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Pr Hatem BEN ROMDHANE<br />
CHAPITRE IV<br />
Faculté des Sciences de Tunis<br />
Département de Chimie<br />
LES MÉTHODES DE SYNTHÈSE<br />
MACROMOLÉCULAIRE<br />
IV-2- POLYCONDENSATION<br />
OU POLYMÉRISATION PAR ÉTAPES<br />
IV.2.1. Caractéristiques générales des polycondensations<br />
Les polycondensations se distinguent des réactions de polymérisation en chaîne par le fait<br />
qu'elles ne nécessitent pas de réaction d'amorçage. Sous l'effet du chauffage ou d'un<br />
catalyseur, les extrémités fonctionnelles des monomères réagissent entre elles pour donner des<br />
oligomères ayant toujours des groupes fonctionnels aux extrémités et donc capables de réagir<br />
à nouveau. De ce fait chaque étape doit être activée et la croissance se fait par réaction de<br />
x-mères:<br />
Monomère + Monomère → Dimère<br />
Dimère + Monomère → Trimère<br />
Dimère + Dimère → Tétramère …<br />
et d'une façon générale :<br />
x-mère + y-mère → (x+y)-mère<br />
Figure 1 : croissance des chaînes en polycondensation<br />
Comme nous l'avons vu dans l'introduction de ce chapitre, dans une polycondensation<br />
le degré de polymérisation augmente de façon continue avec le degré d'avancement de la<br />
réaction. Le stade des oligomères ne peut être dépassé que pour des degrés d'avancement<br />
supérieurs à 95%.<br />
COURS POUR LES ÉTUDIANTS DE PREMIÈRE ANNÉE DE MASTER DE CHIMIE 1
MÉTHODES DE SYNTHÈSE MACROMOLÉCULAIRE<br />
Si l'on interrompt une réaction de polycondensation, on observe que toutes les molécules ont<br />
déjà pris part à des réactions - donc il n'y a plus de monomères - et que les molécules n'ont<br />
pas atteint leur taille ultime.<br />
Par ailleurs, Flory considère que toutes les réactions ont la même constante de vitesse quels<br />
que soient les degrés de polymérisation i et j des x-mères qui y participent. M i + M j = M i+j<br />
Cette hypothèse est vérifiée dès que i et j ont dépassé quelques unités et jusqu'à des valeurs<br />
très élevées (Tableaux I et II).<br />
Nombre de groupes<br />
méthylène (x) dans l'acide<br />
Constante de vitesse "k"<br />
(x 10 4 l.mol -1 )<br />
1 2 3 4 5 8 9 11 13 15 17<br />
22,1 15,3 7,5 7,5 7,4 7,5 7,4 7,6 7,5 7,7 7,7<br />
Tableau I: Constantes de vitesse de la réaction d'estérification<br />
H(CH 2 ) x CO 2 H + EtOH → H(CH 2 ) x CO 2 Et + H 2 O<br />
d'une série homologue d'acides carboxyliques<br />
Nombre de groupes méthylène (x)<br />
dans HO(CH 2 ) x OH<br />
Constante de vitesse "k"<br />
(x 10 3 (mol/l) -1 sec -1 )<br />
5 6 7 8 9 10<br />
0,60 0,63 0,65 0,62 0,65 0,62<br />
TableauII: Constantes de vitesse de polyestérification à 27°C<br />
du chorure de sébacyle ClOC(CH 2 ) 8 COCl<br />
avec des α,ω-alcanes diols dans le dioxane<br />
La fin de la polycondensation est théoriquement marquée par l'obtention d'une macromolécule<br />
unique. En réalité ce stade n'est jamais atteint. On s'efforce d'en approcher en augmentant la<br />
durée de la réaction et en assurant le déplacement des équilibres par élimination des sousproduits<br />
de la réaction (eau, méthanol…).<br />
À l'arrêt d'une polycondensation, les extrémités de chaînes restent réactives "vivantes" et la<br />
polycondensation peut reprendre (avec ses conséquences) si l'environnement réactionnel est<br />
modifié. Si l'on veut qu'un tel phénomène ne se produise, il sera nécessaire de désactiver les<br />
polycondensats en "tuant les extrémités" par l'ajout de monomères monofonctionnels.<br />
D'autres effets peuvent limiter la croissance de la chaîne:<br />
‣ Augmentation importante de la viscosité du milieu empêchant la diffusion des<br />
chaînes. L'addition du solvant ou une élévation de température permet<br />
