POUR MOINS - La Tribune
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LE BUZZ<br />
LA TRIBUNE VENDREDI 11 OCTOBRE 2013<br />
>> IL A OSÉ LE DIRE « Nous sommes sincèrement animés du désir de faire une belle réforme<br />
de la fiscalité. » BERNARD CAZENEUVE, MINISTRE DU BUDGET, LUNDI 7 OCTOBRE, À LA SUITE DE L’ANNONCE, PAR<br />
FRANÇOIS HOLLANDE, DE PROCHAINES ASSISES DE LA FISCALITÉ.<br />
L’ŒIL DE PHILIPPE MABILLE<br />
Des Assises de la Liberté !<br />
© DR<br />
Mais dans quel cerveau dément a donc germé<br />
cette idée, heureusement sans lendemain, de<br />
taxer l’excédent brut d’exploitation des<br />
entreprises (EBE) pour trouver les 2,5 milliards<br />
d’euros manquant pour le budget<br />
2014 ? Dans le document remis par Bercy à la presse, cette<br />
mesure figure au chapitre « Encourager la croissance, la compétitivité<br />
et l’emploi » ! On ne rit pas, car ce n’est pas drôle.<br />
François Hollande aurait-il perdu le b.a.-ba (b.e.-be ?) de la<br />
réforme fiscale, qui suppose de faire la concertation avant<br />
d’annoncer les arbitrages ?…<br />
Un an après la polémique sur les plus-values de cession<br />
des entrepreneurs, il échappe de peu à une affaire des<br />
« pigeons » 2, un mauvais scénario pour un bien mauvais<br />
film. Deux retours en arrière plus tard, la taxe sur l’EBE a<br />
failli devenir une taxe sur l’ENE (excédent net d’exploitation),<br />
avant que les fiscalistes géniaux du ministère de<br />
l’Économie et des finances ne se rendent compte que l’on<br />
passait d’un « impôt imbécile », qui taxait l’investissement<br />
à venir, à un impôt simplement « idiot », taxant les entreprises<br />
ayant déjà investi et s’étant pour cela endettées…<br />
Chapeau, l’artiste ! Il a donc fallu une nouvelle fronde<br />
patronale pour qu’un peu de bon sens souffle enfin et que<br />
l’on revienne à la solution « la moins pire », celle d’une surtaxe<br />
d’impôt sur les sociétés, épargnant les PME. Et que la<br />
promesse présidentielle d’Assises de la fiscalité des entreprises,<br />
après le vote du PLF, donc en début d’année prochaine,<br />
vienne calmer un peu le jeu pour remettre enfin à<br />
plat ce grand bazar qu’est devenu le système fiscal français.<br />
Entre-temps, Pierre Gattaz, qui s’est fait un peu balader par<br />
ses interlocuteurs gouvernementaux, a fini par retrouver le<br />
goût du « patronat de combat » qui avait été la marque du<br />
début de sa campagne pour la présidence du Medef. Mardi<br />
8 octobre, lors d’une manifestation organisée à Lyon par le<br />
Medef et la CGPME qui font de nouveau front commun, 2000<br />
chefs d’entreprise ont sorti le « carton jaune » contre la hausse<br />
À Lyon, le 8 octobre, des entrepreneurs du Medef<br />
et de la CGPME, quasi unanimes pour adresser ensemble<br />
un carton jaune à François Hollande. [PHILIPPE MERLE/AFP]<br />
de la pression fiscale, des cotisations sociales, la complexité<br />
administrative et surtout l’imprévisibilité d’un gouvernement<br />
ballotté entre ses alliés turbulents écologistes et son incapacité<br />
à tenir les promesses de stabilité fiscale pourtant affirmées<br />
haut et clair par le plus haut responsable de l’État.<br />
EN QUELQUES SEMAINES, FRANÇOIS HOLLANDE<br />
a vu disparaître les effets positifs des beaux discours qu’il tient<br />
sur la compétitivité. Certes, il reste le CICE et ses vingt milliards<br />
d’euros destinés à baisser le coût du travail. Mais sinon,<br />
on nage en pleine pagaille. <strong>La</strong> pause fiscale ? Plus personne n’y<br />
croit, pas plus pour 2014 que pour 2015, alors que la France<br />
va afficher, à rebours de tous ses concurrents, le taux facial<br />
d’impôt sur les bénéfices le plus élevé d’Europe. <strong>La</strong> compensation<br />
de la hausse des cotisations employeurs pour les<br />
retraites, que s’apprête à voter le Parlement ? Personne ne sait<br />
comment et par qui elle sera financée…<br />
Le tout dans un climat politique inquiétant, à l’approche<br />
d’élections municipales et européennes de 2014 qui risquent<br />
bien de consacrer le Front national au centre de la vie politique<br />
