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Le répertoire musical de la confrérie religieuse al ... - E-Corpus

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INTRODUCTION


7En Tunisie, comme partout ailleurs dans les pays du Maghreb,musique et religion ont toujours été indissociables et ont partagé un espacecommun : <strong>la</strong> zâwiya (lieu <strong>de</strong> rencontre <strong>de</strong>s a<strong>de</strong>ptes soufis), et ce <strong>de</strong>puis <strong>la</strong>conquête arabo-musulmane. <strong>Le</strong> phénomène peut paraître paradox<strong>al</strong> quand onsait que l’Is<strong>la</strong>m orthodoxe a eu une tendance c<strong>la</strong>ire, bien que controversée, àocculter <strong>la</strong> musique.<strong>Le</strong> mouvement soufi, d’origine orient<strong>al</strong>e et qui a connu en Tunisie uneétonnante expansion <strong>de</strong>puis l’invasion hi<strong>la</strong>lienne au X ème siècle ayant achevél’arabisation et l’is<strong>la</strong>misation <strong>de</strong>s berbères d’Ifriqiya, suscite <strong>la</strong> curiosité <strong>de</strong>schercheurs et continue à poser plus qu’une interrogation. Ce phénomène caractérisé par un zèle dans <strong>la</strong> pratique <strong>religieuse</strong>, n’était-ilpas une forme <strong>de</strong> résistance à une nouvelle culture imposée par le conquérantarabe, et une volonté <strong>de</strong> teinter cette nouvelle religion, l’Is<strong>la</strong>m, par lescouleurs <strong>de</strong> <strong>la</strong> barbarie ? Où était donc passée <strong>la</strong> musique loc<strong>al</strong>e berbère ?Il est certain qu’on ne peut parler <strong>de</strong> musique en Tunisie sans parler<strong>de</strong> religion au point <strong>de</strong> nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r s’il existait déjà une musiqueessentiellement profane ? Faut-il conclure que <strong>la</strong> musique autochtone n’étaitque rudimentaire et ne pouvant riv<strong>al</strong>iser avec cette musique venue d’orientavec <strong>la</strong> propagation <strong>de</strong> l’Is<strong>la</strong>m et <strong>de</strong> <strong>la</strong> culture arabe ?


8D’après Mustapha CHELBI, « rien ne semble indiquer une fusion<strong>music<strong>al</strong></strong>e arabo-berbère, tout semble faire croire que <strong>la</strong> musique arabe s’estdéveloppée en Tunisie d’après ses acquis orientaux »(1)Cette musique, interdite dans les mosquées n’a pu que trouver refugeauprès <strong>de</strong>s <strong>confrérie</strong>s <strong>religieuse</strong>s durant <strong>de</strong>s siècles avant <strong>de</strong> se "profaniser".Il existe, en effet, un patrimoine <strong>music<strong>al</strong></strong> religieux qui est trèspopu<strong>la</strong>ire lorsqu'il est interprété dans les turuq (sing. tarîqa: voie mystique,<strong>confrérie</strong>), mais il est tombé aujourd'hui dans l'oubli. C'est le cas <strong>de</strong> celui <strong>de</strong><strong>la</strong> tarîqa Karrâriyya (Fondée en 1645 par le shaykh Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY (1617 - 1696), homme <strong>de</strong> religion connu pour ses idées favorablesà <strong>la</strong> création artistique, notamment dans le domaine <strong>music<strong>al</strong></strong>). Cette tarîqaest l'une <strong>de</strong>s turuq les plus connues à Sfax, ville du littor<strong>al</strong> tunisien. Sesa<strong>de</strong>ptes se réunissaient dans <strong>la</strong> zâwiya et chantaient <strong>de</strong>s muwashshahât (sing.muwashshah : forme poétique) composés par le shaykh KARRÂY lui-même.Ces muwashshahât puisent dans le <strong>la</strong>ngage littéraire ou di<strong>al</strong>ect<strong>al</strong> et traitent<strong>de</strong> divers sujets: l'idolâtrie et <strong>la</strong> soumission à <strong>la</strong> parole divine, l'éloge duProphète Muhammad, l'ivresse mystique etc.Il s'agit du chant selon <strong>la</strong> nûba traditionnelle tunisienne qui seprésente comme une suite <strong>de</strong> pièces voc<strong>al</strong>es se caractérisant par l'unité dumo<strong>de</strong> (tba` ) et <strong>la</strong> diversité <strong>de</strong>s mouvements ouverts et rythmés <strong>al</strong><strong>la</strong>nt du pluslent au plus vif. Cette tradition <strong>music<strong>al</strong></strong>e est une parfaite synthèse <strong>de</strong>s(1) CHELBI (Mustapha), "Musique et société en Tunisie", Tunis, Sa<strong>la</strong>mmbô, 1985, p.22.


9éléments structurels <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique traditionnelle tunisienne dite (mâlûf), et<strong>de</strong>meure une référence incontournable <strong>de</strong> l’i<strong>de</strong>ntité <strong>music<strong>al</strong></strong>e tunisienne.<strong>Le</strong>s a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> cette tarîqa ont assuré <strong>la</strong> continuité <strong>de</strong> <strong>la</strong> traditionjusqu'aux années soixante-dix du siècle <strong>de</strong>rnier, durant lesquelles toutes lesmanifestations <strong>de</strong> caractère mystique ont connu un déclin très marqué sinonun arrêt tot<strong>al</strong>.Ce <strong>répertoire</strong> <strong>music<strong>al</strong></strong>, ayant été transmis uniquement par <strong>la</strong> traditionor<strong>al</strong>e, <strong>de</strong> bouche à oreille, pendant presque trois siècles, n’a pas été sanssubir, au fil <strong>de</strong>s temps, <strong>de</strong>s déformations et <strong>de</strong>s transfigurations notoires, enplus d’une déperdition tot<strong>al</strong>e <strong>de</strong> plusieurs <strong>de</strong> ses morceaux.De là, une <strong>de</strong> nos motivations premières était d’essayer <strong>de</strong> rassemblerce <strong>répertoire</strong> précieux ou du moins ce qu’il en reste, le transcrire<strong>music<strong>al</strong></strong>ement avec une reproduction intégr<strong>al</strong>e <strong>de</strong>s textes poétiques, entraduisant quelques uns en <strong>la</strong>ngue française, pourrions-nous ainsi apporternotre mo<strong>de</strong>ste contribution pour mettre en v<strong>al</strong>eur le <strong>répertoire</strong>, l’an<strong>al</strong>yser etle réhabiliter auprès du lecteur aussi bien arabe qu’occi<strong>de</strong>nt<strong>al</strong>. Un tel travails’impose à notre avis pour qu’au moins, ce <strong>répertoire</strong> qui fait partie <strong>de</strong> <strong>la</strong>mémoire collective traditionnelle ne tombe pas dans l’oubli, tant il est vraique <strong>la</strong> musique actuelle standardisée, et commerci<strong>al</strong>e diffusée par les médiasmenace ce patrimoine.<strong>Le</strong> choix du <strong>répertoire</strong> <strong>music<strong>al</strong></strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong> <strong>religieuse</strong> <strong>al</strong>-karrâriyya<strong>de</strong> Sfax, comme objet <strong>de</strong> cette recherche n’a pas été fortuit, ou encore moins


10le fait du hasard. Étant nous-même originaires <strong>de</strong> Sfax et profondémentpassionnés <strong>de</strong> musique traditionnelle que nous avons pratiqué <strong>de</strong>puis notreenfance, nous avons toujours été intrigués par <strong>la</strong> richesse et <strong>la</strong> complexité <strong>de</strong>ce <strong>répertoire</strong> datant du XVII ème siècle.Certes plus que n’importe quelle autre <strong>confrérie</strong> <strong>religieuse</strong>, <strong>la</strong> tarîqa<strong>al</strong>-KARRÂRIYYA a pleinement joué le rôle d’école où est enseigné un art<strong>music<strong>al</strong></strong> obéissant à <strong>de</strong>s règles théoriques assez é<strong>la</strong>borées. Son mérite quant à<strong>la</strong> préservation et au développement <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique traditionnelle futconsidérable.La ré<strong>al</strong>isation <strong>de</strong> ce travail n’a pas été aisée, ne serait ce que du fait <strong>de</strong>l’éparpillement <strong>de</strong>s morceaux musicaux et <strong>de</strong> <strong>la</strong> rareté <strong>de</strong>s sourcesbibliographiques traitant du sujet. Un effort pénible d’enquête sur terrain aété nécessaire, notamment auprès <strong>de</strong>s anciens a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong> et tousceux qui peuvent encore témoigner <strong>de</strong> <strong>la</strong> pério<strong>de</strong> où les majâlis (réunions) setenaient encore à <strong>la</strong> zâwiya <strong>de</strong> sidi Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-Karrây fondateur <strong>de</strong> <strong>la</strong><strong>confrérie</strong> et poète parolier <strong>de</strong> l’ensemble du <strong>répertoire</strong>. <strong>Le</strong>s <strong>de</strong>rnièresprocessions <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong> datent <strong>de</strong> 1975, année <strong>de</strong> sa dissolution .Cetteenquête nous a permis, entre autre, <strong>de</strong> découvrir un manuscrit du recueilintégr<strong>al</strong> <strong>de</strong>s poèmes <strong>de</strong> Sîdî Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY. Ce recueil, qu’unancien adhérent à <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong> gar<strong>de</strong> j<strong>al</strong>ousement dans sa bibliothèque, estsans aucun doute, un document unique et sa découverte nous a été d'uneutilité incontestable.


11L'absence d'écrits en rapport direct avec le sujet a particulièrementorienté cette recherche vers l'étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> documents sonores. Nous noussommes donc basés sur <strong>de</strong>s enregistrements que nous avons pu consulter à <strong>la</strong>phonothèque <strong>de</strong> <strong>la</strong> maison <strong>de</strong> <strong>la</strong> radio <strong>de</strong> Sfax. Il s’agit <strong>de</strong> ban<strong>de</strong>s d’archivecontenant l'enregistrement <strong>de</strong> quelques parties <strong>de</strong> nûbât (pluriel <strong>de</strong> nûba) nedépassant pas les vingt minutes, durée maxim<strong>al</strong>e que permettait le supportd'enregistrement <strong>de</strong> l'époque (début <strong>de</strong>s années soixante).Outre l'an<strong>al</strong>yse <strong>de</strong>s documents sonores, un travail a été mené sur leterrain, ponctué par plusieurs rencontres et interviews avec tous ceux quiprétendaient avoir assisté aux majâlis en tant qu’a<strong>de</strong>pte ou en simplesympathisant <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong> motivé par l’écoute <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique. Nous noussommes appliqués à réunir le maximum d'informations sans toutefoisnégliger l'an<strong>al</strong>yse et <strong>la</strong> confrontation <strong>de</strong> certaines données. Des élémentsprobants ont été établis permettant <strong>de</strong> réfuter <strong>de</strong>s données non fondées.D’ores et déjà une ressemb<strong>la</strong>nce entre le <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong> <strong>al</strong>-Karrâriyya et celui <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique traditionnelle dite mâlûf a suscité notrecuriosité:* <strong>Le</strong>s <strong>de</strong>ux <strong>répertoire</strong>s se composent d’un même nombre <strong>de</strong> nûbât (treize);* La nûba prend comme titre le nom du tba` (mo<strong>de</strong>) dont elle est composée;* La structure <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba est presque <strong>la</strong> même dans les <strong>de</strong>ux <strong>répertoire</strong>s,seules les paroles sont complètement différentes.


12<strong>Le</strong>s <strong>de</strong>ux <strong>répertoire</strong>s ont-ils une origine commune ? Se sont-ilsinspirés d’une même source ? L’un d’eux a-t-il tout simplement pratiqué unp<strong>la</strong>giat pur et simple en transposant les mélodies <strong>de</strong> l’autre sur <strong>de</strong>s parolesqui lui sont propres ?En définitive, ce travail est, au-<strong>de</strong>là d’une étu<strong>de</strong> d’un <strong>répertoire</strong><strong>music<strong>al</strong></strong> d’une <strong>confrérie</strong>, une tentative d’éluci<strong>de</strong>r quelques questions serapportant à <strong>la</strong> propagation <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique dans les <strong>confrérie</strong>s <strong>religieuse</strong>s et àl’origine et l’historique dumouvement mystique en Tunisie, etparticulièrement à Sfax, son système <strong>de</strong> fonctionnement et son impactculturel et artistique sur <strong>la</strong> société sfaxienne.Notre démarche a consisté à l’an<strong>al</strong>yse <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique Soufi dans sonévolution au cours <strong>de</strong>s siècles en nous basant sur l’exemple <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique <strong>de</strong><strong>la</strong> <strong>confrérie</strong> <strong>al</strong>-Karrâriyya <strong>de</strong>puis sa création.Cette musique, a priori mystique, n’a pas tardé à échapper auxcloisons <strong>de</strong> <strong>la</strong> zâwiya et changer <strong>de</strong> contexte, du religieux au profane, pourenfin imposer une présence quasi permanente dans les cérémoniesmondaines.Nous avons jugé indispensable d’introduire ce travail par une partiehistorique dans le but d’expliquer et an<strong>al</strong>yser le contexte <strong>de</strong> l’essor dumouvement mystique et <strong>la</strong> prolifération <strong>de</strong>s <strong>confrérie</strong>s <strong>religieuse</strong>s en Tunisie.


13<strong>Le</strong> centre d’intérêt étant <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-Karrâriyya, nous avons réservéun chapitre sur son rituel et ses activités tant à l’intérieur qu’à l’extérieur <strong>de</strong><strong>la</strong> zâwiya.La <strong>de</strong>uxième partie été réservée à l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s caractéristiques dusystème mod<strong>al</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique arabe afin d’an<strong>al</strong>yser <strong>la</strong> forme <strong>music<strong>al</strong></strong>e etpoétique <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba du mâlûf traditionnelle pour fin<strong>al</strong>ement an<strong>al</strong>yser <strong>la</strong> nûba<strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong> <strong>al</strong>-Karrâriyya. L’accent a été mis sur ses caractéristiquesmod<strong>al</strong>es et rythmiques ainsi que sur les textes poétiques. La question <strong>de</strong>l’introduction <strong>de</strong>s instruments a été soulevée pour démontrer une évolutionfrappante <strong>de</strong> cette musique en rapport avec le phénomène d’acculturation quia fait qu’elle change <strong>de</strong> contexte, du religieux au profane.Nous avons tenu à achever notre travail par <strong>la</strong> transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e<strong>de</strong> quelques parties <strong>de</strong>s nûbât <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-Karrâriyya, une tentative <strong>de</strong>notre part <strong>de</strong> contribuer mo<strong>de</strong>stement à <strong>la</strong> sauvegar<strong>de</strong> <strong>de</strong> ce <strong>répertoire</strong><strong>music<strong>al</strong></strong> menacé <strong>de</strong> disparition.


PREMIERE PARTIETradition mystique et naissance <strong>de</strong> <strong>la</strong>Confrérie <strong>al</strong>-Karrâriyyaà Sfax


Chapitre premier<strong>Le</strong> soufisme dans l’Is<strong>la</strong>m


161- Qu'est ce que le soufisme ?1.1- Aperçu historique du mouvement mystiqueSelon <strong>la</strong> doctrine is<strong>la</strong>mique, <strong>la</strong> perfectionest une synthèse <strong>de</strong>s qu<strong>al</strong>ités <strong>de</strong> majesté et <strong>de</strong>beauté; et le soufisme, ainsi que <strong>de</strong> nombreuxsoufis l'ont exprimé, est un revêtement <strong>de</strong> cesqu<strong>al</strong>ités divines (6).<strong>Le</strong> soufisme (taçawwuff), est <strong>la</strong> recherche d'un état <strong>de</strong> pureté mor<strong>al</strong>equi permet d'atteindre <strong>la</strong> Vérité absolue, et d'être en communion directe avecDieu.<strong>Le</strong>s étymologistes donnent plusieurs origines et significations pour leterme (taçawwuff). Certains voient que ce terme viendrait du mot arabe"çafâ`" qui signifie pureté. D'autres considèrent que (taçawwuff) viendrait<strong>de</strong>s termes grecs "sophos", "sophia" qui signifient sagesse. Cependant,l'étymologie <strong>la</strong> plus connue et admise <strong>de</strong> ce terme dériverait du mot arabe"çûf" qui signifie <strong>la</strong>ine, "<strong>al</strong>lusion au <strong>la</strong>inage mo<strong>de</strong>ste porté par les mystiquesmusulmans, ayant choisi délibérément <strong>de</strong> bannir le faste <strong>de</strong> <strong>la</strong> vie, <strong>de</strong>s'adonner à <strong>la</strong> pratique rigoureuse <strong>de</strong>s rites, et à <strong>la</strong> contemp<strong>la</strong>tion qui vajusqu'à l'extase et unit l'homme à <strong>la</strong> divinité"(7).(6) MARTIN (Lings), " Qu'est ce que le soufisme ? ", traduit <strong>de</strong> l'ang<strong>la</strong>is par Roger Du Pasquier,Paris, 1977, éditions du Seuil, Collection Points, série Sagesse, p. 19.(7) ZEGHONDA (Fethi), "at-tarîqa as-sulâmiya fî tûnis ach`âruhâ wa <strong>al</strong>hânuhâ" (La musique dansles chants liturgiques <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong> <strong>religieuse</strong> "SULAMIYA" <strong>répertoire</strong> et an<strong>al</strong>yse), Tunis, 1991,Fondation Nation<strong>al</strong>e pour <strong>la</strong> Traduction, l'Etablissement <strong>de</strong>s Textes et les Etu<strong>de</strong>s Beït <strong>al</strong>-Hikma -Carthage, p. I6.


17Dès le début <strong>de</strong> l'Is<strong>la</strong>m, les proches du Prophète Muhammad se sontefforcés <strong>de</strong> suivre son exemple en menant une vie ascétique marquée parl'humilité et <strong>la</strong> soumission à Dieu. <strong>Le</strong>ur conduite et leur piété exemp<strong>la</strong>iresleur ont donné le mérite du titre "d'amis <strong>de</strong> Dieu" (awliyâ` ul-Lâh, sing.:w<strong>al</strong>y<strong>al</strong>-Lâh), terme qui est synonyme <strong>de</strong> "saint".<strong>Le</strong> dogme simple imposé par <strong>la</strong> loi canonique (<strong>la</strong> sharî`amuhammadyya) ainsi que les règles rituelles que cette loi prescrivait, n'ontpas suffi à satisfaire l'enthousiasme et l'exigence religieux <strong>de</strong> certains fidèles.Ces hommes pieux, zuhhâd (ascètes), se sont déc<strong>la</strong>rés indifférents auxattraits <strong>de</strong>s choses terrestres et ont voué leurs vies à <strong>la</strong> dévotion, multipliantles pratiques <strong>de</strong> piété prônées par le Prophète. C'était une réaction contre :- <strong>Le</strong> désaccord <strong>de</strong>s musulmans à <strong>la</strong> suite <strong>de</strong> <strong>la</strong> mort du ProphèteMuhammad et <strong>de</strong> l'assassinat du kh<strong>al</strong>ife Othmane, qui ont provoqués <strong>de</strong>sconflits dans <strong>la</strong> société musulmane.- L'injuste distribution <strong>de</strong>s richesses provenant <strong>de</strong>s conquêtes, ce qui acréé une fissure et une discrimination au sein <strong>de</strong> <strong>la</strong> société qui a vu naître unenouvelle c<strong>la</strong>sse <strong>de</strong> nouveaux riches et qui a engendré le mécontentement <strong>de</strong>sdéshérités.- <strong>Le</strong> penchant aux p<strong>la</strong>isirs matériels que montraient les musulmans audétriment <strong>de</strong> leurs <strong>de</strong>voirs religieux, notamment durant le règne <strong>de</strong>sAbbassi<strong>de</strong>s (750 - 847). Cette époque était par ailleurs connue sous le nom


18<strong>de</strong> "l’âge d'or", époque où toutes les activités re<strong>la</strong>tives au goût et à l'espritavaient connu un éc<strong>la</strong>t éblouissant.Tout ce<strong>la</strong> a été à l'origine <strong>de</strong> <strong>la</strong> fuite <strong>de</strong> plusieurs hommes <strong>de</strong> cettesociété qui s'est éloignée <strong>de</strong>s instructions <strong>de</strong> <strong>la</strong> religion, pour suivre lecourant soufi. Ainsi, et au fil <strong>de</strong>s siècles, cette tendance mystique s'estdéveloppée avec les gran<strong>de</strong>s figures qui ont contribué à sa propagation enOrient et en Occi<strong>de</strong>nt musulmans. Parmi les plus connues, on cite <strong>al</strong>-Hassan<strong>al</strong>-BAÇRI (640-758) considéré comme le maître <strong>de</strong> <strong>la</strong> mystique is<strong>la</strong>mique,Abû Mahfûdh <strong>al</strong>-KHARKHI (m. 815), pionnier du mysticisme à Bagdad auVII ème siècle, Bichr <strong>al</strong>-HAFI (m. 840) qui considère le taçawwuf commemoyen pour accé<strong>de</strong>r au savoir, <strong>al</strong>-HALLÂJ (assassiné en 922)…Nouveau, ce phénomène a eu rapi<strong>de</strong>ment une gran<strong>de</strong> réputation et apris une p<strong>la</strong>ce importante dans <strong>la</strong> littérature théologique <strong>de</strong> l'Is<strong>la</strong>m. Denombreux fidèles fascinés par cette nouvelle doctrine, n'ont pas tardé àaffluer vers les lieux où les chefs <strong>de</strong> congrégations organisaient <strong>de</strong>smanifestations popu<strong>la</strong>ires qui ne cessaient <strong>de</strong> s'agrandir. Dès lors, ces<strong>de</strong>rniers ont commencé à se subdiviser en <strong>confrérie</strong>s, appelées communémentturuq (pluriel <strong>de</strong> tarîqa) çûfiyya(s) (8). Chaque tarîqa prend le nom <strong>de</strong> sonfondateur qui a enseigné sa propre doctrine et ses propres rituels à sesa<strong>de</strong>ptes (murîdin). En dépit <strong>de</strong> leurs divergences au niveau <strong>de</strong> leur vocation,(8) <strong>Le</strong> soufisme est <strong>la</strong> voie <strong>la</strong> plus directe pour approcher Dieu, si bien que le mot tarîqa (voie)désigne par extension un ordre soufis ou une <strong>confrérie</strong>.


19ces turuq ont visé un seul but : l'anéantissement <strong>de</strong> soi dans <strong>la</strong> divinitésuprême.L'apparition <strong>de</strong>s <strong>confrérie</strong>s <strong>religieuse</strong>s avait nettement marqué leXII ème et le XIII ème siècles, pendant lesquels on note <strong>la</strong> naissance <strong>de</strong>s plusgran<strong>de</strong>s turuq çûfiyya (<strong>confrérie</strong>s <strong>religieuse</strong>s) dans le mon<strong>de</strong> musulman arabeet non arabe. Nous citons à titre d'exemple :- La Qâdriyya., fondée par `Abd-el-Qâ<strong>de</strong>r aj-JÎLÂNÎ (1078-1166), àBagdad. C'est l'une <strong>de</strong>s plus importantes turuq çûfiyya qui a <strong>de</strong>s fidèles et <strong>de</strong>szawâyâ dans tout le mon<strong>de</strong> musulman.- La Mawlâwiyya (ou Mevlevi en turc), génér<strong>al</strong>ement connue enOcci<strong>de</strong>nt sous l'appel<strong>la</strong>tion <strong>de</strong> <strong>de</strong>rviches tourneurs, fondée à Qûnya (Konya)(9) par le grand poète mystique J<strong>al</strong>âl ad-Dîn ar-RÛMÎ (1207-1273), connuaussi sous le surnom <strong>de</strong> Mawlânâ (notre maître). Il est l'auteur du célèbreMesnavi, un recueil <strong>de</strong> vingt-six mille distiques qui est encore considérécomme l'un <strong>de</strong>s plus importants chefs-d'œuvre <strong>de</strong> <strong>la</strong> littérature mystique. La<strong>confrérie</strong> Mawlâwiyya fut souvent considérée comme > qui a engendré un terrain nouveau au développementartistique par l'introduction <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique et aussi <strong>de</strong> <strong>la</strong> danse dans ses rituels."<strong>Le</strong>urs monastères furent pendant le règne <strong>de</strong>s Ottomans et jusqu'au début du20 e siècle <strong>de</strong> véritables écoles <strong>de</strong> musique. Des contacts fréquents entre les(9) Ville située en Anatolie méridion<strong>al</strong>e. A l'époque <strong>de</strong> J<strong>al</strong>âl ad-Dîn ar-RÛMÎ, elle fut <strong>la</strong> capit<strong>al</strong>e<strong>de</strong>s Seldjouki<strong>de</strong>s, une dynastie <strong>de</strong> princes qui <strong>de</strong>scendaient <strong>de</strong> l'empereur Seldjouk -vers l'an 1000-dont ils prirent le nom.


20musiciens <strong>de</strong> <strong>la</strong> cour ottomane et ceux <strong>de</strong>s takiyya-s eurent lieu notammentau 17 e et 18 e siècle, et les premiers vinrent séjourner dans les monastères afin<strong>de</strong> perfectionner leurs connaissances <strong>music<strong>al</strong></strong>es et d'acquérir le titre <strong>de</strong> chefspirituel Dédé". (10)1.2- <strong>Le</strong>s origines du soufisme en TunisieIl est à notre avis assez difficile <strong>de</strong> remonter jusqu'aux origines duphénomène soufi au Maghreb, et en particulier en Tunisie. Cependant, il estfort probable que les origines <strong>de</strong> ce phénomène remontent à l'époque <strong>al</strong>-Moha<strong>de</strong> (11), dynastie fondée par `ABD EL-MU'MEN IBN `ALI EL-KÜMÏ(entre 1094 et 1106 – 1163) <strong>de</strong> <strong>la</strong> tribu Zanâta (groupe <strong>de</strong>s zénètes) qui, partidu Maroc afin d'unifier le Maghreb, a dû chasser en juillet 1159, lesNormands qui ont occupé Mahdia <strong>de</strong>puis 1123, et soumettre les princeshi<strong>la</strong>liens.L'armée <strong>al</strong>moha<strong>de</strong> fut l'objet d'admiration <strong>de</strong> <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion autochtone.Formée <strong>de</strong> cent milles soldats selon les historiens, elle est considérée commel'armée libératrice <strong>de</strong> l'Ifriqiya <strong>de</strong>s Normands (mécréants). Ainsi, <strong>la</strong> ville <strong>de</strong>Mahdia a été libérée et l'unité du pays retrouvée. Cependant, le dangerpouvant venir <strong>de</strong> <strong>la</strong> mer est plus que jamais ressenti.(10) BEN ABDERRAZAK (M. Saif<strong>al</strong><strong>la</strong>h), "les orchestres arabes mo<strong>de</strong>rnes, influence <strong>de</strong>l'organologie occi<strong>de</strong>nt<strong>al</strong>e et les problèmes d'acculturation", Thèse <strong>de</strong> Doctorat, soutenue à Paris IV,<strong>la</strong> Sorbonne, 1999, p.47.(11) <strong>al</strong>-Moha<strong>de</strong> (Étymologie arabe: <strong>al</strong>-muwahhidûn), est une dynastie musulmane d'origine berbèrequi domina l'Afrique du Nord et l'Espagne aux XII ème et XIII ème siècles.


21Pour prévenir une éventuelle invasion à partir <strong>de</strong> <strong>la</strong> mer, l'arméeAlmoha<strong>de</strong> victorieuse a édifié <strong>de</strong>s ribât(s) (tours <strong>de</strong> contrôle) où, <strong>de</strong>s moinessoldats ont été invités à vivre dans l'austérité. C'étaient <strong>de</strong>s murâbitûn quisont chargés <strong>de</strong> surveiller <strong>la</strong> côte contre d'éventuels envahisseurs.Purement militaires au début, ces cita<strong>de</strong>lles n'ont pas tardé à <strong>de</strong>venir<strong>de</strong>s lieux <strong>de</strong> rencontres <strong>de</strong>s fidèles civils venus soutenir ces vail<strong>la</strong>nts soldatsdont <strong>la</strong> mission était <strong>de</strong> veiller sur <strong>la</strong> terre d'Is<strong>la</strong>m contre les infidèles.Nourries <strong>de</strong> sentiment d'admiration et <strong>de</strong> vénération, <strong>de</strong>s cérémonies<strong>religieuse</strong>s ont été organisées dans ces ribâts, marquant ainsi l'éclosion dusoufisme et <strong>la</strong> naissance <strong>de</strong>s <strong>confrérie</strong>s en Tunisie.La prolifération <strong>de</strong>s <strong>confrérie</strong>s en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s ribâts se feraessentiellement à l’époque Hafsi<strong>de</strong> (1183-1512), et il est certain qu'à cetteépoque là que les <strong>confrérie</strong>s <strong>religieuse</strong>s ont connu leur âge d'or.Mais pourquoi les Hafsi<strong>de</strong>s ont-ils vu <strong>de</strong> bon œil et même encouragé<strong>la</strong> prolifération <strong>de</strong>s <strong>confrérie</strong>s musulmanes, <strong>la</strong>issant le phénomène faire tached'huile ?<strong>Le</strong>s Hafsi<strong>de</strong>s, <strong>al</strong>liés <strong>de</strong>s Almoha<strong>de</strong>s, n'étaient que gouverneursd'Ifriqiya; et c'est Abû Zakariyya Yahyâ (1228-1249) qui a proc<strong>la</strong>mé <strong>la</strong>souveraineté du pays en se détachant du pouvoir Almoha<strong>de</strong> siégeant auMaroc. Pour garantir un soutien popu<strong>la</strong>ire et une assise soci<strong>al</strong>e, le pouvoirHafsi<strong>de</strong> a dû miser sur le sentiment religieux en encourageant toute activitémystique, tant il avait besoin <strong>de</strong> paix à l'intérieur du pays pour se consacrer à


22l'édification d'un nouveau pouvoir centr<strong>al</strong>isé ayant choisi pour <strong>la</strong> premièrefois dans l'histoire du pays, <strong>la</strong> ville <strong>de</strong> Tunis pour capit<strong>al</strong>e.<strong>Le</strong>s Banû Hafç étaient eux même très attachés à <strong>la</strong> religionmusulmane, et se prétendaient les <strong>de</strong>scendants du C<strong>al</strong>ife `Umar ibnu-l-Khattâb, ami du Prophète Muhammad. Etrange prétention d'une familleappartenant au c<strong>la</strong>n Hentata <strong>de</strong> <strong>la</strong> tribu Maçmûda dont les origines berbèresne faisaient aucun doute.`Abd-el-Wâhid ibn Abî Hafç, considéré comme le plus grand roihafsi<strong>de</strong>, est connu pour sa piété et son refus du faste du pouvoir. Il s'occupa àédifier <strong>la</strong> ville <strong>de</strong> Tunis qui donnera son nom à tout le pays. Désormaisl'Ifriqiya s'appelle <strong>la</strong> Tunisie, et Tunis a connu à son époque un grand essor.La ville s'est dotée d'un rempart grandiose, <strong>de</strong> plusieurs Souks dont celui d'el-`Attârîn, le prestigieux pa<strong>la</strong>is <strong>de</strong> <strong>la</strong> Qaçba a été construit, monument qui<strong>de</strong>meure à nos jours siège du gouvernement, <strong>la</strong> gran<strong>de</strong> mosquée ez-Zîtûna futrestauré et agrandit. L'université ez-Zîtûna <strong>de</strong>vint <strong>al</strong>ors le centre et <strong>la</strong>référence du savoir et <strong>de</strong> <strong>la</strong> culture arabo-musumlmane <strong>de</strong> tout le Maghreb.<strong>Le</strong> long règne <strong>de</strong>s hafsi<strong>de</strong>s (plus <strong>de</strong> trois siècles), a été secoué par <strong>de</strong>grands événements qui ont eu certes pour conséquences <strong>de</strong> favoriser lemysticisme et le regroupement autour <strong>de</strong>s turuq çûfiyya. Parmi cesévénements, on peut citer l'arrivée <strong>de</strong>s croisés en 1270, et les bataillesmenées contre eux ayant nécessité <strong>la</strong> participation <strong>de</strong>s autochtones,


23encouragés par les hommes religieux érigés en chefs glorifiés par <strong>de</strong>s fidèlesqui désormais leur doivent obéissance et fidélité.La misère <strong>de</strong> son côté a accentué le phénomène, une misère qui atouché aussi bien les villes que les campagnes, et qui a connu son apogée en1248, année <strong>de</strong> propagation <strong>de</strong> <strong>la</strong> peste, et en 1350, année <strong>de</strong> sécheresse et <strong>de</strong>famine et enfin <strong>la</strong> lutte sang<strong>la</strong>nte contre les envahisseurs espagnols.Ce concours <strong>de</strong> circonstances a fait que le soufisme a pris une ampleurconsidérable, qui n'a pas cessé <strong>de</strong> croître jusqu'à l'époque ottomane puiscoloni<strong>al</strong>e. (12)Parmi les grands saints chefs <strong>de</strong> <strong>confrérie</strong>s <strong>de</strong> l'époque hafsi<strong>de</strong>, ilconvient <strong>de</strong> citer sîdî Abû-l-Hassan ash-SHÂDHLÎ (1196-1259), fondateur<strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa Shâdhliyya, sîdî Abû Sa`îd <strong>al</strong>-BÂJÎ (1156-1230), lel<strong>la</strong>Mannûbiyya (morte en 1266), sîdî Ben `AROÛSS (mort en 1463), sîdîDHRÎF… Tous ont élu domicile à <strong>la</strong> ville <strong>de</strong> Tunis et à ses banlieuesproches, certainement attirés par <strong>la</strong> générosité et l'appui <strong>de</strong> <strong>la</strong> famille roy<strong>al</strong>eet <strong>de</strong> l'aristocratie <strong>de</strong> <strong>la</strong> ville prospère <strong>de</strong> Tunis.Ces saints sont vénérés par autant <strong>de</strong> citadins que <strong>de</strong> ruraux, et ontmême marqué le paysage architectur<strong>al</strong> par une présence quasi génér<strong>al</strong>iséed'édifices ornés <strong>de</strong> dômes peints en b<strong>la</strong>nc et en vert, drapés <strong>de</strong> bannières auxcouleurs spécifiques <strong>de</strong> chacun.(12) Pour plus <strong>de</strong> détails, cf. CHERIF (M. <strong>al</strong>-Hâdî), " Mâ yajibu an ta`rifa `an târîkhi tûnis" (Ceque tu dois savoir sur l'histoire <strong>de</strong> <strong>la</strong> Tunisie), éd. Dâr sirâss lin-nashr; CHELBI (Mustapha), " La


24D’après Sadok RIZGUI, les turuq çûfiyya ont connu leur âge d'ordurant <strong>la</strong> <strong>de</strong>uxième moitié du XVIII ème siècle, à l'époque <strong>de</strong> MuhammadSadok Bây (13). A cette époque, on a bâti les zawâyâ (sing. zâwiya : lieu <strong>de</strong>rencontre <strong>de</strong>s a<strong>de</strong>ptes soufis) les plus importantes dans tout le pays (14) poury former les murîdîn (sing. murîd : aspirant, a<strong>de</strong>pte) et les adhérents enmatière théologique et mystique, et pour leur apprendre le Coran et <strong>la</strong> <strong>la</strong>nguearabe. Il importe aussi <strong>de</strong> sign<strong>al</strong>er que ces <strong>confrérie</strong>s ont bénéficié d’unereconnaissance officielle par <strong>la</strong> loi sous le patronage administratif d’unshaykh <strong>al</strong>-mashâyakh (chef <strong>de</strong>s chefs religieux). En conséquence, les turuqse multiplièrent et atteignirent en 1890 le nombre <strong>de</strong> dix-neuf, regroupanttrois cent dix mille six cent quatre-vingt dix-neuf a<strong>de</strong>ptes (15).Cette évolution a permis aux zawâyâ <strong>de</strong> jouer un rôle soci<strong>al</strong>, culturelet même politique important. Elles ont permis <strong>la</strong> lutte contrel'an<strong>al</strong>phabétisme, et ont poussé leurs adhérents à défendre le pays contre lesintrus mécréants, comme ce fut le cas du shaykh `Ali ibn Sâlim ibn Sa`îd an-Nûrî (1643-1706), disciple du shaykh Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY, qui abloqué <strong>de</strong>s biens <strong>de</strong> mainmorte (ahbâs, sing. hubus) pour construire <strong>de</strong>sTunisie <strong>de</strong>s conquêtes", éd. Courrier <strong>de</strong>s G<strong>al</strong>eries; BOUZEKRI (Mohamed), "Raconte moi <strong>la</strong>Tunisie", Orbis édition, Tunis, juillet 2002, 86 p.(13) Un <strong>de</strong>s plus célèbres Bâys <strong>de</strong> <strong>la</strong> dynastie husseïnite (1705-1905), son règne dura <strong>de</strong> 1859jusqu'à 1882.(14) RIZGUI, (Sadok), op.cit., pp. 104 - 105.(15) KASRÂWI (<strong>al</strong>-Azhar <strong>al</strong>-), at-Turuq aç-çûfiyya bi Çafâqus, (les <strong>confrérie</strong>s soufis à Sfax),mémoire <strong>de</strong> C.A.R, Faculté <strong>de</strong>s lettres et <strong>de</strong>s sciences humaines, Tunis, 1985, p. 20.


25navires <strong>de</strong> guerre et combattre les pirates m<strong>al</strong>tais qui attaquaient souvent lescôtes <strong>de</strong> <strong>la</strong> ville, et vo<strong>la</strong>ient les biens <strong>de</strong>s sfaxiens (16).Cependant, après <strong>la</strong> renaissance culturelle qu'a connue le XVII èmesiècle, et le rôle positif qu'ont joué les <strong>confrérie</strong>s dans <strong>la</strong> société tunisienne,celles-ci ont connu un recul considérable consécutif à l'éclipse <strong>de</strong> l'empireottoman et au début <strong>de</strong> l'époque du Protectorat Français (1881-1956). A cetteépoque, les ordres soufis (turuq) ont bénéficié plus que jamais d'unepopu<strong>la</strong>rité remarquable puisqu’ils ont été encouragés par les colons dans lebut <strong>de</strong> détourner les masses popu<strong>la</strong>ires <strong>de</strong>s questions politiques. L'adhésion àune <strong>confrérie</strong> fut considéré comme un <strong>de</strong>voir religieux que l'individu doitaccomplir dès son enfance, car, "celui qui n'a pas <strong>de</strong> maître, a Satan pourmaître" dit un adage soufi (17). <strong>Le</strong>s turuq n'ont plus pour rôle d'instruire lesgens, mais plutôt ils ont déviés à l'ignorance aidant pour tomber dans <strong>de</strong>scroyances rétrogra<strong>de</strong>s et <strong>de</strong> pratiques <strong>de</strong> maraboutisme où s'inst<strong>al</strong>lent <strong>de</strong>sprétendus guérisseurs qui ont propagés le char<strong>la</strong>tanisme et les superstitions.Dès lors, les zawâyâ se sont éloignées <strong>de</strong>s principes <strong>de</strong> <strong>la</strong> religionis<strong>la</strong>mique. De nouveaux rituels ont apparu tel que <strong>la</strong> vénération du w<strong>al</strong>y, <strong>la</strong>sacr<strong>al</strong>isation d'une pierre ou d'un arbre, Cette situation était le résultat <strong>de</strong> <strong>la</strong>détérioration du niveau soci<strong>al</strong> et économique du pays.(16) YAÎCH (Younes), "`Alî <strong>al</strong>-Nûrî <strong>al</strong>-Çafâqusî: `açruhu, hayâtuhu, 'âthâruhu " (Ali NOURI: sonépoque, sa vie et ses oeuvres), Mémoire <strong>de</strong> C.A.R., Faculté <strong>de</strong>s lettres et <strong>de</strong>s sciences humaines,Tunis, 1987.(17) RIZGUI, op. cit. p. 101.


272- La dimension mystiqueA travers l'explication <strong>de</strong>s termes spécifiques du domaine dusoufisme, nous aspirons à nous adresser plus facilement au lecteurfrancophone, et <strong>de</strong> préciser <strong>la</strong> signification <strong>de</strong> ces termes propres au <strong>la</strong>ngagemystique que nous <strong>al</strong>lons utiliser tout au long <strong>de</strong> notre travail.2.1 - <strong>Le</strong> samâ`<strong>Le</strong> samâ` ou as-samâ`, du verbe sami`a: (entendre ou écouter),"désigne dans son sens premier et génér<strong>al</strong>, l'acte d'entendre ou d'écouter, sansréférence à un phénomène sonore particulier; disons l'" (21). Dans<strong>la</strong> tradition soufie, le mot samâ` désigne l'écoute spirituelle <strong>de</strong> musique et <strong>de</strong>chants dans le but d'accé<strong>de</strong>r à un état <strong>de</strong> pureté <strong>de</strong> cœur, un état <strong>de</strong> grâce oud'extase. En effet, "le samâ` […] porte comme fruit un état du cœur qui estappelé transe (wajd) " dit <strong>al</strong>-Ghazâli dans son ouvrage Ihyâ' ùlûm <strong>al</strong>-dîn (22).Il s'agit donc d'une tradition <strong>de</strong> concert mystique, d'écoute spirituelle <strong>de</strong>musique et <strong>de</strong> chants, sous une forme plus ou moins ritu<strong>al</strong>isée.2.2 - <strong>Le</strong> dhikrGlorieuse invocation <strong>de</strong> Dieu, basée sur <strong>la</strong> répétition in<strong>la</strong>ssable dunom <strong>de</strong> Dieu (Allâh) qui se transforme en "Hû" (Lui-Dieu) et <strong>de</strong> <strong>la</strong> shahâda(le témoignage ou <strong>la</strong> profession <strong>de</strong> foi): lâ Ilâha illâ-l-Lâh (il n'y a d'autre(21) ROUGET (Gilbert), <strong>la</strong> musique et <strong>la</strong> transe. Esquisse d'une théorie génér<strong>al</strong>e <strong>de</strong>s re<strong>la</strong>tions <strong>de</strong> <strong>la</strong>musique et <strong>de</strong> <strong>la</strong> possession, Paris, G<strong>al</strong>limard, 1990, pp. 451-452


28dieu que Dieu), ou encore d'autres formules sacrées qui affirment toutesl'omnipotence <strong>de</strong> Dieu. <strong>Le</strong> dhikr peut être jahrî, lisânî (verb<strong>al</strong>, à haute voix)ou khâfî, q<strong>al</strong>bî (muet, du cœur).On peut distinguer trois catégories <strong>de</strong> dhir:- Dhikr <strong>al</strong>-awqât : pratiqué par tous les musulmans à <strong>la</strong> fin <strong>de</strong> chacune<strong>de</strong>s cinq prières quotidiennes. Il s'agit <strong>de</strong> litanies révélées par le coran.- Dhikr aj-j<strong>al</strong>â<strong>la</strong> : c'est ce que fait le contemp<strong>la</strong>tif dans <strong>la</strong> solitu<strong>de</strong>absolue. Il nécessite l'isolement complet <strong>de</strong> l'esprit du mon<strong>de</strong> extérieur et uneconcentration sur <strong>la</strong> Vérité Suprême.- Dhikr <strong>al</strong>-hadhra : une séance d'invocations <strong>religieuse</strong>s pratiquéedans <strong>la</strong> zâwiya, par tous les adhérents réunis et consiste en litaniescomposées <strong>de</strong> versets <strong>de</strong> Coran, d'invocation que l'on répète en chœur et enca<strong>de</strong>nce.2.3 – <strong>Le</strong> hizbDans <strong>la</strong> littérature arabe, le terme hizb (plur. ahzâb), est utilisé pourdésigner un groupe <strong>de</strong> personnes réunies pour défendre une cause commune,pour désigner le parti politique. Dans le domaine religieux, le hizb est une<strong>de</strong>s soixante parties qui constituent le Coran. Dans le domaine mystique, ceterme désigne à <strong>la</strong> fois :(22) Al-GHAZALI (Abû Hâmid), Ihyâ' ùlûm <strong>al</strong>-dîn, (Revivification <strong>de</strong>s sciences <strong>de</strong> <strong>la</strong> religion),Beyrouth, Dâr <strong>al</strong>-ma`rifa, 1983, vol. II pp.268-306.


291/ Une cellule ou une branche d'une <strong>confrérie</strong> qui a sa propre zâwiya. <strong>Le</strong>smembres <strong>de</strong> cette branche qui constituent le hizb sont organisés selon unehiérarchie bien définie : Shaykh <strong>al</strong>-hizb (ou <strong>al</strong>-muqaddim) : c'est le propriétaire <strong>de</strong> <strong>la</strong>zâwiya ou l'un <strong>de</strong> ses <strong>de</strong>scendants. Il doit avoir une licence dugrand chef <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong> (shaykh <strong>al</strong>-mashâyakh) qui représente <strong>la</strong><strong>confrérie</strong> dans le pays s'il s'agit d'une <strong>confrérie</strong> étrangère, ou dushaykh <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong> mère s'il s'agit d'une <strong>confrérie</strong> loc<strong>al</strong>e. Il estle premier responsable du hizb. Shaykh <strong>al</strong>-hadhra : Il assure le bon déroulement <strong>de</strong> <strong>la</strong> séance <strong>de</strong>dhikr. Shaykh <strong>al</strong>-`am<strong>al</strong> : c'est le chef d'orchestre <strong>de</strong> <strong>la</strong> zâwiya, il estgénér<strong>al</strong>ement le meilleur musicien du groupe. Shâwish-az-zâwiya : génér<strong>al</strong>ement, il y a plusieurs shuwwâsh(plur. <strong>de</strong> Shâwish) dans <strong>la</strong> zâwiya, ils sont au service <strong>de</strong>s a<strong>de</strong>ptes etchargés <strong>de</strong> l'entretien <strong>de</strong> <strong>la</strong> zâwiya. As-saqqâ' : comme les shuwwâsh, il y a plusieurs saqqâ'ûn (plur.<strong>de</strong> saqqâ'); leurs rôle consiste à donner à boire aux a<strong>de</strong>ptes lors <strong>de</strong>leur rassemblement que ce soit dans <strong>la</strong> zâwiya ou ailleurs. Al-`<strong>al</strong>lâm : il y a plusieurs `<strong>al</strong>lâma (plur. <strong>de</strong> `<strong>al</strong>lâm), avec leurchef (bâsh `<strong>al</strong>lâm), ils portent les étendards dans les kharjât (sing.kharja : sortie) du hizb.


302/ <strong>Le</strong> wird (plur. awrâd), qui consiste en <strong>de</strong>s prières plus ou moins longues,ou <strong>de</strong>s litanies propres à l'ordre et qui sont associées parfois à <strong>de</strong>s chapitres<strong>de</strong> Coran, que le saint fondateur <strong>de</strong> l'ordre enseigne aux a<strong>de</strong>ptes. Chaqueordre ou même chaque branche a ses propres awrâd composés par sonfondateur.2.4 – La hadhra<strong>Le</strong> terme hadhra, désigne <strong>la</strong> présence, <strong>la</strong> réunion <strong>de</strong>s a<strong>de</strong>ptesappartenant à une tarîqa (<strong>confrérie</strong>), en présence <strong>de</strong> leur chef spirituel(Shaykh at-tarîqa), pour accomplir <strong>de</strong>s pratiques par lesquelles ilsparviennent à un état <strong>de</strong> grâce. Ces pratiques sont surtout <strong>de</strong>s prières, dudhikr et essentiellement <strong>de</strong>s chants religieux accompagnés <strong>de</strong> danse menantjusqu'à <strong>la</strong> transe. MALEK Chebel l'a défini comme suit :C'est le "regroupement dans une zaouia (sanctuaire) en vue d'une cérémonie<strong>de</strong> catharsis collective durant <strong>la</strong>quelle <strong>de</strong>s offran<strong>de</strong>s, <strong>de</strong>s danses extatiques,<strong>de</strong>s sacrifices et <strong>de</strong>s pratiques d'exorcisme ont lieu." (23)De nos jours, et avec <strong>la</strong> disparition <strong>de</strong> ces turuq (pluriel <strong>de</strong> tarîqa), lesens premier du terme hadhra commence à disparaître. En effet, il ne signifieplus une séance mystique ou une cérémonie liturgique. Il est utilisé plutôtdans un contexte profane, pour désigner à <strong>la</strong> fois le <strong>répertoire</strong> <strong>music<strong>al</strong></strong>, <strong>la</strong>(23) CHEBEL (M<strong>al</strong>ek), Dictionnaire <strong>de</strong>s symboles musulmans, Paris, Albin Michel, coll. spiritu<strong>al</strong>itévivantes, 1995, p.190.


31firqa (<strong>la</strong> formation <strong>music<strong>al</strong></strong>e qui en assure l'exécution), et le concert luimême,qui se tient pour animer les cérémonies <strong>de</strong> mariage ou autres. (24)3- La zâwiyaDans le vocabu<strong>la</strong>ire littéraire, <strong>la</strong> zâwiya signifie angle ou coin. Ildérive du verbe zawâ qui a <strong>de</strong>ux sens. On peut l'utiliser dans <strong>de</strong>ux contextesdifférents : il est à <strong>la</strong> fois un lieu <strong>de</strong> rassemblement et un lieu d'isolement.Dans le milieu mystique, le mot zâwiya a évolué. Au début, il étaitutilisé pour désigner l'endroit isolé dans <strong>la</strong> mosquée où les soufis pratiquaientleurs exercices mystiques. Plus tard, ces coins <strong>de</strong> <strong>la</strong> mosquée ne pouvaientplus contenir l'affluence croissante <strong>de</strong>s néophytes. Cette situation a amenéquelques-uns à choisir leurs propres domiciles, tandis que d'autres ont choisi<strong>de</strong>s endroits isolés à <strong>la</strong> campagne comme refuge, et parfois <strong>de</strong>s lieusfréquentés par les brigands qu'ils n'hésitent pas à combattre afin <strong>de</strong> sécuriser<strong>la</strong> zone.<strong>Le</strong> mot zâwiya a été donc à cette époque étroitement lié plutôt à <strong>la</strong>retraite qu'au rassemblement. <strong>Le</strong> terme zâwiya <strong>de</strong>meure utilisé <strong>de</strong> nos joursnotamment à Sfax où il signifie <strong>la</strong> petite école coranique, qu'on appelle aussiKuttâb. Mais on utilise encore ce terme pour désigner un lieu <strong>de</strong> rencontre<strong>de</strong>s a<strong>de</strong>ptes d'une <strong>confrérie</strong>.


32Ecole coranique (Kuttâb(Kuttâb) (25)Pour <strong>la</strong> société tunisienne, ainsi que pour les sociétés arabomusulmanes,<strong>la</strong> zâwiya est un lieu solennel, empruntant à <strong>la</strong> mosquée sonaspect sacré, mais qui le dépasse par sa souplesse et sa permission auxvisiteurs d'accé<strong>de</strong>r à <strong>de</strong>s pratiques profanes telles que chanter, danser, etaussi manger, dormir… Elle "<strong>de</strong>venait par son importance, non seulement lelieu spectacu<strong>la</strong>ire, mais aussi le lieu juridique, clinique, artistique et hôtelier<strong>de</strong> <strong>la</strong> région"(26).(24) Pour plus <strong>de</strong> détails, voir SIALA (Mourad), LA HADRA DE SFAX : rite soufi et musique <strong>de</strong>fête, thèse présentée en vue du gra<strong>de</strong> <strong>de</strong> docteur <strong>de</strong> l'université <strong>de</strong> Paris X, Paris, Université <strong>de</strong> ParisX, UMR 9957 Laboratoire d'ethnomusicologie, 1994, pp 10 - 16, 50.(25) Ecole coranique rassemb<strong>la</strong>nt <strong>de</strong> jeunes garçons, accroupis sur <strong>de</strong>s nattes autour <strong>de</strong> leur med<strong>de</strong>b(le shaykh instituteur), une carte post<strong>al</strong>e datant <strong>de</strong> <strong>la</strong> fin du 19 ème siècle, Massé-Muzi (Nicole),Mémoire en images SFAX, éd. A<strong>la</strong>n Sutton, 2002, Saint-Cyr-sur-Loire, p.23.(26) CHELBI (Mustapha) Musique et société en Tunisie, Tunis, éd. S<strong>al</strong>âmbô, 1985, p.71


333.1- Son rôle soci<strong>al</strong>En tant qu’institution <strong>religieuse</strong> et soci<strong>al</strong>e, <strong>la</strong> zâwiya a joué commenous l'avons sign<strong>al</strong>é plus haut, <strong>de</strong>ux rôles différents et même contradictoires :Un rôle positif <strong>de</strong> regroupement soci<strong>al</strong>, d'association et d'entrai<strong>de</strong>… ;Et un rôle négatif en cultivant <strong>de</strong>s idées <strong>de</strong> soumission et <strong>de</strong> fat<strong>al</strong>isme.<strong>Le</strong> rôle le plus important joué par <strong>la</strong> zâwiya dans <strong>la</strong> société musulmaneen génér<strong>al</strong> et tunisienne en particulier, fut <strong>la</strong> lutte contre l'an<strong>al</strong>phabétisme. Eneffet, ces zawâyâ qui se sont répandues partout, et surtout dans les milieuxruraux, ont donné <strong>la</strong> chance aux jeunes et aux moins jeunes d'apprendre à lireet à écrire, d'étudier <strong>la</strong> théologie musulmane, le fiqh (les sciences <strong>de</strong> <strong>la</strong>religion), <strong>la</strong> littérature, <strong>la</strong> philosophie... Elles donnaient l'opportunité auxétudiants qui venaient <strong>de</strong> loin, d'être logés et nourris, ce qui a attiré etencouragé un grand nombre <strong>de</strong> jeunes à s'intéresser aux étu<strong>de</strong>s.La zâwiya ne logeait pas seulement les étudiants, mais elle était aussi l'hôtelpour les passagers et les voyageurs. On y offrait même <strong>de</strong>s repas pour lespauvres <strong>de</strong> <strong>la</strong> région.<strong>Le</strong>s jeunes ont aussi trouvé dans <strong>la</strong> zâwiya le lieu <strong>de</strong> rencontre où ilspouvaient discuter, écouter et pratiquer <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique. Snoussi confirme que"les zawâyâ étaient parvenus, dès le treizième siècle, à attirer et à intégrerdans leurs rangs <strong>la</strong> quasi-tot<strong>al</strong>ité <strong>de</strong> <strong>la</strong> jeunesse dans les divers pays du


34Maghreb jouant ainsi le même rôle que celui <strong>de</strong>s associations sportives <strong>de</strong>nos jours" (27).La zâwiya est parvenue à apaiser <strong>la</strong> tension entre les tribus, et à mettrefin à leurs interminables guerres ; ces gens qui ne se rencontraient auparavantque sur les champs <strong>de</strong> bataille pour s’entretuer, se réunissent dans <strong>la</strong> zâwiyapour <strong>de</strong>s séances <strong>de</strong> dhikr et hadhra en toute paix.Néanmoins, <strong>la</strong> zâwiya ne va pas <strong>de</strong>meurer aussi bénéfique pour <strong>la</strong>société, et va se voir éloignée <strong>de</strong>s principes pour lesquels elle fut créée.Plusieurs facteurs ont contribué à sa dégradation, au fait qu’elle a tourné enchar<strong>la</strong>tanisme et à <strong>de</strong>s pratiques qui n’ont aucun rapport avec l’Is<strong>la</strong>m, telleque <strong>la</strong> sacr<strong>al</strong>isation d’un arbre ou d’une pierre.Cette déviation est due dans <strong>la</strong> plupart <strong>de</strong>s cas, à l’ignorance <strong>de</strong>s chefsreligieux non qu<strong>al</strong>ifiés, qui ont hérité le poste <strong>de</strong> shaykh ou <strong>de</strong> muqaddim <strong>de</strong>leurs ascendants. Ils ont gagné <strong>la</strong> confiance d'un peuple crédule et fat<strong>al</strong>iste,ce qui donna <strong>la</strong> possibilité à certains d'entre eux d'abuser <strong>de</strong> cetteconfiance."N'ayant aucune formation théologique ni connaissance dans ledomaine <strong>de</strong> <strong>la</strong> mystique musulmane, ils n'avaient rien à apporter à leursa<strong>de</strong>ptes sinon un encouragement dans <strong>la</strong> voie <strong>de</strong> l'ignorance et duchar<strong>la</strong>tanisme ainsi que dans <strong>la</strong> croyance aux pouvoirs miraculeux <strong>de</strong>s saints(27) SNOUSSI (Mannoubi <strong>al</strong>-), Initiation à <strong>la</strong> musique tunisienne, textes polycopiés, vol 1, p. 113.


35et <strong>de</strong>s marabouts"(28). Elle est due aussi à l'encouragement <strong>de</strong>s colons pouréloigner <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion <strong>de</strong>s questions politiques.3.2- son rôle politique<strong>Le</strong>s <strong>confrérie</strong>s et leurs zawâyâ étaient en quelque sorte <strong>de</strong>s partis quiessayaient <strong>de</strong> faire passer leurs opinions et leurs positions vis-à-vis <strong>de</strong>squestions politiques en se basant sur tout ce qui est religieux. C'était <strong>la</strong> seulefaçon pour avoir une certaine influence sur <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion qui était en gran<strong>de</strong>majorité immature, et qui donnait gran<strong>de</strong> importance à tout ce qui se rapporteà <strong>la</strong> religion. En effet, chaque <strong>confrérie</strong> ou chaque zâwiya avait son proprepoint <strong>de</strong> vue et sa propre conception et ce, pour tout ce qui touche à <strong>la</strong>popu<strong>la</strong>tion, que ce soit dans le domaine soci<strong>al</strong>, culturel ou politique. Chaque<strong>confrérie</strong> ou chaque zâwiya essayait donc <strong>de</strong> manipuler <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion et <strong>de</strong>l'avoir dans son camp. Par conséquent, on distinguait <strong>de</strong>ux pouvoirs : celuidu gouvernement, mais qui n'est resté néanmoins que formel, m<strong>al</strong>gré sondispositif militaire; et le pouvoir réel <strong>de</strong> <strong>la</strong> zâwiya qui dominait <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tionet qui faisait passer ses positions envers les questions politiques en se basantsur <strong>la</strong> religion, le point faible <strong>de</strong> tous les membres <strong>de</strong> <strong>la</strong> société. Ce pouvoirétait beaucoup plus important que celui du gouvernement, car il dépassaitmême les frontières du pays pour manipuler les partisans qui sont dans lespays voisins et qui sont toujours en contact avec <strong>la</strong> zâwiya. "La <strong>confrérie</strong>peut exercer à tout le moins une certaine influence politique, aussi bien(28) SIALA (Mourad), op.cit p.88


36d'opposition que d'appui au pouvoir en p<strong>la</strong>ce, au gré <strong>de</strong>s situations […].Lorsqu'il s'agit <strong>de</strong> résistance à <strong>de</strong>s envahisseurs et maîtres étrangers, ce rôlepolitique amène un caractère militaire et les <strong>confrérie</strong>s crist<strong>al</strong>lisent unerésistance <strong>religieuse</strong> en même temps que nation<strong>al</strong>e" (29).3.3 - son rôle dans <strong>la</strong> sauvegar<strong>de</strong> du patrimoine <strong>music<strong>al</strong></strong>La zâwiya n'a pas influencé seulement <strong>la</strong> vie soci<strong>al</strong>e et politique enTunisie, mais aussi, elle a joué un rôle très important dans le domaineculturel et surtout <strong>music<strong>al</strong></strong> comme nous l'affirme Mahmoud GUETTAT pourqui le développement <strong>de</strong>s <strong>confrérie</strong>s "n'a pas eu seulement <strong>de</strong>s conséquencessur <strong>la</strong> vie politique et soci<strong>al</strong>e <strong>de</strong> <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion, il a ég<strong>al</strong>ement contribué à <strong>la</strong>sauvegar<strong>de</strong>, voire à l'enrichissement <strong>de</strong> <strong>la</strong> tradition <strong>music<strong>al</strong></strong>e" (30). En effet,<strong>la</strong> disgrâce soci<strong>al</strong>e envers <strong>la</strong> musique et les musiciens suite à l'envahissement<strong>de</strong> l'espace <strong>music<strong>al</strong></strong> par les chansons juives, surtout à <strong>la</strong> fin du 19 ème siècle etau début du siècle <strong>de</strong>rnier, qui se distinguaient par <strong>de</strong>s paroles libertines etvulgaires, a renforcé <strong>la</strong> position <strong>de</strong> <strong>la</strong> zâwiya dans le domaine <strong>music<strong>al</strong></strong>. Elleest <strong>al</strong>ors <strong>de</strong>venue le centre d'épanouissement pour l'art <strong>music<strong>al</strong></strong> puisqu'elle est<strong>de</strong>venue le seul endroit où on pouvait pratiquer ou écouter <strong>de</strong> <strong>la</strong> musiquesans risquer <strong>de</strong> perdre le respect <strong>de</strong> <strong>la</strong> société. Ainsi, <strong>la</strong> zâwiya a joué le rôledu <strong>de</strong> musique car c'est là où les enfants pouvaient avoir une(29) POPOVIC (A) et VEINSTEIN (G), les ordres mystiques dans l'Is<strong>la</strong>m : Cheminement etsituation actuelle, Paris, éd. De l'école <strong>de</strong>s hautes étu<strong>de</strong>s en sciences soci<strong>al</strong>es, p.305.(30) GUETTAT (Mahmoud), La Musique c<strong>la</strong>ssique du Maghreb, Paris, <strong>la</strong> bibliothèque arabeSindbad, 1980, p 178.


37formation <strong>music<strong>al</strong></strong>e en assistant aux séances <strong>de</strong>s chants confrériques. Sachantsurtout qu'en ces temps là, cette formation se faisait essentiellement parimprégnation, par re<strong>la</strong>tion directe entre le shaykh et son disciple, c'est <strong>la</strong> qui est " une métho<strong>de</strong> d'apprentissage par l'écoute,qui permet à l'élève d'acquérir une connaissance glob<strong>al</strong>e <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique enmême temps que d'assimiler le processus somatique traditionnel <strong>de</strong>formation <strong>de</strong>s sons"(31). C'est ainsi que les " <strong>confrérie</strong>s <strong>religieuse</strong>s ont servi à<strong>la</strong> fois <strong>de</strong> sauvegar<strong>de</strong>, <strong>de</strong> centres d'étu<strong>de</strong>s et <strong>de</strong> sources <strong>de</strong> production pour<strong>la</strong> tradition <strong>music<strong>al</strong></strong>e"(32). En effet, <strong>la</strong> majorité <strong>de</strong>s grands chanteurs etinstrumentistes qui ont marqué le mouvement et le développement <strong>music<strong>al</strong></strong>en Tunisie durant le siècle <strong>de</strong>rnier, ont fait leurs débuts dans <strong>la</strong> zâwiya où ilsont été formé. "Gardiennes <strong>de</strong> <strong>la</strong> tradition, <strong>la</strong> plupart <strong>de</strong> ces zâwiya seprésentent comme un centre d'épanouissement pour l'art <strong>music<strong>al</strong></strong>, à un pointtel que leurs <strong>répertoire</strong>s respectifs sont <strong>de</strong>venus <strong>la</strong> norme à partir <strong>de</strong> <strong>la</strong>quellese juge <strong>la</strong> compétence <strong>de</strong>s musiciens; <strong>la</strong> majorité d'entre eux leur doiventd'ailleurs leur formation professionnelle"(33). C'est le cas <strong>de</strong> plusieurscompositeurs, chanteurs ou instrumentistes qui ont marqué <strong>la</strong> vie <strong>music<strong>al</strong></strong>e enTunisie, et que nous jugeons utile <strong>de</strong> parler <strong>de</strong> certains d'entre eux : Ahmad<strong>al</strong>-WÂFÎ et Khmayyess at-TARNÂN <strong>de</strong> Tunis, et, Muhammad BUDAYYA <strong>de</strong>Sfax.(31) EDITH (Gerson-Kiwi), <strong>Le</strong> musicien dans <strong>la</strong> société d'orient et d'occi<strong>de</strong>nt : Culture, vol. 1, n o 1,Paris-Unesco, 1973, p.196.(32) GUETTAT (Mahmoud), <strong>la</strong> musique c<strong>la</strong>ssique du Maghreb, op.cit., p.179.


383.3.1- <strong>Le</strong> shaykh Ahmad <strong>al</strong>-WÂFÎ (1850-1921)Il est né à Tunis, d'une famille d'origine and<strong>al</strong>ouse. Dès son jeune âge,il accompagnait son père, qui était un <strong>de</strong>s plus célèbres munshidîn (sing.munshid : hymno<strong>de</strong>) <strong>de</strong>s madâ'ih an-nabawiyya (chanteurs <strong>de</strong> louangesadressées au Prophète), à <strong>la</strong> mosquée az-zeitûna où il a appris <strong>al</strong>-inshâd(l'interprétation <strong>de</strong>s hymnes). Faisant ses étu<strong>de</strong>s au kuttâb (école coranique),où il a appris le tajwîd (34), puis à jâma`(mosquée) az-zeitûna où il a eu sondiplôme en littérature et en sciences is<strong>la</strong>miques; le shaykh <strong>al</strong>-wâfî était connupar son amour à <strong>la</strong> lecture, notamment <strong>de</strong>s livres qui par<strong>la</strong>ient <strong>de</strong> <strong>la</strong> musiquetels que "kitâb <strong>al</strong>-aghânî <strong>al</strong>-kabîr" (le grand livre <strong>de</strong>s chants) d'Abû-l-Faraj<strong>al</strong>-AÇFAHÂNÎ, ou "kitâb <strong>al</strong>-mûsîqâ <strong>al</strong>-kabîr" (grand traité <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique)d'<strong>al</strong>-FARÂBÎ …Du coté <strong>de</strong> <strong>la</strong> pratique <strong>music<strong>al</strong></strong>e, Ahmad <strong>al</strong>-Wâfî avait toutes lesconditions favorables pour <strong>de</strong>venir un bon musicien : il accompagnait sonpère, comme nous l'avons dit plus haut, à <strong>la</strong> mosquée az-zeitûna pour assisteraux séances <strong>de</strong> chant soufi, il assistait aussi aux séances <strong>de</strong> chant <strong>de</strong> presquetoutes les turuq qui avaient <strong>de</strong>s zawâyâ à Tunis (comme <strong>la</strong> Qâdriyya, <strong>la</strong>`Îssâwiyya, <strong>la</strong> Sûlâmiyya…) où il a appris leurs <strong>répertoire</strong>s.(33) GUETTAT (Mahmoud), La musique arabo-and<strong>al</strong>ouse L'empreinte du Maghreb, Paris, éditionsEl-Ouns, 2000, p.223.(34) Ps<strong>al</strong>modie coranique. Voir le tajwîd, p. 82.


39<strong>Le</strong> shaykh Ahmad <strong>al</strong>-WÂFÎWÂFÎ (35)A son époque, le phonographe a déjà pris sa p<strong>la</strong>ce dans les maisonsbourgeoises et presque tous les cafés, ce qui a permis au shaykh Ahmad <strong>al</strong>-Wâfi d'écouter et d'apprendre les adwâr (sing. dawr) (36) et les(35) Illustration tirée <strong>de</strong> "at-turâth <strong>al</strong>-mûsîqî at-tûnisî" (patrimoine <strong>music<strong>al</strong></strong> tunisien), 5 ème fascicule :Ahmad <strong>al</strong>-WÂFÎ, Tunis, ministère tunisien <strong>de</strong>s affaires culturelles : direction <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique et <strong>de</strong>sarts popu<strong>la</strong>ires.(36) Forme <strong>music<strong>al</strong></strong>e spécifiquement égyptienne développée à <strong>la</strong> fin du XIX ème siècle, basée sur unpoème di<strong>al</strong>ect<strong>al</strong> en <strong>de</strong>ux parties : une partie composée et une <strong>de</strong>uxième qui sert <strong>de</strong> support pour lechanteur pour faire <strong>de</strong>s improvisations.


40muwashshahât (sing. muwashshah) (37) <strong>de</strong>s grands maîtres <strong>de</strong> <strong>la</strong> musiquearabe comme `ABDU-L-HAMMÛLÎ (1841-1901), `ABD-EL-HAY Helmi(1880-1912), Sayyed eç-ÇAFTÎ (né en 1867) et Youssef el-MANYALÂWÎ(1850-1911)… . Aussi, sa rési<strong>de</strong>nce dans le quartier hwânît `âchour, qui n'estpas loin du quartier juif, lui a donnée <strong>la</strong> possibilité <strong>de</strong> côtoyer les musiciensjuifs qui lui ont appris leur <strong>répertoire</strong> popu<strong>la</strong>ire basé surtout sur le rbâb (38),<strong>la</strong> jrâna (violon) le mezwid et <strong>la</strong> darbouka, qui est très riche en tubû` (sing.tba` : mo<strong>de</strong>) et awzân (sing. wazn : formule rythmique).Après avoir eu cette formation très diversifiée et qui va marquer plustard ses créations <strong>music<strong>al</strong></strong>es, <strong>al</strong>-Wâfî est <strong>de</strong>venu shaykh <strong>al</strong>-hadhra (chef <strong>de</strong>l'ensemble <strong>music<strong>al</strong></strong>) <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-`Îssâwiyya, et membre <strong>de</strong> plusieurstroupes <strong>music<strong>al</strong></strong>es <strong>religieuse</strong>s et profanes. Il a beaucoup aidé le baronRadolph d'ERLANGER dans ses recherches sur <strong>la</strong> musique arabe, on trouveson empreinte dans l'œuvre du baron surtout dans <strong>la</strong> partie qui concerne <strong>la</strong>transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e <strong>de</strong>s exemples musicaux et celle <strong>de</strong>s cent onzeformules rythmiques (awzân).(37) Voir "le muwashshah" au troisième chapitre <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>de</strong>uxième partie <strong>de</strong> ce travail, p.321.(38) L'un <strong>de</strong>s premiers instruments mélodiques utilisés dans <strong>la</strong> chanson tunisienne. C'est uninstrument à cor<strong>de</strong>s frottées. Dépourvu <strong>de</strong> manche, il se compose d'une caisse <strong>de</strong> résonance en bois<strong>de</strong> forme ovoï<strong>de</strong> qui s'<strong>al</strong>longe jusqu'au chevillier. Sa table d'harmonie se compose <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux partiesdistinctes : une partie supérieure qui constitue <strong>la</strong> touche, elle est génér<strong>al</strong>ement recouverte d'unecouche fine <strong>de</strong> cuivre et ornée par une rosace (parfois <strong>de</strong>ux ou trois); et une partie inférieurerecouverte <strong>de</strong> peau <strong>de</strong> chèvre très tendue qui donne à l'instrument un timbre assez spéci<strong>al</strong>. <strong>Le</strong> rbâb a<strong>de</strong>ux cor<strong>de</strong>s accordées ré2 – sol1 et attaquées à l'ai<strong>de</strong> d'un archet qui a <strong>la</strong> forme d'un arc. Il se joueposé en diagon<strong>al</strong>e sur le genou droit.


413.3.2 - <strong>Le</strong> shaykh Khmayyess TARNÂN (1894-1964)D'origine and<strong>al</strong>ouse, Il est né à Bizerte (39) dans une famille connuepar son amour pour <strong>la</strong> musique (<strong>religieuse</strong> ou profane) : son grand père étaitreconnu comme un grand maître <strong>de</strong> mâlûf, son oncle Muhammad étaitShaykh <strong>al</strong>-`am<strong>al</strong> (40) <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa `Issâwiyya, et son <strong>de</strong>uxième oncle Othmânétait un munshid dans différentes turuq (sing. tarîqa) çûfiyya.<strong>Le</strong> shaykh TARNÂN a Fait ses étu<strong>de</strong>s au kuttâb (école coranique), oùil s'est distingué par sa belle voix dans le tartîl (ps<strong>al</strong>modie du Coran) etsurtout dans l'interprétation <strong>de</strong> <strong>la</strong> burda et <strong>de</strong> <strong>la</strong> hamziyya (41); puis dans uneécole primaire où il profitait <strong>de</strong> <strong>la</strong> récréation pour jouer au fh<strong>al</strong>l une flûteoblique en mét<strong>al</strong>, qu'il gardait toujours sur lui (42).Passionné <strong>de</strong> musique, l'enfant TARNÂN accompagnait son père pourassister aux séances <strong>de</strong> dhikr <strong>de</strong>s différentes turuq comme <strong>la</strong> Mûldiyya, <strong>la</strong>Qâdriyya et <strong>la</strong> Sûlâmiyya où il a appris leurs <strong>répertoire</strong>s très variés. I<strong>la</strong>ssistait aussi aux concerts que donnaient les firaq (sing. firqa : troupe<strong>music<strong>al</strong></strong>e) venant <strong>de</strong> Tunis dans les cafés <strong>de</strong> Bizerte comme <strong>la</strong> firqa <strong>de</strong>`Âysha as-saghîra, qui interprétait le mâlûf et les chansons popu<strong>la</strong>ires(39) Ville située au Nord Est <strong>de</strong> <strong>la</strong> Tunisie.(40) Chef <strong>de</strong> l'exécution <strong>music<strong>al</strong></strong>e. Il dirige les musiciens lors <strong>de</strong>s séances <strong>de</strong> chant.(41) Deux poèmes à <strong>la</strong> louange du Prophète Muhammad, composés par le shaykh Sharf ad-dînMuhammad ben Saïd Hamâd <strong>al</strong>-BUÇAYRÎ (mort en 1205), poète soufi <strong>de</strong>venu très célèbre par ses<strong>de</strong>ux poèmes.(42) MEHDI (Sa<strong>la</strong>h <strong>al</strong>-), Ash-Shaykh Khmayess TARNÂN, tunis, éd. <strong>al</strong>-ma`had ar-rashîdî li-lmûsîqâat-tûnisiyya, 1981, 175 p.


42connues sous le nom <strong>de</strong> zendânî (ou zendâlî) (43), ou <strong>la</strong> firqa qui chantait le<strong>répertoire</strong> orient<strong>al</strong>, composée d'émigrés juifs venant <strong>de</strong> <strong>la</strong> Libye lors <strong>de</strong> <strong>la</strong>colonisation It<strong>al</strong>ienne en 1911 (44).<strong>Le</strong> shaykhKhmayyess TARNÂN (45)(43) <strong>Le</strong> terme zandânî vient du mot turc zendâna qui veut dire prison. Il est utilisé pour désigner leschansons popu<strong>la</strong>ires que chantaient les prisonniers dans leurs cellules.(44) MEHDI (Sa<strong>la</strong>h <strong>al</strong>-) ash-shaykh Khmayyess at-TARNÂN, Tunis, <strong>al</strong>-ma`had ar-Rashîdî lilmûsîqâat-tûnisiyya, 1981, p.16.(45) Illustration tirée <strong>de</strong> l'ouvrage <strong>de</strong> <strong>al</strong>-MAHDI (Sa<strong>la</strong>h), op.cit., p.8.


43En assistant à ces concerts <strong>de</strong> musique <strong>religieuse</strong> et profane, le shaykha pu avoir une formation <strong>music<strong>al</strong></strong>e assez soli<strong>de</strong>. Il a appris ainsi les chansons,les adwâr et les muwashshahât.. Cette formation fera <strong>de</strong> lui un auteurcompositeur-interprèteet célèbre shaykh <strong>de</strong> mâlûf. Il est aujourd'huiconsidéré comme le meilleur musicien du XX ème siècle en Tunisie.<strong>Le</strong> jawq du shaykh Khmayyess TARNÂN (46)3.3.3 - <strong>Le</strong> shaykh Muhammad BÛDAYYA (1881-1974)<strong>Le</strong> shaykh Muhammad ben (fils <strong>de</strong>) Hassan ben Muhammad BÛDAYYA estné à Sfax le 16 mai 1881 dans une famille mo<strong>de</strong>ste. Il a fait ses étu<strong>de</strong>s dansle Kuttâb <strong>de</strong> <strong>la</strong> zâwiyya <strong>de</strong> sîdi `Ali <strong>al</strong>-KARRÂY où il a appris le Coran.Orphelin <strong>de</strong> père dès l'âge <strong>de</strong> quatre ans, et <strong>de</strong> mère dès l'âge <strong>de</strong> huit ans, iln'a pas pu se rendre à Tunis pour terminer ses étu<strong>de</strong>s à jâma` (mosquée) azzeitûna.Il exerça <strong>al</strong>ors le métier <strong>de</strong> menuisier qu'il a appris chez le menuisier(46) Illustration tirée <strong>de</strong> l'ouvrage <strong>de</strong> SNOUSSI (Mannoubi), Initiation à <strong>la</strong> musique Tunisienne,volume1 Musique C<strong>la</strong>ssique, Tunis, Ministère <strong>de</strong> <strong>la</strong> culture, <strong>de</strong> <strong>la</strong> jeunesse et <strong>de</strong> loisirs, Centre <strong>de</strong>sMusiques Arabes Méditerranéennes Ennejma Ezzahra, Simpact, 2004, 154p.


44Muhammad <strong>al</strong>-`EUSH. Sa tante qui l'a pris en charge l'a encouragé à adhérerdans <strong>la</strong> tarîqa `Awâmriyya à <strong>la</strong> zâwiya <strong>de</strong> sîdî es-Septî où il a appris le<strong>répertoire</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> hadhra `awâmriyya et à jouer <strong>la</strong> zukra. Faisant connaissance<strong>de</strong> quelques musiciens, notamment ses voisins `Ali <strong>al</strong>-GHÛMA, joueur <strong>de</strong>fh<strong>al</strong>l qui lui a appris à jouer <strong>de</strong> cet instrument; et Muhammad FRÎKHAjoueur <strong>de</strong> târ qui lui a appris le mâlûf. <strong>Le</strong> shaykh BÛDAYYA a pu avoir unebonne formation en musique profane ce qui lui a permis <strong>de</strong> composerplusieurs ashghâl (sing. shghul) (47) et <strong>de</strong> jouer sur différents instruments(kurnîta (48), harmonium et zukra (49) avec presque tout les jawq(s) (50) <strong>de</strong>Sfax. Il a joué le mâlûf sur l’harmonium à l'époque où cet instrument aconnut un grand succès et a eu une p<strong>la</strong>ce dans l'orchestre c<strong>la</strong>ssique (premièremoitié du vingtième siècle).Devenu célèbre, le shaykh BÛDAYYA a fondé son propre jawq qui aeu beaucoup <strong>de</strong> succès auprès <strong>de</strong>s familles sfaxiennes. Ce jawq était lepremier à jouer un <strong>répertoire</strong> religieux dans une zâwiya. En effet, le shaykhBÛDAYYA apprenait tout le <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa KARRÂRIYYA, sujet <strong>de</strong>notre recherche, et en a interprété quelques morceaux à <strong>la</strong> zukra et àl’harmonium, chose qui ne s'est jamais ré<strong>al</strong>isée auparavant.(47) Voir "le shghul" au troisième chapitre <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>de</strong>uxième partie <strong>de</strong> ce travail, p.173.(48) La kurnîta: sorte <strong>de</strong> c<strong>la</strong>rinette, introduite en Tunisie par les turques. Cet instrument a joué unrôle important au sein <strong>de</strong>s fanfares et surtout au sein <strong>de</strong> l'orchestre rattaché à l'armée du Beyottoman. Voir SAKLI (Mourad), "<strong>la</strong> chanson tunisienne, an<strong>al</strong>yse technique et approchesociologique", Thèse <strong>de</strong> Doctorat, soutenue à Paris IV, <strong>la</strong> Sorbonne, 1994, p.187.(49) Nous reviendrons à ces instruments dans le quatrième chapitre <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>de</strong>uxième partie.(50) <strong>Le</strong> terme jawq est utilisé pour désigner l'orchestre <strong>music<strong>al</strong></strong>. Apparu dès <strong>la</strong> fin du 19 ème siècle, ilse compose <strong>de</strong> trois à huit instrumentistes. Il englobe génér<strong>al</strong>ement: un pianoforte ou un harmonium,un violon, un `ûd tûnsî, une darbûka et un târ.


45<strong>Le</strong> shaykh BÛDAYYA a même enregistré pour <strong>la</strong> radio <strong>de</strong> Sfax audébut <strong>de</strong>s années soixante le <strong>répertoire</strong> du mâlûf à l’harmonium, quelquessuites du <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa KARRÂRIYYA à l’harmonium et à <strong>la</strong> zukra, etaussi le <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> hadhra à <strong>la</strong> zukra. Il décéda à Sfax le 7 juin 1974.Portraitdu shaykh MuhammadBÛDAIYYA<strong>de</strong> <strong>la</strong> main <strong>de</strong> Mouna JMAL SIALA (51)(51) Cette illustration nous a été aimablement fournie par Mr. SIALA Mourad, janvier 2005.


