>s rendre maîtres <strong>de</strong> la masse <strong>et</strong> <strong>le</strong>ur perm<strong>et</strong>tre<br />

<strong>de</strong> l'actionner suivant la nouvel<strong>le</strong> position du centre <strong>de</strong> gravité<br />

».<br />

3° Le relèvement <strong>de</strong> Vencolure place forcément <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> sous la<br />

domination du cavalier.<br />

Le relèvement <strong>de</strong> l'encolure a une très gran<strong>de</strong> influence, non<br />

seu<strong>le</strong>ment sur l'équilibre du <strong>cheval</strong> <strong>et</strong> sur ses allures, mais encore<br />

sur sa domination.<br />

« Ce re lèvement — écrit fort justement Le Bon — constitue<br />

à mes yeux un <strong>de</strong>s points fondamentaux <strong>de</strong> l'équitation, <strong>le</strong> meil<strong>le</strong>ur<br />

moyen <strong>de</strong> rég<strong>le</strong>r à volonté la vitesse du <strong>cheval</strong>, <strong>et</strong> d'abréger<br />

immensément la durée du <strong>redressage</strong>. »<br />

Le capitaine <strong>de</strong> Saint-Phal<strong>le</strong> se contente <strong>de</strong> dire qu'il est<br />

exact que « l'extension <strong>de</strong> l'encolure perm<strong>et</strong> la rapidité <strong>de</strong> l'allure,<br />

tandis que <strong>son</strong> élévation l'empêche », m ais je n'ai vu nul<strong>le</strong><br />

part qu'il ait cherché à en déterminer la cause.<br />

Le poids rej<strong>et</strong>é en arrière du fait du relèvement <strong>de</strong> l'encolure,<br />

la position <strong>de</strong> la tête qui s'ensuit <strong>et</strong> qui perm<strong>et</strong> au mors d'agir<br />

avec <strong>son</strong> maximum d'efficacité, ainsi que l'explication donnée<br />

par Goubeaux <strong>et</strong> Barrier: la tête semb<strong>le</strong> moins peser sur la tige<br />

cervica<strong>le</strong> en rai<strong>son</strong> <strong>de</strong> l'inci<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> sa ligne <strong>de</strong> gravitation,<br />

tassement <strong>de</strong>s vertèbres ou mobilisation <strong>de</strong> points d'insertion<br />

<strong>de</strong> certains musc<strong>le</strong>s, eff<strong>et</strong> moral <strong>de</strong> la mise en main, ne me semb<strong>le</strong>nt<br />

pas être <strong>le</strong>s causes du ra<strong>le</strong>ntissement forcé <strong>et</strong> <strong>de</strong> la domination<br />

absolue du <strong>cheval</strong> qui a l'encolure ainsi placée.<br />

Je crois que la cause <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te domination se trouve dans la<br />

décontraction <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong> musc<strong>le</strong>s supérieurs <strong>de</strong> Vencolure,<br />

décontraction produite par <strong>le</strong> fait même <strong>de</strong> <strong>son</strong> comp<strong>le</strong>t relèvement.


— 142 —<br />

Le Bon, lui aussi, indique comme cause possib<strong>le</strong> <strong>de</strong> c<strong>et</strong> eff<strong>et</strong><br />

<strong>de</strong> domination produit par la mise en main encolure re<strong>le</strong>vée, la<br />

décontraction <strong>de</strong>s musc<strong>le</strong>s <strong>de</strong> l'encolure : « Ces eff<strong>et</strong>s (<strong>de</strong> la mise<br />

en main) écrit-il, tous <strong>le</strong>s écuyers ont pu <strong>le</strong>s constater; mais,<br />

quant à <strong>le</strong>ur explication scientifique, je la cherche encore. A peine<br />

pourrait-on dire <strong>de</strong>s défenses qu'étant précédées d'une contraction<br />

généra<strong>le</strong> <strong>de</strong>s musc<strong>le</strong>s <strong>de</strong> l'encolure <strong>et</strong> <strong>de</strong> la fixité <strong>de</strong> la colonne<br />

vertébra<strong>le</strong>, la mise en main <strong>le</strong>s empêche en assurant la décontraction<br />

<strong>de</strong> l'encolure <strong>et</strong> par conséquent, la mobilisation d'une<br />

partie <strong>de</strong> la tige rigi<strong>de</strong> formée par la colonne vertébra<strong>le</strong>. Mais<br />

c<strong>et</strong>te explication superficiel<strong>le</strong>, très suffisante pour un écuyer,<br />

est très insuffisante pour un physiologiste. »<br />

Les explications que je vais donner à ce suj<strong>et</strong> me semb<strong>le</strong>nt<br />

en tout cas très logiques, <strong>et</strong> me suffisent parfaitement; il est vrai<br />

que je ne suis qu'un simp<strong>le</strong> p<strong>et</strong>it cavalier ni physiologiste ni<br />

écuyer...<br />

Que fait un homme qui veut fournir un effort?<br />

Il fait d'abord une profon<strong>de</strong> aspiration, puis il «bloque » sa<br />

cage thoracique <strong>et</strong> sa colonne vertébra<strong>le</strong>, dont il fait un tout<br />

rigi<strong>de</strong> <strong>et</strong> immobi<strong>le</strong>; ensuite, il produit l'effort.<br />

Les musc<strong>le</strong>s s'insérant sur <strong>le</strong> tronc ou sur <strong>le</strong>s parties qui lui<br />

<strong>son</strong>t attachées, c'est la colonne vertébra<strong>le</strong> <strong>et</strong> <strong>le</strong> thorax qui <strong>son</strong>t<br />

<strong>le</strong> point fixe <strong>et</strong> immobi<strong>le</strong> sur <strong>le</strong>quel viendront s'arc-bouter <strong>le</strong>s<br />

musc<strong>le</strong>s qui ont à se contracter pour la production <strong>de</strong> l'effort.<br />

Celui-ci viendra en quelque sorte s'appuyer sur ce bloc fait <strong>de</strong><br />

contractions qui peut très bien se comparer à la butée fixe nécessaire<br />

à un ressort pour qu'il puisse être bandé <strong>et</strong> produire <strong>son</strong><br />

eff<strong>et</strong>. Pour pouvoir faire un effort, <strong>le</strong>s musc<strong>le</strong>s ont un besoin<br />

absolu <strong>de</strong> ce point fixe, <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te contraction préalab<strong>le</strong> <strong>de</strong>s musc<strong>le</strong>s<br />

expirateurs <strong>et</strong> vertébraux sur laquel<strong>le</strong> ils viennent prendre<br />

appui.<br />

Au départ d'un « cent mètres », avant <strong>de</strong> proj<strong>et</strong>er en avant <strong>le</strong><br />

poids <strong>de</strong> sa masse déséquilibrée, <strong>le</strong> « spr inter » fait une profon<strong>de</strong><br />

aspiration <strong>et</strong> bloque <strong>son</strong> thorax <strong>et</strong> sa colonne vertébra<strong>le</strong> sur <strong>le</strong>squels<br />

se ban<strong>de</strong>nt tous ses musc<strong>le</strong>s; pendant l'effort, ceux-ci s'arcboutent<br />

sur ce noyau central <strong>de</strong> contractions, si j'ose dire. L'athlète<br />

maintiendra ces contractions <strong>le</strong> plus longtemps possib<strong>le</strong>,


— 143 —<br />

<strong>et</strong> s'il est obligé <strong>de</strong> relâcher ses musc<strong>le</strong>s expirateurs pour renouve<strong>le</strong>r<br />

l'air <strong>de</strong> ses poumons avant la fin <strong>de</strong> l'effort, il <strong>le</strong> fera très<br />

vite <strong>de</strong> façon à rétablir au plus tôt ce bloc rigi<strong>de</strong>, point fixe nécessaire<br />

à la production <strong>de</strong> tout effort vio<strong>le</strong>nt. Il sait très bien qu'il<br />

ne peut faire effort que lorsque sa respiration est suspendue.<br />

Ainsi donc, l'effort n'est qu'intermittent ou est diminué d'instant<br />

à autre pour qu'il puisse s'opérer une expiration <strong>et</strong> une<br />

inspiration; c'est ce qui explique que, même à force musculaire<br />

éga<strong>le</strong>, celui-là produit l'effort <strong>le</strong> plus considérab<strong>le</strong> qui peut <strong>le</strong> plus<br />

longtemps r<strong>et</strong>enir sa respiration.<br />

Il est aisé <strong>de</strong> se rendre compte que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> n'agit pas autrement<br />

quand il fournit un effort vio<strong>le</strong>nt <strong>et</strong> soutenu. Quand on<br />

monte un <strong>cheval</strong> dans un steep<strong>le</strong>, par exemp<strong>le</strong>, en faisant attention<br />

on perçoit très bien <strong>le</strong>s profon<strong>de</strong>s <strong>et</strong> rapi<strong>de</strong>s expirations<br />

qu'il fait <strong>de</strong> temps en temps pendant <strong>le</strong> parcours; on se rend<br />

compte qu'il se dépêche <strong>de</strong> fixer à nouveau colonne vertébra<strong>le</strong><br />

<strong>et</strong> thorax qu'il tient bloqués <strong>le</strong> plus longtemps possib<strong>le</strong>.<br />

Ainsi que l'homme, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> a besoin <strong>de</strong> faire précé<strong>de</strong>r l'effort<br />

<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te contraction thoracique <strong>et</strong> vertébra<strong>le</strong> ; étant donnée<br />

sa constitution, je dirai même qu'il a besoin surtout <strong>de</strong> bloquer<br />

<strong>son</strong> encolure pour fournir un appui soli<strong>de</strong> aux musc<strong>le</strong>s qui actionnent<br />

<strong>le</strong>s membres antérieurs <strong>et</strong> <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s. Avant <strong>de</strong> sauter,<br />

par exemp<strong>le</strong>, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> s'empare <strong>de</strong> la main <strong>de</strong> <strong>son</strong> cavalier; il<br />

allonge <strong>son</strong> encolure <strong>et</strong> la contracte dans c<strong>et</strong>te position pour<br />

offrir <strong>le</strong> point fixe indispensab<strong>le</strong> aux ressorts qui font jouer <strong>le</strong>s<br />

épau<strong>le</strong>s. Pendant <strong>le</strong>s efforts que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> fournit dans une course,<br />

il a la colonne vertébra<strong>le</strong> rigi<strong>de</strong> <strong>et</strong> contractée; ainsi, non seu<strong>le</strong>ment<br />

un appui ferme est donné aux musc<strong>le</strong>s qui tirent sur <strong>le</strong><br />

scapulum <strong>et</strong> sur l'humérus, mais encore l'encolure ayant sa plus<br />

gran<strong>de</strong> longueur, ces musc<strong>le</strong>s peuvent agir avec <strong>le</strong>ur maximum<br />

<strong>de</strong> puissance contractive. En tendant <strong>son</strong> rachis <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> en<br />

supprime aussi toutes <strong>le</strong>s courbures <strong>et</strong> offre une colonne d'appui<br />

plus soli<strong>de</strong> à l'effort <strong>de</strong> traction <strong>de</strong>s musc<strong>le</strong>s : <strong>le</strong>s vertèbres<br />

cervica<strong>le</strong>s étant alors placées dans <strong>le</strong>ur prolongement <strong>le</strong>s unes<br />

par rapport aux autres. Les observations qui peuvent être faites<br />

sur <strong>de</strong>s chevaux qui fournissent un effort important confirment<br />

ce qui précè<strong>de</strong>.


— 144 —<br />

La seu<strong>le</strong> position <strong>de</strong> l'encolure compatib<strong>le</strong> avec la contraction<br />

généra<strong>le</strong> <strong>de</strong> ses musc<strong>le</strong>s est la position allongée un peu au-<strong>de</strong>ssus<br />

<strong>de</strong> l'horizonta<strong>le</strong>.<br />

Le <strong>cheval</strong> en tous <strong>le</strong>s cas ne pourra produire un effort vio<strong>le</strong>nt<br />

que s'il peut contracter sa colonne vertébra<strong>le</strong>.<br />

Empêchez c<strong>et</strong>te contraction, vous détruisez <strong>le</strong> tremplin d'où<br />

s'élance l'effort brusque <strong>et</strong> vio<strong>le</strong>nt, ou plus exactement vous <strong>le</strong><br />

ren<strong>de</strong>z soup<strong>le</strong> <strong>et</strong> élastique. Le <strong>cheval</strong> se trouve alors dans la<br />

situation d'un sauteur ou d'un coureur qui voudraient prendre<br />

appui sur un sommier métallique pour bondir ou s'élancer en<br />

avant. Malgré la détente énergique <strong>de</strong>s jarr<strong>et</strong>s, ils n'obtiendraient<br />

que <strong>de</strong> faib<strong>le</strong>s résultats dans <strong>le</strong> saut ou <strong>le</strong> départ brusque. Et il<br />

est à prévoir que dans ces conditions, sauteur, <strong>cheval</strong> ou bien<br />

coureur ne persisteront pas longtemps à dépenser <strong>de</strong>s efforts<br />

dont ils auront constaté l'inanité. Le <strong>cheval</strong> sera alors dominé,<br />

soumis, car on lui aura en<strong>le</strong>vé la possibilité <strong>de</strong> produire tout<br />

effort brusque <strong>et</strong> vio<strong>le</strong>nt.<br />

Ceci explique pourquoi un <strong>cheval</strong> peureux qui fait <strong>de</strong>s écarts,<br />

<strong>de</strong>s bonds, <strong>de</strong>vant un obj<strong>et</strong> qui l'effraie, passera doci<strong>le</strong> <strong>et</strong> transformé<br />

près du même obj<strong>et</strong> quand il sera en main l'encolure<br />

re<strong>le</strong>vée.<br />

Il est évi<strong>de</strong>nt que l'encolure re<strong>le</strong>vée est incompatib<strong>le</strong> avec la<br />

contraction généra<strong>le</strong> <strong>de</strong> ses musc<strong>le</strong>s ; la forme arrondie du bord<br />

supérieur <strong>de</strong> l'encolure du <strong>cheval</strong> placé l'encolure re<strong>le</strong>vée indique<br />

en eff<strong>et</strong> que <strong>le</strong>s musc<strong>le</strong>s <strong>de</strong> c<strong>et</strong> endroit qui épousent <strong>et</strong> perm<strong>et</strong>tent<br />

la forme généra<strong>le</strong> du rachis <strong>son</strong>t décontractés, puisque<br />

curvilignes. S'ils se contractaient, ils se redresseraient, <strong>de</strong>viendraient<br />

rectilignes, avant <strong>de</strong> pouvoir rapprocher <strong>le</strong>s pièces osseuses<br />

sur <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s ils <strong>son</strong>t attachés; l'encolure prendrait alors<br />

c<strong>et</strong>te position rigi<strong>de</strong> voisine <strong>de</strong> Thorizonta<strong>le</strong>, la plus favorab<strong>le</strong> à<br />

l'effort vio<strong>le</strong>nt ; ou bien, la contraction <strong>de</strong>s musc<strong>le</strong>s supérieurs<br />

s'accentuant, l'encolure pourrait même se renverser. Encolure<br />

re<strong>le</strong>vée est donc synonyme d'encolure décontractée <strong>et</strong>, ainsi<br />

placée, el<strong>le</strong> ne présente pas un appui suffisamment ferme pour<br />

la défense ou l'effort vio<strong>le</strong>nt.<br />

C'est dans ce point d'appui en<strong>le</strong>vé à l'effort, dans ce tremplin<br />

rendu élastique par <strong>le</strong> relèvement du balancier que je trouve


— 145 —<br />

l'explication <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te expérience signalée par Le Bon dans ses<br />

très intéressantes étu<strong>de</strong>s photographiques :<br />

« De l'influence du relèvement <strong>de</strong> l'encolure sur la réduction<br />

<strong>de</strong> l'amplitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s oscillations <strong>et</strong> sur la suppression <strong>de</strong> la pério<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong> suspension au galop ».<br />

L'encolure <strong>et</strong> la colonne vertébra<strong>le</strong> étant très soup<strong>le</strong>s <strong>et</strong> décontractées<br />

<strong>son</strong>t dans l'impossibilité <strong>de</strong> fournir <strong>le</strong> point fixe nécessaire<br />

à l'effort qui proj<strong>et</strong>te la masse au-<strong>de</strong>ssus du sol : <strong>le</strong> temps<br />

<strong>de</strong> suspension est supprimé; <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> est forcé <strong>de</strong> conserver<br />

avec <strong>le</strong> sol un contact permanent.<br />

§ 2. — Il y a <strong>de</strong>ux sortes d'encolures re<strong>le</strong>vées.<br />

Nous venons <strong>de</strong> voir <strong>le</strong>s différents eff<strong>et</strong>s produits par <strong>le</strong> relèvement<br />

<strong>de</strong> l'encolure sur l'équilibre du <strong>cheval</strong>, sur ses allures<br />

<strong>et</strong> sur sa domination. Mais je ne saurais trop insister sur ce fait,<br />

à mon avis d'une importance capita<strong>le</strong>, qu'il y a <strong>de</strong>ux élévations<br />

<strong>de</strong> l'encolure : l'encolure re<strong>le</strong>vée <strong>et</strong> l'encolure renversée. Leur différence<br />

est souvent marquée d'insuffisante façon.<br />

Je désignerai ces <strong>de</strong>ux positions é<strong>le</strong>vées <strong>de</strong> l'encolure par <strong>le</strong>s<br />

expressions ; encolure renversée <strong>et</strong> élévation complète <strong>de</strong> l'encolure.<br />

Le chape<strong>le</strong>t <strong>de</strong>s vertèbres cervica<strong>le</strong>s <strong>de</strong>ssine dans <strong>son</strong> ensemb<strong>le</strong><br />

<strong>de</strong>ux courbes, l'une antérieure concave, l'autre postérieure convexe<br />

(par rapport à un observateur placé <strong>de</strong>vant <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>).<br />

L'absence d'apophyses épineuses <strong>de</strong>s vertèbres cervica<strong>le</strong>s fait<br />

que cel<strong>le</strong>s-ci peuvent jouer aisément <strong>le</strong>s unes sur <strong>le</strong>s autres<br />

dans n'importe quel<strong>le</strong> direction, ce qui perm<strong>et</strong> à l'encolure <strong>de</strong><br />

prendre <strong>le</strong>s inf<strong>le</strong>xions <strong>le</strong>s plus variées (fig. 60).<br />

a) Encolure renversée. — L'encolure renversée est une élévation<br />

incomplète <strong>de</strong> l'encolure; la partie antérieure seu<strong>le</strong> est<br />

re<strong>le</strong>vée; ce relèvement partiel s'accompagne toujours <strong>de</strong> l'affaissement<br />

<strong>de</strong> la partie postérieure ; <strong>le</strong> mot « renversé » est bien celui<br />

qui convient à c<strong>et</strong>te position défectueuse. C'est la position d'encolure<br />

<strong>de</strong>s chevaux qui portent au vent, <strong>de</strong>s chevaux acculé#*<br />

<strong>de</strong>s chevaux <strong>barbe</strong>s en action avant <strong>le</strong>ur <strong>redressage</strong> (fig. 61).<br />

<strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> 10


— 146 —<br />

J'insiste sur ce point : <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> qui porte au vent n'a pas l'encolure<br />

re<strong>le</strong>vée comme il convient ; la tête est haute, mais la partie<br />

« fondamental e » <strong>de</strong> Vencolure est affaissée. C'est ce qui m'a fait<br />

dire que « <strong>le</strong> p ort au vent » <strong>et</strong> l'encapuchonnement procè<strong>de</strong>nt<br />

Fig. 60. — Sque<strong>le</strong>tte <strong>de</strong> l'encolure.<br />

du même défaut : dans ces <strong>de</strong>ux positions d'apparence opposée<br />

il y a affaissement <strong>de</strong> la base <strong>de</strong> l'encolure (fig. 61).<br />

Je n'ai vu nul<strong>le</strong> part que Baucher ait signalé ce fait, mais il<br />

Fig 61. — Schéma <strong>de</strong>s différentes positions <strong>de</strong> l'encolure.<br />

est vraisemblab<strong>le</strong> qu'il s'en soit rendu compte, car il combat<br />

ces <strong>de</strong>ux défauts par <strong>le</strong> même moyen : l'élévation du bout du<br />

nez à hauteur <strong>de</strong>s oreil<strong>le</strong>s <strong>et</strong> <strong>le</strong> recu<strong>le</strong>r la tête haute :<br />

« Plus <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> porte au vent, plus il est nécessaire <strong>de</strong> l ui re<strong>le</strong>-


— 147 —<br />

ver <strong>le</strong> bout du nez à hauteur <strong>de</strong>s oreil<strong>le</strong>s. Quant aux chevaux qui<br />

s'encapuchonnent, c<strong>et</strong>te attitu<strong>de</strong> disparaît en insistant sur <strong>le</strong><br />

recu<strong>le</strong>r la tête haute. »<br />

Le capitaine <strong>de</strong> Saint-Phal<strong>le</strong> que j'ai eu tant <strong>de</strong> plaisir à étudier,<br />

attribue au même vice ces <strong>de</strong>ux positions défectueuses <strong>de</strong><br />

l'encolure : <strong>le</strong> défaut d'impulsion. « Le s chevaux qui s'encapuchonnent<br />

<strong>son</strong>t ceux qui au lieu <strong>de</strong> prendre <strong>le</strong> contact <strong>de</strong> la main<br />

lorsque <strong>le</strong>s jambes <strong>le</strong>s y incitent, rouent l'encolure dès qu'ils<br />

sentent <strong>le</strong> mors pour en refuser l'appui <strong>et</strong> recu<strong>le</strong>nt la bouche<br />

jusqu'à amener <strong>le</strong> chanfrein en arrière <strong>de</strong> la vertica<strong>le</strong>.<br />

« Le fait <strong>de</strong> refuser <strong>de</strong> se porter sur la main <strong>et</strong> d'en prendre <strong>le</strong><br />

contact avec l'énergie voulue par <strong>le</strong>s jambes, ri est autre chose<br />

que <strong>le</strong> manque d'impulsion. Donc, pour guérir <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> qui s'encapuchonné,<br />

il n'y a qu'à l'amener à se porter en avant à la<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong>s jambes; pour en venir là, il ne faut pas hésiter à<br />

donner à <strong>le</strong>ur action la plus gran<strong>de</strong> intensité possib<strong>le</strong> <strong>et</strong> à la<br />

corroborer au besoin par la cravache » (Saint-Phal<strong>le</strong>).<br />

Le <strong>cheval</strong> qui porte au vent ou qui ne peut se servir <strong>de</strong> <strong>son</strong><br />

encolure à cause d'une main trop haute, trop bruta<strong>le</strong>, ou d'un<br />

mors trop dur, tente <strong>de</strong> réduire <strong>le</strong> plus possib<strong>le</strong> la courbure antérieure<br />

<strong>de</strong> <strong>son</strong> balancier ; il peut même arriver qu'il l'inverse, <strong>et</strong><br />

el<strong>le</strong> se confond alors avec la courbure postérieure convexe, l'encolure<br />

est bien renversée.<br />

Les efforts que fait <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> dans c<strong>et</strong>te position gênante pour<br />

reporter en avant <strong>le</strong> poids qui comprime ses jarr<strong>et</strong>s, ont pour<br />

eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> courber davantage la portion <strong>de</strong> cerc<strong>le</strong> postérieure dont<br />

<strong>le</strong> centre tend à se déplacer vers <strong>le</strong> bas <strong>et</strong> <strong>le</strong> plus en avant possib<strong>le</strong>.<br />

Le <strong>cheval</strong> « avance la ceinture » à s a manière en poussant<br />

en avant la partie postérieure <strong>de</strong> <strong>son</strong> encolure <strong>et</strong> cel<strong>le</strong>-ci se casse<br />

alors, comme nous l'avons vu, <strong>le</strong> plus en avant possib<strong>le</strong>. Le poids<br />

<strong>de</strong> la tête qui appuie sur la tige cervica<strong>le</strong> renversée accentue<br />

encore c<strong>et</strong>te position ruineuse pour <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>.<br />

Sur toutes <strong>le</strong>s photographies <strong>de</strong> chevaux portant au vent, il<br />

est n<strong>et</strong>tement visib<strong>le</strong> que <strong>le</strong> bord inférieur <strong>de</strong> l'encolure est convexe<br />

par rapport à l'observateur placé <strong>de</strong>vant <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>. C<strong>et</strong>te<br />

forme est donnée par la tige osseuse sur laquel<strong>le</strong> <strong>son</strong>t appliqués<br />

<strong>le</strong>s musc<strong>le</strong>s <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te région.


— 148 —<br />

b) Élévation complète <strong>de</strong> Vencolure. — C'est donc à la partie<br />

postérieure <strong>de</strong> l'encolure que doivent s'adresser <strong>le</strong>s mots « relèvement<br />

» <strong>et</strong> « affaissement », c'est la seu<strong>le</strong> qui importe gsx la direction<br />

<strong>de</strong> la base comman<strong>de</strong> cel<strong>le</strong> du jatte.<br />

C<strong>et</strong>te élévation complète <strong>de</strong> l'encolure est cel<strong>le</strong> recherchée<br />

par tous <strong>le</strong>s écuyers; el<strong>le</strong> est exactement l'opposé <strong>de</strong> l'encolure<br />

renversée, car dans l'élévation complète la partie postérieure<br />

<strong>de</strong> l'encolure est re<strong>le</strong>vée.<br />

L'élévation complète <strong>de</strong> l'encolure est la position du <strong>cheval</strong><br />

bien placé, équilibré, soumis, décontracté, soup<strong>le</strong> <strong>et</strong> léger aux<br />

jambes comme aux mains ; c'est c<strong>et</strong>te position re<strong>le</strong>vée à partir<br />

<strong>de</strong> la base qu'il faut rechercher ; nous verrons plus loin comment<br />

il est possib<strong>le</strong> <strong>de</strong> l'obtenir complète <strong>et</strong> vite.<br />

Gustave Le Bon n'a pas remarqué la différence « fondamenta<strong>le</strong> »<br />

qui existe entre ces <strong>de</strong>ux positions d'encolure. « Le <strong>cheval</strong> portant<br />

<strong>le</strong> nez au vent — écrit Le Bon ( 1 ) relève en même temps<br />

<strong>son</strong> encolure. Il faut donc abaisser sa tête <strong>et</strong> bien se gar<strong>de</strong>r <strong>de</strong><br />

modifier la position <strong>de</strong> <strong>son</strong> encolure. » I l faut au contraire modifier<br />

profondément c<strong>et</strong>te position si l'on veut arriver à placer<br />

convenab<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> qui porte au vent; il faut rendre total<br />

un relèvement qui n'est que partiel.<br />

Du livre même <strong>de</strong> Gustave Le Bon nous tirerons <strong>de</strong>s arguments<br />

propres à renforcer <strong>le</strong>s idées précé<strong>de</strong>ntes.<br />

Du ra<strong>le</strong>ntissement forcé <strong>de</strong> l'allure par <strong>le</strong> relèvement <strong>de</strong> l'encolure,<br />

« j'a i même tiré, dit Le Bon, <strong>de</strong>s règ<strong>le</strong>s pratiques extrêmement<br />

simp<strong>le</strong>s qui, avec <strong>le</strong>s trois quarts <strong>de</strong>s chevaux {<strong>le</strong> quart<br />

faisant peut-être exception comprend <strong>le</strong>s chevaux à encolure dite<br />

renversée), perm<strong>et</strong>tent d'éviter l'embal<strong>le</strong>ment <strong>et</strong> <strong>de</strong> rég<strong>le</strong>r <strong>le</strong> trot<br />

<strong>et</strong> <strong>le</strong> galop absolument à la vitesse qu'on désire ».<br />

Pourquoi donc ce quart fait-il exception?<br />

— Parce que <strong>le</strong>s chevaux qui portent au vent n'ont pas Vencolure<br />

complètement re<strong>le</strong>vée. Parce que, dans c<strong>et</strong>te position, la partie<br />

importante du balancier <strong>de</strong>meure affaissée, exactement comme si<br />

<strong>le</strong> <strong>cheval</strong> était encapuchonné. Ce relèvement partiel <strong>de</strong> l'encolure<br />

reste sans eff<strong>et</strong> sur <strong>le</strong> centre <strong>de</strong> gravité, parce que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>, en<br />

l 1 ) L 'équitalion actuel<strong>le</strong> <strong>et</strong> ses principes (Flammarion).


