« Il faut rendre à l’agriculture sa place et son rang »
Pages mensuelles de l'UAW - novembre 2018
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Mouvement<br />
JOURNÉE PROVINCIALE DE NAMUR<br />
Diversification de nos cultures :<br />
marché de niche ou futur de notre agriculture ?<br />
par Myriam Lambillon, coordinatrice UAW<br />
8 novembre 2018<br />
C’est ce 22 octobre dernier que la journée d’étude provinciale du<br />
Namurois s’est tenue. Le choix du suj<strong>et</strong> a été c<strong>et</strong>te année assez<br />
vite trouvé. Car lorsque les agricultrices du Namurois ont choisi<br />
le suj<strong>et</strong>, c’était en mai <strong>et</strong> les grosses chaleurs commençaient.<br />
Elles se <strong>son</strong>t demandé comment l’agriculteur allait devoir<br />
travailler dans les années <strong>à</strong> venir si c<strong>et</strong>te sécheresse qui s’est<br />
avérée par la suite catastrophique, devait perdurer.<br />
Elles se <strong>son</strong>t dit que certaines cultures allaient sûrement changer<br />
<strong>et</strong> que l’idée d’avoir des témoignages sur la façon de changer<br />
d’orientation <strong>et</strong> le choix de ces cultures pouvait les éclairer<br />
quant au futur de notre agriculture <strong>et</strong> des choix que le monde<br />
agricole devra <strong>sa</strong>ns doute faire au sein des fermes.<br />
En creu<strong>sa</strong>nt c<strong>et</strong>te pensée, il s’est avéré qu’avant de faire le choix<br />
d’un nouveau type de culture, il fallait <strong>sa</strong>voir si c<strong>et</strong>te production<br />
pouvait trouver une <strong>place</strong> sur le marché <strong>et</strong> comment la vendre,<br />
ou si ce ne serait qu’un produit de niche<br />
Diversifier ? Pourquoi ?<br />
C’est Alain Masure, directeur du Service<br />
d’études de la FWA qui a introduit la séance<br />
en po<strong>sa</strong>nt une réflexion : <strong>«</strong> Pourquoi <strong>faut</strong>-il<br />
diversifier nos cultures ? <strong>»</strong><br />
<strong>Il</strong> y a tout d’abord les Politiques européenne<br />
de marchés. En eff<strong>et</strong>, les produits traditionnels<br />
<strong>son</strong>t produits sur toute la planète, ce qui<br />
engendre automatiquement de mauvais prix<br />
pour les productions habituelles (céréales,<br />
sucre,..) <strong>et</strong> les protections de nos marchés ne<br />
<strong>son</strong>t plus d’actualité dans la nouvelle PAC, ce<br />
qui n’apporte pas de meilleures perspectives<br />
dans la PAC du futur.<br />
La <strong>sa</strong>turation des marchés alimentaires<br />
traditionnels : nous pouvons remarquer que<br />
l’offre de produits diversifiés ne cesse d’augmenter<br />
<strong>et</strong> même de changer. <strong>Il</strong> y a des rapports<br />
producteurs/ach<strong>et</strong>eur de plus en plus tendus.<br />
De nouvelles habitudes de consommation ont<br />
vu le jour : moins de pain, moins de sucre,…<br />
Et depuis quelques années , le consommateur<br />
veut plus de proximité avec les produits <strong>et</strong> une<br />
meilleure connais<strong>sa</strong>nce des méthodes de production.<br />
Les contraintes environnementales apparaissent<br />
depuis quelques années déj<strong>à</strong>, mais<br />
la pression du citoyen est de plus en plus<br />
forte. <strong>Il</strong> y a aussi tous les facteurs tels que les<br />
engrais, les phytos, l’érosion, le verdissement<br />
de la PAC, les MAEC, les Cipan,… dont il <strong>faut</strong><br />
tenir compte. <strong>Il</strong> y a une certaines pressions du<br />
politique <strong>sa</strong>ns doute découlant de la pression<br />
citoyen-consommateur ?<br />
Et l’évolution des règlementations va plus<br />
vite que les résultats des recherches agronomiques,<br />
ce qui amène des incohérences entre<br />
les différentes règlementations.<br />
<strong>Il</strong> existe également un besoin crois<strong>sa</strong>nt en<br />
énergie verte, avec une orientation tournée de<br />
plus en plus vers la biométhani<strong>sa</strong>tion plutôt<br />
que les biocarburants.<br />
