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Le trafic humain - Missionnaires d'Afrique

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<strong>Le</strong> <strong>trafic</strong> <strong>humain</strong> ….<strong>Le</strong>s esclaves du 21ème siècle –l’épidémie silencieuse ...Notre histoire –notre défiMaggi Kennedy SMNDA10 Novembre 2012Sr Carmen Sammut, Supérieure générale des SMNDA, présente les deux conférenciers du jour:Fr Jean-Claude Ceillier et Sr Margret KennedyEminences, Messeigneurs, Révérends Pères, frères et sœurs religieux, membres de la familleLavigerie ici représentée et tous ceux en Afrique et dans le reste de notre monde globalisé oùnous servons en tant que fils et filles du Cardinal Lavigerie et de Mère Marie Salomé, bonsoir !Ce jour nous rappelle un moment mémorable de l’histoire de l’Eglise. Il y a 125 ans, à lademande du Pape Léon XIII, le Cardinal Charles Martial Lavigerie, archevêque d’Alger,entreprenait d’engager l’Eglise Catholique dans le mouvement de l’abolition de l’esclavage, deconcert avec d’autres pionniers tel William Wilberforce, avec comme point focal, l’Afrique.<strong>Le</strong> 23 décembre 1888, Lavigerie disait: « L’esclavage, tel qu’il est pratiqué en Afrique, n’est passeulement, en effet contraire à l’évangile, il est contraire au droit naturel… il implique toutel’humanité. C’est pourquoi je fais appel à tout le monde, sans distinction de nationalité, de partipolitique ou de croyance religieuse. Je ne m’adresse pas simplement à la foi, mais à la justice,au respect, à l’amour de la liberté »Ce jour-là, il s’adressait aux cœurs de l’assistance comme il le fait aujourd’hui. <strong>Le</strong> défi venant dupassé est tout à fait actuel…pour notre aujourd’hui…Et il est allé même plus loin…“Je suis homme, rien de ce qui est <strong>humain</strong> e m’est étranger. Je suis homme, l’injustice révoltemon cœur. Je suis homme, l’oppression indigne ma nature… Je voudrais restaurer aux fils etfilles de cette race malheureuse, la famille, l’honneur et la liberté !Quel prodigieux désir !…« Je suis homme, rien de ce qui est <strong>humain</strong> ne m’est étranger.» devint la devise du Cardinal,alors que dans les nombreuses villes européennes, il faisait prendre de plus en plus consciencedes diverses formes de l’esclavage…qui était et reste un crime contre l’humanité.A l’approche de sa mort, il disait avec tristesse : “Peu de gens, trop peu de gens ont la vocationultime : devenir <strong>humain</strong> ». C’est un défi pour nous aujourd’hui d’être appelés à le suivre, sonesprit nous habitant au plus intime. Qui parlera si nous ne le faisons pas ?…en tant qu’Egliseaujourd’hui ?<strong>Le</strong> <strong>trafic</strong> des personnes…..le <strong>trafic</strong> <strong>humain</strong>, le nouvel esclavage… S’agit-il seulement d’un


vocabulaire appartenant au jargon? L’esclavage a initialement été supprimé en France en 1794,puis réintroduit et de nouveau supprimé. En Grande Bretagne, il a été interdit en 1807.L’esclavage a été banni à travers le monde en 1926. En Mauritanie, Afrique du Nord, il afinalement été supprimé en 1981. Dans de nombreux pays, il continue à exister sous de nouvellesformes.<strong>Le</strong> <strong>trafic</strong> <strong>humain</strong> existe-t-il vraiment ?Oui, mais il prend différentes formes. Il touche des familles comme les vôtres et la mienne, desgens et des familles ordinaires qui sont entraînés dans un gouffre sombre et profond dedésespérance, à cause souvent de la pauvreté, de l’argent, de l’avidité et parfois par désir del’aventure et du pouvoir.En 2010, à mon retour au Kenya, je me suis trouvée impliquée dans cette lutte. Une Sœur del’Assomption de Nairobi m’avait confié que ses deux nièces en recherche d’un emploi avaient vuune annonce dans le journal avec l’offre d’un bon salaire et de nombreux avantages. Elles onttéléphoné à l’agence. On leur a demandé de se présenter pour un interview. Très enthousiastes,elles s’y préparèrent. C’est ensemble qu’elles ont quitté la maison sous les yeux des parents,heureuses, …on ne les a plus jamais revues vivantes. Où sont-elles maintenant ? Il est difficiled’imaginer le traumatisme de leurs familles ne sachant pas où elles se trouvent et ce qui leur estarrivé…pas de funérailles…pas de lieu de repos pour leur corps, pas de deuil. Et pour les autresfamilles ??? Ce pourrait être toi ou moi ou des membres de nos familles ou amis.