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Planifier ses investissements et gérer son endettement

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REPORTAGE À LA FERMEFERME RÉHEL<strong>Planifier</strong> <strong>ses</strong><strong>investissements</strong><strong>et</strong> <strong>gérer</strong> <strong>son</strong>end<strong>et</strong>tementFrédéric, Luc <strong>et</strong>Patrick LabrecqueÀ la Ferme Réhel de Saint-Bernard, en Beauce, chaqueproj<strong>et</strong> d’<strong>investissements</strong> est soupesé, analysé <strong>et</strong> calculéavant de devenir réalité. Les proj<strong>et</strong>s doivent aussi répondreaux objectifs per<strong>son</strong>nels de chacun des propriétaires <strong>et</strong>à ceux de l’entreprise, pour prendre forme.Par YVON GENDREAU, journaliste, FPLQ20NOVEMBRE 2010 LE PRODUCTEUR DE LAIT QUÉBÉCOIS


Frédéric Labrecque <strong>et</strong> <strong>son</strong> frèrePatrick <strong>son</strong>t devenus propriétaires del’entreprise familiale en 2005. À c<strong>et</strong>teépoque, le vol<strong>et</strong> laitier de l’entreprisecomptait 16 kg/jour de MG. On r<strong>et</strong>rouvaitégalement un vol<strong>et</strong> porcin de110 truies. Ce vol<strong>et</strong> sera toutefoisdémantelé en novembre 2007, fautede répondre aux objectifs de rentabilitéde l’entreprise <strong>et</strong> parce que les propriétairesdécident de se concentrersurtout sur le développement du vol<strong>et</strong>laitier. Ce développement sera toutefoisplanifié.En eff<strong>et</strong>, dès qu’ils prennent larelève de l’entreprise, les nouveauxpropriétaires se fixent des objectifs àatteindre. Ce seront ces mêmes objectifsqui les guideront ensuite dans chacunede leurs décisions. « Toutes lesacquisitions ou les <strong>investissements</strong> doiventêtre planifiés, soutient Frédéric.Quand tu as un proj<strong>et</strong> en tête, il fautprendre le temps de s’asseoir <strong>et</strong> decompter. »Mais les calculs <strong>et</strong> les <strong>investissements</strong>ne <strong>son</strong>t pas sans fondement <strong>et</strong>ils ne doivent pas se faire à l’aveugl<strong>et</strong>te.Si la rigueur doit être de mise,il faut s’appuyer d’abord <strong>et</strong> avant toutsur la mission de l’entreprise : perm<strong>et</strong>trel’épanouissement de chacundes membres qui en font partie. Toutesles décisions qui <strong>son</strong>t pri<strong>ses</strong> doivents’articuler autour de ce critère. Frédéricse rappelle d’ailleurs qu’une per<strong>son</strong>neFrédéric <strong>et</strong> Patrick ont choisi de maximiser l’utilisation des bâtiments.De 2005 à aujourd’hui, c’est tout près de 50 kgde quota que les frères Labrecque ont ach<strong>et</strong>és.âgée l’a appelé, un jour, à <strong>son</strong> chev<strong>et</strong>pour lui dire : « Sois heureux dans la vie<strong>et</strong> le reste viendra tout seul. » Uneparole qui l’a marqué. C<strong>et</strong>te philosophie,<strong>ses</strong> frères Luc <strong>et</strong> Patrick la partagentavec lui. « Nous n’avons pasl’intention de faire de 70 à 80 heuresde travail toutes les semaines, confirment-ilstous. On peut le faire quandc’est vraiment nécessaire, mais ce n’estpas notre objectif. » Tous les trois veulentplutôt se consacrer à fonder unefamille <strong>et</strong> à passer du temps avec elle.