14 L'ACTULUNDI 26 SEPTEMBRE 2011politique monde social économie société faitsdivers justiceLesvictimesavaientétéenterréesvivantesLescorpsdeLucAmblard(àdroite)etdesoncompagnonGuyBordenave(àgauche)ontétéretrouvésle4juin2009enfouisdansunefosseàLaCharité-sur-Loire (ci-dessusl’undessuspectssurleslieuxdudrame).ASSISES. Deux hommes sont jugés pour avoir enlevéet tué un couple d’homosexuels en 2009 dans le Cher.Ils encourent la perpétuité.Le ou les tueurs de Dimitri B. l’attendaientsur le parking. Hier vers5 heures du matin, ce jeune employéd’une discothèque de Porticcio(Corse-du-Sud),surlarivesuddugolfed’Ajaccio, a été abattu de plusieursballes avant même de pouvoir semettre au volant de sa voiture. Agé de20ans,ilestmortsurplaceàquelquesmètres de l’une des issues du Saint-James, la boîte où il officiait commevideur dans un petit centre commercialà deux pas de l’une des plages decette station balnéaire réputée.Dès hier matin, les gendarmes de lasectionderecherchesd’Ajaccios’affairaientsur les lieux du crime et autourOn les surnommait les Tontonsou alors Guyguy etBigdil, pour ceux qui lesconnaissaientlemieux.LucAmblard et Guy Bordenaveformaient un couple sans histoires,apprécié de presque tous dans leurpetit village de Couy, à 35 km deBourges (Cher). « Des gens paisibles,entourés d’un groupe d’amis très proches», avaient noté les gendarmes aucours de leur enquête sur la disparitiondes deux homosexuels.Luc, 56 ans, et Guy, 39 ans, n’avaientplus donné signe de vie depuis la nuitdu samedi 7 au dimanche 8 mars2009. Le mardi suivant, Marie-Laure,la sœur de Guy dont elle était trèsproche, alertait les forces de l’ordre.Dans le pavillon du couple, rien oupresquenemanquait.Ecranplat,téléphoneportable ou voiture : Luc etGuy semblaient s’être volatilisés. Destraces de sang étaient tout de mêmemisesenévidence,orientantl’enquêtevers une piste criminelle.A partir d’aujourd’hui et jusqu’à jeudi,Claude Juillet et Christophe Rayé, 55et 39 ans, comparaissent devant lesassises du Cher à Bourges pour « enlèvementouséquestrationsuiviedelamort des victimes ». Une mort atroce,comme l’a révélé l’enquête.Cinq jours avant de faire irruptiondans le pavillon du couple, ClaudeJuilletavaitcreusé,auborddelaLoire,une fosse de 2,30 m sur 1,10 m delarge et 1,07 m de profondeur. Aprèsavoir séquestré Luc et Guy toute lanuit, Juillet, par ailleurs ancien compagnonde Marie-Laure, la sœur deGuy, avait fait monter le couple dansun fourgon utilitaire au petit matin.Bâillonnés avec du scotch, les brasentravés par des colliers Serflex, lesdeux hommes avaient alors été enterrésvivants.« Les victimes, entièrement habilléeset recouvertes de limon, étaient assisesl’une en face de l’autre », décrit lemédecin légiste. Pour les experts, il est« probable que Guy Bordenave étaitvivant au moment de son enfouissement[…]. S’agissant de Luc Amblard,son mauvais état de santé permetd’envisager soit un décès par suffocation[…], soit un malaise cardiaque. »Pourquoi ne pas les avoir tués avec lefusil qui a servi à les menacer ? « Pournepasfairedebruit»,ajustifiéClaudeJuillet lors de ses auditions. L’hommeest resté tout aussi elliptique et taiseuxde l’Opel de la victime. D’après lespremiers éléments de l’enquête, Dimitriaurait rencontré des problèmesaucoursdelasoiréeavecungroupeeten aurait même averti la gendarmerie.A-t-il été victime d’une expédition punitive?