<strong>Le</strong> <strong>trafic</strong> <strong>humain</strong> est, dans le monde, ce qui rapporte le plus d’argent après la drogue et les armeslégères. En 2011, une estimation du TIP, rapport annuel du gouvernement des USA sur le <strong>trafic</strong><strong>humain</strong>, portait à 32 milliards de dollars USA les vies innocentes de 800.000 personnes, victimesde ce <strong>trafic</strong> à l’intérieur ou au-delà des frontières internationales et dont la moitié sont desenfants.On estime que 12,3 millions d’adultes et d’enfants sont actuellement traités comme esclaves destemps modernes comprenant le travail forcé et la prostitution. Ils sont beaucoup plus nombreuxqui subissent le <strong>trafic</strong> à l’intérieur de leurs frontières nationales pour le travail forcé, leremboursement de la dette, l’esclavage sexuel et la servitude involontaire. Il semble presqueimpossible d’infléchir cette épidémie. <strong>Le</strong> traitement épouvantable et les conditions de vie sontinimaginables. Mené par la pauvreté il touche tous les échelons de la société, manifeste l’aviditéinsatiable de gens qui n’ont aucun scrupule. Il se pourrait qu’il n’arrêtera jamais complètement.Mais ce n’est pas une raison pour ne rien faire.En quoi sommes-nous impliqués ?<strong>Le</strong> <strong>trafic</strong> <strong>humain</strong> nous contamine tous, une conversion radicale est nécessaire. L’Agence Fidesécrit : “400 millions d’enfants dans le monde vivent dans des conditions d’esclavage »”.Beaucoup d’enfants ainsi que des jeunes femmes et jeunes hommes produisent des articles quisont vendus en Europe et dans le reste de l’Occident. “Indirectement cet esclavage fait partie denos existences, les tapis sur lesquels nous marchons et les T-shirts que nous portons ».La Journée mondiale contre l’esclavage des enfants fut célébrée pour la première fois le 16 avril1995 lorsqu’un jeune garçon de 12 ans, chrétien pakistanais - Igbo Mash – fut tué par la mafia deson pays. C’était un esclave dans l’industrie textile depuis l’âge de quatre ans. A dix ans, ils’échappa et ce qui lui était arrivé fut dénoncé aux USA et à l’Union Européenne. Il en paya leprix suprême. L’exploitation des minerais, des textiles et du cacao, au Brésil, Myanmar, Sierra<strong>Le</strong>one, République Démocratique du Congo, Bénin, Egypte et en Côte d’Ivoire prospèrent grâceau travail des enfants esclaves. Dernièrement, en juin 2012, la BBC mettait sur sa liste « Réseauxen Afrique », le commerce du cacao en Côte d’Ivoire. « <strong>Le</strong>s enfants sont plus faciles à contrôlerque les adultes », dit le dicton. On se sert de ces enfants et on en abuse pour notre confort.Toute notre manière de vivre et de nous relier les uns aux autres devient un défi. <strong>Le</strong> <strong>trafic</strong><strong>humain</strong> est autour de nous et en nous…ce silence insistant pousse un cri perçant …les voix deces personnes qui ne se sont pas capables de se défendre elles-mêmes. Entendrons-nous ce cri cesoir, ici au Gesù où le Cardinal Lavigerie parla il y a 125 ans? Supporterons-nous d’entendre etde ressentir cette douleur ?...Rappelons-nous que dans les seules années 1980, il y eut davantage


de femmes et d’enfants esclaves à cause du <strong>trafic</strong> provenant d’Asie que pendant la traite desesclaves venant d’Afrique durant 400 ans. Nous en tant qu’Eglise, il nous faut être impliqué…aulieu et au moment où cela se passe. En Europe beaucoup a été fait mais l’Afrique a besoin d’aideet de la justice pour pouvoir offrir une économie stable dont tous pourront en bénéficier.Lavigerie a eu recours à toutes les ressources possibles pour éradiquer l’esclavage et pourinformer les peuples de la situation désastreuse. Il nous faut ce sens de l’<strong>humain</strong> pour vivre nosrelations à la manière de Jésus…- de personne à personne comme de vrais frères et sœurs – car lavie <strong>humain</strong>e est un don de Dieu. <strong>Le</strong> Cardinal a fait appel aux journalistes de son temps. Il a lancéun défi à tous et à chacun. S’il