09.07.2015 Views

1oVEkjV

1oVEkjV

1oVEkjV

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

Rapport sur l'homophobie 2014SOS homophobie34 rue Poissonnière75002 ParisDirecteur de la publicationYohann Roszéwitch, président de SOS homophobieDirecteurs de la rédactionÉlisabeth RonzierYohann RoszéwitchRédactionPierre BarberanSylvie BartheEBJean-François BerthouPaule-Élise BoudouArnaud BrouNadine CadiouManuel DavidDaphnée Da SilvaJulien DelhorbeADLoïc DuchateauAurore GentienCamille GerbaudJérémie KouzmineTania LejbowiczRaphaël LegouixPascal LelièvreJulien LemonnierDaniel LouisonDimitri OuardighiViolette PaquetAntoine PlanquetteFabien RandanneDavid RaynaudRonan RosecPierre StempferDominique TassartSylvain ToironRomuald VerrierAnna ZielinskaÉditionJuliette RaffierMaquetteMarty de MontereauImpressionImprimerie CPI France-QuercyZA des Grands-Champs46090 MercuèsDistribution-diffusionKTM éditions15, rue Claude-Tillier75012 Paris


Rapport sur l'homophobie 2014SOS homophobie dédie cet ouvrageàMarieetBruno


5SommaireÉditorial . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7L’association SOS homophobie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9Définitions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11Analyses et témoignages . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13Synthèse générale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14Contextes transversaux :Mariage pour tou-te-s . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20Agressions physiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32Lesbophobie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40Gayphobie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46Biphobie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54Transphobie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58Commerces et services . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64Famille, entourage proche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72Internet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 80Justice . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 86Lieux publics . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 92Mal de vivre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 98Médias-Communication . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 104Milieu scolaire-Enseignement supérieur . . . . . . . . . . 110Police-Gendarmerie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 118Politique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 122Presse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 132Religions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 138Santé-Médecine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 144Sport . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 150Travail . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 158Voisinage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 164International . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 170AnnexesLe droit français face à l’homophobie . . . . . . . . . . . . 178Faits marquants de l’année 2013 . . . . . . . . . . . . . . . . 180Communiqués de presse de SOS homophobie . . . . 184Remerciements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 188


Éditorial7«Souhaitons que dans 10 ans SOS homophobie n'ait plus de raison d'exister ! », écrivions-nous en 2004 àl’occasion de notre dixième anniversaire. Force est de constater que ce vœu ne s’est pas exaucé et quel’existence de notre association est aujourd’hui plus que jamais nécessaire.Nous avons malheureusement 20 ans.Comme Paul Nizan, « je ne laisserai personne dire que c’est le plus belâge de la vie ». Nous pourrions nous réjouir du vote de la loi sur le mariage pour tou-te-s. Nous pourrionscélébrer cette victoire tant attendue et si symbolique, résultat d’années de combat et de lutte. Nouspourrions nous contenter de ce nouveau pas vers l’égalité entre tous les couples et toutes les familles.Mais notre cœur n’est ni à la réjouissance, ni à la célébration, ni au contentement. Cette victoire laisse ungoût amer aux lesbiennes, aux gays, aux bi-e-s et aux trans, et à tou-te-s les partisan-e-s de l’égalité.Nous n’acceptons pas que des personnes aient pu manifester,non pour protéger leurs droits,mais pour empêcherd’autres d’acquérir ces mêmes droits, que des familles soient descendues dans la rue pour empêchercertain-e-s enfants d’être protégé-e-s.Nous n’acceptons pas que des hommes et des femmes politiques aient pu tenir,au sein même du Parlement,des propos qui ont nourri la haine.Triste écho des débats sur le Pacs, ces paroles décomplexées ont légitiméles insultes et les violences homophobes.Nous n’acceptons pas que des médias aient passé sous silence les marches pour l’égalité des partisan-e-sdu mariage pour tou-te-s, alors qu’ils relayaient largement les manifestations d’opposant-e-s et des proposd’un autre âge. Notre combat pour l’égalité était-il moins beau que les drapeaux roses et bleus de nosadversaires ?Nous n’acceptons pas les hésitations et les reculades de ceux-là mêmes qui avaient promis l’égalité. Non, la« liberté de conscience » ne peut pas être invoquée pour remettre en cause l’égalité de toutes et de tous etlégitimer la violation des lois de la République ! Non, il n’est pas acceptable que le bruit de quelques-un-e-sjustifie de repousser à demain une loi de protection pour toutes les familles !Nous n’oublierons pas celles et ceux qui nous ont soutenu-e-s, les attitudes courageuses des parlementairesqui ont porté notre parole, la « belle et haute voix » de Christiane Taubira.A elles et à eux, merci.Alors qu’en 20 ans, les témoignages de lesbophobie, de gayphobie, de biphobie et de transphobie reçus parnotre association n’ont cessé de croître, leur nombre a littéralement explosé en 2013. Plus de 3 500 témoignagesreçus, une hausse de 80 % par rapport à 2012 ! Plus d’une agression physique tous les deux jours!Ces violences ont un visage. Pendant les débats sur le mariage pour tou-te-s,Wilfred de Bruijn était agresséà Paris avec son compagnon. Les masques sont alors tombés pour laisser la place à une figure meurtrie et


Rapport sur l'homophobie 2014ensanglantée. « Ce ne sont pas les manifestants contre l’égalité qui nous ont tabassés. Mais les personnesqui ont une parole publique et tiennent des propos inadmissibles, profondément homophobes, risquent delégitimer des actes, des actions et d’autres paroles homophobes. »Ces derniers mois, la parole homophobe s’est totalement décomplexée, dans toutes les sphères de lasociété, alimentée et cautionnée par des silences et des reculades coupables. La soif médiatique de quelques-un-e-sl’a emporté sur le respect de tou-te-s.Désormais, face à une parole homophobe libérée, les victimes choisissent de parler. L’acceptation grandissantedes personnes LGBT et la reconnaissance légale des couples homosexuels, d’abord par le Pacs,aujourd’hui grâce au mariage pour tou-te-s,leur ont permis de ne plus se cacher,de s’affirmer et de prendreconscience de leurs droits.Depuis 20 ans, nous les défendons et les soutenons.A travers notre ligne d’écoute à destination des témoinset victimes d’homophobie, activité fondatrice de SOS homophobie. A travers notre conseil juridique, nosparticipations aux procès. Nous serons ainsi présent-e-s aux côtés de Wilfred et Olivier lors du procès deleurs agresseurs dans quelques semaines, aux côtés de Jean-Paul F. et de Jean-Paul B., sauvagement agressésen mars dernier pour s’être simplement enlacés dans la rue.Le travail de nos bénévoles et de nos membres nous permet de prévenir chaque jour davantage lesLGBTphobies.Au cours de l’année écoulée, plus de 15 000 élèves ont ainsi pu bénéficier de nos interventionsen milieu scolaire. A celles-ci, s’ajoutent les formations que nous assurons auprès des adultes ouencore notre action auprès des adolescent-e-s, grâce notamment au site cestcommeca.net.Depuis 20 ans, notre réflexion s’est enrichie. Elle nourrit aujourd’hui une action commune contre lalesbophobie, la gayphobie, la biphobie et la transphobie. La lutte contre chacune de ces discriminationstrouve ainsi sa place dans notre association. Ce travail est possible grâce à la mobilisation extraordinaireet quotidienne des membres de SOS homophobie, partout en France, à Paris et dans nos dix-septdélégations régionales.La loi sur le mariage pour tou-te-s ne nous fera oublier ni nos missions historiques ni nos engagements militants.Chaquejour, nous continuerons à aider et soutenir les victimes de LGBTphobies. Plus que jamais, nousmultiplierons nos actions de prévention. Nous continuerons de porter le combat pour l’égalité des droits,pour que la PMA soit accessible à toutes les femmes, que le don du sang soit ouvert aux gays et bisexuels,et que les droits des trans soient pleinement reconnus.« Dans toutes les larmes s’attarde un espoir », écrivait Simone de Beauvoir. Riche de son passé, de sa diversitéet de ses espérances, SOS homophobie écrit aujourd’hui une nouvelle page de son histoire.Yohann Roszéwitch,président


9L’associationSOS homophobieSOUTENIRles victimesd’actes homophobesÉcouterUne ligne téléphonique animée par des bénévolesformé-e-s recueille les témoignages et apporte auxvictimes attention, réconfort et pistes de solutiondans le plus strict anonymat. L’écoute se fait égalementsur Internet par chat, sur lequel répondentles mêmes bénévoles. Il est également possible detémoigner par courriel sur le site internet de l’associationet sur le site cestcommeca.net.Les coordonnées de structures ou de personnesaux compétences spécifiques (associations locales,avocat-e-s…) peuvent être communiquées.RépondreLes courriels et témoignages déposés sur notre siteinternet bénéficient d’un suivi attentif et leursauteur-e-s reçoivent une réponse personnalisée.Soutenir et accompagnerSous certaines conditions, et à la demande de l’appelant-e,l’anonymatpeut être levé pour un soutien personnalisé.Si nécessaire, l’association peut intervenirconcrètement auprès des victimes qui sollicitent sonappui : lettre de soutien, accompagnement, interpellationd’employeurs,de voisin-e-s ou autres personnescommettant des actes homophobes ou transphobes.Agir en justiceL’association SOS homophobie, ayant plus decinq ans d’existence, est habilitée à se porter partiecivile auprès de victimes d’actes homophobes outransphobes.PRÉVENIRl’homophobieIntervenir en milieu scolaireL’association propose des rencontres-débats auxélèves des collèges et lycées, animées par des bénévolesformé-e-s.Objectif :la déconstruction des stéréotypeset des idées reçues qui forment le terreaude l’homophobie,de la biphobie et de la transphobie,particulièrement à l’école.Pour ces actions, SOS homophobie est agréée


Rapport sur l'homophobie 2014dans les académies de Créteil, Paris et Strasbourg.Former les professionnel-le-sLa formation pour adultes sensibilise les professionnel-le-sdes domaines de l’éducation,de la santé,du sanitaire et social, de la justice, de la police,de la gendarmerie, les différent-e-s acteurs-tricessociaux (syndicats,associations...) ainsi que les entreprisesà la prise en compte des phénomènes dediscrimination homophobe et transphobe.D’une façon plus générale, il s’agit d’inciter à réfléchirsur les clichés, la banalisation de l’injure homophobeet transphobe, les préjugés, les stéréotypes,et ainsi d’intégrer la lutte contre les discriminationshomophobes, biphobes et transphobes aux différentespratiques professionnelles.Informer les adolescent-e-sOffrir aux adolescent-e-s LGBT un soutien spécifiquepar l’entremise du site internet « C’est commeça » (http://www.cestcommeca.net) : il met à leurdisposition de nombreuses informations,des témoignages,des ressources culturelles, etc., et permetdes réactions personnalisées dans des situations scolairesou familiales difficiles (en écrivant à temoignage@sos-homophobie.org).Intervenir sur les lieux de dragueDans les lieux de drague en plein air fréquentés par deshomosexuels, des interventions de quelquesbénévoles de l’association permettent d’informer leshommes qui fréquentent ces espaces des possiblesdangers et sur la conduite à tenir en cas d’agression.Des outils de prévention sont distribués.MILITERpour l’égalité des droitsRecenser et analyserChaque année le Rapport sur l’homophobie compilel’ensemble des témoignages reçus par l’associationet analyse l’actualité LGBT des douze moisécoulés et son traitement par la presse.À travers denombreuses thématiques (famille, travail, lesbophobie…),la publication qui en résulte offre sanscomplaisance une vision détaillée de l’homophobie,de la biphobie et de la transphobie en France etdemeure le seul outil d’analyse quantitative et qualitativepour en mesurer l’évolution.ManifesterChaque année,SOS homophobie participe à diversesmanifestations : journée internationale de luttecontre l’homophobie, Marches des fiertés LGBT,marche Existrans, Printemps des associations,Solidays et autres salons associatifs ou institutionnels.Elle coorganise également des soirées depromotion et de soutien de l’association.Lutter contre la lesbophobieLa commission lesbophobie conforte la diversité del’association dans sa composition et ses actions.Elle lutte contre les discriminations et les manifestationsde rejet spécifiques faites aux lesbiennes enprenant part à la création de supports d’informationet de communication (Enquête sur la lesbophobieen 2008, micro-trottoir en 2009, etc.) et en participantà des tables rondes, débats, manifestationset animations.Lutter contre la transphobieLe groupe transphobie a pour mission de luttercontre les discriminations et les formes de rejet spécifiquesfaites aux personnes trans.Traquer l’homophobie sur InternetSOS homophobie compte un groupe de suivi,retrait et prévention des propos homophobes ettransphobes sur Internet (forums, blogs, etc.).Prendre positionSOS homophobie intervient auprès des pouvoirspublics français et européens, du Défenseur desdroits, des médias pour porter notre combat pourl’égalité des droits quelles que soient l’orientationsexuelle et l’identité de genre.


11DéfinitionsL’homophobie,qu’est-ce que c’est?Le terme homophobie,apparu dans les années 1970,vient de «homo», abréviation de « homosexuel »,et de «phobie», du grec phobos qui signifie crainte.Il désigne les manifestations de mépris, rejet, ethaine envers des personnes, des pratiques ou desreprésentations homosexuelles ou supposées l’être.Ce n’est pas une construction étymologique puisque«homo» ne renvoie pas au radical grec.Est ainsi homophobe toute organisation ou individurejetant l’homosexualité et les homosexuel-le-s, etne leur reconnaissant pas les mêmes droits qu’auxhétérosexuel-le-s. L’homophobie est donc un rejetde la différence, au même titre que la xénophobie,le racisme, le sexisme, les discriminations sociales,liées aux croyances religieuses, aux handicaps, etc.Une discrimination est une attitude, une action ouune loi qui visent à distinguer un groupe humain d’unautre à son désavantage. La lutte contre les discriminationsest avant tout une démarche pour obtenirl’égalité en droit et en considération. Il ne s’agit pasd’obtenir des droits spécifiques ou des privilèges.Le terme lesbophobie, apparu plus récemment,désigne les formes d’homophobie qui visent spécifiquementles lesbiennes. C’est une combinaisond’homophobie et de sexisme.Le terme de gayphobie,lui aussi plus récent,désigneles formes d’homophobie qui visent spécifiquementles hommes homosexuels.Les termes de biphobie, désignant les discriminationset les manifestations de rejet à l’encontre desbisexuel-le-s, et de transphobie, à l’encontredes trans, sont souvent confondus à tort avec celuid’homophobie.L’abréviation LGBT signifie lesbiennes, gays,bisexuel-le-s et trans.« Faire son coming out » signifie annoncer sonhomosexualité.« Outing » signifie l’annonce de l’homosexualitéde quelqu’un sans son accord.L’hétérocentrisme est l’ensemble des représentationset des valeurs faisant de l’hétérosexualité lanorme unique à suivre en matière de pratiquesexuelle et de vie affective. Il peut inclure laprésomption que chacun est hétérosexuel ou bienque l’attirance à l’égard de personnes de l’autre sexeest la seule norme et donc est supérieure.L’hétérocentrisme fait référence aux privilègesdes personnes hétérosexuelles aux dépens des gays,lesbiennes, et bisexuel-le-s.L’homophobie, la biphobie,la transphobie, ça semanifeste comment?Dans leur forme la plus violente, l’homophobie,la biphobie et la transphobie s’expriment par desviolences physiques et peuvent dégénérer, de labousculade, du passage à tabac, jusqu’au viol etmême au meurtre.Dans une forme plus quotidienne, elles se traduisentpar des réactions, avouées ou non, de rejet, d’exclusion: injures verbales ou écrites, moqueries, humiliations,harcèlement, refus de service, dégradations debiens et discriminations.Elles peuvent aussi se manifesterpar des formes de commisération, de dédainou faire l’objet d’un tabou.


Rapport sur l'homophobie 2014Elles se manifestent dans tous les domaines dela vie : famille, ami-e-s, entourage, voisinage,travail, collège, lycée, vie quotidienne, commerces,services, administrations, lieux publics…Depuis 2003 et 2004, la loi française punit plussévèrement les agressions et les insultes lorsqu’ellessont motivées par l’homophobie. Depuis 2012lorsqu’elles sont motivées par la transphobie. Ellessont tout aussi répréhensibles pénalement que lescomportements racistes ou antisémites.L’homophobie, la biphobie,la transphobie, quellesconséquences?L’homophobie, la biphobie et la transphobiepeuvent avoir des conséquences psychologiques,physiques et sociales dramatiques pour lespersonnes qui en sont victimes.D’un point de vue psychologique, les conséquencesvont de la tristesse et du repli sur soi àl’inquiétude, l’angoisse, la dépression, voire à latentative de suicide (lire chapitre Mal de vivre).Elles peuvent s’accompagner de différentesconduites à risque (alcool,drogues,rapports sexuelsnon protégés…).Pour d’autres homosexuel-le-s, bi-e-s ou trans,l’homophobie, la biphobie ou la transphobie va aucontraire susciter un sursaut de combativité quiles portera à affirmer leur orientation sexuelle,leur identité de genre et leur mode de vie.D’un point de vue physique, les agressions peuventengendrer de lourdes séquelles. Parfois même, lesvictimes n’y survivent pas 1 .D’un point de vue social,l’homophobie,la biphobieet la transphobie peuvent aussi avoir des conséquencesimportantes et difficiles à gérer pour lespersonnes qui en sont l’objet, et ce dans différentsdomaines :- dans le monde du travail,l’homophobie et la transphobiese manifestent par le refus de promotion,la mise au placard,et parfois même le licenciement;- dans la vie quotidienne, déménager ou changerd’établissement scolaire sont parfois les seules solutionspermettant de fuir un quotidien insupportable;- plus généralement dans la vie sociale, l’homophobie,la biphobie et la transphobie prennent la formedu rejet, de l’incompréhension, de la personnehomosexuelle, bi ou trans.Lutter contre l’homophobie,la biphobie et la transphobie,c’est…En conclusion, outre un cadre législatif, encore insuffisantcertes mais pour lequel SOS homophobie s’estbattue car il permet aux victimes d’avoir un réelrecours,notre association reste convaincue que la luttecontre l’homophobie, la biphobie et la transphobiepasse par la mise en place d’une ambitieuse politiquede prévention. Expliquer la diversité, rassurer, sensibiliserà l’acceptation des orientations sexuelles et identitésde genre :autant d’objectifs que nous poursuivonsdans notre lutte, au travers du travail de l’ensemblede nos commissions.Outils et dossiers de sensibilisationsont ainsi préparés et présentés autant quepossible, partout où cela est nécessaire : milieu scolaire,auprès des policiers, dans divers contextes professionnels.Enfin, pour que ces discriminations nesoient plus considérées comme négligeables, voireinexistantes,notre lutte passe aussi par la visibilité dela réalité des agressions homophobes, biphobes ettransphobes aujourd’hui.Ce Rapport sur l’homophobie,qui existe depuis 1997, est pour nous un moyen d’enrendre compte, de mieux connaître l’homophobie, labiphobie et la transphobie,pour mieux les combattre.Pour en savoir plus:Daniel Borrillo, L’Homophobie, éd. PUF, collectionQue sais-je?, novembre 2001 ;Louis-Georges Tin, Dictionnaire de l’homophobie,éd. PUF, mai 2003;Commission lesbophobie de SOS homophobie,« Synthèse de l’enquête sur la lesbophobie »,mai 2008.1. Voir le Rapport annuel sur l’homophobie 2008, p.30 :« Liste des meurtres dont la motivation homophobeest avérée (janvier 2002-janvier 2008) ».


13Comment est réalisé leRapport surl’homophobie ?Comme chaque année,le Rapport sur l’homophobie2014 a été constitué à partir de quatre sources :- les témoignages reçus par l’association au coursde l’année 2013 (sur notre ligne d’écoute, parcourrier, par courriel ou lors de certains événementsauxquels participe l’association) ;- le travail des différents groupes et commissionsde l’association ;- le suivi de l’actualité de janvier 2013 à décembre2013 ;- l’analyse de la presse au cours de la même période.Ce document n’est donc pas le recensementexhaustif de toutes les manifestations homophobessurvenues en 2013, mais bien une visionde l’homophobie à travers les outils de l’associationet son vécu de terrain. Les statistiques communiquéesdans ce rapport sont uniquementétablies à partir des témoignages et demandesde soutien reçus par notre association. On saitqu’au- jourd’hui encore de nombreuses victimesne témoignent pas et passent sous silence lesviolences dont elles peuvent faire l’objet.Depuis la précédente édition de ce rapport,SOS homophobie a souhaité accorder une page àdes personnes physiques ou morales extérieuresà l’association, sensibilisées à la problématiquede l’homophobie. La parole est ainsi donnée à deschercheurs, des personnalités qui apportentdes éléments d’analyse ou à d’autres associationsqui offrent un regard croisé. Ces participationsextérieures sont l’objet des encadrés intitulés« La parole à... ».La combinaison de ces sources nous a permisd’alimenter vingt rubriques, en plus du suivi de lapresse :- seize étudient les contextes dans lesquels se manifestel’homophobie : commerces et services,famille-entourage proche, Internet, justice, lieuxpublics, mal de vivre, médias-communication,milieu scolaire-enseignement supérieur,police etgendarmerie,politique,religions,santé-médecine,sport, travail, voisinage et international ;- six sont des analyses transversales : agressionsphysiques, lesbophobie, gayphobie, biphobie,transphobie et, cette année, « mariage pour toute-s» afin d’analyser l’homophobie qui a pu spécifiquementse dégager dans le cadre de l’adoptionde ce projet de loi ; les témoignages concernantces situations sont analysés également dans lescontextes précisés ci-dessus.Ce rapport est entièrement rédigé par les bénévolesadhérent-e-s de l’association : les différences destyle en font également la richesse.Les prénoms utilisés dans ce rapport sont fictifs afinde préserver l’anonymat des victimes. Ils servent àfaciliter la lecture des témoignages.


Rapport sur l'homophobie 2014 • SynthèseSynthèsedes témoignages 2013Pas de lune de miel pour lesLGBTphobies35173000200019771000365 275 334 472 458 3986531141 1212 1332 1483 15561263 1246 125919971998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010nombre de témoignages reçus depuis 199720112012 2013En 2013,année marquée par les débats et le votede la loi ouvrant le mariage aux couples de personnesde même sexe, le nombre de témoignagesreçus par SOS homophobie enregistre unehausse sans précédent (+78 %), pour atteindre unniveau record (3 517). Les témoignages se concentrentprincipalement sur le premier semestre (61 %des témoignages de l’année), en particulier sur lestrois mois marqués par de grosses manifestationsd’opposant-e-s à cette loi (40 %) : janvier (17 %),avril (12 %) et mai (11 %). Pour analyser ce phénomèneet expliquer ses répercussions dans toutes lessphères de la société, nous avons réalisé dans cetteédition un chapitre transversal « Mariage pour toute-s».Celui-ci nous révèle que près d’un témoignagesur trois reçus en 2013 est lié, de manière plus oumoins directe, à cette thématique.Si l’ampleur de la hausse du nombre d’actes signalésen 2013 doit être rapprochée des débats menésautour de la loi sur le mariage pour tou-te-s, elle nepeut pas uniquement s’expliquer par une augmentationdes actes LGBTphobes (envers les personneslesbiennes,gays,bi-e-s et trans) dans la société française.En effet, comme nous le soulignions déjà en2012 — dont le dernier trimestre concentrait àlui seul près de 40 % des témoignages de l’année —la libération de la parole homophobe s’est aussiaccompagnée d’une libération de la parole des victimes,qui hésitent de moins en moins à réagir faceà leur agression et osent davantage témoigner. Parailleurs, la médiatisation de SOS homophobie et letravail de communication de ses bénévoles ontpermis une meilleure visibilité de l’association et deses actions. Il faut également relever le travail debénévoles de l’association qui sont allées, au coursde l’Eurolesbopride à Marseille,à la rencontre des lesbiennesafin de les sensibiliser, et à cette occasion


Rapport sur l'homophobie 2014 • Synthèseprise de conscience de la nécessité de lutter contreles discriminations et violences LGBTphobes dansle cadre professionnel et d’une mise en œuvreconcrète d’actions.Déjà en hausse l’année dernière,le nombre de témoignagesrelatifs au Milieu scolaire continue de croître(+25 %). Dans le même temps, le nombre d’adolescent-e-squi nous ont contactés a grimpé de 80 %cette année. Le climat d’homophobie, renforcé en2013 avec les débats sur le mariage pour tou-te-s,rend d’autant plus nécessaire le travail de sensibilisationet de prévention auprès des établissementsscolaires mené par les membres bénévoles deSOS homophobie (lire chapitre Milieu scolaire).Au cours d’une année où la parole homophobes’est décomplexée et la visibilité des personnes LGBTn’a jamais été aussi forte, la violence des agressionsà l’encontre de ces dernières s’est renforcée.Les agressions physiques ont ainsi fortement augmenté(+54 %) et sont présentes dans 6 % descas recensés (lire chapitre Agressions physiques).Même si elles sont le plus souvent commises pardes inconnu-e-s, dans des Lieux publics (47 % descas d’agressions physiques sont enregistrés dans cecontexte) et Commerces et services (7 %), ellespeuvent aussi être l’œuvre de personnes del'entourage : Famille (13 %),Voisinage (9 %),Travail(6 %) et Milieu scolaire (5 %).


Rapport sur l'homophobie 2014 • SynthèseRépartition géographiquedes témoignagesLes départements pour lesquels nous avonsreçu en 2013 plus de 50 témoignages sont,par ordre décroissant : Paris, Bouches-du-Rhône, Nord, Rhône, Hauts-de-Seine, Hérault,Val-de-Marne, Charente-Maritime, Isère et Seineet-Marne.En termes géographiques, il est une fois de plusà noter la surreprésentation de l’Ile-de-France dansnos témoignages (près du quart), suivent les régionsRhône-Alpes, Provence-Alpes-Côte d’Azur, Nord-Pas-de-Calais, Languedoc-Roussillon, autant derégions comptant une importante agglomération.


19Manifestations de l’homophobieInsultes39% 37%Rejet / IgnoranceMenaces / chantage22% 18%Homophobie sociale17%DiffamationDiscriminationHarcèlementAgressions Physiques11% 7% 6%3% 1% 1% 1%Dégradations de biens / volsAgressions sexuellesLicenciementOutingManifestations de l’homophobie en 2013*Près de la moitié des témoignages font partd’insultes, ce qui n’est malheureusement pas unesurprise. Le nombre de témoignages faisant état derejet ou d’ignorance ou mettant en avant un climatd’homophobie sociale augmente de façon significative,soulignant le mal-être de bon nombre depersonnes LGBT qui ne se reconnaissent pas dansune société encore trop hétéronormée.* Insultes: intègre les préjugés véhiculés sur les homosexuel-le-s et les trans ; harcèlement : toutes les situations où les agresseur-e-sagissent de façon répétée ; discrimination : traitement particulier des homosexuel-le-s, bisexuel-le-s ou trans par rapportaux personnes non LGBT ; diffamation : imputation d’un fait, par écrit ou oralement, à l’encontre d’un-e homosexuel-le ou trans(ou des homosexuel-le-s et trans en général), de nature à porter atteinte à sa (ou leur) dignité ; homophobie sociale: expressionpar les victimes de difficultés à s’épanouir dans une société hétérocentrée, l’ensemble des représentations et des valeursde la société fait de l’hétérosexualité la norme unique en matière de pratique sexuelle et de vie affective.


Rapport sur l'homophobie 2014Mariagepour tou-te-sL’égalité… ou presque !24%InconnuTrans52%Homme1%23%Femmesexe des victimes29%Inconnu1%- de 18 ans38%35-50 ans+ de 50 ans 7% 16%âge des victimes9% 18-24 ans25-34 ansÉtranger30%Inconnu1%45%Autresrégions24%Île-de-Franceorigine géographiqueHarcèlementDiscrimination4%1%1%72% 58%Homophobiesociale15%Menaces-chantageInsultes1%Agressionsphysiquesmanifestations de l’homophobie*Justice 1%Voisinage 2%Religion 2%42%InternetContextes18%Politique11%2%Milieu scolaire 2% 8%Médias 3% 3%Travail6%Famille-entourageprocheLieux PublicsMal de vivreCommerceset services1006 témoignages, correspondantà 953 cas, soit 28% du total.Les Français-es citent à 46 % (60 % pour les moinsde 30 ans) le vote de la loi ouvrant le mariageaux couples de personnes de même sexe commel’événement le plus marquant de l’année 2013 1 .Indéniablement,cette loi s’inscrit dans les grandes avancéessociales de notre société contemporaine : droitde vote des femmes,loi relative à l’IVG,abolition de lapeine de mort,parmi celles qui marquent une époque.Ce vote répondait à l’Engagement 31 de la campagneprésidentielle de François Hollande, en 2012. Un anaprès son élection,la loi votée après une longue périodede débats houleux et de fortes mobilisations aprofondément divisé la société française, rappelantl’affaire Dreyfus ou le projet de loi Savary (Mouvementde l’école libre).L’édition 2014 du Rapport annuel sur l’homophobiereste ainsi marquée par le nombre importantde signalements reçus par l’association.Près de 1000cas sont relatifs à l’adoption de cette loi,soit environun témoignage sur quatre reçus par SOS homophobiecette année, ce qui justifiait un chapitre spécifiquedans cette édition. Au-delà des signalements relatifsaux manifestations et contre-manifestations,prises de position politiques (près d’un cas sur cinq),ce chapitre transversal est aussi représentatif de* Plusieurs manifestations peuvent être identifiées sur uncas. En conséquence, le total des manisfestations est supérieurà 100 %.1. Sondage CSA / BFM réalisé par Internet du 10 au 12 décembre2013 sur un échantillon national représentatif de980 personnes résidant en France âgées de 18 ans et plus,constitué d'après la méthode des quotas.


Rapport sur l'homophobie 2014 • Mariage pour tou-te-sdu mariage civil ». Un long parcourslégislatif qui débute par la présentationdu projet de loi au Conseildes ministres, le 7 novembre 2012, etse radicalise à la fin des débats parlementaires,notamment après le votefavorable du Sénat le 12 avril 2013.Christine Boutin évoque une « guerrecivile », Frigide Barjot déclare :« Hollande veut du sang,il en aura.Toutle monde est furieux. Nous vivons dansune dictature. » Le Printemps français,mouvement plus radical encore que laManif pour tous, se distingue après lamanifestation du 24 mars, et BéatriceBourges se positionne comme une desprincipales porte-parole de l’oppositionà la suite de Frigide Barjot.Dans la continuité des prises de positionpubliques, plusieurs altercations et agressionsphysiques se déroulent :le 4 avril,la sénatrice ChantalJouanno (UDI), qui s’était déclarée favorable à laloi,est chahutée à son propre domicile par des opposant-e-s.Le 6 avril, le véhicule de la sénatrice EstherBenbassa est dégradé, et un couple d’homosexuelsest violemment agressé physiquement à Paris (lirechapitre Agressions physiques).Le lendemain,l’Espacedes Blancs Manteaux à Paris, où se déroule lePrintemps des associations LGBT, est vandalisé etrecouvert d’affiches de la Manif pour tous. Dans lamême semaine, deux débats avec le député ErwannBinet, rapporteur du projet de loi, sont annulés enraison de menaces pesant sur sa sécurité.Le 27 mars 2013, dans le sillage du Printemps français,lemouvement des Hommen fait son apparitionmédiatique lors d’un rassemblement organisé devantla préfecture de police de Paris. Ces hommes torsesnus et masqués participent à la radicalisation dudiscours et contribuent à une image médiatiqueviolente des opposant-e-s.Participant-e-s à la Manif pour tous,13 janvier 2013Mais cette mobilisation ne se termine pas pour autantavec la promulgation de la loi et sa publication auJournal officiel le 18 mai 2013. La dernière grandemobilisation de la Manif pour tous est organisée le26 mai 2013, qui se conclut par la mise en garde àvue de 231 personnes.Les tweets homophobes atteignentun pic au cours de l’été.Certains mouvementsont continué leurs manifestations dans la deuxièmepartie de l’année : les Veilleurs, au sein de la Manifpour tous, organisent une marche en août 2013 etdes rassemblements réguliers toute l’année.Le 25 octobre, Christiane Taubira, garde des Sceauxqui a porté le projet de loi,en déplacement à Angers,est accueillie par des opposant-e-s au son de «Taubiradégage » ou « non à la dictature socialiste ». C’estalors qu’une adolescente de 12 ans lui brandit unebanane en criant : « La guenon, mange ta banane. »L’opposition à l’application de la loi s’organiseégalement : le Conseil constitutionnel est saisi le18 septembre 2013 par le Conseil d'État sur unequestion prioritaire de constitutionnalité posée parsept maires.Soutenus par le collectif des maires pourl’enfance, ils demandent à ce que les élu-e-s responsablesde l’état civil puissent refuser de marierdes couples de personnes de même sexe en arguantd’une clause de conscience.Le 18 octobre,le Conseilconstitutionnel affirme que la loi ouvrant le mariageet l’adoption aux couples de personnes de mêmesexe ne porte pas atteinte à la liberté de consciencedes maires chargé-e-s de l’appliquer. L’idée d’uneclause de conscience avait pourtant préalablementfortement marqué le débat, notamment ennovembre 2012,lorsque François Hollande déclarait


23devant le Congrès des maires de France que cetteloi « s'applique[rait] pour tous dans le respect néanmoinsde la liberté de conscience », évoquant lapossibilité d'étendre les conditions de délégationd'un-e maire à ses adjoint-e-s. Dès le lendemain,le président de la République revenait sur cetteposition. La décision du Conseil constitutionneln’empêche pas l’entrée en « résistance » de quelquesélu-e-s municipaux-ales. Ainsi, fin août 2013,Marie-Claude Bompard, maire de Bollène (Ligue duSud, parti d’extrême droite), avait annoncé qu’ellerefuserait de célébrer l’union de deux femmes du faitde son opposition au mariage pour tou-te-s.Les deuxfemmes avaient porté plainte pour discrimination,même si elles avaient pu se marier devant l'une desadjointes de la maire. Le parquet a fait valoir que lemariage avait tout de même eu lieu, le procureur arappelé ses obligations à l’édile…L’affaire est classéesans suite. Le 24 octobre, le conseil municipal deFontgombault (Indre) délibérait qu’il refuserait decélébrer le mariage d’un couple de personnes demême sexe, au motif qu'« il existe une loi naturelle,supérieure aux lois humaines » car « ces personnes,quelle que soit leur dignité d'êtres humains, qu'il y alieu de reconnaître par ailleurs, sont radicalementincapables de procréer un être humain qui soit issude cette union ».La préfecture a saisi le tribunal administratifpour l’annulation de cette délibération.Cette forte opposition n’est toujours pas finie à l’heureoù nous publions ce Rapport. En ce début d’année2014, les mobilisations contre le mariage pourtou-te-s s’inscrivent dans divers mouvementsd’opposition à la politique du gouvernement.Le 26 janvier 2014, une manifestation organisée àParis sous l’intitulé « Jour de colère » aux relentsd’antisémitisme voit le rapprochement des opposant-e-sau mariage pour tou-te-s avec les anti-Hollande, les anti-système, les partisan-e-s deDieudonné, dans un imbroglio où il devient impossiblede retrouver le discours et les arguments desopposant-e-s au vote de cette loi. En ce débutd’année, les opposant-e-s issu-e-s de divers mouvementsont réussi au moins ce coup médiatique :brouiller les cartes, inciter à la confusion en manipulantl’opinion. L’opposition s’appuie dorénavantsur le fantasme d’une « théorie du genre », ou surla procréation médicalement assistée. Le 2 février2014, une manifestation est organisée par la Manifpour tous et rassemble près de 80 000 personnesselon la police.Ludovine de la Rochère,nouvelle égériedu mouvement, s’indigne contre « l’ABCD de l’égalité», précisant que « cette question n’a rien à faireà l’école ». Ce nouvel outil à l’essai dans plusieurscentaines de classes a pour objectif de lutter contreles stéréotypes filles-garçons.Une folle rumeur manipuléepar quelques responsables politiques s’étaitpréalablement répandue autour de cours d’éducationsexuelle en classe de maternelle ou l’obligationpour les garçons de s’habiller en filles et inversement.Le mariage pour tou-te-s reste une avancée considérablepour le respect des homosexuel-le-s,mais ne garantit pas encore la stricte égalité que nousrevendiquons. L’égalité, ou presque… L’accès à laPMA pour les couples de lesbiennes et le mariage decertains couples binationaux restent des revendicationsentières.SOS homophobie ne peut que rappeler l’engagementde François Hollande, alors candidat aux électionsprésidentielles, qui déclarait en 2012 à notre association: « Une femme doit pouvoir recourir à l’assistancemédicale à la procréation, soit parce qu'ellene peut pas avoir d'enfant, soit parce qu'elle nesouhaite pas avoir une relation avec un homme.Je suisdonc favorable à l’ouverture de l’assistance médicaleà la procréation aux couples de femmes, dans lesconditions actuelles d’âge et dans le respect del’anonymat du don de gamètes 2 .»Quelques moisaprès son élection, lors d’une interview télévisée endate du 28 mars 2013, s’il a fermement maintenuson soutien au projet de loi ouvrant le mariage etl’adoption aux couples de personnes de même sexe,François Hollande est revenu sur sa position concernantl’ouverture de la PMA aux couples de femmes,en faisant allusion à l’avis que devait rendre le Comiténational d’éthique à la fin de l’année 2013, avispurement consultatif, rappelons-le. De reniementsen reniements, l’accès des lesbiennes à la PMA estdorénavant remisé aux calendes grecques : si celui-2. Réponse au questionnaire adressé par SOS homophobieà François Hollande, candidat aux élections présidentiellesde 2012 (consultable sur le site de l’association).


Rapport sur l'homophobie 2014 • Mariage pour tou-te-sRésultats du vote final à l’Assemblée nationale, 23 avril 2013ci n’était plus prévu dans la loi Famille, le gouvernementreporte ce projet de loi le lendemain de la manifestationdu 26 janvier 2014. SOS homophobies’inquiète également de cet énième report du projetde loi Famille qui aurait pu parfaire la sécurisationjuridique des familles homoparentales en reconnaissantaux parents LGBT des droits même hors mariage.En effet,alors que des décennies d’évolution du droitont permis à la filiation de s’établir et de s’épanouiren dehors du mariage hétérosexuel,c’est l’obligationde se marier qui est faite aux parents de mêmesexe pour adopter…y compris leurs propres enfants.De plus, le retrait de ce projet de loi maintientl’absence de prise en compte par le droit des situationsde coparentalité.En ce qui concerne les couples binationaux, l’adoptionde la loi relative au mariage des couples depersonnes de même sexe s’est accompagnée d’unecirculaire d’application du ministère de la Justice endate du 29 mai qui prévoit que pour un certain nombrede nationalités, le droit du pays d’origine prime sur ledroit français même si le mariage se déroule sur notreterritoire, en vertu d’accords internationaux. C'estle cas de la Pologne, l'Algérie, la Tunisie, le Laos,le Cambodge,la Bosnie-Herzégovine,le Monténégro,la Serbie, le Kosovo, la Slovénie et le Maroc. D’aprèsl’Ardhis 3 ,une trentaine de couples seraient concernéspar ces dispositions.Le 15 novembre 2013,le parquetgénéral de Chambéry a formé un pourvoi en cassationcontre l’arrêt de la cour d’appel de Chambéry,quiavait autorisé le 22 octobre le mariage d’un couplefranco-marocain, alors qu’une convention avec leMaroc ne le permet pas.La question du mariage pources couples est dès lors portée devant la Cour decassation. Alors qu’il paraît possible de passer outreces accords internationaux, en invoquant la notiond’ordre public international français,SOS homophobiedemande la réécriture de cette circulaire en supprimantla référence aux accords binationaux (lire chapitreJustice).La forte mobilisation contre le mariage pourtou-te-s a fait ressortir un climat, des mots et descomportements homophobes,comme le montrent3. Association pour la reconnaissance des droits despersonnes homosexuelles et transsexuelles à l'immigrationet au séjour


25les témoignages reçus. Un débat révélateur del’homophobie de notre pays, qui montre toute lanécessité de développer des actions de préventionet de rester vigilent-e-s.Que ces évènementsn’entachent pas le bonheur des 7 000 coupleshomosexuels et 238 000 couples hétérosexuels 4qui se sont unis en 2013.SOS homophobie adresseses plus sincères félicitations aux nouvelles etnouveaux marié-e-s.4. Bilan démographique 2013 INSEEDes nouvelles et nouveauxmarié-e-s pas à la noceBernard et Peng se sont mariésen août 2013 à Matha (17),devant un adjoint au maire.Le maire de la commune,Claude Binaud, a refusé deles unir parce qu’il s’agissaitde deux hommes, précisantque pour un mariage entredeux femmes, il l’auraitpeut-être fait.Sondage Ifop pour Femmeactuelle (6 février 2013) :43 % des Français-esinterrogé-e-s sont malà l’aise devant un coupled’hommes et 41 % devantun couple de femmes.Xavier assiste au mariaged’amis hétérosexuels, en juin.Le maire déclare : « En cettepériode de débat sur lemariage, je suis plus que ravid’unir aujourd’hui un hommeavec une femme.»Fatiha vit en Bretagne avecsa compagne. En déposantleur dossier de demande demariage à la mairie, on leurrépond que du fait que Fatihaest algérienne, l’union nepourra pas être célébrée.Estelle et Rachel organisentleur mariage programmé enmai. Elles repèrent une salleà louer pour la réception.Aux premiers échanges demails, la salle était libre.Rachel indique son intérêt etprend rendez-vous pour unevisite. En se présentant toutesles deux, elles ressentent unmalaise. Le prestataire neconfirme jamais la réservationpar courriel, comme convenu.En relançant, celui-ci leurrépond que la salle est déjàréservée. Quelques jours plustard, elles renvoient un mailse faisant passer pour un couplehétérosexuel qui se marie…la salle est toujours libre.Internet et homophobie :un mariage qui dureSur Twitter : « Mariage gay,c’est la porte ouverte àtoutes sortes de saloperiestype zoophilie, nécrophilie…Ouais j’ai un esprit fermé,pas comme vos culs.»Sur Facebook : « Bien sûrque c’est un péché d’êtrehomo, la nature que Dieunous a donnée, il faut larespecter, ok ? Il a crééla femme et l’homme etc’est la femme qui fait naîtreles enfants, alors qu’ils aillentse planter leurs trucs dansleurs culs ailleurs, ok ?La France est déjà assezdégueulasse comme ça,on a pas besoin de ces gens.Et bientôt, on sera d’accordqu’ils se marient entrefrères et sœurs, c’est ça ?Et les animaux aussibientôt ? »Sur un forum : « En plus, ilsont le droit d’avoir des enfants,non mais où va-t-on ?Un enfant a besoin d’un pèreet d’une mère pour s’épanouirpleinement, donc ces enfantslàdeviendront homos oulesbiennes ? Heureusementque mes enfants ne sontpas homos ou lesbiennes,car je les aurais reniés, toutsimplement. Et pour finir,rien que d’imaginer ceque peuvent faire les homoset lesbiennes ensemble, j’aienvie de vomir et je plainsvraiment leurs parents carcela doit être très difficiled’accepter, moi je me diraisque je les ai mal éduquéset je serais très triste.Voilà j’aimerais avoirvotre avis sur ce sujet. »Sur Facebook : « Mieuxvaut des femmes pieuses etvoilées que des "folles"avec des bébés déguisésen JP Gautier. Non au mariagegay !!! Les sionistes commevous veulent rendre notresociété décadente pournous détruire !!! Musulmanset chrétiens unis contre


Rapport sur l'homophobie 2014 • Mariage pour tou-te-sle complot sioniste !!!Bande de pédophiles !!! »Sur Twitter : « Mariagepour tous : les bans demariage des PD serontpubliés en mairie. Beaulisting pour la prochaineguerre mondiale. »« Vive les mariés on vacramer ces PD », « Projetde loi pour le mariage pourtous adopté. J’appelleclairement à la violence età la haine. Tue un gay,protège l’avenir. »Débats et dérapages :le malaise au quotidienFabienne nous appelle enpleurs. Militante pour les droitsdes homosexuel-le-s, sesami-e-s lui ont dit dernièrementqu’elle les « saoul[ait] avec[s]on militantisme ».Jérôme travaille dans uneentreprise parisienne. Il esttrès surpris qu’un de sescollègues utilise la messagerieélectronique professionnellepour recruter des bénévolesde la Manif pour tous et appelerà la mobilisation du 24 mars.A la machine à café, François,qui n’a jamais évoqué sonhomosexualité au travail,entend son collègue lui dire :« Je ne sais pas pourquoiils nous font chier avec leurmariage, ils ont le Pacs, çasuffit très bien. »Béatrice est enseignantedans un lycée agricole du Sudde la France. Elle déjeune auréfectoire avec ses collèguesqui discutent du projet de loi.A la fin du repas, le directeurde l’établissement lance :« Que les PD prennent cequi reste. » Devant sa réactionindignée, il répond : « Ne metraitez pas d’homophobe,j’ai un filleul qui est gay. »Etienne est étudiant en classepréparatoire aux grandesécoles aux Antilles. Sonprofesseur déclare :« Mariage pour tous, celaveut dire que je pourrai memarier avec mon chien. »L’employeur de Gaspardlui demande de remplirun formulaire sur sa situationpersonnelle. Il découvre queces données apparaissentsur un logiciel accessibleavec des identifiants qui sontéchangés entre les salariés.Dans le contexte général,il ne souhaite pas que sescollègues apprennent qu’ilest pacsé avec un homme.Elodie est lesbienne. Sa sœurl’invite à son anniversaire,mais leurs parents demandentà Elodie de ne pas venir,sa présence risquant d’attiserles débats. Elle comprendd’autant moins qu’ils n’ontjamais voulu discuter de sonorientation sexuelle avec elle.Boris est principal de collègedans le Sud de la France.Il ne cache pas sa vie de coupleavec Hervé. Une nuit de janvier2014, l’établissement scolairea été tagué sur toute sa façade.Il remercie ses collègues quil’ont soutenu et le Conseilgénéral qui a repeint lebâtiment dans un temps record.Le soir de la Manif pour tousdu 26 mai, Eric reçoit un mailde ses parents avec des photosd’eux avec Frigide Barjotprises lors de la manifestation.Julien n’entendait plus depropos homophobes danssa famille, depuis quelquesannées. Lors d’un débat autourde la PMA, à un repas defamille, son frère lui lance :« Les homosexuels ont tousun problème, sauf toi.Les enfants vont devenirhomosexuels.»Lieux publics, bans publicsStéphanie marche bras dessusbras dessous avec son amiedans les rues de Marseille,à 21 h. Une dizaine de jeuneshommes les interpellent, leurdemandant de dégager :« Vas-y, mets-lui un doigtdevant moi… Fais voir tagrosse chatte… Faites çachez vous… Moi j’suis contrele mariage pour tous…Et si t’adoptes un gosse, il voitdeux femmes, son cerveau,comment tu crois qu’il vase développer ? Nous on esthomophobes… » Le groupeles menace de coups de pied.En s’éloignant, Stéphaniereçoit un claque sur la têteet une pierre dans le dos.En avril 2013, Fabien et sonami flânent dans le VII earrondissement de Paris,


27Courrier International, 25 avril au 1 er mai 2013lorsqu’un homme s’arrêtedevant eux, leur fait un salutnazi et vocifère : « Sales PD,vous n’avez rien à fairedans ce quartier, dégagez. »En faisant la queue dans uncommerce, Géraldine entenddeux hommes discuter :« J’ai appris à tuer en étantsoldat. Si j’avais un fusil, jeles tuerais les PD en leur tirantune balle entre les deux yeux.Ces saloperies, c’estdommage qu’Hitler ne lesait pas tous tués. »Hélène est intersexuelle.A Lyon, elle croise un groupede personnes distribuant destracts pour la Manif pour tous.Celles-ci la suivent en criant :« C’est un mec, c’est un mec,travelo, PD, va te pendre,dégénéré ! »Des propos publics sansdiscernementElise assiste à la cérémonie devœux du maire de sa communedans les Bouches–du-Rhône.Celui-ci déclare : « Je vaisavoir du travail cette année,


Rapport sur l'homophobie 2014 • Mariage pour tou-te-smarier des hétéros, marierdes homos et marierdes animaux. »Lors des débats à l’Assembléenationale, le député UMPDavid Douillet estimequ’avec l'adoption de la loisur le mariage pour tou-te-spermettant l'adoption auxcouples de personnesde même sexe, « le gouvernement[va] sciemmentprovoquer des plaiesouvertes et saccager lavie d'enfants à des finsélectoralistes ».Le 6 juillet 2013, lors d’undébat au conseil municipalde Toulouse, Chantal Dounot-Sobraques, élue UMP, lance :« Un vagin est fait pour lesrapports sexuels, pas l’anus. »A l’occasion de ses vœux surl’édito du bulletin municipal,Alain Chapelain, maire deLongeville-lès-Metz, explique :« Beaucoup manquent derepères et s’accrochent à toutet n’importe quoi pour exister»,en listant le « mariage pourtous… le terrorisme… lestireurs fous… le grandbanditisme… la drogue…la prostitution… j’en passe,et du moins bon peut-êtreencore.»Et les enfants ?Dans le métro, à Paris, Luccroise quelques militant-e-sde la Manif pour tous de retourdu rassemblement du 13 janvier,qu’il reconnaît à leurs pancarteset sweat-shirts. Une des fillettesqui les accompagnentdemande: « Maman, c’estquoi un homosexuel ? »Au lycée d’Aurélien, sescamarades lui adressent, lorsd’un débat organisé en classe :« Pays de merde à cause delui… C’est pour l’argent…On va pas marier des chiensavec des chats. » L’enseignantn'a aucune réaction.En rentrant de son collège(privé), Clara donne à sesparents un tract : « Chersparents, nous vous informonsque les opposants au projetde loi sur le "mariage pourtous" et l’adoption par lescouples de même sexeorganisent une manifestationnationale le 24 mars prochain. »Pourquoi lemariage pourtou-te-s est-ilune nécessité ?L’argumentaire complet est présent sur le sitede l’association. Extraits :Le Pacs ne suffit-il pas ?Non. Les droits donnés par le Pacs et le mariagesont très différents ! Contrairement au mariage, lePacs ne prévoit pas la protection du ou de la partenairesurvivant-e en cas de décès (pensions deréversion, droits de succession). Il ne prévoit pasnon plus les droits extra-patrimoniaux liés à lafamille, comme le port du nom de son ou de sapartenaire, ou les liens de parentalité et droits defiliation. En conclusion, le couple marié est mieuxprotégé par la loi que le couple pacsé.Il est inacceptable que l’Etat français, dont ladevise est pourtant « Liberté, Egalité, Fraternité »,discrimine légalement les couples sur la base del'orientation sexuelle des partenaires.« Je suis contre l'ouverture du mariage auxhomos, mais je ne suis pas homophobe ! »(habituellement suivi de : « J’ai même deshomosexuel-le-s parmi mes amis »)Les violences physiques et les discriminationshomophobes que tout le monde condamne nesont qu'une conséquence de l’homophobie. Lasource ultime de l'homophobie est à rechercherdans une conception hiérarchisée des orientationssexuelles et des identités de genre. Considérer queles couples homos et hétéros ne doivent pas êtretraités de façon égale est une reconnaissanceimplicite de cette hiérarchie. L'inégalité devant laloi rappelle chaque jour aux jeunes LGBT (lesbiennes,gays, bi-e-s, trans) que l’Etat les considèrecomme des sous-citoyen-ne-s.


Rapport sur l'homophobie 2014 • Mariage pour tou-te-sCe que change la loiLa loi n° 2013-404 du 17 mai 2013 ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexepermet aux couples homosexuels de se marier. La loi ouvre également la voie de l’adoption à cescouples mariés. Ce texte reconnaît par ailleurs les mariages entre deux personnes de même sexe célébrésà l’étranger avant l’entrée en vigueur de la loi. Il rend aussi possible la célébration du mariage enFrance lorsque les futur-e-s époux-ses, dont l’un au moins a la nationalité française, vivent dans unpays qui n’autorise pas le mariage entre deux personnes de même sexe (et dans lequel les autoritésdiplomatiques et consulaires françaises ne peuvent pas procéder à la célébration), sous réserve desaccords binationaux (lire chapitre Justice).Enfin, cette loi contient des mesures qui concernent tous les couples. En voici les principales :• Célébration du mariage dans la commune où l’un des parents du couple a son domicile ou sa résidence(précédemment où l’un-e des époux-se avait son domicile ou sa résidence).• Possibilité pour chacun des époux de porter, à titre d’usage, le nom de l’autre époux-se, par substitutionou adjonction à son propre nom dans l’ordre choisi.• En plus des possibilités antérieures, l'adoption plénière de l'enfant du conjoint est permise, lorsquel'enfant a fait l'objet d'une adoption plénière par ce seul conjoint et n'a de filiation établie qu'à sonégard.• L'enfant précédemment adopté par une seule personne, en la forme simple ou plénière, peut l'être uneseconde fois, par le conjoint de cette dernière, en la forme simple.• En cas d'adoption par deux époux, le nom ajouté au nom de l'adopté est, à la demande des adoptants,celui de l'un d'eux, dans la limite d'un nom. A défaut d’accord, le nom conféré à l’adopté résultede l’adjonction à son premier nom, en seconde position, du premier nom des adoptants selon l’ordrealphabétique. En cas d’adoption plénière, à défaut de choix, l’enfant prend le nom constitué dupremier nom de chacun de ses parents (dans la limite d’un nom pour chacun d’eux), accolés dansl’ordre alphabétique (préalablement, en cas de désaccord, il s’agissait du nom du mari ou du père).• Aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire pour avoirrefusé en raison de son orientation sexuelle une mutation géographique dans un Etat incriminantl'homosexualité.Source : www.justice.gouv.fr


Rapport sur l'homophobie 2014AgressionsphysiquesDu sang et des lamesInconnuTrans 5%22%FemmeAttouchementssexuels2%3%70%Hommesexe des victimesMeurtresCoups etblessures93%1%5%Violsmanifestations de l’homophobie*Inconnu 14%Police27%35-50 ans4%+ de 50 ans- de 18 ans10%26%18-24 ans19%25-34 ansâge des victimes1%51%LIEUX PUBLICS5% 8%Milieu scolairecontextes12% Voisinage12% Familleentourageproche11% Commerceset servicesTravailÉtrangerFemmeseule7%Inconnu5%55%Autres régions33%Île-de Franceorigine géographiqueGroupe mixte16%33%Hommeseul2%48%Homme engroupe1%Femmeen groupeauteur-e-s de l’agression200 témoignages, correspondantà 188 cas, soit 6% du total.Wilfred, Olivier, Jennifer, Hugues, Raphaël,Jimmy, Yohan... Les photographies deleurs visages tuméfiés, gonflés, le couparfois entravé d'une minerve, furent diffusées surles réseaux sociaux puis reprises dans la presse. Cesimages révoltantes sont une réponse courageuseet frontale aux agresseur-e-s. Elles sont aussi undémenti aux discours qui nient ou minorent la réalitédes violences homophobes, biphobes et transphobesen France.Car en 2013, les homophobes ne se sont pascontenté-e-s de dénigrer les victimes d'agressions:certain-e-s les ont désignées comme un dangerpour la société. A l'occasion du débat sur le mariagepour tou-te-s, l'homophobie a eu micro ouvertdans les médias. Le député Philippe Cochet parexemple qui, à l'Assemblée nationale, assimilaitl’adoption par les couples homosexuels à un« assassinat d'enfants » ne versait qu'une goutted'eau dans un océan de haine et de préjugés.Certain-e-s sont allé-e-s jusqu'à promettre dusang. De la même manière, à l’issue du vote favorabledu Sénat, Frigide Barjot déclarait : « Hollandeveut du sang, il en aura ! » Les victimes considèrentque cette surexposition de propos agressifs a trèsconcrètement apporté aux agresseur-e-s unencouragement, un sentiment de bonne conscienceet d'impunité favorable au passage à l'acte.* Plusieurs manifestations peuvent être identifiées surun cas. En conséquence, le total des manifestations estsupérieur à 100 %.