Deuxième chapitreLa <strong>confrérie</strong> <strong>al</strong>-KARRÂRIYYA


471- Biographie d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂYNous ne prétendons pas donner une biographie complète du shaykhAbû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY, mais nous tenons à préciser qu'aucun <strong>de</strong>sdocuments que nous avons pu recueillir jusqu'à présent, n'a donnésuffisamment d'informations sur cet homme. C'est pourquoi, nous noussommes basés essentiellement, dans cette partie, sur le recueil d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY qui constitue notre princip<strong>al</strong>e source d'informations, etsur le livre "nuzhat <strong>al</strong>-andhâr" <strong>de</strong> l'éminent historien Mahmûd MAGDÎSH(49).<strong>Le</strong> nom d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY, est en ré<strong>al</strong>ité `Ali ben (fils <strong>de</strong>)Abî-Bakr ben Ahmad ben Muhammad ben Amor ben `Ali <strong>al</strong>-KARRÂY. C'estainsi qu'il a déterminé lui-même sa <strong>de</strong>scendance à <strong>la</strong> fin <strong>de</strong> l'oeuvre Riâdhaç-çâlihîn (Jardin <strong>de</strong>s pieux) d'<strong>al</strong>-ANÇÂRÎ (50) qu'il a copié en 1648.Faisant l'éloge <strong>de</strong> son maître, le shaykh Muhammad MARRÂKSHÎnous informe que le shaykh <strong>al</strong>-KARRÂY est né le vendredi 28 Ramadan 1026<strong>de</strong> l'hégire correspondant à l'année 1617, à Sfax où il a vécu:Translittération du texte arabe :Izdâda yawma-l-jumuà-l-mashkûr`Ishrîna ma`a thamâniatin madhkûrFî shahri çawmin fardhuhu mashhûr(49) Ibid., pp. 208-209(50) ANÇÂRI (Zakariyya <strong>al</strong>-), "Riâdh aç-çâlihîn wa tuhfat <strong>al</strong>-muttaqîn", (Jardin <strong>de</strong>s pieux)manuscrit à <strong>la</strong> Bibliothèque Nation<strong>al</strong>e <strong>de</strong> Tunis, copié par le shaykh KARRÂY en 1648.


48Bi çawmihi tahyâ <strong>la</strong>nâ-l-jarâymuFî sittin ay t<strong>al</strong>î `ishrînThumma <strong>al</strong>fin t<strong>al</strong>ûhâ tabaiyyunanMin hijrati-l-Hâdî-l-wafî nabiyyunâRasûlunâ-l-mukhtâru lâ tukhâçim (51).TraductionIl naquit un vendredi, jour saint,<strong>Le</strong> vingt huit du mois sacré <strong>de</strong> Ramadan,Mois <strong>de</strong> jeûne, <strong>de</strong> prière et <strong>de</strong> piété,L'an vingt six après mille ans <strong>de</strong> l'hégire,De notre Prophète adoré.Un peu plus loin, dans le même muwashshah, le shaykh MARRÂKSHÎ nousdonne encore une fois <strong>la</strong> date <strong>de</strong> naissance du shaykh <strong>al</strong>-KARRÂY. Il dit :Translittération du texte arabe :Fa mîlâduhu fî shahri ramadhâna thâbitu,Bi `ishrîna yawmin ma`a thamânin fawâdhil,Musammâ bi yawmi-l-jumu`ati fîhi sâ`ata,Tujâbu du`â-l-birri fîhâ-s-sâ'il,Fa fî `âmin thumma kâfin muhaqqaq,Wa ba`dahâ <strong>al</strong>fun madhat bi rawâhil (52).(51) KARRÂY (Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-), "Dîwân Abi-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY", (<strong>Le</strong> recueil d'Abû <strong>al</strong>-Hassan<strong>al</strong>-KARRÂY), manuscrit sans date et sans signature, Bibliothèque privée du shaykh MabroukBELHÂJ, ancien a<strong>de</strong>pte <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-KARRÂRIYYA, p.160.


49TraductionPoint doute sur sa naissance,C'était un mois <strong>de</strong> Ramadan, mois sacré,Vingt jours s'étaient déjà écoulés,En plus <strong>de</strong> huit jours bénis,C'était un jour <strong>de</strong> vendredi,Où il est promis que toute prière est exaucée.<strong>Le</strong> shaykh <strong>al</strong>-KARRÂY a étudié <strong>la</strong> théologie musulmane et le Hadîth(plur. Ahâdîth : paroles du Prophète Muhammad) auprès <strong>de</strong> son père AbûBakr ainsi que le Shaykh `Abida Muntaçar ben Muhammad <strong>al</strong>-LÛMÎ(m.1646) mufti <strong>de</strong> Sfax. Ensuite, poursuivant ses étu<strong>de</strong>s à Tunis, il a été ledisciple <strong>de</strong> `Ali NA`ÂS et du Shaykh BETRÛNI qui lui a enseigné le Fiqh (lessciences <strong>de</strong> <strong>la</strong> religion) (53); puis du Shaykh `Ali LÛHÎSHÎ à Kairouan qui luia enseigné le Soufisme en 1645 (54).Toujours avi<strong>de</strong> <strong>de</strong> savoir, il s'est dirigé vers l'Egypte où ses étu<strong>de</strong>s luiont v<strong>al</strong>u l'obtention du diplôme d'enseignant. De retour à son pays, le Shaykha maintenu <strong>de</strong>s contacts réguliers avec le Moyen-orient, notamment avec lesavant `Abd-<strong>al</strong>-Wahhâb <strong>al</strong>-AZHARÎ à qui il envoyait ses écrits et sespoèmes pour qu'ils soient diffusés et critiqués (55).(52) KARRÂY (Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-), op.cit, feuille n o 162.(53) MAKHLOUF (Muhammad), "Shajarat <strong>al</strong>-nûr <strong>al</strong>-zakiyya", le Caire, Dâr <strong>al</strong>-ma`ârif, 1930,tome I, p. 310.(54) MAGDÎSH, op.cit.., tome II, p.159.(55) ABDESSALAM (Ahmed), <strong>Le</strong>s historiens tunisiens <strong>de</strong>s 17 ème 18 ème et 19 ème siècles, essaid'histoire culturelle, Paris 1973, Lib. Cklineksiech, p. 73.


50A <strong>la</strong> fin <strong>de</strong> ses étu<strong>de</strong>s, Abû-l-Hassan a fondé une zâwiya pour yenseigner les sciences <strong>de</strong> <strong>la</strong> religion. Cette zâwiya, a non seulement joué unrôle prépondérant dans <strong>la</strong> diffusion <strong>de</strong> <strong>la</strong> culture, mais a contribué à <strong>la</strong>formation <strong>de</strong> savants aujourd'hui célèbres. Nous citons parmi ces <strong>de</strong>rniers :- <strong>Le</strong> shaykh `Ali <strong>al</strong>-NÛRÎ, (1648-1708), le fondateur <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa an-Nûriyya. Devenu l'un <strong>de</strong>s plus grands savants en littérature et en théologie <strong>de</strong>son époque. Il est l'auteur <strong>de</strong> plusieurs oeuvres touchant surtout à <strong>la</strong> théologiemusulmane, et l'un <strong>de</strong>s rares hommes qui ont eu une gran<strong>de</strong> influence sur <strong>la</strong>popu<strong>la</strong>tion sfaxienne.- <strong>Le</strong> Shaykh Muhammad <strong>al</strong>-HAKMÛNÎ qui fût nommé Qâdhî (magistrat),puis Muftî à Tunis et par <strong>la</strong> suite au Caire où il est décédé en 1725.- <strong>Le</strong> Shaykh `Abd <strong>al</strong>-`Azîz <strong>al</strong>-FURÂTÎ, <strong>de</strong>venu Imâm puis Muftî, mort en1718.- <strong>Le</strong> Shaykh Muhammad MARRÂKSHÎ mort à Sfax en 1735, fils adoptifd'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY, chargé <strong>de</strong> <strong>la</strong> direction <strong>de</strong> <strong>la</strong> zâwiya, il est<strong>de</strong>venu lui-même chef <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-KARRÂRIYYA après <strong>la</strong> mort du ShaykhAbû-l-Hassan, une fonction qu'il transmettra à ses <strong>de</strong>scendants jusqu’à nosjours (56).1.1 <strong>Le</strong> shaykh KARRÂY : Artiste et poète<strong>Le</strong> Shaykh <strong>al</strong>-KARRÂY, est d'abord un homme <strong>de</strong> religion, mais savéritable célébrité provient surtout <strong>de</strong> ses idées favorables à <strong>la</strong> création


51artistique, notamment dans le domaine <strong>music<strong>al</strong></strong>. A l'époque, il s'est opposé àtous ceux qui interdisaient les chants dans les cérémonies <strong>religieuse</strong>s. Il ditdans l'un <strong>de</strong> ses muwashshahât :Translittération du texte arabe :In sa'<strong>al</strong>ta `ani-s-samâ`i,Abâhahu 'ahlu-sh-sharî`a,Liman yakun fîhi bi dâ`î,Wa <strong>la</strong>hu fîhâ-t-tissâ`î,Sâliman `ani-l-qatî`a,Çâdiqan fi-l-wa`di ra`î,Li-sh-sharî`a wa-t-tabî`a (57).Traduction :La musique à n'en point douter,Est permise par <strong>la</strong> loi divine,Je m'y donne à cœur joie,Et j'atteints <strong>de</strong>s sensations merveilleuses,La musique m'occupe mais ne me détache jamais <strong>de</strong> mes obligations,Je <strong>de</strong>meure fidèle à mes promesses,Et voué aux recommandations célestes.Ou encore :Translittération du texte arabe :Lâ t<strong>al</strong>tafit liman yunkir-s-samâ`,Fahwa thabtun haqqan wa bi-l-ijmâ`. (58)(56) MAGDÎSH, op.cit., tome II, p. 174


52Traduction :A ceux qui occultent <strong>la</strong> musique,Tu n'accor<strong>de</strong>ras point d'intérêt,<strong>Le</strong>s hommes <strong>de</strong> loi l'ont confirmé à l'unanimité,Que sa lég<strong>al</strong>ité ne pose aucun doute.Il dit aussi dans un autre muwashshah :Translittération du texte arabe :Da`nî yâ `adhûlî da`nî,Bi-s-samâ` q<strong>al</strong>bî mu`<strong>al</strong><strong>la</strong>q,Mahbûbî hubbu makannî,Qad jama` mâ hû mufarraq,Wa yazûlu-t-ta`abu `annî,Bi qawâlin kabîrin yushawwiq,Isma` q<strong>al</strong>ûlî lâ t<strong>al</strong>umnî,Q<strong>al</strong>ûlî mawzûnan murawnaq.(59)Traduction :Ô toi qui m'en veux,Sache que je suis épris <strong>de</strong> musique,Tel un amoureux qui ne pense qu'à <strong>la</strong> rencontre <strong>de</strong> sa bien aimée,Je trouve en <strong>la</strong> musique mon repos,Ma fatigue ne fait que s'évaporer et disparaître dans les mélodies,Ecoute, écoute bien ces paroles rythmées, si charmantes.(57) KARRÂY (Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-), op.cit, feuille n o 10.(58) KARRÂY (Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-), op.cit, feuille n o 27.


53Il n'est pas sans intérêt <strong>de</strong> sign<strong>al</strong>er que le shaykh Abû-l-Hassan apratiqué <strong>la</strong> musique pendant sa jeunesse, et a même joué aux instruments <strong>de</strong>percussion tels que le târ et le duff. Il dit dans un <strong>de</strong> ses muwashshahât :Translittération du texte arabe :`Addît fi-ç-çughr `addît,Yâ hasratî `<strong>al</strong>â zmânî,Bi-t-târ wi-d-duff ghannît,Wi-z-zhît b-husn-el-ma`ânî,Li-r-Rabb mawlâyâ w<strong>al</strong>lît,Tawba naçûha `atânî (60).Traduction :Que <strong>de</strong> nost<strong>al</strong>gie j'éprouve,Pour le bon vieux temps <strong>de</strong> ma jeunesse,J'ai tant chanté au târ et au duff,Et me suis ainsi réjouis <strong>de</strong> mélodies et <strong>de</strong> nobles paroles,J'implore le bon Dieu pour me gui<strong>de</strong>r au droit chemin,Je lui <strong>de</strong>meure obéissant et fidèle.Nous pouvons déduire <strong>de</strong> ces extrait, que le shaykh Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY donnait une gran<strong>de</strong> importance à <strong>la</strong> musique qu'il a aimé et joué<strong>de</strong>puis sa jeunesse. Et c'est certainement à cause <strong>de</strong> cet amour que voue leShaykh à <strong>la</strong> musique qu'il a réservé une <strong>la</strong>rge partie <strong>de</strong> ses majâlis (sing.(59) KARRÂY (Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-), op.cit., feuille n o 11.


54Majliss : séance, réunion) au chant <strong>de</strong>s muwashshahât qui les écrivait luimême.Parmi les écrits les plus importants du shaykh <strong>al</strong>-KARRÂY, nouscitons un recueil contenant cinquante-six muwashshah(s). A notreconnaissance, ce recueil précieux, objet <strong>de</strong> notre recherche, n'est disponibleque chez le shaykh Mabrouk BELHÂJ (ancien a<strong>de</strong>pte <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa, habitantSfax).<strong>Le</strong> Shaykh <strong>al</strong>-KARRÂY est mort en 1696 (61) à l’âge <strong>de</strong> 79 ans, aprèsavoir créé l'une <strong>de</strong>s turuq (pluriel <strong>de</strong> tarîqa) les plus popu<strong>la</strong>ires à Sfax : <strong>la</strong>tarîqa dite <strong>al</strong>-KARRÂRIYYA, comme nous l'informe un <strong>de</strong> ces disciples dansun muwashshah où il dit :Translittération du texte arabe :Fa fî `ami khamsin thumma <strong>al</strong>fin wa mi'atin,`Afâ `anhu mawlânâ karîmu,Fa `âsha mina-l-a`wâmi sab`îna ba`dahâ,Th<strong>al</strong>âthuna wa sittun ghayra shahryni fawâdhilu (62).Traduction :Cinq années ayant succédés à l'an mille cent,Et il s'est éteint,<strong>Le</strong> bon Dieu, l'a gracieusementAccepté dans sa miséricor<strong>de</strong>,(60) KARRÂY (Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-), op.cit., feuille n o 103(61) Nous avons trouvé cette date dans une p<strong>la</strong>que en marbre fixée au mur, à l'entrée <strong>de</strong> <strong>la</strong> zâwiya.Nous l'avons ég<strong>al</strong>ement trouvé dans le poème d'un <strong>de</strong> ses disciples dans le recueil d'abû <strong>al</strong>-Hassan<strong>al</strong>-KARRÂY, feuille n o 163(62) KARRÂY (Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-), op.cit., feuille n o 113.


55Il n'aura vécu que soixante-dix ans,En plus <strong>de</strong> six puis trois <strong>de</strong> bénédiction,Auxquels ne manquaient que tout juste <strong>de</strong>ux mois.Et un peu plus loin dans le même muwashshah, il dit aussi :Translittération du texte arabe :Muhtadhiran yawma-l-jumu`a,Man tâ`a mawlâhu ghazîra-d-dam`i.Traduction :Son agonie ayant survenu un vendredi en fin <strong>de</strong> journée,Lui, qui a toujours obéi au bon Dieu,Et dont les <strong>la</strong>rmes chau<strong>de</strong>s étaient témoins <strong>de</strong> sa piété.2 - L'époque d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂYAfin <strong>de</strong> mieux comprendre l'oeuvre d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY, etles conditions dans lesquelles il a créé sa tarîqa, nous <strong>al</strong>lons étudier d'abordle contexte historique dans lequel il a vécu, pour en déterminer l'évolutionpolitique, économique et soci<strong>al</strong>e en Tunisie à cette époque.2.1 - La vie politiqueEn 1228, Abû Zakariyya <strong>al</strong>-Hafçi (1228-1249) gouverneur hafsi<strong>de</strong> <strong>de</strong>l'Ifriqiya, une province dépendante du souverain <strong>al</strong>moha<strong>de</strong> <strong>de</strong> Maroc rompitavec le c<strong>al</strong>ife Almoha<strong>de</strong> <strong>de</strong> Marrakech et fonda l'Etat hafsi<strong>de</strong>, s'inst<strong>al</strong><strong>la</strong> à


56Tunis et en fit le siège <strong>de</strong> son gouvernement. Il donna le nom <strong>de</strong> Tunis à toutle pays. L'Ifriqiya <strong>de</strong>vint <strong>la</strong> Tunisie.Jouissant d'un prestige considérable auprès du mon<strong>de</strong> musulman etdu mon<strong>de</strong> chrétien, Abû Zakariyya fit <strong>de</strong> Tunis une capit<strong>al</strong>e dynamique etune p<strong>la</strong>ce commerci<strong>al</strong>e <strong>de</strong> choix dans le bassin méditerranéen. Il conclut avecles "cités-Etats" <strong>de</strong> <strong>la</strong> péninsule It<strong>al</strong>ienne <strong>de</strong>s accords <strong>de</strong> paix et <strong>de</strong> bonvoisinage (Venise en 1231, Pise en 1234, Gênes en 1236). Il encouragea <strong>la</strong>première immigration and<strong>al</strong>ouse vers <strong>la</strong> Tunisie, et tint à recevoir le plusgrand nombre <strong>de</strong> savants et d'hommes <strong>de</strong> religions.Au XV ème siècle l'émir hafsi<strong>de</strong> Othman (1435-1488) fut un souverainà <strong>la</strong> fois puissant, maître <strong>de</strong> son royaume, aimé <strong>de</strong> <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion et respecté<strong>de</strong> ses voisins. Plusieurs puissances chrétiennes renouvelèrent <strong>de</strong>s traitésdurant son règne et développèrent leurs re<strong>la</strong>tions avec <strong>la</strong> Tunisie.Ainsi l'apport <strong>de</strong>s Hafsi<strong>de</strong> à <strong>la</strong> tradition étatique tunisienne, contribuaà affirmer l'existence <strong>de</strong> <strong>la</strong> Tunisie en tant qu'état.A <strong>la</strong> mort du souverain Othman, <strong>de</strong>s luttes dynastiques et <strong>de</strong>sdésordres intérieurs <strong>al</strong><strong>la</strong>ient engendrer une ère <strong>de</strong> troubles et d'instabilitépolitique.Pour asseoir son autorité et sauver son royaume, <strong>Le</strong> <strong>de</strong>rniersouverain <strong>de</strong> <strong>la</strong> dynastie hafsi<strong>de</strong>, Muhammad ben Hassan ben Muhammad <strong>al</strong>-Mass`ud <strong>al</strong>-HAFÇI (1526-1542), n'a pas hésité à se faire ai<strong>de</strong>r par lesEspagnols, ennemis traditionnels du pays, pour combattre les forces turques


57en pleine expansion. Cette intervention espagnole a été très violente etsauvage, elle a causé <strong>de</strong>s dommages irréparables. Ainsi, plusieursmonuments historiques ont été incendiés, <strong>de</strong>s mosquées d'une gran<strong>de</strong>importance architectur<strong>al</strong>e ont été détruites et <strong>de</strong>s bibliothèques entièrementbrûlées, faisant disparaître à jamais <strong>de</strong>s ouvrages et <strong>de</strong>s manuscrits uniquesau mon<strong>de</strong>, traitant <strong>de</strong> toutes les disciplines.Pendant quarante ans, <strong>la</strong> Tunisie <strong>al</strong><strong>la</strong>it être le théâtre <strong>de</strong> <strong>la</strong> lutte entrel'Empire Espagnol et l'Empire Ottoman. C'est enfin sous <strong>la</strong> conduite <strong>de</strong>l'Amir<strong>al</strong> Sinân Bâcha que l'armée turque a réussi en 1573 à repousser lesEspagnols et sauver <strong>la</strong> Tunisie d'une occupation dont le but avoué était <strong>de</strong>christianiser le pays à long terme.La conquête définitive <strong>de</strong> Tunis par les Turcs le 23 août 1574,marque <strong>la</strong> fin d'une longue pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> guerre et <strong>de</strong> désordre, et transforme leroyaume hafçi<strong>de</strong> en province ottomane (Sanjak) sous l'autorité d'un Pacha(Bâcha) représentant le C<strong>al</strong>ife pour une pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> trois ans. <strong>Le</strong> pays estgouverné par le diwân : le conseil d'officiers supérieurs <strong>de</strong> <strong>la</strong> milice <strong>de</strong>sjanissaires (<strong>al</strong>-inkishâriyya). Ce diwân se compose <strong>de</strong> quarante officierssupérieurs (les <strong>de</strong>ys) qui comman<strong>de</strong>nt les quatre milles miliciens sélectionnésexclusivement parmi les Turcs, répartis entre Tunis et les princip<strong>al</strong>es villespour mieux contrôler <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion.<strong>Le</strong>s Turcs se réservèrent les plus hautes fonctions pour diriger lesaffaires tunisiennes et assurer une occupation permanente <strong>de</strong> <strong>la</strong> régence. Ils


58ont pu par <strong>la</strong> suite, imposer une pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> re<strong>la</strong>tive stabilité. Cette pério<strong>de</strong> aduré jusqu' en 1591, date <strong>de</strong> <strong>la</strong> révolte <strong>de</strong> l'armée turque qui s'est terminée parl'ascension <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ys au pouvoir, en <strong>la</strong> personne du <strong>de</strong>y Ibrâhîm Ro<strong>de</strong>lsî,nommé commandant <strong>de</strong> l'armée.La montée <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ys a été à l'origine d'une nouvelle époque <strong>de</strong>stabilité et <strong>de</strong> paix, permettant ainsi aux activités culturelles et scientifiquesdu pays <strong>de</strong> reprendre leur essor (63) (64) : Plusieurs savants tunisiens qui ontquittés le pays pendant <strong>la</strong> pério<strong>de</strong> d'instabilité politique et <strong>de</strong> manque <strong>de</strong>sécurité sont <strong>de</strong> retour, les <strong>de</strong>ys ont fait venir <strong>de</strong>s savants (`u<strong>la</strong>mâ',sing.`âlim) <strong>de</strong> l'orient et <strong>de</strong>s pays voisins pour encourager le développement<strong>de</strong> <strong>la</strong> vie culturelle et scientifique du pays. Cependant, les résultats <strong>de</strong> cechangement et <strong>de</strong> ces mesures ne vont être perçus qu'après plusieurs années,ce qui va donner au shaykh Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY et à sa génération <strong>de</strong>sconditions favorables pour avoir une bonne formation scientifique etlittéraire. Enfin, notons que cette stabilité a été toutefois re<strong>la</strong>tive car lestroubles politiques et sociaux n'ont pas tardé à réapparaître <strong>de</strong> temps à autrejusqu'à l'époque <strong>de</strong> <strong>la</strong> colonisation française.En ce qui concerne <strong>la</strong> région <strong>de</strong> Sfax, dont Abû-l-Hassan estoriginaire, notons qu'à l'époque un certain Ben `Atiya <strong>al</strong>-JEBLÎ y sévissait; Il(63) IBN ‘ABÎ DHIÂF (Ahmad), "Ithâf ahl <strong>al</strong>-zamân bi akhbâr mulûk tûnis wa `ahd <strong>al</strong>-amân",Tunis 1963-1964, Secrétariat d'état <strong>de</strong>s Affaires Culturelles et <strong>de</strong> l'Information, huit volumes, tomeII, p. 21.(64) IBN ABÎ DINAR (Muhammad erra`înî), "Al-mu'nis fi akhbâr ifrîqiyya wa tûnis", Tunis 1967,édition et commentaire CHAMAM (Muhammad), 2 ème éd., p. 172.


59a été un gouverneur exécrable, autoritaire. Il a notamment osé profaner leslieux saints réservés à <strong>la</strong> prière du shaykh en y entrant complètement ivre,emmenant avec lui le shaykh lui-même. Par ailleurs, <strong>la</strong> ville <strong>de</strong> Sfax a étésouvent attaquée par les tribus <strong>de</strong>s environs. Ces rapines ont fait perdre auxsfaxiens leurs biens. Du côté <strong>de</strong> <strong>la</strong> mer, Sfax était une cible favorite <strong>de</strong>spirates m<strong>al</strong>tais, qui vou<strong>la</strong>ient s'emparer <strong>de</strong>s richesses <strong>de</strong> <strong>la</strong> ville.C'est dans un tel climat <strong>de</strong> peur et d'injustice qu'ont été créées <strong>la</strong>tarîqa <strong>al</strong>-Karrâriyya, ainsi que d'autres turuq simi<strong>la</strong>ires. Celles-ci ont connuune gran<strong>de</strong> popu<strong>la</strong>rité auprès <strong>de</strong>s autochtones qui s'adonnaient aux pratiquesconfrériques, mais pouvaient aussi y chercher un refuge.2.2 - La vie soci<strong>al</strong>e et économiqueLa société tunisienne était, à l'époque pré-turque, constituéed'habitants d'origines diverses : Avec les Berbères qui sont les autochtones,nous trouvons les Arabes venus au pays à <strong>la</strong> pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> conquêteis<strong>la</strong>mique, les Juifs qui se sont inst<strong>al</strong>lés au pays avant <strong>la</strong> conquête arabe, etsurtout pendant le règne <strong>de</strong>s Çanhajites (973-1160), et Européens (venussurtout <strong>de</strong> <strong>la</strong> Sicile) (65). Ensuite eut lieu l'immigration and<strong>al</strong>ouse à l'époque<strong>de</strong>s hafsi<strong>de</strong>s soutenue par les hommes politique et encouragée par l'accueilch<strong>al</strong>eureux que réservaient les Tunisiens aux immigrés and<strong>al</strong>ous. Ces


60<strong>de</strong>rniers étaient à leur tour un mé<strong>la</strong>nge <strong>de</strong> races (Berbères, Arabes,Européens...). Ils ont multiplié le nombre <strong>de</strong>s habitants <strong>de</strong>s villes; et ontpermis <strong>la</strong> re<strong>la</strong>nce <strong>de</strong>s activités économiques et culturelles.Dans le domaine <strong>de</strong> l'art, les And<strong>al</strong>ous ont propagé le muwashshah,qui est une forme <strong>de</strong> chant propre à l'And<strong>al</strong>ousie (66), ayant <strong>de</strong>scaractéristiques rythmiques, métriques et poétiques particulières. L'influence<strong>de</strong> <strong>la</strong> musique and<strong>al</strong>ouse est perceptible dans les oeuvres d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY comme nous aurons l'occasion <strong>de</strong> démontrer dans <strong>la</strong> partieconsacrée à l'an<strong>al</strong>yse <strong>music<strong>al</strong></strong>e.2.3 - La vie culturelleL'instabilité politique pendant <strong>la</strong> fin <strong>de</strong> <strong>la</strong> dynastie Hafsi<strong>de</strong> a exercéune gran<strong>de</strong> influence sur <strong>la</strong> vie culturelle et scientifique à Tunis : Beaucoup<strong>de</strong> savants ont quitté le pays, comme c'était le cas du shaykh Muhammad benMuhammad <strong>al</strong>-TÛNSÎ professeur <strong>de</strong> théologie musulmane et <strong>de</strong> <strong>la</strong>nguearabe, qui a émigré à Istanbul (Turquie), puis en Egypte où il est mort en1543 (67).Après <strong>la</strong> montée <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ys qui ont favorisé une époque <strong>de</strong> stabilité et<strong>de</strong> paix, apparut une nouvelle génération <strong>de</strong> savants. Citons, à titre(65) ABDELWAHAB (Hassan Hosni), "Waraqât `ani-l-hadhâra <strong>al</strong>-`arabiyya bi Ifrîqiyya <strong>al</strong>tûnisiyya",(feuillets sur <strong>la</strong> civilisation arabe à Ifrîqiyya" ), Tunis, 1966, librairie <strong>al</strong>-manâr, tomeIII, p. 71.(66) RIZGUI, op.cit, p.51.


61d'exemple, Abu-l-Fadhl Qâsim <strong>al</strong>-QAYRAWÂNÎ (mort en 1600), Muhammad<strong>al</strong>-And<strong>al</strong>usî <strong>al</strong>-TÛNSÎ (mort en 1608) qui fut Imâm <strong>de</strong> <strong>la</strong> mosquée az-zitûna,et le chaykh Abû Muhammad `Abd-el-Qâ<strong>de</strong>r connu sous le nom <strong>de</strong> `ûbayd<strong>al</strong>-Oumî (mort en 1646), qui était Imâm et grand savant très célèbre, et un <strong>de</strong>sprofesseurs du Shaykh Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY. C'est cette génération quiva donner à <strong>la</strong> vie culturelle un nouvel essor.C'est dans <strong>de</strong> telles conditions que le shaykh <strong>al</strong>-KARRÂY a fondé satarîqa. Il s'est efforcé <strong>de</strong> s'opposer aux colons qui ont été <strong>la</strong> cause <strong>de</strong> bien <strong>de</strong>sdommages dans ce pays. L'insécurité causée par les troubles a facilitéd'ailleurs l'adhésion <strong>de</strong>s a<strong>de</strong>ptes à <strong>la</strong> tarîqa.3 - les lieux <strong>de</strong> culte (zawâyâ) dépendant<strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong> <strong>al</strong>-karrâriyya3.1- La zâwiya <strong>de</strong> sîdî `Ali <strong>al</strong>-KARRÂYLa zâwiya (lieu <strong>de</strong> culte) <strong>de</strong> sîdî `Ali <strong>al</strong>-KARRÂY fut fondée à <strong>la</strong>moitié du XV ème siècle par sîdî `Ali <strong>al</strong>-KARRÂY (mort vers 1463) (68), pour yenseigner le Coran et les sciences <strong>de</strong> <strong>la</strong> religion. Elle est située dans lequartier Dannâ du coté Est <strong>de</strong> <strong>la</strong> vieille ville, dans une rue qui portemaintenant son nom. La zâwiya a subi plusieurs transformations et <strong>de</strong>s(67) MAKHLOUF (Mohamed), "Shajarat <strong>al</strong>-nûr <strong>al</strong>-zakiyya fî <strong>al</strong>-tabaqât <strong>al</strong>-mâlikiyya", le Caire,Dâr <strong>al</strong>-ma`ârif, 1930, 2 tomes, 156p.(68) MAGDÎSH (Mahmoud), "Nuzhat <strong>al</strong>-andhâr fî `ajâ'ib <strong>al</strong>-tawârîkh wa <strong>al</strong>-akhbâr" (Panoramasur les merveilles <strong>de</strong>s historiens et <strong>de</strong>s événements), Tunis, Dâr <strong>al</strong>-Hilâl, 1909, édition commentéepar `Abd<strong>al</strong>lâh aj-JRÎDÎ, tome 2, p. 150


62extensions à plusieurs reprises. <strong>Le</strong>s plus importantes ont été faites entre 1978et 1982 pour <strong>la</strong> transformer en une mosquée. Néanmoins, <strong>la</strong> zâwiya est restéejusqu'à nos jours un lieu <strong>de</strong> ziâra (visite) pour ceux qui croient encore aupouvoir et à <strong>la</strong> baraka <strong>de</strong> sîdî `Ali <strong>al</strong>-KARRÂY dont <strong>la</strong> dépouille y reposetoujours.3.2 – <strong>Le</strong> monument abritant <strong>la</strong> zâwiya<strong>de</strong> sîdî Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂYC<strong>la</strong>ssé monument historique, le loc<strong>al</strong> <strong>de</strong> sîdî Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY <strong>de</strong>meure l'un <strong>de</strong>s édifices religieux les plus connus <strong>de</strong> <strong>la</strong> ville <strong>de</strong>Sfax. Associant harmonieusement opulence et sobriété, ce monument estconsidéré comme chef d'oeuvre architectur<strong>al</strong> <strong>de</strong> l'époque hafsi<strong>de</strong>.Construit en 1654, ce bâtiment ayant servi comme siège <strong>de</strong> <strong>la</strong><strong>confrérie</strong>, se situe du coté Est <strong>de</strong> <strong>la</strong> Médina près <strong>de</strong> <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ce Barbarousse,dans une rue qui porte encore le nom du shaykh fondateur <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-Karrâriyya. Il se distingue par son aspect architectur<strong>al</strong> au style arabesqueavec une nette influence hafsi<strong>de</strong>. Son décor très soigné, et sa parfaiteconservation constituent le secret <strong>de</strong> son charme.


63P<strong>la</strong>n <strong>de</strong> <strong>la</strong> médina <strong>de</strong> Sfax (69)Initi<strong>al</strong>ement, le p<strong>la</strong>n du loc<strong>al</strong> était austère, tout juste un espace sanstrop <strong>de</strong> cloisons, <strong>de</strong> forme rectangu<strong>la</strong>ire <strong>de</strong> 29.40 m <strong>de</strong> long et 16.30 m <strong>de</strong><strong>la</strong>rge, <strong>de</strong>stiné à rassembler les a<strong>de</strong>ptes pour les cérémonies <strong>religieuse</strong>smajâlis (réunions) rituels <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa; servant aussi accessoirementd'institution sco<strong>la</strong>ire enseignant le Coran, <strong>la</strong> théologie et <strong>la</strong> littérature arabe.(69) "La médina <strong>de</strong> Sfax est enserrée dans <strong>de</strong>s remparts fortifiés qui, <strong>de</strong>puis plus <strong>de</strong> onze siècles, ontconservé leur tracé rectangu<strong>la</strong>ire initi<strong>al</strong>. Ils ont été construits à l'époque agh<strong>la</strong>bi<strong>de</strong>, autour <strong>de</strong> 859,sous le règne d'Ahmed ibn Agh<strong>la</strong>b, émir <strong>de</strong> Kairouan". Massé-Muzi (Nicole), Mémoire en imagesSFAX, éd. A<strong>la</strong>n Sutton, 2002, Saint-Cyr-sur-Loire, p.23.


64C'est par ailleurs <strong>de</strong> ce loc<strong>al</strong> qu'étaient décidées et organisées toutes lesactions <strong>de</strong> bienfaisance entreprises par <strong>la</strong> tarîqa ainsi que toutes ses activitéscaritatives en faveur <strong>de</strong>s personnes démunies.P<strong>la</strong>ce Barbarousse (70)Mais <strong>de</strong>puis sa construction, le loc<strong>al</strong> a bénéficié d'une succession <strong>de</strong>travaux d'agrandissement, <strong>de</strong> transformation et d'embellissement l'ayantcomplètement modifié. <strong>Le</strong> plus important <strong>de</strong> ces chantiers était probablementcelui entrepris au mois <strong>de</strong> Rejeb 1105 <strong>de</strong> l'hégire, 1693 A. j.c. lors du décèsdu shaykh <strong>al</strong>-KARRÂY.


65La zâwiya <strong>de</strong> sîdî Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY(71)Enterré au loc<strong>al</strong> même, le shaykh a dû être honoré par <strong>la</strong> constructiondu mausolée abritant sa tombe, une chambre funéraire dans <strong>la</strong> pure traditionsoufi. Cette chambre <strong>de</strong>meure le joyau du monument avec notamment un toiten voûte richement décoré <strong>de</strong> sculptures sur plâtre. Au milieu, une belleclôture en bois renferme le cataf<strong>al</strong>que et attire quotidiennement <strong>de</strong> nombreuxvisiteurs qui viennent s'imprégner <strong>de</strong> "baraka" (bénédiction).(70) La p<strong>la</strong>ce Barbarousse à <strong>la</strong> fin du 19 ème siècle, illustration tirée <strong>de</strong> l'ouvrage <strong>de</strong> Massé-Muzi(Nicole), op.cit., p. 49.(71) La faça<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> zâwiya <strong>de</strong> sîdî Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY, photo prise en décembre 2005,collection personnelle.


66Cataf<strong>al</strong>que du shaykh <strong>al</strong>-KARRÂY(72)Cependant, il est certain que <strong>la</strong> gran<strong>de</strong> modification ayant donné à toutl'édifice son aspect définitif, s'est effectuée un siècle et <strong>de</strong>mi après, soit en1262 <strong>de</strong> l'hégire 1845 A.JC., année où d'importants travaux <strong>de</strong> restaurationsont touché surtout <strong>la</strong> s<strong>al</strong>le <strong>de</strong>s prières et l'entrée princip<strong>al</strong>e.Ainsi, <strong>de</strong> <strong>la</strong> gran<strong>de</strong> porte cloutée on accè<strong>de</strong> à un vestibule (sqîfa), unespace carré <strong>de</strong> 37 m 2 qui donne accès au mausolée à gauche et à unechambre <strong>de</strong>stinée l'accueil <strong>de</strong>s visiteurs à droite. Au fond, <strong>la</strong> sqîfa ouvre surun h<strong>al</strong>l à ciel ouvert qui mène vers <strong>la</strong> s<strong>al</strong>le <strong>de</strong>s prières; une s<strong>al</strong>le <strong>de</strong> formerectangu<strong>la</strong>ire encadrée par quatre g<strong>al</strong>eries à rangées d'arca<strong>de</strong>s sur colonnes <strong>de</strong>(72) <strong>Le</strong> cataf<strong>al</strong>que du shaykh Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY, dans une s<strong>al</strong>le à l'intérieure <strong>de</strong> <strong>la</strong> zâwiya,photo prise en décembre 2005, collection personnelle.


67marbre, au style arabesque. <strong>Le</strong> tout harmonieusement décoré <strong>de</strong> sculptures <strong>de</strong>formes géométriques diverses ainsi que <strong>de</strong> c<strong>al</strong>ligraphie orient<strong>al</strong>e <strong>de</strong> caractèreKûfî.La s<strong>al</strong>le <strong>de</strong> prièreAu fond <strong>de</strong> <strong>la</strong> s<strong>al</strong>le, et au plein milieu, se dresse le "Mihrâb": uneniche <strong>de</strong> 0.89 m <strong>de</strong> rayon décorée aux couleurs vives, f<strong>la</strong>nquée <strong>de</strong>colonnettes, et précédée d'une coupole hémisphérique ég<strong>al</strong>ement décorée.


68<strong>Le</strong> mihrâbCette s<strong>al</strong>le somptueuse est <strong>de</strong>sservie <strong>de</strong> trois portes dont <strong>de</strong>ux ont étécertainement ajoutées lors <strong>de</strong>s travaux d'agrandissement aux dépensd'habitations voisines. Elles permettent une meilleure aération <strong>de</strong> <strong>la</strong> s<strong>al</strong>leainsi que plus <strong>de</strong> luminosité et d'éc<strong>la</strong>irage.A l'étage, <strong>de</strong>ux chambres à décoration austère étaient selon <strong>la</strong> traditionor<strong>al</strong>e, réservées au shaykh, elles servaient <strong>de</strong> lieu <strong>de</strong> retrait, <strong>de</strong> repos et <strong>de</strong>recueillement.La splen<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> l'édifice dans sa tot<strong>al</strong>ité, <strong>la</strong>isse <strong>de</strong>viner les moyensmatériels importants dont disposait <strong>la</strong> tarîqa. En effet, <strong>de</strong>s registres <strong>de</strong>comptabilité conservés datant <strong>de</strong> 1885 à 1894, sign<strong>al</strong>ent <strong>de</strong>s rentesconsidérables provenant <strong>de</strong> domaines agricoles, notamment <strong>de</strong>s oliveraies à


69<strong>la</strong> banlieue <strong>de</strong> Sfax, ainsi que plusieurs maisons et locaux <strong>de</strong> commerce etd'artisanat à <strong>la</strong> médina. En 1885, ces rentes ont été fixées à 20.714 ryâls, etles dépenses à 10.090 ryâls, <strong>de</strong>s dépenses <strong>de</strong>stinées à l'entretien du loc<strong>al</strong> etsurtout au paiement <strong>de</strong>s sa<strong>la</strong>ires <strong>de</strong>s murîdîn qui s'occupent <strong>de</strong> <strong>la</strong> zâwiya etaux œuvres <strong>de</strong> bienfaisance. Il est à noter que les registres ne mentionnentpas les offran<strong>de</strong>s provenant <strong>de</strong>s a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa et <strong>de</strong>s gens procheshabitants <strong>la</strong> médina, en hommage à celui qui est considéré un saint qui veillesur <strong>la</strong> ville <strong>de</strong> Sfax, le shaykh Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY.<strong>Le</strong> patrimoine ramassé par <strong>la</strong> tarîqa a été confisqué en 1956 par l'étattunisien après l'indépendance, grâce à une loi interdisant les biens hbuss,cette confiscation n'a pas empêché les a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> continuer leurs activitésjusqu'aux années soixante-dix grâce à <strong>la</strong> générosité <strong>de</strong>s sfaxiens. De nosjours, le loc<strong>al</strong> sert <strong>de</strong> mosquée, et gar<strong>de</strong> une importance très particulière dansl'esprit <strong>de</strong>s habitants <strong>de</strong> <strong>la</strong> ville.4 - Une hiérarchie au sein <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong>La <strong>confrérie</strong> (tarîqa) <strong>al</strong>-Karrâriyya peut être considérée comme unecontinuation et un prolongement <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-WAFA'IYYA (73) d'Egypte.Elle a joué un rôle considérable dans l'essor <strong>de</strong> <strong>la</strong> vie culturelle et <strong>religieuse</strong>.Elle prône <strong>la</strong> diffusion <strong>de</strong> l'éducation <strong>religieuse</strong> et prêche <strong>la</strong> conservation <strong>de</strong>s(73) L'une <strong>de</strong>s dérivés <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa Shâdhliyya, fondée par Muhammad WAFA' ISKANDARANI,mort en Egypte en 1358, disciple <strong>de</strong> l'un <strong>de</strong>s grands shuyûkh (plur.<strong>de</strong> shaykh) <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-Shâdhliyya vecu au début du 13 ème siècle. Cf. CHA'RÂWI (`Abd el-wahâb), <strong>la</strong>wâqih <strong>al</strong>-anwâr fîtabaqât <strong>al</strong>-akhbâr, le Caire, 1869, tome 2, p. 149.


70bonnes moeurs aux a<strong>de</strong>ptes. Elle est l'une <strong>de</strong>s rares turuq <strong>de</strong> <strong>la</strong> région qui apermis d'organiser <strong>de</strong>s chants liturgiques; cette particu<strong>la</strong>rité donne à <strong>la</strong> tarîqa<strong>al</strong>-Karrâriyya le mérite d'avoir contribué à <strong>la</strong> conservation du patrimoine<strong>music<strong>al</strong></strong> tunisien.Cette attitu<strong>de</strong> a influencé d'autres turuq telles que <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-'Awâmriyya (74), <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-`Îsâwiyya (75) et <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-Qâdriyya (76).Toutes ces <strong>confrérie</strong>s ont créé <strong>de</strong>s louanges adressées au Prophète,composées et exécutées grâce à <strong>de</strong>s rythmes et à <strong>de</strong>s mélodies utilisées par <strong>la</strong>tarîqa <strong>al</strong>-Karrâriyya, avec <strong>la</strong> simple différence que cette <strong>de</strong>rnière n'a jamaisemployé <strong>de</strong>s instruments mélodiques pour accompagner ses chants.<strong>Le</strong>s paroles <strong>de</strong>s chants ont été toutes é<strong>la</strong>borées par le Shaykh <strong>al</strong>-KARRÂY qui a composé cinquante-six Muwashshah. <strong>Le</strong>s thèmes serapportaient souvent à <strong>de</strong>s sujets religieux tels que le récit <strong>de</strong> <strong>la</strong> vie duProphète, <strong>la</strong> <strong>de</strong>scription <strong>de</strong>s lieux saints, <strong>de</strong>s prières au bon Dieu, etc.Néanmoins, après <strong>la</strong> mort d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY, les a<strong>de</strong>ptes ont ajoutéd'autres muwashshahât faisant l'éloge du Shaykh, éminent fondateur <strong>de</strong> <strong>la</strong>tarîqa.Comme toutes les turuq soufi, <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-Karrâriyya a sa proprestructure administrative qui est basée sur le principe <strong>de</strong> <strong>la</strong> hiérarchie et quiprécise le rôle et <strong>la</strong> fonction que joue chaque a<strong>de</strong>pte pour assurer le bon(74) Voir "La `Awâmriyya" dans ce même chapitre, p. 92.(75) Voir "La `Issâwiyya" dans ce même chapitre, p. 97.(76) Voir "La Qâdriyya" dans ce même chapitre, p. 102.


71déroulement <strong>de</strong>s différentes pratiques rituelles <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa. Ces fonctionssont les suivantes :- Shaykh at-tarîqaC'est <strong>la</strong> plus haute fonction. <strong>Le</strong> shaykh at-tarîqa est élu pour diriger<strong>la</strong> zâwiya, et se charger ainsi <strong>de</strong> <strong>la</strong> gestion financière et mor<strong>al</strong>e <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa.De ce fait, les nouveaux adhérents ne peuvent être acceptés qu'après sonconsentement. C'est lui qui agrée les chefs <strong>de</strong> groupes et accepte lesoffran<strong>de</strong>s qui parviennent <strong>de</strong>s sympathisants et <strong>de</strong>s a<strong>de</strong>ptes. La gestionfinancière est <strong>de</strong> son ressort, il détermine ainsi ce qui lui est dû pour sesbesoins personnels et ce qui est dû à <strong>la</strong> tarîqa. Ce poste est réservé aux seuls<strong>de</strong>scendants du shaykh Muhammad <strong>al</strong>-MARRÂKSHÎ, fils adoptif du shaykhAbû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY.- Shaykh az-zâwiyaIl est élu pour se charger <strong>de</strong> <strong>la</strong> gestion <strong>de</strong>s affaires courantes <strong>de</strong> <strong>la</strong>zâwiya et <strong>de</strong>s membres du majlis (plur. majâlis). C'est lui qui organise lesséances <strong>de</strong> chant. Ce poste est aussi réservé exclusivement aux <strong>de</strong>scendantsdu shaykh <strong>al</strong>-MARRÂKSHÎ.- Shaykh <strong>al</strong>-wa`dhIl est nommé par le shaykh <strong>de</strong> <strong>la</strong> zâwiya pour se charger <strong>de</strong> <strong>la</strong>formation <strong>de</strong>s a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa, il donne <strong>de</strong>s cours <strong>de</strong> théologiemusulmane; le prétendant à ce poste doit maîtriser les sciences <strong>religieuse</strong>s et


72<strong>la</strong> théologie musulmane, l'appartenance à <strong>la</strong> famille du shaykh n'est pasrequise pour ce poste.- <strong>Le</strong> Shâwish <strong>de</strong> <strong>la</strong> zâwiyaIl est nommé par le shaykh <strong>de</strong> <strong>la</strong> zâwiya, et sa fonction consiste àveiller à l'entretien <strong>de</strong>s locaux et à leur propreté. Il est ég<strong>al</strong>ement chargé <strong>de</strong>spréparatifs nécessaires pour <strong>la</strong> réception <strong>de</strong>s a<strong>de</strong>ptes lors <strong>de</strong>s différentescérémonies. C'est lui qui collecte les loyers <strong>de</strong>s biens immobiliers revenant à<strong>la</strong> tarîqa pour les déposer chez le shaykh <strong>de</strong> <strong>la</strong> zâwiya. Il perçoit un sa<strong>la</strong>ire aumême titre que les tenants d'autres fonctions.La fonction <strong>de</strong> Shâwish <strong>de</strong> <strong>la</strong> zâwiya existe toujours, on asimplement changé <strong>la</strong> dénomination <strong>de</strong> Shâwish en naqîb.5 - <strong>Le</strong>s majâlis <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong>D'après Sadok JEMAL (mort en 1996) et `Abd <strong>al</strong>-HafîdhMARRÂKSHÎ (72 ans), <strong>de</strong>ux anciens a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-Karrâriyya,<strong>Le</strong>s a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa doivent se conformer à plusieurs actionsquotidiennes, hebdomadaires et saisonnières. Ils nous décrivent ledéroulement du majlis <strong>de</strong> <strong>la</strong> façon suivante :Chaque jour, après <strong>la</strong> prière (ç<strong>al</strong>ât <strong>al</strong>-çubh: <strong>la</strong> première <strong>de</strong> <strong>la</strong>journée), les a<strong>de</strong>ptes font une lecture collective <strong>de</strong> d<strong>al</strong>îl <strong>al</strong> khayrât (gui<strong>de</strong> <strong>de</strong>


73<strong>la</strong> bonne fortune) (77). Cette lecture étant régulière, s'effectue <strong>de</strong> façonrituelle; il en résulte qu'à chaque jour <strong>de</strong> <strong>la</strong> semaine, correspond <strong>la</strong> lectured'une partie <strong>de</strong> cet oeuvre. Et avant <strong>de</strong> clôturer le majliss, l'assistanceexprime <strong>de</strong>s voeux (du`â' ) et <strong>de</strong>s prières d'une façon rituelle. Elle répète centfois <strong>la</strong> même phrase. <strong>Le</strong>s a<strong>de</strong>ptes invitent parfois le Shaykh <strong>al</strong>-Hizb à réciteraux fidèles <strong>de</strong>s poèmes d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY.Notons que ces pratiques n'étaient pas très compliquées ni <strong>al</strong>iénantes,comparés à certains rituels en usage chez d'autres <strong>confrérie</strong>s.D'autres activités ont un rythme hebdomadaire. <strong>Le</strong> vendredi, jour <strong>de</strong>prière, comporte <strong>de</strong>s activités particulières en rapport avec <strong>la</strong> tenue du majlisd'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY (réunion solennelle <strong>de</strong>s a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa). <strong>Le</strong>majlis débute par un cours <strong>de</strong> théologie et d'histoire musulmane donné par leshaykh <strong>al</strong>-wa`dh, après quoi <strong>la</strong> chor<strong>al</strong>e chante <strong>de</strong>s muwashshahât (sing.muwashshah) composés par Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY (ou l'un <strong>de</strong> sesdisciples), sans utilisation d'instruments <strong>de</strong> musique; et c'est au shaykh <strong>de</strong> <strong>la</strong>tarîqa <strong>de</strong> choisir le muwashshah qu'on va chanter.Après <strong>la</strong> séance <strong>de</strong> chant, le shaykh reprend son cours sur le mêmethème entamé au début <strong>de</strong> séance. Il explique et commente ensuite lesparoles du muwashshah chanté par <strong>la</strong> chor<strong>al</strong>e.(77) Oeuvre du shaykh Muhammad ben su<strong>la</strong>ymân <strong>al</strong>-Husayni <strong>al</strong>-JAZÛLI, fondateur <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-Jazûliyya, mort à Marrakech en 1465.


74<strong>Le</strong> majlis est clos immédiatement après ç<strong>al</strong>ât <strong>al</strong>-maghrib (<strong>la</strong> quatrième prière<strong>de</strong> <strong>la</strong> journée) pour reprendre <strong>la</strong> nuit après le dîner et ç<strong>al</strong>ât <strong>al</strong>-`ishâ'(cinquième et <strong>de</strong>rnière prière <strong>de</strong> <strong>la</strong> journée).Enfin, certaines activités ont un rythme saisonnier ou un caractèreexceptionnel. <strong>Le</strong>s a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-Karrâriyya, comme ceux d'autresturuq <strong>de</strong> <strong>la</strong> région <strong>de</strong> Sfax et du mon<strong>de</strong> musulman, fêtent lescommémorations <strong>religieuse</strong>s comme le mawlid an-nabawi; l'anniversaire <strong>de</strong><strong>la</strong> naissance du Prophète Muhammad célébré le 12 Rabî` <strong>al</strong>-Aww<strong>al</strong>, troisièmemois <strong>de</strong> l'année hégirienne. Pour cette fête, les a<strong>de</strong>ptes chantent <strong>de</strong>smuwashshahât préa<strong>la</strong>blement conçus et composés pour l'occasion, comme lemuwashshah "aç-ç<strong>al</strong>âtu `<strong>al</strong>â Muhammad" d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY, ourécitent <strong>la</strong> burda. (78)Au cours du mois <strong>de</strong> ramadan, mois du jeûne, <strong>la</strong> tarîqa se contented'organiser <strong>de</strong>s cours en théologie musulmane, avant <strong>la</strong> fin du jeûne. Tandisque <strong>la</strong> soirée entière est consacrée aux prières et à <strong>la</strong> lecture du Coran.A l'occasion du `îd <strong>al</strong>-idhhâ' (fête du sacrifice), appelé aussi `îd <strong>al</strong>kebîr(<strong>la</strong> gran<strong>de</strong> fête) (79), les a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa chantent <strong>de</strong>smuwashshahât (sing. muwashshah) dans lesquels sont énumérés les bienfaits(78) <strong>al</strong>-Burda: Poème très célèbre dans le madîh (louange) du Prophète Muhammad, composé par lepoète soufi le shaykh Sharf ad-dîn Muhammad ben Sa`îd Hamâd <strong>al</strong>-BUÇAYRÎ (mort en 1205),<strong>de</strong>venu très célèbre par ses <strong>de</strong>ux poèmes <strong>al</strong>-Burda et <strong>al</strong>-Hamziyya. Al-Burda est composée <strong>de</strong> centquatre-vingt-<strong>de</strong>ux vers, extrêmement popu<strong>la</strong>ire auprès <strong>de</strong>s musulmans.(79) <strong>Le</strong> 10 du mois <strong>de</strong> dhûl-hijja, <strong>de</strong>rnier mois <strong>de</strong> l'année Hégirienne, le mon<strong>de</strong> musulman célèbre <strong>la</strong>solennité du pèlerinage à <strong>la</strong> Mecque. <strong>Le</strong>s musulmans se ren<strong>de</strong>nt (lorsqu'ils en ont les moyens, argentet santé), une fois dans leur vie, dans <strong>la</strong> presqu'île arabique afin <strong>de</strong> s'acquitter <strong>de</strong>s obligations du "<strong>al</strong>-


75du pèlerinage et <strong>de</strong> <strong>la</strong> visite <strong>de</strong>s lieux saints <strong>de</strong> l'is<strong>la</strong>m. Ensuite, ce mêmethème est développé lors d'une khutba (discours, conférence) prononcée parle shaykh <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa.<strong>Le</strong>s a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa participent aussi à <strong>la</strong> gran<strong>de</strong> manifestationqu'organisaient les ahzâb (pluriel <strong>de</strong> hizb) <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa `Awâmriyya chaqueannée qui est <strong>la</strong> ziâra (visite) <strong>de</strong> sîdî `Âmir, appelée aussi kharja (sortie) poursignifier pèlerinage. "Cette kharja saisonnière s'effectuait à l'issue <strong>de</strong> <strong>la</strong>saison <strong>de</strong>s hadhrât ou hadhârî (sing. hadhra) qui durait treize semaines pourchaque branche <strong>de</strong> <strong>confrérie</strong> (hizb)"(80) qui sont au nombre <strong>de</strong> sept. Chaquehizb fait sa kharja qui dure une semaine selon un c<strong>al</strong>endrier bien précis; et àson retour à Sfax, il est accueilli par le hizb <strong>de</strong> Sîdî Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY.En <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> leur zâwiya, les a<strong>de</strong>ptes sont souvent sollicités par lesgens proches du milieu <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa pour venir chanter à l'occasion <strong>de</strong>scérémonies <strong>de</strong> mariage ou <strong>de</strong> circoncision. Dans ces cas, ils font usaged'instruments <strong>de</strong> percussion (târ et bandîr) (81). <strong>Le</strong>ur contribution est toujoursgratuite.Mais <strong>de</strong>puis que les autres <strong>confrérie</strong>s <strong>de</strong> <strong>la</strong> région ont adopté cettemusique, les sfaxiens ne font plus appel aux a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-Karrâriyya pour animer leurs fêtes, et préfèrent plutôt <strong>la</strong> hadhra qui a vitehajj ilâ bayt-l-Lâh <strong>al</strong>-harâm" (visite <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>de</strong>meure sacrée). Ce pèlerinage aux lieux saints constituel'un <strong>de</strong>s cinq préceptes fondamentaux <strong>de</strong> <strong>la</strong> religion musulmane.(80) SIALA (Mourad), op. cit., p. 119.


76pris sa p<strong>la</strong>ce dans <strong>la</strong> société, puisqu'on y joue le <strong>répertoire</strong>, et on utilise <strong>de</strong>sinstruments <strong>de</strong> percussion, avec un instrument mélodique (<strong>la</strong> zukra) (82).(81) Voir le quatrième chapitre <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>de</strong>uxième partie <strong>de</strong> ce travail, p. 343 et 360.(82) Voir le quatrième chapitre <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>de</strong>uxième partie <strong>de</strong> ce travail, p.340.


Troisième chapitreLa a musique dans l’Is<strong>la</strong>m


781. - <strong>Le</strong> statut <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique dans l’Is<strong>la</strong>m1.1- L’opinion <strong>de</strong>s théologiensDepuis l'avènement <strong>de</strong> l'Is<strong>la</strong>m, <strong>la</strong> musique a toujours été un sujet <strong>de</strong>controverse entre ceux qui approuvent <strong>la</strong> licence <strong>de</strong> l'audition <strong>music<strong>al</strong></strong>e et ceuxqui <strong>la</strong> désapprouvent."Toutes les polémiques autour <strong>de</strong> ce problème neseraient pas apparues si le Coran avait explicitement mentionné <strong>la</strong> musique etstatué sur sa pratique" (83).En effet, l'absence <strong>de</strong> sûrât (versets) c<strong>la</strong>irs et tranchants sur ce sujetdans le Coran, source princip<strong>al</strong>e <strong>de</strong> <strong>la</strong> sharî`a islâmiya (loi canonique), apermis aux théologiens qui sont contre le samâ` (ou <strong>la</strong> musique), d'interpréterquelques versets <strong>de</strong> Coran pour justifier une condamnation <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique.Pour ne citer qu'un seul exemple, le verset :"<strong>Le</strong>ur prière d'ailleurs n'était quesifflement entre les doigts et battements <strong>de</strong> mains. Goûtez le châtiment méritépar votre infidélité"(84), a été retenu pour déduire une condamnation <strong>de</strong>ssifflets et <strong>de</strong>s battements <strong>de</strong>s mains et donc <strong>de</strong> <strong>la</strong> pratique <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique.De même, les théologiens défenseurs <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique, se sont basés surplusieurs versets pour répondre aux attaques <strong>de</strong>s puritains, et fon<strong>de</strong>r s<strong>al</strong>ég<strong>al</strong>ité. Ils ont ainsi retenu le verset suivant par exemple :"Sois mo<strong>de</strong>ste dans(83) DURING (Jean), Musique et extase L'audition mystique dans <strong>la</strong> tradition soufie, Paris, éd. AlbinMichel, 1988, p.218.(84) Coran (VIII, 34).


79ta démarche et parle sur un ton modéré, car le plus détestable <strong>de</strong>s cris est lebraiement <strong>de</strong> l'âne"(85), pour conclure que les voix agréables sont les plussouhaitables, approuvant ainsi <strong>la</strong> pratique du chant.Ce conflit se complique encore plus lorsque l'on se réfère à <strong>la</strong> sunna(l'ensemble <strong>de</strong>s paroles (hadîth) et <strong>de</strong>s actes du Prophète Muhammad), qui est<strong>la</strong> <strong>de</strong>uxième source <strong>de</strong> <strong>la</strong> sharî`a <strong>al</strong>-islâmiya. En effet, défenseurs etdétracteurs apportent <strong>de</strong>s arguments appuyés sur <strong>de</strong>s paroles ou <strong>de</strong>s actes duProphète qui semblent confirmer aussi bien l'une ou l'autre <strong>de</strong> ces positions.Cependant, ils ne sont pas tous authentifiés, d'où une autre source <strong>de</strong>dissension.Pour notre propos, qui n'était pas d'entrer dans les détails <strong>de</strong> cettepolémique qui a fait couler beaucoup d'encre, nous avons jugé préférable <strong>de</strong>parler <strong>de</strong> <strong>la</strong> position <strong>de</strong> pondération d'<strong>al</strong>-GhAZÂLÎ (1058-1111). Il représentele courant soufi qui a essayé <strong>de</strong> concilier les <strong>de</strong>ux parties adverses en adoptantune position intermédiaire faite <strong>de</strong> modération.1.2- La position d'<strong>al</strong>-GhAZÂLÎDans son traité Ihyâ' `ulûm ad-dîn (revivification <strong>de</strong>s sciences <strong>de</strong> <strong>la</strong>religion), qui constitue l'une <strong>de</strong>s plus importantes références du soufisme, AbûHâmed <strong>al</strong>-GhAZÂLÎ, ne condamne pas <strong>la</strong> musique en elle-même, mais plutôtson association à d'autres comportements et situations qui sont interdits par <strong>la</strong>religion is<strong>la</strong>mique telles que l'absorption du vin et <strong>la</strong> déchéance mor<strong>al</strong>e. Il(85) Coran (XXXI, 18).


80précise les situations où l'audition (ou <strong>la</strong> pratique) <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique peut êtrepermise :1/ - Musique et chants <strong>de</strong> pèlerins : <strong>Le</strong>s pèlerins faisaient <strong>de</strong>s tournéesdans les villes en chantant et en glorifiant les mérites du pèlerinage et <strong>de</strong> <strong>la</strong>sainteté <strong>de</strong> <strong>la</strong> Ka`ba afin d'éveiller <strong>la</strong> nost<strong>al</strong>gie <strong>de</strong>s lieux saints chez lesmusulmans. Mais ils ne doivent pas éveiller cette nost<strong>al</strong>gie chez les personnesqui ne peuvent pas s'y rendre.2/ - Chants militaires : Pour donner du courage et entraîner les hommesdans une guerre licite, et favoriser <strong>la</strong> volonté d'<strong>al</strong>ler répandre l'Is<strong>la</strong>m dans lemon<strong>de</strong>.3/ - Chants <strong>de</strong>s soldats au cours <strong>de</strong>s guerres saintes.4/ - Chants <strong>de</strong> <strong>la</strong>mentations, quand on a commis un péché.5/ - Chants <strong>de</strong> réjouissance à l'occasion <strong>de</strong>s fêtes tels que le mariage,<strong>la</strong> circoncision, <strong>la</strong> naissance, ou l'accueil d'un absent.6/ - Chants d'amour si l'être ex<strong>al</strong>té est en rapport légitime avecl'auditeur.7/ - Musique et chants mystiques qui amènent l'auditeur à l'état d'extase,<strong>al</strong>-wajd.Il précise aussi les situations où l'audition (ou <strong>la</strong> pratique) <strong>de</strong> <strong>la</strong> musiqueest strictement interdite (harâm) :1/ - chants <strong>de</strong> <strong>la</strong> femme ou <strong>de</strong> l'adolescent, si l'un ou l'autre peuventsusciter le désir chez l'auditoire.


812/ - Musique pratiquée avec <strong>de</strong>s instruments qu'utilisaient lesmukhannathûn (travestis, efféminés) ou les individus aux mœurs dissolues.3/ - Chants <strong>de</strong>s paroles obscènes moqueurs à l'égard <strong>de</strong>s croyants.4/ - Chants <strong>de</strong>s poèmes qui se réfèrent à l'amour adultère, ou quiconsiste à <strong>la</strong> <strong>de</strong>scription d'une femme en particulier.5/ - Dans les cas où on abuse <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique et où elle <strong>de</strong>vient unemanie, si on lui consacre trop <strong>de</strong> son temps au détriment <strong>de</strong>s <strong>de</strong>voirs religieux.(86).En ce qui concerne les instruments, <strong>al</strong>-Ghazâlî proscrit tout usaged'instruments, n'épargnant que quelques instruments <strong>de</strong> percussion telle que leduff ou le tb<strong>al</strong>.Cependant, et m<strong>al</strong>gré le débat qui ne fut jamais définitivement clos sur sonapprobation, et en dépit <strong>de</strong> <strong>la</strong> réticence <strong>de</strong> certains partisans <strong>de</strong> <strong>la</strong> prohibition<strong>de</strong> <strong>la</strong> musique dans <strong>la</strong> société musulmane, <strong>la</strong> musique, avec ses différentesformes, a pris une p<strong>la</strong>ce importante dans toutes les cérémonies <strong>religieuse</strong>s.2. les formes <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique <strong>religieuse</strong>2.1 - Ps<strong>al</strong>modie du CoranRecommandée par le Coran, <strong>la</strong> tilâwa (lecture, récitation du Coran), estsoumise à <strong>de</strong>s règles précises concernant <strong>la</strong> prononciation, l'intonation et lescésures, toutes ces directives ayant été données par le Prophète lui-même et(86) GHAZÂLÎ (Abu Hâmid <strong>al</strong>-), "ihyâ' `ulûm id-dîn", (Revivification <strong>de</strong>s sciences théologiques),Tunis, Dâr suhnûn li-n-nashr wa-t-tawzî` (maison d'édition et <strong>de</strong> diffusion Suhnûn), 1989, tome VI,pp. 1133-1134.


82transmises par <strong>la</strong> suite <strong>de</strong> génération en génération. Au IX ième siècle les fidèlesont commencé à "chanter" le Coran. "Une sura du Coran s'imprimecertainement avec plus <strong>de</strong> facilité que s'il est lu" (87). Cette lecture "chantée"connaît <strong>de</strong>ux mod<strong>al</strong>ités :2.1.1 - <strong>Le</strong> tartîl :C'est une récitation non répétitive et rapi<strong>de</strong> qui s'exécute en solo. <strong>Le</strong>tartîl se contente <strong>de</strong> quelques formules mélodiques dépourvues <strong>de</strong>modu<strong>la</strong>tions et évoluant sur un ambitus restreint inférieur à l'octave. C'est uneforme intermédiaire entre <strong>la</strong> lecture et le chant, qui obéit à <strong>de</strong>s règles bienprécises selon un modèle traditionnel " dont les règles strictes sont régies par<strong>la</strong> science <strong>de</strong> <strong>la</strong> lecture / uçûl ou `ilm <strong>al</strong>-tajwîd, qui connaît différentssystèmes" (88).Voici un exemple <strong>de</strong> tartîl <strong>de</strong> <strong>la</strong> quatre-vingt treizième sourate (Wadhdhuhâ),exécuté par le muqri' shaykh CHRÏM.(87) REINHARD (Ursu<strong>la</strong> et Kurt), Musique <strong>de</strong> Turquie, Collection <strong>Le</strong>s Traditions Music<strong>al</strong>es <strong>de</strong>l'Institut Internation<strong>al</strong> d'Étu<strong>de</strong>s Comparatives <strong>de</strong> <strong>la</strong> Musique, éd. BUCHET/CHASTEL, PARIS, 1997,p. 155.(88) GUETTAT (Mahmoud), <strong>la</strong> tradition <strong>music<strong>al</strong></strong>e arabe, op. cit., p. 49.


83Transcription d'un tartîl <strong>de</strong> <strong>la</strong> 93 ème sourate (Wadh-dhudhuhâ)â) (89)2.1.2 - <strong>Le</strong> tajwîd :C'est une forme beaucoup plus évoluée que le tartîl où le muqri' (lelecteur) exécute une récitation richement modulée, évoluant sur un ambitusqui dépasse parfois les <strong>de</strong>ux octaves (selon les qu<strong>al</strong>ités et les capacités voc<strong>al</strong>esdu muqri' ) (90) soumis à <strong>de</strong>s règles précises qui sont bien définies par <strong>la</strong>science <strong>de</strong> <strong>la</strong> lecture (`ilm at-tajwîd). Cette science qui consiste à spécifier tout(89) Exemple sonore n o(90) À part ses connaissances en science <strong>de</strong> <strong>la</strong> lecture (`ilm at-tajwîd), le muqri` doit être bien forméen musique.


84"un ensemble <strong>de</strong> disposition visant à <strong>la</strong> juste prononciation <strong>de</strong>s phonèmes dutexte sacré et l'observance <strong>de</strong> règles rythmiques et phoniques particulières quine s'appliquent qu'au Coran " (91).Comme dans toute lecture du Coran, le muqri' commence toujours sarécitation par <strong>de</strong>s formules obligatoires : "A`ûdhu bi-l-Lâhi mina-ch-chaytâner-rajîm"(Dieu me préserve <strong>de</strong> Satan), suivie immédiatement <strong>de</strong> : "Bismi-l-Lâhi-r-Rahmâni-r-Rahîm" (Au nom d'Al<strong>la</strong>h le Miséricordieux); il doitobligatoirement finir sa récitation par "Çadaqa-l-Lâhu-l-`Adhîm" (Dieu estgrand, sa parole est Vérité).Du point <strong>de</strong> vue "<strong>music<strong>al</strong></strong>", le tajwîd est purement voc<strong>al</strong>, il se fait ensolo, il est non mesuré; et le rythme est inspiré par <strong>la</strong> seule métrique du texte.Quant à <strong>la</strong> mélodie, elle se base sur l'un <strong>de</strong>s maqâm (mo<strong>de</strong>s) <strong>de</strong> <strong>la</strong> musiqueprofane. Aucun instrument <strong>de</strong> musique ne peut l'accompagner car il rappelletrop le mon<strong>de</strong> profane, et aucune sourate n'est associée à un maqâm ou à une"phrase <strong>music<strong>al</strong></strong>e" déterminée (on peut entendre <strong>la</strong> même sourate, tantôt dansun maqâm, tantôt dans un autre). <strong>Le</strong> tajwîd est caractérisé par le lentdéroulement du "chant", les notes tenues très longtemps, le changement <strong>de</strong>registre à <strong>la</strong> distance d'une octave, et enfin les silences extrêmement longsséparant les passages mélodiques au cours <strong>de</strong> l'exécution.Nous donnons ci-après <strong>la</strong> transcription d’un tajwîd <strong>de</strong> <strong>la</strong> même sourate (wadhdhuhâ)ré<strong>al</strong>isé par le shaykh Ab<strong>de</strong>l-Bâsset Abd-eççamad, le muqri’ le pluscélèbre dans le mon<strong>de</strong> musulman.(91) LAGRANGE (Frédéric), Musiques d'Egypte, cité <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique/actes du sud, 1996, p.54.


85Transcription d'un tajwjwîd <strong>de</strong> <strong>la</strong> 93 ème sourate (Wadh-dhudhuhâ)Il faut rappeler enfin que le tajwîd n'est en aucun cas considéré commeun genre <strong>de</strong> musique. "En plus du sens <strong>de</strong>s paroles divines, les seules quidoivent peser sur les émotions <strong>de</strong>s auditeurs, <strong>la</strong> "mélodie", par le biais <strong>de</strong>


86<strong>la</strong>quelle passent ces paroles, joue un rôle déterminant dans l'effet queprovoque <strong>la</strong> ps<strong>al</strong>modie du Coran sur les auditeurs. Ces <strong>de</strong>rniers doivent sesentir humbles à l'égard <strong>de</strong> <strong>la</strong> perfection du texte Divin et son Créateur.L'audition du Coran donc a pour fruit l'humilité (<strong>al</strong>-khushû`); et <strong>la</strong>manifestation <strong>de</strong> celle-ci se traduit uniquement par <strong>de</strong>s murmures et parfois<strong>de</strong>s pleurs" (92).2.2 - l'appel à <strong>la</strong> prière :Al-âdhân (ou l'âdhân) est l'appel que <strong>la</strong>nce le mu'adhdhin <strong>de</strong>puis sonminaret (93) pour inciter les fidèles à venir à <strong>la</strong> mosquée pour <strong>la</strong> prière.L'âdhân fut introduit dès les premières années <strong>de</strong> l'Is<strong>la</strong>m, du vivantmême du Prophète Muhammad. <strong>Le</strong> premier âdhân fut entendu du sommetd'une haute maison par Bilâl, choisis par le Prophète pour sa voix forte etsonore pour se faire entendre à distance; et dès 678 on édifia le premierminaret. Pour <strong>de</strong>s mosquées plus gran<strong>de</strong>s, on édifia <strong>de</strong>ux ou même quatretours semb<strong>la</strong>bles. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong> "l'âdhân" est toujours en arabe, <strong>la</strong> <strong>la</strong>ngue sacrée<strong>de</strong> l'Is<strong>la</strong>m. Il comprend habituellement sept lignes ou phrases courtes. <strong>Le</strong>s sixpremières phrases sont répétées <strong>de</strong>ux fois, et sont respectivement suivies <strong>de</strong>silences plus ou moins long.(92) SIALA (Mourad), op.cit. p.174(93) Une tour é<strong>la</strong>ncée avec au sommet une g<strong>al</strong>erie circu<strong>la</strong>ire d'où on peut <strong>la</strong>ncer l'appel aux quatrepoints cardinaux.


87Texte <strong>de</strong> l'âdhân en <strong>la</strong>ngue origin<strong>al</strong>e :Al-Lâhu akbarAl-Lâhu akbarAshhadu an lâ Ilâha il<strong>la</strong>-l-LâhAshhadu an lâ Ilâha il<strong>la</strong>-l-LâhAshhadu anna Muhammadan rasûlu-l-LâhAshhadu anna Muhammadan rasûlu-l-LâhHaiyya `a<strong>la</strong>-ç-ç<strong>al</strong>âtHaiyya `a<strong>la</strong>-ç-ç<strong>al</strong>âtHaiyya `a<strong>la</strong>-l f<strong>al</strong>âhHaiyya `a<strong>la</strong>-l f<strong>al</strong>âhAl-Lâhu akbarAl-Lâhu akbarLâ Ilâha il<strong>la</strong>-l-LâhTraduction :Al<strong>la</strong>h est grandJe témoigne qu'il n'y a d'autre Dieu qu'Al<strong>la</strong>hJe témoigne que Muhammad est l'envoyé d'Al<strong>la</strong>hVenez à <strong>la</strong> prièreVenez au s<strong>al</strong>utAl<strong>la</strong>h est grandIl n'est d'autre Dieu qu'Al<strong>la</strong>h


88Transcription d'un âdhân


89L'âdhân se fait cinq fois par jour : au point du jour pour <strong>la</strong> prière dumatin (ç<strong>al</strong>ât aç-çubh), à midi (pour ç<strong>al</strong>ât adh-dhuhr), à trois heures (pourç<strong>al</strong>ât <strong>al</strong>-`açr), au coucher du soleil (pour ç<strong>al</strong>ât <strong>al</strong>-maghrib) et à <strong>la</strong> tombée <strong>de</strong><strong>la</strong> nuit (pour ç<strong>al</strong>ât <strong>al</strong>-`ishâ').Dans l'âdhân du matin (pour ç<strong>al</strong>ât aç-çubh) on interc<strong>al</strong>e, avant <strong>la</strong>répétition <strong>de</strong> "Al<strong>la</strong>h est grand", <strong>la</strong> phrase suivante : "<strong>la</strong> prière est meilleure quele sommeil".La structure <strong>music<strong>al</strong></strong>e <strong>de</strong> l'âdhân comporte treize lignes qui comportent<strong>de</strong>s arrêts assez lents. L'extension du texte est obtenue par <strong>la</strong> répétition <strong>de</strong>chacune <strong>de</strong>s six premières lignes. Il se pratique génér<strong>al</strong>ement sur <strong>de</strong>s lignesmélodiques sobres et un ambitus restreint. Cependant, l'âdhân peut être plusé<strong>la</strong>boré et artistique, et richement modulé lorsqu'il est interprété par unmu'adhdhin d'une gran<strong>de</strong> mosquée citadine équipée d'un système électrique <strong>de</strong>sonorisation, avec en génér<strong>al</strong> quatre haut-parleurs fixés au sommet du minaretet tournés aux quatre vents. On peut <strong>al</strong>ors écouter l'âdhân sur les différentsmaqâm (mo<strong>de</strong>s) <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique arabe. Cependant, tout comme pour le tajwîd,les musulmans n'utilisent jamais le mot musique en par<strong>la</strong>nt <strong>de</strong> l'âdhân, car ce<strong>la</strong>rappelle trop le mon<strong>de</strong> profane.2.3 - Panégyriques et invocations <strong>de</strong> Dieu(<strong>al</strong>-madâ'ih wa-l-adhkâr)Al-madâ'ih (sing. madîh ou madh), sont <strong>de</strong>s poèmes louangeurs chantésen l'honneur du Prophète Muhammad, et <strong>al</strong>-adhkâr (plur. <strong>de</strong> dhikr) qui


90consiste en <strong>la</strong> répétition in<strong>la</strong>ssable <strong>de</strong> l'un <strong>de</strong>s Noms divins, suivant unemétho<strong>de</strong> <strong>de</strong> récitation appropriée à <strong>la</strong> formule choisie. Dans <strong>la</strong> tarîqa`Issâwiyya par exemple, <strong>la</strong> formule imposée au dhikr collectif se réfère aupremier membre <strong>de</strong> <strong>la</strong> shahâda (profession <strong>de</strong> <strong>la</strong> foi qui affirme l'unicité <strong>de</strong>Dieu par <strong>la</strong> déc<strong>la</strong>ration que point <strong>de</strong> divinité excepté Dieu : "lâ Ilâha il<strong>la</strong>-l-Lâh"). Dans une <strong>de</strong>uxième phase, <strong>la</strong> formule est réduite à <strong>la</strong> répétition du nomd'Al<strong>la</strong>h suivi du terme "huwa" (lui) en hommage à l'ineffabilité divine, lessyl<strong>la</strong>bes s'am<strong>al</strong>gament les uns aux autres formant <strong>la</strong> suite ininterrompue du"cercle" ésotérique sur un rythme monotone qui provoque l'extase. Allâhhuwa, Allâh huwa <strong>de</strong>vient huwa-l-Lâh avant <strong>de</strong> se transformer simplement enH<strong>al</strong>lâhu - H<strong>al</strong>lâhu - H<strong>al</strong>lâhu - H<strong>al</strong>lâhu - Lâhu - Lâhu - Lâhu - Lâhu - Lâh -Lâh - Lâh - Lâh …<strong>Le</strong>s adhkâr peuvent prendre plusieurs formes et être accomplis à <strong>la</strong>mosquée ou dans <strong>la</strong> zâwiya, contrairement au "dhikr <strong>al</strong>-hadhra" qui n'estpratiquée que dans <strong>la</strong> zâwiya et qui se divise habituellement en <strong>de</strong>ux parties:La première consiste en <strong>de</strong>s litanies précédées <strong>de</strong> <strong>la</strong> récitation <strong>de</strong> versetscoraniques. La <strong>de</strong>uxième partie, aujourd'hui prioritaire dans <strong>la</strong> séanced'invocation, s'é<strong>la</strong>rgie au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> l'éloge faite à Dieu et à son Prophète, vers lessaints, maîtres <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa. Mais <strong>la</strong> particu<strong>la</strong>rité qui <strong>la</strong> caractérise le mieux,c'est <strong>la</strong> présence <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique qui est très riche aussi bien en mélodie qu'enrythme, et qui occupe une p<strong>la</strong>ce très importante dans presque toutes les


91cérémonies <strong>religieuse</strong>s. Sa force est mise au service <strong>de</strong> <strong>la</strong> foi. Elle ai<strong>de</strong> leshommes à se plonger dans un état <strong>de</strong> d'âme surhumain, surnaturel et divin.3. - L’introduction <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique dans les zawâyâ <strong>de</strong> SfaxD'après les documents dont nous disposons, nous ne pouvons pasaffirmer ou infirmer l'idée que <strong>la</strong> musique ait été pratiquée dans les zawâyâ <strong>de</strong><strong>la</strong> région <strong>de</strong> Sfax par les soufis avant <strong>la</strong> fondation <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong> <strong>al</strong>-Karrâriyya, dont le fondateur d'après <strong>la</strong> légen<strong>de</strong>, fut le premier à introduire <strong>la</strong>musique dans le mon<strong>de</strong> mystique <strong>de</strong> <strong>la</strong> région.3.1 - <strong>la</strong> légen<strong>de</strong>Lors <strong>de</strong> notre enquête sur le terrain, toutes les personnes interrogées(94), qu'elles soient a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-Karrâriyya ou non, nous ont racontéune légen<strong>de</strong>, très répandue d'ailleurs dans le milieu mystique <strong>de</strong> <strong>la</strong> région <strong>de</strong>Sfax. Elle affirme que c'est le shaykh <strong>al</strong>-KARRÂY qui a introduit <strong>la</strong> musiquedans <strong>la</strong> tradition soufie <strong>de</strong> <strong>la</strong> région.On raconte qu'un soir, et contrairement à leur habitu<strong>de</strong>, les a<strong>de</strong>ptes n'ontpas assisté au majlis du shaykh abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY pour <strong>al</strong>ler voir unorchestre <strong>de</strong> musique traditionnelle tunisienne (mâlûf) qu'on avait fait venir <strong>de</strong>Tunis pour animer une fête <strong>de</strong> mariage à zqâq adh-dhhab, un quartier pas loin<strong>de</strong> celui <strong>de</strong> <strong>la</strong> zâwiya du shaykh <strong>al</strong>-KARRÂY. Celui-ci, se rendant compte <strong>de</strong>l’importance du mâlûf pour les gens et pour les a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> sa tarîqa, décida(94) Notamment, Sadok JEMAL et Ab<strong>de</strong>lhafidh MARRAKSHI, anciens a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-Karrâriyya.