a pu faire cela dans un monde restreint, il est sûr que nouspouvons faire quelque chose dans notre monde globalisé avec tout son réseau de médias. <strong>Le</strong>Pape Léon XIII , visionnaire, très concerné pour les droits de la personne, avait trouvé celui qu’ilfallait pour la tâche qu’il désirait entreprendre.Pendant que l’Europe lançait un défi à l’esclavage en Afrique, les <strong>Missionnaires</strong> d’Afrique, les<strong>Missionnaires</strong> Comboniens et les Spiritains ainsi que la Société des Missions d’Afrique étaientsur la ligne de front de ses réalités, achetant et libérant les esclaves, leur trouvant des villagespour s’y installer afin de mener une vie digne.Déjà en 1939, Sr Marie André du Sacré Cœur, SMNDA, parlait à la Chambre des députés deParis, exposant la situation des femmes africaines, de leurs difficultés en tant que femmes,spécialement celles concernant les mariages précoces et le <strong>trafic</strong> <strong>humain</strong> pour certaines d’entreelles. En 1983, Sr <strong>Le</strong>a Ackermann commença un nouveau travail à Mombasa au Kenya, jusqu’àfaire naître SOLWODI (Solidarité pour les femmes en détresse). Elle réside actuellement enAllemagne mais elle a 6 bureaux au Kenya, continuant le travail qu’elle a commencé. EnAllemagne, avec plus de cent collaborateurs , elle poursuit sa tâche comme Sr Eugenia Bonetti lefait en Italie. D’autres groupes, particulièrement des religieux, travaillent au Nigeria, Kenya,Pays Bas, Grande Bretagne, USA, Philippines ainsi que dans d’autres lieux encore. Il nous fauttravailler dans ce secteur. En 2003, on demanda à l’UISG (Union Internationale des SupérieuresGénérales) de s’occuper de ce problème. Seules, des religieuses ont répondu à cet appel commesi le <strong>trafic</strong> <strong>humain</strong> était un problème de femmes. Un bon pourcentage d’hommes sont aussivictimes du <strong>trafic</strong>.<strong>Le</strong> <strong>trafic</strong> <strong>humain</strong> est devenu une tâche jamais terminée et nous avons besoin de prévention, deprotection, de poursuites judiciaires et de politiques pour mettre en place une approche holistiquesans laquelle il n’y aura pas de progrès dans le processus. Au Ghana, Sr Connie Gemme et SrJacqueline Picard SMNDA se sont investies pour faire face et prévenir le <strong>trafic</strong> <strong>humain</strong> enapportant un soutien aux victimes, leur donnant une vie nouvelle à partir d’une situation autrefoisterrifiante. Beaucoup d’autres en Afrique en ont fait aussi leur priorité, les <strong>Missionnaires</strong>d’Afrique en Afrique du Sud avec P. Sean O’<strong>Le</strong>ary, au Malawi avec P. Bill Turnbull et P. JosCuppens au Centre Social « Center of Social Concern ». P. Anselm à Gao au Mali. Dans lesbidonvilles de Nairobi, Sr Mary O’ Malley MMM et Radek Malinowski ont sans discontinuitéaidé à la prise de conscience du <strong>trafic</strong> <strong>humain</strong> à l’aide de HAART, une petite ONG.Monseigneur Martin Kivuva, évêque de Machakos, près de Nairobi, appuie un projet quiimplique les petites communautés chrétiennes à prendre conscience du soutien aux victimes, ense centrant sur les plus vulnérables, tout en développant des programmes capables d’élever leniveau de vie et d’assurer une viabilité appropriée. Je travaille avec « Awareness Against HumanTrafficking Collaboration » ou « Collaboration pour la Conscience Contre le Trafic Humain » ,qui est partenaire de ce projet et a bénéficié de l’apport des <strong>Missionnaires</strong> d’Afrique et des Sœurs<strong>Missionnaires</strong> de Notre Dame d’Afrique. Monseigneur Boniface <strong>Le</strong>le, archevêque de Mombasa,a souligné la nécessité de travailler davantage avec Solwodi, pour les femmes vulnérables et lesenfants.Qu’est-ce que le <strong>trafic</strong> <strong>humain</strong> ?Une réponse simple serait le commerce des femmes, des hommes et des enfants avec l’objectifde les exploiter. Deux facteurs sont cruciaux dans la définition du <strong>trafic</strong> <strong>humain</strong>. Ce SONTle mouvement et l’exploitation. Il faut d’abord recruter puis transporter. Il y a transfert d’uneplace à une autre, hébergement de la personne ou des personnes et paiement d’argent.