— 149 —<br />

même temps qu'il porte sa tête en arrière, pousse en avant sa<br />

« ceinture » qui est plus lour<strong>de</strong> <strong>et</strong> qui l'emporte.<br />

Et Le Bon <strong>de</strong> continuer : « C'est probab<strong>le</strong>ment parce que, quoi<br />

qu'on fasse, l'encolure prend toujours un peu <strong>de</strong> jeu chez <strong>le</strong>s<br />

chevaux à encolure renversée, que l'exagération du relèvement<br />

<strong>de</strong> l'encolure n'agit pas chez eux <strong>et</strong> ne peut empêcher l'embal<strong>le</strong>ment.<br />

Le capitaine Dumas est cependant convaincu, d'après ses<br />

expériences <strong>et</strong> contrairement à l'opinion généra<strong>le</strong>ment reçue, que<br />

l'embal<strong>le</strong>ment avec l'encolure renversée n'est possib<strong>le</strong> que parce<br />

que c<strong>et</strong>te encolure ayant beaucoup <strong>de</strong> jeu, paraît fixée à s on maximum<br />

d'élévation alors qu'el<strong>le</strong> ne Vest pas. Si on la fixait suffisamment,<br />

l'embal<strong>le</strong>ment resterait, suivant lui, impossib<strong>le</strong>. »<br />

C'est l'affaissement <strong>de</strong> la partie postérieure <strong>de</strong> l'encolure qui<br />

rend inopérant <strong>le</strong> relèvement <strong>de</strong> sa partie antérieure. Seul, <strong>le</strong><br />

relèvement <strong>de</strong> la base pe ut agir <strong>de</strong> façon péremptoire sur <strong>le</strong> centre<br />

<strong>de</strong> gravité, <strong>le</strong> reste <strong>de</strong> l'édifice étant absolument soumis à sa<br />

direction comme la trajectoire à l'inclinai<strong>son</strong> du canon ; seul<br />

aussi, <strong>le</strong> relèvement <strong>de</strong> la base <strong>de</strong> l'encolure provoque sa décontraction.<br />

Il est exact que l'encolure renversée, se trouvant dans une<br />

situation comparab<strong>le</strong> à cel<strong>le</strong> d'une colonne dont la base reposerait<br />

sur un sol mouvant, peut prendre « un peu » ou « beauco up<br />

<strong>de</strong> jeu », m ais ceci n'est qu'une conséquence, la cause est Vaffaissement<br />

<strong>de</strong> la partie fondamenta<strong>le</strong> <strong>de</strong> Vencolure post hoc ergo<br />

propter hoc.<br />

La position défectueuse <strong>de</strong> l'encolure renversée doit donc être<br />

profondément modifiée.<br />

Pour donner à l'encolure du <strong>cheval</strong> qui porte au vent une<br />

bonne position re<strong>le</strong>vée, il faut commencer par re<strong>le</strong>ver sa partie<br />

postérieure ; ensuite, presque <strong>de</strong> lui-même, <strong>le</strong> reste s'infléchira<br />

tandis que se décontracteront <strong>le</strong>s musc<strong>le</strong>s <strong>et</strong> que la tête se placera.<br />

Il ne restera plus alors qu'à s'occuper <strong>de</strong> l'articulation <strong>de</strong><br />

la mâchoire.<br />

Je trouve naturel, dans <strong>le</strong> cas spécial <strong>de</strong> <strong>redressage</strong> qui nous<br />

occupe, d'assouplir <strong>et</strong> <strong>de</strong> placer chacune <strong>de</strong> ces trois articulations<br />

principa<strong>le</strong>s du «bout <strong>de</strong> <strong>de</strong>vant », <strong>de</strong>rnières vertèbres cervica<strong>le</strong>s,<br />

nuque, mâchoire, dans <strong>le</strong>ur ordre <strong>de</strong> rapprochement <strong>de</strong> la masse ;


— 150 —<br />

<strong>de</strong> préparer la base avant <strong>de</strong> s'occuper du faîte. Il vaut mieux,<br />

je crois, débuter par l'articulation qui présente <strong>le</strong> maximum <strong>de</strong><br />

ferm<strong>et</strong>é d'appui <strong>et</strong> placer ensuite <strong>le</strong>s autres articulations qui<br />

viendront se superposer en quelque sorte à cel<strong>le</strong>s précé<strong>de</strong>mment<br />

placées. Je préfère ce procédé à celui généra<strong>le</strong>ment pratiqué <strong>et</strong><br />

qui est enseigné par <strong>le</strong> Manuel d'équitation <strong>et</strong> <strong>de</strong> dressage pour<br />

obtenir <strong>le</strong> placer; commencer par l'assouplissement <strong>de</strong> la mâchoire<br />

qui doit amener <strong>le</strong> ramener <strong>et</strong> l'élévation <strong>de</strong> l'encolure.<br />

En tout cas, dans <strong>le</strong> <strong>redressage</strong> qui nous occupe, l'encolure<br />

péchant par sa hase, je trouve plus rationnel <strong>de</strong> s'attaquer premièrement<br />

<strong>et</strong> sans détours à c<strong>et</strong>te partie, <strong>de</strong> redresser d'abord<br />

ce défaut initial, <strong>de</strong> donner à la masse <strong>de</strong> l'encolure une bonne<br />

direction re<strong>le</strong>vée à partir du garrot avant <strong>de</strong> s'occuper <strong>de</strong> l'articulation<br />

atloïdo-occipita<strong>le</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong> l'articulation maxillaire.<br />

Il semb<strong>le</strong> que Saint-Phal<strong>le</strong> ait adopté c<strong>et</strong> ordre pour placer<br />

l'encolure : « Le jeu <strong>de</strong> l'articulation du garrot dans <strong>le</strong> ramener<br />

— écrit-il — donne déjà à l'encolure une certaine soup<strong>le</strong>sse, mais<br />

el<strong>le</strong> serait insuffisante, <strong>et</strong> même fortement compromise, si <strong>le</strong>s<br />

articulations avoisinantes étaient contractées. Il faut donc<br />

qu'au jeu <strong>de</strong> celt e articulation se joigne celui <strong>de</strong> la nuque <strong>et</strong> celui<br />

<strong>de</strong> la mâchoire.


CHAPITRE IV<br />

COMMENT PLACER L'encolure par <strong>de</strong>s moyens DÉDUITS<br />

DE <strong>son</strong> étu<strong>de</strong> anatomique<br />

§ i. Étu<strong>de</strong> anatomique <strong>de</strong> l'encolure. De la nécessité <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong>. Notions<br />

généra<strong>le</strong>s sur <strong>le</strong>s musc<strong>le</strong>s. Étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s musc<strong>le</strong>s <strong>de</strong> Tencolure.<br />

§ 2. Comment placer l'encol ure. La tonicité musculaire est susceptib<strong>le</strong> <strong>de</strong><br />

varier en plus ou en moins. Musc<strong>le</strong>s à travail<strong>le</strong>r en contraction ou en<br />

élongation ; ordre dans <strong>le</strong>quel <strong>le</strong>s musc<strong>le</strong>s doivent être travaillés. Eff<strong>et</strong>s<br />

produits par <strong>le</strong> recu<strong>le</strong>r la tête haute. Le ramener par impulsion.<br />

§ 3. Réf<strong>le</strong>xions sur l'art équestre. « L'équitation n'est pas une science, c'est<br />

un art » ou bien : « l'équitation est un art scientifique ». Con séquences<br />

<strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux conceptions.<br />

§ 1. Étu<strong>de</strong> anatomique <strong>de</strong> Vencolure.<br />

« Le s lois <strong>de</strong> la mécanique s'appliquent<br />

aussi bien aux moteurs animés qu'aux autres<br />

machines. » ( .1. Ma rey. )<br />

« Dans l 'économie anima<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s forces <strong>son</strong>t<br />

représentée par <strong>le</strong>s musc<strong>le</strong>s, <strong>le</strong>s <strong>le</strong>viers<br />

par <strong>le</strong>s os. » (Goubeaux <strong>et</strong> Barrier.)<br />

On ne peut comprendre <strong>le</strong> jeu <strong>et</strong> <strong>le</strong>s usages d'une machine<br />

sans l'avoir d'abord analysée, c'est-à-dire sans avoir étudié <strong>le</strong>s<br />

pièces, <strong>le</strong>s rouages qui la composent, la forme <strong>de</strong> ces rouages <strong>et</strong><br />

<strong>le</strong>ur mo<strong>de</strong> d'agencement.<br />

Il en est <strong>de</strong> même <strong>de</strong> l'encolure. Puisque nous voulons lui<br />

donner une position autre que naturel<strong>le</strong>, il est nécessaire d'étudier<br />

<strong>son</strong> anatomie.<br />

Quand nous connaîtrons c<strong>et</strong>te machine compliquée que représente<br />

l'encolure, nous pourrons l'employer avec intelligence <strong>et</strong><br />

l'exploiter rai<strong>son</strong>nab<strong>le</strong>ment en mécaniciens instruits. Nous<br />

déduirons aussi <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong> <strong>le</strong>s moyens d'agir sur l'encolure<br />

avec précision <strong>et</strong> efficacité pour arriver à la plier <strong>et</strong> à la faire<br />

fonctionner suivant notre vouloir.<br />

Les moyens empiriques peuvent suffir, mais l'empirisme, incapab<strong>le</strong><br />

<strong>de</strong> fournir <strong>de</strong>s données précises, irréfutab<strong>le</strong>s, n'a jamais


— 152 —<br />

engendré <strong>de</strong> sérieux progrès. L'empirisme ne peut pas non plus<br />

produire <strong>de</strong>s pédagogues; il ne forme que quelques bons exécutants,<br />

<strong>et</strong> encore n'arrivent-ils souvent à ce point que tard,<br />

quand ils n'ont plus à professer.<br />

En tripotant insciemment <strong>de</strong>s machines comp<strong>le</strong>xes, on ne<br />

parvient souvent qu'a bien <strong>le</strong>s détraquer... Pour partir sur <strong>le</strong><br />

bon pied, toute étu<strong>de</strong> sur l'encolure, <strong>son</strong> placer, <strong>son</strong> assouplissement,<br />

doit débuter par <strong>son</strong> étu<strong>de</strong> anatomique.<br />

Avant d'étudier l'anatomie <strong>de</strong> l'encolure, je crois uti<strong>le</strong> <strong>de</strong> rappe<strong>le</strong>r<br />

quelques notions généra<strong>le</strong>s sur <strong>le</strong>s musc<strong>le</strong>s.<br />

Plus un musc<strong>le</strong> est gros, c'est-à-dire plus sa surface <strong>de</strong> section<br />

est étendue, plus il est susceptib<strong>le</strong> d'un effort considérab<strong>le</strong> ; mais<br />

d'autre part, un musc<strong>le</strong> ne se raccourcit qu'en rai<strong>son</strong> <strong>de</strong> sa propre<br />

longueur. On peut estimer qu'en moyenne, <strong>le</strong> raccourcissement<br />

du musc<strong>le</strong> en contraction est d'un tiers <strong>de</strong> sa longueur au<br />

repos. Il suit <strong>de</strong> là que <strong>le</strong> travail d'un musc<strong>le</strong> sera proportionnel<br />

à la fois à la longueur <strong>et</strong> à la section transversa<strong>le</strong> <strong>de</strong> ce musc<strong>le</strong>,<br />

c'est-à-dire à <strong>son</strong> volume ou à <strong>son</strong> poids. S'il est gros <strong>et</strong> court,<br />

il <strong>de</strong>vra produire un grand effort multiplié par un faib<strong>le</strong> parcours<br />

; s'il est long <strong>et</strong> grê<strong>le</strong>, il aura un parcours très étendu, mais<br />

ne développera qu'un effort peu énergique.<br />

Le tissu musculaire est doué d'extensibilité <strong>et</strong> d'élasticité,<br />

mais un musc<strong>le</strong> n'a qu'une puissance : contracti<strong>le</strong>. Il se relâche<br />

pour revenir à sa position norma<strong>le</strong>, mais il n'a pas <strong>de</strong> puissance<br />

extensib<strong>le</strong> capab<strong>le</strong> <strong>de</strong> redresser une articulation; c'est <strong>son</strong> antagoniste<br />

qui <strong>le</strong> redresse en se contractant.<br />

Contractilité ou extensibilité peuvent être augmentées par<br />

une gymnastique appropriée au but visé. Un musc<strong>le</strong> se contracte<br />

d'autant mieux <strong>et</strong> avec d'autant plus d'efficacité que<br />

l'élasticité <strong>de</strong> <strong>son</strong> antagoniste est plus développée.<br />

Extenseurs <strong>et</strong> fléchisseurs antagonistes ne se maintiennent<br />

en équilibre qu'en vertu <strong>de</strong> l'état permanent <strong>de</strong> tension dans<br />

<strong>le</strong>quel ils restent tant qu'ils <strong>son</strong>t soumis à l'influence du système<br />

nerveux, <strong>de</strong> la tonicité musculaire.<br />

« Les musc<strong>le</strong>s rectilignes ont pour eff<strong>et</strong> immédiat <strong>de</strong> rapprocher<br />

<strong>le</strong>s pièces osseuses sur <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s ils s'attachent. Le premier<br />

résultat produit par la contraction d'un musc<strong>le</strong> curviligne


— 153 —<br />

est <strong>le</strong> redressement <strong>de</strong> ses fibres composantes; après quoi, il<br />

peut agir sur <strong>le</strong>s <strong>le</strong>viers osseux comme <strong>le</strong>s musc<strong>le</strong>s rectilignes<br />

s'il n'a pas épuisé tout <strong>son</strong> pouvoir contracti<strong>le</strong> » (^).<br />

Les vertèbres cervica<strong>le</strong>s étant dépourvues d'apophyses épineuses,<br />

<strong>le</strong>ur jeu <strong>le</strong>s unes sur <strong>le</strong>s autres est peu limité par cel<strong>le</strong>sci;<br />

il l'est surtout par <strong>le</strong>s ligaments cervicaux <strong>et</strong> <strong>le</strong> <strong>de</strong>gré <strong>de</strong><br />

f<strong>le</strong>xion ou d'extension dont <strong>son</strong>t capab<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s musc<strong>le</strong>s qui s'y insèrent.<br />

Le grand développement d'apophyses articulaires <strong>et</strong> la<br />

courbe très brève décrite par <strong>le</strong>s surfaces <strong>de</strong> contact <strong>de</strong>s corps<br />

vertébraux perm<strong>et</strong>tent au rachis <strong>de</strong>s mouvements très étendus<br />

<strong>et</strong> très variés.<br />

Les livres dont je me suis servi pour l'étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s musc<strong>le</strong>s <strong>de</strong><br />

l'encolure <strong>son</strong>t <strong>le</strong> « Trai té d'anatomie comparée » <strong>de</strong> Chauveau<br />

<strong>et</strong> l'Anatomie régiona<strong>le</strong> <strong>de</strong>s animaux domestiques <strong>de</strong> L. Moutané<br />

<strong>et</strong> E. Bour<strong>de</strong>l<strong>le</strong>.<br />

Pour simplifier, je ne mentionnerai que <strong>le</strong>s musc<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s plus<br />

importants <strong>et</strong> j'indiquerai <strong>le</strong>urs insertions afin que nous puissions<br />

en déduire <strong>le</strong>s fonctions <strong>de</strong> chacun d'eux.<br />

Nous diviserons l'encolure en <strong>de</strong>ux parties : région supérieure<br />

(A), <strong>et</strong> région inférieure (B).<br />

A) Région supérieure<br />

Les principaux musc<strong>le</strong>s <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te région <strong>son</strong>t :<br />

1° La portion cervica<strong>le</strong> du trapèze : Le trapèze est situé sur<br />

<strong>le</strong>s côtés <strong>de</strong> l'encolure <strong>et</strong> du garrot. Sa forme est cel<strong>le</strong> d'un triang<strong>le</strong><br />

à base dirigée en haut. Insertions : il se fixe par <strong>son</strong> aponévrose<br />

supérieure sur la cor<strong>de</strong> du ligament cervical <strong>et</strong> sur <strong>le</strong> somm<strong>et</strong><br />

<strong>de</strong>s apophyses épineuses <strong>de</strong>s premières vertèbres dorsa<strong>le</strong>s.<br />

Par <strong>son</strong> aponévrose inférieure, il s'attache sur la tubérosité <strong>de</strong><br />

l'épine acromienne <strong>et</strong> sur l'aponévrose scapulaire externe. —<br />

Fonction — Élève l'épau<strong>le</strong> (fig. 68).<br />

2° Le rhomboï<strong>de</strong> (fig. 62).<br />

Placé sous la cor<strong>de</strong> du ligament cervical dont il suit la direction,<br />

il a la forme d'un triang<strong>le</strong> très allongé. — Insertions : Ses<br />

faisceaux <strong>son</strong>t fixés par <strong>le</strong>ur extrémité supérieure sur la portion<br />

(•) Traité d'anatomie comparée, <strong>de</strong> CHAUVEAU.


— 154 ——<br />

funiculaire du ligament cervical <strong>et</strong> sur <strong>le</strong> somm<strong>et</strong> <strong>de</strong>s apophyses<br />

épineuses <strong>de</strong>s 4 ou 5 vertèbres dorsa<strong>le</strong>s qui suivent la première;<br />

par <strong>le</strong>ur extrémité inférieure à la face interne du cartilage <strong>de</strong><br />

prolongement <strong>de</strong> l'omoplate. — Fonction : il tire l'épau<strong>le</strong> en<br />

haut <strong>et</strong> en avant (fig. 63).<br />

Sp<strong>le</strong>ni us<br />

sferno-mdxil/dire<br />

Fig. 62. — Musc<strong>le</strong>s <strong>de</strong> l'encolure : sp<strong>le</strong>nitis, rhomboï<strong>de</strong>, angulaire <strong>de</strong> l'omoplate,<br />

sterno-maxillaire.<br />

3° L'angulaire <strong>de</strong> l'omoplate (fig. 62) est un musc<strong>le</strong> fort <strong>et</strong><br />

triangulaire situé en avant <strong>de</strong> l'épau<strong>le</strong>.<br />

Insertions. Apophyses transverses <strong>de</strong>s 5 <strong>de</strong>rnières vertèbres<br />

cervica<strong>le</strong>s <strong>et</strong> face interne <strong>de</strong> l'omoplate. — Fonction. Il tire en<br />

avant l'extrémité supérieure du scapulum pendant que l'ang<strong>le</strong><br />

humerai se porte en arrière. Si <strong>son</strong> point fixe est à l'épau<strong>le</strong>, il


— 155 —<br />

peut opérer l'inclinai<strong>son</strong> latéra<strong>le</strong> <strong>de</strong> l'encolure, <strong>et</strong> surtout <strong>le</strong> relèvement<br />

<strong>de</strong> sa base (fig. 63).<br />

4° Le spléniiis (fig. 62) est un musc<strong>le</strong> considérab<strong>le</strong> aplati d'un<br />

côté à l'autre, triangulaire, compris entre la cor<strong>de</strong> du ligament<br />

cervical, la branche inférieure <strong>de</strong> l'ilio-spinal <strong>et</strong> <strong>le</strong>s apophyses<br />

transverses <strong>de</strong>s 4 premières vertèbres cercica<strong>le</strong>s.<br />

Fig. 63. — Rô<strong>le</strong> du rhomboï<strong>de</strong> (/•) <strong>et</strong> <strong>de</strong> l'angulaire (an)<br />

pendant la pério<strong>de</strong> d'appui du membre.<br />

Insertions. 11 se fixe par <strong>son</strong> bord supérieur sur la lèvre du ligament<br />

cervical <strong>et</strong> sur <strong>le</strong> somm<strong>et</strong> <strong>de</strong>s apophyses épineuses <strong>de</strong>s<br />

premières vertèbres dorsa<strong>le</strong>s. Son bord antérieur est découpé en<br />

4 ou 5 langu<strong>et</strong>tes qui se fixent à la crête mastoïdienne, à l'apophyse<br />

transverse <strong>de</strong> l'atlas, aux apophyses transverses <strong>de</strong>s troisième,<br />

quatrième <strong>et</strong> cinquième vertèbres cervica<strong>le</strong>s.<br />

Fonction. Il étend la tête <strong>et</strong> <strong>le</strong> cou en <strong>le</strong>s inclinant <strong>de</strong> côté; si<br />

<strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux splénius agissent <strong>de</strong> concert, l'extension <strong>de</strong> la tête est<br />

directe; c'est un « renver seur » <strong>de</strong> l'encolure (fig. 64).<br />

5° Le grand comp<strong>le</strong>xus (fig. 65) est un musc<strong>le</strong> puissant compris<br />

entre la face interne du splénius <strong>et</strong> <strong>le</strong> ligament cervical.


— 156 —<br />

Insertions. La portion postérieure prend <strong>son</strong> origine sur <strong>le</strong><br />

somm<strong>et</strong> <strong>de</strong>s apophyses épineuses <strong>de</strong>s premières vertèbres dor-<br />

Fig. 64. — Levier <strong>de</strong>s fléchisseurs <strong>et</strong> <strong>de</strong>s extenseurs (<strong>le</strong>vier A. P. R.) :<br />

sterno-maxillaire, splénius, grand <strong>et</strong> p<strong>et</strong>it comp<strong>le</strong>xus.<br />

jo<strong>et</strong>il com|o<strong>le</strong>xu5<br />

I<br />

grand comp<strong>le</strong>^uj<br />

Fig. 65. — Les m usc<strong>le</strong>s <strong>de</strong> l'encolure (grand comp<strong>le</strong>xus, p<strong>et</strong>it comp<strong>le</strong>xus, scalène).<br />

sa<strong>le</strong>s <strong>et</strong> sur <strong>le</strong>s apophyses transverses <strong>de</strong>s 4 ou 5 vertèbres dorsa<strong>le</strong>s<br />

qui suivent la secon<strong>de</strong>; la portion antérieure est fixée sur<br />

<strong>le</strong>s apophyses transverses <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux premières vertèbres dor-


— 157 —<br />

sa<strong>le</strong>s <strong>et</strong> sur <strong>le</strong>s tubercu<strong>le</strong>s articulaires <strong>de</strong>s vertèbres cervica<strong>le</strong>s.<br />

Fonction. « Re nverseur » pu issant <strong>de</strong> l'encolure (fig. 64).<br />

6° Le p<strong>et</strong>it comp<strong>le</strong>xus (fig. 65). — Il longe <strong>le</strong> bord antérieur<br />

du grand comp<strong>le</strong>xus. C'est un musc<strong>le</strong> long, divisé en <strong>de</strong>ux corps<br />

fusiformes <strong>et</strong> parallè<strong>le</strong>s.<br />

Insertions. Attaches fixes, sur <strong>le</strong>s apophyses transverses <strong>de</strong>a<br />

<strong>de</strong>ux premières vertèbres dorsa<strong>le</strong>s <strong>et</strong> sur <strong>le</strong>s tubercu<strong>le</strong>s articulaires<br />

<strong>de</strong>s vertèbres cervica<strong>le</strong>s. Attaches mobi<strong>le</strong>s : apophyse mastoï<strong>de</strong><br />

du temporal <strong>et</strong> apophyse transverse <strong>de</strong> l'atlas.<br />

Fonction. Il incline <strong>de</strong> <strong>son</strong> côté la tête <strong>et</strong> la partie supérieure<br />

<strong>de</strong> l'encolure. Il agit encore comme extenseur <strong>de</strong> la tête <strong>et</strong><br />

« renve rseur » <strong>de</strong> l'encolure (fig. 64).<br />

B) Région inférieure<br />

Les musc<strong>le</strong>s <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te région <strong>le</strong>s plus importants pour notre<br />

travail <strong>son</strong>t :<br />

1° Le mastoido-huméral (fig. 66). — Étendu du somm<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />

la tête à la partie inférieure du bras, <strong>le</strong> mastoïdo-huméral est<br />

appliqué sur l'ang<strong>le</strong> scapulo-huméral <strong>et</strong> <strong>le</strong> côté <strong>de</strong> l'encolure.<br />

Insertions. Les extrémités supérieures s'attachent sur l'apophyse<br />

mastoî<strong>de</strong>, la crête mastoïdienne <strong>et</strong> sur <strong>le</strong>s apophyses transverses<br />

<strong>de</strong>s 4 premières vertèbres cervica<strong>le</strong>s, <strong>le</strong>s extrémités inférieures<br />

s'élargissent sur l'ang<strong>le</strong> scapulo-huméral qu'el<strong>le</strong>s enveloppent<br />

<strong>et</strong> se terminent sur l'humérus.<br />

Fonction. Quand <strong>son</strong> point fixe est supérieur, il porte en avant<br />

<strong>le</strong> membre antérieur tout entier. Ce musc<strong>le</strong> joue donc un rô<strong>le</strong><br />

important dans la locomotion car c'est lui qui agit quand l'animal<br />

soulève <strong>le</strong>s membres du <strong>de</strong>vant pour entamer <strong>le</strong> terrain.<br />

Si <strong>le</strong> point fixe du musc<strong>le</strong> est au membre, il incline <strong>de</strong> côté la<br />

tête <strong>et</strong> <strong>le</strong> cou. Si <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux agissent, ils fléchissent l'encolure<br />

(Gg. 67).<br />

2° Le sterno-maxillaire (fig. 62). — Insertions. Attaché inférieurement<br />

sur <strong>le</strong> prolongement trachélien du sternum (Insertion<br />

fixe), il est fixé supérieurement à l'ang<strong>le</strong> <strong>de</strong> la mâchoire<br />

inférieure.<br />

Fonction. Il fléchit la tête, soit directement s'il s'agit <strong>de</strong> con-


— 158 —<br />

maaloi<strong>de</strong> humeral<br />

mserhon rtidstoidienne<br />

extrémirë Inuméraie<br />

Fig. 66. — Musc<strong>le</strong>s <strong>de</strong> l'encolure (mastoïdo-huméral).<br />

Figi 67. — Action du mastoïdo-huméral dans <strong>le</strong>s allures.<br />

A, noin 1 d'anpnî ; B, rési s'an ce; P, pniFS-'nc - ;.