éventuellement le redémarrage de la réaction.<br />
‣ Destruction totale ou partielle des groupes fonctionnels aux extrémités des<br />
chaînes. Ceci peut être dû:<br />
• à une décarboxylation :<br />
• à la formation d'un sel:<br />
R COOH RH + CO 2<br />
+<br />
R NH 2 + HCl<br />
R NH 3<br />
Cette réaction, qui se produit quand un dichlorure d'acide ClOC-Ar-COCl<br />
réagit avec une diamine H 2 N-Ar'-NH 2 lors des synthèses de polyamides<br />
aromatiques par exemple, peut être éviter par addition d'une amine tertaire ou<br />
de pyridine au milieu réactionnel qui capte le HCl formé par la réaction.<br />
CHAPITRE-IV-2- POLYCONDENSATION 2<br />
+<br />
Cl -
Pr Hatem BEN ROMDHANE<br />
Faculté des Sciences de Tunis<br />
Département de Chimie<br />
‣ Formation d'unités cycliques aux extrémités des chaînes. Ceci a été observé par<br />
exemple au cours de la polycondensation de l'hexaméthylène diamine HMDA<br />
avec l'acide butane-dioïque :<br />
O<br />
NH (CH 2 ) 6 NH C (CH 2 ) 2<br />
O<br />
+ HMDA<br />
NH (CH 2 ) 6 NH C (CH 2 ) 2<br />
C<br />
O<br />
C<br />
OH<br />
NH<br />
cyclisation<br />
(CH 2 ) 6 NH 2<br />
NH (CH 2 ) 6 N<br />
O<br />
O<br />
O<br />
‣ Impuretés trifonctionnelles introduisant des branchements qui, lorsqu'ils sont<br />
trop nombreux, entraînent des réticulations, polycondensations<br />
tridimensionnelles et prise en gel.<br />
‣ L'écart à la stoechiométrie qui limite beaucoup le degré de polycondensation.<br />
Dans de pareils cas, à un certain stade toutes les molécules sont terminées par<br />
des groupements terminaux correspondant au monomère en excès, empêchant<br />
par là toute poursuite ultérieure de la polycondensation. Ce phénomène n'existe<br />
pas avec un monomère ayant deux fonctionnalités antagonistes (A—B).<br />
IV.2.2. Différents types de réactions utilisées en polycondensation<br />
Réactions de substitution nucléophile<br />
Ce sont celles qui conduisent à la formation des polyéthers, polythioéthers, polysulfones…les<br />
réactions ont lieu en milieu polaire aprotique.<br />
Le bisphénol (sous forme d'ion phénoxyde) est l'agent nucléophile (figure 2).<br />
n<br />
NaO ONa + n ClH 2 C O CH 2 Cl<br />
O O O<br />
+ (2n-1) NaCl<br />
n<br />
n<br />
NaO ONa + n Cl<br />
O<br />
S Cl<br />
O<br />
O<br />
O O S<br />
+ (2n-1) NaCl<br />
O n<br />
Figure 2: synthèses de polyéthers utilisant le sel disodique du bisphénol A<br />
COURS POUR LES ÉTUDIANTS DE PREMIÈRE ANNÉE DE MASTER DE CHIMIE 3
MÉTHODES DE SYNTHÈSE MACROMOLÉCULAIRE<br />
Réactions de condensation sur les carbonyles<br />
Ce sont les plus importantes en polycondensation. Elles conduisent à la formation des<br />
polyesters, polyamides, polyuréthanes et polycarbonates.<br />
Il y addition nucléophile d'un composé à hydrogène actif sur le carbone électrophile du<br />
carbonyle avec formation d'intermédiaire métastable généralement suivie d'une élimination de<br />
HX (figure 3).<br />
O<br />
O<br />
O<br />
C<br />
H<br />
+<br />
R X + H Y R' R C Y<br />
C + HX<br />
R'<br />
R Y R'<br />
X<br />
Figure 3: Mécanisme de condensation sur les carbonyles de composés à<br />
hydrogène actif mis en jeu dans la synthèse des polyesters, polyamides et polycarbonates<br />
Dans le cas des polyuréthanes, il n'y a pas d'élimination.<br />
O<br />
R N C O + H O R' R N C<br />
O +<br />
R'<br />
H<br />
O<br />
R N C O R'<br />
Figure 4: mécanisme d'addition mis en jeu dans la synthèse des polyuréthanes<br />
H<br />
Autres types de réaction<br />
− les substitutions électrophiles telles que les réactions de Friedel-Crafts<br />
Dans la synthèse des polybenzyles par autocondensation du chlorure de benzyle en présence<br />
d'acide de Lewis, les substitutions conduisent à l'activation en ortho et para si bien que les<br />
