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Le débat<br />
L’écriture inclusive<br />
L’écriture inclusive, c’est quoi ?<br />
En 2015, en France, le Haut conseil à l’égalité entre les<br />
femmes (HCE) et les hommes avait publié un guide<br />
incitant les pouvoirs publics à adopter « une communication<br />
sans stéréotypes de sexe ». Pour aller plus<br />
loin, un Manuel d’écriture inclusive a été récemment<br />
édité par l’agence de communication Mots-Clés. On<br />
y trouve une définition simple. L’écriture inclusive est<br />
décrite comme un «ensemble d’attentions graphiques<br />
et syntaxiques permettant d’assurer une égalité des<br />
représentations entre les hommes et les femmes». En<br />
résumé, l’écriture inclusive souhaite mettre fin à l’invisibilité<br />
des femmes dans la langue française.<br />
S’appuyant sur les recommandations du Haut Conseil<br />
à l’égalité entre les femmes et les hommes (France) le<br />
Manuel d’écriture inclusive la résume en trois grands<br />
principes:<br />
• Accorder les fonctions, les métiers mais aussi les<br />
titres et grades en fonction du genre. On écrira ainsi<br />
une «pompière», «maire», «auteure», «présidente», «sénatrice»,<br />
«directrice», «professeure», «chroniqueuse»,<br />
«entrepreneure», «footballeuse», «programmeuse»,<br />
« ingénieure», «consommatrice», «agricultrice»...<br />
• User à chaque fois du féminin et du masculin, «que ce<br />
soit par l’énumération par ordre alphabétique, l’usage<br />
d’un point milieu, ou les recours aux termes dont la<br />
forme ne varie pas au masculin ou au féminin. On écrira<br />
par exemple «les électeur·rice·s», «les citoyen·ne·s»<br />
• Ne plus employer les antonomases (quand un nom<br />
commun est utilisé comme un nom propre) des substantifs<br />
«femme» et «homme». Est clairement ciblée ici<br />
la graphie «Homme» dans des expressions désignant<br />
les hommes et les femmes. Ainsi, les tenants de l’écriture<br />
inclusive préfèrent l’expression «droits humains»<br />
ou « droits des personnes » à «droits de l’Homme».<br />
En Belgique, un décret impose aux autorités publiques<br />
francophones de « féminiser » leurs textes officiels<br />
depuis <strong>19</strong>93. Et au sein même de ses services, la Fédération<br />
Wallonie-Bruxelles encourage l’égalité écrite<br />
entre femmes et hommes à travers un guide d’écriture<br />
inclusive, réédité pour la troisième fois en 2014, nous<br />
rappelle Clara Van Reeth dans Le Soir.<br />
Que disent les détracteurs de l’écriture inclusive ?<br />
On a toujours fait comme cela<br />
« On a toujours fait comme ça », ne touchez pas à ma<br />
langue française, celle qui porte notre patrimoine tout<br />
entier, reprend un article de « Pile de livres » .<br />
L’Académie française y voit une aberration et un péril<br />
mortel et pose la question « Comment les générations<br />
à venir pourront-elles grandir en intimité avec notre<br />
patrimoine écrit ? » .<br />
Cela complique les choses<br />
Illustration d'un manuel de grammaire<br />
«Je me considère comme un homme féministe» mais<br />
«je suis très réservé» car «cette écriture inclusive, elle<br />
morcèle les mots», disait récemment le ministre de<br />
l’Education en France, Jean-Michel Blanquer, sur LCI,<br />
repris par Europe 1.<br />
Plus virulent, le philosophe Raphaël Enthoven, chroniqueur<br />
sur Europe 1, s’élève contre une «agression<br />
de la syntaxe par l’égalitarisme» qui donne «des mots<br />
illisibles».<br />
Pour l’Académie française, «la démultiplication des<br />
marques orthographiques et syntaxiques qu’elle induit<br />
aboutit à une langue désunie, disparate dans son<br />
expression, créant une confusion qui confine à l’illisibilité».<br />
En Belgique, Marie–Martine Schyns, Ministre de l’Education<br />
trouve que le respect du genre est un beau<br />
combat mais qu’il ne faudrait pas que cela rende la<br />
langue française plus compliquée alors que l’objectif<br />
en Fédération Wallonie Bruxelles est d’asseoir un<br />
apprentissage de la langue française chez tous les<br />
élèves.<br />
Le langage ne doit pas être un lieu de luttes<br />
Dans un entretien avec le Figaro, Alain Bentolla trouve<br />
que travailler sur langage n’est pas le bon moyen<br />
pour contrer les inégalités de genre.<br />
« J’ai bien conscience du caractère inadmissible de<br />
la discrimination sexuelle. Il est absolument insupportable<br />
qu’elle sévisse encore aujourd’hui dans la vie<br />
politique, professionnelle ou familiale. Mais choisir le<br />
terrain linguistique pour mener cette bataille nécessaire<br />
en confondant règle arbitraire et symbole social<br />
c’est confondre les luttes sociales et le badinage de<br />
salon » dit-il.<br />
Le débat