<strong>Il</strong> y a également une demande en produits<br />
‘biobasés’, <strong>et</strong> dans ce cas, tous les secteurs<br />
industriels <strong>son</strong>t concernés : la construction, le<br />
secteur automobile, la diététique, la pharmacie<br />
humaine <strong>et</strong> animale, les cosmétique,… On<br />
peut se poser la question si la chimie verte a<br />
de l’avenir ? Et la recherche n’est pas en reste<br />
en ce qui concerne ces nouvelles technologies.<br />
Et il y a aussi les contraintes climatiques<br />
qui <strong>son</strong>t des freins mais qui pourraient être<br />
pris comme espoir. Les cultures traditionnelles<br />
deviennent difficiles vu les contraintes environnementales,<br />
de nouvelles cultures peuvent<br />
être envi<strong>sa</strong>gées <strong>à</strong> plus grande échelle mais<br />
pour cela il faudra développer de nouvelles<br />
filières<br />
Et tout cela en gardant bien en tête que concurrence<br />
<strong>et</strong> souhaits du consommateur resteront les maîtresmots<br />
!!!<br />
Pour approfondir la réflexion, l’UAW du Namurois a<br />
invité 3 orateurs pour trois types de cultures différentes<br />
<strong>et</strong> prom<strong>et</strong>teuses<br />
Notre premier invité : Mr Eddy Montignies <strong>et</strong> fondateur<br />
de Graines de curieux.<br />
Graine de curieux<br />
Graines de Curieux est une marque <strong>et</strong> un label sous<br />
lesquels Land, Farm & Men valorise diverses productions<br />
locales. Des productions innovantes <strong>et</strong> exclusivement<br />
destinées <strong>à</strong> l’alimentation humaine.<br />
C<strong>et</strong>te filière travaille sur trois concepts : la gestion de<br />
la terre, la filière de valori<strong>sa</strong>tion <strong>et</strong> l’accompagnement<br />
& consultance<br />
Les objectifs de Graines de Curieux <strong>son</strong>t :<br />
m<strong>et</strong>tre en valeur de l’ensemble de nos terres, bonnes<br />
ou moins bonnes<br />
faire évoluer l’alimentation humaine<br />
obtenir une meilleure valori<strong>sa</strong>tion des récoltes<br />
mieux asseoir les fondements agronomiques de<br />
<strong>l’agriculture</strong> bio <strong>et</strong> garantir les débouchés<br />
Le principe de base du rai<strong>son</strong>nement est de se dire<br />
que le pays a une richesse de sol <strong>et</strong> de sous-sol. Et qu’il<br />
<strong>faut</strong> des conseils de cultures adaptés, en optimi<strong>sa</strong>nt la<br />
fonction de chaque sol. <strong>Il</strong> se peut que dans un même<br />
champ, il y ait différentes zones qu’il <strong>faut</strong> travailler ou<br />
traiter autrement afin d’obtenir une culture optimum.<br />
Pour ce faire, Graine de Curieux travaille <strong>et</strong> conseille<br />
des agriculteurs qui travaillent en bio, <strong>et</strong> cherche <strong>à</strong> garder<br />
la main sur <strong>sa</strong> production : on va jusqu’<strong>à</strong> l’assi<strong>et</strong>te<br />
du consommateur.<br />
Le maitre mot : adapter <strong>à</strong> la culture au sol <strong>et</strong> au climat.<br />
Et avant de semer, il <strong>faut</strong> se poser 3 questions : comment<br />
transformer ce que je vais semer ? Comment<br />
vendre mon produit ? Et y a-t-il un marché pour ce type<br />
de produit.<br />
Graine de Curieux travaille des cultures qui prennent<br />
une grande ampleur <strong>et</strong> qui <strong>son</strong>t demandées par le<br />
consommateur. <strong>Il</strong>s innovent avec de nouvelles cultures<br />
encore jamais semées chez nous telles que Quinoa, mill<strong>et</strong>,<br />
caméline, lentille, p<strong>et</strong>it épeautre, <strong>sa</strong>rrasin, avoine…<br />
Graine de curieux avait des contrats en 2014 sur 20<br />
hect de terres, en 2017, ils <strong>son</strong>t passés <strong>à</strong> 315 hectares<br />
avec 800 tonnes de graines. En Belgique en 2016, la<br />
lentille n’était pas cultivée, en 2018 il y a 100 hectares<br />
cultivés <strong>et</strong> les besoins <strong>son</strong>t loin d’être recouverts (pour<br />
info, en France il y a 15000 hectares cultivés <strong>et</strong> le marché<br />