produits obtenus sont fortement réticulés (figure 5)<br />
n<br />
CH 2 Cl<br />
SnCl 4<br />
, AlCl 3<br />
, TiCl 4<br />
T=25°C<br />
H<br />
CH 2<br />
Cl<br />
n<br />
+ (n-1) HCl<br />
Figure 5 : synthèse de polybenzyles par réction de Friedel-Crafts<br />
Réaction d'acylation entre un substrat activé (le diphényl éther) et des chlorures d'acides<br />
carboxyliques en présence de AlCl 3 (figure 6).<br />
n<br />
O<br />
ClOC<br />
+ n<br />
COCl<br />
H<br />
O<br />
O<br />
O C C Cl<br />
n<br />
+ (n-1) HCl<br />
Figure 6 : Synthèse de polycarbonates par acylation de Friedel-Crafts<br />
CHAPITRE-IV-2- POLYCONDENSATION 4
Pr Hatem BEN ROMDHANE<br />
Faculté des Sciences de Tunis<br />
Département de Chimie<br />
- les cycloadditions de Diels-Alder<br />
Ces réactions sont considérées comme relevant de la polycondensation (figure 7). Cependant,<br />
il faut souligner qu'à une certaine température, la réaction inverse, la rétro-Diels-Alder peut<br />
avoir lieu conduisant aux bisdiènes et bisdiénophiles de départ.<br />
O<br />
O<br />
O<br />
O<br />
n R + n N<br />
R'<br />
N<br />
N<br />
R<br />
N<br />
R'<br />
O<br />
O<br />
O<br />
O<br />
n<br />
Figure 7 : Synthèse de polyimides par cycloaddition de Diels-Alder<br />
IV.2.3. Contrôle des masses moléculaires des polycondensats linéaires<br />
Dans ce qui suit, nous supposons que les polycondensations sont réalisées en milieu<br />
homogène et que les réactivités des fonctions A et B ne dépendent pas de la longueur de la<br />
chaîne qui les portent.<br />
Le degré d'avancement ou le taux de conversion d'une réaction de polycondensation s'exprime<br />
par :<br />
nombre de fonctions ayant réagi<br />
p =<br />
nombre total de fonctions à t=<br />
0<br />
Soient:<br />
0<br />
0<br />
- N et<br />
A N respectivement le nombre de groupes fonctionnels A et de groupes fonctionnels<br />
B<br />
B présents initialement à l'instant t =0<br />
0<br />
- dans le cas où les monomères sont du type A⎯B : N A<br />
pourra s'exprimer par exemple en fonction des extrémités A:<br />
p<br />
0<br />
N A − N<br />
0<br />
N A<br />
N A<br />
étant les extrémités A restantes à l'instant "t".<br />
0<br />
= N B<br />
et le degré d'avancement<br />
A<br />
= (I)<br />
- dans le cas où la polycondensation est réalisée avec des monomères du type A⎯A et B⎯B,<br />
on définit un rapport stœchiométrique:<br />
r<br />
N<br />
N<br />
COURS POUR LES ÉTUDIANTS DE PREMIÈRE ANNÉE DE MASTER DE CHIMIE 5<br />
0<br />
= (II)<br />
A se rapporte au monomère en défaut dont la concentration est la plus faible (r ≤ 1).<br />
0<br />
Lorsque le mélange est stœchiométrique N =<br />
0<br />
A N et r = 1.<br />
B<br />
Le degré d'avancement "p" est généralement défini par rapport au monomère dont la<br />
concentration est la plus faible (puisque c'est ce monomère qui disparaît le premier du milieu):<br />
p<br />
=<br />
0<br />
N −<br />
A 2N<br />
0<br />
2N<br />
A<br />
A<br />
0<br />
B<br />
0<br />
N A N<br />
0<br />
N A<br />
2 −<br />
A<br />
=<br />
A
MÉTHODES DE SYNTHÈSE MACROMOLÉCULAIRE<br />
Donc dans les deux cas :<br />
n A⎯B<br />
ou ~~ (A’⎯B’) n ~~<br />
n A⎯A + n B⎯B<br />
unité constitutive<br />
p<br />
0<br />
N −<br />
A N<br />
0<br />
N A<br />
N<br />
N<br />
A<br />
A<br />
= = 1 −<br />
(I)<br />
0<br />
A<br />
Influence du degré d'avancement p et de la stœchiométrie r sur le degré de<br />
polymérisation moyen X n<br />
S’il ne se produit pas de réactions secondaires, le nombre d’unités constitutives contenues<br />
dans le mélange réactionnel est égal au nombre N 0 de molécules présentes initialement dans le<br />
système :<br />
N<br />
=<br />
N<br />
+ avec<br />
2 2<br />
0<br />
0<br />
0 A N B<br />
N<br />
