L'ORGANISATION SUPRAMOLECULAIRE - Orgapolym
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Pr Hatem BEN ROMDHANE<br />
Faculté des Sciences de Tunis<br />
Département de Chimie<br />
CHAPITRE III<br />
<strong>L'ORGANISATION</strong> <strong>SUPRAMOLECULAIRE</strong><br />
1. L'état liquide<br />
Le liquide est isotrope, c'est-à-dire que les molécules qui le constituent ne suivent aucun<br />
ordre. A l'état liquide, fondu ou solvaté, les polymères se présentent sous la forme de pelotes<br />
statistiques plus ou moins enchevêtrées.<br />
2. L'état cristal liquide<br />
Le cristal liquide présente toujours la propriété d'écoulement, mais les molécules qui le<br />
constituent sont assemblées suivant un certain ordre de type cristallin. Il présente un<br />
comportement anisotrope.<br />
Les régions ordonnées du liquide sont appelées des mésophases. Ce sont des groupes rigides<br />
(mésogènes) en forme de bâtonnet ou ayant la forme de disques (figure 1).<br />
RO<br />
OR<br />
X Z X<br />
RO<br />
OR<br />
A B C<br />
Figure 1 : mésogènes en forme de bâtonnet (A et B) ou en forme de disque (C)<br />
Suivant la façon dont les molécules sont orientées dans les mésophases, il existe<br />
principalement trois types de cristaux liquides (figure 2).<br />
nématique smectique cholestérique<br />
Figure 2 : représentation schématique des différents ordres moléculaires<br />
dans les trois types de cristaux liquides<br />
Les mésogènes peuvent appartenir à la chaîne macromoléculaire ou se présenter comme des<br />
groupements pendants (Figure 3).<br />
COURS POUR LES ÉTUDIANTS DE PREMIÈRE ANNÉE DE MASTER DE CHIMIE 1
<strong>L'ORGANISATION</strong> SUPRAMOLÉCULAIRE<br />
Mésogènes dans la chaîne<br />
Mésogènes pendants<br />
Figure 3 : Disposition des groupes mésogènes (rectangles)<br />
et des jonctions flexibles (zigzag) dans les cristaux liquides<br />
Dans les polymères cristaux liquides, on distingue deux types de comportement :<br />
• Les polymères thermotropes qui se forment par fusion. Ils ont des substituants<br />
volumineux, et on y trouve une jonction flexible entre mésogènes<br />
• Les polymères lyotropes se forment en présence d'un solvant. En solution, à partir<br />
d'une certaine concentration, les interactions chaîne-chaîne deviennent supérieures aux<br />
interactions solvant-chaîne.<br />
La morphologie des cristaux liquides peut être influencée par des champs électriques ou<br />
magnétiques externes; ils peuvent changer de couleur avec la température et peuvent présenter<br />
un très haut pouvoir rotatoire.<br />
De plus le produit final conserve à l'état solide l'ordre existant à l'état liquide, ce qui donne<br />
d'excellentes propriétés mécaniques. Le KEVLAR ® de Dupont de Nemours en est un exemple<br />
(figure 4). Il s'agit d'un polyamide aromatique à liaisons amides (d'où leur nom aramide) dont<br />
les propriétés sont très différentes des polyamides aliphatiques courants (nylon). Dans les<br />
fibres obtenues par extrusion, les chaînes macromoléculaires sont alignées. La résistance à la<br />
rupture en tension est supérieure à celle de l'acier. Malheureusement les polymères cristaux<br />
liquides sont faiblement solubles. On utilise alors des espaceurs flexibles pour améliorer leur<br />
solubilité.<br />
O<br />
C C NH NH<br />
O<br />
mésogènes<br />
O<br />
O<br />
C NH C NH<br />
espaceurs<br />
CH 3<br />
CH 2 Si O<br />
CH 3<br />
Figure 4: mésogènes et espaceurs utilisés dans le KEVLAR ®<br />
CHAPITRE-III 2
Pr Hatem BEN ROMDHANE<br />
3. L'état solide :<br />
Faculté des Sciences de Tunis<br />
Département de Chimie<br />
Polymères cristallins et semi-cristallins<br />
Lorsqu'un polymère a une structure hautement stéréorégulière avec très peu ou pas de<br />
ramifications, ou quand il contient des groupes polaires pouvant donner des interactions<br />
dipôle-dipôle, il peut se présenter sous forme cristalline.<br />
Outre les facteurs structuraux, la cinétique de refroidissement d'un polymère fondu ou de sa<br />
cristallisation à partir d’une solution détermine le degré de cristallinité ainsi que la<br />
morphologie de la zone cristalline.<br />
Si le refroidissement est rapide, le caractère amorphe sera largement favorisé.<br />
La température de cristallisation a également une influence sur la morphologie cristalline. Si<br />