français importe encore des lentilles).<br />
Le Miscanthus<br />
C’est au tour de Mr Lucas Gossiaux de Valbiom de<br />
nous expliquer la nouvelle filière du Miscanthus , impressionnante<br />
de par <strong>sa</strong> taille <strong>et</strong> ses débouchés.<br />
Valbiom est un réseau de 140 membres implantés en<br />
Wallonie avec des agriculteurs, des entreprises, des universités,<br />
des centres de recherche <strong>et</strong> des administrations<br />
publiques,…<br />
Le miscanthus est c<strong>et</strong>te graminée vivace originaire<br />
d’Asie mais contrairement <strong>à</strong> certaines graminées elle est<br />
non invasive.<br />
C<strong>et</strong>te culture a de nombreux avantages :<br />
Elle est implantée pour 20 ans.<br />
Elle ne nécessite aucun désherbage après la deuxième<br />
année car les feuilles tombant, un tapis est formé<br />
<strong>et</strong> protège <strong>à</strong> la fois le sol <strong>et</strong> les cultures<br />
elle perm<strong>et</strong> de stocker le carbone<br />
On ne lui connait aucun ravageur, ni maladie<br />
Son cycle de vie étant assez long, elle ne nécessite<br />
pas beaucoup d’intervention. On récolte la tige après la<br />
3ème ou 4ème année grâce <strong>à</strong> une ensileuse dès la chute<br />
de ses feuilles. Comme cela s’effectue en avril, l’ensileuse<br />
est plus disponible ce qui ne concurrence pas les<br />
autres cultures.<br />
On peut ainsi les récolter en vrac <strong>et</strong> les ensiler, ou les<br />
broyer <strong>et</strong> les presser en gros ballots<br />
Et pour s’en défaire après 20 ans,<br />
Simplement respecter ce que l’on appelle un itinéraire<br />
technique : on fauche au mois de juin <strong>et</strong> on passe avec<br />
un disc coller. Puis en été, on passe avec des outils <strong>à</strong><br />
dents de façon <strong>à</strong> faire remonter les rhizomes <strong>et</strong> les laisser<br />
dessécher au soleil.<br />
le miscanthus peut perm<strong>et</strong>tre de valoriser des zones<br />
<strong>à</strong> contraintes, soit parce que les parcelles <strong>son</strong>t très variables<br />
au niveau de la production, soit parce qu’elles<br />
<strong>son</strong>t éloignée de la ferme, soit proches des zones de<br />
captage, ou en bordure de cours d’eau, soit pour des<br />
parcelles suj<strong>et</strong>te <strong>à</strong> l’érosion.<br />
Les filières de valori<strong>sa</strong>tion<br />
<strong>Il</strong> existe déj<strong>à</strong> une série de débouchés telle que les<br />
combustibles, la litière animale, le paillage horticole <strong>et</strong><br />
les matériaux d’écoconstruction, D’autres <strong>son</strong>t en devenir<br />
comme les biocomposites <strong>et</strong> le bioraffinage de 2ème<br />
génération<br />
Parlons chiffres ?<br />
Le coût de départ pour la plantation peut sembler<br />
exorbitant (3000 - 3500€ /ha). C<strong>et</strong>te culture va rapporter<br />
dès la deuxième année en fonction de la filière vers<br />
laquelle vous allez vous diriger :<br />
Pour la chaudière biomasse, cela revient <strong>à</strong> 7c€/litre<br />
équivalent mazout (de <strong>sa</strong>crés économies).<br />
Pour les ventes de combustible, on peut compter une<br />
marge brute /hectare de 1000 <strong>à</strong> 1350€/ha.<br />
Pour la filière litière animale, les prix varient en fonction<br />
du conditionnement : en vrac pour les volailles, les<br />
ovins, les chevaux le prix de vente constatés est de 80<br />
<strong>à</strong> 200€ HTVA/tonne, la litière en <strong>sa</strong>cs pour les chevaux,<br />
est de 500 <strong>à</strong> 800€ TTC/tonne <strong>et</strong> la litière en comprimés<br />
pour les rongeurs (p<strong>et</strong>its conditionnement) revient <strong>à</strong><br />
1380€/tonne. En horticulture, la vente en vrac pour les<br />
communes sera de 100 <strong>à</strong> 200€/tonne <strong>et</strong> pour le paillage<br />
en<strong>sa</strong>ché (marque Belcanthus), il sera de 700 <strong>à</strong> 900€/<br />
tonne.<br />
Et le raisin ?<br />