— 159 —<br />

cert avec <strong>son</strong> congénère, soit <strong>de</strong> côté s'il entre seul en action<br />

(fig. 64).<br />

3° Le scalène (fig. 65). — Situé profondément à la partie inférieure<br />

du cou comprend <strong>de</strong>ux portions d'inéga<strong>le</strong> dimension.<br />

Insertions. La portion supérieure s'attache sur <strong>le</strong>s apophyses<br />

transverses <strong>de</strong>s 3 ou 4 <strong>de</strong>rnières vertèbres cervica<strong>le</strong>s, la portion<br />

inférieure s'attache sur <strong>le</strong>s apophyses transverses <strong>de</strong>s 4 <strong>de</strong>rnières<br />

vertèbres cervica<strong>le</strong>s <strong>et</strong> sur <strong>le</strong> bord antérieur <strong>de</strong> la première<br />

côte.<br />

Fonction. Quand <strong>le</strong> point fixe est à la première côte, ce musc<strong>le</strong><br />

fléchit l'encolure directement ou en l'inclinant <strong>de</strong> côté. Lorsqu'il<br />

prend <strong>son</strong> point d'appui sur <strong>le</strong> cou, il tire en avant la première<br />

côte <strong>et</strong> il la fixe dans c<strong>et</strong>te position, pendant la dilatation <strong>de</strong> la<br />

poitrine, pour favoriser l'action inspiratrice <strong>de</strong>s intercostaux<br />

externes.<br />

4° Long du cou. — C'est un musc<strong>le</strong> impair considérab<strong>le</strong> recouvrant<br />

la face inférieure du corps <strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>s vertèbres cervica<strong>le</strong>s<br />

<strong>et</strong> <strong>de</strong>s 6 premières dorsa<strong>le</strong>s.<br />

Insertions. Il s'attache à la face inférieure du corps <strong>de</strong>s 6 premières<br />

vertèbres dorsa<strong>le</strong>s <strong>et</strong> s'insère sur <strong>le</strong> tubercu<strong>le</strong> inférieur <strong>de</strong><br />

la sixième apophyse trachélienne; d'autres faisceaux moins considérab<strong>le</strong>s<br />

se portent d'une vertèbre cervica<strong>le</strong> à l'autre.<br />

Fonction. Il fléchit l'encolure toute entière <strong>et</strong> <strong>le</strong>s vertèbres<br />

cervica<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s unes sur <strong>le</strong>s autres.<br />

Sur la figure 68, je me suis efforcé d e tracer aussi justement<br />

que mes connaissances me <strong>le</strong> perm<strong>et</strong>tent l'axe <strong>de</strong>s principaux<br />

musc<strong>le</strong>s qui nous intéressent, c'est-à-dire une ligne moyenne<br />

à laquel<strong>le</strong> on peut rapporter l'eff<strong>et</strong> général <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs fibres. C<strong>et</strong><br />

axe est très important pour la détermination <strong>de</strong> l'action physiologique<br />

<strong>de</strong>s musc<strong>le</strong>s.<br />

§ 2. Comment placer Vencolure.<br />

Par <strong>de</strong>s exercices appropriés nous pouvons modifier l'état<br />

<strong>de</strong> longueur permanent <strong>de</strong>s musc<strong>le</strong>s. Un musc<strong>le</strong> travaillé « en<br />

contraction » <strong>de</strong>vie ndra plus large, mais diminuera <strong>de</strong> longueur,<br />

à la façon d'un caoutchouc qui reviendrait à sa longueur norma<strong>le</strong>


— 160 —<br />

Atcrn o-maxi Hai re,<br />

après avoir été étiré; un travail « en élongation » pro duira <strong>de</strong>s<br />

<strong>et</strong>i'<strong>et</strong>s inverses. Il est donc possib<strong>le</strong>, par la gymnastique, <strong>de</strong> raccourcir<br />

un musc<strong>le</strong> en <strong>le</strong> travaillant « en c ontraction » ou d e l'al-<br />

mastoïdo-humeral-^-<br />

Fig. 68. — Axe <strong>de</strong>s principaux musc<strong>le</strong>s <strong>de</strong> l'encolure.<br />

longer en <strong>le</strong> travaillant « en élongation » e t ceci <strong>de</strong> façon non<br />

pas momentanée, mais durab<strong>le</strong>. Autrement dit, la tonicité musculaire,<br />

c<strong>et</strong>te sorte <strong>de</strong> <strong>de</strong>mi-contraction qui rési<strong>de</strong> à l'état cons-


— 161 —<br />

tant dans <strong>le</strong> tissu musculaire est susceptib<strong>le</strong> <strong>de</strong> varier en plus<br />

ou en moins.<br />

Chez l'homme, par exemp<strong>le</strong>, qui travail<strong>le</strong> ses biceps en contraction,<br />

la position naturel<strong>le</strong> <strong>de</strong>s bras tombant librement <strong>le</strong><br />

long du corps se modifie, <strong>le</strong>s biceps <strong>de</strong>venant plus gros se raccourcissent,<br />

<strong>le</strong>s bras tombant sans rai<strong>de</strong>ur ne <strong>son</strong>t plus droits<br />

mais plus ou moins fléchis suivant l'intensité <strong>et</strong> la durée <strong>de</strong>s exercices<br />

faits, <strong>et</strong> si c<strong>et</strong> état <strong>de</strong>s biceps est maintenu par <strong>le</strong> travail,<br />

<strong>le</strong>s bras resteront fixés dans c<strong>et</strong>te nouvel<strong>le</strong> position qu'ils conserveront<br />

naturel<strong>le</strong>ment.<br />

Ceci est très apparent chez <strong>le</strong> forgeron dont <strong>le</strong> métier fait travail<strong>le</strong>r<br />

en contraction <strong>le</strong>s fléchisseurs du bras, <strong>son</strong> bras <strong>et</strong> ses<br />

doigts même restent en permanence dans un état <strong>de</strong> f<strong>le</strong>xion<br />

très accentué.<br />

Il est très possib<strong>le</strong> pour un homme doué d'un peu <strong>de</strong> volonté<br />

<strong>de</strong> modifier l'état d'une poitrine étroite <strong>et</strong> rentrée, d'un dos<br />

voûté, d'épau<strong>le</strong>s tombant en avant <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>le</strong>s placer <strong>de</strong> façon<br />

durab<strong>le</strong> dans une nouvel<strong>le</strong> position. Après un temps suffisant<br />

d'une gymnastique rationnel<strong>le</strong> qui fera travail<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s pectoraux<br />

en elongation <strong>et</strong> fixera <strong>le</strong>s omoplates en arrière en faisant travail<strong>le</strong>r<br />

<strong>le</strong>s dorsaux en contraction, <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s resteront re j<strong>et</strong>ées<br />

en arrière, la poitrine <strong>de</strong>meurera dégagée <strong>et</strong> bombée. Si c<strong>et</strong>te<br />

nouvel<strong>le</strong> position est bien confirmée par un travail assez long,<br />

quelques exercices <strong>de</strong> temps en temps suffiront pour la maintenir<br />

définitivement.<br />

Par <strong>de</strong>s procédés semblab<strong>le</strong>s, la position <strong>et</strong> la forme <strong>de</strong> l'encolure<br />

du <strong>cheval</strong> peuvent être modifiées comme cel<strong>le</strong>s <strong>de</strong>s bras<br />

ou <strong>de</strong>s épau<strong>le</strong>s <strong>de</strong> l'homme. L'encolure affaissée <strong>et</strong> renversée du<br />

<strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> à redresser prendra très vite c<strong>et</strong>te bonne position<br />

complètement re<strong>le</strong>vée dont nous connais<strong>son</strong>s la nécessité <strong>et</strong> <strong>le</strong>s<br />

bienfaits. C<strong>et</strong>te nouvel<strong>le</strong> position d'encolure, obtenue par une<br />

gymnastique rai<strong>son</strong>née <strong>de</strong> ses musc<strong>le</strong>s, se maintiendra non seu<strong>le</strong>ment<br />

pendant <strong>le</strong> travail, dans <strong>le</strong> rassemb<strong>le</strong>r, mais encore au<br />

repos, tout naturel<strong>le</strong>ment. La position libre, habituel<strong>le</strong>, <strong>de</strong> l'encolure<br />

sera modifiée par ce travail.<br />

Les photographies 69 <strong>et</strong> 70 représentent <strong>le</strong> même <strong>cheval</strong>, la<br />

<strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> 11


— 162 —<br />

première partie <strong>de</strong> <strong>son</strong> <strong>redressage</strong> étant terminée (sur <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s<br />

— défaut inverse) <strong>et</strong> à la fin <strong>de</strong> <strong>son</strong> <strong>redressage</strong>.<br />

Avant <strong>son</strong> <strong>redressage</strong> ce <strong>cheval</strong>, spécimen parfaitement achevé<br />

<strong>de</strong> la production <strong>de</strong>s instruments <strong>et</strong> <strong>de</strong> l'équitation arabe, avait<br />

l'encolure complètement effondrée, toutes <strong>le</strong>s caractéristiques<br />

<strong>et</strong> tous <strong>le</strong>s défauts du <strong>cheval</strong> acculé.<br />

Connaissant la position <strong>de</strong> l'encolure défectueuse du <strong>cheval</strong><br />

que nous voulons redresser <strong>et</strong> en nous servant du tab<strong>le</strong>au où<br />

<strong>son</strong>t représentés <strong>le</strong>s axes <strong>de</strong>s musc<strong>le</strong>s <strong>de</strong> la région cervica<strong>le</strong>,<br />

nous allons pouvoir déterminer <strong>le</strong>s musc<strong>le</strong>s qui <strong>de</strong>vront être travaillés<br />

« en c ontraction » <strong>et</strong> ceux qui <strong>de</strong>vront l'être « en élongation<br />

» pou r placer l'encolure dans une bonne position complètement<br />

re<strong>le</strong>vée.<br />

Dans <strong>le</strong>s schémas ci-<strong>de</strong>ssous, pour plus <strong>de</strong> clarté, nous ne représenterons<br />

que <strong>le</strong> splénius, l'angulaire <strong>de</strong> l'omoplate <strong>et</strong> <strong>le</strong> mastoïdo-huméral<br />

auxquels nous confierons <strong>le</strong>s fonctions <strong>de</strong> chefs<br />

<strong>de</strong> groupe musculaire.<br />

La composition <strong>de</strong> chaque groupe <strong>de</strong> ce gros peloton <strong>de</strong> musc<strong>le</strong>s<br />

peut être ainsi fixée :<br />

Splénius : Chef du groupe <strong>de</strong>s « ren verseurs » (r homboï<strong>de</strong>,<br />

grand <strong>et</strong> p<strong>et</strong>it comp<strong>le</strong>xus) ;<br />

Angulaire <strong>de</strong> Vomoplate ; Re<strong>le</strong>veur <strong>de</strong> la base <strong>de</strong> l'encolure;<br />

Mastoido-huméral : Chef du groupe <strong>de</strong>s fléchisseurs (sternomaxillaire,<br />

scalène, long du cou).<br />

Dans la position <strong>de</strong> l'encolure renversée (fig. 71), <strong>le</strong> groupe<br />

splénius (renverseurs) S, est contracté; l'angulaire <strong>de</strong> l'omoplate<br />

(re<strong>le</strong>veur <strong>de</strong> la base) A — <strong>et</strong> <strong>le</strong> groupe mastoïdo-huméral (fléchisseurs)<br />

M, <strong>son</strong>t élongés.<br />

Si nous voulons corriger c<strong>et</strong>te position défectueuse <strong>de</strong> l'encolure,<br />

il faudra travail<strong>le</strong>r <strong>le</strong> groupe splénius-renverseurs en<br />

élongation, l'angulaire re<strong>le</strong>veur <strong>de</strong> la base <strong>et</strong> <strong>le</strong> groupe mastoïdofléchisseurs<br />

en contraction.<br />

Et nous arrivons à la bonne position, complètement re<strong>le</strong>vée,<br />

<strong>de</strong> l'encolure représentée figure 72.<br />

Le groupe splénius élongé ne renversant plus l'encolure perm<strong>et</strong><br />

la voussure complète du rachis ; l'angulaire <strong>de</strong> l'omoplate,<br />

gros musc<strong>le</strong> très puissant, raccourci relève la base <strong>de</strong> l'encolure;


Photo 69. — Cheval <strong>barbe</strong> à la fin <strong>de</strong> la première partie <strong>de</strong> <strong>son</strong> <strong>redressage</strong><br />

(sur <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s, défaut inverse).<br />

Photo 70. — Le môme <strong>cheval</strong> à la fin <strong>de</strong> <strong>son</strong> <strong>redressage</strong>.


— 163 —<br />

îa contraction <strong>de</strong>s fléchisseurs qui vient compléter <strong>et</strong> accentuer<br />

<strong>le</strong>s résultats obtenus par la gymnastique <strong>de</strong>s musc<strong>le</strong>s supérieurs<br />

<strong>de</strong> l'encolure peut produire alors <strong>son</strong> maximum d'eff<strong>et</strong>.<br />

Fig. 71. — Schéma <strong>de</strong>s musc<strong>le</strong>s dans l'encolure renversée.<br />

Avant d'étudier comment nous pourrons faire travail<strong>le</strong>r chacun<br />

<strong>de</strong> ces musc<strong>le</strong>s dans <strong>le</strong> sens voulu, il est nécessaire <strong>de</strong> fixer<br />

l'ordre dans <strong>le</strong>quel ces musc<strong>le</strong>s <strong>de</strong>vront être travaillés. Je trouve<br />

Z<br />

Fig. 72. — Schéma <strong>de</strong>s musc<strong>le</strong>s d'une encolure bien placée.<br />

rai<strong>son</strong>nab<strong>le</strong> <strong>de</strong> lutter d'abord par l'élongation contre la contraction<br />

<strong>de</strong>s musc<strong>le</strong>s qui <strong>de</strong>vraient être soup<strong>le</strong>s <strong>et</strong> élongés; <strong>de</strong> commencer<br />

par détruire ces contractions avant d'en provoquer d'autres<br />

antagonistes; d'allonger, d'assouplir d'abord <strong>le</strong>s musc<strong>le</strong>s


— 164 —<br />

supérieurs pour perm<strong>et</strong>tre <strong>le</strong> placement <strong>le</strong> plus favorab<strong>le</strong> <strong>de</strong>s<br />

musc<strong>le</strong>s <strong>de</strong> la région inférieure qui doivent être travaillés en<br />

contraction.<br />

Nous diviserons notre travail <strong>de</strong> relèvement comp<strong>le</strong>t <strong>de</strong> l'encolure<br />

en 3 phases. :<br />

1° Travail en élongation du groupe splénius (renverseurs) ;<br />

2° Travail en contraction <strong>de</strong> l'angulaire <strong>de</strong> l'omoplate;<br />

3° Travail en contraction du groupe mastoïdo-fléchisseurs.<br />

l re Phase. — Travail en élongation du groupe splénius. — Nous<br />

ferons travail<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s renverseurs en élongation par <strong>de</strong>s <strong>de</strong>scentes<br />

d'encolure; dans ces mouvements, en eff<strong>et</strong>, splénius rhomboï<strong>de</strong>s<br />

<strong>et</strong> compléxus s'étirent.<br />

Les <strong>de</strong>scentes d'encolure <strong>de</strong>vront être très fréquentes <strong>de</strong> façon<br />

à constituer une véritab<strong>le</strong> gymnastique. Il faudra <strong>le</strong>s obtenir aussi<br />

franches, aussi complètes, aussi « poussées à fond » que possib<strong>le</strong><br />

<strong>et</strong> ne passer à la <strong>de</strong>uxième phase du relèvement <strong>de</strong> Vencolure que<br />

lorsque ces exercices seront parfaitement exécutés ; <strong>le</strong>s résultats<br />

futurs n'en seront que mieux confirmés <strong>et</strong> plus rapi<strong>de</strong>ment<br />

atteints.<br />

Ces <strong>de</strong>scentes d'encolure trouveront heureusement <strong>le</strong>ur place<br />

au début du <strong>redressage</strong>, dans la mise en confiance <strong>et</strong> au moment<br />

où il faut m<strong>et</strong>tre <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> sur <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s. El<strong>le</strong>s produiront non<br />

seu<strong>le</strong>ment la confiance dans la main, la recherche du mors <strong>et</strong><br />

<strong>de</strong> l'appui, mais el<strong>le</strong>s auront aussi pour eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> ramener du poids<br />

sur <strong>le</strong> <strong>de</strong>vant.<br />

Les <strong>de</strong>scentes d'encolure ne peuvent être nuisib<strong>le</strong>s que si el<strong>le</strong>s<br />

<strong>son</strong>t mal exécutées. Il importe donc qu'el<strong>le</strong>s soient bien faites.<br />

El<strong>le</strong>s doivent être provoquées par une pression <strong>de</strong>s jambes <strong>et</strong><br />

s'accompagner par conséquent d'un allongement d'allure. El<strong>le</strong>s<br />

seront régularisées ensuite par <strong>le</strong> moyen <strong>de</strong>s doigts qui, en se<br />

serrant ou en laissant fi<strong>le</strong>r plus ou moins <strong>le</strong>s rênes, rég<strong>le</strong>ront la<br />

<strong>de</strong>scente <strong>et</strong> el<strong>le</strong>s conduiront ainsi tout naturel<strong>le</strong>ment au ramener<br />

<strong>et</strong> aux f<strong>le</strong>xions <strong>le</strong>s « lois sacro-saintes <strong>de</strong> l'impulsion » éta nt<br />

respectées. L'encolure ne <strong>de</strong>vra s'étendre que sur avis favorab<strong>le</strong><br />

accordé par un <strong>de</strong>sserrement moel<strong>le</strong>ux <strong>de</strong>s doigts, l'impulsion


— 165 —<br />

venant, en quelque sorte, <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à la main la permission <strong>de</strong><br />

passer.<br />

Si el<strong>le</strong>s <strong>son</strong>t bien apprises <strong>et</strong> récompensées, <strong>le</strong>s <strong>de</strong>scentes d'encolure,<br />

timi<strong>de</strong>s, hésitantes au début <strong>de</strong>viendront vite complètes<br />

<strong>et</strong> franches. Quand <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> aura été exercé au ramener par ce<br />

moyen, <strong>le</strong> cavalier sera maître absolu du centre <strong>de</strong> gravité, c'està-dire<br />

<strong>de</strong> l'équilibre, car il pourra à <strong>son</strong> gré envoyer du poids<br />

sur <strong>le</strong> <strong>de</strong>vant ou en rej<strong>et</strong>er en arrière.<br />

J'attache une importance considérab<strong>le</strong> aux <strong>de</strong>scentes d'encolure<br />

surtout dans <strong>le</strong> cas spécial <strong>de</strong> <strong>redressage</strong> qui nous occupe.<br />

Le capitaine <strong>de</strong> Saint-Phal<strong>le</strong>, grand partisan <strong>de</strong>s <strong>de</strong>scentes<br />

d'encolure bien faites, expose clairement <strong>le</strong>s dangers consécutifs<br />

à une compréhension ou à une exécution mauvaises :<br />

« Nous ve nons <strong>de</strong> voir comment, par <strong>le</strong> ramener, on fait jouer<br />

l'encolure au garrot, <strong>de</strong> bas en haut, pour charger <strong>et</strong> engager<br />

l'arrière-main.<br />

« Il e st nécessaire aussi <strong>de</strong> la faire jouer <strong>de</strong> haut en bas pour<br />

avancer <strong>le</strong> centre <strong>de</strong> gravité <strong>et</strong> décharger <strong>le</strong>s propulseurs.<br />

« On y arrive par la <strong>de</strong>scente d'encolure <strong>et</strong>c... J'estime qu'el<strong>le</strong><br />

doit être fréquemment <strong>de</strong>mandée, à titre d'exertiice, d'une manière<br />

beaucoup plus prononcée.<br />

« Des hi ppiatres croient qu'il est inuti<strong>le</strong> <strong>et</strong> nuisib<strong>le</strong> <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r<br />

au <strong>cheval</strong> l'abaissement comp<strong>le</strong>t <strong>de</strong> l'encolure; c'est lui<br />

apprendre, au dire <strong>de</strong> l'un d'eux, « l'art <strong>de</strong> préparer <strong>le</strong> couronnement<br />

».<br />

« Ce danger ne serait réel que si la <strong>de</strong>scente d'encolure en était<br />

raffaissement. C'est ainsi qu'el<strong>le</strong> a été comprise, il est vrai, par<br />

bien <strong>de</strong>s écuyers. El<strong>le</strong> serait alors, en eff<strong>et</strong>, un mouvement défectueux,<br />

nuisib<strong>le</strong> même, car qui dit affaissement dit affa<strong>le</strong>ment,<br />

abandon <strong>de</strong> toute énergie. Mais tel<strong>le</strong> n'est pas la <strong>de</strong>scente d'encolure<br />

; El<strong>le</strong> ne comporte pas l'affaissement <strong>de</strong> l'encolure <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />

la tête abandonnées par <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> à l'entraînement <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs<br />

poids; el<strong>le</strong> est <strong>le</strong>ur abaissement par une dépense d'énergie appliquée<br />

aux extenseurs pour ramener l'encolure à sa position la<br />

plus basse. Ce n'est qu'une fois que la <strong>de</strong>scente d'encolure est<br />

terminée, que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> peut profiter, pour se m<strong>et</strong>tre au repos,<br />

<strong>de</strong> la posture dans laquel<strong>le</strong> on l'a mis.


— 166 —<br />

« Ainsi comprise, el<strong>le</strong> n'est donc pas un acte <strong>de</strong> mol<strong>le</strong>sse,,<br />

mais une manifestation d'énergie, à laquel<strong>le</strong> il est uti<strong>le</strong> d'avoir souvent<br />

recours.<br />

« La <strong>de</strong>scente d'encolure est, en eff<strong>et</strong>, une excel<strong>le</strong>nte manière<br />

d'entr<strong>et</strong>enir l'impulsion en habituant la bouche à poursuivre <strong>le</strong><br />

mors <strong>et</strong> à en chercher <strong>le</strong> contact sous l'action <strong>de</strong>s jambes. Ce<br />

résultat suffirait à lui seul pour recomman<strong>de</strong>r l'emploi fréquent<br />

<strong>de</strong> c<strong>et</strong> exercice.<br />

« Pour obtenir la <strong>de</strong>scente d'encolure complète, il faut marquer<br />

un peu plus énergiquement l'action <strong>de</strong>s jambes, afin d'augmenter<br />

l'impulsion <strong>et</strong> <strong>de</strong>sserrer <strong>le</strong>s doigts pour perm<strong>et</strong>tre l'extension<br />

<strong>de</strong> l'encolure.<br />

« Si <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> est dans l'impulsion <strong>et</strong> pour l'y maintenir, cemouvement<br />

doit être accompagné d'une accélération d'allure.<br />

Et Saint-Phal<strong>le</strong> insiste longuement sur c<strong>et</strong>te nécessité <strong>de</strong> l'accélération<br />

d'allure :<br />

« Autant l'impulsion peut être développée par la <strong>de</strong>scente<br />

d'encolure avec accélération d'allure, autant el<strong>le</strong> peut être atrophiée<br />

par la <strong>de</strong>scente <strong>de</strong> main, qui est <strong>le</strong> mouvement inverse.<br />

C<strong>et</strong> exercice, fort préconisé par La Guérinière <strong>et</strong> par Baucher<br />

qui s'en servait beaucoup, s'exécute en principe <strong>de</strong> la manière<br />

suivante : <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> étant dans <strong>le</strong> ramener, bien engagé <strong>et</strong> à une<br />

certaine allure, <strong>le</strong> cavalier laisse <strong>le</strong>s rênes se détendre complètement<br />

<strong>et</strong> m<strong>et</strong> ainsi <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> dans <strong>le</strong> vi<strong>de</strong>, sans qu'il doive changer<br />

ni sa position ni <strong>son</strong> allure. Un pareil <strong>cheval</strong> n'a plus rien<br />

à apprendre pour être complètement rétif. Il n'y a qu'à prier<br />

<strong>le</strong> ciel <strong>de</strong> ne lui envoyer aucune mauvaise pensée. Si, en eff<strong>et</strong>,<br />

on lui enseigne à se renfermer <strong>de</strong> lui-même au point que, sans<br />

rênes, il reste assis sur <strong>le</strong>s hanches, on lui enseigne du même<br />

coup la position la plus favorab<strong>le</strong> dans laquel<strong>le</strong> il puisse se m<strong>et</strong>tre<br />

pour refuser <strong>le</strong> mouvement en avant; c'est cel<strong>le</strong>, d'ail<strong>le</strong>urs,<br />

que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> rétif prend naturel<strong>le</strong>ment quand il ne veut pas<br />

avancer. En dressant àia <strong>de</strong>scente <strong>de</strong> main, <strong>le</strong> cavalier donne donc<br />

lui-même au <strong>cheval</strong> la meil<strong>le</strong>ure arme dont il puisse se servir <strong>et</strong>,<br />

qui plus est, la lui rend familière.<br />

« Si au lieu <strong>de</strong> comm<strong>et</strong>tre une semblab<strong>le</strong> impru<strong>de</strong>nce, on habitue<br />

<strong>le</strong> <strong>cheval</strong> par <strong>de</strong>s exercices fréquents à toujours allonger <strong>son</strong>


— 167 —<br />

allure dès que <strong>le</strong>s jambes agissent <strong>et</strong> que <strong>le</strong>s doigts <strong>le</strong> lui perm<strong>et</strong>tent,<br />

nous pourrons obtenir c<strong>et</strong> eff<strong>et</strong> lorsque nous <strong>le</strong> voudrons<br />

<strong>et</strong> par conséquent, nous pourrons toujours avoir notre <strong>cheval</strong><br />

sur la main <strong>et</strong> en être maîtres. C'est précisément <strong>le</strong> résultat <strong>de</strong><br />

la <strong>de</strong>scente d'encolure tel<strong>le</strong> que je la préconise, <strong>et</strong>c...<br />


— 168 —<br />

Il ne faut pas croire que ce mouvement a pour eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> confirmer<br />

<strong>le</strong> défaut du <strong>cheval</strong> portant au vent <strong>et</strong> renversant <strong>son</strong><br />

encolure, bien au contraire <strong>et</strong> plus ce défaut est accusé, plus c<strong>et</strong><br />

exercice est uti<strong>le</strong>. Le <strong>cheval</strong> qui porte au vent renverse <strong>son</strong> encolure<br />

pour rej<strong>et</strong>er du poids en avant, alors que dans <strong>le</strong> recu<strong>le</strong>r la<br />

tête haute il a besoin, pour pouvoir recu<strong>le</strong>r, <strong>de</strong> déplacer du poids<br />

en arrière du centre <strong>de</strong> gravité. Si <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> ainsi maintenu <strong>le</strong><br />

nez à hauteur <strong>de</strong>s oreil<strong>le</strong>s portait la tête seu<strong>le</strong> en arrière, un eff<strong>et</strong><br />

<strong>de</strong> bascu<strong>le</strong> pousserait en avant la « ce inture » beaucoup plus<br />

lour<strong>de</strong>; <strong>le</strong> poids resterait en avant, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> s'immobiliserait,<br />

mais ne recu<strong>le</strong>rait pas; il ne lui est possib<strong>le</strong> <strong>de</strong> recu<strong>le</strong>r qu'après<br />

r<strong>et</strong>rait vers Varrière <strong>de</strong> la base <strong>de</strong> <strong>son</strong> encolure (contraction cherchée<br />

<strong>de</strong>s angulaires).<br />

Il est faci<strong>le</strong> <strong>de</strong> se rendre compte qu'un <strong>cheval</strong> que l'on force<br />

à recu<strong>le</strong>r, <strong>le</strong> nez à hauteur <strong>de</strong>s oreil<strong>le</strong>s, ne renverse pas <strong>son</strong> encolure,<br />

n'affaisse pas la base <strong>de</strong> <strong>son</strong> encolure, mais au contraire<br />

qu'il la relève. Le bord inférieur, convexe lorsque <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

renverse l'encolure, <strong>de</strong>meure droit pendant <strong>le</strong> recu<strong>le</strong>r <strong>le</strong> nez à<br />

hauteur <strong>de</strong>s oreil<strong>le</strong>s.<br />

L'encolure renversée est une position <strong>de</strong> défense ; aussi faudra-t-il<br />

agir, dans c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>uxième phase, avec tact, modération<br />

<strong>et</strong> progressivité pour éviter <strong>de</strong> provoquer une dou<strong>le</strong>ur dans <strong>le</strong>s<br />

jarr<strong>et</strong>s qui pourrait inciter <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> à se défendre ; cherchant<br />

alors à maintenir du poids sur <strong>le</strong> <strong>de</strong>vant malgré la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> du<br />

cavalier, il pourrait être amené à renverser <strong>son</strong> encolure.<br />

Le but <strong>de</strong> ces exercices étant <strong>de</strong> faire travail<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s angulaires<br />

en contraction, on <strong>de</strong>vra <strong>le</strong>ur donner <strong>le</strong> caractère d'une véritab<strong>le</strong><br />

gymnastique ; il faudra procé<strong>de</strong>r par répétition fréquente <strong>de</strong> ce<br />

mouvement au lieu <strong>de</strong> chercher à provoquer une très gran<strong>de</strong><br />

intensité <strong>de</strong> contraction.<br />

Non seu<strong>le</strong>ment ce recu<strong>le</strong>r <strong>le</strong> nez à hauteur <strong>de</strong>s oreil<strong>le</strong>s fait<br />

travail<strong>le</strong>r en contraction l'angulaire <strong>de</strong> l'omoplate <strong>et</strong> produit<br />

ainsi <strong>le</strong> relèvement <strong>de</strong> la base <strong>de</strong> l'encolure, mais encore il influe<br />

très à propos sur <strong>le</strong>s aplombs <strong>de</strong>s membres antérieurs (ouverture<br />

<strong>de</strong> l'ang<strong>le</strong> scapulo-huméral) <strong>et</strong> sur l'engagement <strong>de</strong>s postérieurs<br />

(ferm<strong>et</strong>ure <strong>de</strong> l'ang<strong>le</strong> coxo-fémoral).<br />

Nous savons que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> acculé à redresser est sous


— 169 —<br />

lui du <strong>de</strong>vant. Le recu<strong>le</strong>r l'encolure re<strong>le</strong>vée <strong>le</strong> nez à hauteur<br />

<strong>de</strong>s oreil<strong>le</strong>s tendra à ramener <strong>le</strong>s membres antérieurs sur <strong>le</strong>ur<br />

ligne d'aplomb.<br />

Ce mouvement en eff<strong>et</strong>, fait travail<strong>le</strong>r en contraction mastoïdo-huméral<br />

<strong>et</strong> portion cervica<strong>le</strong> du trapèze. Le mastoïdohuméral<br />

ai<strong>de</strong> au transport du corps en arrière en tirant en<br />

arrière la tête <strong>et</strong> <strong>le</strong>s vertèbres cervica<strong>le</strong>s si <strong>le</strong> point fixe du musc<strong>le</strong><br />

est au membre, ou tire l'humérus en avant faisant tourner <strong>le</strong><br />

membre autour du centre 0 si <strong>le</strong> point fixe est supérieur {fig. 73).<br />

Fig, 73. — Rô<strong>le</strong> du masloïdohuméral (M) <strong>et</strong> du trapèze (Z) dans <strong>le</strong> recu<strong>le</strong>r.<br />

La portion cervica<strong>le</strong> du trapèze se contractant, attire en haut<br />

<strong>et</strong> en avant la partie inférieure du scapulum (fig. 73). L'ang<strong>le</strong><br />

humerai s'ouvre <strong>et</strong> <strong>le</strong>s antérieurs reviennent à <strong>le</strong>ur place norma<strong>le</strong>.<br />

Ils s'y maintiendront tout naturel<strong>le</strong>ment quand une gymnastique<br />

suffisante aura donné à l'encolure une bonne position<br />

re<strong>le</strong>vée à partir <strong>de</strong> sa base.<br />

« Ce mouvement (<strong>le</strong> recu<strong>le</strong>r la tête haute) dit Boisgilbert,<br />

contribue déjà au relèvement <strong>de</strong> l'encolure sans que l'arrièremain<br />

per<strong>de</strong> <strong>de</strong> sa puissance d'impulsion, <strong>le</strong> recu<strong>le</strong>r ne pourrait<br />

avoir d'inconvénients que si <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>le</strong> transformait en résistance,<br />

la tête basse, la colonne vertébra<strong>le</strong> contractée en arc <strong>de</strong><br />

cerc<strong>le</strong>, ce qui ne peut se produire avec l'élévation sur <strong>le</strong> fi<strong>le</strong>t. Il<br />

est à remarquer que ce genre <strong>de</strong> recu<strong>le</strong>r qui se borne à <strong>de</strong>ux ou<br />

trois pas en arrière, ne dispose nul<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> à se r<strong>et</strong>enir,


— 170 —<br />

ou à s'accu<strong>le</strong>r, il produit l'eff<strong>et</strong> contraire. Ne voit-on pas souvent<br />