N<br />
2<br />
0<br />
N A<br />
+ =<br />
2 r<br />
N<br />
2<br />
N<br />
1<br />
(1 + )<br />
r<br />
N<br />
0<br />
0<br />
A<br />
= (III)<br />
B<br />
0<br />
0<br />
0<br />
=<br />
A<br />
A<br />
(IV)<br />
Cette valeur inclut tous les composants du système y compris le monomère résiduel.<br />
Au temps t, le nombre de molécules N est égal à la moitié du nombre des extrémités de<br />
chaînes 2N qui s’exprime par :<br />
2 N = N A + N<br />
(V)<br />
B<br />
0<br />
avec = (1 − p)<br />
à partir de (I)<br />
et<br />
N<br />
N<br />
A<br />
B<br />
N<br />
N<br />
A<br />
0<br />
B<br />
N<br />
0<br />
A<br />
= − p , (<br />
0<br />
N étant toujours le monomère en défaut)<br />
A<br />
r<br />
(V) s’écrira alors :<br />
0<br />
0<br />
p<br />
N A<br />
2N<br />
= N (1 − ) + −<br />
A<br />
r<br />
p N<br />
0<br />
A<br />
N<br />
N<br />
2<br />
1<br />
(1 + − 2 p)<br />
r<br />
0<br />
=<br />
A<br />
(VI)<br />
Le rapport de (IV)/(VI) représentera le degré de polymérisation moyen en nombre qui<br />
s’exprime par :<br />
X n<br />
nombre d'<br />
unités constitutives<br />
=<br />
=<br />
nombre total de chaînes<br />
N<br />
N<br />
0<br />
1+<br />
r<br />
=<br />
1+<br />
r − 2rp<br />
1+<br />
r<br />
X<br />
= (VII)<br />
n<br />
1+<br />
r − 2rp<br />
CHAPITRE-IV-2- POLYCONDENSATION 6
Pr Hatem BEN ROMDHANE<br />
Faculté des Sciences de Tunis<br />
Département de Chimie<br />
Mélanges stœchiométriques<br />
C’est-à-dire r = 1, l’expression (VII) deviendra :<br />
X n<br />
1<br />
= 1 − p<br />
relation de Carothers<br />
(VIII)<br />
Cette relation, dite de Carothers, montre que les polycondensats de masse moléculaire élevée<br />
sont obtenus seulement pour des valeurs élevées de p , c’est-à-dire quand presque tous les<br />
groupes réactifs sont consommés.<br />
Ainsi pour obtenir X n = 20 il faut atteindre une conversion p = 0,950<br />
X n = 50 " p = 0,980<br />
X n = 200 " p = 0,995<br />
Ceci constitue une différence majeure avec les polymérisations en chaîne dans lesquelles des<br />
macromolécules de masse moléculaire élevée sont formées dès le début de la réaction<br />
( X n >1 000).<br />
Mélanges non stœchiométriques<br />
En supposant que le réactif pris en défaut<br />
a totalement réagit, p = 1<br />
La relation (VII) se simplifiera :<br />
X n<br />
1+ r<br />
= 1 − r<br />
(IX)<br />
Pour une stœchiométrie r = 0,9 on obtient<br />
une valeur de X n = 19 et pour r = 0,99 ,<br />
X n = 200.<br />
Ces résultats montrent que c'est le contrôle de<br />
la stœchiométrie qui conditionne l'obtention de<br />
produits de masse moléculaire élevée.<br />
Les variations de X n en fonction de r pour<br />
différentes valeurs de p sont portées sur la figure 8.<br />
Figure 8: Variation de X n en fonction<br />
de r pour différentes valeurs de p<br />
pour une polycondensation A-A + B-B<br />
IV.2.4. Distribution des masses moléculaires dans les polycondensats linéaires<br />
(cas des mélanges stœchiométriques)<br />
Les relations suivantes sont applicables pour les systèmes (A-A+B-B) et (A-B +A-B) à<br />
condition d'exprimer dans les deux cas les degrés de polymérisation en unités constitutives<br />
(~A'-B'~).<br />
COURS POUR LES ÉTUDIANTS DE PREMIÈRE ANNÉE DE MASTER DE CHIMIE 7
MÉTHODES DE SYNTHÈSE MACROMOLÉCULAIRE<br />
Soit un i-mère du type:<br />
A—B'—A'—B'—A'—B'—A'—B'… …A'—B'—A'—B<br />
1 2 3 4 i-1 i<br />
La possibilité de trouver une telle macromolécule est égale au produit de la probabilité de<br />
trouver une molécule avec (i-1) groupes "A" ayant réagi par la probabilité de trouver un<br />
groupe "A" n'ayant pas réagi.<br />
− la probabilité pour qu'un groupe "A" ait réagi à l'instant t est p<br />
− la probabilité pour que (i-1) groupes "A" aient réagi est égale à p (i-1)<br />