33Ce climat terrifiant est en grande partie l'œuvredes opposant-e-s à l'ouverture du mariage auxcouples de personnes de même sexe. La fabled'un rassemblement pacifique de sympathiques« familles à poussettes » n'a pas fait long feu, del'aveu même des ancien-ne-s porte-parole de cesmouvements. Les excès sont devenus systématiqueslors des manifestations, toujoursplus radicales et intolérantes. De nombreusesagressions ont eu lieu en margedes cortèges : saccage et violencescontre les client-e-s et le personnel dubar gay le Vice & Versa à Lille, intrusion,bousculade et lancers d'œufs au centreLGBT Le Girofard à Bordeaux, coupscontre des passant-e-s, des journalisteset des contre-manifestant-e-s, etc.Des victimes plus jeunes et souvent en situationde précaritéEn 2013, 188 cas d'agressions physiques nous ontété signalés, pour plus de 200 victimes.Bien que nous ayons reçu davantage de témoignagesde gays (ils passent de 68 % à 70 % dutotal), le profil général des victimes varie peu, saufpour l'âge. Les 18-24 ans représentent 26 % destémoignages (contre 18 % en 2012).Les cinq personnes trans (toutes MtoF) qui nousont contactés en 2013 pour des faits violentsavaient chacune été victimes d'agressions multiples.En colère mais fatalistes, elles cherchaientun conseil sur les démarches à engager.« J’auraispréférévivrenormalement.Etrehétéro »les faits inquiétants :- impossibilité de faire enregistrer la circonstanceaggravante « homophobie » (introuvable dans levocabulaire du système informatisé de rédactiondes plaintes !) et terme « racisme » sélectionnéà la place par l'agent-e ;- parti pris en faveur de l'agresseur-e et manifestationsgraves d'homophobie de la partde l’agent-e ;- remarques déplacées : « Quand onest homosexuel, on n'habite pas cequartier », par exemple.De nombreuses victimes renoncentdonc à agir par peur de la police ouparce qu'elles considèrent les procéduresjudiciaires trop longues et aléatoires.Parfois, en raison d'un contextefamilial, scolaire ou professionnel fortementhomophobe ou transphobe, la personne agresséechoisit le silence, malgré sa détresse et au risque desubir de nouvelles brutalités.Des alertes préalables souvent ignoréesLes violences homophobes et transphobesproviennent de toutes les couches de la société ycompris, par exemple, du maire d'une communerurale (lire les Témoignages). Les hommes, seulsou en groupes, représentent 81% des auteursd'agressions qui nous sont rapportées. Les femmesagressent – d’après nos témoignages– surtout engroupes, mixtes ou non, et principalement dans uncontexte familial ou de voisinage.De nombreuses victimes nous ont aussi contactéspour obtenir aide et soutien face à une situation deprécarité et d'isolement, consécutive ou aggravéepar l'agression (perte d'emploi, avance des fraismédicaux, frais de justice, absence de revenus liée àla période de soins, nécessité de se reloger, annéescolaire ou universitaire ratée, etc.). SOS homophobiepeut alors accompagner les victimes qui en fontla demande tout au long de leurs démarches.Même si la situation s'améliore, la méfiance vis-àvisdes forces de l'ordre reste très grande et unedemande fréquente concerne la mise en relationavec un commissariat « ouvert et tolérant ». Parmi51 % des agressions se sont produites dans deslieux publics. S'embrasser ou se tenir par la mainsuffit encore à déclencher un déchaînement deviolence (« Vas-y, tue-le, ce sale PD », ou encore« Vous êtes deux grosses gouinasses »). Parfois, lasimple apparence est également prétexte àl'agression. Cette année encore, plusieurs gays ontété la cible d'attaques gratuites ou crapuleusesdans des lieux de drague en plein air ou à leurdomicile (suite à un rendez-vous pris sur un siteInternet de rencontres).La famille et le voisinage sont les contextes où les


Rapport sur l'homophobie 2014 • Agressions physiquesviolences répétées et la crainte de représailles encas de témoignage sont les plus fréquentes.Plusieurs victimes ont été agressées malgré desdépôts de plainte ou mains courantes préalablesauprès des forces de l'ordre.L'école reste parfois un lieu de souffrance. Malgréleurs alertes auprès du corps enseignant, de jeunesvictimes sont isolées, poussées à bout, et finissentparfois par craquer en répondant aux violences ethumiliations répétées. Ainsi des victimes indiquents'être trouvées mises en accusation, puis sanctionnéespar l'administration d'établissements privésqui leur est apparue incapable de les protéger.Enfin, les agressions au travail révèlent un manquede préparation et une lâcheté de la hiérarchie.Pourtant, dans de nombreux cas, il convient denoter la solidarité grandissante des collègues quin'hésitent pas à intervenir puis à témoigner et às'engager aux côtés des victimes (lire chapitreTravail).Un climat détestableA Tarbes,Yves, 23 ans, sortd’un bar avec une amie.Un homme lui lance : « Je tereconnais, t'es un sale PD. »Il fait tomber Yves et le frappe.Les cris de son amie alertentdes passant-e-s et mettentl'agresseur en fuite.Aux urgences, le médecinconstate des hématomes, unecôte cassée et un traumatismecrânien.Yves dépose plainte.Grégory, 38 ans, nous contacteun soir.A Sceaux, des hommesl’ont suivi en le traitant de« sale PD ». Il nous rappelle troisjours plus tard depuis un serviced’urgences : « Cette fois, ilsont tenté de me tuer. » Alorsqu'il rentrait des courses, sesagresseurs lui ont crié :« On veut voir ton string. »Ils lui ont lancé des pierrespuis l’ont frappé en lui disantqu'ils allaient le tuer.Un automobiliste est venu àson secours et l'a transporté àl'hôpital. Grégory est terroriséà l'idée de rentrer chez lui.Il a reçu 21 jours d'ITT.Fabien, 40 ans, sort avecThomas, 25 ans. Parce qu’ilsse tiennent la main, un groupeles insulte (« bande de tapettes,gros PD, je vais t'enculer »)et les frappe. Fabien a plusieurscôtes cassées (15 jours d’ITT).Le diagnostic de Thomas estplus préoccupant car il a reçudes coups de couteau (rateet foie atteints). Les policiersqui enregistrent la plainte semoquent de Fabien car il estmilitaire et gay : « Petit PD !T’es pas un homme ! »A Strasbourg, en lisière d’unlieu de drague, Nassim esttémoin de l'agression violented'un homme seul par quatrepersonnes. Il donne l'alertepuis laisse ses coordonnéesà la police. Il est recontacté48 heures plus tard par lecommissariat : les agresseursont été identifiés. Ils sont engarde à vue et ont reconnu lesfaits, y compris leur caractèrehomophobe. La victime hésiteà porter plainte, visiblementpar crainte de dire sonhomosexualité.Sophie, MtoF en fin de transition,subit des agressions répétéesà Creil. Dès qu'elle est àl'extérieur, elle est insultée etmenacée : « Travelo, enculé,on va te faire la peau. »Elle vient d'être frappée etcommence à avoir des idéesnoires. Elle veut déménagermais elle craint des difficultéspour trouver un logementcar son état civil n'est pas encoremodifié pour correspondreà son identité de genre.Eric, 45 ans, rencontre deshommes à la sortie d’un bargay de Grenoble. Il les invitepeut-être chez lui (ses souvenirssont confus car il a été drogué).A son domicile, les agresseursle poignardent et le laissentpour mort après lui avoir volédu matériel informatique etsa carte bleue. Eric est trouvéle lendemain et conduit àl’hôpital après avoir perdubeaucoup de sang.Les agresseurs sont récidivisteset ciblent exclusivement leshomosexuels. Pourtant, leprocureur refuse de retenirla tentative de meurtre etle caractère homophobe del'agression. Eric et son avocatrestent déterminés.A Lyon, dans les couloirsdu métro,Agathe passe


35son bras autour de la taillede Gladys. Un jeune hommeles suit puis les insulte : « Saleslesbiennes, putes, connasses,salopes. » Il frappe Agatheà la tête et aux jambes. Ellechute. Gladys tente d'interveniret est giflée. Une petite foules'approche, ce qui fait partirl'agresseur.Agathe s'aperçoitplus tard qu'elle a unedent cassée.Léa, 22 ans, et Christelle,43 ans, passent quelques joursen Normandie. Elles prennentl'apéritif face à la plage etéchangent un bisou.Un homme arrive : « Qu'est-cequ'il se passe ici ? Allez,barrez-vous ! » Il jette leurbouteille et hurle : « Vous êtesdeux grosses gouinasses,vous vous envoyez en l'airsur le banc depuis tout àl'heure, c'est indécent ! »Léa reçoit des gifles puis descoups de pied. Des témoinsinterviennent et l'homme finitpar partir. Il sera finalementidentifié. Maire d'un petit villagede la région, il prétend avoirété agressé par Léa puis êtreparti avant l'arrivée de la policecar, bouleversé, il aurait voulualler se recueillir devantle coucher de soleil.Heureusement, une dizainede témoins soutiennentChristelle et Léa (qui a reçu 11jours d’ITT).L'école de la hainePauline est lycéenne à Nevers.L’année passée, après sadéclaration d'amour à unecamarade, elle avait été frappéeet avait trouvé des insultes surson casier (« Va crever, salegouine »).Aujourd'hui, cettehistoire la rattrape.Alors qu'ellese promenait à l'extérieurde son nouveau lycée, elle acroisé un groupe de son ancienétablissement. Un garçon l'afrappée car une rumeur prétendque Pauline serait sortie avecla sœur de celui-ci. Choquée,n'osant pas parler à ses parents,Pauline se sent seule et craintde subir de nouvelles brimadeset de nouveaux coups.Manuel, en classe de secondeà Meaux, est amoureuxd'un garçon. Quand il se sentassez en confiance pour lui direqu’il est gay, toute la classe estmise au courant et se moquede lui. On l'imite avec des gestesefféminés, on lui abîme sesaffaires, on le pousse dans lescouloirs… Des propos homophobessont aussi postés surle groupe Facebook de la classe.Avant un cours de sport, ungarçon commence à l'étrangleren tirant sur sa capuche à traversune grille. Ses camarades rient.Manuel dit penser à la fugueet au suicide, sa vie lui estdevenue insupportable.Lucas est en seconde dansun lycée privé marseillais.Sa classe est au courant de sonhomosexualité, qui ne semblaitpas poser problème. Mais,dans les vestiaires après uncours de sport, pour faire rireses camarades, un garçonlui demande : « Je t'excite ? »Lucas ne répond pas et legarçon lui donne un violentcoup de poing dans le dos.Il répète : « Oh, je t'excite ? »,et, avec l'aide d'un deuxièmegarçon, colle la tête de Lucascontre son sexe. Les garçonsprésents se moquent de Lucas.Il n'ose pas en parler auxprofesseur-e-s de crainteque ses parents soient informésde son homosexualité.La brute d'à côtéLuc et Benjamin sont restaurateursà proximité de Mougins.Un homme, proche desgendarmes, laisse des motssur leur terrasse (« Sale PD »,« Suce gratuitement ») etles insulte régulièrement(« Tapettes, enculés »). Il adéjà agressé Luc, qui a eu untraumatisme crânien.Les rapports de gendarmerie,très partiaux d’après Luc,aboutissent toujours à unclassement sans suite. Un soir,ivre, l’agresseur revient chercherl'affrontement. Les gendarmessont appelés. Mais l'enquêteest à nouveau à charge contreles restaurateurs et un témoindéclare : « Les PD lyonnais, vousdevriez retourner chez vouspour qu'on soit tranquilles. »Sur les conseils de leur avocate,ils déposent plainte dansun commissariat distant.Lubaki, demandeur d'asilecongolais, rejoint unemanifestation parisienne enfaveur du mariage pour tou-te-s.Il porte un t-shirt « Gay OK ».Il est reconnu par despassant-e-s, une famille habitantle même immeuble que lui à


Rapport sur l'homophobie 2014 • Agressions physiquesPantin. Quelques jours plus tard,il est passé à tabac dans l’entréede l'immeuble par ces mêmesvoisin-e-s. Il a porté plaintemais la famille fait pression pourqu'il la retire. Dans l'attentedu procès, ses trois agresseursont été relâchés après la gardeà vue. Lubaki n'ose plus sortirde chez lui.Driss est étudiant en médecineà Paris. Il habite une résidenceétudiante où il est harcelépar un étudiant en droit.Ce locataire a commencé parl'insulter et le menacer (« T'esdans mon secteur, dégage, latarlouze », « T'iras en enfer »).Puis il a frappé Driss (7 joursd'ITT) qui a déposé plainteet recueilli des témoignages.Driss critique l’inaction desresponsables de la résidencequi lui répondent être pourle mariage pour tou-te-s(quel rapport ?) et lui proposentde déménager.Une famille d'enferKevin, 19 ans, et David, 17 ans,sont au cinéma à Nancy quandles parents de David découvrentleur relation. Ils arrivent fous derage dans le multiplexe, tiennentdes propos injurieux et sont trèsagités. David a un malaise et doitêtre pris en charge par le SAMU.Son père cherche à monter dansle véhicule d'intervention pourle frapper mais il est maîtrisé àtemps.A l'hôpital, la scènecontinue : Kevin est menacé demort s’il revoit David.Trois joursplus tard, Kevin nous contactecar il est très inquiet. David estrentré chez ses parents qui ontpris son téléphone etl'empêchent de communiquer.Kevin, terrifié, ne sait pascomment aider son ami.Elodie vit avec Adeline, dontle frère ignore l'homosexualité.A la différence du reste de lafamille, il n'a en effet pascompris que sa sœur et Elodievivent ensemble. Informé,il arrive furieux dans l'appartement.Le ton monte entre le frèreet la sœur. Elodie chercheà les séparer mais il l'injurie,attrape ses cheveux, la frappeà la tête, la met au sol et luidonne des coups de pied.Dans les rues d’Auxerre,Steeve, 25 ans, tient son copainpar la main. Une voitures'approche et il entend :« Tiens, voilà les PD.»Il reconnaît son cousin, quisort de la voiture et vient luiserrer la main. Steeve comprendqu'il est en danger. Son amiparvient à fuir mais Steeve estrattrapé et frappé violemment,ses lunettes cassées. Conduit àl'hôpital, il reçoit 8 jours d'ITT.Sois rentable et tais-toiDimitri, 35 ans, est informaticien.Un jour, un collègue l’insulte(« Sale PD, sale homo, petitepute »), puis lance une chaisedans sa direction. Sans témoin,Dimitri informe son chefde service, qui lui conseille derester cordial. Le collègue restetrès agressif et Dimitri luidemande de s'expliquer ;pour toute réponse, son collèguel’empoigne et le frappe. Dimitrivacille et son arcade sourcilièresaigne abondamment.L'agresseur le poursuit :« T’es une sale pédale, t’es unepoubelle à sperme, je vais tefinir. » Dimitri est conduità l’hôpital pour 6 points desuture (ITT de 3 jours). Il porteplainte. Sa hiérarchie refusede s'engager à ses côtés et luidemande de minimiser les faits :le collègue, considéré commeindispensable, est très apprécié.Dimitri a contacté un syndicat,mais il a peur d’être licencié.


37La parole à…Wilfredet OlivierPostée sur Facebook suite à l’agression àcaractère homophobe dont Wilfred de Bruijn et sonami Olivier Couderc furent victimes le 7 avril 2013, laphotographie du visage tuméfié de Wilfred a fait letour du Web. Nous revenons avec eux sur cetteattention médiatique et sur le regard porté par unNéerlandais sur l’homophobie en France.Aujourd’hui, comment vous sentez-vous ?Wilfred : Il ne reste plus beaucoup de conséquencesphysiques. Je porte toujours une prothèse. Psychologiquement,ça a été dur. Avec Olivier on ne selaisse pas intimider, on va partout. Mais je suismoins à l'aise le soir dans la rue. Pour le Nouvel An,on rentrait en transport en commun. Il y avaitévidemment plein de jeunes, tous un peu bourrés…Olivier : Ma meilleure amie était avec nous, elle avu la panique sur nos visages. Ces moments,quand on quitte une soirée après s’être amusés,on rentre à pied...W. : Maintenant, on se sépare dans le métro.Samedi, c’était bondé, et pour garder l’équilibreOlivier a voulu se tenir à moi. Spontanément je luiai murmuré : « Pas ici. » Je n’étais déjà pas très àl'aise ni très démonstratif…Comment avez-vous vécu la diffusion virale dela photographie ?W. : Ca a été une excellente chose : on s'était faitagresser pour nous rendre invisibles, pour attaquerun visage d’homosexuel et, au final, on étaitvisibles partout ! Ca te donne de la force.Beaucoup de gens étaient choqués et ont agi encliquant, en partageant cette photo. Noussommes devenus héros malgré nous. L’attentionmédiatique a eu d’autres conséquences positives.La police était sous une énorme pression, les bonsmoyens ont été employés pour retrouver nosagresseurs. On ne peut pas tout dire, l'affaire esten cours, mais on se doute que nos agresseurs ontvu « Le Petit Journal », les affiches… Ils sontdevenus très nerveux : « Ca ne passe pas inaperçu…» Cette nervosité est utile parce qu'alors ilspeuvent dire et faire des choses pas très malignes.O. : Dans les débats sur le mariage, personne ne parlaitde l’homophobie ordinaire. Ca a fait irruption.J'ai trouvé ça positif, la lutte pour l'ouverture desdroits au mariage c’était aussi pour casser l'homophobieordinaire qui fait tant de mal.W. : Des amis m’ont vu à la une d’un journal, dansun village argentin. La BBC, El País, la télé chinoise,la radio italienne, des stations latino-américaines...Avec Reuters, ça a pris une ampleurgigantesque. Je crois que les médias internationauxétaient étonnés de ce qui se passait dans lepays des droits de l'homme. Partout où il y a l'ouverturedu droit au mariage, il y a des manifs,des discussions. Mais en France ça a été très dur,violent, et ça a duré très longtemps. Ca ne correspondaitpas à l'image de la France, à ce paysperçu comme donneur de leçons… Et, à mon avis,les médias ne savaient plus sous quel angle aborderle débat. Soudain, une histoire personnelle,avec quelqu'un qui parle un peu anglais, qui est àl’image que se font les médias d’un homme ordinaire...Un sujet avec qui le public peut s'identifier.C'est très injuste mais je pense que ces mécanismesont œuvré... Est-ce que ça a pu changerquelque chose ? Les longs débats parlementairesont été accélérés à la fin, le gouvernement enavait marre. Mais je pense aussi que l'attentioninternationale a joué un rôle. Les ambassadeursdisaient : « Quelle histoire, on passe pour un paysridicule ! »Avez-vous eu des contacts avec d’autrespersonnes agressées ?W. : J'ai contacté le couple agressé le même weekendque nous. J'ai un peu parlé avec RaphaëlLeclerc, ce garçon agressé à Nice. Et on a rencontréBruno Wiel. Mais ça s'arrête là.O. : Dans un bar, un client nous a raconté qu'il luiétait arrivé la même chose. Il nous a remerciés


Rapport sur l'homophobie 2014 • Agressions physiquesd'avoir parlé. C'était révélateur, il regrettait de nepas avoir témoigné publiquement.W. : J’ai été contacté pour un projet télévisé surla violence homophobe. Autour de moi, beaucoupm’ont dit : « J'ai aussi vécu ça mais je ne veux pastémoigner pour la télé. » Des Parisiens qui ontun boulot, indépendants, sortis du placard, biendans leur peau, etc. Malgré ça, ils ne veulent pastémoigner à la télévision. J’étais surpris : d’abordla violence des agressions puis la crainte d’êtreidentifié comme homosexuel ou réduit à cetteidentité.Quel conseil donnez-vous aux victimesd’agression ?W. : « N’aie pas honte, montre-toi et reste fier.Tu verras que tu n’es pas seul. » Il faut des gensautour, des personnes ou des groupes comme SOShomophobie qui soutiennent les victimes, et toutun tissu associatif. On était à Amsterdam, unbateau passait et j’ai traduit son nom à Olivier :« Wonder en Geweld : Miracle et Violence ». Il m’arépondu : « C'est un peu notre histoire mais àl'envers. » La violence puis quelque chose de trèspositif : des milliers d’anonymes qui s'expriment ette soutiennent. Je m'attendais à beaucoup delettres de menaces de mort. Je n’en ai eu que trois,suite à des appels sur des blogs d’extrême droitepour délégitimer ma parole.O. : Je garde en souvenir leurs tweets de demanded'excuses auprès de La Manif pour tous, quandl’affaire a avancé en septembre...W. : Avec Olivier, après l’agression, on le pensaitdéjà: « Ce ne sont pas les manifestants contrel’égalité qui nous ont tabassés. Ce n’était pas nonplus une chasse aux homos, pas dans cette rue àcette heure : il n'y a aucun bar gay. » Mais ça nerend pas les faits moins graves ou moins homophobes.En avril et en mai, on a d’abord parlé denotre agression, qui était clairement homophobe.Et on a ajouté : « Chaque individu est responsablede ses actes, nos agresseurs sont responsables. Cen'est pas Christine Boutin qui m'a frappé. Mais lespersonnes qui ont une parole publique et tiennentdes propos inadmissibles, profondément homophobes,risquent de légitimer des actes, desactions et d'autres paroles homophobes. »


Rapport sur l'homophobie 2014LesbophobieInsultes et violencespour toutes!Inconnu+ de 50 ans 12% 15% - de 18 ans6%23%35-50 ans29%25-34 ans15%âge des victimes18-24 ans22%Inconnu1%ÉtrangerAutres régions50%27%Île-de-Franceorigine géographiqueAutres19%13%Insultes57%Menaceschantage23%15%Agressionsphysiques15%29% HarcèlementRejet-Ignorance23%4% Diffamation4% DiscriminationOutingDégradations 1%volsAgressions sexuellesmanifestations de la lesbophobie*19%FamilleLieuxpublics17%23%Internet8% Voisinage1%Politique1%7% TravailReligion 3%Santé 6%6%Milieu scolaire Mal de vivrecontextes9%Commerceset services329 témoignages, correspondantà 314 cas, soit 9% du total.Cette année,le nombre de cas de lesbophobiequi nous ont été rapportés est en hausse(314 contre 290 l'année dernière). Riend’étonnant puisque l'année 2013 a encore étéfortement marquée par les débats concernant l'ouverturedu mariage pour tou-te-s. Débats qui ontgénéré une libération et une exacerbation de laparole lesbophobe, qui s'est faite particulièrementvirulente avec des appels à la haine, à la violenceet au viol. Cela s'est traduit notamment par uneforte hausse des manifestations de lesbophobiedans les lieux publics et sur Internet.Le milieu familial et l'entourage proche demeurentle contexte fort des actes lesbophobes rapportésen 2013 (23 % des cas). Si les mères des lesbienneset des bisexuelles sont souvent les plus dures dansleurs paroles, les pères sont responsables de la plupartdes agressions physiques au sein de la famille.La surmédiatisation de l'opposition à l'ouverturedu mariage pour tou-te-s a amené les membresdes familles à prendre position, rendant parfois lesfoyers peu sûrs et peu accueillants.Dans ce contexte,il est plus difficile de se sentir acceptée par les sienset de faire son coming out pour une lesbienne.Lorsqu'une femme se décide à se confier à sesproches, elle subit une réaction de rejet dans plusde la moitié des cas, une fois sur trois elle reçoitdes insultes.L’intolérance et le rejet atteignent leur* Plusieurs manifestations peuvent être identifiées surun cas. En conséquence, le total des manifestations estsupérieur à 100 %.


41à la haine,au meurtre,au viol,d’insultes :« pédophiles», « zoophiles », « perverses », « famillesd'anormaux »,«sous-humains »,«sous-merdes»,«bandes d'animaux »,etc.,sans compter les attaquesdirectes à l'encontre de personnalités ayantpris position en faveur du mariage pour tou-tes,notammentCaroline Fourest,journaliste ouvertementlesbienne.Le dessin du mois de Biocoop,octobre 2013paroxysme lorsque certaines d’entre elles sontvictimes de tentatives de retrait de la garde de leursenfants, ou encore quand les grands-parents,jugeant leur fille incapable d’assumer son rôle demère du fait de son orientation sexuelle, appellentles services sociaux.Les lieux publics sont le deuxième contexte de lesbophobiecette année (19 %). Dans la grande majoritédes cas (86 %), les manifestations « se limitent »à des insultes ou à des menaces : allant de «salegouine » aux menaces de viol ou de mort. Dans51 cas signalés cette année, l'agresseur-e est allé-ejusqu'aux violences physiques ou sexuelles (soit prèsd'une agression physique lesbophobe par semaine,un chiffre en hausse de 46 % par rapport à 2012).Dans la majorité des cas,la lesbophobie se manifestedans la rue,néanmoins 19 % des agressions se déroulentdans les transports en commun (métro, bus,train). Lorsque le genre de l’agresseur-e est connu,il s'agit d'un homme dans 91 % des cas, et plus de lamoitié des agressions sont perpétuées par desgroupes de personnes.Les témoignages de lesbophobie sur Internet (17 %en 2013 contre 10 % en 2012) montrent que lesréseaux sociaux sont le théâtre privilégié de l’intolérance.Sur 44 témoignages, 15 ont pour origineTwitter et 10 Facebook.Il s'agit toujours d'incitationsOn peut également noter que dans la majoritédes cas qui nous sont rapportés, les lesbiennesne sont pas ou peu soutenues. Elles rapportentainsi l’indifférence et l’immobilisme des témoinsde leurs agressions dans les lieux publics. Dansle cadre du travail, dans tous les cas relatés, ladirection ou la hiérarchie ne protège pas lesvictimes et préfère ignorer le « problème ».Au sein de leur famille,elles peinent à trouver desconfident-e-s, et n'osent pas leur parler de peur devoir leurs paroles minimisées.Dans le milieu scolaire,les jeunes regrettent le manque d'action de la partdes équipes pédagogiques. Enfin, lorsque les lesbiennesse tournent vers les autorités,police ou gendarmerie,il arrive encore trop souvent qu'il leur soitopposé un refus de prendre la plainte.Cette année les témoignages des moins de 18 ansont doublé (15 % en 2013 contre 7 % en 2012).Comme on peut s’y attendre, les jeunes lesbiennessont avant tout victimes de leur famille ou de leurentourage proche (40 %), puis du milieu scolaire(26 %). Il s’agit avant tout d’insultes, de rejet oud’ignorance, de harcèlement et de menaces.Plus préoccupant encore,les plus jeunes exprimentclairement leur envie de se suicider, incapablesde supporter le rejet de leur orientation sexuelleau quotidien.Tous contextes confondus, les témoignages montrentl'impact psychologique de la lesbophobie ordinairesur la vie quotidienne des lesbiennes :sentiment de rejet et d'isolement,peur,dépression,arrêts de travail, démission ou déménagement,désinsertion sociale ou professionnelle, c'est laqualité de vie et la santé des lesbiennes qui sontdirectement impactées.


Rapport sur l'homophobie 2014 • LesbophobieQuand les prochess’en mêlent…Noa est en couple avec sacopine depuis un an et demi.Elle vit encore chez ses parents,dans l'Orne. Cela fait neuf moisque ses parents ont découvertsa relation. Son père l’amenacée de se suicider àcause de cette relation.Ses parents cherchentà la convaincre de quitterson amie, lui disant qu'elle serajetée hors du foyer lorsqu'ellesera majeure, qu'ils ne luiapporteront aucune aide,qu'elle ne pourra être heureusequ'avec un garçon. Noa nesupporte plus cette pressionet appréhende de se retrouverseule avec ses parents.Elodie a 19 ans. Elle a étémise à la porte par ses parentssuite à son coming out.Elle souhaite récupérer sesaffaires personnelles et sespapiers d'identité, qui sontrestés chez elle. Le seuldocument qu'elle ait àson nom est sa carte pourles transports en commun.Elle a très peur de ses parentset de ses frères et sœurs.Elle est momentanémenthébergée par des amis enrégion parisienne.Odile est allemande. Sa petiteamie, Julie, vit à Lille chezses parents. Ces derniersinterdisent leur relation, jugeantqu'elles sont trop jeunes pourconnaître leur orientationsexuelle. Elles sont ensembledepuis un an, les parents l'ontdeviné très vite et tententde les empêcher d'être encontact. Elles y parviennentmalgré tout en se cachant.La mère de Julie a déjà tenudes propos lesbophobes à safille tels que « je n'ai pas élevéun garçon », et l'a invitée à« traîner avec des gensnormaux ». Odile a expliquéaux parents de Julie que leurcomportement blessait leur fille,mais ses conseils ont étéignorés. Julie est découragéeet Odile s'inquiète. Si ellessouhaitent toujours utiliserle dialogue pour faire évoluerla mentalité des parentsde Julie, elles craignent lesconséquences et veulentêtre certaines que Julie seraprotégée si la situation empire.La mère de Maud a faitune fausse déclaration auxservices sociaux de Bordeaux.Elle leur a écrit que Maudet sa compagne, qui sontensemble depuis dix ans,seraient violentes et auraientdes relations incestueusesavec leur fils de six ans et demi.Maud est harcelée de questionspar des assistantes sociales.Elle regrette d'être immédiatementmise en cause et derecevoir des conseils pouréduquer son fils, alors quepersonne ne vient vérifierla justesse des accusations.Maud se sent perdue faceà cet acharnement.Myriam a confié à l'un de sesamis qu'elle était la mèred'une jeune lesbienne.Celui-ci lui a écrit un mailconsternant : « Elle te boufferajusqu'à la moelle parce qu'ellea la tête en bas et que, parbien des égards, elle estcertainement perdue.Je ne la connais pas, maisje m'en doute, vous l'avezlaissée s'installer dans lepéché, le vice, le mal, demainpeut-être le crime. Je n'ensais rien et ne le lui souhaitepas. Elle porte en elle cettelèpre de l'inversion. En dernierressort, on n'abandonne pasun enfant, mais le premierressort est de lui inculquer,parfois violemment, le sensdu bien et du mal. »Jeanne essaye de dire à sesparents, chez qui elle vitencore, qu'elle aime les filles.Lorsqu'elle aborde le sujet,sa mère lui répond :« J'espère que tu rigoles etque t'es pas... » Jeanne,comprenant que sa mère n'osepas finir sa phrase, lui demandesi cela la gênerait. La réponsene se fait pas attendre : « Jeveux des enfants normaux. »Le père de Jeanne, quantà lui, trouve les couples delesbiennes « dégueulasses ».La fête des voisin-e-sCarole et Martine habitentdans un petit village duSud-Ouest. Elles subissentdepuis quatorze ans desnuisances de la part deshabitant-e-s de la commune :inondation de leur maisonpendant la construction, plantesbrûlées, excréments laissésdevant leur porte, morceauxde verre pilé retrouvés dans lanourriture, chat empoisonné…


43Carole a déjà tenté de porterplainte au commissariat deCahors mais elle n’a pas étéprise au sérieux et le dossierdéposé auprès du procureurs’est vu remettre une fin denon-recevoir pour causede preuves insuffisantes.Depuis que Patricia aemménagé chez Frédérique,les voisins du dessussont devenus totalementincontrôlables : tapage dumatin au soir, insulteslesbophobes, menaces de mort,empoisonnement d’unedes deux chiennes…Frédérique ne supporte plusla situation, elle a déposédeux plaintes au commissariatet saisi le médiateur du bailleur.Elle appelle la ligne d’écoutepour avoir des conseils juridiquescar une confrontationdoit avoir lieu au commissariatle lundi suivant.Sophie, lesbienne de 48 ans,habite Marseille.A son retourd’une hospitalisation, elleconstate que de nouveauxlocataires se sont installésdans son immeuble. Les insultessont immédiates : « sale PD »,« sale sidaïque », « saletravelo », « ce soir on va tefaire ta fête ». Elle reçoitdes crachats sur sa porte,des menaces de mort, unde ses voisins la suit mêmejusqu’à son travail.Très fragile,Sophie désire porter plainte,elle est soutenue par uneassistante sociale etl’association Autres regardsde Marseille.Tweet signalé à SOS homophobieViolence urbaineLilia est dans le métro deLille quand elle entend lespropos d'un groupe degamins : « On peut frapper surles gays sans qu'il y ait deconséquences. » Elle leur jetteun regard désapprobateur etsort du wagon sans penser àmal. Mais les jeunes la suivent,jettent un ballon de foot dans sadirection et lui lancent :« Ca y est, t'es lesbienne,tu te crois un homme, je vaiste mettre ma bite au cul,on va te casser la gueule ! »Lilia, effrayée, se précipite alorsvers les agents de médiationdu métro et leur demande del’aide. Mais les agents n'interviennentpas pour éloignerses agresseurs, au contraire ilslui demandent de partir et dese calmer. Lilia, ne se sentantpas en sécurité, abandonnetoute explication et se sauveen pleurant.Claire et Laura habitent dansun petit village de l'Hérault et sepromènent un samedi aprèsmidiavec leurs enfants.Elles demandent poliment àun homme d'une cinquantained'années de se garer moinsbrutalement lorsqu’il se trouveà proximité d’enfants.Manifestement alcoolisés,l'homme et son comparsesortent de la voiture et insultentle couple : « On va t'enculer!Allez vous brouter, mongoles!»Claire est bousculée avant queles deux hommes se décidentà partir.Sandrine est en voiture dans unvillage près de Toulon avec troisde ses amies. Elles sont prisesà partie par le conducteurd'un autre véhicule qui arriveen face d'elles. Il sort desa voiture et se montre agressif.Sandrine lui demande de secalmer et propose de reculerson automobile pour le laisserpasser. L'homme lui lance desinsultes lesbophobes sur sonphysique, puis annonce :« Tu te prends pour un mec,je vais te frapper comme unmec ! », avant de la frapperau visage par la fenêtre de lavoiture. Sandrine et ses amiesont réussi à s'enfuir et àprendre en photo la plaqued'immatriculation del'agresseur.


Rapport sur l'homophobie 2014 • LesbophobieMarianne et Sofia se promènentbras dessus bras dessous sur uneplace à Marseille. Prises d'unélan amoureux, elless'embrassent. Une dizaine dejeunes hommes viennent verselles en leur donnant l'ordrede ne pas agir ainsi devant euxet de « dégager ». Les insultescommencent à fuser alors quele couple cherche à calmerles jeunes hommes. Ceux-cis'exclament : «Vas-y, mets-luiun doigt devant moi!», «Fais voirta grosse chatte!», «Faites çachez vous!», «Si t'adoptes ungosse, il va avoir 2 femmes.Son cerveau, comment tu croisqu'il va se développer?»Marianne est victime de gestesd'intimidation. Sofia reçoitune pierre dans le dos et uneclaque sur la tête pendantqu’elles tentent de s’échapper.Un samedi, en début de soirée,Amina et Clémence sepromènent dans un petit villagede Gironde en se tenant parla main.Un homme arrivederrière Clémence sansqu'elle ne le remarque. Il lui faitun croche-pied.Surprise, elles'arrête et il frotte son sexedans son dos.Elle se retourne,il lui dit qu'il n'a pas fait exprèsavant de réitérer son geste. Elless’écartent et il hurle : «Bande degouines!» Elles ont eu très peur.Stéphanie se promenait dans sonquartier à Montpellier quanddeux hommes l'ont agresséeen la traitant de «sale gouine».Ils l'ont jetée au sol et l'ont rouéede coups de pied dans le ventreet la poitrine.Avec un cutter,FocusSarah, 17 ans, se rend à la gare de Versaillesavec sa petite amie. Elles attendent le train, enlacéessur le quai. Lorsque le train arrive, Sarah embrasseson amie avant de monter et de gagner sa place.C'est à ce moment-là qu'elle remarque deux hommesqui la fixent en rigolant. L'un d'eux crie « il y a unelesbienne là-bas ! » et la montre du doigt. Les deuxhommes l'insultent, l'un d'eux s'approche d'elle etla lève de son siège. L'autre prend son sac et le jettepar terre. Le premier l'attrape ensuite par le couet l'étrangle, pendant que le second rit et lui metun coup de pied dans le tibia. Elle tombe à terre,ils lui donnent alors des coups dans le ventre etle dos. Au bout de quelques minutes qui vont luisembler très longues, ils descendent du train unestation avant la sienne. Sarah est sonnée, elle saignedu nez et son téléphone est cassé. Elle essaie de serelever quand un homme lui vient en aide.Il descend avec elle et la conduit à l'hôpital le plusproche. Sarah s'en sortira avec une dizaine de bleusdans le dos et sur les jambes et une cicatrice,mais elle reste traumatisée par l'indifférencedes autres passagers-ères qui ne sont pasintervenu-e-s pendant son agression.ils lui ont tailladé le visage àplusieurs reprises en l'insultant etproférant des menaces de mort.On se « lâche » sur les réseauxsociaux !« Beeeeeeeeurk dans mes amissur Facebook y'a une gouine. »« Dans un monde où leschevaux passent pour desbœufs, il est logique quedeux gouines puissent passerpour un père et une mère. »« Les mariages en questionn'étant que des mascaradessans valeur, je ne suis pasparticulièrement choqué parl'idée d'une abrogation decette farce avec effet rétroactif.Le manque de charité estde faire croire à des paireslesbiennes ou homosexuellesqu'elles pourront être un jourles égaux de couples sains etnormaux. La nature s'y oppose,la morale s'y oppose, le bonsens aussi. »« PAUVRE FRANCE !!! J'aimema sœur mais on nous refusele mariage... J'aime mon PDde frère, on va pouvoir semarier ? Ma sœur gouineaime sa sœur gouine, ellesvont pouvoir se marier ? »


45La parole à…Natacha ChetcutiDe récentes études (Blidon, 2007 1 ;Alessandrin et Raibaud, 2013 2 )montrent que l’usage de l’espace public, en tantque lesbienne et gay, est défini par des interactionsgenrées à dominante masculine. A partir d’uneétude menée en France, entre 2010 et 2012 auprèsde lesbiennes de 17 à 35 ans, cette contribution sepropose d’analyser les réactions sociales face à descomportements qui signifient publiquement unerelation lesbienne.Visibilités lesbiennes et effets sociauxDans l’espace public, les violences (insultes, regardsstigmatisants, agressions) s’exercent de préférenceà l’encontre des lesbiennes, qui se voient ainsi rappeléesà la place subordonnée qu’elles occupentdans l’ordre sexuel et l’ordre du genre.Les risques d’agression sont d’autant plus importantsque les lesbiennes sont jeunes et qu’ellesaffirment une liberté de mouvement dans l’espacepublic. Ils ne semblent pas dépendre de la taillede l’agglomération, ni de la position sociale deslesbiennes, mais plutôt des heures auxquelles a lieule déplacement, la nuit semblant être plus propiceà ce type d’agression.Réactions sociales et normes de genreLes données issues de l’enquête montrent que« le laisser voir » exige des stratégies variant selonles contextes.Le choix de la stratégie de la visibilité peut correspondreà une volonté de transgresser la norme :la marque du genre est un facteur aggravant desviolences dans l’espace public : se présentercomme féminines, ou fems, réactiverait l’impensabledu lesbianisme.Une stratégie consiste à user du genre par undétournement de l’assignation à la catégorie« femme » : se rendre visible en tant que lesbiennepar le détour du genre en tant que lesbienne« masculine » ou butch, ou par la revendication ducouple butch/fem. Le lesbianisme ainsi revendiquépar la transgression du genre s’inscrit dans uneappropriation des codes de genre de la masculinitéen tant que butch et de la féminité en tant quefem. Mais la lesbienne butch peut se retrouver dansune confrontation virile avec les agresseurs et lalesbienne fem se trouver aux prises avec des avancessexuelles correspondant à son apparenceféminine. L’usage de la violence peut être revendiquépar certaines lesbiennes. La figure butchpermet de retourner le stigmate par un déplacementdu regard genré et de se protéger contre uncertain nombre de risques liés à l’investissementdans l’espace public en tant que femme oulesbienne fem, mais on observe que les butchs sontaussi davantage victimes d’agressions physiquesdu fait de contrevenir à la règle de la féminitéen tant que femme.A l’inverse, les stratégies d’invisibilité peuvent êtrepensées comme un outil de revendication : userde la féminité permet d’être invisible et ainsi decontourner le stigmate de « la lesbienne ».Cet effacement devient une stratégie pour passerinaperçue et user « librement » de l’espace public.L’orientation sexuelle minoritaire du point de vuede la norme hétérosexuelle est ce qui est à l’originede la discrimination et/ou de la violence vécue, enréaction à « l’affichage » d’une relation de couplelesbien, dont la visibilité dans la sphère publiqueapparaît comme le fruit de luttes individuelles encontinuelle recomposition. Celles-ci agissent surles manières de se représenter, d’être identifiables,dans des techniques d’ajustement variant selonles sanctions déjà rencontrées ou anticipées.1. Distance et rencontre. Eléments pour une géographiedes homosexualités, Marianne Blidon, thèse de géographie,université Paris 7 Denis-Diderot, 2007.2. Géographie des homophobies, Arnaud Alessandrin et YvesRaibaud, Armand Colin, Paris, 2013.Natacha Chetcuti,sociologue rattachée au Centre de recherchessociologiques et politiques de Paris, équipe« genre, travail, mobilité », auteure de « Usagesde l’espace public et lesbianisme, sanctionssociales et contournements ».


Rapport sur l'homophobie 2014GayphobieUne année pas très gaieInconnu19%31%- de 18 ans6%16%18-24 ans35-50 ans20%8% 25-34 ans+ de 50 ansâge des victimesInconnu18%50%Autresrégions32%Île-de-Franceorigine géographiqueAgressionssexuellesOutingDégradations 5%vols8%1%2%Discrimination10%DiffamationAutres8%Insultes57%21%20%RejetIgnoranceMenaceschantage12%Harcèlement11% Agressionsphysiquesmanifestations de la gayphobie*International1%Politique 1%Santé2%Police2%Mal de vivre 4%Milieu scolaire41%Internet4%Commerces et Services4%7%contextes15%LieuxPublics8%11%FamilleTravailVoisinage943 témoignages correspondantà 891 cas, soit 26% du total.Avec une augmentation de 56 %, les témoignagesde gayphobie recensés par SOShomophobie en 2013 ont littéralementexplosé : cette forme d’homophobie, qui cible spécifiquementles gays, semble avoir trouvé en cetteannée de débats sur le mariage pour tou-te-s unepériode propice à sa propagation. Les homophobesse sont déchaîné-e-s sur les gays, notammentsur Internet et les réseaux sociaux (41 % des cas),dans les lieux publics (15 %) et au travail (11 %).Les stéréotypes de genre ayant la vie dure, la perspectivede deux hommes formant famille a visiblementdavantage dérangé que celle de deuxfemmes. C’est avant tout par des insultes que semanifeste la gayphobie (57 % des cas), mais aussipar du rejet et des appels à la haine (21 %),des menaces (20 %), du harcèlement (12 %), voiredes agressions physiques (11 %).Avec Internet et les réseaux sociaux, les homophobesont trouvé un terrain de jeu qui n’est régipar aucune règle : sur le Net, on peut presque toutdire,on est invité à s’exprimer sans aucune retenue,souvent caché derrière un pseudo et toujoursderrière un écran.Tel un virus galopant,la gayphobies’y est distillée tout au long de l’année 2013,portéenotamment par la force d’impact des réseauxsociaux (lire chapitre Internet). Sur Twitter, leshashtags gayphobes ont été innombrables ; sur* Plusieurs manifestations peuvent être identifiées surun cas. En conséquence, le total des manifestations estsupérieur à 100 %.


47Facebook, les commentaires et groupes gayphobesse sont multipliés à l’infini. Injures, menaces,harcèlement,sur le Net,on vise une personne ou l’ensembledes gays sans se censurer ni mesurer sespropos.On trouve également des forums de discussionorientant les échanges vers des proposgayphobes,ou encore des messages d’appel à la haineadressés à toutes et tous suivant souvent l’actualitéde l’année (manifestations contre ou en faveur dumariage pour tou-te-s, vote de la loi, célébration dupremier mariage entre deux hommes, etc.). SOShomophobie, comme d’autres associations ou individus,a régulièrement demandé et obtenu le retraitde ces publications par les sites et réseaux sociauxconcernés. Les victimes et témoins n’en restent pasmoins choqué-e-s et inquiets-ètes: des paroles auxactes,il n’y a parfois qu’un pas.Des appelsà la haine à la violence physique, au harcèlementet aux discriminations,les limitessont parfois aisément franchies.Comme en 2012, les injures gayphobesreposent sur deux constantes : le genreet la sexualité. Les homophobes sontapparemment doublement obsédé-e-s,fasciné-e-s et dérangé-e-s par les pratiquessexuelles réelles ou supposées des gays, maisaussi par le fait que d’autres hommes, adolescentsou adultes, transgressent des codes traditionnels etvisibles de la masculinité, de la virilité pourrionsnousdire. Rester un homme à la voix, au physiqueet à la gestuelle androgynes,c’est l’assurance d’êtrerejeté par ses pairs ; en fin d’école primaire et aucollège, on rejette celui qui « trahit » son genre etles codes érigés : un garçon doit, à l’adolescence,se comporter « comme un mec », aimer et pratiquerle sport, adopter des attitudes singeant unevirilité souvent fantasmée,regarder et considérer lesfilles d’une certaine façon.Celui qui n’obéit pas auxrègles tacitement fixées par les autres jeuneshommes dérange.Car c’est à cet âge que la sociétéattend des garçons qu’ils deviennent des hommes,tels que la « norme » les définit (alors que les jeunesfemmes subiront plus tardivement le poids de cesnormes, si elles refusent de devenir épouses etsurtout mères). « Pédale », « Fiotte », « Tapette »,« Tafiole », « Tarlouze », « Tantouze », « Tante »,«Il n’y aque les PDqui ontla gastroentérite»« Chochotte », « Folasse », « Folle »… sont autantd’injures visant à atteindre un homme dans sa virilité.Injures quasiment toutes au féminin d’ailleurs,ce qui témoigne autant de l’homophobie que dusexisme de leurs auteur-e-s.On regrettera égalementle fait que certains gays eux-mêmes se soient appropriécette hiérarchisation des genres et rejettentparfois les moins « virils » d’entre eux : la « follophobie» est d’autant plus inacceptable quand elleémane de gays eux-mêmes,et témoigne assurémentd’une certaine haine de soi et de ses semblables.C’est également sur leurs pratiques sexuellesprésumées que sont attaqués les gays, même trèsjeunes, même abstinents ou inexpérimentés.Alors que ces pratiques ne leur sont pas réservées etpeuvent être partagées au sein d’un couplehétérosexuel, elles leur sont systématiquementreprochées :sodomie et fellationsemblent passionner les homophobes,quicréditent les gays d’une intensité sexuelletrès supérieure à la norme. Le gay seraitobsédé par le sexe et y consacrerait toutson temps, toute sa vie. « Bouffeur ousuceur de bites », « Enculé », « Sodomite »,il est sans cesse ramené à la sexualité. De« pédéraste » à « PD », puis à « pédophile », il n’y aqu’un pas : dans cette volonté de salir l’homosexuelmasculin, on le présente comme un pervers dangereuxpour la société et ce qu’elle a de plus sacré,les enfants. On lira ou entendra ainsi : « La sodomiedes petits garçons, c’est maintenant ! », ou encore :«Tous ces pauvres enfants qui se feront violer par leursdeux papas à tour de rôle… », suite au vote de la loisur le mariage pour tou-te-s,aussi bien dans les manifestationsque sur Internet, à la télévision, etc.Toutes ces injures et ces amalgames participent à lahaine de soi, au mal-être ressenti par certains gays,notamment les plus jeunes. Souvent répétées,ces invectives sont vécues et ressenties comme unvéritable harcèlement par 12 % des victimes.Plusieurs études ont montré que les jeunes gaysétaient davantage sujets au mal-être et aux tentativesde suicide que les autres jeunes (lire chapitreMal de vivre). Les injures homophobes doivent êtrerefusées, combattues et rejetées de toute urgence !


Rapport sur l'homophobie 2014 • GayphobieLes lieux publics constituent le deuxième contextede la gayphobie :dans la rue,les parcs,les transportsen commun,les homophobes se sont senti-e-s libresd’exprimer leur haine tout au long de l’année 2013(lire chapitre Lieux publics). On lance des insultes,on manifeste avec des pancartes injurieuses et diffamantes,on tague des murs, on menace et mêmeon agresse physiquement des gays. Dans un climatfavorable à la propagation d’injures et de proposhostiles aux homosexuel-le-s, la gayphobie s’estpubliquement libérée.Phénomène particulièrementmarquant de 2013, les propos tenus de manièredécomplexée notamment lors ou en marge desmanifestations contre le mariage pour tou-te-s.Si ces manifestations visaient à refuser les mariagesde couples de femmes comme d’hommes, les gaysy ont largement subi une homophobie qui leur étaitspécialement dédiée. Plusieurs témoignages fontétat d’injures et d’agressions physiques gayphobesalors qu’ils croisaient, dans la rue ou les transportsen commun, des participant-e-s à une des manifestationsorganisées par la Manif pour tous ou lePrintemps français.A plusieurs reprises,des victimesnous ont indiqué que leurs agresseur-e-s avaientétabli un lien entre leurs insultes et le projet de loisur le mariage pour tou-te-s : « Vous les sales PD,vous avez qu’à vous marier et ne plus nous fairechier », « Tous les homos méritent la mort, tu n’aspas à demander à être égal avec nous. » Des tagsgayphobes nous ont aussi été reportés : « Tuonsles PD d’Hollande ! » et « Les PD dehors – urgent »sur des cabines téléphoniques, « Film de Tafioles ! »et « Pour les tapettes » sur des affiches du filmLes garçons et Guillaume, à table ! dans les couloirsdu métro parisien. Plusieurs hommes d’âge mûr,vivant et acceptant leur homosexualité depuis 10,20 ou 30 ans, nous ont contactés pour témoigner.Alors qu’ils n’avaient plus entendu ou subi de proposhomophobes depuis plusieurs années voire décennies,ils ont été surpris et choqués d’être insultésen 2013 : « PD », « Même les chiens et les animauxne font pas ça ! », « Qu’est-ce qu’elle a cette salopeà me regarder,là,connasse ! », « Ca sent le sida ici ! »,etc. La sortie du film L’Inconnu du lac, et le retraitpar deux maires de ses affiches représentant deuxhommes échangeant un baiser, a donné lieu àune manifestation devant la mairie de Saint-Cloud(lire chapitres Médias et Politique). Des témoinsnous ont rapporté les propos tenus par certain-esmanifestant-e-s : « Allez vous enculer au bois deBoulogne ! », « Les PD au Marais ! », « Au Marais ! AuMarais ! Au Marais ! »,ainsi que les messages relayéspar des affiches : « Non à la culture gay, porno etviolente », « Non à la culture du vice » ou encore« Protégeons nos enfants ! ».Notons que 11 % des cas qui nous sont relatésconcernent une agression physique visant un ouplusieurs homosexuels (100 cas) ; ces agressionssont systématiquement accompagnées d’injureshomophobes : en 2013, on a agressé des gays surdes lieux de drague,dans les transports en commun,dans des complexes sportifs (« Ce sont ces deux PDqui sont en train de s’enculer »), dans la rue(« Pédophile et PD ! », « Bande de tapettes »,«GrosPD », « Je vais t’enculer »). Ces agressions sontsouvent gratuites, toujours violentes. Elles ontparfois un motif crapuleux : certains pensent queles gays sont des victimes « faciles », qui selaissent dépouiller sans se défendre et se taisentensuite, par honte ou par peur. Certaines victimesnous indiquent donc avoir été agressées à leur domicilepar un ou plusieurs hommes rencontrés surdes sites de drague.Premier contexte de la gayphobie en 2012,le travail a représenté 11 % des cas en 2013 :97 cas de gayphobie nous ont tout de même étésignalés en milieu professionnel cette année (contre108 en 2012). On continue à discriminer, mettre àl’écart ou à l’index un collaborateur ou un collègueen raison de son homosexualité réelle ou supposée.On nous transfère des échanges de courrielsqui n’ont plus rien de professionnel (« PD du cul ! »,« Parking dans 1H, je te fais manger ta bite ! »), onnous rapporte les propos d’une responsable demagasin (« Sale PD,ramène-toi,sale PD ! »),un appelantnous indique que son supérieur hiérarchique areçu un courriel anonyme injurieux et diffamatoireà son sujet (« Savez-vous que M. X est un homosexuel,limite pédophile ? »), un autre homme a étéagressé physiquement par son patron quand cedernier a compris qu’il vivait avec un autre homme.Le cercle familial,l’entourage proche et le voisinagerestent des contextes dans lesquels la gayphobie


49trouve un terreau favorable : en cette période dediscussions familiales sur le mariage pour tou-te-set d’homophobie décomplexée dans la sociétéfrançaise, 133 cas de gayphobie de proximité nousont été rapportés (lire chapitres Famille, entourageproche et Voisinage). Un jeune homme de 18 ansa par exemple fait son coming out à ses parentsqui l’ont exclu du domicile familial.Sans ressources,il se trouve contraint à se prostituer. Un autrehomme dénonce les injures gayphobes (« PD,tarlouze, fais gaffe à ton petit cul… ») proférées parses voisins dans le cadre d’un conflit de voisinage.Une dame âgée précise aux personnes passantTous ces exemples sont extraits des contextesénoncés et n'ont fait l'objet d'aucune correctionorthographique.Hashtags présents sur Twitter :« #LaFranceSansGays », « #BrulonsLesPD »,«#PayDay», «#Gaystapo», «#NiqueLesGay»,« #LesGaysDoiventDisparaîtreCar »,«#LesGaysNeSontPasHumainCar », «#Pedale»,« #LesGaysNontPasLeurPlaceDansCeMonde »,« #MortAuxGays», «#UnBonGay».Forums de discussion :je-plain-les-gosses-de-gay.htm, vous-l-avezdans-le-cul-les-gays.htm,mariage-gay-parlonsde-sujet-qui-fache.htmMessages d’appel à la haine :« J’appelle clairement à la violence et à la haine.Tue un gay, protège l’avenir », « Mobilisationcontre cette saloperie que constitue la légalisationde l’accouplement sodomite », « Je deteste les PD(sodome) qu’il salisse nos principale fondamentalede la famille », « Il y a des tantouze dans le groupefaut les virés »Messages et commentaires exprimés selonl'actualité :« #cesoir les deux plus gros PD de franceeee »(à la suite du mariage de Vincent Autin et BrunoBoileau)« Depuis que FH à légalisé ces tarlouzes, ils secroient tout permis !! », « Un homosexuel est undevant chez l'un de ses voisins : « Oh ! mais c’estune tantouze qui vit ici ! »En termes de santé, on déplore qu’aucun progrèsn’ait été observé en 2013 : les gays sont toujoursdiscriminés en tant que donneurs potentiels de sangou de moelle osseuse. Si nul ne conteste la prévalencedu VIH au sein de la population homosexuellemasculine,on ne peut se satisfaire de l’exclusion dela totalité des gays de France des donneurs potentielsalors que cette exclusion ne devrait se fairequ’en raison de pratiques et non de population àrisque (lire chapitre Santé).pédophile potentiel. Sauvez un enfant castrez unhomosexuel », « PTDRRRRR LES GAYS MERITENTVRAIMENT LA MORT », « Si un jour j’apprendsmon fils est PD jlattache a une chaise devant desporno hetero jusqu’à se qu’il aime les vagins »,« ce sera loccaz de lancer 2-3 pain de c4 dans lafoule… Saleté de PD. » (à la suite de l’annonce del’accueil des Gay Games de 2018 par Paris),« Ouais un président qui casse du PD !…Si toi aussitu es pour un Poutine Français, RT ! »Messages adressés publiquement à un hommegay ou supposé l'être :« Que le sperme de Vincent McDoom te fasset’étouffer sale bouffeur de bites », « Et les grospaffes qu il prend dans l’oignon il en pense quoi lavieille tarlouze ? », « Nike ta mère mode fucker Salegay je te retrouve je te jure la vie de ma rum je tedéfonce sale iench », « tarlouze, chochotte,coiffeur, trou à bites… », « Ta voix de pédale enchaleur sale petite fiotte de … de merde ta plancheDécathlon entre tes seufs de babtout fragile ! »Tweet signalé à SOS homophobie


Rapport sur l'homophobie 2014 • GayphobieAvec 36 cas en 2013,la gayphobieen milieu scolaire a été trèsprésente, d’autant que les plusjeunes ont toujours des difficultésà accepter de témoigner : sedéclarer victime d’homophobieimplique une acceptation préalablede son homosexualité. Laviolence,le harcèlement et la miseà l’écart subis par ces jeunes gays,ou vus comme tels, provoquentdes blessures physiques et psychologiquesqui ne peuvent êtreniées ou tolérées. L’absence desoutien à ces jeunes victimesconstitue une non-assistance à despersonnes en danger. En complémentdes politiques publiquesdéployées dans les établissementsscolaires, une prise de consciencedu personnel enseignant, desadultes et des parents est indispensablepour accompagner cesjeunes dans l’acceptation et lavalorisation d’eux-mêmes et pourgarantir leur sécurité (lire chapitreMilieu scolaire).Enfin,8 témoignages de gayphobiedans le milieu politique nous ontété transmis :injures,menaces,diffamationvisant un homme politique.Certains n’ont pas hésité àinsulter des élus de la République:accusations à peine voilées depédophilie, injures…Tout commeles autres gays, les hommes politiquesont subi l’homophobie defaçon frontale en cette année 2013(lire chapitre Politique).FocusLudovic a 18 ans, il est scolarisé dans un lycéeprivé catholique, sa famille fréquente une paroissecatholique traditionaliste dans le Sud de la France.Il se dit heureux de quitter son lycée en fin d’année,après avoir passé son baccalauréat. La sous-directricede l’établissement, également adjointe au catéchisme,avait recueilli les confidences du jeune homme qui luiavait « avoué [ses] sentiments contre-nature,sodomites ». Elle l’avait immédiatement orienté versun diacre, « homo repenti », se targuant d’avoir trouvéla « sainte rédemption » dans le service de Dieu,qui avait tenté de « soigner » son orientation sexuelle.Ludovic a hâte de quitter son lycée, sa familleet ses camarades pour aller étudier loin de sa ville.Il ne veut plus devoir sourire aux blagues de mauvaisgoût et aux surnoms qu’on lui attribue et qui fontréférence à ses manières. Il en a marre desprovocations : « Franchement, on aurait dû tousles gazer, non ? T’en penses quoi, toi ? », il ne veutplus tolérer qu’un de ses « potes » lui montredeux garçons efféminés en disant : « Putain,regarde-les ces deux-là, ils ont pas honte d’êtrenés?» Il ne veut plus répondre, acquiescer :« Dans ma tête, je me crie, je leur crie, toutela haine qui est en moi. »Il a besoin de se confier, de raconter qu’il a dûêtre complice de cette homophobie ordinaire quis’est répandue sur la France les premiers mois del’année 2013 : « J’ai défilé sous les bannières dela Manif pour tous, comme pour me faire uncertificat de bonne hétérosexualité », « J’ai applaudiaux prêches du prêtre de ma paroisse […] qui nousmontrait en quoi les gens comme moi étaient bons àbrûler. » Il veut témoigner, au nom des autres jeunesqui, dans des familles ultra-catholiques comme lasienne, sont gays et vont trop loin dans leur rejetd’eux-mêmes. Il veut dénoncer la haine portéepar ces mouvements, leurs « idées du Moyen-Age »,ce rejet des homosexuels et des étrangers, le faitqu’ils aient fait de « la pédale » leur bouc émissaire.


51© Xavier GorceDes réseaux pas très gays !Dimitri dénonce un hashtagparticulièrement violent quicircule sur Twitter :«#IlFautTuerLesHomosexuels»;il souhaite savoir commentfaire retirer les tweets haineuxle mentionnant.Julien déplore les échangesgayphobes qu’il a repérés surle Net. Une jeune femme inviteses followers à retweeter sonpost : « RT si tu penses queles PD devraient subir lemême sort que les juifs#ChambreAGazDansVos-Mères » ; un autre internautecomplète : « Moi c’est t’esPD = baignoire + 220 V ».Pascal est choqué par lespropos qu’il a lus. Une internautea publié : « Je suis pashomophobe mais quand


53peintres en bâtiment travaillantsur un chantier. Il souhaitedénoncer cette homophobiedécomplexée qui s’estinstaurée depuis le débutdes manifestations contrele mariage pour tou-te-s.Il pense qu’il est urgent quele gouvernement lanceune campagne contrel’homophobie.Laurent et Frédéric marchentmain dans la main dans les ruesd’une grande ville de l’Est dela France. Un homme les croise,les regarde et leur lanceélégamment : « Alors,messieurs, on va se nettoyerle cul ? » Le couple est choquéet se sent blessé. Cet hommese serait-il autorisé des propossimilaires en croisant un couplehétérosexuel ?Mauvais sangNicolas veut faire un donde moelle osseuse et s'inscritsur le site Internet de l’EFS, quine mentionne pas d’interdictionde don pour les homosexuels.Il se rend à une convocationà l’EFS à Paris. Il annonce qu’ilest gay lorsque le médecin luidemande s’il fait partie d’une« catégorie à risque ».Le visage du médecin sereferme mais il poursuitle questionnaire, insistant surla prise de cocaïne : « Vousn’avez jamais sniffé ? »Gêné, il lui annonce à la finqu’il ne peut pas fairede don pour le moment.Pas de ça chez nousFlorent est un étudiant brillantqui vit encore chez ses parentsqui sont au courant de sonhomosexualité depuis 4 ou5 ans. Ces derniers lui ontdemandé de se cacher, dene pas dévoiler son orientationsexuelle. Il a dernièrement étéplusieurs fois insulté dansla rue, en cette période delibération de la parole etdes comportementshomophobes. Il souhaitedénoncer cette « homophobielatente, encouragée parcertains politiques etpersonnes publiques ».Il regrette de ne pas pouvoirse plaindre de cette situationauprès de sa famille et en estprofondément malheureux.Karim et Michael rencontrentun différend avec leur jeunevoisine, trop bruyante. Hier,la grand-mère de la jeunefemme a interpellé Karimà ce sujet.Après quelqueséchanges, elle a conclu ladiscussion par : « Vous nesavez pas ce que c’est d’avoirun enfant, sale PD ! »Jean-Claude a été à maintesreprises insulté et menacépar sa voisine : « Tous leshomosexuels devraient avoirle sida pour être exterminés »,« Vous n’avez qu’à crever, salePD ! » Il souhaite que ces injurescessent et demande si porterplainte serait une solution.Grégory est déterminé àdénoncer les agissementsde ses collègues de travail :ils l’ont appelé de leurentreprise en pleine nuit, alorsqu’il dormait chez lui, luiindiquant qu’ils n’avaient pasde copine et qu’ils luiproposaient « de [l’en] faireprofiter », et lui demandants’ils « pouvaient avoir[son] cul ».


Rapport sur l'homophobie 2014BiphobieTo bi or not to bi ?Inconnu6%36%Homme58%FemmeInconnu16%+ de 50 ans35-50 ans14%6%25%18-24 ans25%- de 18 ans14%25-34 ans45%Inconnu30%Île-de-France25%Autresrégionssexe des victimesDiffamation 32%3%Biphobiesociale52%Rejetignorance 32%3%Insultes3%Harcèlement 16% 3%6%AgressionsphysiquesMenacesOutingchantageDiscriminationmanifestations de la biphobie*âge des victimes3%VoisinagePolice3%Santé3%Lieux publics3%30%Famille10%Internetcontextes16%16%16%TravailMilieuscolaireMal de vivreorigine géographique33 témoignages correspondantà 31 cas, soit 1% du total.Le Rapport annuel 2013, qui présentait pour lapremière fois un chapitre dédié à la biphobie,établissait que l’une des caractéristiquesde la biphobie est la négation dela bisexualité comme orientation sexuelleà part entière,souvent perçue à l’extérieurcomme une passade, quand ce n’est pasun « luxe de people » ou un « effet demode » (voir illustration).Seules 58 % desvictimes se sont clairement définieselles-mêmes comme bisexuelles lors deleur contact avec l’association.La forte capacité d’auto-détermination en tantque bisexuel-le concerne notamment les plusjeunes (50 % des victimes ont moins de 24 ans).« Dans lesfaits, je n’aiplus d’amisdepuis quej’ai fait moncoming out»Certain-e-s vont même jusqu’à se décrire commepansexuel-le-s : plutôt que de considérer qu’ils etelles sont attiré-e-s aussi bien par leshommes que par les femmes, ils et ellesse considèrent comme attiré-e-s par unepersonne sans considération de son sexeou de son genre. Pour ces jeunes qui sedéclarent bisexuel-le-s ou pansexuel-les,la bisexualité n'est pas un moyend’échapper à la case « homo ».Les principaux contextes de biphobie vontde pair avec l’âge relativement jeune des* Plusieurs manifestations peuvent être identifiées surun cas. En conséquence, le total des manifestations estsupérieur à 100 %.


55victimes qui font appel à SOS homophobie :la familleet le milieu scolaire.Les personnes bisexuelles qui ontl’âge d’intégrer le milieu professionnel font largementétat de manifestations biphobes sur leur lieu de travail,ce qui en fait le deuxième contexte d’interpellation(ex-æquo) de l’association.L’acceptation de la bisexualité poseencore des difficultés : ni hétéro ni homo,la personne bi perturbe l’approche traditionnellebinaire et immuable des orientationssexuelles et amoureuses. Ainsi,tous âges confondus, les personnes quiont témoigné cette année font état d’unmal-être (16 %) assez net du fait du rejetet de l’incompréhension généralementrencontrés dans les différents aspects de la vie.Les principales manifestations de la biphobie sonten effet d’abord celles du rejet (52 %), de l’ignorance,puis celles des insultes (32 %) et des clichés/ stéréotypes liés à la bisexualité (que l’on désignerasous le terme de « biphobie sociale » sur le modèlede « l’homophobie sociale », 32 %).Les « autres » renvoient sans cesse la personne«Il vaudraitmieux enfinir si c’estpour quecela soitaussi dur»bisexuelle à la question du choix : la bisexualité estaccusée d’être une lâcheté face au choix d'accepterd’être homosexuel-le (dans ce cas le rejet vient dusein même de la communauté homosexuelle) ou bien,parce qu’elle est vue comme « originale », doit êtrerésolue par le choix soit de l’homosexualité(quand la personne en face a au moinsl’ouverture d’esprit nécessaire à l’acceptationde l’homosexualité), soit de l’hétérosexualité(«option salvatrice»,de retourdans le «droit chemin»).Dans le domaine des droits, il faut releverl’effet positif que l’ouverture du mariageet de l’adoption aux couples de personnesde même sexe peut avoir sur les bisexuelle-s.Eneffet,les perspectives de vie des bi-e-s s’harmonisent: quel que soit leur parcours de vie, s’il lesmène vers une relation de type « maritale », cellecipourra être légalement encadrée par un mariage,que la relation soit entretenue avec une personnedu même sexe ou une personne du sexe opposé.Ainsi, les droits des bi-e-s ne varieront plus au grédu hasard des rencontres et de la vie.Marre des casesAngèle, 16 ans, nous demande :« Pensez-vous qu’il soit possiblede pas être homo, hétéro,ou bi, mais juste porté parl’amour ? » Elle nous expliqueque depuis qu’elle a une petiteamie, « les gens sont en trainde [la] mettre dans la casehomo » et qu’elle ne s’y sentpas à sa place.Un-e anonyme nous écrit :« Je suis bi, beaucoup de gensle sont, sûrement vos voisins. »Laurent, 21 ans, sort en boîteavec des ami-e-s et, lors d’unediscussion a priori anodine,il explique être bisexuel. On luirépond alors : «Faut choisir :t’es PD ou t’es normal ?»FamilleRachel, adolescente, a peurde faire son coming out àses parents. « Je serai la riséede la famille et je mettraila honte sur mes parents. »Ses frères et sœurs sont aucourant depuis deux ansmais n’acceptent toujours passa bisexualité : pour eux,« c’est une phase, ça passera ».Fanny habite à Paris et estbisexuelle. Lorsqu'elle l'aannoncé à sa famille au coursd'un déjeuner, elle a étérassurée par sa réactionimmédiate. Malheureusement,quelques jours plus tard,elle reçoit dans sa boîte maildes insultes telles que :« Tu me dégoûtes », « Tu esdégueulasse », « Va pourriren enfer, sale gouine. »Elle continue son récit :« Quelques jours plus tard,mon cousin, baraqué, m'acoincée et menacée si jamais,je cite, "je te vois avec une salegouine, je te défonce la chatteet je connais des potes quiseront ravis de se joindre à moi".Puis il m'a frappée et est parti.Depuis je reçois des menacesrégulières sur ma boîte mailet je n'ose plus sortir de chezmoi (ma famille habite dansl'immeuble). »François est ouvertementbisexuel. Bien que sa mèrene le prenne pas trop mal,depuis qu’il a un petit amielle ne cesse de lui répéter


Rapport sur l'homophobie 2014 • BiphobieTweet signalé à l’associationqu’il serait mieux avecune fille et que justementune fille serait idéalepour le remettresur les rails.Christine est contente que soncoming out se soit bien passé,mais elle est un peu dérangéepar les questionnements desa mère qui se demande quelpeut bien être le traumatismeinconscient qui fait que sa filleest bisexuelle. Peut-êtremaladroitement, ses parentslui répètent souvent qu’ilssont désolés pour elle parceque sa vie sera bien plusdure que si elle était hétéro.D’ailleurs, très permissifslorsqu’elle ramène un garçonà la maison, ils sont bien plusmal à l’aise lorsqu’elle ramèneune fille. Christine s’efforcealors de leur montrer quel’acceptation de sa sexualitélui fait beaucoup de bienet contribue à sa réussitescolaire.Milieu scolairePierre, 16 ans, estbi, sa classe le saitet depuis ses camaradesenchaînentles réflexionsvulgaires. « Lesgens de ma classepensent que c’estde l’humour, maisça ne me fait pasvraiment rire. »Il a conscienceque rien de violentne lui a jamais étédirectementadressé, rien devraiment ouvert. « Mais dansles faits, je n’ai plus d’amisdepuis que j’ai fait moncoming out. »Laura, lycéenne en terminaledans le Nord de la France,nous appelle car elle se sentmal. Beaucoup de ses ami-e-slui ont tourné le dos depuisqu’elle a annoncé sa bisexualité.Faisant l’objet de remarqueset d’insultes quasi quotidienne,elle en a parlé au proviseurqui lui répond : « On n’affichepas sa sexualité au lycée, surtoutquand on aime les filles. »Ses parents, au courant depuispeu, menacent de la mettreà la porte.Ainsi rejetée, ellese sent particulièrement mal,elle a l’impression « d’être unfardeau » et « qu’il vaudraitmieux en finir si c’est pourque cela soit aussi dur. »TravailAurore, petite vingtaine etvivant en Normandie, estrégulièrement insultée sur sonlieu de travail : en face à face,dans son dos ou par petitsmots dans son casier. Son chefn’accepte pas qu’elle refuseses avances : « Je suis bisexuelleet ça ne lui a pas échappé. »D’ailleurs, depuis son refus,il fait circuler dans le servicedes photos d’elle embrassantd’autres femmes.Jérôme a 46 ans. Directeurd’école en Ile-de-France,il entame une procédure dedivorce avec sa femme quiconnaît sa bisexualité.Elle profite de la rupturedifficile pour monter descollègues et parents d’élèvescontre lui en utilisant sonorientation sexuelle. Elle luidit qu’il ne pourra plus«remettre les pieds dansune école ».Affecté à une autreécole, Jérôme est désespéréde constater que son anciennecompagne a aussi réussià faire circuler des rumeurset des photos parmi lepersonnel de ce nouvelétablissement et s’inquiètepour la rentrée.


