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Benjamin Britten - Chandos

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CHAN 10192 X BOOK.qxd 31/1/07 11:30 am Page 16<strong>Britten</strong>: Les Illuminations et autres œuvresLes Illuminations, op. 18Dès son arrivée en Amérique en mai 1938,<strong>Britten</strong> entreprit d’achever, pour la sopranoSophie Wyss, un cycle de mélodies dont deuxavaient déjà été interprétées lors d’un“Promenade Concert” donné à Londres l’étéprécédent. Il acheva Les Illuminations enoctobre de la même année. Comme le montrele présent enregistrement, ce n’était pas lapremière fois qu’il s’intéressait à des œuvresde langue française, mais un monded’expérience sépare l’enfant prodige intrépidede près de quinze ans (Quatre Chansonsfrançaises) et l’artiste cosmopolite de vingtcinqans environ. L’indépendance de <strong>Britten</strong> àl’égard de la tradition romantique allemandeprovient en grande partie, à cette époque, deson goût pour le néo-classicisme français.Mais, s’il avait rendu ouvertement hommage àRavel dans les deux premiers mouvements deson Concerto pour piano de 1938, dansLes Illuminations il absorbe l’expression vocalefrançaise d’une manière plus générale et qui,paradoxalement, fait ressortir une plus fortepersonnalité. Peut-être vaut-il mieux aborderces visions fragmentaires, érotiques et à demiavouées de Rimbaud par le biais de lastylisation musicale pénétrante de <strong>Britten</strong>, unestylisation tour à tour vive, directe,contemplative, tendre et grotesque. Le cycleest unifié par un motif saisissant fait de deuxaccords disjoints (si bémol–mi majeur) quiaccompagne la phrase “J’ai seul la clef decette parade sauvage”, et à la virtuosité de lasoprano solo répond brillamment d’un bout àl’autre de l’œuvre celle de l’orchestre à cordesiridescent.Quatre Chansons françaisesEdward <strong>Benjamin</strong> <strong>Britten</strong> composa ses QuatreChansons françaises durant l’été 1928, avantson quinzième anniversaire. Il avait déjàcommencé à prendre des leçons decomposition auprès de Frank Bridge ets’apprêtait à passer de l’école primaire aulycée de Gresham’s à Holt, d’où était sorti,trois ans auparavant, W.H. Auden, poète enherbe qui devait exercer une influence capitalesur le <strong>Britten</strong> de la “première période”,c’est-à-dire jusqu’en 1941. Paroles et musiqueétaient désormais le moyen d’expressionnaturel du jeune compositeur, comme lemontrent les nombreuses mises en musiquetouchantes de textes de Walter de la Marequ’il réalisa durant ces années. Les QuatreChansons françaises (sur des textes deVerlaine et Hugo) indiquent clairement que<strong>Britten</strong> ambitionnait d’élargir les horizonsexpressifs hérités de Bridge. En dépit desinfluences plus ou moins évidentes (et pasentièrement assimilées) de Wagner, Debussyet Ravel, ainsi que des éléments annonciateursdes découvertes de Berg et de Mahler, ellesdemeurent un exploit venant d’un si jeuneélève. Par ailleurs, la troisième chansonrenferme une étrange prémonition d’un motifimportant de la maturité créatrice ducompositeur: le thème de l’enfance et de lamort, de l’innocence et de l’expériencecorruptrice. Par le symbolisme à deux niveauxde sa berceuse non variée (flûte solo enla majeur) et de ses subtiles texturesharmoniques complexes (orchestre dechambre), ce morceau rappelle fortement la findu Wozzeck d’Alban Berg, où le bruit“innocent” des jeux d’enfants se teinted’ironie dans le contexte d’une musiqueprofondément élégiaque. Cette confrontationsymbolique suggérant un traitementtourmenté du thème est présente dansl’œuvre intégral de <strong>Britten</strong>, jusque dansles pages finales de son dernier opéra, Mort àVenise. Et les Quatre Chansons françaises,premier cycle de mélodies avec orchestre ducompositeur, doivent être appréciéesnotamment pour leur première mention duthème de l’enfant servant de père àl’homme.Sérénade, op. 31Même si <strong>Britten</strong> présenta la Sérénade, en1943, comme “un morceau sans importance”(réaction compréhensible à une époque où ilétait préoccupé par la composition de PeterGrimes), cette œuvre définit à la perfection legénie de son auteur. Voici l’aboutissement dece goût étrange pour le mot et l’image: aprèsune étroite collaboration avec certains desmeilleurs poètes des années trente, après lastylisation européenne consciente de lapériode “américaine” et le retour aux racinesanglaises en 1941, le compositeur nouait unerelation professionnelle étroite avec unchanteur à la sensibilité unique, le ténor PeterPears, pour qui ce “Nocturne” fut spécialementcomposé. Le cor solo tisse un contrepoint surla ligne vocale, à laquelle il fait écho, dans unrôle inspiré à <strong>Britten</strong> par un musicien de sagénération (et malheureusement trop tôtdisparu) doué d’un talent rare, Dennis Brain;il fait des apparitions nombreuses et variéesdans ces mises en musique de poèmes centréssur la nuit, le sommeil et les rêves, domained’expérience dans lequel le compositeur allaittout particulièrement se reconnaître. Letroisième élément envoûtant de la texture estl’orchestre à cordes (et notamment l’ensembled’un autre contemporain célèbre, Boyd Neel),qui avait déjà inspiré à <strong>Britten</strong> des exploitsépoustouflants dans les Variations sur unthème de Frank Bridge, Les Illuminations et le16 17

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