Précisions sur <strong>la</strong> requalification du contrat <strong>de</strong> <strong>franchise</strong> en contrat <strong>de</strong> travail(Soc., 25 mars 2009, Juris-Data n 047554)Les articles L.7321-1 et suivants du Co<strong>de</strong> du travail(ancien article L.781-1) éten<strong>de</strong>nt le bénéfice du Co<strong>de</strong> dutravail à certains travailleurs indépendants, notammentaux personnes qui « vend[ent] <strong>de</strong>s marchandises (…) quileur sont fournies exclusivement ou presqueexclusivement par une seule entreprise, (…) dans unlocal fourni ou agréé par cette entreprise et auxconditions ou prix imposés par cette entreprise ». L’arrêtcommenté apporte <strong>de</strong>ux précisions utiles sur l’application<strong>de</strong> ces dispositions à un ancien franchisé.En l’espèce, un contrat <strong>de</strong> gérance libre avait succédé àun contrat <strong>de</strong> <strong>franchise</strong> signé entre les mêmes parties. Auterme d’une procédure re<strong>la</strong>tivement longue, le gérantavait obtenu l’application <strong>de</strong>s articles précités. Unepremière question subsistait néanmoins : l’ancienneté,qui détermine les in<strong>de</strong>mnités <strong>de</strong> licenciement et <strong>de</strong>préavis, remontait-elle à <strong>la</strong> signature du contrat <strong>de</strong><strong>franchise</strong> ou à celle du contrat <strong>de</strong> gérance libre ?Sur ce premier point, <strong>la</strong> Cour <strong>de</strong> cassation approuve <strong>la</strong>cour d’appel d’avoir considéré que l’ancienneté remontaità <strong>la</strong> signature du contrat <strong>de</strong> <strong>franchise</strong>, dès lors que,précise <strong>la</strong> Haute juridiction, « tant le contrat <strong>de</strong> <strong>franchise</strong>que le contrat <strong>de</strong> gérance libre avaient pour même objet<strong>de</strong> vendre <strong>de</strong>s produits (…) dans un magasin (…) exploitédans <strong>de</strong>s conditions uniformes ».En outre, <strong>la</strong> Cour d’appel avait retenu que l’ex-franchiséne pouvait revendiquer à son profit les dispositions d'uneconvention collective. Par l’arrêt commenté, <strong>la</strong> Cour <strong>de</strong>cassation considère qu’ « en statuant ainsi, alors que lestravailleurs visés à l'article L. 781-1 du Co<strong>de</strong> du travail<strong>de</strong>venu les articles L. 7321-1 et L. 7321-3 bénéficient <strong>de</strong>sdispositions <strong>de</strong> ce co<strong>de</strong> et notamment <strong>de</strong> celles du titre VLivre II re<strong>la</strong>tif aux conventions collectives et que parsuite ils bénéficient <strong>de</strong> <strong>la</strong> convention collective à <strong>la</strong>quelleest soumis le chef d'entreprise qui les emploie, <strong>la</strong> courd'appel a violé le texte susvisé ».Ouverture du point <strong>de</strong> vente au public et résiliation du contrat aux torts exclusifs du franchisé(CA Paris, 18 mars 2009, Juris-Data n 002274)Par un arrêt récent, <strong>la</strong> Cour d’appel <strong>de</strong> Paris retient que lecontrat <strong>de</strong> <strong>franchise</strong> portant sur l'exploitation d'unepizzeria doit être résilié aux torts du franchisé, dès lorsque ce <strong>de</strong>rnier a préféré limiter son activité à <strong>la</strong> livraison àdomicile et n'a donc pas respecté l’obligation lecontraignant à maintenir <strong>la</strong> pizzeria ouverte au public.