57La bisexualité à laradio, tout un art ?Les occasions de parler de bisexualité dans lesmédias sont rares. En tout cas, les médias ne semblentpas très enclins à dédier des espaces dedébat à la question en dehors de toute actualité.La fin de l’année 2013 aura connu deux émissionsradio dédiées au sujet.La journée de la bisexualité, organisée le23 septembre, devient peu à peu une occasion detraiter de cette orientation sexuelle trop souventdélaissée. Par exemple, Le Mouv’, qui reçoit cettesemaine-là l’association Bi’Cause et la psychologueet sexologue Michelle Boiron au cours del’émission «Point G comme Giulia», intitulée pourl’occasion « Tous bisexuels ? ». L’angle psyemprunté pour discuter de la question de labisexualité a de quoi étonner, surtout sur cetteradio. Comme trop souvent, l’analyse psy sert defaire-valoir à des opinions biphobes : ainsi, à écouterl’émission, les bi-e-s ont nécessairement unesensation de manque s’ils ou elles sont en couple,et les femmes accèderaient plus facilement – pourun temps – à cette orientation sexuelle.Bien que le documentaire date de 2009,La Bisexualité, tout un art (réalisé par Laure Michelet Eric Wastiaux) a été rediffusé en 2013 par Arteet a également fourni l’occasion de s’emparer dusujet. Notamment, Agathe André sur France Interlui consacre une émission le7 novembre, sous l’angle «la bisexualité, c’est lasexualité du futur». La discussion, plus libre ici,s’émancipe clairement des normes sociales ets’attelle à déconstruire un certain nombre destéréotypes biphobes, par exemple celui de lasupposée infidélité des personnes bisexuelles.Laure Michel explique: « On peut être bi et monogame,c’est comme quand on est homo ouhétéro », « Ce n’est pas parce qu’on est bi qu’on estnymphomane. » La décontraction de l’émission etl’ouverture d’esprit des deux intervenantes en faitsans conteste une œuvre de pédagogie sur labisexualité et la biphobie.Force est tout de même de constater que cesdeux fois, la question de la bisexualité aura étécantonnée aux émissions présentées comme«sulfureuses». A l’image de Lady Gaga qui a faiten 2013 son coming out bi: le scandale avant la«banalisation»?Elle, Test proposé sur le site Internet du magazine


Rapport sur l'homophobie 2014TransphobieUn «mauvais genre»bien cher payéInconnuInconnu4%43%Androgyne et/ou Cisgenre4%Intergenre42%MtoFgenre des victimes*7%FtoMInconnu 7%17%+ de 50 ans35-50 ans35%- de 18 ans6%10% 18-24 ans25%25-34 ansâge des victimes5%60% 26%Autresrégions7%ÉtrangerÎle-de-Franceorigine géographiqueIncitationà la haineMenaceschantage12%Discrimination3%RejetIgnorance56% 21%Insultes14% Agressionsphysiques14% 14%Diffamationmanifestations de la transphobie**Commerceset services1%Administration 1%Médias 3%Associations3%34%InternetTravail5%École 5%Police 6%7%Voisinagecontextes13%Lieux publics12%Famille10%Mal de vivre79 témoignages correspondantà 77 cas, soit 2% du total.Après deux années relativement stables en cequi concerne le nombre de témoignagesde transphobie reçus, la tendance est malheureusementà la hausse en 2013. Si 52 témoignagessont parvenus à l'association en 2012,79 ont été enregistrés cette année.La Toile est devenue, en 2013, le premier cadre demanifestation de la transphobie (39 % contre 15%l'année dernière). Une hausse qui semble s'expliquerpar la prolifération de propos insultants àl'égard des personnes LGBT sur les réseaux sociaux(lire chapitre Internet). La relative inaction desresponsables de ces plateformes face à ces débordementsne fait qu'encourager le phénomène,qui n'épargne pas les personnes trans. Par ailleurs,le sujet de la « théorie du genre » — termes utiliséspar les détracteurs-trices des « études de genre »(celles-ci s'interrogent notamment sur la manièredont les normes masculine et féminine sont produitespar la société)— a libéré une parole transphobe,caractérisée par une profonde ignorancesur le sujet, amalgamant notamment transidentitéet travestissement, et allant même jusqu’à invoquerde supposés changements de genre imposés(!).* Les victimes se sont définies comme telles. Un cisgenrequalifie une personne dont l’identité de genre est en concordanceavec son sexe déclaré à l’état civil. MtoF et FtoM sontles termes généralement utilisés pour préciser le sens de latransition : MtoF (Male to Female) pour désigner le passagede l’identité d’homme à celle de femme, FtoM (Female toMale) pour désigner le passage de l’identité de femmeà celle d’homme.** Plusieurs manifestations peuvent être identifiées sur un cas. Enconséquence, le total des manifestations est supérieur à 100 %.


59Ce sujet est devenu l'un des nouveaux os à rongerdes collectifs et associations d'opposant-e-s àla loi sur le mariage pour tou-te-s après quecelle-ci a été promulguée. Ils et elles s'opposentainsi à ce que les questions sur le genre- qui n’ontd’autres fins que de lutter contre les inégalitésentre les femmes et les hommes - soient abordéesà l'école. L'argumentation est souvent aussi déconcertanteque la rhétorique est excessive. Il est ainsipossible de lire sur un billet de blog, signalé àSOS homophobie, ayant pour titre « Nouveauxprogrammes scolaires : homosexualité, travestismeet pédophilie » que : « Le ministre de l'Education [...]veut pratiquer la rééducation (comme dans lesrégimes totalitaires communistes) sur les enfants.[...]On ira à la limite de la pédophilie ; en leur (sic)parlant de "zizi" [...] dans Mademoiselle Zaziea-t-elle un zizi. »On peut redouter, le sujet étant toujours d'actualité,que ce phénomène se prolonge en 2014.La haine en pleine rueS'il est aisé de tenir des propos transphobesderrière son écran d'ordinateur, dans l'anonymatpermis par la Toile, on constate que cette hostilitéaux trans se manifeste également, et sans davantagede scrupules, dans les lieux publics, deuxièmecontexte de manifestation de la transphobie (18 %des cas). Plusieurs témoignages font état d'insultesproférées par des inconnu-e-s, croisé-e-s au hasarddans la rue, certain-e-s allant même jusqu'à prendreà témoin les autres passant-e-s. La violencedes mots s'accompagne parfois de violences physiquesface auxquelles les victimes se sententsouvent démunies : celles qui sont prêtes à porterplainte redoutent d'être mal accueillies par lesforces de l'ordre.Certaines justifient leur crainte parune mauvaise expérience passée, à l'image de cettefemme en cours de transition confiant sur notreligne d'écoute qu'un officier de police avait refuséde la reconnaître en tant que femme car ses papiersd'identité mentionnaient son état civil masculin.Cette année, 6 % des témoignages de transphobiereçus concernent le contexte de la police.Les trans ne sont pas forcément à l'abri de l'intoléranceau sein de leur propre famille. Certain-e-s seheurtent fréquemment à l'incompréhension et aurejet de leurs proches. Plusieurs témoins confientavoir dû prendre leurs distances avec leur famillepour vivre librement et s'épanouir pleinement,quand ce ne sont pas leurs parents eux-mêmes quiles ont mis-es à la porte. Désemparé-e-s, ils et ellescontactent alors SOS homophobie pour recevoirune écoute ou être informé-e-s pour trouver unsoutien matériel ou psychologique. Ces manifestationsd'ostracisme, de mépris, de violences, et le sentimentd'isolement alimentent un mal de vivre quise manifeste dans 14 % des témoignages. Plusieursappelant-e-s font état d'idées suicidaires (ou nousindiquent avoir déjà tenté de passer à l'acte).Prise de consciencePour la deuxième année consécutive, SOS homophobiea été contactée par des victimes detransphobie âgées de moins de 18 ans (6%des témoignages). Ce qui confirme le constat établidans le précédent Rapport annuel : les personnestrans prennent de plus en plus tôt conscience deleur identité de genre et la vivent à un plus jeuneâge. Or, contrairement à d'autres pays (Etats-Unis,Canada, Angleterre, Pays-Bas), il demeure quasimentimpossible en France, en 2013, d'entamer unetransition avant d'avoir atteint la majorité, ou alorsseul un suivi psychologique est proposé. Il resteencore un long chemin à parcourir pour que la transidentitésoit prise en compte avec pertinence, sanspréjugés ni idées reçues, à l'échelle de la société.Cette évolution des mentalités est en marche,comme tendent à le montrer les témoignages dejeunes trans soutenu-e-s par leur famille dans leursdémarches, ou le nombre important de signalementsd'actes ou propos transphobes émanantde personnes cisgenres (c'est-à-dire qui ne sont pastrans) : ils représentent plus de 40 % des témoignagesreçus. Une proportion encore plus importantequ'en 2012 (25 % des témoignages) : faut-il voirdans cette progression une prise de conscience,par un public plus large, de la transphobie? Lesactions de sensibilisation menées auprès du grandpublic par SOS homophobie et plusieurs autresassociations n'y sont sans doute pas pour rien.Mais, à l'image de la lutte contre l'homophobie,il ne faut pas relâcher les efforts : ces derniers mois,


Rapport sur l'homophobie 2014 • Transphobieen France, la visibilité des idées réactionnaires, présentantles personnes LGBT comme les ennemi-e-sdésigné-e-s, est grandissante. La vigilance reste demise pour endiguer ce phénomène qui se nourrit del'ignorance et des préjugés.Du côté du droit français, le constat est plus mitigé.Depuis 2012, la transphobie est reconnue commeune discrimination spécifique, mais la notiond'« identité sexuelle » figurant dans le texte de loin'est pas satisfaisante (lire Focus). Le changementd'état civil qui n’a fait encore cette année l’objetd’aucune mesure légale, est toujours un parcours ducombattant particulièrement attentatoire à ladignité des personnes. La procédure oblige encoreles personnes trans à suivre un parcours médical,psychiatrisé, et d'apporter la preuve d'une irréversibilitéde la transition, ce qui se traduit notammentpar une exigence de la stérilisation. Ces difficultésfont qu'un grand nombre de personnes trans n'ontpas un état civil conforme à leur identité de genre.Or, ces difficultés administratives ont des répercussionsparticulièrement importantes sur le quotidiendes personnes trans dont l’état civil ne correspondpas à leur identité de genre : cette discordance faitle nid de la discrimination et de la violence à leurencontre, sans compter la complexité du quotidienà laquelle elle aboutit (à chaque fois qu’il s’agit dedécliner son identité : retrait d’un recommandé àla Poste, contrôle de billet par la SNCF, opérationà la banque, etc). L’identité de genre niée sur lespapiers d’état civil sert alors de justificationaux auteur-e-s de discriminations pour la nier égalementdans le cadre de relations non administratives:la transphobie étatique entretient et légitime latransphobie quotidienne.La bêtise dans la rueNadia passe le week-endchez une amie à Lyon.Alors qu'elle va acheter descigarettes, elle croise uneéquipe de tractage de la Manifpour tous qui se met à la suivresur cent mètres en l'insultant –« Travelo, PD, va te pendre,dégénéré ! » – et en criantaux passants : « C'est un mec,c'est un mec ! » Nadia estbouleversée : « Je suis unepersonne intersexe XXY avecun corps féminin et un visageambigu (sic). C'est unhandicap, pas un choix ! Mespapiers sont féminins et rienne laisse paraître mon étatd'inter. Je trouve l'actioninsultante et discriminante.»Elle précise à SOS homophobiequ'elle a déposé une plainte.Isabelle est une trans en coursde transition MtoF qui vit dansune HLM de Paris. Elle appelleSOS homophobie après avoirété agressée à l'entrée deson immeuble par deux jeunesde 16 ou 17 ans. « Tu vas mesucer la bite, sale travelo »,lui a asséné l'un d'entre euxavant de tenter de lui volerson sac. Elle ajoute qu'elle adéjà été insultée par ces jeunesqui habitent dans son quartiermais dont elle ignore l'identité.Isabelle indique qu'elle iraporter plainte avec une amie.Avant de raccrocher, elle seconfie un peu plus en déplorantque des ami-e-s lui aient tournéle dos en raison de sa décisionde transition. Elle révèleégalement qu'elle éprouvede grandes difficultés à trouverdu travail dans sa professionde peintre en bâtiment,notamment à cause de sespapiers qui font mentiond'un genre masculin.Matteo est un homme,« tendance travesti », selonses propres mots, de 58 ans.Ce soir de mai, il est tardlorsqu'il se dirige vers la stationde RER Châtelet-Les-Halles,à Paris. Il est vêtu d'une jupe,porte des chaussures à talonset des boucles d'oreille.Son chemin croise celuid'un autre homme qui, aprèsl'avoir dépassé, lui lance :« Mi-homme, mi-femme,mi-chimpanzé ». Matteo luirépond : « C'est ça, oui »,puis prend le métro.Ce n'est qu'après coupqu'il prend conscience de laviolence de ces mots.Il explique qu'il ne se sent passali ou dégradé par ces propos,« qui ne dégradent que celuiqui les émet ». Il voulaitcependant faire connaître cette« parole décomplexée » :« Il y avait une volontémanifeste de faire mal etune expression bruted'homophobie, rubriquetransgenre-phobie, sousrubriquetrav'phobie. »


61Garance sort d'un bar LGBTde la capitale avec des ami-e-slorsque des passants lesabordent. Ils demandents'il y a « des PD parmi eux ».Sans se démonter, ils et ellesrépondent que dans leur petitgroupe se trouvent « des trans,des gouines et des PD »,etqu'ils et elles refusent dese laisser insulter sans rien dire.Le ton monte. L'un des passantscrache alors sur une jeunefille de la bande tandis qu'unautre jette son mégot alluméau visage de Garance.Quand l'identité estmépriséeVirginie est arrêtée lors d'unemanifestation de soutien auxsans-papiers à Lille. Pendantson contrôle d'identité, ellesubit des remarques et insultestransphobes de la part desforces de l'ordre. Elle a ainsiété fouillée par des hommes,il lui a été interdit de resterdans le groupe des femmes,et on ne cesse de l'appeler« monsieur ». Lorsqu'elle lefait remarquer, un policier luirépond : « Taisez-vous etfaites-vous opérer, monsieur ! »(Lire aussi chapitre Police).Martin, trans FtoM, dit avoirété rejeté par tous les milieuxassociatifs de sa ville du Nordde la France. « Cela a commencépar de l'indifférence,puis on ne voulait plus demoi », déplore-t-il. « On continuede me parler au fémininalors que j'ai fait comprendreà mes interlocuteurs-trices queje ne leur adresserais plus laparole s'ils continuaient à meparler au féminin. […] Masœur a du mal à accepter. »Martin souffre d'être ainsi misà l'écart alors qu'il fait « tout[s]on possible pour allervers les autres ».Jeunes trans en souffranceCamille, 14 ans, dit vouloirchanger de sexe. Elle appellela ligne d'écoute pour témoignerdes insultes et du harcèlementqu'elle subit au quotidien.Sa famille la traite de« sale lesbienne », de « folle »,d'« anormale ». Dans soncollège parisien, elle estvictime de brimades, on latraite de « folle travelo »,de « lesbienne qui draguetoutes les femmes ».Lou, qui vit dans l'Est de laFrance, est une personnetransgenre de 17 ans quidébute son parcours MtoF. Louparle de lui au masculin,mais ne se définit ni hommeni femme. Il appelle pour fairepart de son désarroi et deses difficultés à franchir lesdifférentes étapes de satransition. Après l'accord deson médecin généraliste et deson endocrinologue, il a eu unrefus de la part du psychologueau sujet de sa transition.Ce qu'il a très mal vécu.Il a fugué et erré trois mois dansla rue. De retour depuis deuxmois chez ses parents, il ne sesent pas mieux. Ceux-cin'acceptent pas son projet detransition. « Tu peux êtrehomosexuel, bisexuel,on peut tout accepter, maispas ça », lui disent-ils. Lou peutcompter sur le soutien de sapetite amie. Il attend sa majoritépour consulter un autrepsychiatre. En attendant, iltrouve le temps long et ditêtre « le garçon d'avant ».Chroniques de latransphobie ordinaireSur un site de rencontres entrejeunes LGBT, Ahmed tombesur un profil indiquant :« Pour les travelos et lesefféminés, la corde et letabouret sont en solde !N'attendez plus ! A part ça,je suis tolérant et j'aime l'originalité.» Ahmed se dit choqué« en tant que militant SOShomophobie et trans-friendly ».Dans un courriel adressé àSOS homophobie, Olivia,transgenre MtoF, se dit blesséepar l'émission « Secret Story »sur TF1, dans laquelle il estproposé à une candidate de sefaire passer pour une trans.« Faire passer une femmepour un homme, c'est de latransphobie. Les trans MtoF,pour la majorité, n'ont jamaisressenti cette situation d'êtredes hommes, c'est ridicule.Ce n'est pas jouer maisatteindre une minorité dansses difficultés », écrit Olivia.RésistanceRomain, 19 ans, est en terminaleS dans un lycée du Nord de laFrance. Il lui arrive de se rendreen cours vêtu avec des habitsféminins. En fin d'année 2012,le proviseur lui a demandéde ne plus venir dans l'établisse-


Rapport sur l'homophobie 2014 • Transphobiement habillé ainsi. Mais le jeunehomme refuse et entend menersa vie comme il le souhaite.L'infirmière, l'assistante socialeet sa professeure principalele comprennent mais ne sontpas prêtes à le soutenir au seindu lycée. Romain nous expliquevouloir changer de sexe.Il est soutenu par sa belle-mèreet des ami-e-s. Il incite surle fait qu'il vit cela de mieuxen mieux, en partie grâceau soutien de son entourage.Une avancéepour les droitsdes personnes transencore entravéeau SénatNous en faisions état dans le précédent Rapportannuel, le 6 août 2012, la nouvelle loi sur le harcèlementsexuel était promulguée en instaurant unecirconstance aggravante lorsque l'infraction étaitcommise en raison de l'identité sexuelle de la victime.Si cette loi reconnaissait enfin la transphobiecomme une discrimination spécifique, la notiond'identité sexuelle à laquelle elle était rattachéen'est aucunement satisfaisante. Le terme « identitéde genre » est bel et bien le plus appropriépuisque la transidentité ne se limite pas au sexe etaux organes sexuels. La notion de genre n'existantpas encore en droit français, le terme d'« identitésexuelle » ne devait être que temporaire, mais onne peut que déplorer que 2013 se soit écouléesans que cette promesse se soit concrétisée.Pourtant, le 27 juin 2013, la Commission nationaleconsultative des droits de l'homme (CNCDH),saisie par Najat Vallaud-Belkacem, ministre desDroits des femmes, et Christiane Taubira, ministrede la Justice, a rendu un avis recommandant augouvernement d'introduire la notion d'« identitéde genre » dans le droit français. En plus de cela,l’avis formulait une liste de propositions permettantde faciliter les conditions de changementd'état civil, notamment en se prononçant enfaveur d'une démédicalisation totale et d'unedéjudiciarisation partielle de la procédure. Cet avisque beaucoup ont qualifié d'« historique » auraitpermis d'effectuer rapidement un pas de géantpour les droits des trans.C’est d’ailleurs dans ce sens qu’à l’occasion duvote du projet de loi sur l’égalité femmes-hommesà la rentrée, plusieurs amendements relatifs àl’amélioration des droits des personnes transétaient déposés. Hélas, le Sénat, suivant l’avis dugouvernement, a rejeté l'ensemble de ces amendements:- l'amendement de Kalliopi Ango Ela (EELV)portant sur la substitution du terme d'« identitéde genre » à celui d'« identité sexuelle », conformémentà l'avis rendu par la CNCDH,- les autres amendements en faveur des droitsdes trans portés par les sénatrices ChantalJouanno (UDI), Esther Benbassa (EELV), CécileCukierman (FdG) et Maryvonne Blondin (PS)visaient, eux, à simplifier la procédure dechangement d’état civil.Najat Vallaud-Belkacem, qui justifiait le rejet deces amendements par le risque de censure constitutionnelle,a toutefois précisé que des dispositionss'inspirant de ces amendements figureraientdans le projet de loi de simplification du droit « aupremier semestre 2014 ». A l’heure où nous rédigeonsce rapport, nous en sommes encore à espérerque cet ajournement ne soit pas unereculade… et que le gouvernement ne perdra pasdavantage de temps à faire avancer la questiondes droits des trans.


63La parole à...BambiL’homophobie, la transphobie… sontdans les esprits. Les lois qui tententd’effacer les marges et d’intégrer ceux qui étaienttenus à l’écart des valeurs traditionnelles, commele mariage pour tous, arrangeront peut-êtreles choses, à la longue. Les mentalités évoluentlentement et, bien qu’il ne faille pas désespérer,il est encore souhaitable de faire valoir sa dignitéet ses droits.Qui peut accepter ceci : un jeune homme de23 ans, beau, rien d’une «folle». (On frémit àl’idée de ce qui lui serait arrivé s’il avait eu le genre« folle ».) Il rencontre rue La Boétie, à deux heuresdu matin, un groupe de trois individus guère plusâgés que lui. Il passe en prenant soin de ne pasleur jeter un regard. Il porte au dos un sac d’ungrand couturier. On lui crie : « PD ! PD ! » Il faitcomme s’il n’entendait pas. On court à lui. A peinese retourne-t-il pour faire face, il est jeté à terre,écharpé à coups de pied, abandonné sur le trottoir,une cheville cassée…Il faut aussi parler, en société, des regards, des sousentendus,des plaisanteries, des discriminations, quisont autant de signes négatifs et blessants.Alors, imaginons la vie des trans. Un éminent journalistecroyait voir dans mon parcours la preuvede l’ouverture de la société, de l’acceptation totalede la transgression suprême que nous représentons.Rien n’est moins sûr. En effet, je ne pouvaispas être rejetée de l’Education nationale dans lamesure où j’avais tout fait pour m’y incorporer,être madame Tout-le-monde, en toute conformité,et dans l’anonymat le plus hermétique. Qui sait cequ’il serait advenu de moi si « la chose » s’étaitsue ?Celles qui ont suivi le même parcours que moi etqui ne font pas d’ostentation, globalement, elless’en sortent, et quelquefois remarquablement.Mais, haro sur les autres ! Imaginons les trans quitrouvent leur point d’équilibre sans être allées aubout de la réassignation sexuelle. Elles vivent enfemmes, ont un état civil masculin. J’ai connucette situation des années durant. Encore étais-jeprotégée par mon métier au Carrousel. J’étaisune artiste. Je passais facilement les frontières.Ou presque. Les Etats-Unis m’ont refusé un visad’entrée. Lorsque nous avons été programmées àLondres, la presse londonienne s’est déchaînée, etle contrat a été annulé. Quant à l’Australie, sonconsul m’a convoquée à Paris, m’a fait signer unepromesse de vivre en homme à Sydney. J’ai signé.Je n’ai jamais tenu aucun compte de ce genred’engagement. J’ai signé le même papier à Rome,lors des Jeux olympiques de 1960, pour ne pas êtrechassée de la Ville éternelle… J’en passe. Je savaispourtant que j’étais une privilégiée. Le martyre decertaines autres, celles qui étaient, par choix oupar contrainte (étant refoulées de partout), desprostituées, je n’ose l’aborder. La police avaittendance à s’acharner. Un détail dira tout : lepréfet Papon a été convoqué par le Conseil municipalde Paris. (Il n’y avait pas de maire à Paris àcette époque.) Il s’est fait tancer pour son manquede sévérité envers nous et envers les garçons quiavaient des cheveux trop bouffants.Les femmes XY qui n’ont pas d’état civil fémininse heurtent de partout à la société. On exiged’elles une vaginoplastie. Elles refusent. Pour cequi est des hommes XX, on n’exige pas d’eux unephalloplastie jugée dangereuse… Comment luttercontre les humiliations en tous genres, quelleforme donner aux efforts pour obtenir la dignité ?Que d’embûches ! En dépit des évolutions, lecombat pour faire admettre ses droits élémentairesreste d’actualité.Après avoir été l’une des égéries du Carrouselet professeur de lettres, Bambi se consacreaujourd’hui à l’écriture. Un documentaire réalisépar Sébastien Lifshitz lui est consacré en 2013.


Rapport sur l'homophobie 2014Commerceset servicesLes LGBTphobiesne connaissent pas la criseDégradationsvols7%7%42%Harcèlement8%AgressionsphysiquesTransOuting2%Insultes3%1%Agressionssexuelles30%Discrimination42%37%HommeInconnu18%Femmesexe des victimesRejetIgnorance40%manifestations de l’homophobie*7%+ de 50 ans- de 18 ans1%Inconnu48%26%35-49 ans4%18-24 ans14%âge des victimes49%De commerceà client1%De commerceà commerce7%8%AdministrationDe clientà commerce35%Envers SOShomophobierépartition des actes25-34 ans47%Inconnu22%Île-de-France31%Autresrégionsorigine géographiqueAutres5% Vente de biensÉvénementiel11%3%Hôtellerie10% restaurants39%9% LogementAssociationInternet8% Téléphonie3%Transport6% 6% Prestationde servicesAdministrationSecteurs concernés188 témoignages correspondantà 175 cas, soit 5% du total.Les commerces et services n’ont pas été épargnéspar l’explosion des témoignages deLGBTphobies reçus par notre association en2013. Le nombre de cas est ainsi passé de 87 en2012 à 175 cette année. La part desfemmes diminue légèrement après plusieursannées de hausse régulière (27 %hors témoignages liés à SOS homophobie,contre 32 % en 2012) alors quecelle des hommes atteint les deux tiers(contre 59 % en 2012). Si la répartitiondes tranches d’âges dans les témoignages reste similaireà 2012,avec une prédominance accrue des 25-50 ans (61 % hors SOS homophobie),il est toutefois«On neveut pas dePD ici »à signaler que les jeunes ne sont pas à l’abri d’uneconfrontation aux LGBTphobies dans les commerceset services (9%). Les témoignages provenant derégions hors Ile-de-France,bien qu’en baisse,continuentde représenter plus de la moitié descas (52 % hors SOS homophobie, contre59 % il y a un an).L’inclusion des associations victimesd’actes LGBTphobes dans ce chapitreexplique la forte proportion d’inconnue-sdans nos statistiques.35% des témoi-* Plusieurs manifestations peuvent être identifiées sur un cas.En conséquence, le total des manifestations est supérieur à100 %.


65gnages reçus concernent les injures, diffamationsou prises à parti adressées à SOS homophobie,phénomènesans précédent certainement lié au contextedu débat sur le mariage pour tou-te-s (lire encadré).Ce contexte fait justement apparaître pour la premièrefois cette année l'homophobie sociale commemanifestation LGBTphobe dans ce chapitre (27 %des cas).La parole de commerçant-e-s ou client-eshostiles aux personnes LGBT s'est libérée, toutcomme celle de personnes ayant éprouvé le besoinde nous contacter pour nous faire part de leur oppositionau projet de loi. Les manifestations plusdirectes,telles que les discriminations,ne sont toutefoispas en recul (30 % des cas) et s’accompagnenttoujours de rejet, moqueries et brimades(40 % des cas), et d’insultes (42 %).Le plus souvent, ce sont les client-e-s qui subissentces comportements (49 % des cas),se manifestant en premier lieu par uneinégalité de traitement, voire dans certainscas par un refus total de service oude vente.La réglementation est pourtantstricte à ce sujet et ne permet pas de discriminersa clientèle, que ce soit sur labase de son orientation sexuelle ou deson identité de genre,réelle ou supposée,n’en déplaise aux commerçant-e-s homophobes,biphobes ou transphobes.Ces LGBTphobies sont parfoisvisibles dans des publicités,à l’image d’une affichedu restaurant Subway d’Angers qui, à l’occasion dela Saint-Valentin, annonçait ouvertement proposersa promotion aux seuls couples hétérosexuels.Si cette initiative a été largement condamnée, l’utilisationpar nombre de marques du logotype de laManif pour tous est, dans le contexte actuel, toutaussi choquante (voir illustration).Même sans annonce préalable, tous les lieux deproximité et du quotidien restent propices auxLGBTphobies ordinaires, les supermarchés, les bars,les pharmacies, etc. Les victimes qui nous contactentfont souvent état d’insultes et de moqueriesrépétées, le rejet pouvant même aller jusqu’à uneagression physique. Parfois, ce sont les commerçant-e-seux-elles-mêmes qui sont victimes de leursclient-e-s (8 % des cas) et ne peuvent donc pas s’ysoustraire. Comptoirs de bistrots ou fauteuils de«On nes’embrassepas devantmon hôtel»salons de coiffure se font ainsi le théâtre de tous lesdiscours haineux, le-la professionnel-le étant, dansl’exercice de ses fonctions, pris-e à partie, insultée,maltraité-e par des client-e-s dont il-elle doitsubir les propos LGBTphobes, quand il ne s’agit pasde dégradations de son matériel.Contrairement à l’an dernier,le milieu LGBT sembletoutefois avoir pu offrir un répit à ses consommateurs-trices.Même dans la recherche d’un logement, les difficultésse multiplient pour les personnes lesbiennes,gays, bi-e-s ou trans (9 % des cas). Dans plusieurstémoignages, elles se sont vu refuser des locationspar des propriétaires qui ne souhaitaient pas louerà des « gens comme ça » et qui osaient même lerevendiquer ouvertement.Comme souvent,le rejetressenti par les victimes se trouve amplifié par lesentiment d’impunité qu’affichent lesbailleurs-euses, pensant être dans leurdroit. Lorsqu’ils parviennent à louer unbien, les locataires ne sont pas pourautant à l’abri : le moindre problème(bruit, paiement du loyer, état du logement)est prétexte à l’expression d’unehomophobie latente,que ce soit celle duou de la propriétaire,du ou de la gardienneou de la copropriété. La victime peut alors setrouver exposée à du harcèlement, des menacesd’expulsion,voire des violences physiques,qui viennentdégrader ses conditions de vie de manièreinsupportable. Les locataires sont pourtant légalementprotégé-e-s contre de tels abus. Ils-ellesdevraient être informé-e-s de leurs droits, en particulierdans des situations où ils-elles se trouventsouvent bien seul-e-s.Les usagers-ères d’Internet ne sont hélas pas nonplus épargné-e-s par les LGBTphobies,bien que protégé-e-spar un anonymat relatif (lire chapitreInternet). Force est de constater que les sites d’ecommercene font pas exception. Certains se permettentainsi de demander à leurs membres derenseigner leur orientation sexuelle, tandis que surd’autres, il se révèle compliqué de publier uneannonce contenant des mots-clés tels que « gay »ou « homosexuel-le », systématiquement refusés.Les formulaires en ligne, simulant par exemple un


Rapport sur l'homophobie 2014 • Commerces et servicesemprunt bancaire,ne sont par ailleurssouvent accessibles qu’auxseuls couples hétérosexuels. Surce terrain également, il est inadmissibleque les homosexuel-le-sne puissent entrer dans les cases,d’autant que ce problème spécifiqueest aussi signalé à l’encontrede certaines administrations publiques.Cesdernières devraient pourtantêtre exemplaires mais leursrésultats demeurent insuffisants(7 % des cas).Tant dans l’exécutionde leurs missions que par le comportementde leurs agent-e-s,elleslaissent encore le champ libre àtrop de discriminations.Au cours d’une année pourtantmarquée par une grande avancéepour les couples de personnes demême sexe,force est de constaterque dans les commerces et services,lecouple doit souvent subirune double peine.Chaque instantpartagé à deux peut en effet serévéler l’occasion d’une nouvellestigmatisation : dans les transports,insulté-e-spar un chauffeurde bus ou éconduit-e-s par untaxi ; dans un gîte, où l'on refusede les saluer, ou dans un hôtel,menacé-e-s de mort par ungroom ; dans leur banque, où onleur interdit l’ouverture d’uncompte joint ;et jusqu’en boîte denuit, où un simple contact s’accompagned’une violente mise àla porte.On comprend ainsi aisémentque si le mariage est désormaisun rêve accessible à tou-te-sceux-celles qui le souhaitent,son organisation reste toutefoisun cauchemar pour bon nombrede couples homosexuels. Entrele-la notaire refusant d’établir lecontrat de mariage ou les presta-FocusIsabelle et Laura, couple d’une trentaine d’années,se ressourcent en Corse pour leurs vacances d’été.A la faveur d’un coucher de soleil, elles décident degoûter la cuisine locale et prennent place surla terrasse d’un restaurant de plage. La soirée se passebien mais à mesure que les deux femmes serapprochent, se tenant discrètement la main,le service, lui, s’allonge.A l’arrivée d’autres client-e-s,le déni de service devient manifeste. Plus d’une heuredurant, le couple attend qu’on daigne les débarrasserpour commander les desserts. L’agacement atteint soncomble lorsque leurs appels, quand ils ne sont pasignorés, ne reçoivent pour réponse qu’un regarddégoûté. Exténuées de ce manque d’attention etchoquées par une attitude ouvertement lesbophobe,Isabelle et Laura demandent l’addition. Cette dernièrene venant toujours pas, elles choisissent de payerau bar. Gardant leur calme, elles répondent de façondiplomate lorsque la gérante leur demandeironiquement si « tout s’est bien passé ».Avec le sourire, celle-ci ose justifier l’attente parl’affluence, bien que le restaurant soit désert.Laura, énervée, pose alors sèchement ses espèces surle comptoir et se dirige vers la sortie. Isabelle ne peutque, impuissante, voir la gérante furieuse courir aprèssa compagne et la saisir hystériquement par le col.Essayant de calmer le jeu, elle propose de partirsur-le-champ mais rien n’y fait, les menaces et insulteslesbophobes déferlent. « Mets-lui un bâton dansle cul pour la calmer », se voit ainsi conseiller Isabelleà l’adresse de Laura. Les deux femmes se pensentsorties d’affaire lorsque deux hommes s’approchent,mais c’est à la patronne qu’ils proposent de l’aide.« Vous nous devez le respect, espèces de gouines »,« Pétasses de goudous » leur sont ainsi assénés partrois personnes haineuses. Le couple n’avait jamais été


67confronté à tant de violence à son égard. Craignantpour leur vie, elles se trouvent forcées de présenterleurs excuses à la gérante.Reparties la peur au ventre et traumatisées,le choc psychologique sera indélébile.tions d’un traiteur ou la locationde salle annulées à la découvertedu sexe des marié-e-s, tous lesobstacles se dressent en effetdevant les victimes pour gâcher lafête. L’égalité acquise dans la loidoit désormais s’inscrire dans lespratiques.Homophobie de proximitéChez le fleuriste, la vendeuseengage la conversation avecYann, homosexuel trentenaire.S’ensuit alors un discourshomophobe agacé : « Qu’estceque c'est que ce mariagepour animaux ? », « Ils nousfont chier, ces PD.» Yann,reparti blessé et meurtri,s’interroge sur les raisonsd’un tel rejet.Dans l’Yonne, à la pharmacie,Laure annonce venir chercherles médicaments de sa compagne.Le pharmacien sepermet alors de lui chanter« Maman, Papa » de GeorgesBrassens puis d’ajouter :« Vous connaissez ? Ce n’estpas ce que vous voulez,vous, pourtant. »Sandra demande au chauffeurde taxi parisien qui la ramènechez elle d’allumer la radio.Il ne peut alors s’empêcher decommenter le débat en courssur le mariage pour tou-te-s :« Ces gens ne méritent quele sida, pire que la mort »,« J’aimerais tous les écraser unpar un. » Alors qu’elle proteste,lui disant être lesbienne,il s’arrête et l’enjoint dedescendre au bord de la route.Là, ses larmes ont coulé.Discrimination tout-terrainEn boîte de nuit, Gaëtan,étudiant parisien, se voitdemander par un videurde remettre son manteau caril porte un débardeur moulantet serait trop choquant :« Il n’y a pas de ça ici », luiindique-t-il. Refusant de serhabiller, n’estimant pas satenue provocante, il est alorslittéralement jeté dehors et setrouve menacé physiquementen l'accusant d’homophobie.Céline, une trentaine d’années,en transition MtoF, se trouvait àla caisse d’un fast-food parisien« ni en garçon ni en fille », sibien que la caissière a refuséde la regarder, prenant sacommande en tournant la têteet ne lui disant ni bonjour niau revoir. Humiliée et choquéepar un tel comportementtransphobe, la jeune femmeavoue y être malheureusementhabituée.Depuis plusieurs semaines,Romain, un jeune Stéphanois,est la cible de moqueriesrépétées d’un coach desa salle de sport. Singé pardes signes et des cris efféminés,invectivé par des « tapette »et « tafiole », il n’ose même pluss’y rendre. S’en étant ouvertau directeur, il semble quele coach soit coutumier dece genre d’agissements.Intimement blessé, le jeunehomme nous dit avoirdes idées noires.Au cours d’un trajet en busà Aix-en-Provence, Brice estsoudainement pris à partie parle chauffeur qui, faisant allusionà « [sa] coupe de cheveux dePD », compte « s’occuper de[lui] au terminus ». Celui-ciayant refusé de s’arrêter àson arrêt, le jeune hommeparvient tout de même às’échapper derrière uneautre passagère. Choqué,il reste atterré qu’aucun-edes autres voyageurs-eusesne soit intervenu-e.En situation de précarité,Samuel, homosexuel de 40 ansau style androgyne, se rendrégulièrement au Centrecommunal d’action sociale desa commune de Camargue.Il y subit à répétition les proposdéplacés et actes discrimina-


Rapport sur l'homophobie 2014 • Commerces et servicesDifférentes utilisations du logotype de la Manif pour toustoires de son assistante socialequi l’appelle « Madame », imiteun personnage de La Cageaux folles devant lui, et écritun 2 à la place du 1 dansson numéro de sécurité sociale.Menacé de blocage de sondossier en cas de plainte,Samuel, seul, est complètementdésemparé.Dans une piscine du Val-d’Oise,Romane embrasse sacompagne au bord de l’eaulorsqu’un agent de sécuritéleur signifie qu’étant des filles,il leur est interdit de « faireça ici ». Rien n’est dit bienentendu au couple hétérosexuelqui s’embrasse quant à lui aumilieu du bassin pour enfants.Le couple se dit insulté et agacéde devoir partout subirce genre d’intervention.Le client est roi...de l'homophobieBrigitte, lesbienne d’unetrentaine d’années, tenait unbar LGBT friendly dans l’Ain.Jaloux de son ouverture etde son succès, le gérant del'établissement voisin la gratifie


69Notre associationégalement prise pour ciblepar la parole homophobeJusqu’alors marginaux,les actes LGBTphobes dontnotre association a été la cible ont pris une importanceparticulière depuis les débats sur le mariagepour tou-te-s (61 cas en 2013).Considérée commereprésentante de la population LGBT, c'est à SOShomophobie que les personnes homophobes ontadressé leur opposition, leurs injures et leur hainede l'homosexualité et du mariage pour tou-te-s.En posant les termes et enjeux pragmatiquement,SOS homophobie avait pourtant dès la fin 2012consacré une page sur son site Internet à la réalitédu projet de loi et des questions soulevées.Celan’a pourtant pas empêché bon nombre d’homophobesde nous contacter pour remettre en causele bien-fondé de cette avancée des droits. Ainsi,un utilisateur nous accuse d’avoir remis en causeune institution sacrée alors que, rappelons-le, lemariage civil n’a rien de religieux.Un autre ne souhaitepas voir notre société « par définition hétérosexuelle» basculer au motif de revendicationségalitaires des homosexuel-le-s ;cette homosexualiténe relèverait d’ailleurs pour lui que d’un « goûtsexuel,tendance de l’adolescence ».Les opposante-sne trouvant comment confronter nos argumentssur le fond se limitent à stigmatiser notreaction par la diffamation. Nous serions ainsi « lefer de lance d’un lobby maçonnique »,quand il n’estpas « sataniste ». Hélas, les inégalités et discriminationsque nous dénonçons jour après jour sontbien réelles. Une partie de nos agresseur-e-s neconçoit même pas que soient possibles d’autresmodèles familiaux que celui qu’elle défend. Lesfamilles homoparentales existent pourtant quoiqu’ils-elles en disent, et il est important de leurgarantir l’application d’un droit semblable à celuides autres familles. Accusée d’ « hétérophobie »,de vouloir « assurer la suprématie d’une espècehomosexuelle hors-norme »,notre association n’apourtant toujours placé au centre de ses revendicationsrien de plus que l’égalité des droits.Nous l’aurons compris, derrière ces assertionsfantaisistes et ces oppositions ne se cachent qu’unrejet et une homophobie ordinaires. Celle-ci nousest d’ailleurs exprimée directement, de manièreinsultante, par nombre d’internautes : « Je hais lesPD et les gouines », « Fermez-la, ne vous affichezpas, pollutions visuelles et morales ». Plus leurspropos sont violents,plus les homophobes se disent« fiers et décomplexés ». Ils et elles n’hésitent plusà se revendiquer comme tel-le-s, alors même queleurs propos sont punis par la loi, d’autant plussévèrement lorsqu’il s’agit d’appel à la haine. Pourcertain-e-s par exemple, « La seule chose de bienqu’ait faite Hitler dans les camps, c’est le trianglerose » – qui désignait les déportés homosexuels–, estimant que ces derniers ne méritent d’ailleurs« que le bûcher » et trouvant dommage que « lesida ne les ait pas tou-te-s tué-e-s ». L’extrémismeauquel nous sommes confrontés n’appelle que lapersévérance de toutes et tous dans notre combatcontre les violences faites à l’encontre des gays,lesbiennes, bi-e-s et trans.depuis des mois de diversesinsultes. Un soir, il l’attend àla fermeture, en bande, biendécidé à en finir. Pour Brigitte,le passage à tabac se solde par45 jours d’ITT et de la chirurgieréparatrice. Elle a depuis venduson bar et se reconstruit difficilement; ses agresseurs, eux,dorment en prison.Jean, homosexuel trentenaire,est caissier dans un hypermarchéde Bretagne.Alorsqu’il surveillait les caissesautomatiques, il doit appréhenderun couple ayant dépasséla limitation du nombred’articles. L’homme s’énervealors, les insultes homophobesdéferlent, puis les menacesde mort.Traumatisé, Jean estdepuis en arrêt-maladie etn’ose plus sortir seul de chez lui.Gérant d’un sex-shop gay àMarseille, Morgan doit depuispeu constater chaque jour sursa façade les dégâts de l’homophobie: vitrine brisée, drapeauarc-en-ciel arraché, mursdégradés.


Rapport sur l'homophobie 2014 • Commerces et servicesEn marge d’un rassemblementcontre le mariage pour tou-te-s,le local du Girofard – associationLGBT d’Aquitaine – est prisd’assaut par des manifestant-e-s.Ses membres sont victimesde jets d’œufs et l’intérieurdu local est saccagé.L’association n’y voit qu’uneénième démonstration haineusede la lutte contre l’avancéedes droits. Choquée, elle adéposé plainteHomophobie à tousles étagesLors d’une visite d’appartementà Tourcoing, quand la propriétairele questionne sursa conjointe,Tom répondqu’il s’agit d’un conjoint.La visite écourtée et sansréponse, il contacte l’agencequi l’informe que cette damea précisé depuis que sonappartement était « réservéaux couples stables » et quece « n’était pas sa mentalité delouer à deux hommes ».Vexé,l’homme ne comprend pas cecomportement : cela faitplusieurs années qu’il est encouple avec son compagnon.Chloé et Sarah nous appellenttraumatisées par le comportementde leur propriétaire.Jugeant Sarah trop masculine,il a refusé de la mettre sur le baillors de son emménagementet a avoué à Chloé être« très déçu » de ses « choixanormaux ».Tentant depuisde les expulser, il a appeléla famille de Chloé pour l’outer,et les harcèle quotidiennement.A bout, elles ont décidé dequitter le logement mais sevoient refuser la restitutionde leur caution.Suite à l’aveu de leur propriétairequi leur explique que si elleavait su, elle n’aurait pas loué àdes « tarlouzes », Michaël etBenoît, couple du Touquet,reçoivent la visite du fils decelle-ci. D’abord copieusementinsulté, Benoît est ensuite passéà tabac jusqu’à l’intervention deson conjoint à l’aide d’unebombe lacrymogène. Il a reçu3 jours d’ITT.Très affectés et encolère, les deux hommes ontdéposé plainte.Arnaud et Julien, en couple, ontemménagé dans un appartementdu XII e arrondissementde Paris il y a un an.Très vite,un soir, ont commencé lesinsultes du gardien à leurégard : « Sales PD », « Dégagez,pervers. » Depuis, cela continuechaque jour, d’autant plus quele syndic, loin de vouloir réglerle problème, mise sur leurdéménagement. Menacés demort, seuls face au harcèlement,ils vivent désormais dans la peur.Mariage pour tou-te-s pasà la fêteClaire se marie avec sa compagneAmélie dans quelquesmois à Lyon.A cause de multiplesrefus, elles n’ont toujourspas trouvé le lieu de laréception. Le premier lieuchoisi appartenait en effetau diocèse qui a mis son veto,le second à une propriétairepour laquelle il était « hors dequestion d’assister à ça ».Pour d’autres, la location leurest indiquée comme réservée,bien que libre en réalité.Les deux femmes demeurentdéterminées à célébrerleur amour.Pour ses faire-part de mariage,Victoria souhaitait imprimerdes timbres personnalisés àl’image du rainbow flag.Malheureusement, ce motifest refusé par la Poste quiinvoque d’étonnantes« raisons juridiques ».A la suite de son mariage avecFabien, Bruno, Cannois de50 ans, a demandé le changementde son nom sur leur boîteaux lettres. La secrétaire dusyndic lui demande alors« qui va s’appeler Monsieur,et Madame ». Malgré soninsistance, rien n’est fait.Blessé d’avoir encore à subirla négation de son union, lecouple a envoyé une miseen demeure.Jeune mariée, Myriam se voitrefuser le paiement de soncongé d’accueil de l’enfant parla sécurité sociale des Yvelines.Sa compagne a pourtantaccouché de leur enfant deuxmois plus tôt. Le problèmevient du formulaire : seul le pèrebiologique peut formuler unedemande. Le couple esten colère face à ce dysfonctionnement: ce congé estlégalement accessible auxcouples homosexuels.


Rapport sur l'homophobie 2014Famille,entourage procheDans l’homophobie, un père,une mère, c’est complémentaire !Trans4%Inconnu41%Femme2%53%HommeInconnu13%+ de 50 ans4%35-50 ans16%23%18-24 ans23%25-34 ans21%- de 18 ansÉtrangerInconnu3%19%53%Autresrégions25%Île-de-Francesexe des victimes2% Dégradations/volsAgressions sexuelles 3%Outing 3%DiscriminationExpulsions 7%Agressions 13%41%physiquesDiffamation 17% 28%InsultesMenaces 18%chantage20%Harcèlement 19% RejetIgnorancemanifestations de l’homophobie*Belle-famille 4%âge des victimes72%Parentscontextes14%Ami-e-s10% Séparationorigine géographique199 témoignages correspondantà 187 cas, soit 6 % du total.Avec près de 200 témoignages en 2013,les LGBTphobies ont touché, plus que jamais,le cadre familial.C'est au sein de la famille quese révèle leur cruelle spécificité.Quand une personneest victime de racisme ou d'une discrimination fondéesur sa religion, elle reçoit généralementle soutien bienveillant de ses parents etla solidarité de ses ami-e-s.Les personneshomosexuelles,bisexuelles ou trans qui sedévoilent à leurs proches prennent quantà elles le risque de réactions totalementinverses,de nature à briser le cocon affectifet à les plonger dans le plus grand dénuementet la solitude.Cela est d'autant plusvrai quand la victime est encore dans l'adolescence,à un âge de dépendance tant psychologique que«Regardetoi!Tu medégoûtes »matérielle envers ses parents. Le rejet peut alorsse muer en menaces et chantage (18% des témoignagesreçus),et aller jusqu'aux violences physiques(13 %), voire à un abandon pur et simple. Quatorzejeunes, représentant tout de même 7 % des témoignages,nous ont ainsi contactés aprèsavoir été mis-e-s à la rue par leurs parents.Par ailleurs, 28 % des témoignages fontétat d’insultes de la part de leur familleou de leurs ami-e-s.L'homophobie et la transphobie parentaless'auto-justifient par le fait que le comingout d'un enfant contrarie les « plans de* Plusieurs manifestations peuvent être identifiées sur un cas. Enconséquence, le total des manifestations est supérieur à 100 %.


73vie » imaginés par les parents :mariage (hétérosexuel,bien entendu), parentalité, etc. Souvent, la religionest un fondement important de ces schémas surl'éducation, le genre et l’orientation sexuelle.L'homosexualité ou la bisexualité de l’enfant vientainsi perturber une conception traditionnelle que lesparents ont de la famille, et à l'intérieur d'elle, unedistinction entre l'homme et la femme, où chacunea une place définie. L'homosexualité et la transidentitépeuvent en outre être perçues commerésultant d'un échec ou d’un défaut d'éducation,voired’une provocation de la part de l'enfant.Ces visionsstéréotypées,puissamment culpabilisantes,peuventavoir des effets désastreux sur des adolescent-e-s oude jeunes adultes en développement et en quête desens. Or, il est évidemment impossible de changerd’orientation sexuelle ou d’identité de genre pourfaire plaisir à ses proches, même « par amour ».Ce sentiment de profond mal-être etd'abandon s'est accentué cette année,alors que le débat sur le mariage pour toute-sest entré à l'intérieur des familles :cette homophobie parentale s'est décomplexéeet a pris les confortables habitsd’une simple opinion politique. Les chiffresparlent d’eux-mêmes : la part de témoignagesde jeunes de moins de 18 ans passe en un an de 14à 21 %. Notons par ailleurs que les femmes restent,cette année encore, particulièrement représentéesdans ce contexte, avec 41 % des témoignages.«C’estune dégénérée»révèle notoirement homophobe ou transphobecesse généralement d’être un-e ami-e. Mais il-ellepeut devenir un-e ennemi-e et briser la confiancequ'a constituée le coming out, en le divulguant àson entourage, en le faisant savoir à tout le lycéepar exemple. Il s’agit alors d’outing, qui, rappelonsle,estpuni par la loi en tant qu'atteinte à la vie privée.Dans d'autres cas, les « ami-e-s » font vivre uncalvaire à leur victime : un cas de « viol correctif »nous a été communiqué par une jeune femme cetteannée, tandis que quatre autres cas d’agressionssexuelles nous sont rapportés dans ce contexte.Cette année encore,plusieurs témoignages mettenten avant un certain type d'homophobie, dont lamanifestation est conjoncturelle.Dans le cadre d'uneprocédure de divorce difficile, l'homosexualité del'ex-conjoint-e peut ainsi être utilisée à son détrimentpar l'autre partie pour justifier unerevendication d'autorité parentale exclusive.Ellepeut également être mise en avantpar le tribunal pour appuyer une décisionen défaveur de l'ex-conjoint-e homosexuelle.Les plaignant-e-s espèrent, via cesdémarches malhonnêtes, faire pencher labalance de la justice en leur faveur,en jouant une foisde plus sur des stéréotypes diffamants:l'image d'unelesbienne qui serait une mauvaise mère car passuffisamment féminine ou d'un père homosexuelpotentiellement prédateur sexuel pour ses enfants.Pour des homosexuel-le-s adultes, qui ne sontgénéralement plus dépendant-e-s de leur famille,l'homophobie est plus diffuse,plus pernicieuse.Mêmesi, plusieurs années après leur coming out, ils etelles ont gagné le droit à l'indifférence et à la « normalité» auprès de leurs proches,une seule personnepeut suffire à influencer le reste de la famille, qui,dans une volonté désespérée de vouloir « ménagerla chèvre et le chou », va trop souvent se ranger ducôté de l'agresseur-e au détriment de la victime.Si l'homophobie,la biphobie et la transphobie parentalessont difficiles car elles détruisent le lien fondamentalqui existe entre parents et enfants, uneconciliation est toujours possible, avec le temps etles mots nécessaires. En revanche, un-e ami-e qui seEn conclusion,les LGBTphobies exercées par la familleet l'entourage proche sont tristement étouffantes.Elles sont d'autant plus accablantes que l'agresseurea auparavant aimé et estimé la victime. Dans cecontexte, le coming out joue un rôle de pivot entreun avant et un après, ce qui est d'autant plus culpabilisantpour la victime. Rappelons que l’un desslogans de la Manif pour tous était « un papa, unemaman, il n'y a rien de mieux pour un enfant ».Sauf si ces parents organisent méthodiquementla destruction de la vie sociale, affective, psychologiqueet professionnelle de leur enfant en détruisantle lien familial. N’est-ce pas là la véritable« familiphobie »?


Rapport sur l'homophobie 2014 • FamillePression familialeFrançois, 20 ans, nous contactepar chat. Rodrigo, son petitami de 22 ans, vient de lequitter pour « se mettre avecune fille ». Il vient d'une familleportugaise très conservatriceet homophobe, avec quiles contacts étaient devenustrès froids : il désirait, ense mettant en couple avecune fille, renouer les liensavec sa famille. François,qui ne comprend pas ladémarche de Rodrigo qu'ilassimile à un refoulement,est accablé par la situation,d'autant plus qu'il avait eu dumal à faire accepter son amià ses propres parents.La transphobie, une maladiefamiliale !Ariel nous contacte par courriel.Attiré par les femmes mais enquestionnement sur son identitéde genre, ses parents ne veulentpas l’entendre parler d’homosexualitéle concernant et luidisent : « Si tu étais homosexuel,tu ne passerais pas ton tempsau téléphone avec des femmesmais avec des hommes. » PourAriel, la seule solution résidedans le dialogue, mais il sembleimpossible. « Etre transexuelleet lesbienne est sans doutece qu’il y a de plus difficile àfaire comprendre aux gens. »Le Parisien, 7 novembre 2013


75Romain, 17 ans, habite àLyon et nous appelle, trèsému. Le jeune homme setravestit en permanence etses parents ne supportentpas « [s]on look ». Pouréchapper à ce climattendu, Romain passe le plusclair de son temps chez soncopain, que ses parents estimentresponsable de « [s]on lookde plus en plus féminin ».Romain, qui souhaite entamerun processus de transition,aimerait apaiser les esprits.Des mots et des coupsFlorence, 42 ans, nous écritde Saône-et-Loire. En 2010,mère d'une petite fille, elledécide de quitter son conjointpour « s'assumer en tant quelesbienne ». Celui-ci n'a passupporté son coming out eta monté l'ensemble de saproche famille contre Florence :sa sœur et son beaufrèreont envoyé uncourrierà un organismed’aide aux enfantsmaltraité-e-s, l'accusantde battre sa fille.Puis ils ont piratéses comptes sur lesréseaux sociaux.Elle dépose alors uneplainte auprès de lagendarmerie, ce quin'a pas arrêté les agissements.Deuxansplus tard, elle tombedans un véritableguet-apens.Attiréechez sa sœur via unprétexte fallacieux,elle est tour à tourinsultée par son pèreet battue par sa sœur,son beau-frère etson ex-conjoint. Elledépose plainte et serend à l'hôpital.Depuis elle est enarrêt-maladie pourdépression.Hakim est un maçonparisien de 32 ans.Né au Maroc etFrançais depuis 1996,il aide depuis cette date sesparents qui l'ont rejointà obtenir la nationalité.Entre-temps, il a annoncé sonhomosexualité à ses parentsmais son père ne l'a jamaisacceptée. Hakim est harcelépsychologiquement, et safamille, « terrorisée » par le pèrequi est également violent enverssa femme, n'ose pas témoigner.Lors du mariage de sa sœur auMaroc, Hakim s'est fait humilierdevant sa famille par son pèrequi a menacé de mort son ami,alors absent : « En France, jepeux rien faire, la France c'estun pays de PD, mais ici j'te jure,je le tue. » Depuis cet ultimeépisode, Hakim a coupéles ponts avec son père eta témoigné en sa défaveur surson dossier de naturalisation.Camille a invité ses parents àvenir fêter ses 19 ans et n’avaitpas prévu de mettre l’homophobieau menu.Au courantde son homosexualité, son pèrelui a alors fait comprendrequ'il « ne la supportait plus ».Brutalement, il s'est mis àl'insulter : « Regarde-toi ! Tu medégoûtes », puis : «Va lécherdes chattes, espèce de salelesbienne. » Sa mère s'estinterposée, ce qui a permisd'éviter qu'il ne frappe sa fille.Pour Camille, il y a un avant etun après.Auparavant épanouie,elle est aujourd’hui déprimée,et se demande si elle peut porterplainte contre son père au vu desdélais de prescription, craignantaussi d'être jugée par la police.Elle se sent assez seule : elle


Rapport sur l'homophobie 2014 • Familleconsidère que ses ami-e-s« ne peuvent pas comprendre,ne sont pas dans [sa] situation ».Bienvenue dehors !Karim a 17 ans, il habite dansl'Ouest de la France.Voilà troisans qu'il vit un enfer. Lors del'annonce de son homosexualitéà sa famille, celle-ci a réagi trèsviolemment : on lui a retiré sachambre et son frère l'a mêmemenacé de mort. Depuis, il dortdans la salle de bain et subit desbrimades quotidiennes de lapart de l'ensemble des membresde sa famille. Selon lacorrespondante de l'associationLGBT qui le suit, Karim subit unvéritable « calvaire ». Ellecherche à l'éloigner au plusvite de ses bourreaux.Timothée, 20 ans, vivant àMaisons-Alfort, a été chasséde chez lui. Depuis quatre jours,il erre dans les rues de Parissans avoir mangé. Sa mère n’apas accepté sa transidentité etil ne peut se raccrocher ni àsa famille antillaise qui vit enoutre-mer ni à ses ressources :il est sans activité.Hypocrisie familialeAudrey habite à Amiens.Son homosexualité était connueet bien acceptée par toute safamille jusqu'à ce que sa bellesœur,d'origine indienne, nel'apprenne.Après un courrielde dénigrement, elle menacede ne plus lui adresser la paroleet de lui interdire de voir sanièce. De fait, les contacts sontrompus,Audrey n'a pas revu sanièce. La famille, autrefois bien-FocusGuillaume a une vingtaine d'années. Il nous écritpour nous faire partager le cauchemar qu'il vit depuisson coming out auprès de sa famille, en 2010.Ses parents, appartenant à la « mouvance catholiqueversaillaise », l'ont alors forcé à voir un psychiatrepour « guérir » son homosexualité. Celui-ci, queGuillaume considère comme « homophobe », a établiune « expertise » pour le placer en institution.Selon ses dires, ses parents auraient fait pressionsur sa tante, adjointe au maire de sa ville, pour quecelui-ci ait une place en « asile » plutôt qu'en maisonde repos. Ce placement dans un établissementnon adapté n'a fait qu'accentuer sa dépression.Guillaume était isolé de ses ami-e-s,ses seuls soutiens.Après trois mois d'internement et très affaibli,ses parents ont finalement trouvé bon de le jeterà la rue, et le jeune homme vivra en foyer pendantsix mois. Mais sans ressources, il est contraintde retourner vivre chez eux, et découvre alorsqu'il a été manipulé : son état de santé ne justifiait pasun placement. Le psychiatre aurait « bidonné » sonrapport, auquel Guillaume n'a jamais eu accès.A cause de ses séjours hospitaliers, il a longtemps étéécarté du marché du travail et toutes ses candidaturessont rejetées par les entreprises vers lesquellesGuillaume postule. Complètement démotivé et nese voyant aucun avenir professionnel, il est contraintd'habiter avec des personnes manipulatrices chezlesquelles il subit brimades et insultes. Il ne peutabsolument pas compter sur le soutien de ses frèreset sœurs, et ne se remet toujours pas après quatre ansde cette hospitalisation abusive, au cours de laquelleil a « failli mourir ». Diminué, il a l'impressionque ses parents ont organisé sa dépression.La veille de son courriel, son père l'a encore traitéde « malade mental ». Une boucle infernale


77Stéphanie, étudiante lorrainede 19 ans, est lesbienne.Depuis le début des débatssur le mariage pour tou-te-s,elle ressent une homophobiede plus en plus forte de la partde ses parents et de ses ami-e-s:son père « veut que les homoquisemble pour lui n’avoir qu'une issue :« Je préfère mourir que d'être esclave de mesparents », alors que Guillaume ne cherchequ'une chose : « Je veux juste qu'on m'aime. »veillante, subit le chantage de labelle-sœur. Ne souhaitant pasenvenimer la situation, ellerefuse la présence d'Audreyaux repas de famille afin de lacontenter.Audrey, qui subitcet isolement forcé avec unsentiment d'injustice, désireporter plainte contre sa bellesœurpour débloquer lasituation. Convaincue qu'elle nevariera pas, elle entreprendcette démarche pour renoueravec sa famille.Didier, 50 ans, vit dans la Sarthe.Après avoir été rejeté pendantdes années par sa famille du faitde son homosexualité, il avait lesentiment d'être de nouveauaccepté, après une conciliation.Malheureusement, il s'est renducompte que son beau-frère lemet systématiquement à partlors des réunions de famille,auxquelles il est d’ailleurs trèsrarement invité. De plus, sonbeau-frère l'a accusé de vol sansraison et sa famille, « qui le saitinnocent », ne le défend pas.Il a l'impression que le rejet alaissé place à une formed’indifférence malsaine, cequi le plonge dans un grandmal-être. Séropositif, vivant chezses parents, il se sent très isolépsychologiquement et amême pensé au suicide.Famille décomposéeHélène vit à Grenoble avec sacompagne, Isabelle, divorcée etmère de quatre enfants dont ellea la garde alternée. Les rapportsavec l'ex-mari d'Isabelle étaientcordiaux jusqu'à ce que celui-cise remarie avec une catholiquepratiquante. Depuis, les rapportsse sont détériorés. L'ex-marid'Isabelle a fait une demande degarde exclusive auprès du juge.Hélène essaie de jouer un rôlede médiateur, mais le père desenfants, sous l'influence de safemme, ne veut rien entendre.Les enfants subissent lesdénigrements et insultes de leurbelle-mère envers leur mère etsa compagne : elle a notammentaffirmé devant eux que leurmère est « une dégénérée ».Très perturbés, ils sont suivispar un psychothérapeute.Hélène, aussi visée, réfléchit àporter plainte en soutien de sacompagne et de ses enfants.Caroline, parisienne de 29 ans,nous contacte via le chat pournous parler de son oncle, uncuré homophobe. Lors d'uneréunion de famille et sachantqu'elle est enceinte, celui-ci lui asouhaité « une aussi bonneannée que possible vu les choixdifficiles [qu'elle a] faits ».Plus tard, jour de Manif pourtous, il lui annonce qu'il est entrain de manifester « avecdes milliers de Français pourdéfendre la famille, les enfantset le mariage ». Heureusement,elle est soutenue par le restede sa famille, catholiquepratiquante, malgré l'influenceque l'oncle tente d'y exerceren ayant par exemple reprochéà la mère de Caroline de nepas l'avoir empêchée d'êtreenceinte. Pour se venger decelui-ci, qu'elle considèrecomme une « cause perdue »,elle lui a offert au dernier Noëlun exemplaire du dernierRapport annuel de SOS homophobie! Les contacts qu'entretientCaroline avec son onclesont réduits au minimum etne sont justifiés que parle souhait de ne pas blessersa grand-mère, très ouverted'esprit, qu'elle adore.Elle est également très soutenuepar sa compagne.Vous avez dit « ami-e-s » ?Sophie a été victime d'un violil y a trois ans de la partd'« amis » qui voulaient, selonses dires, lui apprendre la« vraie vie ». Depuis, elle a honted'elle et ne sort pratiquementplus. Elle n'a pas contactéla police par peur, et estpsychologiquement dévastée.