« On pourrait grossir <strong>et</strong> grossir l’entreprise,<strong>et</strong> ach<strong>et</strong>er jusqu’à 200 vaches,mais ce n’est pas notre intention pourle moment. On devrait se spécialisertant qu’il y a des économies d’échelleà réaliser. Les objectifs à court <strong>et</strong>moyen termes <strong>son</strong>t l’augmentation durevenu per<strong>son</strong>nel, l’acquisition d’unemai<strong>son</strong> <strong>et</strong> élever une famille. Pour nous,c’est important que chacun ait dutemps pour lui afin de faire autre choseque de travailler continuellement à laferme. »RENTABILITÉ ET INTÉGRATIONAinsi donc, au moment de l’acquisitionde la ferme, les propriétaires ontpris le temps de se donner des lignesde conduite, qui s’exécutent en deuxpha<strong>ses</strong>, avec des objectifs précis àcourt, moyen <strong>et</strong> long termes. Première -ment, ils ont déterminé qu’ils voulaientmaximiser l’utilisation des bâtimentspour pouvoir se donner une bonnecapacité de remboursement, tout endégageant une grande rentabilité, unebonne productivité de capital <strong>et</strong> unemarge/coûts variables élevée.De 2005 à aujourd’hui, c’est toutprès de 50 kg de quota que les propriétaire<strong>son</strong>t ach<strong>et</strong>és. L’ajout de quotasupplémentaire, <strong>et</strong> de vaches par lemême coup, les ont amenés à laisserNOVEMBRE 2010 LE PRODUCTEUR DE LAIT QUÉBÉCOIS 21


REPORTAGE À LA FERMEPour les trois frères, bâtir une famille fait partie des priorités. On voit ici Patrick <strong>et</strong> sa conjointe Geneviève Huppé, Luc <strong>et</strong> <strong>son</strong> fils Alexandre,Julie Carrier <strong>et</strong> <strong>son</strong> conjoint Frédéric.de côté l’élevage d’animaux de remplacementpour éviter la construction d’unnouveau bâtiment <strong>et</strong> l’achat de nouvellesterres. Ils ont aussi apportéquelques p<strong>et</strong>ites modifications enmatière de confort. Aujourd’hui, seulesles vaches en lactation <strong>et</strong> les vachestaries prennent place dans l’étable.Patrick <strong>et</strong> Frédéric se <strong>son</strong>t aussi fixél’objectif de diminuer la d<strong>et</strong>te le plusrapidement possible pour perm<strong>et</strong>tre laréalisation de l’objectif à moyen terme :développer une entreprise parallèleafin d’intégrer leur frère Luc, qui travailleactuellement comme représentantd’Unicoop.PLANIFIER SANS ÉMOTIVITÉTous les objectifs que se fixentPatrick <strong>et</strong> Frédéric <strong>son</strong>t écrits sur papier<strong>et</strong> font partie d’un plan sur cinq ans,auquel on ajoute deux autres annéespour pallier les problèmes qui peuventsurvenir en cours de route. Ces deuxans supplémentaires servent aussi àcontrôler les coûts <strong>et</strong> à diminuer l’end<strong>et</strong>tement.Lorsque les cinq premièresannées seront écoulées, on se rassoirapour établir de nouveaux objectifs àcourt, moyen <strong>et</strong> long termes.On a demandé aux producteurs dela Ferme Réhel quel était le facteurlimitant, en matière d’investissement?Frédéric a répondu : « Si le proj<strong>et</strong> n’estpas rentable <strong>et</strong> qu’il ne peut pas remplirnos objectifs, on ne va pas plusloin ». Selon lui, dans tous les cas, leproj<strong>et</strong> envisagé doit être rentable. « Ilfaut respecter les objectifs fixés <strong>et</strong>m<strong>et</strong>tre de côté toute forme d’émotivité.Avant d’ach<strong>et</strong>er un tracteur ouquoi que ce soit d’autre, il faut toujoursse poser la question suivante : est-ceque j’en ai vraiment besoin? L’émotivitépeut parfois coûter cher. »Lorsque Frédéric se présentedevant <strong>ses</strong> créanciers avec les proj<strong>et</strong>sd’<strong>investissements</strong>, presque tous lescalculs ont été faits, y compris en fonctiondes taux d’intérêts. Il sait trèsbien ce que chaque proj<strong>et</strong> lui coûtera.Bref, on pourrait dire qu’il ne resteplus au créancier