cette température est basse, la germination est favorisée mais la vitesse de croissance sera<br />
faible et on obtient plusieurs zones cristallines de petite taille. Si la température est élevée,<br />
peu de germes naissent et l’agitation thermique favorise la croissance ce qui donne alors un<br />
petit nombre de zones cristallines de grande taille.<br />
Enfin, la cristallisation peut être induite et favorisée mécaniquement, soit à l’état solide soit à<br />
partir d’un état fondu, par étirage uniaxial. C’est une orientation préférentielle des chaînes<br />
selon l’axe d’étirage. Simultanément, une cristallisation est très souvent observée. L’étirage<br />
est particulièrement utilisé pour traiter les fibres et obtenir ainsi une résistance mécanique<br />
élevée dans la direction de l’étirage (filage de la laine..) (figure 5).<br />
Sens de l'étirage<br />
Figure 5: l'étirage d'un polymère amorphe non orienté<br />
peut induire une cristallisation<br />
Dans la maille cristalline, la chaîne polymère adopte une conformation qui correspond à son<br />
état d'énergie potentielle minimum.<br />
Ainsi le polyéthylène adoptera une conformation en zigzag trans-trans (figure 6), alors que le<br />
polypropylène, en raison de l'encombrement stérique de ses groupements méthyle, sa<br />
conformation la plus stable est la trans gauche (figure 7) qui conduit à une structure<br />
hélicoïdale (figure 8).<br />
Les polyamides eux se mettent en feuillets. Le plus souvent, la cristanillité n'existe que dans<br />
certaines régions (figure 9).<br />
Dans tous ces exemples, les macromolécules flexibles (PP ou PE) ou rigides (Kevlar) se<br />
présentent sous forme de chaîne en extension et le polymère est dans ce cas anisotrope avec<br />
une bonne résistance mécanique.<br />
Cependant, et c'est d'ailleurs le cas le plus fréquent, les macromolécules peuvent se présenter<br />
sous forme de chaînes repliées. Dans ce cas, plusieurs modèles ont été observés:<br />
COURS POUR LES ÉTUDIANTS DE PREMIÈRE ANNÉE DE MASTER DE CHIMIE 3
<strong>L'ORGANISATION</strong> SUPRAMOLÉCULAIRE<br />
Figure 6 : conformation trans-trans en zigzag du polyéthylène<br />
Figure 7: Conformation trans-trans et transgauche<br />
du polypropylène. La conformation transgauche<br />
est la moins énergétique ce qui explique la<br />
conformation en spirale de la chaîne de PP dans le cristal<br />
(Figure 7 ci-contre).Par souci de clarté; les atomes<br />
d'hydrogène n'ont pas été représentés.<br />
Figure 8: conformation en spirale<br />
du PP isotactique cristallin.<br />
(a): projection parallèle, (b): projection<br />
perpendiculaire à l'axe de la spirale<br />
Figure 9: Représentation de la<br />
structure en feuillet du KEVLAR.<br />
Les liaisons hydrogène sont shématisés en<br />
pointillés .Par souci de clarté; les atomes<br />
d'hydrogène n'ont pas été représentés.<br />
Figure 10: Résumé des différentes structures<br />
rencontrées dans les polymères cristallins.<br />
T: cristaux de chaînes de conformation trans en zigzag<br />
H: cristaux de chaînes à conformation hélicoïdale<br />
L: lamelles à chaînes repliées avec des intercouches<br />
amorphes<br />
F: micelles frangées ou à franges<br />
CHAPITRE-III 4
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- Lamelles à chaînes repliées : les chaînes sont repliées sous forme de lamelles dont<br />
l’épaisseur est de l’ordre de 10 nm (Figures 10 -L et 11))<br />
- Micelles frangées : les lamelles de monocristaux, dans le cas d’un mélange biphasé<br />
(micelles à franges), se retrouvent sous forme de cristallites, zones cristallines de petites<br />
dimensions situées entre phases ou zones amorphes (Figures 10-F et 12)<br />
10 nm<br />
Figure 11: lamelle à chaînes repliées<br />
Figure 12: micelles frangées<br />
formant des cristallites<br />
Dans un polymère transparent, l'amorçage de la cristallinité se traduit par l'apparition de<br />
régions opaques.<br />
Les polymères cristallins sont plus durs, plus rigides, plus opaques et plus résistant aux<br />
solvants, de plus haute densité que leurs homologues amorphes.<br />
La température de fusion est généralement assez bien définie. On parle de température de<br />
transition du premier ordre.<br />
o<br />
Taux de cristallinité<br />