Rapport sur l'homophobie 2014 • Famillesexuels meurent ». Elle estréticente à faire son coming outcar elle a peur de se retrouverà la rue. Sa sœur avec laquelleelle vit est elle aussi homophobeet elle ne peut compter sur sesami-e-s, qui ont participé à laManif pour tous : « Pourquoi tun’y viens pas ? On s’éclate ici !Il faut montrer aux PD qu’on estplus forts qu’eux ! » Stéphanie,oppressée et désespérée,a déjà pensé au suicide.Dans l’homophobie,un père, une mère,c’est complémentaire !Batya, Parisienne de 15 ans, estélève dans une école privéejuive. Quand sa mère a apprisqu'elle était en couple avec unejeune fille de 20 ans, sa réactiona été l'indifférence. En revanche,quand son père l'a appris, il l'a« punie » en la privant de moyende communication. Puis il s'estravisé en lui rendant son téléphoneportable. Mais c'estalors que sa mère s'est mise àdénigrer son amie, l'accusantd'avoir une mauvaise influencesur sa fille et menaçant de porterplainte. Elle décrit son pèrecomme quelqu'un de colérique,fermé au dialogue et ultraprotecteur.Elle ne peut comptersur le soutien de ses ami-e-s,mais elle a une écoutebienveillante de la partd'enseignant-e-s.


79La parole à…Brune, Pierrotet Pablo SebanE-ga-li-té ! Y'a pasde «si», y'a pas de « mais ».Nous c'est Brune, Pierrot et Pablo, et on a deuxmamans : Maria et Mimi. Ou plutôt : on a unemaman et une Mimi. Avec notre papa Gisberto enItalie et notre tata adoptive Jackie, c'est notrefamille à nous, une famille unique et normale.Une famille qui n'est devenue « homoparentale »que quand les journalistes ont voulu nous mettredans une case. Qui est alors devenue « anormale »,« dangereuse » pour nous et pour la « civilisation »,en particulier au cours de cette année 2013.Ah, 2013, une grande année…Bien sûr, la loi sur le mariage pour tous est passée.C'est une bonne nouvelle parce qu'elle attaque(quoique partiellement) l'inégalité de traitemententre homos et hétéros, et ainsi l'homophobie quin'est que le reflet de cette inégalité concrète. C'estune bonne nouvelle, donc, car en faisant bouger leslignes juridiques, en affirmant l'égalité dans le droit,on pourra permettre que s'affirme l'égalité dans lesfaits, et que les consciences évoluent.Mais 2013 est une année qui a fait mal.Elle a fait mal parce que s'est libérée une parolehomophobe massive. Des dizaines de milliers depersonnes descendues dans la rue non pour revendiquerun droit, mais pour exiger que d'autresen soient privés. « Nous ne sommes pas homophobes»,disaient les anti-mariage pour tous.Non-sens : l'homophobie est exactement le fait derevendiquer une inégalité de traitement, une inégalitéde droit, revendiquer que les personneshomosexuelles soient exclues de l'article1 de laDéclaration universelle des droits de l'homme(sic): « Tous les êtres humains naissent libres etégaux en dignité et en droits. »Cette parole homophobe, ils et elles l'ont portée ense servant de nous, en prétendant le faire pournotre bien. Pourtant les enfants qui, comme nous,ont deux pères ou deux mères n'ont jamais dûautant souffrir qu’en 2013. Non du fait de leursfamilles, mais du regard porté sur elles. Bien sûr,nos familles sont complexes, elles sortent de l'archétypedéfendu par leur « norme », de leur idéeabstraite de la famille. Mais comme toutes lesautres familles ! Une famille n'est « normale » quesi on la regarde de loin : vue de près toute famille ases histoires, qui la rendent unique et hors normes.La nôtre, nous l'avons racontée dans un webdocumenaire,Alberomio, mon arbre 1 , et ce qui ressortle plus des retours sur notre témoignage, c’est qu’ilparle à tout le monde ! Non, ce qui nous fait dumal, ce n'est pas notre famille, mais bien leurspropos, leurs actions, leurs manifs pour tous…mais contre nous.2013 a fait mal aussi parce que l'égalité n'a pas étéréellement affirmée. Quand la question de l'égalitése pose, il ne devrait pas y avoir de « mais », etencore moins de « si ». Pourtant, le gouvernementa choisi de limiter l'égalité à la question du mariage,en refusant d'envisager le droit à la PMA et à la GPA(c'est-à-dire le droit à une parentalité choisie pourles couples homos et les célibataires) tout en créantde fait une différence entre les enfants des couplesmariés et ceux des couples non mariés, différencequi avait disparu depuis des décennies.Ce choix a donné confiance aux discours homophobes,car il revient à dire qu'il y a des limites à l'égalité.Une fois la brèche ouverte, il leur a suffi de s'yengouffrer. Le gouvernement a cédé, et le droit à laPMA a été renvoyé aux calendes – sans parler deGPA, à laquelle une simple allusion semble taboue.Pour 2014, il faut se remonter les manches, inverserla machine et affirmer : E-ga-li-té ! Y'a pas de«si», y'a pas de « mais » !1. http://www.alberomio.com/Brune, Pierrot et Pablo SebanPablo Seban a témoigné à l'Assembléenationale dans le cadre du projet de loi mariagepour tou-te-s


Rapport sur l'homophobie 2014InternetLa haine à portée de clic32%Inconnu23%Femmesexe des victimes2HarcèlementDiscrimination 1%1%13%HomophobiesocialeInsultes36%25%Diffamation44%HommeTrans1%Rejetignorance41%30%MenacesChantagemanifestations de l’homophobie*33%Inconnu4%+ de 50 ans24% 18%25-34 ans35-50 ansâge des victimesVidéo(Youtube/Dailymotion) 3%49%TwitterCommentaire 4%d’article depresse 4%Forum dediscussion- de 18 ans5%Type de site16%18-24 ans18%SiteInternet**17%Facebook5%Blog40%Inconnu39%Autresrégions20%Île-de-France1% Étrangerorigine géographique1723 témoignages, correspondantà 1723 cas, soit 51% du total.Une année record2013 aura été une année tristement exceptionnelleconcernant le nombre de témoignagesd’homophobie et de transphobie surInternet. L’année 2012 s’était achevée avec 656témoignages concernant l’homophobie et la transphobieen ligne, enregistrant une tendance à lahausse due aux débuts des débats sur le mariagepour tou-te-s en fin d'année.En 2013,ce sont 1723témoignages qui nous ont été rapportés, soit uneaugmentation de 162 %.Les types de manifestations de la lesbophobie, dela gayphobie, de la biphobie et de la transphobieont aussi évolué entre 2012 et 2013. En 2012, letrio de tête se composait d’insultes (38 % destémoignages), d’homophobie sociale (25 %), et dediffamation (21 %). En 2013, les propos de rejet etd’ignorance prennent la tête (41 %), suivisdes insultes (relativement stables à 36 %), et despropos menaçants (30 %, contre 16 % l’année précédente).Les propos diffamants ne sont plus surce triste podium cette année, mais leur partaugmente tout de même puisqu’ils ont représenté25 % des propos rapportés.* Plusieurs manifestations peuvent être identifiées sur un cas. Enconséquence, le total des manifestations est supérieur à 100 %.** Site internet au sens large : site créé par des opposant-e-s, sited’information de personnes opposées (Boulevard Voltaire, parexemple, ou encore le site d’Alain Soral), etc. Cette dénominationest donc assez généraliste et regroupe des types de siteque nous n’avons pas pu classer dans les autres catégories.


81Internet sert de véritable défouloir pour tenir desdiscours homophobes, et le ton est véritablementmonté par rapport à 2012, puisque les proposde rejet et d’ignorance, insultants, menaçants etdiffamants ont été malheureusement plus quejamais monnaie courante au cours decette année.Le débat sur le mariage pourtou-te-s a joué à plein pour libérer laparole homophobe,y compris sur le Web.Réagir à un article de presse, participer àun forum ou publier son avis sur lesréseaux sociaux est très facile, d’autantplus quand l’anonymat est permis, et dans lecontexte d’un débat passionné, la modération despropos n’est pas chose aisée.Il faut noter une forte corrélation entre le nombrede témoignages reçus et l’actualité. Le mois de janvierrassemble à lui seul 18 % des témoignages reçusen 2013 (des manifestations importantes de soutienou d’opposition au mariage pour tou-te-s onteu lieu à ce moment de l’année),le mois d’avril correspondà 11 % des témoignages (vote de la loi), eten raison de hashtags (mots-clés précédés d’undièse) homophobes très présents sur Twitter en août,celui-ci représente 24 % des témoignages de 2013.Les réseaux sociaux, vecteurs privilégiés del’homophobieCette homophobie sur Internet s’est bien sûrexprimée sur des espaces variés.Les réseaux sociauxn’y ont pas échappé. Cette année, prèsde la moitié (49 %) des 1723 témoignagesreçus concernent des proposhomophobes et/ou transphobes tenussur la plateforme de micro-bloggingTwitter ;140 caractères suffisent amplementpour tenir des discours pouvantatteindre une violence rare. Et, commeen 2012, les hashtags homophobes ont fleuri,tels que « #LesGaysDoiventDisparaitreCar »,« #UnGayMort », « #IlFautTuerLesHomo-sexuels »,ou encore le hashtag de ralliement « #TeamHomophobe» de celles et ceux qui revendiquaientleurs propos haineux. Un exemple de ce que l’onpouvait trouver : « #LesGaysDoiventDisparaitreCarles gays ne sont pas humains, il est donc tout à faitnormal de les exécuter » (les fautes d’orthographe# IlFautTuerLesHomosexuels«C'est unemaladiementale»ont été corrigées pour faciliter la lecture). Plusieursde ces hashtags se sont retrouvés en « trendingtopics », c’est-à-dire parmi les sujets les plusdiscutés à un moment donné sur le réseau social,devenant visibles à tous ceux et celles qui se connectentsur le site Twitter.Tou-te-s les utilisateurs-tricesde ces hashtags n’étaientpas homophobes, car une part importanted’entre eux les dénonçait, maisils alimentaient par la même occasionleur utilisation, renforçant de fait leurplace en trending topic.SOS homophobiea par ailleurs obtenu en 2013 un statut particulierauprès de Twitter pour pouvoir signaler rapidementà la plateforme sociale un hashtag haineux pourle faire désindexer de la liste des trending topics,etainsi éviter qu’il ne gagne en visibilité inutilement.Cela ne supprime pas les propos homophobes,maisc’est déjà une petite avancée. Bref, du mieux,mais encore loin d’être suffisant à nos yeux.L’an dernier, 21 % des témoignages reçus concernaientFacebook, autre réseau social d’importance.Cette année,cette part a légèrement diminué,à 17%,mais cela suffit pour faire de Facebook la deuxièmesource de propos homophobes et transphobes aprèsTwitter. A travers des commentaires et discussionsprivées,bien sûr,mais aussi par le biais de pages publiquesou de groupes créés et dont les « fans » (ceuxqui cliquent sur le bouton «J’aime» de la page) revendiquentleur homophobie. Les proposlaissent peu de place à l’interprétation, entémoignent leurs noms évocateurs :« Homophobe jusqu’aux couilles »,« L’homosexualité est contre-nature »,ou encore « Homophobes et FIERS ».De nombreux témoignages rapportaientune incompréhension à ce que ces propos soientencore visibles, et ce malgré les signalements faitsauprès de Facebook et Twitter. Le retrait de cespropos n’est pas une chose aisée, ni immédiate, etla réactivité en la matière des plateformes socialesest un point qu’il leur faudra développer à l’avenir.Autre preuve que les réseaux sociaux se sontlargement faits l’écho du débat sur le mariage pour


Rapport sur l'homophobie 2014 • Internettou-te-s, le vote définitif de la loià l’Assemblée nationale le 23 avrilest le deuxième événement qui asuscité le plus de trafic sur Twitteren France en 2013, derrière lematch de football France-Ukrainedu 19 novembre . Et les hashtags« #DirectAN » (utilisé pour suivreles débats à l’Assemblée nationalelors de l’examen de la loi) et« #MariagePourTous » se classentrespectivement premier ettroisième dans la catégorie« Politique ». Sur Facebook, lemariage pour tou-te-s se classeseptième toutes catégories confonduesdes sujets les plus discutésen 2013, tandis que la Manif pourtous se classe juste derrière, à lahuitième place .FocusVincent, 45 ans, qui habite le département de l'Eure,a été victime en ce début d'année d'usurpationd'identité et d'outing sur Twitter. Deux comptesont été créés à son nom sur lesquels l'usurpateurn'a pas manqué de préciser également son âge,sa région ainsi que son orientation sexuelle, pourensuite diffuser des tweets indiquant qu'il rechercheun partenaire alors qu'il est en couple depuis 20 ans.Si, à l'heure où Vincent nous a fait parvenirson témoignage, les propos de son agresseur nes’avéraient pas insultants, il n'en est pas moinsvrai que Vincent vivait très mal la situation.En effet, il a manifesté à l'association sa consternationde voir sa vie privée ainsi dévoilée aux yeux detou-te-s puisque n'importe qui a la possibilité deprendre connaissance de ces comptes en tapantson nom dans Google.Vincent a porté plainteauprès de la gendarmerie mais demeure effarépar l'absence de réaction de Twitter : malgré sesdémarches de signalement, les comptes sont toujoursactifs. Il explique que de par son âge et son vécuil parvient à tenir le coup, mais reste néanmoinschoqué : « Je m'assume pourtant depuis des années,je vis une vie de Français moyen, j'ai traversé desgalères, mais là... j'ai l'impression de me retrouversous l'Occupation et qu'on m'a cousu un trianglerose (numérique...) sur la veste. » Il exprimeégalement son inquiétude si de tels agissementsvenaient à viser des jeunes gays et lesbiennes, plusvulnérables : « Que se passe-t-il quand cela arrive àun-e ado ? qui n'osera pas aller porter plainte […].Du grand n'importe quoi de la part d'un siteinternet qui ne réagit pas dans les temps"où ça fait le plus de mal"... et pour certains,malheureusement, dans les temps, où, trop tard,l'ado à qui cela sera arrivé se jettera d'un pont... »


83La haine en hashtagsJonathan, étudiant dans leNord-Pas-de-Calais, signaleà SOS homophobie le tweet« #UnBonGay est un gay mort »qui l'a heurté, et sollicite l'aidede l'association en vue de faireretirer ce tweet « car Twitterne semble rien faire ».Lucie, une jeune femme de26 ans qui vit en Picardie,rapporte des tweets diffusésaprès les premiers mariagespour tou-te-s qui incitentà la haine et au meurtre :« #Vivelesmariés, on va lescramer ces PD ! »Jules, habitant l'Essonne, a étéconfronté au tweet « Les gaysfaut les pendre comme en Iran »et se dit très choqué par lavirulence de ces propos.Les BICHES du Netde SOS homophobie(Brigade d’intervention contre l’homophobieet le sexisme sur Internet)L’actualité de 2013 autour du mariage pourtou-te-s a été à l’origine d’un déferlement depropos homophobes sur Internet. 1263 signalementssont parvenus à SOS homophobie cetteannée, dont 245 pour Facebook et 508 pourTwitter. Parmi ces signalements, 658 ont faitl’objet d’un traitement, dont 121 pour Facebooket 283 pour Twitter.Afin de respecter la divergence des opinions surdes sujets d’actualité, SOS homophobie ne prenden charge les signalements de propos homophobesque lorsqu’ils dépassent les limites de laliberté d’expression, c’est-à-dire uniquementSabrina, étudiante dans le Gard,est scandalisée par les proposqu’elle a rencontrés sur Twitter :« #SiMonFilsDevientHomo jel'oblige à jouer à la rouletterusse devant moi avec 5 ballessur 6 dans le barillet. »Samuel, utilisateur franciliendu site de micro-bloggingTwitter, et âgé de 37 ans, estconfronté quotidiennementà des propos homophobestrès virulents depuis l'ouverturedes débats relatifs au mariagepour tou-te-s.Après avoirdébattu via Twitter avec lesopposant-e-s, il est atterrépar la violence des propostenus par ces derniers-èresqui dépasse ce à quoi il s'étaitpréparé. Il s'est résigné à neplus échanger avec lesopposant-e-s et a communiquéà SOS homophobie denombreux tweets diffamantscomparant l'homosexualitéà la pédophilie et à la zoophilieet dans lesquels les homosexuel-le-s« souhaitentimposer un modèle desociété pervers ».Facebook ou l'homophobie« likée »Laurent, qui vit dans les Vosges,a été indigné par les propostenus sur Facebook à l'encontrede son neveu adolescentBenjamin. Ce dernier a étéouté par des internautes sur lapage « Anti Homosexualité ».Sa photo a été publiée surla page, accompagnée d'untexte profondément insultantet diffamatoire : «Voici Benjamin,un homosexuel français àdécourager à jamais. Regardezlorsqu’il s’agit d’injure, de diffamation ou d’incitationà la haine, à la violence ou à la discriminationcommise avec un mobile homophobe.Les autres propos ne font l’objet d’aucune actionde la part de SOS homophobie.La commission a développé ses propres outilsinformatiques et établi deux partenariats.Le premier accord a été conclu avec Twitter, afinde signaler en priorité les propos homophobes.Le statut de signalant prioritaire nous a étéaccordé par Twitter suite à une rencontre auministère du Droit des femmes.Le second partenariat a été conclu avec lapolice judiciaire, agissant au moyen de la plateformeen ligne www.internet-signalement.gouv.fr. La police judiciaire s’est engagée àtraiter en priorité les propos signalés par SOShomophobie au moyen d’un compte spécial.


Rapport sur l'homophobie 2014 • Internetbien cet insecte vomi parun monde de dégoût pourpolluer notre monde... »Laurent a tenté de signalerla page à Facebook, mais sanssuccès. Benjamin, qui se trouveà un âge où l'affirmation deson homosexualité est difficile,est désemparé face à la situationet a exprimé son malaise.Mélissa, âgée de 33 ans, a faitpart à SOS homophobie deson exaspération face à lapublication sur la pageFacebook de la Manif pour tousde visuels homophobesdestinés aux pancartes pourune manifestation. On pouvaitlire entre autres : « Dernièrefête des Mères avantliquidation » ou « On veut duboulot, pas du mariage homo ».Sa colère était vive face àdes slogans qu'elle qualifiede « mensongers », « haineux »et « insultants ».Lesbophobie pour toutesNoémie, étudiante à Paris âgéede 28 ans, a été interloquéepar un test sur la version enligne du magazine ELLE intitulé:« Etes-vous vraiment hétérosexuelle? » Non seulementles questions font état desexisme et d'un hétérocentrismelatents, mais quelles que soientles réponses sélectionnées,le résultat est toujours le même :Commentaire Facebook signalé à SOS homophobie« Vous êtes paradoxalement,farouchement, tranquillementou gaiement HETERO-SEXUELLE. » Les lesbiennesn'existent pas pour cemagazine.Jeanne, qui vit en Loire-Atlantique, a entrepris de créerun blog alors que les débatsautour du mariage pour tou-te-sfoisonnaient, afin de relayer desarticles en faveur de l’ouverturedu mariage aux homosexuel-lesainsi que des informationsrelatives aux différentesmanifestations dans sa régionet en France.Au départ décidéeà permettre aux internautesde s'exprimer librement viades commentaires, elle a étécontrainte, face à la multitude decommentaires haineux, de filtrerces derniers, et s'est diteextrêmement choquée etblessée – malgré unepréparation psychologiqueaux éventuels commentaireshostiles – par les proposd'un opposant assimilantl'homosexualité à la pédophilieet la visant directement elle,et sa compagne : « Pasd'enfants futures victimesde votre pédophilie. »Du « lobby gay »...Marianne nous fait part decommentaires qui l'ontprofondément offenséeà la lecture d'un article depresse traitant d'un jeune gaymis à la rue par ses parentssuite à son coming out.Les internautes rejettent laposition du journal et évoquent« un parti pris en faveur deshomosexuels [qui] commenceà ressembler à Têtu ». Ils etelles minorent également lesfaits : « L'histoire édifiantedu jour pour le formatage dubon peuple, très "politiquementcorrecte" comme toujours.Des tas d'adultes de 19 anssont mis tous les jours à la portepar leurs parents, mais ils nefont pas partie des prétendues"minorités opprimées"...Toujours ces médias àdéfendre les bobos... »,et vont jusqu'à disculper lesparents : « Il aurait été bien quel'auteur de cet article interrogeles parents... Peut-être aurait-ildécouvert qu'il n'a pas étérejeté pour son homosexualitémais pour son irrespect,ses vols ou son addictionà la drogue ! »… à une « dangereusedéviance »C'est en naviguant sur le siteWeb d'un grand quotidienque Michel, 46 ans, a étéprofondément choqué en lisantdes commentaires tels que :« Ah ! Les homos ! Toujours entrain de faire du lobby afin de


85pouvoir violer des hommeshétéros et des enfants. C'estune maladie mentale. »Marc, qui habite Paris et estâgé de 27 ans, a souhaitésignaler un article issu d'unblog qui qualifie, entre autres,l'homosexualité de « désordremental, comportemental,moral […], de mal social ».Il se dit scandalisé par ce qu'ila pu lire, s'agissant pour lui du« reflet d'une haine profondeà l'égard de l'homosexualité,véhiculant des idéesabjectes ». Marc est d'autantplus choqué et attristéd'apprendre que l'un descontributeurs réguliers à ceblog fait partie de l'entouragede certain-e-s de ses ami-e-sainsi que de sa famille.Dimitri, jeune Parisientrentenaire, nous indique uncommentaire qu'il a lu surun site Internet. Ce dernieraffirme que l'homosexualitéest une maladie mentale :« L'homosexualité n'a riende naturel ; l'homosexualitéest une déviation d'ordrespirituel », et amène vivementles gays et lesbiennes àeffectuer des démarchespour « se soigner ».


Rapport sur l'homophobie 2014JusticeNul-le n’est censé-e ignorerl’homophobie et la transphobie16 témoignages, correspondantà 16 cas, soit 0,5 % du total.Le sentiment de justice va de mise avec le principed’égalité et l’absence de discrimination.L’ouverture du mariage aux couples de personnesde même sexe et,par là même,l’ouverture de l’adoptionaux couples homosexuels jouent pour beaucoupdans ce sentiment de justice.Toutefois, quand nousy regardons de plus près, certaines choses n’ont paschangé avec la loi du 17 mai 2013.formé un pourvoi en cassation contre cette décision,et ce alors que la ministre avait précisé que lesprocureurs généraux pouvaient faire preuve desouplesse dans l’application de cette règle. Toutefois,si la Cour de cassation devait suivre la cour d’appel,la décision serait soutenue par une autorité supérieureet pourrait permettre à d’autres couples binationauxde faire valoir leurs droits.Plusieurs thèmes ressortent dans les témoignagesreçus par SOS homophobie au cours de l’année 2013.Directement liés à l’accès au mariage, lescouples binationaux sont confrontés à unebarrière juridique. En effet, la loi nouvellepermet bien à un couple binational depersonnes de même sexe de se marier.En revanche, s'il existe un accord bilatéralne reconnaissant pas les mariages entrepersonnes de même sexe entre la Franceet le pays d’origine de l'un-e des deux partenaires,,il est alors impossible au couple de se marier.Cette règle, rappelée par la circulaire de la ministrede la Justice du 29 mai 2013, établit une liste de 11pays ayant signé un accord bilatéral avec la France.La cour d’appel de Chambéry avait bravé cette interdiction,en autorisant le mariage d’un couple francomarocainle 22 octobre 2013. Le procureur général a« N’avezvouspashonte d’êtrehomosexuel? »La discrimination ne concerne pas que l’orientationsexuelle.L’année 2013 aura été une année décevantepour les personnes trans. Alors que laCommission nationale consultative desdroits de l’homme a rendu,le 27 juin 2013,un avis favorable à la démédicalisationtotale et à la déjudiciarisation partielledu changement d’état civil, les amendementsdéposés devant le Sénat à l’occasiondu vote de la loi sur l’égalité entre lesfemmes et les hommes ont tous été rejetésle 17 septembre 2013. Alors qu’il s’agissaitpourtant d’un thème urgent et porté par la majoritépolitique,ce rejet a été justifié par le gouvernementpar la peur d’une censure du Conseil constitutionnelface à un cavalier législatif 1 . La question devrait être1. Un cavalier législatif est une disposition introduite dans untexte de loi sans lien direct avec l'objet de la loi. Le procédéest sanctionné par le Conseil constitutionnel.


87abordée au Parlement au cours du premier semestre2014, soit à l’occasion d’une loi sur la simplificationdu droit, soit à l’occasion d’une initiative parlementaire(lire chapitre Transphobie).La loi sur le mariage pour tou-te-s n’est pas le seul faitayant eu un écho médiatique important. L’affaire dubar lillois le Vice & Versa en est un bon exemple etillustre la difficulté de qualifier le caractère homophobed’une agression. Le saccage de ce bar gay, enplein milieu du débat sur le mariage, montre qu'uneagression homophobe peut échapper à ce qualificatif.Le 17 avril 2013, quatre individus sont entrés dans leVice & Versa et ont saccagé le bar,blessant un gérantet un employé. Ils auraient, de plus, tenu des proposhomophobes. Le procureur a, dans son réquisitoire,demandé que soit retenu le caractère homophobedes actes et que les responsables soient condamnésà douze mois de prison dont six avec sursis. Malgréce réquisitoire, le tribunal n’a pas retenule caractère homophobe comme circonstanceaggravante et a condamné les quatreindividus à six mois de prison avec sursis.Cette affaire pose aussi la question de lasévérité des condamnations. Le tribunalcorrectionnel de Perpignan a condamné,le 9 décembre 2013, un jeune homme de19 ans à quinze mois de prison dont neufferme. Alors qu’elle lui avait simplementfait signe car elle le trouvait mignon,la victime,ungay,a été frappée au visage à plusieursreprises, menacée avec un couteauet a été traitée de « sale PD ». La victime a croisél’agresseur le lendemain dans la rue et a été forcéeà lui donner de l’argent. En comparaison, le tribunalcorrectionnel de Tarbes s’est illustré par son manquede sévérité. Alors qu’un jeune homme sortait d’uneboîte de nuit, il a été poussé au sol et roué de coupspar son agresseur, âgé de 21 ans. L’agresseur étaitencouragé par ses amis qui lui lançaient des « Vas-y,casse-le, ce PD ! Crève-le, ce sale PD ! ». L’auteur del’agression a été condamné à 105 heures de travauxd’intérêt général et 1 000€ de dommages et intérêts.L’homophobie reste aussi ancrée en droit de la famille,même si la loi sur le mariage pour tou-te-s a eu desconséquences importantes sur l’adoption, puisqueSubir desmoqueriessur soncouple de lapart de lapolice et duprocureurdésormais les couples de personnes de même sexepeuvent adopter conjointement un enfant.Cependant,les couples de femmes n'ont toujours pasaccès légalement à la PMA,ce qui les oblige à recourirà une insémination artisanale, procédé non sécuriséjuridiquement.En témoigne le jugement aux affairesfamiliales de Nantes le 29 juillet 2013 qui a accordédes droits parentaux au donneur de sperme ayantpermis à un couple de lesbiennes d’avoir un enfant.En application de la loi, cette décision accorde audonneur de sperme un droit de visite et d’hébergement,forçant la famille à se réorganiser malgré unprojet parental construit à deux. De façon plus positive,le tribunal de grande instance de Lille a accordé,pour la première fois,l’adoption plénière à la conjointedans un couple de femmes, le 19 novembre 2013.Le donneur de sperme étant inconnu, le juge a autorisél’adoption plénière.Au niveau européen, la Cour européenne des droitsde l’homme s’est démarquée. Dans sadécision X et autres contre Autriche du19 février 2013, la Cour de Strasbourg adécidé que là où les couples hétérosexuelsnon mariés ont accès à l’adoption coparentale,l’Etat ne peut pas en exclure lescouples homosexuels. Cette décision estd’une grande importance puisqu’elle a desrépercussions dans tous les Etats membresdu Conseil de l’Europe.Toujours au niveau européen, la Courde justice de l’Union européenne (CJUE)a pris une grande décision en matière de demandesd’asile, et considère que l’homosexualité constitueune caractéristique à ce point essentielle à la personnequ’on ne peut exiger qu’elle y renonce. Dansl’affaire X,Y et Z contre Minister voor Immigratie enAsiel du 7 novembre 2013, elle a décidé que lesdemandeurs-euses d’asile homosexuel-le-s constituentun groupe social spécifique susceptible d’êtrepersécuté en raison de leur orientation sexuelle.Malgré cela,elle ne retient pas que le simple fait quela législation nationale incrimine l’homosexualitésoit suffisant. Les autorités compétentes doiventeffectuer une recherche dans le pays d’origine afinde vérifier, entre autres, si les peines d’emprisonnementsont appliquées en pratique.


Rapport sur l'homophobie 2014 • JusticeEt comme une décision en demi-teinte ne vient jamaisseule,le tribunal administratif de Strasbourg a,quantà lui, décidé le 1 er octobre 2013 de surseoir à statuerdans une affaire de don du sang.Un individu a décidéde mettre en cause la responsabilité de l’Etablissementfrançais du sang (EFS) pour avoir refusé son don desang au motif de son orientation sexuelle.Le tribunaladministratif a transféré l’affaire à la Cour de justicede l’Union européenne afin qu’elle se prononce surla légalité de cette décision.L’EFS s’est en effet fondésur la loi du 12 janvier 2009, loi qui établit descritères pour les donneurs-euses conformément à ladirective 2004/33/CE issue de l’Union européenne.C’est donc à la CJUE de se prononcer sur cettediscrimination fondée sur l’orientation sexuelle (lirechapitre Santé).Le mariage pourtous(jours) ?L’une des grandes préoccupations post-adoptiondu mariage pour tou-te-s est celle du retraitde la loi en cas de non-réélection d’une majoritéde gauche en 2017. Cette peur est tout à faitjustifiée, car, l’ouverture du mariage pour tou-te-sayant été mise en place par une loi, une autre loipeut tout à fait l’abroger.Toutefois, quelques indicesnous laissent croire qu’un tel retour en arrièreest peu probable.Tout d’abord, le Conseil constitutionnel s’étantdéjà prononcé favorablement sur la constitutionnalitéde la loi, le recours à la question prioritairede constitutionnalité, qui permet decontester la constitutionnalité d’une loi au coursd’un procès, est exclu.Ensuite, l’expérience au niveau internationalmontre qu’il n’existe aucun précédent sur un retouren arrière dans les pays qui ont ouvert le mariageaux couples de même sexe. Il serait donc politiquementdifficile de justifier une telle décision.Enfin, même si le gouvernement ou le législateursouhaitait abroger cette loi, le Conseilconstitutionnel a développé une jurisprudencedite « effet cliquet ». En matière de libertés fondamentales,ce système empêche un retour enarrière et force à aller de l’avant. Une éventuelleloi abrogeant celle qui a ouvert le mariage auxcouples de personnes de même sexe serait alorssûrement invalidée par le Conseil constitutionnelen raison de sa non-conformité à la Constitutionfrançaise.Alors qu’elle allait retirerun dossier pour se marier àsa compagne, Sonia, de nationalitéalgérienne et vivant enNormandie, a appris qu’ellene pourrait pas l’épouser carl’Algérie fait partie des11 pays visés par la circulairede la ministre de la Justice.Lors du procès de divorceavec son ex-femme, Paul, alorsâgé de 30 ans, est soumis àun interrogatoire homophobede la part de l’avocate de sonex-femme. Il se voit alorscontraint de répondre àdes questions telles que« N’avez-vous pas honted’être homosexuel ? »,ouencore « Est-ce un choixde vie ? », et enfin « Commentpouvez-vous sortir dansla rue ? »Raphaëlle, des Yvelines,souhaite adopter l’enfant desa compagne, qu’elle a eud’une union précédente etque le père n’a pas reconnu.Elle hésite toutefois à le faireen raison du climat d’hostilitéqui règne autour de la loisur le mariage pour tou-te-s etdonc de l’adoption. Selonelle, une procédure d’adoptionest longue, et elle craint quele président de la Républiqueactuel ne soit pas réélu en2017 et que le prochaingouvernement bloque lesmariages et adoptions pourles couples de personnesde même sexe.Marc, 23 ans, s’est marié avecson compagnon en septembreà Ris-Orangis. Cependant,après une soirée arrosée,son époux s’en prend violemmentà lui et finit en comparutionimmédiate.Alors qu’ils’était porté partie civile,Marc a dû subir des moqueries


89sur son couple de la partde la police et du procureur.Après 10 ans de vie communeà Marseille,Vanessa et Mélaniese sont séparées.Au milieu decette séparation se trouve leurfille de 5 ans.Vanessa n’ayantpas pu adopter la fille,biologique, de sa compagne,elle se trouve en plein désarroimaintenant que Mélanieveut partir avec leur filleaux Antilles.Samy, âgé de 27 ans, estde nationalité nigériane.Il a dû fuir son pays aprèsavoir annoncé son homosexualitéà sa famille. Résident d’uncentre d’accueil pour lesdemandeurs d’asile (CADA)à Lille, il s’est vu refuser sademande d’asile malgré lesrisques de persécution qu'ilencourt en raison de sonorientation sexuelle s’ilretourne au Nigeria. Il adésormais quitté le CADAet se retrouve sans papiers,hébergé dans des centresd’accueil provisoires.


Rapport sur l'homophobie 2014 • JusticeLa parole à…Daniel BorrilloJustice et homophobieBien que le dispositif légal de luttecontre l’homophobie n’ait pas cessé des’améliorer depuis les premières dispositions protectricescontre les discriminations fondées sur lesmœurs en 1985, force est de constater que peud’affaires arrivent aux tribunaux. Cette situationcontraste avec les statistiques de SOS homophobie,lesquelles démontrent l’augmentation progressivedes discriminations et agressions à caractèrehomophobe 1 . Le droit semble insuffisammentmobilisé et la substitution de la HALDE par leDéfenseur des droits n’a pas rendu l’accès à la justiceen matière de discriminations fondées surl’orientation et l’identité sexuelle plus visible.L’année 2013 restera celle du début d’égalité pourles couples de même sexe grâce à l’ouverture dumariage et de l’adoption pour tous les couples.Toutefois, en matière de filiation, les discriminationspersistent puisque l’accès à la PMAdemeure interdit aux couples de femmes, et laprochaine loi Famille ne reviendra pas sur cetteinterdiction, au dire de la ministre de la Famille.Est également préoccupant le dispositif de levéede l’anonymat des donneurs de sperme et desdonneuses d’ovocytes proposé par le groupe detravail du ministère de la Famille. Si le don n’estplus anonyme, l’adoption plénière de l’enfant duconjoint deviendra particulièrement difficile carle géniteur pourra réclamer la paternité. En outre,la hiérarchie des filiations s’accentuera en signalantl’origine biologique (nécessairement hétérosexuelle)de la parenté. Un couple de femmesse verra ainsi « imposer » par la loi la présencedu géniteur auprès de l’enfant.Concernant les couples binationaux, les inégalitéssubsistent à cause de la circulaire d’application dela loi selon laquelle le droit du pays d’origineprime sur le droit français. Ainsi les ressortissantsd’Algérie, du Maroc, de la Tunisie, du Cambodge,du Laos, de Pologne, de Slovénie, de Bosnie-Herzégovine, du Monténégro, de Serbie et duKosovo ne peuvent pas contracter un mariage enFrance, quand bien même l’autre conjoint estfrançais. Et si la cour d’appel de Chambéry avaitreconnu un mariage homosexuel franco-marocain,le parquet a formé un pourvoi en cassationcontre l'arrêt. La Cour de cassation devra se prononcerprochainement.En matière de droit d’asile, la situation n’est guèremieux. Certes, la Cour de justice de l’Union européenne(CJUE) a précisé la teneur de la directive2004/83 en levant toute ambiguïté sur le fait que« les personnes homosexuelles […] doivent êtreconsidérées comme formant un groupe social »susceptible de bénéficier du droit d’asile, mais laseule pénalisation des actes homosexuels neconstitue pas pour la cour un acte de persécution.De surcroît, dans la liste des pays sûrs établie parl’Office français de protection des réfugiés etapatrides (OFPRA), il existe des pays où l’homosexualitéest violemment réprimée, comme c’estle cas du Sénégal.Dans d’autres domaines, comme le don de sangou l’identité de genre, les personnes LGBT demeurentdiscriminées. Un tribunal de Strasbourg ademandé à la CJUE si les hommes ayant eu desrelations sexuelles avec des hommes peuventcontinuer à être exclus du don du sang. La courdevrait se prononcer au cours de cette année.De même, le dispositif de lutte contre les proposinjurieux n’est pas applicable pour les discours dehaine envers les personnes transidentitaires, toutcomme l’obligation de stérilisation pour pouvoirchanger de sexe à l’état civil. Hélas, sous la craintede la Manif pour tous, le gouvernement a renoncéà mettre fin à toutes ces discriminations.1 Les manifestations contre le mariage pour tou-te-s, largementmédiatisées, ont déclenché une haine anti-homosexuel-le-sque l’on croyait disparue du paysage politiqued’un pays démocratique comme la France.Daniel Borrillo,juriste, professeur à l’universitéde Paris Ouest-Nanterre


Rapport sur l'homophobie 2014Lieux publicsPlace de l’Homophobie etde la Transphobie2%InconnuTrans 8%31%Femme59%HommeInconnu+ de 50 ans 13%6%28% 32%35-50 ans4%17%18-24 ans- de 18 ans25-34 ans48%AutresrégionsInconnu8%44%Île-de-Francesexe des victimesâge des victimesorigine géographiqueAgressionssexuellesDiscrimination 7%Autres 7%1%Dégradationsde biens 10%12%Menaces13%31%62%AgressionsphysiquesInsultes 20%HomophobiesocialeRejetignorancemanifestations de l’homophobie*15% Rue/ParcsAutres67%contextes12%Transports6% Lieux deDrague314 témoignages correspondantà 291 cas, soit 9% du total.Avec 291 cas de LGBTphobies rapportés en2013,contre 165 en 2012,les lieux publics ontété une scène à ciel ouvert d'une intoléranceoppressante pour les personnes homosexuelles,bisexuelles et trans... ou perçues comme telles.La rue et les parcs restent les principaux lieux où semanifestent l’homophobie, la biphobie et la transphobiedans ce contexte (2/3 des témoignages),suivis des transports en commun (12 %) et des lieuxde drague (6 %).Nul besoin de rappeler ici qu'en 2013,la rue a notammentété occupée par des manifestations d'opposant-e-sau mariage pour tou-te-s. Les chiffres sontsignificatifs :en 2012,48 % des cas rapportés avaientlieu dans les lieux publics ou les parcs. Cette année,les deux tiers des cas se déroulent dans ces mêmeslieux.Des agressions LGBTphobes ont en effet eu lieuen marge de ces événements (lire chapitre Mariagepour tou-te-s). Mais ces manifestations ont surtoutcréé un contexte et une ambiance défavorables auxpersonnes LGBT : l'homophobie sociale est ainsipassée de 8 % en 2012 à 20 % en 2013. Plusieurspersonnes ont contacté SOS homophobie pourévoquer leur incompréhension face aux opposante-sau mariage pour tou-te-s qui manifestaient« contre le droit des autres ». Certaines se sont sentiesrejetées par la société en général, allant jusqu'àne pas allumer la télévision les jours de manifestionscontre le mariage pour tou-te-s. Il est à noter* Plusieurs manifestations peuvent être identifiées sur un cas. Enconséquence, le total des manifestations est supérieur à 100 %.


93que les faits relatés s'installent sur tout le territoire:44 % ont lieu en Ile-de-France et 48 % dans les autresrégions. Les insultes restent la principale manifestationd’homophobie, présentes dans près de deuxtémoignages sur trois,mais les agressions physiquesdemeurent à un niveau important,près d’un tiers destémoignages.Le rejet et l’ignorance (13 % des témoignages),le chantage et les menaces (12 %) et lesdégradations de biens et le vol (10 %) sont aussiprésents de manière non négligeable. Le nombre decas d'homophobie sur des lieux de drague est stable,mais les agressions physiques y sont souvent beaucoupplus violentes et traumatisantes dans la mesureoù les victimes doivent souvent justifier leur présencesur ces lieux, au moment du dépôt de plainte ouauprès de leur famille et entourage. Enfin, la plusgrande partie des victimes de LGBTphobies dans leslieux publics sont des hommes (59 % destémoignages, contre 65 % l’an dernier)âgés de 25 à 50 ans (60 %, contre 57 %en 2012).Comme par le passé, de simples gestesd'affection entre deux personnes du mêmesexe peuvent déclencher des insultes,voire des violences physiques. Pourtant,ces mêmes gestes entre deux personnes de sexedifférent n'interpellent aucunement.Cette réprobationest même étonnamment intégrée par certaine-shomosexuel-le-s qui, insulté-e-s ou agressé-e-s,témoignent auprès de SOS homophobie en précisantque, pourtant, ils ou elles ne se tenaient pas parla main. Comme si ils ou elles devaient être invisiblespour pouvoir vivre tranquillement. Cela peut«Mi-homme,mi-femme,mi-chimpanzé»d'autant plus interpeller que, dans les lieux publics,il n'est pas rare que des tierces personnes assistentaux agressions.Mais la plupart du temps ces témoinsne viennent pas en aide aux victimes. Etrange situationdans un pays où deux femmes ou deux hommespeuvent désormais se marier dans une mairie,où la République reconnaît donc leur couple,mais oùils ou elles ne pourraient pas se tenir la main dansles lieux publics.Aussi, si l'insulte homophobe est encore particulièrementbanalisée (« PD », « gouine »),elle est en plussouvent associée au terme « sale ». Comme sil'insulte en elle-même n'était pas assez dégradante.De nombreuses personnes ont voulu dénoncer etnous ont adressé cette année des photos detags homophobes sur des affiches de films ou despublicités.La transphobie n'est pas non plus absentedes lieux publics.«Mi-homme,mi-femme,mi-chimpanzé »,voilà ce qu'a pu entendreun homme transgenre à la sortie d'uncentre LGBT.L'année 2013 a été marquée par lesdébats autour du mariage pour tou-te-s : 29 %des cas rapportés à SOS homophobie établissentun lien, direct ou non. Espérons qu'en 2014, dansles lieux publics comme ailleurs, les personneshomosexuelles, bisexuelles et transexuelles puissentavoir la même quiétude que les personneshétérosexuelles et cisgenres (c'est-à-dire qui nesont pas transexuelles).Dans les transports publicsLéa, 19 ans, est dans le métroparisien avec sa copine.Lorsque la rame arrive à unestation, un jeune homme lesregarde et leur crie: « Allezbrûler en enfer », avant de sortirprécipitamment sur le quai.Antoine et Julien, la trentaine,rentrent en train chez eux àLille, après une journée à Paris.Ils sont assis à côté d'une famillequi lit des tracts hostiles aumariage pour tou-te-s, et quileur lance des regards méprisants.Les deux jeunes hommesne se sentent pas à l'aise etvivent un trajet très pénible.Jean et Thierry sont dansle RER B. Ils entendent deuxhommes installés derrièreeux parler du mariage pourtou-te-s. L'un dit : « Bientôton pourra se marier avec deschèvres », et l'autre répond :« Dans les pays slaves, onles envoie au goulag .» Jeanet Thierry n'osent pas lesinterpeller et ils constatentque personne n'a réagidans la rame.Cécile est dans le métro avecsa petite amie. Les deux filles


Rapport sur l'homophobie 2014 • Lieux publicséchangent un baiser. Un hommeles voit et les interpelle : « Allezfaire ça ailleurs, c'est dégueulasse,sales gouines. »Michelle et Chantal se promènentdans une rue d'unecommune à proximité de Lyon.Un homme à vélo arrive àleur hauteur et hurle : « Salesgouines.» Michelle et Chantalsont abasourdies d'un teltraitement.A la salle de sportMedhi est adhérent d'unesalle de sport parisienne.Alors qu'il fait des exercices,un autre membre le rejoint,s'approche et se moque de lui.Cet individu se retournevers un troisième sportif enlui disant que « les PD, çane devrait pas exister ».Et il ajoute même : « Il nedevrait exister que desfemmes et des putes. »L'individu va plus loin enprécisant que c’est un scandaleque « des PD fassent partiedu club ». Medhi a informéla direction du club de cetincident et a porté plainte.Louis, 34 ans, est dansle vestiaire de son club desport marseillais. Un hommesort de la douche, nu,la serviette autour du cou.Louis entend d'autresmembres : « Certes, on estentre hommes, mais onne veut pas tout voir. »Son camarade répond :« Et parfois à moitiéhomme ».FocusDans la banlieue lilloise,Marc et Alexandrese rendent en couple dans un complexe nautique.En milieu d'après-midi,alors que les deux hommesdiscutent dans un bassin,un individu qui se trouvejuste à côté d'eux les interpelle : « Sales PD, cassezvousde ma piscine avec votre mariage pour tous,allez faire des trucs de PD ailleurs. »Marc et Alexandre sont complètement surpriset répondent qu'il n'est pas question qu'ils bougent,et que s'il est gêné,c'est à lui de partir.L'hommese met alors à les éclabousser et lève le poing endirection d'Alexandre en précisant :« Casse-toi ou je te mets un pain. »Le couple,sentant la situation dégénérer,fait signe aumaître-nageur afin que celui-ci intervienne.L'homme,de plus en plus énervé, commence àinterpeller les autres personnes présentes avec detels propos : « Moi j'ai fait cinq gosses »,« Dieu acréé l'homme et la femme »,affirmant qu'il nesouhaite pas se trouver dans le même bassinque des « branleurs comme [eux] ».Le maître-nageur arrive et l'homme continue :« Ce sont ces PD qui sont en train de s'enculer. »Le maître-nageur demande alors à Marc et Alexandrede quitter le bassin.Interloqués, ils refusent,précisantau surveillant de baignade qu'ils sont les agressés etnon les agresseurs. Le ton monte davantage, et,voyant que la discussion ne mène nulle part,Marc et Alexandre sortent du bassin.L'hommequi les a insultés reste et discute avec une autrepersonne qui leur a été présentée commele directeur du complexe. Marc et son copain sontchoqués d'avoir dû quitter le bassin mais sont invitésà regagner la baignade lorsque l'agresseur s'en vafinalement : « C'est bon, je me casse d'ici, bande dePD. » Les autres baigneurs commencent à montrerdes regards très hostiles. Le couple se sent très mal àl'aise et préfère partir.


95Marc et Alexandre sont abasourdis : insultés,menacés,et pourtant invités à sortir du bassin quandl'agresseur,lui,n'est pas inquiété.Ils regrettent quela direction du complexe n'ait pas assuré leursécurité.Marc et Alexandre sont allés déposer plainte.MilitantismeRomain, homosexuel, se sentagressé à chaque fois qu'onlui tend un tract pour lesmanifestations contre lemariage pour tou-te-s.En effet, souvent le geste estaccompagné d'une parole dutype « Pour la famille ».Romain n’a pourtant pasle sentiment d'être un dangerpour « la famille », car luiaussi vient d'une famille eta une famille.Après la Marche des fiertésstrasbourgeoise, Estellerentre à pied chez elle,en compagnie de sa copine.Les deux filles se tiennent lamain mais subitement, ungroupe de jeunes hommes lessuivent, les insultent et lesmenacent : « Un bidond'essence, une allumette eton vous brûle. » Estelle etsa copine accélèrent le pas etarrivent à distancer la bande.Après un rassemblementcontre l'homophobie sur leparvis de l'Hôtel de Villede Paris, Charles et son copain,Etienne, sont dans les couloirsdu métro parisien. Ils discutentet rigolent quand ils croisentdeux individus dans lesescaliers.A voix haute, ilslancent : « Tiens, voilà deshomosexuels, fils de pute ! »Dans leur témoignage, Charleset Etienne précisent qu'ils nese tenaient pas par la mainet que les propos adressésne l'étaient qu'eu égard àleur homosexualité supposée.Ils sont choqués parle climat actuel.A Paris, Steeve rentre d'unesoirée entre amis.Troishommes s'approchent de luiet lui demandent une cigarette.Mais Steeve n'a pas decigarettes sur lui. Il se faitbloquer par les trois hommesqui lui font les poches enl'insultant de « sale PD ».Ils le mettent à terre, lui assènentun violent coup de pieddans les côtes. Ils partentavec le sac de Steeve ainsique l'ensemble de ses papiers.Il se rendra aux urgences pourfaire constater ses blessures.La soirée dégénèreKarl est un Parisien de 40 ans.Alors qu'il se trouve devant unbar gay réputé des nuitsparisiennes, il discute demanière amicale avec deuxjeunes hommes. La discussionest cordiale jusqu'au momentoù, sans aucune raisonapparente, l'ambiance changeradicalement. Ils lui balancentdes coups de poing en luidisant : « T'es gay », puiss'enfuient en courant. Karlest sonné et hébété par cetteagression. Il est inquiet faceà ce déferlement de violence.Là encore, l'agression reposesur l'orientation sexuellesupposée de Karl.Une nuit, après une soiréefestive, Florent et son copain,tous deux âgés de 19 ans, sepromènent main dans la mainà Paris. Passant devant uneboîte huppée de la capitale,ils se font interpeller par troisindividus et entendent : « Vousêtes PD ? » Le copain deFlorent reçoit un violent coupderrière la tête. Florent veuts'interposer. Il est attrapé parle col et mis à terre. Ils arriventà s'enfuir et appellentimmédiatement la police.Ils sont d'autant plus choquésque les agents de sécuritépostés devant la boîte ont faitmine de ne rien voir.Célia, âgée de 26 ans, estinstallée à la terrasse d'un barparisien avec des ami-e-s.L'une d'elles a une altercationavec une femme installée surune table à côté. Célia essayede défendre son amie.Elle s'entend répondre :« Vous êtes l'avocat de mademoiselle? Ou l'avocate ? Parceque je ne sais pas madameou monsieur, hein, monsieurmadame.»Célia,lesbienne,prend cette remarque avec


Rapport sur l'homophobie 2014 • Lieux publics© Xavier Gorceviolence et regrette qu'aucun-ede ses ami-e-s n'ait réagi.Lieux de dragueEn Vendée, Luc est sur unparking réputé être un lieude drague. Un groupe dejeunes en voiture vient luidemander une cigarette.Ils se mettent immédiatementà l'insulter et à le menacer,annonçant être là pour « casserdu PD ». Un des jeunes lui metun coup de poing en pleinefigure. Luc porte plainte et severra octroyer trois jours d'ITT.Richard se trouve dansun parc public réputé êtreun lieu de drague dansle Nord. Un homme s'approche


97de lui et lui fait un croche-pied.Immédiatement, deux autreshommes lui sautent dessuspour le neutraliser pendant quele premier va le frapper avecune force incroyable, enl'insultant. Ils lui soutirent soncode de carte bancaire et luivolent tous ses papiers,ses clés et en profitent pourpartir avec sa voiture.Traumatisé, Richard a plusieurscôtes cassées, l'arcadeouverte et son comptebancaire sera vidé.Dans la vie de tous les joursJean-Marc s'est fait suivrejusque devant chez lui à Parisaprès avoir klaxonné, pour unrefus de priorité, celui qui vas'avérer être son agresseur.En effet, alors que Jean-Marcest en bas de chez lui, l'hommesort de son véhicule, le traitede « sale PD » et lui casse lenez. Les voisins viennentimmédiatement l'aider. Suiteà cette agression, Jean-Marcsera hospitalisé deux jours etécopera de huit jours d'ITT.Alexandre a 16 ans et habite enSeine-Maritime. En sortantde son établissement scolaire,il rate son bus et fait du stoppour rentrer chez lui.Un automobiliste lui propose dele ramener. Sur le chemin,l'homme s'arrête dans unendroit isolé, prétextant vouloiruriner. Le conducteur revientavec le pantalon baissé, ilviolente Alexandre, le forceà lui faire une fellation.Tétanisé,Alexandre s'exécute.Aprèscela, le conducteur ramèneraAlexandre à proximité de chezlui. L'adolescent est rongépar la culpabilité, a peur d'avoircontracté une IST et exprimeson refus d'en parler à sesparents tellement il a honte.Axel, 18 ans, pratique la courseà pied près d'Amiens. Un jeunehomme en moto arrive à sahauteur et lui demande s'il« se prend des bites » et s'il« se tape des animaux ».


Rapport sur l'homophobie 2014Mal de vivrePlus rude la vie30%FemmeInconnuTrans 7%3%60%Hommesexe des victimes16%Inconnu25%35-50 ans17%- de 18 ans13%+ de 50 ans 11% 18% 18-24 ans25-34 ansâge des victimesÉtranger25%Inconnu3%52%Autresrégions20%Île-de-Franceorigine géographiquedégradationsvolsAgressionsphysiques6%12%Menaceschantage2%Agressionssexuelles2%51%Rejetignorance45%HomophobiesocialeDiscrimination42%23%17%InsultesHarcèlementmanifestations de l’homophobie*Inconnu2%Bi 3%Hétéro 4%91%Homoorientation sexuelle192 témoignages, correspondantà 132 cas, soit 4% du total.Prendre conscience de son homosexualité et lavivre relève parfois du parcours du combattant,surtout en 2013 dans le contexte de la violenceverbale des opposant-e-s au mariage pour tou-te-set des incidents en marge de leurs manifestations.Les témoignages sont unanimes :ces manifestationsont alimenté durablement le malaise des personnesLGBT. Pire, les slogans véhiculés ont libéré la parolehomophobe,biphobe et transphobe,et l’intoléranceen général.Si l’année 2013 a été importante pour l’avancéedes droits des homosexuel-le-s en France avecl’adoption de la loi sur le mariage pour tou-te-s,une grande partie des 192 témoignages reçus dansce contexte désignent les opposant-e-s au projet deloi, de façon plus ou moins forte et directe, commeresponsables de leur sentiment de mal-être.Plusieurspersonnes estiment que la manifestation des opposant-e-sdu 26 mai 2013, juste après la promulgationde la loi, s’apparente à un vol, à une sorte dedépossession de la victoire des personnes LGBT.Les témoignages de mal de vivre, en hausse de30 % par rapport à 2012, proviennent majoritairementd’hommes (60 % des cas). Les cas de lesbophobieet de transphobie représentent respectivement30 et 7 % de l’ensemble.* Plusieurs manifestations peuvent être identifiées sur un cas. Enconséquence, le total des manifestations est supérieur à 100 %.