92d'apprendre son <strong>répertoire</strong>. Pour ce<strong>la</strong>, il invita les musiciens chez lui. Par <strong>la</strong>suite, il adapta <strong>de</strong>s paroles soufis à <strong>la</strong> musique du mâlûf. De cette manière, ilparvint à enrichir ses majâlis par l'introduction <strong>de</strong> cette musique.Depuis, on a vu entrer <strong>la</strong> musique dans toutes les <strong>confrérie</strong>s, etnotamment dans les <strong>confrérie</strong>s `Awâmriyya, `Issâwiyya et Qâdriyya. Maiscelles-ci, contrairement à <strong>la</strong> Karrâriyya, utilisent <strong>de</strong>s instruments <strong>de</strong> musique.3.2. La propagation <strong>de</strong> cette musiquedans les autres <strong>confrérie</strong>s <strong>de</strong> <strong>la</strong> régionLa musique, nous l’avons vu, est <strong>de</strong>venue présente dans toutes les<strong>confrérie</strong>s <strong>de</strong> <strong>la</strong> région <strong>de</strong> Sfax, qui ont suivi l’exemple <strong>de</strong> sîdî Abû-l-Hassan<strong>al</strong>-KARRÂY. Elles ont introduits le chant avec les instruments <strong>de</strong> musique, etaussi <strong>la</strong> danse dans leur séance collective qui s'appelle <strong>la</strong> hadhra. Cette<strong>de</strong>rnière diffère d'une <strong>confrérie</strong> à l'autre par le <strong>répertoire</strong> chanté et le rituel <strong>de</strong><strong>la</strong> danse. Cependant, certaines étapes qui <strong>la</strong> constituent restent communes àtoutes les <strong>confrérie</strong>s.Pour donner une idée assez c<strong>la</strong>ire sur le fonctionnement etl'organisation <strong>de</strong>s <strong>confrérie</strong>s et <strong>de</strong> leurs rituel, il nous a paru essentiel <strong>de</strong>donner un bref aperçu <strong>de</strong> trois gran<strong>de</strong>s <strong>confrérie</strong>s, considérées comme les plusimportantes <strong>de</strong> <strong>la</strong> région : <strong>la</strong> `Awâmriyya, <strong>la</strong> Qâdriyya et <strong>la</strong> `Îssâwiyya.3.2.1 - La `AwâmriyyaElle est fondée par Sîdî `Âmir <strong>al</strong>-MZÛGHI (m.1639) dont le mausoléeexiste jusqu'à nos jours à Henshîr louhîshî son vil<strong>la</strong>ge nat<strong>al</strong>, situé à cent


93kilomètres au Nord <strong>de</strong> Sfax, et appelé actuellement Sîdî `Âmir. D'après SadokRIZGUI, <strong>la</strong> `Awâmriyya dérive <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa Qashshâshiyya (disparue <strong>de</strong> nosjours), à savoir que sîdî `Âmir fut un disciple <strong>de</strong> son fondateur Abû-l-Ghayth<strong>al</strong>-Qashshâsh (m.1621) qui lui a appris les sciences juridiques.La `Awâmriyya est <strong>la</strong> tarîqa qui a le plus d'a<strong>de</strong>ptes dans <strong>la</strong> région <strong>de</strong>Sfax, et ce<strong>la</strong> résulte à notre avis du long séjour (quarante ans) qu'a effectuésîdî `Âmir à Sfax avant <strong>de</strong> repartir pour son vil<strong>la</strong>ge nat<strong>al</strong> où il a bâti sa proprezâwiya.Comme les a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa n'avaient pas leur propre zâwiya pourexercer les pratiques rituelles <strong>de</strong> leur <strong>confrérie</strong>, à l'instar <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s <strong>confrérie</strong>s<strong>de</strong> <strong>la</strong> région, les fidèles se réunissaient dans <strong>de</strong>s zawâyâ bâties par d'autressaints. Parmi ces zawâyâ, citons <strong>la</strong> zâwiya <strong>de</strong> sîdî `ABBÂS aj-Jdîdî (95) auNord-Est <strong>de</strong> <strong>la</strong> ville dans une rue connue actuellement sous le nom <strong>de</strong> "rue el-Jamm", <strong>la</strong> zâwiya <strong>de</strong> sîdî SLÂMA (96) à Bâb el-qaçba et <strong>la</strong> zâwiya <strong>de</strong> sîdî BÛ`ALI à rue ed-Drîba.Semb<strong>la</strong>blement aux autres <strong>confrérie</strong>s, <strong>la</strong> `Awâmriyya dispose d'uneorganisation hiérarchique bien structurée où chaque a<strong>de</strong>pte se charge d'unetache bien déterminée et assure une fonction très précise pour garantir le bondéroulement <strong>de</strong>s différentes pratiques rituelles <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa, que se soit au(95) C'est <strong>la</strong> zâwiya où le shaykh `Âmir <strong>al</strong>-MZÛGHI a résidé pendant son séjour à Sfax. Elle estfondée par le shaykh `ABBÂS aj-Jdîdî, venu du Maroc pour s'inst<strong>al</strong>ler à Sfax. Il est connu pour sonsavoir et son amour pour <strong>la</strong> religion et le jihâd. Il est mort en 1148 en combattant les normands lors <strong>de</strong>leur invasion <strong>de</strong> Sfax. Cf. MAGDISH (Mahmoud), op.cit., tome 2, p.140.(96) <strong>Le</strong> shaykh SLÂMA ben Yazîd <strong>al</strong>-Qurashî, mort en 1426, homme <strong>de</strong> religion et <strong>de</strong> sciences, il afondé sa propre zâwiya pour y donner <strong>de</strong>s cours <strong>de</strong> théologie musulmane. C'était l'un <strong>de</strong>s murâbitîn dudébut du 15 ème siècle. Cf. `ABD EL-KÂFÎ Abû Bakr, târîkh çafâqus (histoire <strong>de</strong> Sfax), tunis, 1966,tome1, p159.


94cours d'une séance <strong>de</strong> hadhra ou pendant sa contribution aux différentesmanifestations en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> <strong>la</strong> zâwiya. Ces rôles et ces fonctions sont commesuit:- Shaykh <strong>al</strong>-hizb: Chef <strong>de</strong> branche; il représente l'autorité spirituelle à <strong>la</strong>quelletous les a<strong>de</strong>ptes sont subordonnés. Il organise les manifestations da <strong>la</strong> tarîqa àl'intérieur et à l'extérieur <strong>de</strong> <strong>la</strong> zâwiya. C'est le premier responsable <strong>de</strong> <strong>la</strong>zâwiya puisqu'il occupe <strong>la</strong> plus haute fonction dans le hizb. <strong>Le</strong> shaykh <strong>al</strong>-hizbest appelé aussi muqaddim qui signifie "privilégié", "celui qui prend <strong>la</strong>première p<strong>la</strong>ce".- Shaykh <strong>al</strong>-hadhra : Chef <strong>de</strong>s réunions, c'est lui qui prési<strong>de</strong> <strong>la</strong> séance <strong>de</strong> <strong>la</strong>hadhra : il donne le coup d'envoi et organise les apports <strong>de</strong>s a<strong>de</strong>ptes.- Shaykh <strong>al</strong>-`am<strong>al</strong> : C'est le chef <strong>de</strong>s musiciens. Il est le responsable <strong>de</strong>l'exécution <strong>music<strong>al</strong></strong>e, et doit donc avoir une ample connaissance <strong>de</strong>s tubû`, <strong>de</strong>srythmes et <strong>de</strong>s chants, et joue génér<strong>al</strong>ement un instrument <strong>de</strong> percussion(habituellement le târ).- Shâwish <strong>al</strong>-hizb : il veille sur <strong>la</strong> propreté <strong>de</strong> <strong>la</strong> zâwiya et s'occupe <strong>de</strong> sonentretient, mais son rôle princip<strong>al</strong> est d'informer les murîdîn (les a<strong>de</strong>ptes) <strong>de</strong>sdates <strong>de</strong>s réunions da <strong>la</strong> tarîqa, et <strong>de</strong> leur communiquer les instructions dushaykh <strong>al</strong>-hizb. Il faut sign<strong>al</strong>er ici qu'il peut y avoir plus qu'un shâwish et ce<strong>la</strong>dépend du nombre <strong>de</strong>s murîdîn dans <strong>la</strong> zâwiya. Dans ce cas, on désigne un


95Bâsh-shâwish [le chef <strong>de</strong>s shuwwâsh (plur. <strong>de</strong> shâwish)]. Cette fonction estmaintenant remp<strong>la</strong>cée par le naqîb.- Saqqâ` : Echanson, il donne à boire aux a<strong>de</strong>ptes à l'intérieur <strong>de</strong> <strong>la</strong> zâwiya etaussi pendant les kharjât (plur. <strong>de</strong> kharja : sortie) ou toute autre manifestation<strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> <strong>la</strong> zâwiya. Tout comme le poste <strong>de</strong> bâsh-shâwish, il ya le bâsh-saqqâ` si le nombre <strong>de</strong>s a<strong>de</strong>ptes nécessite plusieurs saqqâ'ûn (pluriel<strong>de</strong> saqqâ`).- `Allâm: porteur <strong>de</strong> "sanjaq" (plur. snâjaq), espèce <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> bannière enétoffe <strong>de</strong> soie <strong>de</strong> couleurs spécifiques <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa attachée à une longuehampe en bois que surmontent une boule et un croissant en mét<strong>al</strong> doré. Lors<strong>de</strong>s manifestations du hizb en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> <strong>la</strong> zâwiya, les `<strong>al</strong>lâma, avec leur chef,le bâsh-`<strong>al</strong>lâm, au premier rang, tiennent <strong>la</strong> hampe obliquement avec les <strong>de</strong>uxmains entre<strong>la</strong>cées, les bras tendus, ils reposent l'extrémité inférieure <strong>de</strong> <strong>la</strong>hampe sur le torse à hauteur <strong>de</strong> <strong>la</strong> ceinture. Chaque `<strong>al</strong>lâm est responsable <strong>de</strong><strong>la</strong> maintenance <strong>de</strong> son "sanjaq" qui, comme tout drapeau, doit être toujours entrès bon état.- murîdûn [ou murîdîn (selon <strong>la</strong> conjugaison)] : les a<strong>de</strong>ptes, ce sont lesadhérents <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa. Ils n'ont pas <strong>de</strong> rôles précis à faire si ce n'est que réciteraprès chacune <strong>de</strong>s cinq prières quotidiennes, le wird <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa Shâdhliyya.<strong>Le</strong>s musiciens quant à eux, jouent un rôle prépondérant dans lerassemblement <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa `Awâmriyya puisque <strong>la</strong> musique occupe une p<strong>la</strong>cetrès importante dans ces rassemblements. Il faut cependant remarquer que les


96musiciens qui assurent l'exécution du <strong>répertoire</strong> `Awâmriyya, ne font pasforcément partie <strong>de</strong>s a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa, ils peuvent être <strong>de</strong>s adhérents ou <strong>de</strong>ssympathisants d'une autre <strong>confrérie</strong>. Ce sont <strong>de</strong>s professionnels qui jouentpour toutes les turuq <strong>de</strong> <strong>la</strong> région comme c'est le cas d'ailleurs du shaykhBudayya, le célèbre zakkâr (joueur <strong>de</strong> zukra) qui apprenait et jouait les<strong>répertoire</strong>s <strong>de</strong> toutes les turuq <strong>de</strong> <strong>la</strong> région <strong>de</strong> Sfax. Néanmoins il sont p<strong>la</strong>céssous l'ordre d'un a<strong>de</strong>pte <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa faisant partie <strong>de</strong> <strong>la</strong> hiérarchie du hizb: leShaykh <strong>al</strong>-`am<strong>al</strong>, le premier responsable <strong>de</strong> l'exécution <strong>music<strong>al</strong></strong>e et le chef <strong>de</strong>s:- 'Âlâtjiyya : les Instrumentistes qui sont : le Zakkâr (joueur <strong>de</strong> zukra seulinstrument mélodique <strong>de</strong> l'orchestre), le drâbkî (joueur <strong>de</strong> darbûka) et lesbnâdriyya (plur. <strong>de</strong> bnâdrî) (97)- Muraddidûn (ou qawwâ<strong>la</strong>) : les chanteurs, le chor<strong>al</strong>e qui assure le chant <strong>de</strong>snûbât `awâmriyya. Ils s'engagent parfois avec les Mjâdhîb (les danseurs) dans<strong>la</strong> danse.<strong>Le</strong>s a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> <strong>la</strong> `Awâmriyya se rencontrent comme le veut <strong>la</strong> tradition,<strong>la</strong> veille du vendredi, jour sacré <strong>de</strong>s Musulmans, dans <strong>la</strong> zâwiya pour y exercerles pratiques rituelles <strong>de</strong> leur <strong>confrérie</strong> imposées par le fondateur lui-même.Ces pratiques ne sont pas très spécifiques à <strong>la</strong> tarîqa `Awâmriyya. Ellesressemblent à celles <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa `Issâwiyya et <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa Shâdhliyya. C'estpour ce<strong>la</strong> que nous contenterons <strong>de</strong> dire qu'elles consistent d'une façon(97) Nous rappelons ici que l'orchestre dans presque toutes les turuq çûfiyya se compose d'un zakkâr,un drâbkî et trois ou plus bnadriyya.


97génér<strong>al</strong>e en <strong>de</strong>s panégyriques à <strong>la</strong> gloire <strong>de</strong> Dieu et <strong>de</strong> son Prophète, et surtout<strong>de</strong> sîdî `Âmir le saint fondateur <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa. La soirée commence par une série<strong>de</strong> adhkâr (sing. dhikr : Une invocation à Dieu, brève formule répétitive).Tous les a<strong>de</strong>ptes participent dans cette séance <strong>de</strong> dhikr après quoi, les a<strong>de</strong>ptescè<strong>de</strong>nt <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ce aux musiciens et passent à <strong>la</strong> <strong>de</strong>uxième étape, <strong>la</strong> plusimportante du rassemblement, qui porte le nom <strong>de</strong> hadhra. Cette <strong>de</strong>rnièrecommence par un chant court qu'on appelle un khafif sghir, composé sur unrythme vif. Après quoi, les instrumentistes procè<strong>de</strong>nt à l'exécution d'une pièceinstrument<strong>al</strong>e appelée istiftâh (prélu<strong>de</strong>, <strong>la</strong> première partie <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba), ilsenchaînaient par <strong>la</strong> suite les autres parties <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba sur quoi les a<strong>de</strong>ptesdansaient et tombaient en transe. Ensuite, l'orchestre entame le jeu <strong>de</strong> quelquespièces du <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong>s nûbât khfâf (<strong>de</strong>s pièces légères, assez courtes,chantées à <strong>la</strong> gloire <strong>de</strong>s saints et marabouts locaux); puis joue <strong>la</strong> nûba "SîdîMançûr" pour annoncer <strong>la</strong> fin <strong>de</strong> <strong>la</strong> hadhra.3.2.2 - La `ÎssâwiyyaElle est fondée par le shaykh Muhammad ben `ÎSSÂ <strong>al</strong>-MIKNÂSI (mortà Miknâss (Maroc) vers 1526) (98). La <strong>confrérie</strong> `Îssâwiyya est considéréecomme une continuation et un prolongement <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa Jâzûliyya (99)(98 ) DEPONT (Octave) et COPPOLANI (Xavier), les <strong>confrérie</strong>s <strong>religieuse</strong>s musulmanes, Alger,1897, pp.455-456.(99) La tarîqa Jâzûliyya est fondée par le shaykh Muhammad ben Slîmân <strong>al</strong>-JAZÛLÎ (mort en 1463).Très popu<strong>la</strong>ire surtout en Algérie et au Maroc, elle a joué un rôle important dans <strong>la</strong> vie soci<strong>al</strong>e,culturelle et politique dans ces <strong>de</strong>ux pays à <strong>la</strong> fin du XV ème siècle et les siècles qui ont suivis. Cf.MAKHLOUF (Mohamed), "shajarat an-nûr az-zakiyya fî-t-tabaqât <strong>al</strong>-mâlikiyya", Dâr <strong>al</strong>-Ma`ârif, leCaire, 1930, Tome 1, p.264. et CHARLES ANDRE (Julien), Histoire du Nord Afrique, traduit enarabe par MZALI (Mohamed) et BEN SLAMA (Béchir), Tunis, 1969, p.245.


98puisque le shaykh Ben `ÎSS était l'élève du shaykh Abî `Abbâss Ahmad ben`Umar <strong>al</strong>-HÂRITHÎ, disciple du shaykh Muhammad <strong>al</strong>-JAZÛLÎ, le fondateur<strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa Jazûliyya, qui lui a apprit les traditions soufies (100).Au début, les pratiques <strong>de</strong> <strong>la</strong> `Îssâwiyya n'étaient pas très compliquéesni <strong>al</strong>iénantes, elles se limitaient à <strong>de</strong>s panégyriques et <strong>de</strong>s prières préconiséespar le shaykh fondateur. Par <strong>la</strong> suite, les a<strong>de</strong>ptes ont déviés leur tarîqa <strong>de</strong> saconception originelle. Ils ont introduits <strong>de</strong>s pratiques fakiristes qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt<strong>de</strong>s exercices corporels violents tels que danser et marcher sur <strong>de</strong>s braises,mâcher et av<strong>al</strong>er <strong>de</strong>s clous et <strong>de</strong>s morceaux <strong>de</strong> verre, manger <strong>de</strong>s scorpionsvivants, transpercer le corps avec <strong>de</strong> grosses aiguilles ou <strong>de</strong>s épées, etc.Bien que ses pratiques soient condamnées par l'orthodoxie musulmane,La <strong>confrérie</strong> `Îssâwiyya, <strong>de</strong>venue très popu<strong>la</strong>ire au Maroc, a franchi lesfrontières et s'est propagée dans tout le Maghreb. Elle est connue en Tunisie<strong>de</strong>puis le début du XVIII ème siècle, et <strong>de</strong>venue <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong> <strong>la</strong> plus puissante et<strong>la</strong> plus répandue en Tunisie (on comptait 125 zâwiya en 1887 dans tout lepays) (101). En 1796, le shaykh Muhammad ben Muhammad as-SIÂl a fondé<strong>la</strong> première zâwiya <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa `Issâwiyya à Sfax, et <strong>de</strong>vant le nombrecroissant <strong>de</strong>s a<strong>de</strong>ptes sfaxiens, les zawâyâ se sont multipliées pour atteindre lenombre <strong>de</strong> douze en 1887, et dix-sept en 1925 (102).(100) MAKHLOUF (Mohamed), Ibid., p.264.(101) KASRÂWI (<strong>al</strong>-Azhar), "at-Turuq aç-çûfiyya bi çafâqus", (<strong>Le</strong>s <strong>confrérie</strong>s <strong>religieuse</strong>s à Sfax),Mémoire <strong>de</strong> C.A.R., Faculté <strong>de</strong>s sciences humaines, Tunis, 1985.(102) KASRÂWI (<strong>al</strong>-Azhar), op.cit., p. 193.


99Tout comme <strong>la</strong> `Awâmriyya, le fonctionnement <strong>de</strong> chaque hizb(branche) <strong>de</strong> <strong>la</strong> `Îssâwiyya est assuré par une distribution <strong>de</strong> taches parmi lesa<strong>de</strong>ptes d'une façon bien structurée et hiérarchisée. Ainsi, dans chaque zâwiya`Îssâwiyya nous trouvons :- Shaykh <strong>al</strong>-hizb : élu par les a<strong>de</strong>ptes pour diriger <strong>la</strong> zâwiya et veiller sur lebon déroulement <strong>de</strong>s pratiques <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa à l'intérieur et à l'extérieur <strong>de</strong> <strong>la</strong>zâwiya. C'est le premier responsable dans <strong>la</strong> zâwiya et le chef spirituelsymbolisant <strong>la</strong> plus gran<strong>de</strong> autorité. C'est lui qui nomine parmi les a<strong>de</strong>ptesceux qui doivent assurer les fonction suivantes :- Shaykh <strong>al</strong>-hadhra : il dirige <strong>la</strong> séance <strong>de</strong> <strong>la</strong> hadhra et donne les coupsd'envoi.- Ra'îss <strong>al</strong>-'âlâtjiyya : c'est le chef <strong>de</strong>s musiciens et le responsable <strong>de</strong>l'exécution <strong>music<strong>al</strong></strong>e. Il correspond à shaykh <strong>al</strong>-`am<strong>al</strong> dans <strong>la</strong> `Awâmriyya etdoit avoir les mêmes aptitu<strong>de</strong>s.- Bâsh Shâwish : le chef <strong>de</strong>s chaouchs, appariteurs; il communique lesinstructions du shaykh <strong>al</strong>-hizb aux shuwwâsh (pluriel <strong>de</strong> shâwish) pour lestransmettre aux a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa- Shâwish : il s'occupe <strong>de</strong> l'entretient <strong>de</strong> <strong>la</strong> zâwiya, et informe les murîdîn (lesa<strong>de</strong>ptes) <strong>de</strong>s dates <strong>de</strong>s réunions da <strong>la</strong> tarîqa fixées par Shaykh <strong>al</strong>-hizb. Ils'appelle aussi `Allâf parce qu'il se charge <strong>de</strong> préparer et <strong>de</strong> donner auxdanseurs tout ce dont ils ont besoin pour <strong>la</strong> danse : les morceaux <strong>de</strong> verre, lesclous, les aiguilles, les feuilles <strong>de</strong> cactus, etc.


100- Bâsh saqqâ' : le chef <strong>de</strong>s échansons.- Saqqâ' : l'échanson, il donne à boire aux a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa.- Bâsh `<strong>al</strong>lâm : le chef <strong>de</strong>s `<strong>al</strong>lâma (plur. <strong>de</strong> `<strong>al</strong>lâm).- `Allâm : porteur d'étendards, il assure les mêmes taches que son homologue<strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa `Awâmriyya- Muridûn (ou murîdîn selon <strong>la</strong> conjugaison) : les a<strong>de</strong>ptes. Pour adhérer à <strong>la</strong>tarîqa, le nouveau venu doit subir un rituel bien précis après avoir choisi lerôle qu'il va jouer dans le hizb lors <strong>de</strong> <strong>la</strong> danse. Chedly BEN ABDALLAHnous décrit cette cérémonie : " tout postu<strong>la</strong>nt doit en effet opter pour un thèmetotémique auquel il lui sera possible <strong>de</strong> s'i<strong>de</strong>ntifier : lion, autruche, épervier,chameau, etc. Lors <strong>de</strong> son initiation, le nouveau venu - qui doit âtre parrainépar <strong>de</strong>ux frères <strong>de</strong> l'ordre – est soumis à un rituel obédientiel. C'est ainsi que leshaykh <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong>, […] fait le simu<strong>la</strong>cre <strong>de</strong> lui cracher dans <strong>la</strong> boucheaprès lui avoir murmuré à l'oreille le mot secret initiatique. C'est seulementaprès ce rituel que le néophyte peut participer aux hadhra <strong>de</strong> <strong>la</strong> Aïssawyia pouratteindre à l'état d'ex<strong>al</strong>tation qui lui permet <strong>de</strong> s'i<strong>de</strong>ntifier au thème qu'il achoisi" (103).Comme dans <strong>la</strong> `Awâmriyya, <strong>la</strong> hadhra `Îssâwiyya est composée <strong>de</strong><strong>de</strong>ux parties : Une première assurée par le shaykh <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa qui récitequelques versets <strong>de</strong> Coran, appelée dhikr; et une <strong>de</strong>uxième, <strong>la</strong> plus importante,(103) BEN ABDALLAH (Chedly), Fêtes <strong>religieuse</strong>s et rythmes <strong>de</strong> Tunisie, Tunis, J.P.S EDITIONS,1988, p146.


101qui est <strong>la</strong> hadhra, et qui donne d'ailleurs son nom à tout le rassemblement <strong>de</strong><strong>la</strong> soirée.La hadhra est animée par le chant <strong>de</strong> quatre nûbât (plur. <strong>de</strong> nûba). Lapremière étant c<strong>al</strong>me et sereine, elle n'est pas accompagnée <strong>de</strong> danse. A <strong>la</strong><strong>de</strong>uxième nûba, les danseurs se lèvent et se préparent à <strong>la</strong> danse en s'<strong>al</strong>ignant<strong>de</strong>vant l'orchestre, le rythme <strong>de</strong>vient <strong>al</strong>ors vif, et <strong>la</strong> musique plus intense; <strong>la</strong>danse sur cette nûba est collective et très organisée, elle apprête les danseurspour atteindre une certaine concentration, indispensable pour entamer <strong>la</strong>troisième nûba. C'est à ce moment là que commence <strong>la</strong> danse spécifique à <strong>la</strong>tarîqa `Îssâwiyya, qui est assez spectacu<strong>la</strong>ire, où les danseurs entrent un à unen transe. Ils se détachent les uns <strong>de</strong>s autres et <strong>la</strong> danse <strong>de</strong>vient <strong>al</strong>orsindividuelle. Chaque danseur, se <strong>la</strong>issant <strong>al</strong>ler avec le rythme qui <strong>de</strong>vientencore plus vif et plus accéléré, et <strong>la</strong> musique plus intense, incarne le rôle qu'i<strong>la</strong> choisi. On assiste <strong>al</strong>ors à <strong>de</strong> tumultueuses exhibitions: certains mangent <strong>de</strong>sscorpions vivants, d'autres prennent <strong>de</strong>s morceaux <strong>de</strong> verre et <strong>de</strong>s clous qu'ilsmâchent avec jouissance et qu'ils av<strong>al</strong>ent, ou encore d'autres les torses nues, seroulent en tous sens sur <strong>de</strong>s souches <strong>de</strong> cactus qu'on avait préparé à cet usage.S<strong>la</strong>yem DÂWED un ancien a<strong>de</strong>pte <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa `Îssâwiyya, lui-même étaitharbâwî (il se transperçait le corps avec une harba : baïonnette), qu'on ainterrogé au sujet <strong>de</strong> ces pratiques, affirme que ces danseurs n'arrivaient à fairece<strong>la</strong> qu'en état <strong>de</strong> transe, en joignant leurs esprits à celui <strong>de</strong> Sîdî BEN `ISSA, le


102saint fondateur <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa qui leurs donnait le pouvoir d'affronter cesépreuves sans avoir m<strong>al</strong> et sans le moindre inci<strong>de</strong>nt.Pendant <strong>la</strong> quatrième nûba, <strong>la</strong> <strong>de</strong>rnière <strong>de</strong> <strong>la</strong> hadhra `Îssâwiyya, onassiste à une scène encore plus spectacu<strong>la</strong>ire et un phénomène très étrange.Cette nûba est en fait une pièce instrument<strong>al</strong>e dont l'exécution est très forte,les musiciens jouent <strong>de</strong> leurs instruments le plus fort possible sur un rythmetrès accéléré pour amener les danseurs au sommet <strong>de</strong> leur état <strong>de</strong> ravissementet d'ivresse. D'ailleurs cette phase <strong>de</strong> <strong>la</strong> hadhra s'appelle mukhammra (quivient du terme khamra : vin, et qu'on pourrait traduire par : "<strong>la</strong> phase qui faitaccé<strong>de</strong>r à l'ivresse sacrée". Dans cette phase, les danseurs sont donc au plusfort <strong>de</strong> leur transe. Ils se déchaînent <strong>de</strong> l'esprit <strong>de</strong> leur grand shaykh, etincarnent les esprits <strong>de</strong>s animaux qui imitent leurs faits et gestes sous lecontrôle du Shâwish qui reste attentif et prêt à intervenir car les danseurs<strong>de</strong>viennent aussi dangereux que les animaux qu'ils incarnent. A <strong>la</strong> fin <strong>de</strong> cettenûba, les danseurs reprennent conscience sous l'ordre <strong>de</strong> leur Shâwish, et ainsise termine <strong>la</strong> hadhra `Îssâwiyya qui a dévié <strong>de</strong> <strong>la</strong> conception originelle qui luiavait donné naissance, et qui n'a gardé <strong>de</strong> <strong>la</strong> mystique du fondateur <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqaqu'un rituel édulcoré, voire tot<strong>al</strong>ement déformé et en contradiction f<strong>la</strong>granteavec <strong>la</strong> pureté <strong>de</strong> l'Is<strong>la</strong>m.3.2.3 - La QâdriyyaElle doit son nom à Sîdî `Ab<strong>de</strong>lqâdir aj-JÎLÂNÎ (1077-1166), un <strong>de</strong>s`u<strong>la</strong>mâ' (sing. `âlim : savant, docteur), les plus célèbres <strong>de</strong> son époque. "Il ne


103fonda pas sa tarîqa et ne compta pas <strong>de</strong> soufis parmi ses élèves, toutefois sonenseignement fut transmis dans quelques centres au zèle <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> ses fils,puis <strong>de</strong> leurs <strong>de</strong>scendants" (104). La tarîqa Qâdriyya fut donc fondée au XII èmesiècle mais ne <strong>de</strong>vint puissante qu'à partir du XV èmesiècle. D'aprèsKASRÂWÎ, elle est <strong>la</strong> première tarîqa fondée dans le mon<strong>de</strong> musulman qui adonné naissance à toutes les autres turuq çûfiyya (105). La Qâdriyya estmaintenant représentée dans presque tout le mon<strong>de</strong> musulman etparticulièrement répandue en Orient, surtout en Turquie, Kurdistan,Afghanistan, Pakistan et en In<strong>de</strong>.Au Maghreb, elle est déjà connue au XII ème siècle du vivant même dushaykh `Ab<strong>de</strong>lqâdir aj-JÎLÂNÎ grâce à son élève Abû Medien Shu`ayb <strong>al</strong>-And<strong>al</strong>usî <strong>al</strong>-Bijâ'î qui a transmis <strong>la</strong> doctrine <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa à plusieurs shuyûkhsans fon<strong>de</strong>r toutefois une zâwiya propre à <strong>la</strong> tarîqa Qâdriyya .Pour ce qui est <strong>de</strong> <strong>la</strong> Tunisie, on sait que le shaykh Muhammad ben`ÂSHÛR, mort en 1698 et qui était un <strong>de</strong>s a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> <strong>la</strong> Qâdriyya,accomplissait le rituel <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa chaque vendredi, jour sacré <strong>de</strong>s musulmans,et pendant les fêtes et cérémonies <strong>religieuse</strong>s. (106). Cependant, <strong>la</strong> premièrezâwiya Qâdriyya ne sera fondée que beaucoup plus tard à Menzel Bû Z<strong>al</strong>fa(ville située au Nord-Est du pays) par Abû-l-Hassan 'Alî ben `Umar ash-SHÂYEB (mort en 1784). Elle ne <strong>de</strong>viendra connue et popu<strong>la</strong>ire qu'à l'époque(104) DURING (Jean), Musique et mystique dans les traditions <strong>de</strong> l'Iran, Institut française <strong>de</strong>recherche en Iran, I.F.R.I-Peeters, Paris, 1989, p. 240.(105) KASRÂWÎ (<strong>al</strong>-Azhar), Op.Cit., p. 118.(106) Voir KHÛJA (Hsîn), Dhayl bashâ'iri 'ahl-l-'îmân, établis et commenté par MA`MÛRÎ (Tâher),Tunis, 1975, p. 282.


104<strong>de</strong> l'Imâm Muhammad <strong>al</strong>-MANZILÎ (m.1832), son successeur (107), bien qu'il yavait .plusieurs shuyûkh qui avaient l'ijâza (<strong>la</strong> licence) <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa Qâdriyyacomme c'est le cas du shaykh `Alî an-NÛRÎ, disciple du shaykh <strong>al</strong>-KARRÂY.A Sfax, <strong>la</strong> première zâwiya fut fondée en 1809 par Mahmûd ben Muhammadas-SIÂLÂ, mais <strong>la</strong> tarîqa n'a pas eu au début le succès qu'a eu les autres turuqauprès <strong>de</strong>s sfaxiens, et ce n'est qu'avec le protectorat français - qui a encouragéle mouvement soufi dans le pays pour détourner <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion <strong>de</strong>s questionspolitiques - que <strong>la</strong> tarîqa va connaître une augmentation du nombre <strong>de</strong> seszawâyâ qui va s'élever à dix en 1925.Chaque zâwiya Qâdriyya a sa propre structure administrative qui estbasée sur le principe <strong>de</strong> <strong>la</strong> hiérarchie et qui est indépendante <strong>de</strong>s autres zawâyâoù chaque a<strong>de</strong>pte assure une fonction très précise pour garantir le bondéroulement <strong>de</strong>s différentes pratiques rituelles <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa à l'intérieur ou àl'extérieur <strong>de</strong> <strong>la</strong> zâwiya. Cependant, elle reste soumise à l'autorité du "Shaykh<strong>al</strong> Mashâyakh" (qui est appelé aussi Kabîr <strong>al</strong>-Mashâyakh) : le grand <strong>de</strong>s chefsspirituels <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa Qâdriyya qui représente cette <strong>confrérie</strong> en Tunisie etoccupe <strong>la</strong> plus haute fonction <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa Qâdriyya dans le pays.<strong>Le</strong>s fonctions <strong>de</strong>s a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> <strong>la</strong> Qâdriyya sont simi<strong>la</strong>ires à celles <strong>de</strong> <strong>la</strong>`Îssâwiyya et <strong>de</strong> <strong>la</strong> `Awâmriyya sauf qu'il n'y a pas <strong>de</strong> bâsh Shâwish, <strong>de</strong> bâsh(107) Inconnu, "suwar wa 'âyât qur'âniyya tutlâ fi-l-wird <strong>al</strong>-Qâdirî", p. 220. Nous avons trouvé celivre <strong>de</strong> 278 pages et qui est sans date et sans nom d'imprimerie, dans <strong>la</strong> zâwiya Qâdriyya <strong>de</strong> Sfax. Ilcomporte un certain nombre <strong>de</strong> versets coraniques, <strong>de</strong>s textes <strong>de</strong> prières, une biographie du shaykh`Ab<strong>de</strong>lqâdir aj-JÎLÂNÎ, et l'histoire <strong>de</strong> <strong>la</strong> fondation <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa Qâdriyya en Tunisie.


105saqqâ' ou <strong>de</strong> bâsh `Allâm car le nombre <strong>de</strong>s a<strong>de</strong>ptes ne nécessite pas plusqu'un Shâwish ou plus qu'un saqqâ' ou encore plus qu'un `Allâm.<strong>Le</strong>s a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> <strong>la</strong> Qâdriyya doivent se conformer à plusieurs pratiquesindividuelles et collectives qui sont quotidiennes, hebdomadaires ouoccasionnelles.<strong>Le</strong>s pratiques quotidiennes sont individuelles et se résument à <strong>la</strong> lectureaprès chacune <strong>de</strong>s cinq prières <strong>de</strong> <strong>la</strong> journée, d'un <strong>de</strong>s awrâd (sing. wird) (108)écrits par le shaykh `Ab<strong>de</strong>lqâ<strong>de</strong>r fondateur <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa, puis <strong>la</strong> lecture d'unhizb, après quoi le murîd récite <strong>la</strong> Fâtiha (première sourate du Coran).<strong>Le</strong> vendredi, yawm-l-mî`âd comme l'appellent les a<strong>de</strong>ptes, (le jour duren<strong>de</strong>z-vous, <strong>de</strong> l'assemblement), ces <strong>de</strong>rniers se réunissent le soir après ç<strong>al</strong>ât<strong>al</strong>-ìshâ' (<strong>de</strong>rnière prière <strong>de</strong> <strong>la</strong> journée), dans <strong>la</strong> zâwiya pour accomplir leurrituel qui s'organise en <strong>de</strong>ux parties. La première qui commence par le récit <strong>de</strong><strong>la</strong> Fâtiha, est <strong>de</strong>stinée à <strong>la</strong> récitation du hizb sîdî `Ab<strong>de</strong>lqâ<strong>de</strong>r et à quelquesprières. La <strong>de</strong>uxième partie, <strong>la</strong> plus importante, est <strong>de</strong>stinée à <strong>la</strong> hadhra quicommence par le chant <strong>de</strong> quelques panégyriques à <strong>la</strong> gloire <strong>de</strong> sîdî`Ab<strong>de</strong>lqâ<strong>de</strong>r sans intervention instrument<strong>al</strong>e. Ce chant est exécuté par shaykh<strong>al</strong>-hadhra en <strong>al</strong>ternance avec les raddâda (répétiteurs : le chœur). Juste après,les musiciens entament l'exécution <strong>de</strong>s nûbât Qâdriyya(s) avec les instruments(108) Voir le premier chapitre <strong>de</strong> <strong>la</strong> première partie <strong>de</strong> ce travail, p. 30.


106<strong>de</strong> musique qui sont : le bendîr, <strong>la</strong> darbûka, le târ, les naghârât et <strong>la</strong> zukra,seul instrument mélodique. (109)Actuellement toutes ces turuq ont disparu. Cependant, leurs <strong>répertoire</strong>s- et particulièrement celui <strong>de</strong> <strong>la</strong> 'Awâmriyya - sont encore chantés dans <strong>la</strong>hadhra qui est aujourd'hui présente dans les manifestations famili<strong>al</strong>es, et qui achangé <strong>de</strong> fonctions et <strong>de</strong> fin<strong>al</strong>ités en évoluant du contexte religieux aucontexte profane puisque son milieu originel n'existe plus.4 - La p<strong>la</strong>ce <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique mystiquedans <strong>la</strong> vie <strong>de</strong>s SfaxiensLa musique mystique a toujours occupé une p<strong>la</strong>ce importante dans <strong>la</strong>société sfaxienne et tunisienne en génér<strong>al</strong>. Originellement, elle était beaucoupplus présente dans <strong>la</strong> zâwiya que dans les manifestations profanes. Cettemusique qui a pris le nom <strong>de</strong> hadhra dans le milieu masculin, et <strong>de</strong> bnâdir(110) dans le milieu féminin, a pris p<strong>la</strong>ce dans les différentes <strong>confrérie</strong>s <strong>de</strong> <strong>la</strong>région, est <strong>de</strong>venue indispensable dans leurs rassemblements dans <strong>la</strong> zâwiyaoù elle a joué un rôle centr<strong>al</strong> dans les pratiques <strong>de</strong> ses a<strong>de</strong>ptes.Depuis quelques décennies, et avec <strong>la</strong> disparition <strong>de</strong>s manifestations <strong>de</strong><strong>la</strong> zâwiya pour <strong>de</strong>s raisons que nous avons déjà mentionnées plus haut, cette(109) Pour plus <strong>de</strong> détails sur le déroulement <strong>de</strong> <strong>la</strong> hadhra Qâdriyya, Cf. KASRÂWÎ, Op.Cit., pp.135-139.(110) Bnâdir ou bandârât est un terme qui est utilisé maintenant pour désigner <strong>la</strong> formation <strong>music<strong>al</strong></strong>eféminine qui interprète le <strong>répertoire</strong> <strong>music<strong>al</strong></strong> religieux, elle se compose génér<strong>al</strong>ement <strong>de</strong> troismusiciennes : <strong>la</strong> râyssa (le chef du groupe) c'est <strong>la</strong> chanteuse princip<strong>al</strong>e, elle joue au bandîr(l'instrument le plus important dans cette formation) et les <strong>de</strong>ux ktâyef (adjoints) qui chantent avec <strong>la</strong>râyssa et qui jouent une à <strong>la</strong> darbouka et l'autre au târ.


107musique a commencé à s’insérer <strong>de</strong> plus en plus dans le système cérémoniel<strong>de</strong> <strong>la</strong> vie soci<strong>al</strong>e <strong>de</strong>s sfaxiens. Elle est jouée pour <strong>de</strong>s raisons loin d'êtremystiques ou <strong>religieuse</strong>s. Actuellement, et m<strong>al</strong>gré l’existence <strong>de</strong> plusieursgenres <strong>de</strong> musique arabe et occi<strong>de</strong>nt<strong>al</strong>e grâce à l'ensemble <strong>de</strong>s médias quidiffusent tout types <strong>de</strong> musiques, cette musique, qu'on appelle hadhra a réussià se maintenir. Elle <strong>de</strong>meure appréciée par les sfaxiens et <strong>de</strong>venue mêmeindispensable dans quelques cérémonies tel que le nzûl (une <strong>de</strong>s cérémoniesdu mariage). En effet, <strong>la</strong> hadhra est <strong>de</strong> nos jours très sollicitée pour animertoutes sortes d'événements. Par conséquent, plusieurs troupes <strong>music<strong>al</strong></strong>esformées <strong>de</strong> musiciens professionnels se sont spéci<strong>al</strong>isés dans ce genre <strong>de</strong>musique surtout dans <strong>la</strong> région <strong>de</strong> Sfax, et se sont attribuées le nom <strong>de</strong> hadhra.La hadhra, l'orchestre, se compose génér<strong>al</strong>ement <strong>de</strong> huit musiciens : unzakkâr (joueur <strong>de</strong> zukra), trois bnâdriyya (sing. bnâdrî : joueur <strong>de</strong> bandîr), undrâbkî (joueur <strong>de</strong> darbûka), un tarrârjî (joueur <strong>de</strong> târ) (111) et <strong>de</strong>ux qawwâ<strong>la</strong>(sing. qawwâl : chanteur, soliste). Probablement pour rappeler l'appartenance<strong>de</strong> leur <strong>répertoire</strong> à <strong>la</strong> musique confrérique ou <strong>religieuse</strong>, ces musicienschoisissent leurs uniformes <strong>de</strong> l'habit traditionnel que portaient les a<strong>de</strong>ptes lors<strong>de</strong> leurs rassemblements dans <strong>la</strong> zâwiya : une jebba (sorte <strong>de</strong> bure en <strong>la</strong>ine ouen soie, selon <strong>la</strong> saison), un pant<strong>al</strong>on court typiquement arabe et une kintra(une paire <strong>de</strong> mule arabe).(111) Voir le quatrième chapitre <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>de</strong>uxième partie <strong>de</strong> ce travail, p.358.


108Il est à remarquer que cette formation <strong>music<strong>al</strong></strong>e est toujours sollicitéedans le seul but <strong>de</strong> satisfaire au désir <strong>de</strong> danser sur les rythmes excitants <strong>de</strong> <strong>la</strong>musique <strong>de</strong> <strong>la</strong> hadhra. C'est pourquoi les musiciens choisissent les nûbât khfêf(légères) (112) <strong>de</strong>s différentes turuq <strong>de</strong> <strong>la</strong> région qui se caractérisent par leursrythmes vifs et leurs mélodies simples. Rappelons ici que ces formations<strong>music<strong>al</strong></strong>es n'ont pas un <strong>répertoire</strong> bien déterminé qui appartient à une tarîqaprécise, puisque le but <strong>de</strong> cette musique est loin d'être mystique ou religieux.C'est juste le rythme vif et son exécution incitants à <strong>la</strong> danse qui sont appréciéset <strong>de</strong>mandés en négligeant tot<strong>al</strong>ement les paroles <strong>de</strong> ces nûbât qui sont<strong>de</strong>stinées tantôt à un saint tantôt à un autre. Sur ce sujet SIALA confirme que"Bien que les paroles <strong>de</strong>s nûbât soient <strong>de</strong>stinées à <strong>la</strong> gloire <strong>de</strong> Dieu, duProphète et <strong>de</strong>s saints et marabouts, leur impact sur les auditeurs est faible<strong>de</strong>vant celui du rythme et <strong>de</strong> <strong>la</strong> danse. Ceux-ci restent les plus importantsfacteurs pour lesquels ce genre <strong>de</strong> musique fut adopté pour participer àl'animation <strong>de</strong>s cérémonies <strong>de</strong> réjouissance <strong>de</strong> <strong>la</strong> vie <strong>de</strong>s sfaxiens." (113)Il est donc c<strong>la</strong>ir que, <strong>de</strong> nos jours, <strong>la</strong> hadhra n'est plus considéréecomme une musique <strong>de</strong> <strong>confrérie</strong>, probablement parce que <strong>la</strong> nouvellegénération n'a pas vécu l'époque <strong>de</strong>s <strong>confrérie</strong>s <strong>religieuse</strong>s. Pour les jeunesauditeurs, elle ne diffère <strong>de</strong>s autres types <strong>de</strong> musique qu'ils consomment quepar <strong>la</strong> vivacité et <strong>la</strong> force <strong>de</strong> l'exécution <strong>de</strong> ses rythmes, qui s'ajoutent à(112) Mis à part les premières pièces <strong>de</strong> <strong>la</strong> soirée qui doivent avoir un rythme assez lent juste pourmettre les auditeurs dans l'ambiance.(113) SIALA (Mourad), op.cit., p.128.


109l'origin<strong>al</strong>ité <strong>de</strong> sa composition instrument<strong>al</strong>e et <strong>de</strong>s effets qu'elle peutprovoquer chez quelques danseurs.5 - Ses effets sur l’individuAu début, à l'époque où les a<strong>de</strong>ptes se réunissaient encore dans <strong>la</strong>zâwiya, <strong>la</strong> musique qu'ils pratiquaient avait différents effets sur les auditeurs.On peut distinguer <strong>de</strong>ux situations différentes :D'abord, il y a les majâlis d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY où, l'avons-noussign<strong>al</strong>é, le chant se pratique sans instruments <strong>de</strong> musique, et surtout sansdanse. <strong>Le</strong>s a<strong>de</strong>ptes y cherchent à parvenir à un état <strong>de</strong> grâce par le biais duquelils quittent le mon<strong>de</strong> apparent pour plonger dans le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> l'invisible :parvenir à un état d'extase. Cet état est désigné dans <strong>la</strong> terminologie soufie parle mot "wajd", dérivé du verbe wajada (trouver). La manifestation du wajd dit<strong>al</strong>-GHAZÂLÎ, est "un mouvement irrégulier <strong>de</strong>s extrémités <strong>de</strong> l'auditeur, qu'onappelle tremblement, ou régulier s'il s'agit <strong>de</strong> battements <strong>de</strong>s mains et <strong>de</strong>danse"(114). <strong>Le</strong>s a<strong>de</strong>ptes parviennent à cet état <strong>de</strong> wajd aprèsl'accomplissement d'une suite <strong>de</strong> pratiques rituelles en forme <strong>de</strong> prières et <strong>de</strong>panégyriques <strong>de</strong>stinées à Dieu, au Prophète, et au saint fondateur <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa.Cependant, il faut remarquer que ces états <strong>de</strong> grâce atteints par les a<strong>de</strong>ptesdiffèrent d'une personne à l'autre, chacun réagit à sa façon selon son statuthiérarchique dans <strong>la</strong> tarîqa et son rapport personnel avec le samâ`. <strong>Le</strong> wajd est(114) GHAZÂLÎ (Abu Hâmid <strong>al</strong>-), "Kitâb âdâbu <strong>al</strong>-wajd wa <strong>al</strong>-samâ`" (livre <strong>de</strong>s coutumes <strong>de</strong>l'extase et <strong>de</strong> l'audition) , "Ihyâ' `ulûm ad-dîn", vol. II, Dâr <strong>al</strong>-ma`rifa, Beyrouth, pp. 268-306.


110défini comme étant un état d'âme, qui se manifeste lors d'une séance d'écoutemystique, qui pénètre le coeur et provoque un état <strong>de</strong> crainte et d'afflictiondans lequel <strong>la</strong> cœur acquiert une connaissance ésotérique.(115)Sans doute convient-il <strong>de</strong> rappeler ici que ces états émotionnels sontloin <strong>de</strong> ceux que provoque <strong>la</strong> musique profane, car dans ce genre <strong>de</strong> musique,il est plutôt question <strong>de</strong> tarab qui est un état <strong>de</strong> délectation et d'enchantementauquel l'auditeur accè<strong>de</strong> à <strong>la</strong> suite <strong>de</strong> l'écoute d'un mutrib chantant son airpréféré dans <strong>la</strong> sérénité et le silence, ou dans <strong>de</strong>s cas extrêmes, l'auditeur,submergé par l'émotion, exprime son tarab en prononçant par exemple le nom<strong>de</strong> Dieu "Allâh" mais tout en gardant le contrôle <strong>de</strong> soi-même. <strong>Le</strong> wajd estdonc lié à l'univers du mystique qui ne peut être atteints que dans <strong>de</strong>s lieus etcirconstances bien déterminées.Dans les autres <strong>confrérie</strong>s comme <strong>la</strong> `Awâmriyya ou <strong>la</strong> `Issâwiyya, <strong>la</strong>musique a <strong>de</strong>s effets assez différents puisqu'elle est jouée par un orchestre, etsurtout accompagnée <strong>de</strong> danse extatique. Cette danse qui suit dans <strong>la</strong> tarîqa`Issâwiyya par exemple, un rituel bien précis et contrôlée par le shâwish,conduit certains faqîr (a<strong>de</strong>ptes) à un état <strong>de</strong> transe qui se manifeste par <strong>de</strong>sréactions parfois très spectacu<strong>la</strong>ires. En effet, le danseur, en état <strong>de</strong> transe,<strong>de</strong>vient insensible à <strong>la</strong> ch<strong>al</strong>eur <strong>de</strong>s braises incan<strong>de</strong>scentes où il met les piedssans se brûler, incarne une bête sauvage, surtout le lion, le tigre et l'ours.Imitant ses gestes et ses cris, il <strong>de</strong>vient aussi dangereux que <strong>la</strong> vraie bête;mâche avec jouissance <strong>de</strong>s morceaux <strong>de</strong> verre ou <strong>de</strong>s clous qu'il av<strong>al</strong>e; se roule(115) DURING (Jean), op.cit., p. 95.


111sur <strong>de</strong>s feuilles <strong>de</strong> cactus; colle <strong>de</strong>s bottes d'<strong>al</strong>fa enf<strong>la</strong>mmé sur sa torse nue etses membres…<strong>Le</strong>s a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong>s autres turuq accè<strong>de</strong>nt à <strong>la</strong> transe d'une autre façon, etrévèlent un comportement beaucoup moins spectacu<strong>la</strong>ire. Dans <strong>la</strong> tarîqa`Awâmriyya par exemple, on fait <strong>la</strong> hadhra essentiellement pour satisfaire ledésir puissant <strong>de</strong> danse qui conduit à un état <strong>de</strong> takhmîra (ivresse divine). Tousles a<strong>de</strong>ptes accè<strong>de</strong>nt à cette takhmîra en dansant d'avant en arrière et enba<strong>la</strong>nçant <strong>la</strong> tête tout en se concentrant sur <strong>la</strong> musique qui se caractérise parson exécution violente et par l'accélération du rythme qui les ren<strong>de</strong>nt plussensibles. Cependant, pour quelques a<strong>de</strong>ptes qui sont réceptifs, (on dit qu'ilsont les ahwâl, c'est-à-dire qu'ils sont prédisposés à <strong>la</strong> transe), en écoutant unair bien précis auquel ils sont spéci<strong>al</strong>ement plus sensibles, entrent dans un étatd'émotion plus avancée que <strong>la</strong> takhmîra, un état d'émotions spirituelles, <strong>de</strong>modification <strong>de</strong> <strong>la</strong> conscience qui apparaît sous plusieurs aspects caractériséspar le relâchement complet du danseur qui perd le contrôle <strong>de</strong> soi et présentecertains troubles neurophysiologiques reconnaissables par l'agitationinhabituelle et incohérente du danseur: c'est l'état <strong>de</strong> transe. Gilbert ROUGETnous décrit les principaux symptômes qui peuvent être observés chez unepersonne ayant atteint cet état qui sont génér<strong>al</strong>ement: "trembler, être parcouru<strong>de</strong> frissons, être pris d'horripi<strong>la</strong>tion, s'évanouir, tomber à terre, bâiller, être pris<strong>de</strong> léthargie, être saisi <strong>de</strong> convulsions, baver, avoir les yeux exorbités, tirer une<strong>la</strong>ngue énorme, être atteint <strong>de</strong> par<strong>al</strong>ysie, d'un membre ou d'un autre, présenter


112<strong>de</strong>s troubles thermiques […], être insensible à <strong>la</strong> douleur, être agité <strong>de</strong> tics,souffler bruyamment, avoir le regard fixe […], s'il tourne les yeux vers vous, ilne vous voit pas".(116)Plusieurs facteurs entrent en jeu pour déc<strong>la</strong>ncher cette transe chezl'a<strong>de</strong>pte : d'abord, il y a le lieu où se passe <strong>la</strong> hadhra qui a une pesée sur <strong>la</strong>psychologie <strong>de</strong> l'a<strong>de</strong>pte, en l'occurrence <strong>la</strong> zawiya, c'est un lieu <strong>de</strong> culte, quiprovoque un sentiment <strong>de</strong> khushû` (humilité), surtout pendant <strong>la</strong> soirée <strong>de</strong> <strong>la</strong>hadhra où domine une ambiance très spirituelle avec les bougeoirs, les ciergeset aussi <strong>la</strong> fumée et l'o<strong>de</strong>ur persistantes <strong>de</strong> l'encens… Puis il y a le rituel parquoi commence <strong>la</strong> soirée: les prières, le dhikr, l'invocation <strong>de</strong> Dieu… tout ceciva permettre d'immerger l'a<strong>de</strong>pte dans une atmosphère spirituelle qui va lerendre psychologiquement assez fragile, et l'ai<strong>de</strong>r à entrer dans un étatd'émotion particulier. C'est à ce moment là qu'intervient <strong>la</strong> musique comme leprincip<strong>al</strong> moyen <strong>de</strong> conduire l'a<strong>de</strong>pte à <strong>la</strong> transe. Plusieurs éléments liés à <strong>la</strong>musique contribuent d'une manière ou d'une autre au déc<strong>la</strong>nchement <strong>de</strong> <strong>la</strong>transe et qui sont :- <strong>Le</strong>s paroles <strong>de</strong>s nûbât qui sont le seul élément propre à <strong>la</strong> hadhra(contrairement aux mélodies et aux rythmes dont certains se trouvent dans le<strong>répertoire</strong> traditionnel ou dans d'autres genres), jouent un rôle, bien quesecondaire, assez important dans l'aboutissement à l'état <strong>de</strong> transe du danseur.En effet, les textes poétiques <strong>de</strong> ces nûbât, avons-nous vu, ont pour thèmes(116) ROUGET (Gilbert), op. cit., pp. 56, 57


113essentiels <strong>la</strong> glorification du Dieu, du Prophète, et <strong>de</strong>s saints fondateurs <strong>de</strong>sturuq. Et il suffit <strong>de</strong> prononcer le nom d'Allâh, <strong>de</strong> Muhammad ou d'un saint,pour que le danseur exprime son enivrement par sa danse qui <strong>de</strong>vientsubitement irrégulière et plus ou moins rapi<strong>de</strong> que le rythme du chant, ouencore par <strong>de</strong>s pleurs ou <strong>de</strong>s hurlements.- les mélodies qui sont constituées <strong>de</strong> maqâmât (sing. maqâm : mo<strong>de</strong>) etawzân (sing. wazn : rythme), semblent être le facteur le plus important quimène l'a<strong>de</strong>pte à l'état <strong>de</strong> transe puisque, sans mélodie il n'y a pas <strong>de</strong> danse, etsans danse, il n'y a pas <strong>de</strong> transe. Cependant, en sachant que les maqâmâtemployés dans le <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> hadhra sont pour <strong>la</strong> plupart ceux <strong>de</strong> <strong>la</strong>musique c<strong>la</strong>ssique (le mâlûf) qui serait à son origine, on pourrait se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rpourquoi le sujet qui tombe en transe sur une nûba <strong>de</strong> <strong>la</strong> hadhra dans unmaqâm quelconque reste indifférent en écoutant une nûba <strong>de</strong> mâlûf composéesur ce même maqâm ? bien que plusieurs philosophes et musicologues,notamment <strong>al</strong>-KINDÎ (117) et IKHWÂN AÇ-ÇAFÂ' (les frères <strong>de</strong> pureté) (118)ont essayé <strong>de</strong> mettre en re<strong>la</strong>tion les mo<strong>de</strong>s avec les émotions, les passions et <strong>la</strong>santé mor<strong>al</strong>e et physique, nous ne pouvons pas affirmer qu'il existe unere<strong>la</strong>tion directe entre le maqâm et <strong>la</strong> transe.(117) Abû Yûssuf Ya`qûb <strong>al</strong>-KINDÎ (796-875), célèbre savant, philosophe et musicien arabe. Dansses écrits, il s'est intéressé aux différentes branches <strong>de</strong>s sciences naturelles, à <strong>la</strong> philosophie, à <strong>la</strong>physique, aux mathématiques, à l'astronomie, à l'astrologie, à <strong>la</strong> métaphysique, à <strong>la</strong> pharmacologie et<strong>la</strong> musique. Selon lui, <strong>la</strong> musique est à <strong>la</strong> fois une science et un art. Elle intervient dans diversesbranches <strong>de</strong>s sciences naturelles. Il en étudia divers aspects : mélodique, rythmique, psychologique,thérapeutique et astrologique.(118) IKHWÂN AÇ-ÇAFÂ' est un groupe <strong>de</strong> philosophes et penseurs musulmans paru au début duX ème siècle en Iraq. Ils ont écrit plusieurs rasâ'il (épîtres) se rapportant aux mathématiques, à <strong>la</strong>philosophie, à <strong>la</strong> psychologie, à <strong>la</strong> mystique, à l'astrologie et à <strong>la</strong> musique.


114Quant aux awzân (les formules rythmiques), ils sont beaucoup plusprésents que le maqâm, tout d'abord par le nombre <strong>de</strong>s instruments <strong>de</strong>percussion qui dominent au détriment <strong>de</strong> <strong>la</strong> mélodie qui est exécutée et jouéepar un seul instrument mélodique, en l'occurrence <strong>la</strong> zukra. Ensuite il y a <strong>la</strong>nature <strong>de</strong>s awzân qui ont pour <strong>la</strong> plupart <strong>de</strong>s structures simples et courtes etqui incitent à <strong>la</strong> danse. Sign<strong>al</strong>ons ici d'autres éléments qui donnent au cotérythmique un rôle important pour favoriser l'accès <strong>de</strong>s danseurs à l'état <strong>de</strong>transe. <strong>la</strong> nature <strong>de</strong>s instruments qui ont <strong>de</strong>s timbres différents, <strong>la</strong> liberté <strong>de</strong>l'exécution, puisque les percussionnistes et surtout le drâbkî (joueur <strong>de</strong>darbûka), ne respectent génér<strong>al</strong>ement pas <strong>la</strong> structure <strong>de</strong> base du rythme, etchacun essai <strong>de</strong> donner un jeu très ornementé ce qui va donner à <strong>la</strong> rythmiqueune richesse importante incitant les danseurs à plonger dans ce mon<strong>de</strong>rythmique; L'accelerando crescendo qui s'observe dans l'exécution <strong>de</strong>pratiquement toutes les nûbât <strong>de</strong> <strong>la</strong> hadhra semble avoir aussi un effetimportant sur les danseurs. Tous ces facteurs réunis plongent les auditeursdans une sorte d'ivresse qu'ils appellent eux-mêmes "takhmîra", et conduisentles plus sensibles à <strong>la</strong> transe.


DEUXIEME PARTIEAn<strong>al</strong>yse <strong>music<strong>al</strong></strong>e et poétique


116Chapitre premier<strong>Le</strong> système <strong>music<strong>al</strong></strong> arabe


1171 - <strong>Le</strong>s caractéristiques du système mod<strong>al</strong>Toutes les traditions <strong>music<strong>al</strong></strong>es du mon<strong>de</strong> arabe, <strong>religieuse</strong> ou profane,savante ou popu<strong>la</strong>ire, se basent sur le maqâm (pluriel : maqâmât), traduitgénér<strong>al</strong>ement par mo<strong>de</strong>. Dans <strong>la</strong> littérature arabe, le terme maqâm signifie,selon le contexte dans lequel il est utilisé, <strong>la</strong> dignité, le lieu, <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ce, <strong>la</strong>position, le rang, le séjour, et <strong>la</strong> situation (114)Dans les pays du Maghreb, on utilise le terme "tba`" (plur. tubû`) pourdésigner le maqâm. Etymologiquement, le tba` signifie "le caractère et <strong>la</strong>nature et toutes les manifestations et les réactions que l'homme peut avoiravec les êtres et les choses" (115).<strong>Le</strong> tba' est aussi appelé naghma (littér<strong>al</strong>ement mélodie); mais le termele plus utilisé est maqâm, c'est d'ailleurs le terme que l'on utilise aujourd'huipartout dans le mon<strong>de</strong> arabe pour désigner le mo<strong>de</strong>.Jaques CHAILLEY définit le maqâm comme "un ensemble complexequi comporte une échelle caractéristique, mais souvent aussi - et surtout - unensemble <strong>de</strong> conventions permettant <strong>de</strong> l'i<strong>de</strong>ntifier facilement, et ceci quellesque soient les variations que lui font subir les interprètes, plus ou moinsimprovisateurs : schéma mélodique déterminé, formules connues d'avance,(114) REIG (Daniel), "as-Sabîl" (le chemin), Dictionnaire Arabe-Français; Français-Arabe, Paris,Larousse, 1983.(115) GUETTAT, op.cit., p 115.


118registre voc<strong>al</strong> ou instrument<strong>al</strong>, agréments caractéristiques, procédés spéciauxd'interprétation, <strong>de</strong> style, <strong>de</strong> timbre, etc."(116).D'autre part, Mahmoud GUETTAT définit le maqâm (ou tba`) commeétant "une entité mélodique autonome se mouvant dans un ((univers <strong>music<strong>al</strong></strong>))particulier, dont les structures internes obéissent à une série <strong>de</strong> loisconsacrées à <strong>la</strong> fois par <strong>la</strong> tradition, le goût et les inflexions di<strong>al</strong>ect<strong>al</strong>es etphonétiques propres au génie <strong>de</strong> chaque groupe soci<strong>al</strong>" (117).Chaque tba` (ou maqâm) se distingue donc par une expressionpersonnelle et par une succession particulière <strong>de</strong> notes, "possè<strong>de</strong> certaines mélodiques qui lui sont spécifiques" (118), <strong>de</strong>s motifsmélodiques et rythmiques caractéristiques préexistantes. Par conséquent,l'i<strong>de</strong>ntification du tba` ne peut en aucun cas se faire à travers uneprésentation <strong>de</strong>s notes successives (ascendantes et <strong>de</strong>scendantes) <strong>de</strong> sagamme mod<strong>al</strong>e (as-sul<strong>la</strong>m <strong>al</strong>-mûsîqî), mais plutôt par une tournuremélodique ou un thème caractéristique, ou encore, par <strong>la</strong> manière d'organiserles <strong>de</strong>grés <strong>de</strong> son échelle caractérisée par une certaine disposition <strong>de</strong>sinterv<strong>al</strong>les, <strong>de</strong> différents rapports qui <strong>la</strong> composent, sans oublier bien sur, lesformules mélodico-rythmiques spécifiques qui donnent au tba` saparticu<strong>la</strong>rité.(116) CHAILLEY (Jacques), l'imbroglio <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s, Paris, éd. <strong>Le</strong>duc, 1960, p. 5.(117) GUETTAT (Mahmoud), op. cit. p. 277.(118) GUETTAT (Mahmoud), op. cit., p. 282.


119L'échelle du tba` est essentiellement heptatonique. Elle est toujoursréductible à une série <strong>de</strong> cellules mélodiques appelées ajnâs ou `uqûd(pluriels <strong>de</strong> jins et `iqd : cellule, genre mod<strong>al</strong>). "<strong>Le</strong> cadre d'une octave estgénér<strong>al</strong>ement observé, nous dit SNOUSSI, mais le musicien qui traite unegamme mod<strong>al</strong>e ne considère, presque toujours, qu'une seule <strong>de</strong> ses cellulesconstitutives à <strong>la</strong> fois"(119). La cellule (le `iqd ou le jins), peut être un tricor<strong>de</strong>, un tétracor<strong>de</strong> ou un pentacor<strong>de</strong>. <strong>Le</strong>s tubû` sont constitués par lesdifférentes combinaisons <strong>de</strong> ces ajnâs, d'où <strong>la</strong> variété d'expression mélodiquequi constitue <strong>la</strong> caractéristique <strong>de</strong> chaque tba`. En effet, c'est <strong>la</strong> nature <strong>de</strong>scellules et leur manière <strong>de</strong> combinaison et <strong>de</strong> disposition qui spécifient letba`. La première cellule au départ <strong>de</strong> <strong>la</strong> tonique est considérée comme le jinsprincip<strong>al</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> gamme, elle donne c<strong>la</strong>ssiquement son nom au tba`. Cescellules peuvent être reliées entre elles dans le cadre d'une octave, <strong>de</strong> troisfaçons différentes :- Par conjonction à l'ai<strong>de</strong> d'un <strong>de</strong>gré commun.- Par disjonction avec une séparation d'un ton.- Par superposition à l'ai<strong>de</strong> d'une note commune aux <strong>de</strong>ux tétracor<strong>de</strong>sreliés.Cependant, certains <strong>de</strong> ces ajnâs, bien qu'ils aient les mêmes <strong>de</strong>grés,mêmes <strong>al</strong>térations et mêmes interv<strong>al</strong>les, se distinguent chacun par sa tournuremélodique; qui met en évi<strong>de</strong>nce les caractéristiques propres à chaque tba`.(119) SNOUSSI (Manoubi), op.cit., p. 34.


120Ce processus du mouvement mélodique est déterminé par un certain nombre<strong>de</strong> règles connues et apprises par tradition or<strong>al</strong>e, par tous les musiciensarabes. Ils apprennent dès le début <strong>de</strong> leur carrière <strong>la</strong> façon d'explorer un tba`(ou un maqâm) en prenant compte <strong>de</strong> ses éléments essentiels qui le fon<strong>de</strong>nt,et qui sont : L'ambitus, les ajnâs (cellules) constitutifs <strong>de</strong> <strong>la</strong> gamme, le point<strong>de</strong> départ <strong>de</strong> <strong>la</strong> mélodie, ou entrée (<strong>al</strong>-mabda' ), les point d'arrêtintermédiaires ou momentanés (<strong>al</strong>-marâkiz, pluriel <strong>de</strong> markaz: station ), etenfin le point <strong>de</strong> "repos" fin<strong>al</strong> (<strong>al</strong>-qarâr: station définitive) (120).- <strong>al</strong>-Qarâr : (litt. repos : tonique), <strong>la</strong> note fondament<strong>al</strong>e qui sert <strong>de</strong> base,d'irtikâz (litt. fon<strong>de</strong>ment), et <strong>de</strong> station <strong>de</strong> repos fin<strong>al</strong> pour le tba`. C'est le<strong>de</strong>gré sur lequel s'effectue le repos fin<strong>al</strong> (<strong>la</strong> qaf<strong>la</strong>), <strong>la</strong> ca<strong>de</strong>nce fin<strong>al</strong>e, pouremprunter <strong>la</strong> terminologie <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique occi<strong>de</strong>nt<strong>al</strong>e. Dans ce repos fin<strong>al</strong>, leqarâr est souvent procédé au grave d'une note qui lui sert <strong>de</strong> soutient qu'onappelle hassâs <strong>al</strong>-maqâm. Cette note qui rappelle <strong>la</strong> sensible <strong>de</strong> <strong>la</strong> gammeocci<strong>de</strong>nt<strong>al</strong>e, peu être aussi bien à un <strong>de</strong>mi-ton d'interv<strong>al</strong>le au <strong>de</strong>ssous duqarâr, qu à trois quarts <strong>de</strong> ton, ou encore à un ton entier.- <strong>al</strong>-Ghammâz : c'est l'un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>grés pivots du tba`, il constitue le point <strong>de</strong>départ du <strong>de</strong>uxième jins du tba`, et sert <strong>de</strong> qarâr provisoire d'un autre jins.Ghammâz <strong>al</strong>-maqâm (<strong>la</strong> dominante du maqâm), est toujours variable, il peutêtre, par rapport à <strong>la</strong> tonique du tba`, à une tierce, une quarte, ou une quinte.(120) ERLANGER (Rodolphe d'), <strong>la</strong> musique arabe, tome 5, op. cit., pp. 100-110.SNOUSSI (Manoubi), Initiation à <strong>la</strong> musique tunisienne, op. cit., p. 41.


121<strong>Le</strong>s arabes ont donnés le nom <strong>de</strong> ghammâz à <strong>la</strong> dominante, "sans doute par<strong>al</strong>lusion à l'attraction exercée par ce <strong>de</strong>gré sur les autres sons <strong>de</strong> <strong>la</strong> gamme; cemot signifie, en effet, (qui cligne <strong>de</strong> l'œil), comme pour appeler, attirer, oucomme pour répondre à un appel"(121).- <strong>al</strong>-Mabda' : (le point <strong>de</strong> départ), c'est <strong>la</strong> note par <strong>la</strong>quelle commence lemouvement mélodique, elle doit être déterminée au préa<strong>la</strong>ble. <strong>Le</strong> mabda'n'est pas forcément <strong>la</strong> tonique du tba`, il peut y avoir pour certains tubû` (oumaqâmât), <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>grés par lesquelles le musicien peut entamer sonmouvement mélodique.Rappelons que chaque tba`, et aussi chaque jins, se caractérise par uncertain nombre <strong>de</strong> phrases mélodiques qui le spécifient et lui donnent soni<strong>de</strong>ntité. Ces phrases sont à <strong>la</strong> base du développement mélodique danschaque composition. Ainsi, chaque nûba <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique c<strong>la</strong>ssique tunisienne(mâlûf), ou <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique <strong>religieuse</strong>, ou même une simple chanson <strong>de</strong> variétéou autre, se compose d'un certain nombre <strong>de</strong> phrases mélodiques spécifiquesqui mettent en évi<strong>de</strong>nce le tba` (ou le maqâm) dans lequel elle est composéeÉtant donné que le tba` repose, l'avons-nous vu, sur les cellulesmélodiques (ajnâs ou `uqûd, pluriels <strong>de</strong> jins et `iqd), nous avons jugéindispensable d'exposer tous les ajnâs qui composent les tubû` <strong>de</strong> <strong>la</strong> musiquec<strong>la</strong>ssique tunisienne dite mâlûf et ceux du <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong> <strong>al</strong>-(121) ERLANGER (Rodolphe d'), La musique arabe, tome 5, Paris, Gueuthner, 1959, p. 106.


122Karrâriyya, sujet <strong>de</strong> notre recherche. Cette <strong>de</strong>scription nous servira <strong>de</strong>support dans notre an<strong>al</strong>yse <strong>de</strong>s tubû`.Nous c<strong>la</strong>sserons ces ajnâs selon leurs qarâr (toniques), nousdonnerons, outre les <strong>de</strong>grés <strong>de</strong> chaque jins, un motif mélodique indiquant <strong>la</strong>formule type dans le but <strong>de</strong> donner une idée sur sa ligne mélodiquecaractéristique.A/ <strong>Le</strong>s ajnâs partants <strong>de</strong> <strong>la</strong> note Do2 (râst) : Ces ajnâs sontpentacord<strong>al</strong>s, ils se composent <strong>de</strong>s interv<strong>al</strong>les suivants :(122)1/ - Jins dhîl :2/ - Jins mâya :3/ - Jins rast adh-dhîl:(122) Pour <strong>la</strong> qu<strong>al</strong>ification <strong>de</strong>s interv<strong>al</strong>les, nous avons adopté les termes utilisés par HabibTOUMA : secon<strong>de</strong> majeure (2 <strong>de</strong> Maj. : 1 ton), secon<strong>de</strong> mineure (2 <strong>de</strong> min. : ½ ton), secon<strong>de</strong>augmentée (2 <strong>de</strong> aug. : 1 ½ ton), secon<strong>de</strong> médiane (2 <strong>de</strong> méd. : ~ ¾ ton ). Cependant, nous rappelonsque nous avons utilisé ces termes pour faciliter <strong>la</strong> lecture car, <strong>la</strong> gran<strong>de</strong>ur <strong>de</strong>s interv<strong>al</strong>les en musiquearabe reste variable et non fixe. Voir TOUMA (Habib), La musique arabe, Paris, éd.BUCHET/CHASTEL, 1977, p. 32.


123B/ <strong>Le</strong>s ajnâs partants <strong>de</strong> <strong>la</strong> note Ré (dûkâh) : Il sont pentacord<strong>al</strong>s, nousen distinguons trois types qui diffèrent selon <strong>la</strong> nature <strong>de</strong> <strong>la</strong> secon<strong>de</strong>(mineure, médiane, ou augmentée) située entre le <strong>de</strong>uxième et le troisième<strong>de</strong>gré :• <strong>Le</strong> premier type contient une secon<strong>de</strong> mineure, et se compose <strong>de</strong>sinterv<strong>al</strong>les suivants :1/ - Jins nawâ :2/ - Jins raçd :• <strong>Le</strong> <strong>de</strong>uxième type contient une secon<strong>de</strong> médiane, et se compose <strong>de</strong>sinterv<strong>al</strong>les suivants :1/ - Jins hsîn :


1242 - Jins `irâq :3/ - Jins raml <strong>al</strong>-mâya• <strong>Le</strong> troisième type contient une secon<strong>de</strong> augmentée, et se compose <strong>de</strong>sinterv<strong>al</strong>les suivants :1/ - Jins içba`ayn:2/ - Jins raml :C/ <strong>Le</strong> jins partant <strong>de</strong> <strong>la</strong> note Mi <strong>de</strong>mi bémol (sîkâh) : C'est le jinssîka (ou sîkâh), il est tricord<strong>al</strong>, il se compose <strong>de</strong>s interv<strong>al</strong>les suivants :Jins sîka


125D/ <strong>Le</strong> jins partant <strong>de</strong> <strong>la</strong> note Fa (jahârkâh) : C'est le jins mazmûm, ilest pentacord<strong>al</strong>, il se compose <strong>de</strong>s interv<strong>al</strong>les suivants :Jins mazmûmE/ <strong>Le</strong> jins partant <strong>de</strong> <strong>la</strong> note Sol2 (yâkâh) : C'est le jins içbahân, ilest tétracord<strong>al</strong>, il comporte les interv<strong>al</strong>les suivants :Jins içbahânEn plus <strong>de</strong> ces ajnâs qui appartiennent à <strong>la</strong> musique du mâlûf et quireprésentent les treize tubû` <strong>de</strong>s nûbât, nous décrirons <strong>de</strong>ux autres ajnâs quisont <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique popu<strong>la</strong>ire, et que nous avons remarqué lors <strong>de</strong> notrean<strong>al</strong>yse qu'ils constituent avec d'autres ajnâs un certain nombre <strong>de</strong> tubû` du<strong>répertoire</strong> du mâlûf :1/ <strong>Le</strong> jins mhayar-sîka : c'est un jins pentacord<strong>al</strong>, il forme lepremier tétracor<strong>de</strong> du tba` mhayar sîka qui est très utilisé dans <strong>la</strong> musique


126popu<strong>la</strong>ire tunisienne pour sa simplicité. "<strong>Le</strong>s airs en mo<strong>de</strong> mhayar-sîkareprésentent le type <strong>de</strong> <strong>la</strong> chanson popu<strong>la</strong>ire tunisienne <strong>de</strong> facture citadine.C'est dans ce mo<strong>de</strong> que chantonnent les femmes en vaquant à leur travailménager, à l'ombre <strong>de</strong>s patios; c'est dans ce mo<strong>de</strong> aussi que les marchands <strong>de</strong>quatre saisons chantent, à gorge déployée, <strong>la</strong> bonne qu<strong>al</strong>ité <strong>de</strong> leurs fruits, àl'heure <strong>de</strong> <strong>la</strong> sieste, pour mieux séduire le passant avi<strong>de</strong> <strong>de</strong> se rafraîchir. C'estencore dans ce mo<strong>de</strong> que fredonne l'artisan plongé dans l'exécution d'untravail" (123).<strong>Le</strong> tba` mhayar-sîka se caractérise par son ambitus qui ne dépassegénér<strong>al</strong>ement pas <strong>la</strong> quinte ou <strong>la</strong> sixte. "<strong>Le</strong> processus <strong>de</strong> ce mo<strong>de</strong> comporteune particu<strong>la</strong>rité fort caractéristique, soit le saut fréquent et délibéré du <strong>de</strong>gré<strong>de</strong> <strong>la</strong> quarte (sol) lors <strong>de</strong>s mouvements <strong>de</strong>scendants" (124).<strong>Le</strong> jins mhayar-sîka contient une secon<strong>de</strong> mineure et se compose <strong>de</strong>sinterv<strong>al</strong>les suivants :Jins mhayar sîka2/ <strong>Le</strong> jins mhayar-`irâq : Il est tétracord<strong>al</strong>, et forme le premiertétracor<strong>de</strong> du tba` mhayar-`irâq. Ce tba` est bien connu dans toutes les(123) SNOUSSI (Manoubi), op.cit., p. 64.


127inspirations popu<strong>la</strong>ires, notamment dans les milieux citadins. "<strong>Le</strong> mo<strong>de</strong>mhayar-`irâq se prête particulièrement à <strong>la</strong> composition <strong>de</strong>s airs pathétiques,aussi est-il souvent choisi par les faiseurs <strong>de</strong> chansons d'amour, et par leschanteurs d'hymnes mystiques et <strong>de</strong>s panégyriques <strong>de</strong> Saints qui doivent êtredéc<strong>la</strong>més sur un ton sentiment<strong>al</strong>, tendre et triste" (125).<strong>Le</strong> tba` mhayar-`irâq est un tba` dont le qarâr (<strong>la</strong> tonique) est ledûkâh (Ré). Cependant, il est presque toujours utilisé transposé une quarteplus haut.Jins mhayar `irâqChacun <strong>de</strong> ces ajnâs caractérise donc en pratique un tba` différent enle combinant avec d'autres ajnâs selon un ensemble <strong>de</strong> règles qui assurent <strong>la</strong>spécificité <strong>de</strong> <strong>la</strong> structure mod<strong>al</strong>e et les aspects caractéristiques <strong>de</strong> chaquetba`.2 - <strong>Le</strong> système rythmiqueDans <strong>la</strong> musique arabe, l'élément rythmique est fondament<strong>al</strong>. Il estdéterminant dans les compositions mélodiques, instrument<strong>al</strong>es et voc<strong>al</strong>es, quisont toujours accompagnées d'une formule rythmique, se répétantpériodiquement et servant <strong>de</strong> support métrique à <strong>la</strong> mélodie. Cette formulerythmique est désignée en arabe par les termes :(124) SNOUSSI (Manoubi), op.cit., p. 64.


128- 'Açl : (pluriel : 'uçûl) : origine, racine, principe.- Dharb : (pluriel : dhurûb), du verbe dharaba: donner <strong>de</strong>s coups ...- Wazn : (pluriel : awzân ou mawâzîn), du verbe wazana : peser, mesurer ...- IQA` : (pluriel : îqâ`ât), du verbe awqa`a : taper ou percuter un corpssonore par <strong>la</strong> main ou par un objet. " <strong>Le</strong> terme îqâ` a servi à tous les anciensauteurs arabes pour exprimer <strong>la</strong> notion <strong>de</strong> rythme, à <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ce <strong>de</strong> celui <strong>de</strong> wazn,ou mesure, désormais réservé pour exprimer <strong>la</strong> notion <strong>de</strong> métriqueprosodique" (126).De nos jours, les dénominations les plus usitées par les musiciens sontîqâ` et wazn. Chaque îqâ` a une forme propre dont on traduit les accents par<strong>de</strong>s coups forts frappés au centre <strong>de</strong> <strong>la</strong> peau <strong>de</strong>s instruments à percussiontraditionnels tels les dérivés du tambour, qui donnent un son grave etamplifié, appelés dum(s) (ou dummât: pluriel <strong>de</strong> dum); et <strong>de</strong>s coups faiblesfrappés sur les bords <strong>de</strong> <strong>la</strong> peau <strong>de</strong> ces instruments qui donnent un son c<strong>la</strong>iret aigu, appelés tâk(s) (ou tâkât: pluriel <strong>de</strong> tâk). <strong>Le</strong> dum et le tâk ne signifientrien en eux même, ils sont <strong>de</strong> simples onomatopées qui expriment l'idée d'uncoup fort et un coup faible. L'emp<strong>la</strong>cement, <strong>la</strong> durée et l'espacement <strong>de</strong> cesfrappes et <strong>de</strong>s silences, spécifient les îqâ` ât et permettent <strong>de</strong> les distinguer.Pour transcrire ces îqâ`ât, les musiciens ont adoptés plusieursmétho<strong>de</strong>s. Cependant, <strong>la</strong> notation <strong>la</strong> plus usitée <strong>de</strong> nos jours, attribue àchaque temps <strong>de</strong> l'îqâ` les signes conventionnels suivants :(125) SNOUSSI (Manoubi), ibid, p. 62.


129<strong>Le</strong> temps fort (dum) , , ⎩ …<strong>Le</strong> temps faible (tâk) , …Ainsi, on transcrit un îqâ` <strong>de</strong> dix temps (appelé samâ`î thaqîl) <strong>de</strong> <strong>la</strong> façonsuivante :L'îqâ` est avant tout une formule rythmique qui peut être courtecomme elle peut s'étendre sur une pério<strong>de</strong> assez longue. La pério<strong>de</strong>rythmique est appelée dawr (cycle) ou dâ'ira (cercle). La formule rythmique(ou <strong>la</strong> dâ'ira) courte se répète plusieurs fois et sans interruption, "avec lesmêmes nuances d'intensité, le même ordre <strong>de</strong> succession, et avec les mêmesdurées". Bref, elle se répète i<strong>de</strong>ntique à elle-même au cours d'une phrasemélodique lui servant <strong>de</strong> support métrique; tandis que les formules pluslongues occupent une partie ou <strong>la</strong> tot<strong>al</strong>ité <strong>de</strong> <strong>la</strong> phrase.Pendant l'exécution d'un wazn, le percussionniste doit mettre en évi<strong>de</strong>nce sesbattements fondamentaux qui le particu<strong>la</strong>risent et le distinguent d'un autrewazn. Cependant, le bon percussionniste, arrive toujours à ajouter à cesbattements fondamentaux, d'autres battements secondaires qui jouent le rôle<strong>de</strong> remplissage <strong>de</strong> <strong>la</strong> structure princip<strong>al</strong>e du wazn. <strong>Le</strong>s musiciens appellent ceremplissage le hashu ou le ta`mîr. Comme c'est le cas pour le tba`, ils voientque représenter un wazn par un ensemble <strong>de</strong> battements (<strong>de</strong>s dums et <strong>de</strong>stâks), et l'exécuter d'une manière figée et uniforme, lui ferait perdre sa qu<strong>al</strong>itéet son effet. Toutefois, durant le déroulement du chant, les percussionnistes(126) SNOUSSI (Manoubi), op.cit., p.67.


130jouent en pianissimo, Ils ne font que suivre le mutrib ou le munshid(chanteur), et ne donnent en génér<strong>al</strong>, que <strong>la</strong> structure initi<strong>al</strong>e du wazn. <strong>Le</strong>snombreuses variations qu'ils donnent, surviennent dans raddân <strong>al</strong> jawâb(réplique instrument<strong>al</strong>e).<strong>Le</strong> hashu ou ta`mîr, est donc une sorte d'embellissement, qui utilisedifférentes possibilités : contretemps, syncope, accentuation, et changement<strong>de</strong> tempo; pour briser l'uniformité rythmique, et échapper à <strong>la</strong> monotonie.C'est pourquoi on confie au musicien le plus habile et le plus expérimenté lerôle <strong>de</strong> percussionniste." Chaque type <strong>de</strong> rythme arabe a, en principe, son mouvement propre,fixé approximativement par <strong>la</strong> coutume - en l'absence <strong>de</strong> tout instrument <strong>de</strong>mesure, comme le métronome européen – on ne peut accélérer ou r<strong>al</strong>entir cemouvement que dans une certaine limite. Une fois ce mouvement choisi, <strong>la</strong>durée du temps ét<strong>al</strong>on se trouve <strong>de</strong> ce fait déterminée et doit rester immuablejusqu'à <strong>la</strong> fin <strong>de</strong> <strong>la</strong> phrase mélodique soumise à ce mouvement" (127).<strong>Le</strong> wazn organise l'espace <strong>music<strong>al</strong></strong> par <strong>la</strong> périodicité et l'accentuation,et pourrait être donc, comparé à <strong>la</strong> mesure dans <strong>la</strong> musique occi<strong>de</strong>nt<strong>al</strong>e touten se gardant <strong>de</strong> les confondre car, <strong>la</strong> mesure, toujours réductible à unélément simple, "n'est qu'un cadre abstrait qui limite <strong>de</strong> façon schématiqueles lignes du rythme et en régu<strong>la</strong>rise le mouvement. Tout rythme peut <strong>de</strong> ce(127) SNOUSSI (Manoubi), op.cit., p. 70.