«C’estpossibledanslamesureoùsonexécutionressembleàunguetapens», juge une source judiciaire.Près d’une dizaine de coups de feuauraient été tirés, ce que devrontconfirmer les expertises balistiques.Ce nouveau meurtre par arme à feuqui endeuille la Corse s’inscrit dansuneséried’incidentssurvenuscesderniersmois aux abords de plusieursdiscothèques ou bars de nuit de l’Ilede Beauté. Il y a un an presque aumême endroit, dans une autre boîtede nuit de Porticcio, le Sun Club, unpetit groupe, dont deux frères, avaitsemé la panique en ouvrant le feu àplusieurs reprises à l’extérieur puis àlorsqu’il s’est agi d’avancer un mobileà ce crime prémédité dans ses moindresdétails. « Claude Juillet et Guy seconnaissaient bien, raconte M e MarieDosé, avocate de quatre des dix partiesciviles. Trois mois avant, ils mangeaientensemble au restaurant. »Devant le juge d’instruction, ClaudeJuillet a pourtant avancé avoir vouluen finir avec ce beau-frère qui ne l’appréciaitpas, et aurait voulu, toujoursselon lui, que sa sœur Marie-Lauremette un terme à leur relation. Selonsesproprestermes,«ensupprimantlacause », il « supprimait les conséquences». « La disproportion est totaleentre l’horreur des faits et cetteexplication, reprend M e Dosé. Jecompte beaucoup sur l’audiencepour avoir des réponses. »A moins que Claude Juillet et ChristopheRayé ne se renvoient la balle, cedernier affirmant pour sa part qu’il auniquementagiparappâtdugain.Ungain pourtant minime, seuls deux retraitsayantétéeffectuésaveclescartesl’intérieur de l’établissement. Cinqpersonnes avaient été blessées dontdeuxgrièvement.Ilsvenaientsevengeraprès avoir été mis dehors quelquesheures avant à la suite d’une bagarre.« Il y a malheureusement de plus enplusdetensionsàproximitédesboîtesde nuit ou des bars la nuit », confirmeune source judiciaire à Ajaccio quibancaires des victimes pour un totalde 900 €. Le rôle des experts psychiatress’annonceessentielpourtenterdecomprendre ce qui s’est joué dans latête des deux accusés. Claude Juillet,le premier, présente « des traits decaractèreparanoïaque»,sansquel’onsache s’il s’agit « d’une apparence » oud’une « inaffectivité profonde ». Soncomplice, qui reconnaît avoir participéà la séquestration mais nie avoirété présent lors de l’ensevelissement,est décrit comme « égocentrique »,« alcoolique » « et peut-être pas aussinaïf qu’il voudrait le laisser croire ».NICOLASJACQUARDCRIMEUnjeunevideurdediscothèqueabattuenCorsePorticcioAjaccioBastiaNCORSE-DU-SUD(DR.ETPHOTOPQR/«LANOUVELLERÉPUBLIQUE»/X.GUÉRIN.)Pour ne pas fairede bruitCLAUDEJUILLET,L’UNDESDEUXACCUSÉSDe plus en plusde tensions à proximitédes boîtes de nuitUNESOURCEJUDICIAIRECouyBourgespointeaussi«l’accèsauxarmesfacilitéen Corse », fait aggravant selon luicertaines situations. « Il n’est pas rareque des jeunes entrent en boîte avecdes armes, note ce policier. Ce n’estpas nous qui le constatons, mais lesvideurs. » Si le fléau de la violence à laporte des discothèques n’est pas unespécialité corse, il semble aussi aggravépar l’augmentation de laconsommation de cocaïne sur l’île.«Depuisplusieursmoisnoustironslasonnette d’alarme, avance ce policier.Il y a de plus en plus de jeunes défoncésprêts à faire n’importe quoi etqui s’excitent pour un rien. »DAMIENDELSENYNCHER
LUNDI 26 SEPTEMBRE 2011L'ACTU 15politique monde social économie société faitsdivers justiceVIOLENCEUnpoliciervolontairementpercutéparunscooterUn policier, âgé de 31 ans et enposte dans une unité départementalede Seine-Saint-Denis,a été sérieusement blessé, hier, en find’après-midi, après avoir été renversépar le conducteur d’un deux-roues àAubervilliers. Ce dernier venait decommettre un vol à la portière. Deuxfonctionnaires ont tenté de l’interpelleravant que le pilote du scooterne percute délibérément un des deuxagents. Sous le choc, le policier a étéprojeté à plusieurs mètres de distance.Il souffre notamment de blessuresaux jambes. Il a été évacué,dans un état sérieux, vers l’HôpitalGeorges-PompidouàParis.ChristianLambert, le préfet de Seine-Saint-Denis, s’est rendu sur les lieux desfaits. Le conducteur du deux-rouesn’a pas été interpellé. « Encore unefois, un policier a été victime d’uneagressionaucoursd’uneinterventionen Seine-Saint-Denis, dénonce