99Rejeté-e-s par les autresLes personnes LGBT qui nous appellent ou nous écriventpour exprimer leur mal de vivre évoquentcouramment le rejet dont ils-elles sont victimes :cela concerne 51 % d’entre elles. Le rejet se manifestele plus souvent de manière directe, par desmoqueries voire des violences, et ce à tout momentde leur vie et dans tous les contextes. Il peut aussis’exprimer de manière plus indirecte : dans notresociété hétéronormée, l’image de l’homosexualitéest généralement négative et les préjugés sur les gayset les lesbiennes restent courants. Les homosexuelle-ssont ainsi souvent témoins de propos homophobes,dans leur entourage, dans des discourspolitiques ou dans les médias, qui, même sans êtredes attaques personnelles, peuvent êtredouloureux à entendre.Plusieurs confientleur hésitation à simplement tenir la mainde leur partenaire dans la rue.Les victimes subissent ce rejet dès leur plusjeune âge. A l’école, les cas de brimadesenvers les homosexuel-le-s ne sont pasrares. 17 % des témoignages viennent demineur-e-s,et l’évocation du suicide y est fréquente.Plusieurs personnes nous ont contactés pour évoquerle rejet qu’ils subissent de la part de leursproches, famille ou amis. Ce rejet est d’autant plusdouloureux pour des adolescent-e-s qui se découvrenttout juste homosexuel-le-s et ont encore dumal à l’accepter.Les nombreux témoignages de rejetfamilial montrent que cette homophobie estprésente dans tous les milieux sociaux, ouvriers oubourgeois, privilégiés ou modestes, aussi bien enmilieu rural que dans les grandes villes.Dans 45 % des témoignages est présente la notiond’homophobie sociale, qui prend cette annéesouvent la forme de l’opposition à l’ouverture dumariage aux personnes de même sexe, pour leréserver aux couples hétérosexuels. Ce chiffre estconséquent car il s’agit bien de 45 % qui désignentles opposant-e-s au mariage pour tou-te-s commesource principale de leur mal-être.Dans 42 % des cas,les témoignages mettent en avantles discriminations dont les personnes LGBT sontl’objet comme sources de leur mal de vivre.«L’homophobieestnormale»Elles ont lieu essentiellement dans les lieux publicsou au travail,même si l’environnement familial n’estpas en reste (lire chapitres Lieux publics, Travail etFamille).Des conséquences gravesLe rejet subi et la peur qui en découle, et la difficultéà s’accepter eux-mêmes, mènent souventles personnes gays et lesbiennes à se replier surelles-mêmes. Comme chaque année, nous recevonsde nombreux appels et courriels de personnesqui souffrent de leur solitude,ne pouvant pas parlerde leur orientation sexuelle à leur entourage, parcrainte de leurs réactions.Ce repli sur soi peut aller jusqu’à unevéritable désocialisation. Sur un planprofessionnel, des personnes LGBT nousexpliquent que leur mal de vivre leur a faitperdre leur emploi et qu’elles se retrouventaujourd’hui dans des situationsparfois très précaires. Leur vie sentimentalepeut aussi être inexistante ou serésumer à des aventures sexuelles, sansamour ni tendresse. Certaines poursuivent une viede couple hétérosexuelle qu’elles savent être uneimpasse.De même,leurs relations sociales peuventêtre limitées si elles n’arrivent pas à s’ouvrir auxautres et nouer des liens d’amitié.Les personnes qui nous contactent se sentent laplupart du temps seules et expriment le besoin deparler. Nous les écoutons ou les réorientons versdes lignes d’écoute spécialisées dans le mal de vivrevoire, quand la situation l’exige, vers des médecinsou psychologues.Pour rompre leur solitude, les personnes LGBTsouhaitent aussi rencontrer d’autres homosexuel-le-s,bisexuel-le-s ou trans qui leur ressemblentet avec qui ils-elles peuvent partager plusde choses. Nous leur conseillons alors de sortirdavantage, de fréquenter des établissements deconvivialité ou de contacter des associations LGBT.La dévalorisation, le repli sur soi et la désocialisationsont généralement des signes de dépression.Les personnes qui nous contactent sont souvent


Rapport sur l'homophobie 2014 • Mal de vivretristes, pessimistes, découragées,ce qui peut conduire dans les casextrêmes à des états suicidaires.Plusieurs d’entre elles sont traitéespour leur dépression, à l’aide demédicaments,de psychothérapiesou de séjours en hôpitaux psychiatriques.Nous avons eu connaissancede cas de suicides liés à unmal de vivre.Le mal de vivre peut être exacerbépar des facteurs tels que lamaladie et la vieillesse (lireencadré « Vieillir LGBT »), lemanque de moyens financiers,l’incompréhension des personnesque l’on a aimées, ou les stéréotypesvéhiculés le plus souventpar ignorance.Libération, lundi 22 avril 2013


101Demain ce sera plus durGuillaume a 17 ans et vit à Paris.Il se sait homosexuel et le débatsur le mariage pour tou-te-squi tourne à l’invective le terrifie.Son mal de vivre le pousseau suicide ; il laisse un messageà sa mère, en lui demandantpardon. Il explique qu’il« préfère mourir aujourd’hui,demain ce sera plus dur ».Sur Twitter, dans un messagepitoyable, Christine Boutinrépond : « Le suicide esttoujours épouvantable. Jeviens d’apprendre le suicided’un jeune hétérosexuel.Notre société va très mal. ».Je t’aime, moi non plusMarie a 53 ans et réside dansun village breton pour lequelelle a eu un coup de cœur il ya quelques années. Ecrivaineet conteuse pour enfants, elleexerce son activité professionnelledepuis chez elle.Les habitant-e-s du village, quisont parfaitement informé-e-sde son orientation sexuelle surlaquelle elle ne fait aucun secret,la rejettent, malgré ses tentativespour montrer qu’elle est unefemme comme les autres.Elle cherche à se faire accepterpar le village en participant àun grand nombre d’activités,mais rien n’y fait. Sa maisona été visitée plusieurs fois, etalors qu’elle présentait ses vœuxaux parents du propriétairede son logement, ces dernierslui ont clairement fait savoir qu’ilsne souhaitaient pas avoir affaireà « des gens comme [elle] ».Le sentiment de malaise esttoujours diffus et elle le vittrès mal, n'envisageantaucune solution.Repartir à zéro, mais pouraller oùDavid, 32 ans, en régionparisienne, est issu d’un milieucatholique intégriste. Depuistoujours, il a conscience de sonhomosexualité, mais pour éviterle rejet de la part de sa famille,il joue à l’hétéro, il s’est mariéet a une petite fille de 4 ans.Aujourd’hui, le mensonge àlui-même et à sa famille lui faitmal et lui devient insupportable.Il est écartelé entre la volontéde vivre sa vie et son angoissede faire mal à celle qui partagesa vie depuis plus de 10 ans.Il a pris sa décision.Après leretour des vacances d’été, ilprendra sur lui pour commencersa nouvelle vie, quel qu'ensera le prix.La France, pas si wunderbarDominique est française maisréside à Berlin pour des raisonsprofessionnelles.Employée ausein d’une société française,elle reste discrète sur sonorientation sexuelle.Son environnement quotidienest allemand, mais elle tientà conserver des sourcesfrançaises et/ou francophonespour son informationquotidienne.A ce sujet, lateneur des arguments desopposant-e-s au mariagepour tou-te-s la déstabilisentréellement et ses ami-e-sallemand-e-s se posent deréelles questions sur ce qu’estla France, pays que l’on ditdes droits de l’homme.Soins intensifsDaniel habite en banlieueparisienne.Agé de 39 ans,il est en couple avec soncompagnon de 50 ans,séropositif et atteint d’unehépatite. Daniel est épuisé parles 13 ans de soins qu’il vientde donner quotidiennementà son compagnon. Récemmenthospitalisé dans un servicede bon niveau, il craint dese voir interdire les visites àson compagnon par leurs deuxfamilles qui sont culpabilisantes,racistes, homophobes,alcooliques et violentes.Il a écrit plusieurs courriersau Défenseur des droits pourse renseigner sur leurs droitset aimerait pouvoir teniréloignées les deux famillesqui font front commun alorsqu’elles ne se connaissent pas.Une piste se dégage : se marier.La parole en guise de soinaprès une tentativede suicideAgé de 25 ans, Philippe vientde faire une tentative de suicideen Seine-Saint-Denis. Plusieursévénements ont été à l’originede son envie d’en finir.Alorsqu’il est en questionnement,les violences psychologiquesdes partisan-e-s de la Manifpour tous le poussent à nier soncaractère humain du fait deson orientation sexuelle.Menacé dans la rue par desindividus interpellés plus tard,il trouve une police passive danssa lutte contre l’homophobiequi lui confie qu’ « il y a d’autrespriorités ».Après son hospitalisation,le psychiatre qui le suit


Rapport sur l'homophobie 2014 • Mal de vivrelui déclare que « l’homophobieest normale » et que le problèmede Philippe n’est pas« d’être gay, mais d’être fou ».Aujourd’hui, Philippe souffre,mais il a décidé de parler pourremonter la pente.En être ou pasEn Bretagne, Pierre, 34 ans,n’assume pas ce qu’il ressentpour les hommes. Du coup,il considère que les proposhomophobes qui fusent au travaillui sont tous destinés. Etantmarié, il est pris dans undilemme de fidélité enverssa femme et attirances pourles hommes. Plus que de pouvoirse révéler un jour, il craint de toutperdre s’il décidait de vivreouvertement en accord avecses envies. Il apprend quela réponse n’est pas forcémentbinaire, homo ou hétéro, les bisexistent aussi mais doiventégalement parcourir un longchemin pour se découvrir.L’homophobie en plat du jourClaire habite dans la Loireet témoigne pour son fils,Antoine, commis de cuisinedans un restaurant lyonnais.Du fait de son orientationsexuelle présumée, son fils estharcelé par ses deux supérieureshiérarchiques qui ne le lâchentpas et le poussent à la faute.Pour « respirer » un peu, sonmédecin lui a prescrit 15 joursd’arrêt de travail. Il repousse,pour l’instant, l’idée de saisirla commission LGBT de sonsyndicat pour « ne pas faire devagues ».A cette souffrances’ajoute la perte de son père etde son beau-père, dans lamême année. Heureusement,il a le soutien de sa mère.Colère face à la manifestationdes opposant-e-sdu 13 janvier 2013Dans le Rhône, Lucien, 60 ans,et son compagnon filent le parfaitamour depuis 27 ans. Maisaujourd’hui, Lucien est en colèredu fait de l’homophobieambiante et des exactions de lamanifestation contre le mariagepour tou-te-s du 13 janvier 2013.La logorrhée des opposant-e-srenvoie Lucien à sa jeunesseà la fin des années 1960, oùl’homosexualité tombait encoresous le coup de la loi, à l’époqueoù il devait faire semblant derechercher la présence desfemmes.Ce climat lui faitcraindre pour sa sécurité, etl’adoption de la loi du mariagepour tou-te-s est devenue uneobsession, car il espère pouvoirse marier rapidement avecson compagnon pour le mettreà l’abri s’il venait à décéderavant lui.Acte authentiqueJulien est clerc de notaire enIlle-et-Vilaine, il a besoin d’êtreécouté et conseillé à propos duharcèlement dont il est victimeà son travail.Alors qu’il relateles faits, il pleure et en vient à laconclusion qu’il ne lui est paspossible de retourner travaillertellement sa mise à l’écart lui estpénible. De par leurs fonctions,ses collègues ont consulté sonacte d’état civil et se sont aperçusqu’il était pacsé avec un homme.Parfaitement informés du fait queleur comportement n'est pascorrect, ses collègues sontodieux en l’absence des notaires,puis adoptent une attitudenormale dès qu'ils sont deretour au bureau. Julien est leresponsable hiérarchique d’unecollaboratrice au sein de l’étude,et cette dernière n’a cessé del’insulter jusqu’à porter plaintecontre lui pour harcèlementsexuel.Ayant expliqué à la policequ’il est gay et que les faits nesont donc pas avérés, les chargescontre lui ont été abandonnéeset l’employée a été licenciée.Malgré cela, il est considérécomme un pestiféré et unepersonne à problèmes. Julienest décidé à se battre et vaconsigner quotidiennementles faits dont il est témoinet victime.


103Vieillir LGBTSOS homophobie a reçu en 2013 6% d’appels ettémoignages de victimes de plus de 50 ans,personnes notamment surreprésentées dans lestémoignages de gayphobie (8%) et transphobie(17%), et dans les contextes voisinage (20%), malde vivre (11%) et travail (11%).Il est intéressant de constater que la proportiondes victimes de plus de 50 ans est stable : toujourssituée entre 7 et 10 % au fil des Rapports annuels,depuis 1997.L'une des hypothèses pouvant expliquer ceconstat serait que les seniors ne se reconnaissentpas ou plus dans le milieu LGBT, qu'il soit convivialou associatif. Cette hypothèse est étayée par uneétude récente des Gai-e-s Retraité-e-s.Or, les seniors LGBT ont tout intérêt à bénéficierdu soutien du milieu associatif – que ce soit pourrompre un isolement ou pour être soutenu-e-sen cas de vécu LGBTphobe. Cela est d'autant plusvrai pour les personnes trans dont le coming outpeut se révéler plus tardif.Il est donc fondamental que les associationsLGBT, dont SOS homophobie, poursuivent leurouverture à tou-te-s, quel que soit l'âge, et aientà cet effet une communication explicitementinclusive.C'est pourquoi SOS homophobie a prévu dansses objectifs, dans le cadre de la convention desoutien à la ligne d'écoute par le ministère desDroits des femmes, de communiquer davantageà destination des personnes de plus de 50 ans.Cela posé, il convient également de garder àl'esprit que les seniors d'aujourd'hui ont pu êtreexposé-e-s au cours de leur passé à d'autrescontextes de LGBTphobies.Au-delà des actes de violence et de discriminationémanant de personnes, ces populations ontégalement été jusqu'à récemment, voire sontencore fortement, pour les personnes trans, exposéesà un contexte institutionnel vécu commeune violence.Il en résulte l'intérêt de développer par desétudes et enquêtes publiques la connaissancedes LGBTphobies vécues par les personnes avançanten âge, et notamment d'intégrer une focaleLGBT dans les études sur le suicide des personnesâgées.En outre, les LGBTphobies vécues de la partdes personnels de santé peuvent conduire lespersonnes LGBT à une très forte vigilance en seretrouvant dans un environnement où leurquotidien est cadré par le personnel soignant(lire chapitre Santé).Enfin, l'existence dans les témoignages recueillispar SOS homophobie de situations de maltraitancesde personnes LGBT en milieu hospitalier oude problèmes de discrimination homophobe autravail pour des personnes en EHPAD doiventconduire à une vigilance quant au risque deviolences LGBTphobes en établissements.Compte tenu des éléments ci-dessus, il estprimordial de permettre à ces personnes d'avoirun cadre de vie où leur orientation sexuelle ouleur identité de genre sera intégrée, quel que soitleur choix de lieu de vie.Cela souligne entre autres la nécessité de formerles auxiliaires de vie et les personnels d'EHPADcontre les LGBTphobies et de prévoir pour lesétablissements une charte d'accueil inclusivequelle que soit l'orientation sexuelle ou l'identitéde genre de la personne, tout en faisant connaîtrele numéro de la ligne d'écoute de SOS homophobieen ces lieux.C'est le fil des réflexions qui a animé SOShomophobie lors de sa mission conduite avecle groupe SOS et Aides, mission confiée par laministre déléguée chargée des Personnes âgéeset de l'Autonomie 1 .1. http://www.sos-homophobie.org/~soshomop/sites/default/files/rapport_vieillessement_des_personnes_lgbt.pdf


Rapport sur l'homophobie 201443% régionsAutresÎle-de-France31%InconnuMédias-CommunicationL’homosexualité fait son coming out23%Inconnu23%Femme54%Hommesexe des victimesInconnu27%18-24 ans32%+ de 50 ans 5% 23%25-34 ans13%35-49 ansâge des victimes26%origine géographiqueInsultes63%54%Rejetignorance29%Diffamationmanifestations de l’homophobie*Autres12%ThéâtreSpectacle4%TV44%18%PresseInternetContextes22%Radio78 témoignages, correspondantà 78 cas, soit 2 % du total.L’actualité autour du mariage pour tou-te-s apermis en 2013 une visibilité sans précédent despersonnes LGBT dans les médias, et si cetteannée ne se traduit pas par une augmentation destémoignages par rapport aux années précédentes(78 cette année,contre 82 en 2012),le fait marquantest à chercher du côté de l’âge des victimes.En effet,la tranche d’âge des 18-24 ans est passée en un ande 10 à 32 % !Avec une forte médiatisation des débats sur lemariage pour tou-te-s, la télévision redevient en2013 la première source des témoignages ducontexte (44 % des témoignages, contre 17 %l’année dernière),devant la radio (22 %,contre 32 %en 2012).Dès le début de l’année,plusieurs personnes nous ontcontactés pour déplorer une différence de traitementmédiatique des manifestations des partisan-e-s etdes opposant-e-s au mariage pour tou-te-s.Le députéPS des Hauts-de-Seine Sébastien Pietrasanta s’interrogeen ce sens : « Y a-t-il un traitement différenciédes manifestations pro et anti-mariage pour tou-te-sde la part des médias audiovisuels ?» Il décided’ailleurs d’alerter le CSA à propos de la faible couverturemédiatique de la manifestation en faveurdu projet de loi le dimanche 27 janvier, les chaînesd’information en continu ayant privilégié l’arrivéedu Vendée Globe, alors qu’elles avaient largementcouvert la manifestation des opposant-e-s quinze* Plusieurs manifestations peuvent être identifiées sur un cas. Enconséquence, le total des manifestations est supérieur à 100 %.


105jours auparavant. Principale chaîne visée, BFM TVs’est contentée de répondre que depuis le débutdes débats, elle avait donné la parole aussi bien auxopposant-e-s qu’aux partisan-e-s du mariage pourtou-te-s.L’homophobie dans les médias se caractérisesouvent par une violence verbale, et notammentpar l’amalgame récurrent fait entre homosexualitéet pédophilie.Six personnes nous ont ainsi contactés pour noussignaler un micro-trottoir diffusé sur Canal + en mai2013, dans lequel une opposante aumariage pour tou-te-s qui a marquéles esprits donne ses arguments contrele projet de loi en présentant les homosexuel-le-scomme des pédophiles.Lors d’une manifestation contre le mariagepour tou-te-s, une participante a aussidéclaré devant les caméras que « la loiTaubira, c’est la légalisation de la pédophilie», et d’ajouter que « sur Internet,il y a des sites où on le dit. En France, il y ades gens fatigués d’aller en Thaïlande poursodomiser des enfants. Grâce à la loiTaubira, on se les commande, on se lesachète. Ca va plus vite. Vous n’avez pas compris ? »De tels propos ont soulevé une indignation danstoutes les régions de France sans distinction d’âge.Les émissions grand public retiennent d’autant plusl’attention lorsque l’homophobie y est véhiculéepar des personnalités connues de tou-te-s.C’est le cas des propos gayphobes tenus parAlain Delon dans l’émission « C à vous » diffuséele 2 septembre sur France 5 (6 témoignages) :« Je n’ai rien contre les gays qui se mettent ensemble,mais pour moi, c’est contre-nature… », avantd’ajouter : « Ce que je ne veux surtout pas,c’est qu’ilsadoptent… »Alain Delon devrait peut-être reconnaître tout cequ’il doit aux homosexuel-le-s,et particulièrementà Luchino Visconti qui lui a donné ses plus beauxrôles au début de sa carrière, dans Le Guépard etRocco et ses frères.« Il y a desplans où jeme trouvenettementmoins belle.On diraitunelesbienne »Ces propos ont suscité de nombreuses réactions,à commencer par la fille de l’acteur qui a pris sesdistances sur Twitter, et par son fils Anthony qui aparlé d’une « grosse boulette ». Sur RMC Radio,Christine Boutin déclarait le 27 mai à propos de laPalme d’or cannoise attribuée à La Vie d’Adèle :« Aujourd’hui,la mode, c’est les gays,on est envahispar les gays. » Il serait tentant de répondre à MmeBoutin, Rapports annuels précédents à l’appui, queles personnes LGBT sont au contraire souvent lesgrandes absentes des médias.Dans le domaine des séries télévisées,comme nous l’avions déjà signalé l’annéedernière, Plus belle la vie est le seul feuilletonqui a osé mettre en scène un couplehomosexuel, et même son mariage cetété. A titre de comparaison,aucun couplehomosexuel n’est présent dans Scènes deménages diffusé sur M6.Pourtant, au début des années 2000, desséries comme Clara Sheller sur France 2et Les Bleus sur M6 offraient une boufféed’oxygène. Mais ces séries ont disparu etles chaînes françaises accusent un vrairetard par rapport aux séries américaines en matièrede représentation des minorités.Un personnage LGBT n’est par ailleurs jamais lehéros ou l’héroïne d’une série ou d’un film.Il suffit de se rappeler des réactions au dernier JamesBond, Skyfall, dans lequel la première entrevue entreDaniel Craig et Javier Bardem (le méchant), riche ensous-entendus homosexuels, a fait l’effet d’unebombe dans le monde des super-héros et de notresociété hétérocentrée.Un James Bond gay ??? Jamais,non jamais !Les homosexuel-le-s sont aussi les grand-e-sabsent-e-s de la publicité. Et lorsqu’ils-elles sonttout de même présent-e-s, ils-elles sont généralementprésenté-e-s de manière caricaturale,ou invisibilisé-e-saux yeux du grand public.Ainsi, hormisune publicité de Renault, dans laquelle un motardarrête un automobiliste et lui donne un papier avec


Rapport sur l'homophobie 2014 • Médias-Communicationson numéro de téléphone en guise d’amende, onnotera qu’un puma gay est représenté dans unepublicité d’Orangina.De la même manière, un couple homosexuel estprésent dans l’une des dernières campagnes de laMAIF, mais on ne le voit que quelquessecondes, et il y a de fortes chances pourque,si vous n’êtes pas gay (et en couple),vous ayez pris les deux hommes pour descolocataires. Une manière de parler auxhomos sans se mettre à dos le reste dela population ?Il est vrai que les personnes LGBT ontbénéficié cette année d’une visibilité sansprécédent, mais il en résulte une image dégradée.Dans les débats sur le mariage pour tou-te-s, quece soit à la radio, à la télévision, ou encore dansla presse, il a fallu attendre longtemps avantd’entendre poser la question essentielle : « Et si onparlait d’amour ? » Oui, il a fallu attendre la célébrationdu mariage de Vincent et Bruno, le 29 maià Montpellier, pour qu’enfin le mot « amour » soitprononcé.Oui,la confusion est toujours très grande« On n’en apas fini avecla questionhomosexuelle»et l’amalgame fait entre relation homosexuelle etrelation sexuelle est quasi systématique.C’est pourquoi l’autorisation de diffuser dans lesclasses de CM1 et CM2,après deux ans de polémiqueet d’interdiction, le film Le Baiser de la lune peutsonner comme une victoire. L’Educationnationale a estimé que c’est à partir de10 ans que les enfants doivent apprendreet débattre de l’homosexualité.Ce courtmétraged’animation a pour but d’expliquerles relations sentimentaleshomosexuelles aux enfants,à travers l’histoirede deux poissons mâles amoureuxl’un de l’autre. « Le film parle d’amour,de la pluralité des relations amoureuses.Pas de sexualité. Ce sont les adultes qui réduisentl’homosexualité à la relation sexuelle », expliqueSébastien Watel, le réalisateur.Oui, replacer dès le plus jeune âge la question del’amour au centre des rapports humains peut donnerun nouvel espoir aux personnes LGBT dans leurcombat pour la reconnaissance et l’acceptation detoutes les différences.Mariage pour tou-te-set homoparentalité :la guerre des intolérancesSur I-Télé, Eric Zemmourétale une nouvelle fois sonhomophobie sans complexeen fustigeant le « lobby gay »en qualifiant les familleshomoparentales de « mytheidéologique ». Il finit sa diatribeen faisant le parallèle entremariage de couples homoset inceste, polygamie :« A partir du moment oùl’amour est le seul critèredu mariage, on peut toutaccepter : et la polygamie,et l’inceste, et le mariage desfrères et sœurs. Moi, j’aimema fille, je vais l’épouser. »Sur France Inter, MichelSchneider, écrivain, déclare ausujet des femmes lesbiennesayant des enfants :« Il y a, dans la positiond’avoir des enfants sans rentreren rapport avec le sexe (ausens anatomique) masculin,une peur, une haine, unecrainte, tout ce qu’on voudra,une phobie du membre viril,qui fait que l’on essaie d’avoirle produit de l’accouplementsans avoir à passer par l’acte.Là, il y a quand même un fantasme,on a envie de dire"Mesdames, si vous voulezavoir des enfants, il y a unmoyen très simple et trèséconomique et qui ne coûterien à personne, c’est lerapport sexuel avec unhomme en chair et en os".Pourquoi avoir besoin dePMA ? Pourquoi vouloirêtre mère quand on a choisiune sexualité qui l’interdit,qui l’empêche ? »Sur France Inter toujours,la rediffusion de l’émissionparodique « A votre écoute,coûte que coûte », déjà citéel’an passé, suscite toujoursautant d’émoi auprès desauditeurs-trices (5 témoignages),qui n’ont pas saisiqu’il s’agissait d’une parodieet ont pris au pied de la lettreles propos rediffusés.


107Lors de la rediffusion de cetteémission, aucune précautionn’a été prise par la stationde radio pour préciser cecaractère parodique, alorsque SOS homophobie avaitadressé un courrier afin dedemander une mise en gardedans ce sens. En conséquence,de nombreuses personnesLGBT continuent de se sentirblessées et humiliées.Sur la Chaîne parlementaire,Jean-François Kahn, journalisteet écrivain, a dit respecter lesmanifestant-e-s anti-mariagepour tou-te-s : « On a eu tortde réduire à l’état de ringardet d’homophobe toutepersonne opposée à ce texte.Cela donne de l’importanceà cette manifestation. Je nesuis pas un "ravi" du mariagepour tou-te-s. La société,socialement fracturée, avaitellevraiment besoin de cettedéchirure supplémentaire ?»Homosexualitéet pédophilieSur Radio Courtoisie, on peutentendre ce genre de proposde la part d’un chroniqueur :« Il y a un lien entre homosexualitémasculine etpédophilie au moyen del’étymologie.» Et il affirmequ’autoriser l’adoption dejeunes garçons par deshomosexuels masculinspourrait faire courir un dangerphysique à ces enfants.Sur W9, il ne s’agit pas d’unehomophobie explicite maisplutôt d’une présentationtendancieuse lors de la diffusiond’un reportage très racoleur.Des journalistes et la policevont sur une aire de draguehomo et sous-entendent queles hommes ne se soucientpas des enfants qui jouent àproximité. Le montage vidéoet les propos répétés laissentà penser que les homos nese cachent pas lors de leursrelations sexuelles et quecelles-ci ont lieu à proximitédes enfants. L’heure à laquelleles scènes ont été filméesn’est pas indiquée.Un présentateur du Journalde 13 heures sur France Interfait l’amalgame entre homosexualitéet pédophilie.A propos de la révélationd’un scandale qui touchel’Eglise écossaise et desprêtres mis en cause pourpédophilie, il a conclu endisant : « On n’en a pas finiavec la question homosexuelle.» Une confusionhonteuse ! Il a fait cetamalgame dans les titresdu journal, puis dans ledéveloppement du sujetconsacré à cette affaire.De l’homophobie ordinaireAu JT de 13 heures de France 2,Guillaume Gibault, fondateurde la marque Le Slip français,était interrogé sur sa réussite.Il a montré la une d’un numérospécial des Echos consacréaux entrepreneurs et acteursde l’économie française.Ouvrant le journal, il montreune trentaine de personnalitésdu monde de l’économie(parmi lesquelles il figure) etprécise, pour montrerque c’est une consécrationque de figurer parmi ces gens :« Ce n’est pas des petits PD ! »Dans l’émission « SantéMagazine », une animatricedit à Michel Cymes de remplirune fiole. Ce dernier se metalors à imiter ce qu’il croit êtreun homosexuel en prenantune voix aiguë et en effectuantun mouvement de la mainqui ne tient pas le thermos.L’animatrice le frappe alorssur la tête pour le forcer àarrêter.Récemment, en direct surl’antenne de RTBF, MichelGalabru a dérapé lorsque,interrogé sur le tournaged’un téléfilm, il a évoquédes films précédents :« Des catastrophes », selon lui,« ils étaient tous PD ».Le service public ne nousépargne pas non plusLe présentateur de télévisionNagui a encore tenu despropos homophobes.Dans « Tout le monde veutprendre sa place », jeu diffuséà midi sur France 2, Naguipose la question suivante àun candidat : « Quelle liqueurparfumée à l’anis estconsidérée comme l’apéritifnational grec ? », puis ajoute :« A l’anis, car pour les Grecson aurait pu s’attendre à l’a… »Propos plus que déplacéspour Nagui qui avait déjà,entre autres, fait savoir qu’ilne souhaiterait pas travailler


Rapport sur l'homophobie 2014 • Médias-Communication« avec un collaborateurqui aurait viré sa cuti ».SpectacleHomme de spectacle,Dieudonné donne dans lasurenchère. Dans sa dernièrevidéo, il parle de manièredégradante du mariage pourtou-te-s. Et dit clairementqu’il souhaite que les gens quivoient son spectacle « Mariagepour tous » soient « homovores »c'est-à-dire « qu’ils mangentdu PD » selon ses proprestermes…SportAlors qu’il commentait pourFrance Bleu Provence un matchde football entre Marseille etLyon, Stéphane Tapie a qualifiéle président de l’OM,VincentLabrune, de « tafiole » et« branleur ».Homosexualité et cinéma :« Je t’aime moi non plus »Si la Palme d’or attribuéeà La Vie d’Adèle a été terniesuite aux attaques de LéaSeydoux à l’encontre duréalisateur Abdellatif Kechiche,c’est aussi dans la bouche del’actrice que le glamour cannoisa fait place à des mots navrantsconcernant son rôle :« Par moments, je me suistrouvée jolie, sexy, mais il y ades plans où je me trouvenettement moins belle. Ondirait une lesbienne (rires). »Propos plus que malheureuxmais qui sont encore et toujoursle reflet d’une société ankyloséepar la puissance des clichés.Concernant L’Inconnu du lac,c’est l’affiche du film qui a étécensurée par les mairies deVersailles et de Saint-Cloud.Il s’agit d’une affiche colorée,dessinée dans un style naïf,sur laquelle deux hommess’embrassent.A l’arrière,on distingue vaguementd’autres hommes nus, dontl’un a la tête entre les jambesd’un autre.On ne peut s’empêcherde remarquer que leretrait de cette affiche tombeen plein débat sur la loi surle mariage pour tou-te-s.Le réalisateur, Alain Guiraudie,parle d’« homophobieordinaire ».Toujours est-il qu’il s’agit d’unacte de censure perpétré pardeux maires dans deux villesprécises, et on ne peut queconstater que la rivalité entreprogressistes et réactionnairess’accroît.Cependant, l’année 2013 auraaussi été marquée par desparoles positives et des prisesde position courageuses.Aux antipodes des déclarationshomophobes, l’interviewaccordée par l’acteur MichaelDouglas au journal 20 Minutes.Dans le film Ma vie avecLiberace, Steven Soderbergh luioffre le rôle d’un homosexuelflamboyant. Même s’il pensequ’à ce stade de sa carrière,la question de la prise de risqueconcernant son image ne sepose plus, il déclare être fierd’avoir cette œuvre dans safilmographie. Il affirme n’avoireu aucun mal à se glisser dansla peau de son personnagequi vit une histoire d’amouravec un homme, une histoirebouleversante qui nous faitpartager les sentimentsprofonds entre deux êtresque le temps va séparer.James Franco, quant à lui,à l’occasion de la sortie du filmInterior. Leather Bar, nousmontre sa fascination pourle cuir et recrée une scène,coupée au montage à l'époquecar trop provocante, deCruising, film de WilliamFriedkin avec Al Pacino, dontl’action se situe dans le milieugay sadomaso des années1980. Qui d’autre que luiaurait pu déclarer avec sonplus beau sourire : « Ne pasêtre gay est le grand regretde ma vie ! »Et puis, grâce à GuillaumeGallienne, nous avons pu finircette année 2013 dans ungrand éclat de rire où l’émotiontrouve sa place.Avec sonhilarant Les garçons etGuillaume, à table !, GuillaumeGallienne nous raconte sonhistoire en interprétant sonpersonnage mais aussi etsurtout en incarnant lepersonnage de sa mère avecqui il a entretenu une relationfusionnelle. « Tout le mondepensait que j’étais un PDrefoulé », dit-il. Et bien pasdu tout, même s’il affirmeque « La normalité pour [lui],ça aurait été d’être homosexuel».


109La parole à...L’Associationdes journalistesLGBTL'Association des journalistes LGBT (AJL) est néed'un constat sur le traitement médiatique du projetde loi « mariage pour tous » : l'homophobieparaissait considérée non plus comme un délit,mais comme une simple opinion. En 2013, et lorsdes derniers mois de l'année précédente, nombrede médias ont offert une véritable tribune auxopposants à la loi Taubira. Même s'ils n'en ont paseu l'intention ou conscience, ils ont contribué àlibérer la parole homophobe, tendant à légitimerles propos haineux envers les LGBT. Cela nous afait réagir, en tant que journalistes, mais aussi entant que lesbiennes, gays, bi-e-s ou trans.Afin de nous faire entendre, nous nous sommesd'abord constitué-e-s en collectif. Nous avonsrédigé une tribune, intitulée « Pour une associationdes journalistes LGBT », publiée par Libération le16 mai et reprise par d'autres médias. Nous yannoncions notre volonté d'« améliorer la couverturemédiatique des questions LGBT », à l'image dutravail effectué, depuis 1990, aux Etats-Unis, par laNational Lesbian and Gay Journalists Association(NLGJA) qui compte aujourd'hui une centaine demembres.Nous souhaitons mettre l'accent sur la pédagogiepour remédier aux clichés, préjugés et abus delangage de nos confrères et consœurs concernantles questions liées aux LGBT. Nous refusons denous poser en censeurs ou en donneurs-euses deleçon, mais proposons notre aide à celles et ceuxqui ont la volonté de mieux comprendre, et detraiter avec davantage de pertinence ces problématiques.Une première réalisation concrète seraéditée prochainement : un « kit des bonnes pratiques», qui, entre autres, recensera les phrases àéviter (« Il a avoué son homosexualité », « Sonhomosexualité est un choix de vie »...), souligneral'importance de donner une plus grande visibilitéà la situation des lesbiennes, ou sensibilisera à latransphobie ordinaire contenue dans certainesformulations journalistiques.Notre ambition est également de contribuer à lavisibilité des personnes LGBT dans l’espace publicet de réagir lorsque l'actualité l'exigera.La création de l'association a été publiée auJournal officiel du 8 février 2014. L'AJL est ouverteà tous les professionnels des médias sans distinctionquant à leur orientation sexuelle et/ou leuridentité de genre.AJLSite : ajlgbt.infoContact : contact@ajlgbt.info


Rapport sur l'homophobie 2014Milieu scolaire-EnseignementsupérieurHomophobie à la récréInconnu 14%Trans2%24%Femme60%Hommesexe des victimes- de 18 ans22%Inconnu 36%35-50 ans8%10% 25-34 ansâge des victimes21%18-24 ansInconnu13% 26%17%Inconnu68%61% Île-de- France ÉlèveAutresétudiant-e13%régions2%Autresorigine géographiquestatut des victimesProfesseur-eOutingDégradations/Vols4%4%Insultes51%Rejetignorance47%20%Diffamation18%Harcèlement8% 15% 17%Agressions 13%HomophobiephysiquesMenaces socialeDiscrimination chantagemanifestations de l’homophobie*Inconnu4%65% 15%Élève8%étudiant-e8% GUDProfesseur-eDirectionPersonnelenseignantauteur-e-s de l’agression20%Inconnu 24%EnseignementAutres2%École primaire33%Lycée3%supérieur18%Collègeniveau d’études118 témoignages, correspondantà 110 cas, soit 3% du total.Poursuivant la triste tendance observée cesdernières années, le nombre de témoignagesrelatant des actes homophobes, biphobeset transphobes commis en milieu scolaire a denouveau augmenté en 2013, de près de 30 % (110cas, contre 88 en 2012).Logiquement,les victimes d'intolérance liée à l'orientationsexuelle et à l’identité de genre dans le milieuscolaire sont très majoritairement élèves et étudiante-s,souvent âgé-e-s de moins de 18 ans (36 %).Toujours difficiles à vivre pour ceux et celles quiles subissent, les LGBTphobies peuvent prendre unedimension plus destructrice encore lorsqu'ellestouchent des adolescent-e-s. En effet, leur identitépersonnelle étant encore en construction, ceuxcelles-cisont généralement des cibles plus faciles àatteindre par des attaques morales et physiques liéesà leur orientation sexuelle ou identité de genre.De même, la majorité de ces agressions sont commisespar d'autres élèves ou étudiant-e-s (dans65 % des témoignages), le plus souvent issu-e-s dela même école ou classe que la victime.Dans la lignéedes observations faites les années précédentes,ces agressions consistent surtout en des insultes* Plusieurs manifestations peuvent être identifiées sur un cas.En conséquence, le total des manifestations est supérieur à100 %.


111prononcées à l'égard de la victime (51 %), quis’accompagnent parfois d'une réaction de rejet(47 %), voire de menaces et de chantage (15 %).Ces actes se manifestent parfois de manière répétée,sous forme de harcèlement (18%),répétant d’autantla souffrance éprouvée par la victime.Il est important de noter qu'une large partie de cesjeunes victimes mettent un point d'honneur toutparticulier à dissimuler leur orientation sexuelle ouidentité de genre à leur famille, par crainte d'être denouveau rejetées, ou par doute sur leur propre identité.Ne pouvant se confier qu'à très peu, voire àaucune personne de confiance, les jeunes victimespeuvent progressivement se replier sur elles-mêmeset aller jusqu'à refuser les mains qui leur sont tendues.Parmi les témoignages reçus cette année parnotre association, certains provenaientde parents inquiets quant à la santé physiquede leur enfant homosexuel-le,celuicelle-cipouvant avoir tendance à moinss'alimenter ou à s'enfermer dans sachambre. Parallèlement, certaines victimesde cette tranche d'âge nous ontcontactés et reconnaissent souffrir detroubles du sommeil et d'anxiété sociale,ou se refermer sur elles-mêmes de façonexcessive. Dans le pire des cas, certainesnous confiaient avoir songé à la fugueou vouloir mettre fin à leurs jours… Cette annéeencore, plusieurs nous ont confié avoir déjà commisune tentative de suicide.Ce n'est,bien heureusement,pas un fait présent dansla majorité des cas qui nous parviennent.Mais l'enviede se suicider (généralement vue comme la seule issuepossible par les victimes) est explicitement présentedans près de 10 % des témoignages de personnes demoins de 25 ans.Cette donnée ne peut évidemmentpas être prise à la légère. Ignorer les LGBTphobies àl'école,tout comme ne pas chercher à les reconnaître,revient à tourner le dos à ces jeunes.Particularité de cette année, bon nombre des casqui nous ont été rapportés se sont déroulés dans leclimat du débat sur le mariage pour tou-te-s. Il estde ce fait légitime de penser que l'ampleur prise parce débat a facilité l'intrusion de l'homophobie, de la«Je suisjuste unefille quitombeamoureusedes filles»biphobie et de la transphobie chez les plus jeunesau sein même de l’école. En effet, de trop nombreuxtermes insultants envers les personnes LGBT tendentencore à se banaliser. De plus, certain-e-s jeunesauteur-e-s des agressions qui nous sont rapportéesont certainement un esprit encore malléable,parfois modelé par leurs familles, leurs proches oupar les médias.Notons par ailleurs que lorsque l'auteur-e d’unel'agression est un-e membre du personnel del'Education nationale (23% des cas),l'acte LGBTphoberapporté a quasi systématiquement lieu dans un établissementprivé confessionnel. Dans ce cas, l'acteen question prend généralement la forme d'unediscrimination ou d'insultes à peine voilées etglissées,par exemple,dans un discours traitantd'éducation sexuelle ou du débat surle mariage pour tou-te-s.Bien entendu,les violences homophobes,biphobes et transphobes à l'école ne touchentpas uniquement les étudiant-e-s.En effet, près de 13 % des victimes sontdes professeur-e-s ou membres dupersonnel éducatif. Bien qu'il s'agisse enmajorité de gays,il ne se démarque aucunprofil type de victimes.Ces victimes membres du personnel de l'Educationnationale, à l'instar des victimes étudiantes,sont touchées par des attaques venant aussi biend'étudiant-e-s que de leurs pairs. De même, lesviolences sont principalement de nature morale.A ce titre, les témoignages provenant de professeur-e-sne comportent que rarement des violencesphysiques.En réaction à ces agressions, les victimes peuventsouvent perdre confiance en elles, jusqu'à se sentirréellement mal à l'aise en présence de leurs propresélèves.Parallèlement,l’ambiance de travail avec leurscollègues peut se détériorer, en particulier si l'un-edes collègues est agresseur-e.De plus,poursuivant une autre tendance déjà observéeles années précédentes, certaines victimes de mots


Rapport sur l'homophobie 2014 • Milieu scolaireCommentaires d’élèves, intervention de SOS homophobie en milieu scolaire.


113


Rapport sur l'homophobie 2014 • Milieu scolaireou actes à visée homophobe, biphobe et, plus rarement,transphobe ne sont autres que des parentsd'élèves. En effet, une petite partie des témoignagesreçus et traités cette année (4 %) nous rappellent quele foyer homoparental d'un-e enfant peut aussiconduire celui-celle-ci à être victime d'intolérancedans son établissement scolaire. Aux yeux de sescamarades de classe, l'enfant d'homosexuel-le-s nepeut en effet que l'être à son tour.Enfin, 8 % des témoignages ont reporté que leGroupe union défense (GUD), syndicat étudiantd’extrême droite, publiait et répandait toujoursdes images et propos homophobes.SOS homophobie réalise depuis dix ans des interventionsen milieu scolaire auprès de collégien-ne-s etlycéen-ne-s afin de déconstruire les stéréotypes etles idées reçues qui forment le terreau de l’homophobie.Pour ces actions, SOS homophobie disposed’un agrément national du ministère de l’Educationnationale, ainsi que d’agréments au sein des académiesde Créteil, Paris et Strasbourg. Durant l’annéescolaire 2012-2013,nos intervenant-e-s ont ainsi sensibiliséplus de 15 000 élèves dans 550 classes danstoute la France. La progression est particulièrementimportante dans les régions hors Ile-de-France,représentantaujourd’hui 67 % des classes et 72 % desélèves sensibilisé-e-s, contre 45 % des classes et desélèves il y a deux ans.© Xavier Gorce


115Frères par la nature,étrangers par l'éducationDamien, 19 ans, témoigneavoir un jour reçu un très grandnombre de documents etpolycopiés dénonçantl'homosexualité et l'homoparentalitéde la part de sonprofesseur de philosophie.S'affichant clairement commehomosexuel, il a été la premièrevictime de la vague d'homophobieengendrée par cetteaction.Après avoir été victimede discrimination de la partde son professeur, il s’est plaintauprès de la direction de sonétablissement scolaire etnous dit vouloir entamer unedémarche plus officielle afind'obtenir « un peu de justice ».Depuis, le climat s'est encoredégradé, les propos homophobesdevenant plus durset les élèves se contentantde les approuver.Pierre suit un CAP et nousreporte subir des remarquesdéplacées à propos de sa façonde s'habiller et de se coiffer.Le directeur de son établissementscolaire est allé jusqu'àlui interdire de « traîner avec[s]on mec devant l'école ».Pierre a déposé plainte auprèsdu procureur de la République,accompagné par une vingtainede personnes.Crise adolescenteRoxanne est actuellementlycéenne, en classe de première.Elle nous écrit pour nous parlerdu harcèlement qu'elle a subitrois ans auparavant, quandelle était en troisième.Attirée par une autre fille, elletaisait son orientation sexuelle.Cependant, elle a fini par êtredécouverte par sa classe,entraînant une série d'insulteset d'agressions à son encontre.Elle nous raconte notammentavoir été victime de violencesphysiques (coups et crachats)et s'être fait taguer son casierà plusieurs reprises.Après avoirdû redoubler son année scolaire,elle a de nouveau eu affaireà l'un de ses camarades declasse qui, accompagné dequelques amis, n'a pas hésitéà la frapper.« Je me suisretrouvée avec des hématomesdans le dos. Ma mère ne les ajamais vus », nous confie-t-elle.Par crainte, Roxanne restedésormais seule et nous précisepar ailleurs que ses parentsne seront jamais au courantde son orientation sexuelle.Maria est une lesbienne de17 ans qui subit « l'immaturitéet la bêtise » des élèves deson lycée. Elle se sent agresséepar les remarques homophobesqu'elle entend autour d'elle(« Ils se comportent commedes singes », «Les lesbiennes,y'a rien de plus dégueulasse»...),ne se sent pas àsa place et ne sait pas vers quise tourner pour en parler.Elle qualifie ce qu'elle subit depersécution, et estime, à justetitre, ne pas mériter ça.« Je suisjuste une fille qui tombe amoureusedes filles », nous dit-elle.Elève dans le secondaire,Thomas est constammentvictime de violence physiqueet mentale de la part de sescamarades. Il parle de coupsreçus dans les couloirs, de noteshomophobes envoyées en cours,et de diffamations faites à sonsujet par un autre garçon desa classe. Le comportement desautres élèves de sa classe estallé si loin qu'il nous dit mêmeavoir songé à la fugue, et penserencore sérieusement au suicide.Une mère inquiète nouscontacte pour nous parler desa fille, Sophie, victime d'homophobiedans son établissementscolaire. Sophie est la cible d'unharcèlement commis par uneautre jeune fille s'étant d'abordfait passer pour une amie,puis pour sa petite amie.Par la suite, les insultes,moqueries et violences entreles deux filles sont devenuescourantes, à tel point que Sophierefuse d'aller au collège, a perduénormément de poids, refusede sortir de sa chambre et parlemême de mettre fin à ses jours.Julia, lycéenne, nous confie avoirfait son premier coming out à lafin de son année de quatrièmeauprès de l'une de ses amiesproches. Celle-ci a, heureusement,bien pris la situation etson comportement n'a paschangé envers Julia. Petit à petit,d'autres de ses ami-e-s sontmis au courant et un surveillantdu collège vient même luidemander en public « s'il estvrai qu'[elle] es[t] gouine ».Elle finit par lui dire la vérité etla nouvelle se répand rapidementdans l'établissement,


Rapport sur l'homophobie 2014 • Milieu scolaireau point qu'elle reçoit desinsultes et remarques déplacées.Sa situation empire quandtrois garçons prennent l'habitudede la plaquer contre des murspour la tripoter afin de « lafaire changer d'avis sur leshommes ». Au bout d'unmoment, d'autres élèves luilancent même des pierres.C'est un de ses professeurs quifinit par venir à son secoursen convoquant les élèves et enfaisant en sorte qu'ils-elles nerecommencent plus.Aujourd'hui,Julia est en terminale et, bienqu'il lui arrive de se dire que« naître hétérosexuelle auraitété plus facile », elle estimeaussi « être ce qu'elle est » et« qu'il ne faut jamais se cacher ».N'oubliez pas votrepancarte pour le prochaincoursLouis nous contacte pour nousinformer que l'établissementcatholique dans lequel estscolarisée sa nièce a organiséun pseudo-débat sanscontradicteur-trice. Le débaten question n'avait en effet pourseul but que d'inciter les élèvesà se mobiliser contre le projetde loi sur le mariage pourtou-te-s. Les intervenant-e-stenaient des propos dégradantsen prétendant que « l'homosexualitén'est que contrenature», « n'est pas dans leplan de Dieu », et que « leshomosexuel-le-s ne peuventpas prétendre à une vieaffective féconde ».Lucie est élève en CE1 dans uneécole catholique et vit dans uneFocusJames et Nicholas sont deux expatriés américainsarrivés il y a environ deux ans à Paris avec leur fils.Les deux hommes se sont légalement mariés enCalifornie et l'enfant vit avec eux depuis sa naissance.Leur enfant a 9 ans et est scolarisé en classede CM1 dans une école anglophone.James et Nicholas nous ont contactés pour nousraconter avoir eu deux rendez-vous avec la directionde l'école pour se plaindre des moqueries subiespar leur fils dans sa classe. Malgré ces entrevues,l'école n'a eu aucune action et s'est contentée dedire au couple que « tout le monde a sa façonde voir les choses ».De plus, l'école vient tout juste de présenter unepièce de théâtre jouée par des élèves de CM1 etCM2. L'une des lignes du script contenaitoriginellement un mot à interprétation homophobe(« faggot », soit un équivalent de « tapette ») quiavait été changé en « idiot » par l'éditeur du livreet de la pièce dans des éditions plus récentes.L'école avait, en revanche, choisi d'utiliser le dialogued'origine. De nouveau, le couple a parlé de ceproblème avec l'école, sans que cela n'entraîneaucune mesure. De ce fait, le texte est resté tel quelet la pièce a été jouée par des enfants âgé-e-sde 9 à 11 ans.Le couple se demande ce qu'il est en mesure de fairepour protester contre une telle situation, mais aussisi ces comportements sont habituels en France.famille homoparentale.Troisélèves de sa classe racontent,non sans fierté, avoir participé àla Manif pour tous le week-endprécédent. Le professeur, visiblementdépassé, n'a pas étécapable de les empêcher decrier des chansons et scanderdes slogans de la manifestation.Lucie, terrée au fond de laclasse à ce moment-là, décritce jour comme étant « le jourle plus horrible de [s]a vie ».Arthur est enseignant dansun collège privé de confessioncatholique. C'est à l'intérieurde cet établissement scolaireque deux élèves l'interpellentà grands renforts de menaces


117et sarcasmes. Le professeurn'y prête tout d'abord pas uneréelle attention et se contente depasser son chemin, nonsans avoir brièvement commentéle comportement desdeux adolescents d'un simple« je vois que vous n'avez paschangé ». Ce n'est que plusieursheures plus tard qu'il subitun contrecoup et ressent lebesoin de parler.Se qualifiant lui-mêmed'homosexuel discret, Arthurnous dit vivre dans la religionet la tolérance.Arthur nousprécise notamment avoirparticipé à la deuxièmemanifestation contre le mariagepour tou-te-s, avoir été choquépar les discours tenus, etfinalement s'être détournédu mouvement.Le Parisien, 15 mai 2013


Rapport sur l'homophobie 2014Police-GendarmerieHomophobes, vous avez le droitde garder le silence19%TransFemme 12%69%Homme+ de 50 ans13%19%Inconnu31%35-50 ans18-24 ans6%31%25-34 ansInconnu12%50% 38%Île-de-FranceAutresrégionssexe des victimesâge des victimesorigine géographiqueDiffamation6%DiscriminationOuting 6%75%38%Rejetignorance25%Insultesmanifestations de l’homophobie*18 témoignages, correspondantà 16 cas, soit 1% du total.Depuis 5 ans, nous enregistrons une stabilitédu nombre de témoignages relatifs aux forcesde l’ordre, entre 12 et 16 cas par an. Malgrétout,année après année,nous constatonstoujours les mêmes manquements de lapart des forces de l’ordre que nous dénonçonsdans chaque Rapport. Cette éditionne dérogera pas à la règle.« Taisezvous,faites-vousopérer,monsieur »Premièrement,certains services de policeou de gendarmerie continuent de refuserd’enregistrer des plaintes.Nous rappelonsl’obligation qui est faite aux forces del’ordre d’enregistrer une plainte dans l’article 15-3du Code de procédure pénale : « La police judiciaireest tenue de recevoir les plaintes déposées par les victimesd'infractions à la loi pénale et de les transmettre,le cas échéant, au service ou à l'unité de police judiciaireterritorialement compétent. Tout dépôt deplainte fait l'objet d'un procès-verbal etdonne lieu à la délivrance immédiate d'unrécépissé à la victime. Si elle en fait lademande, une copie du procès-verbal luiest immédiatement remise. » Dans tous lescas,les victimes peuvent s’adresser directementau procureur de la République.SOShomophobie a publié en 2011 le Guidepratique contre l’homophobie destiné àtoutes les victimes,qui précise les démarchesà suivre pour porter plainte ou réagir en cas* Plusieurs manifestations peuvent être identifiées sur un cas. Enconséquence, le total des manifestations est supérieur à 100 %.


de refus d’enregistrement.Une versioncomplète de ce guide est disponiblesur le site Internet del’association. La ligne d’écoute del’association permet également desoutenir les victimes de ces situationset permet une aide dans lecas d’un refus d’enregistrement dela plainte.Deuxièmement, cette annéeencore, les témoignages reçusdénoncent des situations humiliantespour les personnes trans,homosexuelles ou bisexuelles provoquéespar des policiers-ères ougendarmes.Alors que les victimesse rendent au commissariat ou àla gendarmerie en état de choc,force est de constater que l’accueilest loin d’être toujours courtois etla prise en charge bienveillante.Nous rappelons l’arrêté du 6 juin2006 portant règlement générald'emploi de la police nationale :« Les fonctionnaires actifs de lapolice nationale sont loyaux enversles institutions républicaines. Ilssont intègres et impartiaux. Ils nese départissent de leur dignité enaucune circonstance. Placés auservice du public,ils se comportentenvers celui-ci d'une manièreexemplaire. Ils portent une attentiontoute particulière aux victimes,conformément à la teneurde la charte dite de l'accueil dupublic et de l'assistance auxvictimes. Ils ont le respect absoludes personnes, quelles que soientleur nationalité ou leur origine,leurcondition sociale,leurs convictionspolitiques, religieuses ou philosophiquesou leur orientationsexuelle.» Si nous souhaitons unestricte application de ces principes,nous ne pouvons que constaterque la même dignité n’est pasFocusAgressé dans la rue, insulté par la policeFrançois, 50 ans,vit dans un quartier sensibled’une grande ville du Sud de la France.En sortantde la boulangerie, il est violemment agressé parun homme qu’il a déjà croisé dans son voisinage.Cet homme,dont il connaît le nom, est réputé poursa violence.Roué de coups, François parvientà se réfugier dans un salon de coiffure, d’où il appellela police.Le policier ne le croit pas et lui répond :« Débrouillez-vous. » Devant son insistance,une voiture est envoyée pour secourir François,mais l’agresseur a eu le temps de prendre la fuite.Alors que les policiers le conduisent au poste depolice pour déposer plainte,l’un d’entre eux lui dit :« Comme PD, il faut vivre dans un quartier oùl’on est accepté ».Lorsque François répond :« Homosexuel, pas PD »,le policier lui dit :« C’est pareil ! »Arrivé au poste,François est désespéré parles 3 heures de queue pour déposer plainte.Il décide d’aller à l’hôpital pour être soigné.Il reçoit une interruption temporaire de travail (ITT)de 6 jours. François contacte la ligne d’écoutede SOS homophobie car il appréhende de nouvelleshumiliations en allant porter plainte. Il est isoléet a peur de sortir de chez lui.Il craint une longueprocédure, comme celle qu’il avait vécue aprèsune agression en 2011,au terme de laquelleson agresseur avait été condamné à deux ansde prison dont un an avec sursis.119


Rapport sur l'homophobie 2014 • Policeattendue pour les personnes trans :l’identité de genreet le sexe sont des critères qui doivent être cités dansce règlement.Face à ce constat, la formation reste la meilleurearme pour lutter contre l’homophobie et la transphobieau sein des forces de l’ordre. Si une sensibilisationexiste dans le cadre de la formation desélèves gendarmes, rien d’obligatoire n’est mis enplace pour celle des policiers-ères. Aucun modulede formation complet n’existe. Depuis quelquesannées, SOS homophobie assure des actions deformation développées spécifiquement pour lesélèves gendarmes. Ainsi, en 2013, 1 300 élèvesgendarmes des écoles de Chaumont et Montluçonont bénéficié d’une intervention (1 000 en 2012).SOS homophobie est prête à développer cesformations dans toutes les écoles et à engagerun partenariat avec le ministère de l’Intérieur surces actions.Des officiers prochesde tout soupçonDavid et Julien sont arrêtéspar un policier alors qu’ilsprenaient une rue en sensinterdit, dans des embouteillages.Le comportementdu policier change lorsqu’ildécouvre que les deuxpermis de conduire sontrangés dans le même étui.Il décide alors de leur adresserune contravention, alors quela voiture devant eux, ayanteffectué la même infraction,est repartie sans êtreverbalisée. David se plaintd’un comportement injuste.Le ton monte lorsqueDavid refuse de signer leprocès-verbal.Virginie est trans et milite pourles droits des sans-papiers enFrance. Lors d’une manifestationde soutien à Lille, elle est arrêtéeavec plusieurs personnespour un contrôle d’identité.Virginie est mise avec leshommes, et les policiersl’appellent « monsieur ».Lorsqu’elle demande à êtrefouillée par une femme, onlui rétorque : « Taisez-vous etfaites-vous opérer, monsieur. »(Lire aussi chapitre Trans.)Après le viol qu’elle a subi,Stéphanie, lesbienne, a un faceà face avec son agresseur quise déclare bisexuel.A cetteoccasion, un policier lui indiquequ’elle a manqué de prudence,en buvant lors de la soirée.Stéphanie précise qu’ellen’avait bu qu’un verre de vodka.Parmi les conseils du policier :« Vous ne devriez pas traîneravec des bis, surtout en tantque lesbienne, parcequ’un bisexuel reste unhétérosexuel. »Franck fréquente un sex-clubdans le Marais. Lors d’unesoirée, une altercation éclateentre deux individus et lespoliciers sont appelés.En arrivant, l’un d’eux déclare :« C’est un endroit glauque,ça pue, qu’ils crèvent avecleur sperme. »


121


Rapport sur l'homophobie 2014PolitiqueLe mariage, c’est maintenant !31%Inconnu59%Homme10%Femme34%Inconnu5%+ de 50 ans48%35-50 ans3%18-24 ans10% 25-34 ans36%InconnuÉtranger48%3% AutresrégionsÎle-de- France13%sexe des victimesâge des victimesorigine géographique67%Homophobiesociale30%Rejetignorance3%discrimination10%InsultesManifestations de l’homophobie*Si, l’an passé, ce chapitre finissait sur une notepositive,il ne commencera malheureusementpas comme ça cette année : 2013 a en effetvu germer une violente homophobie en politiquedans le cadre des débats sur le mariage pourtou-te-s. Le contexte politique n’a pas fait exceptionà l’augmentation des témoignages : ils ontpresque quadruplé pour atteindre le nombre de 221– le courriel pour 95 % d’entre eux restant le principalmoyen de contact. Les chiffres présentés nedressent pas la typologie des témoignages (originegéographique, sexe et âge des victimes) : pourl’essentiel ce sont des signalements de faitshomophobes de portée générale. Ainsi, bien quenous ayons fait un grand pas vers l’égalité des droits,cette avancée s’est faite au prix fort.221 témoignages, correspondantà 221 cas, soit 7% du total.Le principal élément marquant du contexte politiqueréside en effet dans le mal-être de nombreusespersonnes face aux dérives homophobes. Faut-ils’en étonner? A posteriori, non. Cela avait débutédès 2012. Ce triste constat s’explique par un vifretour d’homophobie dans le débat politique –la quasi-intégralité des témoignages sont liés ausujet du mariage pour tou-te-s – et sa tournureultra-violente parfois. Les maires ont joué dans cecontexte un rôle particulier qui doit être soulignépuisqu’ils sont au cœur de 15 % des témoignagescette année.* Plusieurs manifestations peuvent être identifiées sur un cas.En conséquence, le total des manifestations est supérieur à100 %.


123Une année explosiveLes chiffres parlent d’eux-mêmes : explosion destémoignages dont la quasi-totalité relève du rejetou du climat homophobe : 1 témoignage sur 10fait état d’insultes.Un profond malaise est constatéchez nombre de citoyen-ne-s qui ont « très malvécu » 2013.Les débats et dérapages leuront semblé d’autant plus insupportablesqu’ils ont duré presque un an.Face à cela, certain-e-s s’énervent : « Jevoudrais juste que Frigide Barjot arrêteavec ses imbécillités. Elle est ridicule ! »,nous disait Thomas.Nombre de courrielsfinissent par : « Il faut que cela cesse ! »Certain-e-s ont le sentiment que lesautorités publiques ont laissé faire :« Comment se fait-il que personne nefasse rien ? », demande Aurélie deStrasbourg… Ce malaise est égalementexprimé depuis l’étranger (Espagne,Royaume-Uni, etc.) d’où nous proviennentdes témoignages qui déplorent ladégradation du climat sociétal français :« Je m’inquiète pour vous tous gays etlesbiennes de France. […] Ce qui estencore plus triste, c’est l’image que ladroite donne des Français.[...] Vous devezvous sentir pointés du doigt et vivre dansla peur de devenir une cible. »«Les homossont desmalades.Les homossont unepollution.Il ne fautpas avoirpeur deles discriminer,questionde principeconservatoire»Et cette année, le Prix de l’homophobe de Franceest remis à…La dégradation des débats politiques y est pour beaucoup: « Les discussions et les explications d’amendementssont bourrées d’homophobie crasse etbrutale ! », témoigne-t-on sur la ligne d’écoute del’association.Et la liste des nommé-e-s estlongue.Quelques noms suffiront à réveillernos mémoires : Christine Boutin (PCD),Xavier Breton (UMP), Nicolas Dhuicq(UMP), Philippe Gosselin (UMP), HenriGuaino (UMP), Philippe Marini (UMP),Hervé Mariton (UMP), Philippe Meunier(UMP),Christian Vanneste (RPF),Paul Salen(UMP), Laurent Wauquiez (UMP), etc.Attention, soyons justes : l’homophobien’est pas l’apanage de certain-e-s parlementairesou personnalités,les maires sontégalement en bonne place.Nous avons toutes et tous pris de pleinfouet les manifestations d’homophobie :elles ne sont pas restées enfermées dansles couloirs feutrés du palais Bourbon.On constate en effet une très large diversificationet multiplication des sourcesd’homophobie dans des mouvements issusde la société civile (pour plus de détails,lirele chapitre Mariage pour tou-te-s).Certainstenaient le haut du pavé,à commencer parL’UMP et le projetde mariage pourtou-te-sFace au projet de loi, les tentatives d’oppositionde la droite française ont été nombreuses et multiformes.Voiciquelques initiatives de l’UMP.Dès fin 2012, le collectif « Entente parlementairepour la famille » est créé. Philippe Gosselin rappellele mot d'ordre, éviter tout dérapage, et fait aupassage un discret aveu d’homophobie : « Au PS, ilsse sont dit : "On leur refait le coup de 1999 avecle Pacs, il y aura bien une Boutin pour brandir laBible et ils passeront pour des ringards." Mais ils sesonttrompés,on n'est plus dans le débat homophobede ces années-là.»Autre mobilisation lors des vœuxpar courriel de la Droite libre (mouvement interneau parti) : « Avec des millions de Français, la Droitelibre dit NON à ce monstrueux projet et appelletous ses sympathisants à se joindre à la grande manifestationdu 13 janvier prochain à Paris. » Les chosesne s’arrêtent pas là : dès le 24 janvier, le parti tientune convention dédiée au sujet où BenoistApparu et Franck Riester portaient difficilementune voix dissidente : « Ce sont des droits nouveauxpour les uns, sans en enlever aucun aux autres »,y a plaidé le second.