131fait être introduit dans une mesure, <strong>al</strong>ors que <strong>la</strong> mesure ne peut à elle seuleconstituer un rythme" (128)."<strong>Le</strong> principe fondament<strong>al</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> rythmique arabe, affirme d'Er<strong>la</strong>nger,est <strong>la</strong> périodicité: <strong>la</strong> mélodie rythmée doit se dérouler obligatoirement sur unesuccession <strong>de</strong> pério<strong>de</strong>s ayant <strong>la</strong> même durée, ou les mêmes accents, lesmêmes battements forts et faibles, reviennent dans le même ordre <strong>de</strong>succession" (129).Dans <strong>la</strong> musique c<strong>la</strong>ssique tunisienne, dite mâlûf, et notamment dansle <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong>s nûbât, où les awzân jouent un rôle prépondérant, (ils ontmême donné leurs noms aux différentes pièces <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba), nous soulignonsune caractéristique importante qui est <strong>la</strong> mobilité du tempo : variété à <strong>la</strong> foisrythmique et dynamique utilisée sous ses différentes formes d'accélération ou<strong>de</strong> décélération. <strong>Le</strong>s formules rythmiques sont c<strong>la</strong>ssées selon un mouvementprogressif du plus lent au plus vif. Cette mobilité progressive est présentemême à l'intérieur du même wazn.(128) ERLANGER (Rodolphe d'), La musique arabe, tome VI, op.cit., p.8(129) Ibid., p.2.


Deuxième ChapitreLa nûba du <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> musiqueTraditionnelle tunisienne (mâlûf)


1331 - La nûbaLittér<strong>al</strong>ement, le terme nûba signifie "tour" (tour <strong>de</strong> rôle, <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>,suppléance) (122). Dans le milieu artistique, c'est <strong>la</strong> forme <strong>music<strong>al</strong></strong>e <strong>de</strong> base<strong>de</strong> <strong>la</strong> musique c<strong>la</strong>ssique du Maghreb. Il est à remarquer que ce n'est pas parhasard que l'on a choisi <strong>de</strong> donner à cette forme <strong>music<strong>al</strong></strong>e le nom <strong>de</strong> "nûba",puisque <strong>la</strong> notion <strong>de</strong> périodicité occupe une p<strong>la</strong>ce importante dans l'univers<strong>de</strong> cette tradition <strong>music<strong>al</strong></strong>e.La nûba se caractérise dans sa composition <strong>music<strong>al</strong></strong>e par lemouvement progressif dans <strong>la</strong> succession <strong>de</strong>s rythmes qui définissent sespièces constitutives. Cette succession part du rythme très lent pour finir surun rythme très rapi<strong>de</strong><strong>Le</strong> premier emploi du terme nûba "remonte au VIII ème siècle, sous lerègne prospère du troisième c<strong>al</strong>ife abbasi<strong>de</strong> <strong>al</strong>-Mahdi Ibn Abî Ja`far <strong>al</strong>-Mançûr (775-785)" (123). Celui-ci, a organisé <strong>de</strong>s compétitions artistiquesdans toutes les disciplines réparties sur toute <strong>la</strong> semaine; ainsi nous trouvons<strong>la</strong> journée <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba <strong>de</strong>s chanteurs, <strong>la</strong> journée <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba <strong>de</strong>s poètes, etc.<strong>Le</strong> terme nûba sera utilisé pour désigner <strong>la</strong> séance durant <strong>la</strong>quelle lesmusiciens à tour <strong>de</strong> rôle se produiront <strong>de</strong>vant le c<strong>al</strong>ife [Hârûn <strong>al</strong>-Rashîd(786-809), fils d'<strong>al</strong>-Mahdi Ibn Abî Ja`far <strong>al</strong>-Mançûr], faisant montre <strong>de</strong> leur(122) IBN MANDHOUR (<strong>al</strong>-Fadhl Jamel ad-dîn), lisân <strong>al</strong>-`arab, (dictionnaire <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>la</strong>ngue <strong>de</strong>sarabes), 15 vol., Beyrouth, 1955,1956.(123) GUETTAT, op.cit., p. 121.


134savoir et <strong>de</strong> leurs capacités (124). On appe<strong>la</strong>it ce<strong>la</strong> attendre sa nûba. Par <strong>la</strong>suite, il sera employé pour désigner le morceau instrument<strong>al</strong> ou voc<strong>al</strong> <strong>de</strong>l'artiste. On avait jusque là employé le terme <strong>de</strong> çawt, utilisé dans l'ancienneécole <strong>music<strong>al</strong></strong>e arabe.Au XIV ème siècle, et avec le musicien `Abd <strong>al</strong>-Qâdir ibn Ghaybî (morten 1435), le terme nûba est employé pour désigner une forme <strong>music<strong>al</strong></strong>e.D'après ce <strong>de</strong>rnier, <strong>la</strong> nûba connue à Bagdad à son époque avait quatre qitâ`(sing. qit`a : mouvement) :- <strong>al</strong>-qawl : une récitation modulée;- <strong>al</strong>-ghaz<strong>al</strong> : un chant composé sur un rythme très lent;- <strong>al</strong>-trâna : un chant à rythme moins lent que celui d'<strong>al</strong>-ghaz<strong>al</strong>, etcomposé sur <strong>de</strong>s vers arabes ou persans;- <strong>al</strong>-furûdâsht : un chant léger, <strong>de</strong> plus en plus vif.Vers 1429, Ibn Ghaybî a ajouté un cinquième mouvement qu'il aappelé <strong>al</strong>-mustazâd (morceau ajouté). Ces cinq mouvements étaient à <strong>la</strong> foisinstrumentaux et vocaux."Cette forme <strong>de</strong> nûba fut dé<strong>la</strong>issée à l'époque ottomane au 16 èmesiècle. Elle survivra apparemment dans le dawr (125), le qad et le tawshîh.(124) GUETTAT, op.cit., p. 122.(125) Un poème en <strong>la</strong>ngue di<strong>al</strong>ect<strong>al</strong>e, comprenant entre quatre et dix vers. Il se compose <strong>de</strong> <strong>de</strong>uxparties mesurées : le madhhab, une ouverture entièrement composée sur <strong>de</strong>ux vers ou plus, et leghuçn qui est un développement semi composé ou improvisé sur le reste du texte. Parmi les pluscélèbres compositeurs et interprètes <strong>de</strong> dawr, citons `Abd-el-Hammûlî (1845-1901) et Muhammad`Oçmâm (1845-1901).


135Plus tard elle sera remp<strong>la</strong>cée, dans le Proche-Orient arabe, par <strong>la</strong> waç<strong>la</strong> (126),et en Turquie, par le fâçil. <strong>Le</strong>s <strong>de</strong>ux termes désignent un programme ou suite<strong>de</strong> morceaux formant un concert" (127).En Occi<strong>de</strong>nt musulman, par contre, <strong>la</strong> nûba introduite en And<strong>al</strong>ousiepar le virtuose musicien Abû-l-Hassan `Ali ibn Nâfa`, surnommé Ziryâb (789- 857) (128), ne va pas cesser d'évoluer et va avoir un aspect nouveau. Elle apris <strong>la</strong> signification <strong>de</strong> manifestation <strong>music<strong>al</strong></strong>e, basée sur une suite <strong>de</strong> piècesvoc<strong>al</strong>es et instrument<strong>al</strong>es, qui se succè<strong>de</strong>nt dans un ordre <strong>al</strong><strong>la</strong>nt du plus lentau plus vif. Elle se déroule, comme <strong>la</strong> nûba <strong>de</strong> l'Orient, sur quatre qitâ`(mouvements). Cependant, ces <strong>de</strong>rniers sont nommés différemment etcomposés sur un même mo<strong>de</strong> (tba`) : an-nashîd qui correspond au qawl <strong>de</strong> <strong>la</strong>nûba <strong>de</strong> l'Orient, une récitation modulée; <strong>al</strong>-basît, qui n'est autre que leghaz<strong>al</strong>, chant à rythme très lent; <strong>al</strong>-muharrakât (sing. muharrak), quicorrespon<strong>de</strong>nt à at-trâna, c'est-à-dire un chant moins lent que le précé<strong>de</strong>nt, etenfin; <strong>al</strong>-ahzâj (sing. hazaj), ils correspon<strong>de</strong>nt à <strong>al</strong>-furûdasht, un chant leger,<strong>de</strong> plus en plus vif.(126) La waç<strong>la</strong> consiste en une suite instrument<strong>al</strong>e (bashraf et sammâ`î) et voc<strong>al</strong>e renfermantsurtout <strong>de</strong>s muwashshahât (sing. muwashshah), <strong>de</strong>s azjâl (sing. zaj<strong>al</strong>), et <strong>de</strong>s qaçâ'id (sing. qaçîda).Ils sont tous composés sur un même mo<strong>de</strong> (maqâm).(127) GUETTAT, op.cit., p. 122.(128) Ziryâb, chanteur célèbre à <strong>la</strong> cour du c<strong>al</strong>ife Hârûn ar-Rashîd, il quitta Bagdad à <strong>la</strong> suite d'unconflit avec son maître, le célèbre musicien <strong>de</strong> l'époque Abbassi<strong>de</strong>, Ishâq <strong>al</strong>-mawçilî, pour <strong>al</strong>lers'inst<strong>al</strong>ler à Cordoue en And<strong>al</strong>ousie (Espagne), où il fonda sa propre école <strong>de</strong> musique et introduisitainsi dans.ce pays <strong>la</strong> tradition <strong>music<strong>al</strong></strong>e <strong>de</strong> l'école arabe c<strong>la</strong>ssique.


136En Tunisie, et à l'époque <strong>de</strong> Ahmad ben Yûssef at-Tîfâshî <strong>al</strong>-Gafçî(mort en 1253) (129), <strong>la</strong> nûba se fondait sur, an-nashîd, qui est un récitatif,suivi d'<strong>al</strong>-istihlâl : ouverture, <strong>al</strong>-`am<strong>al</strong>, chant à rythme lourd, <strong>al</strong>-majrâ, chantléger, et aussi sur le muwashshah et le zaj<strong>al</strong> (130).Comme nous l'apercevons, les quatre premiers mouvements <strong>de</strong> <strong>la</strong>nûba sont les mêmes chez Ziryâb, Tîfâshî, et Ibn Ghaybî, sauf que les nomsdiffèrent. <strong>Le</strong> tableau ci-après nous résume les différentes étapes <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba etles noms qu'ont pris ses mouvements.Tableau récapitu<strong>la</strong>tif <strong>de</strong> l'évolution <strong>de</strong> <strong>la</strong> forme nûbaEn And<strong>al</strong>ousieavec Ziryâb(789-857)En Tunisieà l'époque <strong>de</strong> Tîfâshî(mort en 1253)En Orientà l'époque <strong>de</strong> Ibn Ghaybî(mort en 1435)an-nashîd an-nashîd <strong>al</strong>-qaw<strong>la</strong>l-basît <strong>al</strong>-istihlâl <strong>al</strong>-ghaza<strong>la</strong>l-muharrakât <strong>al</strong>-`am<strong>al</strong> at-trâna<strong>al</strong>-ahzâj <strong>al</strong>-majrâ <strong>al</strong>-furûdasht<strong>al</strong>-muwashshah<strong>al</strong>-mustazâdaz-zaj<strong>al</strong>(129) Auteur <strong>de</strong> l'œuvre Mut`at <strong>al</strong>-assmâ` fî `ilm as-samâ` (La jouissance <strong>de</strong>s auditions par <strong>la</strong>science <strong>music<strong>al</strong></strong>e), manuscrit constituant un <strong>de</strong>s volumes d'une vaste encyclopédie intitulée Façl <strong>al</strong>khitâbfî madârik <strong>al</strong>-hawâss <strong>al</strong>-khams li 'ûlî-l-<strong>al</strong>bâb, manuscrit à <strong>la</strong> bibliothèque <strong>al</strong>-Âshûriyya àTunis.


137Au XIV ème siècle, et selon un poème mystique <strong>de</strong> Muhammad adh-Dharîf (mort en 1385), Il y avait quatorze nûbât en Tunisie, dans les tubû`(sing. tba` : mo<strong>de</strong>) suivants : rahâwî, dhîl, raml, içbahân, çîka, muhayyir,mazmûm, `irâq, hsîn, nawâ, raçd-dhîl, mâya, raçd et içba`ayn (131).Pour ce qui est du <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong>s nûbât tunisiennes, toutes les étu<strong>de</strong>s etrecherches sur <strong>la</strong> musique tunisienne, affirment qu'il a été remanié par le beyhusseinite Muhammad ar-Rashîd (1710-1759) (132),lui-même poète,compositeur et, joueur <strong>de</strong> `ud (luth) et <strong>de</strong> violon, qui a renoncé à son trônepour se consacrer à <strong>la</strong> musique. Il a arrangé les différentes parties <strong>de</strong>s nûbât,et composa même <strong>de</strong> nombreuses pièces instrument<strong>al</strong>es (mçaddar, tûshya etfârigha) (133) pour ces nûbât. Il ajouta même <strong>de</strong> nouvelles formes au<strong>répertoire</strong> <strong>music<strong>al</strong></strong> tunisien, tel le bashraf, ouverture instrument<strong>al</strong>ed'inspiration turque.Actuellement, on constate que <strong>la</strong> nûba c<strong>la</strong>ssique tunisienne, a perdu sap<strong>la</strong>ce dans <strong>la</strong> société, elle n'obéit plus à un programme précis. Elle doit saconservation à <strong>la</strong> Rashîdiyya créée en novembre 1934. Cette association quis'appelle <strong>al</strong>-jam`yyia <strong>al</strong>-Rachîdiyya li-l-mûsîqâ at-tûnisiyya (l'association <strong>al</strong>-(130) ABD-<strong>al</strong>-WAHHÂB (Hassan Hossnî), waraqât (Feuillets), Tunis, 1972, Tome II, p. 233.(131) Certains affirment qu'il y avait vingt-quatre nûba complètes en And<strong>al</strong>ousie, mais lesdéfail<strong>la</strong>nces <strong>de</strong> <strong>la</strong> transmission or<strong>al</strong>e ont causé <strong>la</strong> perte <strong>de</strong> certaines parties ou même <strong>de</strong> nûbâtentières. Actuellement on compte seulement treize nûbât, <strong>la</strong> nûba du tba` rahâwî a disparu.(132) Fils aîné <strong>de</strong> <strong>al</strong>-Hussayn ibn 'Ali <strong>al</strong>-Turki, fondateur <strong>de</strong> <strong>la</strong> dynastie husaynite en 1705. Fuyantson oncle `Ali Bâcha (1735-1755) qui a détrôné <strong>al</strong>-Hussayn en 1735, Muhammad <strong>al</strong>-Rashîd s'estexilé en Algérie avec son frère `Ali jusqu'en 1755, date <strong>de</strong> sa reprise du trône <strong>de</strong> son père.(133) Cf. pp. 139, 143.


138Rashîdiyya <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique tunisienne) (134), a été créée pour sauvegar<strong>de</strong>r lepatrimoine <strong>music<strong>al</strong></strong> tunisien et <strong>de</strong> le diffuser parmi <strong>la</strong> génération montante, etréhabiliter l'activité <strong>music<strong>al</strong></strong>e et promouvoir les créations nouvelles.2 - La forme <strong>music<strong>al</strong></strong>eLa nûba est un ensemble <strong>de</strong> suites <strong>de</strong> pièces instrument<strong>al</strong>es mesuréeset non mesurées, et voc<strong>al</strong>es toujours mesurées, composées sur le même tba`qui donne son nom à toute <strong>la</strong> nûba, et sur différents 'îqâ`ât (sing. 'îqâ`:rythme).L'actuelle nûba se compose <strong>de</strong> neuf parties essentielles, ces parties sesuccè<strong>de</strong>nt dans un ordre <strong>al</strong><strong>la</strong>nt du plus lent au plus vif. Elle se présentecomme suit :1/ Istiftâh : Littér<strong>al</strong>ement, le terme Istiftâh, signifie ouverture oucommencement. C'est un prélu<strong>de</strong> instrument<strong>al</strong> non mesuré exécuté parl'ensemble <strong>de</strong> l'orchestre jouant à l'unisson, annonçant le commencement <strong>de</strong><strong>la</strong> nûba. "Ce n'est pas, en effet, à proprement parler, une phrase rythmique, <strong>la</strong>mélodie étant libérée <strong>de</strong> toute mesure formelle apparente, quoiqu'elle sedéroule selon un schéma interne dont les cellules rythmiques sontimperceptibles parce que non marquées par un relief. Cette impression <strong>de</strong>forme mitigée ou estompée provient, sans doute, <strong>de</strong> ce que ce morceau était à(134) Cette association a retenu ce nom en hommage au troisième bây husaynite Muhammad ar-Rachîd.


139l'origine une improvisation <strong>de</strong> style déc<strong>la</strong>matoire"(135), joué par un seulinstrumentiste (génér<strong>al</strong>ement le luthiste). Actuellement, et <strong>de</strong>puis <strong>la</strong> création<strong>de</strong> <strong>la</strong> rashîdiyya, l'istiftâh est exécuté par tout l'orchestre (sauf lespercussions, puisqu'il est composé sur un rythme libre). <strong>Le</strong> rôle que jouel'istiftâh est <strong>de</strong> présenter le mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba, et <strong>de</strong> mettre les musiciens et lesauditeurs dans l'ambiance du tba` <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba.Rappelons enfin que <strong>de</strong> nos jours, il n'existe plus qu'un seul istiftâhpour chaque nûba.2/ Mçaddar : Une pièce instrument<strong>al</strong>e mesurée, jouée par toutl'orchestre. Elle se déroule sur trois rythmes <strong>al</strong><strong>la</strong>nt du lent au rapi<strong>de</strong>:a - Mçaddar, auquel toute cette <strong>de</strong>uxième partie doit le nom, il estformé <strong>de</strong> trois ou quatre mouvements (khânât, sing. khâna) et un refrain. Cerythme est à mesure ternaire, il se déroule dans un mouvement assez lent :64b - Tûq (litt. : collier), une pièce instrument<strong>al</strong>e fondée sur un 'îqâ` dumême nom, et qui est plus rapi<strong>de</strong> que le mçaddar :34(135) SNOUSSI (Manoubi), op.cit., p. 104.


140<strong>Le</strong> phrasé <strong>de</strong>s mélodies composées sur ce rythme repose génér<strong>al</strong>ement sur les<strong>de</strong>ux formules suivantes :etcomme le montre cet extrait du tûq <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba `irâq:c - Silsi<strong>la</strong> (litt. chaîne), une pièce instrument<strong>al</strong>e d'un mouvement trèsrapi<strong>de</strong> composée sue le 'îqâ` hurûb (litt. fugue) 3 :8qui se caractérise par l'accentuation <strong>de</strong> son premier temps. La silsi<strong>la</strong> estcomposée essentiellement sur le motif rythmique suivant :Elle s'achève par une fin<strong>al</strong>e violente.La silsi<strong>la</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba mâya


1413/ <strong>al</strong>-Abyât: (sing. bayt: vers): cette partie <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba est constituée<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux phases différentes:a/ Dukhûl <strong>al</strong>-abyât (entrée <strong>de</strong>s vers), un court prélu<strong>de</strong> instrument<strong>al</strong>composé sur <strong>de</strong>ux rythmes différents, le premier est un barw<strong>al</strong>:24et le <strong>de</strong>uxième est un btâyhî:44Ce prélu<strong>de</strong> instrument<strong>al</strong> est lié à <strong>la</strong> première partie chantée <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba<strong>de</strong> <strong>la</strong> musique c<strong>la</strong>ssique (mâlûf), qu'on appelle <strong>al</strong>-Abyât.b/ <strong>al</strong>-Abyât (les vers), interprétés par le chanteur princip<strong>al</strong> sur le waznbtâyhî dans un mouvement lent et solennel, et interc<strong>al</strong>és par <strong>de</strong>ux intermè<strong>de</strong>s(fârighât, sing. fârigha: vi<strong>de</strong>, sans paroles) instrumentaux composés sur lemême wazn. "<strong>Le</strong> style sévère <strong>de</strong> ce chant d'ordonnance syl<strong>la</strong>bique, oupresque, et <strong>la</strong> tenue littéraire <strong>de</strong> son texte, strictement c<strong>la</strong>ssique, en font <strong>la</strong> <strong>la</strong>


142partie <strong>la</strong> plus noble <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba tunisienne, celle que l'on écoute avec le plusd'attention et <strong>de</strong> sérieux.4/ <strong>al</strong>-btâyhiyya (pluriel <strong>de</strong> btâyhî) : Cette partie est aussi constituée<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux phases à <strong>de</strong>ux rythmes différents :a/ Dukhûl <strong>al</strong>-btâyhiyya, qui est un court prélu<strong>de</strong> instrument<strong>al</strong>composé sur le wazn (formule rythmique) barw<strong>al</strong> puis le wazn btâyhî avant<strong>de</strong> passer sans arrêt à <strong>la</strong> partie chantée sur ce même wazn.b/ <strong>al</strong>-btâyhiyya: c'est <strong>la</strong> première série <strong>de</strong> pièces voc<strong>al</strong>es au nombreindéfini composées sur un même wazn qui est le btâyhî dont le mouvementest assez lent. <strong>Le</strong> btâyhî est un wazn à quatre temps, il se caractérise parl'accentuation <strong>de</strong> son premier temps et <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>de</strong>uxième moitié du troisièmetemps,44une syncope dans son <strong>de</strong>uxième temps,44et un contre temps dans son troisième temps.44Génér<strong>al</strong>ement, les mélodies composées sur ce wazn débutent avec le<strong>de</strong>uxième temps accentué comme le montre l'exemple <strong>music<strong>al</strong></strong> suivant :Extrait du septième btâyâyhî <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba hsîn


1435/ at-tûshya : c'est une pièce purement instrument<strong>al</strong>e qui a pour rôle<strong>de</strong> mettre les auditeurs au courant <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba programmée pour le prochainconcert. Selon l'ordre traditionnel <strong>de</strong>s nûbât, cette pièce doit êtrenécessairement composée sur le tba` (mo<strong>de</strong>) <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba qui suit dans l'ordre,celle que l'on est en train <strong>de</strong> jouer.La tûshya est composée sur <strong>de</strong>ux rythmes : d'abord sur le barw<strong>al</strong>, puissur le btâyhî, avant que le joueur <strong>de</strong> `ud (luth) procè<strong>de</strong> à une improvisationnon mesurée afin <strong>de</strong> retrouver le mo<strong>de</strong> princip<strong>al</strong>, sans que le public s'enren<strong>de</strong> compte6/ <strong>al</strong>- Barâwil : (sing. barw<strong>al</strong>). C'est une partie voc<strong>al</strong>e présentée sousforme d'une série <strong>de</strong> pièces composées sur le wazn barw<strong>al</strong> :24


144Dans le di<strong>al</strong>ecte tunisien, le barw<strong>al</strong> est synonyme <strong>de</strong> " vif "; c'est avec cewazn, exécuté <strong>de</strong> plus en plus rapi<strong>de</strong>ment que <strong>la</strong> nûba atteint <strong>la</strong> fin <strong>de</strong> sapremière partie.<strong>Le</strong> <strong>de</strong>uxième barw<strong>al</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba hsîn7/ <strong>al</strong>-Adrâj: (sing. draj). Cette partie, comme les autres, prend le nomdu 'îqâ` sur lequel elle est composée. Littér<strong>al</strong>ement, "draj signifie rapi<strong>de</strong> etimplique l'idée <strong>de</strong> <strong>la</strong> gradation dans <strong>la</strong> célérité"(136). <strong>Le</strong> mouvement <strong>de</strong> cewazn est très variable, il progresse du lent au très rapi<strong>de</strong> pour revenir à <strong>la</strong> finau tempo du début.Cette partie est composée <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux phases : une phase instrument<strong>al</strong>e appeléefârighat <strong>al</strong>-adrâj, et une autre, voc<strong>al</strong>e, qui est <strong>la</strong> partie princip<strong>al</strong>e, composéed'une série <strong>de</strong> pièces chantées sur le wazn draj que lui correspond <strong>la</strong> formulerythmique suivante :64Fârighat <strong>al</strong>-adrâjadrâj <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba hsîn(136) ERLANGER, op. cit., Tome VI, p. 196.


145Il est à noter que cette partie ne se limite pas au wazn draj, il existe<strong>de</strong>s pièces voc<strong>al</strong>es qui sont composées sur le wazn barw<strong>al</strong> ou le wazn hrûb.8/ <strong>al</strong>-Khafâyif: (sing. khafif). Comme <strong>la</strong> partie <strong>al</strong>-adrâj, cette partieest aussi composée <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux phases : une phase instrument<strong>al</strong>e appeléefârighat <strong>al</strong>-khafâyif, et une voc<strong>al</strong>e composée sur le wazn khafif que luicorrespond <strong>la</strong> formule rythmique suivante :64<strong>Le</strong> wazn khafîf se distingue par son <strong>al</strong>lure assez lour<strong>de</strong>, et sonmouvement assez lent. <strong>Le</strong>s pièces voc<strong>al</strong>es composées sur ce wazncommencent génér<strong>al</strong>ement avec le <strong>de</strong>uxième temps.Extrait du premier khafîf <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba `irâq


1469/ <strong>al</strong>-Akhtâm: (sing. khatm: fin<strong>al</strong>). C'est <strong>la</strong> <strong>de</strong>rnière partie <strong>de</strong> <strong>la</strong>nûba, composée sur un 'îqâ` <strong>de</strong> mesures ternaires appelé khatm qui suit <strong>la</strong>formule rythmique suivante :34Extrait du <strong>de</strong>uxième khatm <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba `irâqIl est à remarquer que certains akhtâm <strong>de</strong> certaines nûbât sont transcrits en6/8 avec <strong>la</strong> formule rythmique suivante :68Extrait du quatrième khatm <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba mâyaSign<strong>al</strong>ons enfin que dans <strong>la</strong> pièce <strong>de</strong> khatm, <strong>la</strong> mélodie s'accélèreprogressivement du mo<strong>de</strong>rato au presto très vif et ce, jusqu'à <strong>la</strong> fin.Pour finir, rappelons que ces parties ne sont pas toutes présentes danstoutes les nûbât, et ce<strong>la</strong> est certainement dû à <strong>la</strong> tradition or<strong>al</strong>e qui, à traversles générations a causé <strong>la</strong> disparition d'un bon nombre <strong>de</strong> parties <strong>de</strong>s nûbât, et


147même une nûba entière, comme c'est le cas <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba rahâwî. C'estcertainement pour cette raison que le nombre <strong>de</strong>s parties diffère d'une nûba àune autre. Prenons l'exemple <strong>de</strong> <strong>la</strong> partie <strong>de</strong>s Btâyhiyya (plur. <strong>de</strong> Btâyhî);dans cette partie, le nombre <strong>de</strong>s Btâyhî varie entre cinq dans <strong>la</strong> nûba du tba`sîka ou celle du tba` mazmûm, et dix-sept dans <strong>la</strong> nûba du tba` dhîl commenous pouvons le constater dans le tableau qui suit. Ce tableau nous donne uneidée génér<strong>al</strong>e sur le nombre <strong>de</strong>s parties <strong>de</strong> l'ensemble <strong>de</strong>s nûbât du <strong>répertoire</strong>du mâlûf (137).Tableau résumant les parties existantes dans les nûbât du mâlûfistiftâhMçaddar Dukhû<strong>la</strong>l- abyâtBtâyhî Tûshyia DukhûlbarâwilBaw<strong>al</strong> Draj Khafîf KhatmDhîl 1 1 1 17 1 - 9 6 10 3`Irâq 1 1 1 10 - 2 5 4 5 2sîka 1 1 1 5 - - 3 2 4 3Hsîn 1 1 1 8 1 2 11 5 5 6Raçd - - 1 7 - - 3 4 4 2Raml-mâya 1 1 1 8 1 1 5 4 5 3Nawâ - - 1 8 - 1 7 4 5 2Açba`ayn 1 1 1 8 1 - 11 3 5 7Raçd <strong>al</strong>-dhîl 1 1 1 9 - 3 7 3 3 3Raml 1 1 1 11 1 - 7 3 5 3Içbahân 1 1 1 7 - - 4 3 3 2Mazmûm 1 1 1 5 - - 6 2 5 2Mâya 1 1 1 6 - - 10 4 5 4(137) C.f. GUETTAT, op.cit. , pp. 224, 225.


1483 - <strong>Le</strong>s mo<strong>de</strong>s (tubû`)<strong>Le</strong>s treize nûbât du <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique traditionnelle "mâlûf",sont composées sur treize tubû` c<strong>la</strong>ssifiés dans un ordre bien déterminé. Cec<strong>la</strong>ssement est sign<strong>al</strong>é dans un zaj<strong>al</strong> appartenant à <strong>la</strong> nûba nawâ. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong>sparoles <strong>de</strong> ce zaj<strong>al</strong> est le suivant :Translittération du texte arabe :Yajurru-r-rabâb rahâwîBi-dh-dhîl q<strong>al</strong>bî kâwîAmmâ-l-`irâq yusâwîSîkâ ma`a-l-husaynAr-raçd wa raml-el-mâyaZîd an-nawâ fî ghâyaAl-'içba`ayn dwâyaRaçd-adh-dhîl yuhyînîAr-raml hîna tanaghgham`Alâ-l-içbahân ys<strong>al</strong>limMazmûm bîh-intammimMâya fi-l-faç<strong>la</strong>ynTraduction :L'archet du rabâb tire sur rahâwî,Et par adh-dhîl mon coeur <strong>la</strong>nguit,Alors que `irâq équivaut àSîka et hsîn,Raçd et raml <strong>al</strong>-mâyâAttise le désir <strong>de</strong> nawâ,Açba`ayn est mon remè<strong>de</strong>,


149Raçd adh-dhîl m'entoure,Puis lorsque ar-raml se met à fredonner,Il se soumet à içbahân,Et clôture par mazmum et mâya,Ses <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rniers portraits.Il est c<strong>la</strong>ir que les noms <strong>de</strong>s tubû` du <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong>s nûbât <strong>de</strong> <strong>la</strong>musique traditionnelle tunisienne, comme c'est le cas d'ailleurs pour lesmaqâmât <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique arabe en génér<strong>al</strong>, ne sont pas <strong>de</strong>s termes uniquementtechniques, ils sont trait à <strong>de</strong>s éléments "extra-musicaux". <strong>Le</strong>s tubû` prennentle noms : d'une loc<strong>al</strong>ité ou d'une région comme içbahân, le nom <strong>de</strong> l'anciennecapit<strong>al</strong>e persane, ainsi que `irâq : l'Irak, ou encore un nom propre comme leHsîn …Ces noms ne sont sûrement pas choisis au hasard, ils montrent que letba` en question provient probablement <strong>de</strong> ces villes, <strong>de</strong> ces régions, ou qu'i<strong>la</strong> été créé par un homme <strong>de</strong> ce nom, et ainsi un style <strong>music<strong>al</strong></strong> rattaché auxlieux ou aux personnes dont ils portaient le nom.Pour présenter ces tubû`, nous avons jugé utile <strong>de</strong> donner, outre leursgammes mod<strong>al</strong>es où nous sign<strong>al</strong>erons les ajnâs (cellules mélodiques), unephrase <strong>music<strong>al</strong></strong>e illustrant les caractéristiques <strong>de</strong> chaque tba`. Car, l'avonsnousvu, l'échelle du tba` est constituée d'une combinaison <strong>de</strong> ajnâs, et <strong>la</strong>présenter en forme d'une succession <strong>de</strong> <strong>de</strong>grés ascendante et <strong>de</strong>scendanten'est en aucun cas suffisant pour déterminer les caractéristiques qui lui sont


150propres. "Il faut jouer le tba' pour pouvoir assimiler ses lois, connaître ses<strong>de</strong>grés, pénétrer son univers et communiquer avec son rûh (âme)" (138).3.1 - Dhîl : <strong>Le</strong> terme dhîl signifie "queue", bien que ce tba` occupe <strong>la</strong>première p<strong>la</strong>ce dans <strong>la</strong> disposition <strong>de</strong>s nûbât. Son nom viendrait <strong>de</strong> sonmouvement mélodique un peu particulier, qui se caractérise par <strong>la</strong> <strong>de</strong>scenteaux notes graves au <strong>de</strong>ssous du qarâr (tonique), comme le confirmeMannoubi SNOUSSI en disant : "le mo<strong>de</strong> dhil comporte une particu<strong>la</strong>rité quiconsiste en un tétracor<strong>de</strong> complémentaire qui vient s'ajouter au <strong>de</strong>ssous <strong>de</strong> <strong>la</strong>tonique qui reste <strong>la</strong> cheville ouvrière du mouvement mélodique. C'est à cetétracor<strong>de</strong> supplémentaire que le mo<strong>de</strong> doit son nom <strong>de</strong> dhil qui signifie(queue) ou (traîne); il constitue, en effet un fléchissement <strong>de</strong> <strong>la</strong> lignemélodique vers <strong>la</strong> grave (c'est-à-dire vers le bas) comparable aufléchissement <strong>de</strong> <strong>la</strong> (queue) d'une robe à traîne" (139).La gamme mod<strong>al</strong>e :Phrase mélodico rythmique caractéristique :(138) GUETTAT, op.cit. , p. 258.


1513.2 - `IRAQ : (ou I`râq comme le prononcent les musiciens <strong>de</strong> <strong>la</strong>région); IL occupe <strong>la</strong> <strong>de</strong>uxième p<strong>la</strong>ce <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux <strong>répertoire</strong>s (traditionnel etcelui <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-Karrâriyya). Il est connu par sa qaf<strong>la</strong> (ca<strong>de</strong>nce)particulière : "un pentacor<strong>de</strong> auxiliaire du genre (rast) vient s'ajouter au genre<strong>de</strong> <strong>la</strong> tonique. Après un repos fortuit sur <strong>la</strong> note grave <strong>de</strong> ce pentacor<strong>de</strong>supplémentaire(sol grave), le mouvement remonte pour effectuer le reposfin<strong>al</strong> sur <strong>la</strong> tonique (ré).<strong>la</strong> ca<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> résolution comporte une chute d'unequarte (<strong>de</strong> <strong>la</strong> dominante à <strong>la</strong> tonique), ce qui constitue <strong>la</strong> caractéristiqueprincip<strong>al</strong>e <strong>de</strong> ce mo<strong>de</strong>" (140).La gamme mod<strong>al</strong>e :(139) SNOUSSI (Mannoubi), op.cit., p.48.(140) SNOUSSI (Mannoubi), op. cit., p.55


152Phrase mélodico rythmique caractéristique :3.3 - Sîka : <strong>Le</strong> tba` sîka est très utilisé dans tout les genres musicaux,savante ou popu<strong>la</strong>ire, <strong>religieuse</strong> ou profane. <strong>Le</strong> terme sîka ou sîkâh estd'origine persane qui signifie le troisième <strong>de</strong>gré. " (Seh-gah), composée <strong>de</strong>(seh) qui signifie trois et <strong>de</strong> (gah) qui signifie position, l'expression entièresignifie donc : position 3 ou troisième position. Elle sert en effet, à désigner<strong>la</strong> troisième note <strong>de</strong> <strong>la</strong> gamme fondament<strong>al</strong>e arabe"(141).La gamme mod<strong>al</strong>e :(141) SNOUSSI (Mannoubi), op. cit., p.55


153Phrase mélodico rythmique caractéristique3.4 - Hsîn : Ce tba` a <strong>de</strong>ux dérivés : le hsîn çabâ et le hsîn `ajam."Hsîn est <strong>la</strong> prononciation di<strong>al</strong>ect<strong>al</strong>e tunisienne <strong>de</strong> Husayn, nom propre arabe<strong>de</strong> personne. Ce nom figure, sous <strong>la</strong> forme attributive <strong>de</strong> Husayni, commenom <strong>de</strong> l'un <strong>de</strong>s douze mo<strong>de</strong>s mélodiques fondamentaux, dans tous les traités<strong>de</strong> musique arabes et persans composés <strong>de</strong>puis le treizième siècle" (142).La gamme mod<strong>al</strong>e :Phrase mélodico rythmique caractéristique :(142) SNOUSSI (Mannoubi), op. cit., p.50


1543.5 - Raçd : C'est un tba` qu'on trouve dans les pays du Maghreb qui,selon plusieurs chercheurs, a <strong>de</strong>s origines africaines (143). "En plus <strong>de</strong> saprononciation particulière <strong>de</strong> son nom, le mo<strong>de</strong> rasd tunisien, ou plutôtmaghrébin, ou mieux encore, hispano arabe, comporte, d'autre part uneparticu<strong>la</strong>rité fort importante, qui le distingue nettement <strong>de</strong> son homonymeorient<strong>al</strong>. Cette particu<strong>la</strong>rité consiste dans le (saut), ou l'omission fréquente etdélibérée, au cours <strong>de</strong>s morceaux composés dans ce mo<strong>de</strong>, d'un <strong>de</strong>gré dansl'un ou l'autre <strong>de</strong> ses tétracor<strong>de</strong>s constitutifs, ce qui donne à <strong>la</strong> mélodie uncaractère pentatonique assez prononcé. […] pour distinguer leur mo<strong>de</strong> rasddu rast orient<strong>al</strong>, les tunisiens le qu<strong>al</strong>ifient <strong>de</strong> "abidi", l'attribuant ainsi, mais à(143) cf. MEHDI (Sa<strong>la</strong>h <strong>al</strong>-), <strong>al</strong>-mûsîqâ <strong>al</strong>-`arabiyya, maqâmât wa dirâsât, (<strong>la</strong> musique arabe,mo<strong>de</strong>s et étu<strong>de</strong>s), Liban, dâr <strong>al</strong>-maghrib <strong>al</strong>-islâmî, 1993, p.42. et BEN ABD JALIL (Ab<strong>de</strong><strong>la</strong>ziz), <strong>al</strong>mûsîqâ<strong>al</strong>-and<strong>al</strong>usiyya <strong>al</strong>-maghribiyya (<strong>la</strong> musique And<strong>al</strong>ous-Maghrebine),Kuweit, imprimeries arrisâ<strong>la</strong>,1988, p.74.


155tort, aux esc<strong>la</strong>ves, c'est-à-dire aux noirs d'Afrique dont <strong>la</strong> musique est, elleaussi, pentatonique (144).La gamme mod<strong>al</strong>e :<strong>Le</strong> tba` raçd a <strong>la</strong> particu<strong>la</strong>rité <strong>de</strong> ne pas se baser sur les ajnâs dans saconstitution mod<strong>al</strong>e, et sa tournure mélodique. Pour ce<strong>la</strong>, nous <strong>al</strong>lons donnerles <strong>de</strong>grés fondamentaux du tba` plutôt que sa gamme mod<strong>al</strong>e.Phrase mélodico rythmique caractéristique :3.6 - Raml-mâya: les mots ramel et mâya servent à désigner <strong>de</strong>uxcor<strong>de</strong>s du luth maghrébin, soit <strong>la</strong> troisième et <strong>la</strong> <strong>de</strong>uxième, donnant l'une unenote correspondant au (sol) et l'autre une note correspondant au (ré) <strong>de</strong> <strong>la</strong>(144) SNOUSSI (Mannoubi), op. cit., p. 44.


156notation européenne. Rien ne semble du reste justifier l'emploi <strong>de</strong> <strong>la</strong> locution(raml-<strong>al</strong>-mâya) pour dénommer le mo<strong>de</strong> mélodique qu'elle désigne enmusique tunisienne (145).La gamme mod<strong>al</strong>e :Phrase mélodico rythmique caractéristique :(145) SNOUSSI (Mannoubi), op. cit., p. 47.


1573.7 - Nwâ : "nwa est <strong>la</strong> prononciation di<strong>al</strong>ect<strong>al</strong>e tunisienne du motarabe nawa qui signifie : éloignement, ou le lieu auquel on se propose <strong>de</strong>parvenir … Selon une superstition popu<strong>la</strong>ire qui a du reste du crédit mêmedans les milieux bourgeois, le mo<strong>de</strong> nwa a le pouvoir <strong>de</strong> provoquer <strong>la</strong>séparation <strong>de</strong>s amis. Il est à ce titre frappé d'une sorte d'interdit, que l'on sep<strong>la</strong>it, du reste, à enfreindre avec p<strong>la</strong>isir.Ce mo<strong>de</strong> a, d'autre part, <strong>la</strong> réputation <strong>de</strong> faire couler une <strong>la</strong>rme <strong>de</strong>tristesse <strong>de</strong> l'œil du chameau, auquel il rappellerait son état <strong>de</strong> servitu<strong>de</strong> etson humiliation. <strong>Le</strong> sens du mot nwa qui signifie : éloignement et qui, parconséquent, éveille le sentiment <strong>de</strong> nost<strong>al</strong>gie, contribue du reste à renforcerl'idée <strong>de</strong> tristesse attachée à ce mo<strong>de</strong>"(146).La gamme mod<strong>al</strong>e :Phrase mélodico rythmique caractéristique :(146) SNOUSSI (Mannoubi), op. cit., p. 47.


1583.8 - Içba`ayn (ou açb`în) : "Açb`in est <strong>la</strong> prononciation tunisiennedu mot arabe (asbu`ayn) qui signifie : les <strong>de</strong>ux doigts. Seuls les musicienstunisiens se servent d'une telle appel<strong>la</strong>tion pour désigner un mo<strong>de</strong> mélodique.<strong>Le</strong> mo<strong>de</strong> ainsi appelé est génér<strong>al</strong>ement connu sous le nom "Hijazi" dans lespays arabes d'Orient, et sous celui <strong>de</strong> "Zaydan" dans les autres pays duMaghreb.L'appel<strong>la</strong>tion <strong>de</strong> Asb`ayn semble résulter <strong>de</strong> <strong>la</strong> technique <strong>de</strong> jeu du luthtunisien. L'accord <strong>de</strong> cet instrument est conçu <strong>de</strong> telle façon que <strong>de</strong>ux doigtsseulement sont génér<strong>al</strong>ement nécessaires pour toucher les cor<strong>de</strong>s, soit :l'in<strong>de</strong>x et l'annu<strong>la</strong>ire. Or, pour jouer dans le mo<strong>de</strong> asb`ayn on écarte ces <strong>de</strong>uxdoigts au maximum, ce qui les met bien en évi<strong>de</strong>nce" (147).La gamme mod<strong>al</strong>e :(147) SNOUSSI (Mannoubi), op. cit., p. 47


159Phrase mélodico rythmique caractéristique :3.9 - Raçd adh-dhîl: ce tba` est propre aux pays du Maghreb où ontrouve, outre les nûbât traditionnelles, un grand nombre <strong>de</strong> composition surce tba`, que ce soit dans <strong>la</strong> musique profane, <strong>religieuse</strong> ou popu<strong>la</strong>ire.<strong>Le</strong> tba` Raçd adh-dhîl se distingue <strong>de</strong>s autres tubû` par <strong>la</strong> mobilité duquatrième <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> sa gamme mod<strong>al</strong>e qui peut être hijâz (fa2 dièze), oujahârkâh (fa2 bécarre). Une caractéristique qu'on ne trouve dans aucun autretba`.La gamme mod<strong>al</strong>e :


160Phrase mélodico rythmique caractéristique3.10 - Raml : en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s nûbât, les compositions sur ce tba` sontinexistants ou presque, ce<strong>la</strong> est dû probablement à sa ressemb<strong>la</strong>nce au tba`içba`ayn. En effet, le raml ne diffère <strong>de</strong> l'içba`ayn que par sa tournuremélodique et sa qaf<strong>la</strong>.Sa gamme mod<strong>al</strong>e :


161Phrase mélodico rythmique caractéristique :3.11 - Içbahân : ce tba` est connu au Maroc sous le nom <strong>de</strong>`ushshâq, et en Orient sous le nom <strong>de</strong> yâkâh. Il se caractérise par son registregrave, c'est certainement <strong>la</strong> raison pour <strong>la</strong>quelle il n'est jamais exploité dans<strong>la</strong> musique popu<strong>la</strong>ire qui utilise <strong>al</strong>-jawâbât (les sons aigus).La gamme mod<strong>al</strong>e :Phrase mélodico rythmique caractéristique


1623.12 - Mazmûm: d'après SNOUSSI, ce tba` prend son nom <strong>de</strong> <strong>la</strong>technique du jeu. Il dit à ce propos : " Mazmûm signifie : serré, aussi en araberégulier qu'en arabe di<strong>al</strong>ect<strong>al</strong>e tunisien. <strong>Le</strong> choix <strong>de</strong> l'appel<strong>la</strong>tion (mazmûm)pour désigner un mo<strong>de</strong> mélodique semble résulter <strong>de</strong> <strong>la</strong> technique du jeu duluth tunisien. Pour jouer dans ce mo<strong>de</strong>, les <strong>de</strong>ux doigts dont on se sert pourtoucher les cor<strong>de</strong>s, soit l'in<strong>de</strong>x et l'annu<strong>la</strong>ire, sont particulièrementrapprochés pour produire l'interv<strong>al</strong>le <strong>de</strong> <strong>de</strong>mi temps qui est sa princip<strong>al</strong>ecaractéristique. On sait que le (si) moins un quart <strong>de</strong> temps est le <strong>de</strong>grénorm<strong>al</strong> <strong>de</strong> cette note dans <strong>la</strong> gamme fondament<strong>al</strong>e arabe. Pour produire surune cor<strong>de</strong> <strong>de</strong> luth le (si bémol) <strong>de</strong> <strong>la</strong> gamme européenne, on rapprochedavantage l'in<strong>de</strong>x <strong>de</strong> l'annu<strong>la</strong>ire qui <strong>de</strong>viennent, <strong>de</strong> ce fait, (serrés) parrapport à leur position norm<strong>al</strong>e" (148).(148) SNOUSSI (Mannoubi), op. cit., p. 57.


163La gamme mod<strong>al</strong>e :Phrase mélodico rythmique caractéristique13/ - Mâya : "<strong>Le</strong> mo<strong>de</strong> mâya était consacré par <strong>la</strong> tradition au matin.Il fut en effet un temps où les mo<strong>de</strong>s du système mélodique tunisien étaientréservés chacun à une heure déterminée du jour ou <strong>de</strong> <strong>la</strong> nuit, selon untableau <strong>de</strong> concordance scrupuleusement observé. Quoique cetordonnancement <strong>de</strong>s programmes <strong>de</strong> concert est aujourd'hui oublié, ilsubsiste encore une réminiscence <strong>de</strong> cette tradition en ce qui concerne lemo<strong>de</strong> (mâya). Il est, en effet, <strong>de</strong> nos jours encore une obligation quasi rituelle<strong>de</strong> jouer, ne fut-ce qu'un morceau dans ce mo<strong>de</strong> à <strong>la</strong> fin <strong>de</strong>s séances


164<strong>music<strong>al</strong></strong>es nocturnes, ces séances se terminant génér<strong>al</strong>ement au crépuscule dumatin"(149).La gamme mod<strong>al</strong>e :Phrase mélodico rythmique caractéristique :4. <strong>Le</strong>s formules rythmiques (awzân)Comme nous l'avons vu, <strong>la</strong> nûba tunisienne se déroule suivant un certainnombre <strong>de</strong> phases ayant chacun un rythme et un tempo déterminés. Cesrythmes (ou ces awzân), suivent un mouvement progressif <strong>al</strong><strong>la</strong>nt du plus lentau plus vif.(149) SNOUSSI (Mannoubi), op. cit., p. 57


165Nous avons indiqué, en chiffres métronomiques, l'<strong>al</strong>lure du mouvement<strong>de</strong> chacun <strong>de</strong>s awzân. Notons que ces indications ne sont qu'une simpleapproximation, puisque les percussionnistes se permettent <strong>de</strong> r<strong>al</strong>entir oud'accélérer le tempo selon leurs goûts.Wazn Formule rythmique tempoMaçaddar 69Tûq 88Hrûb 184Btâyhî 72Dukhûl barâwil 74Barw<strong>al</strong> 92Draj 102Khafîf 112Khatm 200<strong>Le</strong>s percussionnistes, l'avons-nous dit dans le chapitre précé<strong>de</strong>nt,soutiennent discrètement <strong>la</strong> voix du chanteur ou <strong>de</strong> <strong>la</strong> chor<strong>al</strong>e. Ils donnent


166ainsi, le wazn dans sa forme <strong>la</strong> plus simple, et indiquent minutieusement sesbattements fondamentaux. Ce n'est que pendant les répliques instrument<strong>al</strong>esque les percussionnistes se permettent d'improviser <strong>de</strong>s variations sur lethème <strong>de</strong> <strong>la</strong> mélodie pour embellir le rythme et prouver leurs t<strong>al</strong>ents, sanstoutefois modifier le nombre ni <strong>la</strong> durée <strong>de</strong>s temps qui doivent être ressentistout au long <strong>de</strong> l'exécution. Ces variations et ces ornementations rythmiquesconsistent en un remplissage <strong>de</strong>s vi<strong>de</strong>s temporels, séparant les unités <strong>de</strong>temps constitutives <strong>de</strong> <strong>la</strong> pério<strong>de</strong>.


Troisième chapitre<strong>Le</strong>s caractéristiques <strong>music<strong>al</strong></strong>es du <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong><strong>la</strong> <strong>confrérie</strong> <strong>al</strong>-Karrâriyya


1671 - <strong>Le</strong>s formes <strong>music<strong>al</strong></strong>es1.1 - La nûbaLa nûba <strong>al</strong>-Karrâriyya est consacrée, comme <strong>la</strong> nûba <strong>de</strong> mâlûf, à unseul et même mo<strong>de</strong>. Elle ne se compose que <strong>de</strong> pièces voc<strong>al</strong>es, puisque,l'avons-nous vu, il n'y a pas utilisation d'instruments <strong>de</strong> musique. Cependant,et m<strong>al</strong>gré l'absence d'instruments <strong>de</strong> percussion, ces pièces sont toujoursmesurées. Elles obéissent même à <strong>de</strong>s awzân (pluriel <strong>de</strong> wazn : formulerythmique) bien précis et facilement reconnaissable. Ces awzân se succè<strong>de</strong>ntdans un ordre <strong>al</strong><strong>la</strong>nt du plus lent au plus vif, tout comme dans <strong>la</strong> nûba dumâlûf. Chaque nûba est désignée par le nom du tba` (mo<strong>de</strong> mélodique) danslequel elle est composée, et chaque pièce est désignée par le nom du waznqui a servi à sa composition. Nous <strong>al</strong>lons décrire ces pièces dans leur ordre<strong>de</strong> succession. Elle se présentent comme suit :1.11 - Mçaddar :<strong>Le</strong> terme mçaddar dérive du verbe "taçaddara" qui signifie; occuper<strong>la</strong> première p<strong>la</strong>ce. En effet, ce wazn est le premier <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba <strong>al</strong>-Karrâriyya,tout comme dans <strong>la</strong> nûba du mâlûf, avec <strong>la</strong> différence que dans cette<strong>de</strong>rnière, le mçaddar est une ouverture instrument<strong>al</strong>e.<strong>Le</strong> mçaddar est donc <strong>la</strong> première pièce <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba <strong>al</strong>-Karrâriyya. Ellese compose <strong>de</strong> plusieurs tawâ<strong>la</strong>` (sing. tâ<strong>la</strong>` : mouvement) et un refrain. Elleest composée sur le wazn mçaddar, à mesure ternaire :


16864Il est à remarquer que dans <strong>la</strong> musique <strong>de</strong>s autres <strong>confrérie</strong>s <strong>de</strong> <strong>la</strong>région, en l'occurrence dans le <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> hadhra, on appelle aussi <strong>la</strong>première pièce <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba: mçaddar. Cependant, le mçaddar <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba <strong>de</strong> <strong>la</strong>hadhra, est différent <strong>de</strong> celui <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba <strong>al</strong>-Karrâriyya et <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba dumâlûf. En effet, ce <strong>de</strong>rnier, l'avons-nous vu, est un rythme <strong>de</strong> nature binaire(6/4), composé <strong>de</strong> six temps bien distincts, tandis que le premier est unrythme c<strong>la</strong>udicant (27/8), dont les temps sont difficiles à repérer :Mçaddar "nibda' "bism-l-Karîm"<strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba dhîl1.12 - <strong>al</strong>-Btâyhiyya (sing. btâyhî) :C'est <strong>la</strong> <strong>de</strong>uxième partie <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba, elle est composée d'une série <strong>de</strong>pièces sur le btâyhî, un wazn à quatre temps, il se caractérise, l'avons-nous


169vu, par l'accentuation <strong>de</strong> son premier temps et <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>de</strong>uxième moitié dutroisième temps. Ces accents sont facilement repérables dans le chant <strong>de</strong>sqawwâ<strong>la</strong> (sing. qawwâl : soliste) qui, m<strong>al</strong>gré l'absence <strong>de</strong>s instruments <strong>de</strong>percussion et <strong>de</strong> support rythmique, arrivent aisément à mettre en évi<strong>de</strong>nce <strong>la</strong>structure spécifique du wazn btâyhî que lui correspond <strong>la</strong> formule rythmiquesuivante :Toutes ces pièces suivent un mouvement assez lent jusqu'au <strong>de</strong>rnierbtâyhî. Tout comme dans le <strong>répertoire</strong> du mâlûf, <strong>Le</strong> nombre <strong>de</strong>s btâyhiyya estvariable d'une nûba à une autre. Nous donnerons plus loin dans un tableaurécapitu<strong>la</strong>tif, le nombre <strong>de</strong> Btâyhiyya dans chaque nûba.Extrait du btâyâyhî "Sammayt bism-l-LâhLâh" <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba mâya


1701.13 - <strong>al</strong>-Barâwil (sing. barw<strong>al</strong> : synonyme <strong>de</strong> "rapi<strong>de</strong>") :D'après SNOUSSI, "le terme barw<strong>al</strong> dérive certainement <strong>de</strong> celui <strong>de</strong>barw<strong>la</strong>, qui désigne, au Maroc, un type <strong>de</strong> poème en arabe di<strong>al</strong>ect<strong>al</strong> composéd'une suite <strong>de</strong> couplets plus ou moins égaux, et sans refrain"(150).Al-Barâwil est une suite <strong>de</strong> pièces composées sur le wazn barw<strong>al</strong>(2/4), et exécutées <strong>de</strong> plus en plus rapi<strong>de</strong>ment. Sa formule rythmique est <strong>la</strong>suivante :Cette suite <strong>de</strong> pièces appelée barâwil débute génér<strong>al</strong>ement par un ou<strong>de</strong>ux muwashshahât, ou plus, qui sont composés sur le wazn dukhûl barâwilque lui correspond <strong>la</strong> formule rythmique suivante :Tout comme dans <strong>la</strong> nûba du mâlûf, le dukhûl barâwil, qui se déroulesur un mouvement plus ou moins rapi<strong>de</strong>, n'est en ré<strong>al</strong>ité qu'une variationrythmique qui sert à établir le passage <strong>de</strong> <strong>la</strong> suite <strong>de</strong>s btâyhiyya caractériséspar leur mouvement assez lent, à <strong>la</strong> suite <strong>de</strong>s barâwil qui se déroulent sur unmouvement assez rapi<strong>de</strong>.(150) SNOUSSI (Manoubi), op.cit., p.111.


171Extrait du barw<strong>al</strong> "Yâ sâqî isqinî khamra" <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba hsîn1.14 - <strong>al</strong>-Adrâj (pluriel <strong>de</strong> draj) :<strong>Le</strong> terme draj vient du verbe "darraja" qui signifie : "échelonner,graduer". <strong>al</strong>-adrâj est une série <strong>de</strong> pièces composées et chantées sur un waznqui porte aussi le nom <strong>de</strong> draj :1.15 - <strong>al</strong>-khafâyif: (pluriel <strong>de</strong> khafif):Comme nous l'affirme SNOUSSI, "l'emploi du terme khfîf (quisignifie léger) pour désigner cette forme <strong>de</strong> chant semble une impropriété;son <strong>al</strong>lure plutôt lour<strong>de</strong> et traînante, ne justifie pas, en effet, une telleappel<strong>la</strong>tion. Mais ce nom lui a été donné, peut-être, parce que son rythme -


172qui comporte douze unités <strong>de</strong> temps – (151) rappellerait le mètre prosodiqueappelé khafîf qui est composé, lui aussi, <strong>de</strong> douze unités prosodiques" (152).Cette partie est <strong>la</strong> <strong>de</strong>rnière <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba <strong>al</strong>-Karrâriyya, elle estcomposée sur le wazn khafif que nous transcrivons <strong>de</strong> <strong>la</strong> façon suivante :64Extrait du khafîf "Yâ qamara-l-ufuqi"ufuqi"<strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba sîkaÉvi<strong>de</strong>mment, ces <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rnières parties ne contiennent pas <strong>de</strong> fârighât(fârighat <strong>al</strong>-adrâj et fârighat <strong>al</strong>-khfâyif) - qui sont <strong>de</strong>s phases instrument<strong>al</strong>esdans le <strong>répertoire</strong> du mâlûf - puisque le chant dans <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-Karrâriyya sefait, rappelons le, sans instruments <strong>de</strong> musique.Nous sign<strong>al</strong>ons enfin que, <strong>la</strong> phase rythmique khatm, qui est le fin<strong>al</strong> <strong>de</strong><strong>la</strong> nûba du mâlûf, est absente dans <strong>la</strong> nûba <strong>al</strong>-Karrâriyya. Ce<strong>la</strong> est dû(151) SNOUSSI transcrit le khafîf en 3/4 où l'unité <strong>de</strong> base <strong>de</strong> temps équivaut à une double croche:(152) SNOUSSI (Manoubi), op.cit., p.114


173vraisemb<strong>la</strong>blement, à son mouvement qui commence très rapi<strong>de</strong>, partant d'un<strong>al</strong>legro modéré qui s'accélère peu à peu pour atteindre vers <strong>la</strong> fin, un prestoexorbitant. Cette rapidité ne va pas avec <strong>la</strong> nature du chant religieux.1.2 - <strong>Le</strong> shghulTout comme dans le mâlûf, il existe dans le <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-Karrâriyya, en plus <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba, d'autres formes <strong>de</strong> composition qui y ont étéintégrées. Ce sont <strong>de</strong>s pièces complémentaires qui, bien qu'elles aient <strong>la</strong>même structure que les muwashshahât qui forment <strong>la</strong> nûba <strong>al</strong>-Karrâriyya,s'en distinguent par une musique plus légère, et par l'utilisation <strong>de</strong>s formulesrythmiques (awzân) n'appartenant pas à <strong>la</strong> structure génér<strong>al</strong>e <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba. Cespièces sont les ashghâl (ou shghullât, pluriel <strong>de</strong> shghul).<strong>Le</strong> shghul qui signifie "travail" ou "ouvrage", ou plutôt "chanttravaillé", est employé par les musiciens tunisiens pour désigner <strong>de</strong>s pièces<strong>de</strong> chant particulièrement , soigneusement .Composés sur les paroles d'un poème à vers courts agencés en strophes, dugenre appelé tawshîh ou zaj<strong>al</strong>, ces morceaux <strong>de</strong> chant sont composés sur unair <strong>de</strong> base que l'on a par <strong>de</strong>s développements surchargés <strong>de</strong>fioritures, et par <strong>de</strong>s chantés sur <strong>de</strong>s mélismes vocaux constituéspar <strong>de</strong>s mots étrangers au texte poétique, qui n'ont aucun sens et qui ne sont


174formés que <strong>de</strong> consonnes lingu<strong>al</strong>es, comme : <strong>la</strong><strong>la</strong><strong>la</strong>n, tara<strong>la</strong>n, tiritâr, etc."(153).<strong>Le</strong> shghul se caractérise par sa musique plus légère que celle <strong>de</strong>spièces <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba, avec ses variations mélodiques dans chaque vers qui sontcomposés chacun dans un tba` différent. Il se caractérise aussi, et surtout parses awzân puisés dans <strong>la</strong> musique popu<strong>la</strong>ire tunisienne comme le waznfazzâni (154) :Ou le sa`dâwi :Il est à remarquer que le shghul dans <strong>la</strong> musique du mâlûf, estconstruit sur <strong>de</strong>s formules rythmiques (awzân) qui sont d'usage courant enmusique arabe orient<strong>al</strong>e comme c'est le cas du shghul "badrî badâ fî hu<strong>la</strong>lî",en mo<strong>de</strong> içba`ayn, composé sur le wazn samâ`î thaqîl: (155)Certains ashghâl sont même construits sur <strong>de</strong>s awzân boiteux qui"semblent quelque peu bizarres pour les tunisiens, quoiqu'ils y trouventbeaucoup <strong>de</strong> charme. Ils les qu<strong>al</strong>ifient <strong>de</strong> `âyib, ou c<strong>la</strong>udicants, à cause <strong>de</strong>(153) SNOUSSI (Manoubi), op.cit., p. 115.(154) Fazzâni est aussi le nom d'une danse très appréciée par les tunisiens. Certains spéci<strong>al</strong>istesaffirment que l'origine <strong>de</strong> ce wazn tunisien est libyenne (<strong>de</strong> <strong>la</strong> région <strong>de</strong> Fazzân).(155) Voir exemple sonore n o


175leurs temps, et comme pour marquer l'irrégu<strong>la</strong>rité <strong>de</strong> leur <strong>al</strong>lure"(156). Citonsparmi ces awzân, le mjarrad avec <strong>la</strong> formule rythmique suivante :Il est utilisé "sous forme <strong>de</strong> modu<strong>la</strong>tion rythmique. Cette modu<strong>la</strong>tion consisteà varier le wazn initi<strong>al</strong> du chant par le wazn m'jarrad, afin <strong>de</strong> rompre avec <strong>la</strong>monotonie <strong>de</strong> <strong>la</strong> mélodie. "C’est l'exemple du shghul "at<strong>al</strong>ta <strong>al</strong> hajra" (tum'as manqué), dont le wazn est le samâ`î thaqîl"(157) (158)."Certains ashghâl semblent être d'origine orient<strong>al</strong>e directe etd'importation re<strong>la</strong>tivement récente. Cependant, ils ont été assez déformés parl'usage et <strong>la</strong> transmission or<strong>al</strong>e, notamment dans leur structure rythmique,pour se rapprocher, par cette sorte <strong>de</strong> rodage, du style hispano-tunisien ets'intégrer dans <strong>la</strong> masse anonyme du mâlûf. D'autres semblent avoir étécomposés, à une époque assez lointaine, par <strong>de</strong>s musiciens tunisiens, à l'ai<strong>de</strong><strong>de</strong> thèmes empruntés au <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong>s nûbât, ou encore à <strong>de</strong>s compositionsd'origine orient<strong>al</strong>e, ou, enfin, aux <strong>de</strong>ux sources à <strong>la</strong> fois" (159).Dans le manuscrit <strong>de</strong> sîdî Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY, nous trouvonsquarante et un shghul dans les mo<strong>de</strong>s (tubû`) suivants :- Trois dans le tba` çîka,(156) SNOUSSI (Manoubi), op.cit., p. 116.(157) ZOUARI (Lassaâd), "les formules rythmiques (awzân) dans <strong>la</strong> musique arabe traditionnelle",thèse d'histoire <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique et <strong>de</strong> musicologie en vue <strong>de</strong> l'obtention du doctorat nouveau régime,Université <strong>de</strong> Paris-Sorbonne, Paris IV, Paris, 1997, p. 295.(158) Exemple sonore no …(159). SNOUSSI (Manoubi), op.cit., p. 116


176- Quatre dans le tba` hsîn,- Huit dans le tba` içba`ayn,- Sept dans le tba` raçd adh-dhîl,- Cinq dans le tba` nawâ,- Cinq dans le tba` mazmûm,- <strong>de</strong>ux dans le tba` mâya,- Cinq dans le tba` hsîn `ajam,- et <strong>de</strong>ux dans le tba` hsîn çabâ.2 - <strong>Le</strong>s mo<strong>de</strong>s (tubû`)<strong>Le</strong>s muwashshahât qui forment les treize nûbât du <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong>tarîqa <strong>al</strong>-Karrâriyya, sont composés dans les treize tubû` <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique dumâlûf tunisien.La transmission <strong>de</strong> ce <strong>répertoire</strong> s'est effectuée uniquementpar <strong>la</strong> voie <strong>de</strong> <strong>la</strong> tradition or<strong>al</strong>e, ce qui a engendré <strong>la</strong> disparition d'une bonnepartie <strong>de</strong> ces nûbât.<strong>Le</strong> système mod<strong>al</strong> <strong>de</strong> ce <strong>répertoire</strong> puise ses principes fondamentauxdans ce qui est génér<strong>al</strong> à toutes les musiques citadines arabes que nous avonsdémontré au premier chapitre <strong>de</strong> cette partie. <strong>Le</strong>s tubû` sont <strong>de</strong> typeheptatonique, m<strong>al</strong>gré l'aspect pentatonique <strong>de</strong> quelques uns comme nousaurons l'occasion <strong>de</strong> démontrer au cours <strong>de</strong> notre an<strong>al</strong>yse. Ils sont constitués<strong>de</strong> différentes combinaisons <strong>de</strong> genres (ajnâs). <strong>Le</strong> premier genre qui donnegénér<strong>al</strong>ement son nom au tba`, est toujours considéré comme le genre


177princip<strong>al</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> gamme mod<strong>al</strong>e. C'est par <strong>la</strong> nature <strong>de</strong> celui-ci que l'on peuthabituellement i<strong>de</strong>ntifier un tba`. Cependant, nous trouvons parfois <strong>de</strong>s tubû`différents qui ont <strong>de</strong>s genres principaux <strong>de</strong> même nature. Dans ce cas il fautfaire appel aux genres secondaires et aussi à l'exploration mod<strong>al</strong>e qui, ensuivant <strong>de</strong>s règles bien précises que le musicien acquiert en pratiquant <strong>la</strong>musique, met en relief toutes les caractéristiques propres au tba`.Nous avons jugé utile dans notre étu<strong>de</strong> an<strong>al</strong>ytique <strong>de</strong>s tubû` <strong>de</strong> ce<strong>répertoire</strong> d’entreprendre une démarche consistant à an<strong>al</strong>yser séparémentchaque tba` afin d’en faire ressortir les spécificités et les caractéristiquessingulières. Cette démarche peut paraître répétitive mais c’était <strong>la</strong> seulemanière qui permet d’an<strong>al</strong>yser chaque tba` avec les détails qu’il faut.Rappelons que nous nous sommes basés dans cette étu<strong>de</strong> sur <strong>de</strong>senregistrements <strong>de</strong>s nûbât que nous avons consultés à <strong>la</strong> radio <strong>de</strong> Sfax. Cesenregistrements qui ont été faits au début <strong>de</strong>s années soixante, sont d'unegran<strong>de</strong> v<strong>al</strong>eur puisque ce sont les seuls documents sonores qui puissent nousdonner une idée sur les nûbât du <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-Karrâriyya.Inopportunément, on n'y trouve pas <strong>de</strong>s nûbât complètes, mais plutôt <strong>de</strong>ssuites <strong>de</strong> pièces ne dépassants pas les vingt minutes qu'offrait le supportd'enregistrement, et qui ont donné <strong>de</strong> nouvelles nûbât qui sont parfois, auniveau du texte poétique, très différentes.


1782.1 - <strong>Le</strong> tba` dhîl :Ce tba` occupe <strong>la</strong> première p<strong>la</strong>ce dans le c<strong>la</strong>ssement traditionnel <strong>de</strong>snûbât <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux <strong>répertoire</strong>s (celui du mâlûf et celui <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-Karrâriyya). Son qarâr (sa tonique) est râst (Do2).Selon le manuscrit que nous avons entre les mains, <strong>la</strong> nûba dhîl, (<strong>la</strong>nûba composée dans le tba` dhîl), qui commence au verso <strong>de</strong> <strong>la</strong> premièrefeuille (sans numéro), et se termine à <strong>la</strong> moitié du recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille numérodix, se compose <strong>de</strong> huit muwashshahât qui forment les mouvementssuivants :1 er mouvement : le btâyhî " As'<strong>al</strong>û Rabbî ta`âlâ" (Puis-je solliciter Dieu).2 ème mouvement : il comprend Quatre barâwil :- Nibda' bism-l-Karîm (au nom du Seigneur, je commence).- Munâ'î khamra (je désire le vin céleste).- Yâ man sabâ `aqlî (toi qui a asservi mon esprit).- Qad da`ânî shawqî.3 ème mouvement : le draj" Isqînî l-intifâ`î".4 ème mouvement : il comprend <strong>de</strong>ux khafâyif :- Shaykhî yâ bâbâ `Ali (ô mon shaykh Ali)- In sa'<strong>al</strong>ta `ani-s-samâ`îNéanmoins, nous avons trouvé à <strong>la</strong> phonothèque <strong>de</strong> <strong>la</strong> maison <strong>de</strong> radio<strong>de</strong> Sfax, dans trois bobines différentes, trois enregistrements <strong>de</strong> trois suites<strong>de</strong> muwashshahât dans le tba` dhîl.


1792.1.1 - Première suite du tba` dhîl.Elle se compose <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux "fragments" <strong>de</strong> muwashshahât qui formentles <strong>de</strong>ux btâyhî suivants :Un premier btâyhî "'As'<strong>al</strong>u Rabbî ta`âlâ" :Il est dans le manuscrit, le premier btâyhî <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba dhîl. C'est unmuwashshah qui se compose <strong>de</strong> trois adwâr (plur. <strong>de</strong> dawr), et c'estseulement le troisième dawr avec le mat<strong>la</strong>` (160) qui est chanté par <strong>la</strong> chor<strong>al</strong>e.Nous donnerons <strong>la</strong> translittération du texte arabe <strong>de</strong> ce dawr, puis nousessayerons <strong>de</strong> le traduire.Translittération du texte arabe :'as'<strong>al</strong>u Rabbî ta`âlâWa-hmidhu `an kulli hâ<strong>la</strong>Yâ ilâhî bi-l-mu`adhdhamWa-l-khadhar wa-sh-shaykhi muslimWa-l-`arûsî wa-bni-l-qâsimWa man saqâ min bi'ri zamzamFa-shfinî yâ Rabbi wa-rhamWa tafadhdh<strong>al</strong> wa takarramWa-`fu `an `abdin mu'<strong>al</strong><strong>la</strong>mWa-aqb<strong>al</strong> yâ dhâ-l-jûdi man <strong>la</strong>mWa ç<strong>al</strong>li yâ Rabbî wa s<strong>al</strong><strong>la</strong>mWa-ç-çahbi wa-l-'âli-l-muna`amWatlubû minhu-l-kamâ<strong>la</strong>'an yubdi<strong>la</strong>-l-`usra bi yusrîwa-tlibhu fî kashfi dharrîash-shafî`fî-l-mudhnibînawa-l-bukhârî wa tûri sînawa-sh-shaykh mâlik bi-l-madînawa-l-'arba`a wa-l-'arba`înaghurbatî fî-l-`â<strong>la</strong>mînawa 'ammin raw`a-l-khâ'ifînabi-l-'anbiâ' wa-ç-çâlihînayaqb<strong>al</strong> qaw<strong>la</strong>-l-jâhidîna`<strong>al</strong>â 'imâmi-l-murs<strong>al</strong>înawa `itratih wa-l-'aqrabîna`âliman bi kulli 'amrî


180Wa-hmidhu `an kulli hâ<strong>la</strong>wa-tlibhu fî kashfi dharrîTraduction :Je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à Dieu qui est là haut,De transformer mes peines en bonheur,Et <strong>de</strong> me protéger <strong>de</strong>s médisances,Et <strong>de</strong>s m<strong>al</strong>faisances <strong>de</strong>s gens,Je le remercie quoi qu'il advienne,Mon Dieu je t'implore par ton livre saint,Par tes illustres shaykhs, Moslem, Aroussi,Boukhâri, et Ibn kacem <strong>de</strong> Medine,Ainsi par tes honorables serveurs <strong>de</strong> l'eau <strong>de</strong> source Zamzam,Et par les quarante quatre compagnons du Prophète,De m'accor<strong>de</strong>r ta grâce.Je ne suis que ton esc<strong>la</strong>ve souffrant,Que ta bénédiction soit sur le plus majestueuxDes prophètes, sur sa famille et ses proches.Dieu, toi qui me connais si bien,Protège moi <strong>de</strong>s médisances et <strong>de</strong>s m<strong>al</strong>faisances <strong>de</strong>s gensJe te remercie quoi qu'il advienne.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e(160) Voir "le muwashshah" à <strong>la</strong> fin <strong>de</strong> ce même chapitre p.328.


181Un <strong>de</strong>uxième btâyhî "Ç<strong>al</strong>lû yâ jamâ`a" :Nous n'avons pas trouvé les paroles <strong>de</strong> ce btâyhî dans le manuscrit.Elles ont été probablement dites par un <strong>de</strong>s a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-Karrâriyya après <strong>la</strong> mort du shaykh Abû-l-Hassan.Il est à sign<strong>al</strong>er que le document sonore nous donne un btâyhîinachevé. En effet, le chant ne dure que trois minutes et neuf secon<strong>de</strong>s, et nedonne qu'un seul bayt du muwashshah. S'agit-il d'un problème lié auminutage <strong>de</strong> l'enregistrement <strong>de</strong> l'époque qui ne permettait pas <strong>de</strong> dépasserles vingt minutes ?


182<strong>Le</strong>s paroles du btâyhî que nous trouvons dans le document sonore sont lessuivantes :Translittération du texte arabe :Ç<strong>al</strong>lû yâ jamâ`aMan yata' -sh-shafâ`aFî madhû khilâ`a`<strong>al</strong>-taha-l-mutahharli yasjud wa yas'<strong>al</strong>wa misk-l-mu`ashshabTraduction :Prions ensemble pour l'illustre Prophète,Quiconque voudrait bénéficier du pardon,Se doit <strong>de</strong> se prosterner <strong>de</strong>vant dieu,Et formuler ses vœux et ses prières,Pour que le Prophète daigne <strong>de</strong> le défendre.Vanter les mérites du ProphèteEst un s<strong>al</strong>ut <strong>de</strong> l'âme.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e


1832.1.11 Étu<strong>de</strong> an<strong>al</strong>ytique<strong>Le</strong> chant <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux btâyhî a duré dix minutes et quarante cinqsecon<strong>de</strong>s. La structure du tba` s'est composée dans cette partie <strong>de</strong> nûba <strong>de</strong>s"ajnâs" suivants :- Jins dhîl en sol1 (yâkâh), qui suit le parcours mélodique suivant :Comme dans les trois premières mesures du btâyhî "ç<strong>al</strong>lû yâ jamâ `a" :


184- Jins dhîl en do2 (râst), il suit <strong>de</strong>ux parcours mélodiques différents :Parcours 1 :Comme dans <strong>la</strong> <strong>de</strong>rnière phrase du premier btâyhî :Parcours 2 :Comme dans les quatrième et cinquième mesures du btâyhî "ç<strong>al</strong>lû yâjamâ`a" :- Jins mâya en do2 (râst), qui suit le parcours mélodique suivant :Comme dans les mesures (11-12-13) du btâyhî "'as'<strong>al</strong>u Rabbî ta`âlâ":


185- Jins `irâq en ré2 (dûkâh), qui suit le parcours mélodique suivant :Comme dans les mesures (6-7) du btâyhî "ç<strong>al</strong>lû yâ jamâ`a" :D'après cette partie <strong>de</strong> nûba, l'ambitus <strong>de</strong> l'échelle mod<strong>al</strong>e du tba` dhîls'ét<strong>al</strong>e du yâkâh [sol1] au kirdân [do3]. Il comporte les ajnâs suivants :<strong>Le</strong>s <strong>de</strong>grés fondamentaux ou notes préférentielles que nous pouvonsdistinguer dans cette partie <strong>de</strong> nûba sont essentiellement : le do2 (râst) quiest <strong>la</strong> note fondament<strong>al</strong>e qui sert d'irtikâz (litt. : fon<strong>de</strong>ment, <strong>de</strong> base) et <strong>de</strong>station fin<strong>al</strong>e pour le tba` dhîl, et le ré2 (dûkâh) qui joue un rôle importantdans le parcours mélodique du tba`.<strong>Le</strong>s formules mélodico-rythmiques caractéristiques du tba' dhîl quenous pouvons distinguer dans cette partie <strong>de</strong> nûba sont les suivantes :* <strong>la</strong> phrase fin<strong>al</strong>e du btâyhî "'as'<strong>al</strong>u Rabbî ta`âlâ" :


186* les trois premières mesures du btâyhî "ç<strong>al</strong>lû yâ jamâ`a" :* 4 ème et 5 ème mesures du <strong>de</strong>uxième btâyhî* les mesures (7-8-9), et <strong>la</strong> qaf<strong>la</strong> du btâyhî "ç<strong>al</strong>lû yâ jamâ`a" :2.1.2 – Deuxième suite du tba` dhîl.Elle se compose <strong>de</strong> sept "fragments" <strong>de</strong> muwashshahât qui forment lesmouvements suivants :1 er mouvement : Un mçaddar "Nibda' bism-l-Karîm".Il est dans le manuscrit, le premier barw<strong>al</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba dhîl. C'est unmuwashshah qui se compose <strong>de</strong> trois adwâr, et c'est seulement le premierdawr avec le mat<strong>la</strong>` qui est chanté par <strong>la</strong> chor<strong>al</strong>e. Nous donnerons le texte <strong>de</strong>ce dawr en <strong>la</strong>ngue origin<strong>al</strong>e, puis nous essayerons <strong>de</strong> le traduire.Translittération du texte arabe :Nibda' bism-l-KarîmRabbî yultuf bi hâlî


187Bi 'Uwayss wa-l-K<strong>al</strong>îmIn <strong>la</strong>m tabligh murâdikf-aqb<strong>al</strong> `<strong>al</strong>â mawlâkWa-tlub minhu najâmakIn sa'<strong>al</strong>tahu wâfâkWa lâ tatruk su'â<strong>la</strong>k tâliban li najâkWa-rham wa-fshi s<strong>al</strong>âmakli kulli man lâqâkTablugh bihi 'amânak t<strong>al</strong>qâ fî kashfi dâkNatlub Rabbun rahîmRabbî yultuf bi hâlîBi 'Uwayss wa-l-K<strong>al</strong>îmTraduction :Au nom du Seigneur, je commence,Lui, le généreux prends soins <strong>de</strong> moi,Par ses messager Ouys et K<strong>al</strong>im.Si tu n'atteints pas tes ambitions,Rends toi au bon Dieu,Supplie le <strong>de</strong> te soutenir,Il te répondra généreusement,Demeure bon avec tes semb<strong>la</strong>bles,Tu garantiras ton s<strong>al</strong>ut,Moi je ne m'adresse qu'au Seigneur généreuxLui, prendras soin <strong>de</strong> moi,Par ses messager Ouys et K<strong>al</strong>im.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e


1882 ème mouvement : Un btâyhî " Munâ'î khamra " :C'est le <strong>de</strong>uxième barw<strong>al</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba dhîl, c'est un muwashshah qui secompose <strong>de</strong> six adwâr, et c'est seulement le premier dawr avec le mat<strong>la</strong>` quiest chanté par <strong>la</strong> chor<strong>al</strong>e :Translittération du texte arabe :Munâ'î khamraM<strong>al</strong>îha tu`raDurra farîdaLaysat ba`îdaFa hia mufîdaFîhâ-l-masarraM<strong>al</strong>îha tu`ramina-ra'ûf <strong>al</strong>-j<strong>al</strong>îl`ani-sh-shibhi wa-l-mathîlsharâbuhâ ka-z-zulâlli musta`id-l-wiçâlfa yâ <strong>la</strong>hâ min jamâlwa shifâ'un li-l-`<strong>al</strong>îl`ani-sh-shibhi wa-l-mathîlTraduction :Je désire le vin céleste,Une beauté qui n'a pas <strong>de</strong> semb<strong>la</strong>ble,


189Précieuse et unique, pure et limpi<strong>de</strong>,Elle n'est pas loin <strong>de</strong> celui qui tient à sa rencontre,Elle n'a que <strong>de</strong>s vertus,Oh, quelle beauté !Elle apporte <strong>la</strong> joie et <strong>la</strong> sérénité,Elle guérit <strong>de</strong> tous les maux,Une beauté qui n'a pas <strong>de</strong> semb<strong>la</strong>bleTranscription <strong>music<strong>al</strong></strong>e3 ème mouvement : Un dukhûl barâwil " Yâ man sabâ `aqlî " :Dans le manuscrit, ce muwashshah est le troisième barw<strong>al</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûbadhîl, il se compose <strong>de</strong> six adwâr et c'est seulement le premier dawr qui estchanté par <strong>la</strong> chor<strong>al</strong>e.Translittération du texte arabe :Yâ man sabâ `aqlîWa-l-jisma wa-l-kullîAsrâruhu tumlîYâ shaykhî kûn m`ayAbû-l-Hassan Karrâywa-l-q<strong>al</strong>ba wa-l-ahshâ'li-s-sayydi-l-bâshâfî-l-hadhrâ yetmâshâfî qurbî wi-b`âdîshakhî wa 'ustâdhî


190Abû-l-Hassan Karrâyshakhî bihi-n-nâdîTraduction :Toi qui asservi mon cœur et mon esprit,Toi mon shaykh, sois à mes cotés,Là où je vais,Toi, Abû-l-Hassan Karrây, tu es mon shaykh,Tu es mon maître,Abû-l-Hassan Karrây,Je fais appel à toi.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e


1914 ème mouvement : il comporte quatre barâwil :Un premier barw<strong>al</strong> "Habba-n-nasîm" :


192C'est un muwashshah qui, dans le manuscrit, ne figure pas dans <strong>la</strong>nûba dhîl. Cependant, nous l'avons trouvé dans trois nûbât différentes : dans<strong>la</strong> nûba `irâq (l'unique draj <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba `irâq), dans <strong>la</strong> nûba çîka (le <strong>de</strong>uxièmekhafif <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba çîka), et aussi dans <strong>la</strong> nûba raml (le <strong>de</strong>uxième barw<strong>al</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong>nûba raml). Il se compose <strong>de</strong> trois adwâr mais seulement le premier dawrqui est chanté par <strong>la</strong> chor<strong>al</strong>e :Translittération du texte arabe :Habba-n-nasîm wa-l-barqu lâhWa-nshur shdhâ zaynu-ç-çabâhRûhun wa râhun wa-rtiâhWa zdâda shawqî li-l-maqâmNûru-z-zakî badru-t-tamâmYâ man bihi wa bi qurbihiJismî fanâ min hubbihiMatâ 'afûzu bi waçlihiNadkhul min bâb-s-s<strong>al</strong>âmNûru-z-zakî badru-t-tamâmmin 'ardhi yathribmin najd i ya`jibùrfu-l-mahaççabli kay nu`âyinshamsu-l-mahâsintâba-n-na`îmfahwa saqîmTâha-l-`adhîmli kay nu`âyinshamsu-l-mahâsinTraduction :Cette brise qui souffle vient <strong>de</strong> Yathreb, (161)Ainsi que cet éc<strong>la</strong>ir scintil<strong>la</strong>nt,La beauté <strong>de</strong> ce matin rappelle <strong>la</strong> terre <strong>de</strong> Nejd,Et les lieux saints,(161) Yathreb : ancien nom <strong>de</strong> <strong>la</strong> ville <strong>de</strong> Médina, où est enterré le Prophète Muhammad.