qu’à accepter lesconditions de Frédéric… « Si tu ne dispas ce que tu veux, ce <strong>son</strong>t les autresqui vont te le dire ».STRATÉGIE DEREMBOURSEMENTDES DETTESPatrick <strong>et</strong> Frédéric visent une productivitéannuelle de 20 % sur le capitalinvesti. En d’autres mots, si on investitun million de dollars, il faut que c<strong>et</strong>investissement rapporte 200 000 $ parannée. Si vous préférez, pour chaqu<strong>et</strong>ranche de 5 $ d’immobilisations, lesjeunes hommes cherchent à produire1 $ de lait.En matière de d<strong>et</strong>tes, les propriétairesde la Ferme Réhel ont, là aussi,une stratégie bien établie : les rembourserle plus rapidement possible. Ilsm<strong>et</strong>tent tout en œuvre pour payer lequota en cinq ans, la machinerie entrois ans, <strong>et</strong> l’immobilier en 10 ans. Leplus possible, on essaie de conserverune capacité de remboursementélevée. La variation des taux est aussiincluse dans la gestion des risques.Pour chaque emprunt, on se gardeaussi une marge de sécurité financière(capacité de remboursement moins lesannuités totales (capital <strong>et</strong> intérêts)sur les produits) de 10 % pour prévenir…les imprévus.GÉRER LES RISQUES« Les <strong>investissements</strong>, c’est aussiune question de gestion des risques, »vous dira Frédéric. Il évalue d’ailleursà six le nombre de facteurs qui peuventprésenter un risque <strong>et</strong> qu’il faut toujoursgarder à l’œil.1- La variation des prix.2- La variation des rendements (météo,22NOVEMBRE 2010 LE PRODUCTEUR DE LAIT QUÉBÉCOIS


REPORTAGE À LA FERMEtaux de semis, production de laitpar vache, tonnes de fourrage produitesà l’hectare, <strong>et</strong>c.).3- La maladie (ESB, virus, déséquilibrealimentaire, achats d’animaux, <strong>et</strong>c.).4- Les risques financiers (variation destaux d’intérêts, traités internationaux,revenus disponibles, <strong>et</strong>c.).5- Les risques humains (pertes d’employés,manque de main-d’œuvre,mortalité, <strong>et</strong>c.).6- Le manque de formation (surtoutcelle nécessaire pour bien <strong>gérer</strong> <strong>son</strong>entreprise).« Peu importe ce qui risque de survenir,il faut que tu sois en mesure depallier la situation, estime Frédéric.Généralement, quand tu as un pland’affaires <strong>et</strong> que tu gères bien lesrisques, tu es capable de tenir le coup. »Outre le quota <strong>et</strong> les vaches, lesfrères Labrecque ont choisi d’investirdans le matériel de récolte des ensilages,au cours des dernières années.« On essaie toujours de voir si nos<strong>investissements</strong> vont être payants lorsqu’onfait les calculs. Avant d’ach<strong>et</strong>erla machinerie, nous nous sommesdemandé si le forfait ne serait pas unemeilleure alternative. Comme nous voulionsque les récoltes soient faites aumeilleur moment possible, nous avonsdécidé de nous équiper <strong>et</strong> de faire lesrécoltes nous-mêmes. Nous n’avonspas voulu prendre le risque de récolterà un moment qui ne nous convenaitpas. Posséder notre propre équipementnous coûte peut-être un peu plus cher,mais la gestion des chantiers de récolte,c’est aussi un des aspects importantsde la ferme. C’est avec tes fourragesque tu soignes tes animaux <strong>et</strong> que tuobtiens ta production laitière. Il fautdonc récolter au bon moment si tu veuxmaximiser la qualité. Le nouvel équipementnous perm<strong>et</strong> maintenant defaire les récoltes à deux plutôt qu’àquatre… ce qui nous donne aussi plusde temps pour nous. » Soulignons toutefoisque le remboursement de lamachinerie fait partie des chargesvariables de l’entreprise (coûts d’alimentation).BIEN