Rapport sur l'homophobie 2014 • Politiquela Manif pour tous, dès le 17 novembre 2012 lorsd’une manifestation à Paris, puis les 13 janvier,24 mars – manifestation ayant donné lieu à desdébordements et à l’interpellation de 98 personnes– et 26 mai 2013. Le succès de la Manif pour tous asemblé inscrire le mouvement dans la durée :à la rentréede septembre 2013, après l’organisation de sapremière université d’été, le mouvement lance sonGrenelle de la Famille, même si après les manifestationsdu 26 mai, de fortes dissensions n’avaient pasmanqué d’apparaître au sein du mouvement.D’autres mouvements étaient moins connus, maisil faut aussi mentionner les Veilleurs, les Sentinelles,l’Ecologie humaine, Fonder demain, lesMères veilleuses, le Bloc identitaire,Collectif pour fonder l’avenir pour tous,ou le Printemps français créé dès le24 mars 2013.Ces mouvements utilisaient diversesméthodes de revendication et d’influence:nousavons vu des pétitions,destribunes, des demandes de référendum,des articles, des manifestations dans larue, des reportages, des mailings, descourriers, des happenings, des campagnesd’affichage, ou encore des veilléesnocturnes, etc. Nous devons ici mentionnercertaines actions qui se sontdistinguées par leur caractère particulièrementdiscriminatoire. Par exemple celle desJeunesses nationalistes qui distillaient une hainehomophobe teintée de racisme et de xénophobiedans les affiches qu’ils accrochaient, ou encore lesHommen qui ont osé s’approprier la figure de larésistance française pour pourfendre le projet de loidans des campagnes sur le Web. Des manifestationsont fait preuve d’une grande violence lors dela sortie du film d'Alain Guiraudie L’Inconnu du lac.« Allez vous enculer au bois de Boulogne ! Les PDau Marais ! », a-t-on pu entendre à Saint-Cloudoù le maire a fait interdire les affiches du film. Descommentaires cauchemardesques peuvent encoreêtre lus sur certains sites comme egaliteetreconcilation.fr: « Les promoteurs de cette loi méritent lamort car ils permettent implicitement le viol et sansdoute l’assassinat d’enfants achetés, c’est-à-dire« Aujourd’-hui, lamode, c’estles gays, onest envahisde gays. »ChristineBoutin,27 mai2013d’enfants esclaves. » Bref, on l’a constaté : depuisles associations tristement banales – zoophilie,pédophilie, séropositivité, etc. – jusqu’à l’appel à laviolence, il n’y avait qu’un pas.« Hollande veut du sang, il en aura ! », FrigideBarjot, 12 avril 2013Voilà tous les ingrédients d’un climat qui a nourriun vif sentiment d’insécurité (lire chapitre Lieuxpublics) : « Je n’ai jamais eu peur dans mon pays…et je commence à avoir peur pour la première fois »,raconte Sylvie lors d’un appel, avant d’ajouter :« Je n’ai pas envie de recommencer à vivre dans lapeur comme il y a 30 ou 40 ans. » Edouarddans le Languedoc-Roussillon fait part dumême sentiment: « Nous ne pouvons plusnous déplacer en toute sécurité dans la ruede peur de nous faire agresser. »De graves incitations à la haine et à la violencesur la scène politique ont nourri cesentiment.Ce sont les propos du conseillermunicipal FN Richard Jacob lors d’unrassemblement : « Les PD au bûcher ! »(18/02/2013). Ce sont les affiches duGroupe union défense (GUD) intitulées :« Non aux enculés ».C’est l’image diffuséeen ligne par les Jeunes populaires de l’UMPde Garonne (en détournant une affiched’HES – association LGBT associée au PS).C’est un appel à un coup d’Etat militaire 1 au momentoù un magazine d’extrême droite baptisé Lys noircite le nom de généraux de l’armée française connuspour leur position contre le mariage pour tou-te-s…Depuis l’altercation verbale jusqu’aux agressionsphysiques, il n’y eut en effet qu’un pas, commeavec ce maire d’une petite commune de l’Eure (lirechapitre Agressions physiques).Les personnalités politiques ont pu aussi êtrevictimes de ces violences. Nous avions consacréplusieurs pages du rapport 2013 à des extraits decourriers reçus par le député PS de l’Isère ErwannBinet,rapporteur du projet de loi sur le mariage pour1. http://www.change.org/fr/p%C3%A9titions/aux-deuxchambres-du-parlement-pour-un-recours-constitutionnelcontre-le-mariage-pour-tous


125tou-te-s : courrielset lettres manuscritesconfondus, ila reçu plusieurs milliersde messageshostiles. Inutile deprésenter ici encoreles mêmes propos :les missives quenous rapportionsdéjà dans le précédentrapport ontempiré. « Il y a eutrois phases […] »,expliquait un assistantparlementaire,Lys noir, oct. 2013« de septembre àdécembre, on avait quelques courriers d'opposants,très respectueux. A partir de janvier, c'est devenumassif et le ton était clairement trash. Aujourd'hui,on en reçoit moins, mais c'est très violent. » Et l’histoireest malheureusement la même sur le terrain ;notre association a par exemple reçu de Bretagne leAimez-vous les unsles autresCertaines personnalités politiques ont aimémélanger les genres,inviter la religion sur les bancsdes assemblées et même essayer de faire passerdes dogmes et préceptes religieux pour des loisde la République. Mais tout cela était bien maldégrossi… Patrick Buisson n'a pas été le seul àbrouiller les frontières entre religion et Etat,immisçantla première dans les affaires du second :« Le débat suscité par le projet de loi sur le mariagehomosexuel, grand marqueur sociétal de ce débutde mandat, aura été surtout marqué par l’affirmationconjointe d’un néolaïcisme tapageur et d’unantichristianisme particulièrement agressif. »Retourner la situation, en attribuant la positionintrusive tenue par l’Eglise dans les affaires de l'Etat:« Le grand paradoxe est que cet Etat qui s’est misau service d’une croyance religieuse séculièrene respecte plus aucune séparation du politique ettémoignage suivant : « Ma permanence PS reçoitquantité de coups de fils homophobes […] et j’imagineque c’est pareil un peu partout. La personnequi tient la permanence m’a confié être "hallucinée"par la violence des propos. »Pire encore,cela est allé jusqu’aux menaces de mortpour Erwann Binet, mais également pour ClaudeBartolone, président de l’Assemblée nationale,ou encore pour deux député-e-s socialistes deVendée, Sylviane Bulteau et Hugues Fourage, etc.Des élu-e-s de l’opposition (UMP,UDI,etc.) ont égalementété la cible de telles manifestationsd’homophobie;certain-e-s en ont changé leur votelors des débats dans les assemblées.Certains dérapages ont révélé des rapprochementsentre racisme,xénophobie et homophobie.Des manifestationsont en effet mis à jour un lieu politiquedans lequel plusieurs formes d’extrémismes cohabitent.Unévénement marquant le 15 octobre 2013a tristement mis en exergue la promiscuité decertains mouvements et idées : « La guenon, mangedu religieux, puisqu’il est à la fois le politique etle religieux. Un droit pénal religieux, une nouvelleprêtrise judiciaire sanctionnent toute désobéissance,toutmanquement public,comme autant deblasphèmes et de sacrilèges envers les nouveauxdogmes.»Comment donner du crédit à des proposqui justement font état d’un vrai mélange desgenres ? En l’espèce,quand l'Etat légifère ici,il n’interfèrepas avec l'Eglise. Mélange des genres qu'onretrouve dans les propos de certain-e-s autrespolitiques : « La France,fille aînée de l’Église,n’abandonnerajamais ses enfants ni ses familles ! », a punous raconter Mme Boutin le 18 mars 2013.Doit-on prendre le temps de réfléchir aux proposde certain-e-s de nos élu-e-s et notammentJacques-Alain Bénisti qui s’adresse en ces termesau président de l’Assemblée nationale : « Méditonsensemble, puisque c’est le jour du Seigneur,monsieur le Président, sur les conséquences desdécisions que nous allons prendre aujourd’hui.Nous ne souhaitons pas plus créer des "femmesobjets"que des "enfants-Playmobil !" »


Rapport sur l'homophobie 2014 • Politiqueta banane »,a-t-on pu entendre dansla bouche d’une adolescente quibrandissait une peau de banane pendantune manifestation au pied dupalais de justice d’Angers auquel serendait Christiane Taubira, gardedes Sceaux et ministre de la Justice.Ces rapprochements ne nécessitentaucun commentaire ; SOS homophobiecondamne ces propos etdéplore que l’homophobie ait pu êtrele vecteur d’une résurgence d’autresdiscriminations et propos haineux.2013 : année à mairesCette année, maires et conseillersmunicipaux ont occupé une placeimportante sur la scène politique :15 % des témoignages rapportentl’homophobie de ces élu-e-s.Cela s’explique par leurstatut d’officiers d’état civil.Malgré la possibilité pour les maires opposé-e-sau mariage pour tou-te-s de se faire remplacer parun-e adjoint-e, de nombreuses unions ont étérefusées. La « clause de conscience » qu’ils/ellesn’ont pas obtenue a nourri l’acharnement decertain-e-s à discriminer les personnes homosexuelles: certain-e-s refusent encore d’appliquerle droit aujourd’hui en vigueur (lire chapitre Mariagepour tou-te-s). A Connezac, le maire, FrançoisWaroux, fit même voter cette décision au conseilmunicipal : « Considérant qu'il existe une loi naturelle,supérieure aux lois humaines, d'après laquelledepuis les origines du monde aucune union n'a étécélébrée officiellement entre deux personnes dumême sexe au titre d'un "mariage" pour la raison queces personnes, quelle que soit leur dignité d'êtrehumain, qu'il y a eu lieu de reconnaître par ailleurs,sont radicalement incapables de procréer un êtrehumain qui soit issu de cette union et par conséquentde l'éduquer à titre de parents dans l'altérité et la complémentarité,qu'ilne peut donc s'agir d'établir entreeux aucun véritable "mariage". / Après en avoir délibéré,/ Décide que le maire et ses adjoints ainsi quetous les conseillers qui ont voté cette délibération àbulletins secrets démissionneront de leurs fonctionsGraffiti signalé à SOS homophobiede conseillers municipaux dans le cas où ils seraientcontraints de procéder à un tel acte de mariage qu'ilsdésapprouvent formellement. »Aussi, il n’a pas été rare que certains mariages setransforment en tribunes,comme le prouve le témoignagede Pierre, reçu en juin 2013, qui rapporte lespropos tenus par le maire :« En cette période de débatsur le mariage, je suis plus que ravi d’unir aujourd’huiun homme avec une femme. » Pierre nous fait partde son dégoût : « Mais si un maire avait déclaré :"Je suis ravi d’unir aujourd’hui un Blanc avec uneBlanche",je trouverais cela clairement raciste ! » Pourd’autres mairies, nul besoin de mariage pour lancerdes propos véhéments : « Viens et mon homme vat'enculer si tu veux. Tu vas comprendre, PD » sontdes propos attribués à Fadila Oumansour, collaboratricede Pierre Dubois, maire de Roubaix (PS).Certain-e-s conseillers-ères municipaux-alesrapportent même les propos tenus pendant lesséances du conseil municipal, comme Robert,membre, « hétérosexuel » précise-t-il, du conseilmunicipal d’une ville de moins de 1 000 habitante-sen région Rhône-Alpes, qui nous livre les proposdu maire : « Il n’est pas question de louer la salle desfêtes à des PD.» Selon l’élu,cela reviendrait à la louerà des alcooliques,à des drogué-e-s.L’appelant nousavoue regretter de ne pas être intervenu…


FocusEn direct du Parlement :SOS homophobie au plus proche des débatsSOS homophobie s’est engagée dans les débats ;nous avons ainsi cherché à prévenir les dérapagesdans les débats : dévalorisation des personnes LGBT,parole violente et insultante. Nous souhaitionséviter que le débat ne laisse dans l’esprit deshomosexuel-le-s, et notamment dans celui des plusjeunes, l’impression que notre société leur est hostile,avec les conséquences que l’on connaît en termesd’isolement, de décrochage scolaire,de comportements à risques. SOS homophobieen a ainsi appelé à la responsabilité individuellede nos élu-e-s afin de ne pas laisser le débat dérapersur le terrain de la violence verbale homophobe.D’abord, l’association a soumis aux député-e-s etsénateurs-trices un engagement moral pour un débatqui ne porte pas atteinte au respect des personnesLGBT : la « Charte d’engagement moral pourun débat parlementaire respectueux des personneslesbiennes, gays, bisexuelles et trans, et de leurentourage ». Soumise dès le début des débats,elle recueillera près de 80 signatures. Des bénévolesde SOS homophobie se sont également relayé-e-spour suivre les débats en direct depuis l'Assembléenationale et les rapporter sur le site de l’association.Nous vous proposons ci-après une courtechronologie des débats et des témoignages.29 janvier : Le débat s'ouvre à l'Assemblée nationale.Christiane Taubira, garde des Sceaux, ministrede la Justice, est porteuse du projet de loi et ouvrela séance par un discours largement ovationné.Les débats se sont ouverts pour une durée de 15 joursdurant lesquels les député-e-s ont discuté, jour et nuit,127Sur la base des témoignages qu’arecueillis SOS homophobie, nouspourrions aussi dresser une listedes villes de l’Hexagone dans lesquellesil ne fait pas bon êtrehomosexuel-le. Notre tour deFrance nous mènerait ainsi deNoirmoutier (Noël Faucher,UMP)à Visan (Henri Pélissier, UMP),jusque Montfermeil (XavierLemoine, UMP et PCD) ouArcangues (Jean-Michel Colo,UMP), au Vauclin (RaymondOccolier, PS), en passant par leVIII e arrondissement de Paris(François Lebel, UMP) ou encorepar Beaulieu (Eric Quénardel, FN),Béziers (Raymond Couderc,UMP),Sèvres (Nathalie Kosciusko-Morizet,UMP),Clichy-la-Garenne(Gilles Catoire, PS), Sallanches(Georges Morand, UMP), Bollène(Marie-Claude Bompard, Ligue duSud) ou Fontgombault (JacquesTissier, DVD), etc.Enfin, ce tour de France seraitl’occasion de lire les journauxcommunaux de Boulogne-Billancourt (décembre 2012), deLongeville-lès-Metz (janvier2013),de Meudon (janvier/février2013), ou du XV e arrondissementde Paris (été 2013), etc. SOShomophobie dénonce à nouveaucette année la pratique quiconsiste à utiliser les journauxcommunaux pour promouvoir despositions partisanes parfoisteintées d’homophobie.Bilan 2013 : pour le pire et lemeilleur !Douce-amère est certainement lasensation que laissera l’année 2013dans la mémoire de beaucoupde citoyen-ne-s,partagé-e-s entre


Rapport sur l'homophobie 2014 • Politiquele bonheur de savoir aujourd’huila République française reconnaissanted’un peu plus de droitspour les LGBT et le dégoût de l’intoléranceet de la haine que notresociété a fait émerger. Essayonsde ne retenir que le meilleur :depuis le 17 mai 2013, la Franceest devenue le quatorzièmepays à légaliser le mariage entrepersonnes de même sexe. Lespremières cérémonies n’ont pasattendu, Montpellier a été lapremière ville à en célébrer.L’an passé donc, le chapitrePolitique finissait sur une notepositive. Malgré la période difficilepassée, c’est grâce aux motsde Christiane Taubira qu’ilfinit cette année sur une noted’espoir. Des mots solennels àgarder en mémoire : « Noussavons aussi qu’il faut parler àcelles et ceux qui ont été blessésces jours derniers par des mots,des gestes, des actes – leur direqu’ils sont pleinement dans lasociété et que la responsabilité dela puissance publique est de luttercontre les discriminations,que c’est une exigence du pacterépublicain. […] Alors nousleur disons : si vous êtes pris dedésespérance,balayez ces parolesqui vont s’envoler 2 ! »2. Extrait du discours prononcé lors duvote solennel de la loi sur le mariagepour tou-te-s, 23 avril 2013.les 5 000 amendements déposés. A la fin des débatsun membre de SOS nous fait part des derniers motsde cette première séance : « La conclusion revientlégitimement à Bernard Roman, SRC, qui a clôturéla séance en rappelant la violence et l'homophobiede certains des 5 000 amendements déposés parl'opposition, qu'il a interpellée en ces termes :"Lorsque vous serez tous confrontés auxamendements dès demain, est-ce que vousles voterez tous unanimement ?" »2 février : Adoption de l’article premier du projetde loi ; cet article ouvre le mariage aux personnes demême sexe. On retiendra des débats le télescopagedes sujets : alors que la PMA (procréationmédicalement assistée) et la GPA (gestation pourautrui) ne sont pas prévues par le projet de loi,ces deux sujets de société sont au cœur des débatset fortement mobilisés par l’opposition.12 février : Vote solennel du projet de loi parl’Assemblée nationale ; seuls quelques députés UDIet UMP votent pour la loi, en plus des député-e-sde la majorité. Les député-e-s PS scandent « Egalité »à l'annonce des résultats du vote. Les membres deSOS présent-e-s font part de leur émotion :« Mme Taubira demande la parole. Pendant queles député-e-s de droite continuent de quitterl’hémicycle. Elle arbore une veste rouge-orangé.Mais c’est son foulard qui attire mon regard. On abeaucoup commenté les pulls de M. Maritonpendant les débats, il ne manquait que l’orange etle vert pour atteindre les six couleurs du rainbowflag. Aujourd’hui, Mme Taubira porte un foulard.Un foulard rouge-orange-jaune-vert-bleu-violet. » ;


129« Merci, Mme Taubira, de porter ce projet avecautant d’énergie et de conviction. Merci, Mmes,MM. les député-e-s qui avez voté pour, afin dene plus nous maintenir en marge de la société ! »4 avril : Alors que le climat sociétal s’est tendu,le projet de loi arrive au Sénat : des actions contrele projet de loi ont lieu presque tous les jours devantle palais du Luxembourg. Le 11 avril, un membrede SOS homophobie raconte : « En sortant de la cour,je suis sidéré : dans la rue, en face, des femmes, deshommes, des enfants sont agenouillé-e-s et prient,face à une grande croix en bois. Est-il acceptableque, face à ce temple de la démocratie et dansnotre République laïque, des pressions religieusessoient ainsi exercées sur des élu-e-s ? »12 avril : Les sénateurs-trices adoptent le texte.Le gouvernement annonce que le calendrierparlementaire sera avancé, de sorte que le texterevienne devant les député-e-s dès le mercredisuivant, et non courant mai comme prévu.17 avril : Le texte arrive en seconde lecture àl’Assemblée nationale. Le contexte sociétal continuede se tendre. Dans l'hémicycle la tension monteégalement.Nuit du 18 au 19 avril : Certain-e-s député-e-smanquent d'en venir aux mains. Un membre deSOS homophobie rapporte depuis l’hémicycle :« Il est presque une heure du matin quand lesesprits s’échauffent. Marc Le Fur prend la parolepour dénoncer l’attitude des forces de l’ordre faceaux manifestant-e-s resté-e-s aux Invalides aprèsL’homophobie, un mauvaisplat surgeléUn témoignage nous aparticulièrement bouleverséscette année, c’est la raison pourlaquelle il est retranscrit ici.« Je m’appelle Damien, j’ai29 ans depuis quelques jours,et je vis à Paris. J’ai grandien banlieue, élevé par desparents originaires du Nord dela France et ayant eux-mêmeslongtemps vécu au Mexiqueavec les leurs. Nous avionsune maison, un jardin, un chienqui s’appelait Spooky et unenourrice qui s’appelait Malika,même si je doute aujourd’huide l’orthographe exactede son prénom. Mes parents,Votre-Dieu merci, sont hétérosexuels,ce qui semble êtreaujourd’hui pour beaucoupla condition sine qua non pours’unir et élever un enfant"sain". Malgré cela, […] j’aitoujours eu la certitude d’êtregay […]. Comme quoi.Alors que mes amis sevoyaient déjà mariés, parents,grands-parents, j’ai grandi sans[…] projet de couple, d’enfantou de pérennité de monpatronyme, aspirant toujours auseul accomplissement possiblepour les "détraqués" de monespèce […]. J’ai grandi enacceptant, sans mêmeenvisager de m’en plaindre,l’idée de cocher "célibataire"et "sans enfant" sur tous lesformulaires que la vie voudraitbien laisser glisser sous mesdoigts. Et voilà que depuisquelques mois, de nouvelles


Rapport sur l'homophobie 2014 • Politiquecases m’apparaissentaccessibles.Pourtant... quand je rentre lesoir, que j’allume ma télévisionen réchauffant les mêmes platsde pâtes que mes voisins"normaux", je me demandepourquoi cette femme veutme voir enfermé, pourquoicet homme me dit pédophile,pourquoi celui-ci encore réduitmes sentiments à des jeuxsexuels. Je me demandepourquoi la redevance queje paie chaque année, commelui, comme elle, comme eux,finance des reportages quisuivent Frigide Barjot et mesusurrent à l’oreille, entredeux bouchées, que le Diablen’est jamais bien loin et qu’ilporte à cet instant précis unefourche pleine de coquillettesà sa bouche. […] Je medemande pourquoi cette mèrede 15 enfants parle avec tantde certitude d’une sexualitéque l’un d’entre eux pourraitbien encore cacher. […]Je me demande si ma seuleorientation sexuelle a réveillédes idéaux archaïques, quiauraient alors sauté plusieursgénérations les yeux bandéspour venir s’ancrer dansla tête de quelques imbécilesmalheureux. Je me demandesi finalement les couplesd’invertis ne sont pas aussiresponsables des sièclesd’incestes, de mariagesconsanguins, d’adultères,d’alcoolisme domestique,de violences faites auxépouses et à leurs enfants,ou si ces horreurs qui nousl’ordre de dispersion qui leur a été donné.En quelques instants, les député-e-s de l’oppositionsont debout, avancent violemment vers le bancdu gouvernement, la séance est suspendue,les tribunes sont évacuées, la rue est entrée dansl’hémicycle. » « Cela fait 30 ans que je siègedans cet hémicycle, je n'ai jamais vu ça », en diraAlain Vidalies, ministre des Relations avecle Parlement.21 avril : Deux rassemblements opposés – à l’appelde la Manif pour tous et d’Act Up-Paris – ont lieuau même moment à Paris.23 avril : A 17 h 07 précises, l'Assemblée nationaleadopte, par 331 voix contre 225, le projet de loiouvrant le mariage aux couples de personnesde même sexe. Des sénateurs-trices UMP et UDIdéposent immédiatement un recours devantle Conseil constitutionnel.menacent aujourd’hui sontdorénavant tolérées dansl’union entre un hommeet une femme. […]Chaque jour, chaque heure,chaque minute, je vois desgens se permettre deremettre en question monmode de vie, mes aspirations,mes idéaux, mes valeurs,parlant fort dans un microà ma place.Et quelques jours plus tardje me rends compte quele dégoût est là, que lespoings me démangent etque la nausée me guette,mais qu’elle n’a rien à voiravec ce plat surgelé. […] »


131La parole à…Sylvain CréponSur les questions LGBT, la positiondu FN a-t-elle changé avec l'arrivéede Marine Le Pen à la tête du parti ?Comme pour tout parti politique, il faut biendistinguer le discours du programme.Le discours du FN présente une évolutionprogressive depuis le début des années 2000 surl'homophobie.Dans le discours, il y a une vraie différence.Jean-Marie Le Pen était coutumier de déclarationshomophobes. En 1984, dans l'émission « L'Heurede vérité », il déclarait : « L'activisme homosexuelfait peser une menace mortelle sur notre civilisation», alors que Marine Le Pen déclarait le 10décembre 2010 : « J'entends de plus en plus detémoignages sur le fait que dans certains quartiers,il ne fait pas bon être femme, ni homosexuel, ni Juif,ni même Français ou Blanc. »Par contre, dans le programme du FN, il n'y a aucunélément sur les droits des personnes LGBT ni surles moyens de lutter contre l'homophobie.Quelle a été la position du FN lors des débatssur le mariage pour tou-te-s ?Les instances du FN étaient opposées au mariagepour tou-te-s, mais seuls quelques membres duparti se sont joints aux manifestations antimariage.Un sondage IFOP établissait ainsi fin2012, alors que la contestation prenait toute sonampleur, que 33 % des sympathisants de l'UMPsoutenaient le mariage pour tou-te-s alors que42 % des sympathisants du FN en faisaientautant. Un différentiel de près de 10 points. Maisce n'est pas surprenant quand on regarde la structurationdu vote catholique des deux partis : le FNest un parti où le vote catholique pèse peu,contrairement à l'UMP. On peut aussi penser queles réussites des partis populistes européens promariagepour tou-te-s, comme le PVV (Partij voorde Vrijheid) de Geert Wilders aux Pays-Bas, ont puinfluencer le FN.Y a-t-il des personnes LGBT au sein du FN ?Il y a toujours eu des homosexuels au sein du FN,Jean-Marie Le Pen s'en est accommodé. Nuldoute que le discours de Marine Le Pen a contribuéà faire tomber les réticences de personneshomosexuelles qui hésitaient à franchir le pas del'adhésion. Et certains cadres du parti ne cachentplus leur homosexualité. Certains des gays et lesbiennesque j'ai interviewés en 2011 vivaient unclivage moral et affectif, car ils auraient bien aimése marier avec leur conjoint ou leur conjointe,mais ils craignaient que cela soit interprété parles autres militants comme une revendicationcommunautariste. Là réside l'ambiguïté du FN,dans le refus de donner l'égalité des droits (pourtantune valeur universaliste) au nom de la luttecontre le communautarisme.Pour aller plus loin : réponse de Marine Le Pen au questionnairede SOS homophobie lors de l’élection présidentielle.http://www.sos-homophobie.org/presidentielle/presidentielle-2012-reponses-de-marine-le-pen-au-questionnaire-de-soshomophobieSylvain Crépon,sociologue, étudie depuis les années 1990 le FN.Son dernier ouvrage, Enquête au cœur du nouveauFront national, contient un chapitre intitulé« Un Front national féministe et gay-friendly ? »


Rapport sur l'homophobie 2014PresseL'actualité fut (à peu près)couverteLes noces sans FigaroLe mariage pour tou-te-s n’est pas passé sous silencedans les pages du Figaro, qui s’est montré trèsprésent, voire sur le pied de guerre toute l’année.Frigide sur les mots ? Pas vraiment. Engagé ? Sansaucun doute ! Le quotidien a suivi minutieusementles moindres faits et gestes… des opposant-e-sau projet de loi.Annonce, traitement et analyse dechacune de leurs manifestations, les opposant-e-sont fait la une à plusieurs reprises : « Raz de marée »,titre-t-il au lendemain de la manifestation desopposant-e-s du 13 janvier 2013.En revanche, silence en une sur les actions despartisan-e-s du projet de loi qui n’ont été traitéesqu’en pages intérieures. La parole a plutôt étédonnée à Frigide Barjot ou à des élu-e-s ouvertementopposé-e-s au projet de loi comme FrançoisFillon, Henri Guaino ou encore Brice Hortefeux.Même son de cloche dans les éditoriaux, dont lespropos ont été à plusieurs reprises en défaveur duprojet de loi. Le vote définitif de la loi le 23 avrilpousse Le Figaro à titrer : « Les sages peuvent-ils direnon ? », s’accrochant ainsi à l’espoir de voir le texteretoqué par le Conseil constitutionnel.L’agression homophobe de Wilfred et Olivier passequant à elle inaperçue. Pas un mot non plus surla Marche des fiertés LGBT de Paris le 29 juin,l’élection de la ville de Paris pour les Gay Games2018 ou encore la marche Existrans le 19 octobre.Lors de la célébration du premier mariage pourtou-te-s le 29 mai, Le Figaro est présent maisdiscret, avec un titre à double tranchant : « Pour lemeilleur et pour le pire ». Un brin ironique ?Tout le Monde LGBT ou presqueLe Monde couvre largement l’actualité LGBT en2013. Le traitement des débats autour de la loiTaubira révèle un quotidien plus militant qu’en2012.A l’occasion de la Manif pour tous en janvier,Le Monde n’hésite pas à qualifier avec humource mouvement hétéroclite - dont il souligne lesdissensions internes 1 - d’« alliance contre-nature » 2 .Le journal évoque le malaise que peuvent susciterles propos tenus à cette occasion 3 , chez les homosexuel-le-smais aussi chez certain-e-s croyant-e-scatholiques 4 . Il dénonce les raccourcis idéologiques5 , les sophismes 6 , la désinformation quant aunombre de manifestant-e-s 7 ,et n’hésite pas à parlerde « perversion homophobe de la démocratie 8 ».La manifestation des partisan-e-s du mariage pourtou-te-s est elle aussi traitée 9 , Le Monde n’hésitantpas à souligner la mauvaise couverture qu’en fontd’autres médias 10 .L’actualité LGBT internationale est évoquée, auxEtats-Unis 11 mais surtout en Russie : Le Monde1. Le Monde, 13 janvier 20132. Le Monde, 21 janvier 20133. Le Monde, 13 janvier 20134. Le Monde, 12 janvier 20135. Le Monde, 17 janvier 20136. Le Monde, 27 janvier 20137. Le Monde, 22 janvier 20138. Le Monde, 24 janvier 20139. Le Monde, 27 janvier 201310. Le Monde,27 janvier 201311. Le Monde, 27 juin 2013, Le Monde, 28 juin 2013


133Le Figaro, 27 mai 2013dénonce la loi homophobe alors même qu’elle estencore en gestation 12 .On parle davantage des personnes trans cette année,notamment à l’occasion des débats sur la prétendue« théorie du genre » 13 , du mariage pour tou-te-smais aussi lors de l’abolition en Suède de la loi lesobligeant à être stérilisé-e-s pour changer d’étatcivil 14 . La marche Existrans de 2013 n’est évoquéeque parce qu’elle a été interrompue par des CRS 15 .Pour finir, Le Monde oublie curieusement de parlerde la désignation de Paris comme ville organisatricedes Gay Games en 2018.La Croix, un balancier à toute épreuveL'année 2013 fut largement dominée par les débatssur le mariage pour tou-te-s, et La Croix a continuésa politique d'équilibriste,déjà mise en évidence dansle Rapport 2012 : opposition claire mais réclamationd'un débat 16 , d'où une certaine ouverture à lacontradiction dans ses colonnes.Ainsi,le journal ne cache pas sa position,par exempleen relayant directement celle de l'Eglise 17 , encouvrant avec bienveillance les initiatives des opposant-e-s18 , et en leur ouvrant largementleur rubrique spirituelle 19 .Mais il garde tout de même lavolonté de donner la parole aux partisan-e-sdu mariage pour tou-te-s,en consacrant des articles à leursmanifestations ou via le courrier deslecteurs 20 , comme celui du 23 marss’indignant qu’on puisse manifester« contre le droit d’une minorité »,voire directement aux coupleshomosexuels 21 .On peut par ailleursrelever que,contrairement à l'annéedernière, une prise de distance progressivede la rédaction a lieu parrapport à la Manif pour tous,comme dans une chronique du20 avril, qui parle ouvertementd’une « traque haineuse » à proposdu harcèlement subi par la journalisteCaroline Fourest, sans toutefoisoser prononcer le mot « homophobie » 22 .En dehors du débat sur le mariage pour tou-te-s,l'actualité LGBT fut assez largement couverte demanière plutôt factuelle par le journal. On peutcependant relever des non-dits,comme par exemplele silence complet sur l’orientation sexuelle de PatriceChéreau dans sa nécrologie 23 . Pour terminer sur unenote positive,soulignons l'ouverture croissante dansses colonnes aux personnes LGBT dans leur quotidien,comme dans cet article du mois de juillet 2412. Le Monde, 5 avril 201313. Le Monde, 25 juillet 2013, Le Monde, 14 septembre 201314. Le Monde, 29 juin 201315. Le Monde, 9 octobre 201316. Editorial en couverture de La Croix, 29 janvier 201317. « Mariage pour tous, l'Eglise se manifeste », La Croix, lundi7 janvier18. Comme cet article au titre tendancieux : « Le non massif dela rue au mariage pour tous », La Croix, 25 mars 2013, p.519.Voir par exemple l'entretien avec Gilles Bernheim au titresignificatif « Nous avons perdu la compréhension de cequ'est le sens moral », La Croix, 5 et 6 janvier 2013, p.1120. Courrier des lecteurs, La Croix, 29 mars 2013, p.421. La Croix, 24 avril 2013, pp.622. Chronique de Bruno Frappat, La Croix, week-end du20 avril 2013, p.2823. « Patrice Chéreau, l'homme brûlé », La Croix, 9 octobre2013, p.20


Rapport sur l'homophobie 2014 • Pressequi commence par « Christine et sa compagne »et où apparaît de manière étonnante le terme« transgenre » auquel les lecteurs-trices sont sansdoute peu habitué-e-s !20 minutes, le tour des questions LGBTLe quotidien le plus lu de France s’est longuementpenché sur les débats et les manifestations autourdu mariage pour tou-te-s, avec une cinquantained’articles et de brèves sur le seul premier semestre.Il a traité le sujet de manière factuelle, donnant laparole aux partisan-e-s comme aux opposant-e-s.L’opposition au projet de loi est présentée comme« unie mais stérile »,le dérapage de Xavier Bongibault,comparant François Hollande à Hitler,mis en exergue,et la montée des insultes et agressions homophobesbien exposée, jusqu’à la une. Le journal a égalementrelaté les agressions contre les forces de l’ordre etles dégradations commises par des opposant-e-sau mariage pour tou-te-s : lors des manifestations,contre une exposition de photos ou un centreculturel.Le débat parlementaire et les tergiversationsde la majorité sur la PMA ont fait l’objet de plusieursarticles, tout comme la célébration du premiermariage entre deux personnes de même sexe, à laune de deux éditions.20 minutes a également relaté les agressions contreWilfred et Olivier à Paris, et contre un bar gay deLille, l’homophobie sur Twitter, ainsi que la recommandationde l’Unesco sur la sensibilisation desenfants au problème de l’homophobie dès cinq ans.A l’étranger, le journal s’est surtout penché sur ladécision de la Cour suprême des Etats-Unis sur ladéfinition du mariage, ainsi que sur les violenceslesbophobes en Afrique du Sud, à l’occasion d’undéplacement de Valérie Trierweiler.A l’approche desJO de Sotchi, la montée des violences en Russie n’afait l’objet que d’une brève.Les pages culturelles ont largement abordé les filmsautour de l’homosexualité, La Parade, L’Inconnu dulac, Les garçons et Guillaume, à table !, LaVie d’Adèle.C’est seulement dans cette rubrique que lesquestions trans ont été abordées, à travers le documentairesur Bambi. Enfin, dans le domaine sportif,20 minutes a consacré un dossier à l’homophobiedans le football professionnel français, et a présentéen détail les Gay Games qui se dérouleront à Parisen 2018.Le Parisien, débat pour tou-te-sEn 2013, Le Parisien laisse une place importante auxthématiques LGBT dans ses pages. Logiquement,le débat sur le mariage pour tou-te-s constitue leprincipal sujet abordé (environ 60 % des articles del’année liés aux questions LGBT).Quatorze unes sontmême consacrées au sujet. Le journal ne prend pasparti dans ce débat,et laisse s’exprimer les différentspoints de vue existants au sein des familles politiques25 .Le premier mariage entre personnes de mêmesexe, à Montpellier, est ainsi couvert, avec toujoursune volonté de pédagogie 26 .Le mariage pour tou-te-s continue d’être évoquédans les colonnes du journal même après les premièrescérémonies. Un article nous donne ainsi desnouvelles du premier couple gay marié quelquesmois après leur union. Le premier mariage d’uncouple homosexuel dans une série française faitpar ailleurs l’objet d’une interview 27 .Mais les questions homosexuelles ne se limitent pasau débat sur l’ouverture du mariage, et le quotidienaborde toute une série de problématiques liées auxquestions LGBT : discrimination au travail, dans lesport, sur Internet, etc. Le débat sur l’ouvertureaux gays du don du sang est par exemple placéen première page du journal, le jour de la remised’un rapport à la ministre de la Santé 28 . Le Parisienaborde généralement les questions LGBT sous unangle positif :prévention de l’homophobie dès l’écolematernelle, conseils aux parents pour parler desdébats sur le mariage,etc.Le journal met également24. « A Mazille, des chrétiens homosexuels se ressourcent aucarmel de la Paix », La Croix, 11 juillet 2013, p.1225. « Mariage gay : un faux tremplin pour l’UMP », Le Parisien,9 janvier 2013« Le mariage gay divise les familles… politiques », LeParisien, 12 février 201326. « Voilà le livret de famille… pour tous », Le Parisien, 29 mai201327. « Plus beau le mariage gay », Le Parisien, 22 juillet 201328. « Don du sang : un projet pour ne plus exclure les gays »,Le Parisien, 17 juillet 2013


135en valeur le témoignage d’une mère « homophoberepentie » qui raconte son cheminement intérieur 29 .Les questions LGBT sont aussi traitées au niveaude la vie locale : position des personnalités politiquessur le mariage et l’adoption par les homosexuel-le-s,comptabilisation des mariages pourtou-te-s célébrés dans chaque arrondissementparisien, etc. L’attribution des Gay Games 2018 àla ville de Paris fait aussi partie des événementsrelayés par l’édition locale.Nous regrettons néanmoins que les questions transaient été totalement absentes des thématiquesabordées par le journal.Ouest-France, une communication partialeOuest-France a consacré en 2013 près d’unecentaine d’articles aux questions LGBT. Un recordpour un journal généralement peu bavard sur cesthématiques.L’actualité du débat sur le mariage pour tou-te-sa, à elle seule, justifié 70 articles, publiés majoritairemententre janvier et juin, selon trois phasesdistinctes : les débats parlementaires, les manifestations,et les portraits.La restitution des débats àl’Assemblée nationale et au Sénat révèle unecertaine justesse :la parole des un-e-s et des autresest retranscrite de façon équitable. Les portraits deChristiane Taubira et Dominique Bertinotti sontintéressants et sans parti pris. Mais dès que commencentles manifestations,l’étude des articles meten lumière un traitement du sujet pour le moinsfortement orienté. La parole des opposant-e-s aumariage pour tou-te-s a indiscutablement faitl’objet d’un traitement privilégié : pour un articledans lequel la parole a été laissée aux partisan-e-sdu mariage, on en compte au moins deux pour lesopposant-e-s. Notre analyse pourrait doncs’achever sur ce constat : « du simple au double ».Elu-e-s,responsables d’associations,prêtre,psychologueou encore universitaire ont eu la possibilitéd’exprimer leur désaccord, leur inquiétude ou leurexaspération vis-à-vis d’un projet de loi allant à l’encontrede leurs convictions. Ouest-France a relayéle bruit de la rue et passé sous silence l’avis de toutescelles et de tous ceux qui pouvaient enrichir etdépassionner le débat.On regrettera donc certain-e-s absent-e-s, que lejournal n’a pas daigné intégrer à la discussion : lescatholiques ne se retrouvant pas dans les idées expriméeslors des nombreuses manifestations contre lemariage pour tou-te-s, les familles monoparentales(qu’ont pensé ces femmes, qui élèvent leurs enfantsseules,des slogans et des affirmations sur ce que doitêtre LA vraie famille française ?),les enfants adoptée-set leur famille (leur avis sur la négation de touteidée de famille qui ne soit biologique aurait pourtantété instructif), etc. Quant aux homosexuel-le-s,jeunes, âgé-e-s, seul-e-s ou en couple, souhaitantse marier ou non, avec ou sans enfants, leur voix estrestée sans écho. La parole a ainsi été donnée entrès grande majorité aux personnes qui n’étaientpas directement concernées.La passion des débats et des manifestations étantretombée, Ouest-France reprend,dès le mois de juin,son rythme de croisière sur le traitement des questionsLGBT :quelques courts articles sur les violencesà l’encontre des homosexuel-le-s en Russie, et surles derniers soubresauts des Veilleurs dans l’Ouestde la France, quelques lignes sur les maires réfractairesau mariage de couples de personnes de mêmesexe,ou sur l’homophobie à Mouzillon qui n’accueillerapas de club gay dans sa commune. Ouest-Francesemble ainsi avoir cédé à la facilité, et n’a pascouvert l’actualité avec impartialité, choisissantson camp. Malgré cet état de fait, il reste que le4 mars 2013, la publication du portrait d’OliviaChaumont, transsexuelle décrivant son parcourset ses combats, reste l'un des plus beaux témoignagesde l’année 2013.Libération, un soutien exemplaireEn 2013, Libération confirme sa position d’allié despersonnes LGBT dans leur lutte pour l’égalité desdroits,en particulier à travers la couverture qui auraété faite du mariage pour tou-te-s.Le quotidien place le sujet plusieurs fois en une 30 , et29. « Anna, homophobe repentie », Le Parisien,7 novembre 2013 (insert dans chapitre Famille)30. Libération, 1 er janvier, 26 janvier, 28 janvier, 22 avril, 23avril, 27 mai, 30 mai, 1er juin,10 août et 20 août 2013


Rapport sur l'homophobie 2014 • PresseLibération, 23 avril 2013


137plusieurs éditoriaux manifestent l’engagement dela rédaction en faveur du projet de loi. NicolasDemorand salue un « texte de rassemblement qu’aucunemajorité républicaine n’aura le couraged’abroger » qui a pour effet de « dissoudre uneinégalité et une discrimination incompréhensibles auregard du droit républicain 31 ».Libération constate la réussite des manifestationsdes opposant-e-s tout en y observant « une homophobieordinaire qui consiste à manifester pour lemaintien d’une discrimination 32 ». Mais la « dernièreséance », le 26 mai, n’est qu’« une Réac Pride qui sedégonfle […], une marche des fiertés réactionnaires[…], un bouillonnement de haines réchauffées 33 ».Par souci d’équilibre,Libérationdonne parfois la paroleà des opposant-e-s,mais la majorité des intervenante-ssont favorables au mariage pour tou-te-s, qu’ilsellessoient politiques, psychologues, sociologues,philosophes, etc. Le quotidien s’inquiète aussi de lamontée du nombre d’agressions LGBTphobes, etinterroge à plusieurs reprises SOS homophobie oule Refuge sur ce sujet 34 .Libération se fait par ailleurs l’écho de « l’étonnement» que la violence des débats sur le mariage« complètement dépassés » suscite chez des étrangers« effarés » et « un rien ébahis 35 », sans oublierd’évoquer la situation difficile des gays et deslesbiennes dans certains pays étrangers (Russie,Ouganda, etc.), où des lois homophobes ont étévotées 36 .Enfin, « au terme de longues semaines de débatsponctuées de débordements homophobes surle mariage gay », Libération se félicite de l’attributionde la Palme d’or à La Vie d’Adèle, film « éblouissant» qui « regarde le coup de foudre des deux jeuneshéroïnes non comme une anomalie ou une curiositémais comme une passion prenant germe dansun éternel amoureux 37 ».Le Nouvel Obs, oui au mariage pour tou-te-sEn 2013, Le Nouvel Observateur s’est engagéfermement dans le camp des défenseur-ses de lacause LGBT.A l’occasion d’un numéro spécial 38 comprenant undossier de seize pages, la rédaction de l’hebdomadaireprend position en faveur du projet de loi sur lemariage pour tou-te-s, et publie un manifeste ence sens, signé par des personnalités du mondepolitique, des médias, des arts ou du sport. Dansson éditorial,Laurent Joffrin,pour qui le mariage pourtou-te-s est une « mesure d’égalité républicaine »dénonce « l’hypocrisie et l’homophobie » des opposant-e-stel-le-s que Frigide Barjot.L’attitude de cette dernière est d’ailleurs particulièrementcritiquée dans un reportage 39 où l’ons’interroge sur le « double langage » d’« une drôlede paroissienne » aux « dessous pas très chics ».Après quelques mois de manifestations et de débordementsLGBTphobes, Le Nouvel Observateurconstate qu’« on se bat pour empêcher l’autred’accéder au même droit que soi » et demande que« les républicains n’écoutent pas ces artisans del’intolérance et de la régression française 40 ».Si Jean Daniel estime qu’« il y avait des questions plusurgentes » que le mariage pour tou-te-s, LaurentJoffrin dénonce dans le même numéro « un vocabulaire,une rhétorique, une outrance des opposante-sau mariage pour tou-te-s qui ne devraient pasexister en République ». C’est aussi l’occasion pourl’éditorialiste d’opposer une France réactionnaireet une France libérée, à l’image des héroïnes de LaVie d’Adèle, « magnifique histoire d’amour entrefemmes 41 ».Si de nombreux éditoriaux ou chroniques ontdémontré l’engagement de l’hebdomadaire dans lecamp des partisan-e-s de l’égalité des droits,on peutregretter cependant que des thèmes commel’homophobie, la biphobie et la transphobie dans lasociété française ou à l’étranger n’aient pas donnélieu à des enquêtes plus approfondies.31. Libération, 23 avril 201332. Libération, 5 mai 201333. Libération, 27 mai 201334. Libération, 24 janvier et 15 mai 201335. Libération, 12 février 201336. Libération, 8 février, 13 juin, 9 août, 9 novembre et 20décembre 201337. Libération, 27 mai 201338. Le Nouvel Observateur, 10 janvier 201339. Le Nouvel Observateur, 7 février 201340. Le Nouvel Observateur, 25 avril 201341. Le Nouvel Observateur, 30 mai 2013


Rapport sur l'homophobie 2014ReligionsL’alliance sacrée contre l’égalité19%Inconnu2%Trans58%Hommesexe des victimes21%Femme5%+ de 50 ans19% 2%Inconnu58%35-50 ansâge des victimes- de 18 ans18-24 ans7%9% 25-34 ans23%Inconnu61%AutresrégionsÎle-de-France16%origine géographiqueHarcèlement93%RejetignoranceMenaceschantage5%5%5%35%Insultes23%DiscriminationAgressions physiquesManifestations de l’homophobie*43 témoignages, correspondantà 43 cas, soit 1% du total.Les arguments religieux ont nourri le débatautour de l’adoption de la loi ouvrant lemariage aux couples de personnesde même sexe,mais le changement inattenduà la tête de l’Eglise romaine a sansdoute déplacé une partie de la discussion.En attendant, au niveau international,de très mauvaises nouvellesarrivent de plusieurs pays (lire chapitreInternational).Au Nigeria,une des lois lesplus punitives contre les homosexuel-lesa été votée au Parlement le 30 mai2013, ce qui, pour les commentateurstriceseuropéen-ne-s,constitue « une victoire de pluspour les évangélistes américain-e-s, qui ont voyagéen Afrique pour propager leur homophobie pleine«L’homosexualitéc’est cequi signela fin de lacivilisation»de haine 1 ».Le 20 décembre 2013,c’est le Parlementd’Ouganda qui a fait passer une loi punissant depeine de prison à vie tous les actes sexuelsentre personnes du même sexe (le présidentYoweri Museveni a d'abord refusé designer le décret en janvier 2014, en ajoutantque les personnes « anormales »,i.e. les homosexuel-le-s, ne devraient pasêtre tuées ou emprisonnées, mais soignées2 .(Il s'est laissé convaincre que l'homosexualitén'étant pas génétique maiscomportementale, elle peut et doit êtrepunie,et la loi a été promulguée en février2014.) Le durcissement des positions à l’égard des* Plusieurs manifestations peuvent être identifiées sur un cas. Enconséquence, le total des manifestations est supérieur à 100 %.


139homosexuel-le-s dans ce pays a été fortementinfluencé par la propagande des ultra-conservateurs-tricesreligieux-ses américain-e-s,notammentde l’activiste anti-gay et chrétien militant ScottLively et du pasteur évangélique Rick Warren 3 .Les témoignages reçus par SOS homophobie en 2013,en forte hausse par rapport à l’année précédente(leur nombre a doublé), montrent non seulementl’incompréhension de la violence, physique et symbolique,des actions et des déclarations LGBTphobesdes personnes se réclamant des religions,mais aussi la crainte de la rupture du pacterépublicain : la laïcité française est vuecomme menacée étant donné la place queplusieurs religions se sont octroyée dans ledébat sur le mariage pour tou-te-s.Les messages témoignent de la souffrancedes élèves homosexuel-le-s dans des établissementsconfessionnels,mais aussi des professeure-s– ces derniers-ères se sentent souvent humilié-e-spar leurs employeurs-euses qui, dans le contexte duvote de la loi sur le mariage pour tou-te-s, n’hésitentpas à prendre publiquement position contre celui-ci,avec des arguments souvent très violents ;il leur arriveaussi de subir des insultes de la part des élèves.Dans certaines familles très croyantes (cela concerneles trois grandes religions monothéistes),initialementtrès fusionnelles,la découverte de l’homosexualité del’enfant a brisé tous les liens, et a parfois provoquéune violence physique à son égard.Certain-e-s jeunestentent même des thérapies de « conversion » àl’hétérosexualité par la religion, malgré l’absence detoute preuve d’efficacité de celles-ci et l’immensesouffrance qu’elles provoquent. L’ambiance menaçantese retrouve aussi au travail, car plusieurspersonnes nous ont signalé la réception de courrielsà caractère religieux qui reprennent des passageshomophobes des textes dits sacrés.Le catholicisme : qui sommes-nous pour jugerles papes ?Le début du pontificat du pape François semblaitannoncer la rupture avec l’austérité de Benoît XVI.Ce dernier a marqué les esprits par des positionsclairement hostiles à l’égard de l’homosexualité,et parl’omniprésence de celle-ci dans ses discours.Il «refuseraitd'aller dansun paradishomophobe»L’attitude du nouveau pape à l’égard de l’homosexualitésemble marquée par la compassion.Aprèsune visite de sept jours à Rio de Janeiro à l’occasiondes Journées mondiales de la jeunesse, le papeFrançois, dans l'avion du retour, a prononcé unephrase qui a fait le tour du monde : « Si une personneest gay et cherche le Seigneur, fait preuve debonne volonté,qui suis-je pour la juger 4 ?»Il est toutefoisintéressant de noter que cette idée intervientdans une conversation au sujet des prêtres à tendanceshomosexuelles,et – dans les propos du pape– ce sont eux qui ne doivent pas êtrejugés. Elle semble aussi faire un écho critiqueau document de 2005 qui déclareque l'Eglise « ne peut pas admettre auséminaire et aux Ordres sacrés ceux quipratiquent l'homosexualité, présententdes tendances homosexuelles profondémentenracinées ou soutiennent ce qu'onappelle la culture gay 5 ». Cette volonté de « ne pasjuger » a néanmoins été réitérée dans un contexteplus large, accompagnée de celle de diminuer l’insistancede l’Eglise sur des « questions liées à l’avortement,au mariage gay et à l’usage des méthodescontraceptives » (bien que les positions sur ces questionssoient inchangées 6 ).Ce changement de ton (et nullement de fond) a suffipour que le pape devienne la « Personne de l’année »du magazine Time qui a consacré, dans l’article lecélébrant, beaucoup de place à l’attitude de l’Eglise1. Selon Ulrike Lunacek, parlementaire européenne et porteparoledu Parti vert européen, http://www.lgbt-ep.eu/pressreleases/nigeria-adopts-harshest-homophobic-law-in-recenthistory/2. « Gays and lesbians 'sick', Ugandan President says inblocking anti-gay bill », cnn.com, 18 janvier 2014.3. Zoe Alsop, « Uganda's Anti-Gay Bill: Inspired by the U.S. »,Time, 10 décembre 2009, http://content.time.com/time/world/article/0,8599,1946645,00.html4. « Conférence de presse du Saint-Père durant le vol deretour du voyage apostolique à Rio de Janeiro », Brésil,22-29 juillet 2013, http://www.vatican.va/holy_father/francesco/speeches/2013/july/documents/papafrancesco_20130728_gmg-conferenza-stampa_fr.html5. Instruction de la Congrégation pour l'éducation catholiquesur les critères de discernement vocationnel au sujet despersonnes présentant des tendances homosexuelles en vuede l'admission au séminaire et aux Ordres sacrés, 2005.6. «Antonio Spadaro, S.J., « A Big Heart Open to God. Theexclusive interview with Pope Francis », 30 septembre


Rapport sur l'homophobie 2014 • Religionsà l’égard des gays et lesbiennes, en notant en particulierque : « Ce changement peut ne pas ressemblerà une véritable avancée dans les pays développéscomme les Etats-Unis. Mais la sensibilité du pape àl’égard de l’orientation sexuelle a un impact toutdifférent dans des pays en développement, oùl’homophobie est institutionnalisée, généralisée etprovoque des sanctions 7 .»Le même pape a éténommé Personnalité de l’année par le plus ancienmagazine LGBT américain, The Advocate, car il amontré à plusieurs reprises sa volonté d’entretenirun dialogue respectueux avec les personnes homosexuelles.Lesidées encore plus encourageantes viennentd'Afrique du Sud,où l'archevêque Desmond Tutua déclaré, à l'occasion d’une réunion del'ONU en juillet 2013, qu’il « refuseraitd'aller dans un paradis homophobe » et nepourrait pas « louer un Dieu homophobe 8 ».«J’aiapplaudiaux prêchesdu prêtrequi nousmontraiten quoi lesgenscomme moiétaientbonsà brûler»Cette bienveillance ne semble toutefoispas avoir pénétré la plupart des institutionsreligieuses, ni certains sites Internetcatholiques,comme le prouvent les témoignagesreçus par SOS homophobie.Auprèsde certaines autorités religieuses, resteprésente l’idée selon laquelle il y auraitun complot autour de la loi Taubira, et setrouve évoquée la prétendue « loi dusilence imposée par des lobbies ultraminoritairesmais exerçant une pressioninouïe sur les responsables politiques et laplupart des grands médias 9 », qui empêcheraitnotamment les député-e-s de critiquerle projet de loi. Le conseil permanent de laConférence des évêques de France a publié le 16janvier 2013 un communiqué dans lequel les évêquessouhaitent que « les élus et les politiques proposentdes solutions et des formulations qui soientrespectueuses du caractère hétérosexuel dumariage, de la filiation et des personnes homosexuelles» – autrement dit, des « solutions » quiiraient à l'encontre du projet de loi Taubira. Le cardinalAndré Vingt-Trois a choisi le registre apocalyptique.Dans la plupart de ses interviews, ilannonce la création d'un clivage indépassable ausein de la société par le vote de la loi (uneprophétie autoréalisatrice, étant donné l'engagementde l'Eglise dans les débats). Il dessine aussiune version menaçante de la société future quiaccepterait le mariage pour tou-te-s, où se produirait« l’occultation de l’identité sexuelle comme réalitépsychologique et la fermentation,la germinationd’une revendication forte de la reconnaissance de lasexualité différenciée 10 ». Quelques jours plus tard,le même cardinal a toutefois pris ses distances avecles débordements de la Manif pour tous.Les grandes manifestations contre le mariage pourtou-te-s, qui ont bénéficié d'une forte implicationde la part de réseaux catholiques, se sont accompagnéesde réunions très fréquentes de catholiquesregroupé-e-s autour de l'Institut Civitasqui, indépendamment de l'interdictiondes prières de rue depuis 2011, priaientà genoux près du Sénat.IslamEn France, nombreuses ont été les voixhostiles à l’égard de l’homosexualité de lapart de musulman-e-s,dont plusieurs ontrejoint la Manif pour tous. Nombreusesont été aussi les personnes qui ontcontacté SOS homophobie pour partagerleur désolation devant la haine et la violenceprésentes sur les sites Internet seréclamant de l’islam et sur les réseauxsociaux.Les insultes qui qualifient l’homosexualitéd’« un pas vers l’inceste» ou designe de pédophilie, et qui évoluent versles menaces de violence physique au nomde la religion sont légion.La situation internationale est encore plus difficile.Le think tank américain Pew Research Center7. Howard Chua-Eoan & Elizabeth Dias, « TIME's Person of theYear 2013 : Pope Francis, The People's Pope », 11 décembre2013, http://poy.time.com/2013/12/11/person-of-the-yearpope-francis-the-peoples-pope8. «Desmond Tutu n'adorerait pas Dieu s'il était homophobe»,27 juillet 2013, http://www.rfi.fr/afrique/20130727-desmond-tutu-homophobie-lutte-dieu-campagne9. Message de Mgr Marc Aillet, évêque de Bayonne, Lescar etOloron, pour le 15 août 2013, http://www.diocesebayonne.org/spip.php?article372910. Discours d'ouverture du cardinal André Vingt-Trois lors del'assemblée plénière du 16 avril 2013.


141a publié en mai 2013 une étude sur le contenu descroyances des musulman-e-s,notamment en ce quiconcerne l’homosexualité.Celle-ci est condamnéecomme moralement mauvaise par l’écrasantemajorité des musulman-e-s dans les 36 pays étudiés.Les seuls pays où plus de 10 % de fidèles ontdéclaré qu’elle est moralement acceptable sontl’Ouganda (12 %), le Mozambique (11 %) et leBangladesh (10 %).Nouvelles voix,nouvelles interprétationsde l’islamMais ce rejet populaire de l’homosexualité, quisemble caractériser la majorité des fidèles, devientde plus en plus contesté chez les représentant-e-sde l’islam éclairé. Ainsi, quand en Egypte,le cheikh conservateur Ahmed el-Tayeb (l’ancien présidentde l’université al-Azhar au Caire) s’est expriméle 30 mai 2013 contre le mariage homosexuel, quientrerait dans la catégorie « haram » – le péchésuprême selon l’islam –, cette prise de position aprovoqué une réaction forte de la part de l’organisationinternationale Musulman-es Progressistes 11 ,qui s’en est désolidarisée,en permettant d’entrevoirl’hétérogénéité de cette religion.Ludovic-MohamedZahed,imam et porte-parole de la branche françaisede l’organisation, a d’ailleurs ouvertement parléde son mariage (datant d’avant la loi Taubira) enAfrique du Sud avec son compagnon.11. Muslim For Progressive Values : http://mpvusa.org/wpcontent/uploads/2013/01/Al-Azhar-FRENCH.pdfL’islam dans l’univers anglophone, ses fidèles, sesthéologien-ne-s et ses représentants politiques ontété traversés en 2013 par un important débat surl’homophobie.Au printemps 2013, une vidéo d’Abdul HakimMurad (connu également comme Tim Winter, sonnom de naissance), théologien de l’islam et enseignantà l’université de Cambridge, a été publiée surYouTube. Sur cette vidéo, le théologien qualifiel’homosexualité d’« aberration inexplicable 12 » ; cesparoles ont provoqué la colère des étudiant-e-s etde la presse. Cependant, Murad a tenu à préciserque cet enregistrement est maintenant très ancien(1995) et ne représente pas ses opinions actuelles:«la compassion et la compréhension sont meilleuresque les réprimandes 13 », écrit-il aujourd’hui.Des voix encore plus encourageantes sont venuesd’écrivains musulmans anglophones.Le journalistebritannique Mehdi Hasan, dans un article où ilprésente notamment ses excuses pour le comportementhomophobe qu’il a pu avoir dans sajeunesse, note que l'homophobie est proche del'islamophobie, étant nourrie par la peur de l'inconnu,etque « nous devons à tout prix éviter les stéréotypeset la diabolisation des uns et des autres 14 »(son propos n’est toutefois pas exempt de plusieursmaladresses et simplifications). L’écrivain américainMichael Muhammad Knight est allé encoreplus loin, et a publié en 2013 une tribune qui inviteà ne pas considérer l’islam comme inchangeable.Selon lui, les choix des versets et des éléments dela tradition musulmane dépendent des intentionsdes fidèles, qui doivent de toute façon les traduireen un discours parlant pour eux-elles. Or, « toutetraduction est une interprétation, et toute interprétationest un choix 15 » : les musulman-e-s peuventaujourd’hui rejeter les idées qui ont été acceptéespar la tradition mais qui n’ont plus aucune raisond’être, comme la condamnation de l’homosexualité,ou, par exemple, la légitimation du viol desesclaves.C’est aussi aux Etats-Unis qu’officie le premierimam ouvertement homosexuel, DaayieeAbdullah.Ses premières actions en tant qu’imamconsistaient à célébrer les funérailles des musulmansmorts du sida.12. « “Inexplicable Aberration” : Cam Lecturer SlatesHomosexuality », The Tab Cambridge,1 er mai 2013.13. Abdal-Hakim Murad, « Bayan – a clarification », 5 mai2013, http://www.masud.co.uk/ISLAM/ahm/bayan.html14. Mehdi Hasan, « As a Muslim, I struggle with the ideaof homosexuality – but I oppose homophobia », newstatesman.com,20 mai 2013.15. Michael Muhammad Knight, « Editing Homophobia out ofthe “Islamic Tradition” », vice.com, 17 avril 2013.


Rapport sur l'homophobie 2014 • ReligionsPriez pour euxCaroline, jeune femmeamoureuse d’une étrangèrevenue en France en tant quemissionnaire d’une églisechrétienne, nous a racontécomment elle a été empêchéepar cette institution de voirsa copine, et conclut : « J’aifait de grosses dépressionsqui m’ont posé des problèmesfinanciers, car j’ai eu du malà travailler après les ravagesfaits par cette église, qui va siloin et détruit tout sans pitié,pour deux phrases homophobesqui datent de 6 000 anset qui ne sont pas à mes yeuxune marque d’amour dontelle fait tant étalage. »Pour Victor, la fin de sascolarisation dans un lycéecatholique est un soulagement :« Je suis heureux parce queje ne vais plus devoir êtrecomplice de cette homophobieordinaire. Je l’assume,j’ai défilé sous les bannièresde la Manif pour tous, commepour me faire un certificatde bonne hétérosexualité.Je l’assume, j’ai applaudiaux prêches du prêtre de maparoisse traditionnaliste,qui, sous la dictée de Civitas,nous montrait en quoi lesgens comme moi étaientbons à brûler. Mais je ne saispas comment j’ai fait.Mon milieu familial est trèspropice à ce genre dedérapage, mais moi, au fond,j’ai compris que je me hais,que je hais ce que je suis. »Après s’être exprimée en classeen faveur du mariage pourtou-te-s, Laure a reçu le courrielsuivant : « Tu es une grosseconnasse, c’est toi la facho, ettous ceux qui sont pourcette folie, qui vont à la rencontre[sic !] des fondementsmêmes de l’humanité, et ledire en public prouve que tu esune grosse conne ! Le mariageest un acte religieux, toutes lesreligions interdisent l’homosexualité.Car c’est ce quisigne la fin de la civilisation. »La parole à…Martine GrossLa loi juive, s’appuyant sur les versets duLévitique (18,22 et 20,13), considère lesrapports sexuels entre hommes,notamment la pénétrationanale, comme une abomination qui méritela peine de mort. Le texte biblique n’évoque pasl’homosexualité féminine, mais les rabbins de toutestendances évoquent généralement la question del’homosexualité dans son ensemble en assimilantlesbianisme et homosexualité, qu’il s’agisse decondamner ou d’accepter.Les différents courants du judaïsme interprètentla loi juive concernant l’homosexualité avec plus oumoins de souplesse en s’accordant toutefois sur unpoint : à condition de rester discrète et de taire sonhomosexualité, c’est-à-dire en étant invisible,la personne homosexuelle doit être accueillie au seinde la communauté. Comme dans les églises chrétiennes,pour le courant orthodoxe du judaïsme,ce qui est condamné n’est pas la personne maisla pratique.Le courant libéral, minoritaire en France, n’attribuepas un caractère immuable à la loi juive et s’autoriseà adapter la pensée et la pratique juives à l’espritdu temps. Les rabbins du mouvement juif libéral deFrance sont convaincus que l’homosexualité ne posepas de problème avec l’éthique juive mais doiventfaire œuvre de pédagogie auprès de leur communautéencore divisée sur la question. Malgré les directivesdu mouvement libéral mondial permettant auxrabbins libéraux de célébrer des rituels d’union pourles couples de même sexe, le courant libéral françaisreste réticent à pratiquer de telles unions.Pour le courant massorti, lui aussi minoritaire enFrance, la loi juive doit être préservée mais peuts’adapter aux nécessités de l’époque. Les modificationssont réservées à l’assemblée des rabbins.La position de ce courant sur l’homosexualité estoriginale. L’homosexualité étant indépendante de lavolonté de la personne,celle-ci ne saurait en être tenuepour responsable. Sa situation de transgression nedoit pas la priver de la dignité de fidèle,ni l’écarter desdevoirs et des droits religieux (la fidélité, l’honnêteté,le respect mutuel, etc.), prescrits aux couplesmariés. Les rabbins massorti en France ne célèbrent


143pas d’unions de couples de même sexe bien quel’assemblée rabbinique au niveau mondial laisse lesrabbins libres de les pratiquer.Le courant orthodoxe est majoritairement représentépar les rabbins du consistoire. Cette institution a étémise en place par Napoléon pour représenter le cultejuif en France. Pour le courant orthodoxe, la loi juiveest immuable. L’homosexuel-le doit s’abstenir derelations sexuelles avec une personne du même sexe.Ces dernières années, les rabbins consistoriaux ontcependant infléchi leur position.En mai 2010,le rabbinMichaël Azoulay, représentant du grand rabbin deFrance au colloque « Religions, homophobie, transphobie»,disait publiquement qu'il fallait réinterpréterle texte du Lévitique condamnant les actes homosexuelsdans son contexte, lequel a changé avec lemonde contemporain. Selon lui, la condamnationconcernerait le viol qui ne saurait être assimilé àl'homosexualité entre deux adultes consentants.En mai 2011, le grand rabbin Gilles Bernheim acceptaitde signer la déclaration commune contrel’homophobie à l’occasion de l’IDAHO, la journéemondiale contre l’homophobie.En octobre 2012,il prenait cependant publiquementposition dans un essai, Mariage homosexuel, homoparentalitéet adoption : ce que l’on oublie souventde dire, contre le projet de loi ouvrant le mariage etl’adoption aux couples de même sexe.Selon le grandrabbin, la tolérance envers les homosexuel-le-s nejouerait « que le rôle d’un cheval de Troie dans leurcombat contre l’hétérosexualité ».Le ton de l’essai estviolent. Le lexique pour dénoncer ce qui serait del’ordre d’un complot des militant-e-s homosexuelle-spour « dynamiter les fondements hétérosexuelsde notre société » est guerrier :cheval de Troie,combat,destruction, négation, etc. Les homosexuel-le-s,par diverses stratégies, chercheraient à réaliser unambitieux projet : détruire le mariage, combattrel’actuel modèle familial,nier la sexuation.Le discoursquasiment homophobe de l’essai,prêtant aux homosexuel-le-sdes objectifs destructeurs, ne manquepas d’étonner et contraste avec ses déclarationsantérieures.Tant les rabbins libéraux que les rabbins massortiont contesté par voie de presse la prétention dugrand rabbin à représenter la seule voix du judaïsmereligieux. Ils ont exprimé plus clairement des positionsouvertes au sujet de l’homosexualité,du mariage civil des personnes de même sexe,qu’ils ne confondent pas avec une union religieuse,et se montrent attentifs aux vécus des personneshomosexuelles, des couples de même sexe et desfamilles homoparentales.Cependant,la légitimité accordée au consistoire parla République a contribué à effacer la diversité dujudaïsme religieux. Les courants libéraux et massorti,majoritaires aux Etats-Unis, ont plus de malà faire entendre leur voix.Martine Gross,chercheuse au CEIFR (CNRS-EHESS),auteure de plusieurs ouvrages et articlessur l’homoparentalité


Rapport sur l'homophobie 2014Santé-MédecineA quand un vaccin contreles LGBTphobies?Inconnu 6%Trans51%Homme3%Femme40%+ de 50 ans6%Inconnu17%29%35-50 ans- de 18 ans9%18-24 ans10%29%25-34 ansInconnu17%23%Île-de-France60%Autresrégionssexe des victimesâge des victimesorigine géographiqueOuting 6%Refusde soin 6%MéprisJugement37%9%InsultesMoqueries17%Discrimination25%Autres*manifestations de l’homophobie35 témoignages, correspondantà 35 cas, soit 1% du total.En 2013,nous avons reçu 35 témoignages relatifsau domaine de la santé et de la médecine,soit près de 50 % de plus qu’en 2012.Comme pour les autres contextes, cette haussesemble fortement liée aux débats sur le mariagepour tou-te-s.Plus du tiers des témoignages signalent des remarqueset jugements méprisants sur l’homosexualitétenus par des hommes et femmes médecins,gynécologues,psychiatres, psychologues, kinés et infirmiers-ères.A l’occasion des débats sur le mariagepour tou-te-s, certain-e-s ont ouvert les vannes,se permettant d’infliger leurs convictions personnellesà leurs patient-e-s sans se soucier de leurimpact sur leur guérison et leur bien-être.Ces écartssont très mal ressentis par les patient-e-s qui ontsouvent noué une relation de confiance avec cesprofessionnel-le-s, une confiance cruciale pour lesuccès de la thérapie. Les patient-e-s se sententcomplètement déstabilisé-e-s, infériorisé-e-s, etparfois comme pris-es au piège : ils et elles n’ontparfois pas la possibilité matérielle de changer dethérapeute,ou bien sont engagés dans une thérapiejugée très satisfaisante jusqu’à ces remarques. Lesappelant-e-s attendent des thérapeutes une neutralitésur ces questions, et estiment que ces jugementssont contraires à la déontologie médicale :« Un psychiatre est supposé fournir une écoute,pas un positionnement idéologique », « Retomber* Autres - essentiellement ouvrages/articles sur la santé


145sur la Manif pour tous version psy,ça m’a fait du mal,car je me sens déjà très rejetée à la base. » Ils et elless’interrogent sur la meilleure manière de réagir,déçu-e-s et inquiets-ètes de devoir envisager demettre un terme à ces relations thérapeutiques.Plusieurs témoins font aussi état de leur consternationà la lecture d’articles et ouvrages de santépublique invisibilisant ou dévalorisant l’homosexualité(près du quart des témoignages). Ainsi unebrochure intitulée « Mes années ado », disponible àl’infirmerie d’un collège de Rhône-Alpes, explique« Ce qui se passe chez les garçons [à la puberté] :tu commences à te poser des questions et aussi àt’intéresser au sexe opposé ». De telles assertionsne peuvent que renforcer le sentimentd’isolement ou d’étrangeté chez les jeunesqui découvrent leurs attirances homosexuelles.Un étudiant en psychologieappliquée a découvert dans une étuded’un sexologue sur « les violencessexuelles » que l’homosexualité y étaitclassée parmi les perversions et déviancessexuelles, au même titre que « le fétichisme,la bestialité, la pédophilie,la nécrophilie… »Autre sujet de colère récurrent pour lespersonnes qui nous contactent : l’interdictionfaite aux hommes ayant des rapportssexuels avec d’autres hommes dedonner leur sang.Elle suscite toujours stupéfactionet colère chez les donneurs potentiels qui l’apprennentlors de l’entretien avec le médecin del’Etablissement français du sang (EFS). De jeunesgays sont interdits de don quand bien même ilsexpliquent qu’ils n’ont jamais eu de rapport sexuel! Les louvoiements des responsables politiques surcette question se poursuivent depuis plusieursannées, dans un contexte de pénurie de dons. Fin2012, Marisol Touraine, ministre de la Santé, avaitestimé que les conditions n’étaient pas réunies pourrevenir sur cette exclusion, après avoir déclaré lecontraire sept mois plus tôt. En juillet 2013, unrapport lui a été remis par le député (PS) et neurologueOlivier Veran,préconisant,comme le demandentde nombreuses associations, que l’EFS ne seUn gynécologue:«Quand jevois leshomos à laGay Pride,j'en castreraisbien unou deux»focalise plus sur l’orientation sexuelle dudonneur mais sur « son niveau de risque individuel »:pratiques à risque, nombre de partenaires.La ministre renvoie maintenant aux travaux duConseil de l’Europe et à l’avis à venir du Comitéconsultatif national d’éthique. Par ailleurs, deuxhommes nous ont signalé avoir été interdits dedon de moelle osseuse,alors même que cette exclusionne figure pas sur le site Internet de l’EFS.Nous attirions l’an dernier l’attention sur le traitementdes dépouilles des personnes décédées dusida. Un arrêté ministériel de 1998 prévoit en effetque ces corps ne puissent pas bénéficier des soinsde conservation, par crainte d’une contaminationdes thanatopracteurs-trices. Le cercueildoit alors être rapidement scellé, empêchantles proches de revoir le défunt unedernière fois.Une pétition lancée fin 2013par Elus locaux contre le sida a recueilliplus de 56 000 signatures pour accélérerla révision de cet arrêté. La ministre dela Santé avait demandé en février 2013un rapport à l’administration générale desaffaires sociales, qui devait être rendusous trois mois. Le ministère a fait savoirle 3 janvier 2014 que la ministre était« favorable à la levée de l’interdiction »,nous espérons qu’il ne faudra pasattendre encore un an pour qu’un termesoit mis à cette discrimination aussi douloureusequ’injustifiée.Cette année encore nous appelons donc tousles personnels médicaux à s’en tenir strictement àla déontologie médicale et à s’interdire des jugementsqui entravent le succès des thérapies engagées,quand ils ne sont pas la cause de nouvellessouffrances psychologiques. Nous appelons legouvernement à mettre un terme aux discriminationssur le don de sang et les soins funérairesqui n’ont pas de justification médicale.