193La nost<strong>al</strong>gie me prend pour <strong>la</strong> maison <strong>de</strong> Dieu,Je veux admirer encore, cette lumière,Ce soleil, ce c<strong>la</strong>ir <strong>de</strong> lune.Prophète, à tes cotés, je me sens heureux,Mon corps est affaibli, ma<strong>la</strong><strong>de</strong> d'amour,Quand pourrai-je te joindre,Toi le grand messager <strong>de</strong> Dieu,J'entre <strong>de</strong> <strong>la</strong> porte <strong>de</strong> <strong>la</strong> paix,Pour admirer encore, cette lumière,Ce soleil, ce c<strong>la</strong>ir <strong>de</strong> lune.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :


194Un <strong>de</strong>uxième barw<strong>al</strong> " Yâ hâdî-l-matâyâ " :Comme le muwashshah précé<strong>de</strong>nt, ce muwashshah ne figure pas dans<strong>la</strong> nûba dhîl du manuscrit. Il se compose <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux adwâr qui sont dans lemanuscrit, le quatrième et le premier dawr du muwashshah (Yâ ziyâr <strong>al</strong>ka`ba),le <strong>de</strong>uxième mçaddar <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba mâya.Translittération du texte arabe :Yâ hâdi-l-matâyâ`Ishqî wa munâyâWi-nzûr es-saqayâ`arrij li-l-mahbûbafî-l-haram mançûb<strong>al</strong>i-l-`Abbâs mansûbaWa nâkhudh bi sharbaFânî bi-l-mahabbanishrub bi-n-niyyatifî <strong>la</strong>ylâ mawlâtîAblighnî murâdîQad ma<strong>la</strong>kat fu'âdîNinhib win-n-nâdîbi-l-jamâl-l-fâyeqLam ya`taqhâ `âshiqbi-l-gharâm eç-çâdiqYâ 'ah<strong>la</strong>-l-matûbaFânî bi-l-mahabbarifqan yâ hudâtîfî <strong>la</strong>ylâ mawlâtî


195Traduction :Gui<strong>de</strong> <strong>de</strong> caravane,Gui<strong>de</strong> moi vers ma bien aimée,Objet <strong>de</strong> ma vénération et <strong>de</strong> mon admiration,Elle est exposée au haremJe veux boire et me dés<strong>al</strong>térerJ'étancherai ma soif.Cette beauté éc<strong>la</strong>tante est mon but,Elle m'a asservie, et je lui <strong>de</strong>meure fidèle,Elle est ma <strong>Le</strong>i<strong>la</strong>, ma reine !Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :Un troisième barw<strong>al</strong> "Al-atqiâ' an-nujabâ" :Ce barw<strong>al</strong>, est composé <strong>de</strong> cinq vers que nous avons trouvé dans unpoème écrit par un <strong>de</strong>s disciples d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY. Ce poème <strong>de</strong>


196trente-huit vers se trouve dans le manuscrit au verso <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 181 sousle titre <strong>de</strong> "shghul mazmûm", et commence par le vers suivant :Translittération du texte arabe :Hum-r-rijâlu taraqqaw b-ijtihâdihimNâlû-l-munâ fî maqâm-l-amîni `AliTraduction :Ces hommes là, ont réussi à se hisser à un haut niveau,Grâce à leur persévérance, leur ambition est ré<strong>al</strong>isée,Celle d'atteindre le gra<strong>de</strong> sublime d'Ali.Translittération du texte arabe :Al-atqiâ' an-nujabâ' bushrâ <strong>la</strong>hum dhafarûBi waçli mahbûbihim qad j<strong>al</strong><strong>la</strong> `an math<strong>al</strong>îYâ Rabbanâ jud `a<strong>la</strong>ynâ min mawâhibihimWa-sluk binâ manhaja-l-ihsâni fi-l-`am<strong>al</strong>i'Unâdî Karrâya hum çâhibi-l-bughay<strong>la</strong>ti lâTatruknî munjadi<strong>la</strong>n fî-l-hammi wa-l-kas<strong>al</strong>iYâ Rabbanâ jud `a<strong>la</strong>ynâ min mawâhibihimWa-sluk binâ manhaja-l-ihsâni fi-l-`am<strong>al</strong>iYâ 'Abâ-l-Hassan-l-Karrây shaykhî ajibÇarîkha tilmîdhik-l-mawçûfi bi-th-thak<strong>al</strong>iYâ Rabbanâ jud `a<strong>la</strong>ynâ min mawâhibihimWa-sluk binâ manhaja-l-ihsâni fi-l-`am<strong>al</strong>i


197Bi-l-Lâhi riqqû li hâlî wa-`tifû karamanLi 'anna `atfakumu yubrî mina-l-`i<strong>la</strong>liYâ Rabbanâ jud `a<strong>la</strong>ynâ min mawâhibihimWa-sluk binâ manhaja-l-ihsâni fi-l-`am<strong>al</strong>iTraduction :Bonheur aux serviteurs <strong>de</strong> Dieu,Ils ont atteints le but auquel j'aspire encore,Que Dieu gui<strong>de</strong> nos pas vers leurs chemins,Je cite le shaykh Karrây pieux et vertueux,Je l'appelle pour qu'il me soutienne,Toi Abû-l-Hassan Karrây, répond à ton disciple,Qui ne cesse <strong>de</strong> crier,Il est à remarquer que <strong>la</strong> chor<strong>al</strong>e a chanté dans ce barw<strong>al</strong> les :troisième, vingt-troisième, vingt-quatrième, trente-troisième et trentehuitièmevers du poème, en répétant après chacun <strong>de</strong> ces vers, le <strong>de</strong>uxièmevers (yâ Rabbanâ jud `a<strong>la</strong>ynâ min mawâhibihim).Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :


198Un quatrième barw<strong>al</strong> "Yâ Rabbî bi fadhlik" :Dans le manuscrit, c'est le sixième et <strong>de</strong>rnier dawr du muwashshah quicompose le quatrième et <strong>de</strong>rnier barw<strong>al</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba dhîl.Translittération du texte arabe :Yâ Rabbî bi fadhlikThaghra li nabiyyekShawqî li rasûlikBi-l-ward ikhtitâmîfa-`tînî murâdîwa-l-`ashra siâdîsakin fî fu'âdîwa zahr m`a-l-<strong>la</strong>'âlîTraduction :Mon Dieu, aie pitié <strong>de</strong> moi, j'ai besoin <strong>de</strong> ta grâce,Gui<strong>de</strong> mes pas vers le chemin <strong>de</strong> tes hommes saints,Dieu, je te prie exauce mon cœur,Je veux rencontrer ton Prophète bien aiméIl est le roi <strong>de</strong> tes prophètes.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :2.1.21 Étu<strong>de</strong> an<strong>al</strong>ytique


199Dans l'absence d'instruments <strong>de</strong> musique, le chant <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba dhîl,comme celui <strong>de</strong>s autres nûbât, se base sur l'<strong>al</strong>ternance <strong>de</strong>s voix <strong>de</strong>s solistes(qawwâ<strong>la</strong> : diseurs), et celles <strong>de</strong> <strong>la</strong> chor<strong>al</strong>e (raddâda : répétiteurs, solistes).<strong>Le</strong> chant <strong>de</strong>s différents mouvements <strong>de</strong> cette partie <strong>de</strong> nûba qui dure treizeminutes et trente quatre secon<strong>de</strong>s, s'est fait sans interruption.La structure du tba` s'est composée dans cette partie <strong>de</strong> nûba <strong>de</strong>"ajnâs" principaux et d'autres secondaires qui sont les suivants :Parcours 1 :- Jins dhîl en do2 (râst), il suit <strong>de</strong>ux parcours mélodiques différents :Comme dans les mesures (7-8-9) du barw<strong>al</strong> "habba-n-nasîm" :Parcours 2 :Comme dans <strong>la</strong> première phrase du barw<strong>al</strong> "yâ hâdî-l-matayâ" :


200Notons que ce jins est le jins princip<strong>al</strong> du mo<strong>de</strong> dhîl. Il est explorégénér<strong>al</strong>ement au début du chant pour inst<strong>al</strong>ler le tba` dhîl, et aussi à <strong>la</strong> fin <strong>de</strong>chaque phase <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba pour confirmer le tba`. C'est <strong>la</strong> métho<strong>de</strong> <strong>la</strong> plushabituelle suivie traditionnellement dans l'exploration mod<strong>al</strong>e dans <strong>la</strong>musique arabe.- Jins mâya en do2 (râst), il suit le parcours mélodique suivant :Comme dans les quatre premières mesures du dukhûl barâwil "yâ man sabâ`aqlî" :- Jins `irâq en ré (dûkâh), qui suit le parcours mélodique suivant :Comme dans <strong>la</strong> troisième mesure du mçaddar "nibda' b-ism-l-Karîm" :


201- Jins sîka en mi <strong>de</strong>mi bémol (sîkâh), qui suit le parcours mélodiquesuivant :Comme dans les mesures (6-7-8) du barw<strong>al</strong> "yâ hâdî-l-matayâ" :- Jins mazmûm en fa (jahârkâh), suit le parcours mélodique suivant :Comme dans les mesures (16-17-18) du dukhûl barâwil "yâ man sabâ`aqlî" :D'après cette partie <strong>de</strong> nûba, l'ambitus <strong>de</strong> l'échelle mod<strong>al</strong>e du tba` dhîls'ét<strong>al</strong>e du râst [do2] au kirdân [do3], et comporte les ajnâs suivants :


202<strong>Le</strong>s <strong>de</strong>grés fondamentaux ou notes préférentielles que nous pouvonsdistinguer dans cette partie <strong>de</strong> nûba sont essentiellement : le do2 (râst) quiest <strong>la</strong> note fondament<strong>al</strong>e qui sert <strong>de</strong> base, d'irtikâz (litt. : fon<strong>de</strong>ment) et <strong>de</strong>station fin<strong>al</strong>e pour le tba` dhîl, et le ré (dûkâh) qui joue un rôle importantdans le parcours mélodique du tba`.<strong>Le</strong>s formules mélodico rythmiques caractéristiques du tba' dhîl quenous pouvons distinguer dans cette partie <strong>de</strong> nûba sont les suivantes :* 2 ème mesure du btâyhî "munâ'î khamra" :* les mesures 7-8-9 du barw<strong>al</strong> "habba-n-nasîm"* 4 ème et 5 ème mesures du barw<strong>al</strong> "yâ hâdî-l-matâya"Il est à remarquer que ces formules servent le plus souvent <strong>de</strong> qaf<strong>la</strong>(ca<strong>de</strong>nce fin<strong>al</strong>e) pour les phrases ou morceaux du tba` dhîl. Ce sont <strong>de</strong>sformules préétablies et transmises <strong>de</strong> manières traditionnelles jusqu'à nosjours et qui donnent au tba` dhîl sa spécificité.2.1.3 - troisième suite du tba` dhîl.


203Elle se compose <strong>de</strong> cinq "fragments" <strong>de</strong> muwashshahât qui formentles mouvements suivants :1 er mouvement : il comporte trois btâyhiyya :Un premier btâyhî "`Ashiqtu <strong>la</strong>ylâ `adhîma" :Il est dans le manuscrit, le muwashshah qui compose le premiermçaddar <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba `irâq, <strong>la</strong> chor<strong>al</strong>e n'a chanté que le premier dawr <strong>de</strong> cemuwashshah qui comprend sept adwâr :Translittération du texte arabe :`Ashiqtu <strong>la</strong>ylâ `adhîmaHattâ ba<strong>la</strong>ghtu muqîmâN<strong>al</strong>qâ m<strong>al</strong>îha s<strong>al</strong>îmawa 'anâ çaghîr <strong>la</strong>m nukhâtib`<strong>al</strong>â hubbihâ wa-l-q<strong>al</strong>bu târibmin kulli `aybin mujânib`Arûsa fî hulîhâLaylâ sabânî mâ `<strong>al</strong>yhârafî`a `an mithâlîmufarqa`a bi-l-jamâliTraduction :J'ai vénéré ma <strong>Le</strong>i<strong>la</strong> bien aimée (162),Depuis mon jeune age,Jusqu'au jour où je me suis approché d'elle,<strong>Le</strong> cœur joyeux, je découvre une beauté,Si splendi<strong>de</strong>, si parfaite,


204Une princesse, fière et hautaine,Scintil<strong>la</strong>nte <strong>de</strong> diamants,D'une beauté explosive.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :Un <strong>de</strong>uxième btâyhî "Ta'amm<strong>al</strong> yâ-bna 'âdam" :Nous avons trouvé les paroles <strong>de</strong> ce btâyhî dans le troisième dawr dumuwashshah qui compose le premier barw<strong>al</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba çîka :Translittération du texte arabe :Ta'amm<strong>al</strong> yâ-bna 'âdamÇawwar <strong>la</strong>ka-l-qawâyemfî jismik kayfa kânwa-s-sam`a wa-l-`aynân(162) <strong>Le</strong>i<strong>la</strong> : prénom d'une héroïne d'une gran<strong>de</strong> histoire d'amour très connue, amante du poèteKaïss. Dans ce muwashshah, <strong>la</strong> shaykh KARRÂY parle <strong>de</strong> <strong>la</strong> maison <strong>de</strong> Dieu (<strong>la</strong> ka`ba), qu'il.aappelé <strong>Le</strong>i<strong>la</strong>.


205Fiq wa-ntabih yâ nâyemWa ta'amm<strong>al</strong> fi-l-`awâlemFî `ilmi-r-Rabbi-d-dâyemUtruk fi`<strong>la</strong>-l-ma'âthemLâ tabqa mithlî hâyemmin ghaf<strong>la</strong>ti-z-zamânwa-ndhur yâ dhâ-l-insânmin 'a`dhami-l-burhânwa-`rudh `ani-sh-shaytânhâlî `a<strong>la</strong>ya bânIrja` li fawzi-l-Lâhli-l-khidma kun sharhânWa lâ takun bi sâhi`an tâ`ati-r-RahmânTraduction :Fils d'Adam, regar<strong>de</strong> bien ton corps,Tes mains et tes pieds si bien <strong>de</strong>ssinés,L'ouie et <strong>la</strong> vue qui te font p<strong>la</strong>isir,Réveilles toi, le temps ne fais que te distraire,Contemple cet univers, preuve <strong>de</strong> l'existence <strong>de</strong> Dieu.Éloigne toi <strong>de</strong> Satan, interdis toi tous les pêchés,Cesse d'être égarée,Repentis toi, Dieu te pardonnera,Retourne au droit chemin,Point <strong>de</strong> distractions,Résigne toi au miséricordieux.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :


206Un troisième btâyhî "Yâ shykha sîdî" :<strong>Le</strong>s paroles <strong>de</strong> ce btâyhî sont extraites du tâ<strong>la</strong>` et du sixième dawr dumuwashshah qui compose le <strong>de</strong>uxième mçaddar <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba raçd adh-dhîl :Translittération du texte arabe :Yâ shaykha sîdî Abû-l-Hassan asqînâMin khamratik yâ shaykhanâ irwînaYâ shaykha sîdî Abû-l-Hassan yâ sîdîIdhâ nadhtak yâ shaykhî khudh b-'îdîNabghîka fî-sh-shidda takûn `aqîdîWa-hdhar lî yâ sultân wa kun mu`înâYâ shaykha sîdî Abû-l-Hassan asqînâMin khamratik yâ shaykhanâ irwînaTraduction :Shaykh Abû-l-Hassan donne nous boire,De ton vin, et anche nous notre soif,Shaykh, tu es mon patron, soutiens moi,Prends moi par <strong>la</strong> main,Donne moi ton vin, et anche ma soif,Tu es mon sultan, j'ai besoin <strong>de</strong> toi,Dans les moments difficiles.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :


2072 ème mouvement : il comporte <strong>de</strong>ux dukhûl barâwil :Un premier dukhûl barâwil "Idhâ dhakarta-n-naqâ" :<strong>Le</strong>s paroles <strong>de</strong> ce dukhûl barâwil ne figurent pas dans <strong>la</strong> nûba `irâq.Nous les avons trouvé dans le muwashshah qui compose le troisième barw<strong>al</strong><strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba raml, et aussi dans le muwashshah qui compose le khafif <strong>de</strong> <strong>la</strong>nûba çîka.Translittération du texte arabe :Idhâ dhakarta-n-naqâ wa hâjirWa-l-jidh`a wa-l-bâna wa-l-`aqîqWa-sh-sha`ba wa-n-nabta wa-l-maghâyerWa yunbu`u-n-nakhli li-t-tarîqHâmat dumû`î mina-l-mawâtirFa kayfa `affara-l-fatîqFa yâ 'uhay<strong>la</strong>-l-himâ wa zamzamWa-l-hujra wa-l-hijra wa-l-maqâm


208Ta`tifû `an hâdha-l-mutayyamHayyun ka mayytin mina-l-gharâmTraduction :Chaque fois que je contemple cet univers,Des <strong>la</strong>rmes jaillissent <strong>de</strong> mes yeux,Ces lieux saints me ren<strong>de</strong>nt,Amoureux, vivant-mort d'amour.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :


209Un <strong>de</strong>uxième dukhûl barâwil " Fa yâ hamâmâta-l-liwâ' " :<strong>Le</strong>s paroles <strong>de</strong> ce barw<strong>al</strong> sont extraites du premier dawr dumuwashshah "qad bâna shawqî yâ `adhûl" qui compose le quatrièmemçaddar <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba `irâq.Translittération du texte arabe :Fa yâ hamâmâta-l-liwâ'Li'anna q<strong>al</strong>bî qad thawâMudhnâ wa adhramahu-n-nawâAl-hubbu-l-jânî aqûlMâ yubrî dâya-illâ-l-wuçûlh<strong>al</strong> `atfatubihi <strong>la</strong>w`atuwa jamratuhâdha-n-nidhâmli wasati-l-maqâmTraduction :Pigeons qui volez dans les cieux,Ayez pitié <strong>de</strong> moi,J'ai hâte d'atteindre comme vous les lieux saints,Mon cœur est souffrant,Et ne guérira qu'en arrivant en terre sainte,Et que mon poème exprimera mon amour.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :


2102.1.31 Étu<strong>de</strong> an<strong>al</strong>ytique<strong>Le</strong> chant <strong>de</strong>s différents mouvements <strong>de</strong> cette partie <strong>de</strong> nûba a duréquatorze minutes et vingt quatre secon<strong>de</strong>s.La structure du tba` s'est composée dans cette partie <strong>de</strong> nûba <strong>de</strong>s"ajnâs" suivants :- Jins dhîl en sol1 (yâkâh), qui suit le parcours mélodique suivant :


211Comme dans les cinquième et sixième mesures du btâyhî "`ashiqtu<strong>la</strong>i<strong>la</strong> `adhîma ":- Jins dhîl en do2 (râst), il suit comme dans les <strong>de</strong>ux premières suites,<strong>de</strong>ux parcours mélodiques :Parcours 1 :Comme dans les mesures (9-10-11) du btâyhî "`ashiqtu <strong>la</strong>i<strong>la</strong> `adhîma ":Parcours 2 :Comme dans les 5ème et sixième mesures du btâyhî "ta'amm<strong>al</strong> yâ-bna'âdam" :- Jins mâya en do2 (râst), qui suit le parcours mélodique suivant :


212comme dans le dukhûl barâwil "idhâ dhakarta-n-naqâ wa hâjir" :Ce jins a même servi <strong>de</strong> qaf<strong>la</strong> (ca<strong>de</strong>nce fin<strong>al</strong>e) pour le barw<strong>al</strong> "ta'amm<strong>al</strong> yâbna'âdam":Il est à remarquer que cette ca<strong>de</strong>nce fin<strong>al</strong>e en mo<strong>de</strong> mâya n'est qu'unemodu<strong>la</strong>tion mod<strong>al</strong>e qui est très courante surtout dans les barâwil du<strong>répertoire</strong> <strong>music<strong>al</strong></strong> traditionnel (le mâlûf) comme le confirme ZOUARILassaâd dans son ouvrage "at-tubû`at-tûnisiyya" (les mo<strong>de</strong>s tunisiens) (163).suivant :- jins sîka en mi <strong>de</strong>mi bémol (sîkâh), qui suit le parcours mélodiqueC²omme dans les <strong>de</strong>uxième et troisième mesures du btâyhî "`ashiqtu <strong>la</strong>i<strong>la</strong>`adhîma ":(163) ZOUARI (Lassaâd), "at-tubû` at-tûnisiyya mina-r-riwâya ash-shafawiyya ilâ an-nadhariyyaat-tatbîqiyya" (les mo<strong>de</strong>s tunisiens <strong>de</strong> <strong>la</strong> tradition or<strong>al</strong>e à <strong>la</strong> théorie pratique), Sfax, premier trimestre2006, Institut Supérieur <strong>de</strong> Musique <strong>de</strong> Sfax, Imprimerie <strong>la</strong> Reliure Artistique, tome1, pp. 222,223.


213suivant :- jins mazmûm en fa (jahârkâh), qui suit le parcours mélodiqueComme dans <strong>la</strong> première phrase du btâyhî "ta'amm<strong>al</strong> ya-bna 'âdam":Ou encore dans <strong>la</strong> première phrase du dukhûl barâwil "idhâ dhakarta-n-naqâwa hâjir"- jins mhayar sîka en sol (nawâ), qui suit le parcours mélodiquesuivant :Comme dans les mesures (10-11-12) du dukhûl barâwil "idhâ dhakarta-nnaqâwa hâjir" :


214D'après cette partie <strong>de</strong> nûba, l'ambitus <strong>de</strong> l'échelle mod<strong>al</strong>e du tba` dhîls'ét<strong>al</strong>e du yâkâh [sol1] au kirdân [do3], et comporte les ajnâs suivants :<strong>Le</strong>s <strong>de</strong>grés fondamentaux ou notes préférentielles que nous pouvonsdistinguer dans cette partie <strong>de</strong> nûba sont essentiellement : le do2 (râst) quiest <strong>la</strong> note fondament<strong>al</strong>e qui sert <strong>de</strong> base, d'irtikâz (litt. : fon<strong>de</strong>ment) et <strong>de</strong>station fin<strong>al</strong>e pour le tba` dhîl, le ré (dûkâh) qui joue un rôle important dansle parcours mélodique du tba`, et le sol (nawâ) qui est une station importanteet essentielle pour <strong>la</strong> confirmation du tba`.<strong>Le</strong>s formules mélodico-rythmiques caractéristiques du tba' dhîl quenous pouvons spécifier dans cette partie <strong>de</strong> nûba sont les <strong>de</strong>ux suivantes:Formule 1Formule 2


215Il est bien c<strong>la</strong>ir que dans cette troisième partie <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba, les formulescaractéristiques du tba` dhîl ne sont pas aussi présentes que dans les <strong>de</strong>uxpremières parties. Ceci est à notre avis, à cause <strong>de</strong>s modu<strong>la</strong>tions mod<strong>al</strong>es quiont occupé une bonne partie <strong>de</strong>s mélodies <strong>de</strong>s différents mouvements. Noustrouvons même une qaf<strong>la</strong> (ca<strong>de</strong>nce fin<strong>al</strong>e) dans un <strong>de</strong> ces mouvements dansun tba` autre que le tba` dhîl.2.2/ - <strong>Le</strong> tba` `irâq :C'est le <strong>de</strong>uxième tba` <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux <strong>répertoire</strong>s. Sa tonique est Ré (dûkâh).Il est facilement reconnaissable par sa qaf<strong>la</strong> (ca<strong>de</strong>nce fin<strong>al</strong>e) spécifique quicaractérise le tba`.Dans le manuscrit, <strong>la</strong> nûba `iraq commence à <strong>la</strong> moitié du recto <strong>de</strong> <strong>la</strong>feuille numéro dix, et se termine à <strong>la</strong> moitié du recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille numérovingt et un. Elle se compose <strong>de</strong> onze muwashshahât qui forment lesmouvements suivants :1 er mouvement : il comprend Quatre mçaddar (ou btâyhî) :- `Ashiqtu <strong>la</strong>ylâ `adhîma,- Fiq wa-ntabih min sakratik yâ ghâfil,- Miskîn man bi-l-hawâ yudâdî


216- Qad bâna shawqî yâ `adhûl.Rappelons ici que le btâyhî est appelé aussi mçaddar (qui signifie occuper <strong>la</strong>première p<strong>la</strong>ce), puisqu'il occupe justement <strong>la</strong> première p<strong>la</strong>ce dans <strong>la</strong> nûba.2 ème mouvement : il comprend cinq barâwil :- Nibda' b-ism-l-Ilâh- 'Anta m<strong>al</strong>ja'î- Isqînî yâ sâqî- In rumta tashhad- Nibda' b-ism-l-Wâhid3 ème mouvement : il comprend un seul draj :- Habba-n-nasîm wa-l-barqu lâh4 ème mouvement : il comprend un seul khafif :- Yâ habîb <strong>al</strong>-LâhToutefois, nous trouvons dans le document sonore une nûbadifférente, elle se compose <strong>de</strong>s mouvements suivants :1 er mouvement : il comprend un seul dukhûl barâwil :'Anta ma<strong>la</strong>ja'î wa naçrit kulli `abd, qui est dans le manuscrit, lemuwashshah qui compose le <strong>de</strong>uxième barw<strong>al</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba `irâq, et aussi le<strong>de</strong>uxième barw<strong>al</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba 'içbahân. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> ce dukhûlbarâwil est le suivant :


217Translittération du texte arabe :'Anta m<strong>al</strong>ja'î wa naçrit kulli `abdAl-madad yâ akrama-l-khaqi-l-madadAl-madad yâ khyra man watia-th-tharâQad qaçadtu himaka yâ qutba-l-warâLi'annanî `abdun dhaè îfu-l-maqduarawa 'anta yâ Allâhyâ rasû<strong>la</strong>-l-Lâhbi-l-madad ghithnîlâ tukhayibnîqad kabur sinnîLaysa li-r-râjî khilâfak yuqçadAl-madad yâ akrama-l-khaqi-l-madadyâ çafiyya-l-Lâhyâ rasû<strong>la</strong>-l-LâhTraduction :Toi, Al<strong>la</strong>h, tu es mon recours,Tu es le libérateur <strong>de</strong> tout esc<strong>la</strong>ve,Toi, Prophète d'Al<strong>la</strong>h, défends moi,N'es tu pas le plus généreux <strong>de</strong>s créatures,<strong>Le</strong> meilleur <strong>de</strong> tout ceux qui ont mis pied sur terre,J'aspire à ton secours et ton soutien,Je ne m'adresse qu'à toi, ne me dé<strong>la</strong>isse pas,Je ne suis qu'un esc<strong>la</strong>ve, vieux et affaibli,À qui puis-je m'adresser sinon à toi, élu d'Al<strong>la</strong>h.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :


2182 ème mouvement : il comprend un seul btâyhî :- Nibda' b-ism-l-Ilâl, qui est dans le manuscrit le premier barw<strong>al</strong> <strong>de</strong><strong>la</strong> nûba `irâq. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> ce btâyhî est le suivant :Translittération du texte arabe :Nibda' b-ism-l-IlâhThumma nahmid wi-nç<strong>al</strong>lî`<strong>al</strong> man rabbî `<strong>al</strong>lâhRabbî hab lî-l-mawâhib'anta `âlim mâ kânWa-ftah lî bi-l-`ajâyebmin bahrik yâ rahmânNatlub nisma-l-habâyebnimsâ bihâ nashwânNirkab husna-l-marâkibnakhudh bahra-l-`irfân


219Sharba min khamri tâyebtyhdâ lî fî-l-kîsânNishrab nabuh bi-l-ghâyebmin kharatik sakrânMawlânâ huwa-l-ghâlibkul<strong>la</strong> yawmin fî shânNutlub yej`<strong>al</strong>lî nâyebfî ba<strong>la</strong>dî wa-l-'awtânRabbî dull-dh-dhahâyebwa-mlânî bi-l-'îmânWa-çrif `annî-n-nakâyedwa-l-ghaf<strong>la</strong> wa-l-hirmânMa yabghâ yebrâ dâhYerja`li rabbû yetlibminhu jazîl ni`mâhThumma nahmid win-ç<strong>al</strong>lî`<strong>al</strong> man rabbî `<strong>al</strong>lâhTraduction :Prières et louanges à celui que Dieu a distingué,Toi dieu, qui me connais si bien,Donne moi <strong>de</strong> <strong>la</strong> force et <strong>de</strong> <strong>la</strong> sagesse,Rien ne t'est impossible, et ta mer est inépuisable,J'attends cette brise <strong>de</strong> vent céleste,Qui me grisera le cœur et poussera ma barqueDans <strong>la</strong> mer du savoir.J'aimerai boire <strong>de</strong> ce vin délicieux,Servi dans <strong>de</strong> merveilleux verres,Je boirai jusqu'à l'ivresse.<strong>Le</strong> Seigneur fait ce qu'il veut,Il est le plus puissant, je lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>De soutenir ma ville et mon pays,De me combler <strong>de</strong> piété, et <strong>de</strong> m'épargnerDe tout m<strong>al</strong>heur et <strong>de</strong> toute frustration.Quiconque veut guérir <strong>de</strong> ses maux,Se doit <strong>de</strong> supplier le bon dieu,


220Ensuite beaucoup <strong>de</strong> louanges seront adresséesÀ celui que Dieu a distingué.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :3 ème mouvement : il comprend trois barâwil :1- Un premier barw<strong>al</strong>: "In kunta `âshiqan lâ tabrah": lesparoles <strong>de</strong> ce barw<strong>al</strong> sont extraites du muwashshah qui compose le troisièmemçaddar <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba hsîn, il comporte trois adwâr, et c'est seulement lepremier dawr qui est chanté par <strong>la</strong> chor<strong>al</strong>e. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> ce barw<strong>al</strong>est le suivant :Translittération du texte arabe :In kunta `âshiqan lâ tabrahWa-lzam li-ç-çabri wa jud wa-smahMuriqqan li-t-tayri idhâ nawwahWa tâlian sûrata Qad 'af<strong>la</strong>h`an bâbi mahbûbikbi wâbil-dmû`ikdhâkiran lisujûdikli yaçfâ mashrûbik


221Yâ rabbî f-arwî `abdak wa-ftah`a<strong>la</strong>yhi min jûdikWa-rwînî min kîsâni-l-khamrâtWa-mnahnî yâ rabbî bi-l-khayrâtmamzûja bi-l-anwârwa-t-taqwâ wa-l-'asrârTraduction :Si tu es amoureux, tu ne t'éloigneras pointDe <strong>la</strong> porte <strong>de</strong> ta bien aimée,Arme toi <strong>de</strong> patience, et <strong>la</strong>isse couler tes <strong>la</strong>rmes,Laisse toi pleurer en sanglots, comme un oiseau,Parle <strong>de</strong> tes souffrances.Et pour avoir <strong>la</strong> paix dans l'âme,Et que ton sirop <strong>de</strong>vienne lipi<strong>de</strong>Récite quelques Sourates et implore dieu,D'arroser son esc<strong>la</strong>ve, et <strong>de</strong> le faire bénéficierDe sa générosité infinie.Dieu fais-moi boire <strong>de</strong> ces verres <strong>de</strong> vinMêlés <strong>de</strong> lumière, donne moi plus <strong>de</strong> piétéEt plus <strong>de</strong> bonheur.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :


2222- Un <strong>de</strong>uxième barw<strong>al</strong>: "Yâ Ilâhî bi-l-mu`adhdham", qui estdans le manuscrit, le troisième et <strong>de</strong>rnier dawr du muwashshah "'as'<strong>al</strong>u rabbîta`âlâ"qui compose le premier btâyhî <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba dhîl. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong> ce dawr estle suivant :


223Translittération du texte arabe :Yâ ilâhî bi-l-mu`adhdhamWa-l-khadhar wa-sh-shaykhi muslimWa-l-`arûsî wa-bni-l-qâsimWa man saqâ min bi'ri zamzamFa-shfinî yâ Rabbi wa-rhamash-shafî`fî-l-mudhnibînawa-lbukhârî wa tûri sînawa-sh-shaykh mâlik bi-l-madînawa-l-'arba`a wa-l-'arba`înaghurbatî fî-l-`â<strong>la</strong>mînaWatlubû minhu-l-kamâ<strong>la</strong>Wa-hmidhu `an kulli hâ<strong>la</strong>`âliman bi kulli 'amrîwa-tlibhu fî kashfi dharrîTraduction :Dieu je t'implore par ton livre saint,Par tes illustres shaykhs Moslem, Aroussi, Boukhâri,Ibn Kacem, et M<strong>al</strong>ek <strong>de</strong> Médine,D'avoir piété <strong>de</strong> moi et <strong>de</strong> me guérir <strong>de</strong> mes maux.Toi qui me connais si bienProtège moi <strong>de</strong>s médisances et <strong>de</strong>s m<strong>al</strong>faisances <strong>de</strong>s gensJe te remercie quoi qu'il advienne.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :


2243- Un troisième barw<strong>al</strong>:"Asqînî yâ sâqî wa-rwînî bi khamra",qui est dans le manuscrit, le troisième barw<strong>al</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba `irâq, et aussi lequatrième barw<strong>al</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba raml. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> ce barw<strong>al</strong> est lesuivant :Translittération du texte arabe :Asqînî yâ sâqîQad zâda-shtiâqîWa `a<strong>la</strong>t ashwâqîFî-l-q<strong>al</strong>bi-htirâqîDam`î min 'âmâqîMin 'a<strong>la</strong>mi-l-firâqiwa-rwînî bi khamr<strong>al</strong>i rijâli-l-hadhra`an khumayra zahrafa-thifnî bi nadhrayançabib bi kathrafa-sqînî li nabrâ


225Fa-mnun yâ habîbîWa-shfi yâ tabîbîbi-sh-sharâbi-çâfî'anta huwwa-sh-shâfîTraduction :Serveur <strong>de</strong> sirop, donne moi boire,Arrose moi <strong>de</strong> ce vin,J'ai hâte <strong>de</strong> revoir les hommes <strong>de</strong> <strong>la</strong> HadhraL'ivresse en fleurs, me manque,Et mon cœur brûle, regar<strong>de</strong> moi,Ne vois-tu pas mes <strong>la</strong>rmesQui coulent en abondanceFais-moi boire et je guérirai mes souffrances.Bien aimée, offre moi ton sirop limpi<strong>de</strong>,Tu es mon mé<strong>de</strong>cin, tu es mon guérisseur.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :2.2.1 - Étu<strong>de</strong> an<strong>al</strong>ytique<strong>Le</strong> chant <strong>de</strong>s quatre mouvements <strong>de</strong> cette nûba a duré onze minutes etquarante neuf secon<strong>de</strong>s. Il s'est basé comme dans les autres nûbât du


226<strong>répertoire</strong> <strong>de</strong>s majâlis <strong>de</strong> sîdî Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY, sur l'<strong>al</strong>ternance <strong>de</strong>svoix <strong>de</strong>s qawwâ<strong>la</strong> et celles <strong>de</strong>s raddâda.La structure du tba` s'est composée dans cette nûba <strong>de</strong>s genres (ajnâs)suivants :- jins `irâq en ré (dûkâh), il suit <strong>de</strong>ux parcours mélodiques :Parcours 1 :Comme dans <strong>la</strong> <strong>de</strong>uxième phrase du btâyhî "Anta m<strong>al</strong>ja'î wa naçrit kulli`abd", qui a aussi servi <strong>de</strong> qaf<strong>la</strong> pour ce btâyhî":Parcours 2 :Comme dans <strong>la</strong> phrase fin<strong>al</strong>e du barw<strong>al</strong> "Asqînî yâ sâqîwa-rwînî bikhamra":- jins dhîl en sol1 (yâkâh), qui suit le parcours mélodique suivant :


227Nous trouvons ce jins dans <strong>la</strong> première phrase du btâyhî " 'Anta m<strong>al</strong>ja'î wanaçrit kulli `abd":Ou encore dans les mesures (5-6-7-8-9-10) du barw<strong>al</strong> "In kunta `âshiqan lâtabrah":Il est à remarquer que le chant <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba `irâq a curieusement débutépar l'inst<strong>al</strong><strong>la</strong>tion du jins dhîl en sol (yâkâh); ce qui est aussi le cas <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba`irâq du <strong>répertoire</strong> du mâlûf- jins dhîl en do2 (râst), il suit le parcours mélodique suivant :Comme dans les mesures (19-20-21-22) du barw<strong>al</strong> "In kunta `âshiqan lâtabrah" :


228- jins mhayar`irâq en sol2 (nawâ), qui suit le parcours mélodiquesuivant :Comme dans les mesures (19-20-21-22) du barw<strong>al</strong> "yâ Ilâhî bi-lmu`adhdham":D'après cette nûba, l'ambitus <strong>de</strong> l'échelle mod<strong>al</strong>e du tba` `irâq s'étenddu yâkâh [sol1] au kirdân [do3], et comporte les ajnâs suivants :<strong>Le</strong>s <strong>de</strong>grés fondamentaux ou notes préférentielles que nous pouvonsdistinguer dans cette nûba sont surtout : le ré (dûkâh) qui est <strong>la</strong> notefondament<strong>al</strong>e qui sert <strong>de</strong> base et <strong>de</strong> station fin<strong>al</strong>e pour le tba` `irâq; le sol(yâkâh) qui sert <strong>de</strong> station fin<strong>al</strong>e pour un jins princip<strong>al</strong> dans le tba` (le jinsdhîl), et qui est très présent dans l'acheminement mélodique <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba; et ledo2 (râst) qui est un <strong>de</strong>gré essentiel autour duquel s'articule le parcours


229mélodique. Il a même servi <strong>de</strong> point <strong>de</strong> départ (mabda') dans le cheminementmélodique du chant <strong>de</strong> <strong>la</strong> première phase <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba.<strong>Le</strong>s qaflât caractéristiques du tba` `irâq que nous trouvons dans cettenûba sont les suivantes :Qaf<strong>la</strong> (1)


230Qaf<strong>la</strong> (2)Qaf<strong>la</strong> (3)2.3 - <strong>Le</strong> tba` çîka :La nûba du tba` çîka (ou çayka selon <strong>la</strong> prononciation <strong>de</strong>s sfaxiens),occupe <strong>la</strong> troisième p<strong>la</strong>ce <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux <strong>répertoire</strong>s. Sa tonique est Mi <strong>de</strong>mibémol.Dans le manuscrit, <strong>la</strong> nûba çîka commence à <strong>la</strong> moitié du recto <strong>de</strong> <strong>la</strong>feuille numéro vingt et un, et se termine à <strong>la</strong> moitié du recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuillenuméro trente-<strong>de</strong>ux. Elle se compose <strong>de</strong> douze muwashshahât qui formentles mouvements suivants :1 er mouvement : il comprend quatre mçaddar :- Bism-l-muhaymen- 'idhâ dhâqa çadrî- Yâ Rabbî bi fadhlik- `abdun ba`îdu-d-dâri2 ème mouvement : le btâyhî "As'<strong>al</strong>û Rabbî ta`âlâ" (Puis-je solliciter Dieu).3 ème mouvement : il comprend cinq barâwil :- Sammayt bism-l-Lâh- Habba-n-nasîm


231- Yâ Rabb sa'<strong>al</strong>tik bi tâha- Nibda' bism-l-Lâh- Natlub mâlikî Rabbî4 ème mouvement : le draj "Yâ sâmi`an qaw<strong>la</strong>-s-saqîm"5 ème mouvement : il comprend <strong>de</strong>ux khfâyef :- 'Idhâ dhkarta-n-naqâ wa hâijr- Habba-n-nasîm wa-l-barqu lâhCependant, nous avons trouvé à <strong>la</strong> phonothèque <strong>de</strong> <strong>la</strong> maison <strong>de</strong> radio<strong>de</strong> Sfax, dans <strong>de</strong>ux bobines différentes, <strong>de</strong>ux enregistrements <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux suites<strong>de</strong> muwashshahât dans le tba` çîka qui pourraient former une seule nûba.2.3.1 - Première suite du tba` çîkaCette partie <strong>de</strong> nûba se compose <strong>de</strong> quatre muwashshahât formant lesmouvements suivants :1 er mouvement : il comprend <strong>de</strong>ux btâyhî :- Un premier btâyhî : "Bism-l-muhaymen", qui est dans lemanuscrit, le premier mçaddar <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba çîka. C'est un muwashshah qui secompose <strong>de</strong> six adwâr (plur. <strong>de</strong> dawr), et c'est seulement le premier dawr etle mat<strong>la</strong>` qui sont chantés par <strong>la</strong> chor<strong>al</strong>e. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> ce dawr estle suivant :Translittération du texte arabe :Bism-l-Muhaymen abtadî hâdhâ-n-nidhâmLa`<strong>al</strong><strong>la</strong> yarhamnâ


232Bi haqqi tâha-l-muçtafâ badru-t-tamâmYâ Mâlikî ghithnâ`Atshit 'âlâfun kibârun wa çighârYâ Khâliqî fa-rhamBi wâbilin yuhyî-l-arâdhî wa-th-thimârWa-l-wahshu thumma-l-qimamWa-l-wardu wa-n-nisru wa <strong>al</strong>wân-n-nawwârFî dhuhûr-l-amkamB-l-multazim wa-z-zâriât wa-l-maqâmlâ tu'âkhidhnâBi haqqi tâha-l-muçtafâ badru-t-tamâmYâ Mâlikî ghithnâTraduction :Je débute mon poème,Au nom du bon Dieu tout puissant,Et je l'implore pour qu'il m'accor<strong>de</strong> son pardon.Par ton Prophète, notre c<strong>la</strong>ir <strong>de</strong> lune, ton élu,Oh mon Dieu, nous te <strong>de</strong>mandons <strong>de</strong> <strong>la</strong> pluie,Créateur <strong>de</strong> cet univers, aie pitié <strong>de</strong> nous,La nation est assoiffée, grands et petits,Atten<strong>de</strong>nt ton secours,Une pluie bénéfique, abreuvera <strong>la</strong> terre,Redonnera vie à tes créatures,Et nos champs se couvriront <strong>de</strong> roses,


233Et <strong>de</strong> fleurs aux couleurs magnifiquesMon Dieu nous te supplions par tes lieux saints,Accor<strong>de</strong>s nous ton pardon,Par ton Prophète, notre c<strong>la</strong>ir <strong>de</strong> lune, ton élu,Ô mon Dieu, arrose nous d'une pluie s<strong>al</strong>utaire,Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :- Un <strong>de</strong>uxième btâyhî : "Nad`ûka Rabbî". <strong>Le</strong>s paroles <strong>de</strong> cebtâyhî ne figurent pas dans le recueil d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY, ils sontprobablement été extraites <strong>de</strong>s ash`âr (poèmes) <strong>de</strong> l'un <strong>de</strong>s murîdîn <strong>de</strong> <strong>la</strong>tarîqa <strong>al</strong>-KARRÂRIYYA. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> ce mouvement est lesuivant :Translittération du texte arabe :Nad`ûka Rabbî f-aqbil `a<strong>la</strong>ynaBi haqqi taha wa-l-murs<strong>al</strong>înaMin fadhli mawlâya dhî-l-j<strong>al</strong>âli


234Nawwar qulûb 'ahli-l-kamâliRijâlun fâzû b-l-wiçâliAl- awliâ' wa-ç-çâlihînaNad`ûka Rabbî f-aqbil `a<strong>la</strong>ynaBi haqqi taha wa-l-murs<strong>al</strong>înaWa kulluhum min nûr-l-HâdîAhmad Muhammad kanzu-l-`ibâdiTahta liwâhu 'umma tunâdîYâ khîratu-l-kh<strong>al</strong>qi ajma`înaNad`ûka Rabbî f-aqbil `a<strong>la</strong>ynaBi haqqi taha wa-l-murs<strong>al</strong>înaÇ<strong>al</strong>lû `<strong>al</strong>â zaynu-ç-çifâtiWa man 'atâ b-l-bayyinâtiWa khaççahu-l-Lâhu b-l-mu`jizâtiMuhammadun tâju-l-murs<strong>al</strong>înaNad`ûka Rabbî f-aqbil `a<strong>la</strong>ynaBi haqqi taha wa-l-murs<strong>al</strong>înaÇ<strong>al</strong>lû `<strong>al</strong>â az-zakyiu-l-ashrafMan 'ismuhu b-l-haqqi yu`rafShafî`unâ fî yawm-l-mawqifÇ<strong>al</strong>lû `<strong>al</strong>yhi yâ hâdhirînaNad`ûka Rabbî f-aqbil `a<strong>la</strong>ynaBi haqqi taha wa-l-murs<strong>al</strong>înaTraduction :Nous nous adressons à toi, notre Dieu,Au nom <strong>de</strong> ton Prophète, et <strong>de</strong> tes messagers,Fais que notre vœu soit exaucé.Tes saints serviteurs sont auprès <strong>de</strong> nous,Ils ont suivi le droit chemin,Celui tracé par ton Prophète Muhammad,Trésor <strong>de</strong> l'univers,


235La nation fait appel à lui, élu <strong>de</strong>s créatures,Seigneur, nous te supplions au nom <strong>de</strong> ton Prophète,Qui a transmis ta parole divine,De nous accor<strong>de</strong>r ton pardon.Mohamed, roi <strong>de</strong> tous les messagers <strong>de</strong> Dieu,Est distingué par <strong>de</strong>s pouvoirs divins,C'est lui qui le jour du jugement <strong>de</strong>rnier,Sera à nos cotés pour nous défendre,Dieu, à toi nous nous adressons, et implorons ta grâce,Au nom <strong>de</strong> ton Prophète, et <strong>de</strong> tes messagers,Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :2 ème mouvement : le khafif "yâ qamara-l-'ufuqi".Nous avons trouvé cemuwashshah dans <strong>la</strong> partie <strong>de</strong>s shghullât sous le titre "shghul çîka", au verso<strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 160. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> ce muwashshah est le suivant :Translittération du texte arabe :Yâ qamara-l-'ufuqiyâ bahrata-sh-shafaqi


236Fî dhulmati-ghasaqiyâ hubbîYâ rasû<strong>la</strong>-l-Lâh wajdî anta ghâyat qaçdî yâ hubbîYâ khayra jam`i-n-nâss yâ ahdhaba-l-an`âsYâ tayyiba-l-anfâsyâ hubbîYâ rasû<strong>la</strong>-l-Lâh wajdî anta ghâyat qaçdî yâ hubbîTraduction :Toi Prophète du bon Dieu,Tu es <strong>la</strong> lune qui brille au milieu <strong>de</strong>s ténèbres,Tu es le meilleur homme jamais crée sur terre,Tu rassembles toutes les vertus,À toi nous nous confions.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :


2373 ème mouvement : le btâyhî "Khmûssî yâ Karrây". Nous avons trouvéles paroles <strong>de</strong> ce mouvement dans <strong>la</strong> partie <strong>de</strong>s shghullât sous le titre <strong>de</strong>"shgul hsîn çabâ" au recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 127 du manuscrit. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong> sesparoles est le suivant :Translittération du texte arabe :Khmûsî yâ KarrâyJaytik yâ mawlâ-r-râyShy<strong>la</strong> mawlâ-l-burhânqâçid lîk b-niyyatubrî suqman biyyawi-l-barka wi-ç-çâyâ


238Yâ shaykh yâ sultânYakfî min dhâ-l-hijrânLi 'annî fânî `âshiqKhmûsî yâ Karrâyb-l-Lâh kûn m`âyawaçlik yubrî dâyahubbik zâd `a<strong>la</strong>yaqâçid lîk b-niyyaTraduction :Toi mon shaykh Karrây, ô KhmûssiJe me livre à toi, et te <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> me guérir,Soutiens moi, mon shaykh, mon sultan,Je te prie d'être à mes côtés,Seul toi, peux guérir mon m<strong>al</strong>,Ne t'éloignes pas <strong>de</strong> moi,Je suis fou d'amour <strong>de</strong> toi,Toi qui a <strong>la</strong> sagesse, guéris moi.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :


2392.3.11 - Étu<strong>de</strong> an<strong>al</strong>ytique<strong>Le</strong> chant <strong>de</strong>s trois mouvements <strong>de</strong> cette suite a duré quinze minutes ettrente sept secon<strong>de</strong>s. Il s'est basé sur l'<strong>al</strong>ternance <strong>de</strong>s voix <strong>de</strong>s solistes etcelles <strong>de</strong> <strong>la</strong> chor<strong>al</strong>e.La structure du tba` s'est composée dans cette partie <strong>de</strong> nûba <strong>de</strong>s ajnâssuivants :- Jins çîka en mi <strong>de</strong>mi bémol (sîkâh), qui suit le parcours mélodiquesuivant :Comme dans le premier btâyhî "Bism-l-Muhaymen", qui commence par cejins pour inst<strong>al</strong>ler le tba` (les quatre premières mesures) :


240L'exploration <strong>de</strong> ce jins suit le parcours traditionnel et c<strong>la</strong>ssique quientame <strong>la</strong> phrase par <strong>la</strong> tonique du tba` pour y revenir après une simpleprogression <strong>de</strong> notes conjointes qui suivent une ligne sinusoïd<strong>al</strong>e comme lemontre le parcours mélodique suivant :- Jins içba`ayn en sol2 (nawâ), en utilisant les <strong>de</strong>grés <strong>la</strong>2 bémol(huçâr) et si2 bécarre (mâhûr). Il suit le parcours mélodique suivant :Ce jins annonce une franche modu<strong>la</strong>tion vers le mo<strong>de</strong> sîkâ huzâm.Nous trouvons ce jins plusieurs fois au cours <strong>de</strong> ces trois mouvements,comme dans les quatrième et cinquième mesures du btâyhî "nad`ûka Rabbî":La ligne mélodique du mo<strong>de</strong> sîkâ huzâm se manifeste en combinant lejins içba`ayn en sol (nawâ) et le jins çîka en mi <strong>de</strong>mi bémol (sîkâh), commedans <strong>la</strong> <strong>de</strong>uxième mesure du btâyhî "nad`ûka Rabbî".


241- Jins mâya en do2 (râst). Il suit le parcours mélodique suivant :Comme dans les <strong>de</strong>ux premières mesures du btâyhî "Bism-l-Muhaymen" :D'après cette première partie <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba, l'ambitus <strong>de</strong> l'échelle mod<strong>al</strong>edu tba` çîka s'étend du do2 (râst), au ré3 (muhayâr). Il comporte les ajnâssuivants :<strong>Le</strong>s <strong>de</strong>grés fondamentaux ou notes préférentielles que nous pouvonsdistinguer dans cette partie <strong>de</strong> nûba sont surtout : le mi <strong>de</strong>mi bémol (sîkâh)qui est <strong>la</strong> note fondament<strong>al</strong>e qui sert <strong>de</strong> base, d'irtikâz et <strong>de</strong> station fin<strong>al</strong>epour le tba` çîka, le do (râst) qui sert <strong>de</strong> base pour le jins mâya, il est aussiun <strong>de</strong>gré important dans l'une <strong>de</strong>s qaflât du tba` çîka :


242Au cours <strong>de</strong> l'examen et l'an<strong>al</strong>yse <strong>de</strong>s différents mouvements quiconstituent cette partie <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba çîka, nous avons pu relever plusieurssortes <strong>de</strong> ca<strong>de</strong>nces fin<strong>al</strong>es (qaflât), assez distinctes non seulement au niveau<strong>de</strong>s structures rythmiques, mais aussi - et surtout -, au niveau <strong>de</strong>s variationsmélodiques. Ces qaflât peuvent être c<strong>la</strong>ssées en <strong>de</strong>ux catégories et ce, selon<strong>la</strong> nature du jins où se déroulent leurs lignes mélodiques :1/ les qaflât dont <strong>la</strong> ligne mélodique se limite au premier jins du tba`çîka, comme les <strong>de</strong>ux qaflât qu'on trouve dans le btâyhî "Bism-l-Muhaymen" :Qaf<strong>la</strong> (1)Qaf<strong>la</strong> (2)2/ les qaflât dont <strong>la</strong> ligne mélodique se déroule dans <strong>de</strong>ux genresmodaux (le premier et le <strong>de</strong>uxième jins du tba` çîka). Nous pouvons endistinguer <strong>de</strong>ux types :2.1/ les qaflât qui exploitent le jins içba`ayn comme <strong>de</strong>uxième genre(le premier étant toujours le jins çîka), en utilisant les <strong>de</strong>grés [<strong>la</strong>2 bémol](huçâr) et [si2 bécarre] (mâhûr), comme les <strong>de</strong>ux qaflât du btâyhî "nad`ûkaRabbî" :


243Qaf<strong>la</strong> (1)Qaf<strong>la</strong> (2)2.2/ les qaflât qui se déroulent dans le tba` çîka `irâq, en utilisant les<strong>de</strong>grés [<strong>la</strong>2 <strong>de</strong>mi bémol] (tîk huçâr) et [si bémol] (`ajam), comme <strong>la</strong> qaf<strong>la</strong> dubtâyhî "Bism-l-Muhaymen" :2.3.2 - Deuxième suite du tba' çîkaCette <strong>de</strong>uxième partie <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba çîka se compose <strong>de</strong> trois fragments<strong>de</strong> muwashshahât formant les mouvements suivants :1 er mouvement : Un btâyhî "Yâ Rabbî bi fadhlik" :<strong>Le</strong>s trois adwâr <strong>de</strong> ce fragment <strong>de</strong> muwashshah ont été extrait dutroisième mçaddar <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba çîka, auxquels on a ajouté un qufl dont lesparoles auraient été écrites par un <strong>de</strong>s a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa, probablement à <strong>la</strong>pério<strong>de</strong> où <strong>la</strong> zâwiya s'est éloignée <strong>de</strong>s principes <strong>de</strong> <strong>la</strong> religion is<strong>la</strong>mique, et aencouragé ses a<strong>de</strong>ptes à <strong>la</strong> croyance aux pouvoirs surnaturels <strong>de</strong>s saints et


244<strong>de</strong>s marabouts. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> ce fragment <strong>de</strong> muwashshah est lesuivant :Translittération du texte arabe :Yâ Rabbî bi fadhlikWa jud lî bi waçlikWa-hmînî bi majdikBi fadhlik yâ mujîbBi jâh-l-khumûssîYâ `âlim bi hâlîBi 'ahl-l-kamâlif-amnun b-n-nawâliBi fadhlik yâ mujîbBi jâh-l-khumûssîRabbî hab lya-t-taqwâWa-b`id ahli-d-da`waMâ lî ghayrik quwwaBi fadhlik yâ mujîbBi jâh-l-khumûssîirfaq bi ridhâkmâ natlub siwâkwa-ltuf fî qadhâkli'annî saqîmhab <strong>la</strong>yya naçîbyâ `adhîma-sh-shânwa-n-nabî-l-`adnânfî kulli-l-'ahyânli'annî saqîmhab <strong>la</strong>yya naçîbwa-s-sirri-l-`adhîm`annâ yâ Karîmf-<strong>al</strong>tuf yâ H<strong>al</strong>îmli'annî saqîmhab <strong>la</strong>yya naçîbTraduction :Dieu je te supplie <strong>de</strong> m'offrir ta bénédictionJe ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong> que me rendre à <strong>la</strong> loiSoit clément envers moi tu es le généreuxEt je ne suis qu'un ma<strong>la</strong><strong>de</strong>Je t'appelle par ton serviteur saint KhmûssîPour que tu ne me dé<strong>la</strong>isses pas.


245Dieu tu me connais si bienToi qui est si grandJe te prie par ton ProphèteD'exaucer mes vœuxÀ tout momentCar je ne suis qu'un ma<strong>la</strong><strong>de</strong>Je t'appelle par ton serviteur saint KhmûssîPour que tu ne me dé<strong>la</strong>isses pasTranscription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :2 ème mouvement : Un barw<strong>al</strong> "Natlub mâlikî Rabbî".Dans le manuscrit, c'est le muwashshah qui compose le quatrièmebarw<strong>al</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba çîka. La chor<strong>al</strong>e n'a chanté que le premier dawr avec lemat<strong>la</strong>` <strong>de</strong> ce muwashshah qui comprend quatre adwâr. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong>s paroles<strong>de</strong> ce barw<strong>al</strong> est le suivant :Translittération du texte arabe :Natlub mâlikî Rabbîhua-l-li ya`fû `a<strong>la</strong>yyaYahab lî khmrata-l-hubbi min sharâb-l-humayyaYâ sâqî isqînî khamra rafî`a min sharâb-l-qawmBi kîsâni-l-waçli nibrâ wa narkun li-l-qiâmi wa-ç-çawm


246Man sharib <strong>la</strong>m yatiq çabrâ fa yâ <strong>la</strong>yta-l-wiçâl yadûmBi sharba yaqwâ bihâ hubbî zahra çafwa naqiyyaYahab lî khmrata-l-hubbi min sharâb-l-humayyaTraductionJe <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à mon SeigneurDe me pardonnerEt <strong>de</strong> m'offrir le vin <strong>de</strong> l'amour,La boisson célesteServeur <strong>de</strong> vin donne moi boireTes verres promettent <strong>la</strong> guérisonEt incite à <strong>la</strong> prière et au jeûneCelui qui boit, ne peut patienterPuissent les moments <strong>de</strong> rencontre, durerJe bois, et mon amour se renforceEt pousse comme une fleurSi pure, si éc<strong>la</strong>tanteQue Dieu m'offre le vin <strong>de</strong> l'amour,La boisson céleste.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :


2473 ème mouvement : Un dukhûl barâwil "B-n-nabî-l-hâshimî".Il se compose <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux adwâr, le premier est le quatrième dawr dumuwashshah "b-ism-l-muhaymen" qui compose le premier mçaddar <strong>de</strong> <strong>la</strong>nûba çîka, le <strong>de</strong>uxième est le troisième dawr du même muwashshah. <strong>Le</strong> texte<strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux adwâr est le suivant :Translittération du texte arabe :B-n-nabî-l-hâshimî wa-l-murs<strong>al</strong>âtwa-t-tûri wa-r-RahmânWa-r-ra`di wa-l-'a`râfi thumma-n-âzi`âtwa-n-najmi wa-l-furqânwa-n-nahli wa-l-'ahqâbi wa nûn wa-l-`âdyâtwa-l-kahfi ma`a subhân'an tarhama-l-'umma fa dhâ huwa-l-marad


248Faydhan yuwâfiqnâBi haqqi taha-l-muçtafâ badru-t-tamâmYâ mâlikî ghithnâFa lâ tukhayyib yâ Ilâhî man da`âB-l-<strong>la</strong>yli wa-l-'ashârMustanjidan b-l-'anbiâ' wa-l-'arba`aLi tudhhiba-l-'aghiârFa man li hâdha-l-karbi `annâ dâf`aSiwâk yâ ghaffâr'a`fu `<strong>al</strong>â-l-'umma bifadhlik yâ s<strong>al</strong>âmBi ghaythik 'ahyînâBi haqqi taha-l-muçtafâ badru-t-tamâmYâ mâlikî ghithnâTraductionJe te prie, mon Dieu, par ton Prophète,Fils <strong>de</strong> Benî Hâchem,Je te prie par les textes du livre saint,De pardonner à ta nation ses méfaits,Je te prie mon Dieu, par ton Prophète,De nous apporter secours,Et <strong>de</strong> ne pas décevoir celui qui t'appelle,Je te prie, mon Dieu, par tes messagers,De repousser tous les m<strong>al</strong>heurs,Seul toi peux nous prévenir du désastrePardonne à ton peuple,Et donne lui <strong>la</strong> pluie,Une pluie qui re<strong>la</strong>nce <strong>la</strong> vie.


249Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :2.3.21 - Étu<strong>de</strong> an<strong>al</strong>ytique<strong>Le</strong> chant <strong>de</strong>s mouvements <strong>de</strong> cette suite a duré treize minutes et onzesecon<strong>de</strong>s. Il s'est basé comme dans <strong>la</strong> première partie <strong>de</strong> cette nûba, surl'<strong>al</strong>ternance <strong>de</strong>s voix <strong>de</strong>s qawwâ<strong>la</strong>, et celles <strong>de</strong>s raddâda.La structure du tba` s'est composée dans cette suite <strong>de</strong>s ajnâssuivants :- Jins mhayar `irâq en sol2 (nawâ), qui suit le parcours mélodiquesuivant :


250Comme dans le btâyhî "yâ Rabbî bi fadhlik", qui s'est basé, en plus du jinsprincip<strong>al</strong>, sur le jins mhayar `irâq :- Jins çîka en mi2 <strong>de</strong>mi bémol (sîkâh). Il suit <strong>de</strong>ux parcoursmélodiques différents :Parcours 1 :Comme dans le btâyhî "yâ Rabbî bi fadhlik" :Parcours 2 :Comme dans le dukhûl barâwil "bin-n-nabi-l-hâshimî" :- Jins içba`ayn en sol2 (nawâ) en utilisant les <strong>de</strong>grés <strong>la</strong>2 bémol(huçâr) et si2 bécarre (mâhûr). Il suit le parcours mélodique suivant :Comme dans le btâyhî " bin-n-nabi-l-hâshimî" :


251- Jins raçd dhîl en do2 (râst). Il suit le parcours mélodique suivant :Comme dans <strong>la</strong> dixième mesure du btâyhî " bin-n-nabi-l-hâshimî":D'après cette <strong>de</strong>uxième partie <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba, l'ambitus <strong>de</strong> l'échelle mod<strong>al</strong>edu tba` çîka s'ét<strong>al</strong>e du râst [do2] au kirdân [do3], et comporte les ajnâssuivants :<strong>Le</strong>s <strong>de</strong>grés fondamentaux ou notes préférentielles que nous pouvonsdistinguer dans cette partie <strong>de</strong> nûba sont surtout : le mi2 <strong>de</strong>mi bémol (sîkâh)qui est <strong>la</strong> note fondament<strong>al</strong>e qui sert <strong>de</strong> base, d'irtikâz et <strong>de</strong> station fin<strong>al</strong>epour le tba`, le sol2 qui sert <strong>de</strong> base pour le <strong>de</strong>uxième jins (mhayar `irâq ouiçba`ayn), et enfin le si2 <strong>de</strong>mi bémol (awj) et le do2 (râst) qui sont fortementprésents dans cette partie <strong>de</strong> nûba. Ces <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>grés sont considérés comme


252<strong>de</strong>s <strong>de</strong>grés constitutifs du tba` et faisant partie intégrante du parcoursmélodique.À <strong>la</strong> fin <strong>de</strong> cette étu<strong>de</strong> an<strong>al</strong>ytique, nous <strong>al</strong>lons essayer <strong>de</strong> dégager lesprincip<strong>al</strong>es caractéristiques du tba` çîka dans le <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong>s majâlis <strong>de</strong> sîdîAbû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY.En se basant sur <strong>la</strong> transcription <strong>de</strong>s différents mouvements quiforment les <strong>de</strong>ux parties <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba çîka, nous remarquons ce qui suit :* <strong>Le</strong> point <strong>de</strong> départ (le mabda’) dans le cheminement mélodique duchant <strong>de</strong>s différents mouvements <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux parties <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba, n’était pastoujours le même. En effet, nous distinguons trois <strong>de</strong>grés essentiels qui ontservi <strong>de</strong> point <strong>de</strong> départ pour le parcours mélodique <strong>de</strong>s différentsmouvements <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux parties <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba qui sont :- le <strong>de</strong>gré (sîkâh) [ré2 <strong>de</strong>mi bémol], <strong>la</strong> tonique du tba` çîka. Rappelonsque traditionnellement, le "cheminement maqâmique" commencegénér<strong>al</strong>ement par l'exploration du premier jins du tba` que l'on entame avecle premier <strong>de</strong>gré pour bien inst<strong>al</strong>ler le maqâm (ou le tba`), comme dans lebtâyhî "bism-l-muhaymen" :


253- le <strong>de</strong>gré (nawâ) [sol2], le ghammâz du tba`, qui est à une tierce <strong>de</strong> <strong>la</strong>tonique (l'irtikâz). Ce <strong>de</strong>gré est considéré comme un <strong>de</strong>gré constitutif dutba`, et faisant partie intégrante <strong>de</strong> son parcours mélodique. Il sert à <strong>la</strong> fois <strong>de</strong>point <strong>de</strong> départ et <strong>de</strong> station fin<strong>al</strong>e pour le <strong>de</strong>uxième jins (mhayar `irâq ouiçba`ayn), comme nous l'avons démontré plus haut; et aussi <strong>de</strong> point <strong>de</strong>départ dans le cheminement mélodique du chant. Notons l'insistance, danscette partance <strong>de</strong> chant, sur le [si2 <strong>de</strong>mi bémol] (awj), un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>grésconstitutifs du tba` çîka :- le <strong>de</strong>gré (kirdân) [ré 3], avec une insistance ég<strong>al</strong>ement sur le <strong>de</strong>gré(awj) [si2 <strong>de</strong>mi bémol], pour bien afficher le tba` çîka:2.3.3 - Troisième suite du tba` çîka


254Cette troisième partie <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba çîka se compose <strong>de</strong> trois fragments<strong>de</strong> muwashshahât formant trois dukhûl barâwil qui sont les suivants :Un premier dukhûl barâwil : "Karrây yâ sîdî".<strong>Le</strong>s paroles du muwashshah qui forme ce dukhûl barâwil ne figurentpas dans le recueil <strong>de</strong> sîdî Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY. Cependant il comporte<strong>de</strong>s passages que nous avons trouvés dans le muwashshah "Karrây 'u `âlimnibghî nimshî<strong>la</strong>" qui se trouve à <strong>la</strong> fin du manuscrit. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong>ce muwashshah est le suivant :Translittération du texte arabe :Karrây yâ sîdî'asqînî khamraNibda' bism-l-LâhNimshî bi-l-`âdaWi-nzûr-s-sâd<strong>al</strong>i-l-bâsha nud`âfî yâm-l-jum`ashykî yâ ma`lûmwijhati-l-madhlûmyâ shaykh-l-hadhrawi-sqînî khamrayâ sultânîbi jâh-l-`adnâninursum bi-l-hil<strong>la</strong>li-sh-shaykh nitmâdatiçfâlî râsîli-l-majlis nas`âwa`du-l-qur'âniyâ fâris fî-l-qawmbi jâhi-l-qur'ânidâwînî nibrâwi-m<strong>la</strong>-l-kîsânîTraduction :Karrây, tu es mon patron,Tu es mon sultan,Par l'amour du Prophète


255Fais moi boire <strong>de</strong> ton vin.J'évoque le nom du Seigneur,Au début <strong>de</strong> toute chose,Et je le <strong>de</strong>ssine par ma plume,Je me dirige vers mon shaykh,Comme toujours, et je continueÀ visiter mes patrons,Puis-je ainsi purifier ma tête.Je suis l'hôte du Pacha,J'accours vers ses majliss,Chaque vendredi,Jours <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>de</strong>scente du Coran.Illustre shaykh, qui ne te connais pasVail<strong>la</strong>nt cav<strong>al</strong>ier.Tu es le recours <strong>de</strong>s déshérités,Imprégné <strong>de</strong> <strong>la</strong> parole <strong>de</strong> sainte.Shaykh <strong>de</strong> <strong>la</strong> hadhra, ton traitementMe guéris dans l'immédiat,Fais moi donc boire <strong>de</strong> ton vin,Et que tes verres soient remplis.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :


256Un <strong>de</strong>uxième dukhûl barâwil : "lisânu hâlî".Dans le manuscrit, il est le premier dawr du muwashshah qui composele cinquième mçaddar <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba hsîn. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> ce fragment<strong>de</strong> muwashshah est le suivant :Translittération du texte arabe :Lisânu hâlî tarjim `<strong>al</strong>â murâdîFa yâ 'ilâhî bi hurmati-l-hâdîFa yâ 'ilâhî bi sayydi-l-'arsâli'açlih `ubaydak fî jamî`-l-'ahwâliWa-qbil `a<strong>la</strong>yhi bi ghâyati-l-'iqbâliWa-`tif bi fadhlik `<strong>al</strong>â qulyib-ç-çâdîFa yâ 'ilâhî bi hurmati-l-hâdîadh-dhunûb 'âfatî'a`fu `an z<strong>al</strong><strong>la</strong>tîwa-l-`arab w<strong>al</strong>-`ajamtafadhdhu<strong>la</strong>n wa <strong>la</strong>w dha<strong>la</strong>mwa-mnun 'ilâhî bi-n-ni`amyâ è umdatî fî shiddatî'a`fu `an z<strong>al</strong><strong>la</strong>tîTraduction :Mes méfaits se déc<strong>la</strong>rent d'eux-mêmes,Je ne peux les dissimuler, les péchés me torturent,Puisse le bon Dieu pardonner ma débauche,Je l'implore par l'amour <strong>de</strong> son Prophète.Seigneur je te supplie par le patron <strong>de</strong>s messagers,Vénéré <strong>de</strong>s arabes et toutes peup<strong>la</strong><strong>de</strong>s,Pousse ton minable esc<strong>la</strong>ve dans le droit chemin,Pardonne lui ses méfaits,Il est coupable, mais tu es clément,Fais qu'il puisse bénéficier <strong>de</strong> ta bonté infinie,Et qu'il soit honoré par ta rencontre.


257Mon Dieu, je te supplie par ton messager élu,D'avoir pitié <strong>de</strong> mon cœur ma<strong>la</strong><strong>de</strong>,Tu es mon seul soutien dans <strong>la</strong> détresse,Pardonne donc mes péchés.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :


258Un troisième dukhûl barâwil : "Matâ nazûr-mqâmû".Dans le manuscrit, c'est le premier dawr d'un long muwashshah écritpar le shaykh MARRÂKSHÎ, fils adoptif du shaykh Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> ce dukhûl barâwil est le suivant :Translittération du texte arabe :Matâ nazûr mqâmuAl-`âlimmu-l-`<strong>al</strong>lâmaBism-l-Ilâh-l-wâhidWi-çlât rabbî-l-mâjidYâ çâhi dam`î wâjid……………………Matâ nazûr mqâmuAl-`âlimmu-l-`<strong>al</strong>lâmamawlâ-s-sadad wi-r-râyAbû-l-Hassan KARRÂY<strong>al</strong>-khâliq-r-razzâq`<strong>al</strong>â taiyybi-l-akhlâqyajrî mina-l-'âmâqçarrah <strong>la</strong>hu bi-sh-shânmawlâ-s-sadad wi-r-râyAbû-l-Hassan KARRÂYTraduction :Quand pourrai-je me recueillir sur sa tombe,Lui, le sage, l'illuminé, le savant <strong>de</strong>s savants,L'illustre Abû-l-Hassan Karrây.Au nom <strong>de</strong> Dieu, l'unique, le créateur, le donateur,


259Je glorifie le Prophète aux qu<strong>al</strong>ités sublimes,En l'évoquant, <strong>de</strong>s <strong>la</strong>rmes abondantes coulent <strong>de</strong> mes yeux,Elles témoignent <strong>de</strong> mon profond respect.Quand pourrai-je me recueillir sur sa tombe,Lui, le sage, l'illuminé, le savant <strong>de</strong>s savants,L'illustre Abû-l-Hassan Karrây.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :2.3.31 - Étu<strong>de</strong> an<strong>al</strong>ytique :


260<strong>Le</strong> chant du premier dukhûl barâwil a duré six minutes et vingt neufsecon<strong>de</strong>s, celui du <strong>de</strong>uxième n'a duré que <strong>de</strong>ux minutes et quarante septsecon<strong>de</strong>s, et le chant du troisième dukhûl barâwil n'a duré que <strong>de</strong>ux minuteset huit secon<strong>de</strong>s. Il est à sign<strong>al</strong>er que le chant <strong>de</strong> ces trois dukhûl barâwil aété ré<strong>al</strong>isé sans interruption et avec une accélération <strong>de</strong> tempo au début du<strong>de</strong>uxième dukhûl barâwil, puis au commencement du troisième dukhûlbarâwil.La structure du tba` s'est composée dans cette suite <strong>de</strong> dukhûl barâwil<strong>de</strong>s genres suivants :- Jins raçd dhîl en do2 (râst), qui suit le parcours mélodiquesuivant :Comme dans les troisième et quatrième mesures du <strong>de</strong>uxième barw<strong>al</strong> "lisânuhâlî" :- Jins hsîn en ré2 (dûkâh). Il suit le parcours mélodique suivant :<strong>Le</strong> chant du premier barw<strong>al</strong> "Karrây yâ sîdî" commence sur ce jins bien qu'ilne soit pas un jins princip<strong>al</strong> dans le tba` çîka :


261Jins çîka en mi <strong>de</strong>mi bémol (sîkâh) : En plus <strong>de</strong>s qaflât, ce jins esttrès utilisé au cours du chant <strong>de</strong> ces trois barâwil, puisque c'est le jinsprincip<strong>al</strong> du tba` çîka. Il suit le parcours mélodique suivant :Nous le trouvons par exemple dans les mesures (21-22-23) du barw<strong>al</strong> "lisânuhâlî" :- Jins içba`ayn en sol2 (nawâ), en utilisant les <strong>de</strong>grés <strong>la</strong>2 bémol(huçâr) et si2 bécarre (mâhûr). Il suit le parcours mélodique suivant :Comme dans les mesures (6-7) du barw<strong>al</strong> "lisânu hâlî" :D'après cette troisième partie <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba, l'ambitus <strong>de</strong> l'échelle mod<strong>al</strong>edu tba` çîka s'ét<strong>al</strong>e du râst [do2] au kirdân [do3], et comporte les ajnâssuivants :


262<strong>Le</strong>s <strong>de</strong>grés fondamentaux ou notes préférentielles que nous pouvonsdistinguer dans cette partie <strong>de</strong> nûba, sont les mêmes que nous avons dégagédans les <strong>de</strong>ux premières suites, et qui sont surtout le [mi2 <strong>de</strong>mi bémol](sîkâh) qui est <strong>la</strong> note fondament<strong>al</strong>e qui sert <strong>de</strong> base, d'irtikâz et <strong>de</strong> stationfin<strong>al</strong>e pour le tba` çîka, le [do2] (râst), et le [<strong>la</strong>2] (husaynî) qui a même servi<strong>de</strong> mabda' (point <strong>de</strong> départ) pour le premier dukhûl barâwil <strong>de</strong> cette suite.Comme c'est le cas pour les <strong>de</strong>ux premières suites du tba` çîka, nousavons pu relever plusieurs sortes <strong>de</strong> qaflât, assez distinctes non seulement auniveau <strong>de</strong>s structures rythmiques, mais aussi - et surtout -, au niveau <strong>de</strong>svariations mélodiques. Nous les avons c<strong>la</strong>ssé en <strong>de</strong>ux catégories et ce, selon<strong>la</strong> nature du jins où se déroulent leurs lignes mélodiques :1/ les qaflât dont <strong>la</strong> ligne mélodique se limite au premier jins du tba`çîka, comme <strong>la</strong> qaf<strong>la</strong> du <strong>de</strong>uxième dukhûl barâwil "Lisânu hâlî" :Ou encore <strong>la</strong> qaf<strong>la</strong> du dukhûl barâwil "Matâ nazûr mqâmu" :


2632/ les qaflât dont <strong>la</strong> ligne mélodique se déroule dans <strong>de</strong>ux genresmodaux, comme <strong>la</strong> qaf<strong>la</strong> qu'on trouve dans le <strong>de</strong>uxième dukhûl barâwil :En conclusion, et après avoir étudié et an<strong>al</strong>ysé les trois suites <strong>de</strong> <strong>la</strong>nûba çîka, nous <strong>al</strong>lons essayer <strong>de</strong> dégager les princip<strong>al</strong>es caractéristiques dutba` çîka dans le <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong>s majâlis <strong>de</strong> sîdî Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY.En se basant sur <strong>la</strong> transcription <strong>de</strong>s différents mouvements quiforment les trois parties <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba çîka, nous remarquons ce qui suit :* <strong>Le</strong> point <strong>de</strong> départ (le mabda’) dans le cheminement mélodique duchant <strong>de</strong>s différents mouvements <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux parties <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba, n’était pastoujours le même. En effet, nous distinguons trois <strong>de</strong>grés essentiels qui ontservi <strong>de</strong> point <strong>de</strong> départ pour le parcours mélodique <strong>de</strong>s différentsmouvements <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux parties <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba qui sont :* le <strong>de</strong>gré (sîkâh) [ré2 <strong>de</strong>mi bémol], <strong>la</strong> tonique du tba` çîka.Rappelons que traditionnellement, le "cheminement maqâmique" commencegénér<strong>al</strong>ement par l'exploration du premier jins du tba` que l'on entame avec


264le premier <strong>de</strong>gré pour bien inst<strong>al</strong>ler le maqâm (ou le tba`), comme dans lebtâyhî "bism-l-muhaymen" :* le <strong>de</strong>gré (nawâ) [sol2], le ghammâz du tba`, qui est à une tierce <strong>de</strong><strong>la</strong> tonique (l'irtikâz). Ce <strong>de</strong>gré est considéré comme un <strong>de</strong>gré constitutif dutba`, et faisant partie intégrante <strong>de</strong> son parcours mélodique. Il sert à <strong>la</strong> fois <strong>de</strong>point <strong>de</strong> départ et <strong>de</strong> station fin<strong>al</strong>e pour le <strong>de</strong>uxième jins (mhayar `irâq ouiçba`ayn), comme nous l'avons démontré plus haut; et aussi <strong>de</strong> point <strong>de</strong>départ dans le cheminement mélodique du chant. Notons l'insistance, danscette partance <strong>de</strong> chant, sur le [si2 <strong>de</strong>mi bémol] (awj), un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>grésconstitutifs du tba` çîka :* le <strong>de</strong>gré (kirdân) [ré 3], avec une insistance ég<strong>al</strong>ement sur le <strong>de</strong>gré(awj) [si2 <strong>de</strong>mi bémol], pour bien afficher le tba` çîka :


2652.4 - <strong>Le</strong> tba` hsîn :La nûba hsîn, ou <strong>la</strong> nûba composée dans le tba` hsîn, occupe <strong>la</strong>quatrième p<strong>la</strong>ce dans le c<strong>la</strong>ssement traditionnel <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux <strong>répertoire</strong>s. Satonique est ré2 (dûkâh).Dans le manuscrit, <strong>la</strong> nûba hsîn commence à <strong>la</strong> moitié du verso <strong>de</strong> <strong>la</strong>feuille numéro trente <strong>de</strong>ux, et se termine à <strong>la</strong> moitié du recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuillenuméro quarante trois. Elle se compose <strong>de</strong> treize muwashshahât qui formentles mouvements suivants :1 er mouvement : Il comprend six mçaddar :- Yâ 'Ilâhî yâ Muhaymen- Nibda' b-ism-r-Rabb-l-Karîm- 'in kunta `âshiqan lâ tabrah- Nibda' b-ism-l-Wâhid-l-bârî- Lisânu hâlî tarjam `an murâdî- Khamrâtukum fî-l-kîsâni2 ème mouvement : Il comprend quatre barw<strong>al</strong> :- Fiq wa-ntabih likay tutî`- Natlub mâlikî Rabbî


266- Idhâ dhâqa çadrî- Nibda' b-ism-l-Lâh3 ème mouvement : Il comprend un seul draj :- Yâ sâmi`an qaw<strong>la</strong>-s-saqîm4 ème mouvement : Il comprend <strong>de</strong>ux khafif :- 'Alâ 'ayyuhâ-l-hâdî- Isqinî bi kâsi-l-khamraCependant, nous avons trouvé à <strong>la</strong> phonothèque <strong>de</strong> <strong>la</strong> maison <strong>de</strong> radio<strong>de</strong> Sfax, dans <strong>de</strong>ux bobines différentes, <strong>de</strong>ux enregistrements <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux suites<strong>de</strong> muwashshahât. La première suite est dans le tba` hsîn açl, quant à <strong>la</strong><strong>de</strong>uxième, elle est dans le tba` hsîn çabâ, un <strong>de</strong>s dérivés du tba` hsîn açl.2.4.1 – <strong>la</strong> suite du tba` hsînCette suite se compose <strong>de</strong> six muwashshahât formant les mouvementssuivants :1 er mouvement : <strong>Le</strong> btâyhî "Açç<strong>al</strong>ât `<strong>al</strong>â Muhammad" :Dans le manuscrit, ce muwashshah forme le <strong>de</strong>uxième khafif <strong>de</strong> <strong>la</strong>nûba mâya. Il se compose <strong>de</strong> cinq adwâr, et c'est seulement les <strong>de</strong>uxpremiers dawr et le mat<strong>la</strong>` qui sont chantés par <strong>la</strong> chor<strong>al</strong>e. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong>sparoles <strong>de</strong> ce dawr est le suivant :Translittération du texte arabe :


267'Açç<strong>al</strong>ât `<strong>al</strong>â Muhammad'Açç<strong>al</strong>ât `<strong>al</strong>â-t-tuhâmîAl-<strong>la</strong>dhî madhû gharâmîFî hawâh infajar nidhâmîDâ'iman `ishqî mujaddad'Açç<strong>al</strong>ât `<strong>al</strong>â Muhammad'Açç<strong>al</strong>ât `<strong>al</strong>yhi dâyemAn-nabî rawhu-l-`awâlimDhû-l-mawâhib wa-l-makârimMadhuhu-l-hâdî-l-mumajjad'Açç<strong>al</strong>ât `<strong>al</strong>â Muhammadwa-s-s<strong>al</strong>âm `<strong>al</strong>â Muhammadan-nabî-l-hâdî-l-mufadhdh<strong>al</strong>wa 'anâ `ishqî `<strong>al</strong>â 'aww<strong>al</strong>çâhibi-ç-çadri-l-mukamm<strong>al</strong>fî-l-<strong>la</strong>dhî khaddû muwarradwa-s-s<strong>al</strong>âm `<strong>al</strong>â Muhammadkullu waqt wa kulli sâ`a<strong>al</strong>-mukhaççaç bi-sh-shafâ`amadhuhu `indî khilâ`a<strong>la</strong>ysa lî `anhu tahayyudwa-s-s<strong>al</strong>âm `<strong>al</strong>â MuhammadTraduction :Que nos prières soient pour Mohamed,Que <strong>la</strong> paix soit sur son âme,Je prie sur notre Prophète, élu <strong>de</strong> Dieu,Mon amour <strong>de</strong>meure pour lui immuable,Un amour qui m'inspire mes vers,Et je me fais un p<strong>la</strong>isir d'énumérer ses qu<strong>al</strong>ités.Mon amour se renouvelle sans cesse,Pour celui qui a les joues rosâtres,Que nos prières soient pour Mohamed,Que <strong>la</strong> paix soit sur son âme,Je prie pour lui constamment, sans relâche,À n'importe quelle heure,À n'importe quel moment.