S’ENTOURERPour bien planifier <strong>ses</strong> <strong>investissements</strong>,Frédéric soutient qu’il fautsavoir bien s’entourer ainsi que de pouvoircompter sur une bonne équipe dePour Frédéric, une bonne gestion perm<strong>et</strong>de sauver bien du travail... <strong>et</strong> des sous.On a aussi investi dans le matériel de récolteau cours des dernières années.conseillers (non liée <strong>et</strong> indépendante).Fiscaliste, comptable, médecin vétérinaire,technicien en alimentationconstituent autant de ressources auxquellesles propriétaires de la FermeRéhel n’hésitent pas à faire appel.« Plusieurs per<strong>son</strong>nes vous dirontqu’avoir recours à un fiscaliste est dispendieux.Moi je vous dirai que si <strong>ses</strong>conseils m’ont permis d’ajouter unrevenu supplémentaire, la dépenseconstitue plutôt un bon investissement,souligne Frédéric. Nous le consultonsenviron trois à quatre fois par année. »Patrick <strong>et</strong> Frédéric n’hésitent pas àposer des questions <strong>et</strong> soutiennent queleur réseau de contacts leur perm<strong>et</strong>aussi d’avancer. « Même si, au fil dutemps, ton réseau peut évoluer <strong>et</strong>changer, il faut aussi bien s’entendreavec les gens avec qui tu fais affaires.Si tu restes seul dans ton entreprise,tu avances continuellement avec desœillères. »PORTRAIT DE LA FERMELa Ferme Réhel est la propriété deFrédéric <strong>et</strong> de Patrick Labrecque. Enfaisant l’acquisition de l’entreprise deleurs parents, Hélène <strong>et</strong> RéalLabrecque, en 2005, ils devenaient ainsila troisième génération à l’exploiter.Le troupeau Holstein pur sang compte70 têtes, dont 60 vaches en lactation.Les propriétaires n’élèvent plus d’animauxde remplacement. La fermes’étend sur 85 hectares, destinés à laculture du maïs-ensilage (22 ha) <strong>et</strong> desfourrages (43 ha de légumineu<strong>ses</strong> <strong>et</strong>15 ha de foin).La conjointe de Frédéric, JulieCarrier, est médecin vétérinaire pourles grands animaux. Celle de Patrick,Geneviève Huppé, est infirmière. Quantà celle de leur frère Luc, CynthiaBilodeau, elle étudie présentement ensoins infirmiers à l’Université Laval.Ces derniers ont un fils de trois ans :Alexandre.Frédéric <strong>et</strong> Patrick ont complété unDEC en gestion <strong>et</strong> exploitation d’entrepriseagricole au Cégep de Lévis-Lauzon. Pour les deux frères, la formationcontinue est importante. Frédérica d’ailleurs suivi des cours en économieà l’Université Laval. Les deux frèresn’hésitent pas à participer aux congrès,colloques, symposiums, conférences,<strong>et</strong>c. qui touchent de près ou de loin l’entreprise<strong>et</strong> qui peuvent avoir une incidencesur leur gestion au quotidien.À la Ferme Réhel, le partage destâches se fait en fonction des forces dechacun. Bien que Luc ne soit pas encoreintégré totalement à l’entreprise, onreconnaît <strong>ses</strong> forces du côté de lamachinerie <strong>et</strong> de l’entr<strong>et</strong>ien. Pour ce quiest de Patrick, c’est plutôt l’aspect gestiondu troupeau qui l’intéresse. Quantà Frédéric, il se concentre principalementsur la gestion, l’administration<strong>et</strong> la finance. Selon Frédéric, le succèsdes entrepri<strong>ses</strong> de production laitièredépendra de plus en plus de la gestion.« Plus tu pas<strong>ses</strong> du temps à t’occuperde gestion, plus ça devient naturel <strong>et</strong>plus ça peut devenir payant. Ici, on fait60 % de gestion <strong>et</strong> 40 % de travail surle terrain. » ■24NOVEMBRE 2010 LE PRODUCTEUR DE LAIT QUÉBÉCOIS

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