<strong>de</strong>s chevaux qui recu<strong>le</strong>nt par suite <strong>de</strong> rétivité baisser la<br />

tête pour se livrer à c<strong>et</strong>te défense ».<br />

C<strong>et</strong> exercice aura en outre pour eff<strong>et</strong> d'engager l'arrièremain<br />

<strong>et</strong> d'augmenter l'impulsion <strong>de</strong>s hanches dont <strong>le</strong> mécanisme<br />

rési<strong>de</strong> dans <strong>le</strong> jeu <strong>de</strong> l'articulation coxo-fémora<strong>le</strong>. En forçant<br />

c<strong>et</strong>te articulation à se fermer, il produira l'engagement <strong>de</strong>s jarr<strong>et</strong>s<br />

sous la masse « au lieu <strong>de</strong> trouver dans l'abaissement <strong>de</strong>s<br />

hanches la cause <strong>de</strong> l'élévation <strong>de</strong> l'encolure — dit Saint-Phal<strong>le</strong>,<br />

— je pense qu'en rai<strong>son</strong> <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong> l'impulsion c'est, au contraire,<br />

dans l'élévation <strong>de</strong> l'encolure qu'il faut prendre <strong>le</strong>s causes<br />

<strong>de</strong> l'engagement <strong>de</strong>s postérieurs se manifestant par l'abaissement<br />

<strong>de</strong>s hanches. » Au trement dit, se manifestant par la ferm<strong>et</strong>ure<br />

<strong>de</strong> l'ang<strong>le</strong> coxo-fémoral.<br />

C<strong>et</strong>te <strong>de</strong>uxième phase du travail <strong>de</strong> relèvement comp<strong>le</strong>t <strong>de</strong><br />

l'encolure (relèvement <strong>de</strong> la base par contraction <strong>de</strong> l'angulaire<br />

<strong>de</strong> l'omoplate), prendra place dans la <strong>de</strong>uxième partie du <strong>redressage</strong><br />

au moment où il faut provoquer « <strong>le</strong> nouvel équilibre nécessaire<br />

à cause du poids du cavalier », a près que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> acculé<br />

aura pris franchement <strong>le</strong> « défa ut inverse », r elèvement <strong>de</strong> l'encolure<br />

<strong>et</strong> engagement <strong>de</strong>s postérieurs <strong>de</strong>vant obligatoirement<br />

marcher <strong>de</strong> pair.<br />

Il est à remarquer que c<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong> anatomique <strong>de</strong> l'encolure<br />

nous amène aux moyens employés par Baucher. Il paraît cependant<br />

à peu près certain que Bauchër était arrivé à préconiser<br />

ce recu<strong>le</strong>r en empruntant une tout autre voie <strong>et</strong> qu'il en attendait<br />

aussi d'autres eff<strong>et</strong>s. Je crois que Baucher <strong>le</strong> pratiquait,<br />

non pas avec l'idée prépondérante <strong>de</strong> re<strong>le</strong>ver l'encolure <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />

travail<strong>le</strong>r certains musc<strong>le</strong>s en contraction, mais surtout pour<br />

détruire <strong>le</strong>s résistances du <strong>cheval</strong>, avoir sur lui un puissant moyen<br />

<strong>de</strong> domination <strong>et</strong> pour se rendre maître absolu <strong>de</strong> l'impulsion,<br />

avant <strong>de</strong> l'exploiter.<br />

3 e Phase. — Travail en contraction <strong>de</strong>s fléchisseurs <strong>de</strong> Vencolure<br />

(mastoïdo-huméral-sterno-maxillaire-scalène, long du cou).<br />

— L'encolure, à présent, est bien disposée pour supporter ce<br />

nouveau travail, la base est re<strong>le</strong>vée <strong>et</strong> soutenue ferme par <strong>le</strong>s


— 171 —<br />

gros <strong>et</strong> puissants angulaires <strong>de</strong> l'omoplate dont la tonicité a<br />

été augmentée, il ne reste plus qu'à fléchir la partie antérieure <strong>de</strong><br />

la tige cervica<strong>le</strong> sur c<strong>et</strong>te base soli<strong>de</strong> <strong>et</strong> bien dirigée, nous y arriverons<br />

en travaillant en contraction <strong>le</strong>s fléchisseurs.<br />

Dans c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière phase du relèvement <strong>de</strong> l'encolure, la<br />

f<strong>le</strong>xion du rachis sera recherchée en même temps que cel<strong>le</strong> <strong>de</strong><br />

l'articulation atloido-occipitalè.<br />

C'est par <strong>le</strong> ramener « sans <strong>le</strong>quel il n'y a pas <strong>de</strong> domination<br />

possib<strong>le</strong> <strong>de</strong> la part du cavalier », pa r l'engagement <strong>de</strong>s propulseurs,<br />

par <strong>le</strong> moyen <strong>de</strong>s jambes qui enverront Vimpulsion sur une<br />

main fixe, que nous procé<strong>de</strong>rons. Il est indispensab<strong>le</strong> <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r<br />

<strong>le</strong> ramener <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te façon avec tous <strong>le</strong>s chevaux <strong>et</strong> a fortiori<br />

avec <strong>le</strong>s <strong>barbe</strong>s chez <strong>le</strong>squels l'accu<strong>le</strong>ment se trouve à l'état<br />

endémique.<br />

Une comparai<strong>son</strong> très juste faite <strong>de</strong>puis longtemps — cel<strong>le</strong><br />

<strong>de</strong> l'encolure avec un f<strong>le</strong>ur<strong>et</strong> — donne une idée très exacte <strong>de</strong><br />

la conception que l'on doit avoir du ramener. Quand la main<br />

pousse <strong>le</strong> f<strong>le</strong>ur<strong>et</strong> contre un mur, la lame se vousse <strong>et</strong> plus pousse<br />

la main, plus la lame fléchit. Il en est exactement <strong>de</strong> même pour<br />

l'encolure si nous remplaçons la main qui pousse <strong>le</strong> f<strong>le</strong>ur<strong>et</strong> en<br />

avant par la jambe qui communique l'impulsion au <strong>cheval</strong> <strong>et</strong><br />

<strong>le</strong> mur par <strong>le</strong> mors rendu fixe par une main fixe. L'impulsion<br />

provoquée par <strong>le</strong>s jambes venant buter contre la main fixe, fera<br />

se vousser l'encolure; la jambe qui pousse rég<strong>le</strong>ra l'impulsion.<br />

« Prise entre <strong>le</strong>s propulseurs qui la poussent <strong>et</strong> <strong>le</strong> mors qui l'empêche<br />

<strong>de</strong> s'allonger — écrit Saint-Phal<strong>le</strong> — la colonne vertébra<strong>le</strong><br />

fléchit dans ses articulations.<br />

Ici surtout, il faudra beaucoup emprunter à l'équitation vraiment<br />

impulsive que per<strong>son</strong>nifie Saint-Phal<strong>le</strong> si l'on ne veut<br />

s'exposer à « ra ter » <strong>le</strong> <strong>redressage</strong> du <strong>cheval</strong>.<br />

« I l ne faut pas, écrit Saint-Phal<strong>le</strong>, que ce soit <strong>le</strong> mors qui<br />

vienne sur <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>, mais au contraire que ce soit <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> qui<br />

soit envoyé sur <strong>le</strong> mors. Je considère <strong>le</strong> ramener, écrit-il plus<br />

loin, comme ayant une importance considérab<strong>le</strong>, parce que c'est<br />

lui qui, en é<strong>le</strong>vant l'encolure, produit l'engagement <strong>de</strong>s postérieurs,<br />

engagement qui ne peut d'ail<strong>le</strong>urs être produit d'aucune<br />

autre façon si <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> est dans l'impulsion.


— 172 —<br />

« Engager l'arrière-main consiste, en eff<strong>et</strong>, à ramener <strong>le</strong> centre<br />

<strong>de</strong> gravité au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong>s points d'appui <strong>de</strong>s postérieurs ou à <strong>le</strong><br />

rapprocher <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te position. Nous pouvons essayer d'y arrver,<br />

soit par <strong>le</strong>s rênes seu<strong>le</strong>s, soit par <strong>le</strong>s jambes seu<strong>le</strong>s, soit par l'entente<br />

<strong>de</strong>s mains <strong>et</strong> <strong>de</strong>s jambes. Examinons ces divers procédés.<br />

« Si l'on veut engager ]'arrière-main par <strong>le</strong>s rênes seu<strong>le</strong>s, il<br />

faut forcément qu'el<strong>le</strong>s agissent par traction ; or, nous savons<br />

à quels inconvénients <strong>et</strong> à quel<strong>le</strong>s résistances cela nous expose.<br />

C<strong>et</strong>te manière <strong>de</strong> faire doit être formel<strong>le</strong>ment réprouvée ».<br />

; Si <strong>le</strong>s rênes agissent en eiï<strong>et</strong> par traction, el<strong>le</strong>s s'attaquent<br />

directement au poids <strong>de</strong> la masse, <strong>le</strong> cavalier est vaincu d'avance<br />

dans c<strong>et</strong>te lutte, ceci se conçoit aisément.<br />

« Le <strong>de</strong>uxième procédé n'est pas meil<strong>le</strong>ur, parce qu'il exigerait<br />

que <strong>le</strong>s jambes agissant à l'exclusion <strong>de</strong>s mains, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

s'assit sur <strong>le</strong>s hanches; c'est l'inverse <strong>de</strong> ce qui se passe s'il est<br />

dans l'impulsion ainsi que nous l'avons vu précé<strong>de</strong>mment.<br />

A toute action <strong>de</strong> jambe, en eff<strong>et</strong>, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> doit comprendre :<br />

en avant, sinon on est sur <strong>le</strong> seuil <strong>de</strong> la rétivité.<br />

« Pou r obtenir l'engagement <strong>de</strong>s postérieurs il ne reste donc<br />

quv <strong>le</strong> troisième procédé, qui consiste dans une action combinée<br />

<strong>de</strong>s rênes <strong>et</strong> <strong>de</strong>s jambes. Or, pour arriver à engager l'arrièremain<br />

<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te façon <strong>et</strong> sans tirer sur <strong>le</strong>s rênes, il n'y a qu'une<br />

métho<strong>de</strong> possib<strong>le</strong>; <strong>son</strong> application se décompose <strong>de</strong> la manière<br />

suivante .<br />

1° Action <strong>de</strong>s jambes à laquel<strong>le</strong> <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> répond par un essai<br />

d'accélération <strong>de</strong> vitesse <strong>et</strong> d'extension d'encolure.<br />

2° Arrêt <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te extension par la résistance <strong>de</strong>s doigts <strong>et</strong><br />

r<strong>et</strong>rait <strong>de</strong> la main, s'il y a lieu, pour suivre la mâchoire dans la<br />

f<strong>le</strong>xion, d'où l'élévation d'encolure;<br />

3° Gomme conséquence, recul du centre <strong>de</strong> gravité <strong>et</strong> engagement<br />

<strong>de</strong> F arrière-main.<br />

« On voit par là que c<strong>et</strong> engagement est la conséquence <strong>de</strong> l'élévation<br />

<strong>de</strong> l'encolure ou ramener, ou, autrement dit, que c'est<br />

<strong>le</strong> ramener par impulsion qui produit l'engagement <strong>de</strong> l'arrièremain.<br />

v( Aussi, au lieu <strong>de</strong> trouver dans l'abaissement <strong>de</strong>s hanches la<br />

cause <strong>de</strong> l'élévation <strong>de</strong> l'encolure, je pense qu'en rai<strong>son</strong> <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s


— 173 —<br />

<strong>de</strong> l'impulsion, c'est, au contraire, dans l'élévation <strong>de</strong> l'encolure<br />

qu'il faut prendre <strong>le</strong>s causes <strong>de</strong> l'engagement <strong>de</strong>s postérieurs<br />

se manifestant par l'abaissement <strong>de</strong>s hanches.<br />

« C<strong>et</strong>te explication prouve suffisamment l'importance <strong>et</strong><br />

la nécessité d'y exercer <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> avec soin, si l'on est soucieux<br />

<strong>de</strong> rester en concordance avec <strong>le</strong>s lois <strong>de</strong> l'impulsion. »<br />

§ 3. Réf<strong>le</strong>xions sur Vart équestre.<br />

Avec MM. Gustave Le Bon <strong>et</strong> L. <strong>de</strong> Sévy, je pense que l'équitation<br />

<strong>et</strong> la connaissance du <strong>cheval</strong> <strong>son</strong>t susceptib<strong>le</strong>s encore <strong>de</strong><br />

beaucoup <strong>de</strong> progrès si ceux-ci <strong>son</strong>t poursuivis dans <strong>le</strong> domaine<br />

scientifique.<br />

« L'équitation n'est pas une science, c'est un art » en tend-on<br />

affirmer souvent; c<strong>et</strong>te phrase enseignée se propage, se redit <strong>et</strong><br />

<strong>de</strong>vient, multipliant ses exemplaires, une vérité absolue, un dogme<br />

inattaquab<strong>le</strong>. Nombreux <strong>son</strong>t ceux qui ne tentent pas <strong>de</strong> franchir<br />

c<strong>et</strong>te barrière peu engageante faite <strong>de</strong> mots à pic que l'on vient<br />

<strong>le</strong>ur planter <strong>de</strong>vant <strong>le</strong> nez.<br />

« L'équitation n'est pas une science, c'est un art. » ,c<br />

Les fruits d'une semblab<strong>le</strong> conception? Pas <strong>de</strong> chercheurs,<br />

<strong>de</strong> rai<strong>son</strong>neurs pourvus d'esprit scientifique.<br />

Je pense que l'on oppose à tort ces <strong>de</strong>ux mots : science <strong>et</strong> art;<br />

c'est d'accord qu'ils <strong>de</strong>vraient marcher <strong>et</strong> la main dans la main;<br />

l'équitation, n'est-ce pas un art scientifique?<br />

A chaque science principa<strong>le</strong> se rattache un ou plusieurs arts<br />

scientifiques; à la géologie, la métallurgie, l'art du lapidaire; à<br />

la physique, l'optique, l'acoustique; à la zoologie, la mé<strong>de</strong>cine,<br />

l'art vétérinaire, <strong>et</strong>c. L'équitation, comme <strong>le</strong>s autres arts scientifiques,<br />

n'est autre chose que <strong>le</strong>s sciences appliquées; el<strong>le</strong> a pour<br />

obj<strong>et</strong> principal l'application <strong>de</strong>là mécanique, <strong>de</strong> la zoologie, <strong>de</strong><br />

la psychologie. L'art ici, est l'application <strong>de</strong>s connaissances<br />

acquises; c<strong>et</strong>te conception <strong>de</strong> l'art dans <strong>le</strong>s arts scientifiques,<br />

faisait justement dire à d'A<strong>le</strong>mbert que « l'art s'acquiert par<br />

l'étu<strong>de</strong> <strong>et</strong> l'exercice ».<br />

Rendons à César, ce qui est à César <strong>et</strong> à ce don que l'on attri-


— 174 —<br />

hue aux maîtres en equitation, <strong>son</strong> nom véritab<strong>le</strong> : l'habi<strong>le</strong>té.<br />

Et c<strong>et</strong>te habi<strong>le</strong>té doit tendre même à se réduire <strong>de</strong> plus en plus<br />

en théorie. Une gran<strong>de</strong> part d'habi<strong>le</strong>té existera toujours, certes,<br />

en equitation, mais ce ne sera jamais qu'en faisant tache d'hui<strong>le</strong><br />

dans <strong>le</strong> domaine scientifique que l'équitation pourra progresser.<br />

Le docteur Gustave Le Bon écrit à ce propos : « L' habi<strong>le</strong>té<br />

en équitation est certainement quelque chose, mais l'emploi<br />

méthodique <strong>de</strong> principes sûrs, conduit parfois à <strong>de</strong>s résultats<br />

supérieurs ».<br />

« Si, éc rit L. <strong>de</strong> Sévy dans une Revue <strong>de</strong> Cava<strong>le</strong>rie, comme <strong>le</strong><br />

fait justement remarquer <strong>le</strong> général L'Hotte, <strong>le</strong>s plus grands<br />

maîtres <strong>de</strong> l'équitation ont formé peu d'élèves, la faute, il faut<br />

<strong>le</strong> reconnaître, ne vient pas seu<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>rniers. Particulièrement<br />

favorisés par <strong>le</strong>s dons <strong>de</strong> la nature, <strong>le</strong>s virtuoses <strong>de</strong><br />

l'équitation ne semb<strong>le</strong>nt pas avoir cherché à rai<strong>son</strong>ner <strong>le</strong>ur art.<br />

Ils ont systématiquement repoussé la tentation <strong>de</strong> l'analyser,<br />

craignant <strong>de</strong> déflorer <strong>le</strong>ur idéal en <strong>le</strong> soum<strong>et</strong>tant à une analyse<br />

trop précise <strong>et</strong> rigoureuse. Leur instinct, si sûr, <strong>le</strong>ur faisait pressentir<br />

d'ail<strong>le</strong>urs que la perfection <strong>de</strong> l'acte réf<strong>le</strong>xe n'avait rien<br />

à gagner d'une tel<strong>le</strong> investigation. Plus épris d'idéal que d'apostoJ<br />

' ils ont peut-être mis quelque hâte à proclamer que « la<br />

note d'art ne peut se m<strong>et</strong>tre en formu<strong>le</strong> ». Il reste à fixer <strong>le</strong>s<br />

limites <strong>de</strong> c<strong>et</strong> art insaisissab<strong>le</strong> par l'analyse rebel<strong>le</strong> à tout enseignement<br />

».<br />

« Actuel<strong>le</strong>ment — continue L. <strong>de</strong> Sévy — <strong>le</strong> cinéma ra<strong>le</strong>nti,<br />

véritab<strong>le</strong> microscope du mouvement, perm<strong>et</strong> une étu<strong>de</strong> minutieuse<br />

<strong>de</strong>s mouvements qui échappent complètement à l'œil <strong>et</strong> se<br />

prête, par conséquent, à une étu<strong>de</strong> expérimenta<strong>le</strong> approfondie.<br />

De plus, <strong>le</strong> progrès <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> mécanique anima<strong>le</strong> perm<strong>et</strong>tent<br />

d'interpréter scientifiquement tous <strong>le</strong>s phénomènes observés.<br />

« Dès lors rie n ne semb<strong>le</strong> plus s'opposer à la mise au point définitive<br />

d'une doctrine sûre, étayée à la fois sur <strong>le</strong>s données expérimenta<strong>le</strong>s<br />

<strong>le</strong>s plus certaines <strong>et</strong> sur <strong>le</strong>s bases scienti fiques <strong>le</strong>s mieux<br />

assurées. C'est, semb<strong>le</strong>-t-il, dans c<strong>et</strong>te voie que se trouve <strong>le</strong> progrès<br />

<strong>de</strong> <strong>de</strong>main. »


CHAPITRE V<br />

l'assouplissement <strong>de</strong>s articulations <strong>de</strong> la nuque<br />

<strong>et</strong> <strong>de</strong> la machoire<br />

Sa nécessité. — La nuque <strong>et</strong> la mâchoire font office <strong>de</strong> tampons entre <strong>le</strong>s<br />

propulseurs <strong>et</strong> la main du cavalier. — Comment assouplir l'articulation<br />

atloïdo-occipita<strong>le</strong>. — Il est nécessaire <strong>de</strong> dégourdir l'articulation maxillaire<br />

du <strong>barbe</strong> par un travail approprié à l'état <strong>de</strong> sa mâchoire. — Les<br />

f<strong>le</strong>xions directes <strong>de</strong> Baucher.<br />

« Il n'est pas <strong>de</strong> cavalier — écrit Saint-Pli ai<strong>le</strong> — qui n'ait eu<br />

occasion mainte <strong>et</strong> mainte fois <strong>de</strong> constater avec quel<strong>le</strong> facilité<br />

il manie <strong>son</strong> <strong>cheval</strong> lorsque <strong>le</strong>s indications du mors <strong>son</strong>t reçues<br />

avec soup<strong>le</strong>sse <strong>et</strong> quel<strong>le</strong> difficulté, au contraire, la contraction<br />

<strong>de</strong> la nuque <strong>et</strong> <strong>de</strong> la mâchoire apporte à la direction.<br />

« C'est que, si l'encolure <strong>et</strong> la tête restent rai<strong>de</strong>s dans toutes<br />

<strong>le</strong>urs articulations, el<strong>le</strong>s <strong>son</strong>t comme invariab<strong>le</strong>ment soudées à<br />

tout <strong>le</strong> reste du corps; la puissance propulsive <strong>de</strong> l'arrière-main<br />

est transmise sans amortissement à la main du cavalier qui réciproquement,<br />

doit réagir avec une gran<strong>de</strong> énergie sur <strong>le</strong>s propulseurs<br />

pour <strong>le</strong>s comman<strong>de</strong>r.<br />

« Dan s ces conditions <strong>le</strong> cavalier est aux prises avec la force<br />

motrice dont l'eff<strong>et</strong> lui est intégra<strong>le</strong>ment transmis; en sorte que<br />

la direction ne peut se faire avec aucune délicatesse.<br />

« Si au contraire, <strong>le</strong>s articulations <strong>de</strong> la mâchoire <strong>et</strong> <strong>de</strong> la nuque<br />

<strong>son</strong>t soup<strong>le</strong>s, el<strong>le</strong>s <strong>de</strong>viennent entre l'arrière-main <strong>et</strong> <strong>le</strong> mors un<br />

intermédiaire dont l'élasticité amortit d'une part, la poussée <strong>de</strong><br />

la masse j<strong>et</strong>ée sur la main par <strong>le</strong>s propulseurs <strong>et</strong> ajoute, d'autre<br />

part, sa force à cel<strong>le</strong> du doigté ce qui perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> comman<strong>de</strong>r <strong>le</strong>s<br />

propulseurs tout en restant léger.<br />

« C'est quelque chose d'analogue à ce qui se passerait dans <strong>le</strong><br />

cas d'un wagon lancé contre un heurtoir <strong>de</strong> manière à y rester<br />

appliqué. En se comprimant, <strong>le</strong>s tampons amortissent <strong>le</strong> choc<br />

reçu par <strong>le</strong> heurtoir, <strong>et</strong>, en outre, emmagasinent une force qui,<br />

lorsqu'on voudra recu<strong>le</strong>r <strong>le</strong> wagon, s'ajoutera à cel<strong>le</strong> qu'il faudra


— 176 —<br />

p - : i<br />

m<strong>et</strong>tre en œuvre <strong>et</strong> par conséquent lui perm<strong>et</strong>tra d'être moindre.<br />

Il en est <strong>de</strong> même pour l'encolure <strong>et</strong> la mâchoire. Logiquement<br />

assouplies, el<strong>le</strong>s font l'office <strong>de</strong> tampons. El<strong>le</strong>s amoindrissent la<br />

poussée <strong>de</strong> la masse lancée par <strong>le</strong>s propulseurs sur la main <strong>et</strong><br />

augmentent l'action <strong>de</strong> la main sur <strong>le</strong>s propulseurs; en sorte que<br />

<strong>le</strong>s eff<strong>et</strong>s reçus ou faits par <strong>le</strong> cavalier peuvent être infiniment<br />

légers. C'est <strong>le</strong> <strong>de</strong>rnier terme <strong>de</strong> la légèr<strong>et</strong>é ; c'est aussi <strong>le</strong> <strong>de</strong>rnier<br />

terme <strong>de</strong>s f<strong>le</strong>xions. »<br />

L'assouplissement <strong>de</strong>s articulations <strong>de</strong> la nuque sera développé<br />

pendant la 3 e phase du relèvement <strong>de</strong> l'encolure. La gymnastique<br />

du ramener par l'impulsion tel qu'il a été exposé dans <strong>le</strong><br />

précé<strong>de</strong>nt chapitre aura pour eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> travail<strong>le</strong>r en contraction,<br />

en même temps que <strong>le</strong>s fléchisseurs <strong>de</strong> l'encolure, ceux <strong>de</strong> la<br />

tête, tandis que ses extenseurs placés au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> l'articulation<br />

atloïdo-occipita<strong>le</strong> travail<strong>le</strong>ront en élongation.<br />

L'assouplissement <strong>de</strong>s articulations <strong>de</strong> la nuque se produira<br />

d'autant plus vite <strong>et</strong> d'autant mieux que l'articulation <strong>de</strong> l'encolure<br />

au garrot aura été plus assouplie, <strong>le</strong> jeu <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière<br />

articulation donnant déjà à l'encolure une certaine soup<strong>le</strong>sse.<br />

Pour venir à bout <strong>de</strong> ces trois articulations-curiaces, il ne restera<br />

plus qu'à occire la rai<strong>de</strong>ur cadavérique <strong>de</strong> la mâchoire du<br />

<strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>; el<strong>le</strong> opposera d'ail<strong>le</strong>urs maintenant une résistance<br />

moindre aux efforts qui viendront l'achever « par suite <strong>de</strong> la corrélation<br />

existant instinctivement entre toutes <strong>le</strong>s contractions<br />

musculaires ( 1 ). »<br />

Le château <strong>de</strong> cartes <strong>de</strong>s résistances s'écrou<strong>le</strong>ra vite quand<br />

l'une sera complètement tombée <strong>et</strong> cel<strong>le</strong>s qui resteront <strong>de</strong>bout<br />

ne pourront résister longtemps à l'écrou<strong>le</strong>ment <strong>de</strong>s autres.<br />

Je crois opportun <strong>de</strong> rappe<strong>le</strong>r ici que c'est un cas spécial <strong>de</strong><br />

<strong>redressage</strong> que nous étudions ; <strong>le</strong>s moyens employés doivent être<br />

fonction <strong>de</strong>s défauts <strong>de</strong> notre partenaire. Il est nécessaire <strong>de</strong><br />

commencer l'assouplissement <strong>de</strong> l'articulation maxillaire du<br />

<strong>barbe</strong> par un travail approprié à l'état <strong>de</strong> sa mâchoire.<br />

Nous avons vu ail<strong>le</strong>urs que la bouche ouverte du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong><br />

(') Général L'Hote.