268Puisse-t-il nous défendre le jour du jugement <strong>de</strong>rnier.Je me p<strong>la</strong>is <strong>de</strong> vanter ses qu<strong>al</strong>ités et ses vertus,Mes poèmes <strong>de</strong>meurent élogieux à son égard.Que nos prières soient pour Mohamed,Que <strong>la</strong> paix soit sur son âme,Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :2 ème mouvement : <strong>Le</strong> shghul "Fîka qad hassantu dhannî" :


269Nous avons été surpris par l'existence <strong>de</strong> ce mouvement au milieu <strong>de</strong><strong>la</strong> nûba car il est composé sur un wazn à une mesure <strong>de</strong> 7/8 (le nawakht) quiest d'usage courant plutôt en musique arabe orient<strong>al</strong>e. La formule rythmiquequi lui correspond est <strong>la</strong> suivante :D'après sa forme poétique et son wazn, ce chant est un shghul quisemble avoir été composé par un <strong>de</strong>s a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa Karrâriyya, à uneépoque vraisemb<strong>la</strong>blement assez lointaine <strong>de</strong> celle du shaykh Abû-l-Hassan<strong>al</strong>-KARRÂY. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> ce shghul est le suivant :Translittération du texte arabe :Fîka qad hassantu dhannîyâ muwaççaf bi-l-kamâliYâ mawlây yâ Allâh yâ dâyemYâ rasû<strong>la</strong>-l-Lâhi jurnîman <strong>la</strong>ghâ yawma-s-su'âliYâ mawlây yâ Allâh yâ dâyemYâ rasû<strong>la</strong>-l-Lâhi ghithnî'anta kanzî ra'su mâlîYâ mawlây yâ Allâh yâ dâyem'Anta hu-l-ghawthu yâ Muhammad yâ mubajj<strong>al</strong> yâ mu'ayyad'Açç<strong>al</strong>ât `<strong>al</strong>â Muhammadwa-s-s<strong>al</strong>âm `<strong>al</strong>â MuhammadYâ mawlây yâ Allâh yâ dâyemTraduction :Tes vertus m'inspirent mon art,


270N'es tu pas l'homme parfait,Je me rends à mon seigneur Al<strong>la</strong>h l'immortel,Toi Prophète d'Al<strong>la</strong>h, soit à mes cotés<strong>Le</strong> jour où je serai questionné sur mes méfaitsJe me rends à mon seigneur Al<strong>la</strong>h l'immortel,Prophète <strong>de</strong> Dieu, je t'appelle à mon secours,Je n'ai que toi, mon unique trésor,Je me rends à mon seigneur Al<strong>la</strong>h l'immortel,Mohamed tu es le s<strong>al</strong>ut <strong>de</strong> mon âme,Tu es le préféré, tu es obéi et respecté,Je me rends à mon seigneur Al<strong>la</strong>h l'immortel,Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :3 ème mouvement : <strong>Le</strong> dukhûl barâwil "'Ihtazzat rawhî li 'ashwâqihâ":<strong>Le</strong>s paroles <strong>de</strong> ce dukhûl barâwil ne figurent pas dans <strong>la</strong> nûba hsîn durecueil d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY, nous les avons trouvé dans <strong>la</strong> partie <strong>de</strong>s


271shghullât au verso <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 126. Elles forment le <strong>de</strong>uxième dawr dushghul "yâ hâdî inhadh wa jud bi-s-sarâ" qui se compose <strong>de</strong> cinq adwâr. <strong>Le</strong>texte <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> ce dukhûl barâwil est le suivant :Translittération du texte arabe :'Ihtazzat rawhî li'ashwâqihâ<strong>la</strong>mmâ sarat-n-niâqîWa maddat bi-r-ramli 'a`nâquhâWa taghat bi-d-dam`i 'âmâquhâMuhammad huwa tabîbi-l-qulûbwa-stabsharat bi-t-t<strong>al</strong>âqîshawqan 'ilâ râkiba-l-burâqihîna ghadat yashfa` <strong>la</strong>nâIn shâ'a-l-LâhTraduction :Quand <strong>la</strong> caravane s'est dirigée vers les lieux saints,Mes envies se sont exacerbées,Même les chamelles ont eu les <strong>la</strong>rmes dans les yeux,Par l'émotion <strong>de</strong> <strong>la</strong> rencontreDe celui qui, un soir, le bon Dieu l'a emmenéSur le Bouraq pour visiter Jérus<strong>al</strong>em,Mohamed au cœur si tendreNe fera que nous défendreAuprès <strong>de</strong> Dieu, le jour du jugement <strong>de</strong>rnier.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :


2724 ème mouvement : Il comprend trois barâwil :- Un premier barw<strong>al</strong> : "Yâ Rabbî bi fadhlik". Ce fragment <strong>de</strong>muwashshah est dans le manuscrit, le <strong>de</strong>uxième dawr du <strong>de</strong>uxième mçaddar<strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba çîka. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> ce dawr est le suivant :Translittération du texte arabe :Yâ Rabbî bi fadhlikWa-ç-çahha li `abdikWassi`li faqîrikFî dhikrik shifâ'îQaçdî wa munâ'îf-amnun bi-l-`atâyâwa zid bi-l-`inâyamadhîq-th-thanâyayâ mawlâ-l-mawâlî'an tatuf bi hâlî


273Traduction :Dieu, je te supplie, soit clément,Donne <strong>la</strong> santé à ton esc<strong>la</strong>ve, Soutiens le,Il n'est qu'un pauvre démuni,Et son chemin est si étroit,Tout ce que je souhaite est ta clémence,Rien qu'à citer ton nom, me permet <strong>de</strong> guérirTranscription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :- Un <strong>de</strong>uxième barw<strong>al</strong> :"Sammayt b-ism-l-Lâh-l-awhad". <strong>Le</strong>sparoles <strong>de</strong> ce btâyhî ne figurent pas dans le manuscrit d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY, ils sont probablement été extraites <strong>de</strong>s ash`âr (poèmes) <strong>de</strong> l'un <strong>de</strong>smurîdîn <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-KARRÂRIYYA. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> ce barw<strong>al</strong> estle suivant :Translittération du texte arabe :Sammayt b-ism-l-Lâh-l-awhadNabiyyunâ-l-hâdî Ahmadthumma-ç-ç<strong>al</strong>ât `<strong>al</strong>â-l-amjadwa-l-wajha wa-dh-dhurriyya


274Yâ 'bâ-l-Hassan yâ Karrâyyâ shykhî nûb `a<strong>la</strong>yyaTraduction :Je cite d'abord le nom d'Al<strong>la</strong>h, l'unique,Puis je récite mes prières pour son Prophète,Notre gui<strong>de</strong>, et pour ses <strong>de</strong>scendants,Ensuite je te <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, à toi, notre shaykh,Abû-l-Hassan KARRÂY <strong>de</strong> me soutenir.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :- Un troisième barw<strong>al</strong> :"Yâ sâqî isqînî khamra". Ce fragment<strong>de</strong> muwashshah est dans le manuscrit, le premier dawr du cinquième barw<strong>al</strong><strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba sîka. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> ce barw<strong>al</strong> est le suivant :Translittération du texte arabe :Yâ sâqî-sqînî khamraBi kîsâni-l-waçli nabrâMan sharib lâ yatiq çabrâBi sharba yaqwâ hubbîYâhabnî khamrata-l-hubbirafî`a min sharâb-l-qawmwa narshud li-l-qiâm wa-ç-çawmfa yâ <strong>la</strong>yta-l-wiçâl yadûmfa-z-zahra çafwa naqiyyamin sharâbi-l-humayya


275Traduction :Serveur <strong>de</strong> vin, donne moi boire,Tes verres promettent <strong>la</strong> guérison,Et incitent à <strong>la</strong> prière et au jeûne,Quand je bois, mon amour s'envenime,Et mon cœur fleurit,Donne moi encore et encore,<strong>Le</strong> vin <strong>de</strong> l'amour.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :2.4.1 – Étu<strong>de</strong> an<strong>al</strong>ytique


276<strong>Le</strong> chant <strong>de</strong>s quatre mouvements <strong>de</strong> cette suite a duré quatorzeminutes et cinquante quatre secon<strong>de</strong>s.La structure du tba` s'est composée dans cette suite <strong>de</strong>s genres (ajnâs)suivants :- Jins hsîn en ré2 (dûkâh) : Il suit <strong>de</strong>ux parcours mélodiques :Parcours 1 :Comme dans le btâyhî "aç-ç<strong>al</strong>ât `<strong>al</strong>â Muhammad", (<strong>la</strong> <strong>de</strong>uxième phrase qui aoccupé les troisième et quatrième mesures, et qui a servi en même temps <strong>de</strong>qaf<strong>la</strong> pur le btâyhî) :Parcours 2 :Comme dans les quatre premières mesures du barw<strong>al</strong> "yâ rabbî bi fadhlik" :- Jins hsîn en <strong>la</strong>2 (husaynî). Il suit le parcours mélodique suivant :


277Comme dans les mesures (9-10) du btâyhî "aç-ç<strong>al</strong>ât `<strong>al</strong>â Muhammad" :Parcours 1 :- jins mâya en do2 (râst). Il suit <strong>de</strong>ux parcours mélodiques :Comme dans <strong>la</strong> première phrase du btâyhî "aç-ç<strong>al</strong>ât `<strong>al</strong>â Muhammad" :Parcours 2 :Comme dans le dukhûl barâwil "ihtazzat rawhî li 'ashwâqihi" :suivant :- jins mazmûm en fa2 (jahârkâh). Il suit le parcours mélodique


278Comme dans les neuvième et dixième mesures du <strong>de</strong>uxième mouvement"fîka qad hassantu dhannî" :suivant :- jins sîka en mi <strong>de</strong>mi bémol (sîkâh). Il suit le parcours mélodiqueComme dans les mesures (9-10-11) du barw<strong>al</strong> "yâ rabbî bi fadhlik" :- Jins dhîl en sol1 (yâkâh), qui suit le parcours mélodique suivant :Comme dans les mesures (8-9) du dukhûl barâwil "ihtazzat rawhî li'ashwâqihi" :D'après cette nûba, l'étendue <strong>de</strong> l'échelle mod<strong>al</strong>e du tba` hsîn s'étenddu sol1 (yâkâh) au ré3 (muhayyar), et comporte les ajnâs suivants :


279<strong>Le</strong>s <strong>de</strong>grés fondamentaux ou notes préférentielles que nous pouvonsdistinguer dans cette nûba sont surtout : le ré2 (dûkâh), <strong>la</strong> note fondament<strong>al</strong>equi sert <strong>de</strong> base, d'irtikâz et <strong>de</strong> station fin<strong>al</strong>e pour le tba`, et le <strong>la</strong>2 (husaynî)qui sert <strong>de</strong> base pour le <strong>de</strong>uxième jins (hsîn en <strong>la</strong>). Nous sign<strong>al</strong>ons ici quecette note fondament<strong>al</strong>e (husaynî) a distingué le tba` hsîn <strong>de</strong>s autres tubû`qui ont <strong>la</strong> même échelle mod<strong>al</strong>e et <strong>la</strong> même station fin<strong>al</strong>e (darajat <strong>al</strong>-irtikâz).Enfin, Il est à remarquer que les qaflât <strong>de</strong>s différents mouvements quiconstituent cette nûba, se sont toutes déroulées dans le premier jins du tba`hsîn :Qaf<strong>la</strong> 1 :Qaf<strong>la</strong> 2 :Qaf<strong>la</strong> 3 :Qaf<strong>la</strong> 4 :


280Qaf<strong>la</strong> 5 :2.4.2 – <strong>la</strong> suite du tba` hsîn çabâCette suite se compose <strong>de</strong> cinq muwashshahât formant les <strong>de</strong>uxmouvements suivants :1 er mouvement : il comprend trois dukhûl barâwil :- Un premier dukhûl barâwil : "fa mâ lî m<strong>al</strong>ja' ".<strong>Le</strong>s paroles <strong>de</strong> ce dukhûl barâwil sont extraites du cinquième mçaddar <strong>de</strong> <strong>la</strong>nûba nawâ.Translittération du texte arabe :Fa mâ lî m<strong>al</strong>ja' 'illâ-r-rasûl-l-hâdîyuskinu raw`a-l-q<strong>al</strong>bi thumma fu'âdîGhariqtu fî-l-'âkâmi wasata-l-wâdiFa `umdatî taha-n-nabî-l-`adnâniÇ<strong>al</strong>lû `<strong>al</strong>â taha-n-nabî-l-`adnâniAl-muçtafâ-l-hâdî `adhîmi-sh-shâniTraduction :


281A qui je peux recourir, sinon le messager <strong>de</strong> Dieu,Lui seul peut c<strong>al</strong>mer <strong>la</strong> terreur qui gît en mon cœur et en mon âme,Je me noie en plein milieu du torrent,Et je ne trouve à mon secours que le Prophète,Il est l'élu <strong>de</strong> Dieu, il est magnifique,Prions tous pour lui.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :


282-Un <strong>de</strong>uxième dukhûl barâwil : "Yâ Muhammad 'anta ghâyatumaqçadî", qui est dans le manuscrit, le quatrième dawr du khafîf <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba`irâq. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> ce dukhûl barâwil est le suivant :


283Translittération du texte arabe :Yâ Muhammad 'anta ghâyatu maqçadîYâ ghayyâth yâ 'imâma-l-murs<strong>al</strong>îna'anta kahfî wa m<strong>al</strong>âkî sayydîKun shafî`î yâ shafî`a-l-mudhnibînaNajjinâ min hawli yawma-l-maw`idiYâ mubajj<strong>al</strong> 'anta m<strong>al</strong>ja'i-l-khâ'ifînaMin hawli yawmin yashîbu fîhi-l-wa<strong>la</strong>dâNajjinâ bi himâka yâ hulwa-l-k<strong>al</strong>âmiÇ<strong>al</strong>lâ `a<strong>la</strong>yka-l-Lâhu s<strong>al</strong><strong>la</strong>m 'abadâ'âlin wa çahbin wa-t-tâbi`îna bi-t-tamâmTraduction :Mohamed, tu es ma <strong>de</strong>stinée,Tu es mon secours, toi qui es le chef <strong>de</strong>s messagers,Tu es mon patron, tu es mon ange,Défends moi, tu es le défenseur <strong>de</strong>s pécheurs,Sauve moi <strong>de</strong> l'horreur, le jour du jugement,Tu es le recours <strong>de</strong> ceux qui ont <strong>la</strong> peur dans le cœur,Peur <strong>de</strong> cette journée dont <strong>la</strong> terreur fait vieillir les enfants,Sauve moi, tu nous l'as promis dans tes paroles,Et le bon Dieu t'a béni <strong>de</strong> même que ta familleEt tes compagnons fidèles.


284Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :- Un troisième dukhûl barâwil : " 'Isma` jawâhir k<strong>al</strong>âmî".Dans le manuscrit, ce muwashshah compose le premier dawr dupremier barw<strong>al</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba raçd. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong> ses paroles est le suivant:Translittération du texte arabe :'Isma` jawâhir k<strong>al</strong>âmîyâ man yunakkid `a<strong>la</strong>yya


285Fî-l-qawsi narshiq sihâmîYahdhar ma`î shaykhî RâmîTi`sa-l-<strong>la</strong>dhî jâ' yuhâmîAsh-shaykhu bi-s-sahmi qâçimBi-l-hamdi wa-sh-shukri nandhimnâqif mashâf-th-thaniyyayadhrib gharîmî bi niyyayarmî `a<strong>la</strong>yya-r-ramiyyadhahara-l-<strong>la</strong>dhî jâ' yunâjiryâ rabbî rawwî-l-matâyirTraduction :Je dis à celui qui me détourne <strong>de</strong> mes <strong>de</strong>voirs,Écoute bien mes paroles qui v<strong>al</strong>ent <strong>de</strong>s diamants,J'inst<strong>al</strong>le mes flèches dans mon arc,Et je me dresse au bord <strong>de</strong> mon chemin,J'ai à mes cotés mon shaykh, qui vie lui aussi,Contre mon adversaire.M<strong>al</strong>heur à celui qui veut se prendre à moi,Mon shaykh a <strong>la</strong> flèche aiguisée,Prête à toucher tout m<strong>al</strong>faiteur,Pour ce<strong>la</strong>, j'écris mon poème,Et remercie Dieu, qui arrose nos terres.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :


2862 ème mouvement : il comprend <strong>de</strong>ux barâwil :- Un premier barw<strong>al</strong> : "Ç<strong>al</strong>lî `<strong>al</strong>â zayni-ç-çifât".C'est le cinquième dawr du muwashshah qui compose le premier barw<strong>al</strong> <strong>de</strong><strong>la</strong> nûba hsîn du manuscrit. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> ce barw<strong>al</strong> est le suivant :Translittération du texte arabe :Ç<strong>al</strong>li `<strong>al</strong>â zayni-ç-çîfâtRawdha-n-nufûs m<strong>al</strong>ja-l-`uçâtBadru-t-tamâm jam`u-sh-shatât'uqçud wa dum dhukra-l-badî`Wa ç<strong>al</strong>li `<strong>al</strong>â taha-sh-shafî`bi-l-mu`jizâti-'ttaçafaman lâdha bîh qad 'iktafâbahru-`atâyâ wa-l-wafâwa-d`u liman nasaja-n-nidhâm<strong>al</strong>-muçtafâ khayru-l-'anâmTraduction :Beni soit cet homme aux qu<strong>al</strong>ités sublimes,Rehaussé par ses miracles,Il est le s<strong>al</strong>ut <strong>de</strong>s âmes,Et le recours <strong>de</strong>s repentis.Sont comblés tout ceux qui lui ont <strong>de</strong>mandé secours,


287Il est notre pleine lune et unificateur <strong>de</strong>s dispersés.C'est un océan <strong>de</strong> générosité.Adressez vous à ce merveilleux,Et évoquez-le constamment.Beni soit l'auteur <strong>de</strong> ces versPriez encore pour le Prophète défenseur <strong>de</strong>s humains,<strong>Le</strong> distingué, le meilleur <strong>de</strong>s créatyres.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :- Un <strong>de</strong>uxième barw<strong>al</strong> : " 'Anta nûr-l-kawni".


288Dans le manuscrit, c'est le quatrième dawr du muwashshah quicompose le quatrième barw<strong>al</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba 'içba`ayn. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> cebarw<strong>al</strong> est le suivant :Translittération du texte arabe :Anta nûr-l-kawni haqqâNilta bi-l-asrâri sabqâYâ habîbî bitta tarqâWa-nhanâ-l-jidh`u ma`a-l-`itqiWaçfuka-l-'ihsânu wa-ç-çidqiwa-l-mukhaççaç bi-l-jamâlîwa hubûran wa wiçâlîwa-ntahayta 'ilâ-l-ma`âlî<strong>la</strong>ka min ghayri-ftirâ'îyâ mumidda-l-'anbiyâ'îTraduction :Tu es <strong>la</strong> lumière <strong>de</strong> l'univers,Connu par l'éc<strong>la</strong>t <strong>de</strong> ta beauté,Tu mérites cette avance sur tout le mon<strong>de</strong>,Et tu bénéficies <strong>de</strong> l'amour <strong>de</strong> nous tous.Mon amour, tu <strong>de</strong>meures transcendant,Et te voi<strong>la</strong> là haut dans les cimes,Même le tronc <strong>de</strong> l'arbre s'est incliné,Ainsi que les branches, pour te s<strong>al</strong>uer,Avec le respect que tu mérites.Tu es <strong>la</strong> bienfaisance même,Toi, chef <strong>de</strong> tous les messagers.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :


2892.4.21 – Étu<strong>de</strong> an<strong>al</strong>ytique :<strong>Le</strong> chant <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux mouvements <strong>de</strong> cette suite qui comporte troisdukhûl barâwil et <strong>de</strong>ux barw<strong>al</strong>, a duré sept minutes et cinquante secon<strong>de</strong>s.La structure du tba` hsîn çabâ s'est composée, selon cette suite, <strong>de</strong>sajnâs suivants :- Jins hsîn en ré (dûkâh). Il suit <strong>de</strong>ux parcours mélodiques :Parcours 1Comme dans <strong>la</strong> qaf<strong>la</strong> du <strong>de</strong>uxième dukhûl barâwil "Yâ Muhammad" :


290Parcours 2Comme dans le troisième dukhûl barâwil "'Isma` jawâhir k<strong>al</strong>âmî"(cinquième et sixième mesures) :- Jins hsîn en <strong>la</strong>2 (husaynî), qui suit le parcours mélodique suivant :Comme dans les mesures (10-11-12) du dukhûl barâwil "Yâ Muhammad" :suivant :- Jins mazmûm en fa2 (jahârkâh). Il suit le parcours mélodique


291L'emploi du jins mazmûm est l'une <strong>de</strong>s caractéristiques du tba` hsînçabâ. C'est pour ce<strong>la</strong> que nous trouvons plusieurs phrases <strong>music<strong>al</strong></strong>escomposées dans ce jins durant les quatre mouvements <strong>de</strong> cette suite, commedans le premier dukhûl barâwil (mesures 11-12) :- Jins mâya en do2 (râst). Il suit le parcours mélodique suivant :Comme dans <strong>la</strong> première phrase du dukhûl barâwil " Yâ Muhammad " :


292D'après cette suite, l'étendue <strong>de</strong> l'échelle mod<strong>al</strong>e du tba` hsîn çabâs'étend du do2 (râst) au ré3 (muhayyar), et comporte les ajnâs suivants :<strong>Le</strong>s <strong>de</strong>grés fondamentaux ou notes préférentielles que nous pouvonsdistinguer dans cette suite sont essentiellement : le ré2 <strong>la</strong> note fondament<strong>al</strong>equi sert <strong>de</strong> base, d'irtikâz et <strong>de</strong> station fin<strong>al</strong>e pour le tba` hsîn çabâ, le <strong>la</strong>2(husaynî) qui sert <strong>de</strong> base pour le <strong>de</strong>uxième jins (hsîn en <strong>la</strong>), et le fa2(jahârkâh) qui sert d'irtikâz pour le jins mazmûm. Celui-ci, rappelons le, faitdistinguer le tba` hsîn çabâ du tba` hsîn.2.5 - <strong>Le</strong> tba` içba`ayn :La nûba composée dans le tba` içba`ayn occupe <strong>la</strong> cinquième p<strong>la</strong>cedans l'ordre <strong>de</strong>s nûbât du <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-KARRARIYYA, et <strong>la</strong>huitième dans celui du mâlûf.Dans le recueil d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY, <strong>la</strong> nûba içba`ayncommence à <strong>la</strong> moitié du recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille numéro quarante trois, et se


293termine au début du recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille numéro cinquante quatre. Elle secompose <strong>de</strong> quinze muwashshahât qui forment les mouvements suivants :1 er mouvement : il comprend quatre mçaddar :- Yâ sâmi`an qaw<strong>la</strong>-s-saqîm- Ra'aytu taha fî manâmî- Bâna shawqî fîhi zayni-r-rusuli- Bâba-l-Hassan yâ mujlî `kûsî2 ème mouvement : il comprend huit barâwil :- Yâ sâmi`an qaw<strong>la</strong>-s-saqîm- Yâ ghâfi<strong>la</strong>n `an-l-ùyûb- Munâ'î khamrâ- Kayfa tarqâ raqiaka-l-kh<strong>al</strong>q- Idhâ dhakarta-n-naqâ wa hâjir- Miskîn man bi-l-hawâ yudâdî- Nibda' bism-l-Lâhi nandhum- Lâ Ilâha illâ-l-Lâh3 ème mouvement : le draj "Kayfa tarqâ raqiaka-l-kh<strong>al</strong>q".4 ème mouvement : il comprend <strong>de</strong>ux khafif :- Iqb<strong>al</strong> k<strong>al</strong>âma-n-naçîha- Karrây 'u `âlimM<strong>al</strong>heureusement, nous n'avons pas trouvé <strong>de</strong> documents sonorespour ce tba`.


2942.6 - <strong>Le</strong> tba` raçd :La nûba composée dans le tba` raçd occupe <strong>la</strong> sixième p<strong>la</strong>ce dansl'ordre <strong>de</strong>s nûbât du <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-KARRARIYYA, et <strong>la</strong> cinquièmedans celui du mâlûf.Dans le recueil d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY, <strong>la</strong> nûba raçd commenceau début du recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille numéro cinquante quatre, et se termine à <strong>la</strong>moitié du recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille numéro cinquante sept. Elle se compose <strong>de</strong>quinze muwashshahât qui forment les mouvements suivants :1 er mouvement : il comprend <strong>de</strong>ux mçaddar :- Qad bâna shawqî- Sammayt bism-l-Lâh2 ème mouvement : il comprend trois barâwil :- Isma` jawâhir k<strong>al</strong>âmî- Qad da`ânî-sh-shawqu- Qad da`ânî shawqî3 ème mouvement : le draj "yâ ziyyâr-l-ka`ba".4 ème mouvement : le khafif "isqînî l-irtifâ`î".Pour ce tba` non plus, il n'y a pas <strong>de</strong> documents sonores.


2952.7 - <strong>Le</strong> tba` raçd-dhîl :La nûba composée dans le tba` raçd-dhîl occupe <strong>la</strong> septième p<strong>la</strong>cedans l'ordre <strong>de</strong>s nûbât du <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-KARRARIYYA, et <strong>la</strong>neuvième dans celui du mâlûf.Dans le recueil d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY, <strong>la</strong> nûba raçd-dhîlcommence à <strong>la</strong> moitié du recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille numéro cinquante sept, et setermine à <strong>la</strong> moitié du verso <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille numéro soixante <strong>de</strong>ux. Elle secompose <strong>de</strong> onze muwashshahât qui forment les mouvements suivants :1 er mouvement : il comprend quatre mçaddar :- Nibda' bim-r-Rabb- Yâ shaykh sîdî Abû-l-Hassan- In rumta tashhad- Idhâ dhakarta-n-naqâ wa hâjir2 ème mouvement : il comprend quatre barâwil :- `Abdun ba`îdu-d-dâri- Sâra tayfu-l-<strong>la</strong>dhî 'atâ bi-l-haqqi- Natlub mâlikî Rabbî- Anâ-l-<strong>la</strong>dhî min hubbihi yâ çâh3 ème mouvement : le draj "qad bâna shawqî yâ `adhûl"4 ème mouvement : il comprend <strong>de</strong>ux khafif :


296- sammayt bism-l-Lâh- yâ Ilâh yâ muhaymen yâ mujîbNous n'avons pas trouvé <strong>de</strong> documents sonores pour ce tba`.2.8 - <strong>Le</strong> tba` raml :La nûba composée dans le tba` raml occupe <strong>la</strong> huitième p<strong>la</strong>ce dansl'ordre <strong>de</strong>s nûbât du <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-KARRARIYYA, et <strong>la</strong> dixièmedans celui du mâlûf.Dans le recueil d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY, <strong>la</strong> nûba raml commenceà <strong>la</strong> moitié du verso <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille numéro soixante <strong>de</strong>ux, et se termine audébut du verso <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille numéro soixante quatre. Elle se compose <strong>de</strong> neufmuwashshahât qui forment les mouvements suivants :1 er mouvement : il comprend trois mçaddar :- Min fafdhli Rabbi-l-kh<strong>al</strong>q- Fiq wa-ntabih min sakratik- Yâ sâmi`an qaw<strong>la</strong>-s-saqîm2 ème mouvement : il comprend <strong>de</strong>ux barâwil :- Idhâ dhakarta-n-naqâ wa hâjir- Isqînî yâ sâqî3 ème mouvement : le draj "fiq wa-ntabih likay tutî`"4 ème mouvement : le khafîf "hum-r-ijâlu taraqqaw bi-jtihâdihim"


2975 ème mouvement : singulièrement, il y a eu un retour au barâwil qui sont :- Sammayt bism-l-Mu`adhdham- Habba-n-nasîm wa-l-barqu lâhNous n'avons pas trouvé <strong>de</strong> documents sonores pour ce tba`.2.9 - <strong>Le</strong> tba` nawâ :La nûba composée dans le tba` nawâ occupe <strong>la</strong> neuvième p<strong>la</strong>ce dansl'ordre <strong>de</strong>s nûbât du <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-KARRARIYYA, et <strong>la</strong> septièmep<strong>la</strong>ce dans celui du mâlûf.Dans le recueil d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY, <strong>la</strong> nûba nawâ commenceau début du verso <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille numéro soixante quatre, et se termine au débutdu recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille numéro soixante douze.. Elle se compose <strong>de</strong> seizemuwashshahât qui forment les mouvements suivants :1 er mouvement : il comprend six mçaddar :- Nibda' bism-r-Rabb-l-kabîr- Fiq wa-ntabih min ghaf<strong>la</strong>tik yâ ghâfil- Miskîn man bi-l-hawâ yudâdî- Qad da`ânî shawqî- La` <strong>al</strong><strong>la</strong> rahmata mâlikî mawlây- In sa'<strong>al</strong>ta `ani-s-samâ`î2 ème mouvement : il comprend six barâwil :- Nibda' bismi-l-Lâhi nantuq


298- Yâ lâyem fa-kfuf <strong>la</strong>wmak- Miskîn man bi-l-hawâ yudâdî- Yâ habîba-l-Lâhi yâ nûra-l-hudâ- Nibda' bism-l-Lâh- Hawâhu t<strong>al</strong>l bayna-t-tulûl3 ème mouvement : le draj "fiq wa-ntabih likay tutî` "4 ème mouvement : il comprend trois khafîf :- Sâra tayfu-l-<strong>la</strong>dhî 'atâ bi-l-haqq- Yâ sâqî 'isqînî bi kîsânik- In kunta `âshiqan khudh-l-khbarToutefois, nous n'avons trouvé à <strong>la</strong> phonothèque <strong>de</strong> <strong>la</strong> maison <strong>de</strong> radio<strong>de</strong> Sfax, qu'un seul enregistrement qui comporte seulement <strong>de</strong>ux btâyhî et unseul barw<strong>al</strong> :Un premier btâyhî :"Yâ Rabbî bi fadhlik".<strong>Le</strong> muwashshah qui compose ce btâyhî comporte <strong>de</strong>ux adwâr. <strong>Le</strong>premier dawr est dans le manuscrit le sixième et <strong>de</strong>rnier dawr dumuwashshah qui compose le quatrième et <strong>de</strong>rnier barw<strong>al</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba dhîl.Quant au <strong>de</strong>uxième, il est dans le manuscrit le troisième dawr dumuwashshah qui compose le <strong>de</strong>uxième mçaddar <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba çîka :Translittération du texte arabe :


299Yâ Rabbî bi fadhlikThaghra li nabiyyekShawqî li rasûlikBi-l-ward ikhtitâmî`ishqî wa gharâmîÇ<strong>al</strong>lû yâ jamâ`aMan yu`tâ-sh-shafâ`aFî madhû khilâ`aMawlây rajâyQaçdî wa munâyfa-`tînî murâdîwa-l-`ashra siâdîsakin fî fu'âdîwa zahr m`a-l-<strong>la</strong>'âlîsayydu-l-'arsâli`lâ tâha-l-mufadhdh<strong>al</strong>hîna yasjud wa yas'<strong>al</strong>wa miskun mu`ajj<strong>al</strong>'as'<strong>al</strong> lâ 'ubâlî'an t<strong>al</strong>tuf bi hâlîTraduction :Mon Dieu, aie pitié <strong>de</strong> moi, j'ai besoin <strong>de</strong> ta grâce,Gui<strong>de</strong> mes pas vers le chemin <strong>de</strong> tes hommes saints,Dieu, je te prie exauce mon cœur,Je veux rencontrer ton Prophète bien aiméIl est le roi <strong>de</strong> tes Prophètes.Prions tous pour le messager distingué,Qui d'autre que lui, est écouté par DieuIl nous défendra auprès <strong>de</strong> lui,Je me fais un p<strong>la</strong>isir d'énumérer ses qu<strong>al</strong>ités,Et <strong>de</strong> faire son éloge,Seigneur, tu es mon <strong>de</strong>rnier secours,Mon seul espoir est d'obtenir ton pardon.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :


300Un <strong>de</strong>uxième btâyhî "Yâ sâqî isqînî".Dans le manuscrit, c'est le muwashshah qui compose le quatrièmebarw<strong>al</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba çîka. La chor<strong>al</strong>e n'a chanté que le premier dawr <strong>de</strong> ce


301muwashshah qui comprend quatre adwâr. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> ce barw<strong>al</strong>est le suivant :Translittération du texte arabe :Yâ sâqî isqînî khamra rafî`a min sharâb-l-qawmBi kîsâni-l-waçli nibrâ wa narkun li-l-qiâmi wa-ç-çawmMan sharib <strong>la</strong>m yatiq çabrâ fa yâ <strong>la</strong>yta-l-wiçâl yadûmBi sharba yaqwâ bihâ hubbî zahra çafwa naqiyyaYahab lî khmrata-l-hubbi min sharâb-l-humayyaTraductionServeur <strong>de</strong> vin donne moi boireTes verres promettent <strong>la</strong> guérisonEt incite à <strong>la</strong> prière et au jeûneCelui qui boit, ne peut patienterPuissent les moments <strong>de</strong> rencontre, durerJe bois, et mon amour se renforceEt pousse comme une fleurSi pure, si éc<strong>la</strong>tanteQue Dieu m'offre le vin <strong>de</strong> l'amour,La boisson céleste.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :


302Un barw<strong>al</strong> "idhâ dhakarta-n-naqâ".Dans le manuscrit, c'est le muwashshah qui compose le troisièmebarw<strong>al</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba raml, et aussi le khafif <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba çîka.Translittération du texte arabe :Idhâ dhakarta-n-naqâ wa hâjirWa-l-jidh`a wa-l-bâna wa-l-`aqîqWa-sh-sha`ba wa-n-nabta wa-l-maghâyerWa yunbu`u-n-nakhli li-t-tarîqHâmat dumû`î mina-l-mawâtirFa kayfa `affara-l-fatîqFa yâ 'uhay<strong>la</strong>-l-himâ wa zamzamWa-l-hujra wa-l-hijra wa-l-maqâm


303Ta`tifû `an hâdha-l-mutayyamHayyun ka mayytin mina-l-gharâmTraduction :Chaque fois que je contemple cet univers,Des <strong>la</strong>rmes jaillissent <strong>de</strong> mes yeux,Ces lieux saints me ren<strong>de</strong>nt,Amoureux, vivant-mort d'amour.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :2.9.1 – Étu<strong>de</strong> an<strong>al</strong>ytique :


304<strong>Le</strong> chant <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux mouvements a duré dix minutes et huit secon<strong>de</strong>s.La structure du tba` s'est composée dans ces <strong>de</strong>ux mouvements <strong>de</strong>s ajnâssuivants :- Jins nawâ en ré2 (dûkâh). Il suit <strong>de</strong>ux parcours mélodiquesdifférents :Parcours 1 :Comme dans les mesures (7-8) du btâyhî "yâ sâqî isqînî khamra" :Parcours 2 :Comme dans les mesures (7-8) du btâyhî "yâ sâqî isqînî khamra" :Ce jins montre très bien l'aspect pentatonique que nous trouvons aussibien dans les nûbât du <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-Karrâriyya, que dans celui<strong>de</strong> <strong>la</strong> musique traditionnelle tunisienne dite mâlûf.- Jins nazmûm en do2 (râst). Il suit le parcours mélodique suivant :


305Comme dans les mesures (6-7) du btâyhî "yâ Rabbî bi fadhlik" :- Jins içba`ayn en ré2 (dûkâh). Il suit le parcours mélodique suivant :Comme dans les mesures (8-9-10) du btâyhî " yâ sâqî isqînî khamra " :suivant :- Jins içbahân en sol1 (yâkâh). Il suit le parcours mélodiqueComme dans les mesures (10-11) du btâyhî " yâ Rabbi bi fadhlik " :


306D'après ces <strong>de</strong>ux btâyhî et ce barw<strong>al</strong>, l'ambitus <strong>de</strong> l'échelle mod<strong>al</strong>e dutba` nawâ s'étend du sol1 (yâkâh), au si2 bémol (`ajam). Il comporte lesajnâs suivants :<strong>Le</strong>s <strong>de</strong>grés fondamentaux ou notes préférentielles que nous pouvonsdistinguer dans ces <strong>de</strong>ux btâyhî et ce barw<strong>al</strong> sont surtout : le ré2 (dûkâh) quiest <strong>la</strong> note fondament<strong>al</strong>e qui sert <strong>de</strong> base, d'irtikâz et <strong>de</strong> station fin<strong>al</strong>e pour letba` nawâ, le <strong>la</strong>2 (husaynî) et le <strong>la</strong>2 (husaynî), le <strong>de</strong>gré pivot dansl'acheminement mélodique du tba`.2.10 - <strong>Le</strong> tba` raml <strong>al</strong>-mâya :La nûba composée dans le tba` raml <strong>al</strong>-mâya occupe <strong>la</strong> dixième p<strong>la</strong>cedans le c<strong>la</strong>ssement <strong>de</strong>s nûbât du <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong>s majâlis d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY, et <strong>la</strong> sixième dans le <strong>répertoire</strong> du mâlûf.Dans le manuscrit, <strong>la</strong> nûba raml <strong>al</strong>-mâya commence à <strong>la</strong> moitié durecto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille numéro soixante-douze, et se termine à <strong>la</strong> fin du recto <strong>de</strong> <strong>la</strong>feuille numéro soixante-seize. Elle se compose <strong>de</strong> dix muwashshahât quiforment les mouvements suivants :1 er mouvement : il comprend trois mçaddar :


307- Nibda' bism-l-Lâh nantuq- `Ashiqtu <strong>la</strong>i<strong>la</strong> `adhîma- 'Alif-l-badiyyât2 ème mouvement : il comprend quatre barâwil :- Ç<strong>al</strong>lû `<strong>al</strong>â nûr-l-qamarayn- Yâ sâmi`an qaw<strong>la</strong>-s-saqîm- 'Idhâ dhâqa çadrî- Hum-r-rijâlu taraqqû bi-jtihâdihim3 ème mouvement : le draj "Jâ<strong>la</strong>t-l-afkâr"4 ème mouvement : il comprend <strong>de</strong>ux khafîf,- Yâ nadîm 'im<strong>la</strong>'- Yâ habîba-l-LâhInopportunément, nous ne trouvons à <strong>la</strong> phonothèque <strong>de</strong> <strong>la</strong> maison <strong>de</strong>radio <strong>de</strong> Sfax qu'un seul document sonore <strong>de</strong> six minutes et quarante-<strong>de</strong>uxsecon<strong>de</strong>s, qui comporte l'enregistrement <strong>de</strong> seulement <strong>de</strong>ux btâyhî et un seulbarw<strong>al</strong> qui sont les suivants :Un premier btâyhî "Jâ<strong>la</strong>t-l-afkâr".Ce muwashshah est dans le manuscrit, l'unique draj <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba ram<strong>la</strong>l-mâya. C'est un muwashshah qui se compose <strong>de</strong> trois adwâr, et c'estseulement le premier dawr qui est chanté par <strong>la</strong> chor<strong>al</strong>e. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong>s paroles<strong>de</strong> ce dawr est le suivant :


308Translittération du texte arabe :Jâ<strong>la</strong>t-l-afkârWa hat<strong>al</strong> dumû`i-l-'abçârMin `adhîm-sh-shawqBi ru'yati-l-anwâWa shadhâ-l-`anbar wa-l-'azhârMin sanâ'i-l-barqBi rawdhat-l-mukhtârQad hawat shamsun wa 'aqmârMan 'atâ bi-l-haqqB<strong>al</strong>lighû minnî s<strong>al</strong>âmî yâ hudâtî'Inna fî dhâka hayâtî wa na`îmu dhâtîTraduction :Mes pensées s'envolent, et <strong>de</strong> mes yeuxSurgissent <strong>de</strong>s <strong>la</strong>rmes abondantes,Ma mé<strong>la</strong>ncolie est immense,Mon désir, est d'atteindre <strong>la</strong> source <strong>de</strong> lumière,Et sentir ce parfum d'ambre et <strong>de</strong> fleurs,Qui émane <strong>de</strong> l'éc<strong>la</strong>ir qui jaillitDu saint mausolée <strong>de</strong> l'élu <strong>de</strong> Dieu,Un lieu qui englobe soleil et étoiles,Des éc<strong>la</strong>ts <strong>de</strong> vérité,Transmettez mes s<strong>al</strong>utations au Prophète,Il est ma vie, et le s<strong>al</strong>ut <strong>de</strong> mon âme.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :


309Un <strong>de</strong>uxième btâyhî "Yâ habîba-l-Lâh".Dans le manuscrit, c'est l'unique khafif <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba `irâq, et lequatrième barw<strong>al</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba nawâ. C'est un muwashshah qui se compose <strong>de</strong>quatre adwâr, et c'est seulement le premier dawr qui est chanté par <strong>la</strong>chor<strong>al</strong>e. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> ce dawr est le suivant :


310Translittération du texte arabe :Yâ habîba-l-Lâhi yâ nûra-l-hudâYâ khitâma-r-rusuli yâ badra-t-tamâm'I<strong>la</strong>yka jam`u-l-kh<strong>al</strong>qi ta'tîka ghadanTahtamî bi himâka fî yawm-z-zihâmYâ rasû<strong>la</strong>-l-haqqi 'anta thiqatî`inda naz`i-r-rûhi nantuq bi-ç-çawâbYâ nabiyya-l-Lâhi 'annis wihshatîFî su'âli-l-qabri na'tî bi-l-jawâbYâ rafî`a-sh-shâni 'ammin raw`atîYawma hashrî fî-l-qiâma li-l-hisâb`Inda sâqi-l-`arshi yasjud AhmadaAn-nidâ ya'tîhi 'is'<strong>al</strong> lâ tudhâm'irfa` ra'sak tata' yâ Muhammad'Al-wasî<strong>la</strong> minnî yâ khayra-l-'anâmTraduction :Toi bien aimé <strong>de</strong> Dieu, lumière <strong>de</strong> sagesse,Dernier <strong>de</strong> tous les messagers, notre pleine lune,À toi, les gens recouvriront, le jour du jugement,Mon esprit est <strong>de</strong> bénéficier <strong>de</strong> ta protection,À ma mort, je ne prononce que les bonnes paroles,Et te <strong>de</strong>man<strong>de</strong>rai d'être à mes cotés,Je me rendrai à toi, enseignant <strong>de</strong> <strong>la</strong> vérité,Quand, dans ma tombe, les anges viendront,Me questionner sur mes méfaits,Puis-je trouver refuge auprès <strong>de</strong> toi,<strong>Le</strong> jour du jugement <strong>de</strong>rnier,


311Toi, Ahmad Prophète <strong>de</strong> Dieu, tu te prosternerasDevant le seigneur; <strong>al</strong>ors une voix célesteT'ordonneras <strong>de</strong> lever haut <strong>la</strong> tête,Et tes vœux seront exaucés.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :Un barw<strong>al</strong> "Mu`jizât-l-hâdî".Nous n'avons pas trouvé les paroles <strong>de</strong> ce barw<strong>al</strong> dans le recueild'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY, ils sont probablement été extraites <strong>de</strong>s ash`âr(poèmes) <strong>de</strong> l'un <strong>de</strong>s murîdîn <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-KARRÂRIYYA. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong>sparoles <strong>de</strong> ce mouvement est le suivant :Translittération du texte arabe :Mu`jizâtu-l-hâdî lâ tanhaçirWa-l-ba`îr shakâ <strong>la</strong>hu ma`a-sh-shajarsabbah <strong>la</strong>hu-l-hajarwa-nshaq <strong>la</strong>hu-l-qamar


312Wa bi madhihi naftah wa naftakhir namdhî kamâ-d-durarYâ Allâh yâ qâdim bi-n-nabiy-t-tâhir <strong>al</strong>-`afwa wa-l-ghufrâna nas'<strong>al</strong>ûkYâ mâlika-l-mulûkTraduction :<strong>Le</strong>s miracles du Prophète sont infinis,<strong>Le</strong>s rochers ont prié pour lui,<strong>Le</strong>s animaux et les arbres lui ont adressé <strong>la</strong> parole,La lune a été scindée en <strong>de</strong>ux pour le s<strong>al</strong>uer,Et je ne peux que ressentir <strong>la</strong> fiertéEn faisant son éloge,Puisse le seigneur tout puissant me pardonner,Il est le seigneur <strong>de</strong> tous les rois <strong>de</strong> ce mon<strong>de</strong>.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :


3132.10.1 – Étu<strong>de</strong> an<strong>al</strong>ytique :<strong>Le</strong> chant <strong>de</strong> cette suite qui a comporté <strong>de</strong>ux btâyhî et un seul barw<strong>al</strong> aduré six minutes et quarante-<strong>de</strong>ux secon<strong>de</strong>s.La structure du tba` raml <strong>al</strong>-mâya s'est composée dans cette suite, <strong>de</strong>sgenres (ajnâs) suivants :- Jins mâya en do2 (râst). Il suit le parcours mélodique suivant :Comme dans les mesures (4-5) du btâyhî "Jâ<strong>la</strong>t-l-afkâr" :- Jins raml-mâya en ré2 (dûkâh). Il suit le parcours mélodiqueComme dans <strong>la</strong> qaf<strong>la</strong> du btâyhî "Jâ<strong>la</strong>t-l-afkâr" :


314suivant :- Jins mazmûm en fa2 (jahârkâh). Il suit le parcours mélodiqueComme dans <strong>la</strong> première phrase du btâyhî "yâ habîba-l-Lâhi" :suivant :- Jins mhayar `irâq en sol2 (nawâ). Il suit le parcours mélodiqueComme dans les mesures (10-11) du btâyhî "yâ habîba-l-Lâhi" :suivant :- Jins mhayar sîka en sol2 (nawâ). Il suit le parcours mélodiqueComme dans <strong>la</strong> première phrase du barw<strong>al</strong> "mu`jizâtu-l-hâdî" :


315D'après ces <strong>de</strong>ux btâyhî et ce barw<strong>al</strong>, l'ambitus <strong>de</strong> l'échelle mod<strong>al</strong>e dutba` raml <strong>al</strong>-mâya s'étend du do2 (râst), au ré3 (muhayyar). Il comporte lesajnâs suivants :<strong>Le</strong>s <strong>de</strong>grés fondamentaux ou notes préférentielles que nous pouvonsdistinguer dans ces <strong>de</strong>ux btâyhî et ce barw<strong>al</strong> sont surtout : le ré2 (dûkâh) quiest <strong>la</strong> note fondament<strong>al</strong>e qui sert <strong>de</strong> base, d'irtikâz et <strong>de</strong> station fin<strong>al</strong>e pour letba` raml <strong>al</strong>-mâya, et le <strong>la</strong>2 (husaynî), le <strong>de</strong>gré pivot dans l'acheminementmélodique du tba`.2.11 - <strong>Le</strong> tba ` içbahân :La nûba composée dans le tba` içbahân occupe <strong>la</strong> onzième p<strong>la</strong>ce dansl'ordre <strong>de</strong>s nûbât <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux <strong>répertoire</strong>s.Dans le recueil d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY, <strong>la</strong> nûba içbahâncommence au début verso <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille numéro soixante seize, et se termine à<strong>la</strong> moitié du recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille numéro quatre-vingt <strong>de</strong>ux. Elle se compose <strong>de</strong>neuf muwashshahât qui forment les mouvements suivants :1 er mouvement : il comprend trois mçaddar :- Abtadî bism-l-Karîm Rabbî


316- Munâ'î khamrâ- Qad bpana shawqî yâ `adhûl2 ème mouvement : il comprend quatre barâwil :- Sammayt bism-l-Mu`adhdham- Anta m<strong>al</strong>ja'î- Bism-l-muhaymen- Bism-l-Lâh nibda'3 ème mouvement : le draj "`Ashiqtu <strong>la</strong>ylâ `adhîma"4 ème mouvement : le khafif "Yâ qâçidîn nahwa-l-maqâm"pour ce tba`.M<strong>al</strong>heureusement, nous n'avons pas trouvé <strong>de</strong> documents sonores2.12 - <strong>Le</strong> tba` mazmûm :La nûba composée dans le tba` mazmûm occupe <strong>la</strong> douzième p<strong>la</strong>cedans l'ordre <strong>de</strong>s nûbât <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux <strong>répertoire</strong>s.Dans le manuscrit, <strong>la</strong> nûba mazmûm commence à <strong>la</strong> moitié du recto <strong>de</strong><strong>la</strong> feuille numéro quatre-vingt <strong>de</strong>ux, et se termine au début du verso <strong>de</strong> <strong>la</strong>feuille numéro quatre-vingt onze. Elle se compose <strong>de</strong> treize muwashshahâtqui forment les mouvements suivants :1 er mouvement : il comprend six mçaddar :- Fiq wa-ntabih min sakratik yâghâfil


317- Humu-r-rijâlu taraqqû bi-jtihâdihim- `Ashiqtu Laylâ `adhîma- `Abdik yâ Karîm- Nistaftah mina-l-'dhkâr- Bism-l-Lâh niba-l-k<strong>al</strong>âm2 ème mouvement : il comprend cinq barâwil :- Qad bâna shawqî yâ `adhûl- Isqînî l-irtifâ`î- `abdun ba`îdu-d-dâri- Yâ Rabbî yâ dayyân- Alif-l-bidâyât3 ème mouvement : le draj "idhâ dhâqa çadrî"4 ème mouvement : le khafif "fiq wa-ntabih likay tutî`"ce tba`.Inopportunément, nous n'avons pas trouvé <strong>de</strong> documents sonores pour2.13 - <strong>Le</strong> tba` mâya :La nûba composée dans le tba` mâya occupe <strong>la</strong> <strong>de</strong>rnière p<strong>la</strong>ce dansl'ordre <strong>de</strong>s nûbât <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux <strong>répertoire</strong>s.Dans le manuscrit, <strong>la</strong> nûba mazmûm commence au début du verso <strong>de</strong><strong>la</strong> feuille numéro quatre-vingt onze et se termine à <strong>la</strong> fin du recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille


318numéro quatre-vingt quatorze. Elle se compose <strong>de</strong> sept muwashshahât quiforment les mouvements suivants :1 er mouvement : il comprend quatre mçaddar :- Lisânu hâlî- Yâ ziyyâr-l-ka`ba- Yâ Rabbi f-aqb<strong>al</strong> `abadak- Iqb<strong>al</strong> k<strong>al</strong>âma-n-naçîha2 ème mouvement : le barw<strong>al</strong> "Idhâ dhâqa çqdrî"3 ème mouvement : le draj" Qad bâna shawqî yâ `adhûl"4 ème mouvement : il comprend <strong>de</strong>ux khafif :- Fiq wa-ntabih likay tutî- Aç-ç<strong>al</strong>ât `<strong>al</strong>â MuhammadDans le document sonore, nous avons trouvé une nûba différente qui secompose <strong>de</strong> quatre muwashshahât formant les <strong>de</strong>ux mouvements suivants :1 er mouvement : il comprend <strong>de</strong>ux btâyhî :- Un premier btâyhî : "Sammayt bism-l-Lâh", qui est dans lemanuscrit, le premier barw<strong>al</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba çîka.Translittération du texte arabe:Sammayt bism-l-Lâhfî-s-sirri wa-l-i`lâniFa lâ takun bi sâhî`an tâ`ati-r-RahmâniSammayt bism-l-khâ<strong>la</strong>q <strong>al</strong> wâhid-l-ahadFa râziqi-l-kh<strong>al</strong>âyaqfî mulkihi-n-farad


319Mawlânâ huwa-r-râzaqTa'amm<strong>al</strong> yâ-bna âdamÇawwar <strong>la</strong>ka-qawâyimWa ta'amm<strong>al</strong> fî-l-`awâlimli kulli fardin fardfî jismik kayfa kânwa-s-sam`a wa-l-`aynânwa-ndhur yâ dhâ-l-insânTranscription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :- Un <strong>de</strong>uxième btâyhî : "Fiq wa-ntabih yâ nâyem" qui est dans lemanuscrit, le troisième dawr du premier barw<strong>al</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba çîka.Translittération du texte arabe:Fiq wa-ntabih yâ nâyemFî `ilm-r-Rabb ed-dâyemWa ta'amm<strong>al</strong> fî-l-`awâlimFî `ilm-r-Rabb ed-dâyemmin ghaf<strong>la</strong>ti-z-zamânmin a`dhami-l-burhânwa-ndhur yâ dhâ-l-insânmin a`dham-l-burhân


320Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :2 ème mouvement : il comprend <strong>de</strong>ux barw<strong>al</strong> :- Un premier barw<strong>al</strong> : "In kunta `âshiqan", qui est dans lemanuscrit, le premier barw<strong>al</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba çîka.Translittération du texte arabe:In kunta `âshiqan lâ tabrahWa-lzim-ç-çabr wa jud wa-smahMurziq li-t-tayr idhâ nawwahWa tâlian sûrat qad af<strong>la</strong>h`an bâbi mahbûbikbi wâbil edmû`ikdhâkiran li shujûnikli yaçfâ mashrûbik


321Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :- Un <strong>de</strong>uxième barw<strong>al</strong> : "Isqînî yâ sâqî", qui est dans le manuscrit,le quatrième barw<strong>al</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba raml.


322Transccription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :Tableau génér<strong>al</strong> du <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong> selon le manuscritMçaddar Btâyhî Dukhûl Barw<strong>al</strong> Draj khafîfbarâwildhîl 1 - - 4 1 2`irâq 4 - - 5 1 1Çîka 4 1 - 5 1 1Hsîn 6 - - 4 1 2Içba`ayn 4 - - 8 1 2Raçd 2 - - 3 1 1Raçd-dhîl 4 - - 4 1 2Raml 3 - - 4 1 1Nawâ 6 - - 6 1 3Raml mâya 3 - - 4 1 2Içbahân 3 - - 4 1 1


323Mâya 4 - - 1 1 2Tableau génér<strong>al</strong> du <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong> selon le document sonoreMçaddar Btâyhî Dukhûl Barw<strong>al</strong> Draj khafîfbarâwildhîl 1 6 3 4 - -`irâq - 1 1 3 - -Çîka - 4 4 1 - 1Hsîn - 1 4 5 - -Içba`ayn - - - - - -Raçd - - - - - -Raçd-dhîl - - - - - -Raml - - - - - -Nawâ - 2 - 1 - -Raml mâya - 2 - 1 - -Içbahân - - - - - -Mâya - 2 - 2 - -3 - <strong>Le</strong>s textes poétiques<strong>Le</strong> <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-Karrâriyya se compose <strong>de</strong> cinquante sixmuwashshah réunis dans un recueil. Ces muwashshahât, (pluriel <strong>de</strong>


324muwashshah) forment les treize nûbât connues sous le nom <strong>de</strong> nûbât sîdîAbû-l-Hassan.Au cours <strong>de</strong> notre travail sur le terrain, nous avons eu <strong>la</strong> chance <strong>de</strong>trouver le manuscrit qui comporte les oeuvres du shaykh <strong>al</strong>-KARRÂY chezmonsieur Mabrouk BELHÂJ, ancien a<strong>de</strong>pte <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa.Compte tenu <strong>de</strong> l'importance <strong>de</strong> ce manuscrit que nous avons entre lesmains, nous avons jugé indispensable <strong>de</strong> présenter ce précieux document quiest le recueil (dîwân) d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY.<strong>Le</strong> manuscrit se compose <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux cent vingt quatre feuilles dans unétat norm<strong>al</strong>. <strong>Le</strong>s feuilles ont vingt <strong>de</strong>ux centimètres et <strong>de</strong>mi <strong>de</strong> longueur etdix neuf centimètres <strong>de</strong> <strong>la</strong>rgeur. Chaque feuille comprend moyennementdouze lignes. L'écriture est du genre Maghrébin, elle est re<strong>la</strong>tivement lisible.Il est à remarquer que ce manuscrit n'est pas daté, mais son état génér<strong>al</strong> nous<strong>la</strong>isse croire qu'il est écrit à <strong>la</strong> fin du dix-neuvième siècle. Nous trouvonsdans les quatre premières pages une table <strong>de</strong>s matières qui indique lecommencement <strong>de</strong> chaque tâ<strong>la</strong>` (l'incipit du poème) et le numéro <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuilleoù il se trouve. La numérotation est en chiffres romains, elle est en haut et àgauche <strong>de</strong> <strong>la</strong> page.


325Nous trouvons dans le manuscrit les treize nûbât dans l'ordre qui suit :1/ <strong>la</strong> nûba dhîl2/ <strong>la</strong> nûba `irâq3/ <strong>la</strong> nûba çîka4/ <strong>la</strong> nûba hsîn5/ <strong>la</strong> nûba içba`ayn6/ <strong>la</strong> nûba raçd7/ <strong>la</strong> nûba raçd-dhîl8/ <strong>la</strong> nûba raml9/ <strong>la</strong> nûba nawâ10/ <strong>la</strong> nûba raml <strong>al</strong>mâya11/<strong>la</strong> nûba içbahân12/ <strong>la</strong> nûba mazmûm13/ <strong>la</strong> nûba mâya<strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o *du recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 10du recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 21du verso <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 32du recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 43du recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 54du recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 57du verso <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 62du verso <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 64du recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 72du verso <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 76du recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 82au verso <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 91au recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 10au recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 21au verso <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 32au recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 43au recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 54au recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 57au verso <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 62au verso <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 64au recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 72au recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 76au recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 82au verso <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 90au recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 94Outre les treize nûbât, le manuscrit comporte ég<strong>al</strong>ement <strong>de</strong>s poèmesdont l'attribution au shaykh Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY est confirmée par <strong>de</strong>sintitulés du genre :


326- "Parmi les paroles <strong>de</strong> sîdî Abû-l-Hassan, que Dieu lui accor<strong>de</strong> sagrâce, ce qui suit".- "Il a ég<strong>al</strong>ement dit".- "Cette poésie illustre ses paroles, que Dieu l'accueille par samiséricor<strong>de</strong>".Au recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille 106, se termine tout ce qui est attribué au shaykh<strong>al</strong>-KARRÂY comme paroles avec <strong>la</strong> mention suivante :" Ainsi se termine avec l'aimable assistance <strong>de</strong> Dieu "Au verso <strong>de</strong> cette même feuille, débute un autre chapitre entièrementréservé aux ashgâl (ou shgullât pluriel <strong>de</strong> shgul).Dans <strong>la</strong> <strong>de</strong>rnière partie <strong>de</strong> l'ouvrage, nous retrouvons encore une fois<strong>de</strong>s muwashshahât attribués au shaykh, précédés par <strong>de</strong>s intitulés du genre :-"Voici ce qu'il a encore dit"- "Ces paroles sont aussi à lui, que Dieu le gracie".Ces muwashshahât sont suivis par d'autres mais qui sont attribués àd'autres auteurs dont les noms ne sont pas sign<strong>al</strong>és. Ils sont précédés par <strong>de</strong>courtes phrases en guise d'introductions telle que :- "Ces paroles sont à quelqu'un d'autre".<strong>Le</strong> recueil est enfin clôturé par un muwashshah glorifiant les oeuvresdu shaykh <strong>al</strong>-KARRÂY en faisant l'éloge <strong>de</strong> sa sagesse et énumérant sesqu<strong>al</strong>ités spirituelles dont voici quelques passages :


327Translittération du texte arabe :Yâ shaykhinâ-l-barrânîAhdharlî fî-dh-dhîq mâ tinsânîBism-l-Ilâh ibdaytWa `<strong>al</strong>â hâdî-l-muçtafâ ç<strong>al</strong><strong>la</strong>ytMawlâ-haram wi-l-baytYeshfa` fînâ yawm naqif `iryânîTraductionJe t'appelle toi shaykh qui viens <strong>de</strong> si loin,Sois à mes côtés, dans les moments difficiles,Tu ne m'oublieras point,Je cite le nom <strong>de</strong> Dieu,Et je prie pour son Prophète adoré,Bâtisseur <strong>de</strong> <strong>la</strong> sainte mosquée et <strong>de</strong> <strong>la</strong> maison sacrée,Puis-je grâce à lui être libéré,<strong>Le</strong> jour du jugement <strong>de</strong>rnier où l'on ne peut se couvrir.Enfin, nous sign<strong>al</strong>ons que les poètes s'expriment dans un registresoutenu mais parfois on note l'emploi du di<strong>al</strong>ecte tunisien et <strong>de</strong> l'arabelittéraire, pour que les textes soient compréhensibles. Ce mé<strong>la</strong>nge est présentdans les textes du mâlûf.


3283.1 - <strong>Le</strong>s formesComme nous l'avons vu, les poèmes <strong>de</strong>s nûbât <strong>de</strong> ce <strong>répertoire</strong> sontcomposés sous forme <strong>de</strong> muwashshahât et <strong>de</strong> azjâl (sing. zaj<strong>al</strong>).3.11 - <strong>Le</strong> muwashshah :<strong>Le</strong> terme muwashshah vient du verbe washshaha : embellir. C'est unenouvelle forme poétique, apparue en And<strong>al</strong>ousie au neuvième siècle, àl'époque <strong>de</strong> <strong>la</strong> dynastie marwanite (164). <strong>Le</strong> muwashshah « est une formepoétique nouvelle qui a su briser le cadre rigi<strong>de</strong> <strong>de</strong> l'ancienne qaçîda enpassant outre <strong>la</strong> structure <strong>de</strong> <strong>la</strong> métrique c<strong>la</strong>ssique et en adoptant, pour sarythmique et sa rime, <strong>de</strong>s combinaisons et <strong>de</strong>s variétés nouvelles » (165). Il sedivise en stances dites aqfâl (sing. qufl) et abyât (sing. bayt : vers) :I/ <strong>Le</strong>s aqfâl : Ce sont <strong>de</strong>s stances ayant le même nombred'hémistiches, dits aghçân (sing. ghuçn : branche), ayant <strong>la</strong> même métrique et<strong>la</strong> même disposition <strong>de</strong>s rimes. On distingue trois sortes <strong>de</strong> aqfâl :- <strong>Le</strong> mat<strong>la</strong>` (début, prélu<strong>de</strong>) : Sa présence n'est pas indispensable, unmuwashshah est dit tâm (parfait, complet) lorsqu'il commence par un mat<strong>la</strong>`;il est aqra` (incomplet), lorsqu'il est démuni d'un mat<strong>la</strong>`.- <strong>Le</strong>s marâkiz (sing. markaz : station), Ce sont les aqfâl internes dumuwashshah qu'on trouve à <strong>la</strong> fin <strong>de</strong> chaque dawr, et dont le nombre estvariable.(164) KARÎM (Mustafa `Awadh <strong>al</strong>-), "fan <strong>al</strong>-tawshîh", Liban, Dâr <strong>al</strong>-thaqâfa Bayrut, 2ème édition,1974, p.17.


329- La kharja (strophe fin<strong>al</strong>e, sortie), C'est le <strong>de</strong>nier qufl dumuwashshah, elle est indispensable pour compléter <strong>la</strong> forme du muwashshah.La kharja est génér<strong>al</strong>ement en <strong>la</strong>ngue popu<strong>la</strong>ire.II/ <strong>Le</strong>s abyât : <strong>Le</strong> nombre <strong>de</strong>s abyât dépend <strong>de</strong> celui <strong>de</strong>s aqfâl (sanscompter le mat<strong>la</strong>`). <strong>Le</strong>s différentes abyât du muwashshah doivent avoir <strong>la</strong>même métrique, et le même nombre <strong>de</strong> asmât (sing. simt : hémistiche). Avecle qufl, le bayt complète le dawr. (Voir schéma à <strong>la</strong> page 332)Exemple d'un muwashshah "yâ man sabâ `aqlî" <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba dhîl(166) B______________B______________B______________D______________D______________F______________F______________F______________D______________D______________H______________H______________H______________D______________D______________J______________J______________J______________A______________A______________A______________C______________C______________E______________E______________E______________C______________C______________G______________G______________G______________C______________C______________I_______________I_______________I_______________(165) GUETTAT, op.cit., p.126.(166) <strong>Le</strong>s lettres en majuscule indiquent les rimes <strong>de</strong>s vers, elles sont p<strong>la</strong>cées à gauche parce que <strong>la</strong><strong>la</strong>ngue arabe s'écrit <strong>de</strong> droite à gauche.


330D______________D______________L______________L______________L______________D______________D______________N______________N______________N______________D______________D______________C______________C______________K______________K______________K______________C______________C______________M______________M______________M______________C______________C______________Exemple d'un muwashshah "qad bâna shawqî" <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba `irâqB_______________B_______________D______________D______________D______________B______________B______________F______________F______________F______________B______________B______________H______________H______________H______________B______________B______________A______________A______________C______________C______________C______________A______________A______________E______________E______________E______________A______________A______________G______________G______________G______________A______________A______________


331J_______________J_______________J_______________B______________B______________I______________I______________I______________A______________A______________L______________L______________L______________B______________B______________N______________N______________N______________K______________K______________K______________A______________A______________M______________M______________M______________B______________B______________P______________P______________P______________B______________B______________A______________A______________O______________O______________O______________A______________A______________3.12 - <strong>Le</strong> zaj<strong>al</strong><strong>Le</strong> terme zaj<strong>al</strong> vient du verbe zaji<strong>la</strong> qui veut dire chanter. C'est uneforme <strong>de</strong> poésie popu<strong>la</strong>ire, il a les mêmes composants du muwashshah, maisil se distingue par l'emploi <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>la</strong>ngue di<strong>al</strong>ect<strong>al</strong>e. <strong>Le</strong> zaj<strong>al</strong> qui mêle les <strong>de</strong>ux<strong>la</strong>ngues, di<strong>al</strong>ect<strong>al</strong>e et c<strong>la</strong>ssique, est appelé muznim ou muzannam, artificiel; il


332est méprisé par les poètes (167). Cette forme poétique existe aussi bien dans le<strong>répertoire</strong> du mâlûf que dans celui <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique <strong>de</strong> <strong>confrérie</strong> (168).<strong>Le</strong>s formes poétiques qui reposent sur le principe du zaj<strong>al</strong> dans le<strong>répertoire</strong> <strong>de</strong>s majâlis <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-Karrâriyya sont nombreuses, et parfoiscomplexes. Toutefois, nous trouvons quelques formes qui sont plusfréquentes que d'autres. En voici un exemple d'une <strong>de</strong>s formes les plusfréquentes.A______________B______________A______________C______________A______________D______________A______________A______________A_______________B_______________B_______________C_______________C_______________D_______________D_______________A_______________3.2 - <strong>Le</strong>s thèmes<strong>Le</strong>s sujets traités dans le recueil d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY peuventêtre c<strong>la</strong>ssés en quatre thèmes:Exemple :1/ - L'idolâtrie et <strong>la</strong> soumission à <strong>la</strong> parole divine :(167) GUETTAT, op.cit, p.133.(168) Voir CHRISTIAN (poché), La musique arabo-and<strong>al</strong>ouse, France, Actes sud, 1ère édition,1995, pp. 57-68.


333Translittération du texte arabeAs'<strong>al</strong>u Rabbî ta`âlâAn ybdi<strong>la</strong>-l-`usra bi yusryWa-hmidhu `an kulli hâlâWa-tlubhu fî kashfi dharry (169)TraductionPuis-je solliciter Dieu,Pour qu'il m'épargne les moments difficiles,Et qu'il exauce mes vœux,Je me prosterne <strong>de</strong>vant lui et le remercie.Translittération du texte arabeFa yâ Ilâhî irhamni wa-shm<strong>al</strong>Jam`'anâ wa-hfadh lisânyWa kh<strong>al</strong>liçnâ min kulli wâhilWa min shurûr ahli-z-zamânyTraductionJe le prie pour que ma vie se métamorphose en état <strong>de</strong> bonheur,Et que mes tentations soient déjouées,Dieu tout puissant, soit miséricordieux avec moi,Et fais qu'on soit tous unis,Protège moi <strong>de</strong>s médisances,Et <strong>de</strong> <strong>la</strong> m<strong>al</strong>faisance <strong>de</strong>s gens.


334Exemple :2/ - L'éloge du Prophète :Translittération du texte arabeYâ rasû<strong>la</strong>-l-Lâhi anta thiqatî`inda naz`i-r-rûhi nantiq b-j-jawâbYâ habîba-l-Lâhi annis wahshatîFî su'âli-l-qabri na'tî b-l-jawâbYâ rafî`a-sh-shâni ammin raw`atîYawma hashrî fi-l-qiâma li-l-hisâbYâ rashîqa-l-qaddi 'ukshuf dharr'anâMâ r'âka-dh-dharru illâ wa sharidYâ bahiyya-l-husni fadh<strong>la</strong>k `imm'anâFî qulûb-l-hashri anta-l-mu`tamadYâ wafiyya-l-`ahdi farrij karb'anâAnta wa-l-Lâhi shafî`an <strong>la</strong> taridTraductionA toi Prophète je me confie,Toi, élu d'Al<strong>la</strong>h, tu es mon défenseur,<strong>Le</strong> jour du jugement <strong>de</strong>rnier,Quand mon âme aura <strong>de</strong>s comptes à rendre,Quand dans ma tombe, on me jugera,Toi qui es aux cieux, épargne moi tout châtiment,(169) KARRÄY (Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-), Recueil Abû-l-Hassan <strong>al</strong>- KARRÄY, manuscrit sans date et sanssignature, feuille sans numéro, (les premiers vers <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba dhîl)


335Toi qui es si puissant, repousse le diable,<strong>Le</strong> diable qui en te voyant ne peut que s'enfuir,Toi qui est si beau, et si généreux,Nous comptons tous sur toi,Pour <strong>al</strong>léger nos douleurs et nos peines,Tu es notre <strong>de</strong>rnier recours.3/ - La <strong>de</strong>scription <strong>de</strong> <strong>la</strong> ka`ba (lieu saint <strong>de</strong>s musulmans). Cesmuwashshahât nous rappellent ceux <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique profane qui évoquent lethème <strong>de</strong> l'amour.Exemple :Translittération du texte arabe`Ashiqtu <strong>la</strong>ylâ `adhîmaHattâ ba<strong>la</strong>ghtu muqîmâLi liqâ' m<strong>al</strong>îha s<strong>al</strong>îmâwa 'anâ çaghîr <strong>la</strong>m nukhâtib`<strong>al</strong>â hubbihâ wa-l-q<strong>al</strong>bu târibmin kulli `aybin mujânibLahâ jamâlun farîdunFî ruknihâ-l-hajaru-s-sa`îduZuyyâruhâ qad yazîduwa hijruhâ durrun munadhdhamli bâbihâ yurqâ bi sul<strong>la</strong>mshawqan <strong>la</strong>hâ wa li bîri zamzamTraductionJ'ai vénéré ma <strong>Le</strong>i<strong>la</strong> bien aimée,Depuis mon jeune age,Jusqu'au jour où je me suis approché d'elle,<strong>Le</strong> cœur joyeux, je découvre une beauté.*** ***D'une beauté unique,


336Ornée d'or si bien <strong>al</strong>igné,Tu n'y accè<strong>de</strong>s que moyennant une échelle,Plus tu <strong>la</strong> vois, plus tu l'aimes.Exemple :4/ - Description du vin céleste, dont voici quelques passagesTranslittération du texte arabeMunâ'î khamraM<strong>al</strong>îha tu`râDurra farîdaLaysat ba`îdaFa hia mufîdamina-r-R'ûf-l-J<strong>al</strong>îl`ani-sh-shibhi wa-l-mathîlsharâbuhâ ka-z-zulâlli musta`idd-l-wiçâlfa yâ <strong>la</strong>hâ min jamâlFîhâ-l-masarraM<strong>al</strong>îha tu`rawa shifâ'un li-l-`<strong>al</strong>îl`ani-sh-shibhi wa-l-mathîlTraduction :Je désire le vin céleste,Une beauté qui n'a pas <strong>de</strong> semb<strong>la</strong>ble,Précieuse et unique, pure et limpi<strong>de</strong>,Elle n'est pas loin <strong>de</strong> celui qui tient à sa rencontre,Elle n'a que <strong>de</strong>s vertus,Oh, quelle beauté !Elle apporte <strong>la</strong> joie et <strong>la</strong> sérénité,Elle guérit <strong>de</strong> tous les maux,Une beauté qui n'a pas <strong>de</strong> semb<strong>la</strong>ble.


337Outre ces quatre sujets <strong>de</strong> prédilection, le shaykh <strong>al</strong>-KARRÂY a traitédans ses muwashshahât d'autres thèmes tels que <strong>la</strong> sécheresse qui servit àSfax et dont ont souffert les habitants. Ces muwashshahât ont été composéspour les cérémonies <strong>de</strong> ta<strong>la</strong>b <strong>al</strong>-ghayth (sorties collectives ayant pour but <strong>de</strong>solliciter <strong>la</strong> pluie au bon Dieu). Pendant <strong>la</strong> pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> sécheresse, les a<strong>de</strong>ptes<strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa sortaient <strong>de</strong> <strong>la</strong> zâwiya pour <strong>al</strong>ler aux champs, faire <strong>la</strong> prière(ç<strong>al</strong>ât <strong>al</strong>-istisqâ'), et chanter <strong>de</strong>s muwashshahât.Exemple :Translittération du texte arabeBism-l-Muhaymen abtadî hâdhâ-n-nidhâmLa`<strong>al</strong><strong>la</strong> yarhamnâBi haqqi tâha-l-muçtafâ badru-t-tamâmYâ Mâlikî ghithnâ`atshit 'âlâfun kibârun wa çighârYâ Khâliqî fa-rhamBi wâbilin yuhyî-l-arâdhî wa-th-thimârWa-l-wahshu thumma-l-qimamWa-l-wardu wa-n-nisru wa <strong>al</strong>wân-n-nawwârFî dhuhûr-l-amkamB-l-multazim wa-z-zâriât wa-l-maqâmlâ tu'âkhidhnâBi haqqi tâha-l-muçtafâ badru-t-tamâmYâ Mâlikî ghithnâ


338Traduction :Je débute mon poème,Au nom du bon Dieu tout puissant,Et je l'implore pour qu'il m'accor<strong>de</strong> son pardon.Par ton Prophète, notre c<strong>la</strong>ir <strong>de</strong> lune, ton élu,Oh mon Dieu, nous te <strong>de</strong>mandons <strong>de</strong> <strong>la</strong> pluie,Créateur <strong>de</strong> cet univers, aie pitié <strong>de</strong> nous,La nation est assoiffée, grands et petits,Atten<strong>de</strong>nt ton secours,Une pluie bénéfique, abreuvera <strong>la</strong> terre,Redonnera vie à tes créatures,Et nos champs se couvriront <strong>de</strong> roses,Et <strong>de</strong> fleurs aux couleurs magnifiques.Mon Dieu nous te supplions par tes lieux saints,Accor<strong>de</strong>s nous ton pardon,Par ton Prophète, notre c<strong>la</strong>ir <strong>de</strong> lune, ton élu,Ô mon Dieu, arrose nous d'une pluie s<strong>al</strong>utaire,Au nom du tout puissant je débute mon poème,Pour qu'il soit clément,Pour qu'il nous vienne en ai<strong>de</strong>.Nous trouvons aussi dans ce recueil <strong>de</strong>s muwashshahât composés parles disciples du shaykh <strong>al</strong>-KARRÂY traitant presque les mêmes thèmes touten introduisant <strong>de</strong>s vers qui font l'éloge du shaykh Abû-l-Hassan et <strong>de</strong> ses


339ascendants comme le shaykh `Alî <strong>al</strong>-KARRÂY, le doyen <strong>de</strong> <strong>la</strong> famille <strong>al</strong>-KARRÂY à Sfax, (originaire <strong>de</strong> l'Orient is<strong>la</strong>mique qu'il a quitté lorsqu'il aaccompagné son père, tout petit pour s'inst<strong>al</strong>ler à Sfax au début du IX ièmesiècle <strong>de</strong> l'Hégire soit au milieu du XV ème siècle A J.C).Voici un extraits <strong>de</strong> ce qui a été dit par un <strong>de</strong>s disciples et membres <strong>de</strong><strong>la</strong> tarîqa pour énumérer les qu<strong>al</strong>ités <strong>de</strong> son shaykh :Translittération du texte arabeAl-`âlimu-l-`<strong>al</strong>lâmaShaykhî taqî wa wâ`idh`An wirdihi muhâfidhFî-l-`ilmi bahrun fâyidhAbû-l-Hassan KARRÂY<strong>al</strong>fâdhuhu durarwa-dh-dhikri <strong>la</strong>m yaftir'undhur wa-stabshirTraduction :<strong>Le</strong> savant à <strong>la</strong> tête pleine <strong>de</strong> savoir,C'est Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY,Notre shaykh pieux maîtrisant <strong>la</strong> théologie,C'est un conseiller dont les paroles v<strong>al</strong>ent <strong>de</strong> l'or,C'est un océan <strong>de</strong> savoir,Qui t'illumine au premier regard.


Quatrième Chapitre<strong>Le</strong>s instruments <strong>de</strong> musique


334Il est difficile <strong>de</strong> déterminer l’époque au cours <strong>de</strong> <strong>la</strong>quelle les<strong>confrérie</strong>s ont entrepris d’introduire dans leurs processions quelquesinstruments <strong>de</strong> musique. Mais il est fort probable que cette mutation dansl’exécution <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique soufi au sein même <strong>de</strong>s zawâyâ n’a pu se produireque tardivement, au cours du XIX ème siècle et d’une manière progressive.Une tradition or<strong>al</strong>e affirme que c’est <strong>la</strong> tarîqa Karrâriyya qui étaitpionnière dans ce phénomène nouveau, étant <strong>la</strong> première <strong>confrérie</strong> à avoirl’idée audacieuse d’introduire <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique dans <strong>la</strong> tradition soufie <strong>de</strong> <strong>la</strong>région (169).Ce qui est certain, est que cette innovation a été d’une importancecapit<strong>al</strong>e pour <strong>la</strong> propagation <strong>de</strong> cette musique dans les milieux profanes, etce<strong>la</strong> n’a pas été sans é<strong>la</strong>rgir le fossé qui sépare les <strong>confrérie</strong>s <strong>de</strong>s autorités<strong>religieuse</strong>s orthodoxes toujours hostile à <strong>la</strong> musique, notamment à son usagedans les manifestations à caractère religieux.Il est vrai que <strong>la</strong> musique <strong>de</strong>s <strong>confrérie</strong>s <strong>religieuse</strong>s n’a pas cesséd’évoluer <strong>de</strong>puis <strong>la</strong> création du mouvement mystique en Tunisie, en subissant<strong>de</strong>s diverses influences au cours <strong>de</strong>s siècles. Cependant, il est incontestablequ’elle n’a pu prendre sa forme définitive en tant qu’art <strong>music<strong>al</strong></strong> auxcaractéristiques bien définies qu’après l’introduction <strong>de</strong>s instrumentsmusicaux <strong>de</strong> percussion, et surtout l’unique instrument mélodique, <strong>la</strong> zukra,instrument à sonorité très puissante, empruntée à <strong>la</strong> musique profane <strong>de</strong>s(169) Cf. « <strong>la</strong> légen<strong>de</strong> » au troisième chapitre <strong>de</strong> <strong>la</strong> première partie <strong>de</strong> ce travail p. 90.