La présence simultanée des zones cristallines et des zones amorphes dans un polymère a une<br />
influence importante sur ses propriétés, notamment ses propriétés thermomécaniques. Afin de<br />
les évaluer on définit un taux de cristallinité qui peut être en volume ou en masse.<br />
- taux de cristallinité en volume:<br />
volume des zones cristallines V<br />
X =<br />
=<br />
v<br />
volume total V<br />
- un taux de cristallinité en masse :<br />
masse des zones cristallines M<br />
X =<br />
=<br />
m<br />
masse totale M<br />
La masse totale : M = M c + M a<br />
Le volume total : V = V c + V a<br />
En considérant que la masse volumique de la zone amorphe est ρ a<br />
et celle de la zone cristalline est ρ c , l'expression de la masse totale peut s'exprimer par<br />
c<br />
c<br />
M = ρV = ρ c V c + ρ a V a<br />
X<br />
v<br />
=<br />
V<br />
V<br />
c<br />
ρ − ρa<br />
=<br />
ρ − ρ<br />
c<br />
a<br />
et<br />
X<br />
m<br />
=<br />
M<br />
M<br />
c<br />
ρc<br />
ρ − ρa<br />
= ⋅<br />
ρ ρ − ρ<br />
c<br />
a<br />
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Polymère Taux de cristallinité (%) Réseau cristallin<br />
Polyéthylène haute densité 80 orthorhombique<br />
Polypropylène (isotactique) 65 monoclinique<br />
Polyamide 6 35 monoclinique<br />
Polyamide 6,6 70 triclinique<br />
PVC (atactique) 5 -<br />
Tableau I : exemples de quelques polymères cristallins<br />
Polymères amorphes et transition vitreuse.<br />
A l'exception des cristaux liquides, généralement, les polymères à l'état fondu sont amorphes<br />
(absence de zones cristallines).<br />
Si en le refroidissant, le polymère conserve sa nature amorphe, on parle de vitrification. Le<br />
polymère ressemble alors à un verre. C'est ce qu'on observe également lors de la trempe d'un<br />
polymère fondu.<br />
Habituellement, les seuls changements d'état qui nous intéressent sont les passages solideliquide<br />
et l'inverse. Le polymère se dégrade thermiquement avant d'arriver à l'état gazeux.<br />
Du point de vue températures caractéristiques, les zones où la régularité et l’ordre existent<br />
(cristallites) sont caractérisées par une température de fusion (T f ou T m : solide→liquide) ou de<br />
cristallisation (T c : liquide→solide) qui sont nettes. Il s'agit de transitions du premier ordre au<br />
cours desquelles la température du polymère reste constante jusqu'à la fin de la fusion ou de la<br />
formation de tous les cristaux.<br />
Alors que pour la zone amorphe, une plage plus ou moins étroite de température correspond à<br />
la transition vitreuse T v ou T g (transition de second ordre), où la mobilité des chaînes devient<br />
importante. Ceci se traduit par une variation importante des propriétés mécaniques,<br />
diélectrique, thermique…du polymère.<br />
A titre d'exemple, nous présentons dans la figure 13 la variation du volume spécifique d'un<br />
polymère amorphe en fonction de la température.<br />
Figure 13: détermination de la température de transition vitreuse<br />
en fonction des modifications du volume spécifique (ml/g)<br />
CHAPITRE-III 6
Pr Hatem BEN ROMDHANE<br />
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Département de Chimie<br />
Suivant sa morphologie, un échantillon de polymère peut présenter l'une ou l'autre ou les deux<br />
transitions thermiques:<br />
• les polymères complètement vitreux n'ont qu'une T g (T v )<br />
• les polymères complètement cristallins n'ont qu'une T m (T f )<br />
• les polymères semi-cristallins présentent les 2 transitions (figure 14).<br />
Figure 14: températures de transition vitreuse et de fusion cristalline<br />
en fonction du volume spécifique d'un polymère semi-cristallin.<br />
Dans le tableau ci-dessous nous présentons la température de transition vitreuse de quelques<br />
polymères connus.<br />
Polymère<br />
Tg (°C)<br />
O<br />
(CH 2 ) 2 O<br />
-63<br />
O<br />
C (CH 2 ) 4 C O<br />
O<br />
O<br />
C (CH 2 ) 4 C O<br />
O<br />
O<br />
C<br />
C O<br />
(CH 2 ) 4 O<br />
-118<br />
(CH 2 ) 2<br />
O<br />
69<br />
O<br />
C<br />
O<br />
C<br />
O<br />
(CH 2 ) 4<br />
O<br />
80<br />
O<br />
N<br />
HN<br />
CH 3 O<br />
O C O<br />
C<br />
CH 3<br />
NH<br />
N<br />
149<br />
429<br />
Tableau II : Température de transition vitreuse de quelques polymères connus<br />
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