Jean François Baele, fils d’agriculteur a lors de ces<br />
études effectué un stage chez un voisin qui venait d’implanter<br />
des vignes.<br />
En 2005, les premiers cépages ont vu le jour dans les<br />
prairies adjacentes <strong>à</strong> la ferme. <strong>et</strong> le Ry d’Argent a ainsi vu<br />
le jour. D’abord 1 hectare puis en 2007 5 hectares.<br />
P<strong>et</strong>it <strong>à</strong> p<strong>et</strong>it, la vigne a fait <strong>son</strong> chemin <strong>et</strong> Jean-<br />
François ne souhaitant pas dépendre d’autres au niveau<br />
financier, a voulu garder la main mise sur <strong>sa</strong> production.<br />
Mais voil<strong>à</strong>, ce métier ne s’apprenant pas <strong>à</strong> l’école, il<br />
<strong>faut</strong> se créer un réseau <strong>et</strong> pouvoir <strong>à</strong> la fois, planter, soigner,<br />
récolter, presser <strong>et</strong> enfin vendre <strong>son</strong> produit.<br />
Jean-François a pu , peitt <strong>à</strong> p<strong>et</strong>it, avec les conseils<br />
d’autres confrères, faire <strong>sa</strong> <strong>place</strong> au sein de c<strong>et</strong>te spéculation.<br />
Le Ry d’argent est réparti sur 4 parcelles (+/-13 hectares),<br />
4endroits étalés <strong>et</strong> éloignés les uns des autres.<br />
<strong>Il</strong> a créé récemment une entreprise vitivinicole qui<br />
suit le raisin de la plantation <strong>à</strong> la bouteille pour les agriculteurs<br />
mais aussi pour les privés. Chaque parcelle a<br />
un suivi spécifique, pour cela il <strong>faut</strong> bien connaitre ses<br />
parcelles, ses champs. Jean François accompagne ainsi<br />
les agriculteurs qui veulent se lancer. Pour un vignoble, il<br />
<strong>faut</strong> compter 31000€/hectare d’investissement, le coût<br />
est assez élevé pendant 3 ans , il <strong>faut</strong> 7000€ les deux<br />
premières années puis 13000€ d’entr<strong>et</strong>ien annuel, on<br />
récolte le raisin la 4ème année <strong>et</strong> on peut obtenir du vin<br />
la 5ème année.<br />
C<strong>et</strong> investissement est <strong>à</strong> long terme puisque l’on peut<br />
garder une vigne pendant 80 ans.<br />
Malheureusement, les banques <strong>son</strong>t frileuses <strong>à</strong> suivre<br />
car c<strong>et</strong>te culture est peu connue en Wallonie.<br />
Depuis 13 ans, Jean François Baele accompagne près<br />
de 20 hectares chez des agriculteurs<br />
Quelques chiffres ?<br />
Avec un hectare, on produit 2000 bouteilles.<br />
Mais en fonction des conditions climatiques, cela<br />
peut varier, par exemple en 2018, on <strong>sa</strong>it que 1 hectare<br />
va donner 16 000 bouteilles<br />
C’est assez facile <strong>à</strong> compter puisque un kilo de raisin<br />
donne une bouteille.<br />
A la question, la Belgique est-elle une terre de vin ? La<br />
réponse est oui, les blancs <strong>et</strong> les bulles donnent bien…<br />
Pour les rouges, la météo fait que les raisins s’améliorent<br />
<strong>et</strong> la production également.<br />
Comment devenir viticulteurs ?<br />
<strong>Il</strong> existe des formations qui perm<strong>et</strong>tent d’avoir un<br />
accès <strong>à</strong> la profession, dans des centres de formations<br />
mais elles <strong>son</strong>t déj<strong>à</strong> complètes.<br />
L’idéal est également de travailler dans des vignobles<br />
avant de se lancer.<br />
Pour toutes infos complémentaires, n’hésitez pas <strong>à</strong><br />
les contacter<br />
direction@domainedurydargent.com<br />
GRAINES<br />
DE CURIEUX<br />
Eddy MONTIGNIES<br />
Gérant associé<br />
<strong>et</strong> co-fondateur<br />
23 Montegn<strong>et</strong><br />
5370 Havelange<br />
0476 90 39 28<br />
eddy.montignies@landfarmandmen.be<br />
bureau :<br />
10 rue du Tronquoy, 5380 Zoning de Fernelmont<br />
l.gossiaux@valbiom.be<br />
VALBIOM<br />
Lucas Gossiaux<br />
Chef de proj<strong>et</strong>s<br />
Cultures Dédiées<br />
081 62 71 93<br />
0460 97 87 29<br />
RY D’ARGENT<br />
Baele Jean-<br />
François<br />
Rue de la distillerie, 51<br />
5081 Bovesse<br />
Tel/Fax : 081/56.65.45