335milieux ruraux, et parfaitement adaptée aux formes mélodiques <strong>de</strong>s nûbât.Cet instrument n’a pas tardé <strong>de</strong>puis à faire irruption dans presque toutes leszawâyâ <strong>de</strong>s <strong>confrérie</strong>s <strong>religieuse</strong>s en Tunisie pour <strong>de</strong>venir essentiel etincontournable pour l’exécution <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique soufi. Il est même <strong>de</strong>venu unsymbole, et le pilier d’un orchestre constitué d’instruments <strong>de</strong> percussion, enl’occurrence <strong>de</strong>s bendîr et <strong>de</strong>s darbûka. Ce mini orchestre a sans aucun doutedonné du charme à <strong>la</strong> musique soufi et plus d’impact sur l’auditoire.Cette innovation dans l’exécution d’un art <strong>music<strong>al</strong></strong> à caractèreessentiellement religieux, a été inévitable, compte tenu <strong>de</strong> l’importance durôle qu’a <strong>la</strong> musique dans les pratiques <strong>de</strong>s a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong>, unemusique dont <strong>la</strong> force a toujours été mise au service <strong>de</strong> <strong>la</strong> foi ; et qui, commel’affirme REINAHARD, « doit ai<strong>de</strong>r les hommes à se plonger dans un étatd'âme surhumain, surnaturel et divin. Ce<strong>la</strong> peut signifier [ ] renonciation,extase jusqu'à l'oubli <strong>de</strong> soi et dépassement <strong>de</strong> tout élément charnel » (170) ; etil n’y a pas plus efficace que <strong>de</strong>s instruments rythmiques à vibrations et <strong>de</strong>sinstruments mélodiques à sonorité forte et aigu pour parvenir à ces fins etgagner un <strong>la</strong>rge auditoire sensible à tout phénomène nouveau. <strong>Le</strong> succès qu’aconnu l’interprétation <strong>de</strong>s chants avec un accompagnement instrument<strong>al</strong> dans<strong>la</strong> zâwiya <strong>de</strong> sîdî Abû-l-Hassan <strong>al</strong> KARRÂY a été tel, qu’on a dû constituer audébut du XX èmesiècle, un autre orchestre avec l’harmonium commeinstrument princip<strong>al</strong>.(170) REINHARD (Ursu<strong>la</strong> et Kurt), Musique <strong>de</strong> Turquie, op. cit., p.165.


3361 – L'orchestre <strong>de</strong> <strong>la</strong> hadhraDans le domaine mystique, le terme hadhra, rappelons le, désigne uneséance sous l'égi<strong>de</strong> d'un chef spirituel, où se réunissent <strong>de</strong>s a<strong>de</strong>ptesappartenant à une <strong>confrérie</strong> dans le but d'accomplir <strong>de</strong>s pratiques parlesquelles ils parviennent à un état <strong>de</strong> grâce. Cependant, avec <strong>la</strong> disparition<strong>de</strong>s <strong>confrérie</strong>s, ce terme a pris d'autres significations étroitement liées à <strong>la</strong>musique <strong>de</strong>s <strong>confrérie</strong>s. Il désigne à <strong>la</strong> fois l'ensemble du <strong>répertoire</strong> <strong>music<strong>al</strong></strong><strong>de</strong>s <strong>confrérie</strong>s dominantes <strong>de</strong> <strong>la</strong> région <strong>de</strong> Sfax, <strong>la</strong> formation <strong>music<strong>al</strong></strong>e quiassure l'exécution, et le concert lui-même. Ainsi, le terme a subi unglissement <strong>de</strong> sens en passant d'un contexte religieux à un contexte profane.En effet, cette musique a pu prendre p<strong>la</strong>ce dans le système cérémoniel <strong>de</strong> <strong>la</strong>vie soci<strong>al</strong>e <strong>de</strong>s sfaxiens. Elle est jusqu'à nos jours très sollicitée pour animertoutes sortes d'événements.<strong>Le</strong> maître incontesté <strong>de</strong> cette "nouvelle hadhra" est sans doute leshaykh Bûdayya que "les sfaxiens considèrent comme <strong>la</strong> personnification <strong>de</strong><strong>la</strong> hadhra dans <strong>la</strong> région; certains pensent même que ce <strong>répertoire</strong> luiappartient et appellent ce genre <strong>de</strong> musique (hadhrit Bûdayya), <strong>la</strong> hadhra <strong>de</strong>Bûdayya" (171). C’est lui qui a introduit au début du siècle <strong>de</strong>rnier à <strong>la</strong> zâwiya<strong>de</strong> sîdi Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-Karrây les instruments <strong>de</strong> musique pour interpréterpour <strong>la</strong> première fois le <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-Karrâriyya à l’harmoniumet à <strong>la</strong> zukra.


337La hadhra<strong>de</strong> Muhammad BÛDAYYA (172)La hadhra, l'orchestre, se compose génér<strong>al</strong>ement <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux chanteurs(qawwâ<strong>la</strong>) et <strong>de</strong> six instrumentistes solistes, qui jouent <strong>de</strong>s instrumentssuivants :1.1 – <strong>la</strong> zukraC'est un instrument à vent (type hautbois), muni d'une anche double enroseau (çayâh). La zukra est constituée d'un tube en bois d'olivier, d'uneforme cylindrique <strong>de</strong> trente à quarante centimètres <strong>de</strong> longueur; terminé parun pavillon campanulé <strong>de</strong> huit à dix centimètres <strong>de</strong> diamètre. La partiesupérieure comporte une ron<strong>de</strong>lle en p<strong>la</strong>stique, en os, en ivoire ou en cuivre,qui sert d'appui pour les lèvres pendant le jeu, car l'anche double est(171) SIALA (Mourad), op. cit., p. 303(172) L'orchestre <strong>de</strong> hadhra <strong>de</strong> Muhammad BÛDAYYA vers les années cinquante du vingtièmesiècle, collection privée.


338entièrement enfoncée dans <strong>la</strong> bouche qui forme ainsi une sorte <strong>de</strong> réservoird'air, permettant à l'instrumentiste (le zakkâr) un jeu plus lié.<strong>Le</strong> corps <strong>de</strong> l'instrument est percé <strong>de</strong> sept trous sur <strong>la</strong> surfaceantérieure, espacés d'environ <strong>de</strong>ux centimètres. Un huitième trou, percé au<strong>de</strong>ssous,est p<strong>la</strong>cé au milieu <strong>de</strong> l'instrument. <strong>Le</strong> zakkâr se sert <strong>de</strong>s quatredoigts <strong>de</strong> <strong>la</strong> main gauche pour boucher les quatre premiers trous <strong>de</strong> <strong>la</strong> partiesupérieure; et <strong>de</strong> l'in<strong>de</strong>x, du médium et <strong>de</strong> l'annu<strong>la</strong>ire <strong>de</strong> <strong>la</strong> main droite pourboucher les trois autres trous. Quant au huitième trou, il est bouché par lepouce <strong>de</strong> <strong>la</strong> main gauche. <strong>Le</strong> pouce <strong>de</strong> <strong>la</strong> main droite sert <strong>de</strong> support pourmaintenir l'instrument et faciliter le mouvement <strong>de</strong>s autres doigts.A <strong>la</strong> famille <strong>de</strong> <strong>la</strong> zukra se rattachent <strong>de</strong> nombreux instrumentstraditionnels et popu<strong>la</strong>ires qu'on trouve partout dans le mon<strong>de</strong>. Elle estconnue sous le nom <strong>de</strong> ghayta dans le sud <strong>de</strong> <strong>la</strong> Tunisie, en Libye, en Algérieet au Maroc, Zamr en Syrie, et zurna en Turquie.D'après Sa<strong>la</strong>h <strong>al</strong>-Mehdî, (173) <strong>la</strong> zukra fut introduite en Tunisie auXVI ème siècle par les turcs. Elle était employée dans <strong>la</strong> musique popu<strong>la</strong>ire,puis adoptée par certaines turuq çûfiyya telles que <strong>la</strong>`Issawiyya et <strong>la</strong>Àwâmriyya. La zukra se caractérise par une sonorité puissante et criar<strong>de</strong> quiexplique son rôle dans le déroulement <strong>de</strong> toutes les fêtes popu<strong>la</strong>ires,notamment bédouine qui se déroulent génér<strong>al</strong>ement en plein air.(173) MAHDI (Sa<strong>la</strong>h <strong>al</strong>-), <strong>al</strong> mûsîqâ <strong>al</strong>-`arabiyya bayna <strong>al</strong>-taqlîd wa-t-tatawwur, in <strong>al</strong>-Hayât <strong>al</strong>thaqâfiyya,p.42.


339La fonction <strong>de</strong> <strong>la</strong> zukra, seul instrument mélodique <strong>de</strong> l'orchestre, selimite <strong>la</strong> plus part du temps à une exécution instrument<strong>al</strong>e <strong>de</strong> <strong>la</strong> phrasemélodique chantée par les qawwâlâ ou <strong>de</strong> jouer une introduction mélodiqueimprovisée (istikhbâr) qui a pour but <strong>de</strong> mettre en évi<strong>de</strong>nce lescaractéristiques princip<strong>al</strong>es du tba` afin <strong>de</strong> p<strong>la</strong>cer les musiciens et l'auditoiredans l'ambiance <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba que l'orchestre va jouer, ou encore <strong>de</strong> jouer <strong>la</strong>kharja, une improvisation rythmée caractérisée par une accélération durythme.ZukraZukra (174)(174) Collection privée


340<strong>Le</strong> zakkâr se servant <strong>de</strong> sa bouche comme un réservoir d’air (175)1.2 - <strong>Le</strong> bandîr:C'est un tambour sur cadre circu<strong>la</strong>ire en bois, <strong>de</strong> quarante à cinquantecentimètres <strong>de</strong> diamètre et <strong>de</strong> dix à douze centimètres d'épaisseur. Unemembrane en peau <strong>de</strong> chèvre est collée sur ce cadre. Du côté interne <strong>de</strong> <strong>la</strong>peau, on trouve quatre à six timbres en boyau d'agneau ou <strong>de</strong> chèvre, <strong>al</strong>ignéspar<strong>al</strong>lèlement et presque collés à <strong>la</strong> membrane. Une fois que cette <strong>de</strong>rnièreest percutée, les timbres vibrent et donnent à <strong>la</strong> sonorité une coloration trèsparticulière qui est le résultat <strong>de</strong> l'effet <strong>de</strong> <strong>la</strong> vibration <strong>de</strong> ces timbres encontact avec <strong>la</strong> peau percutée.(175) Collection privée.


341<strong>Le</strong> cadre est percé d'un orifice où le bnâdrî (joueur <strong>de</strong> bandîr)introduit le pouce <strong>de</strong> sa main gauche <strong>de</strong> façon à tenir l'instrument à <strong>la</strong>vertic<strong>al</strong>e au niveau <strong>de</strong> <strong>la</strong> poitrine, et pose les autres doigts sur le bord <strong>de</strong> <strong>la</strong>peau, <strong>al</strong>ors que son pouce droit appuie <strong>la</strong>tér<strong>al</strong>ement sur le côté <strong>de</strong>l'instrument pour le soutenir. La membrane est frappée <strong>al</strong>ternativement parles <strong>de</strong>ux mains : <strong>la</strong> main gauche pour les temps faibles (tâk), <strong>la</strong> main droiteétant libre, pour les temps forts (dum) et aussi pour les temps faibles.<strong>Le</strong> bandîr a un timbre lourd et profond, avec une sonorité intense etpersistante. Dans l'ensemble <strong>de</strong> l'orchestre, le bandîr joue princip<strong>al</strong>ement unrôle métronomique, il se contente <strong>de</strong> donner <strong>la</strong> structure <strong>de</strong> base du rythme et<strong>la</strong>isse les embellissements à <strong>la</strong> darbûka.<strong>Le</strong> nombre <strong>de</strong>s bnâdriyya (sing. bnâdrî) varie selon les groupesmusicaux et les régions. La firqa (le groupe <strong>music<strong>al</strong></strong>) qui a joué le <strong>répertoire</strong><strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-Karrâriyya, comportait quatre bnâdriyya.La fabrication du bandîr est assez simple et ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pas uneformation spéci<strong>al</strong>e. Elle est assurée par un artisan qui n'est pas forcémentmusicien, il est plutôt un spéci<strong>al</strong>iste dans <strong>la</strong> fabrication <strong>de</strong>s tamis.


342Bandîrndîr (176)Ensemble <strong>de</strong> bnâdriyya (177)(176) Collection privée.


3431.3 - La darbûkaC'est un instrument <strong>de</strong> percussion très répandu dans le mon<strong>de</strong> arabe.C'est un tambour en forme <strong>de</strong> cruche, en terre cuite sans fond, dont <strong>la</strong> plusgran<strong>de</strong> ouverture est recouverte <strong>de</strong> membrane à peau <strong>de</strong> mouton, <strong>de</strong> chèvreou <strong>de</strong> poisson (cette <strong>de</strong>rnière est considérée comme <strong>la</strong> meilleure), que l'oncolle à <strong>la</strong> poterie avec, en plus, un <strong>la</strong>çage par <strong>de</strong>ux cor<strong>de</strong>s croisées qui sontparfois ornées <strong>de</strong> pompons <strong>de</strong> soie multicolores.Darbûka(178)<strong>Le</strong> corps <strong>de</strong> l'instrument est <strong>de</strong> trente à quarante centimètres <strong>de</strong>longueur, <strong>la</strong> membrane percutée a vingt centimètres <strong>de</strong> diamètre, <strong>la</strong> petiteouverture, <strong>de</strong> huit à douze centimètres <strong>de</strong> diamètre. Pour avoir une bonne(177) Photo prise lors d’un concert <strong>de</strong> Hadhra produit et ré<strong>al</strong>isé par SIALA Mourad, le 1 ernovembre 2005, collection privée.(178) Collection privée


344sonorité, l'instrumentiste règle <strong>la</strong> tension <strong>de</strong> <strong>la</strong> membrane par <strong>la</strong> ch<strong>al</strong>eur, enl'approchant du feu du brasero (kânûn), et en le frottant par <strong>la</strong> main.On se sert du brasero pour réchauffer <strong>la</strong> peau <strong>de</strong> <strong>la</strong> darbûka (179)Dans sa version mo<strong>de</strong>rne commerci<strong>al</strong>isée <strong>de</strong>puis peu, cet instrumentest fabriqué en <strong>la</strong>iton ou en mét<strong>al</strong>, avec un cercle <strong>de</strong> fer tendu <strong>de</strong> peau enp<strong>la</strong>stique, fixé par quatre ou six vis (selon les dimensions) que l'on serre ou<strong>de</strong>sserre à volonté pour hausser ou abaisser <strong>la</strong> hauteur du son. Cette nouvelleversion <strong>de</strong> <strong>la</strong> darbûka a été vite adoptée par les musiciens <strong>de</strong> <strong>la</strong> formation <strong>de</strong><strong>la</strong> `awwâda (180) qui ont trouvé dans cette "darbûka mo<strong>de</strong>rne" une solution(179) Photo prise lors d’un concert <strong>de</strong> Hadhra produit et ré<strong>al</strong>isé par SIALA Mourad, le 1 ernovembre 2005, collection privée.(180) Un groupe <strong>music<strong>al</strong></strong> qui joue tout les genres musicaux, popu<strong>la</strong>ires et savants, il anime lessoirées <strong>de</strong> mariage ou toutes autres festivités. Sa formation instrument<strong>al</strong>e est essentiellementcomposée <strong>de</strong> `ûd (luth), violon, qânûn, darbûka et târ. Dès <strong>la</strong> fin <strong>de</strong>s années 1960, plusieursinstruments occi<strong>de</strong>ntaux ont fait leur apparition dans <strong>la</strong> `awwâda.(telles que <strong>la</strong> guitare électrique,l'orgue électrique remp<strong>la</strong>cé par le synthétiseur à partir <strong>de</strong>s années 1980, et <strong>la</strong> batterie).


345pour le rég<strong>la</strong>ge <strong>de</strong> <strong>la</strong> tension <strong>de</strong> <strong>la</strong> membrane dans <strong>la</strong> darbûka traditionnellequi nécessite <strong>la</strong> présence d'un brasero (kânûn), ou d'une sorte d'inst<strong>al</strong><strong>la</strong>tionélectrique dont le bout se termine par une <strong>la</strong>mpe maintenue à l'intérieure ducorps <strong>de</strong> l'instrument pour chauffer <strong>de</strong> temps à autre <strong>la</strong> peau.<strong>Le</strong>s techniques <strong>de</strong> jeu <strong>de</strong> <strong>la</strong> darbûka diffèrent selon le <strong>répertoire</strong> jouéet le groupe <strong>music<strong>al</strong></strong> : le drâbkîou darbâkjî (joueur <strong>de</strong> darbûka) <strong>de</strong>l'orchestre mo<strong>de</strong>rne, assis, tient son instrument horizont<strong>al</strong>ement sur <strong>la</strong> cuisseet sous le bras gauche, en ayant <strong>la</strong> main gauche sur le bord <strong>de</strong> l'instrument. Ilutilise sa main droite pour les temps forts (dum), et les doigts <strong>de</strong> sa maingauche pour les temps faibles (tâk). Dans le mizwid (181), le drâbkî tient soninstrument entre ses genoux croisés. Dans <strong>la</strong> musique <strong>religieuse</strong>, cependant,le drâbkî tient son instrument sous son aisselle en l'ayant fixé à ces <strong>de</strong>uxextrémités par une cor<strong>de</strong> qui passe sur son épaule gauche. Cette tenue permetà l'instrumentiste <strong>de</strong> jouer <strong>de</strong>bout. Il utilise ainsi sa main droite qui estentièrement libre pour exécuter à <strong>la</strong> fois les dum et les tâk, et sa main gauchepour bien maintenir l'instrument et exécuter les tâk. Remarquons que mêmeassis, le drâbkî <strong>de</strong> <strong>la</strong> hadhra tient toujours son instrument <strong>de</strong> <strong>la</strong> même façoncomme nous le percevons dans les photos suivantes.(181) <strong>Le</strong> terme <strong>de</strong> mizwid désigne à <strong>la</strong> fois un instrument <strong>de</strong> musique (cornemuse) et l'orchestrerattaché à cet instrument. La fonction <strong>de</strong> l'orchestre <strong>de</strong> mizwid consiste en l'interprétation <strong>de</strong>s chantspopu<strong>la</strong>ires.


346Tenue <strong>de</strong> <strong>la</strong> darbûka dans l’orchestre Hadhra (182)(182)Photo prise lors d’un concert <strong>de</strong> Hadhra produit et ré<strong>al</strong>isé par SIALA Mourad, le 1 er novembre2005, collection privée.


347Comme nous l'avons avancé plus haut, cette formation (<strong>la</strong> hadhra) ainterprété quelques suites <strong>de</strong> nûbât du <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong>s majâlis <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-Karrâriyya, une interprétation qui n'a pas été sans conséquences quant àl'authenticité <strong>de</strong> ce patrimoine traditionnel sacré. Afin <strong>de</strong> mieux explicitercette nouvelle forme qu'a prise <strong>la</strong> nûba <strong>de</strong>s majâlis d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY, nous avons transcrit une suite <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba hsîn interprétée par <strong>la</strong>hadhra du shaykh Boudayya et enregistrée à <strong>la</strong> radio <strong>de</strong> Sfax au début <strong>de</strong>sannées soixante du siècle <strong>de</strong>rnier. Nous avons utilisé pour <strong>la</strong> transcription <strong>de</strong>cette suite <strong>de</strong>ux couleurs re<strong>la</strong>tives à <strong>la</strong> zukra et au chant, dans le but <strong>de</strong>repérer visuellement les transformations et les additifs qu’a subi cette suite.Elle se compose <strong>de</strong> quatre "fragments" <strong>de</strong> muwashshahât ou <strong>de</strong> azjâl quiforment les mouvements suivants:Un premier dukhûl barâwil :"Yâ hâdî inhadh wa jud bi-s-sarâ ".Nous avons trouvé les paroles <strong>de</strong> ce dukhûl barâwil dans <strong>la</strong> partie <strong>de</strong>sshghullât, au recto <strong>de</strong> <strong>la</strong> feuille n o 126 du recueil d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-Karrây,dans le shghul "yâ hâdî" qui se compose <strong>de</strong> cinq adwâr, et c'est le premierdawr qui est chanté par <strong>la</strong> hadhra.Il est à remarquer que les paroles du <strong>de</strong>uxième dawr <strong>de</strong> ce shghul ontcomposé le troisième mouvement <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba hsîn que nous avons dans ledocument sonore, qui est le dukhûl barâwil "ihtazzat rawhî li ashwâqihi"(183). <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> ce dukhûl barâwil est le suivant :(183) Cf. le troisième mouvement <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba hsîn, dans le chapitre précédant, p. 271.


348Translittération du texte arabe :Yâ hâdî inhadh wa jud bi-s-sarâWa-twî-r-rubâ wa-l-anâmîLi-l-Hâdî Ahmad shafî`-l-warâAl-abtahî at-tihâmîBi-l-wâdî nazzil bi 'umm-l-qurâLa`<strong>al</strong><strong>la</strong> yabrâ siqâmîAwtânî nahjarhumâ yâ çadîqWa-l-ahli wa-l-madhji`îMuhammad huwwa tabîb-l-qulûbFînâ ghadan yeshfa` fînâ in shâ'a-l-LTraductionChamelier, lève toi et reprend ta marche,Il y a encore tant <strong>de</strong> domaines à parcourir,Ma <strong>de</strong>stination n’est autre qu’Ahmed,Mon bien aimé, défenseur <strong>de</strong>s humainsNous débarquerons à l’oued <strong>de</strong> <strong>la</strong>Mère <strong>de</strong> toutes les villes,Puis-je ainsi guérir <strong>de</strong> mes maux,Mon ami, il est temps <strong>de</strong> tout quitter,Patries, <strong>de</strong>meures, et proches,Seul Mohamed est mé<strong>de</strong>cin <strong>de</strong>s cœurs ma<strong>la</strong><strong>de</strong>s,Puisse-t-il, le len<strong>de</strong>main, nous apporter secours,Avec <strong>la</strong> permission d’Al<strong>la</strong>h


Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e349


350Un <strong>de</strong>uxième dukhûl barâwil :"Yâ Muhammad 'anta ghâyatu maqçadî", qui est dans le manuscrit, le quatrième dawr du khafîf <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba `irâq. Ilest aussi le <strong>de</strong>uxième dukhûl barâwil du premier mouvement <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba hsîninterprétée par <strong>la</strong> chor<strong>al</strong>e qui a enregistré le <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong>s majâlis d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-Karrây. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> ce dukhûl barâwil est le suivant :Translittération du texte arabe :Yâ Muhammad 'anta ghâyatu maqçadîYâ ghayyâth yâ 'imâma-l-murs<strong>al</strong>îna'anta kahfî wa m<strong>al</strong>âkî sayydîKun shafî`î yâ shafî`a-l-mudhnibînaNajjinâ min hawli yawma-l-maw`idiYâ mubajj<strong>al</strong> 'anta m<strong>al</strong>ja'i-l-khâ'ifînaMin hawli yawmin yashîbu fîhi-l-wa<strong>la</strong>dâNajjinâ bi himâka yâ hulwa-l-k<strong>al</strong>âmiÇ<strong>al</strong>lâ `a<strong>la</strong>yka-l-Lâhu s<strong>al</strong><strong>la</strong>m 'abadâ'âlin wa çahbin wa-t-tâbi`îna bi-t-tamâmTraduction :Mohamed, tu es ma <strong>de</strong>stinée,Tu es mon secours, toi qui es le chef <strong>de</strong>s messagers,Tu es mon patron, tu es mon ange,Défends moi, tu es le défenseur <strong>de</strong>s pécheurs,Sauve moi <strong>de</strong> l'horreur, le jour du jugement,Tu es le recours <strong>de</strong> ceux qui ont <strong>la</strong> peur dans le cœur,Peur <strong>de</strong> cette journée dont <strong>la</strong> terreur fait vieillir les enfants,


351Sauves moi, tu nous l'as promis dans tes paroles,Et le bon Dieu t'a béni <strong>de</strong> même que ta familleEt tes compagnons fidèles.Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :


352Un barw<strong>al</strong> : "mâ tubtu li-l-waçli hî<strong>la</strong>"Nous n'avons pas trouvé le texte <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> ce barw<strong>al</strong> dans lemanuscrit. Cependant, nous sign<strong>al</strong>ons que ce barw<strong>al</strong> prend <strong>la</strong> mélodie dutroisième dukhûl barâwil du premier mouvement <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba hsîn çabâ quenous avons an<strong>al</strong>ysé dans le chapitre précédant. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong> ses paroles est lesuivant:


353Translittération du texte arabe :Mâ tubtu li-l-waçli hî<strong>la</strong> dillûnî yâ-hli-l-fadhî<strong>la</strong>Qaçdî liway<strong>la</strong> bi <strong>la</strong>ylâ tâkhudh `<strong>al</strong>â kulli <strong>la</strong>y<strong>la</strong>Qaçdî liway<strong>la</strong> narâhâ wi-n-nâl minhâ murâdîWin-bât <strong>la</strong>y<strong>la</strong> hidhâhâ `aqlî wa thamrit fu'âdîÂnâ ma<strong>la</strong>knî hawâhâkayfa-l-`am<strong>al</strong> yâ siâdîYâ-hli-l-`uqûl-l-jamî<strong>la</strong> dillûnî yâ-hli-l-fadhî<strong>la</strong>Qaçdî liway<strong>la</strong> bi <strong>la</strong>ylâ tâkhudh `<strong>al</strong>â kulli <strong>la</strong>y<strong>la</strong>Traduction :J’ai un désir à ré<strong>al</strong>iser, et je ne sais comment faire,Vous qui êtes dotés <strong>de</strong> <strong>la</strong> sagesse et <strong>de</strong> <strong>la</strong> vertu,Donnez moi conseils et orientez moi,Mon vœu est <strong>de</strong> passer une nuit auprès <strong>de</strong> ma <strong>Le</strong>i<strong>la</strong>Une nuit qui vaut <strong>la</strong> vie entière.Je veux <strong>la</strong> voir le temps d’une nuit,Telle est mon ambition,Elle détient mon esprit et mon cœur,Je suis envoûté par son amour,Dites-moi que faire,Vous qui êtes dotés <strong>de</strong> <strong>la</strong> sagesse et <strong>de</strong> <strong>la</strong> vertu,Mes chers maîtres,Orientez-moi et gui<strong>de</strong>z mes pas.


Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :354


355


356En écoutant cette "nouvelle version" <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba, nous remarquons que :- La présence excessive <strong>de</strong>s instruments <strong>de</strong> percussion a marqué <strong>la</strong>dominance <strong>de</strong>s rythmes au détriment <strong>de</strong> <strong>la</strong> mélodie et <strong>de</strong>s paroles, ce qui afait perdre à <strong>la</strong> nûba non seulement son c<strong>al</strong>me et sa sérénité, mais aussi -etsurtout- elle l'a éloignée <strong>de</strong> son objectif princip<strong>al</strong> car, <strong>la</strong> musique dans cesmajâlis n'a jamais été un but en sois; elle n'était qu'un moyen pour rapprocheraux a<strong>de</strong>ptes les paroles <strong>de</strong>s muwashshahât d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY quisont dans <strong>la</strong> majorité <strong>de</strong>s prières au bon Dieu, et <strong>de</strong>s panégyriques pour leProphète Muhammad.- L'introduction <strong>de</strong>s phases instrument<strong>al</strong>es comme l'improvisation <strong>de</strong><strong>la</strong> zukra au début du chant, a favorisé <strong>la</strong> domination <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique audétriment <strong>de</strong> <strong>la</strong> parole; et surtout l'improvisation instrument<strong>al</strong>e -mélodique etrythmique – dite kharja (litt. : sortie), lors <strong>de</strong> <strong>la</strong>quelle le zakkâr peut sepermettre <strong>de</strong> changer le mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> mélodie, mais doit y revenir à <strong>la</strong> fin avant<strong>de</strong> reprendre <strong>la</strong> mélodie princip<strong>al</strong>e; le drâbkî, quant à lui, se déchaîne et sepermet <strong>de</strong> d'exhiber ses t<strong>al</strong>ents en improvisant <strong>de</strong>s combinaisons rythmiquessouvent très complexes, il est soutenu par les bnâdriyya qui jouent un rôlepurement métronomique et ne se permettent que rarement d'échapper à <strong>la</strong>monotonie en exécutant en chœur <strong>de</strong>s formules rythmiques simples etpréa<strong>la</strong>blement connues par tous. Lors <strong>de</strong> cette improvisation, les wazzâna(batteurs) accélèrent le tempo d'une manière brusque pour un certain momentavant <strong>de</strong> r<strong>al</strong>entir aussi brusquement pour retrouver le tempo du départ. Cette


357séquence instrument<strong>al</strong>e qui incite l'auditeur plutôt à <strong>la</strong> danse, s'avère trèsétrange aux majâlis d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY2 - L'orchestre <strong>de</strong> l'harmonium :L'harmonium a occupé une bonne p<strong>la</strong>ce dans <strong>la</strong> musique tunisienne <strong>de</strong><strong>la</strong> fin du 19 ème siècle jusqu'à <strong>la</strong> fin <strong>de</strong> <strong>la</strong> première moitié du 20 ème siècle."Plusieurs chanteurs se produisent en public ou enregistrent leurs chansonsaccompagnés seulement d'un harmonium et d'une darbûka. […] le publicapprécie beaucoup ce type d'interprétation, bien que pour les oreilles averties,<strong>la</strong> fausseté <strong>de</strong>s sons soit manifeste"(184). Nous trouvons encore cet orchestre,mais rarement, dans les cérémonies <strong>de</strong> mariage <strong>de</strong>s sfaxiens, il se composeaussi bien par <strong>de</strong>s hommes que par <strong>de</strong>s femmes qu'on appelle "mûlât-l-biânû"(<strong>la</strong> pianiste). Comme pour <strong>la</strong> zukra, c'est le shaykh Bûdayya qui a joué le<strong>répertoire</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> KARRÂRIYYA sur cet instrument.L'orchestre <strong>de</strong> l'harmonium <strong>de</strong> MuhammadBÛDAYY A (185)(184) SAKLI (Mourad), Op. Cit., p.192.(185) Photo : " Maj<strong>al</strong><strong>la</strong>t <strong>al</strong>-idhâ`a ", (Magazine <strong>de</strong> <strong>la</strong> Radio), Tunis, 8 Janvier 1962, p. .


358L'orchestre <strong>de</strong> l'harmonium se compose génér<strong>al</strong>ement <strong>de</strong> cinqinstrumentistes solistes, qui jouent <strong>de</strong>s instruments suivants :2.1 L'harmoniumC'est un instrument à anches libres, à soufflerie et à c<strong>la</strong>vier. Ilcomprend "un nombre variable <strong>de</strong> registres, répartis sur un c<strong>la</strong>vier(éventuellement <strong>de</strong>ux) et coupés en <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>mi-registres chacun, un pour lesaigus et un pour les graves, <strong>de</strong> sorte que chaque main puisse jouer avec uneregistration différente"(186).Harmonium (187)(186) Viret (Jacques), Harmonium, in HONNEGGER (M.), Science <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique, Paris, Bordas,1976, Tome I, p. 453.(187) Photo : cat<strong>al</strong>ogue du Musée <strong>de</strong>s Instruments <strong>de</strong> Musique du Centre <strong>de</strong>s Musiques Arabes etMéditerranéennes à Sidi Bou Saïd, Tunis, Ed. du C.M.A.M., 1992, p.22.


3592.2 <strong>Le</strong> târC'est un tambourin sur cadre circu<strong>la</strong>ire. <strong>Le</strong> cadre ou corps est en bois,il est <strong>de</strong> vingt à vingt cinq centimètres <strong>de</strong> diamètre, et <strong>de</strong> cinq à sixcentimètres d'épaisseur. Il comporte cinq encoches (bayt : chambre) portantchacune <strong>de</strong>ux paires <strong>de</strong> petites cymb<strong>al</strong>es (shnâshin ou shanshânât) en cuivreou en <strong>la</strong>iton, <strong>de</strong> quatre à six centimètres <strong>de</strong> diamètre. La membrane tendue etcollée sur ce cadre est en peau <strong>de</strong> chèvre. Comme <strong>la</strong> darbûka, le târ estactuellement fabriqué en mét<strong>al</strong> avec une peau en p<strong>la</strong>stique. Cependant, dans<strong>la</strong> musique <strong>religieuse</strong>, il a gardé sa facture traditionnelle.<strong>Le</strong> târ est un instrument très répandu dans tous les pays arabes, souvent sousl'appel<strong>la</strong>tion <strong>de</strong> riqq. C'est l'instrument rythmique par excellence surtout dans<strong>la</strong> musique savante. Cependant, sa présence dans les formationsinstrument<strong>al</strong>es <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique popu<strong>la</strong>ire ou <strong>religieuse</strong> se fait assez rare.<strong>Le</strong> tarrâr ou tarrârjî (joueur <strong>de</strong> târ), tient son instrument en positionvertic<strong>al</strong>e dans <strong>la</strong> main gauche, entre le pouce et l'in<strong>de</strong>x. Cette position,légèrement perpendicu<strong>la</strong>ire au p<strong>la</strong>n du corps, est maintenue à hauteur <strong>de</strong> <strong>la</strong>poitrine. Il percute par <strong>la</strong> main droite, le centre <strong>de</strong> <strong>la</strong> peau, pour obtenir untemps fort (dum), et le bord pour un temps faible (tâk). "Ces <strong>de</strong>ux sonoritéssont enrichies par une autre sonorité mét<strong>al</strong>lique engendrée par le choc <strong>de</strong>scymb<strong>al</strong>ettes excitées soit par les doigts <strong>de</strong> <strong>la</strong> main gauche, soit parl'oscil<strong>la</strong>tion du târ autour <strong>de</strong> sa position initi<strong>al</strong>e" (188).(188) GUETTAT, (Mahmoud), La musique c<strong>la</strong>ssique du Maghreb


360<strong>Le</strong> târ exige, pour produire tous ces effets, <strong>de</strong> l’habileté et <strong>de</strong>l’expérience, et notamment un poignet assez souple pour exécuter diversmouvements quelque peu compliqués, génér<strong>al</strong>ement à contretemps, sanss’éloigner du mouvement et <strong>de</strong> <strong>la</strong> ligne génér<strong>al</strong>e du rythme que l’on mesure(189).Târ tunisien (190)2.3 La darbûkaComme dans tous les autres orchestres, sa présence dans l’orchestre<strong>de</strong> l’harmonium est indispensable puisque c’est le drâbkî qui assurel’exécution <strong>de</strong>s awzân et veille sur le bon déroulement <strong>de</strong>s morceaux jouésen déterminant le tempo qu’il faut pour chaque morceau et commandant les(189) SNOUSSI, Op. Cit., p. 100.(190) Photo : cat<strong>al</strong>ogue du Musée <strong>de</strong>s Instruments <strong>de</strong> Musique du Centre <strong>de</strong>s Musiques Arabes etMéditerranéennes à Sidi Bou Saïd, Tunis, Ed. du C.M.A.M., 1992, p.47.


361transitions et les arrêts (qaflât). Son rôle est assez semb<strong>la</strong>ble à celui du bâtondu chef dans les orchestres européens.2.4 <strong>Le</strong> violonDès le début du vingtième siècle, certains musiciens tunisiens,décidèrent <strong>de</strong> remp<strong>la</strong>cer le rbâb par le violon qui a vite pris une p<strong>la</strong>ceimportante dans les différentes formations <strong>music<strong>al</strong></strong>es pour sa meilleureton<strong>al</strong>ité, et aussi pour <strong>la</strong> possibilité qu’offre l’instrument d’interpréter les<strong>de</strong>grés fluctuants <strong>de</strong> l’échelle <strong>music<strong>al</strong></strong>e arabe.<strong>Le</strong> violon est appelé kamanja (<strong>de</strong> l’expression <strong>al</strong>-kamâl jâ, <strong>la</strong>perfection est venue), ou jrâna (litt. ‘‘grenouille’’), il est probable cependantque le terme jrâna (typiquement maghrébin), provient du verbe jarra (tirer,traîner), faisant <strong>al</strong>lusion au frottement <strong>de</strong> l’archet sur les cor<strong>de</strong>s (191).La kamanja est accordée Ré 4 – Sol 3 – Ré 3 – Sol 2. Au début dusiècle <strong>de</strong>rnier, il est souvent tenu vertic<strong>al</strong>ement sur le genou gauche, dans uneposition qui rappelle assurément celle du rbâb. A partir <strong>de</strong>s années quarante,on revient définitivement à <strong>la</strong> position originelle (à <strong>la</strong> manière occi<strong>de</strong>nt<strong>al</strong>e),mais tout en gardant l’accord à <strong>la</strong> « façon arabe ».(191) Voir GUETTAT (Mahmoud), La musique arabo-and<strong>al</strong>ouse, L’empreinte du Maghreb, op.cit.,p. 340.


3622.5 <strong>Le</strong> `ûd<strong>Le</strong> `ûd est un luth à manche court, dépourvu <strong>de</strong> frettes, à cor<strong>de</strong>spincées, et dont <strong>la</strong> caisse <strong>de</strong> résonance affecte <strong>la</strong> forme d’une <strong>de</strong>mi-poire. Il atoujours occupé une p<strong>la</strong>ce privilégiée dans <strong>la</strong> musique arabe.On distingue <strong>de</strong>ux types <strong>de</strong> `ûd :* <strong>Le</strong> `ûd tûnsî (luth tunisien), appelé aussi `ûd `arbi (luth arabe). Ilcomprend quatre cor<strong>de</strong>s doubles accordées à l’unisson ( Do 3 –Sol 2 – Ré 3 –Ré 2 ), pincées à l’ai<strong>de</strong> d’un plectre (rîsha) qui consiste en une plume d’aiglecoupée en son milieu et sur une bonne partie <strong>de</strong> sa longueur. De nos jours, leplectre est en corne taillé ou en p<strong>la</strong>stique.


363`ûd tunisien (192)<strong>Le</strong> `ûd tûnsî est d’un jeu re<strong>la</strong>tivement difficile, c’est pourquoi qu’il est<strong>de</strong> plus en plus dé<strong>la</strong>issé <strong>de</strong>puis le début du siècle <strong>de</strong>rnier, et remp<strong>la</strong>cé par le`ûd sharqî au jeu plus facile.* <strong>Le</strong> `ûd sharqî, il se distingue du `ûd tûnsî par une caisse <strong>de</strong>résonance plus importante et une table d’harmonie gran<strong>de</strong>. Son manche estcourt. <strong>Le</strong> `ûd sharqî comporte cinq cor<strong>de</strong>s doubles accordées à l’unisson(Do3 – Sol 2 – Ré 2 – La 1- Sol 1), avec <strong>la</strong> possibilité d’ajouter une sixièmecor<strong>de</strong> accordée Ré 1 ou Do 1.Avec cet orchestre, <strong>la</strong> nûba Karrâriyya a encore subi unetransformation et a pris une autre forme qui se rapproche <strong>de</strong> celle <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûbadu m<strong>al</strong>ûf.Dans le but <strong>de</strong> tracer son évolution et montrer <strong>la</strong> mutation qu’a connu<strong>la</strong> nûba <strong>de</strong>s majâlis d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY, nous avons transcrit unesuite <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba hsîn interprétée par l’orchestre <strong>de</strong> l’harmonium du shaykhBoudayya et enregistrée à <strong>la</strong> radio <strong>de</strong> Sfax au début <strong>de</strong>s années soixante dusiècle <strong>de</strong>rnier.Nous avons utilisé pour <strong>la</strong> transcription <strong>de</strong> cette suite <strong>de</strong>ux couleurs re<strong>la</strong>tivesaux instruments et au chant, dans le but <strong>de</strong> repérer visuellement lestransformations et les additifs qu’a subi cette suite.(192) Photo : cat<strong>al</strong>ogue du Musée <strong>de</strong>s Instruments <strong>de</strong> Musique du Centre <strong>de</strong>s Musiques Arabes etMéditerranéennes à Sidi Bou Saïd, Tunis, Ed. du C.M.A.M., 1992, p.47.


364Elle se compose <strong>de</strong> quatre "fragments" <strong>de</strong> muwashshahât qui forment lesmouvements suivants:Deux btâyhî "Sammayt bism-l-Lâh" et "fiq wa-ntabih yâ nâyem".<strong>Le</strong>s paroles <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux btâyhî sont extraites du muwashshah qui forme lepremier barw<strong>al</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba çîka et qu’on trouve dans le manuscrit au recto <strong>de</strong><strong>la</strong> feuille n o 25. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux btâyhî est le suivant :Translittération du texte arabe :Sammayt bism-l-LâhFa lâ takun bi sâhîSammayt bism-l-khâ<strong>la</strong>qFa raziqu-l-kh<strong>al</strong>âyaqMawlânâ hua-r-râzaqTa’amm<strong>al</strong> yâbna ’âdamÇawwar <strong>la</strong>ka-l-qawâyemWa ta’amm<strong>al</strong> fî-l-`awâlimfî-s-sirri wa-l-i`lâni,`an tâ`ati-r-Rahmâni,<strong>al</strong>-Wâhidu-l-Ahad,fî mulkihi-nfarad,li kulli fardin fard,fî jismik kayfa kân,wa-s-sam`a wa-l-`aynân,wa-ndhur yâ dhâ-l-insân.Fiq wa-ntabih yâ nâyemFî `ilm-r-Rabb-d-DâyemWa t’amm<strong>al</strong> fî-l-`awâlimFî `ilm-r-Rabb- d-Dâyemmin ghaf<strong>la</strong>ti-z-zamânmin a`dhami-l-burhânwa-ndhur yâ dhâ-l-insânmin a`dhami-l-burhânTranscription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :


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367Un premier barw<strong>al</strong>. Juste après les <strong>de</strong>ux btâyhî, <strong>la</strong> chor<strong>al</strong>e enchaîneavec le barw<strong>al</strong> "in kunta `âshiqan lâ tabrah" que nous avons trouvé dans lemanuscrit dans le muwashshah qui forme le <strong>de</strong>uxième mçaddar <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûbahsîn. <strong>Le</strong> texte <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> ce barw<strong>al</strong> est le suivant :Translittération du texte arabe :In kunta `âshiqan lâ tabrahWa-lzami-ç-çabra wa jud wa-sma`Murziq li-t-tayri idhâ nawwahWa tâlian sûrat qad af<strong>la</strong>h`an bâbi mahbûbikbi wâbil-dmû`ikdhâkiran li shujûnikli yaçfâ mashrûbik


Transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :368


369Un <strong>de</strong>uxième barw<strong>al</strong> "Isqînî yâ sâqî" que nous trouvons dans le manuscritdans le muwashshah qui forme le <strong>de</strong>uxième barw<strong>al</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba `irâq. <strong>Le</strong> texte<strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> ce barw<strong>al</strong> est le suivant :Translittération du texte arabe :Isqînî yâ sâqîQad zâda ishtiâqîWa `a<strong>la</strong>t ashwâqîFi-l-q<strong>al</strong>bi-htirâqîDam`î min âmâqîMin a<strong>la</strong>mi-l-firâqîFa-mnun yâ habîbîWa-shfi yâ tabîbîwa-rwînî bi khamr<strong>al</strong>i rijâl-l-hadhra`an khumayra zahrafa-thifni bi nadhrayançabib bi kathrafa-sqînî li nabrâbi-sh-sharâbi-ç-çâfîanta huwa-sh-shâfîTranscription <strong>music<strong>al</strong></strong>e :


370En fin <strong>de</strong> ce chapitre, nous nous contentons d’attirer l’attention sur lechangement radic<strong>al</strong> qu’a connu <strong>la</strong> nûba KARRÂRIYYA lors <strong>de</strong> son exécutionpar l’orchestre hadhra. En effet, nous remarquons <strong>la</strong> dominance du rythmequi se caractérise par <strong>la</strong> vivacité et <strong>la</strong> force <strong>de</strong> son exécution et qui est trèsprésent par le nombre <strong>de</strong>s instruments <strong>de</strong> percussion qui dominent audétriment <strong>de</strong>s paroles, <strong>al</strong>ors qu’il était tot<strong>al</strong>ement absent dans <strong>la</strong> versionorigin<strong>al</strong>e. La mélodie aussi a pris une p<strong>la</strong>ce assez importante <strong>al</strong>ors que pourle shaykh Karrây n’était qu’un moyen pour enrichir ses majâlis et ai<strong>de</strong>r lesa<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> sa tarîqa à bien apprendre et bien mémoriser les paroles <strong>de</strong> sesmuwashshahât qui sont en ré<strong>al</strong>ité <strong>de</strong>s prières traitants pour sujets, l’avons-


371nous vu, <strong>la</strong> soumission à <strong>la</strong> parole divine, l’éloge du prophète Muhammad, <strong>la</strong><strong>de</strong>scription <strong>de</strong> <strong>la</strong> ka`ba, et <strong>la</strong> <strong>de</strong>scription du vin céleste.La domination <strong>de</strong>s instruments <strong>de</strong> musique dans l’exécution <strong>de</strong>s nûbât<strong>de</strong>s majâlis <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa Karrâriyya par l’orchestre hadhra a donc fait perdreaux paroles leur prépondérance dans ce <strong>répertoire</strong>.


1Conclusion


2Cette étu<strong>de</strong> a eu pour objectif <strong>de</strong> rassembler le <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong><strong>religieuse</strong> <strong>al</strong>-Karrâriyya, transcrire et an<strong>al</strong>yser sa musique et ce, dans le but <strong>de</strong>le préserver <strong>de</strong> <strong>la</strong> disparition. Car, dès le début <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>de</strong>uxième moitié du siècle<strong>de</strong>rnier, les a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa ne se réunissent plus dans <strong>la</strong> zawiya pourchanter les muwashshahât <strong>de</strong> sîdî Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY homme <strong>de</strong>religion et fondateur <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong> <strong>religieuse</strong> <strong>al</strong>-Karrâriyya, très célèbre pourses idées favorables à <strong>la</strong> création artistique, notamment dans le domaine<strong>music<strong>al</strong></strong>, et pour son opposition à tous ceux qui interdisaient les chants dansles cérémonies <strong>religieuse</strong>s. Ces muwashshahât sont réunit dans le dîwân(recueil) d’Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY, un manuscrit que nous avons eu <strong>la</strong>chance <strong>de</strong> trouver au cours <strong>de</strong> notre travail sur le terrain, dans <strong>la</strong> bibliothèqueprivée d’un ancien a<strong>de</strong>pte <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa.Ce <strong>répertoire</strong> <strong>music<strong>al</strong></strong> est constitué <strong>de</strong> cinquante six muwashshah quiforment treize nûbât. La nûba dans cette <strong>confrérie</strong> est une suite <strong>de</strong> piècesvoc<strong>al</strong>es mesurées, composées sur le même tba` qui donne son nom à toute <strong>la</strong>nûba, et sur différents awzân (formules rythmiques). Bien que les instruments<strong>de</strong> percussion ne soient pas utilisés dans ces chants, les awzân y sont trèsprésents. Ils ont même donné leurs noms aux différentes parties <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba toutcomme dans <strong>la</strong> musique traditionnelle tunisienne dite mâlûf.En effet, il existe une re<strong>la</strong>tion soli<strong>de</strong> entre le <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong><strong>religieuse</strong> <strong>al</strong>-Karrâriyya et celui <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique du mâlûf : Ils utilisent le mêmeterme (nûba) pour désigner <strong>la</strong> forme <strong>music<strong>al</strong></strong>e et ont le même nombre <strong>de</strong> nûbât


3qui sont composées dans les mêmes tubû`. Ce<strong>la</strong> s’ajoute à quelques pointscommuns au niveau du système <strong>music<strong>al</strong></strong> que nous avons pu voir au cours <strong>de</strong>cette étu<strong>de</strong> et qui sont essentiellement :- L’utilisation dans les textes <strong>de</strong>s chants le muwashshah et le zaj<strong>al</strong>, <strong>de</strong>uxformes poétiques apparues en And<strong>al</strong>ousie au neuvième siècle et qui secaractérisent par ……..- La nûba se caractérise dans sa composition <strong>music<strong>al</strong></strong>e par le mouvementprogressif dans <strong>la</strong> succession <strong>de</strong>s rythmes qui définissent ses piècesconstitutives. Cette succession part du rythme très lent pour finir sur un rythmetrès rapi<strong>de</strong>.- <strong>la</strong> structure du tba` est <strong>la</strong> même, elle se compose génér<strong>al</strong>ement <strong>de</strong>s mêmesajnâs.- les ajnâs <strong>de</strong> chaque tba` suivent génér<strong>al</strong>ement le même parcours mélodique.- les <strong>de</strong>grés fondamentaux (ou notes préférentielles) qui jouent un rôleimportant dans le parcours mélodique <strong>de</strong> chaque tba` sont presque les mêmes.- enfin, pour ce qui concerne l’interprétation, nous remarquons qu’il y atoujours cette <strong>al</strong>ternance <strong>de</strong> chant entre <strong>la</strong> chor<strong>al</strong>e et les instrumentistes dans le<strong>répertoire</strong> du mâlûf, ou entre <strong>de</strong>ux chor<strong>al</strong>es qawwâ<strong>la</strong> et raddâda (diseurs etrépétiteurs) dans le <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong>s majâlis <strong>de</strong> sîdî Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-Karrâypuisqu’il n’y a pas utilisation d’instruments <strong>de</strong> musique.En ne citant que ces points communs qui réunissent les <strong>de</strong>ux <strong>répertoire</strong>s,nous ne pouvons qu’affirmer qu’ils ont les mêmes origines pour ne pas dire


4qu’il s’agit du même <strong>répertoire</strong> comme l’affirme une légen<strong>de</strong> très réponduedans le milieu mystique <strong>de</strong> <strong>la</strong> région <strong>de</strong> Sfax qui affirme que le shaykh Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-Karrây a adapté <strong>de</strong>s paroles soufis à <strong>la</strong> musique du mâlûf qu’il aappris pour enrichir ses majâlis et encourager ses disciples à y assister (1).Depuis, on a vu entrer <strong>la</strong> musique dans les <strong>confrérie</strong>s.Ainsi, ces <strong>de</strong>rnières ont joué un rôle important dans le sauvegar<strong>de</strong> du<strong>répertoire</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique traditionnelle tunisienne « mâlûf », car, suite àl’envahissement <strong>de</strong> l’espace <strong>music<strong>al</strong></strong> dans toute <strong>la</strong> Tunisie par les chansonsjuives (surtout à <strong>la</strong> fin du 19 ème siècle et au début du siècle <strong>de</strong>rnier), qui sedistinguaient par <strong>de</strong>s paroles libertines et vulgaires, il y a eu une abstinencecollective envers cette musique qui a trouvé refuge dans les <strong>confrérie</strong>s<strong>religieuse</strong>s qui ont vite <strong>de</strong>venues le centre d'épanouissement pour l'art <strong>music<strong>al</strong></strong>puisqu'elles sont <strong>de</strong>venues le seul endroit où on pouvait pratiquer ou écouter<strong>de</strong> <strong>la</strong> musique sans risquer <strong>de</strong> perdre le respect <strong>de</strong> <strong>la</strong> société. C’est ainsi queces <strong>confrérie</strong>s ont donné le jour à d’éminents musiciens qui ont marqué lemouvement et le développement <strong>music<strong>al</strong></strong> en Tunisie durant le siècle <strong>de</strong>rniergrâce à <strong>la</strong> formation soli<strong>de</strong> qu’ils ont eu dans ces <strong>confrérie</strong>s.Afin <strong>de</strong> bien situer notre objet <strong>de</strong> recherche, nous avons donné unaperçu historique du mouvement mystique dans le mon<strong>de</strong> arabo-musulman, etessayé <strong>de</strong> remonter aux origines du soufisme en Tunisie. L’explication <strong>de</strong>s(1) C.f <strong>la</strong> légen<strong>de</strong> au troisième chapitre <strong>de</strong> <strong>la</strong> première partie <strong>de</strong> ce travail, p. 90.


5termes spécifiques du domaine du soufisme nous a paru essentielle pourpréciser <strong>la</strong> signification <strong>de</strong>s ces termes propres au <strong>la</strong>ngages mystique que nousavons utilisé tout au long <strong>de</strong> notre travail. Nous avons aussi essayé d’exposerles caractéristiques du système mod<strong>al</strong> spécifique <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique arabe engénér<strong>al</strong> pour pouvoir an<strong>al</strong>yser les nûbât du <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa Karrâriyya.Nous avons bien voulu an<strong>al</strong>yser toutes les nûbât <strong>de</strong> ce <strong>répertoire</strong> car, chaquenûba possè<strong>de</strong> ses propres caractéristiques, et pour les dégager, nous avonssuivi <strong>la</strong> même métho<strong>de</strong> an<strong>al</strong>ytique qui s’est basée essentiellement sur lescomposants <strong>de</strong> chaque tba`, en l’occurence les ajnâs, les <strong>de</strong>grés fondamentauxou notes préférentielles et les qaflât qui caractérisent chaque tba`.A <strong>la</strong> fin <strong>de</strong> ce travail, nous avons parlé <strong>de</strong> l’évolution <strong>de</strong> cette musiqueen introduisant <strong>de</strong>s instruments musicaux, et <strong>de</strong> son nouveau rôle dans <strong>la</strong>société. Cette innovation dans l’exécution d’un art <strong>music<strong>al</strong></strong> à caractèrereligieux, a été inévitable compte tenu <strong>de</strong> l’importance du rôle qu’a <strong>la</strong> musiquenon seulement dans les pratiques <strong>de</strong>s a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong>, mais aussi dans <strong>la</strong>vie <strong>de</strong>s sfaxiens en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> <strong>la</strong> zâwiya. En effet, ce concert <strong>music<strong>al</strong></strong> quis’appelle hadhra est très présent dans le système cérémoniel <strong>de</strong>s fêtesfamili<strong>al</strong>es. Toutes les cérémonies famili<strong>al</strong>es qui nécessitent une animation<strong>music<strong>al</strong></strong>e peuvent être célébrées par <strong>la</strong> hadhra, comme elles peuvent l’être pard’autres formations <strong>music<strong>al</strong></strong>es. Toutefois, l’intervention <strong>de</strong> celle-ci restetoujours <strong>la</strong> plus appréciée par les sfaxiens, notamment dans les cérémonies <strong>de</strong>nzûl (une <strong>de</strong>s cérémonies <strong>de</strong> mariage) ce qui a encouragé plusieurs musiciens


6professionnels à se spéci<strong>al</strong>iser dans ce genre <strong>de</strong> musique et former une troupe<strong>music<strong>al</strong></strong>e qu’on lui donne le nom <strong>de</strong> hadhra.La déformation <strong>de</strong> cette musique ne va pas s’arrêter là car, au cours <strong>de</strong><strong>la</strong> <strong>de</strong>rnière décennie, les pratiques soufies sont <strong>de</strong>venues une sourced’inspiration pour les artistes. Parmi ces artistes, un musicien et un scénaristeont adapté une séance <strong>de</strong> hadhra à <strong>la</strong> scène et en faire un spectacle qu’ils l’ontbaptisé <strong>al</strong>-hadhra. Ainsi nous assistons à un transfert <strong>de</strong> pratiques soufiestraditionnelles sur une scène <strong>de</strong> spectacle où on a introduit <strong>de</strong>s instruments <strong>de</strong>musique occi<strong>de</strong>ntaux, déformé <strong>la</strong> musique par <strong>de</strong>s polyphonies voc<strong>al</strong>es et <strong>de</strong>sharmonies instrument<strong>al</strong>es et attaqué tout un rituel.Nous considérons que ces changements qu’a subi cette musique vontfinir par <strong>la</strong> déformer et par conséquent, nous <strong>la</strong> perdrons à jamais. Il faut doncfaire face à ces déformations. Ce travail n’est qu’une mo<strong>de</strong>ste contributiondans ce sens. « Il est certain, si nous voulons sauvegar<strong>de</strong>r et récupérer lesmusiques traditionnelles, avant qu’elles ne meurent <strong>de</strong> mâle mort dans cecharivari par l’industri<strong>al</strong>isation tentacu<strong>la</strong>ire, il faut enregistrer entièrement le<strong>répertoire</strong>, les morceaux que détiennent encore les maîtres et <strong>la</strong>isser lesmusiciens d’avenir trancher… L’essentiel est d’enregistrer, <strong>de</strong> conserver » (2).( 2 ) GUETTAT (Mahmoud), La musique c<strong>la</strong>sique du Maghreb, op. cit., p.306.


Glossaire <strong>de</strong>s mots arabes


379AAbyâtAçlAdhkârAdwârÂdhânAghçânAghânîAhbâsAhzâjAjnâsAkhtâmAllâh`Allâm`Am<strong>al</strong>AqfâlAshghâl`AwâmriyyaAwliyâ <strong>al</strong>-LâhAwqa`aAwzân: Pluriel <strong>de</strong> bayt: vers: Origine, racine, principe: Pluriel <strong>de</strong> dhikr: invocation à Dieu.: Pluriel <strong>de</strong> dawr: forme <strong>music<strong>al</strong></strong>e ; strophe.: Appel à <strong>la</strong> prière.: Pluriel <strong>de</strong> ghuçn: branche, hémistiche.: pluriel <strong>de</strong> 'ughnia : chanson.: Pluriel <strong>de</strong> hubus : biens <strong>de</strong> mainmorte.: Pluriel <strong>de</strong> hazaj ;.chant leger.: Pluriel <strong>de</strong> jins: genre.: Pluriel <strong>de</strong> khatm: nom d'un rythme, une <strong>de</strong>s parties <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba.: Dieu.: Fonction dans une <strong>confrérie</strong> <strong>religieuse</strong>: porteur <strong>de</strong> bannière.: Travail ; dans le milieu mystique, <strong>la</strong> pratique <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique.: Pluriel <strong>de</strong> qufl: fermoir.: Pluriel <strong>de</strong> shghul: forme poétique: Nom d'une <strong>confrérie</strong> <strong>religieuse</strong> à Sfax, fondée par `Âmir<strong>al</strong>-Mazûghî (m.1639).: Pluriel <strong>de</strong> w<strong>al</strong>y: saint.: Taper, percuter un corps sonore par <strong>la</strong> main ou par un objet.: Pluriel <strong>de</strong> wazn : rythmeBBanâdirBandîrBarakaBarw<strong>al</strong>BaytBeyBnâdrîBnâdriyya: Pluriel <strong>de</strong> bandîr ; Orchestre féminin qui joue le <strong>répertoire</strong><strong>music<strong>al</strong></strong> <strong>de</strong>s <strong>confrérie</strong>s <strong>de</strong> <strong>la</strong> région <strong>de</strong> Sfax.: Instrument <strong>de</strong> percussion très utilisé dans <strong>la</strong> musique <strong>religieuse</strong>.: Bénédiction.: Nom d'un rythme, une partie <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba.: vers.: Titre <strong>de</strong> noblesse turc attribué aux monarques <strong>de</strong> Tunis.: Joueur <strong>de</strong> bandîr.: Pluriel <strong>de</strong> bnâdrî.


380BtâyhîBurda: Nom d'un rythme, une partie <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba.: Poème très popu<strong>la</strong>ire dans le milieu soufi.CÇafâ'Çar`aÇûfÇûfiyyaÇafâqus: Pureté: Crise épileptique.: Laine: Soufi: Sfax, ville au sud Est <strong>de</strong> <strong>la</strong> Tunisie.DDarbûkaDawrDeyDharabaDharbDhikrDhîlDhurûbDrâbkîDrajDuffDum: Instrument <strong>de</strong> percussion.: forme <strong>music<strong>al</strong></strong>e spécifiquement égyptienne d'origine popu<strong>la</strong>ire.: Titre <strong>de</strong> noblesse turc.: Donner <strong>de</strong>s coups.: Du verbe dharaba: rythme.: Invocation à Dieu.: Nom d'un mo<strong>de</strong>.: Pluriel <strong>de</strong> dharb.: Joueur <strong>de</strong> darbûka.: Nom d'un rythme, une partie <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba.: Instrument <strong>de</strong> percussion.: Onomatopée représentant le temps fort d'un rythme, coup frappéau centre <strong>de</strong> <strong>la</strong> peau <strong>de</strong>s instruments <strong>de</strong> percussion traditionnels.FFârigha: Séquence instrument<strong>al</strong>e qui intervient entre <strong>de</strong>ux pièces voc<strong>al</strong>esdans <strong>la</strong> nûba traditionnelle.


381FâtihaFh<strong>al</strong>lFiqhFiraqFirqaFrûdâsht: Première sourate du Coran.: Instrument à vent.: Sciences <strong>de</strong> <strong>la</strong> religion.: Pluriel <strong>de</strong> firqa.: Orchestre.: Chant léger.GGhammâzGhaz<strong>al</strong>Ghuçn: Un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>grés pivots dans le développement d'un maqâm.: Chant à rythme lent.: branche, hémistiche.HHadhraHadîthHaqîqaHarâmHashuHazajHizbHsînHûHubus: Rassemblement <strong>de</strong>s a<strong>de</strong>ptes, <strong>répertoire</strong> <strong>music<strong>al</strong></strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique soufie.: Paroles du prophète.: Vérité.: Illicite.: Remplissage.: Mètre léger, rythme, chant léger.: Section <strong>de</strong> <strong>confrérie</strong> sous le patronage d'un muqaddim.: Nom d'un mo<strong>de</strong>.: Hûwa, lui, Dieu.: Biens <strong>de</strong> mainmorte.IIçba`aynIçbahânIlâhImâm: Nom d'un mo<strong>de</strong>.: Nom d'un mo<strong>de</strong>.: Dieu.: Titre religieux.


382InshâdÎqâ`Îqâ`ât`Iqd`ÎssâwiyyaislâmiyaIstiftâh: Chant.: Percussion, rythme.: pluriel <strong>de</strong> 'îqâ`.: Tétracor<strong>de</strong>.: Nom d'une <strong>confrérie</strong> <strong>religieuse</strong>.: Is<strong>la</strong>mique.: Une <strong>de</strong>s parties <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba traditionnelle.JJahrîJâma`JinsJawq: À haute voix.: Mosquée.: Cellule.: Orchestre.KKa`baKarrâriyyakhâfîKhafîfkharjaKhutbaKuttâb: La Mecque.: Nom d'une <strong>confrérie</strong> <strong>religieuse</strong> fondée par Abû <strong>al</strong>-Hasan<strong>al</strong>-KARRÂY (1617-1693).: Muet.: Nom d'un rythme, une partie <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba.: Sortie, strophe fin<strong>al</strong>e.: Discours religieux.: Ecole coranique.MMabda'MajâlisMajlisMâlûf: La note <strong>de</strong> départ dans le développement d'un maqâm.Pluriel <strong>de</strong> majlis.: Réunion <strong>de</strong>s a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa <strong>al</strong>-Karrâriyya.: Répertoire <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique traditionnelle tunisienne.


383MaqâmMarâkizMarkazMat<strong>la</strong>`MazmûmMçaddarMjarradMouledMuftîMuharrikmuharrikâtMhayyar `irâqMurîdMurîdînMustazâdMuwashshahMuznim ouMuzannam: Mo<strong>de</strong>.: Pluriel <strong>de</strong> markaz.: Station, point d'arrêt momentané.Début, point <strong>de</strong> départ.: Non d'un mo<strong>de</strong>: Nom d'un rythme, une partie <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba.: Nom d'un rythme: L'anniversaire du Prophète Mohamed.: Titre religieux.: Chant à rythme moins long que celui qui le précè<strong>de</strong> ( le trâna).: Pluriel <strong>de</strong> Muharrik.: Non d'un mo<strong>de</strong>: A<strong>de</strong>pte, aspirant.: Pluriel <strong>de</strong> murîd.: Morceau ajouté.: Forme <strong>de</strong> prose et <strong>de</strong> composition voc<strong>al</strong>e arabo-and<strong>al</strong>ouse.: Artificiel.NnaghmaNaqîbNashîdNawâNûbaNûriyyaNzûl: Mo<strong>de</strong>, mélodie.: <strong>Le</strong> shâwish <strong>de</strong> <strong>la</strong> zâwiya.: Correspond au qawl.: Nom d'un mo<strong>de</strong>.: Suite <strong>de</strong> concert arabo-and<strong>al</strong>ouse.: Nom d'une tarîqa fondée par Ali NÛRÎ mort en 1708 à Sfax.: Une étape <strong>de</strong> l'ensemble <strong>de</strong>s cérémonies <strong>de</strong> mariage.QQâdhîQâdriyyaQ<strong>al</strong>bîQarâr: Magistrat.: Nom d'une tarîqa fondée par `Abd <strong>al</strong>-Qâdir <strong>al</strong>-Jîlânî (1077-1166).: du cœur, muet.: Note fin<strong>al</strong>e, tonique.


384QawâlQawâ<strong>la</strong>QawlQaçîdaQufl: Chanteur.: Pluriel <strong>de</strong> qawâl.: Une récitation modulée.: Poème.: Fermoir, une <strong>de</strong>s parties du muwashshah.RRaçdRaçd <strong>al</strong>-dhîlRaddâdRafâ`iyyaRahâwîRamlRaml <strong>al</strong>-mâyaRibâtRîsha: Nom d'un mo<strong>de</strong>.: Nom d'un mo<strong>de</strong>.: Chanteur <strong>de</strong> choeur.: Nom d'une tarîqa.: Nom d'un mo<strong>de</strong>.: Nom d'un mo<strong>de</strong>.: Nom d'un mo<strong>de</strong>.: Tour <strong>de</strong> contrôle: Plectre.SSa`dâwîSamâ`Samâ`î thaqîlShâdhliyyaSharî`aSharqîShâwishShaykhShughulSîdîSîkaSilsi<strong>la</strong>SunnaSûrat: Rythme popu<strong>la</strong>ire à douze temps (Tunisie).: Audition <strong>music<strong>al</strong></strong>e spirituelle.: Nom d’un rythme (10/8): Ordre religieux fondé par Abû-l-Hassan ash-Shâdhly (m. 656 h.): La loi canonique <strong>de</strong> l'Is<strong>la</strong>m: Orient<strong>al</strong>: Huissier.: <strong>Le</strong> chef spirituel.: Littér<strong>al</strong>ement travail. Chant traditionnel é<strong>la</strong>boré(musique arabo-and<strong>al</strong>ouse).: Mon maître.: Nom d'un mo<strong>de</strong>.: Une séquence instrument<strong>al</strong>e dans une <strong>de</strong>s parties <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba.: La tradition du prophète.: Verset


385TTaçawwufTajwîdTa`mîrTâkTâmTârTarîqaTarrârjîTartîlTajwîdTawqTba`Tb<strong>al</strong>TrânaTubû`TuruqTûshya: Soufisme: Ps<strong>al</strong>modie coranique: Remplissage.: Percussion aigue.: Complet, parfait.: Tambour sur cadre à cymb<strong>al</strong>ettes mét<strong>al</strong>liques, tenu dans<strong>la</strong> main gauche et frappé <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux mains.: Ordre religieux, <strong>confrérie</strong>.: Joueur <strong>de</strong> târ.: Récitation coranique: Récitation richement modulée du Coran: Une séquence instrument<strong>al</strong>e dans <strong>la</strong> partie mçaddar<strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba du mâlûf composée sur un rythme rapi<strong>de</strong>.: Caractère, appel<strong>la</strong>tion du mo<strong>de</strong> en Tunisie.: Tambour: Chant à rythme moins long que celui qui le précè<strong>de</strong>.: Pluriel <strong>de</strong> tba`: Pluriel <strong>de</strong> tarîqa.: Une pièce interca<strong>la</strong>ire instrument<strong>al</strong>e dans <strong>la</strong> nûba du mâlûf.WWafâ'iyyaWajdW<strong>al</strong>yWazn: Ordre religieux fondé par Muhammad wafâ' <strong>al</strong>-Iskandarânî(1303-1358).: Extase.: Saint.: Rythme.ZZaj<strong>al</strong>Zakkâr: Forme poétique.: Joueur <strong>de</strong> zukra.


386ZawâyâZâwiyaZîtûnaZqâq <strong>al</strong>-dhabZuhhâdZukra: Pluriel <strong>de</strong> zâwiya.: Lieu <strong>de</strong> rassemblement <strong>de</strong>s a<strong>de</strong>ptes <strong>de</strong> <strong>la</strong> tarîqa.: Olivier, nom <strong>de</strong> <strong>la</strong> gran<strong>de</strong> mosquée <strong>de</strong> Tunis.: Quartier <strong>de</strong> <strong>la</strong> vieille ville <strong>de</strong> Sfax: Pluriel <strong>de</strong> zâhid.: Instrument <strong>de</strong> musique semb<strong>la</strong>ble à un hautbois démuni <strong>de</strong> ses clefs.


Bibliographie commentéecommentée


388`ABD AL-SALAM (Ahmad), "<strong>Le</strong>s historiens tunisiens <strong>de</strong>s 17ème, 18ème,et 19ème siècles, essai d'histoire culturelle", Paris, Cklineksiech, 1973, 220 p.Dans cet ouvrage, outre l'étu<strong>de</strong> intéressante sur <strong>la</strong> vie culturelle,l'auteur donne une biographie complète <strong>de</strong> plusieurs historiens et savants <strong>de</strong><strong>la</strong> Tunisie du 17ème, 18ème, et 19ème siècles.`ABD AL-WAHHAB (Hasan Husnî), "<strong>Le</strong> développement <strong>de</strong> <strong>la</strong> musiquearabe en Orient, Espagne et Tunisie", in: Revue tunisienne, tome XXV,1918, pp. 106-117.Etu<strong>de</strong> portant sur l'origine <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique arabe et <strong>de</strong> sondéveloppement en Espagne et en Tunisie.`ABD AL-WAHHAB (H.H.), "Waraqât `an <strong>al</strong>-hadhâra <strong>al</strong>-`arabiyya biifrîqiyya <strong>al</strong>-tûnisiyya" (Feuillets. Etu<strong>de</strong>s sur certains aspects <strong>de</strong> <strong>la</strong> civilisationarabe en Tunisie), Tunis, Librairie <strong>al</strong>-manar, 1981, 532 p.<strong>Le</strong> plus intéressant pour notre propos dans cet ouvrage d'histoiregénér<strong>al</strong>e <strong>de</strong> <strong>la</strong> Tunisie c'est <strong>la</strong> partie consacrée à <strong>la</strong> musique d'une façongénér<strong>al</strong>e.AHWANI (`Ab<strong>de</strong>l <strong>al</strong>-`Azîz), "Al-zaj<strong>al</strong> fî <strong>al</strong>-And<strong>al</strong>us" (<strong>Le</strong> zaj<strong>al</strong> enAnd<strong>al</strong>ousie), le Caire, Dâr <strong>al</strong> ma`ârif, 1957, 134 p.Etu<strong>de</strong> intéressante sur le zaj<strong>al</strong>, son origine, sa structure et sapropagation.`ALLAF (`Abd <strong>al</strong>-Karim), "Al-tarab `inda <strong>al</strong>-`arab" (<strong>Le</strong> chant chez lesarabes), Bagdad, Librairie <strong>al</strong> adib, 1963, 256 p.


389Une etu<strong>de</strong> portant sur l'histoire du chant arabe en orient <strong>de</strong> <strong>la</strong> jâhiliyyajusqu'aux Abbassi<strong>de</strong>s; <strong>Le</strong> chant en And<strong>al</strong>ousie; les mo<strong>de</strong>s, <strong>la</strong> poésie, et lesinstruments <strong>de</strong> musique.Anonyme, "Al-Shajarah dhât <strong>al</strong>-akmâm <strong>al</strong>-hâwiya li-'usûl <strong>al</strong>-anghâm"(L'arbre à c<strong>al</strong>ices contenant les fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s), éd. critiquée parKHASHABA (GHATTAS `Abd <strong>al</strong>-M<strong>al</strong>ik) et FATHALLAH, le Caire, Al-Hayât <strong>al</strong>-miçriyya <strong>al</strong>-`âmma lil-kitâb, 1983, , 163 p.Ce traité, dont nous ignorons l'auteur et <strong>la</strong> date exacte, contient <strong>de</strong>srenseignements très intéressants sur l'état <strong>de</strong> <strong>la</strong> théorie <strong>music<strong>al</strong></strong>e dans <strong>la</strong>pério<strong>de</strong> qui a précédé l'avènement <strong>de</strong> l'école mo<strong>de</strong>rne.ANÇARI (Zakariyya), "Riâdh <strong>al</strong>-sâlihîn wa tuhfat <strong>al</strong>-muttaqîn", manuscrit,bibliothèque nation<strong>al</strong>e <strong>de</strong> Tunis n. 19649.Une biographie intéressante <strong>de</strong> plusieurs maîtres soufi tunisien duXVIème et XVIIème siècles. Notons que ce manuscrit fut transcrit par leshaykh KARRAY.`AÇI (Mikhâ'îl), "Al-shi`r wa <strong>al</strong>-bî'a fî <strong>al</strong>-and<strong>al</strong>us" (<strong>la</strong> poésie etl'environnement en And<strong>al</strong>ousie), Beyrouth, Dâr <strong>al</strong> hayât, 1970, 142 p.Une étu<strong>de</strong> intéressante sur <strong>la</strong> vie politique et soci<strong>al</strong>e, et son rôle dansle développement <strong>de</strong> <strong>la</strong> poésie and<strong>al</strong>ouse <strong>de</strong>puis <strong>la</strong> qaçîda c<strong>la</strong>ssique jusqu'aumuwashshah.ALLAWIRDI (Mikhâ'îl), "F<strong>al</strong>safat <strong>al</strong>-mûsîqâ <strong>al</strong>-sharqiyya" (<strong>la</strong> philosophie<strong>de</strong> <strong>la</strong> musique orient<strong>al</strong>e), Damas, Dâr <strong>al</strong> kitâb, 1949, 672 p.C'est une étu<strong>de</strong> intéressante sur les différentes questions <strong>de</strong>s pointsesthétiques et acoustiques <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique arabe.


390ANIS (Ibrâhîm), "Mûsîqâ <strong>al</strong>-shi`r" (<strong>la</strong> musique poétique) le Caire, Dâr <strong>al</strong>ma`ârif,1972, 361 p.Cette étu<strong>de</strong> comprend à <strong>la</strong> fois un aspect historique et théorique <strong>de</strong> <strong>la</strong>poésie arabe.ARNOLD (P. H.), et GUILLAUME (A.), "The ligacy of Is<strong>la</strong>m", Oxford,1931.Cet ouvrage qui contient un article <strong>de</strong> H.G. Farmer sur <strong>la</strong> musiquearabe (pp. 356-375) est traduit en arabe par (Jarjîs FATHALLAH), turâth <strong>al</strong>-Islâm (le patrimoine <strong>de</strong> l'Is<strong>la</strong>m).ARBERRY (A.J.), "<strong>Le</strong> soufisme. La mystique <strong>de</strong> l'Is<strong>la</strong>m", Paris, <strong>Le</strong> mail,1988, 150 p.Il s'agit ici d'une étu<strong>de</strong> génér<strong>al</strong>e sur les conceptions fondament<strong>al</strong>es <strong>de</strong><strong>la</strong> tradition mystique <strong>de</strong> l'Is<strong>la</strong>m. En plus, l'auteur a cité les plus importantspersonnages <strong>de</strong> cette tendance <strong>religieuse</strong>, leurs biographies, leurs ouvrages, etsurtout leur propres conceptions en ce domaine.`AYYAD (Shokrî Mohammad), "Mûsîqâ <strong>al</strong>-shi`r <strong>al</strong> `arabî" (<strong>la</strong> musique <strong>de</strong><strong>la</strong> poésie arabe), le Caire, Al-matba`a <strong>al</strong>-thaqâfiyya, 1968, 147 p.c'est un projet pour une étu<strong>de</strong> scientifique <strong>de</strong> <strong>la</strong> poésie arabe. L'auteurse base dans son an<strong>al</strong>yse sur <strong>de</strong>s données à <strong>la</strong> fois linguistiques et <strong>music<strong>al</strong></strong>es.BARBES ( Léo-lui), "<strong>la</strong> musique dans l'Afrique du Nord", in: Encyclopédie<strong>de</strong> <strong>la</strong> musique, Paris, Fasquelle, 1961, pp. 940-943.cet article nous donne un sommaire <strong>de</strong>s différents genres <strong>de</strong> <strong>la</strong>musique maghrébine, écrit par un fin connaisseur, mais non sans <strong>la</strong>cunes,surtout dans <strong>la</strong> musique c<strong>la</strong>ssique.


391BARKECHLI (Mehdi), "<strong>Le</strong>s échelles régulières du cycle <strong>de</strong>s quintes etleurs déformations occasionnelles dans les cadres non pentatoniques", in: Larésonance dans les échelles <strong>music<strong>al</strong></strong>es, Paris, C.N.R.S., 1963, pp. 173-182.Communication présentée lors du Colloque internation<strong>al</strong> sur "Larésonance dans les échelles <strong>music<strong>al</strong></strong>es" qui s'est tenu à l'Université <strong>de</strong> Parisdu 9 au 14 mai 1960, dans le cadre <strong>de</strong>s Colloques internationaux du C.N.R.S.Elle soulève plusieurs questions sur <strong>la</strong> théorie <strong>music<strong>al</strong></strong>e en génér<strong>al</strong>, et celle <strong>de</strong><strong>la</strong> musique orient<strong>al</strong>e en particulier.BARKECHLI (Mehdi), "Quelques idées nouvelles sur <strong>la</strong> consonance", in:Acoustique <strong>music<strong>al</strong></strong>e, Paris, C.N.R.S., 1959, pp. 21-28.Il s'agit <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux communications présentées à Marseille du 27 au 29mai 1958 lors du colloque internation<strong>al</strong> d'acoustique <strong>music<strong>al</strong></strong>.BEN `ABD <strong>al</strong>-JALIL (`Abd <strong>al</strong>-`Azîz), "Madkh<strong>al</strong> ilâ târîkh <strong>al</strong>-mûsîqâ <strong>al</strong>maghribiyya"(Introduction à l'histoire <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique marocaine), le Koweit,`A<strong>la</strong>m <strong>al</strong>-Ma`rifa, 1983, 260 p. Conseil nation<strong>al</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> Culture, <strong>de</strong>s Arts et <strong>de</strong><strong>la</strong> Littérature.C'est une étu<strong>de</strong> historique sur <strong>la</strong> musique marocaine <strong>de</strong>puis lesorigines jusqu'à l'époque <strong>de</strong> <strong>la</strong> dynastie `a<strong>la</strong>ouite (actuellement en règne), enpassant par les diverses dynasties qui se sont succédées sur le Maroc. Il traiteég<strong>al</strong>ement <strong>de</strong> <strong>la</strong> notation <strong>music<strong>al</strong></strong>e <strong>de</strong>s écoles <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique and<strong>al</strong>ouse.BEN ABDERRAZAK (M. Saif<strong>al</strong><strong>la</strong>h), "<strong>Le</strong>s orchestres arabes mo<strong>de</strong>rnes,influence <strong>de</strong> l'organologie occi<strong>de</strong>nt<strong>al</strong>e et les problèmes d'acculturation",Thèse <strong>de</strong> Doctorat, soutenue à Paris IV, <strong>la</strong> Sorbonne, 1999, 724p.


392BOURILLY (Joseph), "Elements d'ethnographie marocaine, publié par E.Laoust, Paris, Librairie coloni<strong>al</strong>e et orient<strong>al</strong>iste, 1932, 264 p.Etu<strong>de</strong> ethnographique intéressante sur le Maroc. le chapitre XIV (pp.231-254) le plus intéressant, étudie <strong>la</strong> musique berbère, les chants et lesdanses <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique popu<strong>la</strong>ire marocaine.BRAILOIU (Constantin), "<strong>Le</strong> rythme aqçâq" in: Revue <strong>de</strong> musicologie,Paris, Décembre 1951 pp. 71-108.C'est le résumé d'une communication faite à <strong>la</strong> Société française <strong>de</strong>musicologie, le 28/6/1951, sur le rythme "boiteux" qui est <strong>la</strong> traduction duterme arabo-turc aqçâq. La notice parle <strong>de</strong> ce système rythmique particulieret souligne sa présence non seulement dans <strong>la</strong> musique Bulgare, maiség<strong>al</strong>ement dans beaucoup d'autres musiques. Elle se termine par uneénumération suivie d'un tableau qui résume les ressources essentielles <strong>de</strong> a<strong>la</strong>qçâq.BROCKELMANN (Carl), "Geschichte <strong>de</strong>r Is<strong>la</strong>mischen Völker undStaaten", München und Berlin, 1939. Trad. française <strong>de</strong> TAZEROUT,Histoire <strong>de</strong>s peuples et <strong>de</strong>s états is<strong>la</strong>miques <strong>de</strong>puis les origines jusqu'à nosjours, Paris, Payot, 1949, 478 p.; trad. arabe par FARIS (Amîn) etBA`LABAKKI (Munîr), Târîkh <strong>al</strong>-shu`ûb <strong>al</strong>-islâmiyya, Beyrouth, 5ème éd.,1968, 901 p.Il s'agit <strong>de</strong> l'une <strong>de</strong>s premières étu<strong>de</strong>s véritablement scientifiques etorigin<strong>al</strong>es sur le développement historique <strong>de</strong>s peuples is<strong>la</strong>miques <strong>de</strong>puis lesorigines jusqu'à nos jours. Cet ouvrage est indispensable à toute personnedésirant se documenter sérieusement sur l'histoire <strong>de</strong>s peuples et <strong>de</strong>s étatsis<strong>la</strong>miques.