<strong>Le</strong> protocole de Palermo (art 3) fournit une définition globale quand il énonce que “<strong>Le</strong> <strong>trafic</strong> despersonnes veut dire recrutement, transport, transfert, hébergement ou réception des personnes, aumoyen de la menace ou l’utilisation de la force ou d’autres formes de contrainte, de rapt,d’escroquerie, de subterfuge, d’abus de pouvoir ou de position de vulnérabilité, donner ourecevoir des versements ou des avantages pour obtenir le consentement d’une personne ayant lecontrôle sur une autre personne, dans le but de l’exploitation. L’exploitation va au moins inclurel’exploitation de la prostitution ou d’autres formes d’esclavage ou encore l’ablation d’organes. »La définition du Protocole de Palermo est longue et compliquée et nous fait réaliser combien leproblème est complexe. 185 pays ont signé cet accord et pourtant le <strong>trafic</strong> continue !Quand est apparue pour la première fois l’expression « Trafic <strong>humain</strong> « ?Aux 19ème et 20ème siècles, lorsque l’esclavage et le commerce des esclaves existaient encore,quoique déjà en régression, l’expression “<strong>trafic</strong> <strong>humain</strong>” fit son apparition. D’abord, elle faisaitréférence au commerce illégal des femmes blanches, pour le sexe. La première loi internationalequi a traité le problème du <strong>trafic</strong> <strong>humain</strong> a été, en1904,l’Accord International pour laSuppression du Commerce de l’Esclavage Blanc communément appelé Convention duCommerce Blanc.La fin de la guerre froide a perçu le capitalisme comme le principal modèle socio-économiquedominant.Comme les tensions entre l’Ouest et l’Est diminuaient, les barrières se sont levées entre les pays.Certains états étaient faibles et pauvres. La révolution technique donna accès à d’incalculablespossibilités d’information. <strong>Le</strong>s changements culturels se sont accélérés. <strong>Le</strong>s économies et lessociétés se sont interpénétrées. <strong>Le</strong> commerce par opposition au développement a conduit aufossé s’accentuant rapidement entre les riches et les pauvres.<strong>Le</strong> Kenya en ligne de front<strong>Le</strong> Kenya, où je travaille est un pays d’origine, de transit et de destination des victimes du <strong>trafic</strong><strong>humain</strong>…La situation est terrifiante et une épidémie silencieuse augmente spécialement àNairobi et à Mombasa qui est un véritable point « chaud » à cause de l’industrie touristique.Comment sont les personnes victimes du <strong>trafic</strong> ?Cela arrive facilement et parfois elles sont trop crédules et absorbées ne réalisant pas et nequestionnant pas les offres qu’elles reçoivent. Nous pouvons tous être aveugles. Mais une foisprises à l’hameçon, les victimes peuvent être menacées et la force peut être utilisée. Toutes lesformes de contrainte y compris la fraude, la tromperie, l’abus de pouvoir, l’abus d’autorité, lesmotivations financières sont des méthodes faciles de manipulation. Au début, souvent lesvictimes coopèrent.<strong>Le</strong> <strong>trafic</strong> <strong>humain</strong> comporte diverses facettes. L’exploitation de la prostitution des autres est unmoyen courant avec le travail forcé et les services. L’esclavage ou d’autres pratiques semblablessont aussi utilisés. A l’ONU il était également dit que souvent, une femme “n’est pas traitéecomme un être <strong>humain</strong> sur une base égale avec les autres mais comme un objet à exploiter”. Despetites servantes et des garçonnets de maison sont aussi très vulnérables à l’abus sexuel.L’ablation de parties du corps est également chose courante dans certains endroits spécialementen vue de la sorcellerie.<strong>Le</strong>s enfants sont naturellement plus confiants et c’est pourquoi plus vulnérables que les adultes,ils fournissent du travail à bon marché. C’est pourquoi le travail des enfants et le <strong>trafic</strong> d’enfantssont fortement liés. Souvent les adultes partent d’eux-mêmes mais les enfants n’émigrent pasd’eux-mêmes. Un enfant ne peut jamais consentir à une situation de <strong>trafic</strong> en tant que mineur.Pourquoi le <strong>trafic</strong> <strong>humain</strong> est-il une affaire si lucrative ?L’approvisionnement et la demande de femmes, hommes et enfants sont constants et les coûtssont très bas. Il existe une petite structure légale contre le <strong>trafic</strong> <strong>humain</strong> en général mais elle restepeu convaincante. Beaucoup de pays comme l’Afrique du Sud et le Mozambique n’ont pas delégislation. En octobre 2010, le Kenya a promulgué “la Loi sur le <strong>trafic</strong> des personnes” qui


