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Les origines de la rhinite chronique : données ostéoarchéologiques

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<strong>Les</strong> <strong>origines</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>rhinite</strong> <strong>chronique</strong> : données ostéoarchéologiques 149extrêmement volumineuses, notamment au niveau <strong>de</strong>ssinus frontaux présentant un aspect en « chou-fleur ») ?Cette pneumatisation <strong>de</strong> <strong>la</strong> face est-elle liée au poids <strong>de</strong>l’ensemble du crâne ou s’explique-t-elle par une théoriemécaniste correspondant à <strong>la</strong> répartition <strong>de</strong>s forces entraînantune diminution du stress mécanique engendré dans lesos par <strong>la</strong> mastication [4,5] ?NéolithiqueL’histoire <strong>de</strong> l’évolution humaine est constituée d’une lentemodification <strong>de</strong>s structures anatomiques permettant uneadaptation progressive et constante <strong>de</strong> l’homme à sonmilieu. Ainsi était atteint un re<strong>la</strong>tif état d’équilibre. Mais,au cours du Néolithique, les migrations <strong>de</strong> popu<strong>la</strong>tion etl’apparition <strong>de</strong>s premières communautés <strong>de</strong> vie vont aboutirà une véritable révolution sanitaire, à l’origine <strong>de</strong> multiplesma<strong>la</strong>dies qu’on peut qualifier <strong>de</strong> « mo<strong>de</strong>rnes ». En effet,entre 10 000 et 5000 ans av. J.-C., en divers points <strong>de</strong> <strong>la</strong>surface terrestre, <strong>de</strong>s communautés se mettent à passerrapi<strong>de</strong>ment d’un état <strong>de</strong> chasseurs—pécheurs—collecteursvivant <strong>de</strong> chasse, <strong>de</strong> trappe et <strong>de</strong> récolte <strong>de</strong> baies et<strong>de</strong> racines à celui d’agriculteurs—pasteurs, producteurs <strong>de</strong>nourriture. Accompagnant cette sé<strong>de</strong>ntarisation et cettedomestication <strong>de</strong>s espèces sauvages animales (élevage) etvégétales (agriculture), <strong>de</strong> nouvelles ma<strong>la</strong>dies vont toutbonnement apparaître [6].L’atopie, tout d’abord, sous <strong>la</strong> forme d’allergies oud’intolérances alimentaires, respiratoires ou cutanées : parexemple chez un nourrisson pour lequel le <strong>la</strong>it maternel étaitremp<strong>la</strong>cé par du <strong>la</strong>it <strong>de</strong> vache ou, plus vraisemb<strong>la</strong>blement,<strong>de</strong> brebis ou <strong>de</strong> chèvre ; ou encore chez ceux qui, en guise<strong>de</strong> vêtements, se sont couverts <strong>de</strong> peaux, <strong>de</strong> <strong>la</strong>ine ou <strong>de</strong>fibres tissées à <strong>la</strong> teinture irritante. La culture <strong>de</strong> graminées,lentement sélectionnées pour offrir un maximum <strong>de</strong> ren<strong>de</strong>ment,se dérou<strong>la</strong>it au plus proche <strong>de</strong>s habitations, tandisque les grains, stockés en gran<strong>de</strong> quantité dans les greniers,constituaient un pool d’allergènes au contact direct<strong>de</strong> <strong>la</strong> communauté (moisissant fréquemment en fin <strong>de</strong> saison,libérant <strong>de</strong>s produits eux aussi allergisants, notamment<strong>de</strong>s mycéliums <strong>de</strong> type Aspergillus). En conséquence, cettepromiscuité humains—humains, humains—animaux domestiques,animaux domestiques-animaux domestiques a étéà l’origine <strong>de</strong> l’apparition <strong>de</strong> véritables phénomènes allergiques,mais aussi <strong>de</strong> brassages <strong>de</strong> germes à l’origine<strong>de</strong> nouvelles ma<strong>la</strong>dies à commencer par <strong>la</strong> tuberculosehumaine, <strong>la</strong> lèpre et <strong>la</strong> brucellose humaine [6].De telles lésions <strong>de</strong> <strong>rhinite</strong> <strong>chronique</strong> peuvent ainsi êtreconstatées sur les squelettes appartenant aux premièrescommunautés organisées sous <strong>la</strong> forme <strong>de</strong> vil<strong>la</strong>ges. Unexemple est fourni par les restes <strong>de</strong> <strong>la</strong> jeune fille découverteà Rome à l’emp<strong>la</strong>cement d’anciens marécages (Equus Domitiani2), datée <strong>de</strong> l’âge du bronze tardif (datation carbone14 : 1250 à 990 cal. av. J.