− la probabilité pour qu'un groupe "A" n'ait pas réagi est égale à (1-p)<br />
La probabilité de trouver un i-mère est par conséquent :<br />
P i = p (i-1) (1-p)<br />
(X)<br />
La probabilité P i étant comprise entre 0 et 1, elle est alors assimilée à la fraction molaire des<br />
i-mères dans le mélange et elle s'écrit :<br />
P i = N<br />
N i<br />
(XI)<br />
N i et N sont respectivement le nombre de molécules des i-mères et le nombre total de<br />
molécules dans le mélange réactionnel, monomères compris, à l'instant t.<br />
N i = N P i<br />
N i = N p (i-1) (1-p)<br />
(XII)<br />
si N 0 est le nombre de molécules présentes au départ<br />
N = N 0 (1-p)<br />
(XIII)<br />
et la relation (XII) s'écrira: N i = N 0 p (i-1) (1-p) 2 (XIV)<br />
de cette relation (XIV) on peut déduire la proportion de molécules de monomères n'ayant pas<br />
réagi, pour un degré d'avancement p, en prenant i = 1 (correspondant aux molécules de<br />
monomères).<br />
Par exemple pour p = 0,90 il reste 1% de monomères n'ayant pas réagi dans le milieu<br />
réactionnel.<br />
si M 0 est la masse de l'unité constitutive (A'—B'), la masse de l'i-mère : M i = i.M 0<br />
et la masse totale = (N 0 . M )<br />
la fraction en masse des i-mères s'écrit alors :<br />
en remplaçant N i par sa valeur tirée de (XIV) :<br />
N .<br />
i M i<br />
i N i<br />
w =<br />
i<br />
N . =<br />
(XV)<br />
0 M N 0<br />
w i = i p (i-1) (1-p) 2<br />
(XVI)<br />
La distribution décrite par les relations (XII) et (XVI) est dite distribution la plus probable ou<br />
distribution de Flory.<br />
CHAPITRE-IV-2- POLYCONDENSATION 8
Pr Hatem BEN ROMDHANE<br />
Faculté des Sciences de Tunis<br />
Département de Chimie<br />
La figure 9 représente les courbes de<br />
distribution massique w i des<br />
macromolécules présentes dans le<br />
système en fonction de leur degré de<br />
polymérisation.<br />
On constate que, lorsque p croît, il se<br />
produit un élargissement de la<br />
distribution des masses molaires qu'il<br />
est possible de relier à l'indice de<br />
X w<br />
polymolécularité<br />
I<br />
p =<br />
X<br />
n<br />
A partir des expressions (X) et (XVI),<br />
on calcule le degré de polymérisation<br />
moyen en nombre X n défini dans le<br />
paragraphe IV.2.3 (relation (VII))<br />
Figure 9: Variation de de la fraction massique<br />
des i-mères en fonction du degré de<br />
polymérisation et pour différentes valeurs de p<br />
On obtient ainsi:<br />
X<br />
n<br />
∑ n<br />
n<br />
n<br />
i i p<br />
i p(<br />
i−1)<br />
1 *<br />
∑ Ρi<br />
∑<br />
= = i<br />
(XVII)<br />
1 1<br />
1<br />
1−<br />
i N i<br />
∑ N i<br />
= = =<br />
( i−1)<br />
(1 − p ) = (1 − p ) ∑<br />
p<br />
avec :<br />
∑ ip<br />
( i−1)<br />
1<br />
=<br />
(1 −<br />
p<br />
2<br />
)<br />
X n<br />
1<br />
=<br />
1−<br />
p<br />
relation de Carothers<br />
(XVIII)<br />
On calcule X w de façon analogue:<br />
X<br />
w<br />
n<br />
∑i<br />
wi<br />
n<br />
∑i<br />
p<br />
= 2<br />
=<br />
( i−1)<br />
2<br />
2<br />
(1 − p ) = (1 − p ) ∑<br />
1<br />
1<br />
n<br />
1<br />
i<br />
2<br />
p<br />
( i−1)<br />
1+<br />
=<br />
1−<br />
p<br />
p<br />
(XIX)<br />
avec :<br />
∑i<br />
2<br />
p<br />
( i−1)<br />
1+<br />
=<br />
(1 −<br />
p<br />
p<br />
)<br />
3<br />
X w<br />
1 +<br />
=<br />
1 −<br />
p<br />
p<br />
(XX)<br />
L'indice de polymolécularité, qui est une mesure de la dispersion des masses moléculaires, est<br />
défini par<br />
= X w<br />
Ip = 1 + p<br />
(XXI)<br />
X n<br />
Lorsque la distribution moléculaire est la plus probable, l'indice de polymolécularité varie de<br />
1 à 2 suivant le degré de conversion p.<br />
COURS POUR LES ÉTUDIANTS DE PREMIÈRE ANNÉE DE MASTER DE CHIMIE 9