comprenait un nombre important de lois incluant celle sur les délits sexuels de 2006. En juin2012, on a constaté que la loi n’avait pas été promulguée correctement aussi le processus est denouveau en cours.On a recours au groupe de pression mais des directives se cherchent. C’est ce sur quoi noustravaillons, sur la manière dont nous pouvons prévenir et engager des poursuites contre lesdélinquants ! De nombreux débats se font aussi pour savoir si la prostitution doit être légaliséeou non. <strong>Le</strong>s organisateurs et les agences du <strong>trafic</strong> <strong>humain</strong> sont rarement ciblés. Ils sont cachés etpuissants, ayant de nombreuses connections internationales.Y a-t-il des variantes spéciales en Afrique ?De nombreux facteurs du <strong>trafic</strong> <strong>humain</strong> sont communs au monde entier mais il existe aussi desfacteurs existant seulement en Afrique. La prostitution, l’exploitation sexuelle et le <strong>trafic</strong>d’organes sont communs au monde entier. Généralement, quand les gens sont victimes du <strong>trafic</strong>en Afrique, la force brutale n’est pas utilisée pour les exploiter. <strong>Le</strong>s abus seraient davantage desmenaces, l’intimidation, la séparation d’avec les familles et l’environnement local.Qu’est-ce que le travail forcé ?Il est très commun et inclut le pâturage du bétail, le travail dans l’industrie de la pêche,l’esclavage domestique et le travail clandestin. La pauvreté et le manque d’accès à l’éducationsont la force motrice du <strong>trafic</strong>. Parfois, la parenté offre son aide pour éduquer des enfants de lafamille dans le besoin mais souvent les promesses d’éducation ne sont jamais honorées et cesenfants sont à la fois utilisés et abusés. Employer des mineurs et ne pas les payer est un délitcriminel. Beaucoup de personnes au Kenya ne le savent pas. A mesure que la nouvelleConstitution se mettra en application, plusieurs personnes pourraient subir des poursuitesjudiciaires. Bien souvent, aujourd’hui, nous constatons que le travail forcé est devenu endémiqueet socialement acceptable. Cela changera seulement avec l’éradication de la pauvreté etl’éducation.Facteurs trouvés principalement en AfriqueEn Afrique nous constatons que l’ablation de parties du corps est une pratique courantespécialement en vue de la sorcellerie. Des jeunes filles sont aussi violées pour se protéger duVIH ou obligées à devenir enceintes pour que l’enfant issu de la grossesse soit vendu au plusoffrant. Certains enfants sont enrôlés de force dans l’armée pour devenir des enfants soldats ; ilssont traumatisés et marqués pour la vie. La liste n’est pas exhaustive…Qu’est-ce que l’Eglise catholique nous dit aujourd’hui ?<strong>Le</strong> Pape Léon XIII a ouvert la voie avec ses encycliques sur les droits des travailleurs et toute laquestion de l’« esclavage». L’engagement à mettre fin à l’esclavage est mis en évidence dans leCatéchisme de l’Eglise catholique (Paragraphe n° 2414 www.ijpc.org) Vatican II en 1965réaffirmait le même souci : “l’esclavage, la prostitution, la vente de femmes et d’enfants, lesconditions scandaleuses de travail où les personnes sont traitées comme de simples outils,davantage pour le profit que pour des personnes responsables et libres ; toutes ces réalités etautres du même ordre sont vraiment infâmes. Elles empoisonnent la société et déshonorent auplus haut point le Créateur. (Gaudium et Spes, 1965, www.ipjc.org)<strong>Le</strong> bienheureux Jean Paul II renvoyait à la même question dans sa lettre aux femmes en 1995 ““le <strong>trafic</strong> des êtres <strong>humain</strong>s, spécialement