— 177 —<br />

monté en mors arabe ne prouve pas du tout la soup<strong>le</strong>sse <strong>de</strong> l'articulation<br />

maxillaire ; <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> ouvre la bouche pour m<strong>et</strong>tre <strong>son</strong><br />

palais à l'abri <strong>de</strong> la meurtrissure causée par <strong>le</strong> passage <strong>de</strong> langue<br />

très é<strong>le</strong>vé (7 centimètres) du ridicu<strong>le</strong> mors arabe ; il est contracté<br />

la bouche ouverte.<br />

Les procédés ordinaires pour assouplir la mâchoire appliqués<br />

au <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> risquent <strong>de</strong> ne donner après un travail long<br />

que <strong>de</strong>s résultats insuffisants. D'après <strong>le</strong>s essais nombreux que<br />

j'ai pu faire, je c rois que seu<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s f<strong>le</strong>xions directes <strong>de</strong> la mâchoire<br />

<strong>de</strong> Baucher peuvent produire sur <strong>le</strong>s bouches endurcies<br />

<strong>de</strong>s chevaux <strong>barbe</strong>s <strong>de</strong>s résultats rapi<strong>de</strong>s, comp<strong>le</strong>ts, décisifs <strong>et</strong><br />

durab<strong>le</strong>s.<br />

Les idées <strong>de</strong> Baucher sur ces f<strong>le</strong>xions directes exposées dans<br />

<strong>le</strong> Baucher <strong>et</strong> l'éq uitation d'extérieur <strong>de</strong> Boisgilbert ne <strong>son</strong>t-el<strong>le</strong>s<br />

pas <strong>de</strong>s plus logiques?<br />

« Beauc oup <strong>de</strong> cavaliers procè<strong>de</strong>nt par pressions discrètes <strong>et</strong><br />

réitérées, écrit-il, en secouant <strong>le</strong> mors, en amusant <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>et</strong><br />

obtiennent ainsi une <strong>de</strong>mi-cession <strong>de</strong> la mâchoire ; ils croient<br />

agir avec tact <strong>et</strong> finesse, c'est <strong>le</strong> contraire qui a lieu. Le <strong>cheval</strong><br />

a fait claquer <strong>son</strong> mors mais il n'a pas cédé. Combien d'animaux<br />

soumis à ces semblants <strong>de</strong> f<strong>le</strong>xion, une fois embarqués au galop<br />

au milieu d'autres chevaux, se braquent sur <strong>le</strong> mors malgré <strong>le</strong>ur<br />

fin dressage, la mâchoire contractée <strong>et</strong> pèsent 100 kilos à la main<br />

du cavalier. Du moment que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> emploie la force pour<br />

résister à l'action du mors, il est nécessaire que <strong>le</strong> cavalier emploie<br />

la force dans <strong>le</strong> travail à pied pour détruire en détail <strong>et</strong> séparément<br />

ces résistances, <strong>de</strong>vrait-il en éprouver une certaine fatigue<br />

dans <strong>le</strong>s bras. C<strong>et</strong> effort ne sera du reste nécessaire qu'au début.<br />

»<br />

Je cite entièrement ici Baucher par Boisgilbert :<br />

$ Première f<strong>le</strong>xion. — Le mors <strong>et</strong> la gourm<strong>et</strong>te ajustés <strong>le</strong> cavalier<br />

placé du côté gauche en avant <strong>de</strong> l'épau<strong>le</strong> du <strong>cheval</strong>, saisit<br />

avec la main gauche la bri<strong>de</strong> à 5 centimètres <strong>de</strong> l'anneau <strong>et</strong> avec<br />

l'autre main la rêne droite éga'ement à 5 centimètres <strong>de</strong> l'anneau;<br />

il tire à lui la rêne droite tout en opérant une autre traction<br />

sur la rêne gauche en avant <strong>et</strong> à droite, <strong>de</strong> manière à produire<br />

un eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> torsion sur <strong>le</strong> mors.<br />

<strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> 12


— 178 -<br />

« Le <strong>cheval</strong> sentant sa mâchoire <strong>de</strong> plus en plus serrée par la<br />

gourm<strong>et</strong>te, la barre droite <strong>de</strong> plus en plus comprimée par <strong>le</strong><br />

canon du mors, commence par serrer <strong>le</strong>s <strong>de</strong>nts <strong>et</strong> <strong>le</strong> plus souvent<br />

s'entête dans c<strong>et</strong>te résistance.<br />

« Po urquoi <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> s'entête-t-il? Parce que <strong>le</strong> cavalier emploie<br />

la force sans cession ni hésitation <strong>et</strong> par un effort continu.<br />

« C<strong>et</strong>te résistance est nécessaire, el<strong>le</strong> doit être provoquée <strong>et</strong> la<br />

force seu<strong>le</strong> sera capab<strong>le</strong> <strong>de</strong> produire un eff<strong>et</strong> durab<strong>le</strong> en la détruisant<br />

à jamais. Les autres moyens <strong>son</strong>t illusoires; ne provoquant<br />

pas <strong>de</strong> résistances, ils n'en détruisent aucune.<br />

« Le ca valier toujours calme, continue donc sans l'augmenter<br />

ni la diminuer la torsion énergique du mors <strong>et</strong> persiste dans la<br />

tension <strong>de</strong>s rênes jusqu'à ce que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> ail cédé. Aussitôt ce<br />

résultat obtenu, il cesse l'eff<strong>et</strong> <strong>de</strong>s rênes <strong>et</strong> caresse l'animal.<br />

« Le cavalier exécute <strong>le</strong> même exercice du côté opposé.<br />

« Deuxième f<strong>le</strong>xion. — Le cavalier se place à gauche du <strong>cheval</strong><br />

en avant <strong>de</strong> l'épau<strong>le</strong>, il saisit avec la main droite la rêne <strong>de</strong> la<br />

bri<strong>de</strong> à 5 centimètres environ <strong>de</strong> l'anneau <strong>et</strong> avec la main gauche<br />

la rêne du fi<strong>le</strong>t du même côté, à la même distance <strong>de</strong> l'anneau.<br />

Après avoir é<strong>le</strong>vé la tête du <strong>cheval</strong>, la direction du chanfrein à<br />

peu près dans la vertica<strong>le</strong> jamais en <strong>de</strong>dans, <strong>le</strong>s mains à peu<br />

près à hauteur du garrot, il opère une traction en sens inverse<br />

sur <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux rênes dans <strong>le</strong> sens <strong>de</strong> la longueur <strong>de</strong> l'animal, l'effort<br />

sur la rêne <strong>de</strong> la bri<strong>de</strong> restant horizontal; celui <strong>de</strong> la rêne<br />

du fi<strong>le</strong>t plus re<strong>le</strong>vé pour empêcher <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>de</strong> baisser la tête.<br />

Il maintient énergiquement la tension <strong>de</strong>s rênes jusqu'à ce que<br />

<strong>le</strong> <strong>cheval</strong> cessant <strong>de</strong> résister, décontracte la mâchoire sans fléchir<br />

l'encolure.<br />

« Le cavalier exécute ensuite la même f<strong>le</strong>xion du côté droit<br />

par <strong>le</strong>s moyens inverses.<br />

« Ces <strong>de</strong>u x eff<strong>et</strong>s latéraux étant obtenus, <strong>le</strong> cavalier <strong>le</strong>s combine<br />

<strong>et</strong> <strong>le</strong>s réunit en une seu<strong>le</strong> f<strong>le</strong>xion. A c<strong>et</strong> eff<strong>et</strong> s'étant placé<br />

à gauche du <strong>cheval</strong> il saisit <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux rênes <strong>de</strong> la bri<strong>de</strong> avec la<br />

main droite <strong>et</strong> <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux rênes du fi<strong>le</strong>t avec la main gauche, <strong>le</strong>s<br />

unes <strong>et</strong> <strong>le</strong>s autres à 10 centimètres <strong>de</strong>s anneaux <strong>et</strong> opère comme<br />

précé<strong>de</strong>mment <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux tractions en sens inverse, la main gauche


— 179 —<br />

produisant un eff<strong>et</strong> en hauteur. Il répète c<strong>et</strong>te f<strong>le</strong>xion en se plaçant<br />

à droite <strong>et</strong> en intervertissant <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> <strong>de</strong>s mains puis en se<br />

plaçant en face du <strong>cheval</strong>.<br />

« Ces <strong>de</strong>rni ères f<strong>le</strong>xions poussées à fond doivent amener l'ouverture<br />

complète <strong>de</strong> la mâchoire sur l'indication <strong>de</strong>s rênes opposées.<br />

Si ce travail a été bien compris la mâchoire restera mobi<strong>le</strong><br />

même aux allures vives au milieu d'une troupe nombreuse <strong>de</strong><br />

cavaliers, l'encolure restant rigi<strong>de</strong>, haute <strong>et</strong> prête à recevoir<br />

sans se baisser l'appui sur <strong>le</strong> fi<strong>le</strong>t. »<br />

J'insiste sur la nécessité <strong>de</strong> conserver pendant ces f<strong>le</strong>xions<br />

l'encolure rigi<strong>de</strong>, <strong>le</strong> « col ferme » <strong>de</strong> P luvinel indispensab<strong>le</strong> pour<br />

une conduite faci<strong>le</strong> du <strong>cheval</strong>, sans quoi, dit Saint-Phal<strong>le</strong>, l'encolure<br />

serait dans la situation d'un gouvernail en caoutchouc<br />

dans l'eau. Boisgilbert en marque l'importance à plusieurs reprises<br />

: « Le cavalier, dit-il, m<strong>et</strong>tra tous ses soins à ne pas porter<br />

atteinte à la rigidité <strong>de</strong> l'encolure en ne lui perm<strong>et</strong>tant <strong>de</strong> s'infléchir<br />

ni à gauche ni à droite. » Dans c<strong>et</strong>te f<strong>le</strong>xion la tête <strong>de</strong>vra<br />

être maintenue assez haute, la direction du chanfrein à peu près<br />

dans la vertica<strong>le</strong>, mais jamais en <strong>de</strong>dans <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te ligne ; el<strong>le</strong> <strong>de</strong>vra<br />

à peine s'infléchir à gauche ou à droite <strong>et</strong> seu<strong>le</strong>ment à <strong>son</strong> point<br />

d'attache avec l'encolure qui <strong>de</strong>vra conserver toute sa rigidité. »<br />

L'emploi <strong>de</strong>s f<strong>le</strong>xions directes <strong>de</strong> Baucher m'ont toujours<br />

donné <strong>de</strong>s résultats inespérés sur <strong>le</strong>s chevaux <strong>barbe</strong>s que j'ai<br />

redressés ou dont j'ai dirigé <strong>le</strong> <strong>redressage</strong>. Ces procédés n'offrant<br />

aucun danger pour l'équilibre du <strong>cheval</strong> présentent aussi l'avantage<br />

<strong>de</strong> pouvoir être employés par presque tous <strong>le</strong>s cavaliers.<br />

Ces f<strong>le</strong>xions directes ne seront nécessaires qu'au début du travail<br />

d'assouplissement <strong>de</strong> la mâchoire p our dégourdir c<strong>et</strong>te articulation<br />

désespérément raidie, sa soup<strong>le</strong>sse sera développée<br />

ensuite par <strong>le</strong>s eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong> l'impulsion venant buter sur une main<br />

fixe, par la mise en main. Dans <strong>le</strong> courant du <strong>redressage</strong>, <strong>le</strong>s<br />

f<strong>le</strong>xions directes <strong>de</strong>meureront pour <strong>le</strong> cavalier une réserve <strong>de</strong><br />

comman<strong>de</strong>ment, un moyen infaillib<strong>le</strong> pour faire tomber <strong>le</strong>s résistances<br />

s'il s'en produit à nouveau ou bien pour accentuer <strong>de</strong>s<br />

f<strong>le</strong>xions <strong>de</strong> mâchoire insuffisantes ou incomplètes.


CHAPITRE VI<br />

obéissance aux ai<strong>de</strong>s — mise en main — légèr<strong>et</strong>é<br />

« Sensibilité aux rênes, sensibilité<br />

aux jambes, tel<strong>le</strong>s <strong>son</strong>t <strong>le</strong>s sources<br />

<strong>de</strong> toute finesse d'équitation. »<br />

(Saint-Piial<strong>le</strong>.)<br />

§ 1. — Le <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> ne cannait pas <strong>le</strong>s ai<strong>de</strong>s. — Le défaut à combattre<br />

n'est autre que l'ignorance.<br />

§ 2. — L'obéissance aux jambes. — Il est nécessaire d'employer au début<br />

du <strong>redressage</strong> <strong>de</strong>s moyens qui obligent <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> à cé<strong>de</strong>r. — Les pirou<strong>et</strong>tes<br />

renversées <strong>de</strong> Baucher. — « Le tr avail correctif <strong>de</strong>s résistances doit être<br />

abandonné dès qu'il est sans but. » Quand la jambe se fait sévère, il faut<br />

que la main laisse s'échapper l'impulsion. —• Jambes énergiques <strong>et</strong> perpétuel<br />

emploi <strong>de</strong>s jambes.<br />

§ 3. — L'obéissance aux rênes. — La liai<strong>son</strong> entre la bouche du <strong>cheval</strong> <strong>et</strong><br />

la main du cavalier. — Il faut non pas que <strong>le</strong> mors vienne sur <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>,<br />

mais que celui-ci soit envoyé sur <strong>le</strong> mors. — Inconvénients <strong>de</strong>s tractions<br />

sur <strong>le</strong>s rênes.<br />

§ 4. — La mise en main; la légèr<strong>et</strong>é. — Ce qu'est la mise en main. — Par<br />

quoi el<strong>le</strong> est constituée. — Ses eff<strong>et</strong>s. — Ce qu'on peut obtenir par la<br />

mise en main. La mise en main d'après Saint-Phal<strong>le</strong>. La légèr<strong>et</strong>é <strong>et</strong> la<br />

fausse légèr<strong>et</strong>é. — Ce en quoi consiste la vraie légèr<strong>et</strong>é.<br />

§ 1 . — Le <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> ne connaît pas <strong>le</strong>s ai<strong>de</strong>s.<br />

Il est nécessaire <strong>de</strong> rappe<strong>le</strong>r au début <strong>de</strong> ce chapitre que <strong>le</strong>s<br />

chevaux <strong>barbe</strong>s ne connaissent généra<strong>le</strong>ment pas <strong>le</strong>s ai<strong>de</strong>s.<br />

Étant donné <strong>le</strong> tact équestre du cavalier arabe, l'emploi brutal,<br />

confus <strong>et</strong> irrai<strong>son</strong>né <strong>de</strong>s ai<strong>de</strong>s, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> ignore qu'en<br />

y cédant il peut se soustraire à <strong>le</strong>urs eff<strong>et</strong>s importuns.<br />

La pression <strong>de</strong>s jambes est une douceur qu'il ne soupçonne pas ;<br />

uniquement commandé à l'éperon qui agit toujours très en<br />

arrière <strong>de</strong>s sang<strong>le</strong>s, il perd fata<strong>le</strong>ment tout respect <strong>de</strong>s jambes<br />

<strong>et</strong> ne conserve plus qu'une épouvantab<strong>le</strong> crainte du mors. Ceci<br />

<strong>et</strong> un perpétuel abus <strong>de</strong>s éperons ren<strong>de</strong>nt <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> froid aux<br />

jambes, que dis-jel inerte aux jambes <strong>et</strong> puis enfin inerte aux


— 181 —<br />

éperons. Ainsi, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> qui n'obéit qu'à l'éperon, surtout s'il<br />

est léger, est bien plus près <strong>de</strong> la rétivité que <strong>de</strong> la vraie légèr<strong>et</strong>é.<br />

Celui qui entreprendra <strong>de</strong> redresser un <strong>barbe</strong> doit bien se<br />

pénétrer <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te situation ; <strong>le</strong> « déf aut » à combattre est l'ignorance.<br />

Prendre cel<strong>le</strong>-ci pour du mauvais vouloir ne peut conduire<br />

qu'à <strong>de</strong>s résultats désastreux. Avant <strong>de</strong> chercher à équilibrer<br />

uotre <strong>cheval</strong> il faut donc lui apprendre <strong>le</strong>s ai<strong>de</strong>s.<br />

§ 2. — Uobéissance aux jambes.<br />


— 182 —<br />

« 2° Pirou<strong>et</strong>tes renversées sur l'éperon. — Demi-tour sur <strong>le</strong>s<br />

épau<strong>le</strong>s en renforçant l'action <strong>de</strong> l'éperon qui chasse <strong>le</strong>s hanches<br />

par l'opposition <strong>de</strong> la tête aux hanches comme indiqué précé<strong>de</strong>mment.<br />

« A c<strong>et</strong> eff<strong>et</strong>, <strong>le</strong> cavalier élève <strong>le</strong> poign<strong>et</strong> droit, <strong>le</strong>s ong<strong>le</strong>s en<br />

l'air, <strong>le</strong>s rênes tenues courtes, la gauche flottante sans être allongée<br />

<strong>et</strong> tire vivement la tête du <strong>cheval</strong> à droite en appuyant la<br />

jambe <strong>et</strong> l'éperon droits <strong>de</strong> manière à déplacer vivement <strong>le</strong>s<br />

hanches à gauche <strong>et</strong> à compléter une pirou<strong>et</strong>te renversée. Dans<br />

ces conditions il sera défendu au <strong>cheval</strong> <strong>de</strong> plier <strong>son</strong> encolure qui<br />

conservera sa rigidité. Répéter <strong>le</strong> même mouvement du côté<br />

gauche.<br />

Et Boisgilbert d'ajouter : « Il y a lieu <strong>de</strong> remarquer que l'eff<strong>et</strong><br />

que l'on veut obtenir serait diminué si la rêne opposée ne restait<br />

pas flottante par suite <strong>de</strong> l'avancement du poign<strong>et</strong>. » Pendant<br />

que <strong>le</strong> cavalier tire la tête en ramenant <strong>le</strong> cou<strong>de</strong> en arrière,<br />

il allonge l'autre bras <strong>de</strong> manière à perdre <strong>de</strong> ce côt é tout contact<br />

avec la bouche.<br />

Je dois faire ici une remarque importante. Étant donnée la<br />

position du cavalier arabe, <strong>le</strong>s jambes agissent toujours très en<br />

arrière <strong>de</strong>s sang<strong>le</strong>s, à l'endroit où el<strong>le</strong>s produisent <strong>le</strong>ur maximum<br />

d'eff<strong>et</strong>. Le <strong>cheval</strong> ignore <strong>le</strong> contact <strong>et</strong> <strong>le</strong> comman<strong>de</strong>ment <strong>de</strong>s<br />

jambes près <strong>de</strong> la sang<strong>le</strong>. Il faut lui apprendre à obéir quand<br />

el<strong>le</strong>s agissent à c<strong>et</strong> endroit afin <strong>de</strong> pouvoir, par la suite, nuancer<br />

<strong>le</strong>urs eff<strong>et</strong>s. Dans <strong>le</strong>s pirou<strong>et</strong>tes renversées sur l'éperon, il importe<br />

donc d'appliquer l'éperon prés <strong>de</strong>s sang<strong>le</strong>s en raccourcissant<br />

<strong>le</strong>s étrivières si c'est nécessaire.<br />

C<strong>et</strong> exercice, dit Boisgilbert, a <strong>le</strong> grand avantage <strong>de</strong> préparer<br />

<strong>le</strong> <strong>cheval</strong> aux eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong> l'éperon sans qu'il puisse l'éviter ni se<br />

défendre; il est obligé <strong>de</strong> <strong>le</strong> subir. Son emploi <strong>le</strong> plus souvent<br />

modéré sera approprié non seu<strong>le</strong>ment à la résistance que l'animal<br />

pourrait présenter, mais aussi à <strong>son</strong> <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> sang <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />

finesse. Sur <strong>le</strong>s natures mol<strong>le</strong>s, sur <strong>le</strong>s chevaux lourds, il fait<br />

merveil<strong>le</strong>; dans tous <strong>le</strong>s cas l'éperon doit être appliqué franchement<br />

sans hésitation ni tâtonnements. »<br />

« Ces <strong>de</strong> ux moyens combinés, mâchoire haute <strong>et</strong> soup<strong>le</strong> tête<br />

<strong>et</strong> encolure opposées aux hanches sous l'eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> l'éperon appli­


— 183 —<br />

qué avec calme <strong>et</strong> précision, neutralisent <strong>le</strong>s résistances <strong>de</strong> l'animal,<br />

sa propension à s'échapper ou à se r<strong>et</strong>enir.<br />

«A première vue ces exercices préparatoires pourraient paraître<br />

d'une sévérité inuti<strong>le</strong> avec certains animaux disposés à obéir à<br />

une indication <strong>de</strong> la jambe. S'il ne s'agissait que <strong>de</strong> dresser <strong>le</strong><br />

<strong>cheval</strong> à exécuter <strong>de</strong>s pirou<strong>et</strong>tes renversées, c<strong>et</strong>te observation<br />

serait exacte, mais <strong>le</strong> but que l'on se propose d'atteindre est<br />

tout autre ; il faut d'abord s'assurer <strong>de</strong> la soumission <strong>de</strong> l'animal<br />

pour n'importe quel<strong>le</strong> pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>son</strong> dressage <strong>et</strong> avoir sous la<br />

main en cas <strong>de</strong> résistances sour<strong>de</strong>s ou vio<strong>le</strong>ntes, un moyen puissant<br />

<strong>de</strong> <strong>le</strong> réduire à la minute.<br />

« E nfin ces moyens ont l'avantage d'émousser la sensibilité<br />

exagérée <strong>de</strong> certains chevaux <strong>et</strong> d'éveil<strong>le</strong>r chez <strong>le</strong>s autres cel<strong>le</strong><br />

qui <strong>le</strong>ur fait défaut; ils influent sur <strong>le</strong> caractère <strong>de</strong> l'animal qui<br />

se m<strong>et</strong> d'autant mieux dans <strong>le</strong> mouvement en avant que <strong>le</strong>s<br />

résistances sour<strong>de</strong>s dont nous ne saurions trop par<strong>le</strong>r <strong>son</strong>t détruites<br />

; il obéit à l'impulsion donnée <strong>et</strong> ne se r<strong>et</strong>ient plus.<br />

« Le cavalier <strong>de</strong>vra procé<strong>de</strong>r à ces eff<strong>et</strong>s énergiques <strong>de</strong> rêne<br />

<strong>et</strong> d'éperon avec décision, mais aussi avec beaucoup <strong>de</strong> calmo;<br />

en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> ces eff<strong>et</strong>s, il <strong>de</strong>vra éviter <strong>de</strong> rechercher <strong>son</strong> <strong>cheval</strong><br />

<strong>et</strong> <strong>le</strong> traiter avec douceur. Il exécutera aussi quelques pirou<strong>et</strong>tes<br />

renversées sur une simp<strong>le</strong> indication <strong>de</strong> la jambe mais sans en<br />

abuser, surtout avec <strong>de</strong>s chevaux ino us, qu'el<strong>le</strong>s ont V inconvénient<br />

<strong>de</strong> refroidir. »<br />

Maintenant, r<strong>et</strong>enez bien c<strong>et</strong>te phrase <strong>de</strong> Baucher : « Le travail<br />

correctif <strong>de</strong>s résistances doit être abandonné dès qu'il est sans<br />

but. »<br />

Avec <strong>le</strong>s chevaux <strong>barbe</strong>s surtout, <strong>le</strong>s jambes <strong>de</strong>vront toujours<br />

rester autoritaires <strong>et</strong> énergiques — ce qui ne veut pas dire bruta<strong>le</strong>s<br />

— <strong>de</strong> façon à maintenir rigoureusement <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> dans <strong>le</strong><br />

mouvement en avant dont il était privé avant <strong>son</strong> <strong>redressage</strong>.<br />

Une vieil<strong>le</strong> habitu<strong>de</strong> est dure à corriger. Il importe que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

<strong>barbe</strong> ait un profond respect <strong>de</strong> la jambe <strong>et</strong> qu'il <strong>de</strong>meure persuadé<br />

que c'est quelque chose d'implacab<strong>le</strong> avec <strong>le</strong>quel il ne lui<br />

est pas permis <strong>de</strong> jouer. Quelques pirou<strong>et</strong>tes renversées sur l'éperon<br />

appliquées au bon moment <strong>et</strong> sans hésitation viendront à


— 184 —<br />

l'occasion entr<strong>et</strong>enir vivace chez <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> un louab<strong>le</strong> désir d'avancement.<br />

Mais quand <strong>le</strong>s jambes agiront avec sévérité, s oit dans la correction,<br />

soit pour porter énergiquement <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> en avant, soit<br />

pour réveil<strong>le</strong>r une impulsion qui paresse, il est absolument indispensab<strong>le</strong><br />

pour la conservation <strong>de</strong> l'impulsion que <strong>le</strong>s mains laissent<br />

jaillir librement <strong>le</strong> mouvement en avant que <strong>le</strong>s jambes ordonnent.<br />

Faute d'observer c<strong>et</strong>te précaution essentiel<strong>le</strong>, on brise l'impulsion<br />

<strong>et</strong> <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> r<strong>et</strong>ombe fata<strong>le</strong>ment dans <strong>le</strong> défaut même<br />

que l'on cherche à combattre. Et cela se conçoit sans effort <strong>de</strong><br />

rai<strong>son</strong>; <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> se trouve alors dans la situation d'un homme<br />

auquel on comman<strong>de</strong> simultanément : « En avant-halte !... »<br />

Il est compréhensib<strong>le</strong> qu'il soit embarrassé, qu'il ne comprenne<br />

pas très bien l'ordre qui lui est donné <strong>et</strong> qu'il se dégoûte enfin<br />

très vite <strong>de</strong> tels procédés...<br />

« Jam bes énergiques » ne veut pas dire non plus « emploi fréquent<br />

<strong>de</strong>s jambes ». Tout au contraire. Un perpétuel emploi <strong>de</strong><br />

jambes insuffisamment énergiques qui tenteraient mol<strong>le</strong>ment <strong>de</strong><br />

ranimer <strong>de</strong>s allures traînantes, aura pour eff<strong>et</strong> certain <strong>de</strong> rej<strong>et</strong>er<br />

<strong>le</strong> <strong>cheval</strong> dans une froi<strong>de</strong> <strong>et</strong> dédaigneuse indifférence aux jambes.<br />

C'est justement ainsi que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> arrive à s'en blaser. Quand<br />

il est besoin <strong>de</strong> « secouer » l'impulsion, une seu<strong>le</strong> attaque autoritaire<br />

<strong>de</strong>s jambes est infiniment préférab<strong>le</strong> à une succession <strong>de</strong><br />

<strong>de</strong>mi-attaques « en mol<strong>le</strong>sse ». Ave c <strong>le</strong>s <strong>barbe</strong>s surtout, mieux<br />

vaut user sévèrement <strong>de</strong> la jambe que <strong>de</strong> s'en servir beaucoup<br />

<strong>et</strong> sans énergie.<br />

D'ail<strong>le</strong>urs, si au début du <strong>redressage</strong> vous avez employé<br />

énergiquement <strong>le</strong>s jambes sans entraver avec la main l'impulsion<br />

qu'el<strong>le</strong>s exigeaient avec sévérité, vous aurez à vous en<br />

servir peu : votre <strong>cheval</strong> sera léger aux jambes.<br />

§ 3. — Uobéissance aux ai<strong>de</strong>s.<br />

L'obéissance <strong>et</strong> la légèr<strong>et</strong>é aux rênes seront obtenues par <strong>le</strong>s<br />

moyens connus <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s cavaliers <strong>et</strong> par une bonne main, fixe,<br />

légère, douce <strong>et</strong> ferme.<br />

M'adressant à <strong>de</strong>s cavaliers, je ne m'étendrai pas sur c<strong>et</strong>te


— 185 —<br />

question : j'attirerai l'attention seu<strong>le</strong>ment sur <strong>le</strong>s points que la<br />

connaissance du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> me fait estimer plus importants<br />

pour mener à bon terme <strong>son</strong> <strong>redressage</strong>.<br />

Si l'on veut <strong>de</strong>meurer dans <strong>le</strong>s principes d'une equitation vraiment<br />

impulsive, je ne saurai trop recomman<strong>de</strong>r <strong>de</strong> s'assimi<strong>le</strong>r<br />

la conception du capitaine <strong>de</strong> Saint-Phal<strong>le</strong> sur la manière dont<br />

doit s'établir la liai<strong>son</strong> entre la bouche du <strong>cheval</strong> <strong>et</strong> la main du<br />

cavalier.<br />

Les notes que je transcrirai ici <strong>son</strong>t extraites <strong>de</strong> <strong>son</strong> ouvrage :<br />

Dressage <strong>et</strong> e mploi du <strong>cheval</strong> <strong>de</strong> sel<strong>le</strong>, ouvrage où fuse <strong>de</strong> toute<br />

part <strong>le</strong> souci permanent <strong>de</strong> l'impulsion.<br />

« La manière d'établir <strong>le</strong> contact entre la bouche <strong>et</strong> <strong>le</strong> mors<br />

a une influence prépondérante aussi bien sur <strong>le</strong> dressage du <strong>cheval</strong><br />

que sur l'équitation du cavalier. C'est quelquefois à grand'-<br />

peine que l'on est arrivé à apprendre au <strong>cheval</strong> que <strong>le</strong>s jambes<br />

doivent toujours avoir une action impulsive.<br />

« Le bénéfi ce <strong>de</strong> ces soins peut être perdu <strong>et</strong> <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> mis en<br />

<strong>de</strong>dans <strong>de</strong> la main <strong>et</strong> rendu rétif par un mauvais emploi <strong>de</strong>s<br />

rênes.<br />

« P our éviter ce résultat désastreux, il faudra que <strong>le</strong>s rênes<br />

n'agissent que par l'eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> Vimpulsion donnée par <strong>le</strong>s jambes ; <strong>de</strong><br />

la sorte, l'usage <strong>de</strong>s rênes, loin <strong>de</strong> nuire à l'impulsion, en <strong>de</strong>vient<br />

une conséquence, en nécessite l'emploi, l'exerce <strong>et</strong> par conséquent<br />

la développe.<br />

« Pou r m<strong>et</strong>tre ce principe en pratique, il faut non pas que <strong>le</strong><br />

mors vienne sur <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>, mais que celui-ci soit envoyé sur <strong>le</strong> mors. »<br />

« Si <strong>le</strong>s rênes agissent par traction — écrit plus loin Saint-<br />

Phal<strong>le</strong> — el<strong>le</strong>s peuvent agir seu<strong>le</strong>s ou concurremment avec <strong>le</strong>s<br />

jambes.<br />

« Dans <strong>le</strong> premier cas, el<strong>le</strong>s trouvent <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> inerte <strong>et</strong> sans<br />

impulsion; el<strong>le</strong>s <strong>son</strong>t aux prises avec <strong>le</strong> poids <strong>de</strong> la masse; <strong>et</strong> <strong>le</strong><br />

<strong>cheval</strong>, au lieu <strong>de</strong> se mouvoir lui-même, laisse déplacer <strong>son</strong><br />

centre <strong>de</strong> gravité par <strong>le</strong>ur effort. Il est lourd à la main <strong>et</strong> d'un<br />

maniement diffici<strong>le</strong>, ce dont il peut efficacement tirer parti pour<br />

résister aux volontés <strong>de</strong> <strong>son</strong> cavalier.<br />

« Si, au contraire, <strong>le</strong>s jambes agissent en même temps que <strong>le</strong>s<br />

rênes tirent sur la bouche, ces ai<strong>de</strong>s <strong>son</strong>t en contradiction, car


— 186 —<br />

l'encolure est ramenée en arrière au moment où el<strong>le</strong> <strong>de</strong>vrait<br />

chercher à s'étendre sous l'action <strong>de</strong>s jambes.<br />

« Pri s entre ces <strong>de</strong>ux actions inverses, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> est forcé <strong>de</strong><br />

désobéir à l'une pour se soum<strong>et</strong>tre à l'autre, à moins qu'il n'échappe<br />

aux <strong>de</strong>ux en se révoltant <strong>et</strong> ne donne à <strong>de</strong>s <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s<br />

inconsidérées la réponse qu'el<strong>le</strong>s méritent.<br />

« S'il est d'un caractère mou ou lymphatique il fait abstraction<br />

<strong>de</strong>s jambes <strong>et</strong> n'obéit qu'aux rênes ; il agit alors sans impulsion,<br />

s'accu<strong>le</strong> même, ou <strong>de</strong>vient aussi lourd à la main que si <strong>le</strong>s<br />

jambes n'agissaient pas. Neuf fois sur dix, ce sera la ruine <strong>de</strong> sa<br />

franchise.<br />

« Si au lieu d'être paresseux, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> est d'un caractère allant<br />

ou impressionnab<strong>le</strong>, ou si <strong>le</strong>s jambes <strong>son</strong>t assez énergiques, el<strong>le</strong>s<br />

l'excitent à échapper aux tractions qui l'entravent <strong>et</strong> dont il<br />

ne peut prévoir la fin. Pour cela, tous <strong>le</strong>s moyens lui seront<br />

bons; il forcera la main, encensera, portera au vent ou s'embal<strong>le</strong>ra;<br />

plus <strong>le</strong> cavalier tire plus il tire, c'est une révolte ouverte<br />

rendant toute direction impossib<strong>le</strong>.<br />

« Les inconvénients <strong>de</strong> faire agir <strong>le</strong>s rênes par traction montrent<br />

surabondamment il me semb<strong>le</strong>, combien ce procédé <strong>de</strong>vra<br />

rester étranger au cavalier soucieux d'avoir une équitation fine<br />

<strong>et</strong> judicieuse.<br />

« Don c, fermez vos jambes <strong>et</strong> vos d oigts <strong>et</strong> ne tirez jamais sur<br />

vos rênes. »<br />

§ 4. — La mise en main. — La légèr<strong>et</strong>é.<br />

A présent que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> connaît <strong>le</strong>s ai<strong>de</strong>s <strong>et</strong> y obéit, il est possib<strong>le</strong><br />

<strong>de</strong> travail<strong>le</strong>r la mise en main <strong>et</strong> <strong>de</strong> rechercher la légèr<strong>et</strong>é<br />

aux ai<strong>de</strong>s.<br />

La mise en main est « l'opération par laquel<strong>le</strong> <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> rem<strong>et</strong><br />

en quelque sorte la disposition <strong>de</strong> toutes ses forces actives entre<br />

<strong>le</strong>s mains <strong>de</strong> <strong>son</strong> cavalier. El<strong>le</strong> comporte un équilibre dont la<br />

stabilité peut être rompue à la plus légère sollicitation par toutes<br />

<strong>le</strong>s forces du <strong>cheval</strong> tendues <strong>et</strong> prêtes à agir ( 1 ). »<br />

( l ) Saint-Phal<strong>le</strong>.