StéphanePelliccia, secrétaire régionaladjoint pour le syndicat de policeUnsa. Le conducteur du scooter a belet bien foncé, à pleine vitesse, sur lefonctionnaire. Il ne s’agit en aucuncas d’un accident. »ST.S.ENBREFABANDONUnnourrissonaétéretrouvéhierendébut d’après-midi par un promeneurà Limoges (Haute-Vienne) dans unsac, près d’un gymnase de la ville.Transporté au centre hospitalier de Limoges,lebébéestenbonnesanté.Uneenquête est en cours pour déterminercomment et par qui ce nouveau-né aétéabandonné.ACCIDENTUnspectateurde22ansestdécédéhierlorsdes24HeuresduMansmotodans la Sarthe, en chutant d’une dizainede mètres depuis les tribunes.L’homme, originaire de la Haute-Vienne, estdécédépeudetempsaprèssontransfertàl’hôpital.INSOLITEUnfauxpendutrouvédansunepoubelleUn simple canular ? L’affaire,rapportée hier par le quotidien« la Provence », a en tout casaccaparé les gendarmes pendantprès d’une heure et demie, samedimatin, sur la commune de Saussetles-Pins,près de Marseille (Bouchesdu-Rhône).Vers 8 h 30, les éboueursdécouvrent dans une poubelle cequ’ils pensent être un cadavre momifié,une corde autour du cou. Immédiatement,la zone est sécurisée etles gendarmes entament une enquêtedevoisinage,tandisqu’untechnicienen identité criminelle est dépêchéde Marseille. Mais très vite, lesenquêteurs commencent à avoir desdoutes.D’abordparcequelecadavre,en état de décomposition avancée,est inodore. Ensuite parce que lacorde semble flambant neuve… Finalement,en sortant le pendu de sapoubelle, les gendarmes se sontrendu compte qu’il s’agissait d’unsimple mannequin en polystyrène,dont le réalisme frisait la perfection.LesépouxTiberirejugéspourfraudeélectoralePROCÈS. Condamnésen première instance,Jean Tiberi, député-mairedu V e arrondissementde Paris, et sa femme,Xavière, nient touteresponsabilité dansl’affaire des faux électeurs.Après les emplois fictifs, lesfaux électeurs. Le procès deJacques Chirac tout justeterminé, la justice examineles agissements présumésdélictueux d’un autre ancien maire(RPR) de Paris. Jean Tiberi, à la tête delamairiedelacapitaleentrejuin1995et mars 2001, est rejugé à partir d’aujourd’huidevant la cour d’appel deParis pour son implication supposéedans une fraude électorale liée auxmunicipales de 1995 et aux législativesde 1997. Au cœur des débats :196 « électeurs irréguliers » inscritsdans le V e arrondissement.A la différence de Jacques Chirac,Jean Tiberi est à 76 ans toujours dansle circuit politique. L’enjeu s’avère importantpour l’actuel député-maire(UMP) du V e arrondissement. En premièreinstance en 2009, le tribunalcorrectionnel de Paris l’avaitcondamné à dix mois de prison avecsursis et surtout trois ans d’inégibilité.Une peine suspendue par l’appel deJean Tiberi, imité par son épouse,Xavière,etsa1 re adjointe,Anne-MarieAuffret, rejugées à ses côtés.Pendant huit journées d’audience, lacour d’appel va se replonger dansl’univers du très chic V e arrondissementoù Jean Tiberi règne depuis desdécennies. Selon l’accusation, l’enquêteamisenévidenceuneorganisationdestinée à permettre l’inscriptionou le maintien indu de personnes surASSASSINATIl venait de sortir d’un rendez-vousdans un bar de la cité des Flamants,samedi soir, avenue Georges-Braqueà Marseille, lorsqu’unevoiture a surgi. Rachid Bekhis, 30 ans,n’a pas eu le temps d’esquisser lemoindre geste de fuite. Il a été fusillésur place par les occupants de cettevoiture qui ont mitraillé la victime,laissant dernière eux une vingtaine deprojectiles de gros calibre. Un règlementde comptes de plus dans la citéphocéenne ensanglantée depuis plusde trois ans par une impitoyableguerre des territoires, où chaquetruand défend bec et ongles lamoindre cage d’escalier, devenue unlieu de deal.Ancien trafiquant, déjà condamnépour des affaires d’escroquerie, RachidBekhis appartenait « à la voyoucratielocale sans pour autant être unvrai caïd », résume un policier. « Tousaspirent à jouer un cran au-dessus deleur niveau », ajoute-t-il. Mais, samedisoir, Rachid Bekhis a allongé la listedes victimes de règlements decomptes. Quatre hommes cagoulésdans une Audi noire ont pris en tenaillela victime, qui était sortie dedétention au cours de l’été. Touché àla tête et au thorax, l’homme a étéretrouvé agonisant par les secours.