<strong>La</strong> solution semble logique : en décidant uni<strong>la</strong>téralement<strong>de</strong> limiter son activité à <strong>la</strong> livraison <strong>de</strong> pizzas à domicile,malgré <strong>la</strong> mise en <strong>de</strong>meure qui lui avait délivrée par le<strong>franchise</strong>ur, le franchisé a commis une faute contractuellejustifiant <strong>la</strong> résiliation du contrat à ses torts exclusifs,s’agissant d’une obligation essentielle du contrat.Obligation d’assistance continue du <strong>franchise</strong>ur(CA Dijon, 10 mars 2009, Juris-Data n 376068)Commet une faute contractuelle, le <strong>franchise</strong>ur qui,s'étant engagé à fournir une assistance au franchisé àl'ouverture et durant l’exécution du contrat, a certesassisté le franchisé <strong>de</strong> manière satisfaisante au début <strong>de</strong>leur col<strong>la</strong>boration, mais a ensuite réduit cette assistanceavant <strong>de</strong> <strong>la</strong> faire complètement disparaître par <strong>la</strong> suite.<strong>La</strong> solution est c<strong>la</strong>ssique : l’assistance étant délivrée encours d’exécution du contrat, le défaut d’assistanceconstitue l’inexécution d’une obligation contractuelle,toujours sanctionnée par <strong>la</strong> résiliation du contrat (Cass.com., 17 nov. 1998, pourvois n 96-15.130, 96-15.132, 96-15.133, 96-15.136, n 96-15.138), et non par sa nullité.<strong>La</strong> <strong>Lettre</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> Franchise – <strong>Simon</strong> Associés – Mai-Juin 2009 Page 6
Limitation stricte <strong>de</strong> l’application <strong>de</strong>s mesures conservatoires par l’Autorité <strong>de</strong> <strong>la</strong> concurrence(Autorité <strong>de</strong> <strong>la</strong> concurrence, décision n 09-D-15 du 2 avril 2009)L’article L.464-1 du Co<strong>de</strong> <strong>de</strong> commerce donne à l’Autorité<strong>de</strong> <strong>la</strong> concurrence le pouvoir <strong>de</strong> « prendre les mesuresconservatoires qui lui sont <strong>de</strong>mandées ou celles qui luiapparaissent nécessaires », mais limite ce pouvoir auxhypothèses où « <strong>la</strong> pratique dénoncée porte une atteintegrave et immédiate » au jeu <strong>de</strong> <strong>la</strong> concurrence et précisequ’elles « doivent rester strictement limitées à ce qui estnécessaire pour faire face à l'urgence ». Dans l’espèceayant donné lieu à <strong>la</strong> décision commentée, <strong>la</strong> pratiquedénoncée avait cessé en cours <strong>de</strong> procédure. Le requérantsollicitait, à titre <strong>de</strong> mesure conservatoire, l’interdictionpour l’auteur <strong>de</strong> <strong>la</strong>dite pratique <strong>de</strong> <strong>la</strong> réitérer.L’Autorité <strong>de</strong> <strong>la</strong> concurrence <strong>de</strong>vait donc déterminer sielle pouvait interdire <strong>de</strong>s pratiques futures à titreconservatoire. Elle répond par <strong>la</strong> négative en soulignantque « les mesures conservatoires que peut prononcerl’Autorité <strong>de</strong> <strong>la</strong> concurrence ne visent pas à prévenir unrisque <strong>de</strong> perturbation potentielle du jeu concurrentielmais ont vocation à répondre à une atteinte existante,grave et immédiate par <strong>de</strong>s mesures d’urgencenécessaires pour éviter <strong>de</strong>s conséquences difficilementréversibles et préserver ainsi <strong>la</strong> pleine effectivité <strong>de</strong>l’application du droit <strong>de</strong> <strong>la</strong> concurrence dans l’attente <strong>de</strong><strong>la</strong> décision au fond ».Rappels sur les obligations mises à <strong>la</strong> charge <strong>de</strong>s distributeurs en matière <strong>de</strong> prix(CJCE, 2 avril 2009, Pedro IV Servicios SL c/ Total España SA, aff. C-260/07)Par sa décision du 2 avril 2009, rendue sur questionpréjudicielle du juge espagnol, <strong>la</strong> Cour <strong>de</strong> justice <strong>de</strong>scommunautés européennes (CJCE) rappelle lesdispositions re<strong>la</strong>tives aux obligations pouvant être misesà <strong>la</strong> charge <strong>de</strong>s distributeurs en matière <strong>de</strong> prix. Statuantnotamment sur le fon<strong>de</strong>ment du règlement d’exemptiondu 22 décembre 1999, <strong>la</strong> CJCE indique c<strong>la</strong>irement que nepeuvent bénéficier <strong>de</strong> l’exemption par catégories prévuepar ce règlement « les accords par lesquels le fournisseurfixe le prix <strong>de</strong> vente au public ou impose un prix <strong>de</strong> venteminimal », tout en précisant que « le fournisseur rest[e]libre <strong>de</strong> recomman<strong>de</strong>r au reven<strong>de</strong>ur un prix <strong>de</strong> vente ou<strong>de</strong> lui imposer le prix <strong>de</strong> vente maximal ». Elle rappelleenfin qu’il est impossible d’imposer une marge fixe.L’épuisement du droit sur <strong>la</strong> marque et <strong>la</strong> revente par le licencié <strong>de</strong> produits marqués à <strong>de</strong>ssol<strong>de</strong>urs au mépris <strong>de</strong> l’interdiction posée dans le contrat <strong>de</strong> licence(CJCE, 23 avril 2009, aff. C-59/08)Une société <strong>de</strong> produits <strong>de</strong> luxe avait conclu un contrat <strong>de</strong>licence par lequel le licencié s'était engagé, en l'absenced'autorisation du titu<strong>la</strong>ire <strong>de</strong> <strong>la</strong> marque, à ne pas vendreles articles marqués à <strong>de</strong>s sol<strong>de</strong>urs ne faisant pas partiedu réseau <strong>de</strong> distribution sélective. Le licencié avaitnéanmoins procédé à une revente interdite en invoquantl'épuisement du droit (Dir. n 89-104, 21 décembre 1988,art.7), les produits ayant déjà été commercialisés dansl’EEE. Le titu<strong>la</strong>ire <strong>de</strong> <strong>la</strong> marque avait bien donné sonconsentement pour <strong>la</strong> commercialisation mais, en vue <strong>de</strong>préserver le prestige <strong>de</strong> <strong>la</strong> marque, avait exclu certains<strong>de</strong>stinataires <strong>de</strong> <strong>la</strong> revente, ce qui écartait, selon lui,l’épuisement <strong>de</strong> son droit faute <strong>de</strong> consentement.<strong>La</strong> CJCE considère qu’il ne saurait y avoir consentement à<strong>la</strong> mise dans le commerce emportant l’épuisement dudroit, lorsque le licencié a méconnu une c<strong>la</strong>use portantsur <strong>la</strong> durée, <strong>la</strong> forme, <strong>la</strong> nature <strong>de</strong>s produits ou services,le territoire ou <strong>la</strong> qualité <strong>de</strong>s produits fabriqués (Dir.n 89-104, 21 décembre 1988, art.8). Si le défaut <strong>de</strong>consentement ne peut être établi, le titu<strong>la</strong>ire <strong>de</strong> <strong>la</strong> marquepeut néanmoins s’opposer à <strong>la</strong> revente en invoquant <strong>la</strong>c<strong>la</strong>use qui interdit cette revente à <strong>de</strong>s sol<strong>de</strong>urs s’il établit<strong>de</strong>s motifs légitimes, tels que l’atteinte à <strong>la</strong> renommée <strong>de</strong><strong>la</strong> marque ; faute d’une telle preuve, <strong>la</strong> c<strong>la</strong>use ne pourradonc être invoquée pour empêcher <strong>la</strong> revente <strong>de</strong>sproduits <strong>de</strong> luxe par le licencié à <strong>de</strong>s sol<strong>de</strong>urs.<strong>La</strong> <strong>Lettre</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> Franchise – <strong>Simon</strong> Associés – Mai-Juin 2009 Page 7