— 187 —<br />

La mise en m^in est constituée par :<br />

— Le relèvement comp<strong>le</strong>t <strong>de</strong> l'encolure, c'est-à-dire <strong>le</strong> relèvement<br />

<strong>de</strong> l'encolure à partir du garrot qui établit l'équilibre <strong>et</strong><br />

l'harmonie entre <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux bipè<strong>de</strong>s antérieurs <strong>et</strong> postérieurs <strong>et</strong><br />

agit sur <strong>le</strong> jeu <strong>de</strong> l'articulation scapulo-huméra<strong>le</strong>, sur <strong>le</strong> geste<br />

<strong>de</strong> l'épau<strong>le</strong>, <strong>le</strong> mastoïdo-buméral pouvant dans c<strong>et</strong>te position<br />

se contracter au maximum.<br />

— La décontraction <strong>de</strong>s musc<strong>le</strong>s supérieurs <strong>de</strong> l'encolure qui<br />

place <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> sous la domination forcée <strong>de</strong> <strong>son</strong> cavalier en lui<br />

en<strong>le</strong>vant <strong>le</strong>s contractions-points d'appui qui lui <strong>son</strong>t nécessaires<br />

pour pouvoir produire un effort brusque <strong>et</strong> vio<strong>le</strong>nt, pour résister,<br />

se défendre.<br />

— La soup<strong>le</strong>sse <strong>de</strong>s articulations <strong>de</strong> la nuque <strong>et</strong> <strong>de</strong> la mâchoire<br />

qui interpose un tampon (suivant l'expression <strong>de</strong> Saint-Phal<strong>le</strong>)<br />

entre <strong>le</strong>s propulseurs <strong>et</strong> la main du cavalier qui reçoit alors avec<br />

élasticité la poussée <strong>de</strong> la masse <strong>et</strong> perm<strong>et</strong> à la main <strong>de</strong> comman<strong>de</strong>r<br />

<strong>le</strong>s propulseurs tout en <strong>de</strong>meurant légère <strong>et</strong> douce, ce<br />

qui amène la légèr<strong>et</strong>é aux rênes. La soup<strong>le</strong>sse <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s ressorts<br />

perm<strong>et</strong> <strong>le</strong>s changements immédiats d'équilibre.<br />

•— La ferm<strong>et</strong>ure <strong>de</strong> l'ang<strong>le</strong> coxo-fémoral qui correspond à l'engagement<br />

<strong>de</strong>s postérieurs sous la masse procure au <strong>cheval</strong> la possibilité<br />

d'embrasser <strong>le</strong> maximum <strong>de</strong> terrain <strong>et</strong> <strong>de</strong> détendre énergiquement<br />

ses jarr<strong>et</strong>s. Maîtres <strong>de</strong> la masse, <strong>le</strong>s propulseurs peuvent<br />

l'actionner suivant la nouvel<strong>le</strong> position du centre <strong>de</strong> gravité<br />

<strong>et</strong> <strong>son</strong>t à même, si <strong>le</strong>s hanches <strong>son</strong>t entr<strong>et</strong>enues « agissantes<br />

<strong>et</strong> diligentes » <strong>de</strong> chasser vigoureusement <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s.<br />

— L'ouverture <strong>de</strong> l'ang<strong>le</strong> scapulo-huméral qui correspond,<br />

en station, au placement <strong>de</strong>s antérieurs sur <strong>le</strong>ur bonne ligne<br />

d'aplomb <strong>et</strong> produit en action un jeu libre aisé, dégagé <strong>de</strong><br />

l'épau<strong>le</strong> <strong>et</strong> <strong>le</strong> relèvement <strong>de</strong>s membres antérieurs.<br />

Par suite <strong>de</strong> ces divers eff<strong>et</strong>s produits par la mise en main,<br />

<strong>le</strong>s allures du <strong>cheval</strong> <strong>de</strong>viennent vigoureuses, énergiques <strong>et</strong> brillantes.<br />

Le <strong>cheval</strong> pouvant travail<strong>le</strong>r à <strong>son</strong> aise sur <strong>de</strong>s bases<br />

courtes acquerra une gran<strong>de</strong> mobilité <strong>et</strong> sera très maniab<strong>le</strong>. Le<br />

cavalier étant maître absolu du centre <strong>de</strong> gravité pourra perfectionner<br />

la légèr<strong>et</strong>é ; il pourra « rassemb<strong>le</strong>r ». Ainsi donc, par<br />

l'exercice <strong>de</strong> la mise en main, <strong>le</strong> relèvement comp<strong>le</strong>t <strong>de</strong> l'encolure


— 188 —<br />

<strong>et</strong> la soup<strong>le</strong>sse <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s ressorts seront accentués <strong>et</strong> confirmés ;<br />

l'impulsion, <strong>le</strong> brillant <strong>et</strong> la vigueur <strong>de</strong>s allures ainsi que la légèr<strong>et</strong>é<br />

seront développés.<br />

Saint-Phal<strong>le</strong> écrit sur la mise en main :<br />

« On ne saurait donc adm<strong>et</strong>tre la mise en main en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong><br />

l'impulsion ni la confondre avec l'état du <strong>cheval</strong> se tenant seul,<br />

suivant l'idéal que se <strong>son</strong>t proposé Baucher <strong>et</strong> quelques autres<br />

écuyers.<br />

« Comme je l'ai dit à propos <strong>de</strong> la <strong>de</strong>scente <strong>de</strong> main, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

qui ne vient pas sur <strong>le</strong> mors est un <strong>cheval</strong> qui ne cherche pas à<br />

marcher ; par suite, eût-il toute la mobilité <strong>de</strong> mâchoire désirab<strong>le</strong>,<br />

il n'a pas l'élément que je considère comme <strong>le</strong> plus important<br />

<strong>de</strong> la mise en main, c'est-à-dire la tendance continuel<strong>le</strong> à<br />

se porter en avant, tendance sans laquel<strong>le</strong> l'animal est suj<strong>et</strong> dans<br />

<strong>le</strong>s circonstances diffici<strong>le</strong>s à s'enfermer malgré <strong>le</strong> cavalier <strong>et</strong> à<br />

refuser <strong>le</strong> mouvement en avant.<br />

« Ainsi pour que la mise en main soit juste, je pense qu'il<br />

faut, d'une part <strong>et</strong> surtout que <strong>le</strong>s ressorts soient bandés afin<br />

qu'ils puissent se détendre dès que <strong>le</strong>s doigts <strong>le</strong> perm<strong>et</strong>tront :<br />

c'est ce qui fait <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> perçant, <strong>et</strong>, d'autre part, que la soumission<br />

à notre volonté <strong>et</strong> la légèr<strong>et</strong>é soient tel<strong>le</strong>s qu'une résistance<br />

insignifiante <strong>de</strong>s doigts suffise à contenir c<strong>et</strong>te ar<strong>de</strong>ur :<br />

«'est ce qui fait <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> léger. En sorte que la mise en main<br />

rési<strong>de</strong> dans l'union <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux qualités mises en jeu : <strong>le</strong> perçant<br />

<strong>et</strong> la légèr<strong>et</strong>é.<br />

« Je ne saurais mieux comparer <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> dans la mise en<br />

main qu'à une tige élastique ployée par <strong>de</strong>ux forces qui en rapprochent<br />

<strong>le</strong>s extrémités. Qu'une <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux forces soit diminuée<br />

ou supprimée, la tige se détend <strong>de</strong> <strong>son</strong> côté. Ainsi fait <strong>le</strong><br />

<strong>cheval</strong> dans la mise en main : il a une élasticité qui est la résultante<br />

<strong>de</strong> toutes ses puissances tendues <strong>et</strong> r<strong>et</strong>enues par <strong>le</strong>s ai<strong>de</strong>s;<br />

que, par <strong>le</strong> placer, on augmente ou diminue l'intensité d'une <strong>de</strong>s<br />

ai<strong>de</strong>s, toutes <strong>le</strong>s forces vives contractées par la mise en main<br />

s'échappent du côté où el<strong>le</strong>s <strong>son</strong>t <strong>le</strong> moins vivement sollicitées<br />

ou r<strong>et</strong>enues, entraînant à <strong>le</strong>ur suite un changement d'équilibre<br />

ou <strong>de</strong> sens dans <strong>le</strong> mouvement.<br />

« La m ise en main comporte naturel<strong>le</strong>ment la soup<strong>le</strong>sse ab so-


— 189 —<br />

lue <strong>de</strong> tout <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>et</strong> l'engagement <strong>de</strong>s propulseurs : la soup<strong>le</strong>sse<br />

pour rendre possib<strong>le</strong> <strong>le</strong> changement immédiat d'équilibre; l'engagement<br />

<strong>de</strong>s propulseurs pour <strong>le</strong>s rendre maîtres <strong>de</strong> la masse<br />

<strong>et</strong> <strong>le</strong>ur perm<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> l'actionner suivant la nouvel<strong>le</strong> position du<br />

centre <strong>de</strong> gravité.<br />

« C'est assez dire qu'il n'y a <strong>de</strong> mise en main que s'il y a élévation<br />

<strong>de</strong> l'encolure <strong>et</strong> décontraction complète <strong>de</strong> la nuque <strong>et</strong><br />

<strong>de</strong> la mâchoire; autrement dit, ramener <strong>et</strong> f<strong>le</strong>xion. »<br />

On peut dire <strong>de</strong> la mise en main ce qu'Ésope disait <strong>de</strong> la<br />

langue ; el<strong>le</strong> peut être en eff<strong>et</strong> la meil<strong>le</strong>ure <strong>et</strong> la pire <strong>de</strong>s choses.<br />

Il faut éviter d'en abuser. Si l'on veut conserver la finesse <strong>de</strong><br />

trempe <strong>de</strong>s ressorts, il ne faut pas <strong>le</strong>s laisser trop longtemps<br />

bandés; ils se fatigueraient. Après <strong>le</strong>s avoir tenus comprimés<br />

dans un travail rassemblé <strong>de</strong> quelque durée, il est nécessaire <strong>de</strong><br />

<strong>le</strong>s laisser se détendre <strong>et</strong> reprendre <strong>le</strong>ur forme naturel<strong>le</strong> dans<br />

un travail libre <strong>et</strong> allongé. Baucher, qui peut en par<strong>le</strong>r en connaisseur,<br />

recomman<strong>de</strong> à chaque instant la discrétion dans <strong>le</strong> rassemb<strong>le</strong>r<br />

« pour <strong>le</strong> bonheur du cavalier <strong>et</strong> <strong>le</strong> bien-être du <strong>cheval</strong><br />

».<br />

Je crois uti<strong>le</strong> d'attirer ici l'attention du <strong>le</strong>cteur sur la confusion<br />

si souvent constatée que font certains cavaliers entre la<br />

légèr<strong>et</strong>é <strong>et</strong> la fausse légèr<strong>et</strong>é. Quand on entreprend <strong>de</strong> redresser<br />

un <strong>cheval</strong> acculé, il est essentiel en eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> bien connaître la<br />

différence qui oppose ces <strong>de</strong>ux légèr<strong>et</strong>és, car <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> qui est<br />

resté longtemps acculé a tendance à revenir vers <strong>son</strong> premier<br />

équilibre défectueux. Or, si <strong>le</strong> cavalier ne sait pas discerner la<br />

vraie <strong>de</strong> la fausse légèr<strong>et</strong>é il croira <strong>son</strong> <strong>cheval</strong> léger parce qu'il<br />

ne tire pas <strong>et</strong> <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>, au lieu <strong>de</strong> courir après <strong>son</strong> mors s'habituera<br />

ainsi à « se tenir seul ». Cheval <strong>et</strong> cavalier s'enliseront <strong>de</strong><br />

plus en plus l'un dans <strong>son</strong> défaut l'autre dans <strong>son</strong> erreur.<br />

« Le <strong>cheval</strong> qui reste en arrière du mors, qui ne vient pas sur<br />

<strong>le</strong> mors, ne présente pas <strong>de</strong> résistance à la main; mais il est dans<br />

une fausse légèr<strong>et</strong>é parce qu'il manque <strong>de</strong> l'impulsion qui l'amènerait<br />

à venir chercher <strong>le</strong> comman<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> la main. A partir<br />

du moment où il a l'habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> rester ainsi en arrière d'el<strong>le</strong>,<br />

rien ne l'empêche plus <strong>de</strong> lui échapper <strong>et</strong> <strong>de</strong> continuer dans la<br />

voie où il s'est engagé jusqu'à s'accu<strong>le</strong>r pour refuser <strong>le</strong> mors si


— 190 —<br />

celui-ci revient en arrière essayer <strong>de</strong> prendre la bouche; l'organe<br />

essentiel <strong>de</strong> direction est faussé, sinon brisé.<br />

« Cel<strong>le</strong>-ci (la légèr<strong>et</strong>é) consiste dans la délicatesse avec laquel<strong>le</strong><br />

<strong>le</strong> <strong>cheval</strong> soumis <strong>et</strong> tendant sans cesse au mouvement en avant,<br />

prend contact avec la main pour lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r en quelque sorte<br />

la permission <strong>de</strong> passer. Si <strong>le</strong>s doigts cè<strong>de</strong>nt, l'encolure s'allonge,<br />

<strong>le</strong> centre <strong>de</strong> gravité avance, l'allure s'étend; s'ils résistent, <strong>le</strong><br />

<strong>cheval</strong> reste mœl<strong>le</strong>usement fléchi, courbé sur la main, prêt à se<br />

détendre dès qu'el<strong>le</strong> ne s'y opposera plus, tel <strong>le</strong> ressort élastique<br />

<strong>et</strong> fin qu'une force imperceptib<strong>le</strong> suffit à tenir tendu mais qui<br />

se déban<strong>de</strong> instantanément dès qu'el<strong>le</strong> disparaît. C<strong>et</strong>te tendance<br />

continuel<strong>le</strong> du <strong>cheval</strong> à se détendre différencie à première vue la<br />

vraie légèr<strong>et</strong>é <strong>de</strong> la fausse; el<strong>le</strong> n'est autre chose que l'allant,<br />

autrement dit, l'impulsion naturel<strong>le</strong> ou acquise. Le <strong>cheval</strong> allégé<br />

sans qu'on prenne sur <strong>son</strong> impulsion est donc un être vibrant<br />

prêt à s'employer; mais, rendu obéissant, il soum<strong>et</strong> <strong>son</strong> désir<br />

à l'autorisation <strong>de</strong> <strong>son</strong> maitre, se laisse placer par lui <strong>et</strong> se contient<br />

sans résistance ou se livre <strong>et</strong> se dépense sans compter. Voilà la<br />

légèr<strong>et</strong>é dans l'impulsion; voilà ce que je crois être la vraie légèr<strong>et</strong>é<br />

(i). »<br />

( 1 ) Saint-Phal<strong>le</strong>.


CINQUIÈME PARTIE<br />

UNE MÉTHODE DE REDRESSAGE<br />

§ 1. — Considérations généra<strong>le</strong>s.<br />

§2. — Exposé <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong>.<br />

§ 1. — Considérations généra<strong>le</strong>s.<br />

Que <strong>le</strong> <strong>le</strong>cteur ne s'imagine pas que je considère la métho<strong>de</strong><br />

présentée comme une rec<strong>et</strong>te pour rendre tous <strong>le</strong>s chevaux<br />

légers <strong>et</strong> parfaitement équilibrés. « A ucune métho<strong>de</strong> quelque<br />

logique <strong>et</strong> bien ordonnée qu'el<strong>le</strong> puisse être ne saurait donner<br />

<strong>de</strong>s résultats infaillib<strong>le</strong>s, toute action équestre exigeant pour<br />

obtenir l'eff<strong>et</strong> qu'on en attend, ce qu'aucun écrit ne saurait<br />

donner : l'à-propos <strong>et</strong> la mesure autrement dit <strong>le</strong> tact équestre.<br />

Ici surtout : Tant vaut l'homme, tant vaut <strong>le</strong> moyen ( 1 ). »<br />

C'est d'ail<strong>le</strong>urs beaucoup plus une monographie <strong>de</strong> <strong>redressage</strong><br />

qu'une métho<strong>de</strong> que je me suis appliqué à écrire.<br />

Je n'ai d'autre prétention que cel<strong>le</strong> d'affirmer que j'ai toujours<br />

très vite redressé <strong>de</strong>s chevaux <strong>barbe</strong>s avec <strong>le</strong>s moyens indiqués.<br />

Je n'ai pas voulu dépasser <strong>le</strong> cadre d'une étu<strong>de</strong> pratique prouvant<br />

qu'on peut tirer parti <strong>de</strong>s chevaux <strong>barbe</strong>s trop souvent<br />

considérés comme pas intéressants, détraqués <strong>et</strong> inutilisab<strong>le</strong>s.<br />

J'ai écouté <strong>le</strong>s conseils <strong>de</strong> Le Bon : « quelque mo<strong>de</strong>stes que puissent<br />

être <strong>le</strong>s capacités équestres du cavalier, ses observations<br />

seront toujours fort uti<strong>le</strong>s <strong>et</strong> constitueront <strong>de</strong>s éléments <strong>de</strong> comparai<strong>son</strong><br />

qui nous font entièrement défaut aujourd'hui ».<br />

Le <strong>redressage</strong> d u <strong>barbe</strong> est un problème particulier. Ceci dit<br />

pour justifier <strong>le</strong>s procédés d'un usage peu courant dont je me<br />

suis servi.<br />

Une métho<strong>de</strong> ne doit pas être envisagée comme un cadre<br />

( 1 ) G énéral L'HOTTE, Questions équestres.


— 192 —<br />

rigi<strong>de</strong>, comme une cage <strong>de</strong> la Balue où doivent se mou<strong>le</strong>r <strong>cheval</strong><br />

<strong>et</strong> cavalier. Chacun a <strong>son</strong> tempérament <strong>et</strong> ses aptitu<strong>de</strong>s spécia<strong>le</strong>s<br />

<strong>et</strong> chaque <strong>cheval</strong> m'a-t-on dit bien souvent, est un problème<br />

différent; aussi, m'efîorcerai-je d'indiquer un cadre aux ang<strong>le</strong>s<br />

suffisamment extensib<strong>le</strong>s pour pouvoir s'adapter au <strong>cheval</strong>.<br />

La durée <strong>de</strong>s différentes pério<strong>de</strong>s <strong>de</strong> <strong>redressage</strong> ne peut non<br />

plus être absolue; el<strong>le</strong> variera selon <strong>le</strong> caractère du <strong>cheval</strong>, <strong>son</strong><br />

<strong>de</strong>gré <strong>de</strong> « sabotage » <strong>et</strong> aussi selon la science, l'habi<strong>le</strong>té du cavalier<br />

<strong>et</strong> sa plus ou moins bonne compréhension <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong>.<br />

J'estime toutefois que la durée indiquée doit être considérée<br />

ainsi qu'un minimum, el<strong>le</strong> pourra être augmentée souvent avec<br />

profit.<br />

La gymnastique entrant pour une très large part dans <strong>le</strong><br />

<strong>redressage</strong> tel qu'il est exposé ici, il faut laisser aux exercices<br />

<strong>le</strong> temps nécessaire pour que <strong>le</strong>ur répétition puisse agir sur la<br />

tonicité <strong>de</strong>s musc<strong>le</strong>s. Le but primordial n'est pas d'al<strong>le</strong>r vite,<br />

mais d'obtenir <strong>de</strong>s résultats soli<strong>de</strong>s <strong>et</strong> comp<strong>le</strong>ts. Il est plus<br />

sage <strong>et</strong> plus rationnel aussi <strong>de</strong> n'é<strong>le</strong>ver <strong>le</strong>s différentes parties<br />

du <strong>redressage</strong> <strong>le</strong>s unes sur <strong>le</strong>s autres que lorsque l'une est suffisamment<br />

soli<strong>de</strong> pour supporter la suivante. Faute <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te précaution<br />

indispensab<strong>le</strong>, après avoir travaillé à bâtir, on s'exposerait<br />

au spectac<strong>le</strong> décourageant <strong>de</strong> l'écrou<strong>le</strong>ment.<br />

En somme, au début du <strong>redressage</strong>, j'ai emprunté à Baucher<br />

ses moyens énergiques qui forcent à l'obéissance <strong>et</strong> font merveil<strong>le</strong><br />

sur <strong>le</strong>s chevaux blasés <strong>de</strong> l'action <strong>de</strong>s ai<strong>de</strong>s, lourds <strong>et</strong><br />

froids aux jambes ; puis, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> à rééduquer étant <strong>de</strong>venu obéissant<br />

aux ai<strong>de</strong>s, j'ai fait appel à l'équitation vraiment impulsive<br />

<strong>de</strong> Saint-Phal<strong>le</strong> qui convient très bien aux chevaux acculés.<br />

Ajoutez à cela <strong>le</strong>s moyens que l'étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s musc<strong>le</strong>s <strong>de</strong> l'encolure<br />

m'a amené à préconiser <strong>et</strong> vous aurez <strong>le</strong>s produits qui entrent<br />

dans la composition <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong>.<br />

Me basant sur <strong>de</strong> nombreuses expériences, je crois pouvoir<br />

dire que la très gran<strong>de</strong> majorité <strong>de</strong>s cavaliers peut en appliquant<br />

ces procédés redresser vite <strong>et</strong> convenab<strong>le</strong>ment n'importe<br />

quel <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>.<br />

Bien que c<strong>et</strong>te métho<strong>de</strong> ait été faite pour ces chevaux, je pense<br />

que <strong>le</strong>s moyens qui la composent peuvent être employés avec


efficacité pour redresser <strong>le</strong>s chevaux d'une autre race doués <strong>de</strong><br />

défauts analogues.<br />

Et maintenant il faut recoudre. Ayant analysé dans <strong>le</strong>s chapitres<br />

précé<strong>de</strong>nts <strong>le</strong>s différents procédés constituant la métho<strong>de</strong>,<br />

nous possédons <strong>de</strong>s idées claires sur tous <strong>le</strong>s termes <strong>de</strong> notre<br />

opération, il ne reste plus qu'à pourvoir à <strong>le</strong>ur mise en place.<br />

Ce sera l'obj<strong>et</strong> <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te exposition.<br />

§ 2. — Exposé <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong>.<br />

l ie pério<strong>de</strong>. — « Self-recovering ».<br />

2 e pério<strong>de</strong>. — M<strong>et</strong>tre en confiance, calmer, <strong>de</strong>scentes d'encolure<br />

(travail en élongation du « renv erseur » <strong>de</strong> l'encolure).<br />

3 e pério<strong>de</strong>. — Apprendre <strong>le</strong>s ai<strong>de</strong>s, m<strong>et</strong>tre <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> sur <strong>le</strong>s<br />

épau<strong>le</strong>s (défaut inverse), continuer <strong>le</strong>s <strong>de</strong>scentes d'encolure.<br />

4 e pério<strong>de</strong>. — Relèvement comp<strong>le</strong>t <strong>de</strong> l'encolure (travail en<br />

contraction <strong>de</strong> l'angulaire <strong>de</strong> l'omoplate), engagement <strong>de</strong>s propulseurs.<br />

5 e pério<strong>de</strong>. — Équilibrer, fléchir l'encolure, assouplir la mâchoire.<br />

Nous examinerons rapi<strong>de</strong>ment chacune <strong>de</strong> ces pério<strong>de</strong>s <strong>et</strong> je<br />

donnerai pour chacune d'el<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s précisions nécessaires ou compléments<br />

indispensab<strong>le</strong>s.<br />

7 re pério<strong>de</strong>. — « Self-recovering ».<br />

Le self-recovering pourra durer environ <strong>de</strong> quatre à huit jours<br />

suivant l'état physique <strong>et</strong> l'état moral du suj<strong>et</strong> à redresser.<br />

Caressez beaucoup <strong>et</strong> faites gentiment connaissance. Quelques<br />

douches <strong>et</strong> massages reposeront <strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s qui, même exempts <strong>de</strong><br />

tares, <strong>son</strong>t vraisemblab<strong>le</strong>ment courbaturés ou fatigués.<br />

2 e pério<strong>de</strong>. — M<strong>et</strong>tre en confiance, calmer, <strong>de</strong>scentes d'encolure.<br />

(l rc phase du travail <strong>de</strong> relèvement <strong>de</strong> l'encolure).<br />

Le « self-recovering » éta nt estimé suffisant, on pourra passer<br />

à la secon<strong>de</strong> division. El<strong>le</strong> durera au moins une dizaine <strong>de</strong> jours.<br />

Avec <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> malmené <strong>et</strong> qui travail<strong>le</strong> avec <strong>le</strong> splénius<br />

contracté au maximum, il ne faudra pas craindre <strong>de</strong> prolonger<br />

<strong>le</strong> <strong>cheval</strong> bariîk 13


— 194 —<br />

c<strong>et</strong>te pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> mise en confiance <strong>et</strong> d'elongation <strong>de</strong>s « ren verseurs<br />

» <strong>de</strong> l'encolure; ce sera assurer une base soli<strong>de</strong> aux progrès<br />

futurs qui n'en seront obtenus que plus faci<strong>le</strong>ment.<br />

Le <strong>cheval</strong> sera monté en gros fi<strong>le</strong>t dans <strong>le</strong> but <strong>de</strong> reposer ses<br />

barres <strong>et</strong> <strong>de</strong> rendre un peu <strong>de</strong> fraîcheur à sa bouche dans <strong>de</strong>s<br />

promena<strong>de</strong>s <strong>le</strong>ntes <strong>et</strong> assez longues au pas <strong>et</strong> au p<strong>et</strong>it trot à<br />

l'extérieur (1 h 30 à 2 h suivant l'état du <strong>cheval</strong>).<br />

Il faudra rigoureusement s'interdire tout acte <strong>de</strong> vio<strong>le</strong>nce <strong>et</strong><br />

trouver <strong>le</strong> moyen <strong>de</strong> se faire obéir sans être sévère. N'oubliez<br />

pas qu'à ce moment, si votre <strong>cheval</strong> n'obéit pas à vos <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s,<br />

c'est par ignorance, par crainte, ou par souffrance qu'il pèche.<br />

Le but <strong>de</strong> la pério<strong>de</strong> en cours ne <strong>de</strong>vra jamais être perdu <strong>de</strong><br />

vue; il est ici <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en confiance <strong>et</strong> <strong>de</strong> calmer ; pour <strong>le</strong> moment,<br />

il ne faudra pas s'occuper d'autre chose. Le cavalier se contentera<br />

<strong>de</strong> maintenir allure <strong>et</strong> direction ; pas <strong>de</strong> ra<strong>le</strong>ntissements ni<br />

d'arrêts brusques, pas <strong>de</strong> changements <strong>de</strong> direction à p<strong>et</strong>it<br />

rayon. « Laissez au <strong>cheval</strong> une gran<strong>de</strong> liberté car en restreignant<br />

ses mouvements on l'empêche <strong>de</strong> r<strong>et</strong>rouver <strong>son</strong> équilibre. »<br />