des femmes, est florissant là où sont limitées lesopportunités d’améliorer leur niveau de vie ou même de leur survie. Il devient facile pour lestrafiquants d’offrir leurs propres « services » aux victimes qui souvent n’ont pas le moindresuspectent de ce qui les attend. Dans certains cas, des femmes et des enfants sont exploités dansleur travail quasi comme des esclaves et bien souvent, également dans l’industrie du sexe. » En2002 il faisait remarquer que “l’accroissement alarmant du <strong>trafic</strong> d’êtres <strong>humain</strong>s est un desproblèmes pressants, problème politique, social et économique lié au phénomène deglobalisation ; il est une sérieuse menace pour la sécurité des nations prises individuellement etla question de la justice internationale ne peut être différée ». (<strong>Le</strong>ttre à l’occasion de « “21ème


siècle – La Dimension Droits Humains dans le Trafic des personnes » Conférence 2002).En 2012, dans un message au 7ème Congrès de la Pastorale du Tourisme, le pape Benoît XVIécrivait “<strong>Le</strong> <strong>trafic</strong> des personnes ou prélèvement d’organes sont vraiment une exploitation desmineurs abandonnés dans les mains d’individus sans scrupules, subissant des abus etmalheureusement, souvent la torture”. Il demande que ceux qui sont engagés dans le domainetouristique et en effet à toute la communauté internationale de lutter contre ces procédés. (23avril 2012 - Service Information Vatican)Prenant la parole au Conseil des Droits Humains en septembre 2011, Monseigneur Silvano M.Tomasi, observateur permanent du Saint Siège auprès des Nations Unies et des InstitutionsSpécialisées à Génève disait :“Pour cette abolition, la conscience et la prévention sont les éléments-clés ». Il faisait remarquerplus loin que nous sommes mis au défi : «Pour lutter contre le fléau du <strong>trafic</strong> des femmes et desenfants avec une plus grande détermination et davantage de résultats concrets, une convergencedes efforts est nécessaire; une mentalité qui est centrée sur la dignité unique de chaque personne,une punition assurée pour les trafiquants, la lutte contre la corruption. « Ce qui est nouveau”,disait-il “c’est la globalisation de ce commerce et le développement du marché mondial quiexploite l’extrême pauvreté et la vulnérabilité de beaucoup de femmes et de mineures quiessaient d’échapper aux conditions intolérables de misère et de violence ». Apporter un soutien àla victime est également essentiel afin de réintégrer les victimes dans la vie. (Agence Fides 15septembre 2011)Que pouvons-nous faire concrètement ?L’Eglise catholique est le meilleur réseau possible au niveau mondial pour éradiquer “le <strong>trafic</strong><strong>humain</strong>”. Elle a un discours clair : le <strong>trafic</strong> <strong>humain</strong> est une violation de la dignité <strong>humain</strong>e qui estun don de Dieu.Nous sommes appelés à:Contester l’ordre économique mondial pour nous centrer sur l’éradication de la pauvretéet de la répartition inégale des richesses, en collaborant dans l’établissement d’un nouvelordre social.Des Conférences Episcopales Régionales existent et fournissent des moyens de travaillerensemble sur des causes communes par la création des réseaux de base.La police britannique avait demandé aux évêques d’Angleterre et du Pays de Galles del’aider dans son travail contre le <strong>trafic</strong> <strong>humain</strong>. <strong>Le</strong> 28 Mai 2012, une Conférence a eu lieuà Rome, pour échanger sur ce qui se fait dans ce domaine. <strong>Le</strong> Cardinal Turkson,président du Conseil Pontifical Justice et Paix avait hébergé la rencontre. Desintervenants de la Police du Royaume Uni ont donné une présentation. Sœur EugeniaBonetti, une missionnaire de la Consolata bien connue ici en Italie et ailleurs dans lemonde pour son travail contre le <strong>trafic</strong> <strong>humain</strong> a aussi partagé son expérience.Des ateliers pour les évêques, les prêtres, religieux et religieuses avec les laïcs. Cesderniers sont nécessaires pour mieux comprendre la complexité et l’horreur de cettesituation.Des sessions