Rapport sur l'homophobie 2014 • Santé-MédecineJugements méprisantsAurélie a 27 ans et habitedans les Hauts-de-Seine.En thérapie pour dépressiondepuis plusieurs années,elle a consulté une nouvellepsychiatre fin 2013 qui, àla troisième séance, a engagéun débat sur les droits deshomos, le mariage pourtou-te-s, la PMA, exposant« sans jugement » sonopposition à tous ces sujets.Aurélie nous demande si cettepsychiatre n'aurait pas dû resterneutre, « en tant que médecin »,au lieu de lui « asséner sesvérités », alors même qu'« ellene sait rien du quotidiendes LGBT et de nos problématiques». Elle a pris rendez-vousavec une autre psy maiscraint déjà « son jugement »,persuadée que « cette visionet cette ignorance doiventêtre courantes chezces médecins ».Frédéric nous racontel’entretien qu’il a eu avecune psychologue en janvier2013. En 45 minutes, il a eudroit à de nombreusesremarques et questions homophobes: opposition aumariage, « l’homosexualité,ça se soigne », « qui faitl’homme, qui fait la femme ? ».`Armelle, la trentaine, est enarrêt-maladie pour dépressiondans le Vaucluse. Elle rencontreune médecin afin d’examinerle prolongement éventuel del’arrêt.Apprenant qu’Armelleest pacsée, la médecin déclareque « le Pacs c’est pour leshomosexuel-le-s » et que« le maire de Paris, c’est pasmon copain ».Armelle s’estsentie blessée par ces proposqu’elle estime totalementinappropriés dans ce cadremédical. Elle s’est sentie priseau piège, « je n’ai rien pufaire », cette praticienne ayantle pouvoir de mettre un termeà l’arrêt-maladie.Michelle, une femme transgenred'une cinquantaine d'annéesvivant dans les Pays de la Loire,nous signale l’attitude transphobede la psychologuequ’elle a rencontrée aprèsl’échec de sa tentative desuicide. Elle a aussi été l’objetde deux agressions verbalestransphobes en deux semaines.Un infirmier demande au voisinde Julien, hospitalisé dans leGard, si ça le dérange departager la chambre avecun homo.Plusieurs jeunes femmes de larégion lilloise nous ont signaléles remarques lesbophobesdu personnel d’une associationspécialisée dans les questionsde sexualité et de famille,vers laquelle leur lycée lesavait orientées : « Les câlinsavec une fille, c’est pas de lasexualité mais de l’affection »,« C’est l’adolescence, ça vachanger. »Anne témoigne des propostenus par son gynécologue,dans les Bouches-du-Rhône.« Il me dit que les enfantsd’homosexuel-le-s serontmalheureux, que nous sommesun lobby bien puissant, sansça le projet de loi sur lemariage n’aurait jamais eulieu, que quand il voit leshomosexuels hommesà la Gay Pride, il en castreraitbien deux ou trois. »Tristan, un jeune homme de24 ans résidant dans le Sud-Est,souffre de schizophrénie et estsuivi depuis six ans par le mêmeinfirmier dans un hôpital public.Il nous appelle car il nesupporte plus les remarqueshomophobes énoncées parl’infirmier depuis… six ans.Il lui explique que l’homosexualitén’est pas normale ettente de le convertir à l’hétérosexualité.Tristanprenait cesremarques à la rigolade audébut, mais aujourd’hui ilattend un changement decomportement. Il a doncenvoyé un courriel à l’infirmier,que celui-ci n’a pas pris ausérieux. Il envisage d’écrireà la direction de l’hôpitalmais n’est pas sûr de vouloirchanger d’infirmier :« Je lui dois tout. »Gabrielle, 32 ans, souffre d’unemyopathie et est suivie depuisplusieurs années par le mêmekiné, qui est au courant deson homosexualité. Elle nouscontacte par chat après avoirdécouvert ses convictionshomophobes : elle a entendula remarque qu’il a adresséeà son collègue dans le couloir,sur « ces PD qui font chieravec leur mariage à la con ».Elle en est très déçue, « un kiné


FocusCertain-e-s médecins prétendent être très attaché-e-s àl’intérêt supérieur de l’enfant,mais n’hésitent pourtantpas à refuser des soins à des femmes enceintes.C’est ce qui est arrivé à Eloïse,une Lilloise de 31 ans.En couple avec Amélie,elles ont commencé en 2012une démarche de PMA en Belgique, « décision bienréfléchie après huit ans de vie commune ».Sa gynécologue n’étant pas équipée d’appareild’échographie,une amie hétéro l’a orientée vers uneautre qu’elle contacte en janvier 2013.La secrétairede cette gynécologue lui fixe un rendez-vous,lui précisant que comme il s’agit d’une grossesse,il est préférable de venir en couple.Eloïse lui précisealors sa situation,demandant si la gynéco n’y verraitpas d’inconvénient.La secrétaire lui demande derappeler dans l’après-midi.Eloïse la rappelle toutela semaine,la secrétaire n’ayant « pas eu le tempsd’en parler » à la gynéco.Elle lui annoncera finalement que comme la PMApour les couples de lesbiennes n’est pas autoriséeen France,la gynéco refuse de la recevoir.Eloïsea « réellement du mal à avaler ces mots » :« Il ne s’agissait pas pour la gynéco d’être dansl’illégalité, je ne lui demandais pas de me faireune insémination. J’ai eu l’honnêteté de lui expliquernotre situation, et là, elle refuse des soins pourune future maman, pour un futur bébé ! »Voilà qui montre que pour certain-e-s médecins,« l’intérêt supérieur de l’enfant » peut tout de mêmeêtre relativisé dès lors que la mère est lesbienne.Il est stupéfiant qu’une gynécologue s’autoriseà créer une source de stress supplémentairepour une femme enceinte.Une telle attitudeest bien évidemment totalement contraireà la déontologie médicale.147homophobe, franchement,ça me saoule », d’autant plusqu’elle avait « vraimentconfiance » en lui : « Je pensaisqu’il me respectait. » Ellese sent un peu coincée caril n’y a que deux cabinetsaccessibles en fauteuil roulantdans sa ville. Elle décidede reprendre rendez-vous aveclui « pour parler de tout ça ».Kevin a 26 ans et réside dansles Bouches-du-Rhône. Il faitrégulièrement des urticairesgéantes, dont il peut mourir,mais heureusement, ce jour-là,son compagnon Loïc estprésent pour l’emmenerà l’hôpital. Ils restent deuxheures dans le service desurgences, Kevin allongé surun brancard, et finissent paravoir un geste de tendresse,se tenant les bras, commetous les couples qui cherchentà se rassurer dans ces circonstances.C’est alors qu’unmédecin surgit d’un bureauà l’autre bout du couloir, leurcriant qu’ils sont dans unservice d’urgences et feraientmieux de se tenir correctement,avant de tourner les talons.Justine, une Bretonne de 41 ans,s’est rendue en mai 2013 dansun centre de santé dépendantd’un CHU pour bénéficierd’une consultation gratuite avecune psychologue. Elle voulaitlui faire part de ses difficultésà s’ouvrir à une relation amoureuseet à s’engager dans unerelation de couple, alorsqu’elle désire construirequelque chose de sérieux


Rapport sur l'homophobie 2014 • Santé-Médecineavec une femme rencontréerécemment. Justine préciseque sa démarche ne concernaitpas son homosexualité,qu’elle assume très bien.Dès que la psychologue acompris qu’elle parlait d’unerelation avec une femme, ellel’a interrompue avec despropos blessants : « C’estcontre- nature, un couple estcomposé d’un homme etd’une femme… » Elle n’a paslaissé Justine s’exprimer et adirigé l’entretien exclusivementsur l’orientation sexuelle,lui expliquant qu’elle n’était« pas la seule personneperdue ». La psychologuea fini par s’emporter et mettreun terme à l’entretien. Justinenous indique s’être sentie« comme une merde » ensortant de l’entretien, complètementdéstabilisée. Ces proposont eu un effet très néfastesur elle, alors qu’elle pense êtreune personne stable et solide.Elle considère cette psychologuecomme « une personnedangereuse ». Elle y voitune faute professionnelle etva écrire à la directionde l’établissement.DonArthur vient d’avoir 18 anset a voulu donner son sangpour la première fois. Il se renddonc dans des locaux del’EFS sur la Côte d’Azur, etindique sur le questionnairemédical qu’il n’a jamais eude rapport sexuel avec unautre homme. Le médecin luidemande après s’il est gay,ce qu’Arthur confirme.Son don est refusé. Il est choquéet nous demande s’il peutporter plainte, nous l’invitons àsaisir le Défenseur des droits.La tante d’Yves souffred’une maladie du sang.Elle a persuadé le jeunehomme de s’inscrire sur unregistre de don de moelleosseuse.Yves sait que les gaysne sont pas autorisés à donnerleur sang, il a consulté le siteInternet : il n’y a pas d’interdictionmentionnée à destinationdes homosexuels masculinsau sujet de la moelle. Il a reçuune convocation et se renddonc dans les locaux de l’EFSoù il rencontre un médecin.Tous les critères semblentpositifs, le médecin questionneYves et, apprenant que cedernier est gay, déclinesa proposition de don :« Vous ne pouvez pas donner,pour l’instant. Peut-être queles critères évolueront… »Yves sort de l’EFS avec« le sentiment d’être rejeté,d’être un moins que rien, pasmême bon à aider les autres. »Moqueries et diffamationJean habite en Alsace ettémoigne de l’attitude dedeux médecins : « L’un desdeux m’appelle madameet me fait, malgré maprotestation, une ordonnanceau nom de madame L.L’autre me fait des gestesdu doigt, emploie un ton devoix imitant une femmeet me demande si j’aimemes vacances au Marocpour les garçons. »OutingMichel a 52 ans et habite dansle Roussillon.Après avoir euun rapport sexuel à risque,il a fait des tests et consultéun médecin à l’hôpital, qui arédigé un courrier à l’attentionde son généraliste pour le tenirinformé. Mais le courrier,également consultable parles autres services de l’hôpital,mentionne un rapport avec« un » ami, révélant ainsi sonhomosexualité au généraliste.Il a appelé le médecinde l’hôpital pour lui faire partde son mécontentement,lequel a reconnu son erreuret s’est excusé.


149


Rapport sur l'homophobie 2014SportPas de temps mortpour l'homophobie25%Inconnu58%Homme17%FemmeInconnu18-24 ans10%10%40% 40%35-50 ans 25-34 ans20%Inconnu10%Étranger40%Autresrégions30%Île-de-Francesexe des victimesâge des victimesorigine géographique10 témoignages, correspondantà 10 cas, soit 0,5 % du total.Cette année encore,peu de témoignages reçuspar l’association concernent les LGBTphobiesdans le sport.Ce qui ne signifie pas pour autantqu’il n’y a pas d’homophobie et de transphobie dansce secteur, comme certain-e-s pourraient le prétendrepar méconnaissance, voire par désinformationet hypocrisie 1 .Les témoignages relatent des faitsallant des moqueries et brimades aux menaces, leplus souvent proférées par un individu ou un groupe,à l’encontre d’une personne rejetée en raison de sonorientation sexuelle réelle ou supposée.Pour les sportifs-vesvictimes d’homophobie ou de biphobie,unedes difficultés est de faire reconnaître l’injusticesubie.Même si les victimes hésitent parfois à porterplainte par crainte que les autorités compétentesbanalisent voire ignorent leur démarche,c’est le plussouvent la peur de l’exclusion de leur groupe (équipe,club, salle de sport, etc.) qui les amène à se taire età ne pas porter plainte.Les témoignages relèvent également la banalisationdes propos homophobes et transphobes chezles plus jeunes sportifs-ves, chez qui les « PD »,« gouine », « travelo » sont autant d’insultes proféréessans qu’ils-elles ne se rendent vraiment comptede la portée de leur propos, tout cela sous le regard,parfois complaisant, des parents et autres adultesresponsables de l’encadrement. La lesbophobie, quise trouve à la jonction de l’homophobie et dusexisme, dont sont victimes les femmes engagées1. Equipe21.fr, émission du 31/10/2013


151dans la pratique sportive doit être une préoccupationpour l’ensemble de la communauté sportive, àcommencer par les éducateurs-trices.On se rappelleque cette année, les Dégommeuses 2 se sont faitviolemment agresser par un groupe d’adolescents,au cours de l'un de leurs entraînements hebdomadaires.Aprèsavoir subi des insultes, les joueuses ontdû esquiver des bouteilles d’eau qu’on leur jetaitdans l’indifférence générale. Le plus préoccupantrestant peut-être l’absence de prise de consciencedes auteur-e-s d’agressions concernant les conséquencesde leurs actes 3 . Leur répétition rappelle lanécessité de condamner l’homophobie ettoute forme de rejet de l’autre, mais aussid’éduquer.La preuve que la sanction peut avoir desvertus éducatives s’est d’ailleurs illustréecette année au travers de l’événementmédiatisé autour du joueur de football JoeyBarton. Joueur de Ligue 1, il avait proférésur Twitter des insultes à caractères homophobeet transphobe au sujet d’un joueur d’une autreéquipe.Après avoir été convoqué devant le Conseilnational d’éthique de la LFP 4 , le joueur, qui officieactuellement dans le championnat anglais, s’estamendé. Il a en effet participé à la campagne delutte contre l’homophobie, « Right Behind GayFootballers », dans laquelle il invitait les footballeurs-eusesdu Royaume-Uni à changer leur attitudevis-à-vis de l’homosexualité et à le rejoindre dansle mouvement en étrennant des lacets arc-en-ciel,en référence au symbole de la communauté LGBT.Tout espoir n’est donc pas perdu.Gay Games Paris 2018Paris sera la ville d’accueil de ces jeux en 2018.Les engagements dans le soutien à la candidatured’une ministre de la République,Valérie Fourneyron,ministre des Sports, et de la championne d’escrimeLaura Flessel, marraine de la candidature, sont hautementsymboliques. Fondés en 1982 à l’initiatived’un décathlonien américain,Tom Waddell, les GayGames se veulent une manifestation sportive et culturelle« inclusive », ouverte à tous les individus sansdistinction d’âge, d’orientation sexuelle, d’identitéde genre, de religion ou encore de nationalité. Il n’y« Uneabsencecriantede témoignages»a d’ailleurs aucune condition de performance àfournir,les participations nécessitant une simple inscription.La ministre rappelle d’ailleurs que l’objectifest d’imposer la tolérance.Certain-e-s, à l’instar du Parti chrétien-démocrate,ont saisi l’occasion d’occulter l’intention de cettemanifestation en utilisant l’argumentaire désormaisbien connu selon lequel militer pour le droit aurespect de chacun-e n’est en fait que du prosélytisme.«Aucune déclinaison communautariste ne peut se justifierautrement que par une manipulation de l’espritdu sport et des Jeux olympiques au profitde revendications qui n’ont rien à voir.Indéniablement, l’organisation des GayGames constitue une promotion delobbies gays et lesbiens qui utilisent àdes fins militantes la beauté et la notoriétéd’un rendez-vous sportif qui appartientau patrimoine mondial. Le Parti chrétiendémocrateappelle les Français et plusspécialement les Parisiens, qui financeraientsur leurs impôts cette manifestation en 2018, àrésister là aussi à une dérive inacceptable 5 . »JO de Sotchi 2014C’est dans ce même esprit de rejet que la préparationdes Jeux olympiques d’hiver de Sotchi en Russies’est déroulée sur fond de loi anti-homosexuel-lesvotée en 2013 par la Douma (lire chapitreInternational). L’événement qui aura lieu en février2014 a déjà fait polémique dans le monde sportif.Lors des championnats du monde d’athlétismed’août 2013 à Moscou, Yelena Isinbayeva, championnerusse de saut à la perche, s’est fait l’émissairede la propagande des lois anti-homosexuel-le-sdu gouvernement russe. Elle soutient l’idée des loishomophobes en argumentant finalement qu’être2. Equipe féminine de football parisienne http://footforlove.yagg.com/2013/05/13/des-footballeuses-agressees-danslindifference-generale-dans-un-stade-parisien/3. « Les violences homophobes et les impacts sur la persévérancescolaire des adolescents au Québec », LineChamberland, Gabrielle Richard et Michaël Bernier,Recherches & Educations, n°8, juin 2013, pp.99-114,http://rechercheseducations.revues.org/15674. Ligue de football professionnel5. http://lepcd.fr/aux-gaygames/


Rapport sur l'homophobie 2014 • Sporthomo assumé-e, c’est faire de la« publicité ». Après que certaine-s,commeEmma Green-Tregaro,sauteuse en hauteur suédoise,ontau contraire protesté à cesMondiaux d’athlétisme contrel’homophobie de ces lois, lessportifs-ves homos devront-ilsellesse faire discrets-ètes auxJO de Sotchi ?Nous sommes ainsi loin desvaleurs énoncées par la charteolympique, qui rappelle dans sesprincipes fondamentaux que« toute forme de discriminationà l’égard d’un pays ou d’une personnefondée sur des considérationsde race, de religion, depolitique, de sexe ou autres estincompatible avec l’appartenanceau mouvement olympique 6 ».C’est là toute l’ambiguïté et leparadoxe de ces événementssportifs mondiaux lorsque l’économieet la politique priment surles valeurs d’égalité et d’émancipationde chacun-e 7 .Rappelons tout de même que quelquessportifs-ves d’envergure internationalesont sorti-e-s du placarden 2013,comme le basketteur NBAJason Collins, le plongeur britanniquemédaillé olympique TomDaley, le boxeur portoricainOrlando Cruz ou la footballeuseaméricaine Abby Wambach. Onregrettera cependant qu’encoretrop peu de sportifs-ves françaisesosent évoquer leur orientationsexuelle. On sait à quel point ces6. CIO, charte olympique en vigueur au09/09/20137. Cf. communiqué de presse SOShomophobieFocusThomas, hétérosexuel, témoigne de sa rencontreavec une équipe de rugby qui a été fondée pardes homosexuels dans le but de militer contrel'homophobie dans le monde sportif, en particulierdans le rugby, qui relève d'une force et d’une virilitéapparentes. L'idée était de montrer que, quelle quesoit l'orientation sexuelle d'un joueur, le sport passeavant tout, et par ailleurs, que certains gays peuventavoir un niveau supérieur à celui d’un hétéro.La rencontre se fait de manière fortuite : « Peu detemps après leur arrivée, deux hommes sont venusnous voir pour nous proposer de nous joindre à euxpour un entraînement. On a tout de suite acceptésans se poser de questions, sans savoir de quelleéquipe il s'agissait et quel niveau les joueursavaient. Bref, on était contents de partager unmoment sportif avec d'autres. A la fin del'entraînement, le coach nous a dit qu'ilss'entraînaient régulièrement sur ce terrain et qu'onétait les bienvenus. On a trouvé l'idée sympa eton y est retournés. J’ai mis un bout de temps avantde savoir dans quelle équipe je jouais, mais quandje l'ai su, ça n'a rien changé pour moi. L'importantétait les liens que j'avais créés avec certains joueurset surtout le fait de jouer au rugby, sport que j'aimaiset que je découvrais. Donc je n’ai pas trouvé çaperturbant, hormis le cliché des douches aprèsl'entraînement.Concernant les matchs, certains de nos adversairessavaient qu'on était une équipe gay et friendly, doncon s'est fait chambrer parfois, ou pire, on n'était paspris au sérieux. Mais c'était un avantage parce quel'effet de surprise nous a permis de remporterquelques matchs. Ce que je retiendrai de cetteexpérience, c'est que cette équipe m'a donnél'opportunité de découvrir et d'apprendre à aimer le


153rugby. Mais au-delà du côté technique de lapratique sportive, les valeurs de cette équipem'ont permis d'avoir une plus grande ouvertured'esprit et une meilleure confiance en moi, quime donnent de l’aisance dans la vie de tousles jours. C'est un point très positif à monépanouissement personnel. »Aujourd’hui,Thomas joue dans une équipeuniversitaire et ne manque pas de retrouver sesanciens partenaires notamment au moment de laMarche des fiertés LGBT.actes sont nécessaires et fondamentauxnotamment pour lesjeunes sportifs-ves LGBT,car ils leurpermettent de s’identifier à desréférences plutôt que de subir et dese cacher dans un milieu dont onsait que l’homophobie,la biphobieet la transphobie sont monnaiecourante tant les enjeux identitairessont forts.Courrier International, 21 au 28 août 2013


Rapport sur l'homophobie 2014 • SportLGBTphobieet sportLes témoignages présents dans ce chapitre,quoique peu nombreux, donnent un aperçu de laviolence des paroles et des actes subis par lespersonnes lesbiennes, gays, bi-e-s ou trans dansla pratique sportive. Mais ils révèlent surtout lapuissance du tabou du sujet de l'orientationsexuelle et de l'identité de genre dans ce domaine.Car pour une insulte que nous relevons dans laretransmission télévisée d'une manifestation sportive,combien de victimes entendent au quotidienqualifier de « tapette » une personne avec des performancesmoindres ? Pour un fil de commentaireshomophobes suite à un article sur le comingout d'un-e athlète, combien de personnes viventdes violences dans leur pratique sportive ? Et pourun couple de lesbiennes qui témoigne après sonexclusion d'un club de foot pour un baiseréchangé, combien sont discriminées, dans l'indifférenceet l'invisibilité ?Pour mieux lutter contre la lesbophobie, la gayphobie,la biphobie et la transphobie dans le sport,il est essentiel de mieux connaître ce phénomène,ce qui débute avec les témoignages des victimes oudes témoins. Il y a donc un fort enjeu à sensibiliserchacun-e à la nécessité de réagir et de témoigner.C'est le point de départ d'un cercle vertueux qui,s'appuyant sur les valeurs du sport, contribuera àrendre pour les pratiquant-e-s sportifs-ves LGBTun milieu plus respectueux de la diversité desorientations sexuelles et des identités de genre.Même si les sportifs-ves pratiquent le dépassementde soi et font fi de ces paroles homophobes,il est important que les personnes concernéespuissent aller au-delà du tabou et témoigner.C'est l'un des objectifs des actions conduitespar SOS homophobie en la matière. Après avoirparticipé en 2012 à la réalisation de la plaquettecontre l'homophobie dans le sport éditée par laFSGL (Fédération sportive gaie et lesbienne),l'association a lancé en novembre 2013 unecampagne d'affichage et de sensibilisation,notamment à destination des professeur-e-s etfutur-e-s professeur-e-s d'EPS, au cœur de ce processusd'éducation.Le lancement de cette campagne s'est effectuéen partenariat avec le SNEP (Syndicat nationaldes enseignant-e-s d'EPS), l'ANESTAPS(Association nationale des étudiant-e-s deSTAPS), la FSGL, la FSGT(Fédération sportive etgymnique du travail) et Femix'Sports.Le début de la campagne de sensibilisation a étéporté par un appel contre l'homophobie dans lesport signé par cinquante personnalités liées aumonde sportif, parmi lesquelles des médaillé-e-solympiques en natation, deux anciennes ministresdes Sports et des enseignant-e-s chercheurseuses,preuve de l'intérêt du monde sportif et universitairepour cette démarche.Le coup d'envoi est donné et les affiches – dontles visuels ont été repris par plusieurs revuesspécialisées – commencent à être diffusées dansdes clubs, STAPS et lycées. L'objectif sera ensuited'intervenir dans des conférences, des séminaireset des formations, pour inciter les victimes ettémoins à signaler les paroles et les actesLGBTphobes, mais également pour contribuer àfaire évoluer les mentalités pour que chacun-ese sente à l'aise dans la pratique sportive,sans distinction d'orientation sexuelle et d'identitéde genre.Tout laisse supposer que l'atteinte de cet objectiftient du marathon. Mais les réponses positivesapportées au cours de notre démarche, le soutiendu ministère des Sports aux Gay Games qui setiendront à Paris en 2018, ou encore l'augmentationdu nombre de coming out de sportifs-ves enactivité constituent autant de signaux indiquantque le monde du sport est prêt.


155La parole à…S. Héas, M. Kérichard,M. Héas, et J. ThomasL’homophobie enFrance dans le sport,quelques résultats d’enquêteLes jeunes interrogé-e-s sont scolarisé-e-s quasiexclusivement en établissement public, de lasixième à la seconde.Pour les enquêté-e-s, l’homophobie dans le sport estpeu fréquente, voire rare. La très grande majoritén’appréhende pas les sports comme un espacehomophobe, ce qui rappelle sans doute que leshomosexuel-le-s sont très largement invisibles dansles sports en dehors de rares coming out. Les jeunesgarçons se déclarent sensibles à l’impact de la« découverte » du statut homosexuel de leurs idolessportives. Les jeunes filles sont bien plus indifférentesà cette « sortie du placard ». Ce résultatconfirme la plus grande acceptation de l’homosexualitépar les jeunes filles et les femmes que parles jeunes hommes. Ces réponses rappellent l’importancedes informations largement diffusées par lesmédias. L’omniprésence des résultats sportifs et pluslargement des rencontres sportives grâce aux NTICinfluence fortement les jeunes générations.La moindre déclaration de la part d’un sportifinternationalement connu peut avoir des répercussionsimportantes pendant des mois, voire desannées. L’âge et/ou l’avancée dans la scolaritésemblent réduire les sentiments, si ce n’est lesactions, homophobes.Tout se passe comme si les sports participaient àl’éducation homophobe, notamment pour lesjeunes garçons. Les auteurs qui ont souligné cettesocialisation sportive particulière sont légion.Citons La Jeunesse (2008), pour qui le sport sert àla fois de courroie de transmission, de générateuret d’interprétations des normes masculines. Terret(2004) ou McKay et Laberge (2006) ont précisécomment la culture sportive était profondémentstructurée par l’homophobie et le sexisme, davantagemême que la société en général. Le sportapparaît comme un lieu par excellence del’apprentissage de l’homophobie (Liotard, 2008).Des auteurs comme Gentaz soulignent enfin quel’homophobie semble nécessaire à la constructionidentitaire de chacun-e, sportif-ve ou non. Il nes’agit pas d’être fataliste et résigné, au contraire !Connaître ce piège culturel peut justement permettrede le combattre plus efficacement.Les garçons sportifs sont beaucoup plus enclinsque les non-sportifs à considérer comme un dramed’être attirant pour ses camarades. Cette réaction« épidermique » n’est pas constatée chez les jeunesfilles. Ce résultat confirme l’importance del’homosociabilité sportive excluant toute espècede connotation homosexuelle, notamment chezles jeunes garçons. La proximité physique induitepar les sports semble exclure totalement tout rapprochementintempestif.Ces données permettent de préciser la difficulté delutter spécifiquement contre l’homophobie danset par les sports. En effet, ces activités physiquessont historiquement construites en Occident paret pour les hommes.Par contre, les règles sportives appliquées à tous ettoutes offrent un espace intéressant non seulementde confrontation ou de cohabitation, maissurtout de collaboration. Les activités physiques lesplus compétitives ne sont pas facilement mobilisablespour accroître le respect des uns envers lesautres. Mais de nombreuses activités physiquesexercées en mélangeant les populations – masculines,féminines, jeunes, plus âgées, ou bien valideset personnes en situation de handicap, etc. – sontdes portes ouvertes à l’acceptation et l’inclusionde tous.S. Héas, UFR APS, Université de Rennes 2.M. Kérichard, M. Héas, Association DubleMProduction, Vincennes.J. Thomas, UFR APS, Université de Montpellier.


Rapport sur l'homophobie 2014 • SportLa parole aux…organisateurs-trices desGay GamesParis 2018Plus grand événement sportif, culturel et festif aumonde, hétéro-friendly, ouvert à tou-te-s, les GayGames participent depuis trente ans à la visibilité,la lutte contre les discriminations et à l’intégrationdes lesbiennes, gays, bisexuel-le-s et trans. Portéepar le mouvement sportif LGBT français, l’associationParis 2018 a été choisie en octobre 2013 pourorganiser la dizième édition du 2 au 12 août 2018et accueillir 15 000 participants à Paris.Créés par le docteur Tom Waddell en 1982, les GayGames portent des valeurs fondées sur l’inclusion,la participation et le dépassement de soi. Les jeuxaccueillent tout adulte, quels que soient sonorientation sexuelle, son genre, etc. Aucun niveaude performance sportive n’est exigé. Ainsi, tous lesquatre ans, les Gay Games offrent aux participantsl’opportunité de s’exprimer ouvertement et de seretrouver à travers le sport, la culture et l’art dansun esprit de fraternité et de tolérance.Objectif principal : la lutte contre les LGBTphobieset le VIH/sidaSoutenus par Pierre Bergé, Laura Flessel et Jean-Paul Gaultier, les Gay Games à Paris vont offrir àtou-te-s une opportunité formidable d’agir pendantquatre années pour lutter efficacementcontre les LGBTphobies et le VIH/sida, et ainsiremplir leur objectif principal : promouvoir lerespect, la tolérance et l’égalité.L’inclusion de toutes les parties prenantesAinsi, pour atteindre tous les pans de la société eten partenariat avec la société civile, nous associonspleinement les fédérations sportives nationales,les institutions publiques et le grand publicà tous nos événements.• Le monde sportifLe monde sportif a pris conscience du rôle qu’ildoit jouer en tant que facteur d’intégration et il luireste encore du chemin à faire en direction de lacommunauté LGBT. Ainsi le Comité nationalolympique et sportif français (CNOSF) et les 22fédérations sportives nationales (dont football ethandisport) qui nous soutiennent déjà seront pleinementintégrées à l’élaboration des Jeux et à l’espritde Paris 2018.• Le monde politiqueEn tant qu’événement militant, il est primordiald’y intégrer les pouvoirs publics et de profiter dela visibilité offerte par les Gay Games pour sensibiliserla classe politique aux LGBTphobies et lesinciter à agir pour un changement profond dans lasociété. Pour ce faire, nous allons associer des instancesà tous les niveaux : Premier ministre, ministredes Sports, ministre de la Culture, Mairie deParis, Région Ile-de-France…• Le monde culturelLes milieux artistiques ont toujours été à l’avantgardedes changements sociétaux. C’est pourquoi,depuis leur création, la culture est indissociable dusport à l’intérieur des Gay Games. Le programmeculturel se fera l’écho de la culture LGBT et permettraà des artistes de s’exprimer dans des lieuxmythiques de la culture française et parisienne,offrant une grande visibilité à l’événement.Les Gay Games à Paris, une formidableopportunitéPendant dix jours nous allons avoir l’occasion desensibiliser la France entière sur des thématiquesqui nous sont chères : la lutte contre les discriminations,mais aussi la lutte contre le sida. Nous allonsmettre la lumière sur toutes les associations LGBTqui s’engagent au quotidien. L’occasion est unique.Tom Waddell, en créant ces jeux, rêvait de changerle monde et le rendre meilleur. Paris 2018, avecson slogan « Tous égaux », vous invite à faire de cerêve une réalité !


157


Rapport sur l'homophobie 2014TravailHomophobie à temps plein3%Trans2%Inconnu77%Homme18%Femmesexe des victimesInconnu+ de 50 ans11%11%âge des victimes8% 18-24 ans47%35-50 ans 23%25-34 ans8% Inconnu54%37%Île-de- AutresFrance régionsÉtranger1%origine géographiqueLicenciement 8%OutingAgressionsphysiques 8% 5% 29%16%HarcèlementHomophobiesociale19%Menaceschantage54%Insultes23%Diffamation27%discrimination28%RejetIgnorancemanifestations de l’homophobie*6%Supérieur-ehiérarchique31%Syndicat/CHSCT/Médecin du travail…Collègue(sans lien hiérarchique)45%14% 4%soutien face à l'homophobieClient-e/Fournisseur-euse/Patient-e/Élève…Subordonné-eAuteur-e-s de l’agression56%Aucun2%22%Collègue14%Supérieur-ehiérarchique6% Syndicat/CHSCT/Médecin du travail…Client-e/Fournisseur-euse/Patient-e/Élève…191 témoignages, correspondantà 161 cas, soit 5 % du total.«Je ne suis pas intervenu parce que j’étais dansun cadre professionnel. » Ce témoignagerésume la complexité d’être soi-même au travail.Quece soit durant un stage,pendant une périoded’essai (par crainte de ne pas être embauché-e) ouau quotidien, les insultes homophobes, biphobesou transphobes répétées affectent et rendent leclimat difficile à vivre.Il devient alors impossible de parler librement de savie privée (vacances, famille) au travail, contrairementaux autres collègues, par peur du rejet.De même, certaines victimes s’interrogent surl’opportunité de signaler un Pacs ou un mariage àleur employeur-euse, lorsque ce ou cette dernierèreest homophobe ou est soupçonné-e l'être.31 % des témoignages concernent directement leservice public,alors que ce secteur ne concerne que20 % des emplois. Le travail en libéral au domiciledes particuliers (infirmier-ère, professeur-e particulier-ère)n’est pas non plus épargné : certainstémoignages montrent la difficulté de devoir exercerson activité dans l’intimité de personnes ouvertementhomophobes (présence de drapeaux de laManif pour tous, propos intolérants).La majorité des victimes sont des hommes (78 %des témoignages), âgés de 35 à 50 ans (47 %) ethabitant en région hors Ile-de-France (54 %).Quantaux agresseur-e-s, la plupart sont des collègues* Plusieurs manifestations peuvent être identifiées surun cas. En conséquence, le total des manifestations estsupérieur à 100 %.


159direct-e-s de la victime (45 %). La majorité destémoignages font état de relations entre collègues,au départ qualifiées de cordiales, évoluant demanière négative lorsque l’homosexualité d’unmembre de l’équipe est révélée.Commencent alorsles insultes, le rejet, la diffamation, voire l’outing.Un changement de supérieur-e hiérarchique est aussila cause d’une crainte que le nouveau ou la nouvelleresponsable soit homophobe,ouvertement ou non.De nombreux témoignages signalent des refus depromotion,des rapports négatifs infondés,voire despropos insultants tenus sans témoins. Les insultesquotidiennes finissent par devenir épuisantes, aupoint que certaines victimes finissent par démissionnerou demander une mutation. De même, unstagiaire a préféré mettre fin à son stage, à force desubir insultes et réflexions dégradantes. Il ne fautalors pas s’étonner si 32 % des victimes mettent enavant que les situations vécues sont sources d’arrêtde travail, de dépression, voire d’hospitalisationsuite à une tentative de suicide.De manière générale, les témoignagesmontrent une libération évidente, aucours de la période de débats sur lemariage pour tou-te-s,de la parole homophobedans le monde professionnel, avecdes discours récurrents, sur le lieu de travail,contrel’évolution de la loi.Le mondedu travail est ainsi devenu, cette année,un lieu privilégié pour les appels à manifestercontre l’ouverture du mariage auxcouples de personnes de même sexe.Circulent alorsdans les entreprises pétitions,courriels et tracts syndicauxcontenant des propos clairement homophobes.Notonsà ce sujet que 6 % des actes signalésémanent de délégué-e-s du personnel.« Ouvrir ladiscussionet fairecesserles proposhomophobes»le meilleur des cas, l’agresseur-e reçoit un simpleavertissement. Ainsi, un proviseur n’a pas estiménécessaire de sanctionner un élève qui a insulté unprofesseur. Cette absence de prise en compte estfréquemment évoquée, lorsque le supérieur hiérarchiquen’est pas lui-même l’agresseur.Au sein de petites structures (restaurants, parexemple), il est difficile de trouver une quelconqueforme de soutien : absence de délégué-e-s dupersonnel, collègues craignant de perdre leur place.A l’inverse, il est heureux de voir que les manifestationsde soutien peuvent exister dans d’autres structureset sont en augmentation (44 % destémoignages, contre 36 % en 2012) : un médecindu travail, qui rappelle à l’employeur l’importancedes faits ; un DRH, qui accompagne une victime aucommissariat pour le dépôt de plainte ;une autre victime,menacée de poursuites après avoirsouligné le caractère homophobe depropos tenus par son directeur, a reçu lesoutien immédiat de ses collègues.Les appels sur la ligne d’écoute de l’associationpermettent parfois aux victimesde mieux définir,de comprendre le caractèreLGBTphobe des situations vécues autravail. La démarche du dépôt de plainteest alors facilitée.L’acte ou la parole homophobe,biphobe ettransphobe dans un contexte professionnel demeuredifficile à prouver. Soit les propos sont tenus volontairementen l’absence de témoins,soit les collèguesprésent-e-s ne souhaitent pas témoigner,par craintede perdre leur place ou d’être mal vu-e-s.Face à cette situation, nous relevons des appels,notamment d’hétérosexuel-le-s, agacé-e-s par lespropos homophobes de leurs collègues,demandantdes conseils pour mieux ouvrir la discussion et fairecesser ces propos.Il arrive encore que, suite à une agression physiqueet des insultes, les supérieur-e-s hiérarchiquestentent ou conseillent de minimiser les faits. DansPar ailleurs, dès l’évocation de l’homosexualité duou de la salarié-e, des pressions peuvent apparaîtrepour accélérer son départ. De même, certain-e-ssupérieur-e-s hiérarchiques se moquent ouvertementdes règles du Code du travail en n’hésitantpas à évoquer oralement l’homosexualité commemotif d'une procédure de licenciement.


Rapport sur l'homophobie 2014 • TravailLes échanges avec les victimes, par courriel ousur la ligne d’écoute, permettent de solliciter lespartenaires internes (RH, médecine du travail…),ou de mettre en place les actions nécessaires(dépôt de plainte, recherche d’avocat…).Par ailleurs, les interventions et formations pouradultes (IFPA) en milieu professionnel, menées parl’association, ont pour objet de sensibiliser auxdiscriminations LGBTphobes. En effet, les témoignagesreçus montrent qu’il est encore nécessairede rappeler l’obligation de sécurité de l’employeur-euse(article L4121-1 du Code du travail) :« L'employeur prend les mesures nécessaires pourassurer la sécurité et protéger la santé physique etmentale des travailleurs. »De même, l’article L1132-1 du Code du travailmet en avant le fait qu’« aucune personne ne peutêtre écartée d'une procédure de recrutement ou del'accès à un stage ou à une période de formation enentreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné,licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire,[…] en raison de son origine, de son sexe, deses mœurs, de son orientation ou identité sexuelle,de son âge, de sa situation de famille […] ».de ses collègues (« Tu peux temettre un gode dans le cul »).Ces insultes ne s’arrêtent paslà et se poursuivent à propos desclients de l’agence (« J'aimeraisbien savoir qui est la femme »).Il vit très mal cette situation,d'autant plus qu'il n'a jamaisévoqué son homosexualité autravail.Après une périoded’arrêt de travail, il finira parporter plainte, sur les conseilsde sa DRH.Contenu de l’intranet d’une entreprisesignalé à SOS homophobieSi l’homophobie recrutait…Laurent, 39 ans, employé debanque à Courbevoie, viten couple avec un garçon maispréfère dire, sur son lieu detravail, qu’il est célibataire.La une d'un journal évoquantle premier mariage pour tou-te-sa été placardée sur la porte deson bureau. L'affiche est enlevéeà sa demande, mais recolléequelques heures plus tard.Depuis, il affronte quotidiennementdes insultes de la partJean, 51 ans, travaille à Paris.Il répond habituellement avecflegme aux remarques homophobesde ses collègues.Mais celles-ci deviennent deplus en plus pressantes etle scandalisent : « Maintenantils vont pouvoir se marier, onaura tout vu. » Il commenceà se sentir mal à l'aise, d'autantplus que certaines réflexionsémanent directement de sonsyndicat. Il se sent de plusen plus isolé : « Je suis misà l'écart, ça parle pas maldans mon dos. »Thomas, 37 ans, est conseillerà Pôle emploi en Ile-de-France.


161Pendant une session derecrutement, lors d'une pause,il entend l'un des demandeursd'emploi dire qu'il « s'est faitdraguer par un mec et qu'il luia cassé la gueule ». Un autredéclare que, dans certains pays,« il n'est pas normal qu'il y aitdes homos ».Thomas, estimantque ce n'était pas son rôle, n'apas souhaité s'impliquer danscette conversation, mais il luia été difficile de poursuivrela session dans ce climat :« J’ai mal vécu ce moment oùj’entendais des jeunes exprimerdes positions haineuses etrétrogrades. »Monique, 56 ans, est employéede supermarché dans le Sudde la France. Elle habite dansune petite ville de province etest harcelée depuis que descollègues l'ont croisée en villeavec son amie : on renverse sonchariot de marchandises,on l’insulte durant ses pauses :« T'as qu'à foutre le camp »,« Je vais te rentrer dedans ».Elle dort de plus en plus malmais n'a pas envie de démissionner,car elle refuse quela connaissance de sonorientation sexuelle influesur sa vie professionnelle.Florian, Marseillais de 40 ans,est vendeur. Une nouvelleresponsable arrive dans laboutique et lui déclare ouvertement,et en tête-à-tête, n'aimer« ni les gays, ni les tafioles, ni lesgrandes fiottes ».A un retourde vacances, elle lui annoncequ'elle a été « heureuse dene pas avoir eu de gay dansson magasin pendantquinze jours ».Nathalie, 47 ans, habite Nancy.Ingénieure, elle appellel’association pour demanderdes conseils pour un jeunecollègue, homosexuel. Cedernier semble de plus en plusaffecté par les propos insultantsprononcés sur le lieu de travail,au point de commencer àprendre des somnifères.Elle décidera d'en parlerà son P-DG.Jacques, 23 ans, est employéd'une petite boutique d'électroménagerde Cannes. L'undes fournisseurs l'appelle sanscesse « la grosse folle » et luidemande « s'il aime se faireprendre ».Son patron luidemande simplement« de ne pas écouter ».Abattu,il ne sait pas comment réagir.Marie, 49 ans, est infirmièredans un grand hôpital publicparisien.Elle rencontre principalementdes difficultés avec uncollègue, qui lui tient des proposdésobligeants : « Les autresinfirmières ne souhaitentpas se changer dans lesvestiaires en ta présence. »Récemment, ce collègue estpassé aux insultes.Marie ena parlé à son chef, qui ne réagitpas. Elle va contacterRainbhôpital, associationLGBT des agents desétablissements publicsde santé.Nicolas, 26 ans, est télévendeuren Charente-Maritime.Sa direction s'apprête à lelicencier pour résultats insuffisantset, surtout, « suite à sacondition ». Sa responsableévoque alors son homosexualité,puisque, d’après elle, « ça neplaît pas ». Un autre responsablelui dit clairement : « Je ne veuxpas de PD dans mon équipe. »Lors de son appel à l’association,il est aidé à définir les pistesà mettre en place si lelicenciement s’avère effectif.Mathieu est maître d'hôtel àParis. Il endure de nombreusesmoqueries de la part deses collègues, notammentaprès avoir dû s’arrêter quelquetemps pour subir des soinsmédicaux : « La coloscopie,c'est un truc de PD », ou« C'est à cause de ta maladiede PD ». Les insultes nes’arrêtent pas là : « Même devantles clients, je me fais insulter. »Il évoque le sujet à son patron,qui lui déclare qu'il a « autrechose à faire ».


Rapport sur l'homophobie 2014 • TravailLa parole à…Claude Weinumassociation HomobusHomobus est une association loi 1901.Elle s’est donné pour but, entre autres, la défensede l’égalité des droits des salariés LGBT du GroupeRATP.Tout au long de l’année, des campagnes d’informationet de prévention sont menées. L’associationest présente lors du salon du Printemps des associationsLGBT, au siège de l’entreprise pour laJournée mondiale de lutte contre le sida, pourla Journée internationale contre l’homophobie, etdéfile à la Marche des fiertés.En dehors de ces rendez-vous réguliers, deuxjournées de sensibilisation contre les discriminationsLGBTphobes au travail ont été organisées :l’une dans un centre bus et l’autre dans un terminusde conducteurs du RER.Une brochure éditée par Homobus et listant lescentres de dépistage du VIH en Ile-de-France a étéimprimée et mise à la disposition des agents danstous les centres médicaux du Groupe.Plusieurs articles parlant de l’association sontparus dans les journaux internes du Groupe et unpublipostage a été envoyé, il y a quelques années,dans le courrier interne de chaque agent pour lesinformer de l’existence de l’association.consulter le Défenseur des droits et de déposerune main courante au commissariat.- Armonia, agent du secrétariat métro, entame uneprocédure pour que son prénom masculin soitchangé sur le fichier téléphonique du Groupe enadéquation avec son apparence physique.L’association interviendra avec le soutien del’Observatoire RATP social et politique de diversitépour aider Armonia à obtenir gain de cause.- Une machiniste-receveuse a demandé à l’associationsi, à l’instar de ses collègues hétérosexuels,elle avait droit aux congés spéciaux quisont accordés lors d’un mariage. Elle a obtenugain de cause en cachant l’identité de saconjointe, sur la copie du livret de famille qu’ellea fourni à son encadrement.- Didier, machiniste-receveur, victime d’insulteshomophobes de la part d’un collègue, a demandéà l’association de lui indiquer la marche à suivrepour que ses conditions de travail s’améliorent.Didier a été accompagné pour déposer une maincourante au commissariat et pour être reçu parson responsable de centre bus.L'association Homobus est à l'écoute des agentsdu Groupe RATP et les soutient dans leurs démarchesafin qu'aucune discrimination fondée surl'orientation sexuelle ne soit plus tolérée.Les demandes d’informations et de soutien émanantd’agents du Groupe sont diverses :- Une machiniste-receveuse s’est fait insulterpendant ses heures de travail par un voyageur.Elle a demandé l’aide de l’association qui lui aconseillé de déposer une main courante aucommissariat.- Un conducteur de métro, dont le code vestimentairedérange, est harcelé par ses collègues, chezlui au téléphone : l’association lui a conseillé deClaude Weinum,Président de l'association Homobus


163La parole à…La CGTengagée dans la luttecontre les LGBTphobiesForte de ses valeurs fondatrices de justicesociale et de solidarité, la CGT s’est engagée delongue date dans le combat contre les discriminationset pour l’égalité des droits des personnes quellesque soient leur orientation sexuelle et leur identitéde genre.Au sein de la CGT, le travail militant sur lesquestions LGBT est structuré depuis 1996 sousforme d’un collectif confédéral qui regroupe dessyndiqué-e-s lesbiennes, gays, bi-e-s, trans et hétérosmandaté-e-s par leurs organisations territorialesou professionnelles.Plusieurs principes orientent notre action depuisbientôt 20 ans. Nous considérons que les droits desLGBT sont l’affaire de toute l’organisation et de toute-sles militant-e-s. Nous sommes convaincu-e-sque les syndicats et le monde associatif doivent unirleurs efforts. Nous accordons une importance égaleà toutes les composantes du sigle LGBT. Nous sommesattaché-e-s à obtenir de véritables droits scellésdans les accords d’entreprises qui ont une valeurjuridique, et non pas une éphémère attention deschartes et autres codes de bonne conduite qui nesont pas contraignants pour l’employeur-euse.L’année 2013 en France est marquée par l’ouverturedu droit au mariage et à l’adoption auxcouples de même sexe. Néanmoins, l’expressionpublique, violente et haineuse de l’opposition àcette avancée historique majeure nous a rappeléque la société n’était pas immunisée contre lesthèses homophobes, transphobes et sexistes. Nousle mesurons tous les jours sur le terrain de l’entreprise,où ces discriminations s’expriment encore ettoujours. Elles génèrent de la souffrance au travailpour les salarié-e-s LGBT quand elles ne les priventpas tout simplement de l’accès à l’emploi. Elles lespoussent à taire leur vie de couple, et par là mêmeà renoncer aux droits liés au statut familial. Nousconstatons toutefois que les victimes font de plusen plus appel à nos syndiqué-e-s pour faire cesseret réparer l’injustice subie. Nous nous efforçonsd’être dignes de cette confiance.Notre ancrage dans le monde du travail donne ànos élu-e-s et mandaté-e-s la possibilité d’être desacteurs-trices actifs-ves de la lutte contre l’homophobieet la transphobie et d’agir concrètementpour l’égalité des droits. Ainsi en 2010-11, la CGTfut à l’origine du premier accord d’entreprisereconnaissant l’homoparentalité et le mariageentre les personnes de même sexe conclu à l’étranger.La possibilité du mariage pour tou-te-s ouverteen France par la nouvelle loi n’évacue pas la questionde l’égalité des droits des couples pacsés ouvivant en concubinage devant les droits sociauxdans l’entreprise, qu’ils soient accordés par la directionou décidés par les comités d’entreprise.Traiterdes droits des personnes LGBT dans un accordd’entreprise peut également aider les personnesconcernées à « sortir du placard ».La CGT est de plus en plus fréquemment sollicitéepar les personnes transgenres qui souhaitent êtreaccompagnées pour annoncer leur démarche au collectifdu travail et à l’employeur-euse. Nous sommesd’ailleurs très préoccupé-e-s par la situation quecontinuent à endurer les personnes transgenres enFrance. Nous sommes convaincu-e-s de l’extrêmeurgence de faire une loi sur le changement d’état civilen France et de ne plus laisser cette question à lalibre appréciation des tribunaux. Ainsi attendonsnousdu gouvernement français des avancéesconcrètes pour les droits des transgenres, dans l’espritde la résolution 1728 du Conseil de l’Europe.Pour faciliter et amplifier l’appropriation des thématiquesLGBT par les syndicalistes, la CGT a élaboréun DVD et un Guide d’action syndicale «Gagnerl’égalité des droits des LGBT dans le monde dutravail ». Parus en octobre 2012, ces outils relatentl’histoire des persécutions à l’encontre des personnesLGBT, décrivent l’homophobie et la transphobieau travail, décryptent les moyens d’actions dans lecadre du mandat syndical. Il est possible de lescommander gratuitement ou de les télécharger surnotre site Internet.Collectif confédéral CGT de luttecontre l'homophobie, pour l’égalité etla non-discrimination des LGBT,Site Internet : www.cgt.fr (rubrique Travail /Égalité au travail / Homophobie)http://www.cgt.fr/-homophobie-.html


Rapport sur l'homophobie 2014VoisinageL’homophobie cogne à votre porteTrans3%76%Homme21%Femme20%18%Inconnu 2%34%+ de 50 ans35-50 ans- de 18 ans6% 18-24 ans20%25-34 ansInconnu3%63%Autresrégions34%Île-de-Francesexe des victimesâge des victimesorigine géographiqueOutingHomophobiesocialeRejetignorance8%Agressionssexuelles2% 1%75%Insultes60%Harcèlement12%29%42%13%MenacesDégradations14%chantagevolsDiffamation 18%AgressionsDiscriminationphysiquesmanifestations de l’homophobie*141 témoignages, correspondantà 130 cas, soit 4% du total.Des boîtes aux lettres taguées, des voituresvandalisées, des animaux de compagnieempoisonnés, des vitres cassées, des jets debouteilles ou d’œufs, des fenêtres maculées d’excréments,des préservatifs remplis de lait glissésdans le courrier :l’homophobie et la transphobie devoisinage se sont une nouvelle fois distinguéesen 2013 par des procédés aussi divers qu’abjects.« Je suis consterné par la débilité de certains », nousécrit un jeune homme qui a découvert le mot« PD » gravé sur sa boîte aux lettres. Notre interlocuteurveut connaître les « moyens légaux » pourstopper net ce « début de harcèlement ».Il est dans son bon droit, car on est, hélas, loin desblagues de potaches.Parmi les incidents qui ont étérapportés cette année à SOS homophobie,plus d’unsur sept (14 %) comprend une violence physique :cela commence par des crachats mais peut allerjusqu’aux coups.Témoin cet homme de 37 ans qui,dans son immeuble HLM, reçoit un tesson debouteille sur la tête parce qu’il a protesté contreun tapage nocturne : « Tu ferais mieux d’aimer lesfemmes ! »,lui lance un voisin devant la police municipale.Résultat : deux jours d’incapacité totale detravail (ITT).Dans deux cas sur cinq (42 %), on relève des intimidations: « Mes neveux vont s’occuper de toi »,« On fera tout pour que tu déménages ! » Dans le* Plusieurs manifestations peuvent être identifiées sur un cas. Enconséquence, le total des manifestations est supérieur à 100 %.


165Pas-de-Calais, un couple de lesbiennes subit desmenaces de mort de la part d’un voisin devenu« incontrôlable » depuis qu’elles vivent ensemble.Dernier épisode en date : une menace de violcorrectif « pour vous remettre le cerveau à l’endroit ».Quand une victime est prise dans le viseur des agresseur-e-s,l’escaladeest fréquente :plus dela moitié des témoignages reçus (60 %)relève du harcèlement, avec des insultesou des dégradations de biens à répétition,dont les conséquences psychologiques etmatérielles sont éprouvantes.En 2013, le nombre de situations ainsirecensées via notre ligne d’écoute ou lesmédias électroniques est globalementstable : 130 actes contre des gays, lesbiennes,bi-e-s et trans dans le cadre du voisinage.L’orientation sexuelle ou l’identité de genre est parfoisinvoquée à l’occasion d’un conflit entre voisine-spour déstabiliser ou affaiblir : « Ma chiennen’aboie que sur toi et on sait tous pourquoi ! », lanceun gardien à un habitant d’Ile-de-France. La personneLGBT est ainsi renvoyée à un statut de « souscitoyen-ne», qui n’aurait pas le droit de se plaindredu bruit ou d’une voiture mal garée. Mais le plussouvent, l’hostilité est frontale : « T’es dans monsecteur, dégage, la tarlouze ! », s’entend dire unétudiant de Seine-Saint-Denis en résidenceuniversitaire.Aux 130 victimes directes, c’est-à-direayant fait l’objet d’un témoignage auprèsde notre association,il convient d’ajouterdes conjoint-e-s et parfois des parents,frères ou sœurs : au total, 197 personnesqui ont souffert de ces manifestationsLGBTphobes. Il est ainsi frappant de constater que45 % des cas portés à notre connaissance concernentdes personnes LGBT qui sont en couple ouqui l’ont été récemment, au vu et au su de leurvoisinage.Pourquoi cette surreprésentation ? Parceque la vie en couple constitue un signe fort de visibilitéLGBT,en particulier aux yeux des homophobeset transphobes.Alors que le mariage des personnesde même sexe vient d’entrer dans le droit français,il n’est donc pas inutile de rappeler que vivre sous«Onva vousremettrele cerveauà l’endroit»«T’es dansmon secteur,dégage, latarlouze!»le même toit représente encore aujourd’hui uneprise de risque pour les personnes LGBT.Autre fait remarquable en 2013 :des personnes ontcontacté SOS homophobie, non pas pour des faitsles visant directement, mais pour un environnementhomophobe engendré par lesmanifestations contre le mariage pourtou-te-s (lire chapitre Mariage pour toute-s).Un jeune gay nous fait ainsi partde son désarroi : « J’habite à Versailles,l’épicentre des opposants au mariage desgays et lesbiennes. Une bonne partie desfenêtres sont recouvertes de drapeaux etd’affiches. » Un homme, qui précise êtrehétérosexuel, nous téléphone, choquépar la pancarte apposée sur le pavillon voisin :« Homophilie = maladie mortelle ».Certaines personnes victimes de LGBTphobies de lapart de leur voisinage vivent parfois avec stupeurcette intrusion dans leur vie quotidienne d’un rejetdont elles se croyaient protégées. D’autres cumulentles difficultés – personnes au chômage,malades, en situation de handicap, étrangers-èressans papiers – et semblent choisies par leursharceleurs-euses pour leur fragilité. Les personnestrans, souvent victimes de discriminations, ne sontpas épargnées et bénéficient rarement du soutiendes autres habitant-e-s.Quels que soient leur statut social et leséléments de preuve à leur disposition,lesvictimes souffrent souvent de ne pas êtreprises au sérieux par les forces de l’ordre,leur propriétaire ou bailleur social : prèsd’une sur cinq (18 %) dit avoir fait l’objetde discrimination dans son différendavec ses voisin-e-s. Malheureusement, que vousobteniez ou non gain de cause, le déménagementest fréquemment évoqué comme une solution ouune conséquence inéluctable à cette situationde violence physique, verbale, matérielle ou psychologique.