(LP/JEAN-BAPTISTEQUENTIN.)25FÉVRIER2009.Enpremièreinstance,JeanTiberiavaitétécondamnéparletribunalcorrectionneldeParisàdixmoisdeprisonavecsursisettroisansd’inégibilité.Safemme,Xavière,avaitécopédeneufmoisavecsursis.Despeinessuspenduesparl’appel.Selonl’accusation,lesfauxélecteursbénéficiaientdelogements,d’emplois...les listes du V e , car ces dernièresétaient susceptibles d’apporter leursuffrage à Jean Tiberi. Le mécanismereposait pour l’essentiel sur desadresses fictives ou des certificatsd’hébergement de complaisance. Encontrepartie, les faux électeurs pouvaientespérer obtenir un logement,Hier,lesprochesdelavictimes’étaientdonné rendez-vous dans le quartierSaint-Jérôme, où vit sa mère.Ce meurtre prend aussi des allures de« baptême du feu » pour Alain Gardère,le nouveau préfet délégué à lasécurité à Marseille, dont la missionest d’endiguer cette escalade de violencedansunevilleminéepartouslestrafics et où 26 agressions graves ontlieu chaque jour.Sansêtrel’undespointslesplussensiblesde Marseille, la cité des Flamantsest devenue un lieu de rendez-vous etd’échange du trafic de stupéfiants.Une activité dominée par les citésrivales toutes proches de Font-Vert oude la Busserine. Fin avril, le parrain deFont-Vert,SaïdTir,59ans,étaitabattuau volant de sa voiture alors qu’il avaitsur la cuisse une arme chargée. Aumois de mai, deux truands lyonnais,Sabrie Khemaicia, 33 ans, et OussamniKari,24ans,quiavaientaffichéleurs ambitions sur Marseille, ont euxaussi été exécutés au pistolet-mitrailleuren plein centre de Marseille.un emploi ou une place en crèche.Aux yeux de l’accusation, Marie-Anne Auffret, 73 ans, fut un « élémentcentral » de la fraude. Bien que ni élueniemployéedelaVille,XavièreTiberi,omniprésente dans la vie de l’arrondissement,estaccuséed’avoirjouéun« rôle officieux de dirigeant ». Quant àson mari, il est considéré comme uncomplice mais avant tout le « principalbénéficiaire » du système. Lesépoux Tiberi ont toujours réfuté toutacte délictueux. Xavière a dénoncéune « cabale » en soulignant que sonDepuis plusieurs mois, le syndicat depoliceAlliancefustige«l’irruptiondesméthodes du grand banditisme aucœur de Marseille ». « Malgré uneespérance de vie de plus en pluscourte, les truands ne reculent devantrien », constate David-Olivier Reverdy,le responsable local du syndicat. « Lapolice se doit d’agir en amont et nemari n’avait jamais eu besoin de çapour gagner les élections. « Les dysfonctionnements,dont mon clientconteste être l’auteur, et les anomaliesrelevéessurleslistesélectoralesfurentsans conséquences sur les scrutins,comme l’a affirmé le Conseil constitutionnel», insiste M e Jean-Yves LeBorgne, conseil de Jean Tiberi avecM e Thierry Herzog. L’avocat va souleveraujourd’hui plusieurs questionsprioritaires de constitutionnalité, susceptiblesde provoquer un report duprocès. GEOFFROYTOMASOVITCHNouveaurèglementdecomptesàMarseilleDes méthodesdu grand banditismeLESYNDICATDEPOLICEALLIANCEMARSEILLE(BOUCHES-DU-RHÔNE),HIER.RachidBekhis,30ans,estmortsousdesrafalesdeballesdegroscalibre.(AFP/GÉRARDJULIEN.)plus compter les coups », ajouteM. Reverdy. Allusion au manque demoyens récurrent de certains servicesde la police judiciaire. De son côté, leSnop, premier syndicat d’officiers,évoque par la voix d’Yves Robert « lalongue dérive à la napolitaine » de lacité phocéenne.JEAN-MARCDUCOS