Dès <strong>le</strong> début <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te pério<strong>de</strong>, il faudra apprendre au <strong>cheval</strong><br />

<strong>et</strong> pratiquer fréquemment la gymnastique <strong>de</strong>s <strong>de</strong>scentes d'enco ­<br />

lure provoquées par <strong>le</strong>s jambes <strong>et</strong> obtenues <strong>de</strong> plus en plus « à<br />

fond » en usant <strong>de</strong> caresses distribuées à propos (loi <strong>de</strong>s associations).<br />

Toutes <strong>le</strong>s occasions propres à favoriser l'extension <strong>et</strong><br />

l'abaissement <strong>de</strong> l'encolure seront recherchées (laisser <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

manger <strong>de</strong> l'herbe <strong>le</strong> long <strong>de</strong>s routes <strong>le</strong> cavalier étant monté,<br />

<strong>et</strong>c...), que <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> se ren<strong>de</strong> bien compte qu'il peut à <strong>son</strong> aise<br />

baisser la tête <strong>et</strong> allonger <strong>son</strong> encolure sans rencontrer la bruta<strong>le</strong><br />

sévérité d'un mors qui lui meurtrit <strong>le</strong>s barres. Outre <strong>le</strong>ur<br />

eff<strong>et</strong> d'élongation sur <strong>le</strong> splénius, <strong>le</strong>s <strong>de</strong>scentes d'encolure concourent<br />

à donner au <strong>cheval</strong> confiance dans la main <strong>et</strong> l'habituent<br />

à chercher <strong>le</strong> contact du mors dans <strong>le</strong> mouvement en avant provoqué<br />

par <strong>le</strong>s jambes; à « courir après <strong>son</strong> mors ».<br />

Vers la fin <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te pério<strong>de</strong>, quand <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> confiant dans la<br />

main commence à prendre sur el<strong>le</strong> un appui franc <strong>et</strong> décidé, il<br />

faudra rechercher <strong>le</strong> calme dans Vimpulsion à toutes <strong>le</strong>s allures<br />

en évitant toutefois d'abuser du galop. Plus que jamais proscrire<br />

la vio<strong>le</strong>nce <strong>et</strong> la colère. « A gissez sur <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> par <strong>le</strong>s contraires,


opposant la patience à l'impatience, <strong>le</strong> calme à la vio<strong>le</strong>nce, l'énergie<br />

à la paresse <strong>et</strong> aussi au refus d'obéissance ( 1 ). »<br />

Au moindre signe d'obéissance <strong>de</strong> la part du <strong>cheval</strong>, faire<br />

succé<strong>de</strong>r immédiatement un repos (associations), relâcher <strong>le</strong>s<br />

jambes <strong>et</strong> <strong>le</strong>s rênes, passer au pas après une allure vive <strong>et</strong> m<strong>et</strong>tre<br />

pied à terre. Si <strong>le</strong>s allures <strong>son</strong>t désordonnées, fixer la main, arrêter,<br />

calmer <strong>et</strong> repartir tranquil<strong>le</strong>ment. Plus <strong>le</strong> cavalier sera fixe,<br />

mesuré <strong>et</strong> conciliant dans ses actions, plus <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> se m<strong>et</strong>tra<br />

en confiance, plus vite il reprendra <strong>son</strong> aplomb ( 2 ). »<br />

3 e pério<strong>de</strong>. — Apprendre <strong>le</strong>s ai<strong>de</strong>s, m<strong>et</strong>tre <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> sur <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s<br />

{défaut inverse), continuer <strong>le</strong>s <strong>de</strong>scentes d'encolure.<br />

Dans c<strong>et</strong>te pério<strong>de</strong> où <strong>le</strong>s éperons auront à intervenir <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

sera encore monté en fi<strong>le</strong>t. Ceci est nécessaire car « il fa ut toujours<br />

faire connaître <strong>le</strong>s éperons avant <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre <strong>le</strong> mors <strong>de</strong><br />

bri<strong>de</strong>, <strong>le</strong> bridon offrant un appui plus doux engage <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> à<br />

se m<strong>et</strong>tre <strong>de</strong>ssus <strong>et</strong> à se porter en avant ( 2 ). »<br />

C<strong>et</strong>te pério<strong>de</strong> pourra durer <strong>de</strong> dix à douze jours. Les <strong>le</strong>çons<br />

seront d'une heure ou d'une heure <strong>et</strong> <strong>de</strong>mie en insistant dans<br />

ce <strong>de</strong>rnier cas sur l'allure du pas. El<strong>le</strong>s <strong>de</strong>vront être données <strong>de</strong><br />

préférence à l'extérieur; <strong>le</strong> manège ne sera utilisé que si <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

est véritab<strong>le</strong>ment très diffici<strong>le</strong> à tenir ou manque <strong>de</strong> calme.<br />

a) Apprendre <strong>le</strong>s ai<strong>de</strong>s. — Le <strong>cheval</strong> étant <strong>de</strong>venu calme <strong>et</strong><br />

confiant dans la main, il sera temps <strong>de</strong> lui apprendre <strong>le</strong>s ai<strong>de</strong>s.<br />

L'obéissance à la jambe sera obtenue rapi<strong>de</strong> <strong>et</strong> complète par<br />

<strong>le</strong>s pirou<strong>et</strong>tes renversées <strong>de</strong> Baucher que je ne fais que résumer<br />

ici.<br />

1° Pirou<strong>et</strong>te renversée sur une seu<strong>le</strong> rêne. — Le cavalier étant<br />

à pied, <strong>de</strong>mi-tour sur <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s par opposition <strong>de</strong> la tête aux<br />

hanches avec une encolure maintenue é<strong>le</strong>vée, en s'appliquant à<br />

conserver la rigidité <strong>de</strong> l'encolure.<br />

2° Pirou<strong>et</strong>te renversée sur l'éperon. — Le cavalier étant à <strong>cheval</strong>,<br />

<strong>de</strong>mi-tour sur <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s en renforçant l'action <strong>de</strong> l'éperon<br />

qui chasse énergiquement <strong>le</strong>s hanches par l'opposition <strong>de</strong> la<br />

tête aux hanches avec une encolure maintenue é<strong>le</strong>vée <strong>et</strong> rigi<strong>de</strong>.<br />

(') Général L'Hotte.<br />

( a ) M anuel cCequitation <strong>et</strong> <strong>de</strong> dressage.


— 196 —<br />

La rêne <strong>et</strong> la jairme du même côté agissent simultanément. La<br />

rêne qui n'agit pas <strong>de</strong>vra rester flottante. Se servir <strong>de</strong> l'éperon<br />

près <strong>de</strong> la sang<strong>le</strong> ; procé<strong>de</strong>r avec décision mais avec calme <strong>et</strong>,<br />

en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> ces eff<strong>et</strong>s, traiter <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> avec beaucoup <strong>de</strong> douceur.<br />

Ces exercices <strong>de</strong>vront naturel<strong>le</strong>ment être répétés <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux<br />

côtés.<br />

L'emploi <strong>de</strong> l'éperon <strong>de</strong>vra être proportionné au <strong>de</strong>gré d'impressionnabilité<br />

du <strong>cheval</strong> <strong>et</strong> à sa résistance.<br />

Après chaque pirou<strong>et</strong>te, il faudra reporter <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> en avant<br />

en baissant <strong>le</strong>s mains <strong>et</strong> er laissant l'impulsion se produire librement<br />

dans un temps <strong>de</strong> trot ou <strong>de</strong> galop bien détendu.<br />

« Ce tte première <strong>le</strong>çon <strong>de</strong> l'éperon doit être donnée une ou<br />

<strong>de</strong>ux fois seu<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> chaque côté ( 1 ). » Les pirou<strong>et</strong>tes sur l'éperon<br />

seront continuées jusqu'à complète obéissance aux jambes,<br />

mais il suffira généra<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> 4 ou 5 <strong>le</strong>çons pour donner aux<br />

chevaux <strong>le</strong>s plus froids aux jambes une entière obéissance à <strong>le</strong>ur<br />

action.<br />

Le restant <strong>de</strong> la pério<strong>de</strong> sera employé à assouplir <strong>le</strong>s hanches<br />

<strong>et</strong> à <strong>le</strong>s mobiliser autour <strong>de</strong>s épau<strong>le</strong>s.<br />

La bri<strong>de</strong> pourra être prise dès que cesseront <strong>le</strong>s pirou<strong>et</strong>tes<br />

rinversées sur l'éperon.<br />

b) M<strong>et</strong>tre <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> su r <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s. — Les allures <strong>de</strong>vront être<br />

entr<strong>et</strong>enues énergiques <strong>et</strong> détendues. En avant ! En avant ! Il<br />

sera bon <strong>de</strong> pousser <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> au trot ou au galop dans <strong>de</strong>s <strong>de</strong>scentes<br />

afin <strong>de</strong> l'inciter à porter <strong>son</strong> poids sur l'avant-main. Quelques<br />

galops courts <strong>et</strong> vîtes pourront être donnés avec profit à<br />

ce moment. Donnez résolument au <strong>cheval</strong> <strong>le</strong> défaut inverse.<br />

Il tire? Fixez la main <strong>et</strong> laissez faire : <strong>le</strong> <strong>redressage</strong> est en bonne<br />

voie.<br />

Dans c<strong>et</strong>te pério<strong>de</strong>, <strong>le</strong>s hanches seront assouplies <strong>et</strong> mobilisées<br />

autour <strong>de</strong>s épau<strong>le</strong>s. Ce travail préparera l'arrière-main à<br />

recevoir <strong>le</strong> poids qu'el<strong>le</strong> aura à supporter du fait du relèvement<br />

<strong>de</strong> l'encolure. Mobiliser <strong>le</strong>s hanches contribuera en outre à charger<br />

<strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s <strong>et</strong> à m<strong>et</strong>tre <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> en avant.<br />

[ L ) Boiscilbert.


— 197 —<br />

La Guérinière dans <strong>son</strong> traité d'équitation écrit que dans la<br />

volte <strong>le</strong>s hanches en <strong>de</strong>hors « <strong>le</strong>s parties <strong>de</strong> <strong>de</strong>vant <strong>son</strong>t plus<br />

suj<strong>et</strong>tes <strong>et</strong> plus contraintes que cel<strong>le</strong>s <strong>de</strong> <strong>de</strong>rrière <strong>et</strong> que c<strong>et</strong>te<br />

façon m<strong>et</strong> <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> sur <strong>le</strong> <strong>de</strong>vant ».<br />

Newcast<strong>le</strong> écrit : « La tête <strong>de</strong>dans, la croupe <strong>de</strong>hors sur un<br />

cerc<strong>le</strong> m<strong>et</strong> d'abord <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> sur <strong>le</strong> <strong>de</strong>vant, il prend <strong>de</strong> l'appui<br />

<strong>et</strong> s'assouplit extrêmement <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s. Trotter <strong>et</strong> galoper la<br />

tête <strong>de</strong>dans, la croupe <strong>de</strong>hors jait al<strong>le</strong>r tout ce <strong>de</strong>vant vers <strong>le</strong><br />

centre e t <strong>le</strong> <strong>de</strong>rrière s'en éloigne étant plus pressé <strong>de</strong>s épau<strong>le</strong>s<br />

que <strong>de</strong> la croupe. Tout ce qui chemine sur un grand cerc<strong>le</strong> travail<strong>le</strong><br />

davantage parce qu'il fait plus <strong>de</strong> chemin que tout ce qui<br />

chemine sur un plus p<strong>et</strong>it cerc<strong>le</strong> ayant plus <strong>de</strong> mouvement à<br />

faire <strong>et</strong> il faut que <strong>le</strong>s jambas soient plus en liberté; <strong>le</strong>s autres<br />

<strong>son</strong>t plus contraintes <strong>et</strong> suj<strong>et</strong>tes dans <strong>le</strong> p<strong>et</strong>it cerc<strong>le</strong> parce qu'el<strong>le</strong>s<br />

portent tout <strong>le</strong> corps <strong>et</strong> cel<strong>le</strong>s qui font <strong>le</strong> plus grand cerc<strong>le</strong> <strong>son</strong>t<br />

plus longtemps en l'air qu'el<strong>le</strong>s. »<br />

C<strong>et</strong>te mobilité <strong>de</strong>s hanches sera rapi<strong>de</strong>ment obtenue avant la<br />

fin <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te pério<strong>de</strong>, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> étant <strong>de</strong>venu par <strong>le</strong> moyen <strong>de</strong>s<br />

pirou<strong>et</strong>tes renversées aussi obéissant à l'action <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux jambes<br />

qu'à cel<strong>le</strong> d'une seu<strong>le</strong>. El<strong>le</strong> sera augmentée progressivement mais<br />

en prenant soin <strong>de</strong> proportionner <strong>le</strong>s <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s au <strong>de</strong>gré <strong>de</strong><br />

connaissance <strong>et</strong> d'assouplissement <strong>de</strong>s hanches, bref aux possibilités<br />

du <strong>cheval</strong>. Suivre <strong>le</strong>s progrès <strong>et</strong> non <strong>le</strong>s précé<strong>de</strong>r.<br />

c) Les <strong>de</strong>scentes d'encolure seront continuées, perfectionnées<br />

durant tout ce travail <strong>et</strong> <strong>de</strong>mandées principa<strong>le</strong>ment après <strong>le</strong>s<br />

allures détendues qui doivent suivre toute pirou<strong>et</strong>te renversée su r<br />

l'éperon.<br />

En résumé, <strong>le</strong>s <strong>le</strong>çons journalières comprendront, après un<br />

léger travail <strong>de</strong> détente, une ou <strong>de</strong>ux pirou<strong>et</strong>tes renversées à<br />

pied sur une seu<strong>le</strong> rêne, puis une ou <strong>de</strong>ux pirou<strong>et</strong>tes renversées<br />

sur l'éperon <strong>de</strong> chaque côté après <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> poussé<br />

énergiquement sur <strong>le</strong> mors sera porte franchement en avant dans<br />

<strong>de</strong>s allures bien détendues. Descentes d'encolure <strong>et</strong> terminer <strong>le</strong>s<br />

<strong>le</strong>çons en travaillant la mobilité <strong>de</strong>s hanches autour <strong>de</strong>s épau<strong>le</strong>s<br />

•au pas d'abord puis au trot <strong>et</strong> au galop. Éviter <strong>le</strong>s mouvements<br />

<strong>de</strong> pied ferme qui n'habitueraient pas <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> à travail<strong>le</strong>r dans<br />

l'impulsion.


— 198 —<br />

pério<strong>de</strong>. — Relèvement comp<strong>le</strong>t <strong>de</strong> l'encolure (travail en<br />

contraction <strong>de</strong> l'angulaire <strong>de</strong> l'omoplate), engagement <strong>de</strong>s propulseurs.<br />

A ce moment du <strong>redressage</strong>, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>, autrefois acculé, doit<br />

être absolument engagé dans <strong>le</strong> défaut inverse <strong>et</strong> tout à fait sur<br />

<strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s.<br />

L'équilibre entre <strong>le</strong> bipè<strong>de</strong> antérieur <strong>et</strong> <strong>le</strong> bipè<strong>de</strong> postérieur<br />

sera recherché en faisant passer très progressivement sur l'arrière-main<br />

l'exacte quantité <strong>de</strong> poids nécessaire. Les jarr<strong>et</strong>s<br />

assouplis <strong>son</strong>t préparés à supporter <strong>le</strong> poids que <strong>le</strong> relèvement<br />

<strong>de</strong> l'encolure rej<strong>et</strong>tera sur eux, mais ils ne <strong>son</strong>t pas encore engagés<br />

sous la masse.<br />

Le but <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te pério<strong>de</strong> est <strong>de</strong> provoquer l'engagement <strong>de</strong>s<br />

propulseurs en même temps que « <strong>le</strong> no uvel équilibre nécessaire<br />

à tout <strong>cheval</strong> monté ». Sa durée pourra être <strong>de</strong> dix à douze jours<br />

<strong>et</strong> afin <strong>de</strong> débuter doucement <strong>le</strong> travail <strong>de</strong>s jarr<strong>et</strong>s, <strong>le</strong>s <strong>le</strong>çons<br />

ne dépasseront pas une heure. Le <strong>cheval</strong> pourra être monté en<br />

bri<strong>de</strong>, mais <strong>le</strong>s mouvements <strong>de</strong> relèvement <strong>de</strong> l'encolure seront<br />

naturel<strong>le</strong>ment <strong>de</strong>mandés au moyen du fi<strong>le</strong>t.<br />

A partir <strong>de</strong> ce moment, je conseil<strong>le</strong>rai <strong>de</strong> travail<strong>le</strong>r <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

au manège. Le <strong>barbe</strong>, souvent distrait à l'extérieur, sera ainsi<br />

susceptib<strong>le</strong> <strong>de</strong> plus d'attention ; <strong>le</strong>s progrès seront plus rapi<strong>de</strong>s.<br />

Le relèvement <strong>de</strong> la hase <strong>de</strong> Vencolure (2 e phase du travail <strong>de</strong><br />

relèvement) sera obtenu par l'élévation du nez du <strong>cheval</strong> à<br />

hauteur <strong>de</strong> ses oreil<strong>le</strong>s <strong>et</strong> <strong>le</strong> recu<strong>le</strong>r dans c<strong>et</strong>te position, <strong>le</strong> cavalier<br />

étant à pied.<br />

Après avoir placé <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> d'aplomb, <strong>le</strong> cavalier se place<br />

<strong>de</strong>vant <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>, saisit <strong>le</strong>s rênes <strong>de</strong> fi<strong>le</strong>t à quelques centimètres<br />

<strong>de</strong>s anneaux du fi<strong>le</strong>t <strong>et</strong> élève <strong>le</strong> bout du nez à hauteur <strong>de</strong>s oreil<strong>le</strong>s,<br />

<strong>le</strong>s bras tendus vertica<strong>le</strong>ment ; après avoir laissé un moment <strong>le</strong><br />

<strong>cheval</strong> dans c<strong>et</strong>te position, lorsque celui-ci soutient <strong>de</strong> lui-même<br />

<strong>le</strong> poids <strong>de</strong> <strong>son</strong> encolure, <strong>le</strong> cavalier pousse <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> en arrière<br />

jusqu'à <strong>le</strong> faire recu<strong>le</strong>r d'un pas d'abord pour arriver à <strong>de</strong>ux ou<br />

trois pas seu<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> recu<strong>le</strong>r dans c<strong>et</strong>te position. Laisser alors<br />

r<strong>et</strong>omber l'encolure dans sa position norma<strong>le</strong> <strong>et</strong> reporter <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

en avant. 11 faudra agir ici avec modération <strong>de</strong> façon à ne pas<br />

fatiguer <strong>et</strong> charger trop brusquement <strong>le</strong>s jarr<strong>et</strong>s. On <strong>de</strong>vra recu<strong>le</strong>r


— 199 —<br />

souvent <strong>et</strong> peu à chaque fois (5 ou G recu<strong>le</strong>ra la tête haute pourront<br />

être <strong>de</strong>mandés dans <strong>le</strong> courant <strong>de</strong> la <strong>le</strong>çon journalière).<br />

L'engagement <strong>de</strong>s propulseurs déjà amorcé par c<strong>et</strong>te sorte<br />

<strong>de</strong> recu<strong>le</strong>r sera poursuivi par l'exercice du ramener par impulsion.<br />

Il vaudra mieux chercher <strong>le</strong> ramener dans un travail long<br />

plutôt que dans un travail serré pour ne pas trop assujétir <strong>le</strong><br />

<strong>cheval</strong> afin que ni fatigue, ni gêne trop gran<strong>de</strong>, ni dou<strong>le</strong>ur ne<br />

viennent l'exaspérer <strong>et</strong> l'inciter à se soustraire à <strong>de</strong>s exigences<br />

abusives.<br />

L'assouplissement <strong>de</strong>s hanched sera continué <strong>et</strong> <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

poussé sur <strong>le</strong> mors dans un travail aux allures courtes où la<br />

mise en main ne sera <strong>de</strong>mandée que très progressivement.<br />

Les figures <strong>de</strong> manège seront commencées mais avec modération.<br />

El<strong>le</strong>s seront larges au début <strong>et</strong> <strong>de</strong> plus en plus serrées au<br />

fur <strong>et</strong> à mesure <strong>de</strong>s progrès du <strong>cheval</strong>. Suivre <strong>le</strong>s progrès <strong>et</strong> n on<br />

<strong>le</strong>s précé<strong>de</strong>r.<br />

5 e pério<strong>de</strong>. — Équilibrer, fléchir l'enco lure, assouplir <strong>le</strong>s articulations<br />

<strong>de</strong> la mâchoire (T ravail en contraction <strong>de</strong>s fléchisseurs<br />

<strong>de</strong> l'encolure, <strong>de</strong>rnière phase <strong>de</strong> <strong>son</strong> relèvement comp<strong>le</strong>t) .<br />

Le <strong>cheval</strong> connaît à présent <strong>le</strong>s ai<strong>de</strong>s <strong>et</strong> y obéit. L'encolure <strong>et</strong><br />

la tête <strong>son</strong>t à peu près bien placées. Les postérieurs <strong>son</strong>t engagés<br />

sous la masse. Il ne reste plus qu'à établir « la balance entre<br />

<strong>le</strong>s forces qui chassent en avant <strong>et</strong> cel<strong>le</strong>s qui modèrent » en développant<br />

la « dil igence » avec laquel<strong>le</strong> <strong>le</strong>s propulseurs doivent<br />

chasser <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s <strong>et</strong> à rendre la mâchoire soup<strong>le</strong>. Ceci fait, c'est<br />

en se jouant qu'un bon cavalier obtiendra équilibre, harmonie<br />

<strong>et</strong> légèr<strong>et</strong>é qui <strong>de</strong>viendront <strong>de</strong> plus en plus parfaits à mesure<br />

que s'affinera la soup<strong>le</strong>sse <strong>de</strong>s ressorts dans la mise en main <strong>et</strong><br />

<strong>le</strong> rassemb<strong>le</strong>r.<br />

La durée <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te pério<strong>de</strong> est impossib<strong>le</strong> à fixer, el<strong>le</strong> dépend<br />

<strong>de</strong>s qualités du <strong>cheval</strong> <strong>et</strong> du cavalier <strong>et</strong> du point jusqu'où on<br />

veut pousser ce travail <strong>de</strong> finissage. Des résultats ordinairement<br />

suffisants seront obtenus au bout d'une quinzaine <strong>de</strong> jours.<br />

Le cavalier <strong>de</strong>vra s'attaquer à présent à l'articulation maxillaire,<br />

<strong>de</strong>rnier ressort restant à assouplir avant d'arriver à la par­


— 200 —<br />

faite légèr<strong>et</strong>é. Pour <strong>le</strong>s rai<strong>son</strong>s précé<strong>de</strong>mment exposées, c<strong>et</strong>te<br />

articulation <strong>de</strong>vra être d'abord dégourdie au moyen <strong>de</strong>s f<strong>le</strong>xions<br />

directes <strong>de</strong> Banc lier <strong>et</strong> sa soup<strong>le</strong>sse développée ensuite dans la<br />

mise en main par <strong>le</strong>s eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong> l'impulsion venant buter sur<br />

une main fixe.<br />

Dès <strong>le</strong> début <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te pério<strong>de</strong>, <strong>le</strong>s f<strong>le</strong>xions directes seront<br />

faites journel<strong>le</strong>ment au commencement <strong>et</strong> à la fin du travail jusqu'à<br />

ce que la mâchoire cè<strong>de</strong> à la plus légère action <strong>de</strong>s mors <strong>et</strong><br />

à <strong>le</strong>urs différentes combinai<strong>son</strong>s. El<strong>le</strong>s <strong>de</strong>vront être abandonnées<br />

dès qu'el<strong>le</strong>s n'auront plus <strong>de</strong> rai<strong>son</strong> d'être <strong>et</strong> que l'articulation<br />

maxillaire sera suffisamment dégourdie. Des résultats satisfaisants<br />

seront atteints en général au bout <strong>de</strong> quelques jours.<br />

Les épau<strong>le</strong>s <strong>de</strong>vront bien entendu être assouplies, mais avec<br />

<strong>le</strong>s chevaux <strong>barbe</strong>s, mobilisées avec ménagements autour <strong>de</strong>s<br />

hanches. Pour assouplir <strong>et</strong> alléger <strong>le</strong> <strong>de</strong>vant, je conseil<strong>le</strong>rai surtout<br />

l'épau<strong>le</strong> en <strong>de</strong>dans en insistant sur <strong>le</strong> fait que ce mouvement<br />

doit être exécuté en allongeant l'allure <strong>et</strong> non en la ra<strong>le</strong>ntissant.<br />

C<strong>et</strong>te <strong>le</strong>çon, dit la Guérinière, est « la plus uti<strong>le</strong> <strong>de</strong> cel<strong>le</strong>s qu'on<br />

doit employer pour assouplir <strong>le</strong>s chevaux. El<strong>le</strong> produit tant <strong>de</strong><br />

bons eff<strong>et</strong>s à la fois que je la regar<strong>de</strong> comme la première <strong>et</strong> la <strong>de</strong>rnière<br />

<strong>de</strong> toutes cel<strong>le</strong>s qu'on peut donner au <strong>cheval</strong> pour lui faire<br />

prendre une entière soup<strong>le</strong>sse <strong>et</strong> une parfaite liberté dans toutes<br />

ses parties ».<br />

Dans c<strong>et</strong>te pério<strong>de</strong> où l'on recherche l'équilibre, la légèr<strong>et</strong>é,<br />

prendront place avec toutes <strong>le</strong>s figures <strong>de</strong> manège <strong>de</strong> plus eri<br />

plus serrées, <strong>le</strong>s départs au galop du trot, du pas, <strong>de</strong> l'arrêt,<br />

du recu<strong>le</strong>r, ainsi que <strong>le</strong>s allongements <strong>et</strong> <strong>le</strong>s ra<strong>le</strong>ntissements<br />

d'allures. Le galop à faux produira d'excel<strong>le</strong>nts résultats en<br />

« amenant <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> à modifier <strong>de</strong> lui-même <strong>son</strong> équilibre ( 1 ).<br />

Allongements <strong>et</strong> ra<strong>le</strong>ntissements d'allures <strong>de</strong> plus en plusfrancs<br />

<strong>et</strong> rapprochés <strong>de</strong>vront être <strong>de</strong>mandés sans mouvements<br />

<strong>de</strong> tête indiquant une lutte contre la main; <strong>le</strong>s allongements<br />

<strong>de</strong>vront être francs, immédiats <strong>et</strong> <strong>de</strong>vront se faire par détente<br />

énergique <strong>de</strong>s jarr<strong>et</strong>s <strong>et</strong> <strong>de</strong>s reins. Le cavalier <strong>de</strong>vra toujours<br />

[*) Manuel (T equitation <strong>et</strong> <strong>de</strong> d ressage-.


