Les Conjurées ou La Croisade des dames - Opéra Théâtre de Saint ...
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Composée entre ses <strong>de</strong>ux grands opéras les plus ab<strong>ou</strong>tis (Alfonso und Estrella<br />
et Fierabras), la partition <strong><strong>de</strong>s</strong> Conjurées est achevée en quelques semaines<br />
seulement en avril 1823. Inspiré <strong><strong>de</strong>s</strong> œuvres d’Aristophane (L’Assemblée <strong><strong>de</strong>s</strong><br />
femmes et surt<strong>ou</strong>t Lysistrata) transposées en univers germanique à l’époque <strong><strong>de</strong>s</strong><br />
croisa<strong><strong>de</strong>s</strong>, le livret est issu d’un recueil <strong>de</strong> pièces <strong><strong>de</strong>s</strong>tinées par leur auteur Ignaz<br />
Franz Castelli (1781-1862) à être portées sur les scènes lyriques (parution en<br />
février 1823). Défenseur <strong>de</strong> la liberté <strong><strong>de</strong>s</strong> pays germaniques contre Napoléon,<br />
opposant au régime <strong>de</strong> Metternich, Castelli est alors un auteur dramatique déjà<br />
bien connu et la censure veille sur sa production. Le choix d’Aristophane prend<br />
alors une dimension politique et sociale très forte.<br />
L’histoire est celle d’une conjuration <strong>de</strong> femmes lasses <strong><strong>de</strong>s</strong><br />
occupations guerrières <strong>de</strong> leurs maris qui espèrent avoir tr<strong>ou</strong>vé<br />
un bon moyen <strong>de</strong> contraindre ces éternels croisés à changer<br />
d’existence en se refusant à eux…<br />
Derrière les clichés <strong>de</strong> la guerre <strong><strong>de</strong>s</strong> sexes et la faça<strong>de</strong> innocente d’une révolte<br />
féminine, s<strong>ou</strong>ffle un vent <strong>de</strong> rébellion politique et morale sur la Vienne<br />
Bie<strong>de</strong>rmeier. Aussi l’intrigue paraît-elle malséante et suspecte à la censure<br />
<strong>de</strong> Metternich qui exige d’abord un changement du titre - le singspiel <strong>de</strong>vait<br />
désormais s’intituler Der häusliche Krieg / <strong>La</strong> Guerre domestique - avant d’en<br />
interdire les représentations.<br />
C’est finalement à Berlin que la pièce <strong>de</strong> Castelli tr<strong>ou</strong>ve son public le 6 janvier<br />
1824, mais avec la musique d’un autre compositeur, celle <strong>de</strong> Georg Abraham<br />
Schnei<strong>de</strong>r (1770-1839).<br />
<strong>La</strong> partition <strong>de</strong> Schubert comprend onze numéros musicaux où les dialogues<br />
parlés alternent avec <strong><strong>de</strong>s</strong> Duos, <strong><strong>de</strong>s</strong> Ariettes et six Chœurs (exclusivement<br />
féminin, puis masculin et enfin mixtes). Trois c<strong>ou</strong>ples dominent l’intrigue :<br />
le Comte et la Comtesse, responsables <strong>de</strong> l’action (Heribert et Ludmilla von<br />
Lü<strong>de</strong>nstein) ; <strong>de</strong>ux jeunes am<strong>ou</strong>reux, lyriques et tendres, à peines mariés mais<br />
déjà séparés (Alstof et Hélène von Reisenberg) ; un page et une servante<br />
(Udolin et Isella), comiques et prosaïques.<br />
Pleine <strong>de</strong> verve et <strong>de</strong> gaieté, mais aussi <strong>de</strong> tendresse et <strong>de</strong> force, la musique aux<br />
accents contrastés <strong>de</strong> Schubert puise son inspiration dans le modèle mozartien :<br />
la Romance n°2 d’Hélène n’est pas sans rappeler la Cavatine <strong>de</strong> Barberine<br />
(n°24 <strong><strong>de</strong>s</strong> Noces <strong>de</strong> Figaro), par le caractère, l’inflexion mélodique, mais aussi<br />
le rec<strong>ou</strong>rs à la tonalité <strong>de</strong> fa mineur ; tandis que la l’utilisation <strong><strong>de</strong>s</strong> trombones<br />
associés aux timbales dans la Scène <strong>de</strong> conjuration en ré mineur (n°4<br />
Verschwörungschor) renvoie à la Scène du comman<strong>de</strong>ur dans Don Giovanni.<br />
Le Finale n°11 impressionne par ses larges proportions (une cinquantaine <strong>de</strong><br />
pages <strong>de</strong> partition) et son architecture <strong>de</strong> rondo faisant alterner <strong><strong>de</strong>s</strong> épiso<strong><strong>de</strong>s</strong><br />
aux tempos vifs et lents. <strong>La</strong> musique <strong>de</strong> Schubert oscille entre légèreté et<br />
gravité donnant par-là même à estimer le livret <strong>de</strong> Castelli dans t<strong>ou</strong>te sa<br />
profon<strong>de</strong>ur.<br />
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