Rapport sur l'homophobie 2014 • VoisinageLe choc des insultesMarc, 46 ans, vit à Paris dansun immeuble HLM où habitentbeaucoup de personnes âgées.Un soir, vers 19 h 30, il se faitagresser verbalement dansla cage d’escalier par deuxjeunes manifestement sousl’emprise de cannabis. Ils letraitent de « sale PD » et lemenacent de le « planter » :« On sait où tu habites, c’estnotre territoire ici ! » Marchabite seul et ne travaille pas.Depuis, il a peur de sortirde chez lui. Il envisage dedéménager.Jérôme vit dans une petitecommune bretonne depuisquelques mois avec son ami.Il pense bien s’entendre avecses voisins. Mais une nuit,une voiture s’arrête devant chezeux et sa boîte aux lettres estendommagée de huit coupsde couteau. Jérôme a pris desphotos avant d’aller porterplainte à la gendarmerie.Il n’est pas aux abois mais semontre tout de même inquiet :sur la boîte aux lettres, les coupsde couteau visaient son nom etcelui de son compagnon.« Pour la seconde fois j’ai étévictime de propos homophobesde la part de mavoisine », nous écrit Antonin,qui vit à Paris. « Une premièrefois, elle m’a menacé en medisant que “tous les homosexuelsdevraient avoir le sidapour être exterminés”. Elle aajouté qu’elle allait appeler sescopains toxicos pour nousrefiler le sida avec uneFocusRomane est une femme de 28 ans.Elle vit en régionlyonnaise avec sa compagne qu’elle présente àses voisins comme sa colocataire.Depuis cinq mois,elle se fait régulièrement insulter par sa voisine dudessous,sans savoir ce qui a déclenché cette hostilité :« Tête de lesbienne,on n’aime pas ta gueule »,« Tu n’es qu’une sale gouine,je vais te faire craquer ! »Cette voisine a arraché l’étiquette de sa boîte auxlettres.Elle a jeté des détritus sur son paillasson ainsiqu'un détergent liquide.Romane a eu le temps del’apercevoir lors de ce dernier acte de malveillance.Quand la jeune femme appelle la ligne d’écoute deSOS homophobie,elle est manifestement sous le choc.Son débit est rapide.Elle est blessée d’avoir été outéeen tant que lesbienne alors que sa compagne et elleavaient choisi d’être discrètes sur le sujet.Elles peuventcependant compter sur le soutien d’une autre voisine,qui habite au rez-de-chaussée :elle les a défendues etse trouve désormais également dans le collimateur del’agresseure.Romane a très peur et se sent menacée.Sans travail,déprimée,elle est sous anxiolytiques.Elle trouve que sa compagne minimise les faits,et n’est pas soutenue par sa famille.Ses relations avecsa mère,très catholique,sont difficiles.Cette dernièrelui a dit pour tout réconfort : « De toute façon,tu n’asqu’à pas être homo.»Romane a déjà déposé une main courante il y a deuxmois,mais le commissariat n’a pas voulu enregistrersa plainte.L’écoutante de SOS homophobie lui rappelleque la police en a pourtant l’obligation et l’encourage àfaire valoir le caractère homophobe des insultes.Parmi les autres pistes envisagées : écrire directementau procureur de la République,aller à la mairie poursolliciter l’intervention d’un médiateur,contacterle bailleur social.Nous proposons également à Romanede recourir à un soutien psychologique poursurmonter cette épreuve.Enfin,nous lui indiquonsles coordonnées d’associations de parents ethomosexuel-le-s chrétien-ne-s pour tenter,par leurintermédiaire,de renouer le contact avec sa mère.


167Photo reçue d'une victimeseringue. Et hier, elle m’a crié :“Vous n’avez qu’à crever,sales PD”.»Antonin ne saitplus quoi faire et nous demande:« Dois-je aller porter plainte à lapolice ? »« Les gays vont brûler enenfer »Maria est une jeune lesbienneet vit à Strasbourg. Des voisinslui reprochent de faire trop debruit. Elle retrouve des excrémentsdans sa boîte aux lettreset s’est fait traiter de « salelesbienne » et de « travelo »devant des témoins. Elle s’estrendue plusieurs fois aucommissariat pour porterplainte mais on l’en a dissuadéeen lui disant que seulel’accumulation de mainscourantes pourrait déclencherla procédure. Or la police nepeut pas refuser de prendreune plainte…Alex nous écrit de Nice :« J’ai trente ans et je m'entendscordialement avec monvoisinage. Je suis en couple etnous vivons heureux. Je laissema voiture dormir dehors aupied de monimmeuble, dansune résidence.Un soir, en rentrant,quelle ne fut pasma surprise detrouver un autocollantsur ma voiture :“Les gays vontbrûler en enfer !!”Je répondraisvolontiers en laissantun mot dansle hall d'entréemais je n'ai pas envie d'attiserla haine. Alors je vais attendreet voir si cela se reproduit.Mon conjoint se sent à présenten insécurité. Certains seraientencore prêts à brûler quelquessorcières… Le Moyen Age ! »Homophobie à chaque palierEric vit dans une commune dela banlieue de Lille. Il rencontredes problèmes de nuisancessonores avec une voisine et sonfils qui habitent l’appartementau-dessus.A la suite d’unénième tapage, il monte àl’étage. Une altercation s’ensuitet il est frappé à la tête.Un voisin, témoin de l’agression,prend parti contre lui en luilançant : « Tu ferais mieuxd’aimer les femmes ! »Plus tard, la voisine avec qui ilest en conflit vient frapper àsa porte pour l’insulter : « Pute,PD, salope ! » Eric nous ditqu’il a peur pour sa sécurité,« qu’il n’a plus sa place dansce pays » : « Je suis homo maisj’ai droit à ma tranquillité.Qu’on m’on laisse vivre. »Jean-Michel nous appelle pourraconter l’homophobie qu’ilsubit dans son HLM, à Dijon,depuis des années : indifférence,rejet, insultes. Il a cherché àdéménager mais la procédureest longue. Ce dernier weekend,sa boîte aux lettres a ététaguée : « Salope », « PD ».Jean-Michel se dit déjà trèssensible en temps normal.Mais cette fois-ci, c’est l’épisodede trop. Il pleure beaucoupdepuis deux jours et ne réussitpas à dormir la nuit. Il est alléporter plainte auprès de lapolice, photos à l’appui.Le commissariat l’a acceptéemais il a peu d’espoir.Joël et son conjoint travaillentensemble en professionindépendante. Leur voisin depalier, se plaignant au départdu bruit de la télé, entre chezeux sans frapper et les insulte.Après, c’est l’escalade :harcèlement téléphonique,menaces de mort et chantage.« Depuis deux mois, nousn’osons plus rentrer chez nouset dormons dans la famille oudans notre voiture. Il nousréclame de l’argent pour nouslaisser regagner notreappartement ! » Leur entrepriseest en train de couler.Trois plaintes ont été déposéesmais la police leur faitcomprendre qu’en l’absenced’agression physique, leurtraitement prendra du temps.Pas de respect pour lafamilleUne adolescente nous écritde Normandie pour témoignerdes actes d’homophobie dont


Rapport sur l'homophobie 2014 • Voisinagesont victimes ses « deuxmamans ». Un conflit avecun voisin au sujet d'une placede parking a dégénéré enmanifestations de lesbophobie.Outre des dégradations de lavoiture, ce couple de femmess’entend appeler « messieurs »par son agresseur. « Je nedemande aucune aideque ce soit, j’apporte justeun témoignage », conclutnotre correspondante.Sébastien a 28 ans et vit chezsa mère, son frère et sa sœur,dans un logement social.Ils sont victimes d’injuresde la part d’une voisine et deses enfants depuis trois mois.Cette femme a dit à sa mère :« Tu as un PD, une pute à côtéde toi. » De plus, sa sœur s’estentendu dire qu’elle « se faisaitbaiser par tout le quartier ».Sébastien se sent d’autant plusmal que seul-e-s ses prochesétaient au courant de sonhomosexualité.Au coursd’une procédure de médiation,le bailleur social a décidéque si la situation s’envenimait,ce sont les deux famillesqui seraient expulsées.Mathieu nous appelle de Lyoncar il vient de recevoir unelettre anonyme à caractèrehomophobe : elle lui enjoint,ainsi qu’à son fils et soncompagnon, de quitterla résidence car leur relationhomosexuelle serait« malsaine » pour les autresenfants. Mathieu et son conjointont déjà été victimes dedégradations et de volFocusJoachim est un étudiant en sixième année demédecine. A un mois et demi des examens,il nousappelle car il ne supporte plus le harcèlementqu'il subit de la part d'un autre locataire desa résidence universitaire.Tout a commencé il ya plusieurs mois par des insultes homophobes.Les coups ont suivi,se traduisant par sept joursd’incapacité totale de travail (ITT).Il a porté plainteà plusieurs reprises contre son agresseur,un étudiantcomme lui,et deux autres résident-e-s ont acceptéde témoigner.Mais ses plaintes n’ont pas abouti.Joachim se montre déterminé à ne pas se laisserfaire,même s’il est conscient des risques qu’il prend.Il a fait appel à une assistante sociale,a saisi le Crous(centre régional gérant les logements étudiants),quilui a proposé de le reloger dans une autre résidence.Mais il veut faire valoir ses droits et obtenir l’expulsionde son harceleur.Joachim estime être bien entourépar des « personnes bienveillantes »,dont une amieétudiante en droit.Confiant-e-s dans sa ténacité etla rigueur de sa démarche,nous lui rappelonsqu’il peut appeler notre ligne de soutien autantde fois que nécessaire.dans leur jardin. Ils envisagentde déménager.Climat homophobeMika, 30 ans, vit dans le XVI earrondissement de Paris.Issu lui-même d’un milieuqu’il qualifie de « facho-catho »,il nous explique qu’une famille« catholique intégriste » de sonimmeuble arbore sur sa fenêtreun drapeau de la Manif pourtous. Il estime que personnene devrait s’autoriser à« afficher son orientationpolitique ». Pensant que porterplainte sera inutile, il envisagede contacter le syndic dela copropriété.Un couple de femmes nousécrit de la région parisienneoù elles habitent depuis plus devingt ans : « Nos voisins de lamaison juste en face, que nousconnaissons de longue date,sont très remontés depuis lasurenchère des manifs deFrigide Barjot auxquelles ilsparticipent. Ils ont ostensiblementmis des drapeaux dechaque côté de leur porte


169d’entrée et sur leur pelouse.Nous sommes choquéespar ce que nous interprétonscomme une provocation. »Séverine estime que ses voisinsont « totalement changé deregard » sur elle depuis lesmanifestations contre le mariagepour tou-te-s. « Avant, c’étaitun simple bonjour. Maintenant,ils me regardent de hautcomme si j’étais différente. »Séverine a désormais peurquand elle sort dans sa petiteville du Centre : « Je crains deme faire agresser parce queje suis lesbienne. Ma vie estdevenue un cauchemar. J’aihâte que se termine l’examendu projet de loi », nous écrivaitelleau printemps 2013.Haro sur les plus fragilesBruno habite en régionparisienne et vivait avec uncompagnon décédé en 2010.Il est victime de la part d’unevoisine d’insultes à la foisracistes, gayphobes et handiphobes.Malgré l’interventionde la police, elle continue leharcèlement : « Sale Arabe,rentre dans ton pays, salehandicapé de PD… » Brunoa d’abord besoin de soutienmoral car il se remet trèsdifficilement du décès deson ami, qui s’est suicidé.à domicile en raison d’un handicap.La femme de ménagede l’immeuble, nous dit-il, tientrégulièrement des proposgayphobes tant à son égardqu’à celui du professionneld’aide à la personne.Cette femme a égalementessayé d’entrer de force chezlui, accompagnée de son fils,sous prétexte de « discuter ».L’auxiliaire de vie est égalementinquiet : cette personne l’a prisà partie en lui demandantcomment « un garçon aussijeune pouvait faire ce qu’il fait ».SOS homophobie l’orientevers un avocat.Véronique est une trans en coursde transition MtoF. Elle vit à Pariset nous appelle suite à uneagression verbale à l’entréede son immeuble de la part dedeux jeunes mineurs : « Tu vasme sucer la bite, sale travelo. »Ils ont également essayé de luivoler son sac.Véronique hésiteà porter plainte car elle a déjàété mal accueillie dans le passépar un officier de police qui arefusé de la reconnaître en tantque femme en raison de sonétat civil masculin.Un homme âgé vit à Paris eta besoin d’un auxiliaire de vie


Rapport sur l'homophobie 2014InternationalUn monde à deux vitessesTrans9%Harcèlement 3%Dégradationsvols 6%Diffamation 9%AgressionssexuellesHomophobiesociale20%Inconnu57%Homme29%Inconnu40%Outing 11%Agressions14% physiques14%26%Menaceschantage14%Femmesexe des victimes31%Insultes31%RejetIgnorance29%Discriminationmanifestations de l’homophobie*Inconnu23%35-50 ans43%14%20%25-34 ansâge des victimes18-24 ansInconnu49%EuropeReste duMonde6%3%31%Reste del’Afrique11%Maghreborigine géographique30 témoignages, correspondantà 35 cas, soit 1% du total.«J’appelle les dirigeants mondiaux à s’attaquerà la violence contre les membres de la communautédes homosexuels,bisexuels et transidentitairesde notre famille humaine. » Ban Ki-moon,26 juillet 2013, Le Cap,Afrique du Sud.Lors du lancement de la campagne mondiale « Libreset égaux », le Secrétaire général des Nations uniess’est engagé personnellement à défendre la causeLGBT. Ses objectifs ? Sensibiliser le public sur laviolence et la discrimination homophobes,biphobeset transphobes, et promouvoir un meilleur respectdes droits partout dans le monde.Faut-il voir en 2013 un changement d’attitudeconcernant les droits des personnes LGBT ? Sansdoute… Mais force est de constater que dans lemonde d’aujourd’hui,des pays continuent d’avancer,à petits ou grands pas,en faveur de l’égalité,pendantque d’autres stagnent, et parfois même reculent.Un monde à deux vitesses toujours loin d’être rose.Selon le huitième rapport sur l’homophobie d’Etatde l’International Lesbian, Gay, Bisexual, Trans andIntersex Association (ILGA), 78 pays membres del’ONU étaient toujours dotés en 2013 de loispersécutant les personnes sur la base de leur orientationsexuelle.SOS homophobie a, cette année encore, reçu denombreux témoignages en provenance de l’étranger.* Plusieurs manifestations peuvent être identifiées sur un cas. Enconséquence, le total des manifestations est supérieur à 100 %.


171Souvent des appels à l’aide de personnes persécutées,agressées sexuellement, discriminées ou bienen grande souffrance psychologique. Même si unegrande partie des cas provient d’Afrique (42 %),la moitié concerne l’Europe et plus précisémentl’est de l’Europe. L’année 2013 a vu l’homophobiemonter en flèche notamment en Russie, en Ukraineet en Grèce.Europe : Raz d’Poutine !On pourrait penser que sur le Vieux Continent, où lasituation des personnes LGBT s’est considérablementaméliorée ces dernières années, avec notammentl’ouverture du mariage aux couples de personnesde même sexe dans certains pays, l’homophobiebattait en retraite. Mais dans des pays où l’homosexualitéest censée être relativement bien acceptée,les préjugés, les discriminations et la violencepersistent. Dans un rapport publié en avril 2013,Amnesty International met l’accent sur le« manque de protection contre les crimesde haine à caractère homophobe et transphobedans certains pays de l’Union européenne», comme en Allemagne, enBulgarie, en Italie, en Lettonie et enRépublique tchèque. De nombreuseslacunes sont également constatées enUkraine,en Moldavie,en Russie ou encoreen Turquie.Cette année, le président russe VladimirPoutine s’attire les foudres de nombreuxpays occidentaux en promulguantune série de lois restrictives des droits.Les personnes LGBT seraient-elles devenuesles terreurs de la Douma ? LeParlement russe a tranché : sur 437 député-e-s, 436ont voté au mois de juin 2013 en faveur d’une loi« punissant la propagande des sexualités non traditionnellesdevant mineur ». Alors que l'organisationHuman Rights Watch voit au travers de cette loi« discrimination et violation des droits humains »,laRussie surenchérit par un autre texte de loi interdisantl’adoption d’enfants russes par des coupleshomosexuels ou des célibataires dans les pays ayantlégalisé les unions entre personnes de même sexe.Le tout s’accompagne malheureusement à traversle pays d’une vague de violences envers les personnes«Nousdevonsnous cachercomme descriminels,par peur,chaquejour, d’êtreagressés »LGBT (guets-apens, vidéos d'humiliations, demauvais traitements et d'actes de barbarie diffuséessur Internet). Un climat terrifiant, confirmé par lahausse du nombre de nos témoignages en provenancede Russie.Même son de cloche en Ukraine où le Parlement avoté en 2012 une loi contre la « propagande homosexuelle».Depuis,les violences ne cessent de croître.Vladimir, 35 ans, témoigne de ce climat insupportablepour lui. « Je ne peux plus vivre avec la personneque j’aime dans ce pays. Nous devons nous cachercomme des criminels, par peur, chaque jour, d’êtreagressés », nous a-t-il déclaré. Et d’ajouter : « Il n’y apas d’autre solution ici que le suicide ! Aidez-moi, s’ilvous plaît, et dites-moi quoi faire. »Afrique : La lutte continueThabo Makgoba, archevêque anglican sud-africain,a lancé fin 2013 un appel à la responsabilisationdes leaders africains, hommes etfemmes, pour « faire cesser la violence »contre les personnes LGBT.Il a appelé,dansun message diffusé par l’organisationHuman Rights Watch, à « ne pas avoirpeur », mettant en cause les argumentsavancés par plusieurs gouvernementsselon lesquels la culture, la tradition et lareligion justifient la marginalisation deslesbiennes, gays, bisexuel-le-s et trans.« Certains disent que [l’homosexualité] estnon africaine,et je leur réponds que l’amourtranscende les cultures », a-t-il déclaré.Et d’ajouter : « Lorsque vous violentezquelqu’un sur la base de sa différence,c’estnon seulement le violenter mais aussi s’abaissersoi-même. » Des voix s’élèvent donc contre l’homophobied’Etat en Afrique, continent où, de loin,se trouvent aujourd’hui les pires lois criminalisantl’homosexualité. Faut-il voir ici un signe d’espoir?En Ouganda, la situation est des plus critiques.Le 20 décembre 2013, le Parlement a voté une loiqui durcit drastiquement la répression de l’homosexualité.Dans sa version initiale, le texte prévoyaitla peine de mort pour quiconque serait surpris-e pourla deuxième fois au cours d’un acte homosexuel.


Rapport sur l'homophobie 2014 • InternationalLargement critiquée par les démocratiesoccidentales, cette clausea finalement été écartée.Dans sa version finale, le texteprévoit tout de même la prison àperpétuité pour les homosexuelle-srécidivistes.«C’est une victoirepour l’Ouganda. Je suis heureuxque le Parlement ait voté contrele mal », a déclaré à l’AgenceFrance-Presse le député DavidBahati, à l’origine de la nouvellelégislation.Le Haut-Commissariatdes Nations unies a appelé leprésident Yoweri Museveni « àprotéger les droits de l’homme età s’abstenir de signer ce projet deloi »,considérant les LGBT dans cepays comme une « minoritévulnérable et marginalisée qui seheurte déjà à de nombreusesviolences et discriminations ».Leprésident ougandais a refusé dansun premier temps, le 17 janvier2014, de promulguer cette loi,estimant qu’il existe de meilleursmoyens de « soigner cette anormalité». Ayant eu la « confirmationque l’homosexualité n’est pasgénétique », il fait entrer la loi envigueur en février 2014.Au Cameroun,la situation est toutaussi délicate. Le 21 mars 2013,un rapport publié par HumanRights Watch déplore « les violationsdes droits humains commisesdans l’application de la loi contrel’homosexualité », loi en vigueurdans ce pays. Selon cette organisation,« contrairement à laplupart des 78 pays dont la législationcontient actuellement detelles lois, mais qui les mettentrarement en application, les procureurscamerounais ont engagédes poursuites contre au moinsFocusSophia témoigne de sa situation en Algérie :« Je me présente, mon nom est Sophia, je suiscélibataire et vis chez mes parents, avec mon frère,sa femme et sa petite fille. Je suis lesbienne depuismon plus jeune âge et j’ai déjà eu l’occasion defréquenter des filles, mais toujours dans le plusgrand secret parce que, comme vous le savezcertainement, l’homosexualité en Algérie estconsidérée comme un crime contre-nature,punissable par la loi […]. Je vivais mon orientationsexuelle jusque-là sans trop d’embûches, jusqu’aujour où mon frère est tombé sur mon journal intimedans lequel je détaillais mes rencontres,mes impressions et mes sentiments enversmes partenaires. Sur le coup, il n’a rien dit,ne croyant pas ce qu’il lisait. Il voulait vérifierl’information par lui-même. C’est ainsi qu’il mesuivait chaque jour jusqu’au travail, surveillaitmes allées et venues, prospectant derrière mon dos,jusqu’au jour où il m’a surprise dans les brasd’une fille. A partir de là, ce fut l’enfer pour moi.Il m’a battue, a chassé la fille, l’a dit à ses parentspuis m’a séquestrée dans ma chambre durantplusieurs jours, menaçant de me tuer et me traitantde tous les noms. Je n’avais pas le droit de sortir,ni même de manger. Il a été jusqu'à inviter ses amischez nous en l’absence de nos parents pour un violcollectif : "On va te baiser jusqu’à ce que tu deviennesaccro à la bite et pas à la chatte",disait-il.Il menace chaque jour de venir faire un scandaleau bureau,devant mes collègues.Je suis fonctionnaireet dans ce milieu,si mes supérieur-e-s l’apprennent,jerisque d’être radiée,révoquée et emprisonnée durantdes années,car mon frère trouvera le moyen de fairetémoigner des personnes contre moien échange de pots de vin.Il est prêt à tout pourque cette histoire n’éclabousse pas la réputationqu’il a dans le quartier.Il a même juré de me tuer.


173J’ai réussi à m’enfuir de la maison et je vis depuisquelques semaines chez une amie qui m’a encouragéeà déposer une demande de visa pourla France afin de pouvoir échapper à mon frère.Mais je sais qu’il est capable de me suivre jusquelà-bas,pour se venger.C’est pourquoi j’ai besoinde votre aide pour entamer des démarches quime protègeraient ou m’aideraient à me faire oubliermon frère pendant quelque temps […].Je vous remercie d’avance pour l’attention portéeà ma détresse et espère trouver une solution.»de New Delhi en 2009 qui dépénalisaitles rapports entre adultesde même sexe et considérait l’article377 du Code pénal de 1860comme une « violation des droitsfondamentaux » de la Constitution.Pour la Cour suprême, c’estaujourd’hui au Parlement qu’« il revient de légiférer sur ce sujet ».La loi pénale indienne qualifie toujoursl’homosexualité de comportement« contre-nature », punid’une amende et d’une peined’emprisonnement.28 personnes pour homosexualité au cours des troisdernières années ». Le 15 juillet 2013, Eric OhenaLentembe, directeur exécutif de la Camfaids(Cameroonian Foundation for AIDS), journalistehomosexuel et militant LGBT, est retrouvé mort,torturé dans son appartement.Les autorités du gouvernementont refusé de reconnaître que ce meurtrepouvait être motivé par la haine.L’Afrique du Sud sort, elle, son épingle du jeu. Le seulpays du continent à autoriser le mariage entrepersonnes de même sexe a vu célébré le premiermariage homosexuel traditionnel zoulou, en avril2013.Devant près de 200 invité-e-s,Tshepo Modisaneet Thoba Sithole se sont mariés selon un rite zoulou,entièrement vêtus de costumes traditionnels.L’Afrique du Sud est toujours considérée commele pays le plus avancé du continent en matière dedroits civils, malgré la réalité des discriminations etde la violence à l’encontre des personnes LGBT,notamment les « viols correctifs » de lesbiennes.Asie, Proche et Moyen-Orient : Délit un jour,Delhi toujoursL’Asie avance à petits pas, devenant plus favorableaux personnes LGBT.Ce n’est pas le cas de l’Inde quifin 2013 a confirmé la validité d’une loi héritée dela législation britannique,qualifiant l’homosexualitéde « crime ». Le 11 décembre, la Cour suprêmeindienne a en effet cassé un arrêt pris par un tribunalDans certains pays du Proche et duMoyen-Orient, des tribunauxs’appuient encore sur la charia. Selon son interprétation,cette loi islamique considère la sodomiecomme un crime. C’est le cas notamment del’Afghanistan, de l’Arabie saoudite ou de l’Iran.Au Liban, l’article 543 du Code pénal stipule que« tout rapport sexuel contre-nature est passible d’unan d’emprisonnement ». En avril 2013, l’ONG libanaiseHelem, spécialisée dans la défense des droitsLGBT, a dénoncé une agression contre les client-e-sd’une boîte de nuit de Dékouané. La police municipaleaurait effectué une descente dans cet établissementtolérant envers les homosexuel-le-s,arrêtantplusieurs personnes et notamment une personnetrans. Selon l’un de nos témoignages, cette dernièreaurait été « humiliée et forcée à se déshabiller àl’intérieur des locaux de la municipalité ». L’ONGaffirme dans un communiqué que, plusieurs moisdurant, la police a harcelé les client-e-s de cettediscothèque et que plusieurs personnes ont été« arrêtées,emmenées de force,puis agressées sexuellementet verbalement ».Même si la visibilité des personnes LGBT reste faibleen Asie, les marches des fiertés continuent de serépandre. Depuis 2009, la « Pink Dot » de Singapourcontourne les lois interdisant les manifestations publiques.Chaqueannée un pique-nique est organisé dansle célèbre Hong Lim Park.Les participant-e-s sont toute-sinvité-e-s à porter du rose.En 2013,l’événementarassemblé près de 21 000 personnes.Un gros «point


Rapport sur l'homophobie 2014 • Internationalrose » qui a fait parler de lui dans le monde entier.Selon l’ILGA, des Marches des fiertés se tiennentdésormais au Vietnam,en Thaïlande et même en Inde.Amériques : L’homophobie pirate encore lesCaraïbesSi l’Amérique du Nord continue sa quête vers uneplus grande égalité, l’Amérique du Sud et plus particulièrementles Caraïbes traînent encore les pieds.En Haïti, en République dominicaine, en Jamaïqueet dans d’autres îles de l'archipel,les agressions contreles homosexuel-le-s se sont multipliées cette année.Le 22 juillet, Dwayne Jones, travesti jamaïcain de17 ans, a été violemment agressé, puis poignardé ettué d’une balle. D’après une association de défensedes droits LGBT, au moins 25 homosexuel-le-s ettrans dominicain-e-s auraient été assassiné-e-sdepuis 2006. Selon Amnesty International, depuislongtemps déjà, « des cas flagrants de discriminationsont signalés dans les pays anglophones desCaraïbes,dont des épisodes de violences motivées parla haine ». Des discriminations légales « grâce aumaintien des lois datant de l’ère coloniale ».En Haïti,des organisations de défense des droits LGBTont reçu cette année des menaces lorsqu’elles se sontexprimées. En réponse, la Coalition haïtienne desorganisations religieuses et morales a organiséplusieurs manifestations sur l’île. Depuis, le nombred’agressions violentes contre des personnes LGBTaurait fortement augmenté. Les Nations unies ontinvité en août 2013 tou-te-s les Haïtien-ne-s à«continuer à travailler ensemble à la construction d’unEtat basé sur le respect de l’Etat de droit,la tolérance,la dignité de chacun et les droits de l’homme ».Plus au nord, l’égalité des droits marque des points.Le 26 juin 2013, la Cour suprême des Etats-Unis ainvalidé la loi fédérale de Défense du mariage(Defense of Mariage Act ou DOMA). Une victoirepour les défenseurs-euses du mariage ouvert àtou-te-s et pour le président Barack Obama qui aaussitôt annoncé la bonne nouvelle sur les réseauxsociaux : « Today's DOMA ruling is a historic stepforward for #MarriageEquality.#LoveIsLove 1 . »Cet acte ne signe pas pour autant l’ouverture aumariage à tous les couples (cette dernière relève dela compétence fédérale), mais assure que tousles couples légalement mariés doivent être traités dela même façon. En 2013, 9 nouveaux Etats américainsfranchissent le pas du mariage homosexuel,portant à 17 le nombre total d’Etats, plus la capitaleWashington, le reconnaissant juridiquement. Autregrand pays à autoriser le mariage, le Brésil dontle Conseil national de justice a adopté à l’unanimitéla décision, le 14 mai 2013.1. « La décision rendue aujourd'hui au sujet de la loi DOMAest une avancée historique vers l'égalité dans le mariage. »


175La parole à…Karima Delli,Catherine Grèze,Nicole Kiil-Nielsen,L’Union européenne : le plusgrand défenseur des droitsLGBT dans le mondeA l’heure où vous lirez ces lignes, les électionseuropéennes seront derrière nous. Le 25 mai, prèsde 400 millions de citoyens européens auront puélire leurs représentants pour la période de 2014 à2019. Alors qu’une nouvelle législature débute,rappelons-nous du rôle crucial que joue l’Unioneuropéenne pour défendre les droits des personnesLGBT dans le monde.En juin 2010, le Conseil de l’Union européenneadoptait une « boîte à outils » pour promouvoir etdéfendre les droits des personnes lesbiennes, gays,bisexuelles et transgenres dans le monde. Cetteliste d’actions suggérait aux diplomates européens,en poste dans 139 ambassades de l’UE dans lemonde, des moyens d’agir pour soutenir les défenseursdes droits humains, faire reculer la discrimination,et lutter contre la criminalisation de l’homosexualitéet des personnes transgenres - surtoutlorsque celle-ci implique la peine de mort, dansau moins cinq pays.Bien qu’une excellente première étape, l’applicationdes « boîtes à outils » diplomatiques de l’UE restefacultative et à l’appréciation des chefs de missionde par le monde. En décembre 2012, le Parlementeuropéen a demandé au Conseil d’ « œuvrer enfaveur de lignes directrices contraignantes » pourremplacer cette boîte à outils.Et depuis juin 2013, c’est chose faite. Les 27(désormais 28) ministres européens des Affairesétrangères ont adopté les lignes directrices del’UE en faveur des droits des personnes LGBTI 2 .Ces lignes directrices sont désormais imposéesaux diplomates européens, et les guident pourpromouvoir des droits humains universels, quellesque soient l’orientation sexuelle et l’identité degenre des individus.Grâce à ces lignes directrices, la diplomatie européennedans le monde inclut désormais :• Des actions ciblées, telles que des démarches etdéclarations publiques, des visites en prison,une présence de nos diplomates aux procès pours’assurer que ceux-ci sont aussi justes que possible,ou encore des rapports ciblés sur l’évolutiondes lois affectant les personnes LGBTI.• Un focus spécifique sur la situation des personnestransgenres et intersexuées.• Une liste de critères fondée sur le droit international,qui permet de juger de la situation despersonnes LGBTI dans un pays donné (par exemple,les associations LGBTI sont-elles libres dese réunir, discuter ou organiser des événementspublics ?).La situation va-t-elle s’améliorer dans les 78pays condamnant aujourd’hui l’homosexualité ?Certainement pas d’ici demain, malheureusement.Mais l’action diplomatique européenne disposedésormais d’une corde importante à son arc.Le Parlement européen a, quant à lui, adopté cescinq dernières années pas moins de 75 résolutionsmentionnant les droits des personnes LGBTIdans le monde : Russie, Iran, Croatie, paysafricains, caribéens et pacifiques, Nations unies,la situation des femmes lesbiennes… tous cespays, tous ces sujets ont attiré notre attention, etnous avons tout fait pour que l’Union européennepromeuve les valeurs d’égalité et de justice àtravers son rayonnement mondial.De par le monde, nous pouvons compter sur denombreux alliés ; mais nous savons également queles ennemis de l’égalité sont de tous les continents,et de toutes les batailles. L’Union européenne doitrester l’une des principales défenses pour les droitsLGBTI dans le monde.• Consulter les lignes directrices de l’UE pour les droits despersonnes LGBTI (en anglais) :http://bit.ly/LGBTIguidelines2. Lesbiennes, gays, bi-e-s, trans et intersexesKarima Delli, Catherine Grèze, Nicole Kiil-Nielsen, députées européennes EELV, membresde l’Intergroupe LGBT du Parlement européen


Rapport sur l'homophobie 2014


177Annexes


Rapport sur l'homophobie 2014Le droit françaisface à l’homophobieAgression - l'homophobie, une circonstance aggravanteAu début des années 2000, plusieurs textes sont votés ou amendés par l'Assemblée nationale inscrivantdans la loi la lutte contre la violence perpétrée envers des individus en raison de leur orientation sexuelleréelle ou supposée: c’est l’intention de l’agresseur qui compte, en l’occurrence son mobile homophobeassimilé à un mobile raciste.L'homophobie peut être une circonstance aggravante de certaines infractions, c'est-à-dire qu'elle peutalourdir la peine encourue – l’article 132-77 du Code pénal exige des manifestations extérieuresd’homophobie concomitantes à l’infraction.- Meurtre à caractère homophobe ou transphobe [ART. 221-4 7° CP]: Réclusion criminelle à perpétuité ;- Tortures et actes de barbarie à caractère homophobe ou transphobe [ART. 222-3 5° TER CP]: 20 ansde réclusion criminelle ;- Violences à caractère homophobe ou transphobe ayant entraîné la mort sans intention de ladonner [ART. 222-8 5° TER CP]: 20 ans de réclusion criminelle ;- Violences à caractère homophobe ou transphobe ayant entraîné une mutilation ou une infirmitépermanente [ART. 222-10 5° TER CP]: 15 ans de réclusion criminelle ;- Violences à caractère homophobe ou transphobe ayant entraîné une incapacité de travail totalependant plus de 8 jours [ART. 222-12 5° TER CP]: 5 ans et 75 000 euros d’amende ;- Violences à caractère homophobe ou transphobe ayant entraîné une incapacité de travail totaleinférieure ou égale à 8 jours [ART. 222-13 5° TER CP]: 3 ans et 45 000 euros d’amende ;- Viol à caractère homophobe ou transphobe [ART. 222-24 9° CP]: 20 ans de réclusion criminelle ;- Agressions sexuelles autres que le viol présentant un caractère homophobe ou transphobe[ART. 222-30 6° CP]: 10 ans et 150 000 euros d’amende ;- Vol à caractère homophobe ou transphobe [ART. 311-4 9° CP]: 5 ans et 75 000 euros d’amende ;- Extorsion à caractère homophobe ou transphobe [ART.312-2 3° CP]:10 ans et 150 000 euros d’amende;- Menaces à caractère homophobe ou transphobe de commettre un crime ou un délit [ART. 222-18-1 CP]: 2 ans et 30 000 euros d’amende ;- Menaces à caractère homophobe ou transphobe de commettre un crime ou délit avec l’ordrede remplir une condition [ART. 222-18-1 CP]: 5 ans et 75 000 euros d’amende ;- Menace de mort avec l’ordre de remplir une condition [ART.222-18-1 CP]:7 ans et 100 000 euros d’amende;- Injure homophobe ou transphobe non publique [ART. R. 624-4 CP]: 750 euros d’amende ;- Diffamation homophobe ou transphobe non publique [ART. R. 624-3 CP]: 750 euros d’amende ;- Injure homophobe ou transphobe publique [ART.33 AL. 4 L.1881]: 6 mois et 22 500 euros d’amende ;- Diffamation homophobe ou transphobe publique [ART.32 AL.3 L.1881]:1 an et 45 000 euros d’amende.L’homophobie et la transphobie peuvent également être réprimées en tant qu’infractions spécifiques.Ainsi, la provocation à la haine ou à la violence ou aux discriminations fondées sur l’orientation sexuelle ou


179l’identité sexuelle est punie d’1 an d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende (Art. 24 al. 9 L.1881).DiscriminationConstitue une discrimination homophobe ou transphobe toute distinction opérée entre des personnesphysiques en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité sexuelle, réelle ou supposée.La discrimination est envisagée aux articles 225-1 à 225-4 du Code pénal.L’article 225-2 précise que la discrimination n’est sanctionnée que dans certains cas limitativement énumérés:- Le refus de fournir un bien ou un service;Exemples :- le cas du propriétaire d’un appartement qui, ayant appris que son locataire est trans, lui imposedes garanties supplémentaires exorbitantes- le cas d’un dentiste refusant des soins à une personne séropositive- ou encore celui d’un hôtelier refusant une chambre à un couple homosexuel- L’entrave à l’exercice d’une activité économique : sans viser des agissements précis, cette formede discrimination vise tous moyens exercés par une personne (pression, dénigrement, boycott) àl’encontre d’une personne en raison de son orientation sexuelle, son état de santé ou son handicap,son sexe afin de rendre l’exercice de son activité plus difficile;- La discrimination à l’embauche, c’est-à-dire dans l’accès à un emploi;- La discrimination au travail : refus d’un avantage, harcèlement ou licenciement d’un salarié.Ces discriminations, commises par des personnes privées, sont punies par 3 ans d’emprisonnement et45 000 euros d’amendes.La peine encourue est aggravée (5 ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende) lorsque la discriminationse déroule dans un lieu accueillant du public ou consiste à interdire l’accès à un tel lieu.Les discriminations peuvent également être commises par une personne dépositaire de l’autorité publiqueou chargée d’une mission de service public dans l’exercice de ses fonctions.Exemples :- Refus du bénéfice d’un droit- Entrave à l’exercice d’une activité économique qui peut se manifester par un retard manifeste etdélibéré dans la façon de traiter une demande (exiger des formalités inutiles…)La répression est alors aggravée : 5 ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende (Art. 432-7 CP).Pour venir en aide aux victimes, la loi du 31 mars 2006 a introduit une disposition autorisant le «testing»en vue de faciliter la charge de la preuve. L’article 225-3-1 du Code pénal a ainsi consacré la légalité de cemode de preuve.A noter :Au-delà des actes discriminatoires,le droit sanctionne également les provocations à la discrimination.Ces informations sont extraites du Guide pratique contre l’homophobie édité par SOS homophobie.La version complète de ce guide est téléchargeable sur le site de l’association.


Rapport sur l'homophobie 2014 • AnnexesFaits marquantsde l’année 20135 janvier 2013 — Politique – Mariage pour tou-te-sUn mariage symbolique est célébré à Montauban entre deux femmes.A l’initiative des Jeunes Communistes,cette cérémonie vise à protester contre l’homophobie de la maire UMP de la ville, Brigitte Barèges.9 janvier 2013 — Politique – PMALe groupe PS à l’Assemblée nationale retire l’amendement PMA du projet de loi « Mariage pour tou-tes». La PMA serait intégrée à un projet de loi Famille pour mars 2013, repoussée « avant la fin de l’année2013 »… Quelques député-e-s déposeront néanmoins un amendement.13 janvier 2013 — La Manif pour tousA l’appel de la Manif pour tous, entre 340 000 (selon la police) et 800 000 personnes (selon les organisateurs-trices)se réunissent à Paris contre le mariage,l’adoption et la PMA pour les homosexuel-le-s.Plusieursresponsables politiques y participent, dont Jean-François Copé et Marion Maréchal-Le Pen.19 janvier 2013 — Manifestations pour l’égalitéEn région,plusieurs manifestations rassemblent 40 000 personnes,aussi bien dans de grandes villes (Bordeaux,Lille, Marseille, Strasbourg,Toulouse) que dans de plus petites (Dijon,Angers, Nancy, Orléans…).22 janvier 2013 — Santé – VIHUne recommandation du Haut Conseil de la santé publique préconise la fin de l’interdiction des soins decorps pour les personnes décédées des suites du VIH ou des hépatites B ou C.23 janvier 2013 — Politique – Mariage pour tou-te-s200 élu-e-s marchent du palais Bourbon à l’Elysée pour remettre au Président de la République une lettre luidemandant de recevoir les opposant-e-s au mariage pour tou-te-s.25 janvier 2013 — Justice – Etat civilUne circulaire du ministère de la Justice vise à simplifier la transcription dans l’état civil français des enfantsné-e-s d’une GPA pratiquée à l’étranger.27 janvier 2013 — Manifestations pour l’égalitéEntre 125 000 (selon la police) et 400 000 personnes (selon les organisateurs-trices) défilent à Paris poursoutenir le projet de loi « Mariage pour tou-te-s ». La veille, plusieurs manifestations étaient organiséesen région (Lyon,Bayonne,Clermont-Ferrand…).Des Français-es vivant à Montréal,Rio de Janeiro ou encoreBuenos Aires ont également manifesté leur soutien à la loi.29 janvier 2013 — La Manif pour tousL’ouverture des débats à l’Assemblée nationale provoque des actions de la Manif pour tous dans Paris :banderoles déployées sur des ponts et des péniches, prière de rue organisée aux abords du palais Bourbonpar Civitas.12 février 2013 — Politique – Mariage pour tou-te-sLors d’un vote solennel, le projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe estadopté à l'Assemblée nationale par 329 voix pour et 229 contre. Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault


181salue une loi « qui restera comme une des grandes lois de la République ».16 février 2013 — La Manif pour tousLe collectif dépose au Conseil économique, social et environnemental (CESE), dont l’avis est consultatif,une pétition qui réunirait 700 000 signatures. Celle-ci est déclarée irrecevable le 21 février par le présidentdu CESE, Jean-Paul Delevoye, et officiellement rejetée le 26 février.23 février 2013 — Culture – CinémaLes Invisibles, de Sébastien Lifshitz, remporte le César du meilleur documentaire.24 mars 2013 — La Manif pour tousAprès avoir plusieurs fois demandé de manifester sur les Champs-Elysées (demande rejetée par la préfecture),le collectif organise un nouveau rassemblement contre le mariage pour tou-te-s. Il revendique 1,4 millionde participant-e-s alors que la police n’en dénombre que 300 000. Plusieurs débordements ont lieu, desmanifestant-e-s essayant coûte que coûte de forcer le passage jusqu’aux Champs-Elysées.26 mars 2013 — Politique – Union européenneParis accueille la Conférence régionale sur les droits des personnes LGBT en Europe, qui réunit responsablespolitiques européen-ne-s et militant-e-s.7 avril 2013 — Associations – Printemps des associations vandaliséLa devanture de l’Espace des Blancs Manteaux à Paris, où se tient le Printemps des associations LGBT, estrecouverte d’affiches pro-Manif pour tous et Printemps français.Le maire du IV e arrondissement,ChristopheGirard,ainsi que les ministres de l’Intérieur et des Droits des femmes,Manuel Valls et Najat Vallaud-Belkacem,condamnent ces « dégradations scandaleuses ».8 avril 2013 — Agression homophobeUn couple d’hommes, Wilfred et Olivier, est agressé dans Paris alors qu’il sort d’une fête. La photo duvisage tuméfié de Wilfred circule sur les réseaux sociaux.10 avril 2013 — Rassemblement contre l’homophobieDans un climat de multiplication des actes et paroles homophobes, plus de 5000 personnes se rassemblentdevant l’Hôtel de Ville à Paris contre l’homophobie et pour l’égalité des droits.12 avril 2013 — Politique – Mariage pour tou-te-sAprès dix jours de débat, le Sénat adopte le projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes demême sexe par 171 voix pour et 165 contre.17 avril 2013 — Agression homophobeQuatre individus s’en prennent à un bar gay de Lille, insultant et agressant notamment le patron, blessanttrois personnes.20 et 21 avril 2013 — Rassemblements pour l’égalitéPlusieurs rassemblements sont organisés à Paris et dans d’autres villes afin de protester contre l’homophobieambiante et de soutenir le projet de loi « Mariage pour tou-te-s ».23 avril 2013 — Justice – Demande d'asileA Bordeaux, trois personnes sont condamnées pour les actes homophobes (insultes et coups) qui ont eulieu en septembre 2011. L'un d'entre eux écopera de quatre mois de prison ferme, les deux autres paierontsoixante jours amendes à 15 euros.23 septembre 2012 — Politique – Adoption du mariage pour tou-te-sLa loi est adoptée en seconde lecture lors d’un vote solennel par 331 voix pour et 225 contre. Les députée-sde l’opposition saisissent immédiatement le Conseil constitutionnel.


Rapport sur l'homophobie 2014 • Annexes17 mai 2013 — Politique – Mariage pour tou-te-sC’est le jour de la lutte internationale contre l’homophobie et la transphobie que le Conseil constitutionnelvalide la loi ouvrant le mariage et l’adoption aux couples de personnes de même sexe. Elle estpromulguée dans la foulée par le Président de la République, François Hollande.26 mai 2013 — La Manif pour tousUn rassemblement du mouvement réunit 150 000 personnes à Paris. Il se termine par des affrontementsentre manifestant-e-s et policiers-ères.26 mai 2013 — Culture – CinémaLe même jour, la Palme d’or du Festival de Cannes est attribuée à La Vie d’Adèle, d’Abdellatif Kechiche,qui retrace une histoire d’amour entre deux jeunes femmes.29 mai 2013 — Premier mariage pour tou-te-sA la mairie de Montpellier, le premier mariage pour tou-te-s est célébré par la maire PS de la ville, HélèneMandroux.30 mai 2013 — Associations – SOS homophobieL’agrément du ministère de l’Education nationale, qui avait été retiré à l’association en décembre 2012suite à une plainte de la Confédération nationale des associations familiales catholiques, lui est réattribué.4 juin 2013 — Agression homophobeUn couple de femmes est agressé à Lille après un rassemblement des Veilleurs. L’état d’une des deuxfemmes nécessite un arrêt de travail de 90 jours.7 juin 2013 — Politique – Mariage pour tou-te-sJean-Michel Colo, le maire d’Arcangues (Pays basque), refuse de célébrer un mariage entre deux hommeset explique que personne de son conseil municipal ne le fera. Les deux hommes portent plainte pour discriminationle 26 juin. Leur mariage sera célébré par une adjointe au maire le 22 juillet.10 juin 2013 — Culture – Affiches censuréesDes affiches du film L’Inconnu du lac, sur lesquelles deux hommes s’embrassent, sont retirées de l’espacepublic à la demande des mairies de Saint-Cloud et de Versailles.22 juin 2013 — Culture – Exposition vandaliséeL’exposition « Couples imaginaires » d’Olivier Ciappa, dont SOS homophobie était partenaire, présentéesur les grilles du square du Temple en face de la mairie du III e arrondissement de Paris, est vandalisée. Lesvisages sur les photos sont lacérés.27 juin 2013 — Politique – TransidentitéLa CNCDH (Commission nationale consultative des droits de l’homme) rend un avis favorable à lareconnaissance de l’identité de genre dans le droit français. Elle préconise notamment une démédicalisationcomplète de la procédure de changement de sexe à l’état civil, ainsi qu’une déjudiciarisation partielle.10 juillet 2013 — EuroprideOuverture de l’Europride à Marseille, qui se tient jusqu’au 20 juillet.10 septembre 2013 — Justice – GPA / Etat civilLa Cour de cassation émet deux arrêts justifiant le refus de transcription dans l’état civil français d’enfantssoupçonné-e-s d’être né-e-s par GPA à l’étranger.Cette décision va à l’encontre de la circulaire Taubira du25 janvier 2013.


18312 septembre 2013 — Justice – Mariage binationalLe mariage d’un couple franco-marocain est annulé deux jours avant la cérémonie. Le procureur de laRépublique invoque les conventions bilatérales liant la France et d’autres pays (Maroc, mais aussi dix autrespays dont la Pologne, le Cambodge ou l’Algérie) qui empêchent les ressortissants de ces pays d’épouser unepersonne du même sexe.Ce mariage sera finalement célébré le 9 novembre après plusieurs recours juridiques.18 septembre 2013 — Politique – Droits des personnes transLes amendements concernant les droits des personnes trans proposés par plusieurs sénatrices, dont EstherBenbassa (EELV) et Chantal Jouanno (UDI),n’ont pas été adoptés dans le cadre de la loi sur l’égalité hommesfemmes.Selon la ministre des Droits des femmes, Najat Vallaud-Belkacem, ces dispositions figureront dansla loi sur la simplification du droit début 2014.22 septembre 2013 — Politique – Comité consultatif national d’éthique22 nouveaux membres sont nommé-e-s au CCNE, chargé de rendre son avis sur des questions telles que laPMA ou l’ouverture du don du sang aux hommes homosexuels. Certains de ces nouveaux membres ontdéjà montré leur ouverture sur les sujets LGBT.7 octobre 2013 — Sport – Gay GamesEn lice aux côtés de Londres et Limerick, Paris remporte l’organisation des Gay Games 2018. Le projet avaitreçu un fort soutien associatif et politique, notamment de la ministre des Sports Valérie Fourneyron.17 octobre 2013 — Justice – AdoptionPour la première fois en France, un couple de femmes obtient l’adoption plénière de leurs enfants grâceà une décision du tribunal de grande instance de Lille.18 octobre 2013 — Politique – Clause de conscienceEn réponse à une question prioritaire de constitutionnalité déposée par le Collectif des maires pour l’enfance,proche de la Manif pour tous, le Conseil constitutionnel établit que la loi « Mariage pour tou-te-s » ne portepas atteinte à la liberté de conscience des maires.19 octobre 2013 — ExistransEntre 700 (selon la police) et 2 000 personnes (selon les organisateurs-trices) participent à la 17 e marcheExistrans à Paris pour réclamer notamment une loi sur le changement d’état civil des personnes trans.27 octobre 2013 — La Manif pour tousEn déplacement à Angers, la ministre de la Justice Christiane Taubira est attendue par une centaine depersonnes de la Manif pour tous, dont des enfants, qui demandent sa démission, à coups notammentd’insultes racistes.23 novembre 2013 — La Manif pour tous3 000 personnes défilent à Nantes contre le mariage pour tou-te-s, la PMA et la GPA.10 décembre 2013 — Justice – Plainte pour refus de célébrer un mariageUn couple de femmes que la maire de Bollène, Marie-Claude Bompard (Ligue du Sud), avait refusé de marierpour motifs religieux a porté plainte pour discrimination et entrave à l’exécution de la loi. La plainte estclassée sans suite sous prétexte que le mariage a pu être célébré.


Rapport sur l'homophobie 2014 • AnnexesRécapitulatif descommuniqués de pressede SOS homophobieRetrouvez le texte complet des communiqués de presse de l’association sur notre site Internet :www.sos-homophobie.org/communiquesLe 28 janvier 2013Une charte pour un débat parlementaire respectueux des personnes LGBTDepuis le début des débats publics concernant le mariage pour toutes et tous, SOS homophobie est enpremière ligne pour constater les effets des dérapages verbaux et caricatures diverses.Le 08 février 2013Alignement des délais de prescription des injures et diffamations...« la patience estl’art d’espérer »Le Sénat a voté à l'unanimité, jeudi 7 février, pour une proposition de loi, adoptée par l'Assembléenationale, relative à la suppression de la discrimination dans les délais de prescription prévus par la loisur la liberté de la presse du 29 juillet 1881.Le 11 février 2013Rencontre des associations de lutte contre l'homophobie avec Twitter : une premièreétapeCommuniqué de presse inter-associatif : SOS homophobie, CONTACT, RAVAD et Inter-LGBTLe 8 février, les associations SOS homophobie, CONTACT, l’Inter-LGBT et le RAVAD ont rencontré lesresponsables de Twitter, en présence de la ministre Najat Vallaud Belkacem – à l’initiative de la rencontre –et d’un représentant du ministère de Fleur Pellerin.Le 13 février 2013Mariage, adoption : l'égalité est en marche !Ce mardi 12 février, après dix longues journées de débat, l'Assemblée nationale a adopté en premièrelecture la loi ouvrant le mariage et l'adoption aux couples de personnes de même sexe, avec 329 votespour et 229 contre.Le 18 mars 2013Le prix Pierre Guénin contre l'homophobie est décerné à Sophia AramLe 12 mars 2013, les membres du jury du prix Pierre Guénin contre l’homophobie parmi lesquels compte SOShomophobie,se sont réuni-e-s sous la présidence de Christophe Girard et ont décidé de distinguer Sophia Aram.Le 27 mars 2013Nouvelle enquête sur la lesbophobie : mieux la connaître pour mieux lutter contreLes femmes qui aiment les femmes sont encore victimes de comportements hostiles, c’est pourquoi SOShomophobie mène une nouvelle enquête sur la lesbophobie. Le questionnaire, administré du 30 marsau 20 juillet 2013,sera disponible sur le site de l’association,et ses membres iront à la rencontre des personnesconcernées à l’occasion de manifestations LGBT (lesbiennes, gays, bi-e-s et trans) partout en France.


185Le 29 mars 2013Pour François Hollande, la PMA ...on verra.Lors de son interview télévisée du 28 mars 2013, François Hollande a fermement maintenu son soutienau projet de loi ouvrant le mariage et l’adoption aux couples de personnes de même sexe qui sera débattudans quelques jours au Sénat. SOS homophobie salue cette fermeté.Le 08 avril 2013Après la semaine sainte, la semaine des violences homophobesAlors que les débats s’ouvrent au Sénat sur le projet de loi ouvrant le mariage et l’adoption aux couplesde personnes de même sexe, les violences commises par les opposant-e-s au projet de loi se multiplient.Le 18 avril 2013L'habit ne fait pas le moine, le sticker SOS homophobie ne fait pas la non-homophobeCe mardi 16 avril, invitée de l'émission «Le Grand Journal» sur Canal +, Frigide Barjot arborait un stickerde SOS homophobie sur son t-shirt. Son espoir de se dédouaner de sa responsabilité quant à la radicalisationdu mouvement la Manif pour tous est, et restera, un combat vain tellement les violences de cesdernières semaines et derniers mois marqueront à jamais les citoyen-ne-s épris-es d'égalité.Le 29 avril 2013Projet 17 mai : des crayons pour lutter contre l'homophobieAprès 7 mois consécutifs où SOS homophobie a recueilli beaucoup plus de témoignages que d'habitude,après les manifestations de rejet des homosexuel-le-s ces dernières semaines, après les violentesagressions verbales ou physiques dont l'association a été témoin, le vote de la loi sur le mariage pourtou-te-s a été un souffle, une respiration.Le 14 mai 2013Rapport annuel sur l'homophobie 2013 : les homophobes à la noceA l'occasion de la Journée internationale contre l'homophobie et la transphobie et pour la 17 e année consécutive,SOS homophobie publie son Rapport sur l'homophobie. Basé sur les centaines de témoignagesque l'association reçoit chaque année sur sa ligne d'écoute, son site Internet ou lors d'événements,il constitue aujourd'hui la seule publication permettant de suivre, année après année, l'évolution del'homophobie et de la transphobie en France.Le 17 mai 2013L'avancée vers l'égalité n'est pas contraire à la constitution !Ce vendredi 17 mai, le Conseil constitutionnel a rendu un avis attendu : la loi ouvrant le mariage et l'adoptionaux couples de personnes de même sexe n'est pas contraire à la Constitution.A peine le texte était-il voté enseconde lecture à l'Assemblée nationale, après un nombre presque record d'heures de débat au sein deshémicycles du Parlement,que les parlementaires de l'opposition sautaient sur l'ultime procédure leur permettantde faire obstruction à l'adoption du texte et saisissaient le Conseil constitutionnel.Le 21 mai 2013L'homophobie au travail est contre-productive !La lesbophobie,la gayphobie,la biphobie et la transphobie au travail sont des réalités quotidiennes.Insultes,blagues à la machine à café, harcèlement moral, refus d'embauche ou licenciement discriminatoire,blocage dans la carrière : en l'espace de trois ans, plus de 500 situations d'homophobie dans le cadreprofessionnel ont été signalées à la ligne d'écoute de SOS homophobie.


Rapport sur l'homophobie 2014 • AnnexesLe 29 mai 2013Après la pluie de violences, le beau temps des mariagesAprès plusieurs semaines de violences et un week-end ayant laissé cours à de nombreuses et déplorablesagressions physiques, notamment à l’encontre de membres de SOS homophobie, les premiers mariagesentre personnes de même sexe sont enfin célébrés ce mercredi 29 mai.Le 30 mai 2013Prévention à l'école : SOS homophobie de nouveau agréée sur le plan nationalLe 30 mai 2013, le ministère de l'Education nationale publie au Bulletin officiel l'arrêté délivrant àSOS homophobie un agrément national au titre des associations éducatives complémentaires del'enseignement public : une reconnaissance du travail réalisé et qui reste encore à faire pour la luttecontre l'homophobie, la biphobie et la transphobie en milieu scolaire.Le 03 juin 2013SOS homophobie multiplie ses actions contre l'homophobie et le sexisme dans le sportIl y a quelques semaines, les Dégommeuses, équipe féminine de football parisienne, ont subi au coursd'un entraînement une violente agression par un groupe d’adolescents : du haut d'un immeuble voisinau terrain, ces agresseurs les ont arrosées d'insultes, accompagnées de gestes à connotation sexuelle,avant de jeter vers elles des bouteilles pleines d'eau. Et ceci, dans l'indifférence générale.Le 10 juin 2013Futur-e-s marié-e-s discriminé-e-s : SOS homophobie appelle à agirCes dernières semaines,SOS homophobie a reçu plusieurs témoignages de couples de personnes de mêmesexe qui se voient refuser des services commerciaux,tels que des locations de salles en vue de leur mariagepar exemple, au seul motif de leur orientation sexuelle. Parfois même, un refus de célébrer leur union parle ou la maire de leur commune. Une situation alarmante.Le 24 juin 2013La lutte contre l'homophobie et la transphobie un an après l'arrivée au pouvoir deFrançois HollandeEn 2012, SOS homophobie faisait parvenir à chaque candidat-e à l’élection présidentielle un questionnaireportant sur 12 revendications qui visent à lutter contre l’homophobie et la transphobie et à œuvrerpour l’égalité des droits. Un an après les élections présidentielles et législatives, force est de constaterque ces sujets ne sont pas ignorés par le nouvel exécutif mais que des résultats concrets se font attendre.Le 03 juillet 2013PMA : le CCNE repousse la tenue d’états généraux non nécessairesLe président du comité consultatif national d'éthique (CCNE) annonce reporter ses états générauxsur la question de la procréation médicalement assistée (PMA) « au début 2014 ». La raison invoquée :le débat public sur la fin de vie qui a bousculé son calendrier.Le 02 août 2013Démédicalisation et déjudiciarisation du changement d'état civil pour les personnestransCommuniqué de presse inter-associatifDémédicalisation et déjudiciarisation du changement d’état civil pour les personnes trans : après l’avis de laCNCDH, le parti socialiste au gouvernement doit plus que jamais tenir ses engagements : une loi et vite !


187Le 03 septembre 2013Rentrée scolaire : nouveaux espoirs dans la lutte contre l'homophobie et la transphobieà l'écoleUne nouvelle année scolaire démarre et nous ne pouvons qu'espérer qu'elle soit moins virulente que celleécoulée pour les jeunes lesbiennes, gays, bi-e-s et trans (LGBT), ou celles et ceux perçu-e-s comme tel-le-s.L'actualité de ces derniers mois a mis en évidence un relent inquiétant d'homophobie et de transphobie ausein de la société française qui a pu s'exprimer sans complexe dans l'espace public et sur les réseaux sociaux.Le 18 octobre 2013Pas de clause de conscience pour les maires opposé-e-s à l'égalitéVendredi 18 octobre, le Conseil constitutionnel affirme que la loi ouvrant le mariage et l’adoption auxcouples de même sexe ne porte pas atteinte à la liberté de conscience des maires chargé-e-s de l’appliquer.Le 27 novembre 2013Réduire l'homophobie, la transphobie et la sérophobie pour mieux vieillirA tout âge, la lesbophobie, la gayphobie, la biphobie et la transphobie nuisent au bien-être, comme peuten témoigner le chapitre Mal de vivre du Rapport annuel sur l’homophobie de SOS homophobie.Une attention particulière doit être portée sur les personnes lesbiennes, gays, bi-e-s et trans avançanten âge, largement oubliées des travaux jusqu’ici.Le 28 novembre 2013L'homophobie n'a pas sa place dans le sportDe tout temps, le sport a été mis en avant pour ses vertus et valeurs, qu'elles soient sociales, éducativesou sanitaires. Mais si le sport peut être un puissant vecteur d'intégration, il peut être aussi un lieu d’exclusion,d’oppression, de discriminations (sociales, raciales, sexistes...).Le 09 janvier 2014PMA : les lesbiennes passent encore une fois à la trappeSOS homophobie déplore que la procréation médicalement assistée (PMA) soit, de nouveau, écartée dudébat politique. En ce début d’année, la ministre de la Famille, Dominique Bertinotti, a annoncé que la PMAne figurerait pas dans le futur projet de loi « Famille ». Une annonce au goût amer en cette période desvœux pour l’année 2014.Le 17 janvier 2014Alignement des délais de prescription pour les injures et diffamations publiques :enfin !L’Assemblée nationale a adopté jeudi 16 janvier une proposition de loi relative à la suppression de la discriminationdans les délais de prescription prévus par la loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881.


Rapport sur l'homophobie 2014RemerciementsSOS homophobie tient à remercier :La Fondation Pierre Bergé - Yves Saint-LaurentPierre GuéninLe magazine Marcel MagazineAinsi que :La mairie de Paris, les mairies d’arrondissements et les maisons des associations,Les collectivités territoriales, municipalités, conseils généraux, conseils régionaux,pour leur soutien et leur collaborationLe centre lesbien, gay, bi et trans de Paris-Île-de-France, partenaire de SOS homophobie depuissa création ainsi que tous les autres centres LGBT de France pour leur collaboration avec lesdélégations régionales de SOS homophobieJack T., organisateur des Follivores/CrazyvoresL’ensemble des commerces, entreprises et professionnel-le-s qui soutiennent notre actionE-llico, Yagg, Têtu et les médias qui ont relayé notre actionEt les associations et personnes extérieures à l’association qui ont participé à ce rapport :Wilfred de Bruijn et Olivier CoudercNatacha ChetcutiMarie-Pierre Pruvot dite BambiBrune, Pierrot et Pablo SebanDaniel BorrilloAssociation des journalistes LGBTSylvain CréponMartine GrossStéphane HéasGay Games Paris 2018Claude Weinum et l'association HomobusCollectif confédéral CGT de lutte contre l'homophobie, pour l’égalité et la non-discriminationdes LGBTKarima Delli, Catherine Grèze et Nicole Kiil-NielsenEt :Les établissements scolaires qui ont accueilli les intervenant-e-s de SOS homophobieL’ensemble de nos partenaires associatifsLes organisateurs-trices de salons et de conférences auxquels SOS homophobie a participéTou-te-s les membres de SOS homophobie pour leur formidable investissement,ainsi que les donateurs-trices et sympathisant-e-s de l’associationToutes les victimes et tous les témoins pour la confiance qu’ils et elles nous montrent en noustransmettant leurs témoignages qui permettent d’alimenter ce Rapport annuel.


189


Rapport sur l'homophobie 2014Notes


Notes191


Rapport sur l'homophobie 2014ISBN : 978-2-917010-10-5EAN : 9782917010105Dépôt légal à parution,publication de SOS homophobie, association loi 1901Parution : Mai 2014© SOS homophobie© Illustrations Xavier GorceTous droits réservésCréation maquette et couverture : Marty de Montereau


2014Le 11 avril 2014, SOS homophobie a eu 20 ans.20 ans de soutien aux victimes, 20 ans de prévention desLGBTphobies, 20 ans de lutte en faveur de l'égalité des droits.Le travail des membres et des bénévoles de SOS homophobiea permis la création de la ligne d'écoute dès 1994, l'écrituredu premier Rapport annuel trois ans plus tard, les premièresinterventions en milieu scolaire en 2004. Ces activités se sontprogressivement élargies, de la formation pour adultesà la création, par exemple, d'un site internet destinéaux adolescent-e-s.Aujourd'hui, partout en France, à Paris et dans nos dix-septdélégations régionales, les bénévoles de SOS homophobieluttent activement contre la lesbophobie, la gayphobie,la biphobie et la transphobie.Et pourtant... Nous ne pouvons pas oublier qu'au cours desderniers mois, dans les rues, sur nos écrans de télévision,dans l'enceinte même du Parlement, les mots, les insultes etles violences homophobes, biphobes et transphobes se sontmultipliés.A toutes celles et à tous ceux qui, au cours des vingt dernièresannées, ont aidé et soutenu SOS homophobie, ont participéà nos actions, ont milité à nos côtés : merci.SOS homophobie34, rue Poissonnière75002 Parisn° Azur 0 810 108 13501 48 06 42 41www.sos-homophobie.orgsos@sos-homophobie.org 10 €

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!