MÉTHODES DE SYNTHÈSE MACROMOLÉCULAIRE<br />
IV.2.5.Cinétique de polycondensation<br />
Flory a montré que la réactivité intrinsèque des groupes fonctionnels dépends très peu, voire<br />
pas du tout, du degré de polymérisation de la chaîne qui les porte (Tableau I et II). En<br />
revanche l'accroissement de viscosité du milieu réactionnel au fur et à mesure de l'avancement<br />
de la réaction, rend difficile le mouvement des chaînes et diminue la fréquence de rencontres<br />
entre les fonctions antagonistes devant réagir ensemble.<br />
En faisant l'approximation de ne pas prendre en compte ce phénomène, les cinétiques des<br />
polycondensations peuvent être décrites de manière analogue à celles des réactions simples de<br />
la chimie organique.<br />
Les schémas cinétiques que nous allons décrire concernent des monomères bis-fonctionnels<br />
A—B ou (A—A + B—B) utilisés dans des conditions stœchiométrique (r=1) .<br />
On distingue alors trois types de cinétiques :<br />
• réaction stœchiométrique sans catalyseur<br />
• réaction stœchiométrique catalysée par un catalyseur extérieur<br />
• réaction stœchiométrique autocatalysée par l'un des groupements réactifs<br />
Réaction stoechiométrique non catalysée<br />
[A]<br />
r = 1 ⇒ [A] = [B]<br />
− = k [A][B] = k [A]<br />
dt<br />
d 2 2<br />
− d[A]<br />
kdt<br />
2<br />
[A]<br />
=<br />
En supposant qu'à t=0 on a [A] 0 , après intégration, on obtient:<br />
1<br />
[A]<br />
D'autre part rappelons l'expression (I) du degré d'avancement :<br />
même volume,<br />
[A] −[A]<br />
[A]<br />
0<br />
L'expression (XXII) pourra alors s'écrire:<br />
1<br />
−<br />
[A] (1 − p)<br />
0<br />
1<br />
− 1 =<br />
(1 − p)<br />
= k [B]<br />
d[B]<br />
= −<br />
dt<br />
1<br />
− = k t<br />
[A]<br />
(XXII)<br />
0<br />
p =<br />
0<br />
N − A N<br />
0<br />
NA<br />
A<br />
, rapporté au<br />
0<br />
p =<br />
(XXIII)<br />
1<br />
[A]<br />
0<br />
k t [A]<br />
0<br />
= k t<br />
(XXIV)<br />
En utilisant la relation de Carothers<br />
X n<br />
=<br />
1<br />
1−<br />
p<br />
X = k t [A] 1<br />
0 +<br />
n (XXV)<br />
Dans de telles conditions, le degré de polymérisation moyen en nombre croit linéairement<br />
avec le temps.<br />
CHAPITRE-IV-2- POLYCONDENSATION 10
Pr Hatem BEN ROMDHANE<br />
Faculté des Sciences de Tunis<br />
Département de Chimie<br />
Réaction stoechiométrique catalysée par un catalyseur extérieur<br />
L'équation cinétique s'écrit:<br />
d[A]<br />
− = k' [cata][A][B]<br />
(XXVI)<br />
dt<br />
Comme k'[cata] = constante = k",<br />
d[A]<br />
dt<br />
et le traitement cinétique est ramené au cas précédent.<br />
2<br />
− = k"[A][B] = k"[A]<br />
(XXVII)<br />
Figure 10 : variation de X n et de la conversion en fonction du temps<br />
lors de la polyestérification de l'acide adipique avec le diéthylèneglycol à 109°C<br />
catalysée par 0,4%(mol) d'acide p-toluènesulfonique<br />
Réaction stœchiométrique autocatalysée par l'un des groupements réactifs<br />
Prenons comme exemple la polyestérification d'un diacide avec un diol. Lorsque<br />
la polyestérification est réalisée en l'absence d'acide fort, l'acide carboxylique se comporte à<br />
la fois comme un monomère et comme un catalyseur.<br />
Par un souci de simplification de la présentation, l'écriture des réactions sera limitée à des<br />
modèles monofonctionnels.<br />
2<br />
R<br />
C<br />
O<br />
K<br />
R<br />
C +<br />
OH<br />
+<br />
R<br />
C<br />
O<br />
OH<br />
OH<br />
O<br />
R<br />
OH<br />
O<br />
k'<br />
C+<br />
, R C + R' O H<br />
OH<br />
étape cinétique<br />
O<br />
OH<br />
+<br />
R C O R'<br />
OH OH<br />
+<br />
R<br />
COO<br />
Figure 11: mécanisme d'estérification en absence d'acide fort<br />