-C.). Cet individu, dont <strong>la</strong> dysmorphiefaciale et corporelle indiquait qu’elle était atteintedu syndrome <strong>de</strong> Down (trisomie 21), fut sacrifié d’un coup<strong>de</strong> hache porté au crâne, puis déposé sans ménagement àdistance <strong>de</strong>s structures funéraires contemporaines. Caractéristique<strong>de</strong> <strong>la</strong> ma<strong>la</strong>die, le sujet était porteur <strong>de</strong> lésionsflori<strong>de</strong>s <strong>de</strong> <strong>rhinite</strong> <strong>chronique</strong> caractérisées par <strong>de</strong>s choanesparticulièrement hypertrophiques, criblés <strong>de</strong> multiplesFigure 1 Vue <strong>de</strong> face <strong>de</strong>s fosses nasales <strong>de</strong> l’individu EquusDomitiani 2 : noter le caractère hypertrophique et inf<strong>la</strong>mmatoire<strong>de</strong>s choanes.(cliché P. Charlier)pertuis vascu<strong>la</strong>ires, réalisant une obstruction osseuse quasicomplète <strong>de</strong>s fosses nasales (Fig. 1) [7].Égypte ancienneAu sein <strong>de</strong> cette civilisation ancienne, <strong>la</strong> pratique intense<strong>de</strong>s soins d’embaumement corporel (externes et internes :momification) n’al<strong>la</strong>it pas <strong>de</strong> pair avec <strong>de</strong>s connaissancesanatomiques précises. La lecture <strong>de</strong>s papyrus médicaux nepermet pas <strong>de</strong> retrouver <strong>de</strong> <strong>de</strong>scription <strong>de</strong> cas <strong>de</strong> <strong>rhinite</strong><strong>chronique</strong> [8], et l’on en est tenu à <strong>de</strong>s données paléopathologiquespour évaluer <strong>la</strong> fréquence <strong>de</strong> cette lésion danscette popu<strong>la</strong>tion. Dans cette perspective, les outils radiographiqueset fibroscopiques appliqués à d’innombrablesmomies et restes squelettiques ont permis <strong>de</strong> mieux cernerl’importance du problème et <strong>de</strong> poser <strong>de</strong>s diagnostics remarquablementprécis [9—13]. Le fibroscope permet d’allerdirectement au cœur <strong>de</strong>s cavités aériennes, <strong>de</strong> proposer<strong>de</strong> visu un diagnostic et <strong>de</strong> réaliser <strong>de</strong>s prélèvements àvisée anatomopathologique, mycologique, génétique, toxicologique,etc.De telles lésions touchent <strong>de</strong>s individus <strong>de</strong> « c<strong>la</strong>ssessociales » extrêmement variées (paysans, artisans,« nobles »), mais également d’<strong>origines</strong> géographiquesdiverses (bords du Nil, oasis, sites désertiques, région duDelta, nome d’Alexandrie). La juxtaposition <strong>de</strong> chacun<strong>de</strong> ces cas ostéoarchéologiques a permis <strong>de</strong> proposer uneorigine multifactorielle <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>rhinite</strong> <strong>chronique</strong> dans cecontexte chronoculturel : sable du désert mis en suspensioncréant un empoussièrement respiratoire fréquent ;poussières <strong>de</strong> bois précieux chez les artisans (ébénistes,notamment) <strong>de</strong> <strong>la</strong> vallée <strong>de</strong>s Rois et <strong>de</strong>s Reines (momies<strong>de</strong> Deir-el-Medineh) ; graminées chez les agriculteurs(comparables à celles <strong>de</strong>s popu<strong>la</strong>tions néolithiques).Malheureusement, ces lésions ne sont pas évi<strong>de</strong>ntesà observer compte tenu <strong>de</strong>s fréquentes <strong>de</strong>structions<strong>de</strong>s cornets et du sinus ethmoïdal survenant lors <strong>de</strong>l’excérébration : retrait <strong>de</strong>s matières cérébrales par les<strong>la</strong>mes criblées lors du processus <strong>de</strong> momification à l’ai<strong>de</strong>

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