— 201 —<br />

veil<strong>le</strong>r à entr<strong>et</strong>enir une respectueuse obéissance à l'action <strong>de</strong>s<br />

jambes. Le souci du mouvement en avant doit percer pendant tout<br />

<strong>le</strong> travail. Les ra<strong>le</strong>ntissements au pas amèneront la « coulée »<br />

<strong>de</strong>s hanches sous la masse. Ce travail <strong>de</strong>s ra<strong>le</strong>ntissements <strong>et</strong> allongements<br />

d'allures débuté sur une ligne droite, sera exécuté ensuite<br />

sur <strong>le</strong> cerc<strong>le</strong> <strong>et</strong> aux <strong>de</strong>ux mains ; <strong>le</strong>s hanches, ainsi, seront obligées<br />

<strong>de</strong> s'engager davantage, la soup<strong>le</strong>sse <strong>de</strong> la colonne vertébra<strong>le</strong><br />

sera plus développée. Toutes <strong>le</strong>s fois qu'un <strong>cheval</strong> lutte<br />

contre la main dans <strong>le</strong>s ra<strong>le</strong>ntissements aux allures vives, il faut<br />

<strong>le</strong> reprendre sur <strong>le</strong>s ra<strong>le</strong>ntissements au pas.<br />

Enfin, il sera bon, après <strong>le</strong>s ra<strong>le</strong>ntissements d'allures, <strong>de</strong> prendre<br />

pendant quelque temps <strong>de</strong>s allures franches <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> bien<br />

appuyé sur la main. Il faudra toujours terminer un travail rassemblé<br />

par <strong>de</strong>s allures allongées <strong>et</strong> détendues avant <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre<br />

<strong>le</strong> <strong>cheval</strong> au repos.<br />

L'accu<strong>le</strong>ment étant plus grave <strong>de</strong> conséquences <strong>et</strong> plus diffici<strong>le</strong><br />

à combattre, <strong>le</strong> cavalier <strong>de</strong>vra, pendant tout <strong>le</strong> <strong>redressage</strong>,<br />

veil<strong>le</strong>r soigneusement à ne pas amoindrir l'impulsion, <strong>le</strong> perçant<br />

<strong>et</strong> à entr<strong>et</strong>enir <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> toujours franchement dans <strong>le</strong> mouvement<br />

en avant.<br />

Que <strong>le</strong> <strong>le</strong>cteur qui entreprendra <strong>le</strong> <strong>redressage</strong> d'un <strong>cheval</strong><br />

<strong>barbe</strong> essaie c<strong>et</strong>te métho<strong>de</strong> ; il sera étonné <strong>de</strong> la rapidité avec<br />

laquel<strong>le</strong> il transformera ce <strong>cheval</strong> primitivement froid aux jambes,<br />

résigné, sans entrain, acculé, aux allures éteintes, en un<br />

<strong>cheval</strong> franc, joyeux, énergique, vibrant, aux allures vivifiées<br />

par une impulsion qui ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ra qu'à s'extérioriser gaîment.<br />

Au bout d'un mois ou d'un mois <strong>et</strong> <strong>de</strong>mi d'application <strong>de</strong> ces<br />

procédés, <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> sera équilibré <strong>et</strong> léger aux ai<strong>de</strong>s. Il<br />

sera <strong>de</strong>venu un <strong>cheval</strong> agréab<strong>le</strong>, soup<strong>le</strong>, doci<strong>le</strong>, soumis, perçant,<br />

offrant à <strong>son</strong> cavalier la perspective <strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>s satisfactions<br />

équestres.<br />

»


POSTFACE<br />

4 janvier 1930.<br />

Ä la suite <strong>de</strong> la publication du « Cheval <strong>barbe</strong> <strong>et</strong> so n <strong>redressage</strong> »<br />

dans la Revue <strong>de</strong> Cava<strong>le</strong>rie, j'ai été vivement pris à partie <strong>et</strong> accusé<br />

n d'arabophobie caractérisée », <strong>de</strong> « mener une campagne contre la<br />

cava<strong>le</strong>rie indigène », <strong>de</strong> « provoqu er la mésentente entre cadres français<br />

<strong>et</strong> indigènes », d'enrayer « <strong>le</strong>s engageme nts », <strong>de</strong> « j<strong>et</strong>er <strong>le</strong> discrédit<br />

sur la cava<strong>le</strong>rie tout entière » <strong>et</strong> ce travail a été même estimé<br />

<strong>de</strong>voir être « bien accueilli en Al<strong>le</strong>magne ».<br />

Je ne me perm<strong>et</strong>trai pas <strong>de</strong> discuter Va ppréciation <strong>de</strong> la haute<br />

autorité qui a écrit cela. Je n'ai pas non plus estimé convenab<strong>le</strong><br />

<strong>de</strong> répondre da ns <strong>le</strong> journal où ces critiques avaient paru.<br />

Si el<strong>le</strong>s étaient exactes, je n'a urais plus qu'à disparaître couvert<br />

<strong>de</strong> honte, d'opprobre <strong>et</strong> <strong>de</strong> remords! Comme jene <strong>le</strong> mérite en aucune<br />

façon, j'ai <strong>le</strong> bien naturel désir d'expliquer mes intentions. El<strong>le</strong>s<br />

ont été bonnes. J'ai la conviction profon<strong>de</strong> d'avoir, en écrivant<br />

ce livre, servi notre arme en général <strong>et</strong> nos cavaliers arabes en<br />

particulier, car je suis tout àl'opposé <strong>de</strong> V arabophobie. Comme tous<br />

ceux qui ont été au feu avec nos spa his, j'ai une très haute considération<br />

pour ces beaux <strong>et</strong> braves guerriers <strong>et</strong> pour <strong>le</strong>ur s bel<strong>le</strong>s qualités.<br />

Mes nombreux camara<strong>de</strong>s officiers indigè nes que j'ai connus<br />

<strong>et</strong> parmi <strong>le</strong>squels je conserve <strong>de</strong> fidè<strong>le</strong>s amis, ont dû se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r ce<br />

qu'il m'arrivait s'ils ont lu <strong>le</strong>s reproches sévères q ui m'ont été i n­<br />

fligés!...<br />

Je n'ai plus qu'un mot à dire sur la légen<strong>de</strong> <strong>de</strong> l 'Arabe cavalier.<br />

Je reconnais bien volontiers qu'el<strong>le</strong> a été u ti<strong>le</strong>, nécessaire même<br />

autrefois <strong>et</strong> <strong>de</strong> plus d'une parfaite psychologie lorsque « pour ne<br />

pas r<strong>et</strong>ar<strong>de</strong>r l'entrée en ligne <strong>de</strong>s combattants », <strong>le</strong>s événements<br />

« imposaient la formation rapi<strong>de</strong> d'escadrons <strong>de</strong> spahis ». C'est<br />

là un fait indiscutab<strong>le</strong>. Mais aujourd'hui, <strong>le</strong>s conditions ne <strong>son</strong>t


— 204 —<br />

-plus <strong>le</strong>s même s <strong>et</strong> c<strong>et</strong>te légen<strong>de</strong> <strong>de</strong>vient non seu<strong>le</strong>ment inuti<strong>le</strong>, mais<br />

néfaste en se perpétuant sans rai<strong>son</strong>. Il me parait évi<strong>de</strong>nt qu'il<br />

serait plus profitab<strong>le</strong>, à présent, <strong>de</strong> travail<strong>le</strong>r sur <strong>de</strong>s bases nouvel<strong>le</strong>s<br />

mieux en accord avec l'actualité, <strong>le</strong> ré el <strong>et</strong> <strong>le</strong> possib<strong>le</strong>, <strong>de</strong> substituer<br />

à la légen<strong>de</strong> <strong>de</strong> V « Arabe cavalier tout fait » la réalité « l'Arabe<br />

excel<strong>le</strong>nt cavalier en puissance », cavalier à instruire {je ne dis pas<br />

par m oi, je suis avec rai<strong>son</strong> dépourvu <strong>de</strong> prétentions en la matière<br />

) par notre bon règ<strong>le</strong>ment métropolitain, tout simp<strong>le</strong>ment.<br />

Les Arabes <strong>de</strong>viendraient alors <strong>de</strong> très bons cavaliers ou — si l'on<br />

veut — <strong>de</strong>s cavaliers meil<strong>le</strong>urs.<br />

Et voilà pourquoi je gar<strong>de</strong>, malgré t out, profondément accro chées<br />

au fond d u cœur, la conviction <strong>et</strong> la consolante certitu<strong>de</strong> d'avoir<br />

servi mon arme <strong>et</strong> mes amis spahis en écrivant ceci.


TABLE DES GRAVURES<br />

Pages<br />

1 Cheval <strong>barbe</strong> 2<br />

2 Arabe <strong>barbe</strong> 2<br />

3 Pur-sang arabe 4<br />

4 <strong>et</strong> 4 6is Chevaux arabes du Hedjaz 5<br />

5 Messaoud sur l'obstac<strong>le</strong> 10<br />

6 Zanzi monté par <strong>le</strong> capitaine <strong>de</strong> Laissardière 10<br />

7 <strong>et</strong> 8 Loyauté 14<br />

9 <strong>et</strong> 10 Chevaux <strong>barbe</strong>s du Gharb (Maroc occi<strong>de</strong>ntal) ... 24<br />

11 <strong>et</strong> 12 Cheval <strong>barbe</strong> <strong>de</strong> Constantine 25<br />

13 Barbe d'Alger 26<br />

14 Barbe d'Oran 26<br />

15,16,17 Chevaux du Rif 26<br />

18 <strong>et</strong> 19 Chevaux marocains du Gharb (Maroc occi<strong>de</strong>ntal) . 27<br />

20 <strong>et</strong> 21 Chevaux marocains <strong>de</strong> la région <strong>de</strong> Mogador .... 28<br />

22 Sel<strong>le</strong> arabe sans housse 30<br />

23 Harnachement arabe 30<br />

24 Position du cavalier arabe 30<br />

25 Mors arabe militaire 32<br />

26 Mors arabe civil 36<br />

27 Mors du mu<strong>le</strong>t 37<br />

28 Éperons arabes 38<br />

29 « Le croc-en-jambe à la lance », vign<strong>et</strong>te extraite <strong>de</strong><br />

« La parure du cavalier », artic<strong>le</strong> <strong>de</strong> M. Louis MebciEit,<br />

paru dans <strong>le</strong> Sport Universel . . 43<br />

30 Cavaliers arabes d'Arabie (Hedjaz) 44<br />

30 bis Cavaliers arabes (Nord africain) 44<br />

31 Harnachement arabe d'Arabie 45<br />

32 Harnachement arabe (Nord africain) 45<br />

33 <strong>et</strong> 34 Fantasias ; 52<br />

35 Le port au vent <strong>et</strong> l'encapuchonnement 64<br />

36 Eff<strong>et</strong>s du renversement <strong>de</strong> l'encolure sur la distance qui<br />

sépare <strong>le</strong> mors <strong>de</strong> la main 64<br />

37 <strong>et</strong> 38 Encolure renversée. — Pour tenter <strong>de</strong> rétablir l'équilibre,<br />

<strong>le</strong> <strong>cheval</strong> pousse en avant la base <strong>de</strong> <strong>son</strong> encolure<br />

64<br />

39 Cavalier arabe au trot 68<br />

40 Cavalier arabe au galop 68<br />

•41 Galop <strong>de</strong> la Guérinière 74<br />

12 Galop avec base bipéda<strong>le</strong> postérieure 74


— 206 —<br />

Page»<br />

43 <strong>et</strong> 44 Cavaliers arabes au galop 75<br />

45, 46, 47, 48 Schémas <strong>de</strong>s différents aplombs (exagérés à <strong>de</strong>ssein). . 87<br />

49 Attitu<strong>de</strong> caractéristique du <strong>barbe</strong> 88<br />

50 Sque<strong>le</strong>tte du jarr<strong>et</strong> 90<br />

51 Influence du rassemb<strong>le</strong>r par convergence <strong>de</strong>s antérieurs<br />

<strong>et</strong> <strong>de</strong>s postérieurs sur <strong>le</strong>s mouvements du <strong>cheval</strong><br />

en action 92<br />

52 Décomposition <strong>de</strong>s mouvements d'élévation <strong>et</strong> d'abaissement<br />

du centre <strong>de</strong> gravité dans la locomotion<br />

anima<strong>le</strong> 93<br />

53, 54, 55, 56, 57, 58 Schémas <strong>de</strong>s différents équilibres du <strong>cheval</strong><br />

pendant <strong>son</strong> <strong>redressage</strong> 114<br />

59 Schéma <strong>de</strong>s différentes positions <strong>de</strong> l'encolure <strong>et</strong> <strong>le</strong>ur<br />

influence sur <strong>le</strong>s allures 139<br />

60 Sque<strong>le</strong>tte <strong>de</strong> l'encolure 146<br />

61 Schéma <strong>de</strong>s différentes positions <strong>de</strong> l'encolure 146<br />

62, 63, Les musc<strong>le</strong>s <strong>de</strong> l'encolure. Rô<strong>le</strong> du rhomboï<strong>de</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong> l'angulaire<br />

pendant la pério<strong>de</strong> d'appui du membre. 154, 155<br />

64, 65, 66 Levier <strong>de</strong>s fléchisseurs <strong>et</strong> <strong>de</strong>s extenseurs. — Sternomaxillaire.<br />

— Splénius .— Grand <strong>et</strong> p<strong>et</strong>it comp<strong>le</strong>xus<br />

156, 158<br />

67 Action du mastoïdo-huméral dans <strong>le</strong>s allures ..... 158<br />

68 Axe <strong>de</strong>s principaux musc<strong>le</strong>s <strong>de</strong> l'encolure 160<br />

69 Cheval <strong>barbe</strong> à la fin <strong>de</strong> la première partie <strong>de</strong> <strong>son</strong><br />

<strong>redressage</strong> (sur <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s : défaut inverse) .... 162<br />

70 Le même <strong>cheval</strong> à la fin <strong>de</strong> <strong>son</strong> <strong>redressage</strong> 162<br />

71 Schéma <strong>de</strong>s musc<strong>le</strong>s dans l'encolure renversée . . . . 163<br />

72 Schéma <strong>de</strong>s musc<strong>le</strong>s d'une encolure bien placée. . . 163<br />

73 Rô<strong>le</strong> du mastoïdo-huméral <strong>et</strong> du trapèze dans <strong>le</strong> recu<strong>le</strong>r<br />

169


TABLE DES MATIÈRES<br />

PRÉFACE<br />

PLAN<br />

Pages<br />

v<br />

ix<br />

PREMIÈRE PARTIE<br />

LE CHEVAL BARBE<br />

CHAPITRE I<br />

§ 1. — Généralités. — Son tempérament. — Sa tail<strong>le</strong> 1<br />

§ 2. — Son portrait co mparé ayec celui du <strong>cheval</strong> arabe 3<br />

§ 3. — .Ses qualités : « Le meil<strong>le</strong>ur <strong>cheval</strong> <strong>de</strong> guerre du mon<strong>de</strong>. » —<br />

Son caractère. — Ses moyens 5<br />

§ 4. — Le <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> ne saute pas. — Les rai<strong>son</strong>s pour <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s<br />

ses moyens <strong>de</strong> saut <strong>son</strong>t inconnus'. 8<br />

CHAPITRE II<br />

La- population <strong>cheval</strong>ine <strong>de</strong> l'Afrique du Nord <strong>et</strong> l'é<strong>le</strong>vage du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> .<br />

§ 1 . •— La population <strong>cheval</strong>ine. — Autrefois. — Aujourd'hui. -—<br />

Causes <strong>de</strong> dégénérescence 17<br />

§ 2. —- L'é<strong>le</strong>vage en Afrique du Nord 20<br />

§ 3. •—• Comme nt est é<strong>le</strong>vé l e <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong>. — So/i utilisation . . . 2 1<br />

CHAPITRE III<br />

Des différentes variétés <strong>de</strong> la race <strong>barbe</strong>.<br />

§ 1. — Les chevaux d'Algérie. — a) Province <strong>de</strong> Constantine. —<br />

b) Province d'Alger. — c) P rovince d'Oran 25<br />

§ 2. — Les chevaux du Maroc 26<br />

DEUXIÈME PARTIE<br />

COMMENT EST MONTÉ LE CHEVAL BARBE<br />

CHAPITRE I<br />

Les moyens.<br />

§ 1 . -— Le harnachement arabe. — 1° La sel<strong>le</strong>. —- S a constitution.


— 208 —<br />

Pages<br />

— Ses caractéristiques au point <strong>de</strong> vue équestre. — 2° Les<br />

mors. — La « honte du mors arabe ». — a) Le mors arabe militaire.—<br />

Ses particularités.— « On s'imagine généra<strong>le</strong>ment<br />

qu'il est dur. »— Le mors arabe militaire comparé au mors<br />

rég<strong>le</strong>mentaire français. — Indépendamment <strong>de</strong> la force <strong>de</strong><br />

<strong>le</strong>vier du mors, d'autres éléments peuvent produire sa<br />

dur<strong>et</strong>é. — Les qualités que <strong>le</strong> Manuel à l'us age <strong>de</strong>s gradés<br />

<strong>de</strong>s rsgimenfs <strong>de</strong> sp ahis attribue au mors arabe. — Comment<br />

<strong>le</strong> mors arabe produit l'affaissement <strong>de</strong> l'encolure. —<br />

b] L e mors arabe civil. — Sa constitution. — Sa dur<strong>et</strong>é. —<br />

c) Le mors <strong>de</strong> mu<strong>le</strong>t. — Sa constitution. — Sa dur<strong>et</strong>é. . . 29<br />

§ 2. —• Les moyens d'impulsion. •— a) Les éperons arabes. — b) L'étrier.<br />

— c) Le choc <strong>de</strong> l'éperon contre l'étrier. — d) L'extrémité<br />

<strong>de</strong>s rênes 38<br />

CHAPITRE II<br />

L'equitation arabe dans <strong>le</strong>s tribus.<br />

I 1. — La légen<strong>de</strong> <strong>de</strong> « VArabe cavalier <strong>et</strong> homme <strong>de</strong> <strong>cheval</strong> accompli ».<br />

— Ses idées sur <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> ; comment il l'apprécie ; <strong>son</strong> habi<strong>le</strong>té<br />

équestre<br />

I 2. — L'équitation arabe dans <strong>le</strong>s tribus. — Comment <strong>le</strong>s Arabes se<br />

servent du mors dans <strong>le</strong>s tribus. — Les fantasias. — Conséquences<br />

<strong>de</strong> l'emploi d'un mors trop dur. — « Il existe une<br />

relation intime entre la puissance <strong>de</strong>s éperons <strong>et</strong> cel<strong>le</strong><br />

du mors <strong>de</strong> bri<strong>de</strong>. » — Comment <strong>le</strong>s Arabes croient pouvoir<br />

rétablir l'équilibre. — Les erreurs fondamenta<strong>le</strong>s <strong>de</strong><br />

l'équitation arabe dans <strong>le</strong>s tribus : a) l'absence <strong>de</strong> dressage;<br />

b) la dur<strong>et</strong>é du mors<br />

40<br />

59<br />

CHAPITRE III<br />

L'équitation arabe dans <strong>le</strong>s régiments <strong>de</strong> spahis.<br />

$ 1. — Ce qu'el<strong>le</strong> est. — Le cavalier d'aujourd'hui n'est pas ce qu'il<br />

était autrefois. — Aujourd'hui plus que jamais instruction<br />

équestre <strong>et</strong> dressage du <strong>cheval</strong> <strong>son</strong>t nécessaires. —<br />

Les « bonnes rai<strong>son</strong>s » pour une instruction restreinte . . 49<br />

$ 2. — Ce qu 'el<strong>le</strong> <strong>de</strong>vrait être d' après <strong>le</strong> Manuel à l'usage <strong>de</strong>s gradés.<br />

<strong>de</strong>s régiments <strong>de</strong> saphis. — Examen critique <strong>de</strong>ce règ<strong>le</strong>ment.<br />

§ 3. — Ce q u'il faudrait qu'el<strong>le</strong> soit. — Avec <strong>le</strong> mors arabe il faut 61<br />

pratiquer une équitation arabe 81


— 209 —<br />

TROISIÈME PARTIE<br />

CE QUE DEVIENT LE CHEVAL BARBE AVEC LES PROCÉDÉS<br />

ET LES MÉTHODES EMPLOYÉS<br />

CHAPITRE I<br />

Comment on <strong>le</strong> trouve dans <strong>le</strong>s régiments.<br />

Pages<br />

§ 1 . — Sa silhou<strong>et</strong>te. — Aplombs, conséquences : l'encolure affaissée.<br />

— Le <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> est acculé. — L'accu<strong>le</strong>ment. — Le col<br />

ferme. — Le jarr<strong>et</strong> coudé 86<br />

§ 2. — Ses allures. •— Le <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> est plus beau au repos qu'en<br />

action. -— Si <strong>le</strong> cavalier se sert du mors, l'arrière-main<br />

est écrasée. — Les allures <strong>son</strong>t rai<strong>de</strong>s <strong>et</strong> gênées. — Conséquences<br />

<strong>de</strong> la rai<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> la colonne vertébra<strong>le</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong> la<br />

mâchoire. — Les allures du <strong>cheval</strong> sous lui du <strong>de</strong>vant <strong>et</strong><br />

sous lui du <strong>de</strong>rrière. — Les forces qui élèvent <strong>le</strong> centre <strong>de</strong><br />

gravité <strong>son</strong>t l'élément <strong>le</strong> plus important <strong>de</strong> la dépense<br />

dans la locomotion anima<strong>le</strong>. — Le <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> au pas,<br />

au trot, au galop. — «Il y a <strong>de</strong>s chevaux qui participent à<br />

l'accu<strong>le</strong>ment <strong>et</strong> à la surcharge <strong>de</strong>s épau<strong>le</strong>s. » — « A quoi<br />

tient c<strong>et</strong>te apparente anomalie. » — Le <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> se<br />

débat entre <strong>de</strong>ux dou<strong>le</strong>urs 91<br />

§ 3. — Ses défenses. — El<strong>le</strong>s <strong>son</strong>t toutes conséquences <strong>de</strong> l'accu<strong>le</strong>ment<br />

<strong>et</strong> <strong>de</strong> jarr<strong>et</strong>s douloureux. — L'équitation « dite<br />

arabe » q ui interdit l'emploi d'une jambe isolée favorise<br />

encore l'accu<strong>le</strong>ment <strong>et</strong> <strong>le</strong>s résistances. — L'encolure est<br />

un timon. — L'absence d'eff<strong>et</strong> latéral du mors arabe<br />

<strong>et</strong> l'emploi unique en équitation arabe <strong>de</strong> la rêne contraire<br />

d'opposition pour conduire <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> facilitent aussi<br />

<strong>le</strong>s résistances 97<br />

§ 4. — Son caractère. — Les meil<strong>le</strong>urs chevaux <strong>de</strong>viennent rétifs. . 99<br />

CHAPITRE II<br />

Causes. -— Conséquences. — Remè<strong>de</strong>s.<br />

Les causes d'usure: <strong>le</strong> mors <strong>et</strong> <strong>son</strong> emploi. L'impossib<strong>le</strong> est <strong>de</strong>mandé<br />

au cavalier; l'absence <strong>de</strong> dressage. — Conséquences : usure<br />

rapi<strong>de</strong> <strong>et</strong> prématurée du <strong>cheval</strong>. — Les remè<strong>de</strong>s : une seu<strong>le</strong>solution<br />

logique <strong>et</strong> vraiment efficace ; supprimer <strong>le</strong> mors ;<br />

par quoi <strong>le</strong> remplacer 101


— 210 —<br />

QUATRIÈME PARTIE<br />

REDRESSAGE DU CHEVAL BARBE<br />

CHAPITRE I<br />

A quoi remédier <strong>et</strong> comme ni.<br />

Pages<br />

§ 1. — Choix d'un <strong>cheval</strong> : « La jeune branche se redresse sans grand<br />

travail, mais <strong>le</strong> gros bois ne se redresse jamais. » — II faut<br />

faire la part <strong>de</strong>s beautés <strong>et</strong> <strong>de</strong>s défectuosités. — Les compensations.<br />

— Le <strong>cheval</strong> en action. — Le <strong>cheval</strong> en station.<br />

— Le <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> rétif est <strong>le</strong> plus souvent un excel<strong>le</strong>nt<br />

<strong>cheval</strong>. — Il faut <strong>le</strong> monter à l'extérieur pour juger<br />

sa va<strong>le</strong>ur <strong>et</strong> observer ses allures au r<strong>et</strong>our vers l'écurie . 106<br />

§ 2. — A quoi remédier : à l'accu<strong>le</strong>ment. — Comment y remédier. —<br />

Première phase : équilibre naturel. —Deuxième phase: provoquer<br />

un nouvel équilibre qui tiendra compte du poids du<br />

cavalier <strong>et</strong> <strong>de</strong> sa répartition inéga<strong>le</strong>. — Troisième phase :<br />

équilibre entre <strong>le</strong>s forces qui chassent en avant <strong>et</strong> cel<strong>le</strong>s<br />

qui modèrent — Comment redresser <strong>le</strong>s chevaux « sur<br />

<strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s »; <strong>le</strong>s chevaux qui participent à l'accu<strong>le</strong>ment<br />

<strong>et</strong> à la surcharge <strong>de</strong>s épau<strong>le</strong>s 111<br />

§3. — Principes <strong>de</strong> dressage. — Théorie psychologique <strong>de</strong> l'obéissance.<br />

— Le « self-recovering ». -— La caresse-confiance <strong>et</strong><br />

la caresse-récompense ». — L'équité doit rég<strong>le</strong>r <strong>et</strong> peine<br />

<strong>et</strong> récompense. — « La volonté du cavalier doit être un<br />

mur... » 117<br />

^ 4. — Les défenses du <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> <strong>et</strong> commen t <strong>le</strong>s combattre : il faut<br />

chercher à combattre <strong>le</strong>s défenses en cherchant à rétablir<br />

l'équilibre. — Avant d'entreprendre <strong>de</strong> lutter contre<br />

un défaut, il faut en rechercher la cause. — De l'emploi<br />

<strong>de</strong>s rênes rigi<strong>de</strong>s sur <strong>le</strong>s chevaux qui se cabrent ou ne se<br />

portent pas en avant à l'attaque <strong>de</strong>s jambes 123<br />

CHAPITRE II<br />

A la recherche d'une métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>redressage</strong>.<br />

§ 1. — Généralités 127<br />

2. — Baucher <strong>et</strong> <strong>le</strong> <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> : <strong>le</strong>s <strong>de</strong>ux métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Baucher.<br />

— Pourquoi la <strong>de</strong>uxième peut être appliquée avec fruits au<br />

<strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> à redresser. — Avantages <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong><br />

Baucher : gran<strong>de</strong> puissance <strong>de</strong>s moyens auxquels <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

est forcé <strong>de</strong> cé<strong>de</strong>r; pirou<strong>et</strong>tes renversées sur l'éperon <strong>et</strong><br />

f<strong>le</strong>xions directes <strong>de</strong> la mâchoire 128


— 211 —<br />

CHAPITRE III<br />

Le relèvement <strong>de</strong> l'encolure.<br />

Pages<br />

§ 1 . — Ses eff<strong>et</strong>s : 1° sur <strong>le</strong> centre <strong>de</strong> gravité du <strong>cheval</strong>. — Nécessité<br />

<strong>de</strong> donner au <strong>cheval</strong> un nouvel équilibre ; 2° sur <strong>le</strong>s allures :<br />

<strong>de</strong> l'influence produite sur <strong>le</strong>s allures par <strong>le</strong>s différentes<br />

positions <strong>de</strong> l'encolure ; <strong>le</strong> relèvement <strong>de</strong> l'encolure doit<br />

toujours s'accompagner <strong>de</strong> l'engagement <strong>de</strong>s postérieurs;<br />

3° sur la domination du <strong>cheval</strong> : d'où provient <strong>le</strong> ra<strong>le</strong>ntissement<br />

<strong>et</strong> la domination forcée du <strong>cheval</strong> qui a l'encolure<br />

re<strong>le</strong>vée. -— L'encolure re<strong>le</strong>vée n'est pas compatib<strong>le</strong> avec la<br />

contraction <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s musc<strong>le</strong>s. •— Commen t s'explique<br />

l'influence du relèvement <strong>de</strong> l'encolure sur la suppression<br />

<strong>de</strong> suspension au galop 135<br />

§ 2. — Il y a <strong>de</strong>ux relèvements d'encolure : a] l'e ncolure renversée ;<br />

<strong>le</strong> <strong>cheval</strong> qui porte au vent à la base <strong>de</strong> l'encolure affaissée ;<br />

b) l'élévation complète <strong>de</strong> l'encolure. — Pourquoi <strong>le</strong> relèvement<br />

<strong>de</strong> l'encolure d'un <strong>cheval</strong> qui porte au vent ne peut<br />

empêcher l'embal<strong>le</strong>ment. — Dans quel ordre faut-il s'occuper<br />

<strong>de</strong>s articulations du


212<br />

CHAPITRE VI<br />

Obéissance aux ai<strong>de</strong>s. — Mise en main.—Légèr<strong>et</strong>é.<br />

Pages<br />

§ 1 . — Le <strong>cheval</strong> <strong>barbe</strong> ne connaît pas <strong>le</strong>s ai<strong>de</strong>s. — Le défaut à combattre<br />

n'est autre que l'ignorance 180<br />

§2. — L'obéissance aux jambes : il est nécessaire d'employer au<br />

début du <strong>redressage</strong> <strong>de</strong>s moyens qui obligent <strong>le</strong> <strong>cheval</strong><br />

à cé<strong>de</strong>r. — Les pirou<strong>et</strong>tes renversées <strong>de</strong> Baucher. — « Le<br />

travail correctif <strong>de</strong>s résistances doit être abandonné dès<br />

qu'il est sans but. » — Quand la jambe se fait sévère, il<br />

faut que la main laisse échapper l'impulsion. — Jambes<br />

énergiques <strong>et</strong> perpétuel emploi <strong>de</strong>s jambes 181<br />

§ 3. — Vobéissance aux rênes. — La liai<strong>son</strong> entre la bouche du <strong>cheval</strong><br />

<strong>et</strong> la main du cavalier. — « Il faut, non pas que <strong>le</strong> mors<br />

vienne sur <strong>le</strong> <strong>cheval</strong>, mais que celui-ci soit renvoyé sur<br />

<strong>le</strong> mors. »— Inconvénients <strong>de</strong>s tractions sur <strong>le</strong>s rênes . . . 184<br />

§4. — La mise en main. — La légèr<strong>et</strong>é. — Ce que c'est que la mise<br />

en main. — Par quoi el<strong>le</strong> est constituée. — Ses eff<strong>et</strong>s. —<br />

Ce qu'on peut obtenir par la mise en main. — La mise en<br />

main d'après Saint-Phal<strong>le</strong>. — La légèr<strong>et</strong>é <strong>et</strong> la fausse<br />

légèr<strong>et</strong>é. — Ce en quoi consiste la vraie légèr<strong>et</strong>é 186-<br />

CINQUIÈME PARTIE<br />

UNE MÉTHODE DE REDRESSAGE<br />

§ 1 . — Considérations généra<strong>le</strong>s<br />

§2. — Exposé <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong> .<br />

191<br />

193<br />

POSTFACE 203<br />

TABLE DES GRAVURES 205<br />

rUPUDtEBIE BERQEU-LEVSAÜLT, NANCY-PABIg-STBAâBOÛBG. — 1930

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