La vitesse de polycondensation s'exprime par :<br />
Rp = k' [R'OH][RCOO Θ , RC ⊕ (OH) 2 ]<br />
(XXVIII)<br />
COURS POUR LES ÉTUDIANTS DE PREMIÈRE ANNÉE DE MASTER DE CHIMIE 11
MÉTHODES DE SYNTHÈSE MACROMOLÉCULAIRE<br />
en tenant compte de la constante d'équilibre K:<br />
Rp = k' K[R'OH][RCOOH] 2 = k [R'OH][RCOOH] 2<br />
(XXIX)<br />
La réaction est donc d'ordre 2 en acide et 1 en alcool.<br />
Si r =1,<br />
[OH] = [COOH] = [A] au temps t<br />
et [A] 0 au temps t = 0<br />
l'expression cinétique sera alors:<br />
par intégration, on obtient:<br />
d[A]<br />
dt<br />
3<br />
− = k [A]<br />
(XXX)<br />
− d[A]<br />
k dt<br />
3<br />
[A]<br />
=<br />
(XXXI)<br />
1<br />
[A]<br />
1<br />
− 2 k t<br />
2<br />
[A]<br />
(XXXII)<br />
=<br />
2<br />
0<br />
1<br />
2 2<br />
[A] (1 − p)<br />
0<br />
1<br />
−<br />
[A]<br />
2<br />
0<br />
= 2 k t<br />
(XXXIII)<br />
En introduisant la valeur de<br />
(Carothers)<br />
X n<br />
1 2<br />
X 2 = 2 k t [A]<br />
0<br />
1<br />
(1 − p)<br />
= +<br />
n 2 (XXXIV)<br />
Les variations de<br />
X 2 n<br />
avec t sont linéaires.<br />
Elles sont représentées sur la figure 12 dans<br />
le cas de la polyestérification de l'acide<br />
adipique par léthylène glycol.<br />
2<br />
X n<br />
Figure 12 : variation de et de la conversion en fonction<br />
du temps lors de la polyestérification de l'acide adipique avec<br />
le diéthylèneglycol à 109°C sans catalyseur<br />
CHAPITRE-IV-2- POLYCONDENSATION 12
Pr Hatem BEN ROMDHANE<br />
Faculté des Sciences de Tunis<br />
Département de Chimie<br />
IV.2.5.Polycondensation de monomères multifonctionnels – "Point de gel"<br />
Si la fonctionnalité moyenne des monomères est supérieure à 2 on obtient un réseau<br />
tridimensionnel et le milieu devient très visqueux à partir d’un certain degré d’avancement.<br />
C’est la gélification.<br />
Il n'y a plus alors homogénéité du milieu réactionnel. La formation de réseaux<br />
tridimensionnels est caractérisée par l'apparition de deux fractions :<br />
- une fraction insoluble appelée le gel gonflé par le sol<br />
- le sol constitué par le polymère soluble, les monomères et éventuellement le solvant.<br />
Au cours de la réaction, l'accroissement du gel se fait au dépend du sol. L'apparition du gel<br />
pour une conversion déterminée correspond au "point de gel" caractérisée par un degré<br />
d'avancement critique p c .<br />
De nombreuses théories ont essayé de rendre compte de la gélification, nous décrirons ici la<br />
plus simple : la théorie de Carothers.<br />
Théorie de Carothers<br />
Rappelons que la fonctionnalité moyenne f d'un système de monomères est définie par<br />
la relation:<br />
∑ni<br />
∑<br />
dans laquelle f i est la fonctionnalité du monomère i.<br />
fi<br />
f =<br />
n<br />
(XXXV)<br />
i<br />
Exemple : considérons un système constitué par:<br />
− x monomères trifonctionnels<br />
− y monomères bis-fonctionnels<br />
A'<br />
A'<br />
B'<br />
A'<br />
A<br />
x A + y B B<br />
A'<br />
A'<br />
B'<br />
A<br />
B'<br />
B'<br />
A'<br />
B'<br />
B'<br />
A'<br />
A'<br />
A'<br />
Figure 13: formation de réseaux tridimensionnels à partir de monomères de f > 2<br />
f<br />
∑ ni<br />
f<br />
= ∑ n<br />
i<br />
i<br />
3x + 2y<br />
=<br />
x + y<br />
pour satisfaire des conditions stœchiométriques, il faut que 3x = 2y .<br />
COURS POUR LES ÉTUDIANTS DE PREMIÈRE ANNÉE DE MASTER DE CHIMIE 13
MÉTHODES DE SYNTHÈSE MACROMOLÉCULAIRE<br />
Dans le cas général, considérons un système constitué initialement de N 0 molécules de<br />
monomères et contenant des quantités équimolaires de fonctions A et B.<br />
Le nombre de fonctions présent initialement à t=0 est égal à N 0 f .<br />
Si au temps t le système contient N molécules, c'est que 2(N 0 -N) groupes fonctionnels ont<br />