française. Certes, le vote de Brignoles, dont le deuxième tour<br />
des cantonales partielles, dimanche 13 octobre, sera scruté<br />
avec attention, ne doit pas faire illusion. En nombre de voix,<br />
le Front national ne fait pas un score plus impressionnant que<br />
celui de 2012 dans cette petite ville du Var. Mais le grand vainqueur<br />
est l’abstention, qui a rassemblé les deux tiers des 20 728<br />
électeurs inscrits et éliminé la gauche (PS et Verts) dès le premier<br />
tour. Ajouté à l’impopularité record de l’exécutif, cela<br />
démontre de la part d’une majorité de Français un rejet des<br />
institutions et de l’ensemble des partis de gouvernement.<br />
Les zigzags actuels de la politique de François Hollande sont<br />
sans doute responsables de cette situation. Mais c’est surtout<br />
l’absence de résultats tangibles que les Français sanctionnent.<br />
<strong>La</strong> priorité donnée à la compétitivité des entreprises ne suffit<br />
pas à calmer la colère des patrons, surtout celle des petits. Les<br />
ménages se sentent les grands oubliés de la politique fiscale,<br />
même si la gauche va tenter de corriger un peu le projet de<br />
budget en faveur du pouvoir d’achat des plus modestes. <strong>La</strong><br />
reprise est là, certes, mais encore imperceptible et sans effets<br />
immédiats sur le chômage.<br />
François Hollande se félicite souvent d’avoir réussi à<br />
réformer sans conflits sociaux. Et il est vrai qu’il n’y a pour<br />
l’instant pas de grève pour menacer la brise de croissance.<br />
Mais en arrière-plan c’est une grève citoyenne qui plane,<br />
faute de parvenir à convaincre les Français que les efforts<br />
consentis vont finir par porter leurs fruits. Sortir de cette<br />
impasse sera long et difficile. Et plutôt qu’à des Assises de<br />
la fiscalité, dont sont curieusement exclus les impôts sur<br />
les ménages, la France des entrepreneurs aspire surtout à<br />
des Assises de la Liberté où l’État ferait enfin sa révolution<br />
copernicienne et chercherait enfin des solutions qui<br />
marchent pour retrouver le point de croissance qui nous<br />
manque. <br />
WEB TV / LA TRIBUNE DES DÉCIDEURS en partenariat avec<br />
« Arrêtons les subventions aux entreprises<br />
et baissons les impôts »<br />
Interrogé dans le cadre de l’émission de latribune.fr, Xavier Fontanet,<br />
ancien président d’Essilor, a répondu aux questions des internautes.<br />
© DR<br />
Le gouvernement est-il en train<br />
de se réconcilier avec l’entreprise<br />
?<br />
Il existe des signaux faibles qui sont<br />
positifs. Regardez Arnaud Montebourg,<br />
qui a remplacé dans son discours le mot<br />
entreprises par celui d’entrepreneurs. Ce<br />
n’est pas neutre. L’entrepreneur, c’est<br />
celui qui prend un risque pour tout le<br />
monde. Mais il a besoin de liberté pour<br />
affronter la concurrence. Et cette liberté<br />
s’acquiert par la confiance. Il faut changer<br />
notre modèle : en réalité, plus l’État<br />
soutient les entreprises, plus il les épuise.<br />
Arrêtons donc les subventions, et baissons<br />
les impôts.<br />
Cette concurrence que vous vantez<br />
a favorisé l’émergence du<br />
low-cost. Pensez-vous que l’optique<br />
puisse prendre ce virage ?<br />
On entend souvent dire que les verres de<br />
lunettes sont plus chers en France qu’en<br />
Allemagne. Mais en France, énormément<br />
de gens portent des Varilux, des verres<br />
plus chers, car ils sont fabriqués à l’unité.<br />
Ce n’est pas un luxe. Si le verre est moins<br />
travaillé, votre cerveau va se fatiguer, et<br />
votre productivité va baisser. On ne peut<br />
donc pas faire de low-cost en la matière.<br />
Ces prix élevés sont aussi favorisés<br />
par la prise en charge des<br />
mutuelles, souvent totale, qui<br />
arrange tout le monde ?<br />
Une minorité d’opticiens s’est mal comportée<br />
vis-à-vis des mutuelles. Il y a un<br />
travail de réconciliation à mener entre<br />
les différentes parties. Cela ne concerne<br />
pas les fabricants de verres. <br />
<br />
Interview réalisée<br />
par Thomas Blard et Éric Walther