de formation des formateurs dans les Diocèses pour parvenir à toucher lesgens à baseChaque Diocèse constitues une église particulière et les lettres pastorales sur « le <strong>trafic</strong><strong>humain</strong> » pourraient être un outil valable dans la planification pastorale qui pourraitaboutir à la possibilité d’une réflexion renouvelée sur la sexualité <strong>humain</strong>e, les valeursfamiliales et l’assistance économique.Il est important Impliquer les Commissions Justice et Paix dans la prévention du <strong>trafic</strong><strong>humain</strong> à tous les niveaux. La traite des personnes est intimement lié au problème desDroits Humains. Dans certains milieux, elle est simplement considérée comme uneaffaire des migrants. Ceci n’est pas juste car le <strong>trafic</strong> <strong>humain</strong> et un domaine différent.<strong>Le</strong>s petites Communautés Chrétienne nous permettent d’atteindre la population à la basedans les milieux ruraux et les villes y compris les bidonvilles. A Machakos près de


Nairobi, le groupe de Collaboration pour la Conscientisation Contre le Trafic Humaintravaille avec l’évêque et les bureau de Caritas. Nous avons eu des sessions de formationdes formateurs, en vue d’arriver dans tous les coins du Diocèse qui compte 900.000Catholiques, 62 Paroisses et 11 groupes suivant les 11 Doyennés. L’enthousiasme defaire quelque chose est énorme… Nous avons maintenant des structures de soutien auxvictimes. <strong>Le</strong>s rapports sont souvent déchirants. Il faudra faire plus pour être au courantdes conditions des jeunes filles spécialement sur l’autoroute de Mombasa où de petitesfilles allant jusqu’à 10 ans se vendent pour de la nourriture et d’autres produits depremière nécessité Ce travail ne convient pas aux cœurs défaillants.La recherche et la diffusion de l’information sont d’une importance vitale pour s’assurerque les besoins sont clairement identifiés et peuvent être suivis et évaluésNous pouvons offrir des formations et assurer des suivis, à travers nos SecrétariatsCatholiques et collaborer avec d’autres Eglises et des Non-chrétiens. Grace à “Initiativedes Religions Unies”, un groupe interreligieux, l’équipe à laquelle j’appartiens travailleavec des Musulmans, des Hindous, des Bahaïs ainsi que d’autres Eglises.<strong>Le</strong>s réseaux sont essentiels à la circulation de l’information et c’est important d’avoir descoordinateurs diocésains bien connus pour que les autorités locales sachent avec quicommuniquer. <strong>Le</strong>s réseaux diocésains ont besoin de l’appui d’un réseau national etrégional. L’Union Internationale des Supérieurs Généraux (UISG) l’a initié en Europe oùça fonctionne bien, et commence aujourd’hui en Afrique où il est encore à son stade debalbutiement. Nous connaissons de bonnes expériences de collaboration, mais les réseauxnommés comme tels sont plus difficiles.Il y a un grand besoin de structures d’appui qui incluraient des professionnels préparéspour donner gratuitement de leur temps pour venir en aide aux victimes. De même, on abesoin d’écrivains, d’artistes et des journalistes qui utiliseraient leurs talents pour fairepasser le message dans les média.Besoin de matériels imprimés, des dépliants, d’affiches ainsi que des livres pour laformation des formateurs. Ce matériel pourrait être offert gratuitement pour l’utilisationdans des écoles, des lieux de travail et les lieux de cultes.Utilisation de toutes les formes de média.Dans tous les coins de notre Diocèse, nous atteignons toutes les couches à travers lesAssociations des Religieuses… Zambie, Ouganda, Kenya et beaucoup d’autres paysreçoivent des sessions et ont besoin de plus de suivi...