393BUCHNER (Alexandre), "Encyclopédie <strong>de</strong>s instruments <strong>de</strong> musique" ,Paris, Gründ, 1980, troisième tirage 1985..BURCKARDT (Titus), "Introductions aux doctrines ésotériques <strong>de</strong>l'Is<strong>la</strong>m", Paris, Derving-livres, 1969, 187 p.C'est une étu<strong>de</strong> sur les doctrines ésotériques <strong>de</strong> l'Is<strong>la</strong>m. Son auteur abien évi<strong>de</strong>mment traité les conceptions sous-jacentes du soufisme qu'unmusulman ordinaire n'est génér<strong>al</strong>ement pas sensé à connaître pour accomplirau mieux ses pratiques d'adoration <strong>de</strong> Dieu, en l'occurrence les cinq piliers <strong>de</strong>l'Is<strong>la</strong>m dont <strong>la</strong> prière est <strong>la</strong> plus importante.CARDET (louis), "Un problème <strong>de</strong> mystique comparée: La mention du nomdivin (dhikr) dans <strong>la</strong> mystique musulmane", in: Revue thomiste, T. 1, 2, n°1,1952, pp. 642-671, et T. 1, 3, n°1, 1953, pp. 197-216.Dans cet article l'auteur a présenté quelques notions assez vagues surle soufisme en mettant le point sur le terme dhikr qu'il considère comme étantle mot-clef dans <strong>la</strong> recherche <strong>de</strong> <strong>la</strong> vérité divine pour les investigateurs dansle domaine du mysticisme musulman.CARRA <strong>de</strong> VAUX (Baron Bernard), "<strong>Le</strong>s penseurs <strong>de</strong> l'Is<strong>la</strong>m", Paris, PaulGeuthner, 1926, 5 vol.CHABRIER (Jean-C<strong>la</strong>u<strong>de</strong>), "Eléments d'une approche comparative <strong>de</strong>séchelles théoriques arabo-irano-turques", in: Revue <strong>de</strong> Musicologie, LXXI,Paris, 1985, n° 1-2, pp. 39-78.Cette étu<strong>de</strong> propose une métho<strong>de</strong> comparative <strong>de</strong>s échelles araboirano-turquesactuellement utilisées, et leur confrontation avec les systèmesd'interv<strong>al</strong>les et les échelles décrits dans les traités <strong>de</strong> l'Is<strong>la</strong>m médiév<strong>al</strong>.


394CHABRIER (Jean-C<strong>la</strong>u<strong>de</strong>), "Problèmes contemporains du musicien et <strong>de</strong><strong>la</strong> musique dans le mon<strong>de</strong> orient<strong>al</strong> selon l'école <strong>de</strong> Bagdad", in: Revue <strong>de</strong>psychologie <strong>de</strong>s peuples, mars 1977, 32e année, pp. 37-67.CHEBEL (MALEK), Dictionnaire <strong>de</strong>s symboles musulmans, Paris, AlbinMichel, coll. spiritu<strong>al</strong>ité vivantes, 1995, 501 p.Ce dictionnaire nous présente <strong>de</strong>s définitions et <strong>de</strong>s petits aperçushistoriques <strong>de</strong> plusieurs mots clés et symboles musulmans, ainsi que <strong>de</strong>sacceptions sommaires <strong>de</strong>s principaux termes soufis.CHELBI (Mustapha), "Musique et société en Tunisie", Tunis, Sa<strong>la</strong>mbô,1985, 178 p.L'auteur utilise <strong>la</strong> musique pour "faciliter l'accès à l'histoire <strong>de</strong> <strong>la</strong>société et à <strong>la</strong> vie quotidienne. Il s'agit d'un travail intéressant dans cetteoptique. Cependant, le manque <strong>de</strong> formation <strong>music<strong>al</strong></strong>e <strong>de</strong> l'auteur ressort àtravers <strong>de</strong>s erreurs techniques manifestes, notamment dans <strong>la</strong> partie intitulée"communication d'un espace". L'annexe <strong>de</strong> ce livre comprend les textespoétiques en <strong>la</strong>ngue arabe <strong>de</strong>s différents chants cités dans l'ouvrage.CHOTTIN (Alexis), "Tableau <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique marocaine", Paris, Paulgeuthner, 1938, 223 p. (+ XVIII p<strong>la</strong>nches hors texte)Ce tableau comporte <strong>de</strong>ux parties. Dans <strong>la</strong> première partie, l'auteurtraite <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique berbère dans <strong>la</strong> région centr<strong>al</strong>e. Dans <strong>la</strong> <strong>de</strong>uxième partie,l'auteur parle <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique arabe et <strong>de</strong> ses composantes: <strong>la</strong> musiquec<strong>la</strong>ssique et <strong>la</strong> musique popu<strong>la</strong>ire.


395COMITE SUPERIEUR DE LA MUSIQUE, "tûrâthunâ <strong>al</strong>-mûsîqî" ( notrepatrimoine <strong>music<strong>al</strong></strong>), publié par le comité supérieur <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique sous <strong>la</strong>direction <strong>de</strong> Ahmad SHAFIQ abû `ûf, avec M.A. HAFNI et ibrâhîm SHAFIQ,le Caire. Dâr <strong>al</strong>-ma`ârif, ( 4 vol. parus).Outre leurs introductions historiques, ces quatre volumes contiennentle texte poétique et <strong>la</strong> transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e d'un grand nombre <strong>de</strong> adwâr et<strong>de</strong> mûwashshahât composés par les musiciens <strong>de</strong> l'école arabe orient<strong>al</strong>e.CORAN (<strong>Le</strong>), Livre saint <strong>de</strong> l'Is<strong>la</strong>m.Al-Qur'ân (le Coran) renferme les enseignements divinstransmis au Prophète Muhammad par l'ange Gabriel. Il comporte 114chapitres (sourates), subdivisés en versets ('Ayât, plur. <strong>de</strong> 'Aya), dontle nombre varie entre 286 pour le chapitre le plus long, et 3 pour leplus court.DEMENGHEM (Emile), "<strong>Le</strong> culte <strong>de</strong>s saints dans l'is<strong>la</strong>m maghrébin",Paris, G<strong>al</strong>limard, 1982, 382 p.Dans cet ouvrage, l'auteur a étudié <strong>la</strong> tradition soufi, les rites et lespratiques <strong>de</strong>s popu<strong>la</strong>tions <strong>de</strong> l'Afrique septentrion<strong>al</strong>e. Cependant, onremarque qu'il évoque surtout le cas <strong>de</strong> l'Algérie; <strong>de</strong> ses plus grandspersonnages mystiques et <strong>de</strong> leurs sanctuaires, et du déroulement <strong>de</strong> leursfêtes et <strong>de</strong> leurs pratiques rituelles.DEPONT ET COPOLLANI, "<strong>Le</strong>s <strong>confrérie</strong>s <strong>religieuse</strong>s musulmanes",Alger, 1897, 600 p.Cet ouvrage est considéré comme le premier grand traité <strong>de</strong> <strong>la</strong>mystique musulmane du Maghreb. Ses <strong>de</strong>ux auteurs essaient <strong>de</strong> faire <strong>la</strong>synthèse <strong>de</strong> l'ensemble <strong>de</strong>s ouvrages consacrés aux <strong>confrérie</strong>s qu'ils qu<strong>al</strong>ifient


396<strong>de</strong> mystérieuses. Ils donnent une étu<strong>de</strong> sur les origines <strong>de</strong>s <strong>confrérie</strong>s<strong>religieuse</strong>s, leur évolution et leur organisation. Notons cependant que si lesinformations et les exemples recueillis proviennent d'Algérie, sont hé<strong>la</strong>sattribués à tous les pays <strong>de</strong> l'Afrique du Nord.DOZY (Reinhart Peter Anne), "L'histoire <strong>de</strong>s musulmans d'Espagnejusqu'à <strong>la</strong> conquête <strong>de</strong> l'And<strong>al</strong>ousie par les Almuravi<strong>de</strong>s", <strong>Le</strong>y<strong>de</strong>, 1932, (711-1010), éd. revue et mise à jours par E.Lévi-Provenç<strong>al</strong>, 3 vol.une excellente documentation historique sur <strong>la</strong> vie politique,soci<strong>al</strong>e, et culturelle <strong>de</strong> l'Espagne musulmane.DUBOULOZ-LAFFIN (M.Louise), "<strong>Le</strong> bou-Mergoud. Folklore tunisien.Croyances et coutumes popu<strong>la</strong>ires <strong>de</strong> Sfax et <strong>de</strong> sa région", Paris,Maisonneuve, 1946, 316p.Cet un ouvrage ethnographique dans lequel l'auteur, qui a séjournéquelques années dans cette région, décrit les coutumes et les croyances <strong>de</strong>shabitants <strong>de</strong> Sfax, c'est-à-dire tout ce qui touche à <strong>la</strong> vie quotidienne <strong>de</strong>l'individu <strong>de</strong>puis <strong>la</strong> naissance jusqu'à <strong>la</strong> mort.DUBOULOZ-LAFFIN (M.Louise), "Confréries <strong>religieuse</strong>s à Sfax", in:Revue en terre <strong>de</strong> l'Is<strong>la</strong>m, pp. 175-201,Bref aperçu historique sur les plus importantes <strong>confrérie</strong>s <strong>de</strong> <strong>la</strong> région.L'auteur a essayé en plus <strong>de</strong> décrire quelques séances d'adorations que lessoufis <strong>de</strong> <strong>la</strong> régions et du Maghreb d'une façon génér<strong>al</strong>e appellent dhikr.DULAYMI (Mûhammad Nâyif), "Dîwân <strong>al</strong>-muwashshahât <strong>al</strong>-mawçiliyya",(recueil <strong>de</strong>s muwashshahât <strong>de</strong>s mousoul), Fès, 1975, 252 p.


397Ce recueil contient une préface brève mais documentée sur l'origine et<strong>la</strong> structure du muwashshah. Il nous présente <strong>de</strong>s muwashshahât appartenantà <strong>de</strong>s poètes originaires du Mousoul et vivant entre le XIème et le XXèmesiècle.DURING (Jean), "La musique iranienne: Tradition et évolution", Paris,Recherche sur les civilisations, 1984, 243 p.Etu<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique traditionnelle <strong>de</strong> l'Iran sous ses <strong>de</strong>ux aspects :1e/ - socio-culturel, qui met en évi<strong>de</strong>nce les lieux d'apprentissage et <strong>de</strong>pratique <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique iranienne, ainsi que les techniques suivies (notation<strong>music<strong>al</strong></strong>e, enregistrements...).2è/ - <strong>music<strong>al</strong></strong>, comprenant l'étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s instruments et <strong>de</strong> leur technique <strong>de</strong> jeu,l'échelle et les mo<strong>de</strong>s, les différentes formes <strong>de</strong> chant et les stylesd'interprétation <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique iranienne.Cette étu<strong>de</strong> comprend ég<strong>al</strong>ement <strong>la</strong> transcription d'exemples <strong>de</strong> musiquetraditionnelle iranienne.DURING (Jean), "Musique et mystique dans les traditions <strong>de</strong> l'Iran",Institut française <strong>de</strong> recherche en Iran, I.F.R.I-Peeters, Paris, 1989, 688 p.DUVELLE (Charles), "La musique orient<strong>al</strong>e en Afrique noir", in: <strong>la</strong> RevueMusic<strong>al</strong>e (réunion <strong>de</strong> Yaoundé-Cameroun, organisée par l'U.N.E.S.C.O, 23-27 Février 1970), Paris, U.N.E.S.C.O, 1972, pp. 95-116.Il s'agit d'une tentative fiable, donnant les gran<strong>de</strong>s lignes du cadreméthodologique dans lequel se situe l'approche d'une influence réciproqueentre <strong>la</strong> musique orient<strong>al</strong>e et <strong>la</strong> musique africaine avant et après l'Is<strong>la</strong>m.EDITH (Gerson-Kiwi), "<strong>Le</strong> musicien dans <strong>la</strong> société d'orient etd'occi<strong>de</strong>nt" : Culture, vol. 1, n o 1, Paris-Unesco, 1973, p.196.


398ERLANGER (Baron Rodolphe d'), "La musique arabe", Paris, PaulGeuthner, 1930-1959, 6 vol.t.I: <strong>al</strong>-FARABI, Kitâb <strong>al</strong>-mûsîqâ <strong>al</strong>-kabîr (<strong>Le</strong> grand livre <strong>de</strong>musique), 1ère partie, 1930, 329 p.t.II: <strong>al</strong>-FARABI, Kitâb <strong>al</strong>-mûsîqâ <strong>al</strong>-kabîr (<strong>Le</strong> grand livre <strong>de</strong>musique), 2ème partie, pp. 1-101; IBN SINA, Kitâb <strong>al</strong>-shifâ' (Livre <strong>de</strong> <strong>la</strong>guérison),1935, pp. 105-245.t.III: SAFIYYU <strong>al</strong>-DIN, <strong>al</strong>-Risâ<strong>la</strong> <strong>al</strong>-sharafiyya fî <strong>al</strong>-mûsîqâ(Epître à Sharaf <strong>al</strong>-Dîn sur les rapports harmoniques), pp. 1-182; SAFIYYU<strong>al</strong>-DIN, Kitâb <strong>al</strong>-adwâr fî ma`rifat <strong>al</strong>-anghâm w<strong>al</strong>-adwâr (Livre <strong>de</strong>s cyclesmusicaux), avec le commentaire intitulé Sharh mawlânâ Mubârak Shâh (<strong>de</strong>`Alî <strong>al</strong>-JURJANI), 1938, pp. 183-566.t.IV: Anonyme, Traité dédié au Sultân Osmanlî Muhammad II,pp. 1-264; <strong>al</strong>-LADHIQI, <strong>al</strong>-Risâ<strong>la</strong> <strong>al</strong>-fathiyya fî <strong>al</strong>-mûsîqâ (Epître sur <strong>la</strong>musique), 1939, pp. 265-498.t.V: Essai <strong>de</strong> codification <strong>de</strong>s règles usuelles <strong>de</strong> <strong>la</strong> musiquearabe mo<strong>de</strong>rne, 1949, 426 p.t.VI: Essai <strong>de</strong> codification <strong>de</strong>s règles usuelles <strong>de</strong> <strong>la</strong> musiquearabe mo<strong>de</strong>rne (suite), 1959, 644 p.Il s'agit d'une traduction intégr<strong>al</strong>e <strong>de</strong>s principaux traités théoriquesarabes. <strong>Le</strong>s tomes V et VI offrent un sérieux essai <strong>de</strong> codification et <strong>de</strong>c<strong>la</strong>ssification <strong>de</strong>s règles et <strong>de</strong>s formes usuelles <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique traditionnelle <strong>de</strong>l'Orient et du Maghreb arabe. Ces précieux volumes, offrent une étu<strong>de</strong>


399complète sur les systèmes ton<strong>al</strong>, mod<strong>al</strong> et rythmique <strong>de</strong> <strong>la</strong> musiquetraditionnelle arabe.ERLANGER (<strong>Le</strong> Baron Rodolphe d'), "Mélodies tunisiennes", Paris, PaulGeuthner, 1937, 38 p.Un recueil <strong>de</strong> 16 mélodies tunisiennes avec <strong>la</strong> transcription et <strong>la</strong>traduction <strong>de</strong>s paroles <strong>de</strong> chaque mélodie. Nous trouvons à l'introduction untraité sur <strong>la</strong> musique en Tunisie: échelles, tubû`, rythmes, musiquetraditionnelle et musique popu<strong>la</strong>ire.FARABI (Abû Naçr), "Kitâb <strong>al</strong>-mûsîqâ <strong>al</strong>-kabîr" (grand traité <strong>de</strong> <strong>la</strong>musique), texte édité et annoté par Ghattâs `abd <strong>al</strong>-m<strong>al</strong>ik khashaba, révisé etintroduit par Mahmûd Ahmad <strong>al</strong>-Hafnî, le Caire, 1967, 1210 p. Trad.française intégr<strong>al</strong>e par le Baron Rodolphe d'Er<strong>la</strong>nger, in: <strong>la</strong> musique arabe, t.I et II, Paris, Paul Geuthner, 1930-1935. XXVIII + 329 + 101 p.Composé <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux traités renfermant, huit discours et quatrerespectivement. <strong>Le</strong> second traité est m<strong>al</strong>heureusement introuvable. <strong>Le</strong>s huitdiscours du premier traité, comportent quatre livres subdivisés en <strong>de</strong>uxparties :1 - le livre d'introduction : précieux document sur <strong>la</strong> philosophie<strong>music<strong>al</strong></strong>e.2 - le livre <strong>de</strong>s éléments; le livre <strong>de</strong>s instruments et le livre <strong>de</strong> <strong>la</strong>composition. Selon une métho<strong>de</strong> origin<strong>al</strong>e, l'auteur fournit un exposéremarquable sur <strong>la</strong> théorie, l'organologie et <strong>la</strong> composition <strong>music<strong>al</strong></strong>es.FARMER (Henry Georges), "The music of Is<strong>la</strong>m", in: The new Oxfordhistory of music, London, Egon WELLESZ, Oxford University Press, 1969,pp. 421-477.


400FARMER (Henri Georges), "A history of arabianmusic to the XIIIth. century", London, 1929, trad.arabe par Jarjîs Fath<strong>al</strong><strong>la</strong>h <strong>al</strong>-muhâmî, Beyrouth,Maktabat <strong>al</strong>-hayât, 1972, 346 p.C'est une étu<strong>de</strong> détaillée sur l'histoire <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique arabe <strong>de</strong> <strong>la</strong>jâhiliyya jusqu'à l'époque <strong>de</strong>s Abbassi<strong>de</strong>s (XIIIème siècle). Farmer a puconsulter et réunir tout ce qu'on a pu écrire sur cette musique: manuscritsinédits, ouvrages et articles publiés aussi bien en orient qu'en occi<strong>de</strong>nt. Cetteétu<strong>de</strong> constitue une source essentielle, pour tous ceux qui veulent connaîtrel'histoire <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique arabe.FARMER (Henry Georges), "The sources of Arabian Music An annotatedbibliography of Arabic manuscripts which <strong>de</strong><strong>al</strong> with the theory, pratice andhistory of Arabian Music", Scot<strong>la</strong>nd, Bears<strong>de</strong>n, 1940, rééd., <strong>Le</strong>y<strong>de</strong>, E.J. Brill,1965, 97 p., 5 pl. h.t. Trad. arabe par NASSAR (Husîn), Masâdir <strong>al</strong>-mûsîqâ<strong>al</strong>-`arabiyya, le Caire, Maktabat Misr, 1957, 176 p.Il s'agit d'un recensement assez complet <strong>de</strong>s écrits arabes sur <strong>la</strong>musique, composés entre les VII-VIIIe siècles. Pour chacune <strong>de</strong>s 353 sourcesréunies (dont seulement 145 nous sont parvenues), l'auteur indique l'origine<strong>de</strong> l'information, le lieu <strong>de</strong> conservation, les cotes <strong>de</strong> bibliothèque qu'elleporte et parfois aussi <strong>la</strong> date et le lieu <strong>de</strong> sa publication en arabe ou end'autres <strong>la</strong>ngues. <strong>Le</strong> c<strong>la</strong>ssement est chronologique, par auteurs.FARMER (Henri-George), Série d'articles dans l'Encyclopédie <strong>de</strong> l'Is<strong>la</strong>m(ancienne et nouvelle édition).M<strong>al</strong>gré leur brièveté, ces articles sont d'une gran<strong>de</strong> importance.


401FASI (Muhammad), "Al-mûsîqâ <strong>al</strong>-maghribiyya <strong>al</strong> musammât a<strong>la</strong>nd<strong>al</strong>ûsiyya" (<strong>la</strong> musique marocaine dite and<strong>al</strong>ouse), Fès, 1965, 15p.conférence polycopiée.Remarquable exposé sur les différentes parties <strong>de</strong> <strong>la</strong> nûba au Maroc.débutant par une an<strong>al</strong>yse du terme: "And<strong>al</strong>ouse" que toute une littératurecoloni<strong>al</strong>e a imposé à ce <strong>répertoire</strong>. Il conclut par un essai sur <strong>la</strong> signification<strong>de</strong> chaque tab` et <strong>de</strong> sa nûba.FASI (`Abd <strong>al</strong>-Rahmân), "Kitâb <strong>al</strong>-jumû` fî `ilm <strong>al</strong>-mûsîqâ wa <strong>al</strong>-tubû` "(Livre <strong>de</strong>s systèmes sur <strong>la</strong> science <strong>music<strong>al</strong></strong>e et les mo<strong>de</strong>s), trad. ang<strong>la</strong>ise parFARMER (H.G.), in: An old Moorish Lute Tutor, G<strong>la</strong>sgow, The civic Press,1933, p. 1 (texte arabe); pp. 14-16 (texte ang<strong>la</strong>is).Ecrit en 1650, ce traité est conçu sous forme <strong>de</strong> poème didactique <strong>de</strong>23 vers, récapitu<strong>la</strong>nt l'essentiel <strong>de</strong>s connaissances <strong>music<strong>al</strong></strong>es <strong>de</strong> l'époque.GHARRARI (`Abbâs), "Muwashshahât maghribiyya" (muwashshahâtmarocaines), Casab<strong>la</strong>nca, 1973, 255 p.Bien documenté, ce livre fournit une étu<strong>de</strong> sérieuse sur lesmuwashshahât en génér<strong>al</strong> et ceux du Maroc en particulier.GHAZALI, (Abû hâmid), "Ihyâ' `ulûm <strong>al</strong>-dîn", (Revification <strong>de</strong>s sciences<strong>de</strong> <strong>la</strong> religion), Tunis, dâr suhnûn li <strong>al</strong>-nashr, 1989, Tome VI.Cet ouvrage veut réconcilier l'auteur avec <strong>la</strong> religion musulmane, aprèsune longue pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> confusion. Aujourd'hui, ce livre est considéré commeun manuel utile pour indiquer <strong>la</strong> bonne voie qui mène à Dieu.


402GUETTAT (Mahmoud), "La musique and<strong>al</strong>ouse et ses prolongementscontemporains au Maghreb", Paris IV, thèse <strong>de</strong> 3ème cycle en musicologie,histoire et étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique arabe, 1977, 2 vol. 387 p.Cette thèse est une étu<strong>de</strong> détaillée sur <strong>la</strong> musique au Maghreb: sesorigines, ses instruments, et ses formes. On y trouve aussi un aperçu sur lesdifférentes écoles <strong>music<strong>al</strong></strong>es arabes <strong>de</strong> <strong>la</strong> jâhyiliyya jusqu'à nos jours.GUETTAT (Mahmoud), "La tradition <strong>music<strong>al</strong></strong>e arabe", Paris, Ministère <strong>de</strong>l'Education Nation<strong>al</strong>e, 1986, 131 p.Ce manuel présente les éléments indispensables à <strong>la</strong> compréhension <strong>de</strong><strong>la</strong> tradition <strong>music<strong>al</strong></strong>e arabe: ses étapes historiques, les éléments <strong>de</strong> son<strong>la</strong>ngage <strong>music<strong>al</strong></strong> et son contexte socio-culturel. Il se termine par unebibliographie presqu'exhaustive, une discographie et un <strong>al</strong>bum <strong>music<strong>al</strong></strong>contenant 52 exemples, illustrant certaines formes voc<strong>al</strong>es et instrument<strong>al</strong>escitées dans le texte.HABIB (Mohamed), "Atwâr <strong>al</strong>-nûba fî <strong>al</strong>-târîkh <strong>al</strong>-islâmî" (l'évolution <strong>de</strong> <strong>la</strong>nûba dans <strong>la</strong> civilisation musulmane), in: patrimoine <strong>music<strong>al</strong></strong> tunisien, 4 èmefascicule (préface).Dans cette préface, l'auteur donne un aperçu sur l'emploi du termenûba à travers l'histoire <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique arabe.HABIB (Mohamed), "Târîkh <strong>al</strong>-mûsîqâ <strong>al</strong>-`arabiyya" (histoire <strong>de</strong> <strong>la</strong>musique arabe), Tunis 1962, 35 p. cours polycopié par le ConservatoireNation<strong>al</strong> <strong>de</strong> Musique, Ministère <strong>de</strong>s Affaires Culturelles.Exposé <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique arabe <strong>de</strong>s origines jusqu'au VIIIème siècle.L'auteur constate quatre étapes :1 - <strong>de</strong>s origines jusqu'au VIème siècle.


4032 - du VIème au VIIème siècle.3 - du VIIème siècle jusqu'à <strong>la</strong> première moitié du VIIIème siècle.4 - avec le règne <strong>de</strong> l'Umayyâ<strong>de</strong> <strong>al</strong>-W<strong>al</strong>îd (743-744) jusqu'au règne d'<strong>al</strong>-Mahdî <strong>al</strong>-`abbâsî (775-785).HAFIDH (M.M. Sâmî), "Târîkh <strong>al</strong>-mûsîqâ wa <strong>al</strong>-ghinâ' <strong>al</strong>`arabî" (Histoire<strong>de</strong> <strong>la</strong> musique et du chant arabe), le Caire, 1961, 264 p.Ce livre offre une vue d'ensemble sur <strong>la</strong> musique arabe <strong>de</strong> <strong>la</strong> jâhiliyyajusqu'au début du XXème siècle.HAJJI (`Abd <strong>al</strong>-Rahmân), "Târîkh <strong>al</strong>-musîqâ <strong>al</strong>-and<strong>al</strong>usiyya" (Histoire <strong>de</strong><strong>la</strong> musique and<strong>al</strong>ouse), Beyrouth, Dâr <strong>al</strong>-jîl, 1969, 155 p.Cet ouvrage nous donne un aperçu sur l'origine, le développement et <strong>la</strong>propagation <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique and<strong>al</strong>ouse. il comprend aussi une étu<strong>de</strong> sur: lemuwashshah et le zaj<strong>al</strong>, et l'apport <strong>de</strong> cette musique à celle <strong>de</strong> l'Europemédiév<strong>al</strong>e.HAYIK (Abû `Abd Allâh Muhamad), "Majmû`at <strong>al</strong>-Hâyik" ( recueil <strong>de</strong><strong>al</strong>-Hâyik), Casab<strong>la</strong>nca, 1972, 199 p.<strong>Le</strong> recueil <strong>de</strong> <strong>al</strong>-Hâyik (fin <strong>de</strong> XVIIIème siècle), contient le texte <strong>de</strong>spoèmes chantés dans les 11 nûbât du <strong>répertoire</strong> marocain, exceptés ceux duqâyim wa niçf du nûbat raçt et hijâz mashriqî (retrouvés récemment dans unrecueil anonyme daté <strong>de</strong> 1788) et ceux du draj. La préface est consacrée àl'examen <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique au point <strong>de</strong> vue théologique et thérapeutique. Son3ème chapitre parle <strong>de</strong>s rythmes et <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s.HIFNI (Mahmûd Ahmad), "<strong>al</strong>-Mûsîqâ <strong>al</strong>-nadhariyya" (La théorie<strong>music<strong>al</strong></strong>e), le Caire, Al-hay'a <strong>al</strong>- misriyya <strong>al</strong>-`âmma li-<strong>al</strong>-kitâb, 1958, 335 p.


404Ce manuel <strong>de</strong> théorie <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique, contient : <strong>la</strong> théorie <strong>de</strong> <strong>la</strong> musiqueocci<strong>de</strong>nt<strong>al</strong>e, les règles <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique arabe, les instruments, les formes arabes<strong>de</strong> composition instrument<strong>al</strong>e et voc<strong>al</strong>e. L'ouvrage se termine par 314questions concernant les <strong>de</strong>ux musiques.HIFNI (Mahmûd Ahmad), "`Ilmu <strong>al</strong> '<strong>al</strong>ât <strong>al</strong> mûsîqiyya" ( science <strong>de</strong>sinstruments <strong>de</strong> musique), le Caire, Al-hay'a <strong>al</strong>- misriyya <strong>al</strong>-`âmma li-<strong>al</strong>-kitâb,1971, 283 p.Il s'agit d'une étu<strong>de</strong> organologique assez complète sur les instruments<strong>de</strong> musique arabes et occi<strong>de</strong>ntaux; <strong>Le</strong> livre se termine par un <strong>al</strong>bum <strong>de</strong> 151p<strong>la</strong>nches contenant tous les instruments étudiés et une bibliographieimportante.HILW (S<strong>al</strong>îm), "Al-mûsîqâ <strong>al</strong>-sharqiyya" (<strong>la</strong> musique orient<strong>al</strong>e), Beyrouth,Manshûrât dâr maktabat <strong>al</strong>-hayât, 1974, 319 p.C'est une étu<strong>de</strong> qui présente plusieurs musiques antiques etcontemporaines. Elle est divisée en cinq parties. La première et <strong>la</strong> <strong>de</strong>uxièmeétudient le développement <strong>de</strong>s gammes <strong>de</strong>s musiques orient<strong>al</strong>es anciennes et<strong>de</strong> <strong>la</strong> musique occi<strong>de</strong>nt<strong>al</strong>e. <strong>Le</strong>s trois <strong>de</strong>rnières parties traitent <strong>de</strong> <strong>la</strong> musiquearabe: ses échelles, ses instruments et son influence sur <strong>la</strong> musiqueeuropéenne.HILW (S<strong>al</strong>îm), "Al-muwashshahât <strong>al</strong>-and<strong>al</strong>usiyya: nash'tuhâ watatawwuruhâ" (les muwashshahât and<strong>al</strong>ouse: origine et développement),Beyrouth, Dâr <strong>al</strong>-`ilm li-<strong>al</strong>-m<strong>al</strong>âyîn, 1965, 317 p.C'est une étu<strong>de</strong> complète sur les muwashshahât. Dans <strong>la</strong> <strong>de</strong>uxièmepartie <strong>de</strong> l'ouvrage, l'auteur nous donne le texte, <strong>la</strong> transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e et lerythme <strong>de</strong> 115 muwashshah <strong>de</strong> l'école orient<strong>al</strong>e.


405IBN ABI DHIAF (Ahmad), "Ithâf ahl <strong>al</strong>-zamân bi akhbâr mulûk tûnis",(histoires <strong>de</strong>s rois <strong>de</strong> Tunisie), Tunis, 1972, critique équipe du secrétariatd'Etat du ministère <strong>de</strong>s affaires étrangères,Etu<strong>de</strong> historique et an<strong>al</strong>ytique sur <strong>la</strong> vie politique, soci<strong>al</strong>e et culturelledu royaume <strong>de</strong> <strong>la</strong> Tunisie.IBN `ABD RABBIH (Abû `umar Ahmad Muhammad), "Al-`iqdu <strong>al</strong>farîd"(le collier unique), Beyrouth, 1946-1947, le Caire 1887-1888, 3 vol.,nouvelle édition édition critique par Ahmad Amîn, Ahmad <strong>al</strong>-Zin et Ibrâhîm<strong>al</strong>-Abyârî, 7 vol. le Caire, 1948-1950, Lajnat <strong>al</strong>-ta'lif wa <strong>al</strong>-tarjama wa <strong>al</strong>nashr.(commission<strong>de</strong> traduction et d'édition).IBN ABI DINAR (Muhammad <strong>al</strong>-ra`înî), "Al-mu'nis fî akhbâr ifrîqiyya watûnis", (histoire <strong>de</strong> <strong>la</strong> Tunisie), Tunis, 1967, 284 p., an<strong>al</strong>yse et critique parmuhammad SHAMMAM.Dans cet ouvrage, l'auteur essaie <strong>de</strong> montrer les bienfaits <strong>de</strong> <strong>la</strong>musique, en réfutant tous les préjugés sur <strong>la</strong> musique et l'is<strong>la</strong>m. Il donne aussi<strong>de</strong>s renseignements intéressants sur les origines du chant ainsi que sur <strong>la</strong> vieet l'oeuvre <strong>de</strong> nombreux musiciens célèbres.IBN AL-Khatib (Lisân <strong>al</strong>-Din), "Jaysh <strong>al</strong>-tawshîh" (recueil dumuwashshahât), pub. par Hilâl Nâjî et Muhammad Mâthûr, Tunis, Sociététunisienne <strong>de</strong> distribution, 1967, 303 p.Il s'agit d'une collection importante <strong>de</strong>s muwashshahât and<strong>al</strong>ouses.L'auteur nous donne aussi un aperçu biographique sur chaque auteur <strong>de</strong>muwashshah, ainsi que <strong>de</strong>s indications sur son style avec <strong>de</strong>s exemplessélectionnés.


406IBN KHALDUN (Abû Zayd `Abd <strong>al</strong>-Rahmân), "<strong>al</strong>-Muqaddima", le Caire,Dâr <strong>al</strong>-Sha`b, 1979, 552 p. Trad. française par SLANE (M.G. <strong>de</strong>), <strong>Le</strong>sProlégomènes, Paris, Paul Geuthner, 1934, 3 vol. Nouvelle trad. introduite etannotée par MONTEIL (Vincent), Discours sur l'histoire universelle (<strong>al</strong>-Muqaddima), Beyrouth, 1967-68, Commission internation<strong>al</strong>e pour <strong>la</strong>Traduction <strong>de</strong>s Chefs-d'oeuvres (coll. UNESCO d'oeuvres représentatives,série arabe), 3 vol.Dans cette Muqaddima, genre <strong>de</strong> prolégomènes à son gigantesqueouvrage sur l'histoire universelle: Kitâb <strong>al</strong>-`ibar wa-dîwân <strong>al</strong>-mubtada' wa<strong>al</strong>-khabar fî akhbâr <strong>al</strong>-`Arab wa <strong>al</strong>-`Ajam wa <strong>al</strong>-Barbar wa man `âsharahummin dhawî-<strong>al</strong>-sultân <strong>al</strong>-akbar, l'auteur parvient à fon<strong>de</strong>r les toutes premièresbases <strong>de</strong> <strong>la</strong> sociologie, et à avancer l'une <strong>de</strong>s premières théories sur <strong>la</strong> sciencehistorique. La Muqaddima contient, entre autre, un chapitre sur l'art du chant.Il s'agit d'un exposé assez rapi<strong>de</strong> sur l'histoire <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique arabe <strong>de</strong>puis <strong>la</strong>pério<strong>de</strong> pré-is<strong>la</strong>mique jusqu'à l'époque <strong>de</strong> l'auteur.IBN HALIKKAN (Abû <strong>al</strong>-`Abbâs Shams <strong>al</strong>-Dîn), "Wafiyyât <strong>al</strong>-a`yân waanbâ' abnâ'<strong>al</strong>-zamân" (Biographie <strong>de</strong>s personnages notables), éd. par`ABBAS (Ihsân), Beyrouth, Dâr <strong>al</strong>-Thaqâfa, 1970, 7 vol.Dictionnaire biographique <strong>de</strong>s hommes célèbres <strong>de</strong> <strong>la</strong> civilisationarabo-musulmane. Il comprend <strong>de</strong>s renseignements sur <strong>la</strong> vie et l'oeuvre d'unnombre impressionnant <strong>de</strong> théoriciens et <strong>de</strong> musiciens.IBN HISHAM (Abû Muhammad `Abd <strong>al</strong>-M<strong>al</strong>ik), "<strong>al</strong>-Sîra <strong>al</strong>-nabawiyya"(La tradition du Prophète), éd. critique par (SA`D Tâhâ `Abd <strong>al</strong>-Ra'ûf),Beyrouth, Dâr <strong>al</strong>-jîl, 1954, 4 vol.IBNU SINA' ( Abu `Ayt <strong>al</strong>-Husayn Ibnu `Abd Al<strong>la</strong>h), "Jawâmi` `ilm <strong>al</strong>mûsîqâmin kitâb <strong>al</strong>-shifâ' " (traité sur <strong>la</strong> musique, extrait <strong>de</strong> kitâb <strong>al</strong>-shifâ':section <strong>de</strong>s sciences mathématiques chapitre 12) textes arabes, manuscrit à <strong>la</strong>bibliothèque du musée irakien, N° 2085, 45 p., éd. critique par Zakariya


407Yûsif, le Caire, Imprimerie Nation<strong>al</strong>e, 1956, 49 p., tra. française par le B. R.d'Er<strong>la</strong>nger, in: <strong>la</strong> musique arabe, II, Paris, P. Geuthner, 1935, pp. 102-245.Ce compendium <strong>de</strong> <strong>la</strong> science <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique est exécuté dans sixdiscours, traitant successivement <strong>la</strong> diffusion <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique, le son,l'interv<strong>al</strong>le, <strong>la</strong> consonance, les genres, les échelles, les mo<strong>de</strong>s, le rythme, <strong>la</strong>poésie et <strong>la</strong> métrique, <strong>la</strong> composition et enfin les instruments. Tout ceci, avecune manière admirable concise et con<strong>de</strong>nsée, avec un esprit critique éminentrationnel et organisateur. C'est aussi l'oeuvre d'un génie à <strong>la</strong> fois savant,musicien et poète.IBNU ZAYLA (Abû Mançûr <strong>al</strong>-Husayn), "Kitâb <strong>al</strong>-Kâfî fî <strong>al</strong>-mûsîqâ"(livre sur <strong>la</strong> musique), éd. critique par Zakariyya Yûsif, le Caire, Dâr <strong>al</strong>qa<strong>la</strong>m,1964, 80 p.Dans cet ouvrage, Ibnu Zay<strong>la</strong> (m. 1048) a apporté <strong>de</strong>s élémentsnouveaux parmi lesquels citons, notamment l'utilisation d'une notation<strong>al</strong>phabétique pour désigner les sons du `ûd, et <strong>la</strong> nouvelle manière c<strong>la</strong>ire estprécise pour expliquer <strong>la</strong> rythmique <strong>music<strong>al</strong></strong>e et <strong>la</strong> métrique poétique.Contrairement à ses prédécesseurs, les lettres <strong>de</strong> l'<strong>al</strong>phabet ont pour lui unesignification numérique.IÇFAHANI (Abû <strong>al</strong>-Faraj), "Kitâbu <strong>al</strong>-aghânî <strong>al</strong>-kabîr" (le livre <strong>de</strong>schants), 20 vol. D'après l'édition origin<strong>al</strong>e <strong>de</strong> Bûlâq) et vol. supplémentaire(par I. Guidi et autres <strong>Le</strong>y<strong>de</strong>) pour <strong>de</strong>s tables <strong>al</strong>phabétique comprenant :1 - In<strong>de</strong>x <strong>de</strong>s poètes2 - In<strong>de</strong>x <strong>de</strong>s rimes3-In<strong>de</strong>x historique4-In<strong>de</strong>x géographique,éd. Beyrouth, 1970 d'après Farmer, éd. Bûlâq 20 vol.,1869 et éd. Sâsî 21 vol., 1905-1906.


408L'auteur a réuni dans cet ouvrage une masse considérable d'anecdotessur les poètes, les musiciens et les personnages importants dans <strong>la</strong> sociétéarabe. Ce livre est considéré comme une source précieuse pour l'étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong>littérature et <strong>de</strong> <strong>la</strong> société arabe <strong>de</strong>puis <strong>la</strong> jâhiliyya jusqu'au Xème siècle. Iloffre d'importantes informations, tant sur <strong>la</strong> musique et les musiciens que sur<strong>la</strong> vie <strong>music<strong>al</strong></strong>e <strong>de</strong> l'époqueIKHWAN <strong>al</strong>-SAFA', "Risâ<strong>la</strong> fî <strong>al</strong>-mûsîqâ" (Epître sur <strong>la</strong> musique), in:Rasâ'il IKHWAN <strong>al</strong>-SAFA' wa KHillân <strong>al</strong>-Wafâ', Qomm, Maktab <strong>al</strong>-i`lâm <strong>al</strong>islâmî,1984, pp. 186-240. Trad. française annotée par SHILOAH (Amnon),l'Epître <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique <strong>de</strong>s IKHWAN <strong>al</strong>-SAFA', in: Revue <strong>de</strong>s Etu<strong>de</strong>sIs<strong>la</strong>miques, Paris, Paul Geuthner, 1964, pp. 125-162, rééd. 1966, pp. 159-193.IKHWAN <strong>al</strong>-SAFA' wa KHillân <strong>al</strong>-Wafâ' (Frères <strong>de</strong> <strong>la</strong> Pureté et Amis<strong>de</strong> <strong>la</strong> Fidélité), est un genre <strong>de</strong> société <strong>de</strong> penseurs musulmans dont onconnaît peu <strong>de</strong> choses sur ses membres. <strong>Le</strong>urs épîtres constituent uneencyclopédie englobant toutes les connaissances philosophiques etscientifiques <strong>de</strong>s Arabes du Xème siècle. La musique, qui fait l'objet <strong>de</strong> l'un<strong>de</strong>s 52 épîtres <strong>de</strong> l'encyclopédie, est étudiée dans ses trois dimensions:scientifique, artistique et philosophique.JARGY (Simon), "La musique arabe", Paris, P.U.F., 1971, rééd, 1977, 128p. coll. que sais-je? n° 1436.Cette étu<strong>de</strong> vise à donner une vue d'ensemble sur <strong>la</strong> musique arabeaussi bien popu<strong>la</strong>ire que c<strong>la</strong>ssique.KA`ÂK (`Othmân), "Ahmad <strong>al</strong>-Wâfî", in : le patrimoine <strong>music<strong>al</strong></strong> tunisien,5ème fascicule, Ministère <strong>de</strong>s Affaires Culturelles, Tunis. (préface)


409Cette préface qui re<strong>la</strong>te <strong>la</strong> vie et l'oeuvre du grand musicien Ahmad <strong>al</strong>-Wâfî (1850-1921), fournit entre autre, d'autres renseignements sur <strong>la</strong> musiqueet les musiciens <strong>de</strong> l'époque.KASRÂWI (<strong>al</strong>-Azhar), "At-Turuq as-sûfiya bi Safâqus" (<strong>Le</strong>s <strong>confrérie</strong>s<strong>religieuse</strong>s à Sfax), Mémoire <strong>de</strong> C.A.R., Faculté <strong>de</strong>s <strong>Le</strong>ttres et <strong>de</strong>s SciencesHumaines, Tunis, 1985.statistiques.c'est une étu<strong>de</strong> détaillée sur les zawâya <strong>de</strong> Sfax : Historique etKATIB (<strong>al</strong>-Hasan Ibn Ahmad Ibn `Alî ), "Kitâb kamâl adab <strong>al</strong>-ghinâ'" (Laperfection <strong>de</strong> l'art du chant), éd. critique par KHASHABA (Ghattâs `Abd <strong>al</strong>-M<strong>al</strong>ik), le Caire, 1975, 146 p. Trad. française commentée par SHILOAH(Amnon), Paris, Paul Geuthner, 1972, 239 p.C'est une étu<strong>de</strong> intéressante sur <strong>la</strong> plupart <strong>de</strong>s questions re<strong>la</strong>tives à <strong>la</strong>musique sous ses <strong>de</strong>ux aspects: pratique et théorique.KELKEL (Manfred), "Musique <strong>de</strong>s mon<strong>de</strong>s", Paris, lib. philosophique J.Vrin, 1988, 342 p.KHEMAKHEM (Mouhammad), "La musique tunisienne traditionnelle :structures et formes", Paris IV, thèse d'université en lettres, 1974, 256 p.L'auteur étudie <strong>la</strong> musique tunisienne traditionnelle, ses instruments,ses rythmes, ses formes mélodiques et voc<strong>al</strong>es. Ce travail débute par unaperçu sur <strong>la</strong> musique en Tunisie, <strong>de</strong> l'époque <strong>de</strong>s berbères jusqu'à nos jours.KHULA`I (Kâmil), "Kitâb <strong>al</strong>-mûsîqâ <strong>al</strong>-sharqî" (le livre <strong>de</strong> <strong>la</strong> musiqueorient<strong>al</strong>e), le Caire, Dâr <strong>al</strong>-ma`ârif, 1904, 210 p.


410Importante an<strong>al</strong>yse <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s et <strong>de</strong>s rythmes <strong>de</strong> l'école arabeorient<strong>al</strong>e; on y trouve ég<strong>al</strong>ement plusieurs musiciens célèbres <strong>de</strong> l'époque.LAGRANGE (Frédéric), Musiques d'Égypte, cité <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique, Actes Sud,1996, 175p.Une présentation assez complète <strong>de</strong>s musiques d'Égypte dans leurdiversité soci<strong>al</strong>e, géographique et diachronique, <strong>de</strong>puis le début du XX èmesiècle jusqu'à <strong>la</strong> pério<strong>de</strong> contemporaine. Nous nous sommes surtout intéressésau <strong>de</strong>uxième chapitre "Musique et chants religieux".LINGS (M.), "Qu'est-ce que le soufisme ?", traduction <strong>de</strong> l'Ang<strong>la</strong>is parRoger DU PASQUIER, Paris, Du seuil, 1977, 182 p.Il s'agit d'une introduction génér<strong>al</strong>e sur le soufisme. Dans ce manuell'auteur a essayé <strong>de</strong> passer brièvement en revue les plus importantes ca<strong>de</strong>nceshistoriques <strong>de</strong> cette doctrine et d'expliquer les termes-clefs permettant <strong>de</strong> sefaire une idée génér<strong>al</strong>e et assez complète sur le soufisme.LORTAT-JACOB (Bernard), "L'improvisation dans les musiques <strong>de</strong>tradition or<strong>al</strong>e", Paris, Se<strong>la</strong>f, 1987, 274 p.Il s'agit d'une série d'articles effectués sous <strong>la</strong> direction <strong>de</strong> l'auteurtraitant <strong>de</strong> sujet l'improvisation dans <strong>la</strong> musique <strong>de</strong> tradition or<strong>al</strong>e. l'article duprofesseur Schéhéraza<strong>de</strong> QASSIM HASSAN sur le maqâm irakien nous a étéutile.MAGDISH (Mahmoud), "Nuzhat <strong>al</strong>-andhâr fî `ajâ'ib <strong>al</strong>-tawârîkh wa<strong>la</strong>khbâr " (panorama sur les merveilles <strong>de</strong>s histoires et <strong>de</strong>s évènements),Tunis, dâr <strong>al</strong>-hilâl, 1909, 682 p. 2 tomes, édition commentée par `Abd<strong>al</strong><strong>la</strong>haj-jrîdî.


411<strong>Le</strong> premier tome <strong>de</strong> l'ouvrage est consacré à l'histoire <strong>de</strong> l'Is<strong>la</strong>m enAfrique septentrion<strong>al</strong>e pendant les aires <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s dynasties musulmanes.<strong>Le</strong> <strong>de</strong>uxième tome est consacré à l'histoire <strong>de</strong> Sfax suivie d'une longue liste<strong>de</strong> biographies <strong>de</strong>s plus grands personnages mystiques <strong>de</strong> <strong>la</strong> région.MAHDI (Sa<strong>la</strong>h), "La musique arabe", Paris, A. <strong>Le</strong>duc, 1972, 100 p.C'est une étu<strong>de</strong> importante sur <strong>la</strong> musique arabe c<strong>la</strong>ssique: <strong>la</strong> nûbamaghrébine, <strong>la</strong> waç<strong>la</strong> orient<strong>al</strong>e, <strong>la</strong> musique instrument<strong>al</strong>e, les awzân(rythmes) et les mètres poétique. Nous trouvons aussi une brève biographie<strong>de</strong> quelques musiciens arabes contemporains. <strong>Le</strong> livre se termine par 39fragments d'exemples musicaux titrés <strong>de</strong>s différentes formes <strong>de</strong> <strong>la</strong> musiquetraditionnelle.MAHDI (Sâ<strong>la</strong>h ), "Maqâmât <strong>al</strong>-mûsîqâ <strong>al</strong>-`arabiyya" (les mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> <strong>la</strong>musique arabe), Tunis, Société tunisienne <strong>de</strong> distribution, 1982, 243 p.Etu<strong>de</strong> sur <strong>la</strong> plupart <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s utilisés dans les pays arabes. Pourchaque mo<strong>de</strong> étudié, l'auteur donne, à <strong>la</strong> fin <strong>de</strong> l'ouvrage, un exempletranscrit <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique traditionnelle.MAHDI (sa<strong>la</strong>h ) et KA`AK (`ûthmân ), "<strong>al</strong>-shaykh ahmad <strong>al</strong>-wâfi", Tunis,S.T.A., 1982, 101 p.<strong>Le</strong> livre expose les oeuvres <strong>de</strong> l'artiste ahmad <strong>al</strong> WAFI, et leurstranscriptions <strong>music<strong>al</strong></strong>es.MAHDI (Sa<strong>la</strong>h) et RIZGUI (Mouhammad), "<strong>al</strong>-ma`had <strong>al</strong>-rashîdî"(l'institut <strong>de</strong> <strong>la</strong> rashidiyya), Tunis, S.T.A., 1981, 153 p.


412Il s'agit <strong>de</strong> l'histoire <strong>de</strong> <strong>la</strong> création <strong>de</strong> l'institut "<strong>la</strong> rashîdiyya", et <strong>de</strong>son évolution jusqu'à nos jours. Ce livre commence par un bref aperçuconcernant <strong>la</strong> vie <strong>music<strong>al</strong></strong>e avant <strong>la</strong> création <strong>de</strong> cet institut.MAHFOUDH (Huseyn `Ali), "Mu`jam <strong>al</strong>-mûsîqâ <strong>al</strong>-`arabiyya"(dictionnaire <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique arabe), Baghdad, Aljumhûriyya, 1964, 224, p.C'est un dictionnaire <strong>de</strong>s termes employés dans <strong>la</strong> musique arabe.MAKHLOUF (Muhammad), "Shajarat <strong>al</strong>-nûr <strong>al</strong>-zakiyya", le Caire, Dâr <strong>al</strong>ma`ârif,1930, 2 tomes. 156 p.Une biographie complète <strong>de</strong> plusieurs savants et maîtres soufis dèsl'avènement <strong>de</strong> l'Is<strong>la</strong>m.MANNOUBI (Muhammad), "Târîkh <strong>al</strong>-mûsîqâ <strong>al</strong>-and<strong>al</strong>usiyya bî <strong>al</strong>maghrib"(histoire <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique and<strong>al</strong>ouse au Maroc), in: Al-Bahth <strong>al</strong>-`ilmî(recherche scientifique) no 14, 15, (janv., fév.) 1969.Une étu<strong>de</strong> historique sur <strong>la</strong> musique marocaine: nûba, muwashshahât,et autres...MANTRAN (Robert), "L'expansion musulmane, VII-XIème siècles", Paris,P.U.F. 1969, 102 p.C'est un bref Exposé sur l'histoire <strong>de</strong>s conquêtes musulmanes durant <strong>la</strong>pério<strong>de</strong> <strong>al</strong><strong>la</strong>nt du VIIe au XIe siècle.Massé-Muzi (Nicole), "Mémoire en images SFAX", éd. A<strong>la</strong>n Sutton, 2002,Saint-Cyr-sur-Loire, 128 p.


413MASS`UDI (Abû <strong>al</strong>-Hasan `Alî Ibnu <strong>al</strong>-Husayn), "Murûj <strong>al</strong>-dhahab wama`âdin <strong>al</strong>-jawhar" (les prairies d'or), éd. par Muhammad Muhyî <strong>al</strong>-dîn `abd<strong>al</strong>-Hamîd, 4 vol. (4ème éd. révisée), le Caire, 1964-1965, 424 p. Textesarabes et trad. française par Barbier <strong>de</strong> Meynard et Pavet <strong>de</strong> Courteil, 9 vol.Paris, 1861-1877.Dans cet ouvrage, <strong>al</strong>-Mass`ûdî (m. 956) rassemble quelques rudiments<strong>de</strong> géographie, d'Histoire universelle et <strong>de</strong> l'histoire <strong>de</strong> l'Is<strong>la</strong>m. Il contientég<strong>al</strong>ement plusieurs renseignements re<strong>la</strong>tifs à <strong>la</strong> musique et leurs musicienssurtout dans le chapitre consacré au K<strong>al</strong>if abbasi<strong>de</strong> <strong>al</strong>-Mu`tamad (m. 893).L'auteur produit le discours <strong>de</strong> Ibnu Khurdâthaba (m. 912) sur <strong>la</strong> musique(éd. du Caire, IV, pp. 220-226). Ce discours porte sur les origines <strong>de</strong>sinstruments, le genre hudâ', les premiers chanteurs et chanteuses chez lesArabes, l'influence du chant, le chanteur parfait les différentes émotionsengendrées par <strong>la</strong> musique, les genres rythmiques et enfin <strong>la</strong> danse.MITJANA (Rafaël), "L'orient<strong>al</strong>isme <strong>music<strong>al</strong></strong> et <strong>la</strong> musique arabe", in: lemon<strong>de</strong> orient<strong>al</strong>e, tome.I, Uppsu<strong>la</strong>, 1906, pp.184-222Ecrit par un spéci<strong>al</strong>iste éminent, cette étu<strong>de</strong> consciencieuse et utile,offre une foule <strong>de</strong> renseignements précieux, re<strong>la</strong>tif à <strong>la</strong> musique arabe, sonhistoire et son apport à <strong>la</strong> musique occi<strong>de</strong>nt<strong>al</strong>e. M<strong>al</strong>gré son ancienneté, cetexposé gar<strong>de</strong> toute son importance.MINISTERE DES AFFAIRES CULTURELLES, "at-turâth <strong>al</strong>-mûsîqî attûnisî"(patrimoine <strong>music<strong>al</strong></strong> Tunisien), éd. ministère tunisien <strong>de</strong>s affairesculturelles: direction <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique et <strong>de</strong>s arts popu<strong>la</strong>ires, Tunis, 9 fascicules.parus:Premier fascicule: ensemble <strong>de</strong>s bashârif tunisiens, 26 p.Deuxième fascicule: ensemble <strong>de</strong>s tawâshîh et azjâl tunisien,44 p.


414Troisième fascicule: nûbat <strong>al</strong>-dhaïl, 42 p.Quatrième fascicule: nûbat <strong>al</strong>-`irâq, 38 p.Cinquième fascicule: huit morceaux <strong>de</strong> ahmad <strong>al</strong>-WAFI, et lesnûbât: sîka et hsîn, 92 p.Sixième fascicule: les nûbât: râçd, raml <strong>al</strong>-mâya, et nawâ, 88 p.Septième fascicule: les nûbât: açba`ayn, raçd <strong>al</strong>-dhaïl et raml,100 p.Huitième fascicule: les nûbât: <strong>al</strong> asbahân, <strong>al</strong> khadhrâ, et <strong>al</strong>zîrkûlâh,95 p.Neuvième fascicule: les azjâl, les muwashshahât et lesfûnduwât, 133 p.Chacun <strong>de</strong> ces fascicules contient une préface intéressante traitant unsujet particulier. Ils renferment le texte et <strong>la</strong> transcription <strong>music<strong>al</strong></strong>e d'unebonne partie du <strong>répertoire</strong> c<strong>la</strong>ssique tunisien.MIQUEL (André), "L'Is<strong>la</strong>m et sa civilisation", Paris, Armand Colin, 1968,572 p. coll. Destins du mon<strong>de</strong>.MOKRI (M.), "<strong>Le</strong> soufisme et <strong>la</strong> musique", in: encyclopédie <strong>de</strong> musique,Fasquelle, vol III, Paris, 1961, pp. 1014-1015.exposé sur <strong>la</strong> musique chez les Soufis.NAYEL (Bohli), "Al haqiqa at-târîkhiyya li <strong>al</strong>-taçaouef <strong>al</strong>-islâmî(l'évi<strong>de</strong>nce historique du soufisme Is<strong>la</strong>mique), Tunis, 1965, pp.116-117.PACHOLCZYK (Josef), "Arab music, in: The new Grove Dictiotionary ofmusic and musicians", London, Macmil<strong>la</strong>n, 1980, pp. 521- 526.


415Etu<strong>de</strong> intéressante sur <strong>la</strong> théorie et les formes instrument<strong>al</strong>es et voc<strong>al</strong>es<strong>de</strong> <strong>la</strong> musique traditionnelle arabe du XXe siècle.POCHE (Christian), "La musique arabo-and<strong>al</strong>ouse", Cité <strong>de</strong> <strong>la</strong>musique/actes sud, 1995,153p.Interressante étu<strong>de</strong> sur <strong>la</strong> musique arabo-and<strong>al</strong>ouse, notammentsur <strong>la</strong> forme <strong>music<strong>al</strong></strong>e "<strong>la</strong> nûba" et ses instruments, et <strong>la</strong> forme poétique " lemuwashshah".POPOVIC (A) et VEINSTEIN (G), "les ordres mystiques dans l'Is<strong>la</strong>m :Cheminement et situation actuelle", Paris, éd. De l'école <strong>de</strong>s hautes étu<strong>de</strong>s ensciences soci<strong>al</strong>es, p.305.RAJA'I (Fû'âd), et DARWISH (Nadîm), "<strong>al</strong>-Muwashshahât a<strong>la</strong>nd<strong>al</strong>ûsiyya" (les Muwashshahât and<strong>al</strong>ouses), Alep, Dâr <strong>al</strong>-kitab, 1956,tome I 396 p. col. Min KûnîzinâCet ouvrage contient en outre d'une intéressante étu<strong>de</strong> surl'histoire <strong>de</strong>s muwashshahât and<strong>al</strong>ouses, le texte poétique et <strong>la</strong>transcription rythmique et mélodique d'un grand nombre <strong>de</strong>muwashshahât appartenant à 21 was<strong>la</strong> <strong>de</strong> l'école <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique arabeorient<strong>al</strong>e.RASHID-(Sobhi-Anwar), "<strong>al</strong>-âlât <strong>al</strong>-mûsiqiyya fil `uçûr <strong>al</strong>-islâmiyya "(lesinstruments <strong>de</strong> musique à travers les pério<strong>de</strong>s is<strong>la</strong>miques), Bagdad, Matba`at<strong>al</strong>-sha`b, 1975, 415p.Cette étu<strong>de</strong> comparative sur les instruments utilisés dans <strong>la</strong> musiquearabe <strong>de</strong>puis les Umayya<strong>de</strong>s jusqu'au XVIème siècle, est l'une <strong>de</strong>s travauxscientifiques les plus sérieux. Elle est basée sur <strong>la</strong> documentation écrite,archéologiques et sur <strong>de</strong>s témoignages iconographiques très variés. <strong>Le</strong> lecteur


416y trouve une étu<strong>de</strong> détaillée et bien documentée; pour chaque instrumentutilisé. <strong>Le</strong> texte est enrichit par 206 figures et 103 p<strong>la</strong>nches contenant lesdifférents instruments étudiés.RIBERA Y TARAGO (Julien), "La musica araba y sa influencia en leespanio<strong>la</strong>" (<strong>la</strong> musique arabe et son influence en Espagne),(col. <strong>de</strong> Manu<strong>al</strong>eshispania, vol.I, série G), in 12°, Madrid, volonted, 1927, 355p.C'est une étu<strong>de</strong> approfondie sur <strong>la</strong> musique arabe en Espagnemusulmane et son rôle dans l'évolution <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique <strong>de</strong> l'Europe Médiév<strong>al</strong>e.RIZGUI (Sadok), "<strong>al</strong>-aghânî <strong>al</strong> tûnisiyya" (les chants tunisiens), Tunis, <strong>al</strong>dâr<strong>al</strong>-tûnisiyya li <strong>al</strong>-nashr, 1968, 457 p.L'auteur nous donne une idée complète sur <strong>la</strong> vie soci<strong>al</strong>e, littéraire,artistique et folklorique <strong>de</strong> <strong>la</strong> Tunisie durant les <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rniers siècles.ROUANET (Jules), "La musique arabe", in: Encyclopédie <strong>de</strong> Lavignac,tome V, Paris, De<strong>la</strong>grave, 1922, pp. 2676-2812.Cette étu<strong>de</strong> datant du début du siècle, est sans doute l'une <strong>de</strong>spremières d'importance, consacrée à <strong>la</strong> musique arabe. Il est regrettable,cependant, que <strong>la</strong> foule considérable <strong>de</strong> renseignements recueillis par l'auteur,soit présentée avec <strong>de</strong>s opinions très subjectives.ROUANET (Jules), "La musique arabe dans le Maghreb", in: Encyclopédie<strong>de</strong> Lavignac, tome V, Paris, De<strong>la</strong>grave, 1922, pp. 2813-2942.Il s'agit d'une étu<strong>de</strong> sur <strong>la</strong> musique maghrébine et notamment celle <strong>de</strong>l'Algérie, où l'auteur a effectué <strong>de</strong> longs séjours.


417ROUGET (Gilbert), "La musique et <strong>la</strong> transe", Paris, G<strong>al</strong>limard, 1980, 494p.Il s'agit dans ce livre d'une étu<strong>de</strong> très intéressante sur les rapports <strong>de</strong> <strong>la</strong>musique et <strong>de</strong> <strong>la</strong> transe dans les différentes sociétés du mon<strong>de</strong>. L'auteurconsacre une gran<strong>de</strong> partie aux différents cas <strong>de</strong> transe en rapport avec <strong>la</strong>musique dans le mon<strong>de</strong> arabe. C'est un ouvrage capit<strong>al</strong> pour les recherchessur <strong>la</strong> mystique musulmane.SAFDI (Sa<strong>la</strong>h <strong>al</strong>-dîn kh<strong>al</strong>îl b.Aybak), "Tawshîh <strong>al</strong>-tawshîh", (<strong>la</strong> théorie <strong>de</strong>smuwashshahât), éd. par A. Habîb MUTLAQ, Beyrouth, Dâr <strong>al</strong>-`ilm li-<strong>al</strong>m<strong>al</strong>âyîn,1966, 227p.Cet ouvrage contient un grand nombre <strong>de</strong> muwashshahât introuvablesailleurs. De même, il offre <strong>de</strong>s renseignements importants sur l'origine et lesstructures du mûwashshah, ainsi que sur les washshahûn précurseurs aussibien And<strong>al</strong>ou-Maghrébins qu'Egyptiens et Syrio-p<strong>al</strong>estiniens.SAKLI (Mourad), "<strong>la</strong> chanson tunisiènne, an<strong>al</strong>yse technique et approchesociologique", Thèse <strong>de</strong> Doctorat, soutenue à Paris, Université <strong>de</strong> Paris-Sorbonne (Paris IV), 1994, 530 p.Une étu<strong>de</strong> intéressante sur <strong>la</strong> chanson tunisienne. L'auteur a essayé <strong>de</strong>définir ce genre <strong>music<strong>al</strong></strong>, <strong>de</strong> le cerner et <strong>de</strong> connaître <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ce qu'il occupeaussi bien dans <strong>la</strong> vie <strong>music<strong>al</strong></strong>e que dans <strong>la</strong> société tunisienne. Une approchesociologique très approfondie a permis <strong>de</strong> compléter l'an<strong>al</strong>yse technique pourexpliquer le phénomène <strong>music<strong>al</strong></strong>.SHALBI (Mustapha), "Musique et société en Tunisie", Paris III, thèse <strong>de</strong>troisième cycle, étu<strong>de</strong>s is<strong>la</strong>miques, 1976, 245 p.


418C'est une étu<strong>de</strong> sur les divers aspects <strong>de</strong> <strong>la</strong> vie culturelle et soci<strong>al</strong>e <strong>de</strong><strong>la</strong> Tunisie, et <strong>de</strong> <strong>la</strong> civilisation arabo-musulmane.SHILOAH (Amnon), "Musique <strong>de</strong> l'is<strong>la</strong>m", in: Encyclopaedia Univers<strong>al</strong>is,tome XV, Paris, 1989, pp. 945-947.Essai <strong>de</strong> synthèse <strong>de</strong>s éléments les plus importants <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique <strong>de</strong>l'Is<strong>la</strong>m, avec une étu<strong>de</strong> succincte mais intéressante sur <strong>la</strong> musiquemauritanienne.SOURDEL (Dominique) et THOMINE (Janine), "La civilisation <strong>de</strong>l'Is<strong>la</strong>m c<strong>la</strong>ssique", Paris, Arthaud, 1968, 678 p. coll. <strong>Le</strong>s gran<strong>de</strong>s civilisationsVIII.Cet intéressant ouvrage offre une étu<strong>de</strong> détaillée sur les divers aspects<strong>de</strong> <strong>la</strong> vie politique, <strong>religieuse</strong>, juridique, soci<strong>al</strong>e et économique <strong>de</strong> l'Is<strong>la</strong>mc<strong>la</strong>ssique (<strong>de</strong>puis son avènement jusqu'à 1260).TIFASHI (Ahmad), "Mut`at <strong>al</strong>-asmâ` fî `ilm <strong>al</strong>-samâ` " (<strong>la</strong> jouissance <strong>de</strong>sauditions par <strong>la</strong> science <strong>music<strong>al</strong></strong>e), (M.s à <strong>la</strong> bibliothèque <strong>al</strong> `ashûriyya àTunis, d'après H.H. `ABD <strong>al</strong>-WAHHAB), un extrait concernant l'And<strong>al</strong>ousiea été publié par Muhammad ibn TAWIT, in maj<strong>al</strong><strong>la</strong>t <strong>al</strong> abhâth tome XXI, no2, 3, 4, Beyrouth, déc. 1968.C'est un volume parmi 40, écrits par <strong>al</strong>-TIFASHI (1184-1253), savantet homme <strong>de</strong> lettres, originaire <strong>de</strong> Gafsa (Tunisie). Consacré à l'art <strong>music<strong>al</strong></strong>,l'ouvrage donne <strong>de</strong>s informations <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> importance pour le chant, <strong>la</strong>danse, et <strong>la</strong> poésie dans <strong>la</strong> société arabe et en particulier and<strong>al</strong>ou-maghrébine,<strong>de</strong>puis l'avènement <strong>de</strong> l'is<strong>la</strong>m jusqu'au XIIIème siècle.TOUMA (Habib Hassan), "La musique arabe", Paris, Buchet / Chastel,1977, 165 p.


419Etu<strong>de</strong> sérieuse et bien documentée sur <strong>la</strong> musique savante arabe,<strong>de</strong>puis <strong>la</strong> jâhiliyya jusqu'à nos jours.YAÎCH (Younes), "`Alî <strong>al</strong>-Nûrî <strong>al</strong>-Çafâqusî: `açruhu, hayâtuhu, âthâruhu"(Ali NOURI: son époque, sa vie et ses oeuvres), Mémoire <strong>de</strong> C.A.R., Faculté<strong>de</strong>s lettres et <strong>de</strong>s sciences humaines, Tunis, 1987.Ce mémoire nous offre une étu<strong>de</strong> sérieuse et intéressante sur <strong>la</strong> viesoci<strong>al</strong>e, économique et politique à Sfax à l'époque du shaykh Abû-l-Hassan<strong>al</strong>-KARRÂY, maître <strong>de</strong> Ali NOURI.YILLIS (J.) et HAFNAWI (A), "<strong>al</strong>-Turâth <strong>al</strong>-ghinâ'î <strong>al</strong>-jazâ'irî: <strong>al</strong>muwashshahâtw<strong>al</strong> azjâl " (le patrimoine <strong>de</strong>s chants Algériens: lesmuwashshahât et les azjâl), Alger, C.N.C.D., 1976, 426 + 331 p. 2 tomes.C'est l'ensemble <strong>de</strong>s textes, corrigés et annotés, du <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong>s nûbâtAlgériennes selon les trois écoles constantinoise, <strong>al</strong>géroise, et tlemcennienne,rassemblé par l'auteur avec <strong>la</strong> col<strong>la</strong>boration <strong>de</strong> plusieurs spéci<strong>al</strong>istes (d'Alger,<strong>de</strong> Constantine et <strong>de</strong> Tlemcen). <strong>Le</strong>s <strong>de</strong>ux tomes contiennent aussi uneintéressante introduction sur les muwashshahât et sur <strong>la</strong> nûba. C'est l'un <strong>de</strong>stravaux les plus sérieux sur le patrimoine <strong>music<strong>al</strong></strong> Algérien.WAJA (Ahmad), "adh-dhâkira aj-jamâ`yya wat-tahawwûlât <strong>al</strong>-ijtimâ`yyamin mir'ât <strong>al</strong>-ughnya ach-cha`byya", mémoire collective et changementssoci<strong>al</strong>es d'après <strong>la</strong> chanson popu<strong>la</strong>ire, Tunis, Alif-publications <strong>de</strong> <strong>la</strong> merméditerranée, Faculté <strong>de</strong>s sciences humaines et soci<strong>al</strong>es <strong>de</strong> Tunis, 1998,pp.260 - 261.


420Une approche sociologique très intéressante <strong>de</strong> <strong>la</strong> pratique <strong>music<strong>al</strong></strong>e enTunisie, traitant particulièrement du rapport entre <strong>la</strong> musique popu<strong>la</strong>ire et lesdifférentes structures soci<strong>al</strong>es.ZEGHONDA (Fethi), "at-tarîqa as-sulâmiya fî tûnis ach`âruhâ wa<strong>al</strong>hânuhâ" (La musique dans les chants liturgiques <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong> <strong>religieuse</strong>"SULAMIYA" <strong>répertoire</strong> et an<strong>al</strong>yse), Tunis, 1991, Fondation Nation<strong>al</strong>e pour<strong>la</strong> Traduction, l'Etablissement <strong>de</strong>s Textes et les Etu<strong>de</strong>s Beït <strong>al</strong>-Hikma -Carthage, p. I6.Il s'agit d'une étu<strong>de</strong> intéressante sur l'une <strong>de</strong>s <strong>confrérie</strong>s les plusimportantes en Tunisie (<strong>la</strong> Sulâmiyya). L'auteur consacre une bonne partie àl'histoire du soufisme (taçawuf), avant <strong>de</strong> présenter et an<strong>al</strong>yser le <strong>répertoire</strong><strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong> Sulâmiyya. L'auteur confirme que "<strong>la</strong> tradition <strong>music<strong>al</strong></strong>e <strong>de</strong> <strong>la</strong><strong>confrérie</strong> Sulâmiyya apparaît ainsi comme l'expression authentique qui traduitles fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> <strong>la</strong> pensée mystique <strong>de</strong>s fidèles. Cette expression encorevivante <strong>de</strong> nos jours est une parfaite synthèse <strong>de</strong>s éléments structurels <strong>de</strong> <strong>la</strong>musique profane tunisienne".ZOUARI (Lassaâd), "<strong>Le</strong>s formes rythmiques (awzân) dans <strong>la</strong> musiquearabe traditionnelle", thèse <strong>de</strong> Doctorat nouveau régime en histoire <strong>de</strong> <strong>la</strong>musique et musicologie, Université <strong>de</strong> Paris-Sorbonne Paris IV, Paris,Octobre 1996, 643p.Une étu<strong>de</strong> interréssante sur les formules rythmiques (awzân) <strong>de</strong> <strong>la</strong>musique arabe traditionnelle.Id., "at-tubû` at-tûnisiyya mina-r-riwâya ash-shafawiyya ilâ an-nadhariyyaat-tatbîqiyya" (les mo<strong>de</strong>s tunisiens <strong>de</strong> <strong>la</strong> tradition or<strong>al</strong>e à <strong>la</strong> théorie pratique),Sfax, premier trimestre 2006, Institut Supérieur <strong>de</strong> Musique <strong>de</strong> Sfax,Imprimerie <strong>la</strong> Reliure Artistique.


Table <strong>de</strong>s matières


422PREMIERE PARTIETRADITION MYSTIQUE ET NAISSANCEDE LA CONFRERIE <strong>al</strong>-KARRÂRIYYA À SFAX.Chapitre I : <strong>Le</strong> soufisme dans l'Is<strong>la</strong>m ……………………………… 141. Qu'est ce que le soufisme ? ……………..………………………………… 151.1 Aperçu historique du mouvement mystique ……...…………......... 151.2 <strong>Le</strong>s origines du soufisme en Tunisie ……………..…...………….. 192. La dimension mystique …………..……………………………………….. 262.1 <strong>Le</strong> samâ` …………………………………………………..……… 262.2 <strong>Le</strong> dhikr ………………………………..………………………..... 272.3 <strong>Le</strong> hizb ………………………………...………..………………… 272.4 La hadhra ………..………………………………………………... 293. La zâwiya ……..……………………………………………………………. 303.1 Son rôle soci<strong>al</strong> ……………………...…………......……………… 323.2 Son rôle politique ……..…………………………………………... 343.3 Son rôle dans le sauvegar<strong>de</strong> du patrimoine <strong>music<strong>al</strong></strong> …………….... 353.3.1 <strong>Le</strong> shaykh Ahmad <strong>al</strong>-WÂFÎ ……...………...…………………….. 373.3.2 <strong>Le</strong> shaykh Khmayess TARNÂN ……………...………………..… 403.3.3 <strong>Le</strong> shaykh Muhammad BÛDAYYA ………...……………………. 42Chapitre II : La <strong>confrérie</strong> <strong>al</strong>-Karrâriyya …………….......……. 451. Biographie d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY …………………..........………. 461.1 <strong>Le</strong> shaykh KARRÂY: Artiste et poète ……………………………...492. L'époque d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY …………………………….......... 542.1 <strong>la</strong> vie politique …………………………………...……………….. 552.2 <strong>la</strong> vie soci<strong>al</strong>e et économique ……………...………………………. 582.3 <strong>la</strong> vie culturelle …………………………………......…………….. 59


4233. les lieux <strong>de</strong> culte (zawâyâ) dépendant<strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong> <strong>al</strong>-Karrâriyya …………………………………...………... 603.1 La zâwiya <strong>de</strong> sîdî `Ali <strong>al</strong>-Karrây ……………...…….…………… 603.2 <strong>Le</strong> monument abritant <strong>la</strong> zâwiya d'Abû-l-Hassan <strong>al</strong>-KARRÂY ……614. Une hiérarchie au sein <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong> …………………………….…... 685. <strong>Le</strong>s majâlis <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong> …………..………………………………….. 71Chapitre III : La musique dans l’Is<strong>la</strong>m ………………....…………. 761. <strong>Le</strong> statut <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique dans l'Is<strong>la</strong>m ……………………………...……... 771.1 L’opinion <strong>de</strong>s théologiens …………...…………………………… 771.2 La position d'<strong>al</strong>-GHAZÂLÎ …………..……..……………………. 782. les formes <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique <strong>religieuse</strong> ………………..…………………….. 812.1 Ps<strong>al</strong>modie du Coran ……………….……………………………... 812.1.1 <strong>Le</strong> tartîl …………………………………………………………… 812.1.2 <strong>Le</strong> tajwîd ………………………………………………………….. 822.2 L'appel à <strong>la</strong> prière ………….……………………………………... 852.3 Panégyriques et invocations <strong>de</strong> Dieu (<strong>al</strong>-madâ'ih wa-l-adhkâr) …. 883. L’introduction <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique dans les zawâyâ <strong>de</strong> Sfax ………………..... 903.1 La légen<strong>de</strong> ……………………………………...…………………. 903.2 La propagation <strong>de</strong> <strong>la</strong> musiquedans les autres <strong>confrérie</strong>s <strong>de</strong> <strong>la</strong> région ……………………………... 913.2.1 La `Awâmriyya ……………………………………………...……... 923.2.2 La `Îssâwiyya ……………………………………………………….. 973.2.3 La Qâdriyya ………………………………………………………. 1024. La p<strong>la</strong>ce <strong>de</strong> <strong>la</strong> musique mystique dans <strong>la</strong> vie <strong>de</strong>s sfaxiens ………..… 1055. Ses effets sur l’individu …………………………………..…………… 108


424DEUXIEME PARTIEANALYSE MUSICALE ET POETIQUESChapitre I : <strong>Le</strong> système <strong>music<strong>al</strong></strong> arabe ……….…......…………….. 1151. <strong>Le</strong>s caractéristiques du système mod<strong>al</strong> ………………………………….. 1162. <strong>Le</strong> système rythmique …………………..……...…………………..……... 127Chapitre II : La nûba du <strong>répertoire</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> musiquetraditionnelle tunisienne (mâlûf) ………..….…...... 1321. La nûba .......................................................................................................... 1332. La forme <strong>music<strong>al</strong></strong>e ………………....……………………………………… 1383. <strong>Le</strong>s mo<strong>de</strong>s (tubû`) ……………...………………………………………….. 1473.1 Dhîl …...…………………………………………………….………..1493.2 `irâq ……………………………………………………………….....1513.3 Sîka ……………………………………………………………..……1523.4 Hsîn ……………………………………………………………….....1533.5 Raçd ………………………………………………………………….1543.6 Raml-mâya ……………...………………………………………….. 1553.7 Nwâ …………………………………………………………………. 1563.8 Içba`ayn …………….………………………………………………. 1583.9 Racd adh-dhîl ….…………………………………………………… 1593.10 Raml …………..……………………………………………………. 1603.11 Içbahân ………………...…………………………………………… 1613.12 Mazmûm …………...……………………………………………….. 1623.13 Mâya ………………………..………………………………………. 1634. <strong>Le</strong>s formules rythmiques (awzân) ….……………………..……………… 164


425Chapitre III : les caractéristiques <strong>music<strong>al</strong></strong>es du <strong>répertoire</strong><strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>confrérie</strong> <strong>al</strong>-Karrâriyya ………….………….. 1671. <strong>Le</strong>s formes <strong>music<strong>al</strong></strong>es …………….…......………………………………… 1681.1 <strong>la</strong> nûba ………….……………………………………………….. 1681.1.1 <strong>Le</strong> mçaddar ………………………………………….….……….. 1681.1.2 <strong>Le</strong>s btâyhiyya ………………………………………….………… 1701.1.3 <strong>Le</strong>s barâwil ……………………………………………………… 1711.1.4 <strong>Le</strong>s adrâj ………………………………………………………… 1721.1.5 <strong>Le</strong>s khfâyef ……………………………………………….……… 1721.2 le shghul ……………………………….………………………… 1742. <strong>Le</strong>s mo<strong>de</strong>s (tubû` ) ………………….…………………………………....... 1772.1 <strong>Le</strong> tba` dhîl ……………………………………….……………… 1792.1.1 Première suite du tba` dhîl ……………………..………...……… 1802.1.11 Étu<strong>de</strong> an<strong>al</strong>ytique ……………………...…………………………. 1842.1.2 <strong>de</strong>uxième suite du tba` dhîl ……………………………………… 1872.1.21 Étu<strong>de</strong> an<strong>al</strong>ytique ……………………...……………………...….. 1992.1.3 troisième suite du tba` dhîl ……………………..……….………. 2032.1.31 Étu<strong>de</strong> an<strong>al</strong>ytique ……………………...………………...……….. 2112.2 <strong>Le</strong> tba` `irâq …………………………..…………………….…… 2162.2.1 Étu<strong>de</strong> an<strong>al</strong>ytique ………………………………..............……….. 2262.3 <strong>Le</strong> tba` çîka ……………………………………..……………….. 2302.3.1 Première suite du tba` çîka …………………………………...…. 2312.3.11 Étu<strong>de</strong> an<strong>al</strong>ytique ……………………...…………………..…….. 2382.3.2 Deuxième suite du tba` çîka …………………...……….….…… 2422.3.21 Étu<strong>de</strong> an<strong>al</strong>ytique ……………………........................….……….. 2482.3.3 Troisième suite du tba` çîka ……………………...…..………… 2532.3.31 Étu<strong>de</strong> an<strong>al</strong>ytique ……………………...……………..………….. 2592.4 <strong>Le</strong> tba` hsîn……………………………………………………… 2642.4.1 La suite du tba` hsîn ………………………….…….…………… 266


4262.4.11 Étu<strong>de</strong> an<strong>al</strong>ytique ……………………...……………...………….. 2752.4.2 La suite du tba` hsîn çabâ ………………………….…………… 2802.4.21 Étu<strong>de</strong> an<strong>al</strong>ytique ……………………...……………………..…... 2882.5 <strong>Le</strong> tba` içba`ayn............................................................................. 2922.6 <strong>Le</strong> tba` raçd …………………………………………………….. 2932.7 <strong>Le</strong> tba` raçd adh-dhîl ……………………………………………. 2942.8 <strong>Le</strong> tba` raml ……………………………………..………………. 2952.9 <strong>Le</strong> tba` nawâ …………………………………………………….. 2962.9.1 Étu<strong>de</strong> an<strong>al</strong>ytique ……………………...…………………...…….. 3032.10 <strong>Le</strong> tba` raml <strong>al</strong>-mâya ……………………………………………. 3062.101 Étu<strong>de</strong> an<strong>al</strong>ytique ……………………...………………...……….. 3132.11 <strong>Le</strong> tba` içbahân …………………………………………………. 3152.12 <strong>Le</strong> tba` mazmûm ……………………...…………………………. 3162.13 <strong>Le</strong> tba` mâya ………………………………………………..…… 3173. <strong>Le</strong>s textes poétiques ……………………………………………………….. 3233.1 <strong>Le</strong>s formes ………………………………………………...…….. 3273.1.1. <strong>Le</strong> muwashshah ………………...……….………………………. 3283.1.2. <strong>Le</strong> zaj<strong>al</strong> ………………………………………………………..… 3313.2. <strong>Le</strong>s thèmes ……………………………………………………..... 332Chapitre IV : <strong>Le</strong>s instruments <strong>de</strong> musique ……………………… 3401. L'orchestre <strong>de</strong> <strong>la</strong> hadhra ……………………………………………..… 3431.1 La zukra ……………………………………………….………… 3441.2 <strong>Le</strong> bandîr ……………………………………….……………….. 3471.3 <strong>la</strong> darbûka ………………………………………….……………. 3502. L'orchestre <strong>de</strong> l'harmonium ……………………………….……..…… 3632.1. L’harmonium ……………………………………………..…….. 3642.2. <strong>Le</strong> târ …………………………………………………...……….. 3652.3. La darbûka ………………..………………………………………3662.4 <strong>Le</strong> violon …………………………………………….……………3672.5 <strong>Le</strong> `ûd ……………………………………………………………..368


427CONCLUSION ……………………………….…………………..………… 377BIBLIOGRAPHIE ……………………………………………….…………. 380DISCOGRAPHIE ………………………...……………………...…………. 355GLOSSAIRE DES MOTS ARABES …………………………………….. 418TABLE DES MATIERES ………………..…………………...…………… 426

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