CANARD GASCON 94 Mars-Avril 2022

Figure
Charles Derennes, le plumitif gascon
Romancier, journaliste et poète, Charles Derennes (1882-1930) n’a cessé de chanter
les beautés de sa Gascogne natale.
Charles Derennes, figure attachante et injustement oubliée de la littérature du Sud-Ouest.
S’il a vécu la plus grande partie de sa
vie à Paris, Charles Derennes est
resté fidèle à sa Gascogne. Fils d’un
professeur agrégé d’histoire et écrivain
breton (Gustave Derennes), il est né à
Villeneuve-sur-Lot. Après des études
secondaires dans la banlieue de
Bordeaux, il prépare le concours d’entrée
à l’École normale supérieure au Lycée
Henri IV puis au Lycée Louis-le-Grand
d’où il est renvoyé. Il obtient tout de
même une licence de lettres et commence
à fréquenter les salons littéraires
parisiens, dont celui d’Anna de Noailles.
Conteur, essayiste et critique, il collabore
à de très nombreux journaux parisiens ou
provinciaux (Le Mercure de France, La
Plume, Le Divan, L’Auto, La Baïonnette,
Le Matin, La Petite Gironde, La Vie
française, La Vie parisienne, etc.)
Des romans galants
Parallèlement à ce travail de journaliste, il
mène une carrière de romancier et publie,
au cours de sa carrière, une cinquantaine
de livres. Les premiers sont des romans
légers, voire « galants » qui, pour la
plupart, paraissent en feuilletons dans La
Vie parisienne : Les caprices de Nouche,
Nique et ses cousines, le Miroir des
pécheresses… Avec son Bestiaire
sentimental, œuvre composée de trois
volumes (Vie de Grillon, La Chauve-
Souris, Émile et les autres), il connaît un
grand succès. Il décroche le prix Fémina
en 1924 pour le troisième titre de cette
série.
Le pèlerin de Gascogne
Son amour de la Gascogne l’amène à
publier en 1918 Le Pèlerin de Gascogne,
un ensemble de textes courts qui mêle ses
impressions à des récits du cru. On le suit
sur les routes des Landes à bord de sa
Renault HP 40 verte qui sillonne le pays à
la vitesse de 35 km/h. Chaque étape, et
elles sont nombreuses, est l’occasion de
partager ses émotions et ses souvenirs
d’enfance.
Les autres récits se présentent sous forme
de petites nouvelles particulièrement
savoureuses et nous content avec humour
et humanité, la vie des gens simples de
Gascogne. Il y intègre des mots du patois
gascon sans que cela ne nuise à la
compréhension du texte. Sa série sur les
« cocus et autres bons bougres » est un
régal littéraire. Le livre a charmé tant de
lecteurs que la Communauté de
Communes Maremne Adour Côte-Sud en
a assuré une réédition.
Un auteur à (re) découvrir !
Jean-Louis Le Breton
Et l'homme d’Hossegor
Avec les écrivains Rosny jeune et Paul
Margueritte (frère de victor), Derennes a
contribué à lancer la station balnéaire
d’Hossegor. Voici comment il en parlait
en 1921 : « Je suis habitué d’un coin de
la forêt landaise qui s’appelle Hossegor,
commune de Soorts. Quantité de
personnalités de la politique et du
journalisme, des lettres et des arts y
fréquentèrent ; quelques uns s’y sont fait
bâtir d’agréables villas ou de plaisantes
bicoques ; on est toujours sûr d’y
trouver des amis, quelle que soit la
saison où la fantaisie vous prend d’y
aller, et la plus franche cordialité règne
entre les hôtes de ce lieu, ce qui n’a rien
d’étonnant, car il est peu de paysages
aussi reposants, aussi harmonieux, aussi
charmants et grandioses tout ensemble.
Un lac maritime, un bassin d’Arcachon
en miniature y vit et palpite, se vide et
s’emplit, tantôt lagunaire, tantôt
gentiment houleux, entouré d’une
couronne de pins qui le fait ressembler à
un fjord norvégien, mais à un fjord qui
serait baigné d’une lumière ionienne.
Vers l’ouest, une presqu’île de huit cent
mètres de large sur une lieue environ de
long le sépare de l’océan gascon, de la
mer sauvage prompte aux grands
délires.»
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