<strong>Le</strong> Bon Samaritain. C’est une histoire bien connue, mais avons-nous jamais pensé àconvertir des voleurs ?Il avait été suggéré que le 18 Mai, fête de sainte Bakhita, soit une journée de prière pourtoutes les victimes du <strong>trafic</strong> <strong>humain</strong>. La prière est la pierre de touche pour laconscientisation sur le sort des victimes du <strong>trafic</strong> <strong>humain</strong>.Au Kenya, il y a plus de 2000 paroisses. Imaginez si nous pouvions conscientiser toutesces paroisse, les écoles et établir de petits secteurs de financement pour aider ceux qui ontle plus besoin d’éducation ! Et si nous donnions plus de bourses d’études dans nos écoles?Qu’en est-il des écoles professionnelles pour l’apprentissage des compétences? Il estessentiel de donner une formation agricole dans le respect de l’environnement… Cesécoles existent mais très souvent les frais sont trop élevés pour ceux qui en ont le plusbesoin.La prise de conscience peut se faire à travers les familles, les petites communautéschrétiennes, les hôpitaux, les maisons de formation, les séminaires, les media…La sacralité de l’être <strong>humain</strong> requiert engagement et courage, aussi, pouvons-nous nousengager à 3 niveaux : sauver, réhabiliter et réintégrerAujourd’hui, plusieurs activités sont en cours à travers l’Afrique … Défendre la dignitéde la personne, promouvoir un niveau de vie raisonnable pour les familles, éduquer les


jeunes garçons et filles…, n’est-ce pas là la raison de notre présence? Restaurer lesvaleurs précieuses qui ont souvent disparus dans notre monde moderne globalisé…Avant tout, ne cédons pas au découragement devant cette tâche si difficile, lorsque nousentendons les cris de l’humanité souffrante. Rappelons-nous toujours qu’il y a une grandemajorité qui s’oppose à ceux qui cherchent à s’enrichir en exploitant les vies de leurs semblables.Hommes et femmes, citoyens et dirigeants, croyants et personnes de bonne volonté, consacrentleurs vies chaque jour, défiant des organisations et des pouvoirs, pour lutter contre ce fléauqu’est le <strong>trafic</strong> <strong>humain</strong>. (Cardinal Turkson, Président de la Commission Pontificale Justice etPaix, le 8 Mai 2012Si à partir d’aujourd’hui nous arrivons à sauver une personne des horreurs du <strong>trafic</strong> <strong>humain</strong>, çaaura valu la peine. Cependant , je crois que nous avons la possibilité de nous embarquer dans unprocessus visant à sauver un grand nombre de cette tragédie <strong>humain</strong>e.ConclusionLa rapport annuel du Département d’Etat Américain sur le Trafic des Personnes (TIP) a recensél’effort de 184 gouvernements étrangers l’an passé, et souligne l’importance de 3 P : Prévention,Protection et Poursuites judiciaires, comme faisant partie des responsabilités des Etats dans leurlutte contre la traite des êtres <strong>humain</strong>s. Il en va de même pour nous membres d’organisationsconfessionnelles, partageant des valeurs chrétiennes communes, ayant des rôles et desresponsabilités différents. Membres de la même famille <strong>humain</strong>e, nous sommes tous conviés àunir nos actions pour l’éradication de ce fléau.En tant que famille Lavigerie et dans l’esprit du Cardinal, quel défi allons-nous relever?MAINTENANT !Nous célébrons ici un grand évènement ecclésial.Nous sommes appelés à :Participer à la lutte contre le traite des <strong>humain</strong>s pour libérer ses victimes à tous lesniveaux.Partageons l’héritage que le Cardinal Lavigerie nous a légué, au service de l’Afrique.Pouvons-nous chacun à sa manière, être son feu, son zèle, son enthousiasme et en mêmetemps témoigner ensemble que l’Eglise se soucie passionnément de la personne<strong>humain</strong>e?A la manière du Synode, nous pouvons secouer l’Afrique “Lève-toi” en disant “No” àl’esclavage et en nous soutenant mutuellement, nous pouvons restaurer l’espoir dans ladignité de la personne <strong>humain</strong>e.Allons-nous passer outre comme l’avaient fait le prêtre et le lévite?Rappelons-nous des paroles du Cardial : « Peu de gens, très peu de gens ont la vocationsuprême : celle de devenir <strong>humain</strong> » Où nous situons-nous ?Cette épidémie peut être éradiquée.Sommes-nous prêts à tendre la main aux autres, avec amour et justice, pour relever cedéfi de devenir réellement <strong>humain</strong>?Merci… Durant ce temps que nous venons de passer ici, 20 personnes au moins sontdevenues victimes du <strong>trafic</strong> <strong>humain</strong> …Maggi Kennedy MSOLA10th November 2012

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