réagi. Chaque réaction correspond à la disparition de deux fonctions et la perte d'une<br />
molécule.<br />
Le taux de conversion p s'écrit:<br />
2( N 0 N )<br />
p = −<br />
(XXXVI)<br />
N 0<br />
f<br />
N<br />
Puisque X = 0<br />
n<br />
N<br />
, la relation précédente peut s'écrire:<br />
2 1<br />
p = ( 1 − )<br />
f<br />
Equation de Carothers (XXXVII)<br />
X n<br />
Au point de gel, le degré de polymérisation X n → ∞ et le taux de conversion tend vers une<br />
2<br />
valeur appelée le taux de conversion critique p c<br />
= (XXXVIII)<br />
f<br />
IV.2.6.Techniques de polycondensation<br />
Plusieurs techniques sont utilisées pour réaliser une polycondensation (en solution, en<br />
émulsion, interfaciale) mais la plus employée c'est la polycondensation en masse.<br />
Comme la polycondensation est peu exothermique le problème de régulation de température<br />
ne se pose pas. En revanche, quelques paramètres sont à maîtriser. Il s’agit en particulier de<br />
l’élimination ou du piégeage des petites molécules qui se forment (H 2 O, MeOH, HCl..), et<br />
surtout du problème de la stoechiométrie qui conditionne l’obtention de longues chaînes.<br />
Ce problème est le plus souvent contourné et la solution retenue est d’opérer en deux temps,<br />
en passant par la préparation d’un intermédiaire "stoechiométrique".<br />
Synthèse du nylon 6,6<br />
La synthèse directe du nylon 6,6 à partir d’acide adipique et d’hexaméthylènediamine donne<br />
un polymère de masse molaire moyenne inférieure à 10 000 à cause d’une maîtrise difficile de<br />
la stoechiométrie.<br />
Industriellement, on commence par préparer un sel de nylon en neutralisant une solution de<br />
diacide par la diamine.<br />
NH 2<br />
H 2 N<br />
HMDA<br />
OH<br />
+<br />
H 3 N<br />
O<br />
+<br />
NH 3<br />
O<br />
O<br />
acide adipique<br />
OH<br />
O<br />
O<br />
sel de nylon<br />
O<br />
Figure 14: synthèse du sel de l'HMDA et de l'acide adipique<br />
CHAPITRE-IV-2- POLYCONDENSATION 14
Pr Hatem BEN ROMDHANE<br />
Faculté des Sciences de Tunis<br />
Département de Chimie<br />
Le sel est ensuite séparé et purifié (précipitation dans le méthanol). Il donne une<br />
stoechiométrie parfaite.<br />
La polycondensation est ensuite réalisée à partir du sel à 220°C (20bar) puis à 280°C avec<br />
élimination d’eau, en continu. Une quantité déterminée d’acide acétique (espèce<br />
monofonctionnelle) sert à contrôler la masse moyenne.<br />
Synthèse du polyéthylène téréphtalate (PET)<br />
Un deuxième exemple de maîtrise de la stoechiométrie est celui de la synthèse industrielle du<br />
PET, polymère de grande diffusion (fibre, emballages, feuilles…).<br />
Le polymère est préparé en deux étapes :<br />
- une première étape ayant lieu entre 150 à 200°C consistant à préparer le diester de<br />
l’acide téréphtalique, le téréphtalate de l’éthylène glycol (figure 15).<br />
C H 3<br />
O<br />
O<br />
O<br />
+<br />
O CH 3<br />
HO<br />
en excès<br />
OH<br />
HO<br />
O<br />
O<br />
+<br />
C H 3<br />
OH<br />
O<br />
O<br />
OH<br />
Figure 15: synthèse du téréphtalate de l'éthylène glycol<br />
- la deuxième étape est la polycondensation proprement dite, elle a lieu entre 260 à<br />
290°C et utilise le monomère préparé dans la première étape avec une élimination de<br />
l’éthylène glycol.<br />
HO<br />
n<br />
O<br />
O<br />
polycondensation<br />
O<br />
O<br />
HO<br />
OH<br />
O<br />
O<br />
+<br />
(n-1)<br />
HO<br />
OH<br />
O<br />
O<br />
PET<br />
Figure 16: synthèse du polyéthylène téréphtalate<br />
par polycondensation du téréphtalate de l'éthylène glycol<br />
n<br />
OH<br />
COURS POUR LES ÉTUDIANTS DE PREMIÈRE ANNÉE DE MASTER DE CHIMIE 15